Condensé du mémoire de Master 2 de
Christine CHEVEAU
2006
LA PRODUCTION DES BIOCARBURANTS EN PICARDIE :
QUELLES PERSPECTIVES POUR L'AGRICULTURE REGIONALE ?
UNIVERSITE DE PARIS-X NANTERRE
Master Recherche Sciences Humaines et
Sociales
Mention « Géographie et
Aménagement »
Spécialité « Mondialisation et
dynamiques rurales comparées »
Option « études rurales
comparées »
Directeur de mémoire : Jean-Paul
CHARVET
NB : mémoire terminé en juillet
2006- Le présent condensé a été
rédigé en novembre 2006. Les événements majeurs
survenus entre juillet et novembre 2006 ont été
intégrés entre crochets et en notes de bas de page.
INTRODUCTION
3
1° PARTIE : LE DEVELOPPEMENT DE
LA PRODUCTION DE BIOCARBURANTS EN PICARDIE EN 2004-2005 :
6
A- La Picardie : région
pionnière des biocarburants :
6
L'ensemble des agréments pour les
usines biodiesel en France représentait en 2004 387 500 tonnes, et celui
des unités de bioéthanol 111 000 tonnes.
6
La géographie de la production des
biocarburants est marquée par une profonde disparité entre le
nord et le sud de la France :
6
B- Des cultures encore marginales au
sein de la région :
10
Les cultures
« industrielles » représentaient 2% de la SAU de la
région pour la récolte 2004 :
10
Ces surfaces stagnent depuis
2000 :
11
Les insuffisances de l'approche des
cultures à destination des biocarburants par le biais des cultures
« industrielles » :
11
Les cultures à destination des
biocarburants sont inégalement réparties au sein de la
région Picardie:
12
2° PARTIE : LA PRODUCTION DE
BIOCARBURANTS : VERS UN DEBOUCHE IMPORTANT POUR L'AGRICULTURE
REGIONALE ?
15
A- Un nouvel élan pour le
développement des biocarburants qui se concrétise depuis
2005 :
15
I- La répartition globale entre
filières au niveau français - situation juin
2006 :
15
II- Une géographie agro-industrielle
qui se déconcentre, mais qui demeure marquée par un
déséquilibre entre le nord et le sud de la
France :
17
III- L'émergence de circuits courts
pour l'huile végétale :
19
IV- Des besoins accrus à
l'exportation :
21
B- Les surfaces destinées aux
biocarburants : d'une culture marginale à une culture occupant une
part significative des assolements ?
24
I- Le développement des surfaces
nécessaires au niveau national pour satisfaire les objectifs
français:
24
II- Les perspectives de
développement des surfaces de colza à destination des
biocarburants en Picardie:
24
III- Les perspectives de
développement des surfaces à destination du bioéthanol en
Picardie :
29
CONCLUSION
36
Annexes
39
INTRODUCTION
La production de biocarburants dans le monde
était quasi nulle en 1975, alors qu'en 2004, elle atteignait 35 millions
de tonnes. Il s'agit donc d'une industrie récente, qui a connu un
développement important ces 30 dernières années.
Cependant, ce développement est très inégal : le
Brésil est au 1° rang mondial avec 15,28 millions de m3 de
bioéthanol produits1(*) en 2004-2005, (soit environ 12 millions de tonnes), et
les Etats-Unis sont au 2° rang mondial avec une production de 3 400
millions de gallons d'éthanol en 20042(*) (soit environ 10 millions de tonnes) et de 25 millions
de gallons (environ 75 000 tonnes) de biodiesel3(*).
Le développement en Europe est plus
récent et moins important : l'Union européenne en 2005 a
produit 722 000 tonnes de bioéthanol et 3 184 000 tonnes de
biodiesel.
La législation européenne sur les biocarburants
a été plutôt faite de déclarations de bonnes
intentions dans les années 1980. La Commission a élaboré
un projet éthanol dans les années 1980, mais la confrontation des
intérêts divergents et les coûts budgétaires l'ont
incitée à renoncer fin 1987 à un programme de subvention.
Ayant à faire face à la fin des années 1980 au poids
financier de la PAC, la CEE ne voulait pas retomber dans un autre
système budgétairement lourd. Cependant, les mesures prises pour
réduire certaines émissions et supprimer la présence de
plomb dans l'essence sont essentielles à la fin des années 1980
pour comprendre le démarrage de la production de biocarburants en
Europe4(*). Au même
moment, la réforme de la PAC a également rendu possible ce
démarrage, avec le système de la jachère industrielle, qui
permet aux agriculteurs de continuer à produire des cultures à
finalité non alimentaires sur les terres qu'ils auraient dû geler.
Ces deux éléments, indépendants l'un de l'autre, ont eu
pour conséquence de convaincre au moins partiellement les
pétroliers et les exploitants agricoles de l'intérêt des
biocarburants.
La filière agricole s'est en effet réellement
tournée vers les biocarburants avec l'obligation de geler des terres,
mise en place pour réduire les excédents, mal supportée
par la profession, et la possibilité pour
« échapper » à ce gel de cultiver à
des fins non alimentaires. En 1993, R. Lévy écrivait dans
son rapport sur les biocarburants: « Nous pensons que notre
étude aura montré que le problème posé aujourd'hui
n'est pas un problème énergétique, mais seulement un
problème agricole. Il s'agit d'atténuer, pour notre agriculture,
le choc de la nouvelle PAC et de la mise en jachère »5(*).
2003 marque une rupture dans les directives de
l'Union européenne, avec l'adoption de la directive 2003/30/CE
« visant à promouvoir l'utilisation de biocarburants ou
autres carburants renouvelables dans les transports », et de la
directive 2003/96/CE « restructurant le cadre communautaire de
taxation des produits énergétiques et de
l'électricité ». L'Union européenne a
fixé des valeurs de référence pour les objectifs
nationaux d'incorporation des biocarburants:
- 2%, calculés sur la base de la teneur
énergétique, de la quantité totale d'essence et de gazole
mise en vente sur le marché à des fins de transport le 31
décembre 2005 au plus tard.
- 5,75%, calculés sur la base de la teneur
énergétique6(*), de la quantité totale d'essence et de gazole
mise en vente sur le marché à des fins de transport le 31
décembre 2010 au plus tard.
Pour atteindre leurs objectifs, les Etats membres peuvent
appliquer des exonérations totales ou partielles ou des
réductions du niveau de taxation des biocarburants, avec une modulation
effectuée en fonction du cours des matières premières,
pour éviter toute surcompensation par rapport aux carburants
traditionnels.
A ces deux directives s'ajoute un élément
important de la nouvelle réforme de la PAC : la possibilité,
dès 2004, de cultiver des terres hors jachère afin de produire
des biocarburants, en bénéficiant de la même aide
compensatoire aux surfaces que les cultures alimentaires correspondantes et
d'une aide supplémentaire de 45€ par hectare dite aide aux cultures
énergétiques (ACE ou « crédit
carbone »).
Ces deux directives et l'instauration du
« crédit carbone » s'inscrivent dans des
préoccupations environnementales croissantes et le souci de respecter le
protocole de Kyoto en termes de réduction des gaz à effet de
serre. Cependant, si elles marquent une rupture, elles ne sont pas une
révolution : les objectifs nationaux fixés par la directive
européenne ne sont, du moins pour l'instant, que des valeurs de
référence7(*).
De plus, si ces directives vont bien dans le sens du développement des
biocarburants dans l'Union, elles n'interdisent pas que ce développement
se fasse à partir d'importations.
Le développement des biocarburants en France
n'a débuté qu'après 1992, d'une façon d'abord assez
forte, mais avec ensuite un ralentissement net. Depuis 2003, le mouvement pour
le développement de la production des biocarburants connaît une
relance importante, vu les nouvelles directives européennes.
Ceci s'est traduit concrètement par la possibilité pour
l'éthanol en mélange direct dans l'essence de
bénéficier des exonérations de droits d'accise ainsi que
la création, par la loi de finances de 2005, de la TGAP (Taxe
Générale sur les Activités Polluantes) : cette taxe
est applicable à partir du 1° janvier 2005 sur les carburants
dès la première tonne de produit fossile mise à la
consommation. Les distributeurs de carburants peuvent s'exonérer de
cette taxe en incorporant du biocarburant dans le carburant qu'ils
commercialisent. Le montant de la taxe payée est fonction de la
différence entre le taux fixé par la loi pour les carburants
fossiles et le pourcentage de biocarburants incorporé. Chaque
année, il existe donc un taux d'incorporation qui permet au distributeur
de ne pas payer de taxe. La loi de finances pour 2005 fixait ce taux à
1,2% pour 2005 et 5,75% pour 2010. Ce système est relativement
incitatif, même si le niveau de la taxe pour les pétroliers qui ne
respecteraient pas cette obligation a été jugé
insuffisant, au moins les premières années, par nombre
d'observateurs, notamment de la filière agricole.
Pour l'heure, la production des biocarburants suscite un
engouement d'autant plus fort que le prix du pétrole s'est
envolé. Après avoir fixé via la TGAP en 2005 un objectif
de 5,75% (en valeur énergétique) d'incorporation de biocarburants
dans les carburants fossiles pour 2010, le gouvernement a décidé
d'accélérer le processus. La loi de finances de 2006 a
ramené cet objectif à 2008, et a fixé un objectif de 7%
pour 2010. Le taux d'incorporation de biocarburants dans les carburants
fossiles en 2004 n'étant que de 0,83%, les objectifs fixés sont
réellement ambitieux.
L'enjeu majeur pour les filières de
production de biocarburants devient de réussir à répondre
à la demande ainsi créée, en un temps très
court, tant au niveau des capacités de production industrielle
qu'à celui de la production de la matière première
agricole. Alors que les cultures destinées aux biocarburants
n'occupaient qu'une part marginale de la surface agricole française
(moins de 350 000 hectares en 2004), elles doivent pour répondre
aux objectifs connaître un accroissement rapide. La production nationale
de cultures destinées aux biocarburants devrait occuper plus de
1 500 000 hectares en 2008, et 2 000 000 d'hectares en
2010.
Ce développement des biocarburants est
réclamé par l'ensemble du monde agricole, même si les avis
divergent sur le mode de développement à adopter. En effet, face
à une PAC de moins en moins protectrice, qui veut développer une
agriculture tournée vers les marchés, le développement des
biocarburants est vécu comme l'émergence d'un nouveau
débouché.
Afin de tenter d'analyser dans quelle mesure la
production de biocarburants peut devenir un débouché important
pour l'agriculture française, nous étudierons ici plus
précisément les perspectives de développement des surfaces
cultivées pour l'approvisionnement des usines de biocarburants à
travers l'exemple de la Picardie. En effet, cette région est
particulièrement intéressante, car, région de grandes
cultures, elle a participé pleinement au développement depuis
1992 des trois grandes filières de production de biocarburants
(bioéthanol blé, bioéthanol betteraves, EMHV), tant au
niveau industriel qu'au niveau agricole.
Dans un premier temps, pour comprendre sur quelles bases la
relance de la production de biocarburants s'effectue, nous analyserons le
degré de développement de la production des biocarburants en
2004-2005, juste avant que les effets du plan biocarburant ne se fassent
réellement sentir: nous verrons quels avantages ont permis à la
Picardie de développer depuis 1992 des capacités industrielles de
production de biocarburants dans les trois filières, et comment
l'agriculture régionale répondait à ces besoins et
à ceux des usines limitrophes.
La relance du développement des biocarburants devrait
introduire un changement d'échelle, tant au niveau industriel
qu'agricole : nous étudierons dans un second temps quels sont les
débouchés potentiels qui s'ouvrent aujourd'hui pour les cultures
à destination des biocarburants, afin de tenter d'évaluer quelle
part et quelle importance ces cultures peuvent prendre dans les assolements
régionaux à l'horizon 2008-2010.
1° PARTIE : LE DEVELOPPEMENT DE LA PRODUCTION DE
BIOCARBURANTS EN PICARDIE EN 2004-2005 :
A- La Picardie :
région pionnière des biocarburants :
L'ensemble des
agréments pour les usines biodiesel en France représentait en
2004 387 500 tonnes, et celui des unités de bioéthanol8(*) 111 000 tonnes9(*).
Au niveau du bioéthanol, la répartition entre la
betterave et le blé est fortement
déséquilibrée : la part de la betterave est de 70%
(74 000 tonnes de bioéthanol issues de betteraves, 32 000 tonnes issues
de blé en 200410(*)). De fait, la filière bioéthanol est
dominée par les producteurs et industriels sucriers.
Les principales usines ont été mises en
activité avant 1998 : le développement s'est ensuite
nettement ralenti.
La géographie de la production des
biocarburants est marquée par une profonde disparité entre le
nord et le sud de la France11(*) :
Carte n°1 : élaboration personnelle- Fond
de carte : IGN
Les usines de production de biocarburants
agréées en 2004 sont assez peu nombreuses. Au niveau
géographique, elles sont concentrées dans le nord de la
France.
En fait, la carte des usines agréées ne
représente pas l'ensemble des usines de production de biocarburants, car
elle ne prend pas en compte les distilleries d'éthanol ne
possédant pas d'agréments propres, mais participant à
l'approvisionnement des unités d'ETBE. La plupart des distilleries
d'alcool produisent en effet également du bioéthanol pour
approvisionner les unités d'ETBE.
Carte n°2 : élaboration personnelle- Fond
de carte : IGN
Les distilleries ont une capacité de production de
bioéthanol modeste : il n'y a pas d'unité
« géante » entièrement dédiée
à la production de biocarburants. La plus grande distillerie en 2004
était celle d'Arcis-sur-Aube, avec une capacité de production
d'alcool et éthanol de 1 200 000 hectolitres/an (environ
95 000 tonnes). A titre de comparaison, en 2004, l'Espagne avait une
capacité de production de bioéthanol de 257 000 tonnes par an
avec seulement 2 usines de bioéthanol.
De fait, les usines de production de bioéthanol sont
assez nombreuses, avec des capacités de production de biocarburants
relativement modestes. A l'inverse, avec l'unité de Grand-Couronne,
pouvant produire 250 000 T de biodiesel, les usines de production de
biodiesel sont nettement moins nombreuses 12(*). La géographie de l'ensemble des usines est
marquée par une grande disparité entre le nord et le sud de la
France. Ces caractéristiques s'expliquent par plusieurs facteurs.
La concentration des usines de biocarburants dans le nord de la
France s'explique en partie par le fait que le Bassin parisien est le premier
centre de raffinage de carburants en France : la carte des unités
de biocarburants agréées montre une grande adéquation
entre sites de production d'ETBE et raffineries.
La localisation des bassins de production de colza, blé
et betteraves explique également en partie la concentration des usines
de biocarburants au nord de la France : les usines sont localisées
dans ou à proximité des bassins de production de la
matière première agricole.
Cependant, certains choix effectués lors de la
création de ces usines sont essentiels à analyser pour comprendre
la localisation des usines de productions de biocarburants en France et leur
nombre : dans le contexte d'une production naissante ne nécessitant
pas de grands volumes de production, il s'agissait d'abord de
limiter le coût des investissements et de valoriser les
infrastructures et les savoir-faire qui existaient déjà avant
l'apparition de ce nouveau débouché. Les moyens financiers
disponibles étaient relativement limités, d'autant plus que les
sociétés pétrolières, qui ont des capacités
de financement beaucoup plus grandes, n'ont pas souhaité investir de
façon très importante dans la filière. Ce mode de
développement explique par exemple la localisation de la première
usine de biodiesel à Venette, dans une région qui n'est pas la
principale productrice de colza en France.
Ce mode de croissance a favorisé la Picardie,
région de grande culture qui disposait déjà de
distilleries de betteraves et d'une usine de trituration d'oléagineux.
Cette région a ainsi développé des usines dans les trois
filières de biocarburants. Par ailleurs, cette région a
profité de sa proximité avec le port de Rouen pour participer
à l'approvisionnement de la seule usine de grande capacité,
appartenant à la filière biodiesel.
De fait, les cultures à destination des biocarburants sont relativement
développées en Picardie, mais elles n'occupent encore qu'une
faible part des assolements.
B- Des cultures encore
marginales au sein de la région :
Les cultures
« industrielles »13(*) représentaient 2% de la SAU14(*) de la région pour la
récolte 2004 :
Les cultures
« industrielles » sont surtout développées
dans le nord de la France, notamment dans les régions du Bassin
parisien.
Source : Les aides PAC aux surfaces, cahiers de
l'ONIC, ONIC-ONIOL/SCEES-DPEI, juin 2005- Fond de carte :
IGN
Discrétisation par méthode des seuils
naturels- Carte n°3 : élaboration personnelle
Cependant, les cultures « industrielles »
ont encore peu de poids dans la SAU de la Picardie. Environ 30
00015(*) hectares de
blé, colza et betteraves étaient contractualisés au titre
de la jachère industrielle ou de l'ACE pour la récolte 2004,
toutes utilisations industrielles confondues. Selon la statistique agricole
annuelle Agreste, il y avait en 2004 en Picardie 725 900 hectares de cultures
de blé, colza et betteraves : les cultures
« industrielles » occuperaient donc 4% de ces surfaces et
2% de la SAU16(*) de la
région. La Picardie représenterait environ 10% de la sole de
blé, colza et betteraves « industrielle »
française. L'année 2004 est cependant une mauvaise année
pour les cultures industrielles : le taux de jachère a
été abaissé à 5% et le report sur les cultures ACE
a été faible dans la région. En 2003, 34 000 hectares
avaient été cultivés au titre de la jachère
industrielle blé, colza et betteraves, soit 2,5% de la SAU de la
région. Malgré la présence de plusieurs usines
à approvisionner, les surfaces concernées par la production de
biocarburants demeurent donc faibles, car les volumes produits sont
limités.
En 2004, le colza « industriel »
(23 000 ha) représentait 34% de la sole colza de la région
avec une sole colza de 66 900 hectares17(*). Le blé « industriel » (5
000 ha) représentait un peu moins de 1% de la sole de blé, et la
betterave « industrielle » (1 000 ha) environ 0,7% de
la sole betteravière.
En 2003, avec 27 000 ha cultivés, le colza
« industriel » représentait 48% de la sole de
colza.
Seul le colza paraît donc avoir atteint une importance
réelle dans les assolements des agriculteurs. Cependant, même
pour cette plante, la Picardie a encore une production
« industrielle » peu développée : avec
23 000 hectares, cette culture ne représente que 2,5% de la SCOP
aidée18(*)+gel.
L'importance du colza « industriel » dans la sole colza
vient aussi du fait que le colza est relativement peu cultivé dans la
région.
Ces surfaces stagnent depuis 2000 :
Pour l'ensemble de la France, les surfaces
« industrielles » ont connu un maximum en 1999.
L'écart important entre les récoltes 1998 et 1999 est lié
au passage d'une obligation de gel de 5 à 10%. C'est également un
changement de taux de gel, de 10 à 5%, qui explique la diminution
significative des surfaces « industrielles » entre 2003 et
2004, même avec la création de l'aide aux cultures
énergétiques, qui s'est révélée assez peu
attractive.
L'évolution entre 2000 et 2003 est liée au
contexte de stagnation de la capacité de production de
biocarburants en France.
La Picardie suit cette
évolution générale:
milliers d'hectares
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
Colza
|
28
|
25
|
25
|
27
|
23
|
Tournesol
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
Blé éthanol
|
6
|
6
|
6
|
6
|
5
|
Betteraves
|
2
|
2
|
2
|
1
|
1
|
Autres
|
4
|
4
|
4
|
3
|
1
|
Total
|
40
|
36
|
37
|
37
|
30
|
Source : ONIOL/FIRS, surfaces sous contrats
industriels en Picardie, l'année mentionnée est l'année de
récolte. (jachère industrielle jusqu'en 2003, jachère
industrielle et ACE en 2004)
Les insuffisances de l'approche des cultures à
destination des biocarburants par le biais des cultures
« industrielles » :
Se servir des statistiques des cultures sur
jachère industrielle ou bénéficiant de l'aide aux cultures
énergétiques ne permet qu'une estimation approximative des
surfaces portant des cultures destinées aux biocarburants, surtout au
niveau d'une région comme la Picardie, et ce pour deux raisons
principales.
-Premièrement, il existe des débouchés
industriels autres que les biocarburants. Ainsi, une partie du blé
cultivé sur jachère industrielle, notamment dans la Somme, est
utilisée par l'industrie de l'amidonnerie. Environ 1 000 ha ont
été contractualisés dans ce cadre par des organismes
stockeurs dont le siège est dans la région en 2004, ce qui
représente environ 1/5° des surfaces blé en jachère
industrielle ou bénéficiant de l'ACE en Picardie. Ces surfaces
sont apparemment intégrées par l'ONIOL dans les surfaces de
« blé éthanol ».
-Deuxièmement, des cultures issues de surfaces non
aidées dans le cadre de la jachère industrielle et de l'ACE
peuvent être utilisées pour produire des biocarburants. C'est le
cas des betteraves utilisées dans les sucreries-distilleries. Selon la
CGB, en 2003, 1/3 des surfaces destinées à la production
d'éthanol carburant étaient issues de production hors
jachère industrielle, ce qui représentait environ 3 500
hectares pour toute la France. En 2004, cette part des surfaces hors
jachère industrielle mobilisées a augmenté du fait de la
baisse du taux de jachère : près de 50% des surfaces
utilisées pour la production de bioéthanol étaient hors
jachère cette année-là, ce qui représenterait pour
la Picardie environ 1 000 hectares de betteraves éthanol hors
jachère.
Utiliser les surfaces en jachère industrielle et
bénéficiant de l'ACE pour estimer les surfaces portant des
cultures à destination des biocarburants doit donc se faire avec
précaution. Pour 2004, on peut estimer la surface en colza
« biocarburant » à 21 000 hectares, celle de
betteraves à un peu plus de 2 000 hectares, et celle de blé
à un peu plus de 4 000 hectares.
Les cultures à
destination des biocarburants sont inégalement réparties au
sein de la région Picardie:
Au niveau de la région picarde, pour la betterave, la
géographie des cultures contractualisées pour produire le
bioéthanol suit dans ses grandes lignes celle des bassins de production
de la betterave, puisque pour la campagne 2004-2005, la quasi-totalité
des sucreries et/ou distilleries où livrent des planteurs de la
région proposaient des contrats éthanol, même si la
proportion de contrats éthanol par rapport aux quotas sucriers n'est pas
la même pour toutes les usines.
Pour le blé et le colza, l'approche de la localisation
des cultures qui peut être réalisée à
l'échelle des organismes de collecte19(*) permet de distinguer quelques éléments
remarquables dans la localisation des cultures destinées aux
biocarburants :
- Les cultures de blé et de colza sont relativement
dispersées : il n'existe pas d'organisme collecteur
spécialisé dans les cultures à destination des
biocarburants. Au niveau des exploitations agricoles, il existe même une
atomisation de la production.
- Presque tous les organismes stockeurs importants de la
région collectent du colza à destination des unités
d'estérification. En 2004, 17 des 20 coopératives ayant leur
siège en Picardie avaient contractualisé des surfaces en
jachère industrielle ou ACE.
- A l'inverse, seulement une partie des organismes collectent
du blé « industriel » à destination des
distilleries de bioéthanol: il s'agit essentiellement des organismes de
la moitié est de la région. D'autres organismes situés
plus à l'ouest participent également à la collecte de
blé à destination des biocarburants, mais indirectement,
puisqu'ils livrent du blé « alimentaire » à
l'usine Tate and Lyle, qui peut être en partie transformé en
biocarburants.
La répartition inégale des cultures
destinées aux biocarburants au sein de la région est d'abord le
reflet de l'inégale répartition des cultures de blé,
betteraves et colza « alimentaires », ainsi que du niveau
divers de production des filières biodiesel et bioéthanol.
Cependant, plusieurs phénomènes sont intéressants à
observer :
- Le développement plus faible de la culture de
colza en Picardie par rapport à d'autres régions est vrai pour le
colza « alimentaire » comme pour le colza
« industriel ». Cependant, il est moins accentué
pour le colza « industriel ». Pour 2004, la sole
de colza « industriel » picarde représente 8,5% de
la sole nationale de colza « industriel », ce qui est
supérieur à la part de la sole de colza
« alimentaire », qui ne représente que 5,5% de la
sole nationale de colza « alimentaire ». Il y a notamment
plus de colza « industriel » cultivé dans la Somme
que de colza « alimentaire ». Ceci est une des
conséquences spatiales du système de la jachère
industrielle. Les cultures sur jachère industrielle
bénéficient en effet d'un coût d'opportunité plus
faible que celles de la sole « alimentaire », car elles se
substituent au gel non productif. Or, celui-ci ne doit pas
générer de produits, puisqu'il est interdit de vendre son couvert
(l'exploitant ne peut s'en servir que pour autoconsommation après le 31
août), alors qu'il génère des charges, puisqu'il faut
l'implanter et l'entretenir (le gel n'est en aucun cas de la friche, toute
prolifération d'adventices indésirables est notamment interdite
sur les parcelles en gel).
-La réglementation sur la jachère industrielle
favorise une extrême dispersion des cultures
« industrielles ». Cependant, l'analyse menée ne
doit pas supposer une connexion entre flux de
comptabilité-matière liés aux contrats de jachère
industrielle et d'ACE et flux physiques réels, c'est-à-dire que
ce seraient bien les produits cultivés sur les jachères
industrielles qui seraient ensuite transformés dans les usines de
biocarburants. En fait, la réglementation européenne n'exige pas
cela : elle rend possible des « transferts » de
marchandise.
Soit une sucrerie A qui réceptionne X tonnes de
betteraves « industrielles », mais n'a pas de
capacité de distillation. La sucrerie-distillerie B peut prendre X
tonnes de betteraves non « industrielles » qu'elle a
elle-même réceptionnées et les transformer en
bioéthanol. En échange, les X tonnes de betteraves
« industrielles » vont être transformées en un
autre produit dans la sucrerie A. Pour la comptabilité-matière,
il y a bien eu X tonnes de betteraves « industrielles »
entrées et sorties de la sucrerie A, mais en réalité, les
betteraves n'ont pas eu à être physiquement transportées
jusqu'à l'usine B.
De fait, il n'y a pas de lien physique automatique et
obligatoire entre bassins de production de betteraves, blé ou colza
« industriels » et unités de production de
biocarburants. La carte de la jachère industrielle, en plus du
fait qu'il existe en dehors des biocarburants d'autres débouchés
industriels, ne donne donc pas une vision exacte du bassin de collecte
réel des diverses usines : il existe deux
géographies des cultures industrielles : la première est
liée aux contrats, la seconde aux flux physiques réels.
Vu les échanges entre silos d'un même organisme collecteur et le
type de contrats utilisés entre les divers organismes, ce bassin est
difficile à connaître précisément, et il peut
fluctuer en fonction de l'évolution des autres marchés.
- La structuration de la filière biodiesel avec
Diester Industrie, qui cherche à permettre l'accès aux
débouchés « industriels » à l'ensemble
des exploitants agricoles, même situés loin d'une usine
d'estérification, a permis un développement des cultures de colza
« industriel » sur une grande partie de la
région. En effet, le biodiesel est développé
essentiellement par une société, Diester industrie20(*), qui est détenue par
SOFIPROTEOL (l'établissement financier de la filière
oléagineux française) et SOPROL (société qui
détient également Saipol avec Bunge) à 66.66%, et par
FIDICOOP et FIDINEGOCE à 33.34%. FIDICOOP et FIDINEGOCE sont des
sociétés holding qui regroupent l'actionnariat de nombreux
organismes collecteurs et stockeurs de graines oléagineuses21(*).
A l'inverse, il n'existe pas à proprement
parler de filière bioéthanol blé, chaque usine ayant son
propre mode de développement et d'approvisionnement. En Picardie, le
bioéthanol blé est produit par deux sociétés,
TEREOS et Tate and Lyle, selon une logique très différente.
La volonté de Tereos est d'impliquer personnellement
chaque agriculteur : il est demandé à chaque exploitant
agricole qui veut livrer du blé destiné aux biocarburants de
verser une participation, qui permet de financer une partie des investissements
de l'usine, et de signer un contrat d'engagement pluriannuel. Pour qu'un
exploitant agricole puisse livrer, il faut donc que la coopérative ou le
négoce auquel il livre ait lui-même des droits à livrer, et
que cet exploitant ait versé une participation financière. Cette
organisation favorise donc une concentration des cultures du blé
« industriel » : un agriculteur qui ne livre pas dans
une coopérative associée au projet et/ou qui n'a pas pris un
engagement pluriannuel ne peut pas participer à ce système.
Pour approvisionner l'usine de Tate and Lyle, il n'existe pas
de filière propre aux biocarburants, car la distillerie utilise les
amidons les moins purs issus de l'activité amidonnière, qui sont
dans les autres usines de ce type souvent destinés à la
fabrication d'aliments du bétail. Selon les variations des prix des
marchés, des farines de meilleure qualité peuvent
également être transformées en alcool. La filière de
cette distillerie est donc celle des amylacées. De fait, l'usine
n'utilise pas pour cette activité de blé issu de jachère
industrielle ou bénéficiant de l'ACE.
Depuis 1992, la production industrielle des
biocarburants a crû en France d'une façon assez importante
comparativement aux autres pays européens. Cependant, cette production
avait pour la campagne de commercialisation 2004-2005 des besoins encore
relativement restreints. Ces besoins sont couverts par des unités de
production de biocarburants développées en grande partie à
partir d'usines déjà en activité, dans le but de limiter
les investissements nécessaires.
Ce mode de croissance a favorisé la Picardie,
qui a pu développer des usines dans les trois filières de
biocarburants. Par ailleurs, cette région a profité de sa
proximité avec le port de Rouen pour participer à
l'approvisionnement de la seule usine de grande capacité, appartenant
à la filière biodiesel.
L'approvisionnement de l'ensemble de ces usines a
induit un développement des cultures destinées aux biocarburants
dans la région. Les filières colza et betteraves ont
été développées sur l'ensemble de la région,
alors que celles du blé demeurent plus localisées. Cependant, le
développement de l'ensemble des filières demeure peu
important et la production des cultures contractualisées pour la
production de biocarburants est atomisée. Pour les exploitants
agricoles, il s'agit d'une production marginale, destinée surtout
à valoriser la jachère rendue obligatoire par la réforme
de la PAC de 1992.
Avec la relance du développement des
biocarburants, les quantités de biocarburants nécessaires pour
atteindre les objectifs gouvernementaux sont nettement plus importantes :
la production des cultures destinées aux biocarburants devrait sortir
ainsi de la marginalité.
2° PARTIE : LA PRODUCTION DE BIOCARBURANTS :
VERS UN DEBOUCHE IMPORTANT POUR L'AGRICULTURE REGIONALE ?
A- Un nouvel élan pour le développement
des biocarburants qui se concrétise depuis 2005 :
I-
La répartition globale entre filières au niveau français -
situation juin 2006 :
Suite aux directives européennes de 2003 citées
en introduction, le gouvernement français s'est engagé dans un
plan en faveur des biocarburants, annoncé en septembre 2004 lors de la
visite de J.P Raffarin à l'usine Diester de Venette. L'objectif
était alors l'incorporation en 2010 de 5,75% (en valeur
énergétique) de biocarburants dans les carburants classiques. Le
gouvernement a cependant souhaité ensuite accélérer le
processus et la loi de finances de 2006 a ramené l'objectif de 5,75% de
biocarburants incorporés à 2008 et a fixé pour 2010 un
objectif de 7%.
La première phase engagée en septembre 2004
annonçait la volonté de tripler la production de biocarburants en
2007. Pour cela, le gouvernement augmentait les agréments de
800 000 tonnes, dont 320 000 tonnes pour la filière
bioéthanol et 480 000 tonnes pour le biodiesel.
Lors de l'annonce de ces agréments, le gouvernement a
lancé une deuxième phase pour l'attribution entre 2006 et 2008
de 950 000 tonnes d'agréments supplémentaires. Ces tonnages
ont été révisés à la hausse dès
septembre 2005 ; les agréments pour 2008 ont été
portés à 1 800 000 tonnes, dont 465 000 tonnes
pour l'éthanol et 1 335 000 tonnes pour le biodiesel.
De nouveau, lors de l'annonce de ces agréments, le
gouvernement a lancé une nouvelle phase pour la période
2008-2010, de 1,1 millions de tonnes de biocarburants (950 000 tonnes de
biodiesel et 150 000 tonnes d'éthanol). Les résultats de ce
nouvel appel d'offre devraient être connus fin 2006.
Au total, pour 2010, les agréments
accordés seraient de 3 233 000 tonnes pour le biodiesel, et de
1 046 000 tonnes pour le bioéthanol.
A l'heure actuelle, sur 880 000 tonnes
d'agréments accordés en éthanol, il est difficile de
savoir précisément quelle sera la part du blé et celle de
la betterave. Les agréments n'étant notifiés qu'aux
intéressés, certains ne souhaitent pas en donner exactement le
détail. De plus, les parts du blé et de la betterave
prévues pourraient aussi être modifiées en fonction de
l'évolution plus générale des marchés
céréaliers et betteraviers.
Si Cristanol aboutit bien à une production
réalisée à 70% à partir de blé, la part de
l'éthanol blé sera supérieure à 40% de l'ensemble
de l'éthanol produit : il y a une modification réelle, au
sein de la filière éthanol, de la répartition entre la
betterave et le blé. Ceci est notamment lié à
l'intérêt accru des céréaliers pour cette
filière.
Les capacités de production finales annoncées
pour les diverses nouvelles usines sont importantes : Tereos a deux
projets, l'un de 240 000 tonnes, l'autre de 200 000 tonnes, Cristal
union et Champagne céréales ont un projet commun de 280 000
tonnes, le groupe Soufflet voudrait construire une usine de plus de
300 000 tonnes, Roquette a annoncé le chiffre de 160 000
tonnes, et Abengoa de 180 000 tonnes. D'ici 2010, la production
réelle des diverses usines serra cependant limitée par rapport
aux ambitions affichées. La capacité des nouvelles usines, si
l'on additionne l'ensemble des objectifs affichés par les industriels,
serait de plus de 1 350 000 tonnes, alors que les agréments
prévus par le gouvernement pour atteindre 7% de biocarburants
incorporés en 2010 sont de 1 046 000 T. De plus, des usines
déjà en activité veulent elles aussi saturer leurs
capacités de production, et, pour certaines, les augmenter.
Dans le contexte d'une production sous
agréments, avec des perspectives à l'export limitées par
un possible développement des importations d'éthanol depuis les
pays tiers, certains projets n'atteindront peut-être pas leur objectif de
production finale d'ici 2010, et ce d'autant plus que les freins nationaux au
développement du bioéthanol sont encore forts. En effet,
l'envolée rapide des agréments ne conduit pas forcément
à une croissance toute aussi rapide de la production de biocarburants.
Evidemment, un délai est nécessaire pour la construction de
nouvelles unités, mais, au-delà de cet aspect technique, un
blocage important pèse sur la filière bioéthanol. Les
pétroliers, défavorables à l'incorporation directe
d'éthanol dans l'essence, ne semblent pas, au dire des promoteurs des
biocarburants, mettre à la vente sur le marché français
des bases essence à basse volatilité qui permettraient aux
mélanges éthanol-essence de respecter les normes
européennes en vigueur en la matière.
Ainsi, la relance du développement des biocarburants
en France depuis 2005 se veut ambitieuse, même si certains blocages
freinent sa pleine réalisation pour le bioéthanol. Pour le
biodiesel, l'organisation de la filière oléagineux et le soutien
des pétroliers permettent d'éviter les écueils
rencontrés par le bioéthanol, même si le
développement de l'EMVH colza est confronté à une autre
difficulté : l'augmentation importante nécessaire de la sole
de colza française, défi qui sera analysé plus loin. Cette
relance oblige à la construction de nouvelles usines, de taille plus
importante, qui suit en partie de nouvelles logiques de localisation.
II- Une géographie agro-industrielle qui se
déconcentre, mais qui demeure marquée par un
déséquilibre entre le nord et le sud de la France :
1°) Les nouvelles
usines de la 1° phase (2005-2007) se déconcentrent :
Carte n°4 : élaboration personnelle-
Fond de carte : IGN
L'essentiel de la production de biodiesel et de
bioéthanol demeure situé dans le nord de la France. Malgré
le projet de Sète, plus de 80% de la production de biodiesel sera
concentrée dans la moitié nord de la France. De même, plus
de 80% des agréments d'éthanol (hors ETBE) seront situés
dans cette moitié nord.
Les projets de la filière biodiesel
privilégient des usines à grand volume regroupant sur un
même site trituration, raffinage et estérification. Ils favorisent
des situations d'interface entre zones de production, raffineries et zones de
consommation.
Pour la filière bioéthanol, le
développement de la production va d'abord se faire par saturation des
capacités existantes. Cependant, il existe plusieurs projets de
construction d'usines de grande capacité, dont certaines suivent de
nouvelles logiques de localisation. C'est le cas du projet de Lillebonne et de
celui de Lacq dont les logiques se rapprochent de celles de la filière
biodiesel. Ils privilégient une situation d'interface entre zone de
production de céréales et raffineries de pétrole.
Ainsi, avec le développement d'usines construites
spécialement pour la filière biocarburant, le poids de la
localisation des industries de raffinage de pétrole se renforce.
2°) La carte des
usines de biocarburants à l'horizon 2008 :
Carte n°5 :
élaboration personnelle- Fond de carte : IGN
Pour la filière biodiesel, deux unités se
situent dans la moitié sud de la France, mais cinq nouvelles
unités seront construites dans le nord. Pour la filière
bioéthanol, aucune nouvelle usine n'est prévue dans le sud de la
France. La géographie des biocarburants demeure donc majoritairement
localisée dans la moitié nord de la France.
Les projets
bioéthanol sont en continuité avec les logiques connues pour
cette filière ; à l'inverse, la
deuxième phase marquera un changement important dans le
développement de la filière biodiesel. En effet, alors que
celle-ci s'est développée essentiellement à partir d'huile
de colza, une partie des nouveaux agréments a été
accordée à des usines qui produiront du biodiesel à partir
d'autres matières premières : huiles animales (EMHA) et
huiles usagées.
Pour la filière du biodiesel issu directement de
graines oléagineuses, le maillage du territoire par les usines
d'estérification se complète et est nettement moins
dissymétrique que celui de l'ensemble des usines de biodiesel : la
filière diester veut favoriser une couverture de l'ensemble des bassins
de production de colza et tournesol.
Les premières phases d'augmentation des
agréments de biocarburants continuent de favoriser la Picardie, surtout
dans la mesure où cette augmentation se réalise encore à
partir d'usines préexistantes, mais ce mode de développement
rencontre certaines limites liées en particulier à l'âge de
ces usines. Par exemple, l'usine de Venette ne peut plus augmenter ses
capacités de raffinage : une partie de l'huile
estérifiée dans la nouvelle unité devra donc venir d'un
autre site. Si les deux unités d'estérification fonctionnent
à 100 000 tonnes chacune, se seront près de 400 tonnes
d'huile par jour qui manqueront. Les contraintes liées à
l'âge de ce site pèsent réellement sur son fonctionnement
et ses perspectives de développement.
De plus, l'absence d'interface importante avec des
raffineries défavorise nettement la Picardie, notamment pour le
bioéthanol blé : TEREOS, groupe coopératif
originaire de la région, a choisi d'installer son unité en
Normandie.
[Une troisième phase d'agréments a
été accordée en octobre 2006. Pour le bioéthanol,
les nouveaux agréments (200 000 tonnes) ont tous été
à des projets déjà agréés. L'usine Tereos
d'Origny a ainsi reçu 30 000 tonnes supplémentaires, et
celle de Lillebonne 7 500 tonnes. Pour la filière biodiesel
(900 000 tonnes d'agréments), de nouveaux projets ont
été agréés, dans le même esprit que pour la
deuxième phase, et des compléments ont été
accordés pour des unités déjà
agréées. Pour le bioéthanol comme pour le biodiesel, cette
nouvelle tranche d'agréments ne modifie pas fondamentalement la donne
pour la région Picardie]
Depuis 2005, une véritable relance du
développement des biocarburants en France a été
opérée par le gouvernement, dans le but d'atteindre, voire de
dépasser les objectifs de la directive européenne de 2003. Ce
plan de relance se manifeste essentiellement par l'octroi de nouveaux
agréments à des usines de biocarburants. Cependant,
parallèlement à ce développement à échelle
agro-industrielle, certains acteurs agricoles souhaitent développer des
filières plus courtes.
III- L'émergence de circuits courts pour
l'huile végétale :
1°) Une
législation très peu incitative :
Le code des douanes, dans son article 265, interdit
l'utilisation à la carburation, la vente ou la mise en vente pour la
carburation de produits dont l'utilisation et la vente pour cet usage n'ont pas
été spécialement autorisées par des
arrêtés du ministre de l'économie et des finances et du
ministre de l'industrie. L'article 265 ter prévoit une
taxation d'office en cas d'utilisation d'un carburant sans l'autorisation
requise.
La loi d'orientation agricole adoptée en
janvier 2006 ouvre la possibilité d'utiliser à partir de 2006
l'huile végétale pure en autoconsommation dans les engins
agricoles sans paiement de la TIC. Cette mesure a été
prise grâce à la directive européenne 30/2003, qui permet
l'utilisation des HVP, et sous la pression d'un milieu agricole qui a dû
faire face à une augmentation significative du prix du gazole au cours
de l'année 2005.
A partir du 1° janvier 2007, cette même loi
autorise la vente d'huile végétale pure pour un usage
agricole ou l'avitaillement des navires de pêche
professionnelle. Les modalités de cette autorisation seront
fixées par des décrets ultérieurs.
2°) des
difficultés techniques réelles :
Utiliser de l'HVP nécessite de prendre certaines
précautions, voire de réaliser des modifications au niveau
mécanique, suivant le type de moteur et le taux de mélange
HVP-diesel souhaité.
L'Institut Français des Huiles Végétales
Pures, association de promotion de l'utilisation des HVP, indique que
jusqu'à 5% d'HVP dans un véhicule à moteur diesel, aucune
modification du moteur n'est nécessaire, quel que soit le type de
moteur. Par contre, de 5 à 30%, l'installation de kits de bicarburation
est nécessaire pour les moteurs HDI et TDI. Au-delà de 30% de
HVP, tous les moteurs doivent être adaptés.
La proportion d'huile utilisable est également fonction
de la température extérieure : l'HVP est difficile à
utiliser quand les températures sont basses.
Surtout, il n'existe pas pour l'instant de normes pour
l'HVP : les diverses caractéristiques des huiles pressées
varient et sont plus ou moins adaptées à une utilisation comme
carburant. Cependant, des normes ont été mises au point
et testées, notamment en Allemagne, ce qui pourrait permettre une
avancée assez rapide dans ce domaine.
3°) Un prix de
revient relativement élevé :
Le prix de revient de l'huile végétale pure
concurrence difficilement le gazole, d'autant plus que les exploitants
agricoles bénéficient d'exonérations de TIPP pour leur
consommation de carburants.
Les diverses méthodes de calcul, si elles ne permettent
qu'une estimation, et si elles varient dans le temps en fonction des prix de
vente des graines et tourteaux, montrent cependant que, pour l'exploitant
agricole, préférer l'autoconsommation de son HVP par rapport
à l'achat de carburant à l'extérieur n'est pas
évident économiquement.22(*)
4°) Un
développement embryonnaire :
Il existe un intérêt réel des
agriculteurs pour le pressage du colza à la ferme, mais qui n'est pas
centré que sur la production de biocarburants : il s'agit d'une
démarche plus globale visant d'une part à la réduction des
coûts d'approvisionnement des exploitations, avec l'utilisation de l'HVP
mais aussi des tourteaux en autoconsommation, et/ou d'autre part à
l'augmentation de la valeur ajoutée à la ferme des produits
vendus sous forme d'huile carburant ou autres.
Par ailleurs, certains organismes collecteurs
d'oléagineux pourraient également investir dans des presses, et
produire de l'huile végétale à destination de la
carburation agricole, mais aussi de systèmes de chauffage pour des
entreprises ou des collectivités.
Compte-tenu de l'importance des tourteaux dans cette
production, ce seront certainement les exploitations en
polyculture-élevage qui s'intéresseront le plus à
l'HVP : dans ce contexte, la Picardie, qui n'est pas une grande
région d'élevage, sera peut-être moins engagée dans
ce type de filière courte que d'autres régions.
Ainsi, après une phase de stagnation, le
développement de la production des biocarburants en France connaît
une forte relance, qui se traduit par une multiplication des projets, tant au
niveau des circuits longs que des circuits courts de production. La Picardie
demeure cependant dominée par les besoins générés
par les circuits longs. De plus, la région pourrait aussi participer
à l'approvisionnement d'usines d'autres pays de l'Union
européenne
IV- Des besoins accrus à l'exportation :
1°) Les besoins en
colza se renforcent :
Certains organismes collecteurs
d'oléo-protéagineux français ont déjà des
contrats de jachère industrielle ou ACE avec des usines de trituration
d'autres pays de l'U.E, et en particulier avec des usines allemandes. Ce type
de contrat est cependant plus courant dans l'est de la France que dans le
nord.
De plus, selon une étude menée par l'INRA, la
production potentielle d'huile de colza sur surfaces en jachère
industrielle ou bénéficiant de l'ACE était de 909 000
tonnes, pour une production de biodiesel de 1 844 000 tonnes23(*) : ce seraient donc
près de 900 000 tonnes d'huiles
« alimentaires » de colza qui ont dû être
utilisées en 2004 au niveau européen pour la production de
biodiesel, cet usage venant en concurrence directe avec les usages
traditionnels de cette huile. La France participe donc déjà par
ses exportations de graines et/ou d'huile « alimentaires »
à l'approvisionnement des autres pays de l'U.E. Avec la croissance du
biodiesel dans l'ensemble de l'Union, ce marché pourrait se renforcer.
La région Picardie pourrait être plus
particulièrement impactée par le développement de la
production des biocarburants en Belgique. En effet, la Belgique a adopté
un système de promotion des biocarburants proche du système
français, basé sur des réductions de taux d'accise
accordées aux biocarburants produits dans des usines
agréées. L'objectif d'incorporation a été
fixé à 3,37% pour le biodiesel en 2006, avec une augmentation les
années suivantes de 0,92%/an, plafonnée à 5%. La loi
concernant les biocarburants du 10 juin 2006 a fixé un volume maximal
d'agréments de 475 millions de litres (environ 400 000 tonnes) pour
la période octobre 2007-décembre 2008 et de 380 millions de
litres (330 000 tonnes) pour les années 2009 à 2012.
L'appel d'offres pour l'obtention des agréments est en
cours, les résultats devraient être connus à l'automne
2006. [Fin octobre 2006, une première tranche d'agréments de
la filière biodiesel a été accordée aux usines pour
une durée de 11 mois : Proviron (Ostende-48.32 millions de litres,
soit 42 648T), Flanders Bio Fuel (Gistel-40.68 millions de litres, soit 35 905
T), Oléon (Ertvelde- 72 millions de litres, soit 63 548T),
Néochim (Feluy- 125 millions de litres, soit 110 327T). Une seconde
tranche sera accordée ultérieurement. ]
Pour alimenter ces usines, la Belgique dispose d'une
production nationale de colza extrêmement limitée. En 2005,
5 600 ha étaient ensemencés en colza, pour une production de
24 000 tonnes24(*)
(qui permettent donc théoriquement de produire 9 500 tonnes de
biodiesel). Les emblavements semblent avoir presque doublé pour la
récolte 2006, mais la production demeure très faible. La Belgique
aura donc besoin d'importer massivement des graines oléagineuses.
2°)
L'émergence de besoins en blé à destination de la
production de bioéthanol:
Plusieurs pays de l'Union européenne, pour atteindre
l'objectif de 5,75% de biocarburants incorporés en respectant une
répartition équitable entre diesel et essence, ont
développé ou développent actuellement des projets d'usines
de bioéthanol.
C'est le cas de la Belgique, dont les besoins pourront
particulièrement toucher la Picardie, du fait de sa proximité
géographique. Pour le bioéthanol, l'objectif (et le plafond)
était prévu à 7%, soit 1,9 millions d'hectolitres. Mais le
développement des usines de biocarburants en Belgique est un sujet
communautaire polémique. Dans ce contexte, les agréments
prévus ont été portés par la loi du 10 juin 2006
à 2,5 millions d'hectolitres d'éthanol, soit environ 200 000
tonnes pour la période 2008-2012. L'objectif pour l'éthanol est
donc supérieur à l'objectif européen de 5,75% qui
représenterait pour la Belgique 120 000 tonnes d'éthanol.
Pour produire 200 000 tonnes d'éthanol/an, la
Belgique aurait théoriquement besoin de mobiliser 700 000 tonnes de
blé, soit 80 000 hectares avec un rendement de 8.8
tonnes/ha25(*). La
production de blé en Belgique en 2005 a été de
1 740 000 tonnes : 700 000 tonnes de blé
représentent 40% de cette production. Cependant, une partie de
l'éthanol sera produit à partir de betteraves. Produire 2/3 de
l'éthanol belge avec du blé nécessiterait près de
470 000 tonnes de blé, soit 27 % de la production de froment belge.
Les besoins sont donc relativement importants et devraient
être supérieurs à ces estimations, dans la mesure où
certaines usines pensent également vendre hors agréments ou
produire pour l'exportation vers d'autres pays de l'U.E. C'est la
volonté clairement affichée du groupe Südzucker.
Trois usines devraient bénéficier des
agréments belges d'éthanol : elles seraient situées
à Wanze, Gand et Anvers. [Informations disponibles en juillet 2006-
en octobre 2006, les agréments accordés ont
été : Bio Wanze, 125 millions de litres/an, environ 100 000
T ; Alco Bio Fuel (Gand), 91 millions de litres/an, 72 000 T ; Tate
and Lyle (Alost), 32 millions de litres/an, 25 500 T, peu d'informations sont
disponibles sur ce dernier projet]. Les projets de Wanze et Gand sont des
projets de 300 000 m3/an chacun, environ 240 000 tonnes. L'usine de
Wanze, développée par le groupe Südzucker, devrait à
terme utiliser 2/3 de blé et 1/3 de betteraves, ce qui représente
800 000 tonnes de blé pour produire 300 000 m3
d'éthanol et 55 000 tonnes de gluten. L'usine de Gand semble devoir
utiliser avant tout du blé. Pour les usines de Wanze et Gand, les
besoins pour produire 400 000 tonnes d'éthanol à partir de
blé26(*) seraient
de 1 400 000 tonnes de blé. Ceci représente une
évolution importante des utilisations du blé en Belgique,
principalement tournées à l'heure actuelle vers l'alimentation
animale et l'alimentation humaine27(*). Le développement de la production
d'éthanol en Belgique va donc consolider les importations de blé
de ce pays, déjà conséquentes (3,5 millions de tonnes en
2003, 3 millions de tonnes en 200428(*)). Les importations en provenance de France ont
représenté un peu moins de 50% de ces importations en 2003-2004.
Si la France participait à 50% à l'approvisionnement des usines
de Wanze et Gand, ce marché représenterait plus de 700 000
tonnes de blé, ce qui est loin d'être négligeable,
comparé aux besoins générés par les usines
françaises pour atteindre l'objectif de 5,75% d'incorporation, qui
seraient de 1,9 millions de tonnes si ces usines produisaient leur
éthanol à 60% à partir de blé. Le nord de la
France, frontalier, a pleinement son rôle à jouer dans cet
approvisionnement.
Carte n°6 : élaboration personnelle-
Fond de carte Philcarto
Ainsi, avec la relance du développement des
biocarburants au niveau de l'Etat français, l'intérêt accru
des agriculteurs pour les filières courtes de production, et
l'accélération généralisée du
développement de la production des biocarburants dans l'ensemble des
pays de l'Union européenne, la production de matières
premières agricoles destinées à l'approvisionnement des
diverses filières, relativement marginale jusqu'alors, va
nécessairement occuper une part plus importante des assolements en
Picardie.
B- Les surfaces destinées aux biocarburants :
d'une culture marginale à une culture occupant une part significative
des assolements ?
I- Le développement des surfaces
nécessaires au niveau national pour satisfaire les objectifs
français:
Selon le Ministère de l'Economie, des Finances et de
l'Industrie29(*), il
faudrait 2,3 millions de tonnes de biodiesel et 900 000 tonnes de
bioéthanol en 2008 pour atteindre l'objectif d'incorporation de 5,75%.
C'est sur cette base qu'ont été attribués les
agréments des première et deuxième phases du plan
biocarburants.
II- Les perspectives de développement des
surfaces de colza à destination des biocarburants en Picardie:
1°) Un potentiel de
développement important :
Pour analyser les perspectives de développement des
surfaces de colza à destination des biocarburants dans la région,
il serait faux de partir des besoins des usines locales. En effet, les besoins
de la filière au niveau national, voire européen, sont tels que
tout ce que la Picardie pourra produire en colza dans les prochaines
années trouvera débouché.
La Picardie n'est pas une grande productrice de colza :
cette culture subit la concurrence de têtes de rotation plus
rémunératrices, comme la betterave ou la pomme de terre. De fait,
le potentiel de développement du colza en Picardie dépend d'abord
de l'évolution de la marge dégagée par cette culture.
Des prix qui tendent à augmenter :
Le cours de
l'huile de colza profite actuellement du développement de la production
de biodiesel. Alors que la consommation d'huile pour l'alimentation stagne,
c'est la forte croissance de la demande en biodiesel en Europe qui soutient les
prix de l'huile de colza sur les marchés européens.
Les achats européens en huile de colza pour la
production de biocarburants réalisés hors contrats de colza
« industriel » ou ACE, donc sur le marché du colza
« alimentaire », comme expliqué plus haut, ont
entraîné une croissance forte du prix de l'huile de colza.
Cette croissance du prix de l'huile de colza, qui tend
grâce au biodiesel à se déconnecter des fluctuations du
soja, est rendue possible avant tout parce que l'industrie européenne
utilise essentiellement de l'huile de colza pour la production des
biocarburants. La réglementation européenne crée en
particulier un marché « captif » pour le colza au
travers de l'indice d'iode maximal fixé par la norme EN 14214.
Cependant, le quasi-monopole de l'huile de colza dans la
production de biodiesel en Europe pourrait être limité assez
rapidement par l'envolée de ses cours. La Commission européenne
est déjà en train de travailler à une révision de
la norme 14214, afin de « permettre l'utilisation d'une gamme plus
étendue d'huiles végétales dans le biodiesel »,
en optant « pour une démarche
équilibrée » entre production communautaire et
importations30(*).
De fait, si, à court terme, tout laisse à
penser que le cours de l'huile de colza continuera de profiter du
développement du biodiesel en Europe, et sera relativement
déconnecté du cours des autres huiles, à moyen terme,
cette déconnection peut se révéler peu durable. Cependant,
si jusqu'à présent seule l'Europe s'est réellement
intéressée au biodiesel, il n'en est plus de même
aujourd'hui : plusieurs pays, dont les Etats-Unis et le Brésil, ont
lancé des plans ambitieux de développement du biodiesel, à
base d'huile de palme et de soja notamment. Ceci devrait également peser
sur les disponibilités de ces huiles, développer des concurrences
entre leurs usages alimentaires et industriels, et pourrait donc aussi
provoquer une certaine augmentation du cours de l'ensemble des huiles.
Le lien entre augmentation des cours de l'huile de colza et
augmentation des cours de la graine de colza n'est cependant pas
automatique : l'augmentation des prix de la graine de colza pour la
campagne de commercialisation 2005-2006 a été inférieure
à celle de l'huile, le développement des capacités de
trituration étant encore limité.
Ainsi, le prix du colza « industriel » ne
connaît pas d'envolée, mais il est tout de même en
augmentation; le colza devient plus attractif pour les agriculteurs, d'autant
plus qu'avec le développement des capacités de trituration en
Europe, le cours de la graine de colza devrait être moins en
décalage avec celui de l'huile de colza sur les prochaines
campagnes : la production de colza pourrait même devenir
insuffisante pour répondre à la demande des triturateurs.
Cependant, vu le recours possible aux importations à moyen terme, ce
phénomène devrait n'être que conjoncturel.
Les rendements ont des
perspectives d'augmentation réelles :
Après avoir augmenté au début des
années 1990, les rendements régionaux en colza ont diminué
à partir de 1997. Cependant, ils augmentent à nouveau depuis
2000, de façon relativement régulière. La lutte contre le
phoma, maladie qui touche le colza, surtout dans les régions où
cette culture revient fréquemment sur une même parcelle, pourrait
aussi permettre d'améliorer les rendements.
Une marge qui devrait
s'améliorer:
Les perspectives d'évolution de marge du colza
« industriel » devraient donc au moins dans un premier
temps bénéficier du marché « captif »
de l'huile de colza, même s'il n'est pas sûr que ce
phénomène soit durable.
Ceci est d'autant plus à l'avantage du colza que les
marges d'autres cultures « concurrentes » n'ont pas les
mêmes perspectives. Le colza « industriel » se
développe d'abord au détriment du colza
« alimentaire », mais il devrait aussi se développer
en remplacement d'autres cultures, dont le pois protéagineux. Ce
développement ne sera pas homogène sur l'ensemble de la
région, mais il est possible y compris dans des zones qui jusqu'ici
cultivaient peu de colza, comme le Santerre, où le pois était
relativement développé jusqu'alors.
Les surfaces contractualisées pour la récolte
2006 sont de 58 000 hectares31(*). La croissance des surfaces en colza
« industriel » en Picardie entre 2005 et 2006 est de 53%,
ce qui est proche de l'évolution nationale (+ 49%), mais en retrait par
rapport à la campagne précédente (+65%).
La sole totale en colza pour la récolte 2006 selon les
estimations de l'ONIGC est de 87 000 hectares, en progression de 16,5% par
rapport à la récolte précédente. Le colza
« industriel » représenterait 67% de cette surface
totale : la surface en colza « alimentaire »
régresse.
Les courbes de tendance réalisées à
partir de l'évolution des surfaces depuis 2004 laissent à penser
que pour la récolte 2008, les surfaces en colza
« industriel » pourraient se situer entre 70 et 90 000
hectares.
Il est difficile de prévoir l'évolution à
plus long terme, car elle dépend de l'évolution des prix du
colza, sur laquelle va peut-être peser une ouverture plus grande aux
importations d'huile en provenance des pays tiers pour la production d'EMHV, et
du différentiel de marge entre les diverses cultures.
Par ailleurs, comme cela a déjà
été indiqué, une partie du colza produit sur sole
« alimentaire » pourra servir en réalité, de
façon « invisible » pour les exploitants agricoles,
à approvisionner des usines d'estérification, notamment dans des
pays voisins comme l'Allemagne ou la Belgique, qui ont des besoins
supérieurs à leur production de colza
« industriel ».
Source : ONIOL/FIRS 2000-2005 - ONIGC 2006 - ces surfaces
comprennent également d'autres utilisations que les biocarburants
Les perspectives de développement des surfaces pour la
production de bioéthanol ne sont pas de même ordre : elles ne
nécessitent pas de forte augmentation des surfaces cultivées en
blé et en betteraves en remplacement d'autres cultures, mais
plutôt un changement de destination finale des surfaces actuelles. De
fait, pour essayer d'estimer les perspectives de développement des
surfaces à destination du bioéthanol en Picardie, la
démarche ne doit pas comme pour le colza tenter de cerner les
possibilités de développement des cultures de blé et
betteraves dans la région, mais partir des besoins des diverses usines
que la région peut approvisionner.
III- Les perspectives de développement des
surfaces à destination du bioéthanol en Picardie :
Pour le blé, la région
approvisionnera essentiellement les usines de Lillebonne (Tereos) et Nesle
(Tate and Lyle), ainsi que les usines belges.
1°)
L'approvisionnement de l'usine de Lillebonne :
L'usine de bioéthanol blé d'Origny devrait
cesser de fonctionner. Il n'y aura donc plus en Picardie que l'usine Tate and
Lyle de Nesle. Cependant, le projet de Lillebonne touche pleinement la
région Picardie.
Le projet de Lillebonne représente un réel
changement d'échelle par rapport à l'usine qui existait à
Origny. La nouvelle usine a reçu un agrément pour 145 000
tonnes d'éthanol, auxquels il faut ajouter quelques milliers de tonnes
d'agréments que possédait la distillerie blé d'Origny.
L'objectif de production est de 200 000 à 240 000 tonnes de
bioéthanol blé. L'usine devrait si elle atteint cet objectif
utiliser entre 700 000 et 850 000 tonnes de blé, soit entre
75 000 et 95 000 hectares avec un rendement de 9T/ha, qui devraient
être produits d'abord sur jachère industrielle et surfaces
bénéficiant de l'ACE.
Carte n°7 : élaboration personnelle-
Fond de carte : IGN
Le fonctionnement de cette usine sera de même type que
celui décrit pour l'usine d'Origny-Sainte-Benoîte : pour y
accéder, les agriculteurs devront livrer à un organisme
collecteur associé au projet et payer des « droits
d'entrée ». A l'heure actuelle, ces organismes sont :
Unéal, Céréna, Hubau, Cohésis, Ax'ion,
Océal, Agralys, Epis-centre, la coopérative d'Artenay et l'union
de commercialisation Beauce Gâtinais Céréales32(*). 50% des investissements
nécessaires pour la construction de l'usine de Lillebonne devraient
être couverts par des fonds propres, constitués des apports
« de quelques 40 000 agriculteurs et de leurs
coopératives céréalières »33(*). Les organismes collecteurs de
l'ouest de la Picardie, comme ceux de Normandie, ne sont pas partenaires du
projet Tereos, malgré leur proximité géographique.
La Picardie et le Nord-Pas-de-Calais devraient approvisionner
l'usine de Lillebonne pour la production d'au moins 200 000 tonnes
d'éthanol, ce qui devrait représenter entre 350 et 400 000
tonnes de blé, soit 45 000 hectares, approximativement 15% de la
collecte de ces organismes. Il y avait en région Picardie et
Nord-Pas-de-Calais un peu plus de 750 000 hectares cultivés en
blé tendre en 2004, le nouveau débouché
représenterait donc entre 5 et 6% de la surface en blé de ces
régions. Pour la seule région Picardie, on peut estimer que 260
à 300 000 tonnes de blé seront contractualisées, soit
9 à 10% de la collecte de l'Aisne et de l'Oise, ce qui
représente 29 à 33 000 hectares avec un rendement de 9T/ha.
Les tonnages concernés étant sans commune mesure
avec ceux de la distillerie de blé d'Origny, le rayon moyen de collecte
va forcément être beaucoup plus étendu. Vu
l'éloignement géographique de plusieurs des collecteurs
associés au projet, une partie non négligeable de la collecte
pourra provenir en réalité de « transferts ».
A l'annonce du projet, aucun organisme de collecte proche de Lillebonne n'a
été associé. Les zones de collecte importantes des
entreprises les moins éloignées de Lillebonne sont situées
à plus de 120 km de l'usine (Yvelines, nord de l'Eure-et-Loir, ouest de
l'Oise). Cependant, il est possible que, pour faciliter les
« transferts » de céréales, de nouveaux
organismes collecteurs rejoignent le projet. La coopérative Cap Seine a
notamment émis publiquement son souhait de le faire.
Avec son réseau fluvial, l'Oise dispose d'une liaison
privilégiée vers Rouen : Océal comme les Ets Hubau
possèdent des capacités de stockage à Pont-Sainte-Maxence.
De ce point de vue, l'Eure-et-Loir est moins avantagée.
A l'inverse, l'Aisne et le Nord-Pas-de-Calais disposent de
bonnes liaisons vers d'autres destinations, dont Dunkerque et les ports belges.
Ainsi, ils pourraient être moins tentés d'approvisionner
réellement l'usine de Rouen que certains départements du Centre
qui disposent pourtant de moins bonnes liaisons avec Rouen, mais qui n'ont pas
assez d'autres débouchés.
Le prix payé par Tereos fonctionne sur le
système du prix d'acompte, avec d'éventuels compléments de
prix. La faible attractivité du blé à destination des
biocarburants s'est vu lors de la campagne 2004-2005 : le taux de
jachère ayant été réduit de 10 à 5% de la
SCOP, les surfaces de blé éthanol en Picardie ont baissé
de 24%, et 200ha seulement ont été contractualisées pour
bénéficier de l'aide aux cultures énergétiques. Le
développement du bioéthanol n'ouvre pas en soi un marché
plus fortement rémunérateur que les débouchés
traditionnels du blé.
Cependant, Tereos se dit capable d'assurer pour approvisionner
son usine de Lillebonne un prix proche de celui du blé
« alimentaire ». C'est là un enjeu majeur. En effet,
vu les tonnages concernés et vu le développement du colza
biocarburant, la collecte ne pourra plus être issue presque uniquement
des jachères. Les prix à la production du blé devront donc
atteindre au moins ceux des blés « alimentaires » de
basse qualité, car sinon, les agriculteurs n'ont pas de réel
intérêt à les produire hors jachère. (L'aide de 45
€/ha, avec un rendement de 90 quintaux/ha, ne procure qu'un revenu
complémentaire de 5€/tonne). Une rémunération
correcte du blé biocarburant est d'autant plus nécessaire que
contrairement aux autres blés, l'accès à ce marché
est lié au versement d'une somme non négligeable pour les
producteurs.
2°) Autres
perspectives de développement des surfaces de blé
destinées à la production de bioéthanol :
a- Un
développement plus discret de l'usine Tate and Lyle de Nesle :
Sur le même schéma qu'en 2004-2005, l'usine Tate
and Lyle de Nesle devrait poursuivre son développement. Ceci n'induira
pas forcément une progression de la quantité de blé
utilisée par l'ensemble de l'usine (amidonnerie et distillation), dans
la mesure où l'industrie de l'amidonnerie subit actuellement des
concurrences renforcées, et pourrait être touchée par la
réforme de l'OCM sucre. En effet, la baisse du prix du sucre de 36%
pourrait augmenter la compétitivité du sucre par rapport au
glucose produit par les amidonneries. Les industriels de l'amidonnerie avancent
une diminution des utilisations des céréales pour l'amidonnerie
de l'ordre de 3,5 millions de tonnes34(*). Cependant, cette diminution est incertaine :
d'autres paramètres peuvent modifier les données. C'est le cas de
l'augmentation des cours du pétrole, qui provoque une augmentation de la
demande en éthanol à l'échelle internationale, et par
là une tension sur le prix du sucre, « concurrent »
direct de l'éthanol, notamment au Brésil.
Si cette distillerie voulait produire 300 000 hl de
bioéthanol/an, elle devrait utiliser l'équivalent d'environ
9 500 hectares de blé, provenant toujours essentiellement de la
Picardie, soit environ 1,5% de la sole de blé picarde de 2005-2006. Pour
cette usine, il s'agirait plus d'une consolidation d'une transformation
intérieure à la région dans le cadre de l'amidonnerie que
de l'ouverture d'un nouveau débouché important. Pour les
producteurs, ce développement serait
« invisible ».
b- Des perspectives
communautaires non négligeables:
La région Picardie, qui exporte une partie de sa
production vers les autres pays de l'Union européenne, pourra participer
à l'approvisionnement de ces pays en grains, dans une proportion
impossible à déterminer à l'heure actuelle, car les divers
projets sont souvent encore en cours de gestation. Ce sera certainement le cas
pour les usines belges, dans une proportion non négligeable a priori vu
les besoins expliqués plus haut.
Une partie de la Picardie est en effet plus proche de la
Belgique que du port de Rouen : Saint-Quentin, dans le nord de l'Aisne,
est à 180 km par route de Gand et à 200 km de Wanze, alors
qu'elle est à 240 km de Lillebonne.
Avec des besoins actuellement estimés pour deux des
usines prévues à 1 400 000 tonnes de blé, si la
région arrivait à conquérir un quart de ce marché,
les usines belges représenteraient un débouché aussi
important que l'usine de Lillebonne.
Ce développement pourrait suivre deux schémas.
Les usines belges peuvent passer des contrats de jachère industrielle ou
des contrats ACE avec des exploitants français, comme l'ont
déjà fait des usines de trituration de colza allemandes. Mais
elles peuvent aussi acheter au moins une partie de leur grain sur le
marché dit « alimentaire », hors contrat, ce qui
leur donne une souplesse au niveau des approvisionnements beaucoup plus grande,
et peut-être plus adaptée à leur perspective, qui est non
seulement d'assurer l'approvisionnement de la Belgique en éthanol, en
bénéficiant de réductions de droits d'accise, mais aussi
de conquérir des marchés à l'export.
3°) Un
décollage de la production qui devrait s'effectuer à partir de la
récolte 2007:
Pour la récolte 2006, la surface
contractualisée en blé « industriel » n'est
que de 8 000 hectares, en légère diminution par rapport
à l'année précédente, ce qui peut être
lié aux difficultés de commercialisation que connaît
actuellement la filière éthanol. Cette stagnation des surfaces
contractualisées en blé suit la stagnation constatée au
niveau national, car les nouvelles usines ne sont pas encore en
activité.
Le décollage du nombre de contrats pour
l'approvisionnement de l'usine de Lillebonne devrait s'effectuer pour la
récolte 2007, sa mise en route étant prévue pour la
campagne de commercialisation 2007-2008.
Source : ONIOL/FIRS 2000-2005 - ONIGC 2006 - ces surfaces
comprennent également d'autres utilisations que les biocarburants
Cependant, pour le blé, une partie non
négligeable des surfaces ne sera pas l'objet de contrats : c'est le
cas pour l'approvisionnement de Tate and Lyle, et ce pourrait être
également le cas pour l'approvisionnement des usines belges. De fait,
une partie de ce développement sera « invisible »
pour les exploitants agricoles, car hors contrat, et ne jouera pour eux
qu'indirectement, en offrant un débouché à leur
production.
4°) Les
perspectives de développement des surfaces de betteraves à
destination des biocarburants en Picardie :
a- Un contexte de
réduction des surfaces betteravières :
Pour la filière betteravière, le
développement des surfaces à destination des biocarburants se
situe dans le contexte très particulier des quotas sucriers et de la
réforme de l'OCM sucre. De plus, les rendements betteraviers continuant
d'augmenter, les surfaces nécessaires à la production d'une
même quantité de sucre diminuent. Ainsi, l'enjeu est de contribuer
à maintenir des surfaces betteravières menacées de
disparition.
De fait, les surfaces betteravières qui seront
consacrées à l'éthanol pour la récolte 2006
existaient déjà, il n'y a pas de risque de concurrence accrue
avec les surfaces alimentaires. Sur l'ensemble de la France, les surfaces
betteravières 2006 seraient en retrait de 7% par rapport à
200535(*).
L'enjeu du développement des surfaces d'éthanol
est plus difficile à cerner à plus long terme, car les
incertitudes sont nombreuses, notamment sur les résultats du plan de
restructuration lié à la réforme de l'OCM sucre. Si ce
plan n'atteint pas les résultats escomptés, des réductions
de quotas pourraient avoir lieu pour l'ensemble des producteurs.
b- Des perspectives qui
dépendent des choix de chaque industriel :
En l'état actuel de la réforme de l'OCM sucre,
vu la volonté de Tereos et de Saint Louis sucre de développer des
surfaces en betteraves alcool, éthanol et non alimentaires, seuls les
planteurs de la SVI devraient voir leurs surfaces de betteraves fortement
réduites : ainsi, pour les planteurs livrant à la sucrerie
de Sainte-Emilie, (qui est l'unique sucrerie du groupe dans la région),
la prévision de réduction de surfaces pour la récolte 2006
était de plus de 20% en avril 2006. Cependant, ceci ne
représenterait qu'une réduction de surface d'environ 3 000
ha.
La rémunération des betteraves éthanol
n'est bien sûr pas aussi rémunératrice que celle de la
production de sucre dans le cadre du quota. La production de betteraves hors
quota reste cependant relativement attractive pour les agriculteurs. Les
contrats proposés par les industriels n'ont pas de mal à trouver
preneur, même pour les contrats de Tereos, qui nécessitent la
souscription de parts sociales et le paiement de « droits
d'entrée » afin de financer les nouveaux investissements.
Selon l'Association de gestion et de comptabilité de l'Oise, il faudrait
huit ans à un exploitant pour avoir un retour sur investissement compte
tenu du coût de la souscription d'un contrat éthanol (calcul
effectué sur la base d'un contingent acquis 20€/T pour un rendement
de 80T/ha à 16% de sucre et un prix de vente de 22€/ha). En dessous
de 22€/ha, ou avec un rendement inférieur, la culture serait moins
rentable qu'un blé avec un rendement de 9T/ha.
Cependant, Tereos a annoncé par communiqué que
les planteurs s'étaient portés acquéreurs à plus de
140% aux nouveaux contrats alcool-éthanol proposés.
c- 10% de la sole de
betteraves contractualisée pour la production de bioéthanol
à l'horizon 2010 :
A moyen terme, si Tereos produit 200 000 tonnes de
bioéthanol à Origny et Saint Louis sucre environ 65 000
tonnes à Eppeville, les besoins dans la région pourraient
représenter entre 15 000 et 20 000 hectares, suivant la part
des planteurs de Picardie dans les contrats36(*). La betterave éthanol pourrait ainsi occuper
une part significative de la sole betteraves : à peu près
11% pour 15 000 hectares de betteraves éthanol avec une sole
betterave totale de 140 000 hectares. Mais ceci représenterait
moins de 2% des terres arables de la région. Cependant, pour produire
200 000 tonnes de bioéthanol à Origny, Tereos devra soit
recevoir des agréments supplémentaires, soit avoir des
débouchés conséquents hors agrément, car la
distillerie d'Origny n'a reçu dans la deuxième phase du plan
gouvernemental que 45 000 tonnes d'agréments bioéthanol.
Source : ONIOL-FIRS 2000-2005, ONIGC 2006
Conclusion : des cultures qui
devraient occuper rapidement une part assez importante des
assolements :
Chaque culture destinée aux biocarburants n'occupera
pas une place importante dans la SAU. Cependant, l'ensemble des cultures
contractualisées avec des exploitants agricoles par des usines
françaises au titre des biocarburants pourrait représenter assez
rapidement près de 10% des terres arables, ce qui est loin d'être
négligeable. A ces contrats pourraient s'ajouter des contrats d'usines
d'autres pays européens. Il est cependant difficile de donner une date
de réalisation de ces estimations: elle est liée à la
capacité des usines à atteindre leurs objectifs de production
affichés pour le bioéthanol.
L'ensemble des cultures réellement utilisées
pour la production de biocarburants, vu les perspectives à l'export sur
le colza et le blé, et compte tenu du schéma de fonctionnement
de la distillerie Tate and Lyle, pourrait être supérieure à
la part contractualisée, même si certains contrats de Tereos
pourraient faire l'objet de « transferts ».
CONCLUSION
La production de biocarburants en France a
débuté en 1992. Il s'agissait d'une production encore en partie
expérimentale, nécessitant des volumes assez réduits. Dans
ce cadre, la France a privilégié un développement de
capacités de production de taille modeste, à partir d'usines
déjà en activité, ce qui a permis de limiter les
investissements nécessaires et de valoriser les savoir-faire existants.
Ce mode de développement a particulièrement
favorisé la Picardie, région de grande culture, qui disposait
d'une usine de trituration et de plusieurs distilleries de betteraves. De
fait, cette région a construit une usine d'estérification
à Venette et une distillerie de bioéthanol blé à
Origny-Sainte-Benoîte. Plusieurs distilleries de betteraves
déjà en activité ont également produit du
bioéthanol.
La Picardie a également bénéficié
de sa proximité avec le port de Rouen, où Diester industrie,
premier opérateur de la filière biodiesel, a construit la seule
usine de taille importante de l'ensemble des filières biocarburants,
puisque la région a participé à l'approvisionnement en
colza de cette unité.
Les besoins générés par ces diverses
usines ont mené les exploitants agricoles picards à
développer des cultures destinées aux trois différentes
filières de production (biodiesel, bioéthanol blé,
bioéthanol betteraves). Cependant, en 2004-2005, au début du plan
de relance gouvernemental de la production de biocarburants en France, les
surfaces cultivées pour la production de biocarburants étaient
encore marginales, même dans une région comme la Picardie :
les surfaces contractualisées en colza, blé et betteraves
« industrielles » ne représentaient que 3% des
terres arables de la région en 2003 et 4% en 2005. Les productions
contractualisées à destination des biocarburants étaient
limitées par la raison même qui avait poussé le monde
agricole en 1992 à réclamer l'ouverture de ce nouveau
débouché, puisqu'elles étaient conçues dès
le départ pour permettre la mise en culture des terres que la
réforme de la PAC obligeait à geler. Il s'agissait ainsi d'une
production atomisée, vendue à un prix inférieur aux
cultures « alimentaires ».
Parmi les trois filières, celle du colza était
présente sur la majeure partie du territoire régional, celle des
betteraves sur l'ensemble des bassins de production traditionnels de cette
culture, alors que celle de blé était développée
essentiellement dans l'est de la région. Cette différence
était due à des volumes différents à produire, mais
aussi à des modes d'organisation distincts. Alors que les
filières colza et betteraves ont privilégié un mode
d'organisation permettant théoriquement à l'essentiel des
agriculteurs de pouvoir cultiver du colza « industriel » et
à la majeure partie des planteurs de pouvoir produire de la betterave
à destination des biocarburants, même s'ils étaient
physiquement éloignés d'une usine d'estérification ou
d'une distillerie, la filière céréalière a à
l'inverse choisi une approche plus locale, liée à la
proximité physique d'une usine.
Depuis 2005, la France, suite à l'adoption par l'Union
européenne de sa directive sur le développement des
biocarburants, a relancé la croissance de sa production de biocarburant
d'une façon importante. Pour cela, plusieurs projets d'usines de forte
capacité ont été agréés.
La Picardie semble moins favorisée qu'en 1992-93 pour
l'implantation d'usines de production de biocarburants sur son territoire. Avec
le développement d'unités de production de plus grande
échelle, son principal handicap est de ne pas être une interface
majeure entre zone de production agricole et raffineries de pétrole. De
fait, Tereos, groupe coopératif de la région, a
décidé de démanteler son unité de bioéthanol
blé d'Origny-Sainte-Benoîte et de construire sa nouvelle usine
près de Rouen. La Picardie continue cependant de
bénéficier de la préexistence d'usines, dans la mesure
où le développement de la production de biocarburants en France
se fait toujours en partie par la saturation des capacités existantes
dans les distilleries et par la mise en valeur des unités
déjà en activité. Son usine d'estérification de
Venette doit ainsi doubler sa production, une nouvelle distillerie de
betteraves de grande capacité doit voir le jour à
Origny-Sainte-Benoîte, les distilleries de betteraves d'Eppeville et de
blé de Nesle prévoient une saturation, et même
peut-être une augmentation de leurs capacités de production.
De plus, de nouvelles perspectives de débouchés
s'ouvrent pour la région. Comme dans l'ensemble de la France, des
circuits courts pour l'huile végétale pure émergent. Ils
sont conçus par les exploitants pour réduire leurs coûts
d'approvisionnement grâce à l'utilisation de l'huile mais aussi
des tourteaux de colza et/ou pour augmenter la valeur ajoutée à
la ferme de la production de colza par la vente d'huile carburant. Ce type de
circuit devrait cependant moins intéresser la Picardie que les grandes
régions de polyculture-élevage, vu l'importance de la production
de tourteaux dans ce mode de valorisation des graines de colza. Par ailleurs,
avec la directive européenne sur le développement des
biocarburants, ce n'est pas seulement la France qui s'est engagée dans
une rapide croissance de la production de biocarburants, mais l'ensemble de
l'U.E. Ce développement pourrait ouvrir des débouchés non
négligeables pour la production agricole picarde, en particulier en
direction de la Belgique proche. Le plan de développement des
biocarburants belge et les ambitions de ses industriels nécessitent en
effet pour ce pays une importation conséquente de graines
oléagineuses et de blé.
L'exemple de la Picardie montre que, pour une région
qui continue de développer les trois différentes filières
de production de biocarburants, les surfaces mobilisées devraient
devenir significatives, puisque les diverses cultures contractualisées
en jachère industrielle ou ACE à destination des biocarburants
pourraient rapidement représenter au moins 10% des terres arables de la
région.
Ce développement se fait suivant un mode d'organisation
des diverses filières proche de celui mis en place depuis 1992. La
filière colza privilégie une mobilisation de tous les producteurs
afin de réussir à couvrir l'essentiel des besoins des usines du
pays par du colza français. La filière betteraves favorise
toujours une répartition des contrats entre l'ensemble des planteurs,
même si les différences de développement de
l'activité éthanol au sein des divers groupes industriels
engendrent des disparités fortes entre les planteurs appartenant
à des groupes distincts. La filière blé - ou plutôt
les filières blé demeurent dans une logique plus locale et
concurrente, même si une usine comme celle de Lillebonne nécessite
un bassin d'approvisionnement nettement plus large qu'une unité de la
taille de l'usine de bioéthanol blé
d'Origny-Sainte-Benoîte.
De fait, alors que le colza « industriel »
devrait se développer d'une façon accélérée
sur une grande partie du territoire picard, même dans des zones qui
avaient jusque là peu développé la culture de colza, et
que la plupart des planteurs ont accès à des contrats de
betteraves à destination des biocarburants, les surfaces
contractualisées par la future usine de Lillebonne demeureront
localisées pour la Picardie essentiellement dans l'Aisne et l'est de
l'Oise. Ceci est paradoxal dans la mesure où les agriculteurs de la
région les plus proches géographiquement de l'usine sont dans la
Somme et l'ouest de l'Oise. Cependant, une partie des exploitants picards
cultivent du blé transformé en éthanol, mais sans le
savoir, car la distillerie de Nesle est approvisionnée par des farines
issues de blé non contractualisé dans le cadre de la
jachère industrielle ou de l'ACE.
Par ailleurs, le développement des biocarburants dans
la région comporte encore de nombreuses inconnues37(*), dont la part que cette
région réussira à conquérir sur les marchés
qui s'ouvrent pour le colza et le blé avec la multiplication des usines
dans les divers pays de l'Union, et en particulier sur le marché belge.
Si la Picardie, qui est traditionnellement moins productrice de colza que
d'autres régions, participera peut-être relativement peu à
l'approvisionnement en graines oléagineuses de la Belgique, elle peut
par contre vouloir exporter une partie importante de sa production de
blé vers les usines de bioéthanol de ce pays.
Au niveau des assolements, la région, qui
n'était pas grande productrice de colza, devrait connaître une
réduction notable de la sole de pois et d'une partie de la sole de
céréales à paille au profit d'une augmentation
significative de la sole de colza.
Cependant, le développement de la production de
biocarburants n'est pas une révolution pour les agriculteurs
picards : si les surfaces contractualisées en jachère
industrielle ou ACE sortent de la marginalité, elles n'en demeurent pas
moins limitées, et l'essentiel des cultures de blé et de
betteraves qui vont y être consacrées existaient
déjà, ainsi qu'une partie des cultures de colza. De plus, une
part de l'approvisionnement des usines se fait et se fera de façon
« invisible » pour les exploitants agricoles, dans la
mesure où certaines unités ne passent pas de contrats de
jachère industrielle ou ACE, mais achètent sur le marché
des grains dits à tort « alimentaires ».
En fait, le développement des biocarburants est
aujourd'hui un enjeu important pour le monde agricole surtout par l'impact
qu'il peut avoir sur les cours des diverses productions, et donc sur les marges
dégagées, en particulier dans une région
spécialisée dans les grandes cultures comme l'est la Picardie. Si
cet impact semble faible pour la betterave, il parait pouvoir être non
négligeable pour le blé, et même important pour le colza,
surtout tant que le biodiesel demeure un marché
« captif » pour l'huile de colza. Estimer plus
précisément le poids de la croissance de la production de
biocarburants sur les évolutions de prix des marchés
européens et internationaux des diverses matières
premières agricoles concernées nécessiterait une analyse
approfondie, qui dépasse le sujet de ce mémoire, mais qui serait
nécessaire pour appréhender réellement quelles sont les
perspectives qu'offre le développement des biocarburants à
l'agriculture picarde.
La question de la durabilité de ce
développement se pose cependant. Les biocarburants se développent
aujourd'hui pour le monde agricole comme une tentative de réponse
à la tendance baissière des marchés des matières
premières agricoles au niveau international. Mais l'émergence de
nouveaux débouchés alimentaires solvables pourrait inverser cette
tendance : l'agriculture choisira-t-elle alors de continuer à
produire des biocarburants à un coût de production plus
élevé, quitte à ne pas répondre à la
demande alimentaire ?
Juillet 2006
(Condensé réalisé en novembre
2006)
Annexes
Schémas des principales agro-industries
nécessaires pour la production de l'EMHV et de
l'ETBE : p 38-39
Schéma de production de l'ester
méthylique d'huile végétale :
p 40
Schéma de production du bioéthanol et de
l'ETBE : p 41
Lexique des principaux sigles
utilisés : p 42
Schémas des principales agro-industries
nécessaires pour la production de l'EMHV et de l'ETBE
Production du
biodiesel :
Exploitation agricole : culture du colza
et/ou du tournesol
Coopérative ou négoce
céréalier : collecte
Usines de transformation de graines
oléagineuses : trituration/ semi-raffinage
Usines de transformation de graines
oléagineuses : trans-estérification
Production de
l'ETBE :
Exploitation agricole : culture du
blé et/ou betterave
Coopérative ou
négoce céréalier: collecte du blé
distilleries :
-distillation de la betterave et/ou du blé
industrie de déshydratation de l'alcool
agricole : déshydratation
unité de production de l'ETBE
Sucrerie: collecte de la betterave
colza
trituration
trans-estérification
pétrole
raffinage
méthanol
tourteaux (1 à 1.5T de tourteau par tonne
d'huile)
10%
huile
90%
biodiesel (90%)
glycérine(10%)
tournesol
Schéma de production de l'ester
méthylique d'huile végétale
Schéma de production
du bioéthanol et de l'ETBE38(*)
Blé
Betterave
hydrolyse
extraction
fermentation - distillation
déshydratation
BIOETHANOL
isobutène
ETBE
Pétrole
raffinage
53%
47%
drèches de blé (1.2T par tonne d'éthanol
produite)
pulpes de betteraves (0.75T par tonne d'éthanol
produite)
Lexique des principaux
sigles utilisés
ACE : Aide aux Cultures Energétiques
(réglementation PAC)
ACS : Aides Compensatoires aux Surfaces
(réglementation PAC)
ADEME : Agence de Développement et de la
Maîtrise de l'Energie
AGRICE : Agriculture pour la Chimie et l'Energie (groupement
d'intérêt scientifique, géré par l'ADEME)
AMSOL : Association de l'industrie des Semences de plantes
Oléo-protéagineuses
ARVALIS : Institut du Végétal (organisme
de recherche appliquée, secteurs céréales,
protéagineux, pomme de terre, fourrages)
BCE : Brie Champagne Ethanol (entreprise)
BENP : Bio Ethanol Nord Picardie (entreprise)
BGC : Beauce Gâtinais Céréales (union de
commercialisation de coopératives)
B5 : biodiesel mélangé à hauteur de 5%
dans le gazole
B100 : biodiesel pur
CETIOM : Centre Technique Interprofessionnel des
Oléagineux Métropolitains
CER France : Centre d'Economie Rurale (centre de gestion)
CGB : Confédération Générale des
planteurs de Betteraves
CUMA : Coopérative d'Utilisation de Matériel
Agricole
DIREM : Direction des Ressources Energétiques et
Minérales (Ministère de l'Industrie)
DPU : Droit à Paiement Unique (réglementation
PAC)
EEHV : Ester Ethylique d'Huile Végétale
ETBE : Ethyl Tertio Butyl Ether
EMHA : Ester Méthylique d'Huile Animale
EMHV : Ester Méthylique d'Huile
Végétale
E10 : mélange éthanol 10%-essence 90%
E85 : mélange éthanol 85%-essence 15%
FIRS : Fonds d'Intervention et de Régularisation du
marché du Sucre
HVP : Huile Végétale Pure
IEA : International Energy Agency
IFP : Institut Français du Pétrole
INRA : Institut National de la Recherche Agronomique
ISAB : Institut Supérieur d'Agriculture de
Beauvais
MTBE : Méthyle Tertio Butyle Ether
OCEA : Office de Comptabilité et d'Economie rurale
d'Amiens (centre de gestion, a rejoint CER France).
OCM : Organisation Commune de Marché
(réglementation PAC)
ONIC : Office National Interprofessionnel
des Céréales
ONIDOL : Organisation Nationale Interprofessionnelle des
Oléagineux
ONIGC : Office National Interprofessionnel des Grandes
Cultures, créé en juin 2006 (fusion de l'ONIC, de l'ONIOL et du
FIRS)
ONIOL : Office National Interprofessionnel des
Oléo-protéagineux
SARDAA : Société Artésienne de
Déshydratation d'Alcool Agricole (entreprise)
SCOP : Surface en céréales et
oléo-protéagineux. Désigne parfois l'ensemble des surfaces
bénéficiant des aides compensatoires aux surfaces, donc
également le lin textile et le chanvre. (réglementation PAC)
SDHF : Sucreries Distillerie des Hauts de France,
(entreprise reprise par Tereos en 2005).
SVI : Société Vermandoise Industrie,
(entreprise, appartient au groupe Vermandoise)
TEP : Tonne Equivalent Pétrole
TGAP : Taxe Générale sur les Activités
Polluantes
TIPP-TIC : Taxe Intérieure sur les Produits
Pétroliers, devenue Taxe Intérieure de Consommation
UFIP : Union Française des Industries
Pétrolières
* 1 Source : UNICA, union
des agro-industries de la canne à sucre de Sao Paulo.
* 2 Source : Renewable
Fuels Association, Etats-Unis.
* 3 Source : National
Biodiesel Board, Etats-Unis.
* 4 Directives européenne
85/210/CEE du Conseil du 20 mars 1985 et 85/536/CEE du Conseil du 5
décembre 1985.
* 5 Cf Les biocarburants,
rapport R. Lévy, février 1993, diffusion :
Ministère de l'Industrie et du Commerce extérieur.
* 6 1 litre d'éthanol ou
d'EMHV n'a pas le même pouvoir calorifique qu'1 litre d'essence ou de
gazole.
* 7 Lors des discussions
précédant l'adoption de ces directives, certains Etats membres
ont refusé l'instauration d'objectifs obligatoires.
* 8 Nous privilégierons
le terme de bioéthanol pour parler de l'alcool d'origine agricole
destiné aux biocarburants, car l'éthanol peut être
d'origine synthétique, et l'alcool a d'autres utilisations possibles.
* 9 Les agréments
étaient de 199 000 tonnes pour les unités d'ETBE :
l'ETBE contenant seulement 49,75% d'éthanol en masse, ceci
représente un agrément bioéthanol de 99 000
tonnes.
* 10 Source : les
biocarburants, ONIC-ONIOL-FIRS, avril 2005
* 11 Les volumes
indiqués sont les volumes agréés en 2004, et non les
volumes réalisés. La carte des usines d'éthanol
répertorie l'ensemble des usines liées à Ethanol Union,
union de vente des distilleries pour l'éthanol, et à Tereos.
Certaines usines peuvent ne pas avoir produit d'éthanol en 2004 et/ou
2005.
* 12 Il existe également
deux unités agréées en Allemagne : SA Oelmühle
Hambourg et SARL Oelmühle Leer Connemann, agréées chacune
pour 5 000 tonnes de biodiesel.
* 13 Le terme de cultures
« industrielles » est ici utilisé pour
désigner les cultures produites sur jachère industrielle ou
bénéficiant de l'aide aux cultures énergétiques. Le
terme de cultures « alimentaires » désigne les
cultures non produites dans le cadre de la jachère industrielle ou de
l'ACE. Ceci ne préjuge en rien de leur utilisation finale : une
partie non négligeable des cultures « alimentaires »
est utilisée pour des productions non alimentaires.
* 14 Calcul effectué
avec une SAU de 1 350 000 ha, source Agreste, statistique agricole
annuelle 2004.
* 15 Source : ONIOL/FIRS-
surfaces sous contrats de jachère industrielle ou ACE.
* 16 Calcul effectué
avec une SAU de 1 350 000 ha, source Agreste, statistique agricole
annuelle 2004.
* 17 Source :
ONIC-ONIOL-FIRS, Picardie « Chiffres clefs », campagne
2004-2005.
* 18 La SCOP est ici prise au
sens large des cultures bénéficiant des aides compensatoires
aux surfaces en 2004 : elle intègre également le lin textile
et le chanvre. En 2004, la SCOP aidée+gel était de 938 069
ha en Picardie selon l'ONIC.
* 19 Source : contrats
ONIOL de jachère industrielle et ACE par organismes de collecte, et
enquêtes complémentaires réalisées auprès des
organismes de collecte.
* 20 A la création de
l'usine de Grand-Couronne, il existait en fait trois
sociétés : la société DICO (Diester-industrie
centre ouest), dont les organismes stockeurs possédaient 47% des actions
par le biais de FIDICOOP et FIDINEGOCE et la société Robbe,
Diester Industrie n'assurant que la commercialisation. Les deux
sociétés ont été absorbées par Diester
industrie en 2001, date à laquelle les organismes stockeurs sont
entrés directement dans le capital de Diester industrie à hauteur
de 33,34%.
* 21 Schéma
réalisé à partir des données contenues dans
info-PROLEA, mai 2003 et du dossier de presse réalisé lors de la
venue de J.P Raffarin à Venette, septembre 2004
* 22En juillet 2005, le prix du
fioul domestique hors taxe était de 0,45€/litre. En octobre 2005,
période de prix du pétrole élevés, il était
de 0,50€/litre. Source : Prix DIREM, Ministère de l'Economie,
des Finances et de l'Industrie, avril 2006.
* 23 Source :
« Le développement des utilisations non alimentaires de
l'huile de colza dans l'U.E : quels impacts sur les marchés et les
prix mondiaux ? », Y. Dronne et A. Cohin, INRA Rennes, sept-dec
2005.
* 24 Source : Institut
National de Statistique, estimation de la production.
* 25 Moyenne des rendements en
froment d'hiver des récoltes 2004 (91,2 quintaux/ha) et 2005 (85,5
quintaux/ha), source : Institut National de Statistique.
* 26 Sur la base d'une
production à 100% à partir de blé à Gand et
à 2/3 à partir de blé à Wanze.
* 27 Cf Evolution du bilan
d'approvisionnement en céréales de la Belgique de 1970/71
à 2003/04, Livre Blanc
« céréales », F.U.S.A et CRA-W Gembloux, Ph.
Burny, S. Matendo, B. Duquesne, février 2006.
* 28 Source : base de
données FAOSTAT
* 29 Source :
« différentes données chiffrées sur les
biocarburants », novembre 2005.
* 30 Communication de la
Commission : « Plan d'action dans le domaine de la
biomasse », Bruxelles 7/12/2005, COM(2005) 62final.
* 31 Source : ONIGC,
chiffres provisoires des surfaces sous contrat de jachère industrielle
et ACE, fin juin 2006.
* 32 Union qui regroupe la
coopérative d'Artenay (qui appartient au groupe Tereos), la
coopérative de Pithiviers, celle de Boisseaux et de Puiseaux.
* 33 Source :
communiqué de presse de Tereos du 2 novembre 2004.
* 34 Source : SCOP info,
AGPB, AGPM, FOP, janvier-février 2006.
* 35 Source : Agreste
conjoncture Grandes cultures, n°2 avril 2006.
* 36 Sur la base de 3 000
hectares déjà utilisés en 2005, auxquels s'ajoutent les
besoins liés à la nouvelle usine d'Origny et à
l'augmentation de la production de la distillerie d'Eppeville.
* 37 L'union de
coopératives créée en octobre 2006 pour
l'approvisionnement de l'usine Cristanol de Bazancourt regroupe certaines
coopératives de la région Picardie, dont NORIAP. Cette
information n'était pas encore connue à la date de fin de
rédaction de ce mémoire. De fait, paradoxalement, l'est de la
région Picardie participe au projet de Lillebonne, alors que l'ouest
s'engage dans le projet de Bazancourt. Nettement, les choix d`alliance des
divers organismes stockeurs ne sont pas fonction de leur proximité
géographique avec les usines de bioéthanol, ce qui est rendu
possible par le système de « transferts » de grains
issus de jachère industrielle ou ACE.
* 38 source pour les
quantités de coproduits : fiche IFP Les biocarburants dans le
monde, Panorama 2005.
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