La faillite du processus démocratique en Afrique( Télécharger le fichier original )par Honoré EBENGO ALFANI Université de Lubumbashi RDC - Licence en relations internationales 2011 |
§ 3. Immigration et déroulement électoraux1. ImmigrationLa Côte d'ivoire a connu une invasion des peuples, en majorité, venant des pays de Sahel suite à la sécheresse qu'ils avaient connue d'une part et à la guerre qui se déclenchait en Liberia et sierra Léone d'autre part. Dans sa vision de vouloir créer un « ivoirien nouveau » en faisant effacer des identités ethniques ; le président Félix HOUPHOUET BOIGNY procéda à la politique de la porte ouverte permettant à tout celui qui veut s'installer dans le pays d'y aller sans être inquiet. C'est ainsi que les peuples provenant des pays voisins prirent ce pays d'assaut, en l'occurrence, le Burkina Faso, la Guinée équatoriale, le Mali, le Libéria, le Sierra Leone, le Liban, etc. Ces flux ont provoqué de terrible changement dans la politique nationale. Ceci étant certaines provinces ont connu désormais une multiplicité linguistique ayant des conséquences sur la cohabitation des peuples. Le recensement de 1998 avait démontré que sur 15,4millions d'habitants, le pays avait environ 4 millions d'étrangers, soit 26 % de la population totale. Les burkinabé y étaient en 56 %, les maliens 19,8 %, les guinéens 5,7 %. La majorité de ces immigrés se trouvaient dans les zones agricoles. A l'Est, précisément en face du Ghana, en zone Akan dans la région du Sud Comoé qui a pour chef-lieu ABOISSO et celle du Moyen-Comoé dont le chef-lieu est ABENGOUROU, les résultats des recensements se levaient à 45% et 43,4 % d'étrangers. A l'Ouest dans le territoire de KRU le pourcentage des réfugiés libériens est de 42,9% tandis que les Siéra Léonais détenaient un record de 54,3 % dans le département de TABOU, installé chez leur cousin »61(*) Le pays fut envahi et quasiment partagé entre les nationaux et les non nationaux au point de pousser un équilibre. Le nombre des non originaires était approximatif de celui des originaires en 1998 2. Déroulements électorauxEn 1990, le pays s'engage à la traditionnelle culture démocratique d'organisation des élections. Celles-ci furent organisées et opposèrent le président de trois décennies Monsieur FELIX HOUPHOUET à Monsieur LAURENT GBAGBO, une première fois dans l'histoire démocratique de ce pays. Ces élections donnèrent la présidence au premier pour la septième fois. Le président élu continuait à répéter la même politique de porte ouverte. C'est ainsi que les burkinabés, les maliens, les guinéens etc. s'installèrent en Côte d'ivoire en toute quiétude. La pratique de porte ouverte avait, par l'ivresse philanthropique semblait-il, poussé le président à donner à ces étrangers le droit de vote. La participation massive des étrangers haussait les voix à sa victoire de 1990. Mécontent d'une telle politique et dominé d'un patriotisme, après la mort de FELIX HOUPHOUET le 07/12/1993, le président BEDIE jeta l'éponge à cette pratique. Il retira de prime abord la primature à OUATTARA un (nordiste) et la confia à DANIEL KABLAN un (sudiste), ensuite tout droit de vote réservé aux étrangers fut récupéré. Les élections de 1995 d'après HOUPHOUET seront dominées par de manoeuvres politiciennes touchant la révision de la loi électorale et BEDIE y sortit vainqueur après avoir exclu OUATTARA de la course. Son mandat fut compromis par un coup d'Etat de Général ROBERT GUEI, le premier dans l'histoire politique du pays. Après la mort du « vieux », les deuxièmes élections présidentielles furent organisées en 2000 sous le contrôle de putschiste ROBERT GUEI. Au cours de celle-ci, Monsieur ADO fut, à nouveau, écarté. Ces élections perdurent leur sens à cause d'exclusion de certains candidats. Non seulement les exclusions de leaders furent manifestes, mais aussi leurs partisans boycottèrent d'y participer sous le mot d'ordre de leurs leaders (BEDIE et ADO). Ces boycottes provoquèrent des absentions respectivement de plus ou moins 42 % (pour les partisans du premier) et 35 % de voix62(*) (pour ceux du second). A chaque fois qu'il y a une exclusion d'un acteur potentiel, ses partisans manifestent naturellement la réticence vis-à-vis des élections. Les conséquences habituelles sont que les élections sont toujours boycottées parce qu'elles n'ont pas reçues l'assentiment de la majorité d'électeurs et d'acteurs d'une part et souvent elles se déroulent dans une tension conflictuelles d'autre part. Au cours de cette compétition de 2000, Laurent GBAGBO fut élu par 20 % du corps électoral63(*). Ce faible pourcentage de participation provoqua une crise de légitimité par rapport au pourcentage d'obtenu. En 2002, un coup d'Etat raté fut vécu et suivi de soulèvement militaire qui aboutira à une rébellion. A cet effet, une transition fut observée jusqu'en 2010 année des récentes élections. Au deuxième tour de ces élections, le scénario africain va être observé, Laurent GBAGBO à ALLASSANNE DRAMANE OUATTARA vont se trouver en compétition tendue. Au final, ils seront tous déclarés les présidents de la République. Le premier par le Conseil constitutionnel estima que les chiffres qui ont été donnés par la commission électorale indépendante étaient nuls suite à l'expiration de 3 jours. D'où ce conseil déclare LAURENT GBAGBO président et l'investi le 04 décembre avec son Premier Ministre GILBERT MARIE N'GBO AKE. La CEI (Commission électorale indépendante) quant à elle, reconnaît président en la personne de Monsieur Allassane Dramane Ouattara le 02 décembre. Cette annonce intervient après l'expiration de la date limite et sous protection de l'ONU. Pourquoi ? Etant proclamé ainsi, Laurent GBAGBO acquiert le pouvoir constitutionnel et ADO le pouvoir de la CEI. Cette situation plongea le pays dans une crise sans précédent, une crise qui durera plus ou moins 9 mois avec comme conséquence mortelle de plusieurs ivoiriens estimée à 173 personnes, selon l'ONU. En apothéose, Alassane Dramane Ouattara fut proclamé président par le même conseil constitutionnel qui avait proclamé Laurent GBAGBO afin de confirmer sa légitimité. * 61 BERNARD LUGAN, Histoire de l'Afrique : des origines à nos jours, éd. Ellipses Marketing, Paris, 2009, pp.978-980 * 62 Art.cit, p.980 * 63 Idem, p.982 |
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