4.2. Intégration de la production
L'intégration de la production est une politique
concertée de rationalisation de la production, dont le fondement repose
sur la négation même de la concurrence entre partenaires
communautaires dans les domaines concernés. L'intégration de la
production peut être mise en oeuvre selon deux modalités 29:
- La première est celle de la
spécialisation. C'est la situation dans laquelle, quelques partenaires
de la Communauté ont compétence (naturelle ou attribuée)
pour fabriquer un produit ou un groupe de produits, pour l'ensemble du
marché communautaire. Ils jouissent alors d'une sorte de monopole
reconnu et accepté, étant pratiquement assurés de ne pas
se heurter à une concurrence quelconque, de la part des autres
partenaires.
- La seconde modalité
d'intégration de la production est celle de la coproduction. Deux ou
quelques partenaires mettent en commun, chacun, un élément de
force productive (matière première, main-d'oeuvre, technologie
...) pour la fourniture commune d'un produit qui sera naturellement
destiné à l'ensemble du Marché Communautaire
Comme nous pouvons le constater, l'intégration de la
production repose généralement sur une division
systématique du travail au niveau des pays membres ; chaque pays membre
se spécialise dans une branche d'activité
déterminée. Telle activité sera localisée dans tel
pays, soit selon des normes de calcul économique, comme une meilleure
rentabilité financière (intégration capitaliste), soit
parce que les pays concernés en ont décidé ainsi
(intégration socialiste)30.
Autrement dit, l'allocation des ressources aura
été effectuée par la loi du profit, ou par la
volonté consciente des Gouvernements des Etats membres. Le
système de coproduction est aussi une variante de l'intégration
de la production. On parle de coproduction lorsqu'une branche d'activité
est exploitée de manière conjointe par deux ou plusieurs pays
partenaires31. L'intégration de la production est surtout
développée dans le cadre des groupes de pays à
économies régies par le mode de production socialiste, dans
lequel l'Etat reste le maître d'oeuvre de toute activité
économique de base. Dans une telle communauté
intégrée, la production intégrée trouve
29 DIOUF, M., op.cit., p.125
30 Idem., p.129 31Ibidem
MBO KOMANGO Guy La SADC et l'intégration des
économies. Enjeux et défis congolais
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automatiquement comme débouchés les
marchés des pays membres, qui ne se présenteront pas en position
de concurrence ; ce qui signifie une liberté totale de circulation des
marchandises.
L'intégration de la production ne peut donc exister
qu'avec la libre circulation des marchandises, c'est-à-dire, un certain
degré d'intégration des marchés. Seulement, ici,
uniquement parce qu'elle est la base de l'intégration de la production.
C'est d'ailleurs bien la raison pour laquelle, l'intégration des
marchés peut ici rester partielle. Autrement dit, la phase du libre
échange suffit pour assurer l'intégration de la production. Les
pays membres n'ont pas à s'embarrasser des contraintes de l'Union
douanière (tarif extérieur commun) ou du Marché commun
(harmonisation des politiques fiscales) ; ce qui exclut tout risque de
supranational.
L'exemple type d'intégration de la production est celui
des pays socialistes : Conseil d'Assistance et d'Entraide Mutuelle (Comecom).
L'intégration des marchés et l'intégration de la
production sont surtout des tendances. La première est
prépondérante dans le capitalisme, la seconde dans le
socialisme.
a)Spécialisation et division du
travail.
Les deux termes « spécialisation » et «
division du travail » sont presque synonymes dans le vocabulaire des
économistes. Ceux-ci ont toujours considéré la division du
travail comme devant servir aux échanges commerciaux. A
l'intérieur d'un groupe de pays, la division du travail est
déterminée par des différences dans les conditions de
production, dans les avantages et désavantages dont
bénéficie et souffre chaque pays. Les avantages, qu'ils soient
absolus ou relatifs, sont toujours donnés par la Nature.
Certains pays disposent de dotations naturelles en ressources
du sol ou du sous-sol. Leurs exportations de produits primaires (d'origine
minérale, végétale ou animale) correspondront alors
à une certaine spécialisation naturelle. Les produits primaires
constituent d'ailleurs le seul domaine de spécialisation naturelle. Par
contre, la spécialisation opérée sur base de produits
industriels n'a rien de naturel ; elle est toujours créée. En
effet, on peut toujours transposer d'un pays à un autre les facteurs de
production industrielle (machine, technologie, savoir-faire, matières
premières ...).
Ceci étant, la spécialisation naturelle ou
créée, peut être opérée à un niveau
vertical ou à un niveau horizontal, en prenant comme critères
dimensionnels le secteur primaire (ressources du sol et du sous-sol) et le
secteur secondaire (industrie). On parlera alors de spécialisation
verticale, lorsque ce sont les deux secteurs qui se trouvent concernés
en même temps dans les échanges : certains pays sont
spécialisés dans les produits primaires, d'autres dans les
produits industriels. Comme c'est le cas
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économies. Enjeux et défis congolais
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par exemple lorsque la RDC exporte du cuivre vers l'Europe
pour en recevoir des voitures. La spécialisation verticale est une
spécialisation sectorielle32.
On parlera de spécialisation horizontale lorsque c'est
un seul secteur qui est concerné dans les échanges : à
l'intérieur d'un même secteur, certains pays sont
spécialisés dans telles branches de produits, d'autres pays
étant spécialisés dans telles autres branches de produits.
Comme c'est le cas lorsque le Sénégal exporte des phosphores et
de l'arachide vers la Côte d'Ivoire pour en recevoir du café et du
cacao. Comme cela arrive aussi à l'occasion d'échanges de
produits manufacturés entre pays développés ; la
spécialisation horizontale est une spécialisation interbranche ou
intra-branche. C'est le commerce extérieur, pour être plus
précis, la structure des échanges commerciaux, qui constitue le
révélateur du type de spécialisation en vigueur dans un
ensemble communautaire.
b) Les Actions communes de coproduction
L'intégration de la production ne se réduit pas
aux accords de spécialisation. Elle s'étend aussi aux actions
communes de production, entreprises sur la base d'une
complémentarité que justifie la dotation inégale des pays
en ressources naturelles : matières premières, ressources
financières et ressources techniques. Il peut arriver que l'exploitation
d'une branche d'activité dans un secteur donné, soit d'une
envergure de mobilisation de ressources de toutes sortes, telle qu'un seul pays
ne puisse pas y faire face. Sans être impliqués dans une
expérience communautaire, un certain nombre de pays
intéressés peuvent toujours joindre leurs efforts en vue de la
réalisation d'objectifs communs.
Ce qui est de nature à donner lieu à des
organisations-consortiums, pour mettre en valeur un fleuve commun ou bien pour
lutter contre un péril commun. Mais lorsqu'une telle composition a lieu
entre partenaires communautaires et se traduit par l'implantation
d'unités de production, elle revêt une signification
différente et s'inscrit comme composante du processus
d'intégration lui-même.
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