2.2.2 Limites de la reforme
foncière au Cameroun
Bien qu'en révisé les conditions d'obtention du
titre foncier au Cameroun, la dernière réforme foncière,
n'a pas évoqué la question de l'extension du domaine national
dont l'importance n'est plus à démontrer. Ce domaine qui fait
pourtant aujourd'hui objet d'une vive polémique, a été
évité dans le décret du 16 décembre 2005, tout
comme la question de la propriété traditionnelle aussi
appelé le droit coutumier mais s'est montré très brutal
dans la répression des contrevenants à la législation
foncière et domaniale.
2.2.2.1 Méconnaissance du
droit coutumier par la réforme
Le patrimoine collectif national, aujourd'hui appelé le
domaine national camerounais, a toujours été la pomme de discorde
entre l'Etat et les collectivités traditionnelles au sujet du
contrôle et de la répartition des terres. Les collectivités
revendiquent leur droit de regard sur ces terres qu'ils prétendent
qu'elles font partie intégrante de leurs terroirs, alors que l'Etat en
revendique l'administration, dans l'intérêt général
de toutes les populations camerounaise ou étrangères, et dans le
but de réaliser ses objectifs économiques et sociaux. La
stratégie de l'Etat a consisté dans la réforme du 16
décembre 2005, à ignorer la question pour ne s'attaquer qu'aux
autres aspects de la question foncière, tous aussi fondamentaux. Mais
l'on ne saurait logiquement dissocier la question de la sécurisation
des droits fonciers de celle relative à la propriété des
terres du domaine nationale, puisque les communautés traditionnelles en
revendiquent la garantie des droits. S'il est exact que le droit
représente les aspirations d'une population donnée, il est
dès lors surprenant que la place de la propriété
coutumière soit ignorée de la récente réforme
foncière.
En parcourant le décret du 16 décembre 2005, on
est frappé par l'absence de toute référence au droit
coutumier. Or, pour de nombreux camerounais, la terre n'est pas seulement
source d'enrichissement des propriétaires et possesseurs, elle est aussi
une source d'enracinement culturel et religieux. La terre des ancêtres
est l'un des arguments invoqués par la collectivité Bakweri dans
le conflit qui l'oppose à l'Etat du Cameroun, la Banque mondiale et le
FMI, au sujet de la privatisation de la CDC, dans le cadre du programme
d'ajustement structurel dans lequel est engagé l'Etat camerounais. Ce
conflit, comme celui plus général qui oppose les
collectivités traditionnelles à l'Etat, ne saurait être
réglé de manière durable, en faisant fi de la «
propriété coutumière ». D'ou la
nécessité de beaucoup de réserve, dans la
répression des agissements contraires à la réglementation
foncière, qui pourraient traduire une autre vision de l'organisation
foncière, différente de celle du gouvernement (Tchapmegni,
2007).
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