§6. En matière de la mise en mouvement de l'action
publique
Le système pénal ne reconnaît d'autre
part aucune place aux victimes et leurs conflits. Quand il s'empare d'une
affaire, non seulement il crée et renforce les inégalités
sociales mais encore pétrifie-t-il les faits sans tenir compte du
caractère évolutif de l'expérience antérieure des
individus. En cette matière deux principes fondamentaux sont à la
base des différents abus enregistrés. Il s'agit de celui de la
plénitude de l'action publique appartenant au MP et celui de
l'opportunité qui est un principe de base gouvernant le
déclenchement de l'action publique au Congo. En effet, la thèse
propriétariste de l'action publique au seul MP et son pouvoir
d'appréciation sur l'opportunité de mettre l'action publique en
mouvement constituent d'une manière ou d'une autre une large
faculté permettant à ce dernier de prendre la justice en otage,
l'action publique demeurant ainsi dans son ultime appréciation.
Cette aptitude de se saisir d'office lui reconnu par la loi
à fin de mettre l'action publique en mouvement crée des
inconvénients énormes dans l'ordre communautaire voire familial
des individus vivant au sein d'une société alors que le Droit
pénal recule de plus en plus face à l'ordre familial. Dans la
pratique, l'opinion publique n'est pas souvent intéressée lorsque
par exemple les membres d'une famille se causent des torts moins graves. Cela
prouve à suffisance que l'ordre familial prime sur l'ordre public.
Comme nous le savons, un bon Droit est celui qui tient compte
de la réalité sociale dans laquelle il doit être
appliqué. Il doit s'efforcer plus à rétablir l'ordre
communautaire troublé par les actes infractionnels posés par l'un
de ses membres et faire voir aux autres les graves conséquences des
actions en justice car dit-on :« mieux vaut un mauvais
arrangement à l'amiable qu'un bon procès ». Cela
justement parce que la majorité des procès, si pas tous,
créent souvent un climat de méfiance entre les parties. Le
procès apparaît entre elles comme un précédent
fâcheux qui demeure inoubliable surtout si l'une d'elles a fait la prison
ou a vendu ses biens précieux qu'elle gardait jalousement pour
s'acquitter des amendes et autres frais de justice ainsi
qu'éventuellement des DI.
La décision de poursuite et la mise en mouvement de
l'action publique dans pareille hypothèse aura comme conséquence
de faire revivre de mauvais souvenirs entre les parties et peut même
détruire l'ordre communautaire et conduire ces derniers à vivre
en marge de la loi.
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