Paragraphe 2-
Les moyens institutionnels et financiers
Ce paragraphe s'évertue à examiner les moyens
institutionnels et financiers déployés par les deux
collectivités partenaires pour la mise en oeuvre de leur
partenariat-coopération décentralisée.
S'agissant des moyens institutionnels, il faut signaler que
les deux villes ont convenu de la création d'une structure regroupant
des personnes qui s'occupent de la mise en oeuvre de la coopération. Il
s'agit des comités de jumelages dont le but reste avant tout d'oeuvrer
au rapprochement des peuples grâce à une promotion et à une
pérennisation des échanges socio-culturels et sportifs. Les
comités de jumelages sont des associations de loi 1901 qui renforcent et
développent le partenariat entre les deux communes. Les comités
de jumelages sont les interlocuteurs privilégiés de toutes les
actions en matière de coopération. Ils sont sensés
faciliter la mise en oeuvre des accords de jumelages ou des conventions de
coopération décentralisée. Ce sont des associations
regroupant des personnes motivées, engagées en faveur des
actions de développement et de solidarité. Ils regroupent dans le
cas des villes du nord des personnes préoccupées par
l'amélioration des conditions de vie des populations et par voie de
conséquence du développement local de leur commune au Sud.
Mis en place en 1998, le comité de jumelage de Rillieux
s'est transformé en une association spécialisée en
coopération décentralisée dont le but est de favoriser le
rapprochement entre territoires et peuples. Il favorise également la
compréhension et l'ouverture des cultures et savoir-faire
différents, sources d'enrichissement réciproque et d'innovation.
Le comité de jumelage est un partenaire de longue date qui a permis de
faire évoluer les actions de coopération en Natitingou et
Rillieux-la-Pape. C'est grâce au comité de jumelage, que les
actions ont été menées sur le terrain à Natitingou
même si la ligne générale est celle de la commune.
Dirigé par un conseil d'administration et un bureau composé de
personnes ressources notamment d'anciens fonctionnaires des
collectivités territoriales, d'élus, de fonctionnaires et
d'habitants sensibles aux enjeux de solidarité et de
développement au Sud, le comité de Rillieux a été
très efficace pendant la période de gloire de cette
coopération. Il est à l'origine du Projet Natitingou Ville
Propre, de la collecte sélective des piles, de l'équipement des
dispensaires de Natitingou de destructeurs d'aiguilles, de l'achat de
l'incinérateur, de la construction de poteaux de basket à la
maison des jeunes et de loisirs de Natitingou sans oublier la dotation de
livres de la bibliothèque de la commune. Pour le projet Natitingou
Ville Propre, le comité a réussi à obtenir du grand Lyon
une subvention annuelle de 10.000 Euros. Elle sollicite également de la
part d'autres partenaires comme Cités Unies France, des subventions
afin de réaliser les projets qui tiennent aux deux collectivités
engagées dans cette coopération. C'est pour cela d'ailleurs que
l'association Comité de Jumelage Rillieux-la-Pape, sera
désignée comme maître d'oeuvre des actions de la commune
à Natitingou. Elle se trouve en amont et en aval de toute action sur le
terrain et son implication dans la mise en oeuvre est très grande et
utile.
L'association Comité de Jumelage Rillieux-La- Pape,
organise les visites officielles dans les deux pays, conçoit avec les
autorités municipales les programmes de séjour et d'accueil des
membres des délégations. Elle travaille dans un souci
d'égalité, de réciprocité et de confiances
mutuelles. C'est encore l'association qui joue évalue les actions
menées sur le terrain et au besoin recadre ou réoriente les
actions communes. C'est un pion essentiel dans la mise en oeuvre de la
coopération entre les deux villes et lorsqu'il s'est mis en
difficulté, le partenariat a manqué de dynamisme.
Du côté de Natitingou, l'existence et le
rôle du comité de jumelage paraît ambigu. En ce qui concerne
l'existence de cette structure, nos investigations montrent qu'il y avait bien
un comité de jumelage. D'ailleurs la convention 2005 dans son article 11
fait référence à l'existence d'une telle structure. Son
rôle est d'aider à la mise en oeuvre de la coopération
notamment à partir de la présentation de projets qui s'appuient
sur le plan de développement local de Natitingou, d'un plan de
financement traduisant son implication. Nos investigations ont
révélé que ce comité n'a pas été
fonctionnel comme on l'aurait souhaité. Cette situation a mis en
difficulté et en situation d'interlocuteur unique les partenaires de
Rillieux-la-Pape notamment le comite de jumelage.
De plus, il semble que le fonctionnement de ce comité
n'est pas le même que celui de Rillieux-la-Pape. Si à
Rillieux-la-Pape, le comité de jumelage est une association de droit
commun, librement gouverné avec des dirigeants élus au sein des
membres, cela n'est pas le cas à Natitingou, où selon nos
sources, le Président de cette association est souvent nommé.
C'est le cas par exemple de sieur Éric Potikamou, ex président du
comité de jumelage nommé par le Maire Biaou. Cette situation
n'est pas de nature à garantir une relation franche basée sur les
mêmes règles de fonctionnement. Nos investigations pour savoir
s'il y a un comité de jumelage à Natitingou, nous
révèlent aussi que de façon opérationnelle, cette
structure est absente dans la mise en oeuvre des actions de la
coopération. Cette situation serait à la base des
difficultés que va rencontrer la coopération entre les deux
collectivités. Elle a ouvert les voies à la dérive dans la
mise en oeuvre des actions de partenariat sur le terrain.
Sur le plan organisationnel interne, les deux
collectivités ont travaillé à mettre en place même
si cela n'est pas toujours cohérent des services en charge de la
coopération décentralisée. La coopération et
surtout son suivi feront l'objet des compétences dévolues
à ces services. Au niveau de Rillieux-la-Pape, cette compétence
est assurée par la direction culture et enseignement notamment par le
service culturel. Ce service joue en quelque sorte le rôle de direction
des relations internationales dans la mesure où c'est elle coordonne les
actions de la coopération décentralisée et de
solidarité internationale de la commune. La personne chargée de
la gestion et du suivi des relations de coopération et solidarité
internationale de la commune au sein de ce service est Madame Marie-Noëlle
Fargeot, notre tutrice de stage et adjointe de la grande direction culture et
enseignement. C'est cette personne qui accomplit toute seule depuis plus de
deux ans, l'immense tâche de coordination des actions de
coopération décentralisée et de l'association
comité de jumelage de la commune. C'est encore elle qui suit les actions
sur le terrain, recherche les financements, rédige les conventions entre
les deux communes et répond aux appels à projets du
Ministère des Affaires Étrangères et autres
ministères. Nous trouvons que cette charge est trop immense pour une
seule personne qui doit s'occuper des autres questions comme celle de la
culture, de l'enseignement sans oublier les travaux au conseil municipal.
À Natitingou, les relations de la commune avec les
partenaires étrangers dépendent de la commission des affaires
socio-culturelles et de la coopération décentralisée.
Cette commission est comme une sorte de la direction des relations et de la
solidarité internationale qui a pour mission de conseiller le Maire par
rapport aux actions développement nécessitant l'apport ou le
soutien des partenaires de la commune. De façon concrète, un
service est crée pour s'occuper de la question depuis l'adoption du
nouvel organigramme de la commune. Il s'agit du service de la planification, du
développement et de la coopération décentralisée,
qui coordonne, supervise et élabore, les projets de coopération
avec les partenaires extérieurs de la ville. Ce service est
dirigé par Serge Béré Kassa, un cadre compétent
mais dont les moyens d'action sont limités. Comme à
Rillieux-la-Pape, ce service qui élabore les programmes de
planification, de développement de la commune et supervise les actions
de coopération décentralisée fonctionne malheureusement
avec une seule personne. Si à Rillieux-la-Pape, l'efficacité d'un
tel service n'est pas mise en doute, à Natitingou le problème de
l'efficacité des actions d'un tel service se pose avec les multiples
tâches de la personne en charge de la coopération.
En ce qui concerne les moyens institutionnels au niveau
national, rappelons qu'il existe au Bénin certaines structures voire
organismes qui interviennent dans la coopération
décentralisée. Ces structures ou organismes jouent en
général le rôle de partenaire technique, administratif ou
de conseiller près des communes béninoises mais aussi des
collectivités étrangères. Nous pouvons citer entre autres
le Ministère de la décentralisation et des collectivités
locales (MDCL), ex Ministère de la Décentralisation, de la
Gouvernance Locale, de l'Administration et de l'Aménagement du
Territoire (MDGAAT), du Ministère des Finances et de l'Économie
(MFE), du Ministère des Affaires Étrangères, de
l'Intégration Africaine, de la Francophonie et des Béninois de
l'Extérieur et le Commission Nationale de Coopération
Décentralisée (CNCD). Ces institutions se doivent de travailler
ensemble afin de répondre aux besoins de cohésion et de
cohérence des actions de coopération décentralisée.
Ce sont des institutions informent et conseillent les collectivités
étrangères sur les dispositions juridiques et les
différentes démarches administratives en matière de
coopération décentralisée au Bénin.
S'agissant des moyens financiers, il importe de signaler
qu'ils n'existent presque pas, ce qui favorise le recours à des
méthodes très différentes. Pendant qu'à Natitingou,
il n'y a pas une ligne budgétaire consacrée à la
coopération décentralisée, à Rillieux-la-Pape les
choses semblent beaucoup avancées et doivent servir d'exemple au
partenaire du Sud. La question des finances constitue le véritable
problème de la coopération dans les pays du sud, qui ont des
budgets très réduits. Le pouvoir central a
transféré des compétences aux nouvelles
collectivités sans accompagnement des moyens financiers. Ce qui fait que
les communes et dans notre étude Natitingou, n'arrive pas à
jouer son rôle de partenaire crédible. La situation de moyens
financiers limités de la commune peut conduire à un
détournement de la coopération et les écarts de
comportements observés en disent beaucoup à ce sujet. Par contre
à Rillieux-la-Pape, la commune inscrit chaque année un montant
pour ses relations avec ses partenaires. Aussi modeste soit ce budget, c'est la
preuve que la solidarité ou la coopération
décentralisée a un coût, qu'il faut budgétiser
à l'avance pour ne pas se mettre en difficulté. C'est sur ce
budget que la ville alloue une subvention au comité de jumelage pour la
mise en oeuvre des actions à réaliser.
En ce qui concerne le dispositif financier pour les fonds
destinés à la coopération, signalons qu'il fait objet de
débat. En effet, les fonds qui entrent dans le cadre de la
réalisation des actions sont tenues de respecter deux conditions
nécessaires du droit français. La première concerne le
respect des procédures françaises en matière de transfert
d'argent. La deuxième condition concerne l'utilisation de l'argent qui
doit présenter un intérêt local. Ces deux conditions
doivent être réunies pour financer un projet ou une action
à Natitingou. En plus de ces conditions françaises, les textes
béninois exigent que les fonds de la coopération soient
domiciliés sur un compte du trésor public béninois. Cette
mesure pour nous ne respecte pas les règles de la coopération
c'est-à-dire les relations de territoire à territoire aux
intérêts et objectifs communs avec des actions retenues
indépendamment de toute action de l'État. Malgré ces
mécanismes, la mise en oeuvre de la coopération se trouve
confrontée à des problèmes de culture, de mentalité
et d'approche de développement. C'est ainsi qu'il sera relevé
plusieurs insuffisances dans la mise en oeuvre de la coopération, ce qui
n'est sans effets sur l'efficacité des relations de partenariat entre
les deux collectivités partenaires.
Après avoir élucidé les
évolutions de la coopération entre les deux territoires, les
actions mises en oeuvre et examiné les différents moyens
juridiques, institutionnels et financiers, nous venons faire la lumière
sur l'état des lieux de la coopération entre les communes de
Rillieux-la-Pape en France et de Natitingou au Bénin. L'étape
suivante consiste à faire une analyse objective de cette
coopération et de proposer des pistes de solutions pour redynamiser la
coopération entre les deux partenaires.
TROISIEME
PARTIE- ANALYSE DE LA COOPÉRATION ET PROPOSITIONS DE
RELANCE
Dans cette dernière partie, il est question de
présenter le milieu professionnel qui a nous servi de lieu
d'apprentissage et d'approfondissement de nos connaissances (Chapitre 1). Les
nombreuses connaissances que nous avons apprises nous servent de base pour une
analyse du partenariat entre les communes de Rillieux-la-Pape et de Natitingou
mais aussi la formulation de quelques recommandations pour la
pérennisation des rapports entre les deux collectivités
partenaires (Chapitre 2).
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