Résumé
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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Les réflexions que nous avons tenté de mener au
sujet des représentations des espaces urbains et des ordures
ménagères ont permis de constater tout premièrement la
complexité du sujet choisi. Et le défi a consisté, dans un
premier temps à identifier les différentes représentations
des espaces urbains, publics et privés tels que nous les avons
distingués ainsi que les représentations des ordures
ménagères. En second lieu il s'agit d'établir les liens de
causalité possibles qui existent entre ces représentations et la
gestion des ordures ménagères.
En somme, il s'est agi pour nous de comprendre et d'expliquer
un fait social à l'oeuvre dans une société en plein
développement urbain. Et une chose nous est apparue évidente :
les espaces urbains vivent sous des images mentales. En tant que supports
privilégiés des activités des hommes, ils sont diversement
perçus et valorisés par ceux qui les habitent ou les mettent en
valeur : « à l'étendue qu'ils occupent, qu'ils parcourent et
qu'ils utilisent se superpose, dans leur esprit, celle qu'ils connaissent,
qu'ils aiment et qui est pour eux signe de sécurité, motif de
fierté ou source d'attachement. » (Paul Claval, 1978 : 16). A la
fonctionnalité des espaces qui participent de la formation des
représentations des espaces urbains, s'ajoutent une organisation et une
gestion des espaces urbains qui ne fournissent pratiquement aucun repère
aux citadins n'djaménois en quête de sens à ce nouvel
environnement en plein développement. Les espaces publics urbains,
qu'ils soient définis comme « espaces de l'Etat »,
« espaces de tout le monde » ou « espaces vides
», ont en commun le fait de ne pas être perçus
à travers des fonctions urbaines de divertissement, d'esthétique,
de ventilation urbaine, de circulation, de commerce, de sport, ...de
façon collective. Ceci produit une désorganisation sociale qui
affecte l'assainissement desdits espaces car il y a inadéquation entre
ces fonctions urbaines et les usages que suggèrent les
représentations desdits espaces par ses consommateurs (et producteurs)
quotidiens. Or ces derniers, en plus de leur réglementation,
suggèrent des normes de salubrité imposables et qui s'imposent
d'ailleurs très souvent d'elles-mêmes à l'ensemble de la
communauté urbaine particulièrement lorsqu'ils
bénéficient d'un assainissement régulier. En absence donc
de ce modèle qui accompagne le développement urbain, les
représentations qui se constituent, autorisent pour l'essentiel des
investissements des espaces urbains sans une véritable
responsabilité des populations urbaines1quant à leur
assainissement. Bien entendu, les espaces urbains ne seront jamais investis
uniquement à travers les fonctions que lui définit
l'aménageur urbain. Car à ces fonctions se superposeront
nécessairement des fonctions que lui attribueront soit, sporadiquement
soit, permanemment les personnes qui les exploitent dans leurs quêtes
quotidiennes des « bénéfices [notamment] symboliques »
pour emprunter le terme de Michel de Certeau (1994 : 17).
1 Qui sont d'ailleurs une sorte de citadins hybrides ;
peut-on dire des néo-citadins en quête de citadinité ?
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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Les espaces urbains sont en outre gérés en
fonction des contraintes naturelles que l'on y rencontre. Nous avons pu voir
que compte tenu de leur géomorphologie et de leur géologie, on y
accueille des ordures qu'on attend en réalité ailleurs dans des
territoires prévus à cet effet. D'où l'ambivalence du
concept de "Not In My Back Yard" (NIMBY) que nous avons
développé.
En tout cas, la gestion des ordures ménagères
à N'Djaména se réalise en marge de la gestion des espaces
urbains. Or, gérer les ordures ménagères suppose
nécessairement que soient également gérés les
espaces qui en sont les supports. Car finalement le problème qui
préoccupe (ou qui devrait préoccuper) les gestionnaires des
ordures ménagères ou même les populations, c'est de
gérer sainement les ordures dans les espaces même où elles
sont produites. C'est évident en plus qu'en milieu urbain, chaque
ménage ou chaque individu ne transporte pas les déchets de ses
consommations ni individuellement, ni aussitôt après leur
production, aux décharges finales généralement
situées hors de la ville. Les déchets urbains partent des
ménages et autres producteurs des déchets aux décharges
finales en transitant par les espaces urbains où parfois ils
séjournent pendant longtemps. Il faut donc gérer aussi bien les
espaces urbains que les ordures ménagères.
Perceptions, espaces urbains et gestion des ordures
ménagères à N'Djaména (Tchad)
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