Chapitre II - La résolution des litiges
rétrospectifs
173. Le conflit est rétrospectif lorsqu'il porte sur
une circoncision déjà intervenue. L'un des parents reproche
à l'autre d'avoir circoncis l'enfant sans recueillir son consentement
préalable. Ce grief sera présenté au juge dans le but de
voir sanctionner le comportement fautif du parent défendeur.
174. Le fait de circoncire l'enfant n'est pas, en soi, une
faute (au sens large c'est-à-dire source de responsabilité
délictuelle ou source d'une suppression ou d'une diminution des
prérogatives parentale). Peut en revanche être
considérée comme une faute au sens large le fait d'agir en
méconnaissance des règles de l'autorité parentale,
c'est-à-dire en violation de l'autorité de l'autre parent, soit
aussi en dépassement de pouvoirs. Ici le raisonnement est
différent de celui du chapitre précédent : il s'agit non
plus de prévenir une éventuelle circoncision non
désirée par un parent, comme c'était le cas dans les
litiges préventifs, mais de voir sanctionner une circoncision
effectuée en dépassement de pouvoirs.
175. S'intéresser à la manière dont les
juges traitent ces litiges rétrospectifs permet de répondre
à la question suivante : la règle dégagée par la
jurisprudence, selon laquelle la circoncision de l'enfant est un attribut de
l'autorité parentale s'exerçant conjointement par les deux
parents, fait-elle l'objet de sanctions ? Encore faut-il évidemment que
la règle soit suffisamment prévisible, et que les sanctions
prononcées soient proportionnelles.
176. Le grief invoqué par le parent demandeur
reprochant à l'autre parent d'avoir fait circoncire l'enfant
unilatéralement, en méconnaissance des règles de
l'autorité parentale, sera désigné par l'expression «
grief de circoncision ».
177. Le grief de circoncision est invoqué dans trois
séries d'actions : actions en divorce, actions en responsabilité
délictuelle et demandes de modification des modalités d'exercice
de l'autorité parentale. En réponse à ces trois
séries de demandes, les juges n'ont pas réussit à
dégager des solutions cohérentes. Il a simplement
été dégagé que le grief de circoncision ne permet
pas, à lui seul, de prononcer un divorce pour faute (section I). Le
contentieux fait en revanche transparaitre un balbutiement jurisprudentiel en
matière de responsabilité délictuelle (section II) et
d'exercice de l'autorité parentale (section III).
Section I - Le contentieux du divorce : l'absence de
faute au sens de l'article 242 du Code civil
178. La circoncision rituelle de l'enfant, ordonnée
par un parent, sans avoir préalablement recueilli le consentement de
l'autre parent, est-elle une faute cause de divorce au sens de l'article 242 du
Code civil ? La construction jurisprudentielle appelle à une
réponse négative. Cette fermeté des juges dans
l'appréciation de la faute cause de divorce en matière de
circoncision (II), s'explique par leur fermeté dans le domaine
48
plus général des pratiques religieuse (I).
I - Fermeté des juges en matière
religieuse
179. Les juges, en application de l'article 242 du Code civil,
exigent que soit rapportée la preuve de la réunion de tous les
éléments constitutifs de la faute (A). Cette exigence est la
même lorsque la faute reprochée à l'autre époux est
fondée sur sa pratique religieuse. Cette question, aussi délicate
soit-elle, ne fait pas exception à la règle (B).
|