CITATION
« Tous les humains ont besoin de lieux de tendresse
et de repos, de paix et de sérénité »
Gérard Fourez, Eduquer, 1998, De Boeck :
57
DEDICACE
Je dédie ce mémoire à :
- Dieu le Tout Puissant qui a envoyé son Fils unique
pour nous pourvoir de sa grâce ;
- Mon père SODJAGO Kossi et à ma mère
NOUMONVI Améyo qui ont compris que la nouvelle génération
a plus que jamais besoin d'être scolarisée.
Qu'ils trouvent ici le fruit et l'aboutissement des efforts
auxquels ils ont librement consentis.
Avant-propos
La violence observée un peu partout dans le monde
aujourd'hui inquiète-t-elle ? Si oui, que font les hommes en guise
de palliatif pour débrouiller cette situation? L'homme connaît-il
l'origine de ce fléau séculaire ? Telles sont autant
d'interrogations devant lesquelles l'esprit humain reste complètement
atterré et interdit.
La violence aujourd'hui prend une proportion
inquiétante. A la télévision comme à la radio, sur
l'internet comme dans les rapports humains quotidiens, elle est bien visible.
Face à la guerre et à la criminalité, le message est
orienté vers le « qui veut la paix prépare la
guerre ».
Cependant, nous nous sommes posé une question de
départ qui, d'ailleurs, nous a le plus poussé à opter pour
cette thématique : pourquoi la violence, quelle est l'origine de la
violence ? Cette question, aussi pertinente soit-elle n'est pas nouvelle.
Ce fut à celle-ci que répondait Hobbes (1651)
lorsqu'il disait que l'homme est un loup pour l'homme. En clair, pour celui-ci,
la violence est innée à l'homme. Pour d'autres, comme A. Smith,
elle provient des conditions (par exemple économiques)
extérieures qui déterminent l'homme. Mais Morin (1985) en trouve
l'origine dans les habitudes relationnelles entre les hommes. Autrement dit, ce
sont les comportements que nous contractons à travers
l'éducation et que nous manifestons dans nos rapports avec autrui qui
sont à l'origine de la violence.
Cette dernière vue nous semble plus pertinente en ce
sens qu'elle situe clairement la violence observée aujourd'hui dans le
temple de l'éducation. Cette dernière représente toute la
culture humaine. Et la violence est justement une culture. C'est dire en fait
que si la violence a pris aujourd'hui une proportion inquiétante, c'est
parce que l'homme l'a « cultivée ». La
responsabilité incombe donc en amont et en aval à
l'éducation.
Conscient de ce constat, l'école, l'institution
éducative moderne, est orientée de manière à
véhiculer une culture de paix tant dans sa philosophie que dans ses
pratiques. Dans presque tous les pays, la punition corporelle, conçue
comme instrument de supplice, d'oppression et de violence est bannie et
interdite.
Le Togo, ayant ratifié beaucoup de conventions
relatives aux droits de l'enfant est arrivé à interdire ces
pratiques autour des années 75. Mais certains enseignants continuent
à en faire usage jusqu'aujourd'hui. Que cache réellement ce refus
d'obtempérer ? Les enseignants font-ils
délibérément de ne pas respecter la réglementation
ou sont-ils forcés par un certain nombre d'éléments ?
Est-ce une simple faille organisationnelle ou les enseignants font ceci en se
référant aux éléments macrosociaux ?
Nous nous inscrivons ici dans une dynamique avant tout
sociale. Notre intérêt est donc tourné vers les
représentations sociales de la punition surtout corporelle dans la
société togolaise. L'intérêt sociologique de
l'étude se situe surtout dans ce prisme.
Mener un travail de recherche de l'envergure de celui-ci est
une entreprise difficile. Sa réussite provient de la contribution de
plusieurs personnes que nous nous devons de remercier en signe de gratitude.
Nous tenons à remercier du fond de notre coeur toutes
les personnes qui ont contribué à notre formation et à la
réalisation de ce mémoire.
Nos remercîments vont particulièrement
à :
- Monsieur BAKALI Toï, notre directeur de
mémoire qui n'a pas hésité à consacrer son temps et
à apporter sa grande contribution à la réalisation de
cette étude ;
- Monsieur GBEMOU Kokou qui a accepté diriger ce
travail ;
- Aux membres de jury qui, en dépit de leurs
multiples occupations, ont bien voulu lire et examiner ce mémoire,
recevez ici mes sincères remerciements;
- Ma tante SODJAGO Adjo pour son soutien financier et
moral ;
- Ma soeur SEGLA Akouvi pour son soutien ;
- AMAGLO Kokou qui n'a pas hésité à nous
apporter son soutien pour la réalisation de ce travail, qu'il voit ici
ma reconnaissance ;
- Monsieur TIOU Komi pour ses conseils et son
soutien ;
- Monsieur DATOLOUMBEYE Kourabé Lobet Japhet pour son
soutien incommensurable ;
- Monsieur LABO Illa pour son soutien.
Mawoussé K. SODJAGO, Avril 2011LISTE
DES SIGLES
CNDP-TICE : Centre National de Documentation
Pédagogique et des Technologies de l'Information et de la Communication
pour l'Education
CNIOSP : Centre National d'Information et d'Orientation
Scolaires et Professionnelles
CSEF : Conseil Supérieur de l'Education et de la
Formation
DAENF : Direction de l'Alphabétisation et de
l'Education Non Formelle
DAF : Direction des Affaires Financières
DEPP : Direction des Enseignements Préscolaires et
Primaires
DESG : Direction de l'Enseignement Secondaire
Général
DEX-CC : Direction des Examens, Concours et Certification
DF : Direction des Formations
DPEE : Direction de la Planification de l'Education et de
l'Evaluation
DPIP : Direction des Programmes et Innovations
Pédagogiques
DRE : Direction Régionale de l'Education
DRH : Direction des Ressources Humaines
EPT : Education pour Tous
EPP : Ecole Primaire Publique
IEPP : Inspection des Enseignements Préscolaires
et Primaires
IGE : Inspection Général de l'Education
LIMUSCO : Librairie des Mutuelles Scolaires
MEPSA : Ministère des Enseignements Primaire,
Secondaire et de l'Alphabétisation
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PAN/EPT : Programme d'action Nationale / Education pour
Tous
PC : Punitions Corporelles
PSP : Punitions Semi Physiques
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Tableau
récapitulatif des indicateurs et variables
Tableau 2 : Répartition des
enseignants à enquêter selon leur établissement
Tableau 3 : Répartition des
enseignants selon leur âge et sexe
Tableau 4 : Répartition des
enseignants selon leur niveau d'instruction et leur
formation professionnelle
Tableau 6 : Répartition des
enseignants selon les motifs qui les poussent à punir
leurs élèves
Tableau 7 : Répartition des
enseignants selon les PC utilisées
Tableau 8 : Opinion des enseignants
sur les types de punition qu'ils utilisent
Tableau 9 : Répartition
des enseignants selon l'importance qu'ils accordent aux PC
Tableau 10 : Opinion des enseignants
sur ce que signifie la punition corporelle
Tableau 11 : Répartition des
enseignants selon leur niveau d'information concernant la prohibition des PC
à l'école
Tableau 12 : Répartition des
enseignants selon les raisons qui les poussent à user des PC
Tableau 13 : Répartition des
enseignants selon leur perception concernant le
développement du goût de
l'effort par les P.C.
Tableau 14 : Répartition des
enseignants selon leur perception concernant le fait
que les P.C. amènent
l'élève à mieux travailler
Tableau 15 : Répartition des
enseignants selon leur perception en ce qui concerne
le fait que les P.C. développent la
bonne conduite
Tableau 16 : Répartition des
enseignants selon qu'ils communiquent ou non les
objectifs des cours aux
élèves
RESUME
Cette étude a pour objectif de mettre en lumière
les facteurs qui justifient la non application de la prohibition des punitions
corporelles dans le système scolaire togolais. En clair, il est question
des causes qui justifient l'usage des PC (punitions corporelles) par certains
enseignants, bien que ce soit explicitement interdit. Elle se fonde sur le
constat que beaucoup d'enseignants, bien qu'informés sur l'interdiction
des PC à l'école continuent à en faire usage.
L'aspect théorique comprend à la fois la revue
critique de la littérature et une théorie d'analyse.
En ce qui concerne la revue critique de la littérature,
elle est axée sur deux principaux pôles : les thèses
soutenant l'usage des punitions en éducation et qui apportent en
même temps des éléments sur le fondement des PC en
éducation et celles qui mettent l'accent sur la nécessité
de supprimer les punitions surtout corporelles en éducation.
Quant au volet théorie d'analyse, nous nous sommes
adossé sur deux théories sociologiques notamment la
théorie systémique et celle stratégique.
Nous avons utilisé comme instrument de collecte de
données le questionnaire qui nous a permis de recueillir des
données auprès de 60 enseignants sélectionnés dans
4 EPP (écoles primaires publiques) de choisis au hasard dans
l'inspection Lomé-Ouest qui constitue notre zone d'étude.
Après les investigations sur le terrain, les
résultats auxquels nous sommes parvenus montrent que les enseignants
continuent à pratiquer les PC bien que ce soit interdit parce que, d'une
part, ils pensent que les PC développent chez l'élève le
goût de l'effort, améliorent son comportement et l'amènent
à améliorer ses résultats scolaires et à se
ressaisir vite et d'autre part, parce qu'ils utilisent la pédagogie
traditionnelle.
Considérant ces résultats, nous avons
proposé, pour faire respecter la réglementation censée
lutter contre la violence en éducation scolaire, qu'il faut former les
enseignants à l'usage des méthodes pédagogiques nouvelles
et construire des infrastructures qui permettront d'avoir des effectifs
raisonnables dans les salles de classe.
MOTS-CLES
Punition, punition corporelle, discipline, prohibition,
système scolaire, violence.
INTRODUCTION
GENERALE
Toute société assure sa perpétuation au
travers de l'éducation. L'éducation est donc le socle et le pivot
de tout l'édifice social. C'est à juste titre que J. J. Natanson
(1973 : 13) affirmait : « Si l'éducation
n'est pas assurée, c'est la catastrophe. Tous les maux, d'ailleurs,
viennent de l'absence d'éducation ou de la mauvaise
éducation ». L'éducation est donc la nourriture de
la société. Elle est à la vie sociale ce qu'est la
nourriture à la vie biologique. Elle rend l'homme social, donc capable
de vivre en société comme le signalait E.
Durkheim (1966 : 90) : « L'homme que
l'éducation doit réaliser en nous, ce n'est pas l'homme tel que
la nature l'a fait, mais tel que la société veut qu'il
soit ». Pour Kant (1981 : 37) « L'homme ne
peut devenir homme que par l'éducation ».
Mis à part ce rôle social, l'éducation
assure le développement économique et sociopolitique de la
société. Elle reste le levier de tout progrès
économique, social, culturel et politique. Pour Joseph Ki-Zerbo
(1992 : 458), « l'éducation est la locomotive du
développement ». L'éducation crée un
capital humain mis au service du développement de la
société. Elle joue, par ailleurs un rôle intégrateur
de l'individu dans le tissu social. En un mot, elle transforme l'homme.
Dans ce sens, l'éducation est un droit
fondamentalement reconnu à tout individu. Puisque c'est elle qui
favorise son épanouissement. Pour Ibn Habib Bawa (2008 : 2),
« De nos jours, ne pas aller à l'école signifie ne
pas acquérir les savoirs de base ». Conscient de ce
rôle irremplaçable de l'éducation surtout scolaire, les
Nations Unies ont défini dans le deuxième objectif du
millénaire pour le développement (OMD) le droit d'accès
à l'éducation pour tous.
Dans ce cadre s'inscrit le fameux plan de l'EPT. Au Togo, ce
plan d'action national d'éducation pour tous (PAN/EPT) a
été clairement défini à travers des
priorités stipulées et conçues de façon concise.
Disons que sur le plan quantitatif, l'éducation scolaire a
été plus ou moins démocratisée. Mais, il est
à noter que sur le plan qualité, elle n'est pas ce que l'on
attend d'elle. C'est dans cette perspective que des conférences sont
organisées pour assurer la bonne qualité de l'éducation
(par exemple la conférence d'Addis Abéba en 1961, de Nairobi en
1968, de Dakar en 2000, etc.). Dans cette optique, nous voulons nous investir
dans le chantier pour y apporter des perspectives amélioratives, si l'on
peut nous permettre le terme.
Ce qui a le plus marqué historiquement,
géographiquement et pédagogiquement l'éducation et que,
paradoxalement l'on n'en parle pas assez -ou pas du tout- est la contrainte,
laquelle se matérialise par la discipline et les punitions. Les
punitions sont, en effet, un fait indéniable en éducation.
Cependant, on n'en parle pas assez. On feint d'ignorer ce
débat en prenant pour évidents et vrais des
préjugés, des idées arrêtées et
bloquées. Or, « Education et liberté, discipline et
autorité, sont des sujets classiques qu'un pédagogue [...] ne
peut se dispenser de traiter » disait Natanson (1973 : 22).
Pour notre compte, nous dirons que éducation et contrainte, punition et
travail scolaire des élèves sont des sujets qu'un
spécialiste de l'éducation ne peut passer sous silence. Notre
étude trouve précisément ici une pertinence focale.
Nous partirons de l'école comme l'institution
éducative prioritaire, puisque c'est elle qui fait l'objet de notre
étude. L'école est après tout le miroir de la
société. Toutes les pratiques sociales y trouvent leur
écho. Ce qui sous-tend qu'on puisse étudier la
société à travers l'école, ou mieux à
travers son école. Si donc l'usage de la contrainte en
éducation est « chose éminemment sociale »,
il a alors sa place dans « l'ordre des choses » à
l'école.
L'école, telle qu'elle est organisée
déjà renferme en son sein la contrainte : milieu clos,
règlement intérieur, l'enfant comme une cire molle, etc. La
littérature pédagogique est elle-même complice de l'usage
répété des formules normatives comme : "il faut", "on
doit", "tu dois", etc. Ces normes sont extérieures à l'enfant et
assurent l'équilibre du groupe scolaire. Tout manquement à ces
règles et normes est sévèrement réprimé au
travers des sanctions ou punitions qui peuvent être
prédéfinies ou non.
La punition est donc perçue comme un
élément incontournable en éducation surtout scolaire.
D'où le milieu scolaire devient un lieu où sévit une
discipline infaillible avec les pratiques punitives comme support. Le dressage
brutal, la correction corporelle ou morale, la surveillance étroite et
l'exigence d'obéissance absolue sont donc des formes de
sociabilité (ou de socialisation !) admises en éducation au
cours des siècles.
L'histoire de l'éducation nous a permis de nous rendre
compte des types de punitions pratiquées dans le milieu scolaire depuis
l'antiquité.
Au VIème siècle avant J-C, il n'existait pas
des textes officiels ou juridiques pouvant réglementer les punitions. On
châtiait les enfants comme en prison avec l'idée que c'est le seul
moyen d'obtenir d'eux une discipline chère à la réussite
scolaire. Donc les punitions de toutes sortes étaient
pratiquées.
Mais, au fil du temps, et avec le développement des
pédagogies dites nouvelles, des critiques acerbes et virulents sont
adressées au système de punitions qui est surtout perçu
comme un système de violence. Le développement des recherches sur
la psychologie de l'enfant et des thématiques comme
éducation à la paix, éduquer sans
violence, éducation conformément aux droits de
l'homme ont permis de percevoir les châtiments corporels comme
étant trop brutaux et trop oppressifs. Malgré cette perception,
l'usage la « pédagogie noire » ou de la
pédagogie des muscles persiste dans le milieu scolaire, surtout en
Afrique Noire.
Ce n'est qu'à partir du XIXème siècle
que l'on a assisté à un début d'abandon des punitions
corporelles avec la publication des textes juridiques. En France, par exemple,
en janvier 1887, les châtiments corporels étaient abolis par un
arrêté ministériel.
Au Togo, déjà en 1975, la législation
scolaire précise : « le châtiment corporel
est interdit » (République togolaise, 1975 : 32).
Mais, malgré ces précisions de la
législation et au grand dam de la réglementation, l'usage des
punitions de tout genre reste patent, parlant et probant dans le milieu
scolaire au Togo. Pour Saliou Sarr (2010), le président de l'Ecole
Instrument de Paix au Sénégal (EIP-Sénégal), dans
la plupart des écoles de la sous région ouest africaine,
près de 80 % des enseignants infligent des châtiments corporels
aux élèves.
La présente étude va s'atteler à
déterminer les facteurs qui sous-tendent l'usage des punitions
corporelles à l'école au Togo malgré son interdiction.
Par punition, nous entendons toute action capable de montrer
à l'enfant une faute commise, de l'humilier afin de l'amener à se
repentir. C'est donc une « action exercée » par
un individu sur un autre. Dans le cas d'une punition scolaire, l'action est
exercée par le maître qui incarne l'adulte. Sur ce,
l'exécution d'une punition est un devoir pour l'élève. La
punition est corporelle lorsqu'elle cause une douleur physique.
La littérature sur la question est hautement
polémique. Certains auteurs pensent qu'on ne peut pas éduquer
sans punir et d'autres pensent le contraire en insistant surtout sur la
suppression des punitions corporelles jugées trop rudes et surtout
inhumaines. Pour les premiers, les punitions aident l'élève
à améliorer son travail scolaire et pour les seconds, elles
inhibent le goût de l'effort et nuisent à
l'élève.
Cependant, en nous engageant dans ce domaine, nous nous
inscrivons dans une perspective améliorative du milieu et des pratiques
scolaires. Notre étude ne vise donc pas à choisir entre une
suppression systématique des punitions ou un maintien radical de
celles-ci. Concrètement, nous allons mettre en lumières les
raisons matérielles qui poussent les enseignants à user des
châtiments corporels bien que ce soit explicitement interdit. Pour ce
faire, nous allons partir des opinions des enseignants et des
élèves, les vrais protagonistes en situation.
Cette préoccupation conduit inéluctablement
à un certain nombre d'interrogations : pourquoi utilise-t-on la
punition en éducation ? Peut-on concevoir une éducation sans
punition ou peut-on éduquer sans punir? La punition peut-elle
amener l'enfant à développer le goût de l'effort ? La
punition amène-t-elle l'enfant à améliorer son travail
scolaire ? Si les punitions surtout corporelles continuent par être
pratiquées et ce, dans l'illicite (« le châtiment
corporel est interdit », précise la législation
scolaire) dans le milieu scolaire au Togo, c'est parce qu'elles ont un
fondement.
De crainte de ne pas pouvoir élucider certains aspects
du problème en n'adoptant qu'un point de vue sociologique, nous nous
sommes proposé d'adopter un point de vue pluridisciplinaire. Et la
littérature sur la question plaide en notre faveur. En effet,
psychologues, philosophes, sociologues et pédagogues se sont
sérieusement intéressés à la question.
Dans sa structure, le document comprend les différents
chapitres d'un mémoire classique.
Le premier chapitre intitulé
Problématique tente de poser et de justifier le
problème tout en mettant l'accent sur notre connaissance documentaire
concernant le sujet.
Le deuxième chapitre intitulé
Méthodologie nous a permis de présenter les
principales méthodes et techniques d'investigation utilisées.
Le troisième chapitre intitulé
Présentation du milieu d'étude tente de
décrire l'environnement où a lieu l'étude.
Le quatrième chapitre est intitulé
Présentation, analyse et interprétation des
résultats. Nous y avons présenté et
analysé les résultats de recherche et dressé le lien entre
ces résultats et nos hypothèses de départ.
Le cinquième chapitre est essentiellement
consacré aux recommandations.
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE
CHAPITRE 1- PROBLEMATIQUE
1.1- Justification de l'étude
1.1.1- Motivation et intérêt du sujet
Le choix de notre thème a été
dicté par nos préoccupations de chercheur en sociologie de
l'éducation et surtout par l'ampleur du problème qui s'y pose. En
tant que chercheur dans le domaine de l'éducation, nous avons beaucoup
réfléchi à l'éducation scolaire que nous avons
reçue, à l'environnement scolaire dans lequel nous avons
évolué. C'est dans cette réflexion (et observation !)
que les pratiques punitives, surtout celles corporelles nous ont
interpellé.
Les thématiques de la violence en
éducation, de l'éducation à la paix, de
l'éducation conformément aux droits de l'homme nous ont
beaucoup fait réfléchir. Si nous nous sommes investis dans ce
domaine relatif aux punitions corporelles à l'école, c'est pour
analyser son parallélisme, sa congruence, son lien avec ces concepts.
Si nous constatons avec Messan Kodjo (1992 : 6) que
« l'usage des punitions est un fait indéniable dans les
institutions éducatives [...] au Togo », il n'est pas
moins constatable qu'on parle peu des punitions au Togo. C'est donc une
thématique qui fait parler peu d'elle. « Au Togo [...],
les punitions en tant que telles ne constituent pas une préoccupation
majeure ni pour les institutions éducatives ni pour les
pédagogues et autres spécialistes de l'éducation. Les
punitions n'ont pas encore fait l'objet d'un grand débat
scientifique » (Messan K, 1992 :4). Le thème de
l'usage des punitions en milieu scolaire est en quelque sorte un thème
tabou, truffé de non-dits. C'est dans ce sciage que nous voulons
explorer ce domaine, non pas « par provocation », et ce,
spécifiquement sous l'angle des facteurs expliquant le non respect de
l'abolition des punitions corporelles à l'école.
Ensuite, nous avons observé la relation
maître-élève qui caractérise le milieu scolaire au
Togo. Nous sommes frappés par les tensions qui infectent ces relations.
Le problème de punition et d'indiscipline dans les milieux scolaires au
Togo est un problème récurrent. Les problèmes
d'indiscipline amènent les enseignants à user des punitions
surtout physiques. Ceci conduit à un affrontement entre
élèves et enseignants, caractéristique, selon nous, du
conflit générationnel qui marque la société
globale.
Sur ces constats, nous avons voulu, par le canal de cette
étude, comprendre ce qui amène à utiliser les punitions
corporelles en milieu scolaire malgré ses effets susmentionnés.
La punition faisant parti des facteurs inhérents aux conflits scolaires,
il nous a paru pertinent de nous arrêter sur leur fondement, leurs effets
sur le rendement scolaire des élèves et les politiques qui les
réglementent.
Nous voulons, pour nous résumer, apporter notre
contribution, aussi modeste soit-elle, au domaine de l'éducation dans
lequel nous nous sommes investis.
L'étude est localisée à Lomé pour
diverses raisons :
Primo, la ville de Lomé est la capitale du Togo. De ce
fait, elle offre une multitude d'écoles primaires publiques, le secteur
ou le degré d'enseignement que nous avons choisi dans le cadre de la
présente étude.
Secundo, elle offre une diversité
d'élèves et d'enseignants en ce qui concerne leur ethnie, leur
origine sociale, leur origine régionale. Ce melting-pot pourra nous
aider à généraliser plus ou moins l'étude sur
l'ensemble de la société togolaise.
Tertio, la plupart des structures chargées de
l'enseignement du Premier Degré y sont implantées. Ces structures
nous apporteront les informations nécessaires sur la gestion et le
fonctionnement des écoles primaires publiques au Togo, lesquelles
informations sont utiles pour le bon déroulement de cette
étude.
Enfin, nous vivons dans le milieu. Cela nous aidera à
résoudre les problèmes de moyens (déplacement,
documentation,...) qui se dressent en un véritable chicane sur notre
chemin.
1.1.2- Pertinence scientifique
Ce thème que nous abordons sous l'angle de l'usage des
châtiments corporels au grand dam de la règlementation en vigueur
n'a pas fait l'objet d'une étude systématique. En revanche, les
punitions ont fait l'objet de plusieurs études pluridisciplinaires et
transdisciplinaires.
Sur le plan psychologique, ce débat trouve sa place
dans la psychologie de l'apprentissage. Ce thème s'inscrit dans le
débat sur le conditionnement en éducation. Il a fait l'objet de
plusieurs études à commencer par Ivan Pavlov jusqu'à
Skinner en passant par Thorndike.
Particulièrement pour Skinner qui a travaillé
sur le conditionnement instrumental ou opérant, il est à notifier
que les punitions s'inscrivent dans le rang des renforçateurs. On
n'oubliera pas Alice Miller, la propriétaire du terme
« pédagogie noire ».
Sur le plan pédagogique, ce sujet s'inscrit dans un
débat actuel : celui de la vision des pédagogies nouvelles
que contrarient celle de la pédagogie traditionnelle. De nos jours, les
pédagogies nouvelles restent au coeur des transformations
pédagogiques qui caractérisent le milieu scolaire. Ces
pédagogies qui se réclament de la liberté, de l'autonomie,
de la responsabilisation et de l'engagement personnel de l'apprenant suscitent
que l'on se pose la question sur le cadre ou l'environnement pédagogique
et surtout relationnel dans lequel elles devront se matérialiser. Ainsi
Neill, Mme Montessori, Makarenko, Comenius, Claparède, Decroly, pour se
limiter à ceux-là, ont décrit et/ou
expérimenté un cadre dans lequel les punitions n'avaient pas leur
place. Ces partisans des pédagogies nouvelles ont mené des
réflexions et des recherches sur les pratiques punitives en
éducation.
En terme philosophique, le débat se pose sous forme
antinomique : antinomie entre la contrainte et le désir
(intérêt), entre la transmission et la spontanéité,
entre la rupture et la continuité. Ces pôles sont défendus
par des chercheurs qui en ont fait un thème central dans leurs travaux.
John Dewey, Carl Rogers, Rousseau, Locke, Alain, entre autres se sont investis
dans ce domaine.
Aussi des thèses se sont-elles
intéressées à ce domaine. On notera entre autres les
travaux de Jeanne Contou, de Kodjo Messan.
En définitive, la problématique de
discipline-punition a été et reste une préoccupation des
chercheurs en éducation. Et ce, surtout avec le développement et
l'actualité des thématiques comme la violence en
éducation, l'éducation à la paix, l'éducation
conformément aux droits de l'homme. Pour notre compte, nous nous
sommes spécifié en orientant le débat vers l'analyse du
non respect de l'interdiction des punitions corporelles en milieu scolaire au
Togo. Ceci donnera, en principe, une nouvelle teinture et un surplus de
pertinence à la problématique.
1.1.3- Pertinence sociale
La présente étude va répondre aux
préoccupations de l'administration, en ce qui concerne les
interrogations autour de la suppression réelle et effective ou du
maintien de certains types de punition, surtout celles corporelles. Etant
donné que la paix est l'une des valeurs indiscutables
réclamées par la société dans son ensemble, la paix
scolaire devient une préoccupation majeure.
Cette étude pourra, pensons-nous, aider les enseignants
à choisir, parmi une gamme variée de punitions, celles qui
peuvent véritablement aider les élèves dans le processus
éducatif. Puisque c'est ici l'occasion de recenser les types de punition
en usage dans le milieu scolaire au Togo, bien que ce ne soit pas l'objectif
prioritaire de cette étude.
Ensuite, c'est le lieu de la découverte de la
conception de la nature de l'enfance par la société togolaise
à travers une société adulte représentée par
les enseignants. C'est aussi, à concrètement parler, le lieu de
la découverte du rapport entre l'adulte et l'enfant, donc du
modèle pédagogique au Togo.
Par ailleurs, les punitions corporelles sont, pour la plupart
du temps, à l'origine des conflits notoires entre les enseignants et les
élèves. Il en est des cas où l'élève
considère l'enseignant comme un « ennemi ». Alors
sèche-t-il les cours dans sa matière et peut aller jusqu'à
se dire qu'il est incapable de réussir dans la dite matière. Dans
ces cas fréquents d'ailleurs, les punitions inhibent les efforts de
l'apprenant. Dans ce contexte de crise, nous pensons réaliser un
document qui pourra intégrer une certaine
« liberté pour apprendre » pour emprunter
le terme à Carl Rogers (1981). Nous ne
prétendons pas nous aligner derrière une quelconque suppression
des punitions en milieu scolaire (ce qui d'ailleurs ne constitue pas l'objectif
prioritaire de cette étude), mais nous aurons à démontrer
qu'il en existe une gamme assez variée et qu'il est à choisir
celles qui sont autorisées et effectivement éducative au
détriment de celles qui sont prohibées. Nos recommandations iront
dans ce sens précis.
En outre, à travers la non application de la
prohibition des châtiments corporels, nous mettrons en lumière les
problèmes organisationnels qui minent le système scolaire
togolais, les trous ou les failles de la réglementation du milieu
scolaire, ce qui constitue une base pour l'amélioration du
système.
Notre contribution au débat, aussi modique soit-elle,
participera à tracer des directives, lesquelles pourront
améliorer la relation éducative que nous cernons comme l'ensemble
des rapports aussi verbales que non verbales entre l'enseignant et l'apprenant.
Puisque c'est cette relation qui conditionne le bon déroulement de
l'acte pédagogique.
Au-delà de tout ceci, cette étude pourra servir
de référence aux organismes (ONG, associations, groupements,
etc.) de la promotion de l'enfance et des droits de l'enfant. Ce document
pourra aussi servir de référence aux chercheurs et aux organismes
susmentionnées quant aux projets axés sur la violence en
éducation, les conflits scolaires, l'éducation à la paix,
l'éducation conformément aux droits de l'homme, l'inventaire des
punitions en usage dans le milieu scolaire au Togo, etc.
1.2- Revue critique de la littérature
Ce qui saute aux yeux dans la littérature est cette
contradiction radicale qui oppose les auteurs qui ainsi se divisent en deux
camps rivaux : d'un côté, les partisans de l'éducation
traditionnelle qui font l'éloge des punitions et plaident pour leur
maintien et de l'autre, les partisans des écoles "nouvelles" ou
"actives" qui critiquent ces punitions en disant que les élèves
peuvent performer et obtenir de bons résultats scolaires sans elles.
Pour les premiers, l'élève ne pourra pas apprendre et
réussir en l'absence des punitions. La délicatesse de la mission
qui est confiée à l'enseignant l'autorise à user de tous
les moyens, les punitions corporelles inclu, pour parvenir à un bon
résultat. Pour les seconds, les élèves peuvent se
discipliner eux-mêmes si on fait confiance en eux.
1.2.1- Les travaux centrés sur la défense de
l'usage des punitions en éducation scolaire
Beaucoup de travaux défendent l'usage des punitions
corporelles en milieu scolaire. Entre autres, nous avons recensé les
travaux de Ségbo, d'Alain, de Mosse-Bastide, de Tchaménon. Le
dénominateur commun de tous ces travaux est qu'ils soulèvent la
question de la nécessité de la punition en éducation en
général et à l'école en particulier.
Selon Koffi Ségbo (2007) qui s'inscrivait dans la
logique du « qui aime bien châtie
bien », la punition est un remède contre la paresse. Elle
aide les élèves à obtenir de meilleurs résultats
scolaires. Rapportant les résultats d'une enquête menée par
Yawovi Tchamenon (1984) auprès des enseignants et des parents
d'élèves, il en vient à dire que la non utilisation du
bâton derrière les élèves est à l'origine de
leurs échecs. Pour cela, il prône l'usage des punitions
corporelles. « L'enseignant qui aime ses élèves,
dit-il, et qui veut la réussite de ceux-ci [...] doit pouvoir
sanctionner par des punitions corporelles » (Ségbo,
2007 : 32). En d'autres termes, la punition réveille en l'enfant le
sentiment du travail. L'élève sait qu'il y aura des coups
humiliants et douloureux lorsqu'il manque de faire son travail. Cela voudra
dire que selon Ségbo, l'application de la prohibition des punitions
corporelles à l'école sera source d'échec. C'est cette
vision qui l'amène à défendre l'usage des punitions
corporelles à l'école.
Selon Léandre Coudray (1989), après la
période de la "vieille Grèce", la correction corporelle reste
courante dans les écoles primaires. Ces punitions permettaient au
magister d'instaurer une discipline, nécessaire pour le bon
fonctionnement des activités pédagogiques. Il citait Saint
Augustin qui nous présente une pédagogie de sévère
contrainte corporelle et morale dont il fait l'éloge en ces
termes :
« ...On me mit à l'école pour
apprendre mes lettres ; pauvre que j'étais, je ne voyais pas
à quoi cela servait, et pourtant, quand je me montrais paresseux
à apprendre, je recevais des coups. Les grandes personnes trouvaient
cela parfait. Nos nombreux devanciers dans la vie nous avaient
préparé ces sentiers douloureux par où il nous fallait
passer, au prix d'un surcroit de labeur et de souffrance pour les enfants
d'Adam... » (Saint Augustin, cité par Coudray,
1989 :20)
Pour Saint Augustin, le bâton permet à
l'enseignant d'obtenir le goût de l'effort auprès de
l'élève, de l'amener à apprendre. Les punitions
corporelles permettent à l'élève de reconnaître ce
qui lui est utile et de faire l'effort pour le réaliser. Vu le moyen
pédagogique que constitue la punition corporelle, l'enseignant ne pourra
donc pas s'en passer.
D'autres auteurs abordent le thème sous le narthex de
l'autorité. C'est dans ce canal que s'inscrit Marcel Postic.
En effet, pour Postic (1974), l'autorité du
maître est incontournable et est la seule condition de la réussite
de l'apprentissage. Selon lui, l'autorité est un pouvoir permettant
à l'enseignant d'asseoir l'ordre, le respect, la concorde mutuelle, en
un mot la discipline. L'enseignant doit être en mesure d'appliquer les
sanctions avec fermeté pour se faire respecter. Citant G. Ferry et R.
Cousinet, il disait que l'autorité est nécessaire en
éducation et doit caractériser toute relation éducative.
Il faut que les élèves se considèrent toujours comme
« inférieurs » et sachent donc qu'ils
dépendent de l'autorité d'un adulte (l'enseignant) qui lui, se
considère toujours
comme « supérieur ».
Pour Mosse Bastide (1966), l'autorité du maître
répond aux nécessités de l'apprentissage, ainsi qu'aux
objectifs à atteindre. En effet, Mosse Bastide défend
l'autorité comme un moyen efficace de formation, un moyen pour assurer
la transmission maximale et une réussite du processus d'enseignement. Il
se défendait en ces mots :
« L'enseignement est la tentative audacieuse [...]
de chercher à conduire tous les enfants à ces sommets qu'ont
gravis les seules grandes personnalités, en leur apprenant en vingt ans
vingt-cinq siècles de découvertes [...]. Ne faut-il pas les
obliger à devenir des hommes ? [...] Ne faut-il pas lutter contre
le plaisir immédiat, la paresse souciante de l'animal ? »
(Mosse Bastide, cité par Douet, 1987 : 33)
Ce sont là des questions qui ne laissent pas le choix
à l'enseignant même en face de la réglementation.
L'enseignant a des objectifs qu'il doit atteindre. Et ceci n'est guère
mission facile. Il faut parfois « forcer les choses ». La
vision de Mosse Bastide paraît judicieuse mais comment procéder
quand la réglementation explicitement interdit ces pratiques ? Ceci
ne pose-t-il pas un autre problème si l'enseignant enfreint le
règlement ?
D'autres auteurs encore abordent le phénomène
de façon plus générale en utilisant le concept de
"discipline" qui, en fait couvre le champ de la punition et de
l'autorité. La discipline étant l'ordre à établir,
le décorum, elle inclut en son sein même les pratiques punitives,
qui ne sont en principe qu'à son service.
Mosse Bastide (1966) considère la discipline comme le
seul moyen d'amener l'enfant à la connaissance de soi. Pour lui,
l'enfant est le jouet de ses instincts. Il a une nature
« animale », caractérisée par le règne
des pulsions. « Discipliner, disait-il, c'est
dépouiller l'enfant de sa sauvagerie» (Mosse Bastide,
cité par Douet, 1987: 33).
Alain (1948), ardent défenseur de la pédagogie
traditionnelle entre dans ce débat en concevant l'enfance comme une
période d'incapacité et d'agitation. Corollaire : il
prône un système autoritaire et de tradition. Pour lui, l'enfant a
au fond de lui le désir de grandir, de ressembler à un adulte,
d'avoir sa compétence. Cependant ses désirs sont vains car
l'enfant ne peut pas lui-même suivre le chemin qui le conduirait à
réaliser ce but, et c'est le rôle du maître que de l'aider
dans cette tâche en lui imposant la contrainte nécessaire. Pour
Alain, le maître ne doit pas craindre de déplaire à
l'enfant. Et d'ailleurs, il ne doit pas chercher à lui plaire. L'enfant
est un être de plaisir. Alain oppose les notions de travail, de
difficulté à celles du plaisir et de
l'intérêt. « Ce qui intéresse n'instruit
jamais ! ». C'est ce constat qui l'a amené à
défendre la méthode traditionnelle. « Que le
passage de la récréation à la classe soit marquée
et solennel, que la cloche ou le sifflet marque le retour à un ordre
plus sévère »
La discipline, l'autorité sont les seuls garants,
selon Alain, de la réussite du processus d'apprentissage. C'est pour
cela que le maître ne doit pas témoigner de la sympathie à
l'égard de l'élève. Car « bonté de
coeur entraîne paresse, désordre,
laisser-aller... ». C'est cette atmosphère de sympathie
et d'affectivité qui rend l'éducation familiale inefficace et
impossible. Alain se dresse ici, en somme, comme le grand tenant des
méthodes traditionnelles basées sur la répression, la
punition, la discipline stricte et l'autorité.
Même son de cloche pour Emile Durkheim (1903) qui
conçoit la discipline d'une façon sociologique, donc descriptive.
Pour lui, à l'école, la discipline est la
« morale » de la classe. Chaque
société, selon Durkheim, a besoin de fonctionner (ou mieux
fonctionne) sur des règles qui constituent sa morale, sa constitution.
Sans ces règles, la vie sociale est impossible. La classe, ou bien
l'école, étant une « petite
société », elle a besoin de la discipline. En
clair, la discipline a un rôle régulateur. L'élève
en a besoin pour travailler et performer. Pour Durkheim, l'éducation est
une « conformisation » sociale. Elle ne peut donc pas
être un processus dans lequel on peut accorder la liberté à
l'enfant. D'où il faut user de la contrainte et de la discipline. Selon
Durkheim, si la punition ne fait pas l'autorité de la règle, elle
empêche néanmoins la règle de perdre son autorité.
Pour Durkheim, il s'agit des punitions aussi corporelles que symboliques.
Pour Alain et Durkheim, la discipline est conçue comme
un élément imposé. Elle est extérieure. De ce fait,
les élèves peuvent la subir. Mais c'est une discipline qui
assujettit.
Les défenseurs des punitions aussi corporelles que
symboliques à l'école partent de certaines considérations
et s'appuient sur des méthodes pédagogiques, lesquelles font la
cohérence même de leur conception. Par exemple, pour ceux-ci,
l'enseignement est magistral, bipolaire et unidirectionnel. Il y a un
pôle "e" qui est le pôle enseignant et un pôle "a" qui
est le pôle apprenant. Les connaissances sont transmises ou
véhiculées du haut vers le bas et à sens unique. Le
pôle "e" étant le sommet, il dispose de la toute puissance sur le
pôle récepteur. La deuxième considération s'articule
autour des conceptions de l'enfant et de l'enfance.
En clair, les défenseurs de l'usage des punitions
à l'école se situent dans une perspective de la pédagogie
traditionnelle. Mais à ces conceptions, deux inspecteurs malgaches ont
formulé une phrase que l'on pourrait qualifier de
leitmotiv : « Le temps est révolu où le
maître estimait normal d'avoir recours au châtiment corporel pour
maintenir intacte son autorité » (Désarmais et R.
Gineste, 1963 : 302). Si les punitions corporelles sont aujourd'hui
conçues comme instrument de supplice et d'oppression, l'enseignant se
doit de s'en méfier surtout que la législation scolaire
l'interdit explicitement.
1.2.2- Les travaux centrés sur la prohibition des
punitions corporelles à l'école
Dans ce registre, nous avons consulté les travaux de
Neill, de Kodjo Messan, de Désarmais et Gineste, de Chatelain, de
Bernard Douet, de Jeanne Contou pour ne citer que ceux-là. Les travaux
de ce registre essaient de faire le lien entre les punitions et la violence et
démontrent donc le fait que la punition ne soit pas nécessaire en
éducation. Par ailleurs, ils fustigent l'autorité/discipline
verticale, unilatérale et excessive au profit d'une
autorité/discipline concerté et autonome.
Déjà au Moyen Age (XVème siècle),
Montaigne dénonçait l'usage des punitions corporelles en
éducation. Cette pratique disciplinaire que Montaigne qualifiait de
« discipline de fer et de sang » lui
apparaît comme une barbarie. Dans les Essais, il s'exclamait en
ces termes :
« Cette police (ce système de punition) de la
plupart de nos collèges m'a toujours déplu : on eût
failli [...], moins dommageablement, s'inclinant vers l'indulgence. C'est une
vraie geôle de jeunesse captive : on les rend
débauchée, l'en punissant avant qu'elle le soit. Arrivez-y sur le
point de leur office (à l'heure du travail) : vous n'oyez que cris
et d'enfants suppliciés et de maîtres enivrés en leur
colère. Quelle manière, pour éveiller l'appétit
envers leur leçon [...], les mains armées de fouets ! Inique
et pernicieuse forme ! » (Montaigne, cité par Coudray,
1989 :21).
A titre de travail empirique, Jeanne Contou (1980), dans sa
thèse de troisième cycle a dénoncé le
système punitif en France. C'est un système dur, barbare et cruel
puisque les punitions avaient pour seul but de combattre l'enfance. Tout ceci
découle des conceptions de l'enfance. Cette période est
diabolisée puisque l'enfant est considéré comme un
être léger, inintelligent, malléable, paresseux d'esprit,
impur, non mûr, corrompu, impitoyable par rapport à l'adulte,
méchant et sadique. La conclusion à laquelle aboutit Contou est
claire : le système punitif sévère, sadique,
oppressif et répressif conduit inéluctablement l'enfant à
la résignation, à l'obéissance aveugle, au conformisme, au
pessimisme bref à l'apathie qui rend l'enfant cruel,
révolté, lâche et menteur. Il nourrit de la haine envers le
travail. Et la conséquence directe n'est que les mauvaises performances,
ce qui se solde par l'échec scolaire. Contou a principalement axé
ses travaux sur les punitions symboliques. En définitive, pour lui, les
punitions n'ont pas de place dans l'éducation scolaire.
Abondant dans le même fil, Bernard Douet (1987) a
mené des enquêtes dans les écoles primaires et maternelles
qui lui ont confirmé que les punitions sont inefficaces. Bien souvent,
les enfants ne mettent pas la différence entre l'intention
éducative et l'acte agressif. Donc, pour eux, être puni, c'est
être agressé. Les investigations de Douet ont confirmé que
les élèves développent les sentiments d'opposition et de
révolte si on les punit de trop. Pour Douet, les punitions sont
inutiles, inefficaces voire dangereuses. Il a donc préconisé que
la discipline soit bienveillante et l'autorité non excessive. Il faut
rechercher les vraies causes de l'indiscipline pour user de la thérapie
la plus convenable au lieu de s'enfermer dans un système de punition
aveugle voire néfaste. En clair, selon Douet, les punitions surtout
corporelles doivent être abolies.
Quant à A. S. Neill (1970), celui-ci aborde le
problème d'une manière encore plus radicale. Pour Neill, le
système de punition est mauvais. La punition est toujours un acte de
haine. Elle forme un cercle vicieux. A Summerhill, les cours sont facultatifs.
Les élèves les suivent s'ils veulent. Les élèves
vivent dans une totale liberté. Et pourtant on y travaille beaucoup.
Donc, pour l'initiateur et le directeur de l'école de Summerhill,
l'enfant libre, autonome n'a pas besoin de punition pour travailler. Puisque la
punition lui enlève tout esprit de responsabilité, d'autonomie et
d'indépendance. La punition sème dans le coeur de l'enfant la
crainte. Or « personne ne peut aimer ce qu'il
craint ».
Telle est aussi la position de Chatelain (1952) qui à
son compte s'insurge contre les pédagogies traditionnelles,
basées sur la punition. Pour celui-ci, l'usage des punitions conduit
à former des enfants trop dociles, craintifs, indifférents, voire
déloyaux, agressifs ou sournois. En d'autres termes, la punition produit
plus de mal que de bien. Les élèves n'en ont pas besoin pour
travailler.
Dans la même veine, R. Désarmais et R. Gineste
(1963 : 302) s'écriaient ainsi : « le temps
est révolu où le maître estimait normal d'avoir recours au
châtiment corporel pour maintenir intacte son
autorité ». Selon ces deux inspecteurs, la crainte que
sèment les punitions corporelles n'est pas à même à
favoriser les activités pédagogiques. La relation
éducative se trouvera tendue dans une telle atmosphère rendant
l'activité scolaire inefficace voire impossible. La punition ne peut
donc pas amener les apprenants à améliorer leur travail scolaire
puisqu'elle se matérialise dans un cadre hostile aux activités
pédagogiques.
De l'autre côté de l'échiquier, John
Locke, bien qu'étant du même avis que Neill, paraît plus
prodigue en solutions réalistes. Selon Locke en effet, les punitions
corporelles sont inefficaces puisqu'elles rendent les élèves
anxieux, frustrés et haineux. En général, les
élèves s'acharnent à bien exécuter leur travail
scolaire afin d'échapper à ces punitions qui sont d'ailleurs
impropres à la morale éducative. Pour Locke, lorsque la punition
n'est pas acceptée par l'élève, elle crée un
sentiment de désobéissance entrainant souvent l'abandon ou la
fuite. Pour lui, il faut avoir confiance en l'enfant. Selon le gentleman,
« The sooner you treat him as a man, the sooner he will
begin to be one ». Locke préconise qu'on donne la
liberté à l'enfant afin qu'il soit motivé par le choix
éducatif de ses maîtres. « Changez de
méthode, et vous verrez qu'ils tourneront aussitôt leur
application du côté que vous voudrez. »
Abordant le problème sous l'angle de la discipline,
Chatelain (1952) plaide pour une discipline interne, émanant des
élèves eux-mêmes, une autodiscipline, ce à quoi fut
d'accord Célestin Freinet (1978).
Freinet qui a classé la discipline en trois (3)
catégories, en vient à choisir celle basée sur la
coopération scolaire, l'entraide entre les élèves,
l'autogestion de la vie commune par les élèves eux-mêmes,
etc. Le tout reste possible grâce aux conseils du maître. Le
rôle de l'enseignant est de guider, d'animer, et non de commander. Dans
une classe, selon Freinet, la discipline sera consentie donc naturelle parce
que comprise par tous comme étant nécessaire. C'est cette
discipline qui aide les élèves à bien travailler. De ce
fait, il condamne la punition, car étant conçue comme quelque
chose d'extérieure et d'imposée aux élèves. Ce sont
là des vues plus ouvertes, ce que l'on peut appeler une perspective
centriste.
Kodjo Messan (1992) y trouve place en reconnaissant d'abord,
au-delà de tout, la place des punitions en éducation. Toutefois,
il préconise que l'on fasse usage uniquement que des punitions
symboliques. « Une menace visuelle ou une insulte [...]
valent mieux qu'un coup de bâton sur les
fesses ».Il précise enfin que l'idéal serait de ne
pas punir du tout car il y a un lien important entre la punition et la
violence. Pour Messan, il y a un lien entre les disciplines d'enseignement et
l'usage des punitions à l'école.
C'est cette idée qu'a prolongé Halilou (2000) en
reconnaissant d'abord le système disciplinaire et punitif comme
nécessaire en éducation scolaire. Mais, malgré tout,
dit-il, « elle ne donne pas entièrement
satisfaction ». Il reprend Messan en affirmant que les punitions
symboliques sont les plus appropriées en situation d'apprentissage. Mais
les punitions ne règlent pas les vrais problèmes. Puisqu'elles
enferment le punisseur et le puni dans une sorte de cercle vicieux.
Bien que Freinet, Chatelain et Neill puissent être
classés dans le registre des partisans des écoles nouvelles,
Neill s'éloigne sensiblement des deux premiers en refusant
l'obéissance et la discipline. « Pourquoi un enfant
devrait-il obéir ? »demandait-il. Pour Neill,
l'enfant est par nature bon. C'est donc la discipline qui le corrompt. Il en
donne un exemple probant : « Enchaînez un chien
et de bon chien, il deviendra méchant. Disciplinez un enfant et
cet enfant a priori sociable deviendra mauvais, menteur et
haineux. » (Neill, 1970 :152). Seule la discipline
consentie garantit la liberté de l'enfant et de son être.
Revenant à la vue modérée ou
« centriste », nous préciserons que pour ceux-ci il
ne s'agira pas de rejeter toutes les punitions en bloc (comme le
préconise Neill), mais il faut les utiliser dans des circonstances
précises et vraiment nécessaires et aussi dans des conditions
rationnelles.
Désamais R. et Gineste R. (1963 : 303) pour
qui « ce n'est pas par la crainte, (mais) c'est par
l'affection que le maître obtient le travail le plus régulier et
le plus productif », après avoir montré
l'intention positive qui anime la discipline, parlent de la discipline
libérale, de liberté organisée. Pour eux,
l'éducation traditionnelle n'amène pas l'enfant à
l'acquisition de l'autonomie. L'enseignant doit s'efforcer de trouver une
solution d'équilibre entre la discipline stricte et la liberté
absolue. L'enseignant doit donc s'efforcer de concilier discipline et
liberté. Il parviendra ainsi à la discipline
libérale :
- En faisant preuve d'une grande compréhension à
l'égard des élèves ;
- En participant à toutes leurs activités,
à leurs jeux ;
- En créant un esprit d'équipe par des
réalisations communes en tout domaine ;
- En développant l'amour de
l'élève ;
- En « sublimant » les instincts
d'opposition ou de destruction des agités et des meneurs ;
- En secouant les « indifférents et les
amorphes » ;
- En faisant régner un esprit d'équipe, de
confiance et de camaraderie ;
- En ayant recours que tout à fait exceptionnellement
aux punitions ;
- En n'infligeant pas des punitions collectives.
Cette solution se trouve encore plus réaliste puisque
dire simplement qu'il faut supprimer les punitions en éducation
scolaire, c'est comme si l'on revenait à une société sans
règle et sans « morale » (Durkheim), à une
forme de libertinage, de licence ou d'anarchie, de laisser-aller (Saint
Augustin). Ce qui est certain, c'est le risque y est grand.
Sur le plan psychologique, le débat reste le même
mais un peu plus spécifié. Les théories de l'apprentissage
entre autres le renforcement se sont penchés sur ce thème et en
ont fait une préoccupation brillante et focale.
La théorie des renforcements a pour pionnier Skinner.
Celui-ci distingue les renforcements négatifs de nature aversive
(punition) des renforcements positifs de nature attractive (récompense).
Pour Skinner (1968), la punition est sans doute un renforçateur
privilégié. Mais, en étudiant plus minutieusement
l'influence des renforcements dans les phénomènes
d'apprentissage, il en vient à condamner les renforcements
négatifs dans sa théorie. Pour Skinner (1968), la
pédagogie traditionnelle n'utilise souvent que les
procédés aversifs, c'est-à-dire les punitions mais aussi
de façon maladroite. « Il pouvait y avoir des
renforcements positifs (récompenses, plaisir d'apprendre), mais d'une
manière générale, l'enfant apprenait pour échapper
à la punition. » Pour lui, c'est un système
à condamner car générant
« anxiété, ennui, agressivité,
culpabilité, voire terreur » et conduit à
« l'échec de l'enseignement que l'on
constate ».
Skinner s'aligne derrière les renforcements positifs
qui, selon lui sont les seuls à même d'amener les
élèves à améliorer leur travail scolaire. C'est
cette optique que défend aussi Le Ny (1974) pour qui, la punition
appartient au passé et qu'il faut la remplacer par la
récompense.
Pour Cornman (1973), le dressage, c'est-à-dire
l'imposition pure et simple de la punition ne peut être utilisée
que durant les deux premières années en raison de
l'impossibilité à faire appel à la réflexion ou
à la conscience morale de l'enfant qui n'existe pas encore. Les
punitions sont donc nécessaires à cette époque de la vie.
Il s'agit alors d' « éduquer les réflexes de
l'enfant en lui donnant des automatismes, des habitudes »
(Cornman, 1973 : 253). Dès que l'enfant acquiert une certaine
conscience morale (de 4 à 5ans), le dressage peut laisser place à
la contrainte morale tenue par le langage donc basée sur la condamnation
morale.
Ce parcours de la revue de littérature nous a permis de
recenser les études traitant des pratiques punitives. Chacun des travaux
a étudié les retombées de l'usage des punitions en
éducation scolaire. Beaucoup de ces auteurs sont arrivés à
la conclusion qu'il faut supprimer les punitions surtout corporelles en
éducation et pourquoi il faut les supprimer. Mais il est à noter
qu'il n'y pas d'étude consacrée systématiquement à
l'usage des punitions corporelles en milieu scolaire au Togo et ce, sous
l'angle spécifique de leur prohibition. C'est dans cette perspective que
nous avons repositionné le problème sur les facteurs qui
expliquent la non application de la prohibition des punitions corporelles dans
le système scolaire togolais et ce, pour combler ce vide. En outre,
notre étude trouve là une pertinence focale.
1.3- Position du problème
Le Togo est un pays rectangulaire de l'Afrique occidentale. Il
est précisément implanté entre le Burkina-Faso au nord, la
République du Bénin à l'est, le Ghana à l'ouest et
l'Océan Atlantique au sud. Avec une superficie de 56 600 km2,
sa population est estimée à 5 millions d'habitants, soit une
densité de 90 habitants par km2.
La première école au Togo fut ouverte à
Petit-Popo (Aného) vers 1842 par Georges Akuété Zankli
Lawson 1er (confère Lange, 1975). En 1850, l'oeuvre de Lawson
fut appuyée par la mission de Wesley qui crée la première
école méthodiste au Togo.
Ensuite vinrent les premiers missionnaires au Togo : la
mission de Brême. L'oeuvre scolaire des missionnaires continua
jusqu'à ce que l'administration allemande ne décide, sur
l'insistance des populations, d'ouvrir en 1891 la première école
primaire publique à Adjido. Cette école publique poursuivait deux
objectifs : assurer la formation générale de la population
et former des indigènes pour le service colonial.
En 1919, le Togo a été retiré à
l'Allemagne et confié à la France par le traité de
Versailles. Avec la France, le Togo a connu une évolution quantitative
du système scolaire qui s'explique par la politique de la
« dégermanisation » menée par la France.
Selon Lange (1975), en 1960, alors que les pays de l'AOF ont
généralement un taux de scolarisation de 13,5%, ce taux
était de 42,0% au Togo. Malgré cette évolution
quantitative de l'enseignement qui se matérialise par la hausse des
effectifs scolaires au Togo, sur le plan qualitatif, les problèmes des
temps coloniaux (problème des inégalités scolaires, de
l'efficacité interne et externe, des déperditions scolaires)
restent non résolus jusqu'à nos jours.
En 1960, le Togo -comme la plupart des pays africains-
acquiert son indépendance et a à sa charge le devoir d'organiser
lui-même son système d'enseignement. Mais depuis que
l'administration togolaise a pris en main la destinée éducative
du Togo, on peut remarquer une certaine continuité de la politique
éducative coloniale comme nous le signale Gbikpi-Bénissan (2006).
Plusieurs problèmes minent le système scolaire d'où une
réforme fut proposée et adoptée en 1975. Mais on constate,
sur fond de réalité, que malgré les efforts consentis,
cette réforme n'a pas pu être totalement appliquée. Elle
n'a jamais été évaluée par ceux qui l'ont
initiée. D'où de géants problèmes demeurent et
rongent le système comme du chancre.
Parmi ces problèmes, il y en a même qu'on ignore
ou qu'on considère comme secondaires et subsidiaires notamment ceux
liés aux pratiques punitives, à la discipline à
l'école. C'est dans ce contexte que Bakali (1997) signale qu'il y a peu
d'études consacrées à la discipline au Togo. Sur ces
constats, nous voudrons explorer ce domaine qui, pour nous, participe aussi
à l'amélioration surtout qualitative du système scolaire.
L'éducation est un processus continu. Le processus de
la formation de l'individu est un processus complexe. Tout est prévu
à l'occasion par les autorités éducatives, du moment
où c'est l'Etat qui gère l'éducation. Dans ce processus,
les autorités assurent la mobilisation des intrants (mobiliers et
immobiliers) qui sont comme le carburant du système. Après la
mobilisation de ces intrants, l'autorité administrative attend pour
évaluer les extrants. Ces derniers sont le produit fini du
système et sont le bon indicateur pour évaluer
l'efficacité externe du système éducatif.
Mais il existe un troisième paramètre qu'on a
souvent tendance à minorer et qui, pourtant, revêt une importance
capitale méritant ainsi d'être examiné comme les intrants
et les extrants : il s'agit des processus. Pour
être clair, il s'agit de la relation maître-élève.
La pédagogie, comme discipline, semble se
préoccuper plus de ce paramètre. La relation éducative,
définie comme l'ensemble des rapports entre l'enseignant et l'apprenant,
peut être triangulaire ou verticale.
Au Togo, comme le soulignent les études sur le sujet,
les punitions de toutes sortes (corporelles et non corporelles) sont une
réalité constatable.
Si nous partons de la réforme de 1975, il est
consigné que les méthodes actives sont préconisées
et que le maître doit devenir avant tout un animateur. Les punitions
corporelles y sont prohibées.
Mais dans la réalité, bien que ces mesures aient
participé à diminuer l'intensité du
phénomène, elles ne sont pas respectées jusqu'au bout. La
réalité quotidienne du milieu scolaire au Togo est marquée
par des punitions corporelles et symboliques : des enfants frappés
à longueur de journée, des bras cassés, des oreilles
pincées jusqu'à ce que le sang ne coule, des enfants
renvoyés qui abandonnent ainsi les cours, parfois des filles
fessées même en période de menstruation, des enfants
ridiculisés et humiliés devant leurs camarades, etc.
« Malgré les interdictions à
l'école dans la plupart des pays, des recherches au
Sénégal, Togo, en RCA, et en Guinée, ont montré que
plus de la moitié des élèves des établissements
d'enseignement primaire étaient victimes de châtiments corporels.
La plupart des enseignants interrogés reconnaissent qu'ils utilisent les
châtiments corporels comme mode de punition » (Saliou Sarr,
2010)
Alors il demeure là une question trop cruciale et sans
précédent : Pourquoi, malgré les
réglementations qui régissent les pratiques punitives, les
enseignants s'obstinent-ils à les utiliser de façon
illégale (le châtiment corporel est interdit, précise la
réforme) d'une part, et pourquoi, d'autre part, les autorités
éducatives brillent dans un silence éclatant ?
En ce qui nous concerne, nous pourrons essayer de
répondre à la première partie de la question tout en se
réservant le droit d'éluder la seconde partie. Les enseignants,
ou mieux certains enseignants, n'hésitent pas à utiliser le
bâton et les gifles, bien que ce soit interdit, parce qu'ils sont
soucieux de l'avenir de l'enfant et que pour eux, la punition est le seul
remède contre la paresse. Pour ceux-ci, partisans du « qui
aime bien châtie bien », l'enseignant qui ne punit pas
suffisamment ses élèves, et surtout corporellement ne pourra
jamais motiver ses élèves. Et par conséquent, ceux-ci ne
pourront obtenir un bon rendement scolaire.
Pour ces enseignants, tout doit commencer par les coups de
bâton. Il ressort de cette analyse que ces pratiques, dans l'imaginaire
pédagogique, sont pour la réussite des apprenants. Alors plus on
punit corporellement, plus on obtient chez l'élève le goût
de l'effort et plus l'élève réussit. Telle est la maxime
de l'enseignant punisseur. Ce n'est que cette intention qui est reprise par
Ségbo (2007 : 32) lorsqu'il
disait : « l'enseignant qui aime bien ses
élèves et qui veut la réussite de ceux-ci [...] doit
pouvoir sanctionner par les punitions corporelles ». En fait,
Ségbo ne fait que dire haut ce que les enseignants pensent tout bas.
Pour notre compte, un interlocuteur nous confiait : « Moi,
je connais des gens qui ont réussi grâce aux punitions. La
punition a fait ces preuves. Des gens sont devenus de grands types aujourd'hui
parce qu'on les a forcé à le devenir ». Cette
conception sociale reste la résonnance de beaucoup de gens. A travers
cette déclaration, c'est toute une conception socioculturelle qui se
révèle. Le même interlocuteur nous
demandait : « Et vous, voulez-vous qu'on supprime les
punitions ? », ce à quoi nous nous sommes bien
réservé de répondre.
Mais ce qui est patent, c'est que l'enseignant punisseur
manque de pousser son raisonnement jusqu'au fond. Et d'ailleurs, il sait qu'il
le fait illégalement. Pour Gbikpi-Benissan (2006), dans ces
conditions, l'activité propre de l'élève est compromise.
Toute initiative individuelle est interdite. L'élève fait tout
pour plaire au maître et se conformer à ses ordres. Eviter les
coups devient le principal moteur de l'activité conditionnée des
élèves. C'est logiquement que les PC sont prohibées.
Si donc juridiquement les PC sont interdites, comment le
justifier ? En d'autres termes, quelles sont les causes qui motivent la
prohibition des PC ?
Le domaine des punitions est l'un des plus
controversés. On a développé autour des punitions surtout
corporelles de solides mythes notamment ceux selon lesquels :
- Les punitions corporels sont intrinsèques au
processus éducatif ;
- Sans la punition corporelle, les élèves
échoueront plus ;
- Sans les punitions corporelles, les élèves
seront paresseux et ne pourront pas réussir (si l'élève
réussit, c'est grâce aux châtiments corporels).
Beaucoup de témoignages sous-tendent ces mythes. Un
universitaire interviewé nous disait :
« Que voulez-vous ? Les enfants d'aujourd'hui
sont trop têtus. Ils ne veulent pas travailler. A notre temps, que tu le
veuilles ou non, tu vas travailler. Parce que le bâton est toujours
derrière toi. Aujourd'hui ceux qui luttent pour la suppression des
punitions corporelles à l'école vont reconnaître plus tard
qu'ils ont tort lorsqu'ils vont constater que le niveau des
élèves continue par trop baisser ».
Par exemple au Sénégal le mot wolof Yaar
signifie à la fois éduquer et fouet. Mais à l'encontre de
ces mythes, d'autres conceptions se sont développées. Celles-ci
se réclament de la préservation et du respect des droits et de la
dignité de l'enfant et de l'enfance.
Ce qui est encore patent, c'est qu'on pense que l'enfant
« africain » est trop têtu, que l'enfant
« de peau noire, de cheveux noirs » a besoin
incontournablement du bâton pour réussir.
Devant ces conceptions, les punitions corporelles font partie
intégrante des formes de violence exercée sur l'enfant. Les
châtiments corporels frisent la brimade, la torture et la violation des
droits de l'Homme. Les effets immédiats des punitions physiques c'est
des bras cassés, des oreilles pincées jusqu'à ce que le
sang ne coule, des enfants qui abandonnent les cours pour ne citer que
ceux-là. Voici un témoignage grisant que nous avons relevé
sur icilome.com :
« Violation des droits des enfants : de la punition
au sadisme
Une école privée située dans le
quartier de Djidjolé à Lomé a eu à torturer
très récemment ses élèves de la classe de
troisième à qui il était administré presque 6
à 10 coups de bâton par enseignant pour les dix matières
soit environ 60 coups et plus. Alors qu'un enseignant donnait sa dose à
une fille, celle-ci s'est subitement mise à menstruer de façon
précoce; ceci n'a pas empêché l'enseignant de continuer par
la frapper. Et le reste, c'était à l'hôpital et au
commissariat de Djidjolé où le Directeur de l'école
à eu à sentir l'odeur des cellules. » (
www.icilome.com, consulté le
07/08/2010)
Dans une étude menée par l'UNICEF en 2001, il
est relevé un témoignage selon lequel au Ghana, une fillette de
12 ans nommée Carmen Jones est décédée suite
à un châtiment corporel infligé par son enseignant. (UNICEF
WCARO, 15/08/2010). C'est surtout cette substance de violence qui se lit dans
les châtiments corporels qui a lutté pour leur prohibition.
En effet, dans le cadre d'une étude sur les pratiques
punitives, laquelle étude est commise en RDC en 2006-2007 par l'UNICEF,
une enseignante s'indignait en ces termes : « ...qui
aime bien châtie bien, on dit ici, mais ce n'est pas vrai. Quand nous
punissons, nous sommes en colère, nous nous jetons sur les
élèves avec rage, c'est comme si nous nous défoulions sur
les enfants ». La législation scolaire au Togo
déclare la punition corporelle « humiliante pour la
personnalité de l'enfant ».
Bien que les conceptions collectives ne soient pas si
d'accord, les punitions corporelles se recoupent avec la violence, ce pourquoi
elles sont prohibées. Mais cette prohibition n'est pas une
réalité sur le terrain. Ceci ne se passe pas sans
conséquences notoires.
La non application de la prohibition des châtiments
corporels en milieu scolaire au Togo n'est plus chose à
démontrer. Elle se voit partout. Pour Messan Kodjo (1992 : 12),
« les pratiques punitives réelles en milieu scolaire
togolais sont plus ou moins incohérentes par rapport aux prescriptions
administratives ». La réalité quotidienne du
milieu scolaire au Togo est marquée par des punitions
corporelles comme le confirme une fois encore ce
témoignage :
« Moi j'ai eu 40 coups un jour d'un professeur.
Parce que je n'avais pas copié trois phrases d'une leçon
d'histoire. Si tu veux des précisions c'était au primaire en
classe de CM2 à Kouvahey » (recueilli en 2006 sur
www.icilome.com, consulté le
07/08/2010).
Au Togo, comme le soulignent les témoignages et
constats sur le sujet, les punitions de toutes sortes (corporelles et non
corporelles) sont une réalité probante. Nous n'avons pas assez
cité ce témoignage : « Moi, je connais des
gens qui ont réussi grâce aux punitions. La punition a fait ces
preuves. Des gens sont devenus de grands types aujourd'hui parce qu'on les a
forcé à le devenir ». Cette conception sociale reste la
résonnance de beaucoup de gens. A travers cette déclaration,
c'est toute une conception socioculturelle qui se révèle.
La tension bat son comble et la relation est tendue entre les
enseignants et les élèves, ces derniers étant
réduits à des objets qu'on doit façonner ou à des
êtres « frivoles » et
« asociaux » que le maître doit rendre social et ce,
uniquement par le moyen de la contrainte et des punitions. On pourrait
même parler de la pédagogie des muscles. Pour certains enseignants
et responsables de l'éducation, supprimer les punitions corporelles
serait supprimer en même temps la discipline.
Ceci engendre de nombreux problème du rang desquels le
problème du conflit scolaire, c'est-à-dire des conflits entre
enseignants et élèves. Ces derniers remettent en cause le
système punitif et répondent par la désobéissance,
le refus systématique d'exécuter les sanctions voire le
décrochage (l'abandon des cours). Ceci engendre un véritable
problème de la gestion du milieu scolaire.
Au problème des conflits scolaires, aujourd'hui
préoccupant, s'ajoute le problème de la violence en
éducation. L'éducation qui se fonde sur les châtiments
corporels est perçue comme un vecteur de la violence, de la
brutalité, de la légalisation de la force. Ceci, l'enfant le
perçoit aussi bien et l'acquiert tout au long du processus
éducatif. En amendant l'enfant par le moyen de la force, on lui apprend
implicitement que par la force, on peut tout obtenir. Et il l'acquiert !
Comment, dans ces circonstances, former « des individus sains,
équilibrés et épanouis dans toutes les
dimensions » ? Pour Sarr (2010), les châtiments
corporels, et les autres formes de violence peuvent avoir des
conséquences graves sur la santé de l'enfant et sa
personnalité ; en particulier, ils peuvent compromettre le
développement physique, psychologique ou affectif de l'enfant. A long
terme, ils renforcent le développement de comportements violents chez
l'enfant. L'enfant victime de mauvais traitements a souvent des
problèmes de communication, il ne peut s'exprimer qu'au travers de son
comportement. Il s'agit d'enfants parfois agressifs, instables qui
extériorisent de façon continue un excès de tension. Ils
se montrent agités, et sont désobéissants. A
côté de ses attitudes anormales de l'enfant, on ne doit pas
minorer les problèmes d'abandon scolaire et d'échec scolaire
qu'entraîne cette pratique.
Enfin, il se pose un problème organisationnel ou mieux
un problème de gestion de l'école. La violation de la
réglementation par les enseignants constitue un problème à
résoudre. Si les autorités éducatives ont prohibé
l'usage des châtiments corporels, c'est bien pour des raisons qui devront
être défendues. Si les enseignants ne sont pas convaincus par ces
raisons, les autorités devront procéder à une explication
plus rigoureuse. Aussi devront-ils connaître l'univers pédagogique
des enseignants qui n'obtempèrent pas pour mieux les amener à
respecter la règlementation.
Il n'y a pas d'enseignement sans stratégie. Chaque
enseignant a des méthodes et stratégies plus ou moins
organisées et coordonnées vers la réalisation des
objectifs qu'il s'est donnés.
Il est aussi à constater qu'il existe plusieurs
méthodes mais nous les catégorisons en deux grands groupes :
les méthodes traditionnelles et les méthodes actives ou
nouvelles. Pour reconnaître les caractéristiques de chacune des
deux méthodes, nous partirons de simples indices :
L'enseignant a-t-il la toute puissance sur la classe et
use-t-il plus de la fonction d'imposition ? Se considère-t-il comme
le seul détenteur du savoir ? Nous sommes dans les méthodes
traditionnelles. Mais s'il responsabilise l'élève et le
considère comme l'acteur principal de l'acte pédagogique, s'il
insiste sur l'initiative des élèves et les implique dans la
construction du savoir, s'il cherche à soutenir la motivation des
élèves plutôt qu'à chercher à la créer
(ce qui n'est même pas possible !), nous sommes dans les
méthodes actives.
Dans les méthodes traditionnelles, étant
donné que l'élève est extérieur au processus
d'enseignement-apprentissage, on exerce sur lui toute forme de contrainte. Les
punitions corporelles y sont pratiquées avec une surabondance
marquée. On veut l'intégrer dans le processus par la force. En
revanche, dans la deuxième méthode, l'élève se
trouve déjà au coeur du processus. Il travaille par
lui-même d'où l'usage d'un stimulus extérieur (punitions)
est rare. Ici, le maître est avant tout un animateur et un guide pour les
élèves.
Il est donc clair que les enseignants usent des punitions
corporelles parce qu'ils se situent dans la perspective des pédagogies
traditionnelles. Au Togo, certaines conditions notamment l'effectif
pléthorique des élèves dans la classe, la non disposition
à quantité des matériels didactiques (manuels scolaires,
laboratoires, etc.), la carence de formation et de recyclage des enseignants,
etc. rendent difficile l'usage des méthodes actives. D'où les
enseignants optent plus facilement pour les méthodes traditionnelles.
Or, une grande importance est accordée aux punitions corporelles dans
ces méthodes.
L'usage des punitions en éducation est un fait social.
Il est donc un fait général. Tout milieu éducatif,
historiquement connu, dans son sein renferment l'idée de la contrainte.
Même le terme éducation renferme en son sein même cette
idée. Puisqu'elle consiste en « la socialisation
méthodique » de l'individu. Cette socialisation suppose
que l'apprenant acquiert de nouvelles connaissances sous la houlette de
quelqu'un qui, en principe, exerce sur lui une certaine forme
d'autorité.
Le milieu éducatif (ou plus précisément
scolaire) togolais est donc marqué par la contrainte. C'est cette
contrainte qui se matérialise par l'usage des punitions de toutes
sortes. Dans sa thèse de doctorat, Kodjo Messan (1992), a eu à
apporter des témoignages poignants : « C'est mon
propre enfant, je vous le confie [...]. Faites en sorte qu'il devienne
quelqu'un. [...]S'il ne travaille pas bien ou s'il n'obéit pas bien, je
vous permets de le corriger comme il faut. S'il meurt, je vais
l'enterrer... » (Messan K., 1992 : 7). Les punitions
corporelles (PC) sont donc une réalité éducative dans le
milieu scolaire au Togo.
En effet, il est à signaler que les pratiques punitives
trouvent leur source dans la famille. C'est ce que souligne ce cas
rapporté par K. Messan lors d'un entretien :
« Dans certaines familles les filles qui
s'adonnaient précocement aux activités sexuelles subissaient des
traitements punitifs parfois très cruels. On les ligotait comme du
bétail et on leur aspergeait le vagin de jus de piment
écrasé et salé. Quant aux garçons qui se trouvaient
intraitables, ils étaient suspendus par les pieds à une branche
ou à une poutre du plafond et on faisait un feu doux à l'endroit
où tombait la tête.... » (Messan Kodjo, 1992 :
6-7).
En bref, punir, c'est corriger. Et corriger l'enfant, c'est le
remettre sur le droit chemin, faire en sorte qu'il ne répète pas
la faute qu'il a commise. Et au Togo, la famille se montre éducatrice
à cet égard.
A l'école, les punitions sont l'accompagnement de la
discipline scolaire, laquelle est le support des activités
pédagogiques. Les punitions sont utilisées pour libérer
l'élève des fautes et surtout pour l'aider à "performer"
dans son éducation. Elles revêtent donc un caractère
positif. Dans une étude menée par Tchamenon (1984), il parvient
à ressortir que la non utilisation du bâton derrière les
élèves est à l'origine de leurs échecs. La punition
est donc un remède contre la paresse et l'inattention. Le système
discipline-punition trouve partout sa nécessité dans le milieu
scolaire.
Mais il y a certains types de punitions qui soulèvent
particulièrement des controverses. Ces types de punitions renferment une
violation flagrante des droits de l'enfant puisqu'elle comporte une substance
de violence qui n'est pas à nier. Ils ne sont guère compatibles
avec le respect de la dignité et de la personne de l'enfant : il s'agit
des punitions corporelles. Or, l'usage de ces types de punition est un fait
indiscutable à l'école au Togo.
C'est en connaissance de ce fait que, sur le plan
administratif, l'usage des punitions corporelles est interdit dans le
système scolaire au Togo. La réforme de l'enseignement de 1975
précise : « le châtiment corporel est
interdit » (République togolaise, 1975 : 32). La
circulaire du ministère de l'Enseignement (1980) interdit les
châtiments corporels dans les établissements scolaires. En lieu et
place de celles-ci d'autres formes de punitions sont préconisées
notamment la réprimande, les mauvais points, la privation partielle de
récréation, l'exclusion temporaire, etc.
Mais dans la pratique, malgré la réglementation,
on note l'usage des châtiments corporels. Pourquoi cet état de
fait ? Est-ce un simple désir de braver l'administration
scolaire ? Peut-on considérer ceci comme une déviance ou ces
pratiques trouvent-elles leur source même dans la
société ? Telles sont autant d'interrogations qui
confèrent à notre étude une pertinence focale.
Ces pratiques engendrent, par ailleurs, de sérieux
problèmes : le problème du conflit scolaire,
c'est-à-dire des conflits entre enseignants et élèves, le
problème d'abandon scolaire et du décrochage, le problème
de la gestion de l'école.
L'objet de cette étude est d'examiner de plus
près les facteurs qui expliquent la non application de cette
réglementation pourtant en vigueur. Le problème réside
à la fois dans l'absence de débats systématiques autour de
la violence en éducation et de l'usage des PC en éducation, mais
aussi dans les conceptions arrêtés (les clichés) qui
cristallisent toute discussion autour de la thématique.
Cette préoccupation conduit à un certain nombre
de questions. Elle nous a permis de poser comme question fondamentale,
directrice de la recherche : quels sont les facteurs explicatifs de la non
application de la prohibition des punitions corporelles à
l'école au Togo ? Spécifiquement, nous aurons à
répondre aux questions suivantes :
ü Quelles sont les punitions corporelles en usage dans le
milieu scolaire au Togo ?
ü Quel est le fondement des punitions corporelles en
milieu scolaire au Togo ?
ü Comment les enseignants se représentent-ils les
punitions corporelles à l'école au Togo ?
ü Quelle est l'importance accordée par les
enseignants aux punitions corporelles dans leurs méthodes
pédagogiques ?
1.4- Les objectifs de la recherche
1.4.1- Objectif général
La présente étude vise à analyser les
facteurs qui sous-tendent l'usage des punitions corporelles en milieu scolaire
au Togo malgré leur prohibition.
1.4.2- Objectifs opérationnels
Notre étude se fixe comme objectifs
spécifiques :
ü d'identifier les punitions corporelles utilisées
en milieu scolaire au Togo ;
ü de relever les perceptions des enseignants concernant
l'usage des punitions corporelles à l'école;
ü d'analyser l'importance que les enseignants accordent
aux punitions corporelles dans leurs pratiques pédagogiques.
1.5- L'hypothèse, les variables et
indicateurs
1.5.1- L'hypothèse
En vue de cerner les causes du non respect de la prohibition
des punitions corporelles à l'école, nous émettons
l'hypothèse suivante.
1.5.1.1- Hypothèse principale
La non application de l'interdiction des punitions corporelles
à l'école est due aux représentations que les enseignants
ont de la punition corporelle et aux méthodes pédagogiques que
ceux-ci utilisent.
1.5.1.2- Hypothèses secondaires
1- Pour les enseignants, les punitions corporelles
développent chez l'élève le goût de l'effort,
celui-ci ne voulant pas recevoir des coups ;
2- Pour les enseignants, les punitions corporelles
développent chez l'élève une bonne conduite ;
3- Pour les enseignants, l'élève a plus peur des
punitions corporelles et donc travaillent bien ;
4- Pour les enseignants, l'élève a plus peur des
punitions corporelles et donc se ressaisit vite ;
5- La méthode pédagogique utilisée par
les enseignants les amène à utiliser les punitions corporelles.
1.5.1.3- Explication des hypothèses
· Pour les enseignants, les punitions corporelles
développent chez l'élève le goût de l'effort,
celui-ci ne voulant pas recevoir des coups
Il s'agira de montrer que selon la perception et les croyances
des enseignants, selon la façon dont les enseignants se
représentent les punitions corporelles, ces dernières
amènent l'élève à faire plus d'effort. C'est ce que
voudra signifier Ségbo (2007) lorsqu'il disait que si
l'élève sait qu'il y a des coups humiliants et douloureux
à recevoir lorsqu'il manque de faire son travail, il s'y met à
fond.
· Pour les enseignants, les punitions corporelles
développent chez l'élève une bonne conduite
Selon les enseignants utilisant les punitions corporelles, ces
types de punition sont les seules qui pourront amener l'élève
à adopter un comportement exemplaire : obéissance au
maître, respect pour le maître, le respect du règlement
intérieur, etc.
· Pour les enseignants, l'élève a
plus peur des punitions corporelles et donc travaillent bien
Selon l'enseignant-punisseur, lorsqu'on inflige une peine
physique à l'enfant, il travaille plus. Puisque, la peur que
créent les punitions corporelles amène l'élève
à améliorer ses résultats scolaires. C'est cette
conception même que Tchaménon (1984) a eu à soutenir
lorsqu'il disait que la non utilisation du bâton derrière les
élèves est à l'origine de leurs échecs.
· Pour les enseignants, l'élève a
plus peur des punitions corporelles et donc se ressaisit vite
Pour l'enseignant-punisseur, pour amener l'élève
à prendre vite conscience du fait que ce qu'il fait n'est pas bon, pour
l'amener à cesser au plus vite le comportement fautif, il faut utiliser
les punitions corporelles. Ceci se recoupe avec la conception de ceux qui
disent que supprimer les punitions corporelles serait en même temps
supprimer la discipline en milieu scolaire.
· La méthode pédagogique
utilisée par les enseignants les amène à utiliser les
punitions corporelles à l'école
Il s'agit de montrer que la plupart des enseignants utilisent
la méthode pédagogique traditionnelle. Or les
caractéristiques immanentes à ces pédagogies exigent que
l'on utilise les punitions corporelles. Par exemple, l'enfant est
considéré comme une cire molle, une tabula rasa et l'enseignant
comme un dieu, comme le seul détenteur infaillible du savoir. Cette
pédagogie est surtout basée sur la reproduction des
connaissances, ce qui ne laisse aucune initiative à l'enfant. Dans ce
cas, celui qui ne suit pas le rythme est puni sévèrement et
corporellement.
1.5.2- Définition des variables et indicateurs
Pour mettre en emphase « la
vérifiabilité » des hypothèses sus-jacentes,
nous allons procéder à la détermination des variables. Une
variable est une valeur qui peut prendre plusieurs formes. Elle se mesure
à partir des indicateurs. Ces dernières sont, selon les mots de
Paul N'da (2006 : 55), ce qui « permet de reconnaître
une variable, une notion plus abstraite et vaste ».
Des hypothèses émises, nous avons retenu deux
(2) variables indépendantes et une (1) variable dépendante.
1.5.2.1- Les variables indépendantes
Par variable indépendante, on entend la variable cause
ou la variable explicative. C'est la variable qui influe sur le
phénomène à expliquer. Dans le cadre de notre travail,
nous avons retenu deux variables indépendantes que sont la
représentation sociale de la punition corporelle (l'image qu'on a de la
punition corporelle) et la pédagogie utilisée par
l'enseignant.
Par la représentation sociale de la punition, nous
exprimons la manière dont l'enseignant se figure les punitions
corporelles, leur importance, leur but d'après celui-ci.
La représentation sociale se
présente comme une construction, un remodelage de l'objet ; elle
est à la fois une activité et un produit. La
représentation apparaît comme un univers d'opinions et de
croyances organisé autour d'une signification centrale ayant trait
à l'objet. C'est aussi un ensemble de connaissances, de jugements, de
valeurs, d'attitudes, de prévisions, d'opinions plus ou moins
organisés et structurés. De ce fait, elle se situe à la
croisée du psychologique et du social. Par le processus de l'influence
sociale à travers les valeurs, les croyances et idéologies
(socialisation, éducation), le social détermine la
représentation qu'un individu a d'un objet. Selon Jodelet (1989), les
représentations constituent une forme de connaissance, socialement
élaborée et partagée ayant une visée pratique et
encourant à la construction d'une réalité commune à
un ensemble social. Elles constituent les façons dont nous
appréhendons les événements de la vie courante, les
connaissances spontanées, naïves, constituées à
partir de nos expériences mais aussi des informations, des savoirs et
modèles de pensée que nous recevons et transmettons par la
tradition, l'éducation et la communication sociale.
En clair, selon le vécu de l'individu, il a des
manières de concevoir des objets et des faits. Cette manière de
voir détermine son interprétation de ces objets et faits et est
mise en évidence dans ses relations sociales : ce sont ces
manières de concevoir, d'interpréter que nous appelons les
représentations sociales. Elle se mesure à travers les
indicateurs suivants :
- aident l'élève à
réussir
- aident l'élève à avoir une bonne
conduite
- développent chez l'élève le goût
de l'effort
Par méthode pédagogique, nous
désignons l'ensemble de démarches formalisées et
appliquées selon des principes définis pour acquérir un
ensemble de savoirs conformes aux objectifs pédagogiques. Les
méthodes pédagogiques désignent les manières dont
le formateur organise la transmission de ses connaissances et de ses
savoir-faire aux apprenants, en vue d'atteindre les objectifs
pédagogiques.
Pour cette variable, nous retenons comme indicateurs :
- un enseignement axé sur des cours magistraux
- un enseignement centré sur l'enseignant
- un enseignement qui ne donne pas priorité à
l'initiative de l'élève
- un enseignement basé sur la reproduction des
connaissances
- l'ignorance par l'élève des objectifs des
cours
1.5.2.2- La variable dépendante
La variable dépendante est le phénomène
que le chercheur tente d'expliquer. Il s'agit ici de la non application de la
prohibition des punitions corporelle à l'école. Pour cette
variable, nous avons retenu comme indicateur l'usage des punitions corporelles
(les fessées, les gifles, les mise à genou les oreilles
pincées et/ou tirées, les coups dans les mains, les mises
à genou).
Tableau 1 : Tableau synoptique
des indicateurs et variables
Types de variable
|
Variables
|
Indicateurs
|
Variables indépendantes
|
La représentation sociale de la punition corporelle
|
- aident l'élève à réussir
- aident l'élève à avoir une bonne
conduite
- développent chez l'élève le goût de
l'effort
|
la pédagogie utilisée par l'enseignant
|
- un enseignement centré sur l'enseignant
- un enseignement axé sur des cours magistraux
- un enseignement qui ne donne pas priorité à
l'initiative de l'élève
- un enseignement basé sur la reproduction des
connaissances
- l'ignorance par l'élève des objectifs des
cours
|
Variable dépendante
|
Le non respect de la prohibition des punitions corporelles
|
L'usage des punitions corporelles (fessées, coups dans les
mains, gifles, tirer/pincer les oreilles, les mises à genou...) à
l'école
|
Source :
d'après les résultats des travaux Sodjago
1.6- La conceptualisation
Pour répondre aux exigences méthodologiques
prônées par Emile Durkheim (1937, 2007 : 34) qui stipulaient
que : « la première démarche du
sociologue doit donc être de définir les choses dont il traite,
afin que l'on sache et qu'il sache bien de quoi il est
question », nous allons procéder à la
définition des concepts de cette étude.
Par ailleurs, cette étape incontournable de la
démarche nous permettra de « délimiter
opérationnellement le champ de notre étude ».
1.6.1- Punition
Le mot punition vient du verbe punir qui, lui-même
vient du latin punire dérivé de poena (qui veut dire compensation
pour une faute). Punir, en clair, veut dire infliger un châtiment ou une
peine pour une faute.
Selon le dictionnaire Larousse (2009 : 835), le
verbe punir a trois sens, qui ne sont nullement pas contradictoires. Punir,
c'est :
« 1. Châtier pour un acte délictueux,
pour une faute [...]
2. Frapper d'une sanction ; réprimer un
délit, une faute, etc., condamner [...]
3. Etre la conséquence désagréable d'une
conduite. Une indigestion a puni sa gourmandise. » (Dictionnaire
Larousse, 2009 : 835)
La punition désigne à la
fois « l'action de punir (et) la peine
infligée » (id., 2009 : 835). C'est une
« sanction déplaisante à l'égard de
l'auteur d'un comportement inapproprié ou
désapprouvé. » (Dictionnaire
encyclopédique de pédagogie moderne, 1973 :
252). Elle consiste donc en une correction, une sanction, une pénitence,
une peine, un châtiment.
Pour Jacques J. Natanson (1973 :
26), « punir, c'est infliger une souffrance, une privation
ou une humiliation, chaque fois que se produit un comportement non conforme au
désir de l'éducateur, ou à ce qu'il considère comme
étant le comportement normal, correct ». De cette
définition, nous déduisons que la punition est inséparable
de l'idée de faute ou d'une transgression, de l'idée d'une norme
ou d'une valeur, de l'idée d'un interdit.
La punition est donc une action exercée par un
individu sur un autre afin de montrer à ce dernier qu'il a
transgressé un interdit ou qu'il a commis une faute et de l'amener
à ne plus commettre cette même faute. La punition est alors
à la fois un instrument oppressif et préventif.
Résumons-nous en disant avec Kodjo Messan (1992 :
38) que la punition est « le comportement ou l'acte
désagréable qu'un maître ou un parent impose à un
individu jeune dont il a la charge et qui a commis un acte interdit, une
faute. »
La punition peut être corporelle ou symbolique.
1.6.1.1- La punition corporelle
Par punition corporelle, nous entendons une action punitive
qui touche à l'intégrité physique de celui qui la subit.
C'est une peine physique d'où l'on pourrait encore l'appeler punition
physique. Comme exemple, nous pouvons citer les fessées, les gifles, les
coups dans les mains, les coups de poing sur la tête, pour nous limiter
à ceux là.
Selon Toulabor C.-M. (2010), on peut catégoriser les
punitions corporelles en deux grands groupes : les châtiments
corporels avec coups que l'on peut définir comme ceux où les
coups portent directement sur le corps dans le but de provoquer une douleur
immédiate et intense chez l'individu et les châtiments corporels
sans coups. Dans le premier registre, on peut citer des pratiques comme les
fessées, les gifles, les coups dans la paume de la main, au bout des
ongles ou sur le crâne, les coups de poing sur la tête, etc. Dans
le second registre, Toulabor nous décrit ici une punition que l'on
appelle « le supplice des bras en croix ou en balance ».
Cela consiste à étendre bien horizontalement les bras pour
recevoir une charge d'un certain poids dans chaque main. En
général, on utilise le quart d'un bloc de dix, soit environ deux
à trois kilos. L'élève est contraint de garder ses bras en
équilibre et, lorsque ce dernier est rompu, l'enseignant intervient pour
lui asséner des coups sous les coudes dans le but de rétablir
l'équilibre. La poursuite de la réalisation de cette fin peut
dégénérer en fessées pharaoniques. On note aussi le
piquet, le séchage au soleil, les mises à genou trop anodines
comparativement aux autres épreuves, selon Toulabor
C'est cette deuxième catégorie de punition que
Kodjo Messan qualifie de PSP (punitions semi physiques). Il est donc
évident que dans le cadre de ce travail, nous les intégrons dans
la liste des punitions corporelles.
1.6.1.2- La punition symbolique
Par punition symbolique, on entend une peine qui touche au
moral de celui qui la subit, qui se propose de l'humilier afin de l'amener au
repentir. A la différence d'une peine physique, elle touche au moral du
puni. Elle est pour la plupart du temps -mais pas tout le temps- verbale. Dans
ce registre, nous pouvons citer les insultes, les réprimandes, les mises
à la porte, les privations de récréation, la retenue
après la classe, les pensums, des points en moins, l'attribution d'un
zéro entre autres.
1.6.2- Discipline
Le concept de discipline est vaste et étendu. Ecartons
tout d'abord les sens qui le rapprochent à une matière
d'enseignement ou une branche de l'enseignement qui ne nous intéressent
pas du tout dans cette étude.
Lato sensu, la discipline est un ensemble de règles de
conduites, lesquelles sont imposées à une collectivité ou
que l'on s'impose à soi-même. Elle est selon le dictionnaire
Larousse (2009 :325), la « soumission à
des règles ou à un règlement ».
Le mot discipline vient du verbe
« discipliner » qui signifie assujettir, soumettre, donner
le sens de l'ordre.
Pour Lopez-Pino (1964), cité par Bernard Douet
(1984 : 17), la discipline vient de
l'hébreu « musâr », qui signifie à
la fois éducation et châtiment. Selon le même auteur, la
discipline vient du grec « paideia », qui veut dire
à la fois éduquer et punir.
A concrètement parler donc, la discipline implique la
règle, l'ordre, l'obéissance, la régularité, la
ponctualité.
Lorsqu'elle s'exerce au sein de l'institution scolaire, on
parle de la discipline scolaire.
Dans le milieu scolaire, en effet, il existe un ensemble de
rituels, de règles de conduite, de normes qui règlent et
codifient les activités et la vie scolaire : c'est cet ensemble que
l'on nomme la discipline scolaire. C'est donc un « ensemble
de règles établies en vue du déroulement ordonné
des activités de la classe ou de l'école. »
(Dictionnaire encyclopédique de pédagogie
moderne, 1973 : 97). Le règlement intérieur en est
un partitif. Il est comparable à la constitution, à la loi
fondamentale de l'école. Le règlement intérieur est
à l'institution scolaire ce qu'est la constitution à la
société générale. Il est au service de la
discipline d'où toute initiative singulière ou collective visant
à enfreindre ses principes est réprimée
sévèrement. La discipline est concrètement synonyme du
respect du maître, du silence dans la classe, de l'attention.
Puisque ces règles sont la
« morale » de la société scolaire, elles ont
besoin d'être préservées. La discipline scolaire est donc
chargée de sanctionner le comportement des élèves, en
incarnant en eux le sens du respect, de l'obéissance et de l'ordre.
Selon Neill (1970), il y a deux sortes de discipline : la
discipline qui subordonne l'individu à la cause et celle qui
intéresse tous les individus et se subordonne à leur cause. La
première est fondée sur la peur. C'est par exemple la discipline
de l'armée. La seconde est fondée sur la coopération.
C'est par exemple la discipline de l'orchestre. Mais Neill constate que la
première forme de discipline est celle qui est couramment
pratiquée.
Pour leur part, Sheldon et Egéanor (1950), cités
par M. Cusson (1977) classifient la discipline comme suit :
- La discipline relâchée : les parents sont
négligents, indifférents à tout ce que l'enfant fait.
- La discipline excessivement stricte : les parents sont
durs et exigent l'obéissance par la peur.
- La discipline erratique : les parents ne sont pas
constants dans la surveillance des enfants.
- La discipline ferme mais affective qui repose sur la
raison.
La classification de Célestin Freinet n'est pas moins
édifiante. Pour Freinet, cité par Douet (1984 : 36-37), on
distingue trois types de discipline :
- La discipline excessive où le maître est
présenté comme un personnage redoutable donc punissant de
façon exemplaire, excessive
- La discipline ferme où l'enseignant est
présenté comme un personnage juste, généreux et
aimé
- Et l'auto-discipline où l'enseignant est
présenté comme un personnage qui est chargé de promouvoir
la reconnaissance des droits et des devoirs de chacun en vue de bâtir une
société juste. Et c'est le modèle que l'auteur
défend.
Résumons-nous avec Emile Durkheim (1903 : 105) en
disant que :
« À l'école, en effet, il existe tout
un système de règles qui prédéterminent la conduite
de l'enfant. Il doit venir en classe avec régularité, il doit s'y
présenter à heure fixe, dans une tenue et une attitude
convenable ; en classe, il ne doit pas troubler l'ordre ; il doit
avoir appris ses leçons, fait ses devoirs, et les avoir fait avec une
suffisante application, etc. Il y a [...] une multitude d'obligations
auxquelles l'enfant est tenu de se soumettre. Leur ensemble constitue la
discipline scolaire. C'est par la pratique de la discipline scolaire qu'il est
possible d'inculquer à l'enfant l'esprit de discipline. »
Par ailleurs, nous employons le terme "système
discipline-punition" pour signaler qu'entre les deux termes, il n'y a pas de
cloison. Pour Bernard Douet (1984), la discipline couvre le champ des
punitions. Puisque la punition sert à maintenir la discipline. C'est au
nom de la discipline qu'on punit.
1.6.3- La prohibition
Il s'agit de la défense de faire quelque chose. Le
terme revêt une connotation juridique. On parle souvent d'une loi
prohibitive. Selon le dictionnaire Larousse (2009 : 825), la prohibition
se rapporte à une « interdiction
légale ».
1.6.4- Le système scolaire
Le système est défini par Mialaret (1979 :
419) comme un « ensemble de pratiques, de méthodes et
d'institutions formant à la fois une construction théorique et
une méthode pratique ».
Défini ainsi, le système scolaire est l'ensemble
cohérent de pratiques, de méthodes et de règlementations
qui fondent et organisent l'école dans un pays. C'est ainsi qu'on
distingue un système scolaire propre au Canada, propre au Togo, Propre
à la France, propre à la Chine, en Bref propre à chaque
pays.
Selon Akakpo-Numado (2010 :10), il est « un
ensemble d'éléments constitués d'institutions, d'acteurs,
de programmes, de ressources, etc. organisé pour assurer
l'éducation dans un pays donné. Il regroupe toutes les pratiques
éducatives formelles et non formelles ».
Le système scolaire peut être aussi
considéré comme synonyme de système éducatif
à moins que l'on considère ce dernier sous l'angle de vue
strictement de l'école.
1.7- Les théories d'analyse
Pour pouvoir mener à bien cette étude, il nous
paraît incontournable de prendre appui sur une théorie de base,
laquelle se doit surtout d'être sociologique. C'est dans ce sillage que
nous avons jugé pertinent de prendre appui sur deux théories
notamment la théorie systémique et la théorie
stratégique. Il nous a semblé judicieux d'explorer les
théories sous leur angle particulier, de déterminer ensuite les
éléments qui leur sont communs et de dire en dernier ressort en
quoi elles peuvent être pertinentes dans la conduite de notre
étude.
1.7.1- La théorie systémique
L'approche systémique est un modèle de
représentation de la réalité qui trouve ses sources dans
la pensée scientifique. C'est Ludwig Bertalanffy (1968, trad.1973) qui
a, pour la première fois, élaboré une théorie
générale des systèmes. Celui-ci définit la
théorie générale des systèmes comme
« une étude scientifique des "tout" et des
"totalités"[...] » (Bertalanffy, trad.1973 : VII).
A l'interrogation de savoir ce que c'est qu'un système,
Bertalanffy répond que c'est un ensemble d'éléments en
interaction. Mais sa définition est trop formelle. La définition
opérationnelle nous est donnée par Walliser Bernard qui en
relève trois caractéristiques essentielles :
« Ensemble en rapport réciproque avec un
environnement, ces échanges lui assurant une certaine
autonomie »
« Ensemble formé de sous-systèmes en
interaction, cette interdépendance lui assurant une certaine
cohérence »
« Ensemble subissant des modifications plus ou moins
profondes dans le temps, tout en conservant une certaine permanence »
(Walliser B., 1977 :10-11, cité par Gbikpi-Benissan, 2006 :
59)
Dans l'approche systémique, on ne doit pas perdre de
vue la relation dialectique entre le système et son environnement.
L'intérêt de l'analyse systémique est qu'elle
« introduit un langage plus rigoureux dans les sciences sociales
et substitue à une analyse qui décompose le réel en ses
éléments une recherche partant d'un point de vue
synthétique. » (Lê Thành Khôi,
cité par Gbikpi-Benissan, 2006 : 61).
Les pratiques scolaires doivent être décrites et
expliquées par une approche globale parce que le système scolaire
(ou sous-système, devra-t-on dire) est en interaction permanente avec le
système social. Pour l'expliquer, il faut remonter à
l'organisation sociale dans sa « totalité ». De
l'angle de vue où nous cernons la théorie, il découle que
l'école n'est pas un système indépendant de la
société. De là, certains constats s'imposent :
- C'est le système social qui influence le plus le
système scolaire ;
- C'est la méthode et les pratiques éducatives
en usage dans la société qui sont utilisées à
l'école.
1.7.2- L'analyse stratégique
L'analyse stratégique de Crozier et Friedberg a servi
de base dans l'analyse de l'action collective dans des domaines de recherche
très variés en sociologie. La démarche de recherche
privilégiée s'organise autour du concept central de
stratégie. Les considérations de base de l'approche
stratégique sont condensées dans les trois énoncés
suivants :
1. L'acteur n'a que rarement des objectifs clairs et encore
moins des projets cohérents; (ex: des conséquences
imprévues de son action l'amenant à reconsidérer sa
position) ;
2. Son comportement est actif. Même s'il est toujours
contraint et limité, il n'est jamais totalement limité;
3. Ce comportement a toujours un sens. Cette
rationalité est liée, non à des objectifs clairs et
explicite mais par rapport aux opportunités (contexte) et par rapport
aux comportements des autres acteurs.
L'analyse stratégique (A.S.) est partie d'une
constatation de base : aucun individu n'accepte d'être traité
totalement et uniquement comme l'objet du fonctionnement ou de
l'accomplissement des buts d'une organisation. Les conduites des acteurs ne
sont plus vues comme la simple résultante, prévisible,
stéréotypée et donc reproductible des déterminants
structurels, financiers ou psychologiques. Leurs conduites sont
inventées par les acteurs, dans un contexte, construites en vue de
certains buts et croyances.
Pour atteindre ces buts, les acteurs vont poursuivre leurs
propres stratégies; ils vont utiliser les ressources dont ils disposent
de la manière la plus judicieuse compte tenu des contraintes du moment,
telles qu'ils les perçoivent, depuis leur position. Leur conduite n'est
donc pas entièrement prévisible puisque changeante.
Le comportement de l'acteur ne peut se concevoir en dehors du
contexte d'où il tire sa rationalité. L'approche
stratégique nous paraît judicieuse parce que le système
scolaire est une organisation, laquelle bien que réglementée
offre des possibilités de choix aux acteurs. En outre, elle nous
renseigne sur le fait que l'acteur dans le système n'entend pas
être l'objet mais le sujet de la réglementation.
L'approche systémique et l'approche stratégique
se recoupent en certains points que nous pouvons relever à travers les
caractéristiques suivantes :
- L'existence d'un système (l'approche globale)
- L'interdépendance
- L'existence d'un environnement qui influence l'acteur dans
le système.
De ces deux théories, nous retenons que :
- L'école est un sous-système du système
social
- Il y a une relation d'interdépendance entre les
pratiques sociales et les pratiques scolaires
- L'environnement social influence beaucoup l'environnement
scolaire et ses acteurs (enseignants et élèves notamment)
Du coup, nous dirons que les pratiques punitives notamment les
punitions corporelles dont les enseignants font usage se retrouvent dans la
société togolaise. Ces pratiques étant d'abord d'usage
dans la société globale, elles ne sont que
« déversées » à l'école.
Puisque l'école est un sous-système du système social,
elle est influencée dans ses pratiques par le système social.
C'est là un premier niveau d'analyse.
Au deuxième niveau, l'enseignant qui a devant lui les
élèves connaît certes la législation scolaire mais a
d'autres fins qu'il doit atteindre : celles de voir les
élèves réussir et de les voir se conduire bien. Alors il
utilise toutes les ressources à sa disposition, en fonction de ses
croyances, pour atteindre ses objectifs, parfois au détriment de la
réglementation.
Chapitre 2 METHODOLOGIE
La nécessité de définir une approche
méthodologique qui puisse nous permettre de collecter les informations
ou données nécessaires en vue de répondre aux
interrogations et vérifier les hypothèses s'avère
indispensable.
2.1- La recherche documentaire
La collecte d'information d'ordre théorique et
statistique a lieu à partir des consultations d'ouvrages, de documents
électroniques, de mémoires, de thèses, et de l'annuaire
des statistiques scolaires.
Nous avons donc rassemblé des documents à partir
de la bibliothèque de l`Institut National des Sciences de l'Education
(INSE), de la bibliothèque de la Faculté des Lettres et Sciences
Humaines (FLESH), de la bibliothèque centrale de l'université de
Lomé et de la bibliothèque de la DIFOP.
Nous nous sommes également rendu à l'UNICEF
Togo, au Plan Togo, à l'Unité de Recherche Démographique
(URD).
Par ailleurs, nous avons eu recours à l'internet qui
nous a fourni une grande documentation, laquelle nous avons exploité
avec la plus grande finesse possible.
2.2- Les visites de terrain
Pour repérer les enseignants, nous avons fait des
déplacements au sein des établissements pour observer les
enseignants. Il s'agissait d'une observation qui nous avait permis de
repérer les enseignants qui pratiquent les punitions corporelles. Nous
nous sommes aussi renseigné auprès des élèves qui
nous ont donné des informations sur certains enseignants qui utilisent
les P.C.
Nous avons donc eu à effectuer des visites de terrain
tout le long de la recherche. Nous nous sommes rendu dans les quatre
établissements aussi bien pour la pré enquête, la
construction de l'échantillon que pour l'enquête proprement
dite.
En outre, nous avons eu à nous entretenir avec
certains parents d'élèves qui sont pour nous des personnes
ressources. Ceux-ci nous ont livré surtout leur jugement en ce sui
concerne cette interdiction.
2.3- L'univers de la recherche et
échantillonnage
L'étude couvre l'inspection Lomé-Ouest qui loge
dans la région pédagogique de Lomé/Golfe. Notre
étude porte spécifiquement sur quatre(4) EPP. Il s'agit des EPP
Wonyomé, Amadahomé, Camp Adidogomé et
Soviépé. Les éléments visés au sein de ces
établissements sont les enseignants qui pratiquent les punitions
corporelles : c'est notre univers d'enquête.
Compte tenu du fait que tous les enseignants des
établissements choisis ne pratiquent pas les PC, il nous a fallu
incontournable de prendre appui sur un échantillon prenant en compte
seulement les enseignants qui font usage de ces pratiques.
Selon De Landsheere (1979), échantillonner c'est
choisir un nombre limité d'individus, d'objets ou
d'évènements dont l'observation permet de tirer des conclusions
applicables à la population à l'intérieur de laquelle le
choix a été fait.
Pour Paul Foulquié (1971 : 142),
l'échantillon est un « ensemble de cas choisis dans une
population de manière à la représenter et pouvant servir
d'échelle pour l'appréciation d'un cas du même
genre ». Ainsi, l'échantillon n'est que l'image
fidèle de la population dans laquelle il est tiré. Pour minimiser
les marges d'erreurs que peuvent porter les résultats d'une observation
sur un échantillon, l'échantillon doit être
représentatif.
D'abord il est à signaler que le choix des quatre
établissements scolaires relevait du pur hasard. Dans le choix des
individus à interroger, nous nous sommes proposé d'interroger
tous les enseignants des quatre établissements choisis qui pratiquent
les punitions corporelles. Il s'agissait alors d'un choix raisonné.
Considérant les établissements choisis, notre
échantillon se répartit comme suit :
Tableau 2 : Répartition
des enseignants à enquêter selon leur établissement
Etablissements
|
Nombre d'individus à enquêter
|
EPP Wonyomé
|
20
|
EPP Soviépé
|
9
|
EPP Camp Adidogomé
|
12
|
EPP Amadahomé
|
19
|
Total
|
60
|
Source : données de la recherche
Sodjago
2.4- L'instrument d'investigation (le
questionnaire)
Le questionnaire est l'instrument de collecte d'information le
plus adapté aux enquêtes quantitatives. C'est l'outil d'analyse
privilège dans l'étude des représentations sociales.
Le questionnaire consiste en une série de questions
standardisées et posées soit oralement, soit par écrit de
telle manière que les réponses puissent être
classées. Les questionnaires peuvent être soit fermées
(répondre par oui ou non), soit ouvertes (aucune proposition de
réponses n'est faite), soit en éventail (on associe la liste de
réponses possibles).
Nous optons pour cet instrument parce qu'il permet de toucher
rapidement plusieurs individus à la fois. De plus, les observations y
sont systématiques et standardisées. Il a, en outre, l'avantage
de faciliter le dépouillement des données collectées. Dans
le cadre de notre étude, notre questionnaire a porté sur la non
application des enseignants de la prohibition des punitions corporelles en
milieu scolaire au Togo. Il est composé de questions fermées,
ouvertes et de questions à plusieurs réponses parmi lesquelles
l'enquêté devra cocher celle qui correspond à ses
perceptions et pratiques.
Il est structuré en cinq (5) parties :
caractéristiques de l'enquêté (I), types de punition
pratiquées (II), connaissance et information (III), perceptions et
croyances (IV) et les méthodes pédagogiques utilisées
(V).
Restant toujours dans notre cadre d'étude, nous
l'avons administré aux enseignants des écoles primaires publiques
ciblées. Le questionnaire est élaboré à partir des
indicateurs des différentes variables d'étude.
2.5- Le déroulement de l'enquête
Cette étude a connu une phase préparatoire et
une phase d'enquête proprement dite.
2.5.1- La phase préparatoire
La phase préparatoire nous a permis d'abord d'obtenir
une attestation de recherche signée par le chef de département de
la Sociologie. Suite à cette attestation, nous nous sommes
adressé ensuite à la Direction Régionale de l'Education
(DRE) pour l'obtention d'une autorisation nous permettant de mener notre
recherche sur le terrain. Enfin, nous nous sommes présenté
à l'Inspection avec l'autorisation de la DRE. Nous avons obtenu à
ce niveau aussi une nouvelle autorisation du chef de l'Inspection
(l'inspecteur) à administrer notre questionnaire.
Après cette démarche administrative, nous avons
testé le questionnaire auprès de huit (8) enseignants, ce qui
nous a permis de réajuster certaines questions.
2.5.2- La phase de l'enquête proprement dite
Avec les autorisations de la DRE et de l'Inspection, nous nous
sommes directement adressés aux Directeurs des établissements
concernés. Nous avons cherché à rencontrer les enseignants
sélectionnés.
Nous avons fait remplir le questionnaire avec la collaboration
des directeurs d'établissement. Ceci ne s'est pas fait à notre
présence pour certains enseignants. Pour ceux-ci, nous leur avons remis
les questionnaires et nous sommes revenu les collecter un autre jour. Mais
certains ont rempli en notre présence.
Cette phase a couvert la période du 3 au 7 Mars 2011.
2.6- Méthode d'analyse des résultats
Compte tenu du caractère exploratoire de notre
recherche, nous utiliserons le tri à plat. Cependant, nous construirons
des tableaux croisés pour les questions relatives aux
caractéristiques des enquêtés. Nous allons utiliser les
tableaux des fréquences pour le dépouillement de nos questions.
Cela nous permettra d'avoir des données numériques qui, à
leur tour nous donneront les vraies tendances. L'analyse des données
comporte quatre (4) niveaux :
- Le premier niveau traite de la perception des enseignants en
ce qui concerne le lien entre les PC et le goût de l'effort
- Le second niveau porte sur l'examen du lien entre les PC et
la conduite (le comportement) de l'élève, vu par l'enseignant
punisseur
- Dans un troisième niveau, nous avons traité de
la relation entre les PC et le travail scolaire de l'élève
- Dans un dernier et quatrième niveau, l'analyse a
porté sur la relation entre les méthodes pédagogiques
utilisées et l'usage des PC.
2.7- Le dépouillement du questionnaire
Pour dépouiller le questionnaire, nous nous sommes
servi de deux logiciels que sont Epidata et SPSS (Statistical Package for
social studies). Après la saisie, nous avons procédé
à l'apurement des données. Ensuite, nous avons reconstruit les
tableaux en utilisant le logiciel de traitement Word.
Notons que nous n'avons pas eu recours à un
statisticien. Le dépouillement a été fait par
nous-mêmes.
2.8- Les difficultés rencontrées
Lors de la collecte des informations, nous nous sommes
trouvé devant un certain nombre de difficultés qu'on peut classer
en deux groupes : les difficultés économiques et les
difficultés liées à la nature de notre objet
d'étude.
En ce qui concerne les difficultés économiques,
elles sont liées au fait que nous ne disposons pas d'un moyen de
déplacement. Nous sommes obligé de solliciter les services d'un
taxi pour nous rendre sur les lieux de l'étude. Ceci nous revient cher.
Cela a d'ailleurs pesé sur la durée de l'étude dû au
fait que ce n'est pas à chaque moment que nous voudrions nous rendre sur
le terrain que nous disposons des moyens financiers pour le faire. En outre, la
multiplication des questionnaires nous a posé des soucis financiers.
Quant aux difficultés liées à la nature
du thème, elles concernent le fait que le thème soit sensible. Le
domaine des punitions reste un domaine tabou, truffé de non-dits. Cela a
été difficile pour nous de persuader certains enseignants
à remplir le questionnaire. Pour eux, nous pourrions être un
enquêteur envoyé par leur supérieur pour sanctionner le
fait qu'ils enfreignent la réglementation.
Par ailleurs, certains enseignants nous ont
réclamé de l'argent pour remplir le questionnaire. Pour ceux-ci,
ce travail nous permet d'occuper un haut niveau alors qu'ils n'y gagnent rien.
Pourquoi donc y consacrer leur temps pour rien ?
Chapitre 3 PRESENTATION DU MILIEU D'ETUDE
La présentation du cadre de recherche devient
importante du moment où l'étude s'est fondée sur un
travail de terrain. Etant donné que l'étude est bien
localisée dans un milieu précis et localisé, il nous
incombe de s'attarder sur les caractéristiques de celui-ci.
3.1- Présentation des lieux de la recherche
L'étude couvre l'inspection Lomé-Ouest qui loge
dans la région pédagogique de Lomé/Golfe. La zone
Lomé-Ouest découle avant tout d'un découpage
pédagogique. Sur le plan administratif, cette zone couvre les quartiers
situés à l'ouest de Lomé, la capitale togolaise. Ces
quartiers sont : Adidogomé, Soviépé, Djidjolé,
Totsi. Notre zone d'étude loge 43 écoles primaires publiques avec
un effectif de 294 enseignants.
Un établissement primaire public est une institution
chargée de donner l'enseignement de base et gérée par
l'administration publique.
Compte tenu de l'impossibilité de couvrir tous les
établissements, l''étude est focalisée sur quatre EPP.
Nous nous proposons de donner un aperçu général de ces
établissements en ce qui concerne leur historique, leurs ressources et
les problèmes quotidiens auxquels ils sont confrontés.
3.1.1- L'EPP Amadahomé
L'EPP Amadahomé est située dans le quartier
Amadahomé à Adidogomé. Elle a vu le jour en 1966. Le
premier directeur qui l'a dirigé répond au nom de Monsieur
Avognon Kokou.
L'EPP Amadahomé comporte trois (3) groupes :
groupe A, groupe B et groupe C. Les effectifs sont respectivement 440, 510 et
432, ce qui équivaut à un effectif total de 1382
élèves. Chaque groupe est composé de 6 classes sauf le
groupe B qui comporte 8, ce qui donne une moyenne par classe qui
équivaut à 73 élèves pour le groupe A, 64
élèves pour le groupe B et à 73 élèves pour
le groupe C. Ces moyennes constituent également le ratio
élèves/enseignant puisque l'établissement dispose de vingt
(20) enseignants, soit un enseignant par classe.
Comprenant 3 groupes, l'établissement est dirigé
par 3 directeurs, ce qui voudra dire que chaque groupe est dirigé par un
directeur. L'actuelle directrice du groupe A est Mme Evoda Akouvi.
Il est à souligner que dans l'enceinte de l'EPP
Amadahomé loge un collège d'enseignement général
(CEG).
3.1.2- L'EPP Camp Adidogomé
L'EPP Camp Adidogomé est situé dans l'enceinte
du camp RI (2ème Régiment de l'Infanterie). Elle est
créée en 1978. Elle a donc aujourd'hui 33 ans.
L'EPP Camp Adidogomé est composé de deux
groupes : L'EPP Camp Adidogomé/A et L'EPP Camp Adidogomé/B.
Le groupe A avec un effectif de 397 élèves. Avec
un effectif de 6 enseignants, le ratio élèves/enseignant est en
moyenne égal à 66 élèves pour un enseignant. Ce
groupe est composé de 6 classes.
Le groupe B a un effectif de 355 élèves, ce qui
donne une moyenne d'élèves par classe égale à 59
élèves. Avec un effectif de 6 enseignants, soit un enseignant par
classe, le ratio élèves/enseignant est de 59.
3.1.3- L'EPP Soviépé
L'EPP Soviépé est située dans le quartier
Soviépé à côté de la station de
télévision TV7. Elle a vu le jour en 1978.
L'EPP Soviépé est composé de trois
groupes : le groupe A, le groupe B et le groupe C. les effectifs sont
respectivement 362 pour le groupe A, 440 pour le groupe B et 412 pour le groupe
C. chaque groupe est composé de 6 classes. L'effectif moyen par classe
est donc de 60 pour le groupe A, 73 pour le groupe B et 67 pour le groupe C.
Avec un effectif de 18 enseignants, l'EPP
Soviépé, comme tous les autres écoles publiques, se
confronte quotidiennement à d'énormes difficultés
notamment la non disponibilité des manuels scolaires, l'état peu
confortable des salles de classe, les effectifs pléthoriques, etc.
3.1.4- L'EPP Wonyomé
L'EPP Wonyomé est localisée dans le quartier
Wonyomé près de la frontière Togo-Ghana.
Créé en 1972, il est l'établissement le plus ancien de
ceux que nous avons eu à explorer.
Comme tous les autres établissements, l'EPP
Wonyomé est composé de trois groupes
d'établissement : le groupe A, B et C. Comprenant 21 classes, soit
7 classes par groupe, l'EPP Wonyomé est dirigé par trois
directeurs, soit 1 par groupe.
L'EPP Wonyomé, dès ses débuts ne se
réduisait qu'à l'actuel groupe B. Ce n'est qu'après tout
que les autres groupes furent créés dans le souci
d'élargir l'école et d'accueillir un plus grand nombre
d'élèves.
Les effectifs sont respectivement de 440 pour le groupe A, de
450 pour le groupe B et de 415 pour le groupe C, ce qui porte l'effectif total
à 1305. L'effectif moyen par classe est donc respectivement de 62, 64
et de 59.
Nous y avons recensé 21 enseignants, soit un enseignant
par classe.
En somme, comme nous pouvons le constater, tous les
établissements que nous avons explorés ont ce dénominateur
commun de souffrir du problème des effectifs pléthoriques. C'est
le plus grand problème auquel sont confrontés les enseignants
dans ces établissements. Après cela viennent les problèmes
des moyens didactiques surtout les manuels scolaires. Compte tenu de la
cherté de l'information, de nos ressources temporelles et
financières limitées, nous n'avons pas pu avoir le nombre de
manuel par établissement. Auquel cas, nous calculerons les ratios
élèves/manuel, ce qui édifiera plus dans la
compréhension des difficultés auxquelles font face enseignants et
élèves. Il est aussi à signaler l'état
défectueux de certaines salles de classe, ce qui ne fait
qu'accroître les difficultés. Il y a même des salles de
classe sous des matériaux provisoires, totalement ouvertes ce qui ne
peut évidemment pas favoriser la concentration des élèves
qui sont déjà en surnombre.
3.2- Les écoles primaires et leur environnement
institutionnel
Le Togo, à l'instar des autres pays, a un
système scolaire structuré en divers degrés. Au Togo, le
système est subdivisé en quatre (4) degrés :
- Le premier degré
- Le deuxième degré
- Le troisième degré
- Le quatrième degré
Mais notre attention se focalisera sur le premier degré
puisque c'est lui qui a servi de cadre de recherche à cette
étude. Il est aussi important de souligner que le premier degré
comprend deux niveaux : les jardins d'enfants et l'école
primaire.
C'est précisément à ce deuxième
niveau que nous concentrerons l'essentiel de notre description.
L'école primaire au Togo accueille les enfants des deux
sexes âgés de cinq ans révolus. Comme objectif, elle assure
une éducation de base visant le développement de la
personnalité de l'enfant et son éveil sur le milieu,
l'acquisition de bonnes habitudes et de connaissances instrumentales permettant
d'aborder plus tard un enseignement général ou professionnel.
Rappelons que, quels qu'en soient les objectifs, ils doivent aboutir
(finalité) à la formation d'un citoyen sain,
équilibré et épanoui dans toutes les dimensions.
L'école « doit permettre la formation de l'esprit critique
[...]. Toutes les idéologies pourront s'y exprimer librement sans
recherche de prosélytisme. » (République
togolaise, 1975 : 9).
L'école primaire accueille les enfants pour une
période de 6 ans. Ainsi, dans sa structure, comporte-t-il trois paliers,
chaque palier comprenant deux (2) niveaux :
- Le cours préparatoire (CP), CP1+CP2
- Le cours élémentaire (CE), CE1+CE2
- Le cours moyen (CM), CM1+CM2
La fin du cycle primaire est sanctionnée par le
Certificat d'Etude du Premier Degré (CEPD).
Sur le plan administratif, l'école primaire est
dirigée par le Ministère de l'Enseignement Primaire, Secondaire
et de l'Alphabétisation (MEPSA) qui dispose d'un cabinet et de deux
services centraux notamment le secrétariat et les directions centrales.
Les directions centrales du MEPSA sont au nombre de onze (11) :
- DEPP : Direction des Enseignements Préscolaires
et Primaires
- DESG : Direction de l'Enseignement Secondaire
Général
- DAENF : Direction de l'Alphabétisation et de
l'Education Non Formelle
- DRH : Direction des Ressources Humaines
- DAF : Direction des Affaires Financières
- DPEE : Direction de la Planification de l'Education et
de l'Evaluation
- DEX-CC : Direction des Examens, Concours et
Certification
- DF : Direction des Formations
- DPIP : Direction des Programmes et Innovations
Pédagogiques
- CNIOSP : Centre National d'Information et d'Orientation
Scolaires et Professionnelles
- CNDP-TICE : Centre National de Documentation
Pédagogique et des Technologies de l'Information et de la Communication
pour l'Education.
Ensuite viennent les Directions Régionales de
l'Education qui entretiennent des relations fonctionnelles entre elles et avec
les directions centrales du ministère. On a six DRE au Togo. Celles-ci
ont autorité sur les Inspections de l'Enseignement du Premier
Degré (IEPP) qui sont dirigées par les chefs d'inspection
(inspecteur) et qui entretiennent des liens directs avec les
établissements primaires.
Nous ne manquerons pas de signaler qu'il y a trois
institutions rattachées directement au MEPSA dont :
- La LIMUSCO : Librairie des Mutuelles Scolaires
- Le CSEF : Conseil Supérieur de l'Education et de
la Formation
- L'IGE : Inspection Général de
l'Education
Voici en schéma l'organigramme de l'enseignement
primaire au Togo :
LIMUSCO
MINISTRE
(MEPSA)
CSEF
CABINET
IGE
SECRETARIAT GENERAL
DIRECTIONS CENTRALES
DRE
IEPP
ETABLISSEMENT D'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE
Concernant le volet de l'organisation juridique, le
système éducatif togolais est régi et structuré par
l'Ordonnance n°16 du 6 Mai 1975 portant Réforme de l'Enseignement.
Si nous partons de cette réforme de 1975, il est
consigné que les méthodes actives y sont
préconisées, et que le maître doit devenir un animateur.
Les pratiques punitives y sont réglementées. Et même avant
la réforme de 1975, il a été adopté, dès
1973 au colloque des inspecteurs du premier degré de l'éducation
nationale (1973 : 22) « la suppression pure et simple du
châtiment corporel ». Au cours du même colloque, le
terme « maître » fut refusé d'usage, surtout
dans les textes. Les inspecteurs ont préféré le terme
« enseignant ».
En clair, selon la législation scolaire au Togo,
certains types de punitions sont interdites alors que d'autres sont
autorisées. Les punitions autorisées sont :
« - La réprimande en privé ou devant
les élèves
- La retenue après la classe sous la surveillance du
maître
- Les mauvais points
- La privation partielle de récréation
- L'exclusion temporaire » (République
togolaise, 1983 : 31).
Les punitions prohibées sont constituées par les
châtiments corporels (fessées, coups dans la main, gifles, les
coups de poing sur la tête, etc.). Il est écrit :
« le châtiment corporel est interdit »
(id. : 22).
En 1980, un arrêté du Ministère de
l'éducation et de la recherche interdit les châtiments
corporels à l'école. Les inspecteurs et les conseillers
pédagogiques ont la charge de sensibiliser en permanence les enseignants
sur les conséquences néfastes de ces châtiments et ont le
pouvoir de les faire sanctionner le cas échéant.
Dans la même dynamique, en 2000, un arrêté
ministériel a interdit l'usage des punitions corporelles en milieu
scolaire au Togo.
Les conditions de l'usage des punitions sont aussi
réglementées depuis la réforme :
« Les punitions doivent êtres rares,
occasionnelles, modérées, infligées avec calme et
dignité, proportionnelles à l'âge et à la
sensibilité de l'enfant, à la gravité de la faute.
(...), la punition collective doit être
bannie » (ibid. : 32).
Les diagnostics opérés révèlent
que l'enseignement primaire au Togo souffre d'un déficit notoire de
qualité. Ce déficit provient de l'état des
infrastructures, des effectifs trop élevés dans les classes du
manque de formation professionnelle des enseignants, de l'insuffisance de
manuels scolaires et de matériels didactiques.
DEUXIEME PARTIE : LES RESULTATS
Chapitre 4 PRESENTATION, ANALYSE ET INTERPRETATION
DES RESULTATS
La présentation des données reste une
étape incontournable dans la conduite de cette recherche. Elle consiste
à :
« ...fournir tous les résultats pertinents
relativement aux questions de recherche ou aux hypothèses
formulées. Lorsque le chercheur présente les résultats de
son étude, il doit s'en tenir strictement à une
présentation sous forme narrative des résultats qu'il a produits
dans les tableaux [...]. Ces tableaux [...] à l'appui du texte narratif
doivent avoir un numéro et un titre précisant l'information
présentée. » (Fortin, cité par N'da, 2006 :
116)
C'est précisément à cet exercice que
nous allons nous livrer dans la première partie du présent
chapitre. Dans une seconde partie, nous passerons à
l'interprétation des résultats.
4.1- Présentation et commentaire des
résultats
4.1.1- Caractéristiques sociodémographiques
des répondants
Tableau 3 : Répartition des
enseignants selon leur âge et sexe
Sexe
Age
|
Masculin
|
Féminin
|
Total
|
30-40
|
fréquence %
6 10,7
|
fréquence %
9 16,1
|
fréquence %
15 26,8
|
40-50
|
13 23,2
|
10 17,9
|
23 41,1
|
50-60
|
10 17,9
|
8 14,2
|
18 32,1
|
Total
|
29 51,8
|
27 48,2
|
56 100
|
Source : données de l'enquête
51,1% des enseignants enquêtés sont des hommes
alors que 48,2% sont des femmes. Cette tendance quasi équilibrée
révèle que les P.C. sont utilisées aussi bien par les
hommes que par les femmes. Concernant l'âge, la plupart des enseignants
(73,2%) interviewés sont âgés de plus de 40 ans alors
qu'une minorité (26,8%) a un âge compris entre 30 et 40 ans.
Tableau 4 : Répartition des
enseignants selon leur niveau d'instruction et leur formation
professionnelle
Formation professionnelle
Niveau d'instruction
|
ENI
|
Aucune
|
Total
|
Collège
|
Fréq %
12 21,4
|
Fréq %
6 10,7
|
Fréq %
18 32,1
|
Lycée
|
13 23,2
|
13 23,2
|
26 46,4
|
Etudes universitaires
|
6 10,7
|
6 10,7
|
12 21,4
|
Total
|
31 55,3
|
25 44,6
|
56 100
|
Source :
données de l'enquête
55,3% des enseignants ont été formés
dans les ENI alors que 44,6% n'ont aucune formation professionnelle. En ce qui
concerne le niveau d'instruction, 32,1% des enseignants se sont limités
au collège, 46,4% au Lycée et 21,4% ont fait les études
universitaires.
4.1.2- Présentation des données relatives aux
perceptions et pratiques
Tableau 5 : Répartition des
enseignants selon qu'ils punissent ou non
Vous arrive-t-il de punir vos élèves ?
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Oui
|
56
|
100
|
Non
|
0
|
0
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
100% des enseignants reconnaissent qu'ils punissent les
élèves
Données relatives aux motifs pour lesquels les
enseignants punissent leurs élèves
Tableau 6 : Répartition des
enseignants selon les motifs qui les poussent à punir leurs
élèves
Les motifs
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Ils ne vous respectent pas
|
13
|
23,2
|
Ils n'apprennent pas leurs leçons, ils travaillent mal
|
22
|
39,3
|
Ils sèchent les cours
|
7
|
12,5
|
Ils bavardent en classe
|
10
|
17,9
|
Ils sont récalcitrants et têtus
|
4
|
7,1
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de
l'enquête
Concernant les motifs pour
lesquels les enseignants punissent les élèves, 23,2% des
enseignants estiment que c'est dû au fait que les élèves
ne les respectent pas, 39,3% affirment que les élèves
n'apprennent pas leurs leçons et qu'ils travaillent mal, 12,5% affirment
qu'ils sèchent les cours, 17,5% estiment qu'ils bavardent en classe
alors que 7,1% perçoivent que les élèves sont
récalcitrants et têtus.
Données relatives aux types de punitions
corporelles utilisées par les enseignants
Tableau 7 : Répartition des
enseignants selon les PC utilisées
Punitions corporelles utilisées
|
Fréquence
|
Pourcentage
(%)
|
Les fessées
|
15
|
26,7
|
Les mises à genou
|
13
|
23,2
|
Coups sur la tête, tirer les oreilles, pincer
|
3
|
5,4
|
Frapper dans les mains
|
25
|
44,6
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
Pour ce qui concerne les punitions utilisées
par les enseignants, 26,7% des enseignants utilisent les fessées, 23,2%
les mises à genou, 5,4% donnent des coups sur la tête, tirent et
pincent les oreilles et 44,6% frappent dans les mains.
Données relatives à l'opinion des
enseignants sur les types de punition qu'ils utilisent
Tableau 8 : Opinion des enseignants sur les
types de punition qu'ils utilisent
Opinion
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Punition corporelles
|
49
|
87,5
|
Punition symboliques
|
7
|
12,5
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de
l'enquête
87% des enseignants classent les punitions qu'ils
utilisent dans le registre des punitions corporelles alors que 12,5% les
classent dans les punitions symboliques. C'est surtout ceux qui utilisent les
mises à genou (10,3%) et les coups sur la tête (1,4%) qui classent
les punitions qu'ils utilisent dans les punitions symboliques.
Données relatives à l'importance que les
enseignants accordent aux punitions corporelles
Tableau 9 : Répartition des
enseignants selon l'importance qu'ils accordent aux PC
Importance
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Améliorer le comportement de l'élève
|
29
|
51,8
|
Aide l'élève à travailler
|
7
|
12,5
|
Les deux précédentes propositions
|
20
|
35,7
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
La majorité des enseignants (51,8%)
affirment que les punitions corporelles présentent la grande importance
d'améliorer le comportement de l'élève alors que seulement
12,5% estiment qu'elles aident les élèves à mieux
travailler. Enfin, 35,7% soutiennent les deux propositions (améliorent
le comportement de l'élève et l'aident à mieux
travailler).
Données relatives aux définitions des PC
Tableau 10 : Opinion des enseignants sur ce
que signifie la punition corporelle
Opinion
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
N'évoque pas la douleur physique
|
24
|
42,9
|
Evoque la douleur physique
|
30
|
53,6
|
Sans réponse
|
2
|
3,6
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
Pour la plupart des enseignants (53,6%), la punition
corporelle évoque la douleur physique alors que 42,9% la
définissent sans faire allusion à la douleur physique ou
corporelle. Par ailleurs, 3,6% des enseignants n'ont pas répondu
à la question.
Données relatives au niveau d'information des
enseignants en ce qui concerne la prohibition des PC
Tableau 11 : Répartition des
enseignants selon leur niveau d'information concernant la prohibition des PC
à l'école
Niveau d'information
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Informé
|
56
|
100
|
Pas informé
|
0
|
0
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de
l'enquête
Concernant le niveau d'information quant à
l'interdiction des punitions corporelles à l'école, 100% des
enseignants affirment qu'ils sont informés.
Données relatives aux raisons qui poussent les
enseignants à user des PC
Tableau 12 : Répartition des
enseignants selon les raisons qui les poussent à user des PC
Les raisons
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Les élèves sont paresseux
|
11
|
19,6
|
Les P.C. aident l'élève à travailler
|
20
|
35,7
|
Les P.C. aident l'élève à bien se
comporter
|
5
|
8,9
|
Aident l'élève à se discipliner
|
20
|
35,7
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de
l'enquête
Les enseignants continuent par utiliser les
punitions corporelles parce que les élèves sont paresseux
(évoqué par 19,6% des enseignants). Pour d'autres enseignants
(35,7%), c'est parce que les P.C. aident l'élève à mieux
travailler et pour d'autres encore (8,9%), elles l'aident à bien se
comporter. Enfin, 35,7% des enseignants pensent que les P.C. aident
l'élève à se discipliner (comportement).
Données relatives aux perceptions des enseignants
en ce qui concerne le lien entre les PC et le goût de
l'effort
Tableau 13 : Répartition des
enseignants selon leur perception concernant le développement du
goût de l'effort par les P.C.
Perception
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Développe le goût de l'effort
|
53
|
94,6
|
Ne développe pas le goût de l'effort
|
3
|
5,4
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
94,6% des enseignants pensent que les P.C. développent
chez l'élève le goût de l'effort alors qu'une
minorité (5,4%) estime qu'elles ne développent pas le goût
de l'effort chez l'élève.
Données relatives aux perceptions des enseignants
en ce qui concerne le lien entre les PC et le travail scolaire de
l'élève
Tableau 14 : Répartition des
enseignants selon leur perception concernant le fait que les P.C.
amènent l'élève à mieux travailler
Perception
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Amènent l'élève à mieux travailler
|
50
|
89,3
|
N'amènent pas l'élève à mieux
travailler
|
6
|
10,7
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de
l'enquête
89,3% des enseignants pensent que les P.C. amènent
l'élève à mieux travailler alors que certains (10,7%)
estiment qu'elles n'amènent pas l'élève à mieux
travailler.
Données relatives aux perceptions des enseignants
en ce qui concerne le lien entre les PC et la conduite de
l'élève
Tableau 15 : Répartition des
enseignants selon leur perception en ce qui concerne le fait que les P.C.
développent la bonne conduite
Perception
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Développe la bonne conduite
|
53
|
94,6
|
Ne développe pas la bonne conduite
|
3
|
5,4
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
94,6% des enseignants pensent que les P.C. développent
chez l'élève la bonne conduite. Mais pour d'autres (5,4%) les
P.C. n'améliorent pas le comportement de l'élève.
Données relatives à la communication des
objectifs du cours aux élèves
Tableau 16 : Répartition des
enseignants selon qu'ils communiquent ou non les objectifs des cours aux
élèves
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Oui, je communique les objectifs
|
0
|
0
|
Non, je ne communique pas les objectifs
|
55
|
98,2
|
Sans réponse
|
1
|
1,8
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
La plupart des enseignants (98,2%) ne communiquent pas les
objectifs des cours aux élèves. Par ailleurs 1 enseignant, soit
1,8% n'a pas répondu à la question.
Données relatives à l'usage des
matériels concrets par les enseignants
Tableau 17 : Répartition des
enseignants selon qu'ils utilisent ou non des matériels concrets pour
faire les cours
|
Fréquence
|
Pourcentage (%)
|
Oui, j'utilise des matériels
|
15
|
26,8
|
Non, je n'utilise pas de matériels
|
40
|
71,4
|
Sans réponse
|
1
|
1,8
|
Total
|
56
|
100
|
Source : données de l'enquête
71,4 % des enseignants n'utilisent pas de matériels
concrets pour montrer aux élèves ce dont ils parlent. Seulement
26,8% affirment utiliser certains matériels (comme les cartes) pour
faire les cours.
En somme, on peut retenir que, selon la perception des
enseignants usant des PC, ces dernières les aident à maintenir
l'ordre dans la classe, surtout dans le contexte des effectifs
pléthoriques qu'ils vivent. Les PC amènent l'élève
à se discipliner et à bien se comporter, à
développer le goût de l'effort, à étouffer sa
paresse pour ainsi mieux travailler car « nul n'aime la
douleur ».
Pour les enseignants, le fait que les PC provoquent une
douleur immédiate leur confère une certaine efficacité
car « sans le bâton, l'élève se dit qu'on va
seulement l'insulter » et il ne travaille ni n'adopte un bon
comportement.
Tous les enseignants nous ont confié qu'ils sont
informés de la réglementation portant interdiction des punitions
corporelles en milieu scolaire au Togo. Mais ils sont souvent obligés de
l'utiliser parce que les élèves sont paresseux, travaillent mal
et se comportent mal en classe.
La plupart des enseignants ne communiquent pas aux
élèves les objectifs des cours. En clair, les
élèves ne savent pas ce qu'on attend d'eux. Il est à noter
que parmi les PC, les coups dans les mains et les fessées sont les plus
utilisées. Cumulés, ils représentent à eux seuls
73,1 % des cas évoqués (confère tableau 7).
4.2- Interprétation des résultats
A ce niveau, nous allons mettre en emphase les facteurs qui
poussent les enseignants à user des punitions corporelles bien que ce
soit explicitement interdit dans la réglementation. Autrement dit, nous
allons donner un sens sociologique à nos résultats. A cet effet,
nous dégagerons dans les parties qui suivront les grandes tendances en
ce qui concerne les facteurs explicatifs de la non application de la
prohibition des P.C. à l'école au Togo et en faire une
analyse.
- Punition corporelle et goût de
l'effort
A la lumière des résultats obtenus, la plupart
des enseignants pensent que la punition développe chez
l'élève l'aversion pour la paresse. 94,6% des enseignants
pensent que les P.C. développent chez l'élève le
goût de l'effort (confère tableau 13).
Pour les enseignants, « l'élève qui
n'apprend pas ses leçons, ayant été puni une ou deux fois
finira par se mettre au travail ». « Si l'enfant sait qu'il
sera puni, il mettra du sérieux dans son travail ».
« Certains enfants sont paresseux et c'est le bâton qui les
réveille. Personne n'aime ce qui fait mal. Pour l'éviter, on
s'efforce de bien faire ». Ce sont là quelques propos tenus
par les enseignants pour justifier leur perception.
En ce qui concerne l'importance accordée par les
enseignants aux PC dans leurs pratiques, 100% des enseignants confirment que
celles-ci aident les élèves, soit à améliorer leur
résultat scolaire, soit à se discipliner.
En somme, le goût de l'effort s'acquiert dans
la douleur, diront les enseignants. Pour ces derniers, un maximum d'effort
requiert la contrainte. Or, les PC sont le moyen le plus contraignant en
éducation. Le fait que l'effet des PC soit immédiat leur
confère une certaine efficacité que n'ont pas les punitions
symboliques.
- Punition et conduite (comportement) de
l'élève
94,6% des enseignants pensent que la punition corporelle
développe chez l'enfant la bonne conduite. Dans cet ensemble qu'est la
bonne conduite se trouve des éléments comme la ponctualité
(venir à l'école à l'heure), la régularité
(ne pas sécher les cours), le respect pour l'enseignant (23,2%), le
calme dans la classe (17,9%), la discipline (35,7%).
A la lumière de ces constats, on déduit que le
comportement de l'élève est visé durant ces pratiques,
c'est ainsi que certains enseignants nous ont confié que
« dans une classe où il ya du bruit et que l'enseignant prend
le bâton, tout rentre en ordre, l'élève suit attentivement
» ; « une société sans rigueur conduira au
désordre et à l'anarchie » ; « si on
tape des élèves pour une faute, au moins 75% se remettent, mais
si on dit verbalement à peine 5 ou 10% (se ressaisissent) ».
Ces propos nous renseignent sur l'univers idéologique de ces enseignants
pour qui, les PC sont une panacée à l'indiscipline.
Sous l'angle de l'importance accordée aux punitions,
69,6% des enseignants pensent que celles-ci améliorent le comportement
de l'élève. Pour ceux-ci, ils punissent les élèves
pour éloigner d'eux « les égarements, la paresse et le
laisser-aller ».
De ce qui précède, il ressort que dans
l'imaginaire pédagogique, ces enseignants se représentent les PC
comme un ingrédient nécessaire au modelage du comportement de
l'élève. Alors qu'elles soient prohibées ou non, pour
l'enseignant, c'est une ressource disponible et immédiate qui pourra lui
permettre d'atteindre sa fin : transmettre aux élèves des
savoirs.
- Punition corporelle et travail scolaire de
l'élève
La grande majorité des enseignants pensent que
l'élève améliore son résultat scolaire grâce
aux punitions. Plus précisément 89,3% des enseignants pensent
qu'il y a une relation entre les PC et le travail scolaire de
l'élève. Voilà quelques propos justificatifs tenus par les
enseignants. « Pour toute personne, il faut quelque chose qui fait
peur pour bien travailler ». « Avec le bâton,
l'enfant a peur et à la maison, il peut apprendre ses
leçons ».
Concernant les raisons qui poussent les enseignants à
user des PC, 19,6% des enseignants pensent que les élèves sont
trop paresseux, en d'autres termes, ils sont de nature paresseux et
n'apprennent donc pas leur leçons puis 35,7% affirment que c'est pour
les aider à améliorer leur résultats scolaires,
c'est-à-dire à fuir la paresse et apprendre leurs leçons.
Si l'on cumule ces pourcentages, on arrive à constater que 55,3%, soit
plus de la moitié des enseignants qui pratiquent les PC pour aider leurs
élèves à améliorer leur travail scolaire.
En définitive, comme l'a affirmé Durkheim
(1903), le travail ne peut se faire que dans un minimum d'organisation et de
discipline. Et les PC sont justement au service du maintien de cette
discipline. Une raison de croire que les PC sont efficaces pour pousser les
apprenants à améliorer leur rendement scolaire. C'est aussi le
lieu de souligner, par rapport aux travaux d'Alain, la conception de la nature
de l'enfance par les enseignants interrogés. Pour ceux-ci, l'enfant
serait paresseux de nature et quelques coups de bâton suffiront à
la pousser au travail.
- L'univers pédagogique des enseignants qui
n'obtempèrent pas
A la lumière des données, nous constatons que la
grande majorité (98,2%) des enseignants ne communique pas aux
élèves les objectifs du cours. En clair, les élèves
ne savent pas ce qu'on attend d'eux, pourquoi ils font le cours et comment
investir le cours qu'ils auront appris dans leur vécu. Leur souci est de
« bûcher » les cours et les réciter lors des
devoirs pour échapper aux punitions.
Notons que plus l'élève connaît les
objectifs, c'est-à-dire le fondement de ce qu'il fait, plus il sait ce
qu'on attend de lui et plus il s'investit pour satisfaire à cette
attente. C'est là même un des grands principes des méthodes
actives. En ne communiquant pas aux élèves les objectifs des
cours, ces enseignants se situent dans la perspective de la méthode
traditionnelle qui n'intègre pas l'élève au coeur du
processus d'enseignement-apprentissage. Dans ce contexte, les
évaluations sont des occasions pour piéger l'élève.
Dans cette ligne de vue, la contrainte, l'autorité et la force sont les
ressources immédiates dont dispose l'enseignant pour intégrer
l'apprenant dans le processus d'enseignement-apprentissage.
Ensuite, 71,4 % des enseignants font les cours
théoriquement sans se soucier de montrer concrètement aux
élèves ce dont ils parlent. En utilisant des matériels
concrets comme les cartes, les bâtonnets, des objets comme la potasse, le
sodium, l'élève se représente mieux les concepts dont on
lui parle. Il est donc judicieux de souligner, en considérant les
résultats que nous avons obtenu, que la grande majorité des
enseignants qui n'obtempèrent pas se situent dans une pédagogie
traditionnelle. La non disponibilité des laboratoires ne favorisent pas
les enseignants dans l'usage des matériels. Or, il est
démontré que par le concret, l'élève comprend plus
et donc s'intéresse à ce qu'on fait. Le non usage des
matériels concrets peut entraîner l'ennui et le
désintérêt au niveau de l'élève. Et ce sont
ces états qui amènent aussi l'enseignant à chercher
à intégrer l'élève de force ou de gré dans
le processus éducatif.
En somme, les enseignants utilisent les PC parce que c'est ce
qu'ils utilisent dans la société. Etant donné qu'ils
l'utilisent, ils en ont une certaine représentation. La logique de
l'usage des PC est simple : on utilise les PC parce que c'est comme
ça qu'on éduque chez nous, parce que c'est avec elles qu'on
éduque chez nous. Déthiouckh S. a résumé ceci dans
une phrase aussi complète : « De l'avis de bon nombre
de maîtres, le châtiment corporel fait partie intégrante de
notre tradition éducative (africaine) ».
(Déthiouckh Samba, 2009, in
www.fimem-freinet.org). Et
à Saliou Sarr d'ajouter : « En effet l'enfant
africain est élevé dans une culture qui utilise le bâton
comme une forme de punition, pour amener les enfants à apprendre et
à s'instruire. Dès lors frapper un enfant est
considéré comme un droit des parents et des
enseignants ». Etant donné donc que
l'école reproduit les structures et les relations
sociales qui existent dans son environnement, elle admet aussi les
châtiments corporels qui sont répandus dans la famille. À
chaque période historique, on est surpris de constater un certain
parallélisme entre l'importance des punitions corporelles
utilisées dans les familles, et celles employées dans les
écoles. (
http://web.me.com/jacornet/Site_1/Page_11.html.,
3 févr. 2011).
4.3- Vérification de l'hypothèse
Via cette recherche, nous nous sommes fixé comme
objectif de passer en revue les raisons qui poussent les enseignants à
pratiquer les PC tout en sachant que c'est interdit. Nous avons ainsi
posé les hypothèses selon lesquelles les enseignants continuent
à utiliser les PC parce qu'ils pensent que :
- Les PC développent chez l'élève le
goût de l'effort ;
- Les PC amènent l'élève à
développer la bonne conduite ;
- Les PC amènent l'élève à mieux
travailler ;
- Les PC amènent l'élève à se
ressaisir vite.
Par ailleurs, ils utilisent les méthodes
pédagogiques traditionnelles
Il était question, en clair, d'évaluer les
perceptions des enseignants concernant l'usage des PC. Au terme de la
recherche, il convient de retenir que :
· La plupart des enseignants pensent que la punition
développe chez l'élève l'aversion pour la paresse. 94,6%
des enseignants pensent que les P.C. développent chez
l'élève le goût de l'effort. Notre première
hypothèse à savoir que pour les enseignants, les
punitions corporelles développent chez l'élève le
goût de l'effort, celui-ci ne voulant pas recevoir des coups est
confirmée.
· 94,6% des enseignants pensent que la punition
corporelle développe chez l'enfant la bonne conduite. Dans cet ensemble
qu'est la bonne conduite se trouve des éléments comme la
ponctualité (venir à l'école à l'heure), la
régularité (ne pas sécher les cours), le respect pour
l'enseignant (23,2%), le calme dans la classe (17,9%), la discipline (35,7%).
Considérant ces données, notre deuxième hypothèse
(Pour les enseignants, les punitions corporelles développent
chez l'élève une bonne conduite) trouve sa
confirmation.
· La grande majorité des enseignants pensent que
l'élève améliore son résultat scolaire grâce
aux punitions. Plus précisément 89,3% des enseignants pensent
qu'il y a une relation entre les PC et le travail scolaire de
l'élève. La grande majorité des enseignants affirment
qu'ils utilisent les PC pour aider les élèves à
améliorer leurs résultats scolaires. Notre troisième
hypothèse qui stipulait que pour les enseignants,
l'élève a plus peur des punitions corporelles et donc travaillent
bien trouve ainsi sa confirmation.
· La grande majorité des enseignants pense que la
punition corporelle est plus efficace parce qu'elle touche le physique et
provoque une douleur immédiate. Et comme « nul n'aime la
douleur », ceci amène les élèves à se
ressaisir plus vite. Pour certains enseignants, les insultes et les
réprimandes n'amènent pas les élèves à se
ressaisir autant que les PC. Notre quatrième hypothèse
(pour les enseignants, l'élève a plus peur des punitions
corporelles et donc se ressaisit vite) trouve ainsi sa confirmation.
Mais celle-ci doit être nuancée parce que certains enseignants
reconnaissent, malgré tout, qu'il y a certains enfants qui même en
présence du bâton n'arrivent pas à apprivoiser cette
discipline chère à l'activité
d'enseignement-apprentissage.
· 98,2% des enseignants ne communiquent pas à
leurs élèves les objectifs des cours. Ce faisant, ils
n'intègrent pas l'élève au coeur du processus
d'enseignement-apprentissage. Ils se contentent de centrer l'enseignement sur
eux-mêmes sans se soucier de la priorité de l'élève
au coeur même de ce processus. Ils se situent ainsi dans une perspective
traditionnelle de la pédagogie, ce qui explique leur usage des PC. Notre
dernière hypothèse se trouve ici confirmée.
Concernant le volet théorique, nous allons faire le
parallèle entre les résultats auxquels nous sommes parvenu et nos
théories d'analyse. Autrement dit, nous dirons en quoi ces
théories confirment ou infirment les résultats auxquels nous
sommes parvenu.
En ce qui concerne la théorie systémique, nous
avons posé les principes suivants :
- C'est le système social qui influence le plus le
système scolaire ;
- C'est la méthode et les pratiques éducatives
en usage dans la société qui sont utilisées à
l'école.
Selon nos résultats, on est parvenu au fait que les
enseignants se réfèrent à l'éducation qu'il avait
reçu eux-mêmes tant en famille qu'à l'école
influence dans leurs pratiques scolaires quotidiennes. Cela a marqué
leur représentation sociale de la punition corporelle. Ainsi la plupart
des enseignants pensent que la punition corporelle, du fait qu'elle provoque la
douleur est plus efficace et amène l'élève à vite
se ressaisir. Là, nous pouvons dire que ce sont simplement les
perceptions que la société togolaise dans son ensemble a à
l'égard des PC que ces enseignants transposent à l'école
à travers leur pratique. Un enseignant nous confiait lors de nos
enquêtes : « Nous Africains, avons été
éduqués comme cela ».
Ensuite, on n'est pas encore parvenu à éradiquer
les PC dans l'éducation familiale. C'est donc une pratique courante que
de frapper son enfant à la maison. Alors comment convaincre les
enseignants à ne pas l'utiliser à l'école quand,
quotidiennement à la maison, c'est ce qu'ils utilisent ?
En ce qui concerne la théorie organisationnelle
(stratégique) de Crozier et Friedberg, nous sommes parvenu aux principes
suivants :
- Le comportement de l'acteur est actif. Même s'il est
toujours contraint et limité, il n'est jamais totalement limité;
- Ce comportement a toujours un sens. Cette rationalité
est liée, non à des objectifs clairs et explicite mais par
rapport aux opportunités (contexte) et par rapport aux comportements des
autres acteurs.
A la lumière de nos résultats, nous pouvons dire
que bien que les enseignants soient au courant de la réglementation
prohibant l'usage des PC et voient ainsi leur champ d'autorité
limité, ils trouvent des circonstances pour en faire usage. Et ce, en
fonction du comportement des élèves. C'est le cas, par exemple,
lorsqu'un élève bavarde et trouble la classe quand l'enseignant
fait son cours.
Etant donné que le comportement de l'enseignant a
toujours un sens, c'est-à-dire motivé par des raisons qu'il puise
dans sa représentation, les enseignants se fondent sur le fait que les
élèves (les enfants) sont paresseux, irrespectueux,
récalcitrants et têtus pour braver le règlement.
4.4- Les limites de l'étude
Cette étude comporte des limites que nous ne
chercherons pas à occulter ou à passer sous-silence. Celles-ci se
voient sur deux plans.
Sur le plan géographique, cette étude est
limitée seulement à l'inspection Lomé-Ouest. D'où
on ne peut prétendre la généraliser. Nous pensons qu'une
étude réalisée sur un espace plus vaste comme l'ensemble
du Togo avec un échantillon de plus grande taille permettra de relever
encore d'autres facteurs que nous n'avons pas pu mettre en lumière dans
cette étude.
Concernant les outils d'investigation
utilisés, nous nous sommes limité au questionnaire, ce qui a
priori n'est pas suffisant. Le questionnaire comporte beaucoup d'insuffisances
aussi. Il présente, par exemple, le désavantage de ne permettre
de creuser le phénomène d'étude. Pour Nda (2006 :
83), «la superficialité des réponses ne permet pas
l'analyse de certains processus ». Nous aurions, si nous
en avions les moyens nécessaires d'utiliser aussi l'observation et les
entretiens. Par ailleurs, une étude un peu plus longitudinale ayant
utilisée une approche de l'observation participante aboutira, selon
nous, à des résultats plus riches.
chapitre 5 les recommandations
Comment faire pour faire respecter cette réglementation
qui est supposée lutter contre la violence, du moins physique, en milieu
scolaire ? A-t-on bien fait de sortir seulement des circulaires prohibant
les punitions corporelles sans étudier au préalable les causes
profondes qui amènent les enseignants à user de ces
pratiques ? Nos recommandations vont à l'endroit des
autorités éducatives, des enseignants, des élèves
et des parents d'élèves.
5.1- Recommandations à l'endroit des
autorités éducatives
« La violence reste un problème courant
caché de la vue du public et presque totalement absent de l'ordre du
jour politique » nous alertaient les experts qui ont
préparé le document pour la 15ème
Réunion du Comité Africain d'Experts sur les Droits et le Bien-
être de L'Enfant (CAEDBE) le 15-19 Mars 2010 à Addis Abéba
(« La Violence contre les Enfants en Afrique Défis et
Priorités d'Action », 15-19 Mars 2010). Mais la violence
devait et doit constituer une priorité pour l'autorité
éducative.
Les autorités éducatives doivent
procéder d'abord à une recension des raisons qui poussent
à pratiquer les PC pour savoir comment orienter leurs campagnes de
sensibilisation. Puisqu'il ne s'agit pas de prohiber mais il va s'agir surtout
de convaincre les acteurs sur les raisons qui motivent cette prohibition. Lors
de nos enquêtes, un enseignant déclarait qu'il pratique les PC
parce que « nous, Africains, avons été
éduqués comme cela ».
Nous pensons, selon les propos que nous avons eu à
recueillir, que les enseignants ne sont pas suffisamment informés des
raisons qui motivent la suppression des PC en milieu scolaire. Un enseignant se
lamentait en ces termes : « cette interdiction rend les
élèves paresseux, ils n'apprennent plus, ils ne respectent plus
les maîtres, plus de discipline, ils viennent (au cours) quand ça
leur plaît ». Il revient donc aux autorités
éducatives de s'impliquer plus dans l'explication de cette mesure aux
enseignants.
Ensuite, le problème de la formation des enseignants
se trouve une fois encore posé. Toute réforme scolaire doit
impliquer les enseignants au premier chef puisqu'ils sont les premiers qui
décideront si oui ou non la réforme aura lieu. Selon
Amouzou-Glikpa (2009), les maîtres constituent :
« L'agent d'exécution et de
réalisation des politiques scolaires. [...] La tâche
confiée aux enseignants est celle de l'accomplissement ou de la
réalisation de la mission de socialisation. Les résultats de leur
action pédagogique devant correspondre aux objectifs poursuivis par
l'Etat, le mode de formation à donner aux enseignants est de la
même importance que celui des élèves» (Amouzou-Glikpa,
2009 :4)
En même temps qu'on prescrit dans la réforme
l'usage des méthodes actives, on assiste au fait que les enseignants ne
soient pas formés à cette méthode. Nous avions, dans nos
recherches, découvert une certaine relation entre l'usage de la
pédagogie traditionnelle et la pratique des PC. Cela voudra dire qu'on
doit se soucier beaucoup plus de la formation des enseignants pour les amener
à une meilleure compréhension de la législation scolaire.
Dans nos investigations, 55% seulement des enseignants ont affirmé
qu'ils ont reçu une formation professionnelle. Et cette formation se
résume seulement à la formation initiale.
Enfin, le problème des effectifs pléthoriques
n'est pas sans impact sur l'usage des punitions corporelles. Nous en voulons
pour preuve des enseignants qui disaient que dans une classe où il ya
plus de cent (100) élèves où cinquante (50) sont en train
de bavarder, vingt (20) sont en train de dormir dans leur coin et seulement un
dixième (1/10) suit le cours, comment ne pas utiliser le bâton. Il
suffit de donner quelques coups à cinq (5) élèves pour que
les autres se réveillent. Un enseignant lors de nos investigations nous
confiait : « dans une classe où il y a du bruit, il
suffit de frapper quelques élèves pour que les autres se
taisent ». Et cette phrase s'inscrit dans l'impossibilité de
l'enseignant à imposer le silence dans une classe de plus de 100
élèves. C'est dans cette optique que la réduction des
effectifs par classe pourra contribuer à éviter à certains
endroits l'usage des PC. Pour Sarr (2010), la surcharge des classes avec des
effectifs pléthoriques amène souvent les enseignants à
recourir aux châtiments corporels pour discipliner les
élèves et à faire face à la violence entre
élèves. Au Sénégal, précise-t-il, les
enseignants avancent que c'est le seul moyen de maintenir la discipline dans
des classes pléthoriques et que c'est un moyen qui a fait ses preuves.
C'est ce qui ressort de l'enquête menée dans les écoles au
Sénégal. C'est que pendant longtemps en Afrique, l'on a mis
l'accent sur la dimension quantitative (nombre d'enfants inscrits)
plutôt que sur la qualité.
5.2- Recommandations à l'endroit des enseignants
La seconde partie de nos recommandations s'adresse aux
enseignants. L'enseignement, comme nous l'a confirmé certains directeurs
que nous avons rencontré, est un métier sacerdotal. L'enseignant
doit posséder certaines qualités pour pouvoir bien faire son
métier.
En ce qui concerne les pratiques punitives, il est certes
difficile de pouvoir conduire une classe de plus de cent (100)
élèves sans souvent porter des coups pour servir d'exemple aux
autres. Mais, étant donné que la loi prohibe cette pratique, il
est de bon ton d'obtempérer. Bien que les enseignants soient
imbibés dans cette éducation traditionnelle dans laquelle
transparaît le système punitif autoritariste, ils doivent faire
preuve d'adaptation. Il existe une gamme variée de punitions et
l'enseignant a à choisir entre celles qui sont autorisées au
détriment de celles prohibées.
Les enseignants devront comprendre qu'il ya un lien
étroit entre les PC et la violence. Etant donné que la violence
scolaire constitue de nos jours un frein à l'épanouissement
affectif des élèves, elle se doit d'être contrée et
évitée et ce, d'abord par les enseignants. On doit
procéder à une « prophylaxie
intellectuelle », selon les mots de Bakali (1997). La punition
ne résout pas les vrais problèmes. Les conceptions selon
lesquelles les punitions corporelles sont les plus efficaces dans la situation
d'enseignement-apprentissage sont « révolues ».
Selon les investigations menées par Bakali (idem :
60) dans les CEG du Golfe dans le cadre de son mémoire de
Maîtrise, 35% des enseignants ne cherchent pas à comprendre les
élèves, 20% les menacent, 15% ne respectent pas les
élèves et les ridiculisent, 13% les dédaignent. Ceci
entraîne un manque de communication et agit négativement sur les
activités pédagogiques. Pour rétablir un bon climat
propice au bon déroulement des activités pédagogiques, il
faut rétablir la communication entre les deux protagonistes.
L'enseignant dans ces conditions devra abandonner les
méthodes brutales, l'autorité excessive pour devenir un guide, un
conseiller et un animateur. L'enseignant devra donc s'habituer, ou mieux
s'adapter à sa tâche, celle d'aimer les élèves pour
en faire des hommes, des êtres épanouis. L'article 29 de la CIDE
ne dit-elle pas que :
« l'éducation doit viser
à épanouir la personnalité de l'enfant, à
inculquer à l'enfant le respect des droits de l'homme et des
libertés fondamentales, à inculquer à l'enfant le respect
de sa culture d'origine et d'adoption, à le préparer à
assumer ses responsabilités dans une société libre, dans
un esprit de compréhension, de paix, de tolérance,
d'égalité et d'amitié entre tous, à inculquer le
respect du milieu naturel » ?
La communication est l'élément le plus important
dans le processus d'enseignement-apprentissage puisqu'il s'agit d'un processus
interactif. « Il apparaît évident que les
communications constituent un chaînon essentiel des relations humaines
dans l'école [...]. (Elles) constitue(nt) un élément non
négligeable de paix scolaire » (Delaire, 1986 :
75).
Enfin, il y a certaines règles
élémentaires que nous nous proposons de rappeler à travers
les lignes suivantes :
- Dans une situation d'apprentissage, l'excès ou
l'insuffisance de punitions sont des erreurs pédagogiques ;
- Si on doit punir, il faut éviter le châtiment
corporel et que la punition soit proportionnelle à la gravité de
la faute commise ;
- Les punitions non corporelles doivent être
manipulées avec beaucoup de prudence
- La punition doit être attribuée avec
impartialité et justice ;
- Il faut punir avec calme et non dans la colère et
l'agitation ;
- On pourrait négocier le type de punition avec
l'élève ce qui impliquera davantage d'impliquer de façon
constructive l'enfant dans le processus punitif ;
- Si nécessaire, « il faut éduquer
autant que possible de façon que la punition soit inutile. S'il le faut,
punir rarement et comme à regret» (Weyergans, cité par
Mensa K., 1997 : 201).
5.3- Recommandations à l'endroit des
élèves
Du côté des élèves, ils doivent
comprendre que l'obéissance est la première règle qu'ils
doivent observer. Elle est même énoncée dans les dix
commandements de Dieu : « Honore ton père et ta
mère, afin que tes jours se prolongent sur le sol que Jéhovah ton
Dieu te donne » (Bible, Exode 20 : 12).
L'élève devra faire tout (apprendre ses leçons, respecter
l'enseignant, connaître et observer le règlement intérieur
de son établissement) pour ne pas énerver l'enseignant.
Les élèves devront comprendre qu'il n'y a de
droit que par l'accomplissement des devoirs. Et leur devoir, c'est de suivre
l'enseignant, de lui témoigner de l'égard et du respect,
d'observer le règlement intérieur.
5.4- Recommandations à l'endroit des parents
d'élèves
Enfin, les parents devront jouer le rôle
d'éducation de base qui leur est dévolu et confié. Ils
doivent témoigner, à l'égard de leurs enfants, de
l'affection. L'étude menée par Bakali (1997) dans le cadre de son
mémoire de Maîtrise a confirmé le fait que les
élèves placés dans un foyer instable sont plus enclins
à manifester des comportements répréhensibles, ce qui
suscite la colère des enseignants qui n'hésitent pas à
utiliser les punitions corporelles. Cela voudra dire que l'affection et l'amour
sont des ingrédients nécessaires au bon développement de
l'enfant
Les parents, par la combinaison de l'affection et de la
rigueur, pourront amener les enfants à comprendre qu'on les punit parce
qu'ils n'ont pas obéi et qu'en obéissant à son
supérieur, ils ne seront pas puni.
CONCLUSION
Les problèmes de la violence en éducation et des
conflits scolaires sont devenus si récurrents qu'il devient aujourd'hui
plus qu'important d'y réfléchir afin de saisir la dynamique de
leur production. En outre, nul ne doutera du fait que la fluidité de la
communication entre enseignants et élèves reste le premier
ingrédient dans la formation d'un citoyen « sain,
équilibré et épanoui dans toutes les
dimensions ». Ainsi, les conflits scolaires sapent la
communication et influencent négativement la qualité de
l'éducation. C'est dans ce cadre que nous avons entrepris une
étude qui se penchait sur une pratique perçue comme étant
un vecteur de la violence en éducation et des conflits scolaires : les
punitions corporelles.
Notre recherche avait pour objectif de ressortir les
facteurs qui amènent les enseignants à user des punitions
corporelles à l'école bien que ce soit explicitement interdit
dans la législation scolaire. Elle a été menée dans
l'inspection pédagogique Lomé-Ouest, spécifiquement dans
quatre établissements scolaires.
Pour atteindre notre objectif, nous avons administré
un questionnaire à un échantillon de soixante (60) enseignants.
Les données recueillies ont été dépouillées
et traitées à l'aide des logiciels Epidata et SPSS.
Après l'analyse, les résultats auxquels
nous sommes parvenus montrent que :
- La plupart des enseignants qui utilisent les PC pensent que
les punitions aident l'élève à fournir plus d'effort
puisque « nul n'aime la douleur ».
- La plupart des enseignants pensent que les PC sont les plus
à même d'aider l'enseignant à maîtriser la classe
puisque celles-ci disciplinent l'élève.
- La majorité des enseignants se représentent
les PC comme étant le remède le plus efficace à la
paresse. Pour eux celles-ci amènent l'élève à mieux
travailler.
- La grande majorité des enseignants usant les PC
utilisent la méthode pédagogique traditionnelle.
Les facteurs que nous avons relevés au
début de l'étude via nos hypothèses sont réellement
celles qui expliquent cette bravade de la règlementation. Notre
étude a bien ainsi confirmé nos hypothèses de
départ. Mais nous estimons que ce ne sont pas là tous les
facteurs.
Dans ce cadre, d'autres études toujours dans ce
domaine pourront amener à déceler d'autres facteurs. On pourra
ainsi mener une étude sur le lien entre les conditions
socioéconomiques des enseignants et l'usage des punitions corporelles,
sur l'histoire personnelle des enseignants et l'usage des PC. Ces études
pourront permettre de mettre en lumière d'autres facteurs qui n'ont pu
être découverts dans cette étude. On peut, en outre,
conduire des études systématiques et transdisciplinaires sur
l'historique des punitions dans la société togolaise,
l'inventaire des punitions utilisées dans la société
togolaise, l'impact des punitions corporelles sur le comportement à long
terme de l'enfant, le lien entre l'usage des punitions et la violence sociale,
etc. Toutes ces études, menées, seront d'une grande contribution
pour la compréhension du domaine des punitions, un domaine mal
maîtrisé, truffé de préjugés et de non-dits,
un domaine tabou.
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SILLAMY, Norbert, 1983, Dictionnaire usuel de la
psychologie, Paris, Bordas.
SKINNER, B. F., 1968, La révolution scientifique de
l'enseignement, Bruxelles, Edition Charles Dessart.
TCHAMENON, Yawovi, 1984, Les déperditions scolaires
à l'école primaire au Togo de 1975 à 1984 : cas de la
préfecture du Golfe, mémoire pour l'obtention du diplôme de
l'ENA, Lomé, UL.
TOULABOR, Comi-M.1982, « La violence à
l'école : le cas d'un village au Togo », in
www.oldtapir.com
II- Sources électronique
- AA, « Des enseignants d'une école
privée de Djidjolé ont donné plus de 60 coups de
bâton à des élèves d'une classe »,
http://www.icilome.com,
consulté le 07/08/2010.
- Déthiouckh Samba, 2009, « La classe
coopérative. Une alternative aux châtiments corporels »,
Bulletin n° 21, Cellule ASEM de Rufisque,
http://www.fimem-freinet.org/coope-space-fr-fr/mouvements/afrique-camem/senegal/documents/violences/alrnative-aux-chatiments-corporels.
- AA, 2001, « Châtiments corporels dans les
pays relevant du bureau régional de l'Unicef pour l'Afrique de
l'ouest », UNICEF WCARO, 15/08/2010,
http://www.crin.org/docs/resources/treaties/crc.28/UNICEF-WCARO.pdf.
- Saliou Sarr, 2010, Les châtiments corporels
à l'école, in
www.eip-cifedhop.org/eipafrique/senegal/senegal.html
- Toulabor C.-M.,
www.oldtapir.com
-
http://web.me.com/jacornet/Site_1/Page_11.html.,
consulté le 3 févr. 2011.
TABLE DES MATIERES
CITATION............................................................................................
... i
DEDICACE..........................................................................................
... ii
AVANT-PROPOS.....................................................................................
iii
LISTE DES
SIGLES..............................................................................
... v
LISTE DES
TABLEAUX...........................................................................
.. vi
RESUME.................................................................................................
vii
INTRODUCTION
GENERALE...................................................................
...1
PREMIERE PARTIE : CADRE
THEOERIQUE...................................................6
CHAPITRE 1-
PROBLEMATIQUE...................................................................7
1.1- Justification du choix du
sujet................................................................. 7
1.1.1- Motivation et intérêt du sujet
.......................................................... .....7
1.1.2- Pertinence
scientifique.........................................................................8
1.1.3- Pertinence
sociale.............................................................................
.9
1.2- Revue critique de la
littérature.........................................................
.......11
1.2.1- Les travaux centrés sur la défense de
l'usage des punitions en éducation
scolaire...........................................................................
...............11
1.2.2- Les travaux centrés sur la prohibition des
punitions corporelles à l'école......15
1.3- Position et définition du
problème............................................................20
1.4- Les objectifs de
recherche......................................................
............29
1.4.1- Objectif général
.............................................
................................29
1.4.2- Objectifs opérationnels.........................
.............................................29
1.5- L'hypothèses, les variables et
indicateurs.................................................29
1.5.1-
L'hypothèse................................................................
...... .............29
1.5.1.1- Hypothèse
principale.......................................................................30
1.5.1.2- Hypothèses
secondaires...............................................................30
1.5.1.3- Explication des
hypothèses...............................................................30
1.5.2- Définition des variables et
indicateurs.................................... ............31
1.5.2.1- Les variables
indépendantes.........................................................
...32
1.5.2.2- La variable
dépendante...................................................................33
1.6- La
conceptualisation............................................................
.............34
1.6.1-
Punition...........................................................................
............35
1.6.1.1- Punitions
corporelles.......................................................................36
1.6.1.2- Punitions
symboliques......................................................................36
1.6.2-
Discipline........................................................................
...........37
1.6.3- La
prohibition...................................................................................39
1.6.4- Le système
scolaire.........................................................................39
1.7- Les théories
d'analyse............................................................ ..
..........39
1.7.1- La théorie
systémique.........................................................
............39
1.7.1- L'analyse
stratégique.........................................................
.............40
Chapitre 2-
METHODOLOGIE....................................................................43
2.1- La recherche
documentaire..................................................................
43
2.2- Les visites de
terrain...........................................................................
43
2.3- L'univers de la recherche et
l'échantillonnage............................................44
2.4- L'instrument d'investigation (le
questionnaire)............................................45
2.5- Le déroulement de
l'enquête......................................................
...........46
2.5.1- La phase
préparatoire........................................................................46
2.5.2- La phase de l'enquête proprement
dite..................................................46
2.6- Méthode d'analyse des
résultats................................................... ..
......47
2.7- Le dépouillement du
questionnaire......................................................... 47
2.8- Les difficultés
rencontrées................................................... ......
...........47
Chapitre 3- PRESENTATION DU MILIEU
D'ETUDE.................................... 49
3.1- Présentation des lieux de la
recherche.......................................... ...........49
3.1.1- L'EPP
Amadahomé...........................................................................
49
3.2.2- L'EPP Camp
Adidogomé.................................
...................................50
3.1.3- L'EPP
Soviépé.................................................................................
50
3.1.4- L'EPP
Wonyomé...............................................................................50
3.2- Les écoles primaires et leur environnement
institutionnel.............. ...............51
DEUXIEME PARTIE : LES
RESULTATS........................................................55
CHAPITRE 4- PRESENTATION, ANALYSE ET
INTERPRETATION DES
RESULTATS........................................................................56
4.1- Présentation et commentaire des
résultats................................................56
4.1.1- Caractéristiques
sociodémographiques..................................................56
4.1.2- Présentation des données relatives aux
perceptions et pratiques ...............57
4.2- Interprétation des
résultats.....................................................................64
4.3- Vérification de
l'hypothèse.....................................................................68
4.4- Les limites de l'étude
............................................................
............70
Chapitre 5- LES
RECOMMANDATIONS.....................................................72
5.1- Recommandations à l'endroit des autorités
éducatives................................72
5.2- Recommandations à l'endroit des
enseignants..........................................73
5.3- Recommandations à l'endroit des
élèves.................................................75
5.4- Recommandations à l'endroit des parents
d'élèves....................................76
CONCLUSION
.........................................................................................77
BIBLIOGRAPHIE ET SOURCES
ELECTRONIQUES.......................................78
I-
Bibliographie..........................................................................................81
II- Sources
électroniques.............................................................................84
TABLE DES
MATIERES.............................................................................85
ANNEXE..................................................................................................
I
ANNEXE
QUESTIONNAIRE
Madame, Monsieur, dans le cadre de la réalisation de
notre mémoire pour l'obtention du diplôme de maitrise en
sociologie, nous souhaiterions vous poser quelques questions. Nous vous
assurons que vos réponses resteront strictement confidentielles.
Retenez qu'il n'y a pas de mauvaises ou de bonnes
réponses. C'est ce que vous savez, ce que vous pensez ou ce que vous
faites qui nous intéresse. Nous vous prions de bien vouloir
répondre à toutes les questions qui vous seront soumises car
toutes vos réponses sont importantes pour nous.
Pour ce faire, encadrer le numéro qui correspond
à ce que vous pensez ou à ce que vous faites.
Merci d'avance pour votre disponibilité et votre
attention.
SECTION I- CARACTERISTIQUES DE L'ENQUETE
N° D'ORDRE
|
QUESTIONS ET FILTRES
|
REPONSES ET CODES
|
PASSEZ A
|
Q101
|
Sexe
|
- Masculin...................................1
- Féminin............................... .....2
|
|
Q102
|
Age (mettez seulement le nombre d'années)
|
............ ans
|
|
Q103
|
Niveau d'instruction
|
- Primaire....................................1
- Collège......................... ... .........2
- Lycée........................................3
- Etudes universitaires....................4
|
|
Q104
|
Formation professionnelle
|
- ENI..............................................1
- ENS.............................................2
- INSE.............................................3
- Aucune.........................................4
- Autres (à
préciser)...........................5
|
|
SECTION II- TYPES DE PUNITIONS PRATIQUEES
N° D'ORDRE
|
QUESTIONS ET FILTRES
|
REPONSES ET CODES
|
PASSEZ A
|
Q201
|
Vous arrive-t-il de punir vos élèves ?
|
- Oui.............................................1
- Non........................................ 2
|
Q301
|
Q202
|
Dans quelle circonstance les punissez-vous ?
Quand :
|
- Ils travaillent mal.......................... 1
- Ils ne vous respectent pas.................2
- Ils n'apprennent pas leurs leçons.......3
- Vous venez à l'école avec une
mauvaise humeur........................ ...4
- Vous avez des problèmes familiaux....5
- Ils sèchent les cours........................6
- Ils bavardent en classe................... 7
- Ils sont récalcitrants et têtus........... ..8
- Vous voulez leur faire
comprendre le cours........................ 9
- Autres (à préciser)............... .......
..10
|
|
Q203
|
Quelles sont les punitions que vous utilisez ?
|
- Les fessées......................... 1
- Les gifles............................ 2
- Mettre à genou..................... 3
- Tirer les oreilles..................... 4
- Travail supplémentaire............ 5
- Des points en moins............ 6
- Mauvaises notes.................... 7
- Envoi chez le directeur............ 8
- Retenue après la classe............ 9
- Retenue pendant les
récréations.......................... 10
- Ne plus s'occuper de l'élève..... 11
- Le faire huer par ses
camarades........................ 12
- Donner un zéro..................... 13
- Insulter................................ 14
- Renvoi de la classe................ 15
- Faire appeler les parents......... 16
- Donner un avertissement......... 17
- Maudire l'élève...................... 18
- Frapper dans les mains..............19
- Gronder...................................20
- Autres (à préciser)............... ....21
|
|
Q204
|
Dans quelle typologie les intégrez-vous ?
|
- Punitions corporelles......................1
- Punitions symboliques....................2
|
|
Q205
|
Quelle importance revêtent pour vous ces
punitions ?
|
|
|
III- CONNAISSANCE ET INFORMATION
N° D'ORDRE
|
QUESTIONS ET FILTRES
|
REPONSES ET CODES
|
PASSEZ A
|
Q301
|
Que signifient pour vous les punitions corporelles ?
|
|
|
Q302
|
Savez-vous que les punitions corporelles sont interdites à
l'école ?
|
- Oui
- Non
|
Q401
|
Q303
|
Si oui, pourquoi continuez-vous à les utiliser ?
|
|
|
IV- PERCEPTIONS ET CROYANCES
N° D'ORDRE
|
QUESTIONS ET FILTRES
|
REPONSES ET CODES
|
PASSEZ A
|
Q401
|
Beaucoup de gens pensent que la punition corporelle
développe le goût de l'effort parce qu'il touche
l'élève. Etes-vous de cet avis ?
|
- Oui..........................................1
- Non........................................ 2
|
|
Q402
|
Expliquez-vous
|
|
|
Q403
|
Pour nombre de gens, l'élève a plus peur des
punitions corporelles, donc travaille mieux. Pensez-vous qu'ils ont
raison ?
|
- Oui.......................................1
- Non.......................................2
|
|
Q404
|
Pourquoi ?
|
|
|
Q405
|
Etes-vous d'accord que la punition corporelle développe la
bonne conduite ?
|
- Oui.......................................1
- Non.......................................2
|
|
Q406
|
Expliquez-vous
|
|
|
SECTION V- LES METHODES PEDAGOGIQUES
UTILISEES
N° D'ORDRE
|
QUESTIONS ET FILTRES
|
REPONSES ET CODES
|
PASSEZ A
|
Q501
|
Communiquez-vous les objectifs des cours aux
élèves ?
|
- Oui.....................................1
- Non....................................2
|
|
Q502
|
Utilisez-vous des matériels concrets pour faire le
cours ?
|
- Oui.....................................1
- Non....................................2
|
|
Merci pour votre
coopération !