LES CONTRATS DE
PERFORMANCE
ENERGETIQUE
SENANT Thomas
Mémoire de Candidature au Master FPFS Université
Paris Ouest la
Défense
Mai 2013
3
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION 4
1. LES OBSTACLES AU DEVELOPPEMENT DES CPE 5
1.1. Des
procédures de passation contraignantes et mal maîtrisées
par les pouvoirs
adjudicateurs 5
1.1.1. Les contraintes liées au code des marchés
publics 6
1.1.2. Les PPP : des procédures lourdes pour des contrats
complexes 7
1.1.3. Le recours aux sociétés
dédiées : difficultés liées au regroupement des
compétences 8
1.2. Les contraintes du financement et de la viabilité
économique des opérations : 9
1.2.1. Les difficulté dans la maîtrise des
coûts 10
1.2.2. L'insuffisance des dispositifs actuels d'incitation au
recours aux CPE 11
2. LES DISPOSITIFS A FAVORISER AFIN DE SOUTENIR LES CPE 13
2.1. Diversifier les porteurs du financement : 13
2.1.1 Principes et porteurs du tiers financement 13
2.1.2. Le tiers financement par une société
publique dédiée : 14
2.1.3. La technique de l'intracting 16
2.1.4. La création d'un fond d'investissement
public-privé pour l'efficacité énergétique
17
2.2. Diversifier les sources de financement et d'économies
d'énergies 19
2.2.1 Le recours aux émissions obligataires : 19
2.2.2. Le recours à des prêts bonifiés 20
2.2.3. Favoriser la valeur verte 21
2.2.4. Production d'électricité : panneaux
photovoltaïques, chaudières biomasses etcÉ 21
CONCLUSION 22
4
INTRODUCTION
En janvier 2013, Delphine Batho, Ministre de l'Ecologie, du
Développement durable et de l'Energie, a engagé le débat
national sur la transition énergétique.
Dans le cadre de cette réflexion globale,
différentes mesures et dispositifs seront adoptées afin d'assurer
le respect des objectifs européens et nationaux.
En effet, les lois Grenelle 1 et 2 du 3 août 2009 et du
12 juillet 2010 engagent la France à diviser par 4 ses émissions
de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 avec une réduction de
3% par an en moyenne des rejets de gaz à effet de serre.
Par ailleurs, l'article 5 de la loi Grenelle 1 assigne aux
bâtiments publics l'objectif de réduire de 38 % leurs
consommations énergétiques d'ici 2020. Il en fait une obligation
pour l'Etat et une recommandation pour les collectivités
territoriales.
Parmi les différents axes de réflexion, une
restructuration du cadre réglementaire autour des contrats de
performance énergétique (CPE) est envisagée.
Le contrat de performance énergétique a pour
objet de « garantir dans la durée une amélioration de
l'efficacité énergétique d'un bâtiment ou ensemble
de bâtiments existant. L'amélioration de
l'efficacité énergétique consiste en la réduction
de la consommation énergétique et, le cas échéant,
la modification du niveau de service »1.
Dans le cadre du présent mémoire, la
définition du CPE se limite aux contrats globaux, initiés par un
pouvoir adjudicateur (Etats, collectivités, groupements), sur le domaine
public au sens large. Sont exclus de ce champ les CPE passés entre un
particulier et un prestataire privé ou public et les rénovations
dans le secteur du logement social.
Le CPE est ici considéré comme un outil de la
commande publique, dont la forme contractuelle peut varier selon les modes de
passations utilisés dans le secteur de la rénovation du
bâtiment, qui inclus systématiquement un volet performance
énergétique, prévu de manière explicite au
contrat.
Si le CPE existe depuis 2009, prévu explicitement comme
l'un des outils phares des lois Grenelle, il n'a pas suscité
l'engouement espéré auprès des personnes publiques. Son
utilisation ne s'est pas répandue, alors même que les acteurs
publics ayant eu recours au CPE en sont globalement satisfaites d'autant plus
que le projet initial est complexe2. Face à cette inertie,
diverses interrogations apparaissent. Est-ce qu'il s'agit d'un manque de
soutien
1 Olivier Ortega, les contrats de performance
énergétique, Rapport à Mme Koscuisko-Morizet,
Ministre de l'écologie, du développement durables, des transports
et du logement, mars 2011
2 Complexité des projets et recours aux contrats de
partenariat, le cas de CPE en France, Rapport du CEF-O-PPP par Eshien
Chong, Aude Le Lannier, Carine Staropoli.
5
politique ? Ou d'un manque d'information auprès des
collectivités, d'un manque de sanctions en cas de non respect des
objectifs environnementaux ?
Or, face à l'inflation du prix des énergies, la
problématique environnementale est relayée par une
préoccupation d'ordre économique. Menacées par le contexte
actuel de crise économique, l'Etat et les collectivités sont
amenés à réduire leurs dépenses, dont leur
consommation énergétique.
En outre, dans un environnement de défiance vis
à vis de la solidité financière des collectivités,
la frilosité des établissements bancaires à accorder des
prêts empêche la mise en place de contrats complexes tels que les
CPE.
A cela d'ajouter la mauvaise image de l'utilisation des
contrats de partenariats auprès des élus, il apparaît
clairement un contexte peu propice au développement des CPE.
Ainsi peut-on se demander quelles faiblesses
caractérisent le CPE, et comment redynamiser le recours à cet
outil par les pouvoirs adjudicateurs ?
Le CPE semble un outil nécessaire au respect des
objectifs de performance énergétique fixés pour les
personnes publiques, victime d'un désintérêt de la part des
pouvoirs adjudicateurs car cet outil semble connaître certaines limites.
Cependant le CPE dispose d'un véritable potentiel, qui tend à
être révélé par de nombreuses réflexions
actuellement menées afin de faciliter sa passation par les personnes
publiques.
1. LES OBSTACLES AU DEVELOPPEMENT DES
CPE
Aujourd'hui, une dizaine seulement de CPE ont
été signés en France par les collectivités afin de
rénover leur parc immobilier. Ces dernières ne semblent pas
s'être appropriées l'outil, pourquoi ?
Deux aspects majeurs permettent de regrouper les obstacles
liés au CPE : l'aspect juridique et l'aspect
économique/financier.
1.1. Des procédures de passation contraignantes
et mal maîtrisées par les pouvoirs adjudicateurs
Lorsqu'un pouvoir adjudicateur souhaite mettre en place un
CPE, celui-ci dispose de possibilités très variées, selon
le degré d'externalisation du projet souhaité.
En effet, le CPE peut être conclu principalement sous la
forme : - d'un Marché Public de Performance Energétique (MPPE), -
d'un Partenariat Public Privé (PPP) au sens large du terme,
6
- d'un marché de performance énergétique
en application de l'ordonnance du 6 juin 2005 relative aux marchés
passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises
au Code des marchés publics.
Cette typologie correspond à des contrats
variés, dont la préparation, la passation et la mise en oeuvre
sont bien souvent contraignantes pour le pouvoir adjudicateur.
1.1.1. Les contraintes liées au code des
marchés publics
Lors du recours au MPPE, la première approche pour le
pouvoir adjudicateur est d'envisager une succession de marchés
séparés (étude, maîtrise d'oeuvre, travaux de
rénovation, puis exploitation/ maintenance) conformément à
la loi MOP 3et au CMP, qui prévoit en son article 10 le
principe d'allotissement afin de susciter une plus large concurrence et
permettre notamment aux petites et moyennes entreprises (PME) d'accéder
à la commande publique.
Cependant, les premières expériences ont
montré qu'afin de garantir l'amélioration de la performance
énergétique, il est nécessaire que le titulaire d'un CPE
soit en mesure de maîtriser, outre la réalisation des travaux,
fournitures ou services : la conception des actions mises en oeuvre, ainsi que
l'exploitation et la maintenance du bâtiment.
Ainsi, depuis le 25 août 20014, le CMP permet le
recours à des marchés globaux associant : - soit la
réalisation, l'exploitation ou la maintenance (marchés publics
dits « REM »),
- soit la conception, la réalisation, l'exploitation ou
la maintenance (marchés publics dits «CREM »),
Toutefois, les CREM et REM sont soumis à la condition
de « remplir des objectifs chiffrés de performance
énergétique définis en termes de niveau d'activité,
de qualité de service, d'efficacité énergétique ou
d'incidence écologique ». Ces contrats doivent comporter des «
engagements de performance mesurable ».
En outre, les MPPE demeurent soumis à l'article 96 du
CMP, qui prohibe : « l'insertion dans un marché de toute clause de
paiement différé ». Cet article intervient en écho de
l'article 10 du CMP qui stipule que ces marchés doivent respecter la
règle de la distinction de la rémunération des prestations
de construction de celle des prestations d'exploitation ou de maintenance.
Or cette interdiction comporte 3 conséquences
significatives pour le pouvoir adjudicateur :
· Celui-ci n'a d'autre choix que d'effectuer le paiement
du prix sous forme d'avance, d'acompte, puis de solde, au fur et à
mesure de l'avancement des travaux ou de la réalisation des prestations
de services.
3 Loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative
à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la
maîtrise d'oeuvre privée
4 Décret n° 2011-1000 du 25 août
2011 modifiant certaines dispositions applicables aux marchés et
contrats relevant de la commande publique
·
7
Le paiement des travaux ne pourra être
étalé sur la durée globale du marché et la
rémunération du titulaire est amenée à varier au
cours de son exécution.
· Le système de pénalités en cas de
sous-performance s'en trouve complexifié, le pouvoir adjudicateur ne
pouvant récupérer lesdites pénalités sur la
rémunération des prestations de fournitures et de services et
même éventuellement de travaux. En toute logique, une garantie
financière doit être envisagée afin de
récupérer les pénalités applicables
postérieurement au paiement des prestations de travaux ou de
fournitures.
Si les contraintes liées au CMP ne condamnent pas le
recours aux MPPE, ceux-ci s'en retrouvent pénalisés par rapport
aux PPP.
1.1.2. Les PPP : des procédures lourdes pour des
contrats complexes
Afin de pallier aux contraintes de l'obligation
d'allotissement et de l'interdiction de paiement différé
liées au CMP, le législateur a permis le recours aux PPP pour la
mise en place des CPE. En termes de performance énergétique, les
PPP comprennent d'une part le Contrat de Partenariat de Performance
Energétique (CPPE) issu de l'ordonnance du 17 juin 2004 et d'autre part
le Bail Emphytéotique Administratif (BEA) de valorisation depuis la loi
LOPPSI du 14 mars 2011.
Le recours au CPPE permet au pouvoir adjudicateur de confier,
au sein d'un même contrat, la mission globale de financer, concevoir tout
ou partie, réaliser les travaux de rénovation, maintenir et
assurer le suivi des objectifs de performance énergétique sur des
équipements publics dans un cadre de longue durée.
La différence majeure entre le CPPE et le CREM tient
au financement. Dans le cadre du CPPE le titulaire est chargé de
financer les travaux de rénovation par ses propres moyens. En
contrepartie, le pouvoir adjudicateur verse au titulaire un loyer
périodique correspondant aux charges d'investissement, d'exploitation et
de financement. Ce procédé est fortement incitatif en termes de
délais et de performance. En effet, la mise en loyer n'intervient qu'une
fois les travaux achevés et le loyer est modulé par la bonne
réalisation des objectifs et des activités annexes (si
prévues au contrat).
Cependant, le caractère dérogatoire au droit de
la commande publique de cet outil implique pour le pouvoir adjudicateur de
justifier sa mise en oeuvre par la réalisation d'une évaluation
préalable, qui doit conclure à la nécessité de
recours au CPPE selon 3 critères : la complexité, l'urgence et /
ou l'efficience économique du projet.
A ces exigences s'ajoute la nécessité de
procéder à un dialogue compétitif pour le choix du
prestataire. Si cette procédure est un réel atout lié au
contrat de partenariat, car elle permet à la personne publique de
parfaire son projet à travers un réel dialogue avec les
prestataires, elle s'avère néanmoins couteuse et chronophage.
8
Finalement, la pratique tend à exclure le recours au
CPPE pour les projets de rénovation d'un faible montant
(inférieur à 5 M€)
Le BEA de valorisation constitue dans ce cas une alternative
efficace au CPPE et au CREM. Il confère au preneur des droits
réels sur les biens existants.
Ce dernier devient propriétaire des ouvrages,
immeubles et installations dont il est chargé d'assurer la
rénovation pendant toute la durée du contrat, laquelle est
généralement longue puisque le BEA est nécessairement
conclu sur une durée comprise entre 18 et 99 ans.
Bien souvent, le BEA est accompagné d'une convention
d'exploitation non détachable. Ce mécanisme permet au prestataire
de réaliser des travaux et rénovations ainsi que la maintenance
des ouvrages tout en permettant leur utilisation par la personne publique.
En pratique, le preneur verse une redevance symbolique
(1€) à la personne publique, qui paie en retour un loyer
correspondant aux charges d'investissement, d'exploitation et de
financement.
1.1.3. Le recours aux sociétés
dédiées : difficultés liées au regroupement des
compétences
Une 3ème possibilité est offerte
au(x) pouvoir(s) adjudicateur(s) : conclure le marché de performance
énergétique en application de l'Ordonnance du 6 juin 2005
relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou
privées non soumises au Code des marchés publics.
Il s'agit pour le pouvoir adjudicateur de passer le
marché avec une société dédiée, qui peut
prendre la forme :
- d'une Société d'Economie Mixte (SEM). Une SEM
est une société anonyme détenue par des actionnaires
publics (collectivités et leurs groupements) et privés. Les
actionnaires publics sont majoritaires et détiennent au minimum 51 % et
au maximum 85 % du capital social de la SEM.
La SEM garantit à la fois au groupement une prise en
compte effective de l'intérêt général dans les
objectifs de l'entreprise et la souplesse d'une société de droit
privé.
- d'une Société Publique Locale (SPL) qui
à l'instar de la SEM est une société anonyme régie
pour l'essentiel par le droit privé, mais dont le capital est
détenu à 100 % par des actionnaires publiques. Son champ
d'intervention est limité au périmètre géographique
et aux compétences de ses actionnaires.
Cependant la SPL bénéficie de l'exception
du in-house, conformément à la législation
européenne, car dans ce cadre le pouvoir adjudicateur exerce un
contrôle analogue à celui qu'il exerce sur ses propres
services5.
La relation in-house permet au pouvoir adjudicateur
d'échapper aux obligations de publicité et de mise en concurrence
lors de la passation des marchés.
5 CJUE, arrêt Teckal, 18 novembre
1999
9
En pratique, la société dédiée
permet d'une part au pouvoir adjudicateur de conserver un contrôle
important sur les projets de performance énergétique, ainsi que
d'assouplir la procédure d'attribution du marché dans le cas de
la SPL.
D'autre part, la société dédiée
sert de véhicule aux collectivités et leurs groupements afin de
mettre en commun leurs compétences (expertise juridique,
financière) et leurs moyens. La SPL ou la SEM rend accessible des
projets globaux et complexes, tout en bénéficiant
d'économies d'échelles lors de la réalisation des
études et des travaux.
Cependant, lorsque les collectivités décident
de se regrouper au sein d'une société dédiée,
celle-ci présente certaines limites vis-à-vis des projets
globaux.
Tout d'abord, les SEM et les SPL n'ont pas compétence
pour la passation des contrats de partenariats selon l'ordonnance du17 juin
2004.
En toute hypothèse, l'article L 1414-III du code
général des collectivités territoriales (CGCT) autorise,
selon la Mission d'Appui aux Partenariats Public-Privé (MaPPP), les
collectivités territoriales à mutualiser la réalisation
d'un projet en contrat de partenariat en constituant un « groupement de
commandes » dont le « coordonateur (chef de file) », sera en
charge des mission suivantes : réalisation de l'évaluation
préalable, conduite de la procédure de passation et suivi de son
exécution.
Cependant, il existe un certain nombre de risques juridiques
et financiers dont l'obligation de signature du contrat par toutes les
collectivités ou l'individualisation par collectivité du paiement
du prestataire6.
Dans le cas où un CREM serait passé entre les
collectivités et la société dédiée, il n'en
demeure pas moins l'impossibilité de paiement différé qui
pénalise un tel montage.
Le recours au BEA de valorisation permet alors
d'éviter ces deux obstacles mais reste peu approprié pour des
projets d'un montant élevé.
1.2. Les contraintes du financement et de la
viabilité économique des opérations :
Dans le contexte actuel de raréfaction des ressources
publiques, les personnes publiques rencontrent de fortes difficultés
pour financer des projets, dont les opérations de performance
énergétique. En conséquence, le développement des
CPE semble compromis face à leur complexité et au manque de
soutien de la part des autorités politiques.
6Ç Groupement de commandes » entre
collectivités territoriales et contrats de partenariat, avis de la
MaPPP, 1er août 2012, disponible sur
<
http://www.economie.gouv.fr/files/directions_services/ppp/fiche_groupement_commandes.pdf>
10
1.2.1. Les difficulté dans la maîtrise des
coûts
Les CPE présentent un certain nombre de
difficultés dans leur mise en place et leur suivi, tenant
essentiellement à leur complexité technique ainsi qu'à
leur manque de prévisibilité sur de longues durées.
En premier lieu, la définition d'une
situation de référence constitue un
point sensible dans la mise en place d'un CPE. Cet état sert par la
suite de base au prestataire pour concevoir, proposer, chiffrer et
évaluer les engagements de performance énergétique.
Au préalable de sa contractualisation, cette situation
requiert une connaissance et un certain nombre d'informations en amont,
impliquant généralement une assistance forte.
La finesse de cette définition dépendra de la
présence ou non de négociation et de dialogue avec les
prestataires selon que le pouvoir adjudicateur a recours à un dialogue
compétitif ou un simple appel d'offre.
Cette situation est élaborée en fonction des
informations réunies par le maître d'ouvrage et
communiquées au prestataire, discutées ou non entre les parties
selon la procédure choisie. Afin de disposer des informations
nécessaires, un dossier de consultation doit être adressé
aux entreprises, portant sur l'ensemble des caractéristiques du
bâtiment à la date donnée.
Une fois établie la situation de
référence, reste pour les prestataires potentiels à
proposer une évaluation chiffrée des économies
d'énergies réalisées sur la durée du projet, et au
maître d'ouvrage d'évaluer la fiabilité de ces
estimations.
Or les gains financiers prévisionnels dépendent
non seulement des quantités d'énergie économisées
mais sont proportionnels au poids des charges énergétiques.
D'où l'importance de l'évolution du prix des
énergies sur la durée du contrat, évolution qui
s'avère complexe à mesurer sur le long terme. Les perspectives
actuelles misent globalement sur une inflation importante du prix des
énergies qu'il s'agisse de l'électricité ou du gaz.
Ces estimations ont pour conséquence de favoriser les
CPE : leur financement s'en trouve amélioré et les gisements de
réduction de consommation d'énergie se reconstituent
progressivement par l'effet mécanique de la hausse des prix.
L'inflation de l'énergie constitue une variable
fondamentale lors de la modélisation des objectifs de performance
énergétique. Cependant, pour de longues durées, il ne
s'agit que d'hypothèses tendancielles, qui du point de vue des
établissements financiers intervenant en tant que prêteur sur les
CPE, présentent un risque non négligeable dans la
rentabilité du projet et la capacité pour le prestataire de
rembourser son emprunt de manière continue dans le temps.
En outre, les économies d'énergies, si
importantes soient elles, ne permettent généralement pas de
couvrir les investissements de rénovation.
11
Cette idée selon laquelle le CPE permet de financer les
investissements par les économies, largement répandue chez un
grand nombre de maîtres d'ouvrages, s'est avérée impossible
en pratique, même dans le cas où n'est prise en compte que la part
des travaux dédiée à l'amélioration de la
performance énergétique.
L'une des conclusions du rapport d'Olivier Ortega sur les
CPE,7 est que rétrospectivement, chaque CPE présente
son économie propre en fonction des bâtiments auxquels il
s'applique, l'utilisation qui en est faite, les objectifs à atteindre
etc.
Une autre limite des CPE dans leur application tient au
comportement des usagers. Ce facteur vient nettement complexifier ce type de
contrat. En effet, qui du prestataire ou du maître d'ouvrage peut
garantir que les usagers adopteront un comportement respectueux de
l'environnement ? En ce sens, le Centre d'analyse stratégique (CAS) a
récemment été saisi sur le phénomène de
l'« effet rebond », défini comme « l'annulation des gains
de performance énergétique obtenus par la diffusion du
progrès technique, du fait d'une utilisation accrue des ressources
»8.
La prise en charge de « ce risque opérationnel
» nécessite par l'un ou l'autre des cocontractants d'être
identifié au préalable puis inscrit dans le contrat afin
d'éviter au maximum tout contentieux lorsque le projet entre en phase de
maintenance.
Afin de prévenir ces contentieux, il est possible de
définir un volet sensibilisation au contrat, l'une des parties
s'engageant à former les usagers aux bonnes pratiques pour une
utilisation appropriée des bâtiments.
Le CPE apparaît donc comme un contrat complexe, non
seulement dans sa rédaction mais aussi dans son application. De plus,
cet outil relativement peu médiatisé ne semble pas
bénéficier du soutien législatif nécessaire
à sa généralisation parmi les pouvoirs adjudicateurs.
1.2.2. L'insuffisance des dispositifs actuels d'incitation
au recours aux CPE
Il existe aujourd'hui un certain nombre de dispositifs
permettant de favoriser les projets de performance
énergétique.
Si un certain nombre d'instruments financiers, dont
l'Eco-prêt à taux zéro, le Crédit d'Impôts
développement durable sont disponibles pour les particuliers, les
pouvoirs adjudicateurs ne bénéficient pas de tels avantages en
terme d'accès à des prêts bonifiés,
particulièrement s'ils sont mal notés.
Cet aspect semble s'aggraver dans le contexte
économique actuel, les établissements financiers faisant preuve
d'une défiance envers la solidité financière des personnes
publiques qui n'existait pas avant la crise de 2008.
7 Olivier Ortega, Les contrats de performance
énergétique, Rapport à Madame Nathalie Koscuisko-Morizet,
Ministre de l'écologie, du développement durable, des transports
et du logement, mars 2001
8 Adrient Pouthier, Performance
énergétique des bâtiments : quelle stratégie pour
éviter « l'effet rebond » ?, article par sur le Moniteur, le
05 février 2013
12
Si le mécanisme de cession de créances Dailly
permet l'accès à une ressource moins chère pour 80% de la
dette en CPPE et 100% en BEA de valorisation, car le risque pour le
prêteur porte sur une contrepartie publique, le contexte actuel de
défiance envers le secteur publique amène les
établissements prêteurs à s'interroger sur
l'efficacité de ce mécanisme.
Alors que les prêts étaient accordés au
prestataire sans recours contre celui-ci, lui permettant de déconsolider
sa dette grâce à la société projet, les conditions
pourraient évoluer, soit par l'introduction d'une garantie en cas de
recours, soit par une augmentation du coût de la ressource (peu probable
en milieu concurrentiel).
D'autre part, l'Etat a mis en place depuis 20059
le système des Certificats d'Economies d'Energies (CEE). Ce dispositif
« repose sur une obligation de réalisation d'économies
d'énergie imposée par les pouvoirs publics aux vendeurs
d'énergie »10.
Les CEE sont aujourd'hui partie intégrante des projets
de CPE, permettant d'accroître leur rentabilité. La valeur
économique des CEE a conduit à la création d'un
marché de gré à gré où la valeur du CEE est
négociée entre partenaires obligés et éligibles.
Contrairement au marché du carbone, les transactions de CEE n'ont pas
connu de volatilité trop importante. La valeur des CEE est fixée
et révisée selon un rythme triennal. L'obligation ayant
été fixée à 54 TWh cumac pour la première
période entrée en vigueur le 1er juillet 2006, et
à 345 TWh pour la 2e, effective à compter du
1er janvier 2011.
D'après un article d'Elisabeth Salles paru dans le
Moniteur le 27 février 2013 : « Pour la 3e période, qui
démarrera le 1er janvier prochain (2013), l'Ademe avait
recommandé un quasi-triplement de l'objectif actuel, vers plus de 1000
TWh cumac correspondant à l'objectif inscrit dans la directive
européenne sur l'efficacité énergétique. L'Agence
n'a apparemment pas été suivie par Delphine Batho
»11. Le gouvernement ne devrait adopter qu'un doublement pour
la 3ème période.
Une nouvelle fois, un dispositif qui semble pourtant efficace
manque de soutien de la part des autorités publiques.
Enfin, la mise en place par l'Etat en 2009 d'un label
Bâtiment Basse Consommation - Rénovation (BBC Rénovation)
qui s'applique aux CPE atteste la conformité des travaux de
rénovation à un cahier des charges garantissant un niveau minimal
de performance énergétique. Ce seuil s'établit à 80
Kwh économisé par mètre carré chauffé et par
an.
Si l'ensemble de ces dispositifs permet de favoriser le
développement des CPE, ils ne sont pourtant pas suffisants. La
réglementation ainsi que les dispositifs encadrant les projets de
performance énergétique ne permettent pas aujourd'hui de
respecter les objectifs de réduction de la consommation établis
par les lois Grenelle1 et 2 et la réglementation européenne.
9 loi d'orientation sur l'énergie du 13
juillet 2005
10 Site internet du ministère du
développement durable <
http://www.developpement-durable.gouv.fr/-Certificats-d-economies-d-energie,188-.html>
11 Article le moniteur : <
http://www.lemoniteur.fr/201-management/article/actualite/20304243-certificats-d-economies-d-energie-doublement-des-obligations-pour-la-3e-periode>
13
Par ailleurs, les secteur est pénalisé par le
manque de clarté dans la volonté des pouvoirs publiques d'inciter
de manière effective le secteur de la performance
énergétique et le réticence des personnes publiques
à recourir aux contrats de partenariat (43 % de nouveaux contrats de
partenariats et assimilés en moins au 1er semestre 2012 par
rapport à 201112). Il est alors nécessaire de repenser
les mécanismes actuels, afin de relancer le développement des
CPE, notamment par la mise en place de financements adaptés.
2. LES DISPOSITIFS A FAVORISER AFIN DE
SOUTENIR LES CPE
Ainsi, divers études sont menées aujourd'hui
autour des CPE afin de relancer le secteur de la performance
énergétique. Un rapport très attendu d'Olivier Ortega et
Inèse Reinmann commandé par Philippe Pelletier, Président
du comité stratégique du Plan Bâtiment Grenelle devrait
dégager de nouvelles propositions notamment sur le plan financier.
D'autres études, menées notamment par
l'Institut de la Gestion Déléguée (IGD) en relation avec
le Centre d'Expertise Français pour l'Observation des Partenariats
Public-Privé (CEF-O-PPP) devraient déboucher elles aussi sur de
nouvelles solutions.
Parmi les solutions en cours d'élaboration, il est
possible d'envisager 2 axes de réflexion, autour des porteurs du
financement d'une part et des sources de financement d'autre part.
2.1. Diversifier les porteurs du financement :
Pour tout projet de partenariat public-privé au sens
large du terme, se pose initialement la question pour le pouvoir adjudicateur
de faire ou bien faire faire, c'est-à-dire d'externaliser ou non la
conception, la réalisation, l'exploitation, la maintenance mais aussi le
financement des projets. Différentes solutions innovantes font
progressivement leur apparition aujourd'hui.
2.1.1 Principes et porteurs du tiers financement
Parmi ces nouveaux modèles, celui du tiers-financement
semble avoir le vent en poupe.
Si la définition précise de ce concept ne
semble pas tout à fait arrêtée à l'heure actuelle,
la principale définition actuellement utilisée est celle du tiers
investissement, établie lors d'une étude menée
conjointement par la Caisse des Dépôts et des Consignations (CDC),
la Ville de Paris, la Région Ile-de-France et l'ADEME en
2009-201013, qui le défini comme un « mécanisme
(qui) consiste à faire financer une rénovation par un tiers,
lequel se rembourse
12 Derniers chiffres CEFOPPP disponibles sur le
site du CEFOPPP <
http://www.cefoppp.org/page.asp?ref_page=7531&ref_arbo=2176
>
13 Résumé disponible sur le site de la
Caisse des Dépôts
<
http://www.caissedesdepots.fr/fileadmin/img/03._developpement_durable/01._construire_la_ville_durable/livra
ble_synthese_etude_ti_cdc_v1-0.pdf>
14
en partie sur les économies d'énergies obtenues
grâce à cette rénovation et garantit contractuellement
l'amélioration de performance énergétique du
bâtiment.
Le groupe FIEE a proposé un modèle de
simulation (Annexe 1) de la rentabilité des projets (taux de
rentabilité interne) financés par un système de tiers
investissement, permettant de déterminer les conditions pour permettre
le développement d'une offre publique et d'une offre privée.
Ce mode de financement permet en fait de résoudre les
problèmes de trésorerie pour le pouvoir adjudicateur
(identifiés en première partie) et plus particulièrement
lorsqu'il demeure soumis à la loi MOP : cas des CREM notamment.
Par principe, le tiers financeur présente une
capacité à organiser l'investissement dans la rénovation
énergétique à moyen et long terme. Si aujourd'hui les
investisseurs ne considèrent pas que l'efficacité
énergétique soit un investissement de qualité d'autant
qu'il est à maturité longue, le tiers financement jouerait le
rôle d'un véhicule permettant aux investisseurs institutionnels
(SICAV, caisses de retraites, assureurs etc) d'acheter des créances
d'efficacité énergétique.
Pour améliorer les conditions de financement du
secteur de la rénovation énergétique avec un coût
faible (taux d'intérêt bas et maturité longue), il semble
nécessaire que les détenteurs de capitaux s'intéressent
aux créances issues de cette activité, tout en ayant confiance
dans ces investissements.
D'après le rapport d'Olivier Ortega : « ce
modèle devrait permettre la création et la structuration d'une
créance de qualité à partir du moment où les
sociétés de tiers financements prouveront que les prêts
pour financer la rénovation énergétique seront bien
remboursés. »
Par ailleurs, le rapport préconise la création
de tiers financeurs issus du secteur public afin d'amorcer le marché.
2.1.2. Le tiers financement par une société
publique dédiée :
En premier lieu, un tiers financement porté par une
société publique dédiée, que ce soit une SEM, une
SPL ou un groupement, présente l'intérêt de ne pas
rechercher une rémunération financière
élevée de son activité (rentabilité de l'ordre de 4
à 5 % à 10 ans).
Cette solution a notamment été envisagée
par la Région Rhône-Alpes, très en avance en terme de
développement du secteur de la performance énergétique.
Selon un schéma novateur, la région a
initié la constitution de la SPL « OSER », avec laquelle le
Conseil Régional accompagné par 11 collectivités a conclu
un BEA de valorisation, profitant d'une grande souplesse dans la
procédure de passation grâce à ce type de contrat.
15
Schéma simplifié d'une
opération en tiers financements
La SPL « OSER » est capitalisée à
hauteur de 5,29 millions d'euros, par un capital « d'entrée »
apporté par les collectivités proportionnellement à leur
nombre d'habitants et un capital « projet » permettant à la
SPL de disposer des fonds propres nécessaires à la mise en place
des projets.
Elle intervient non seulement en tant que maître
d'ouvrage mai aussi en tant que tiers investisseur. Ce montage innovant permet
à la SPL de préfinancer les études, les travaux et la
gestion du projet. Une fois les travaux de rénovation effectués,
la SPL perçoit, en contrepartie des charges supportées au titre
des travaux, des frais financiers et de la maintenance, des loyers
versés par les collectivités.
La comparaison entre la solution en loi MOP et celle avec la
SPL en tiers-investissement menée par la Région Rhône Alpes
(Annexe 2), démontre qu'il s'agit en principe d'un montage
sécurisant et performant pour les collectivités. D'un point de
vue financier, le lissage des dépenses dans le temps est permis
grâce au paiement différé. Le financement est d'autant plus
optimisé, que la solidité financière de la SPL permettra
l'accès à une ressource peu chère au moment
d'emprunter.
La SPL permettra donc d'apporter une offre régionale
complète aux collectivités pour la réalisation de leurs
projets de rénovation sur leur patrimoine. Un premier projet de
rénovation de collèges et lycées devrait être
lancé prochainement, qui devrait permettre d'initier d'autres projets de
performance sur le parc immobilier des collectivités membres de la SPL
dans le futur.
Cette tendance au recours à une société
dédiée semble progressivement se généraliser. Le 10
janvier 2013, 14 collectivités d'Ile-de-France pilotées par le
Conseil Régional, en association avec la Caisse des Dépôts
et avec la Caisse d'Epargne d'Ile-de-France, ont créé une SEM
16
dédiée à la rénovation
énergétique des logements collectifs et la production
d'énergies renouvelables.
La SEM intervient là aussi en tiers financement,
grâce à un capital de 5,32 millions d'euros. Elle proposera
à partir du second semestre 2013 une offre globale (ensemble technique),
elle pourra avancer au bénéficiaire l'investissement
nécessaire aux travaux et éventuellement inclure une garantie sur
la performance énergétique des travaux
réalisés14.
2.1.3. La technique de l'intracting
Ce mécanisme pour la première fois
expérimenté par la ville de Stuttgart en Allemagne s'inspire du
système de contracting (Tiers-financement) tout en opérant
exclusivement avec des fonds budgétaires municipaux. D'après une
fiche de cas publiée par Energie-Cités en collaboration avec
l'ADEME15, cette nouvelle approche expérimentée par
Stuttgart dès 1995 connaît un succès grandissant en
Allemagne et en Autriche.
Au sein de la municipalité de Stuttgart, le Service de
protection de l'environnement finance ses investissements en faisant appel
à ses propres titres budgétaires, dans lesquels entrent plus tard
les frais énergétiques économisés. D'où la
possibilité de créer un tel titre pour une période
limitée. Au fil du temps, ce titre budgétaire augmente
grâce aux économies accumulées, et des fonds
supplémentaires peuvent ainsi être dégagés
après une phase initiale de démarrage afin de financer d'autres
mesures dites d' « intracting ». Le Service de protection de
l'environnement octroie ainsi un crédit à taux zéro,
lié à une affectation spécifique, au Service technique.
La municipalité organise ensuite ses services afin
d'identifier clairement les acteurs du système et la chaîne de
responsabilités.
17
Modèle de financement « Intracting
»
D'après l'étude de cas, entre 1995 et 2001, 32
millions d'euros ont été investis en Allemagne et en Autriche
dans le cadre de 158 projets individuels. Le temps de retour moyen sur les
capitaux investis est actuellement de 4 ans et demi.
Ce schéma semble alors une alternative
intéressante aux CPE pour des collectivités souhaitant intervenir
sur des projets de rénovation et de performance
énergétique de plus petite envergure, grâce à ses
propres ressources et selon un système de financement
particulièrement sécurisé.
2.1.4. La création d'un fond d'investissement
public-privé pour l'efficacité énergétique
Que ce soit les initiatives de tiers financement, ou les
projets de performance énergétique dans leur ensemble, il semble
nécessaire d'établir une orientation des capitaux permettant la
réalisation des projets. En effet, la rénovation du
bâtiment est caractérisée par des temps de retour sur
investissement long, comparable à l'échelle du temps qui
prévaut dans le secteur immobilier.
Un investissement sécurisé nécessite
alors des capitaux à maturité longue et à
rentabilité faible.
Cependant, il semble de plus en plus contraignant pour les
établissements de crédit de financer ce type d'investissement,
car étant soumis à des règles plus strictes dont celles de
« Bâle III », peu favorables à l'obtention d'engagements
de maturité longue (au-delà de 10 ans). Pour autant, ce type
d'investissement est possible, à condition d'obtenir un soutien des
pouvoirs publics au départ, d'où l'idée de créer un
véhicule de refinancement public-privé pour l'efficacité
énergétique, proposé notamment par Olivier Ortega et
Inès Reinmann.
L'idée de la création d'une agence publique de
financement, indépendante de l'Etat et permettant l'accès
à une ressource peu chère a déjà fait l'objet de
nombreuses études. Ce type de structure existe avec succès depuis
de nombreuses années dans les pays du nord de l'Europe, et la crise a
accru leurs parts de marchés. En mutualisant les besoins d'emprunts des
collectivités, elle ferait en sorte que de nombreuses
collectivités puissent profiter du financement obligataire et profiter
de liquidités aux meilleurs taux16. Ces projets ont
récemment débouché sur la création de la Banque
Publique d'Investissement (BPI) le 31 décembre 201217.
Malgré une importante enveloppe de financement disponible grâce
à la Banque Postale, la BPI n'est pas en mesure de proposer aux
collectivités des emprunts de longue durée.
16 Christophe Hannequin, Pour un véhicule
public de financement des collectivités
17 Loi n°2012-1559 du 31 décembre 2012
relative à la création de la Banque publique d'investissement.
18
C'est pourquoi il pourrait être envisagé un
véhicule de refinancement public-privé dédié au
secteur de l'efficacité énergétique, avec une double
mission :
- Optimiser et accroître la ressource financière
en mutualisant les ressources actuellement disponibles auprès des
collectivités et en cherchant de nouvelles ressources, sans
accroissement de l'endettement public ;
- Accélérer le financement et le refinancement
des porteurs de projet d'efficacité énergétique, des
structures qui les portent et les entités qui y investissent ou les
financent.
Une condition d'efficacité serait la création
d'un véhicule de grande envergure, de portée nationale afin
d'attirer des investisseurs institutionnels de long terme, permettant
l'accès à des capitaux à maturité longue et
à faible risque.
Le groupe de travail a présenté l'exemple d'un
fonds disposant de 2 milliards d'euros de fonds propres constitués
grâce aux CEE, à la Caisse des dépôts, à des
financements européens (BET) et à la collecte de
l'épargne. Ce fonds permettrait de capitaliser 10 milliards d'euros en
émettant de nouvelles « obligations vertes ».
Principe de constitution et de structuration du
véhicule d'investissement18
Ce véhicule pourrait par la suite :
-refinancer des structures d'efficacité
énergétique (tiers financeurs) ;
18 Plan bâtiment durable
19
- refinancer des fonds régionaux ;
- refinancer des banques de détail et les banques
commerciales ; - financer directement de gros projets.
Fonctionnement du fond d'investissement pour la
rénovation énergétique19
Cependant, le gouvernement semble encore aujourd'hui peu
enclin à autoriser la création d'un véhicule
véritablement indépendant de l'Etat, géré
uniquement pour les collectivités et dans leur propre
intérêt.
2.2. Diversifier les sources de financement et
d'économies d'énergies
Grâce aux différents montages innovants
décrits en amont, de nouvelles perspectives en termes de financement. Le
secteur de la performance énergétique serait alors susceptible de
profiter de sources de financement à la fois variées et plus
sécurisées.
2.2.1 Le recours aux émissions obligataires :
Lorsqu'est évoquée la création d'un
fonds d'investissement des collectivités, l'un des intérêts
majeurs de ce véhicule serait de permettre à ces dernières
d'élargir leurs capacités de financements grâce aux
émissions obligataires.
Face à des financements bancaires plus rares et plus
chers, les marchés de capitaux peuvent présenter une solution
alternative permettant un accès compétitif et transparent aux
liquidités.
19 Plan Bâtiment Durable
20
Certaines collectivités importantes (ville de Paris,
département de l'Essonne) possèdent déjà leur
programme EMTN alors que d'autres réalisent des émissions Stand
Alone en nom propre (ville d'Aubagne, région Nord Pas de Calais etc) ou
en se regroupant.
Parmi les différents types d'émissions
obligataires possibles, ce véhicule permettrait de faciliter les
émissions publiques groupées. Il s'agit d'une émission
collective qui permet à des petites (ou grandes) collectivités de
se financer directement sur le marché.
Les avantages du recours au marché
désintermédié (avec l'aide d'une banque, mais qui ne joue
par le rôle d'intermédiaire) sont notamment de permettre
l'accès à un nombre plus important d'investisseurs, une plus
grande transparence des marges ainsi que des niveaux de financement meilleurs.
En outre, les collectivités bénéficient d'une totale
indépendance vis-à-vis des banques, évitant de souscrire
à des produits structurées potentiellement très rentables
mais surfacturés et mal maîtrisés par ces
dernières.
En « court-circuitant » les banques, les
collectivités accèdent directement aux investisseurs finaux
permettant l'accès à des conditions de financement très
favorables grâce, le cas échéant, à leur signature
AAA et de leur statut de collectivité locale française de premier
ordre.
Les émissions obligataires participent à la
diversification des ressources financières des acteurs publics, qui peut
être complétée par des prêts bonifiés afin de
parer en partie la crise de liquidité dont est victime le secteur
bancaire.
2.2.2. Le recours à des prêts
bonifiés
Dans le cadre des objectifs fixés par l'Europe en
matière d'environnement, de nombreux dispositifs ont été
mis en place par les institutions, dont le déblocage de
différents fonds destinés à financer entre autres les
projets de performance énergétique.
Généralement, il s'agit de mettre à
disposition d'établissements financiers ou bien même
d'entités publiques une ressource avantageuse, grâce à des
prêts bonifiés venant financer en partie des projets respectueux
de critères fixés au sein de conventions-cadres.
Surement le plus connu, le FEDER vise à renforcer la
cohésion économique et sociale au sein de l'Union
européenne en corrigeant les déséquilibres
régionaux. Doté de 201 milliards d'euros sur la période
2007-2013, il permet de réaliser des travaux de réhabilitation
énergétique pour 4% de l'enveloppe nationale soit environ 230
millions d'euros pour la France pour cette période. La Commission et le
Parlement sont aujourd'hui en pourparlers dans le but d'augmenter la part
réservée aux projets de performance énergétique.
La Commission a mis en place plusieurs entités de
soutien aux personnes publiques pour le développement de projets
relatifs à l'efficacité énergétique et aux
énergies renouvelables, dont le Mobilising Local Energy Investments
(MLEI) doté de 735 millions d'euros sur la période 2007-2013 et
l'European Local Energy Assistance (ELENA) doté de 97 millions d'euros
pour l'assistance à la mobilisation des investissements.
De même, la Banque Européenne d'Investissements
(BEI) ainsi que la Banque de développement du Conseil de l'Europe (BDCE)
mettent à disposition des établissements financiers
(Crédit Agricole, Banque Populaire, Crédit Coopératif etc)
des enveloppes thématiques destinées à financer des
projets d'énergie renouvelable. La BDCE met à disposition une
enveloppe spécifiquement dédiée aux projets de
rénovation énergétique.
La BEI quant à elle, propose l'accès à
des prêts bonifiés à la fois pour les établissements
financiers, mais aussi pour les collectivités dans le cadre de Plan
Energie Régionaux. Pour la première fois en Europe en 2009, la
BEI s'associait avec la Région Poitou-Charentes pour lancer le Plan
énergie solaire régional pour un investissement de 400 millions
d'euros. Depuis, ce type de financement s'est étendu à d'autres
secteurs (éolien, biomasse, performance énergétique) ainsi
qu'à d'autres régions en France et en Europe.
Il se trouve que dans le contexte actuel d'assèchement
des crédits, ce dispositif de prêts bonifiés s'avère
quasiment indispensable pour les collectivités pour le financement de
leurs projets d'énergies renouvelables et de performance
énergétique. Ce mécanisme constitue donc une solution
efficace pour diversifier et sécuriser les financements dans ce secteur,
méritant surement une médiatisation accrue auprès des
collectivités bénéficiaires ainsi que des acteurs du
secteur.
2.2.3. Favoriser la valeur verte
Parmi les mesures préconisées par le groupe de
travail « Financement innovants de l'efficacité
énergétique » figure l'émergence de la « valeur
verte » définie comme la « valorisation donnée à
un patrimoine aux performances énergétiques et environnementales
élevées par rapport à un autre patrimoine aux performances
énergétiques et environnementales plus faibles ».
Cette mesure est proposée en réponse à
un marché des biens immobiliers dont le prix est apprécié
au regard de leur performance énergétique encore insuffisant. Le
rapport suggère : d'adopter la définition légale
(ci-dessus) correspondant à celle de l' «immeuble responsable
» qui une fois identifié fera l'objet d'un système
d'incitation-sanction pour les propriétaires.
Le groupe de travail propose une obligation de
provisionnement pour ces travaux au moment de la vente, un bonus-malus ou
encore une incitation fiscale.
Si cette définition semble avant tout s'appliquer aux
logements ou aux immeubles tertiaires, l'idée de considérer une
valeur verte pour les bâtiments du domaine publique (qui peuvent
très bien faire l'objet d'un déclassement un jour où
l'autre), pourrait être reprise par les collectivités. Cette
valeur verte renforcerait finalement le dispositif du label
BBC-rénovation déjà présent dans les projets
d'amélioration de la performance énergétique
évoqués plus en amont.
2.2.4. Production d'électricité : panneaux
photovoltaïques, chaudières biomasses etcÉ
21
De plus en plus régulièrement, les projets de
performance énergétique associent des travaux
22
de rénovation avec la mise en place de systèmes
de production d'énergie (éoliennes, chaufferies biomasse,
panneaux photovoltaïques etc).
Par exemple, l'Université de Versailles Saint Quentin
en Yvelines a récemment signé un CPPE qui inclue des travaux de
rénovations mais aussi l'installation d'éoliennes et de panneaux
photovoltaïques montés sur les toitures des bâtiments.
Ce genre d'initiatives implique un investissement initial
plus lourd, cependant l'économie du projet s'en trouve
améliorée sur le long terme. Les bâtiments
bénéficient d'une baisse de leur consommation
énergétique et tendent à une autonomie
énergétique totale, voir un excédent pouvant être
revendu à condition de raccorder les installations au réseau
Electricité de France.
Ces recettes annexes présentent un grand
intérêt d'un point de vue économique et participent
à améliorer la rentabilité des projets.
Ainsi les collectivités et les autres pouvoirs
adjudicateurs se doivent constamment de réfléchir à
l'optimisation de leurs financements, ce qui implique de diversifier au maximum
leurs ressources.
CONCLUSION
Cette analyse de la situation actuelle du CPE permet de
constater un réel écart entre les textes et la mise en pratique
de ce type d'instrument. Divers freins, à la fois sur le plan juridique
et financier sont identifiés obstruant l'essor de cet outil pourtant
nécessaire à la mise en oeuvre des objectifs de réduction
des consommations énergétiques fixés pour les personnes
publiques.
Les pouvoirs adjudicateurs font face à des contrats
complexes et manquent à la fois d'informations et de moyens quant
à leur mise en place et leur application. Le rôle des
autorités publiques est donc de favoriser le recours à ces
contrats, ce qui implique non seulement une véritable volonté
politique, mais surtout l'adoption de dispositifs permettant de
généraliser leur accès.
Le travail d'observation mené par les
différents acteurs du secteur de la performance
énergétique a permis de dégager des solutions innovantes,
particulièrement par rapport aux modalités de financement des
CPE. Le principe du tiers-financement a fait ses preuves à
l'étranger, notamment dans les pays du nord de l'Europe. Certaines
Energy Saving Compagnies (ESCO) font leur apparition en France, et pourraient
demain financer des rénovations à rentabilité longue sur
le bâti. De même, l'idée de la création d'un fonds
permettant le financement commun de CPE pour les collectivités semble se
généraliser aujourd'hui, permettant de diversifier le recours
à de nouvelles sources de financement ces dernières.
23
De plus, cette réflexion autour du financement des
opérations de performance énergétique est menée
pour les autres types de CPE, dans le secteur du logement social ou des
rénovations pour les particuliers par exemple. Dans le secteur du
logement social, les problématiques à la fois foncières et
financières entravent là aussi le développement des CPE.
Un nouvel outil pour la commande publique est à envisager, permettant de
combiner les contributions publiques et les financements privés.
Il est donc à espérer que les conclusions sur
la transition énergétique permettent d'aboutir très
prochainement à l'adoption de dispositifs législatifs efficaces
et adaptés au secteur, permettant aux pouvoirs adjudicateurs de financer
des travaux nécessaires sur le plan environnemental, créateurs
d'emplois et bénéfiques pour les usagers.
24
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages :
· Christophe Hannequin, Pour un véhicule public
de financement des collectivités
· Avantages et inconvénients d'un contrat de
performance énergétique, Thèse de Laurent Gayral,
Université Paris Dauhpine, CGEMP, 2005 (p.142É)
Articles :
· Vincent Wisner, Les régions à l'heure
du tiers financement, site internet du centre de ressources du
développement territorial posté le 12-03-2013
· Adrient Pouthier, Performance
énergétique des bâtiments : quelle stratégie
pour éviter « l'effet rebond » ?, article par sur le Moniteur,
le 05 février 2013
· P. Pintat, Les marchés publics globaux
après la réforme, Revue Contrats Publics n °114,
octobre 2011 (p.159É)
· Présentation d'un montage innovant
réalisé par la ville de Stuttgart, fiche de cas
Energie-Cité/ADEME, 2002 (p194É)
Rapports :
· Les contrats de performance
énergétique, Rapport à Mme Koscuisko-Morizet,
Ministre de l'écologie, du développement durables, des transports
et du logement, Olivier Ortega, mars 2011
· Les financements innovants de l'efficacité
énergétique, rapport à Philippe Pelletier,
Président du comité stratégique du Plan Bâtiment
Grenelle, par Iness Reinmann et Olivier Ortega, mars 2013 (Rapport FIEE)
· Complexité des projets et recours aux contrats
de partenariat, le cas de CPE en France, Rapport du CEF-O-PPP par Eshien
Chong, Aude Le Lannier, Carine Staropoli.
· Guide du contrat de performance
énergétique, Commissariat Général du
Développement Durable, Ministère de l'écologie, de
l'énergie, du développement durable et de la mer, juillet 2010
25
Sites Internet :
·
http://www.developpement-durable.gouv.fr
·
http://www.lemoniteur.fr
·
http://www.cefoppp.org
·
http://www.caissedesdepots.fr
·
http://www.eib.org/?lang=fr
ANNEXE 1 : modèle de simulation de la
rentabilité des projets
financés par un système de
tiers investissement (rapport FIEE) :
Prix des rénovations énergétiques
(€/m2)
TRI 150 200 250 300 350 400 450 500 550 600
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#NO
0% 24% 15% 9% 5% 1% MBR
E!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
! #NOM BRE!
|
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
#DIV/0
!
|
5% 26% 16% 10% 6% 2% 0% #NOM
BRE!
10% 27% 17% 11% 7% 4% 1% #NOM
BRE!
%Subventio
ns
15% 28% 19% 12% 8% 5% 2% 0% #NOM
BRE!
20% 30% 20% 14% 9% 6% 3% 1% #NOM
BRE!
25% 31% 21% 15% 11% 7% 5% 2% 0% #NOM
BRE!
26
#NOM BRE!
30% 33% 23% 16% 12% 9% 6% 4% 2% 0% #NOM
BRE!
35% 34% 24% 18% 13% 10% 7% 5% 3% 1% 0%
40% 36% 25% 19% 15% 11% 9% 6% 5% 3% 1%
"#$% & '($$( %)%*+,( -(.#,( ,/- 0(, 1+.#$12,(, $13#-45/(,
6789 4)8-%: 0#)$ 7(-$%4)(, )( ,#)$ .%, 04-(7$(;()$ %..*47%<*(, ()
*=3$%$ 0/ 0-#4$ 8-%)>%4,9
Interprétation du tableau : considérant l'ensemble
du montage et des hypothèses retenues (cf.
P( , /@ 4)045/( QR ;.< .4 0,/ .3
ci-dessous), le taux de
rentabilité interne du projet obtenu pour des travaux dont le coût
est de
6: P 3 @ 045( 0 ? <
350€/m2 avec un taux de subvention de 20% est de 6%.
0= <* 0
Les cases surlignées en vert indiquent des TRI compatibles
avec une perspective ' .-(;4( 7%, $+.( .(;($ ( $4-( (, 7#)7*/,4),
,/%)$(d'investisseur privé (>10%). Les cases
surlignées en rouge indiquent des TRI compatibles
/$ 5 7F 0 ) @847%8 *% <*43 @* 0(
avec une perspective d'investisseur public (entre 5 et 10%). Les
cases en gris indiquent un
($ V $ 4*$4 *=$4$ 0=/ F$ 0 3E%$4 W GIIJKL / ; -$ 0
TRI nul ou négatif.
@%-%)$4- /)
27
ANNEXE 2 : comparaison qualitative
détaillée des montages
MOP/SPL par la Région
Rhône-Alpes :