Contribution a la relance de la coopération décentralisée entre Rilleux-la-Pape et Natitingou: dynamiques et perspectives.( Télécharger le fichier original )par Hospice Bienvenu HOUNYOTON Université Lumière Lyon 2 - Master 2 Parcours Professionnel d'Economie Sociale et Solidaire 2008 |
Paragraphe 2- Les enjeux de la coopération décentralisée pour les collectivités françaises.Dans un contexte en pleine mutation caractérisé par la libre circulation des capitaux et des marchandises et par l'augmentation croissante des disparités entre les pays, la coopération décentralisée apparaît pour les collectivités territoriales françaises, comme un moyen de se démarquer de la politique classique de coopération et de proposer leur propre vision du développement. Les relations des collectivités territoriales avec leurs homologues étrangères, est un élément essentiel de cette nouvelle vision du développement notamment de leur politique internationale. La coopération décentralisée participe à ce combat des collectivités pour un développement plus juste, humain et témoigne de leur engagement en faveur de la solidarité internationale, un principe fondamental de l'économie sociale et solidaire. Lorsqu'on analyse l'engagement des collectivités en faveur de la solidarité internationale, on se rend compte qu'elles proposent contrairement aux modèles classiques de développement cherchant à accroître les inégalités sociales, une nouvelle vision du développement qui est la voie de la solidarité au service d'un développement plus juste et respectueux de la dignité humaine. Cette nouvelle forme de développement prônée par les collectivités territoriales du Nord et plus particulièrement françaises à un double appel : une nouvelle conscience mondiale et l'établissement d'un ordre international basé sur la solidarité. Elles estiment que cette dernière est une nouvelle solution aux problèmes de sous-développement dans les pays du Sud. Pour beaucoup d'élus engagés en faveur de la coopération décentralisée, les populations du Sud ne parviendront à améliorer considérablement leur sort qu'à condition que s'instaurent des relations de partenariat entre les collectivités du sud et les collectivités du Nord. Ces relations doivent être des relations de territoire à territoire et devront être présidées par l'esprit de partage, de franchise, d'amitié et d'amour du prochain. Celles-ci seront animées par une solidarité efficace mise en oeuvre sous formes de jumelage, de partenariat-jumelage ou encore de coopération décentralisée. C'est l'objectif de la mobilisation des collectivités territoriales françaises pour promouvoir la coopération décentralisée. Pour ces élus, la légitimité de la coopération décentralisée découle de la condition infra-humaine à laquelle sont réduites les populations du Sud et des différentes politiques aberrantes de coopération qui sont à l'origine des désastres humains, sociaux et économiques observés dans les collectivités du Sud. Pour eux, la nécessité d'agir pour mettre fin à cette situation s'impose et devient une aspiration partagée. Ils proposent contre ce système, une nouvelle politique d'aide au développement qui se veut l'anti-thèse de la coopération classique en privilégiant les partenariats pour soutenir un développement plus authentique et humain dans ces territoires du Sud. Ainsi don, les collectivités locales du Nord, en s'engageant en faveur de la solidarité plaident par cette nouvelle forme d'intervention qui n'est rien d'autre l'expression de la solidarité internationale, pour un développement plus humain en suscitant les dynamiques de l'économie sociale et solidaire. Elles élaborent pour parvenir à cette fin des stratégies d'intervention, des actions, des programmes et des projets qui tentent de répondre aux problématiques de développement notamment en Afrique subsaharienne, rendant ainsi accessible à tous et universel le développement. D'où le statut d'acteurs privilégiés incontournables qu'elles deviendront à partir des années 80. La coopération décentralisée renforce leur statut d'acteurs incontournable et revêt du coup un enjeu important pour elles. Le premier enjeu de la coopération décentralisée pour les collectivités territoriales du Nord est qu'elle ouvre à la solidarité basée sur des rapports d'amitié, de partage d'expériences et une meilleure connaissance des hommes mais aussi des cultures. Pour le sénat Français, la coopération décentralisée est un moyen formidable de « rapprochement des hommes », « une école de solidarité » et un « espace de rencontre interculturelle22(*) ». La coopération décentralisée favorise avant tout la multiplication des échanges entre les personnes physiques ou morales sur les territoires respectifs des partenaires. Ces échanges concernent en majorité les institutions à caractère social et culturel comme les écoles, les groupes artistiques, les associations et les chantiers de jeunes. Le coup le plus intéressant de cet engagement des collectivités en faveur de la solidarité internationale, sera la transformation des rôles des États notamment de leurs prérogatives. Avec l'internationalisation de l'action extérieure des collectivités locales, les États tout en étant les principaux sujets de droit international, donc d'acteurs traditionnels, vont céder du terrain aux structures infra-étatiques que sont les collectivités territoriales, qui joueront désormais un rôle essentiel dans la politique internationale d'aide au développement. Les États deviennent de simples réceptacles et sont contraints à orienter, répartir, distribuer et limiter leurs domaines d'intervention, changeant au passage leurs fonctions et structures. Comme l'écrivent Adda Bekkouche et Bertrand Gallet, c'est « la relation entre le centre et la périphérie qui s'en trouve bouleversée23(*) ». On observe précisent nos deux auteurs qu'un mode de fonctionnement horizontal se met en place entre agents de pays et régions différentes, prenant alors le pas sur le mode classique de fonctionnement pyramidal. Ainsi, les collectivités territoires en tout état de cause, se transformeront-elles en de véritables agents des relations internationales, définissant leurs activités en fonction de leurs centres d'intérêt et des régions du monde qui semblent les préoccuper. Par cette imposition au plan international, les collectivités territoriales déterminent les nouvelles problématiques de développement à l'échelle planétaire et notamment dans les pays du Sud. D'où tout l'enjeu que revêt aujourd'hui pour cette dernière la coopération décentralisée. Elle permet en gros à ces dernières d'acquérir un statut d'acteurs des relations internationales, d'acteurs privilégiés de développement et assurer le rayonnement de leur territoire. La coopération décentralisée permet aux collectivités territoriales du Nord d'afficher une politique étrangère différente de la politique classique de développement qui vise l'amélioration des conditions de vie des populations et le respect de leur dignité. C'est une marque de soutien au développement à travers l'action internationale que certaines collectivités du Nord cherchent à avoir. Les collectivités territoriales françaises, dans leur majorité vont se lancer dans la course à la recherche de partenaires au Sud. La commune de Rillieux-la-Pape n'a pas échappé à ce mouvement. Cet engagement en faveur de l'éducation au développement dans les pays, a emporté et emballé au milieu des années 90, la municipalité de gauche arrivée au pouvoir suite aux élections locales dans cette banlieue lyonnaise. Très tôt, l'équipe municipale va concrétiser sa volonté de s'ouvrir à l'internationale par l'intermédiaire du partenariat-jumelage qu'elle a conclu avec l'ex-Circonscription Urbaine de Natitingou. C'est justement de ce partenariat qu'il sera question d'aborder dans la seconde partie de cette étude consacrée à ses origines, son évolution et les grandes réalisations. DEUXIEME PARTIE : LE PARTENARIAT RILLIEUX LA PAPE - NATITINGOU : ORIGINES, EVOLUTION ET MISE EN OEUVRE Cette deuxième partie s'attaque de façon proprement dite à notre étude. Organisée en deux chapitres, elle a pour but de retracer la genèse, les tenants et aboutissants de cette initiative (Chapitre 1) et souligner son évolution dans le temps à travers les actions développées sur le terrain par les deux partenaires (Chapitre2) * 22 Colloque du Sénat 1996. * 23 Bekkouche .A. et Gallet., « La coopération décentralisée : l'émergence des collectivités locales et autorités territoriales sur la scène internationale », AFRI, 2001, Volume II, p 383. |
|