Abstract :
This chapter is a contribution to a better understanding of
climate change over the past thirty years in the study sector. This study
required the collection of rainfall and thermal data for 30 years period
(1987-2016). After highlighting the evolutionary trend of the main climatic
parameters (rain and temperature), based on the calculation of indices and the
determination of break-up periods, the study analyzed endogenous perceptions of
climatic events. The results show an uneven distribution of precipitation and
temperatures marked by continuous changes in natural environmental conditions.
The study identifies three phases in the evolution of rainfall. The first
1987-1990 was marked by rainfall surpluses. The second is characterized by
rainfall deficits between the period 1990-2006 and the last one characterized
by very high instability in the evolution of rainfall, concerning the period
2006-2016. The application of the Pettitt test to this time series revealed
stationary failures in the different rainfall series at the 95% threshold,
highlighting two sub-periods and an upward trend in rainfall. At the same time,
minimum and maximum temperatures are increasing globally. These results show a
change in the evolution of climate parameters in the study area.
53
Keywords : Climate change, water resources,
Oueme valley, Benin.
54
Introduction
Le changement climatique caractérisé par la
recrudescence des phénomènes extrêmes comme les
sécheresses et les inondations, la hausse des températures, la
variabilité accrue de la pluviométrie et des
caractéristiques des saisons agricoles, (GIEC, 2007), constitue une
menace majeure pour les pays de l'Afrique en général et ceux de
l'ouest en particulier. Ces régions sont particulièrement plus
vulnérables à la variabilité et aux changements
climatiques notamment à cause de certaines de ses
caractéristiques physiques et socio-économiques qui les
prédisposent à être affectées, de façon
disproportionnée, par les effets négatifs des variations du
climat (UICN-BRAO et al., 2003).
Au Benin, des travaux de Boko (1988) ; Afouda (1990) ;
Houndenou (1999) ; Ogouwale (2006) ; Vissin (2007) ; Amoussou (2010) et Totin
(2010), il ressort que la péjoration pluviométrique, la
réduction de la durée de la saison agricole, la persistance des
anomalies négatives et la hausse des températures minimales
caractérisent désormais les climats du pays et modifient les
régimes pluviométriques. Cette modification des paramètres
climatiques perturbe négativement les activités
économiques et impacte la disponibilité de la ressource en eau.
Plusieurs auteurs ont d'ailleurs mis en évidence la variation des
ressources en eau de surface en réponse à la fluctuation du
climat (Sircoulon, 1987 ; Mahe et Olivry, 1995 ; Bricquet et al., 1997
; Ouedraogo, 2001 ; Ardoin-Bardin, 2004 ; Vissin, 2007) . Ces perturbations
climatiques associées aux mutations spatiales dues aux activités
humaines accentuent les pressions sur les ressources eau.
Face à ce diagnostic, quelles sont les fluctuations
climatiques dans le secteur d'étude entre 1987 et 2016 ? Pour
répondre à cette question, des données ont
été collectées et analysées à l'aide de
matériels et méthodes.
55
3.1. Matériels et méthodes
3.1.1. Collecte des données
Les données utilisées dans le cadre de cette
étude concernent les chroniques climatologiques et quelques
données socio-économiques ayant servi à analyser
respectivement la variation du climat et les perceptions et savoirs des
communautés sur l'évolution du climat.
i. données climatologiques
Les données climatologiques utilisées ont
été recueillies à l'Agence pour la Sécurité
de la Navigation Aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) de
Cotonou. Ces données (pluviométrie, température et
évapotranspiration) à l'échelle mensuelle et annuelle
proviennent des stations installées à l'intérieur ou
à proximité de la basse vallée de l'Ouémé
sur la période 1987-2016. Le réseau d'observation
météorologique utilisé est composé de cinq stations
qui sont présentées dans le tableau I.
Tableau I : Stations météorologiques du secteur
d'étude
Stations
|
Latitude
|
Longitude
|
Type de stations
|
|
(Nord)
|
(Est)
|
|
Adjohoun
|
6°25'00»
|
2°13'34»
|
Pluviométrique
|
Bonou
|
7°33'33»
|
2°50'00»
|
Pluviométrique
|
Porto-Novo
|
6°48'33»
|
3°02'06»
|
Pluviométrique
|
Cotonou
|
6°01'25»
|
2°06'53»
|
Synoptique
|
Bohicon
|
7°9'5''
|
2°7'49»
|
Synoptique
|
|
Source : Données de terrain / ASECNA
2017
ii. Données socio-économiques
Une enquête de terrain notamment dans le secteur
d'étude, a permis de collecter certaines données
socio-économiques, pour constituer une base pouvant servir à
connaître les perceptions endogènes des manifestations des
changements climatiques.
· Échantillonnage
Le secteur d'étude couvre les communes de Bonou,
Adjohoun, Dangbo, Aguégués et Sô-Ava. Selon le RGPHR4R, la
population de cette zone est estimée à 401 308 habitants
constitués en 71 462 ménages. La sélection des cibles
interrogées a été fondée sur un choix
raisonné : les usagers ont été priorisés en raison
de leur connaissance du milieu, de ce qu'ils pratiquent au moins une
activité et sont capables de fournir des informations sur le climat.
Par ailleurs, l'ensemble des communes que compte le milieu
d'étude a été parcouru et la taille de
l'échantillon est déterminée par la formule de Dagnelie
(1998) :
=
(1)
56
Avec :
- X la taille de l'échantillon
- Zá= 1,96 écart réduit correspond à
un risque á de 5 % ;
- Le paramètre de précision (i) est fixé
à 5 %
- La proportion estimée (p) des ménages ; soit p =
50 %
- 1-p = 50 %
- Ainsi, X = 384,16 arrondi à 384 ménages. Cet
effectif est réparti
proportionnellement de la taille des communes comme l'indique
le
tableau II.
57
Tableau II : Répartition des ménages
enquêtés avec la formule de Dagnelie
Commune
|
Effectif des ménages
|
Ménages enquêtés
|
Proportion en %
|
BONOU
|
7 721
|
41
|
10,8
|
ADJOHOUN
|
15 309
|
82
|
21,4
|
DANGBO
|
19 613
|
105
|
27,4
|
AGUEGUES
|
8 463
|
45
|
11,8
|
SO-AVA
|
20 356
|
109
|
28,5
|
Total
|
71 462
|
384
|
100
|
|
Source : Travaux de terrain / INSAE 2016
· Outils et techniques de collecte des
données
Les entretiens semi-directifs ont été
utilisés pour cette collecte des données. À cet effet, ils
ont permis à partir d'un questionnaire, la collecte de données
socio-économiques servant à apprécier les perceptions des
usagers de l'eau sur les changements climatiques
· Limite de l'enquête
Les questionnaires étaient en français, mais
ont été administrés la plupart du temps dans les langues
locales. Les enquêteurs avaient une bonne compréhension de la
version française des questionnaires et une bonne maîtrise des
langues locales parlées dans le secteur d'étude. Par ailleurs,
ils ont reçu une formation incluant des sessions sur l'administration
des outils de collecte dans les langues locales afin de réduire
d'éventuels biais inhérents à une mauvaise
interprétation des questions ou concepts. Mais il est possible que des
erreurs liées à la traduction en langue locale aient pu
être commises. 3.1.2. Analyse des données
L'étude du changement climatique s'est faite à
partir de la détermination des paramètres de tendance centrale,
de dispersion et de la mise en évidences des tendances.
· la moyenne arithmétique
La moyenne arithmétique est l'outil statistique le
plus fréquemment utilisé dans les études de climatologie
(Houndenou, 1999). Dans cette étude, elle a été
calculée sur une série de 30 ans, et elle demeure
représentative du climat sur une longue période (Choisnel, 1992).
Elle s'exprime de la façon suivante
:
(avec n le nombre d'observations)
|
(2)
|
|
La moyenne a permis d'identifier les différents rythmes
pluviométriques,
les champs moyens et de caractériser l'évolution
de la pluviométrie.
· Paramètres de dispersion
Les paramètres de dispersion sont calculés
à partir du paramètre fondamental de tendance centrale qu'est la
moyenne. Ces paramètres de dispersion sont l'écart-type et le
coefficient de variation.
· l'écart type
Il est utilisé pour évaluer la dispersion
absolue des valeurs autour de la valeur centrale. Il se détermine par le
calcul de la racine carrée de la variance :
??(??) = v?? Où v est la variance de la série.
· Coefficient de variation
Cv =
? X
? ? ? 100
? ? x?
C'est le moyen le plus utilisé pour tester et
quantifier la variabilité d'une réalité ou d'un
phénomène statistique. C'est le rapport de l'écart-type
à la moyenne, exprimé en pourcentage. Il s'écrit de la
manière suivante :
; = écart-type de la série et = moyenne.
(3)
58
Le coefficient de variation permet d'établir des
comparaisons des degrés de variabilité de la pluviosité
dans l'espace (Houndenou, 1992). Mais, il ne peut s'appliquer à toutes
les régions, surtout dans les milieux désertiques ou
59
subarides, car parfois il exagère et amplifie la
variabilité. Cette méthode a été utilisée
par Bokonon-Ganta (1987), sur la période 1955-1984 pour montrer la
variabilité pluviométrique dans la région du golfe de
Guinée.
Boko (1988) en a fait usage pour identifier la
variabilité des précipitations sur tout le Bénin de 1951
à 1980. Pour étudier les relations entre l'eau et les cultures
dans le Bénin septentrional et central, Afouda (1990) s'en est aussi
servi. Par contre, Houndenou, (1999) a utilisé cet indice comme
outil-test de la variabilité des précipitations afin de
décrire fidèlement la notion de variabilité proprement
dite dans des régions homogènes où les pluies sont
soutenues. C'est cette même raison qui justifie le choix de cet outil
dans cette étude.
· Indice standardisé des
précipitations
À partir de l'écart type, l'indice
standardisé des précipitations ou Standardized
Précipitations Index (SPI) représentant les anomalies
centrées réduites pluviométriques interannuelles a
été calculé Bergaoui et Alouini (2001).
(4)
Les anomalies se calculent par la formule suivante :
=
= indice standardisé des précipitations / anomalie
centrée réduite pour
l'année i
= moyenne de la série
= écart-type de la série
Le tableau III présente la classification selon la valeur
du SPI.
60
Tableau III : Classification des valeurs du SPI
Classes du SPI Proportion de sécheresse /
humidité
SPI > 2 Humidité extrême
1< SPI < 2 Humidité forte
0 < SPI < 1 Humidité
modérée
-1 < SPI < 0 Sécheresse
modérée
-2 < SPI < -1 Sécheresse
forte
SPI < -2 Sécheresse
extrême
Source : (Bergaoui et Alouini, 2001)
L'indice standardisé des précipitations a
été utilisé pour déterminer les indicateurs des
péjorations pluviométriques et spécifiquement, les
années marquées par un excédent ou un déficit
pluviométrique.
Toutefois, les paramètres de dispersion ne suffisent
pas à eux seuls pour mesurer la variabilité, car ils ne
décrivent pas l'évolution temporelle des séries
pluviométriques (Vissin, 2007). Ainsi, les valeurs de la
pluviométrie ont été testées par le test de rupture
de Pettitt.
· Test de mise en évidence des ruptures :
test de Pettitt
Le test non paramétrique de Pettitt est très
efficace pour la détection des « ruptures » dans les
séries chronologiques. Il a été expérimenté
par plusieurs chercheurs. Au Bénin, on peut citer Houndenou (1999),
Ardoin-Bardin (2004), Ogouwale (2006), Vissin (2007), Yabi (2007), Totin (2010)
et Ogouwale (2013).
Ce test, dérivé du test de Mann-Whitney
(Pettitt, 1979), permet de tester deux échantillons d'une même
série. À partir de deux échantillons x1, x2, ..., xt et
xt+1, xt+2, ...,xn d'une même série x1, x2, ..., xn, la
statistique U compte le
61
nombre de fois où un membre du premier groupe
excède un membre du second groupe. Elle s'écrit :
(5)
Avec sgn(x) = 1 si x > 0, 0 si x = 0 et -1 si x < 0.
Soit Kn la variable définie par le maximum en valeur
absolue de Ut, n pour t variant de n à n-1, si Kmax désigne la
valeur de Kn prise pour la série étudiée, sous
l'hypothèse nulle, la probabilité de dépassement de la
valeur Kmax est donnée approximativement par :
????????(???? > ????????) = 2exp (-6(????????)2
??3 + ??2 ) (6)
Pour un risque donné de première espèce,
si la probabilité Prob (KRNR> KRmaxR) est
influencée à ?, l'hypothèse
nulle est rejetée. Ce test est réputé pour sa robustesse
(Lubes et al., 1994) ; (Vissin, 2007).
· Comparaison de deux échantillons
temporels
Cette évaluation permet selon Vissin (2007) de mettre
en évidence la péjoration pluviométrique. Le choix des
périodes est issu des résultats de l'application des tests de
Pettitt sur la série pluviométrique.
L'écart « e »entre
la moyenne m1 de la période avant la rupture et la moyenne m2 de la
période après la rupture est déterminé par la
formule suivante :
(7)
Le déficit (en %) est calculé comme suit :
· Étude du bilan climatique
Le bilan climatique traduit le rythme des excédents ou
des déficits en eau. Il exprime la différence entre la somme des
abats pluviométriques et celle de
62
l'évapotranspiration potentielle (ETP) et constitue,
lorsqu'il est positif, le surplus disponible pour la recharge en eau du sol et
pour l'écoulement (Sutcliffe et Piper, 1986) et (Vissin, 2001).
Il permet également de mettre en évidence
l'évolution du climat à travers les apports pluvieux et les
pertes par évaporation et s'exprime par la formule suivante :
Bc = P - ETP, avec : Bc, bilan climatique en mm, P, pluie
totale annuelle en mm et ETP, évapotranspiration réelle en mm.
L'ETP est définie comme la demande climatique en vapeur
d'eau.
- Si P - ETP > 0, alors le bilan est excédentaire ;
- Si P - ETP < 0, alors le bilan est déficitaire ;
- Si P - ETP = 0, alors le bilan est équilibré.
Cette méthode a été utilisée dans
la réalisation de certaines études notamment au niveau
régional sur les ressources hydroélectriques en Afrique de
l'Ouest (Le Barbe et al., 1993) ; en Guinée pour l'étude
du bilan hydrologique, de même au Togo (Sutcliffe et Piper, 1986) et au
Bénin (Vissin, 2007; Vodounou, 2010).
3.2. Résultats
Le changement climatique se mesure à travers les
paramètres climatiques tels que la température, les
précipitations, l'humidité, les vents, la fréquence des
événements extrêmes. Les deux premiers sont les principaux
abordés par cette recherche. L'analyse de la dynamique climatique a
consisté dans un premier temps à analyser l'évolution des
régimes pluvio-thermiques. Dans un second temps, les perceptions
endogènes de cette variabilité ont été
abordées. 3.2.1. Variabilité spatio-temporelle des
précipitations
La variabilité des précipitations a
été effectuée en fonction des modifications spatiale et
temporelle sur la période allant de 1987 à 2016.
63
3.2.1.1. Analyse spatiale de la variation
pluviométrique
L'évolution spatiale des hauteurs de pluie est
caractérisée par une moyenne de 1219,38 mm et une faible
variation (CV=3,08 %) des abats pluviométriques (figure 9).
z
·
Da ' gbo
z
_5
2°25'0"E
2°36'0"E
N30'30"E
2°19'30"E
2°25'0"E
2°36'0"E
2'30'30"E
2°19'30"E
N
w
-
LEGENDE
COMMUNE D'ADJA-OUERE
Adjohoun
! Chef lieu de commune Limite de Commune
Pluiviométrie (mm) Période 1987-2016
1171,08-1212,19
1 212,2 - 1 253,3
1 253,31 - 1 294,41
1 294,42 - 1 335,52
COMMUNE DE SAKETE
S
COMMUNE DE ZE
COMMUNE D'IFANGNI
COMMUNE
D'ABOMEY-CALAVI
ués
Source: ASECNA (2016) Realisation:
Ferri COCKER, 2018
0 5 10
Km
64
Figure 9 : Répartition spatiale des hauteurs de pluie
entre 1987 et 2016
65
L'analyse de la figure 8, révèle ainsi une
inégale répartition spatiale de la pluviométrie dans le
milieu d'étude. En effet la pluviométrie y varie entre 1171,08 et
1335,52 mm. Les fortes valeurs pluviométriques sont enregistrées
au nord et au sud précisément à la latitude de Bonou et de
Sô-Ava (pluie >1253 mm). A la latitude de Dangbo et d'Adjohoun, les
plus faibles valeurs de pluie sont enregistrées et oscillent entre 1171
et 1212 mm. Cette évolution pluviométrique est aussi
marquée par une succession d'années sèches et humides
entre 1987 et 2016.
3.2.1.2. Tendance annuelle des
précipitations
Le calcul de l'indice pluviométrique moyen a permis
d'analyser cette variabilité temporelle des précipitations. Il
s'agit ainsi d'une description de l'évolution interannuelle des pluies
moyennes dans la vallée. Les résultats obtenus pour cet indice
sont présentés par la figure 10.
Figure 10: Variabilité interannuelle des pluies dans le
secteur d'étude (1987 -
2016)
66
L'analyse de la figure 10 permet d'observer une
variabilité dans l'évolution pluviométrique de 1987
à 2016. La pluviométrie dans le secteur d'étude est en
effet, marquée par son irrégularité qui se manifeste par
d'importantes fluctuations interannuelles. Malgré la différence
des volumes pluviométriques, les quatre stations présentent
pratiquement les mêmes caractéristiques en alternant des
séquences humides et des occurrences sèches.
En effet, trois phases ont été
identifiées dans l'évolution temporelle de la
pluviométrie. La première phase est marquée par des
excédents pluviométriques et concerne la période
1987-1990. Cependant, la station de Porto-Novo connaît un déficit
pluviométrique dès 1990 tandis que celle de Cotonou enregistre
deux déficits pluviométriques en 1989 et 1990 même si les
années suivantes y sont humides.
La deuxième sous-période est
caractérisée par des déficits pluviométriques et
concerne la période 1990-2006. Ainsi, à partir de la fin de
l'année 1990 jusqu'au début de l'année 2006, il y a eu une
longue période de déficit pluviométrique, les indices
étant relativement négatifs. Cependant, quelques années
sont excédentaires. C'est le cas des années 1997 et 1999 pour la
station de Bonou; 1995, 1999 et 2003 pour la station d'Adjohoun ; 1995, 1996,
1997, 1999 et 2004 pour la station de Porto-Novo ; 199.3, 1997, 1999, 2003 et
2004 pour la station de Cotonou.
La troisième période (2006-2016) est
caractérisée par des fluctuations interannuelles du volume
pluviométrique et concerne essentiellement les stations de Cotonou et de
Porto-Novo. Des anomalies pluviométriques sont identifiées durant
cette dernière séquence. L'année 2016 par exemple est
déficitaire dans la zone, à l'exception de la station de
Porto-Novo.
Le Tableau IV présente la répartition des
fréquences des années selon les classes de SPI et le
caractère toujours irrégulier de la pluviométrie. Il met
en
67
exergue des épisodes humides et des épisodes
secs. Dans l'ensemble, les séquences humides (15 années) sont
égales aux séquences sèches (15 années) au niveau
des stations de Bonou et de Porto-Novo. A la station d'Adjohoun, les
séquences humides (16 années) sont plus fréquentes que les
séquences sèches (14 années). Tandis qu'à la
station de Cotonou, on observe une prépondérance des
séquences sèches (17 années).
Tableau IV : Fréquence des
années selon les classes de SPI
Stations
|
NA
|
HE
|
HF
|
HM
|
SM
|
SF
|
SE
|
Bonou
|
30
|
0
|
4
|
11
|
10
|
4
|
1
|
Adjohoun
|
30
|
0
|
7
|
9
|
8
|
6
|
0
|
Porto-Novo
|
30
|
0
|
3
|
12
|
12
|
2
|
1
|
Cotonou
|
30
|
2
|
2
|
9
|
14
|
3
|
0
|
|
Source : Traitement de données, 2019
SPI : indice standardisé des
précipitations, NA : nombre d'années, HE
:
humidité extrême, HF :
humidité forte, HM : humidité
modérée, SE : sécheresse
extrême, SF : sécheresse forte, SM :
sécheresse modérée.
Globalement, il est donc constaté que la
décennie 2000 a été beaucoup plus humide que la
décennie 1990. Des résultats similaires avaient été
obtenus en Afrique de l'Ouest par plusieurs auteurs (Le Barbe et al.,
2002 ; Le Lay et Galle, 2005). Ainsi, le secteur d'étude n'est pas en
marge de la forte variabilité interannuelle qui caractérise les
régions du monde et le Bénin en particulier. Selon Ogouwale,
(2006), le Bénin subit en effet, une péjoration climatique
récente avec de fortes variabilités spatio-temporelles des
précipitations, alternant périodes sèches et
périodes humides, caractérisées par une diminution
remarquable des événements pluvieux en terme de quantité
d'eau précipitée.
Cette variabilité pluviométrique est conforme
à ce qui a été observé dans la plupart des travaux
sur le régime des précipitations de la sous-région de
l'Afrique de l'Ouest (Mahe et Olivry, 1995 ; Paturel et
Servat, 1996) et particulièrement au Bénin (Houndenou, 1992 ; ;
Amoussou, 2010 ; Koumassi, 2014 ; Assaba, 2014).
Eu égard à ce qui précède, le
test de Pettitt a été appliqué pour ressortir
d'éventuelle rupture de stationnarité. La figure 11
présente les résultats dudit test.
68
Figure 11: Rupture de stationnarité dans
l'évolution de la série pluviométrique
L'analyse de la figure 11 révèle, une rupture
de stationnarité pendant la décennie 2000. Cette rupture est
détectée en 2006 pour les stations de Cotonou et de Porto-Novo,
en 2007 pour la station de Bonou et en 2005 pour la station d'Adjohoun. La
présence de rupture de stationnarité dans les séries
pluviométriques signifie qu'il y a une variation de la moyenne des
précipitations avant et après l'année de rupture, cette
variation étant statistiquement significative au seuil de 95 %. Le
tableau V présente la segmentation de la pluviométrie entre 1987
et 2016.
69
Tableau V : Segmentation de la
pluviométrie entre 1987 et 2016
Stations
|
Début
|
Fin
|
Moyenne
|
Écart-type
|
|
1987
|
2007
|
1213,23
|
268,56
|
Bonou
|
2008
|
2016
|
1583,23
|
180,81
|
|
1987
|
2005
|
1096,39
|
223,21
|
Adjohoun
|
|
|
|
|
|
2006
|
2016
|
1300,09
|
199,22
|
|
1987
|
2006
|
1182,40
|
276,18
|
Porto-Novo
|
2007
|
2016
|
1313,99
|
216,74
|
|
1987
|
2006
|
1318,49
|
345,34
|
Cotonou
|
|
|
|
|
|
2007
|
2016
|
1423,06
|
249,44
|
|
Source : Traitement de données, ASECNA,
2016
L'analyse de ce tableau confirme que la deuxième
sous-période est plus humide que la première pour l'ensemble des
stations étudiées. Toutefois, la similarité des
années de rupture pour les stations de Cotonou et de Porto-Novo est
liée probablement à leur proximité. Ces résultats
confirment néanmoins l'existence de deux phases distinctes dans
l'évolution pluviométrique et montrent la tendance à la
hausse des hauteurs de pluie à partir de 2005. Ce qui se justifie par
les nombreuses anomalies positives obtenues après ces années
(2007 et 2005) et par les anomalies négatives obtenues dans la
décennie 1990.
3.2.1.3. Variabilité saisonnière
comparée des précipitations par sous-périodes
L'étude comparée des deux sous-périodes
identifiées à partir du test de Pettitt permet de mettre en
évidence la baisse marquée des hauteurs de pluie
saisonnières. La figure 12 en est une illustration.
70
Figure 12: Régime pluviométrique des
sous-périodes 1987-2016
L'analyse comparative de la pluviométrie
saisonnière indique que la période 2007-2016 reste
excédentaire par rapport à la période 1987-2006 avec un
optimum en juin pour les stations de Cotonou et Porto-Novo. Pour les stations
de Bonou et Adjohoun, cet optimum se situe en mai. Cependant, au cours de cette
saison pluvieuse les stations de Bonou, Cotonou et Adjohoun, connaissent une
baisse pluviométrique en avril tandis que ce déficit est
enregistré en mai pour la station de Porto-Novo.
3.2.1.4. Évolution mensuelle des champs de
précipitations
L'étude de l'évolution des champs
pluviométriques au pas de temps mensuel a permis de faire un zonage
climatique. La figure 13 présente les isohyètes mensuelles dans
le secteur d'étude pour la période 1987-2016.
71
Pluviométrie moyenne mensuelle de janvier à
avril
72
Pluviométrie moyenne mensuelle de mai à
août
73
Pluviométrie moyenne mensuelle de septembre à
décembre Figure 13 : Évolution moyenne mensuelle du
régime pluviométrique
74
L'analyse de cette figure révèle que les mois de
janvier, février, mars, novembre, décembre sont
caractérisés par un état de sécheresse dont
l'amplitude varie suivant la pluviométrie au niveau de chaque station.
Le mois de décembre enregistre les plus faibles valeurs
pluviométriques. Les valeurs les plus faibles sont enregistrées
au sud à la latitude de Dangbo (11mm), tandis que les champs de
précipitations les plus élevés (17 à 20 mm) sont
observés au nord à la latitude de Bonou. Aussi, ce mois est-il
moins arrosé que les mois de janvier, février et mars. Au cours
du mois de mars, les valeurs pluviométriques les plus
élevées sont enregistrées au nord et au sud plus
précisément à la latitude de Dangbo et Bonou (81mm).
Les périodes d'avril, mai, juin, juillet correspondent
à la grande saison pluvieuse. Au cours de cette période, les
hauteurs de pluie sont élevées et oscillent entre 113 mm et 321
mm. Dans la période, le mois d'avril enregistre les plus faibles valeurs
pluviométriques (113 à 141 mm). Le mois de juin est le mois le
plus arrosé de l'année (186 à 321 mm). Au cours de ce
mois, la hauteur de pluie est marquée par une évolution graduelle
et un gradient sud-nord.
En juillet, août et septembre, cette hauteur de pluie
diminue graduellement avec un gradient pluviométrique tantôt
nord-sud, tantôt sud-est/sud-ouest. Le mois d'octobre enregistre des
précipitations variant de 155 à 180 mm. Les valeurs les plus
élevées sont enregistrées au nord du secteur
d'étude, tandis que les précipitations les moins
élevées sont observées au centre à Adjohoun. Le
mois de novembre est quant à lui, marqué par un gradient
nord-sud. Au cours de ce mois les précipitations deviennent faibles et
descendent jusqu'à 32 mm.
Pour mettre en évidence les mois les plus humides,
l'analyse du bilan climatique a été effectuée.
75
3.2.1.5. Bilan climatique
La détermination du bilan climatique permet de
déduire les mois humides des mois secs dans le secteur d'étude.
La figure 14 met en exergue les mois les plus humides de l'année.
Bonou Cotonou Adjohoun Porto-Novo
350,0
-50,0
-100,0
Mois
Bilan climatique (mm)
300,0
250,0
200,0
150,0
100,0
50,0
0,0
Figure 14: Bilan climatique mensuel
De l'analyse de la figure 14, il ressort qu'au pas de temps
mensuel, le bilan climatique permet d'identifier deux périodes
opposées :
· sept mois humides s'observent d'abord de mars à
juillet et de septembre à octobre, avec un optimum en juin. Ces mois
fournissent à eux seuls 80 à 86 % de la pluviométrie
annuelle de la période 19872016. Les rivières pendant ces mois
sont alimentées en surplus d'eau et favorisent l'alimentation des
réservoirs souterrains.
· De novembre à février, ce sont les mois
secs où la demande évaporatoire de l'atmosphère est
très importante, avec un fort amenuisement et même
l'assèchement des réserves d'eau du sol.
76
Par ailleurs, la péjoration pluviométrique de la
première période est beaucoup plus marquée pendant les
mois les plus pluvieux. Dans l'ensemble, la baisse de la pluviométrie de
ces mois durant la première sous-période (1987-2007)
comparativement à la deuxième sous-période (2008-2016) est
de 17,4 %. Les déficits les plus importants sont enregistrés
pendant les mois de juin (11,8 %) et octobre (10,1 %) à la station de
Porto-Novo, de mai (23,3 %) et octobre (8,7 %) à la station de Cotonou.
Le tableau VI présente les déficits entre les différentes
périodes.
Tableau VI : Déficits entre les sous-périodes des
mois les plus humides
|
|
Bonou
|
|
Adjohoun
|
Porto-Novo
|
|
Cotonou
|
|
|
1987-
|
2008-Déficit
|
1987-
|
2006-Déficit
|
1987-
|
2007-Déficit
|
1987-
|
2007-Déficit
|
|
2007
|
2016
|
(%)
|
2005
|
2016
|
(%)
|
2006
|
2016
|
(%)
|
2006
|
2016
|
(%)
|
Avr
|
81
|
82
|
1,0
|
60
|
97
|
61,3
|
65
|
63
|
-3,8
|
73
|
81
|
11,4
|
Mai
|
127
|
120
|
-5,1
|
119
|
110
|
-7,3
|
110
|
108
|
-1,3
|
139
|
106
|
-23,3
|
Juin
|
134
|
164
|
22,5
|
144
|
208
|
44,4
|
155
|
137
|
-11,8
|
206
|
223
|
8,4
|
Juill
|
184
|
190
|
3,5
|
199
|
201
|
1,2
|
246
|
324
|
31,5
|
317
|
398
|
25,7
|
Sept
|
138
|
144
|
4,4
|
131
|
154
|
17,5
|
148
|
192
|
29,2
|
127
|
145
|
14,3
|
Oct
|
162
|
159
|
-2,1
|
138
|
149
|
7,9
|
163
|
147
|
-10,1
|
139
|
127
|
-8,7
|
Total
|
160
|
179
|
11,6
|
136
|
189
|
39,3
|
135
|
200
|
48,4
|
164
|
179
|
9,0
|
|
Source : Traitement de données, ASECNA, 2016.
La comparaison des moyennes par sous-période des mois
les plus humides révèle également que la première
sous-période a été moins humide que la seconde.
Néanmoins, il faut remarquer que la hausse entre les deux
sous-périodes est de 11,62 % à la station de Bonou, 39,3 %
à la station d'Adjohoun, 48,4 % à la station de Porto-Novo et 9 %
à la station de Cotonou.
77
3.2.2. Analyse de la variation thermique
L'analyse de la variation des températures maximales
et minimales sur la période 1987-2016 révèle que le
secteur d'étude est affecté par une modification de son
régime thermique avec quelques anomalies thermiques. Il s'agit ici de
l'anomalie thermique ou l'anomalie de la température moyenne pour chaque
mois et pour chaque année, moyennée ensuite sur l'ensemble du
pays. L'unité de mesure est le degré Celsius (°C).
L'anomalie de la température moyenne est la mesure de l'écart
positif ou négatif par rapport aux conditions normales. Il s'agit d'un
indicateur standard de changement climatique qui est couramment utilisé
dans les rapports de surveillance. L'anomalie de la température moyenne
à l'échelle du globe, basée sur l'ensemble des anomalies
constatées à l'échelle locale et régionale, est
l'un des indices les plus largement employés et les plus connus en
climatologie. Le suivi de l'anomalie de la température moyenne à
l'échelon national est essentiel pour comprendre l'importance relative
de la variabilité interannuelle et les changements à plus long
terme causés par les activités humaines.
3.2.2.1. Tendance annuelle des
températures
Les figures 15 et 16 illustrent l'évolution des
températures minimales et maximales, respectivement au niveau des
stations de Cotonou et de Bohicon qui couvrent le secteur d'étude.
Figure 15: Tendance des températures maximales et
minimales à Cotonou
Figure 16: Tendance des températures maximales et
minimales à Bohicon
78
Les températures maximales oscillent entre 32,32°C
et 33,76°C à Bohicon et entre 30,1 à 31,1 °C à
Cotonou soit une hausse respective de 1,44°C et 1°C. Quant aux
températures minimales, elles varient de 24,3°C à
25,7°C à Cotonou soit une augmentation de 1,4°C. A Bohicon,
ces valeurs varient de
22,6 à 24,41°C soit une augmentation de
1,81°C. Les températures minimales et maximales ont donc partout
augmenté. Le nord du secteur d'étude est le plus affecté
par cette hausse.
Ce réchauffement thermique est illustré par
l'augmentation quasi continue des anomalies thermiques positives à
partir de 1998. La figure 17 présente les anomalies thermiques à
la station de Cotonou et la figure 18 présente les anomalies thermiques
à la station de Bohicon.
79
Figure 17: Anomalies thermiques à la station de
Cotonou
80
Figure 18: Anomalies thermiques à la station de
Bohicon
L'analyse des anomalies thermiques révèle d'une
part, une similarité dans l'évolution annuelle du régime
thermique des stations de Cotonou et de Bohicon. Elle rend compte d'autre part
d'une irrégularité dans l'évolution de ces anomalies qui
est marquée par deux périodes distinctes. La première
période est marquée par des déficits thermiques et
concerne la période 19871997. La deuxième période est
celle de 1998-2016 qui est caractérisée par une succession de
plusieurs anomalies positives, ce qui confirme cette tendance au
réchauffement supra décrite. Cette tendance à la hausse de
températures entraine une augmentation de la demande
évaporatoire, ce qui va se traduire par une pression sur les ressources
en eaux en particulier celles de surface.
3.2.2.2. Tendance thermique mensuelle
La température moyenne mensuelle suit un rythme annuel
bimodal avec deux pics en mars (29,48°C) et en novembre (28,37 °C)
pour la station de Cotonou
81
(figure 19), en février (29,96°C) et en
décembre (28,53°C) pour la station de Bohicon (figure 20)
Figure 19 : Régimes thermiques moyens à la
station de Cotonou
Figure 20 : Régimes thermiques moyens à la
station de Bohicon
82
Manifestement, les mois de décembre, novembre,
février et mars détiennent les plus grandes valeurs de
température traduites par une forte chaleur qui apparaît
très éprouvante pour les populations locales. Les plus faibles
valeurs de la température sont enregistrées en
juillet-août.
3.2.3. Perception endogène des manifestations
des changements climatiques
Les investigations de terrain montrent que la population
n'est pas ignorante des bouleversements climatiques qui caractérisent le
Bénin et en particulier la basse vallée de l'Ouémé.
Cet impact est particulièrement important dans le secteur d'étude
où l'agriculture est à 100 % pluviale sans aucune alternative
d'irrigation à grande échelle et constitue la principale source
d'emplois et de revenus pour la majorité de la population. Cette
communauté est en effet, unanime sur les changements climatiques en
cours. Pour faire face à cette situation indésirée, les
producteurs sont parfois obligés ou contraints de développer des
stratégies en vue d'améliorer leur production. Ainsi, dans le
contexte des changements climatiques, les producteurs du secteur d'étude
développent des adaptations visant à réduire leur
vulnérabilité ou à améliorer leur résilience
face à des changements observés ou prévus au niveau du
climat à travers de nouveaux systèmes de production. Ils optent
à certains moments pour les spéculations à cycle court
même si le risque de perte n'est pas nul. Les effets du changement
climatique ont poussé certains producteurs du secteur d'étude
à changer d'activité après des pertes de récoltes
(18 %), d'autres se sont endettés (15 %) et les moins
téméraires se sont laissés à la démotivation
et ses corolaires (14 %). Presque tous les enquêtés sont dans la
demande d'assistance, pas seulement financière mais technique. Ils
souhaiteraient que l'Etat mette en place des projets pour suivre avec eux
l'évolution du changement climatique et les accompagner à trouver
des « solutions scientifiques » auxquelles s'ajouterons les
stratégies endogènes
d'adaptation qui sont des solutions fondées sur la
nature. Les perceptions socio-anthropologiques des indicateurs de changement
climatique sont synthétisées dans le tableau VII.
Tableau VII : Synthèse des perceptions paysannes des
changements climatiques
Faits
climatiques (%) enquêtés
Manifestations Conséquences
74 %
88 %
Réduction de la
durée de saisons 84 % Pluies tardives
Chaleur de plus en plus intense et accablante
Augmentation de l'intensité pluviométrique
Les temps sont de plus en plus chauds surtout pendant la saison
pluvieuse
Pendant la grande saison pluvieuse, les pluies sont violentes et
se déclenchent soudainement
Baisse des rendements halieutiques et du développement
des plantes
La fréquence des crues est élevée
entraînant des inondations et les pertes de récoltes
Perturbation du calendrier agricole
83
Source : Enquête de terrain, 2018
La pluviométrie
Les indicateurs des changements pluviométriques tels
que l'augmentation de la pluviosité, le raccourcissement de la saison
pluvieuse ont été reconnus par plus de 50% des
enquêtés. Ces indicateurs ont été cités comme
étant les paramètres climatiques changeants les plus
déterminants puisqu'ils ont une influence directe sur les
différentes activités menées dans le milieu
d'étude. La température
L'analyse du tableau VII indique que les perceptions des
enquêtés sont globalement uniformes pour l'augmentation de la
chaleur. En effet,
84
l'indicateur Chaleur de plus en plus intense et accablante, a
été perçu par plus de 74% des interviewés.
Les résultats de cette étude ont montré
ainsi que les perceptions des enquêtés sont en accord avec les
tendances révélées par l'analyse des données
climatiques.
3.3. Discussion
L'approche méthodologique utilisée a permis
d'analyser les paramètres étudiés. Elle a conduit à
la détermination de point de rupture qui a permis de distinguer deux
périodes qui ont été analysé puis comparées
suivant les axes de la recherche. Cela a débouché sur la
caractérisation de la similitude entre les résultats
scientifiques et les perceptions endogènes. Même si l'objectif
visé est atteint, cette méthode n'a pas permis d'estimer de
façon quantitative chiffrée les effets du changement climatique
sur les ressources en eau. Les précipitations constituent un des
paramètres fondamentaux du climat et leur évolution
peut-être révélatrice et indicatrice d'un changement de
climat (Ogouwale, 2006). Dans le milieu d'étude, les hauteurs de pluie
moyennes annuelles oscillent entre 1171 et 1335 mm. Dans ce milieu, le nord et
le sud enregistrent les plus fortes pluviométries contrairement au
centre. Cette diminution des précipitations pourrait s'expliquer par le
fait que la région côtière s'inscrit dans la diagonale de
sécheresse qui s'étend du Bénin au Ghana (Boko, 1988 ;
Houndenou, 1999). L'analyse des séries pluviométriques sur la
période 1987-2016 a également permis d'observer, plusieurs
anomalies négatives au cours de la décennie 1990. En revanche, la
deuxième moitié de la décennie 2000 est marquée par
des excédents pluviométriques.
L'application du test de Pettitt aux séries
pluviométriques met en évidence des ruptures de
stationnarité respectivement en 2007 et 2005 pour les stations de Bonou
et Adjohoun tandis que les stations de Porto-Novo et de Cotonou
85
enregistrent une rupture de stationnarité en 2006. De
ces résultats, il se dégage une hausse des hauteurs de pluie.
L'augmentation des pluies ainsi révélée dans le secteur
d'étude est en accord avec les résultats de Vissin et al.
(2016), qui ont montré que la basse vallée de
l'Ouémé a non seulement connu une rupture de
stationnarité, mais aussi une légère reprise des hauteurs
pluviométriques de 2 % à la fin des années 1990. Dans le
même ordre d'idée, en étudiant la variabilité
spatio-temporelle de la pluviométrie dans le bassin de
l'Ouémé au Bénin, Alamou et al. (2016)
révèlent une augmentation très importante du cumul
pluviométrique à partir de 2002 à Cotonou comme à
Bohicon. Dès lors se pose la question de l'évolution
générale des pluies à plus long terme dans le contexte des
changements climatiques.
Toutefois, le déficit enregistré pendant la
décennie 1990 correspond à la péjoration climatique
observée au Bénin et aussi en Afrique de l'Ouest depuis les
années 1970 comme l'ont déjà montré plusieurs
auteurs (Bokonon-Ganta, 1987 ; Boko, 1988 ; Afouda, 1990 ; Houndenou, 1999 ;
Ogouwale, 2006 ; Totin, 2010). Elle est également similaire à
celle observée par Amoussou (2010) dans le bassin versant du complexe
Mono-Ahémé-Couffo au Sud-Bénin. A ce niveau, l'auteur a
montré que la baisse des précipitations depuis les années
1970 s'est poursuivie en s'amplifiant au début de la décennie
1980, avec des sécheresses sensibles, surtout de 1982 à 1987.
Par ailleurs, l'augmentation des précipitations se
déroule principalement au coeur de la saison des pluies et est
liée à la hausse thermique enregistrée sur la
période 1987-2016. En effet, la dynamique de mousson s'intensifie en
réponse à l'augmentation du gradient thermique
continent/océan (Monerie et Roucou, 2015) et à cela, il faut
aussi ajouter un effet local lié à l'augmentation de
l'évaporation de surface et de l'humidité atmosphérique
favorisant une instabilité atmosphérique et donc les pluies (Seth
et al., 2013).
86
Plus de 50% des enquêtés ont perçu ces
changements climatiques à travers les indicateurs tels que la hausse de
l'intensité pluviométrique, le rétrécissement de la
saison pluvieuse, la chaleur de plus en plus intense et accablante. D'une
façon globale, les pluies tardives constituent une menace pour les
activités agricoles. Les chaleurs de plus en plus accablantes
constituent des facteurs de perturbation des activités de pêche.
Ces perceptions sont en accord avec les travaux réalisés par
Ogouwale (2006) qui confirme les perceptions paysannes selon lesquelles les
changements climatiques sont manifestés à travers le
démarrage tardif et la mauvaise répartition des pluies suivie
d'une chaleur plus intense et accablante.
Dans leur étude sur l'Agriculture paysanne et
stratégies d'adaptation au changement climatique au Nord-Bénin,
Vodounou et Doubogan (2016) ont identifié 9 indicateurs d'impacts du
changement climatique sur l'agriculture et les producteurs. L'indicateur
d'impact le plus prépondérant déclaré par les
populations est l'insécurité alimentaire (22 %) qui constitue la
conséquence du bouleversement des dates de semis (16 %) et de la baisse
de rendement (15 %). Dans la présente étude, ces indicateurs sont
sous-entendus puisque les enquêtés ont évoqué le
changement d'activité, l'endettement et la démotivation. Lorsque
la baisse des rendements conduit à l'insécurité
alimentaire, on ne peut que s'attendre à la démotivation vue que
tout est lié.
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