La participation des collectivités territoriales décentralisées à la protection de l'environnement au Cameroun, en Belgique et en France.( Télécharger le fichier original )par Guy Laurent KOUAM TEAM Université de Limoges (France) - Master en droit international et comparé de l'environnement 0000 |
&.II. : Les outils économiques locaux de régulation et de gestion environnementaleLes instruments économiques sont assurément un levier important des collectivités dans la protection de l'environnement. En effet le processus de décentralisation doit nécessairement s'accompagner de transfert de moyens, hors malheureusement nous constatons que comme en France, il existe une difficulté de transfert de ces moyens au Cameroun et en Belgique. En réalité, les différentes législations offrent peu de marge à leurs collectivités pour inciter en leurs habitants ou leurs entreprises un comportement respectueux de l'environnement. En France149(*) et au Cameroun en 2010, l'État détient encore la création et l'application des normes de pollution et l'essentiel des instruments économiques : ces derniers sont constitués par des taxes environnementales et depuis peu en France, des marchés de droits à polluer visant à réduire l'effet de serre. Les collectivités territoriales des trois pays détiennent essentiellement l'application d'instruments de taxes relativement annexés au plan global. I- La fiscalité comme instrument économique principal de régulation environnementale dans les trois pays
Il s'agit ici, surtout de la fiscalité incitative, qui peut prévoir des taxes élevées dans le but d'influencer ou de décourager certaines habitudes de consommation des usagers ou des entreprises. Une bonne fiscalité environnementale amènes beaucoup d'avantages entre autres: Une induction des changements de comportements des producteurs et des consommateurs, un rééquilibrage de la charge fiscale qui pèse sur les différents facteurs de production (travail, capital et environnement)et un encouragement permanent à l'amélioration des performances environnementales et à la créativité . Pour mieux comprendre le jeu fiscal environnemental local, il est nécessaire pour nous de présenter brièvement la politique fiscale dans les trois pays. En matière d'imposition en France150(*) et au Cameroun151(*), l'État est tout puissant et décide de tout. Pas d'impôt sans textes de lois: C'est le principe de légalité de l'impôt. L'État fixe l'assiette et détermine une fourchette de taux. Et les collectivités choisissent aux cours des conseils prévus à cet effet, les taux qu'elles appliqueront sur leurs territoires respectifs, dans la fourchette que la loi leur a autorisée152(*). La loi sur la fiscalité locale camerounaise dispose qu'une collectivité territoriale ne peut percevoir un impôt, une taxe ou une redevance que s'il (elle) est créé(e) par la loi, voté (e) par l'organe délibérant et approuvé (e) par l'autorité compétente153(*).Alors qu'en Belgique, les collectivités territoriales disposent d'un peu plus de liberté en la matière. En effet au vu de l'exposé constitutionnel tiré de l'article 170, ce texte semble donner plus de pouvoirs propres154(*) aux communes et aux provinces belges, la loi ne gardant des marges de manoeuvres exceptionnelles. L'approche fiscale est souvent utilisée en Europe comme en Afrique, plus dans un but financier qu'incitatif155(*) . La fiscalité étant vue ici plus comme un moyen de financement de l'environnement. Elle n'est dès lors perçue que comme une redevance, qui ne modifie pas fondamentalement le comportement du pollueur, mais que l'on affecte à la réparation des dégâts, en espérant évidemment que les atteintes portées à l'environnement soient réversibles156(*). Hors comme nous l'avons précédemment vu, les collectivités territoriales ne détiennent pas la possibilité de création des principales taxes environnementales. S'agissant spécialement des taxes environnementales en Belgique, depuis 1993, la fiscalité environnementale est de compétence régionale157(*). C'est le cas des écotaxes telles que les taxes sur l'eau et les déchets, à l'exception des déchets radioactifs158(*). S'agissant donc des écotaxes159(*) , jusqu'en 2009, elles n'ont pas de valeur incitative dans les trois pays. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères en France n'a aucune valeur incitative en matière de réduction des flux polluants. Pareillement, la taxe sur les eaux usées et une autre sur les déchets que lève la Région Wallonne suit la même logique. Au Cameroun il existe des taxes communales liées à l'environnement que l'on peut qualifier d'écotaxes. Elles rentrent d'une part dans la catégorie de la taxe plus générale dite « taxe de développement local ». Cette taxe est perçue simplement en contrepartie des services de base et des prestations rendus aux populations notamment, l'assainissement, l'enlèvement des ordures ménagères, le fonctionnement de ambulances, l'adduction d'eau, l'électrification. D'autre part il existe au Cameroun ce que la loi sur la fiscalité locale a baptisé: « Autres taxes communales»160(*).Dans cette catégorie se retrouvent des taxes liés aux problématiques environnementales et que l'on pourrait véritablement qualifier d'écotaxes. Il s'agit par exemple de la taxe d'abattage du bétail, de la taxe communale sur le bétail, de la taxe d'hygiène et de salubrité, de la taxe sur le transport des produits de carrières pour ne citer que ceux là. Mais, ces dernières n'ont aucune valeur incitative. Soulignons tout de même des avancées en France où par exemple, l'article 1395 G du Code Général des Impôts (CGI) autorise les communes et les établissements publics de coopération intercommunale dotés d'une fiscalité propre à exonérer de taxe foncière sur les propriétés non bâties, pour une durée de cinq ans, les terrains agricoles exploités selon un mode de production biologique. L'essor le plus important s'est fait avec les mesures fiscales envisagées par le Grenelle de l'environnement. En effet, parmi les principes ayant guidé à la reforme de la fiscalité environnementale dans ce cadre, se retrouvent en bonne place, l'incitation où il s'agit d'encourager les comportements vertueux sans aucun objectif de rendement budgétaire et sans infliger de pénalités financières injustifiées, notamment en l'absence d'alternative crédible161(*). Finalement, nous constatons que le véritable pouvoir fiscal des collectivités en France et au Cameroun en matière environnementales tient à l'application et la variation des taux de taxation que leur propose la loi. En Belgique, cette liberté fiscale environnementale est plus réduite, les collectivités étant dans ce domaine soumises à la législation régionale. Toutes les fois où les collectivités territoriales usent de leur pouvoir de taux en France et au Cameroun, il est toujours envisageable de tenir compte de critères écologiques. Seulement, cela requiert une certaine harmonie politique au niveau intercommunal ou régional, ce qui n'est pas toujours évident compte tenus des intérêts des différents acteurs. * 149- DE BEIR, JEAN ; DESCHANET, Elisabeth ; FODHA, Mouez op. Cité p. 7 * 150- En France, l'article 34 de la constitution précise que « la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». * 151- Au Cameroun l'article 26 précise que: « Sont du domaine de loi: (...) la création des impôts et taxes et la détermination de l'assiette, du taux et des modalités de recouvrement de ceux - ci * 152 - Article 3 al. 3 de la loi n° 2009/019 du 15 décembre 2009 portant fiscalité locale au Cameroun. * 153 - Article 3 al. 1 de la loi n° 2009/019 du 15 décembre 2009 portant fiscalité locale au Cameroun. * 154 - Par rapport aux collectivités camerounaises et françaises. * 155 - DE BEIR, Jean ; DESCHANET, Elisabeth ; FODHA, Mouez , op. Cité p. 7 * 156 - Avec le « grenelle de l'environnement »,la France entre dans l'ère d'une fiscalité écologique incitative. * 157 - GÉRARD, Marcel. Op. Cité p.26. * 158 - En Belgique la gestion des déchets radioactifs est de compétence fédérale. * 159 - Accises sur des biens de consommation susceptibles de nuire à l'environnement, par exemple du fait de leur contenant. * 160 - Article 61 et suivants de la loi n° 2009/019 du 15 décembre 2009 portant fiscalité locale au Cameroun. * 161 - Ministère de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer en charge des Technologies vertes et des Négociations sur le climat. La fiscalité environnementale prend son essor, 2010 (page consulté le 11 août 2010) <www.legrenelle environnement.fr/.../Grenelle_fiscalite_verte_V2010_02-02_.pdf> |
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