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Le droit des sites et sols pollués, un cadre juridique rénové par la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové du 24 mars 2014

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par Morgane LACLAVETINE
IUP droit de l'urbanisme et de l'immobilier de Narbonne - Master 2 Droit de l"urbanisme et de l'envrionnement 2015
  

Disponible en mode multipage

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_SOMMAIRE

LISTE DES ABREVIATIONS UTILISEES 3

INTRODUCTION 3

CHAPITRE 1 : L'AMELIORATION DE L'INFORMATION RELATIVE AUX SITES ET SOLS POLLUES 9

SECTION 1 : LA CONSOLIDATION DE L'INFORMATION INSTITUTIONNELLE EN MATIERE DE SITES ET SOLS POLLUES 11

PARAGRAPHE 1 : LE RENFORCEMENT DU RECENSEMENT DES SITES ET SOLS POLLUES 12

A/ LES BASES DE DONNEES EXISTANTES AVANT LA LOI ALUR 12

B/ UNE NOUVELLE BASE DE RECENSEMENT DES SITES ET SOLS POLLUES CREEE PAR LA LOI ALUR : LES SECTEURS D'INFORMATION SUR LES SOLS (« SIS»). 14

1- La mise en place des SIS 15

2- Les effet emportés par le recensement d'un terrain dans un SIS 16

3- Le lien entre SIS et documents d'urbanisme 16

PARAGRAPHE 2 : L'INSTAURATION DES CARTE DES ANCIENS SITES INDUSTRIELS ET ACTIVITÉS DE SERVICE 17

SECTION 2 : LA CONSOLIDATION DE L'OBLIGATION D'INFORMATION EN MATIERE CONTRACTUELLE 19

PARAGRAPHE 1 : VENTE OU LOCATION D'UN TERRAIN POLLUE, UNE OBLIGATION D'INFORMATION PREEXISTANTE ET RENFORCEE PAR LA LOI ALUR. 20

A/ L'OBLIGATION LEGALES D'INFORMATION EN CAS DE VENTE D'UN TERRAIN POLLUE ANTERIEURE A L'ADOPTION DE LA LOI ALUR ... 21

B/ ... RENFORCEE PAR LA LOI DU 24 MARS 2014 ET ETENDUE AU CONTRAT DE LOCATION. 22

PARAGRAPHE 2 : LES CONSEQUENCES DE LA MÉCONNAISSANCE DE CETTE OBLIGATION 23

A/ LES SANCTIONS ENCOURUES EN CAS DE MECONNAISSANCE DE L'OBLIGATION D'INFORMATION CONTRACTUELLE DU VENDEUR/BAILLEUR D'UN TERRAIN POLLUE 24

B/ LES CONDITIONS NECESSAIRE A L'OBTENTION D'UNE REPARATION 25

CHAPITRE 2 : LES CHANGEMENTS APPORTES PAR LA LOI ALUR EN MATIERE DE REHABILITATION DES SITES ET SOLS POLLUES 27

SECTION 1 : TRANSFERT DES OBLIGATIONS DE REHABILITATION ET CHANGEMENT D'USAGE 29

PARAGRAPHE 1 : L'INTRODUCTION DE LA NOTION DE TIERS INTERESSE PAR LA LOI ALUR 29

A/ LA NOTION D'EXPLOITANT ET SON OBLIGATION DE REMISE EN L'ETAT 30

B/ LA NOTION DE TIERS INTERESSE ET L'OBLIGATION DE REMISE EN L'ETAT POUVANT LUI ETRE TRANSFEREE 31

PARAGRAPHE 2 : L'ENCADREMENT DU CHANGEMENT D'USAGE D'UN SITE POLLUE INITIE PAR UN TIERS 33

A/ LE POSSIBLE CHANGEMENT D'USAGE D'UN TERRAIN AVANT LA MISE EN PLACE DU NOUVEL ARTICLE L 556-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT : UN MANQUE D'ENCADREMENT JURIDIQUE. 34

B/ L'INSERTION D'UNE PROCEDURE DE CHANGEMENT D'USAGE A L'ARTICLE L. 556-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT. 35

SECTION 2 : LA HIERARCHISATION PRECISE DES RESPONSABLES DE LA REHABILITATION DES SITES ET SOLS POLLUES. 37

PARAGRAPHE 1 : LES RESPONSABLES DE PREMIER RANG DE LA REMISE EN ETAT DES SITES ET SOLS POLLUES 37

A/ LES RESPONSABLES DE PREMIER RANG SUR LES TERRAINS AYANT PRECEDEMMENT ABRITE UNE ACTIVITE INDUSTRIELLE 38

B/ LES RESPONSABLES EN CAS DE POLLUTION ISSUE DE DECHETS. 39

PARAGRAPHE 2 : LE RESPONSABLE A TITRE SUBSIDIAIRE 40

A/ LA CONSECRATION DU RESPONSABLE SUBSIDIAIRE PAR LA LOI ALUR... 41

B/ ... OU LA CONFIRMATION D'UNE JURISPRUDENCE CONSTANTE REAFFIRMEE RECEMMENT 42

CONCLUSION 45

BIBLIOGRAPHIE 47

LISTE DES ABREVIATIONS UTILISEES

Al. : Alinéa

AJDA : Actualité juridique du droit administratif

AJDI : actualité juridique du droit immobilier

Art. : Article

BASIAS : Base des Anciens Sites Industriels et Activités de Service

BASOL : Base de données sur les sites et sols pollués appelant une action des pouvoirs publics, à titre préventif ou curatif

BDEI : Bulletin de droit de l'environnement industriel

BO : bulletin officiel

BRGM : Bureau de Recherche Géologique Minière

CA : Cour d'appel

CAA : Cour administrative d'appel

CASIAS : Carte des Anciens Sites Industriels et Activités de Service

Cass. 3è civ : Arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cours de cassation

Cass : Cour de cassation

CC : Conseil Constitutionnel

CEAss : Arrêt d'assemblée du Conseil d'Etat

CE Sect. : Arrêt de section du Conseil d'Etat

CE : Conseil d'Etat

CJCE : Cour de justice de l'Union Européenne

DGPR : direction générale de la prévention des risques

DRIRE : Direction régionale de l'industrie et de la lumière

Gaz. Pal. : Gazette du palais

ICPE : Installation classée pour la protection de l'environnement

JO : Journal Officiel

Lebon : recueil des arrêts de droit administratif

Loi « ALUR » : Loi pour l'accès au logement et l'urbanisme rénové

MEDDE : Ministère de l'Écologie, du Développement Durable et de l'Énergie

RDI : Revue de droit immobilier

SIS : Secteur d'information sur les sols

TA : Tribunal administratif

QPC : Question prioritaire de constitutionnalité

INTRODUCTION

« Le sol a longtemps été considéré comme un milieu intermédiaire, dont la qualité dépendait principalement de celle des autres milieux qui l'influencent (air, eau). C'est sans doute cette propriété singulière qui explique l'émergence tardive de l'individualisation de la prise en compte du sol dans les politiques environnementales  (...) »1(*).

Comme le font ici remarquer les avocats spécialisés en droit de l'environnement que sont Jean-Pierre BOIVIN et Frédéric DEFRADAS, même si la problématique de la pollution des sites et sols existe depuis des décennies, les prémices d'un cadre juridique applicable en la matière se sont fait attendre et ne sont apparus que tardivement en comparaison à l'émergence de la pollution des sols.

Il est dans un premier temps important de délimiter le terme de sols pollués, qu'entend-on alors par là?

Au sens de la charte européenne des sols en date du 30 mai 19722(*), le sol est « un milieu vivant en dynamique qui permet l'existence de la vie végétale et animale. Il est essentiel à la vie de l'homme en tant que source de nourriture et de matière premières. Il est un élément fondamental de la biosphère et contribue, avec la végétation et le climat, à régler le cycle hydrologique et à influencer la qualité des eaux. »

Pour ce qui est de la définition des sols pollués précisément, nous retiendrons celle qui nous est fournie par le ministère chargé de l'environnement. Il s'agit en ce sens d' « un site présentant un risque pérenne, réel ou potentiel, pour la santé humaine ou l'environnement du fait d'une pollution de l'un ou de l'autre des milieux, résultant de l'activité actuelle ou ancienne ».

Les sols pollués présentent alors, en vertu de ces définitions, un danger non négligeable pour la santé humaine mais également pour l'environnement, pouvant affecter la faune et la flore. Il apparaît donc important de réglementer l'utilisation et la gestion de ces sites afin de limiter l'apparition de telles pollutions et les nuisances qu'elles emportent et le cas échéant, de les réhabiliter dans la mesure du possible.

En plus des conséquences que peuvent engendrer de telles pollutions, il faut relever que les sites pollués sont nombreux sur le territoire national. Il aurait été recensé environ 300 000 sites potentiellement pollués parmi lesquels, 4000 présenteraient une pollution avérée en France. Ces terrains se situent principalement dans le Nord pas de Calais et en Loraine, régions françaises ayant connu une forte concentration d'activités industrielles grandement nocives pour l'environnement ainsi que pour la sécurité et la santé publique.

La première réglementation concrète et notable relative aux sites et sols pollués est apparue suite à un arrêt du Conseil d'État rendu en 19973(*) . Ce dernier ne faisant que confirmer l'obligation de remise en l'état des sites et sols pollués issue d'un décret du 21 septembre 19774(*) fondé lui-même sur la loi du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement5(*) .

Suite à cela, l'État Français, auquel nous nous intéresseront exclusivement dans le cadre de ce devoir, a décidé de mettre en place une véritable politique de réhabilitation et de traitement des sites et sols pollués exprimée par l'édiction de plusieurs directives6(*) confirmées par une jurisprudence administrative et judiciaire audacieuse.

Le législateur a par la suite souhaité préciser cette politique en introduisant diverses mesures relatives aux sites et sols pollués dans le code de l'environnement par le biais de la loi du 30 juillet 20037(*). De plus, un chapitre spécifiquement dédié aux sites et sols pollués a été ajouté audit code et consacré par l'ordonnance du 17 décembre 20108(*). Pour autant, ce chapitre n'était jusqu'à récemment quepeu fourni puisque composé du seul et unique article L. 556-1.

La dernière évolution notable de la règlementation relative aux sites et sols pollués, antérieurement à la mise en place du nouveau régime que nous allons étudier dans le cadre de ce mémoire, résultait d'une volonté de modernisation de cette dernière traduite par la prise de quatre circulaires du 8 février 2007.

Après avoir étudié brièvement les dispositions françaises règlementant le droit des sites et sols pollués jusqu'alors, il nous est possible de constater que ce dernier s'est principalement développé par le biais de circulaires et qu'aucun texte législatif à proprement parlé n'avait encore été réellement mis en place.

Notons également que, face à la multiplicité de ces textes et à leur imprécision, le droit applicable aux sites et sols pollué pouvait être qualifié d'épars et d'incomplet. Il était en effet « perçu comme une spécialité technique et complexe (...) »9(*).

De plus, le droit des sols s'est principalement développé autour de la police des installations classées pour la protection de l'environnement même s'il puise dans divers autres types de polices administratives. Il ne faisait par conséquent l'objet d'aucune disposition textuelle distincte et propre.

« En effet, pris en étau entre le droit des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) et le droit des déchets, la question des sites et sols pollués avait bien du mal à s'émanciper de ces tutelles »10(*).

C'est à ce manque de précisions juridiques et d'existence d'un régime indépendant concernant les sites et sols pollués qu'est venu répondre récemment la loi pour l'accès au logement et l'urbanisme rénové11(*).

Cette loi a été introduite en conseil des ministres par Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement alors en fonction, le 26 juin 2013. Cependant, elle n'a été adoptée que l'année suivante. En effet, la loi dite « ALUR » a fait l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité déposée devant le Conseil Constitutionnel le 24 Février 2014 par plus de 60 députés et 60 sénateurs. Dans sa décision QPC en date du 20 mars 201412(*), le Conseil Constitutionnel en tranché en déclarant l'essentiel de la loi ALUR conforme à la constitution permettant ainsi sa promulgation quatre jours plus tard.

La loi du 24 mars 2014 a pour objectif principaux de tenter de remédier à la forte augmentation des prix des logements ainsi qu'au manque d'offres de logements sur le marché Français. Pour ce faire, la loi ALUR réforme en profondeur le droit de l'urbanisme et de l'aménagement en prenant diverses mesures relatives aux documents d'urbanisme et de planification notamment.

Ce texte, fourni dont les dispositions influencent de nombreux domaine comporte en son sein des mesures relatives au droit des sites et sols pollués. Ces dispositions, moins mise en avant que d'autres n'en demeure pas moins importantes.

La loi du 24 mars 2014 a en effet apporté des changements notables au régime des sites et sols pollués. Ces mesures émanent de l'article 84 bis de ladite loi, devenu par la suite l'article 173 de la loi ALUR et ont été introduites dans le code de l'environnement sous la forme de « nouvelles dispositions qui fournissent aux acteurs, maire, propriétaire, exploitant ICPE, aménageur, ou promoteur, un cadre rénové pour leurs opérations »13(*).

Cependant, l'aboutissement de la mise en place de ces mesures n'a pas été des plus aisés. De fait, face à l'ampleur des enjeux qu'elles revêtaient, le législateur restait hésitant quant à leur promulgation.

En effet, aucune référence aux sites et sols pollués n'avait à la base été retenu dans le premier projet de loi ALUR soumis à l'examen de l'Assemblée nationale le 26 juin 2013 malgré l'existence de plusieurs rapports mettant en avant la nécessité de mettre en oeuvre de nouveaux mécanismes et de légiférer en la matière afin d'instaurer un véritable droit des sols pollués indépendant des autres régimes déjà cités. Soulignant ainsi l'urgence d'intervenir dans le but de fournir de meilleurs outils de gestion aux acteurs du secteur.

Malgré cette absence de référence aux sites et sols pollués dans le projet de loi ALUR présenté à l'assemblée nationale, le Sénat qui a toujours été en faveur de l'instruction de telles dispositions a adopté en première lecture, un amendement défendu par le sénateur Van Dierendonck proposant d'insérer un article 84 bis, portant directement sur cette thématique, au projet de loi.

Cet amendement a finalement été examiné puis adopté en commission mixte paritaire et a été intégré à la loi ALUR.

« Quelle bataille! Quelle détermination aura été nécessaire à l'adoption, au sein de la loi ALUR, du fameux article 173 relatif aux sites et sols pollués »14(*).

Ces mesures, objet de plusieurs mois de réflexion de la part du ministère de l'Écologie, envieux de clarifier les règles applicables à la gestion des sols pollués ont donc mené à l'adoption de dispositions spécifiquement consacrées à la gestion de tels sites. Ce qui permet alors de fournir un socle technique commun à l'ensemble des opérations applicables aux sites et sols pollués ainsi qu'une « vue d'ensemble » aux différents acteurs du milieu. Ces dispositions ont ensuite été confirmées par plusieurs jurisprudences sur lesquelles nous nous pencherons également au fil du présent devoir.

Cette nécessaire modernisation de la législation applicable aux sites et sols pollués revêtait non seulement un véritable enjeu environnemental d'un point de vue de la santé publique et dangers environnementaux mais elle a aussi sous entendait également d'importantes répercussions en droit de l'urbanisme. En effet, le contexte actuel étant l'urbanisation du territoire, les villes s'étendent rapidement.

Cependant, cette croissance urbaine se heurte au manque d'espaces à urbaniser. Ainsi nombreux sont les acteurs de la tendance à l'urbanisation ont véritablement pris conscience du potentiel foncier que représentaient les terrains industriels désaffectés et se sont par conséquent tournés vers la reconversion des friches industrielles. Il s'agit alors de réhabiliter des espaces industriels déstructurés, hérités du déclin de certaines activités industrielles, désormais inutilisés et laissés à l'abandon. Ces derniers étant très souvent touchés par la pollution, ils nous intéresseront particulièrement dans le cadre de notre étude.

Il convient dorénavant de se poser la question suivante : Quelles sont les avancées les plus marquantes opérées ALUR en matière de sites et sols pollués ?

Dans un premier temps, il est possible de constater que la loi du 24 mars 2014 renforce l'information relative aux sols pollués en créant des secteurs dédiés, les « secteurs d'information sur les sols » (SIS), renforçant de la sorte les liens entre sols pollués et autorisations d'urbanisme (Chapitre 1).

Dans un second temps, elle réorganise la prise en charge de la remise en état des sols pollués et remet au clair la hiérarchie des responsables de l'obligation de réhabilitation encourageant ainsi à la réhabilitation des sites et sols pollués (Chapitre 2).

CHAPITRE 1 : L'AMELIORATION DE L'INFORMATION RELATIVE AUX SITES ET SOLS POLLUES

La nécessité d'information quant à l'existence potentielle ou avérée d'une pollution sur un terrain donné n'est pas une préoccupation nouvelle. Il est possible de retrouver des inventaires de ce type dès 1978.

En effet, l'État français a rapidement souhaité mettre en place une politique de prévention. Nous pouvons ici penser à l'adage connu « mieux vaut prévenir que guérir » (sous-entendu mieux vaut éviter un ennui que d'être obligé d'y remédier) qu'applique ici l'État préférant de la sorte prévenir une pollution éventuelle et/ou empêcher son accroissement en prenant les précautions nécessaires plutôt que de devoir procéder à une réhabilitation longue et coûteuse.

Pour cela, l'Etat se fonde sur le principe de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement15(*). Selon ce dernier, il est souhaitable de mettre en place des actions à priori dans le but de prévenir l'apparition des pollutions ou de limiter leur extension.

Cependant, lorsque l'évitement de telles pollutions ou de leur étendue s'avère impossible, il est important de mener une campagne d'information quant à l'état des sites pollués afin de prévoir les mesures particulières qui devront être prises concernant ces sites et leur éventuelle réhabilitation ou utilisation.

Cette information passera dans un premier temps par le biais d'une démarche de recensement visant « à connaître et à faire connaître l'état des pollutions des sites »16(*) afin que des politiques de traitement puissent être menées. La connaissance de ces lieux et de leur état doit donc être actuelle et diffusée. Ce rôle de diffusion est rempli par plusieurs bases de données régulièrement actualisées qui jouent un rôle d'alerte et de mise en garde, tant pour les autorités en charge de l'environnement et de l'urbanisme que pour les acteurs privés intervenant sur des sites et sols pollués.

Alors qu'il existait plusieurs bases de données recensant les sites et sols pollués Français préalablement à l'adoption de la loi ALUR du 24 mars 2014, cette dernière est venue compléter le régime en instaurant une nouvelle base de données notamment et en créant un instrument destiné à sectoriser le territoire national et à accroître les connaissances sur ces sols d'autre part (Section I).

Dans un deuxième temps, nous verrons que l'obligation d'information quant à la pollution des sites n'existe pas que dans la sphère publique (de l'Etat aux administrés comme nous l'avons vu ci haut) mais qu'elle existe également dans la sphère privée étant entendu de particulier à particulier. L'Etat d'un site étant une donnée essentielle permettant d'apprécier l'aptitude à la destination de ce dernier et à évaluer les travaux à entreprendre notamment, la campagne d'information quant à l'état des sites et sols pollués est également retranscrite par l'obligation opposée aux vendeurs et bailleurs de terrains pollués de transmettre toute information relative à l'état du sol à de potentiels acquéreurs ou locataire. Cette obligation qui préexistait à la loi ALUR se trouve renforcée par cette dernière

(Section 2).

SECTION 1 : LA CONSOLIDATION DE L'INFORMATION INSTITUTIONNELLE EN MATIERE DE SITES ET SOLS POLLUES

Comme dit précédemment, les premières bases de recensement des sites et sols pollués sont apparues dès 1978. Suite à cela, d'autres textes, principalement des circulaires17(*)ont fait leur apparition en reprenant cette nécessité de recenser les sites et sols pollués. Ces textes ont ensuite tous été abrogés par la circulaire du 8 février 2007 intitulée « modalités de gestion et de réaménagement des sites pollués ».

La loi «  Grenelle II » du 12 juillet 201018(*) a également apporté des compléments à la législation relative aux sites et sols pollués en insérant l'article  L. 125-6 dans le code de l'environnement. Ce dernier indiquait alors que l'État devait rendre publiques « les informations dont il dispose sur les risques de pollution des sols ». Selon cette disposition, l'Etat se voit dans l'obligation de transmettre des informations actualisées concernant la pollution des sols sur le territoire national. Il est par conséquent amené à se renseigner et à mener des campagnes régulières afin de rendre ses connaissances en la matière actuelles et de pouvoir les divulguer au public.

Par la suite et plus récemment, la loi ALUR a pris le relais en modifiant l'article L. 125-6 du code de l'environnement. Elle introduit en effet dans ce dernier la notion de « secteurs d'information sur les sols », base de donnée nouvelle, toujours tenue par l'Etat, qui recensera « les terrains où la pollution des sols telle qu'elle est connue justifie la réalisation d'études de sols et de mesures de gestion de la pollution pour préserver la sécurité, la santé ou la salubrité publiques et l'environnement » (Paragraphe 1).

Par ailleurs, la loi pose également comme obligation pour l'Etat de publier une carte des anciens sites industriels et activités de services (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : LE RENFORCEMENT DU RECENSEMENT DES SITES ET SOLS POLLUES

Comme vu ci haut, l'État Français, afin de respecter le code de l'environnement se doit de transmettre au public les informations dont il dispose au sujet des sites et sols pollués et de leur état précis. Pour cela, l'administration utilise des bases données recensant ces informations.

Il s'agit d'outils permettant de centraliser les informations relatives à ces sites. Ces dernières sont recueillies par la direction générale de la prévention des risques dépendante du ministère en charge de l'environnement qui les retranscrit sur des sites accessibles en ligne dont le traitement est automatisé. Le but de cette transmission de connaissances est d'améliorer la gestion des sites pollués et leur réhabilitation. Cela permet de choisir avec soin les actions qui seront menées sur ces terrains dans le but de prévenir les nuisances et risques que pourrait engendrer leur pollution. Cela permet également de pouvoir mener plusieurs analyses comparatives quant à l'état des sols.

La loi ALUR est venue compléter le système de recensement des sites et sols pollués en ajoutant aux deux principales bases de données, identifiables avant le 24 mars 2014 (A), un inventaire supplémentaire nommé « secteurs d'information sur les sols » ((B)

A/ LES BASES DE DONNEES EXISTANTES AVANT LA LOI ALUR

Il existait avant 2014 deux principales bases de données recensant les sites et sols pollués du territoire national.

Tout d'abord, la base de données dite BASOL portant sur « les sites et sols pollués ou potentiellement pollués appelant une action des pouvoirs publics,
à titre préventif ou curatif. ». On retrouve inventoriés au sein de cette base des sites et sols pollués situés en France connus depuis 1994.

Elle a pour but de permettre aux administrés de connaître les actions menées par l'État destinées à limitée l'extension ou la survenance de pollution sur des sites pollués ou potentiellement pollués.

Elle est consultable sur le site Internet du Ministère de l'Écologie, du Développement Durable et de l'Énergie et est actualisée de manière régulière puisqu'elle est mise à jour tous les trois mois. Les informations contenues dans cette base BASOL sont recueillies par les préfectures et lesDirections régionales de l'industrie et de la lumière.

Cet outil représentait, jusqu'à l'apparition des SIS que nous étudierons plus bas, la seule base de donnée recensant les sites actuellement pollueurs ou potentiellement polluants.

En effet, la seconde base de donnée majeure identifiable avant le 24 mars 2014 n'informe que sur les sites ayant fait l'objet d'activités industrielles. Il s'agit de la base de donnée dite « BASIAS » (Base des Anciens Sites Industriels et Activités de Service), créée par un arrêté ministériel en date du 8 décembre 1998. Les données communiquées par la base BASIAS sont, comme celle de la base BASOL, publiques et consultables à plusieurs endroit à savoir ; en préfecture et en mairie, dans les services géologiques régionaux du Bureau de Recherche Géologique Minière, sur Internet.

L'inscription d'un site dans cette base de recensement ne permet pas directement d'informer les tiers sur l'état de la pollution qui le touche mais simplement de porter à leur connaissance un inventaire des anciens sites industriels et activités de service. Il s'agit d'un recensement permettant de garder en mémoire l'utilisation dont a fait l'objet tel ou tel site. C'est ce qui permet de différencier les outils de recensement BASOL et BASIAS.

Cependant, malgré cette divergence, les deux outils peuvent être qualifiés de complémentaires. En effet, lorsqu'un site n'appelant plus d'action de la part des pouvoirs publics et n'a donc plus vocation à entrer dans la base de donnée BASOL, il est aussitôt transférés dans la base de recensement BASIAS.

Enfin, comme le souligne Jean-Pierre LEBRETON19(*) ces outils « ont la qualité d'inventaire sans opposabilité juridique ; il n'a pas été établi de lien avec les pouvoirs d'intervention de l'administration, notamment en matière de planification urbaine et de réglementation de l'usage des sols ».

C'est notamment ce lien avec la dimension urbanistique qu'est venu renforcer la loi initié par Cécile DUFLOT en modifiant ainsi l'article L. 125-6 du code de l'environnement20(*).

B/ UNE NOUVELLE BASE DE RECENSEMENT DES SITES ET SOLS POLLUES CREEE PAR LA LOI ALUR : LES SECTEURS D'INFORMATION SUR LES SOLS (« SIS»).

L'instauration des SIS est sans doute la mesure majeure émanant de la loi ALUR au sujet des sites et sols pollués. Initialement, ces secteurs d'information étaient dénommés « zones de vigilance » mais le terme de « secteurs d'information sur les sols » a finalement été préféré car jugé plus neutre21(*).

Leur création était nécessaire dans la mesure où « Le législateur ne pouvait se suffire de bases de données répertoriant les sites, simples instruments de connaissance entre les mains de l'administration concernée ; il devait organiser une procédure d'identification dans le cadre de laquelle interviennent les parties prenantes »22(*).

Les modalités de création de cette base ainsi que les effets emportés par cette dernière sont définis à l'article précité du code de l'environnement et attendent encore d'être précisés par un décret en conseil des ministres.

1- La mise en place des SIS

« Le représentant de l'Etat dans le département recueille l'avis des maires des communes sur le territoire desquelles sont situés les projets de secteur d'information sur les sols et, le cas échéant, celui des présidents des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière d'urbanisme. Il informe les propriétaires des terrains concernés.

Les secteurs d'information sur les sols sont arrêtés par le représentant de l'Etat dans le département. ». C'est ce que nous précise l'article L 125-6 du code de l'environnement.

L'État jouant déjà un rôle essentiel en termes de gestion des sites et sols pollués comme nous l'avons vu précédemment, voit ainsi ses prérogatives étendues en la matière puisqu'il lui revient de créer les SIS. C'est le préfet qui prendra l'initiative et qui arrêtera la création d'un tel secteur après consultation des autorités administratives compétentes en matière d'urbanisme. Les propriétaires de bien fonciers pollués doivent également être avertis si la création d'un SIS vient à affecter leur terrain.

Pour ce qui est des terrains concernés, la loi fait référence aux «  terrains où la connaissance de la pollution des sols justifie (...) la réalisation d'études de sols et de mesures de gestion de la pollution pour préserver la sécurité, la santé ou la salubrité publiques et l'environnement. ». Doivent donc être compris dans les SIS les sites dont la pollution avérée est susceptible d'engendrer un danger justifiant l'adoption de mesures particulières à son égard.

Notons également que la délimitation de ces secteurs dépend au sens du code de l'environnement des connaissances que possède l'État sur les sites et sols pollués. Il n'est donc pas invité à procéder à une recherche de ces sites mais simplement à communiquer les données dont il dispose à leur sujet.

2- Les effet emportés par le recensement d'un terrain dans un SIS

Au sujet des obligations découlant de la création des SIS, nous remarquons que ces derniers ont une fonction d'information, de porter à connaissance comme cela était déjà le cas pour les bases de données BASOL et BASIAS. Cependant, les SIS ont un rôle supplémentaire dans la mesure où ils permettent d'imposer des précautions et des mesures particulières à prendre pour tout projet envisagé sur un des sites pollués recensé en leur sein. Lorsqu'un terrain est touché par un SIS, une étude des sols devra être menée dans le but d'établir les mesures de gestion de la pollution propres à assurer la compatibilité entre l'usage futur et l'état des sols23(*). Cette étude devra être menée par un bureau d'étude certifié préalablement à toute opération de construction. Cette mesure constitue par conséquent une restriction au droit de propriété emportant des effets assimilables à ceux des servitudes.

De plus, l'une des principales obligations découlant de l'affectation d'un terrain par un SIS est celle qui revient au propriétaire de ce terrain lorsqu'il veut céder ce dernier ou bien le louer. En effet, comme nous le verrons plus en détail dans la suite de ce devoir, les vendeurs ou bailleurs des biens immobiliers concernés voient leur obligation d'information contractuelle renforcée.

3- Le lien entre SIS et documents d'urbanisme

 « Les secteurs d'information sur les sols sont indiqués sur un ou plusieurs documents graphiques et annexés au plan local d'urbanisme ou au document d'urbanisme en tenant lieu ou à la carte communale. ». Selon cette disposition, les documents d'urbanisme devront impérativement mentionner l'existence potentielle de SIS sur le territoire de la collectivité qu'ils recouvrent. Ceci permet un renforcement de l'information quant aux sols pollués dans la mesure où auparavant, les connaissances relatives à ces sites devaient simplement être prises en compte dans les documents d'urbanisme. Elles n'y étaient pas annexées ni mentionnées.

Ce rapprochement entre la dimension urbanistique et les sites et sols pollués est également assuré par un second dispositif créé par la loi ALUR il s'agit de la carte des anciens sites industriels et activités de service (CASIAS) que nous allons dorénavant étudier.

PARAGRAPHE 2 : L'INSTAURATION DES CARTE DES ANCIENS SITES INDUSTRIELS ET ACTIVITÉS DE SERVICE

C'est toujours au sein de l'article L 125-6 du code de l'environnement que nous retrouvons la mention de ces cartes. Ce dernier indique que « L'État publie, au regard des informations dont il dispose, une carte des anciens sites industriels et activités de services. Le certificat d'urbanisme prévu à l'article  L. 410-1 du code de l'urbanisme indique si le terrain est situé sur un site répertorié sur cette carte ou sur un ancien site industriel ou de service dont le service instructeur du certificat d'urbanisme a connaissance »24(*).

Cette carte, dont le nom est rapproché de la base de donnée BASIAS traitera par conséquent des même sites. Mais, alors que BASIAS opère simplement un recensement de ces derniers, la carte des anciens sites industriels et activités de service sera une véritable cartographie de ces sites permettant ainsi de les situer géographiquement. Il sera donc possible grâce à cette carte dévaluer les régions comportant le plus grand nombres de friches industrielles dont le sol est pollué par exemple.

La Carte des anciens sites industriels et activités de service peut donc être perçues comme la consécration juridique et le pendant de la base de données BASIAS.

Nous remarquons également que si un projet de construction est envisagé sur un terrain présent sur cette carte, le certificat d'urbanisme éventuellement demandé et délivré à cette occasion devra en faire mention.

Ainsi, nous constatons que l'objet principal de cette mesure semble traduire la volonté du législateur d'intégrer l'information environnementale dans les renseignements d'urbanisme fournis par les communes.

Les autorités délivrant le certificat d'urbanisme pourront par conséquent tenir compte de la présence du terrain en question sur cette carte pour décider si elles délivreront un certificat d'urbanisme positif ou bien négatif dans le cas de la demande d'un certificat d'urbanisme opérationnel.

Cependant, rappelons que le certificat d'urbanisme n'est pas un document obligatoire, même s'il est conseillé d'en demander un préalablement à toute opération de construction, et qu'il s'agit simplement d'un document d'urbanisme informant sur les possibilités de réalisation d'un projet et sur les règles d'urbanisme applicables au terrain en question25(*). Ce n'est donc pas un document contraignant d'un point de vue juridique.

Tout comme en ce qui concerne les secteurs d'information sur les sols, c'est l'État qui est chargé de répertorier et de cartographier les sites sur l'outil CASIAS et ce, toujours « au regard des informations dont il dispose ».

Enfin, les modalités d'élaboration et de gestion de cette carte ainsi que les répercussions qui découleront de la mise en place de cette carte seront précisées par décret en Conseil d'État.

Nous remarquons que par l'introduction de ces dispositifs, la loi ALUR a souhaité renforcer l'information institutionnelle qui existait déjà au sujet des sites et sols pollués. Cependant, il ne s'agit pas de la seule obligation d'information qu'elle est venue consolider. En effet, la loi du 24 mars 2014 a également entendu modifier le régime applicable à l'obligation d'information contractuelle en matière de sites et sols pollués. C'est ce que nous allons dès maintenant voir.

SECTION 2 : LA CONSOLIDATION DE L'OBLIGATION D'INFORMATION EN MATIERE CONTRACTUELLE

Nous allons maintenant nous intéresser au cas de la vente ou de la location par son propriétaire d'un terrain pollué ou potentiellement pollué. Cette vente ou cette location faisant bien sur l'objet d'un contrat, il en découle des obligations pour chaque partie signataire.Même s'il est possible d'identifier des obligations propres aux contrats de location et d'autres, différentes, propres aux contrats de vente, nous ne distinguerons pas ici les deux types de relations contractuelles.

Pour commencer, les propriétaires de terrains peuvent être tenus de remettre ces biens immobiliers en l'état préalablement à toute location ou vente de ces derniers.

Cela sera le cas lorsque le propriétaire est considéré comme le dernier exploitant débiteur de l'obligation légale de remise en l'état. Si cette obligation ne se trouve pas respectée, le vendeur/bailleur pourra voir sa responsabilité civile engagée sur le fondement de l'article 1382 du code civil26(*).

Outre cette obligation, le propriétaire qui vend ou loue son bien est bien entendu tenu de délivrer ou de mettre à disposition la chose objet du contrat27(*).

Enfin, en application de l'article 1641 du code civil, le vendeur est tenu de garantir l'acquéreur contre les vices cachés28(*), garantie qui permet à l'acquéreur d'être protégé de tout défaut qui n'aurait pas été révélé au moment de la vente et qui serait susceptible de rendre impropre le bien à la destination qui lui était réservée ou bien qui diminuent fortement sa valeur, ce sont des défauts cachés qui auraient pu être de nature à dissuader l'acquéreur d'acheter le bien.

Pour terminer, il existe une obligation d'information du vendeur/bailleur à l'égard de l'acquéreur/locataire. Nous allons maintenant nous attarder plus précisément et longuement sur cette dernière car, en matière de vente/location de terrains pollués, cette obligation a été renforcée par la loi ALUR du 24 mars 2014 (Paragraphe 1) et le non-respect de cette dernière n'est pas sans conséquences (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : VENTE OU LOCATION D'UN TERRAIN POLLUE, UNE OBLIGATION D'INFORMATION PREEXISTANTE ET RENFORCEE PAR LA LOI ALUR.

« Depuis plusieurs années, l'environnement occupe une place déterminante dans le cadre des ventes de terrains sur lesquels une activité susceptible d'avoir généré des impacts a été exercée. » nous disent Jean-Pierre BOIVIN et Frédéric DEFRADAS29(*).

En effet, l'acquéreur/locataire comme le vendeur/bailleur ont intérêt à tous deux se renseigner sur l'état de pollution du terrain objet d'une transaction immobilière et ce afin de connaitre les frais qu'une éventuelle réhabilitation engendrerais pour le potentiel acheteur/locataire ainsi que pour vérifier la compatibilité du terrain avec la destination envisagée d'une part et pour permettre la sécurisation de la vente du coté du vendeur/bailleur d'autre part.

C'est ainsi dans cette logique que la loi ALUR est venue renforcer (B) l'obligation d'information quant aux connaissances sur la pollution potentielle ou avérée d'un terrain en vente ou en location qui existait déjà en matière de vente (A).

A/ L'OBLIGATION LEGALES D'INFORMATION EN CAS DE VENTE D'UN TERRAIN POLLUE ANTERIEURE A L'ADOPTION DE LA LOI ALUR ...

Dans un premier temps, le vendeur se doit de respecter l'obligation d'information imposée par l'article L 514-20 du code de l'environnement selon lequel « Lorsqu'une installation soumise à autorisation ou à enregistrement a été exploitée sur un terrain, le vendeur de ce terrain est tenu d'en informer par écrit l'acheteur ; il l'informe également, pour autant qu'il les connaisse, des dangers ou inconvénients importants qui résultent de l'exploitation. (...) ».

En outre, il est également spécifié au sein de cet article que le vendeur doit informer l'acquéreur de l'éventuelle manipulation ou de l'éventuel stockage de substances chimiques ou radioactives ayant eu lieu sur le terrain objet de la cession.

« L'acte de vente atteste de l'accomplissement de cette formalité ».

Notons que cette obligation n'est pas applicable aux terrains sur lesquels une installation soumise au régime déclaratif a été exploité30(*), ni dans l'hypothèse ou l'installation est encore en activité à la date de la vente31(*).

Le vendeur est donc tenu de signaler les dangers et inconvénients résultant de l'ancienne exploitation du terrain mais uniquement en vertu des faits dont il a connaissance.

Deuxièmement, tout vendeur de terrain pollué est soumis à l'article L 512-18 du code de l'environnement32(*). Cet article précise que « Le dernier état réalisé -sous-entendu le dernier état de pollution du site objet du contrat- est joint à toute promesse unilatérale de vente ou d'achat et à tout contrat réalisant ou constatant la vente des terrains sur lesquels est sise l'installation classée. ». Le propriétaire est donc tenu de mettre à jour régulièrement l'état de pollution de son terrain et donc, de l'actualiser dès lors qu'une modification aurait pu engendrer un changement de cet état.

Enfin, il existe une dernière obligation d'information notable que nous relèverons ici et à laquelle le vendeur d'un terrain pollué ne peut se soustraire. Il s'agit de celle mise en place par l'article L125-7 issu de la loi ALUR du 24 mars 2014.

B/ ... RENFORCEE PAR LA LOI DU 24 MARS 2014 ET ETENDUE AU CONTRAT DE LOCATION.

Depuis l'entrée en vigueur de la loi ALUR, le code de l'environnement dispose en son article L 125-733(*) que « (...) lorsque les informations rendues publiques en application de l'article  L. 125-6 font état d'un risque de pollution des sols affectant un terrain faisant l'objet d'une transaction, le vendeur ou le bailleur du terrain est tenu d'en informer par écrit l'acquéreur ou le locataire. Il communique les informations rendues publiques par l'Etat, en application du même article L. 125-6. (...) »

En effet, le propriétaire d'un terrain potentiellement pollué ou touché par une pollution avérée se doit d'informer tout acquéreur ou locataire lorsque ce site est situé dans le périmètre d'un secteur d'information sur les sols ou qu'il figure sur la carte des anciens sites industriels et activités de service.

Cette formalité doit être accomplie par écrit et « L'acte de vente ou de location atteste de l'accomplissement de cette formalité. ». Elle doit donc obligatoirement être remplie et justifiée faut de quoi le vendeur/bailleur pourra voir sa responsabilité engagée, ce que nous verrons un peu plus tard.

Cependant, observons que le vendeur/bailleur est simplement tenu de relayer les informations rendues publiques par l'Etat, informations que l'acquéreur/locataire peut aisément retrouver et consulter pour s'assurer de la bonne foi du vendeur et du respect de cette obligation d'information qui lui incombe.

Nous constatons qu'il s'agit du même régime juridique que pour le cas des terrains ayant abrité une ICPE vu un peu plus haut dans le devoir.

Ce qui différencie l'article L 514-20 du code de l'environnement de l'article L 125-7 du même code est que le premier traite de l'obligation d'information relative à la possible appartenant d'un terrain en vente/location à une activité liée au régime des ICPE tandis que le second article fait mention d'une obligation d'information pesant sur le vendeur/bailleur d'un terrain pollué ou potentiellement pollué relevant des secteurs d'information des sols ou bien la CASIAS.

Néanmoins, ces deux articles sont similaires dans la mesure où l'obligation d'information doit se manifester dans les deux cas de la même manière et que la méconnaissance de ces dernières emportent les mêmes sanctions, sanctions que nous allons maintenant étudier.

De plus, relevons que l'article étudié du code de l'environnement ne mentionne que le terme de « terrains ». Mais qu'en serait-il des contrats qui ne porteraient pas sur un « terrain » mais sur un immeuble par exemple ? En ce sens, l'article en question apparait comme quelque peu imprécis. Néanmoins, cette notion devrait être précisée par un décret dans le but de ne pas entrainer de confusion et d'éviter les fraudes.

Pour terminer, s'agissant de la recherche éventuelle de telles informations par le vendeur, ce dernier n'a pas l'obligation de les effectuer néanmoins, il lui est fortement conseillé de se renseigner sur le sujet afin de pouvoir justifier toutes poursuites en cas d'une éventuelle méconnaissance de l'obligation d'information par le vendeur.

PARAGRAPHE 2 : LES CONSEQUENCES DE LA MÉCONNAISSANCE DE CETTE OBLIGATION

Si jamais il s'avère qu'une pollution existait sur le terrain qu'il a acheté ou loué, et que le propriétaire du terrain en avait connaissance sans pour autant l'en avoir informé, l'acquéreur ou le locataire disposera de plusieurs moyens destinés à sanctionner le propriétaire en cas de manquement à son obligation d'information (A).

Cependant, il ne pourra voir la responsabilité du vendeur ou du bailleur que dans l'hypothèse ou il aura luisatisfait à quelques conditions afin de pouvoir prétendre à un éventuel dédommagement de la part du propriétaire (B).

A/ LES SANCTIONS ENCOURUES EN CAS DE MECONNAISSANCE DE L'OBLIGATION D'INFORMATION CONTRACTUELLE DU VENDEUR/BAILLEUR D'UN TERRAIN POLLUE

Si le vendeur ne rempli pas son obligation d'information contractuelle, ce dernier s'expose à plusieurs types de sanctions rappelées par l'article L 125-7 du code de l'environnement.

Afin d'éviter toutes ces sanctions, le vendeur/bailleur d'un terrain pollué a tout intérêt à informer le locataire/acquéreur de la présence du terrain objet du contrat dans un secteur d'information sur les sols ou bien dans la CASIAS.

Une fois la pollution intégrée dans l'économie générale du contrat, il pourra, au même titre que la seconde partie au contrat, être protégé par le droit de l'environnement.

Néanmoins, si la pollution n'est en aucun cas mentionnée dans le contrat alors qu'elle était connue du vendeur ou du bailleur, l'acquéreur/locataire a la possibilité de demander la résolution du contrat pure et simple. Il se verra par conséquent restituer la somme qu'il avait versé au vendeur auquel il rendra le terrain objet du litige.

La partie non avertie de la pollution connue et décelée sur le terrain en question peut également exiger une restitution d'un certain montant prélevé en conservant le bien sans pour autant que la vente ne soit annulée sur le prix de la vente ou bien dans le cas d'une location, la réduction du loyer.

Enfin, l'acquéreur/locataire sera en droit de demander la réhabilitation du terrain aux frais du propriétaire fautif du terrain, cela dans l'hypothèse seulement ou le prix des travaux envisagés ne paraît pas disproportionné du prix d'achat de base.

Pour pouvoir prétendre à l'un de ces types de réparation, l'acquéreur/locataire doit introduire une action en justice devant un juge et doit lui aussi respecter plusieurs conditions.

B/ LES CONDITIONS NECESSAIRE A L'OBTENTION D'UNE REPARATION

Tout d'abord, il est nécessaire que le demandeur intente une action en justice dans les délais accordés par la loi. Il s'agit en l'espèce des mêmes délais que ceux applicables à la garantie des vices cachés en droit commune des contrats33(*).

Ainsi, le délai court à compter du moment de la découverte de la pollution et ce pour une durée de deux ans. Passé ce délai, aucune contestation basée sur l'article L 125-7 du code de l'environnement n'est plus possible. C'est donc une action limitée dans le temps qui est ici posée par la loi ALUR.

Dans un deuxième temps, il est nécessaire, pour pouvoir prétendre à l'accueil de son action en réparation, que l'acquéreur/locataire démontre que la pollution constatée est de nature à rendre le terrain litigieux impropre à sa destination.

Pour se protéger, l'acquéreur/bailleur doit par conséquent mentionner dans le contrat la destination future du terrain acheté sans quoi il ne pourra pas prouver que la pollution détectée lui porte préjudice et il ne sera donc pas protégé par le régime juridique dont il est question ici.

De plus, la pollution doit être assez importante pour être de nature à empêcher l'acquéreur ou le locataire, non prévenu de la présence de pollution sur le terrain, de disposer du bien comme il l'entendait au moment de la signature du contrat.

Il s'agit d'un mécanisme de sanctions spécifiques répondant à une dynamique de droit privé et dont le régime est identique à celui posé par l'art L 514-20 du code de l'environnement sur les ICPE précédemment étudié

Comme pour l'essentiel des dispositions de l'article L 173 de la loi ALUR, un décret en Conseil d'Etat est attendu afin de définir les modalités d'application de cet article.

Pour conclure sur ce point, nous avons eu l'occasion d'observer que la loi ALUR du 24 mars 2014 avait introduit plusieurs dispositifs novateurs dans le droit des sites et sols pollués et notamment en ce qui concerne l'obligation d'information découlant de l'existence de tels terrains, qu'il s'agisse de l'information que l'Etat transmet à ses administrés ou encore de celle que doit mentionner le propriétaire d'un terrain pollué en cas de cession ou de location de son bien.

Mais ces dispositions ne sont pas les seules émanant de la loi dont Cécile Duflot est à l'origine à marquer profondément la règlementation sur les sites et sols pollués. En effet, le législateur a également entendu clarifier d'autres points concernant la gestion de tels sites et notamment apporter des précisions législatives pour tout ce qui concerne la réhabilitation de ces derniers.

Ce sont ces nouvelles règles, introduites dans le code de l'environnement et destinées à sécuriser la reconversion des anciens sites industriels et des terrains suspectés de pollution, que nous allons dès maintenant étudier au travers du deuxième chapitre de ce devoir.

CHAPITRE 2 : LES CHANGEMENTS APPORTES PAR LA LOI ALUR EN MATIERE DE REHABILITATION DES SITES ET SOLS POLLUES

Alors que le droit des sites et sols pollués, pour ce qui concernait notamment les mesures de leurréhabilitation, s'attardait principalement sur l'encadrement d'un régime des responsabilités dites spéciales, la loi ALUR est venu pallier à ce cantonnement.

En effet, la législation ne s'intéressait alors qu'aux terrains ayant fait l'objet d'activités menées d'une part par les exploitants d'installations classées pour la protection de l'environnement, d'autre part d'activités précisément recensées dans le code de l'environnement34(*) et enfin, aux activités émanant de détenteurs ou producteurs de déchets. Toutes ces personnes étaient alors considérées comme étant les « pollueurs » du terrain en cas de pollution avérée de ce dernier. C'est donc la responsabilité de ces trois types de débiteurs qui était presque toujours retenue en cas de nécessaire dépollution et remise en l'état du site35(*).

Ainsi, nous remarquons que régime des responsabilités en matière de réhabilitation de sites et sols pollués émanait principalement des législations relative aux ICPE et aux déchets et pouvait par conséquent être considéré comme cantonnée à ces domaines. Mais alors, qu'en était-il des pollutions qui n'avaient pour origine aucun de ces cas ?

C'est pour pallier à cette interrogation que la loi du 24 mars 2014 est venue moderniser le droit des sites et sols pollués en étendant la responsabilité, quant à la remise en l'état des terrains, à plusieurs autres intervenants que ceux précédemment évoqués.

Notons que la loi ne remplace pas la législation existante mais qu'elle vient la compléter.

Les dispositions relatives à ces « nouveaux » débiteurs de l'obligation de remise en état d'un site pollué permettent par conséquent de faire émerger une véritable police des sites et sols pollués inexistante jusqu'alors. Ceci « permettant ainsi de sortir du seul domaine de ces réglementation spécifiques -celles précitées- pour encadrer la réhabilitation des sites et sols pollués ».

La loi ALUR a, en effet, créé de nouveaux mécanismes ayant pour but d'accompagner l'émergence de ces nouveaux acteurs de la reconversion des friches industrielles dont l'action de « recyclage urbain » permettrait de répondre à l'objectif de densification des zones urbaines et périurbaines, tout en apportant une réponse à la pénurie de foncier constructible36(*).

Dans ce but le législateur a dans un premier temps mis en place un régime permettant de mieux définir les contours de la réhabilitation des sites et sols pollués et de justifier juridiquement que la responsabilité d'autres intervenant que ceux classiquement invoqués puisse être engagée (Section 1).

Suite à l'introduction de telles dispositions dans le droit Français, la loi ALUR devait indéniablement clarifier la hiérarchie des responsables de la remise en l'Etat des sites et sols pollués.

C'est ce qu'elle opère par le biais de la réécriture des articles L 556-1 et suivants du code de l'environnement, consacrant une véritable hiérarchisation juridique des responsables de la réhabilitation des sites et sols pollués, déjà entamée par la jurisprudence du Conseil d'État et de la Cour de Cassation (Section 2).

SECTION 1 : TRANSFERT DES OBLIGATIONS DE REHABILITATION ET CHANGEMENT D'USAGE

Comme cela a déjà été souligné, la loi ALUR avait notamment pour objectif de moderniser le processus permettant de remettre en état un site pollué dans le but de réutiliser ce dernier autrement que par la passé, autrement dit, en lui conférant une nouvelle affectation.

La préoccupation relative à la réhabilitation de tels sites est ancienne cependant elle a longtemps été abordée uniquement sous l'angle du droit des ICPE selon lequel, le seul débiteur de cette obligation était le dernier exploitant d'une telle activité industrielle.

Premièrement, l'intervention des tiers lors de la réhabilitation d'un site pollué était alors méconnue du droit. C'est donc pour introduire cette possibilité dans la législation nationale que de nouvelles dispositions encadrant cette pratique ont été mises en place par la loi ALUR (Paragraphe 1).

Deuxièmement, il était possible de se questionner au sujet d'un possible changement de destination d'un site pollué postérieurement à une première remise en état. A ce sujet, la loi du 24 mars 2014 tente également de mettre fin aux interrogations en encadrant les mesures de remise en état complémentaires rendues nécessaires par un changement d'usage non prévu au départ par le dernier exploitant du site (Paragraphe 2).

PARAGRAPHE 1 : L'INTRODUCTION DE LA NOTION DE TIERS INTERESSE PAR LA LOI ALUR


Hormis les cas où les projets de reconversion étaient menées par les responsables de la pollution eux-mêmes, aucune disposition légale ne venait encadrer spécifiquement l'action des tiers intervenant sur les sites et sols pollués.

Pour commencer, la loi combinée à la jurisprudence37(*)prévoyait que l'obligation de remise en état d'un site pollué suite à la cessation d'activité pesait exclusivement sur l'ancien exploitant de ce dernier ou bien, si celui-ci a disparu, sur son ayant droit (A).

Mais la loi ALUR tend également à favoriser la réhabilitation des anciens sites exploités en offrant la possibilité, à tout tiers « intéressé », de se substituer à cet exploitant pour remettre le site en état (B).

A/ LA NOTION D'EXPLOITANT ET SON OBLIGATION DE REMISE EN L'ETAT

Il convient dans un premier temps de s'interroger sur la notion d'exploitant, quelle peut en être la définition retenue ?

Il peut d'une part s'agir d'un exploitant dit « régulier »38(*), ce terme signifiant que la personne a procédé à la déclaration préalable régulière d'une ICPE pour se voir délivrer un titre d'autorisation d'exploiter.

Mais cela peut également être un39(*) exploitant irrégulier ne disposant pas d'une telle autorisation d'exploitation. En effet, ce dernier ne saurait ce prévaloir de l'inexistence de l'autorisation d'exploitation dans le but d'échapper à l'obligation de remise en l'état.

La cour de cassation a de plus relevé que l'obligation de remise en état d'un site pollué résultait d'une « obligation particulière » et qu'à ce titre, elle pesait, en toute hypothèse, sur l'exploitant de l'installation40(*).

Ce sont ainsi ces personnes qui, ayant exploité un ou plusieurs sites sur lesquels étaient situées des ICPE, doivent remettre le site en question en état après toute cessation d'activité. Cela dans le but de permettre une protection satisfaisante des intérêts visés aux articles L. 511-1 et L 211-1 du code de l'environnement et de rendre possible, en toute sécurité, l'usage postérieur de ces terrains.

Cependant, la loi ALUR a tempéré ce principe en légiférant que les exploitants précités avaient la possibilité de transférer l'obligation de remise en l'état d'un site ayant accueilli une ICP à un tiers intéressé.

B/ LA NOTION DE TIERS INTERESSE ET L'OBLIGATION DE REMISE EN L'ETAT POUVANT LUI ETRE TRANSFEREE

Alors que la législation étaient silencieuse à ce sujet, la loi ALUR a mis en place le fait qu'un tiers à l'exploitation initial du terrain prenne en charge l'obligation de remise en état d'une ICPE en lieu et place de l'exploitant.

Auparavant, les exploitants de ces terrains avaient bel et bien recours à ce type de dispositif néanmoins, même s'il s'agissait d'une pratique contractuelle développée depuis plusieurs années et fréquemment utilisée, elle ne pouvait pas être opposable à l'administration41(*) et se caractérisait donc nécessairement par un rapport de droit privé42(*).

Ainsi, même si l'obligation de remise en état était contractuellement transférée par le dernier exploitant de l'activité industrielle à un tiers, l'exploitant restait tout de même le débiteur de cette obligation aux yeux de l'Etat, position qui ne lui était pas conséquent pas favorable car non sécurisante.

La loi ALUR vient par conséquent consacrer juridiquement ce transfert de l'obligation de réhabilitation d'un terrain pollué de l'exploitant à un tiers étranger à l'exploitation, sécurisant ce types de rapports et apportant donc une protection supplémentaire à l'exploitant du site.

Dans le cas de figure ou la remise en l'état est effectuée par un tiers, nous seront en présence d'un contrat qui identifiera le dernier exploitant comme restant le débiteur administratif mais engagera le tiers intéressé (nécessairement bailleur ou acquéreur du terrain en revanche) à réaliser pour son compte les travaux de remise en état du site.

Auparavant, le dernier exploitant de l'ICPE était l'unique interlocuteur de l'administration, devant faire office d'intermédiaire entre cette dernière et un éventuel tiers intéressé.« Cette relation triangulaire cédant/acquéreur/administration entrainait des difficultés et constituait un frein à la mise en oeuvre de schémas contractuels permettant de financer des travaux de traitement de sites par un tiers, au lieu et place de l'exploitant. »43(*)

Avec la mise en place de la pratique contractuelle ci-haut décrite, le tiers intéressé aura dorénavant une relation directeavec l'administration, dispensant l'exploitant de faire office de relais, et deviendra le nouveau débiteur des opérations de remise en état.

De plus, le tiers aura la possibilité de superviser et de contrôler l'ensemble de la procédure et des opérations et de réaliser cette réhabilitation selon les mesures qu'il entend mettre en oeuvre, ce qui était auparavant impossible.

L'article L 512-21 du code de l'environnement pose les principes de cette pratique :

« Le tiers demandeur recueille l'accord du dernier exploitant, du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme et, s'il ne s'agit pas de l'exploitant, du propriétaire du terrain sur lequel est sise l'installation.

Le tiers demandeur adresse au représentant de l'Etat dans le département un mémoire de réhabilitation définissant les mesures permettant d'assurer la compatibilité entre l'usage futur envisagé et l'état des sols.

Le représentant de l'Etat dans le département se prononce sur l'usage proposé dans le cas mentionné au II et peut prescrire au tiers demandeur les mesures de réhabilitation nécessaires pour l'usage envisagé.

Le tiers demandeur doit disposer de capacités techniques suffisantes et de garanties financières couvrant la réalisation des travaux de réhabilitation définis au IV pour assurer la compatibilité entre l'état des sols et l'usage défini. Ces garanties sont exigibles à la

première demande. »

Nous remarquons alors qu'un tel transfert est très strictement encadré. Il convient notamment pour le tiers intéressé de faire la demande du transfert de l'obligation de remise en état du dernier exploitant vers lui et qu'il devra notamment prouver qu'il dispose des capacités techniques et financières suffisantes pour effectuer les travaux de réhabilitation prévus et accomplir toutes les démarches liées. La démarche sera matérialisée par un arrêté préfectoral susceptible de mesures de police.

En tout état de cause, si le tiers demandeur venait à défaillir et de l'impossibilité de mettre en oeuvre les garanties financières, le dernier exploitant demeurerait responsable de la réhabilitation.

Après avoir étudié le cas des remises en état pour une utilisation définie dans le contrat, nous allons dorénavant traiter des remises en état pouvant être nécessaires en cas de changement d'usage postérieur.

PARAGRAPHE 2 : L'ENCADREMENT DU CHANGEMENT D'USAGE D'UN SITE POLLUE INITIE PAR UN TIERS

Pour que l'obligation de remise en état soit opposée à un quelconque débiteur, il est nécessaire que les mesures de remise en état et l'usage projeté soient clairement mentionnées dans le contrat pour pouvoir par la suite être mis en oeuvre. Mais qu'en est-il lorsque l'usage du terrain est voué à changer ? Dans les faits, les constructeurs intervenants sur un terrain pollué se devaient de définir les mesures mises en oeuvre par eux dans le cadre de la remise en l'état du site et de garantir l'application de ces dernières. Cependant, il n'existait encore aucun cadre règlementaire ou législatif à ce sujet (A) et aucun lien avec la dimension urbanistique relative aux autorisations d'urbanisme ne pouvait être relevé.

C'est ce qu'est venu corriger la loi ALUR par le biais du nouvel article L 556-1 du code de l'environnement (B).

A/ LE POSSIBLE CHANGEMENT D'USAGE D'UN TERRAIN AVANT LA MISE EN PLACE DU NOUVEL ARTICLE L 556-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT : UN MANQUE D'ENCADREMENT JURIDIQUE.

Le changement d'usage d'un terrain pollué pouvait être réalisé mais il était alors conseillé au maître d'ouvrage initiateur de ce changement de soumettre le projet de dépollution et le changement prévu à l'avis du préfet.

Ce dernier, après avoir évalué les solutions proposées pour la réhabilitation du site et l'étude sanitaire des risques confirmait la faisabilité du changement d'usage envisagé par le biais d'un arrêté.

Même s'il était vivement conseillé au maître d'ouvrage d'obtenir cet avis conforme dans la mesure ou ce dernier pouvait être exigé par la suite en cas de cession du terrain ou de vente de biens immobiliers situés sur ce dernier, cela n'avait en aucun cas été rendu obligatoire.

Nonobstant, la preuve de cet avis était notamment demandé en cas de demande de permis de construire sur le site en question afin de s'assurer de la conformité de l'usage de ce dernier en vertu de l'article R. 111-2 code de l'urbanisme établissant un lien entre les préoccupations environnementales et urbanistiques en conférant à l'administration le pouvoir de refuser la délivrance d'une autorisation d'urbanisme ou d'y apposer des prescriptions particulières pour des motifs de sécurité et de salubrité publique.

Cependant, il ne s'agissait que d'un conseil résultant de la pratique et non d'une obligation. En effet, aucun texte n'organisait l'obligation d'obtenir un tel avis de l'administration. Ainsi, les maîtres d'ouvrage n'avaient pas systématiquement recours à cette consultation du préfet.
La compatibilité du projet envisagé avec l'état des sols d'un terrain n'était ainsi pas clairement assurée. La loi ALUR, est alors venue apporter des dispositions visant à remédier à cela.

B/ L'INSERTION D'UNE PROCEDURE DE CHANGEMENT D'USAGE A L'ARTICLE L. 556-1 DU CODE DE L'ENVIRONNEMENT.

Le nouvel article L 556-144(*) du code de l'environnement pose impose désormais au maître d'ouvrage souhaitant changer l'usage d'un ancien site ICPE de « définir des mesures de gestion de la pollution des sols et les mettre en oeuvre afin d'assurer la compatibilité entre l'état des sols et la protection de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques, l'agriculture et l'environnement au regard du nouvel usage projeté. ».

Il s'agit ici d'une obligation spéciale que devront satisfaire les maîtres d'ouvrage souhaitant effectuer un changement d'usage sur un terrain ayant accueilli une ICPE et ayant été réhabilitée dans les règles.

Cette nouvelle réglementation s'inscrit dans le prolongement d'une volonté de protection de l'exploitant annoncée notamment par un décret du 13 avril 201045(*), « en cas de modification ultérieure de l'usage du site, l'exploitant ne peut se voir imposer de mesures complémentaires induites par ce nouvel usage sauf s'il est lui-même à l'initiative de ce changement d'usage ».

Conformément à ce que préconise le code de l'environnement, les mesures de réhabilitation devront être définies en tenant compte d'un bilan coûts/avantages imposant de la sorte une contrainte budgétaire ainsi que d'un bilan inconvénients/avantages.


Concernant l'exécution des mesures, le maître d'ouvrage devra faire attester de leur mise en oeuvre par un bureau d'études certifié dans le domaine des sites et solspollués.

Sur ce point, la loi ALUR va même au-delà, elle instaure en effet une procédure permettant la réalisation de projets de constructions ou d'aménagements sur les sites et sols pollués grâce au nouvel article L 556-2 du code de l'environnement selon lequel, « les projets de construction ou de lotissement prévus dans un secteur d'information des sols (...) font l'objet d'une étude afin d'établir les mesures de gestion de la pollution à mettre en oeuvre pour assurer la compatibilité en l'usage futur et l'état des sols ». Cette étude doit être réalisée comme dit plus haut par un bureau d'étude certifié et jointe au dossier de

demande d'autorisation.

Dans l'hypothèse ou, après cette démarche il subsiste une pollution quelconque, il faudra en aviser le propriétaire du terrain et le préfet afin d'éventuellement créer un SIS sur le terrain pollué.

Enfin, cette remise en état par le maître d'ouvrage dans le but d'opérer un changement d'usage du terrain ne devra cependant pas avoir pour conséquence la disparition de l'obligation de remise en l'état qui pèse sur le dernier exploitant du site.
Il existe en effet une différence permettant de distinguer ces deux obligations. La remise en état qui constitue une obligation pour le dernier exploitant d'un terrain ayant accueilli une ICPE marque la fin de cette activité tandis que la remise en état pour nécessaire lorsqu'un usage différent de celui initialement prévu et engendrée par le maître d'ouvrage marque le début d'une nouvelle activité.

Après la consécration de la possibilité de transférer l'obligation de remise en état d'un site pollué à des personnes autres que l'exploitant, d'une activité industrielle ainsi que les détenteurs et producteurs de déchets, le législateur a entendu clarifier le régime des responsabilité qui découlerait de l'obligation de réhabilitation des sols pollués.

SECTION 2 : LA HIERARCHISATION PRECISE DES RESPONSABLES DE LA REHABILITATION DES SITES ET SOLS POLLUES.

La loi Grenelle 2 avait introduit dans le code de l'environnement l'article L. 556-1 que nous venons d'évoquer. Ce dernier employait déjà le terme de « responsable » pouvant être mis en demeure d'exécuter les travaux de réhabilitation nécessaires en cas de pollution ou de risques de pollution d'un sol.Une telle disposition permet de sécuriser et de minimiser dans al mesure du possible les pollution de sols en permettant de contraindre certaines personnes pouvant être déclarées responsables.

Cependant, le terme de « responsable » n'étant pas précisé et clairement défini, il était nécessaire que le législateur opère une mise au point à ce sujet.

La loi ALUR a été ainsi l'occasion, pour le législateur, de se saisir de cette difficulté et de préciser la hiérarchie des responsables de remise en état des sites et sols pollués en commençant par traiter des responsables principaux (Paragraphe 1) et d'autre part en instaurant la notion de débiteur subsidiaires (Paragraphe 2).

Elle reprend le mécanisme des responsabilités en la matière au sein du nouvel article L. 556-3 du code de l'environnement.


PARAGRAPHE 1 : LES RESPONSABLES DE PREMIER RANG DE LA REMISE EN ETAT DES SITES ET SOLS POLLUES

L'identité des responsables de la réhabilitation des sites et sols pollués variera en fonction de l'origine de la pollution.

En effet, si le sol a été pollué du fait de la présence passée d'une installation industrielle sur le site (A) le responsable retenu ne sera pas le même que si le sol a été pollué d'une autre manière (B).

Les dispositions relatives à ces différents cas de figure sont repris au sein de L'article L. 556-3 du code de l'environnement46(*).

A/ LES RESPONSABLES DE PREMIER RANG SUR LES TERRAINS AYANT PRECEDEMMENT ABRITE UNE ACTIVITE INDUSTRIELLE

L'article L. 556-3 du code de l'environnement indique que « Pour les sols dont la pollution a pour origine une activité mentionnée à l'article L. 165-2, une installation classée pour la protection de l'environnement ou une installation nucléaire de base, le dernier exploitant de l'installation à l'origine de la pollution des sols, ou la personne désignée aux articles L. 512-21 et L. 556-1, chacun pour ses obligations respectives. »

Cet article précise ainsi les cas dans lesquels le terrain sera considéré comme pollué par une activité industrielle.

Dans ces cas de figure, le responsable prioritaire se trouvera être en premier lieu le dernier exploitant de l'installation. Ce dernier sera, comme nous l'avons étudié précédemment dans l'obligation de remettre le site en état suite à l'arrêt de son activité et ce afin que le terrain soit en mesure de convenir à un usage futur autre sans compromettre la sécurité et la santé publique.

En outre, il est possible, comme nous l'avons déjà évoqué, que l'obligation de remise en état du site ait été transférée du dernier exploitant à un « tiers intéressé », notion introduite récemment dans la législation Française. Si tel est le cas, la responsabilité du dernier exploitant sera transférée à ce tiers en même temps que l'obligation de réhabilitation. Le tiers intéressé deviendra dès lors la responsable de premier rang.

Enfin, le dernier responsable prioritaire potentiel sera trouvé en la personne du maître d'ouvrage à l'origine d'un changement de destination du terrain concerné. En effet, en prévoyant le changement d'usage futur du site pollué, ce dernier se voit débiteur de l'obligation d'adopter les mesures nécessaires à la remise en état du terrain pour que ce dernier puisse être utilisé de la manière projetée.

Nous constatons donc que dans tous les cas, lorsque l'obligation de remise en état pèse sur une personne, c'est cette dernière qui peut voir engager sa responsabilité en cas de manquement à cette obligation. Ainsi, le transfert de l'obligation de réhabilitation s'accompagne du transfert de la responsabilité.

L'article précité mentionne également les sols pollués par une autre origine, cas dans lequel, les responsables de premier rang ne seront pas les mêmes que ceux évoqués ci-haut.

B/ LES RESPONSABLES EN CAS DE POLLUTION ISSUE DE DECHETS.

Le nouvel article L. 556-3 du code de l'environnement indique dans un deuxième temps que « Pour les sols pollués par une autre origine, le producteur des déchets qui a contribué à l'origine de la pollution des sols ou le détenteur des déchets dont la faute y a contribué (...) »

La loi traite ici des sols qui ont été pollués par des déchets notamment et non pas une activité industrielle passée. Une telle pollution pouvant être évitée par de simples mesures de prévention est par conséquent de nature à engendrer la responsabilité de la personne qui a produit les déchets ayant engendré la pollution ou bien du détenteur de ces déchets ayant commis une faute qui a contribué à la pollution du sol en question.

Cependant, cette disposition peut susciter deux questions notamment, pour commencer, qu'entend-on par le détenteur et le producteur des déchets ? Deuxièmement, que signifie la formulation « dont la faute y a contribué » ?

Pou répondre à de telles interrogations, on peut être amenés à penser que le détenteur ou le producteur des déchets doit être entendu comme celui qui a placé les déchets sur le site pollué. Quand à la formulation « dont la faute y a contribué », il est sans doute sous entendu ici que les déchets se trouvant sur le terrain ont indéniablement conduit à la pollution après avoir été placés la ou ils l'ont été par leur producteur ou détenteur.

L'article L 556- 3 précise par ailleurs que, dans tous ces cas de figure, quelle que soit l'origine de la pollution, l'administration est en mesure de contraindre la personne juridiquement responsable pour qu'elle prenne les mesures nécessaires à la dépollution.

Si cette dernière n'opère pas de remise en état ou qu'il n'emploie pas de mesures adéquates et que la pollution constatée présente un risque pour l'homme et l'environnement, l'administration pourra faire effectuer par ses services les travaux nécessaires aux frais du responsable. A cette fin, le ministre chargé de l'Environnement ainsi que le ministre chargé de l'Urbanisme ont la possibilité de confier l'exécution la dépollution ordonnée d'office à un établissement public foncier et, en l'absence d'un tel établissement, à l'ADEME.

En l'absence de l'un de ces responsables de premier rang, le propriétaire de l'assise foncière des sols s`il est démontré qu'il est fautif pourra être déclaré responsable de la remise en état du sol.

PARAGRAPHE 2 : LE RESPONSABLE A TITRE SUBSIDIAIRE

Alors que les tentatives de l'administration de contraindre certains propriétaire à procéder à la remise en état d'un site pollué leur appartenant étaient demeurées infructueuses en raison de l'absence de base légale ou règlementaire, la loi ALUR est venue apporter le socle législatif règlementaire en la matière (A).

Cette dernière indique en effet qu'en l'absence de possibilité d'engager la responsabilité d'un des responsables de premier rang précédemment étudiés, la responsabilité d'un responsable subsidiaire pourra être recherchée. Ce principe a été repris récemment par la jurisprudence administrative (B).

A/ LA CONSECRATION DU RESPONSABLE SUBSIDIAIRE PAR LA LOI ALUR...

L'article 173 de la loi ALUR qui vient ajouter dans le Code de l'environnement un nouvel article L. 556-3 en ajoutant aux termes de l'ancien article L. 556-1, un II qui définit le terme de responsable selon un ordre de priorité. Dans cette disposition est indiqué qu'en plus des responsables de premier rang que nous avons évoqués plus haut, il existe désormais un responsable à titre subsidiaire. Ce dernier pourra voir sa responsabilité engagée en cas d'absence du responsable prioritaire ; « A titre subsidiaire, en l'absence de responsable au titre du 1°, le propriétaire de l'assise foncière des sols pollués par une activité ou des déchets tels que mentionnés au 1°, s'il est démontré qu'il a fait preuve de négligence ou qu'il n'est pas étranger à cette pollution.».

Le propriétaire d'un terrain pollué n'ayant accueilli ni ICPE ni déchets, pourra voir sa responsabilité être mise en cause.

Mais dans un premier temps, le législateur précise que cette responsabilité n'est que subsidiaire, en effet, elle ne pourra intervenir que dans le cas ou l'engagement de la responsabilité d'un débiteur principal est impossible. C'est-à-dire que sa responsabilité ne pourra être recherchée qu'en l'absence de l'existence du dernier exploitant d'une ICPE, d'un tiers intéressé à qui a été transférée l'obligation de remise en l'état du site ou bien du maître d'ouvrage à l'initiative du changement d'usage d'un terrain pollué.

Que signifie alors « l'absence de responsable au titre du 1° » ? Nous entendrons ici cela comme le fait que le responsable à titre principal ne peut être retrouvé par l'administration et que de ce fait, il est impossible de lui enjoindre de procéder aux travaux nécessaires à al remise en état du site pollué. Afin de protéger l'administration, il est alors permis à cette dernière de rechercher un responsable à titre secondaire pour ne pas avoir à assumer elle-même les frais qu'entrainerait la mise en oeuvre des mesures de réhabilitation du terrain.

Dans un second temps, il est indiqué que le propriétaire de l'assise foncière du terrain ne verra sa responsabilité engagée que s'il est prouvé qu'il a fait preuve de négligence ou qu'il n'est pas étranger à cette pollution. La responsabilité de ce dernier sera alors quasi automatiquement engagée sauf dans le cas ou le propriétaire parviendra à démontrer sa bonne foi. Il appartiendra donc à l'administration souhaitant rechercher la responsabilité d'un débiteur subsidiaire en matière de réhabilitation de sites pollués. Si cette dernière y parvient, elle aura la possibilité de mettre en demeure le propriétaire fautif de procéder aux travaux de réhabilitation nécessaires ou bien le contraindre à assumer financièrement l'ensemble des autres mesures pouvant être prévues par l'Etat.

La loi précise encore une fois qu'un décret en conseil d'état définira les modalités d'applications de ces mesures et, notamment, l'identité de l'autorité de police chargée de les faire appliquer.

B/ ... OU LA CONFIRMATION D'UNE JURISPRUDENCE CONSTANTE REAFFIRMEE RECEMMENT

Dans un premier temps, le conseil d'état refusait de reconnaitre la responsabilité subsidiaire du propriétaire sur le fondement du droit des ICPE du site malgré les poursuites répétées de l'administration afin d'obtenir la remise en état d'un site pollué par le propriétaire du terrain suite à l'impossibilité d'obtenir cette réhabilitation de la part du dernier exploitant47(*).

Puis cette responsabilité subsidiaire du propriétaire de l'assise foncière a été reconnue par la jurisprudence sur le fondement de la législation des déchets et non sur le fondement de la législation relative aux ICPE48(*) pour être par la suite confirmée à plusieurs reprises49(*).

Enfin, plus récemment, en fin d'année 2014, le conseil d'état est venu préciser le principe de la responsabilité subsidiaire du propriétaire du terrain posé par la loi ALUR.

Dans son arrêt du 24 oct. 201450(*), le Conseil d'Etat traite notamment du comportement fautif du propriétaire du terrain pouvant en conséquence voir sa responsabilité engagée à titre subsidiaire.

Ainsi, la responsabilité du propriétaire est étendue par cet arrêt aux cas ou ce dernier avait connaissance lors de l'achat du terrain de l'incapacité du responsable principal à satisfaire à ses obligations de remise en état. Auparavant, il n'était fait mention dans la jurisprudence que de la « négligence du propriétaire » précisée notamment dans l'arrêt Wattelez rendu le 25 septembre 2013 par le conseil d'état51(*)

Le Conseil d'État s'ouvre par conséquent à une nouvelle hypothèse de responsabilité, lorsque le propriétaire « ne pouvait ignorer, à la date à laquelle il est devenu propriétaire de ce terrain, d'une part, l'existence de ces déchets, d'autre part, que la personne y ayant exercé une activité productrice de déchets ne serait pas en mesure de satisfaire à ses obligations »52(*). Le fait de connaitre au moment de l'acquisition du terrain l'existence de déchets polluant ce site combiné au non respect de son obligation de remise en état par le responsable principal est donc clairement ici considéré par le conseil d'Etat comme une négligence de la part du propriétaire du bien foncier pouvant être de nature à engager sa responsabilité. En effet une absence de réaction de sa part lors de la cession du terrain correspondrait à l'acceptation tacite de la présence de ces déchets sur son terrain et à la prise en charge de la pollution pouvant en résulter. Ceci permettant de responsabiliser les acquéreurs de terrains pollués et de sécuriser les ventes de tels biens en les encadrant strictement.

Une telle affirmation permet également l'éloignement dans certains cas de l'application du principe du pollueur payeur en vertu duquel, celui qui a causé la pollution d'un bien peut voir sa responsabilité engagée et devra assumer les frais d'une éventuelle dépollution, prévention ou lutte contre l'étalement de la pollution qu'il a engendré53(*). En effet, dans le cas ou l'acquéreur (devenant donc propriétaire) aurait connaissance de la pollution mais n'aurait pas causé cette dernière, il ne serait pas responsable en vertu du principe du pollueur payeur, il était donc nécessaire de permettre un engagement éventuel de sa responsabilité par un autre moyen.

CONCLUSION

Il est dès lors possible de retenir que la loi ALUR a opéré une véritable refonte du droit des sites et sols pollués par le biais de l'introduction de diverses dispositions dans le code de l'environnement représentants chacune un sujet clé pour le droit des sites et sols pollués.

Il s'agit la d'une réelle réforme en la matière même si ces dispositions n'ont pas été mises en avant comme d'autres mesures prises par la loi ALUR au moment de sa promulgation.

Outre le fait que, suite à cette loi, le législateur a cherché à améliorer l'information en matière de sites et sols pollués, que cela soit d'un point de vue institutionnel ou d'un point de vue contractuel, ce dernier a également clairement souhaité favoriser et sécuriser le recyclage des anciens sites industriels notamment mais également de tous les sites pollués pouvant faire l'objet d'une nouvelle utilisation que celle à laquelle ils étaient initialement destinés en introduisant la possibilité que l'obligation de remise en état d'un tel site ne pèse plus exclusivement sur les débiteurs qui étaient connus jusqu'alors.

Même si le droit des sites et sols pollués n'avait pas attendu l'année 2014 pour émaner, force était de constater qu'aucun fondement textuel solide ne pouvait être pointé du doigt. La loi ALUR participe ainsi grandement à la fortification et à la structuration législative de la matière en créant un véritable cadre commun et spécifique au droit des sites et sols pollués.

En effet, l'efficacité des nouveaux dispositifs introduits par la loi ALUR et relatifs à la gestion et à l'utilisation des sites et sols pollués ne pourra être appréciée que lorsque les décrets d'application prévus par chacune des dispositions adoptées par cette loi n'auront été pris.

Comme nous l'avons en effet constaté, même s'il a été possible de décrire ces principes, chacun d'entre eux doit être précisé par un décret en Conseil d'Etat.

De plus, alors que la loi étudiée semblait vouloir mettre en place une véritable police administrative en charge du droit des sols, il est regrettable que le législateur n'ai pas évoqué précisément l'identité de l'autorité administrative compétence.

En conclusion, nous retiendrons que la loi ALUR a su apporter les réponses aux questions que l'on se posaient fréquemment en matière de règlementation sur les sites et sols pollués néanmoins, il est possible de relaver plusieurs incertitudes et impressions demeurant malgré l'adoption des dispositions étudiées.

Ainsi, certaines incertitudes démurent et représentent une source d'insécurité. Les dispositifs mis en places doivent par conséquent encore être affinés. On pense notamment pour cela à la voie règlementaire comme l'indique la loi ALUR mais également à la voie jurisprudentielle.

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrage :

-Jean Pierre BOIVIN, Frédéric DEFRADAS, Sites et sols pollués : outils juridiques, méthodologiques et financiers, guides juridiques, 2ème édition, 2013

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-Raphaël ROMI, Droit de l'environnement, LGDJ-Lextenso éditions, 2014

Codes :

-Code de l'urbanisme, Dalloz, 2014

-Code de l'environnement, Dalloz 2014

Revues :

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-François-Guy TREBULLE, « sols pollués : le clair-obscur de la loi ALUR », Environnement et développement durable, Environnement n° 8-9, aout 2014, étude 13.

-Marie-Anna LEJEUNE, « l'outsider de la loi ALUR : le volet « sites et sols pollués », Bulletin de CHEVREUX notaires, Edition spéciale, juillet 2014.

-Corentin GOUPILLER et Caroline FACELINA, « la loi ALUR : âge de raison du droit des sols pollués ? », Droit de l'environnement n°223, Mai 2014

-Yves JEGOUZO, Jean-Pierre LEBRETON et Pascale STEICHEN, « la réfomre du droit des sites et sols pollués commentaire de l'article 173 de la loi ALUR du 24 mars 2014 », Gridauh, 24 septembre 2014

-Béatrice PARANCE, note sous arrêt, « Nouvelles précisions sur la responsabilité du propriétaire négligent pour les déchets abandonnés sur son site », La Semaine Juridique Edition Générale n° 51, 15 Décembre 2014, 1320

-Philippe BILLET, « La loi ALUR et les sols pollués » La Semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n° 37, 15 Septembre 2014

-Lorenzo BALZANO et Camille BILLMANN, « les apports de la loi ALUR sans le domaine des sites et sols pollués », RDI 2014 p. 432

Références juridiques et bases de données accessibles via l'environnement numérique de travail de l'université de perpignan :

-Lexisnexis

-Lextenso

-Dalloz

-Légifrance

Sites internet :

* 1 Jean Pierre BOIVIN, Frédéric DEFRADAS, Sites et sols pollués : outils juridiques, méthodologiques et financiers, guides juridiques, 2ème édition, 2013

* 2 Charte Européenne des sols, Conseil de l'Europe, 30 mai 1972 (révisée en 2004)

* 3 C.E, 8 Septembre 1997, Sérachrom, req. N° 121904

* 4 Article 34-3 du Décret n°77-1133 du 21 septembre 1977 pris pour l'application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement

* 5 Loi n°76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement

* 6 Circulaire du 3 décembre 1993 complétée par les Circulaires du 3 Avril 1996 et du 10 décembre 1999, textes abrogés par la circulaire du 8 février 2007 intitulée Modalités de gestion et de réaménagement des sites pollués

* 7 Loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages (1)

* 8 Ord. n° 2010-1579, 17 déc. 2010 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des déchets

* 9 Corentin GOUPILLIER et Caroline FACELINA, la loi ALUR : âge de raison du droit des sols pollués ?, Droit de l'environnement n° 223-Mai 2014

* 10 F.-G. Trébulle, «Les principales problématiques juridiques sur le thème de la pollution des sols», M.-P.Blin- Franchomme (dir), Sites et sols pollués: les enjeux d'un droit, un droit en jeu(x); dossier spécial, «Quel avenir pour le droit des sites et sols pollués?», Litec, coll. Colloques, 2010

Dr. et patr. avr. 2013, n°224, p.43 et s. ;F.Chaillou et B.Parance,«Les contraintes environnementales des cessions immobilières» : RLDC 108/2013, n°5216.

* 11 LOI n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (1)

* 12 Décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014

* 13 Nathalie Levray, sites et sols pollués : un environnement rénové par la loi ALUR, opérations immobilières, le moniteur.fr.

* 14 Béatrice PARANCE, professeur de droit, université Vincennes - Saint-Denis (Paris8), membre du laboratoire de droit médical et de lasanté (EA1581) « L'article 173 de la loi ALUR : l'émancipation du droit des sites et sols pollués ? » Gazette du Palais, 03 juillet 2014 n° 184, P.6

* 15 Article 191 § 2 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne du 25 mars 1957 & Article L 110-1 du code de l'environnement.

* 16 Article 191 § 2 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne du 25 mars 1957 & Article L 110-1 du code de l'environnement.

* 17 Circulaire n° 94-I-1 du 09/02/94 relative au recensement des informations disponibles sur les sites et sols pollués actuellement connus notamment.

* 18LOI n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement (1)

* 19 Yves JEGOUZO, Jean-Pierre LEBRETON et Pascale STEICHEN, La réforme du droit des sites et sols pollués, commentaire de l'article 173 de la loi ALUR du 24 mars 2014

* 20 Article 125-6 du code de l'environnement modifié par la loi n°2014-366 du 24 mars 2014 - art. 173.

* 21 Claude Bérit-Débat, rapporteur pour le Sénat

* 22 Yves JEGOUZO, Jean-Pierre LEBRETON et Pascale STEICHEN, La réforme du droit des sites et sols pollués, commentaire de l'article 173 de la loi ALUR du 24 mars 2014

* 23 Article L 556-2 du code de l'environnement

* 24 IV de l'article L 125-6 du code de l'environnement.

* 25 Voir en ce sens l'article L 410-1 du code de l'urbanisme, modifié par l'ordonnance n°  2005-1527 du 8 décembre 2005

* 26Article 1382, Créé par Loi 1804-02-09 promulguée le 19 février 1804 « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

* 27Article 1719 et 1720 du code civil

* 28 Article 1641 Créé par Loi 1804-03-06 promulguée le 16 mars 1804 « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. »

* 29Jean Pierre BOIVIN, Frédéric DEFRADAS, Sites et sols pollués : outils juridiques, méthodologiques et financiers, guides juridiques, 2ème édition, 2013

* 30 C.A Paris, 30 sept 2010, req., N°08/16169

* 31Cass. 3è civ, 9avr 2008, n°07-10.795

* 32 Art L 512-18 du code de l'environnement créé par la loi du 30 juillet 2003

* 33 Code civil : articles 1641 à 1649

* 34Article L 165-2 du code de l'environnement

* 35Article L 556-3 II du code de l'environnement

* 36A. Souchon et P. Viterbo, Réhabilitation des sites et sols pollués : nouveaux enjeux, nouveaux acteurs ?, Florilèges du droit public en l'honneur de Jean-Pierre Boivin : éd. La Mémoire du Droit, 2011

* 37 CE, 8 juill. 2005, n° 247976, Sté Alusuisse Lonza France, au Lebon avec les conclusions AJDA 2005. 1829 , chron. C. Landais et F. Lenica ; D. 2005. 3075 , note B. Quiriny ; RFDA 2006. 375, note B. Plessix - CAA Lyon, 9 déc. 2010, n° 09LY00211, M. Johannes - Il importe peu que l'exploitation ait été légalement autorisée ou non (CE, 10 juin 2011, n° 329899, M. Roulet).

* 38 C.E, 29 mars 2010, Communauté de communes de Fécamp, req. N°318886

* 39 CAA Nancy, 2 aout 2007, M. Durrenwaechter, req. n° 05NC01103

* 40 Cass, 3eme civ, 10 avril 2002, Sté Agip, n° 00-17.874

* 41 CE, 24 mars 1978, n° 01291, La Quinoléine, au Lebon - CE, 11 avr. 1986, n° 62234, S des produits chimiques Ugine Kulhman, au Lebon - CE, 8 juill. 2005, n° 247976, S Alusuisse Lonza France, au Lebon avec les conclusions; AJDA 2005.

* 42 Cass, 3ème Civ, 16 mars 2005 arrêt Hydro Agri N° 03-17875

* 43 Lorenzo Balzano, Camille Billmann Les apports de la loi « ALUR » dans le domaine des sites et sols pollués, RDI 2014. 432

* 44 Modifié par  LOI n°2014-366 du 24 mars 2014 - art. 173

* 45n° 2010-368

* 46 Livre V « prévention des pollutions, des risques et des nuisances », chapite IV « sites et sols pollués », titre V « dispositions particulières à certains ouvrages ou installations »

* 47 CE, 21 févr. 1997, n° 160787, Wattelez, C.E 21 févr. 1997, n° 160250, SCI Les Peupliers, C.E ass., 8 juill. 2005, n° 247976, Alusuisse 

* 48 CE, 26 juill. 2011, n° 328651, Commune de Palais-sur-Vienne

* 49 CE, 1er mars 2013, n° 348912, CE 1er mars 2013, n° 354188, CE, 25 sept. 2013, n° 358923

* 50 CE, 24 oct. 2014, n° 361231

* 51 C.E, 25 sept. 2013, Wattelez, n°N° 358923

* 52 CE, 24 oct. 2014, n° 361231, Note sous arrêt par Béatrice Parance

* 53 L 110-1 du Code de l'Environnement






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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe