Master 2: Migrations
Internationales Spécialité professionnelle : Conception de
projets en coopération pour le développement Année
2008-2009 Titre
« Développement international et
développement territorial : conception d'un projet
de développement d'écotourisme, dans le cadre de la
coopération décentralisée, entre les régions de
Fatick au Sénégal et de Poitou-Charentes en France
»
Présenté par Sory KABA sous la
direction de Nathalie KOTLOK Maître de
conférences
RESUME
Le concept de développement, dans le contexte de la
mondialisation, a subi beaucoup de critiques, comme modèle à
transposer, partout dans le monde.
Une approche basée sur le territoire, qui s'appuie sur les
spécificités locales, en mobilisant et organisant les acteurs,
semble mieux répondre au contexte de la mondialisation.
Loin de s'en départir, l'approche territoriale du
développement complète le modèle de développement
libéral, dans certains de ses aspects.
Dans cette logique, je me suis intéressé aux liens
de la coopération décentralisée entre les régions
de Fatick au Sénégal et de Poitou-Charentes en France, pour
illustrer mon propos.
Le projet de développement de l'écotourisme, qui
est un des axes de cette coopération, que j 'ai eu le privilège
d'élaborer dans le cadre de mon stage, au Parc interrégional du
Marais Poitevin (un des maîtres d'oeuvre du projet), est un exemple
d'approche territoriale du développement.
Parmi les stratégies de mobilisation des acteurs, celle
relative aux migrants Fatickois à l'étranger et
sénégalais de manière générale, a
été étudiée, pour donner plus de consistance au
lien nécessaire, entre le local et le global, dans une approche
territoriale du développement.
MOTS-CLEFS :
Développement - Territoire Ecotourisme
Coopération - Migrations
REMERCIEMENTS
« Conception de projet en coopération pour le
développement » : une formation à la pointe de la
connaissance. Connaissance du cadre institutionnel de la solidarité et
de la migration internationale, considération conceptuelle du
développement, la gestion du cycle de projet, le tout dans le contexte
de la mondialisation.
Je tiens à remercier particulièrement Mme
Nathalie kotlock et Mr Patrick Gonin, pour la mise en oeuvre de cette
formation, mais aussi pour leur encadrement et leur appui
méthodologique, durant toute la durée de cette formation. A
travers eux, je remercie l'ensemble des intervenants du master.
Au-delà, ce ft l'occasion de rencontres, de
découvertes, à travers une promotion, composée d'hommes et
de femmes, particulièrement sympathiques. Je tiens à les
remercier tous.
Mon stage était l'occasion d'aborder la
problématique du développement territorial, à travers
l'élaboration d'un projet de développement de
l'écotourisme, dans le cadre de la coopération
décentralisée, entre les régions de Fatick au
Sénégal et de Poitou-Charentes en France.
Je voudrais remercier vivement le directeur du Parc
interrégional du Marais Poitevin et à travers lui tout le
personnel. Mais de manière particulière, je remercie Corinne
Rouault, pour sa disponibilité, sa générosité, son
encadrement et son accompagnement, ainsi que Sandrine Guihéneuf.
C'est l'occasion pour moi de remercier, les autorités
des deux régions (Mme. Ségolène Royal et Mr. Abdoulaye
Séne, ainsi que son successeur Mr.Comba Ndofféne Diouf), pour
m'avoir donné l'opportunité de contribuer à l'oeuvre de
développement de mon territoire et en me mettant dans les conditions de
le faire, en m'attribuant une bourse.
Enfin, je tiens à remercier :
- Mme. Françoise Lechanjour, pour son engagement et sa
détermination, qui m'ont été d'une grande importance et
à travers elle, toute sa famille et ses amis,
- Le personnel des Conseils Régionaux de Fatick et de
Poitou-Charentes, pour leur collaboration ;
- Tous les acteurs, que j'ai pu rencontrer durant tout ce temps,
particulièrement la communauté des migrants ;
- Tous ceux qui, de prés ou de loin, m'ont apporté
leurs conseils et leurs appuis ;
- toute ma famille, pour leur soutien et leurs prières,
particulièrement ma grande soeur Sadio Kaba. Mon épouse Aminata
Wade, pour ses encouragements, sa tolérance et sa patience.
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS 3
INTRODUCTION 6
PREMIERE PARTIE : Coopération
décentralisée Fatick /Poitou-Charentes : une approche
dynamique du développement territorial qui lie le local au global
10
A- Contexte 10
De la coopération au codéveloppement : une
stratégie de mobilisation des migrants pour un développement
territorial élargi 24
DEUXIEME PARTIE : Méthodologie d'études et
résultats d'enquêtes 29
A- Positionnement de la coopération
décentralisée Fatick/Poitou-Charentes et la mobilisation des
migrants : les deux objectifs de l'étude 29
B- Présentation de la méthodologie
d'enquêtes 31
Analyse des résultats d'enquêtes 33 TROISIEME
PARTIE : Le développement de l'écotourisme : un projet ambitieux
de développement territorial de la région de Fatick dans le cadre
de la coopération
décentralisée avec la région
Poitou-Charentes 43
A- L'écotourisme: une orientation durable du tourisme
43
B- La pertinence du projet à l'échelle du
territoire: une stratégie de positionnement régional 48
Le Parc interrégional du Marais Poitevin : première
expérience à l'international dans le cadre du projet de
développement de l'écotourisme à Fatick 50
Plan d'actions du projet de développement de
l'écotourisme 56
CONCLUSION 70
BIBLIOGRAPHIE 73
ANNEXES 75
TABLE DES SIGLES ET ABREVIATIONS -
ANPT Agence Nationale de Promotion du Tourisme
- BECEAO Banque Centrale des Etats de l'Afrique de
l'Ouest
- BM Banque Mondiale
- CPBBM Club des Plus Belles Baies du Monde
- CRT Comité Régional du Tourisme
- COREPA Convention pour la Rénovation de Pal marin
- DGCI D Direction Générale de la
Coopération Internationale et du Développement
- DSRP Document Stratégique de Réduction de la
Pauvreté
- EUROPARC Fédération des parcs naturels et
nationaux de l'Europe - FCFA Franc des Colonies Françaises
d'Afrique
- FMI Fond Monétaire International
- MAEE Ministère des Affaires Etrangères et
Européennes
- OCDE Organisation de Coopération pour le
Développement Economique
- OMD Objectif du Millénaire pour le
Développement
- OMT Organisation Mondiale du Tourisme
- ONG Organisation Non Gouvernementale
- PIB Produit Intérieur Brut
- PNDS Parc National du Delta du Saloum
- PNUD Programme des Nations-Unies pour le
Développement
- PIMP Parc Interrégional du Marais Poitevin
- PRDI Plan Régional de Développement
Intégré
- PRODER Programme de Développement des Energies
Renouvelables - UE Union Européenne
- UNICEF Organisation des Nations-Unies pour l'Education et la
Santé des Enfants
- UNESCO Organisation des Nations-Unies pour l'Education, la
Science et la Culture
- SAPCO Société d'Aménagement de la
Petite Côte
- SCA Stratégie de Croissance
Accélérée
- SCAC Service Consulaire d'Actions Culturelles
- SIPTSS Syndicat d'Initiatives et de Promotion du Tourisme du
Sine Saloum
INTRODUCTION
Le concept libéral du développement a subi une
évolution significative à l'épreuve du temps et des crises
et fait l'objet de nombreuses critiques.
Le développement, notion par essence polysémique
autant dans l'usage que dans la définition renvoie aux termes
croissance, épanouissement, progrès, essor, extension ou
expansion1. Mais aussi, c'est une technique. Une technique au
travers de laquelle des changements sociaux, des modes de pensées et de
fonctionnement des sociétés sont produits, au moyen d'un
processus d'innovations.
Les processus de territorialisation et de
déterritorialisation engendrés par la mondialisation ont tendance
aujourd'hui à favoriser le territoire, appelé à jouer un
rôle d'une grande importance jusqu'ici marginalisée, pour une
approche durable du développement.
Dans le contexte de la mondialisation fortement marqué par
la libéralisation des économies le développement durable
prend tout son sens.
Dans les années 1970, le développement local
était le concept de référence. Il a cédé sa
place au développement territorial dans les années 1980 et au
développement durable aujourd'hui.
L'intérêt porté par les Etats et la
communauté internationale aux collectivités et aux pouvoirs
locaux, pour pouvoir atteindre les objectifs du millénaire pour le
développement (OM D)2, comme l'illustrent bien les cas du
Ghana et de l'Ouganda, semble prédisposer les territoires à jouer
un rôle de premier plan dans le processus de développement et
d'épanouissement des peuples, dans un monde divisé en trois
pouvoirs « économiques, politiques et celui de la
société civile »3.
Dans un tel contexte que doit-être une approche
territoriale locale du développement ?
Dans une première hypothèse, j'affirme que des
synergies et des intéractions peuvent exister entre le
développement économique international d'approche libérale
et le développement territorial local durable. En m'inspirant des
études déjà effectuées en la
1 Le petit Robert
2 Politique de lutte contre la pauvreté définie par
l'ONU en 2000, qui s'articule autour de 8 objectifs.
3 Nicanor PERLAS : la société civile : le
troisième pouvoir, 2003, éd. Yves Michel
matière mais aussi en analysant les relations de
coopération décentralisée qui lient les régions
Poitou-Charentes en France et de Fatick au Sénégal,
coopération qui promeut le développement de type territorial,
j'approfondirai cette hypothèse.
La coopération décentralisée, expression
forte de la coopération au développement, est celle qui lie entre
elles, les collectivités locales et territoriales de pays
différents, dans la logique d'une recherche d'une plus grande
efficacité des actions de développement.
Cette même recherche d'efficacité conduit,
aujourd'hui, à considérer la problématique migratoire dans
une approche du codéveloppement ou le migrant appelé «acteur
d'ici et là- bas » doit jouer un rôle capital.
Approcher la problématique migratoire comme une
solution et non comme un problème, autant par les pays d'arrivée
que de départ, peut être une force essentielle qui permet aux
migrants de contribuer au développement des deux territoires, qui
constituent ces « deux espaces de vie ». Je développerai dans
les pages qui suivent, cette nécessaire relation entre la migration et
le développement territorial.
Dans ce contexte de mondialisation, ces concepts de
coopération décentralisée, de
codéveloppement, de migrations internationales ont pris des
significations toutes différentes, autant dans leur définition
que dans leur mise en oeuvre, face aux échecs
répétés des politiques, qui structurent réellement
le développement. Ces politiques s'éloignent au fur et à
mesure des préoccupations des sociétés et des discours sur
le développement soutenable ou durable.
La chute des économies socialistes qui servaient de
contre proposition au capitalisme qui inspire nos économies voit, comme
l'ère du développement qui a débuté avec la fin de
la seconde guerre mondiale, un accroissement des inégalités dans
la répartition des richesses entre nantis et pauvres ; à
l'échelon international entre Etats, comme du reste au sein même
des Etats. Ces inégalités constatées dans la distribution
des richesses mondiales, est également un argument en faveur d'une
démarche territoriale d'un développement endogène et non
exogène.
Concrètement, la mondialisation amplifie t-elle ces
inégalités ?
Des inégalités qui font que 80% des richesses du
monde sont détenues par 20% de la population mondiale. Selon l'UNICEF,
l'extrême pauvreté touche environ 1,2 milliards de
personnes dans le monde, soit 1/4 de la population mondiale,
alors que la moitié de ces pauvres vit dans des pays riches avec des
ressources. De telles disparités entre autres peuvent- elles encore
durer, alors que la planète n'a jamais été aussi riche
?
A terme, je me demande : Que signifie le développement
? Les concepts de coopération décentralisée, de
codéveloppement, de migrations internationales qu'est ce qu'ils
englobent ? Comment les combiner dans le cadre du développement
territorial pour contribuer à faire reculer ou à enrayer la
pauvreté dans notre planète ?
Des recherches ont favorisé l'émergence de
nombreuses démarches, approches et initiatives, qui élargissent
les champs d'études et multiplient tout en les différenciant, les
acteurs bénéficiaires des actions d'un développement plus
juste et plus harmonisé. Mais toutes ont en commun, de faire du
territoire un espace de vie, où il est possible d'impulser un
développement territorial endogène et non exogène.
Ainsi la question centrale que je me pose dans le cadre de
cette étude est de savoir comment favoriser une approche
territoriale locale qui impulse un développement endogène
particulièrement à Fatick, aux moyens de la
coopération décentralisée avec la région
Poitou-Charentes et de la mobilisation des migrants ?
Il ne s'agira pas pour moi que de formuler des
considérations théoriques dans le cadre de ce mémoire. La
coopération décentralisée entre les régions de
Fatick et de Poitou-Charentes m'offre la possibilité d'élaborer
un projet de développement de l'écotourisme, selon les principes
de la gestion du cycle du projet, dans la première région
nommée, qui dispose de potentialités réelles dans ce
domaine.
Par rapport au tourisme de masses, l'écotourisme est
une alternative qui repose sur des activités qui contribuent pleinement
à l'épanouissement des populations locales, tout en respectant et
préservant, à long terme, les richesses naturelles,
patrimoniales, historiques, locales.
Pour avoir été un acteur du développement
territorial à Fatick sur ces questions de tourisme durable, j'ai pris ce
recul, pour analyser de manière plus large la problématique du
développement territorial local à Fatick aux moyens de la
coopération décentralisée et de la migration dans son
rapport avec le développement, dans le cadre de mon mémoire, qui
je souhaite, contribuera à renforcer la légitimité des
espaces publics territoriaux autant au
Sénégal ou la démocratie se doit
être renforcée, qu'en Poitou-Charentes, qui se veut une
reconnaissance internationale et cherche à mutualiser ses
expériences de développement territorial local, dans le contexte
de la mondialisation.
Dans le cadre de cette étude les objectifs poursuivis
sont d'une part positionner la coopération entre les régions de
Poitou-Charentes et de Fatick au Sénégal dans la dynamique d'un
développement territorial local endogène, et d'autre part,
mobiliser et organiser les acteurs territoriaux, surtout les migrants Fatickois
en Europe et les migrants Sénégalais en général,
selon deux approches. Une approche exploratoire qui m'a permis d'interroger les
faits par des entretiens individuels, par un travail documentaire et une
approche descriptive pour situer la problématique, par un
questionnaire.
Plusieurs déplacements, successivement dans certaines
régions de la France, ensuite au Portugal, en Italie et enfin au
Sénégal ont été effectués, à la
rencontre des acteurs à mobiliser pour le projet de développement
de l'écotourisme qu'il me revient d'élaborer pour la
région de Fatick, dans le cadre de mon stage effectué au parc
Interrégional du marais Poitevin (PIM P), partie prenante au projet,
comme d'ailleurs d'autres acteurs que nous présenterons dans la
troisième partie de notre étude.
En vue de répondre de manière analytique
à comment favoriser une approche territoriale locale qui impulse
un développement endogène particulièrement à
Fatick, aux moyens de la coopération
décentralisée avec la région de Poitou-Charentes et de la
mobilisation des migrants, mon propos s'établit en trois
parties.
J'aborderai, en première partie, la coopération
décentralisée Fatick/Poitou-Charentes, qui se définie dans
une approche dynamique du développement territorial qui cherche à
lier le local au global, où les éléments liés au
contexte, à l'historique, aux axes de cette coopération, aux
stratégies et retombées seront mis en exergue.
La deuxième partie est consacrée à la
présentation des objectifs de l'étude qui vise à
positionner la coopération entre Fatick et Poitou-Charentes, à
travers un jeu d'acteurs au quel les migrants doivent prendre une place
importante, à la méthodologie d'études et à la
présentation des résultats d'enquêtes de terrain.
La troisième partie, quant à elle, est
réservée au projet de développement de
l'écotourisme à Fatick. Les questions liées à la
pertinence du projet à l'échelle du territoire, sa
description, y seront développées, ainsi qu'une
présentation du PIMP structure d'accueil pour mon stage, ainsi que la
présentation de tous les acteurs mobilisés dans le cadre de la
mise en oeuvre de ce projet.
PREMIERE PARTIE :
Coopération décentralisée Fatick/Poitou-Charentes
: une approche dynamique du développement territorial qui lie le local
au global
A- Contexte
? Du développement économique
libéral au développement territorial
Selon Marx Weber « le développement est une
évolution d'un certain ordre social accompagné par une
transformation des manières de faire, de sentir, d'agir, de penser des
membres de la société ». Toujours
selon lui, « l'absence d'évolution des valeurs peut bloquer le
processus de développement, ou du moins le compromettre ».
La dynamique de la mondialisation, qui marque notre temps
depuis de longues années, intègre l'ensemble des pays du monde
dans un processus économique libéral, en rupture avec le
modèle orthodoxe des échanges internationaux. Depuis les
années 1980, elle s'accompagne d'une libéralisation des
économies, qui se manifeste par une série de réduction des
contrôles tarifaires et non tarifaires des échanges
extérieurs, réduction du contrôle des gouvernements et des
Etats sur les investissements étrangers, réduction du rôle
économique de l'Etat avec l'abandon du modèle traditionnel de
substitution aux importations, réduction du secteur public liée
à l'abaissement des dépenses budgétaires et à la
privatisation d'un certain nombre d'entreprises publiques.
Telle quelle, la mondialisation conduit à une
marginalisation des pays et des populations les plus pauvres par rapport au
processus de développement, qui nécessite selon la
définition de Weber citée ci-dessus, la remise en cause des
valeurs qui sous-tendent la mondialisation. Valeurs liées : à la
révolution industrielle, la révolution des transports, la
révolution démographique en lien avec la révolution
agricole, la quête effrénée des marchés.
Concrètement, l'histoire du développement
économique international au 21éme siècle se
caractérise par un mélange de bonnes volontés de certains
Etats du Nord industrialisés, et d'actions effectives de la
communauté internationale, particulièrement celles des nations
unies, pour promouvoir un modèle de développement inscrit dans la
durabilité et de lutte contre la pauvreté dans les pays du
tiers-monde et au-delà.
Mais dans la réalité, le concept de
développement est un instrument de pouvoir et de domination du monde qui
a fait son apparition à partir de 1949, lors du discours d'investiture
du Président américain Harry Truman.
Il a utilisé le concept de développement pour
justifier et définir une politique d'aides à l'endroit des «
pays sous-développés », communément appelés
par la suite le « tiers-monde », dans le cadre de la guerre froide,
mais aussi pour la reconstruction de l'Europe dévastée par la
guerre.
En ce sens, la création de l'organisation des
Nations-Unies (ON U) et d'instances internationales de développement
tels que la Banque Mondiale (BM), le Fonds Monétaire International
(FMI), l'Organisation des Nations-Unies pour l'Education, la Culture et la
Science (UNESCO), le Programme des Nations-Unies pour le Développement
(PNUD). .favorise depuis lors, la mise en place d'un système mondial
dont la priorité et de promouvoir le développement.
Mais ce développement, est selon Ivan Illich, un
processus de dépossession des capacités autonomes de l'homme au
profit de l'hétéronomie. Cela est d'autant plus vrai, qu'en 1990,
le PNUD4 a popularisé le concept des «
capabilities5 » d'Amartya Sen (prix Nobel de la paix 1998)
à travers un rapport annuel sur le développement humain dans le
monde. Cette approche multidimensionnelle du développement se
présente comme une alternative à celle de la banque mondiale sur
le revenu. Le coeur de cette approche du développement est de ne pas
réduire la pauvreté à un concept matériel, mais de
considérer toutes les possibilités dont dispose effectivement un
individu pour être et agir comme il le souhaite.
Dans ce sillage, l'ONU proclame en 2000 les objectifs du
millénaire pour le développement (OMD), qui visent entre autres
à réduire l'extrême pauvreté et la faim dans le
monde dans un délai de 15 ans.
Mais cette démarche de réduction et de lutte
contre la pauvreté doit s'accompagner d'une volonté de
préservation des ressources naturelles de la planète.
Déjà en 1972, la
4 Programme des nations unies pour le développement.
5 Se traduit en français par « capabilités
» et désignent l'ensemble des états et actions qu'un
individu peut atteindre ou entreprendre.
problématique de l'environnement s'invite sur la
scène internationale avec le club de Rome6 dans leur rapport
sous titré « Rapport sur les limites de la croissance »
amenant à s'interroger sur les modèles de développement
possibles.
Devant l'ampleur du danger, est apparu en 1987, le terme de
« développement durable », dans le rapport de la
commission Brundtland7.
Ceci renforce la définition du développement de
Gilbert RIST selon laquelle : « le développement est
constitué d'un ensemble de pratiques parfois contradictoires en
apparence qui, pour assurer la reproduction sociale obligent à
transformer et à détruire de façon
généralisée, le milieu naturel et les rapports sociaux en
vue d'une production croissante de marchandises (biens et services)
destinés, à travers l'échange à la demande
solvable »8.
Tous ces défis qui interpellent le développement
économique libéral, liés d'une part à la lutte
contre les inégalités sociales et contre la pauvreté dans
le monde et d'autre part à la nécessaire préservation des
ressources de la planète, engendrent et obligent à un
retour aux austères modes de vie ancestraux, de
production.
Il s'agit là d'un appel aux traditions industrielles
locales, qui insiste particulièrement, sur la prise en compte des
valeurs culturelles et sur le recours à des modalités
coopératives. Le développement doit dès lors être
circonscrit dans un territoire, où ceux y vivent pourront en
maîtriser tous ces aspects.
6 C'est un groupe de réflexion réunissant des
scientifiques, des économistes, des fonctionnaires nationaux et
internationaux, { l'initiative d'industriels de 53 pays, avec comme but de
proposer des solutions ayant trait à la « gouvernance »
mondiale dans son aspect environnement.
7 Du nom de la présidente de la commission mondiale sur
l'environnement et le développement, la Norvégienne Gro Harlem
BRUNTLAND;
8 Dans son ouvrage « Histoire d'une croyance occidentale
» 1996 : p 26-34
? Du développement territorial
Les successions de crises que traverse notre planète,
amènent à privilégier le plan local par rapport au plan
national et entrainent sur le terrain des poussées sociales, culturelles
et identitaires.
Le local s'approprie en quelque sorte le développement,
surtout dans les pays sous développés, le
sous-développement étant un produit du développement, pour
en faire un concept et une pratique globale, une stratégie territoriale
intégrée, solidaire, durable.
Le sous-développement, connu depuis l'expansion
coloniale européenne et la révolution industrielle est d'une
autre nature. Il résulte de l'échange entre une économie
dominante et une économie dominée et se traduit par un
appauvrissement au moins relatif de cette dernière.
Aujourd'hui, le sous-développement doit être
appréhendé comme un facteur susceptible de produire des effets
positifs de développement, qui vont à l'encontre du modèle
capitaliste.
Le regard porté par les tenants de ce modèle,
sur les pays sous-développés, comme du reste les critères
qui sont définis, comme étant les références du
développement, ne sont pas transposables partout. Ces
références mettent l'accent sur les idées de
progrès techniques et de productions industrielles. Mais aujourd'hui, un
monopole est assuré sur ces différents éléments
liés aux progrès scientifiques et techniques, constituant la base
d'un système de production qui sont inaccessibles aux pays du tiers
monde.
C'est une bataille perdue d'avance, je le pense, que de vouloir
bâtir le développement sur la base de ces
références.
D'ailleurs, depuis dix ans, il est question de crise
économique dans laquelle s'enlise le monde capitaliste et par voie de
conséquence toute la planète.
Mais le terme de crise est impropre, selon François
Partant, dans la mesure où une crise est presque par définition
provisoire.
Il s'agit, pour lui, bien plutôt, « d'un
processus de désorganisation économique et de
décomposition sociale qui affecte inégalement les pays, qu'ils
soient ou non industrialisés, mais qui ne s'accompagne pas ou pas encore
d'un véritable ébranlement de l'appareil mondial de production.
C'est d'ailleurs pour cela que d'innombrables entreprises, et en
particulier les principales firmes multinationales,
continuent de réaliser de confortables profits et que certains
économistes, parmi lesquels Jacques Attali, ont pu dire que la crise
était terminée »
Le développement territorial devient, par la force des
choses, une approche qui favorise un développement endogène,
c'est-à-dire qui s'appuie sur les spécificités locales et
qui offre la possibilité de sortir les pays
sous-développés de l'engrenage du développement.
Cet engrenage, qui fondait la politique de
développement des pays industrialisés, met les pays en voie de
développement dans une position de devoir importer, même à
crédit, dès lors qu'ils ne peuvent pas produire tout ce dont ils
ont besoin pour vivre. Ainsi s'installe une dépendance, qui les rend de
plus en plus vulnérables.
Au-delà d'endetter de manière continue les Etats
des pays en voie de développement, ce système défait le
tissu social et entraine les populations dans une situation de remise en cause
profonde de leur être et de leur existence. Ainsi tous les repères
sociaux et historiques, sont déréglés.
L'exemple du Nigéria en est une parfaite illustration.
C'est le 8éme pays producteur de pétrole dans le monde
et le premier en Afrique, avec 2,7 millions en moyenne de barils de brut par
jour, exportés9 en 2007. Mais il importe 100% de ses besoins
en carburant (27 millions de litre d'essence par jour, alors que des
multinationales du pétrole dans son territoire, exploitent la ressource,
pour la lui revendre ensuite.
Cette ignominie, que d'aucuns peuvent considérer de
normal, par la responsabilité partagée des autorités du
pays, est dépourvu de tout bon sens. Un bon sens, qui pouvait permettre
au gouvernement d'être assez légitime, d'être stable et de
mettre le pays à l'abri d'un besoin énergétique, ce qui du
reste peut compromettre les intérêts des forces occidentales.
Aujourd'hui, le pays s'expose, à une situation de ni paix
ni guerre, ou la population est manipulée, corrompue, car en manque de
tout.
C'est d'ailleurs, dans cet esprit, que le Président
Sarkozy disait à Dakar, en 2007, que : « le drame de l'Afrique
c'est que l'homme Africain n'est pas entré dans l'histoire. Le
9 Jean Ziegler, « la Haine de l'occident »,
édition Albin Michel, 2008 ; p.142.
paysan africain, qui depuis des millénaires vit avec
les saisons, dont l'idéal de vie est d'être en harmonie avec la
nature, ne connait que l'éternel recommencement du temps rythmé
par la répétition sans fin du même geste et des même
paroles [...] 10»
Les pratiques des oligarchies capitalistes, comme dans
l'exemple du Nigéria, ainsi que la mauvaise volonté des pays
industrialisés de sortir le monde de la faim depuis 2000, contrairement
à celle dont ils ont fait montre, pour sauver le système
financier international en crise, en mettant à la disposition des
banques plus de 800 milliards11, prouvent s'il en est besoin, que le
développement du tiers monde ne sera pas exogène. Si cette somme,
distribuée aux 6,7 milliards d'êtres humains de la planète,
chacun se retrouverait avec une somme sensiblement égale à 104
millions de dollar.
Une telle démarche ne relancerait-elle pas les banques
ainsi que le système productif mondial ? Je crois que oui ; mieux et de
manière plus juste que l'utilisation faite actuellement de cette manne
financière. Sous ce rapport, le développement se comprend comme
un système par lequel, les moyens pour mettre toute la planète
à l'abri du besoin existent, mais, il faut faire en sorte qu'il continue
à y avoir des pauvres et des nécessiteux. Par contre, ces
derniers ne peuvent et ne doivent compter que sur eux-mêmes pour sortir
de leur situation de précarité. D'où l'émergence de
plusieurs formes de théorie.
La théorie du développement endogène
développée par John Friedmann et Walter Stöhr prend forme
vers la fin des années 50. Selon eux, c'est une «
approche volontariste, axée sur un territoire restreint, qui
conçoit le développement comme une démarche partant du
bas, privilégiant les ressources endogènes ».
Mais le développement local prend son essor à
partir des années 80, face à l'ampleur de la crise
économique et de la crise d'efficacité de l'action publique
centralisée.
C'est dans les années 1990 que la notion de
développement territorial devient hégémonique. Cette
période coïncide avec un contexte économique et
idéologique caractérisé par un phénomène de
déterritorialisation et de reterritorialisation accentuée de la
production des échanges, des concentrations industrielles et
financières, de la circulation accélérée des
10 p81, allocution prononcée le 25 juillet 2007 à
Dakar ;
11 Interview de Jean-Pierre Elong Mbassi Président
d'Africités (structure qui regroupe les collectivités locales et
régionales d'Afrique) {
Afrik.com.
idées, des capitaux, des marchandises et des hommes et par
une volonté individuelle d'ancrage, d'identité, d'un «
besoin de territoire, d'être de quelque part ».
Le territoire n'a pas vocation à vivre son
développement dans l'autarcie ou l'accaparement des ressources, mais
plutôt par son aptitude à fédérer des initiatives,
sous le signe de ses intérêts propres.
Selon les géographes, le territoire est un espace
réel et rêvé, qui ne peut pas se réduire ou se
résumer à la seule entité géographique ; il est
produit par les acteurs et sert de concrétisation à leurs
comportements.
Le développement territorial devient dès lors
une dynamique de participation circonscrite dans un territoire, le tout en lien
avec un réseau, qui favorise un rapport entre le territoire et
l'extérieur, qui requiert des acteurs organisés, une intelligence
spécifique mobilisée.
Cependant les territoires comme les individus doivent tout
d'abord être « motivés », « réactifs »,
« autonomes », « responsables ». D'autre part, les valeurs
du développement local territorial, prônent la synergie des
acteurs (privé et public, monde syndical et patronat...),
l'élaboration de projets globaux qui articulent l'économique avec
le social et le culturel, grâce au partenariat et à la
démocratie participative, selon un esprit de solidarité.
Cette responsabilisation des acteurs locaux, promue par les
processus de la décentralisation et de la mondialisation, ont aussi
profondément affecté les pays du Sud à partir des
années 90. Les compétences consenties aux collectivités
locales et la place faite à la société civile et aux ONG
ont pris plus d'espace.
? De la décentralisation en France et au
Sénégal
Ces espaces publics locaux ouverts par les politiques de
décentralisation, renforcent de juré, le rôle d'animation
du développement des collectivités territoriales, qui doivent
être efficaces et attentives aux initiatives des citoyens.
La décentralisation est un processus par lequel, des
pouvoirs de gestion sont transférés de l'Etat central vers les
collectivités territoriales, élues au suffrage universel. Par
opposition à la déconcentration, ou l'Etat, étend ses
tentacules dans les profondeurs de son territoire à travers des
représentants, qu'il se choisit lui même.
Mais ce processus de décentralisation ne semblait pas
répondre à une logique de développement.
En France, l'essence du système qui mettait en place
les institutions territoriales répondait plus à un moyen
d'expression de la démocratie locale et de la libre administration des
populations que l'instrument rationnel des formes de
développement12.
Mais sous l'influence de l'Europe, ce schéma classique a
fortement évolué.
Aussi, face à l'ampleur de la crise économique
et de la crise d'efficacité de l'action publique centralisée,
l'Etat délègue de nouvelles compétences aux
échelons infranationaux, les collectivités locales, avec une
vocation plus utilitariste.
Ainsi cette pratique, par la force des choses, sera
érigée en vertu au sein des Etats de l'OCDE à partir de
1984. D'autant plus que la contrainte supplémentaire venait de
l'idéologie libérale qui favorise l'entreprise et l'entrepreneur.
On assiste ainsi à l'élection de maires, chefs d'entreprise ;
l'individu autonome créatif devient central. C'est le retour du
sujet-action et de nouveaux mots gourous tels que « le projet » de
ville, de territoire, d'établissements...
A partir de 1986, toutes les initiatives doivent être
inscrites dans un projet. C'est la « dictature du projet ».
Au Sénégal, l'instrumentalisation de la
décentralisation par la classe politique nationale entame la
possibilité d'accroître l'imputabilité politique des
décisions publiques à l'échelle locale.
Mieux, dès le début des années 80, la
situation macro-économique cumule quatre handicaps majeurs : une
stagnation de la production intérieure, un important déficit de
la balance des paiements et des finances publiques, une
détérioration des avoirs extérieurs et un endettement
massif (PNUD 2001).
Ces facteurs cumulés entraînent une inscription
encore récente des dynamiques locales dans les stratégies de
développement, car jusque vers la fin des années 1970, les
travaux sur le développement, portent en premier, sur les politiques et
les dynamiques structurelles de niveau national.
12 Jean Claude Némery et Serge Wachter, « Entre
l'Europe et la décentralisation, les institutions territoriales
Françaises », p.13, 1993.
Mais la pression des besoins sociaux face à une
situation sur la pauvreté extrêmement préoccupante (en 2001
le Sénégal était classé 145ème
sur 162 selon l'indice de développement humain)13, les
critiques externes du dirigisme économique de l'Etat, sont autant de
facteurs qui concourent, qui favorisent une habilitation nouvelle de la
décentralisation et des acteurs locaux.
L'Etat sénégalais est devenu un Etat
décentralisé et déconcentré avec aujourd'hui trois
paliers de collectivités locales dont l'existence et l'autonomie sont
garanties par la constitution.
Depuis l'accession à l'indépendance, les
hésitations du législateur se lisent dans la succession des
dispositifs législatifs. Tout en reconnaissant l'existence des
collectivités de base et en leur confiant une part de la gestion de
l'espace national, le législateur peine à relâcher
significativement le contrôle de l'Etat central sur les centres de
décision locale. La loi 64-02 du 19 janvier 1964 impose aux grandes
communes la présence d'un administrateur ordonnateur nommé par le
pouvoir central qui s'assure ainsi le champ politique local.
En 1972, la carte administrative prend forme
(départements, arrondissement, communautés rurales) et les
communautés rurales sont érigées en collectivités
locales par la loi 75-25 du 19 avril 1975. C'est l'étape dite de la
« ruralisation ». Leur gestion est placée sous
l'autorité du sous-préfet d'arrondissement, comme du reste
l'approbation des actes relevant du département au préfet, qui
lui assure aussi la tutelle aux communes, et les actes relevant de la
région, au gouverneur.
Ce n'est qu'en 1990 avec la loi 90-35 du 08 octobre que le
président du conseil rural récupère la gestion des
communautés rurales. Dans le même temps, un maire élu au
suffrage universel vient en remplacement de l'administrateur nommé dans
les grandes communes.
En 1983 le Sénégal était divisé en
huit régions administratives. La région n'étant pas encore
reconnue collectivité locale. Le contrôle à priori des
décisions des mairies et communautés rurales par les
administrateurs, représentants de l'Etat, réduit l'autonomie de
ces entités décentralisées. Il ne sera levé qu'avec
le renforcement de la politique de décentralisation de 1996.
13 Document stratégique de réduction de la
pauvreté (DSRP).
La réforme dite de « régionalisation »
porte sur trois points essentiels : l'introduction du contrôle de
légalité à postériori, le transfert de neuf
domaines de compétences partagées aux collectivités
locales et l'érection de la région en collectivité locale
dotée d'une assemblée régionale élue au suffrage
universel.
Deux nouvelles régions sont ainsi crées, qui fait
passer le nombre à dix. Aujourd'hui le Sénégal compte 13
régions.
? De la coopération
décentralisée
Dans le contexte de la décentralisation des pouvoirs
politiques, d'aménagement perpétuel des territoires et de
l'importance croissante des relations internationales, les collectivités
territoriales locales se sont lancées dans des actions de
coopération au développement, appelée coopération
décentralisée.
Les grandes mutations liées à la dynamique de la
mondialisation et les nouveaux rapports des acteurs publics comme privés
au territoire, font des institutions territoriales un important facteur de la
compétition internationale.
Ainsi les Etats ont tendance à se concentrer plus que
jamais sur leurs fonctions régaliennes et leurs administrations
allégées, du fait de l'engagement des collectivités
locales dans les champs de la coopération, mais dans le respect des
grands principes qui fondent les axes de la diplomatie nationale.
La notion de coopération décentralisée en
France vient surtout désigner une coopération de
collectivité(s) territoriale(s) à collectivité(s)
territoriale(s), entre la France et un pays étranger.
Elle a été tout d'abord illustrée dans la
loi d'orientation n° 92-125 du 6 février 1992 (abrogée),
relative à l'administration territoriale de la république, qui
fut la première à poser un ensemble de règles
précises en matière de coopération
décentralisée en France.
Ensuite, la notion de coopération
décentralisée a été élargie et assouplie
dans la loi du 7 février 2007, dite loi Thiollière, relative
à l'action extérieure des collectivités territoriales et
de leurs groupements. Elle apporte, en effet, deux importantes innovations
puisque, d'une part, la notion de « collectivités territoriales
étrangères » a été remplacée par celle
« d'autorités locales étrangères » qui inclut
les Etats fédérés et d'autre part, elle autorise les
collectivités territoriales françaises et leurs
groupements à entreprendre des actions à caractère
humanitaire sans passer de convention lorsque l'urgence l'exige.
Selon le Ministère Français des Affaires
Etrangères et Européennes (MAEE), « la
coopération décentralisée regroupe l'ensemble des actions
de coopération internationale, menées par convention, dans un but
d'intérr~t commun, par une ou plusieurs collectivités
territoriales Françaises (régions, départements, communes)
et leurs groupements et une, ou plusieurs autorités locales
étrangères, dans les limites de leurs compétences.
»14
Pour la commission européenne, la coopération
décentralisée doit être comprise comme « la
participation d'acteurs variés de la société civile
à la discussion de priorités et à la mise en oeuvre
d'actions de développement, sur la base d'initiatives émanant de
ces acteurs. » (DGCID, MAEE, 2006, p. 59)
Cette notion de la coopération
décentralisée est apparue pour la première fois dans la
politique européenne de développement, dans la quatrième
convention de Lomé (1994 et 1996), par rapport aux objectifs, principes
et acteurs de la coopération. Ces accords de Cotonou, font une large
part à la coopération décentralisée en l'inscrivant
dans une perspective de développement humain durable, axée sur la
réduction de la pauvreté.
Dans ce contexte, les pays africains, pour
bénéficier des actions de cette nouvelle approche de
solidarité au développement, qui vont beaucoup plus loin que les
jumelages existant, se sont mis à jour.
Au Sénégal, la coopération
décentralisée trouve son fondement juridique dans les lois de
décentralisation de 1996, qui reconnaissent aux collectivités
locales (communautés rurales, communes, régions) le droit «
d'entreprendre des actions de coopération qui donnent lieu à des
conventions avec des collectivités de pays étrangers ».
En mettant en exergue la possibilité pour les
collectivités locales de signer des conventions avec des organismes
internationaux prises de développement, le législateur
sénégalais a fait un pas de plus que son homologue
français et s'approche davantage de la nouvelle conception de cette
coopération notamment celle de l'Union Européenne.
14 Source :
www.gouv.diplomatie.fr
D'après cette conception « la coopération
décentralisée n'est pas tant un nouvel instrument ou thème
d'action de la coopération au développement, qu'une
manière différente de concevoir et de pratiquer celle-ci.
L'objectif de la coopération décentralisée est, avant
tout, d'assurer un « meilleur » développement, par une plus
grande prise en compte des besoins et priorités exprimés par la
population ; elle vise ainsi à renforcer le rôle et la place de la
société civile dans le processus de développement
».
Elle consiste en effet à faire collaborer à
différents niveaux d'intervention les acteurs économiques et
sociaux potentiels, tant du nord que du sud. Cet élargissement des
acteurs du champ de la coopération décentralisée est
l'élément de différenciation. Cette conception est
largement partagée par le système des Nations-Unies et
particulièrement le PNUD (Programme des Nations-Unies pour le
Développement). La banque mondiale également s'inscrit dans cette
même logique.
L'Etat n'est plus le seul acteur du jeu international. Il a
dû intégrer de nouveaux intervenants, tels les organisations
internationales, les multinationales, les ONG, mais aussi les
collectivités. Cela dans la droite ligne de l'évolution
constatée dans les relations internationales qui renvoie à la
diversification et à la multiplication des acteurs.
La coopération décentralisée devient
ainsi un moyen de rapprochement entre les hommes, une « «
école de solidarité ». Elle ouvre à des rapports de
solidarité et à une meilleure connaissance des hommes, même
si pour certains elle est un objet peu défini.
? La coopération Fatick/Poitou-Charentes :
état des lieux
Alors que la tendance de l'aide publique au
développement est largement à la baisse, que les modalités
de coopération sont à réinventer, il est
intéressant de constater que des élus locaux jugent positivement
l'intérêt de mener des actions de coopération.
La coopération décentralisée offre un
effet de notoriété et d'image, de mobilisation des
compétences diffuses dans les collectivités, un moyen de
financement supplémentaire au profit des actions de projet mises en
oeuvre.
Mieux la coopération décentralisée oeuvre au
renforcement et à la structuration des collectivités
engagées avec des effets politiques induits :
- en diffusant leur savoir-faire, les collectivités
locales françaises élargissent leurs horizons dans un monde
où l'appartenance à des réseaux internationaux est devenue
une exigence ;
- l'encouragement à la participation, prôné
dans les pays du sud, est une école pour approfondir le fonctionnement
démocratique dans les collectivités du Nord.
Les régions de Fatick et de Poitou-Charentes, sont dans
cette logique depuis 2003, à l'image des relations
multiséculaires et multiformes entre le Sénégal et la
France. Des efforts considérables ont permis de créer des
relations directes avec les acteurs respectifs des deux territoires dans les
différents domaines de la coopération au bénéfice
de leurs populations respectives.
Après plusieurs rencontres et plusieurs échanges
entre les deux régions, différents axes qui répondent aux
besoins de développement territorial à Fatick ont
été ciblés.
Il s'agit en effet :
- du programme de renforcement de la filière caprine en
s'appuyant sur l'expérience de Poitou-Charentes, qui a prit forme en
2005 ;
- du micro crédit, qui a permis la création de
bourses tremplin et de financer des porteurs de projets ;
- du programme de développement des énergies
renouvelables (PRODER), avec un volet « énergie solaire »
appelé programme d'éco développement, un volet recherche
pour exploiter le potentiel solaire de la région de Fatick, avec des
études pour l'installation de séchoirs, de pompes, de panneaux
solaires,
- de l'écotourisme ;
- des échanges d'informations, de bonnes pratiques et de
renforcement de l'efficacité institutionnelle.
Le projet de renforcement de la filière caprine,
après plus de 3 ans de mise en oeuvre, a été
évalué le vendredi 18 septembre 2009. Il entre dans sa
deuxième phase d'exécution.
Ce projet a permis aujourd'hui de susciter un grand
intérêt pour les traditions liées à la
chèvre, dont les systèmes d'exploitation et de transformation du
lait (en fromage) sont valorisés pour une commercialisation à
Fatick et au Sénégal, en lien avec le secteur de
l'écotourisme (projet prévu dans la période
2010-2012 à concevoir dans le cadre de ce mémoire), ou du
tourisme en général.
Le projet « micro crédit » a
été lancé en mars 2009. Plusieurs micro projets sont
déjà financés et font l'objet d'un accompagnement pour
venir à bout de la pauvreté dans la région de Fatick,
où 59%15 de la population vivent en dessous du seuil de la
pauvreté.
Les difficultés d'approvisionnement en énergie au
Sénégal ne peuvent connaître une solution durable que dans
l'exploitation du potentiel solaire du pays.
Le Sénégal est l'un des pays les plus
ensoleillés d'Afrique. Pour cette raison, la région de Fatick en
partenariat avec la région Poitou-Charentes se positionne sur la
problématique du réchauffement climatique en
général, en vue d'expérimenter des modes d'adaptation
opérationnels et de maîtrise de l'énergie.
Ce projet bénéficie aujourd'hui de l'appui du PNU D
et de la région catalane en Espagne.
Le projet de développement de l'écotourisme, quant
à lui, fera l'objet d'une présentation plus spécifique
dans ce qui suit.
Toute cette dynamique qui crée des compléments
de revenu aux populations locales en favorisant une économie locale en
croissance, ne pouvait être faite, sans l'apport financier de la
coopération décentralisée, au regard de la modestie des
moyens du conseil régional de Fatick. C'est là, l'une des
contraintes des politiques de décentralisation au Sénégal.
L'Etat encore « jaloux » de ses prérogatives à tendance
à transférer les compétences sans les moyens
nécessaires à leur réalisation.
La coopération décentralisée qui
crée ainsi un lien entre le local et le global, offre d'innombrables
possibilités d'animation du développement territorial et renforce
l'état de fait « région », encore récent, dans
l'environnement institutionnel Sénégalais.
Communément appelée la coopération des
peuples, la coopération décentralisée se
révèle plus fonctionnelle que la coopération
internationale. Elle s'inscrit dans une forte dynamique d'échanges, de
mutualisation d'expériences, de savoir-faire, de territoires à
territoires.
15 Source : service régional de la statistique de Fatick,
2008 ;
Des stratégies articulées autour de pratiques de
mutualisation entre acteurs des deux territoires sur les domaines
déjà cités, facilitent la connaissance entre les deux
régions. Connaissances qui mettent la coopération dans une
perspective de long terme.
Cette dimension temporelle est fondamentale pour accompagner
le processus de développement territorial, qui s'inscrit dans un temps
long, qui souvent, va au-delà du temps des élus.
L'implication des bénéficiaires en amont et en aval
des projets, constitue un des gages de succès de la coopération
Fatick/ Poitou-Charentes.
Cette coopération figure parmi les 72, les plus actives
entre les collectivités françaises et
sénégalaises16.
B- De la coopération décentralisée
au codéveloppement : une stratégie de mobilisation des migrants
pour un développement territorial élargi
? Définition du codéveloppement
Né à la fin des années 70, le
codéveloppement cherchait à influer le nouvel ordre
économique international.
Dans les années 1990, avec le contexte de la
mondialisation qui a vu les inégalités entre pays s'agrandir, le
concept refait surface pour devenir une stratégie de
développement. Une stratégie qui dissimule certaines
difficultés des Etats face au développement qui a rendu son sens
confus et qui vise, entre autres, à accompagner les migrants dans leurs
initiatives de développement de leur pays d'origine, qui peut à
terme réduire le flux migratoire.
En France, bien avant le rapport de Samir
Naïr17, rapport de bilan et d'orientation sur la politique de
codéveloppement liée aux flux migratoires, plusieurs politiques
et stratégies ont été mises en oeuvre.
Dans un sens ou dans un autre, ces politiques visaient
à diminuer les flux migratoires et à encourager le retour des
migrants chez eux, contre une aide à la réinsertion, devant
servir à la mise en oeuvre de projet de développement dans leur
territoire d'origine. Du fameux
16 Source : service consulaire d'actions culturelles (SCAC), 2008
;
17 Professeur d'université, chargé de la mission
interministérielle Migration/Codéveloppement, 1997
« million » de Stoléru, aux politiques de retour
de Charles Pasqua, toutes ces initiatives rentraient dans ce cadre.
Samir Naïr, dans son rapport, dissocie le retour du
migrant qui ne le souhaite pas de l'aide financière. Pour lui, il
fallait plutôt une approche du codéveloppement, dite «
participative » ; qui d'une part, favorise l'intégration parfaite
du migrant en France et/ou d'autre part, l'aide à monter un projet chez
lui, pour éventuellement maintenir les potentiels candidats au voyage et
contribuer à l'effort de développement de sa localité.
Ainsi, en France, à l'occasion du conseil des ministres
du 08 octobre 2003, le codéveloppement était défini comme
« toute action d'aide au développement, quelle qu'en soit la
nature, quelle qu'en soit le secteur dans lequel il
intervient, à laquelle participent des migrants vivant en
France, quelle qu'en soit les modalités de cette participation
».
Pour l'Union Européenne, le codéveloppement se
définit comme « toute action de développement social,
économique, culturel et politique, des pays d'origine, sur une
collaboration entre les migrants, leur organisation et leurs partenaires
publics ou privés, à la fois dans le pays d'origine et dans le
pays d'accueil (...), considérant que le codéveloppement
s'inscrit dans le cadre global des discussions liées à
l'intégration, aux migrations et au développement ».
La comparaison de ces deux définitions, portant sur le
concept de codéveloppement, laisse voir la difficulté qu'il y a
à le mettre en oeuvre, dans la réalité des choses.
Mais en tout état de cause, l'objectif assigné au
codéveloppement est de s'attaquer aux flux migratoires en s'attaquant
aux causes de la migration, en développant les pays d'origine.
A priori une telle politique est vouée à
l'échec, car le modèle de développement libéral et
capitaliste n'est pas transposable dans les pays d'origine et conscrit le
migrant dans une logique fonctionnelle, une clôture sociale et spatiale.
C'est d'ailleurs l'une des contradictions les plus flagrantes de la
mondialisation : « l'assignation à résidence » pour les
sans qualifications, alors qu'ils constituent les cohortes
d'émigrés les plus importantes de ces dernières
années.
Pour le migrant, le codéveloppement n'est possible que
dans la circulation migratoire, dans le « va et vient », qui lui
permet de durer en migration, en maintenant ses contacts et de répondre
aux attentes de son terroir, car la réalisation de son projet migratoire
va au-delà de sa
propre famille. Elle intègre des éléments
et des facteurs sociologiques que la démarche institutionnelle du
codéveloppement ne saurait prendre en compte. Les objectifs et les
stratégies s'opposent à tout point de vue.
Ce qui fait dire à Patrick Gonin18 que les
politiques publiques françaises en la matière oppose «
l'idéologie au concret, le fonctionnel au relationnel ».
Le concept de développement ou de
codéveloppement, sont ainsi utilisés comme un moyen de
réduire ou d'éliminer à terme les migrations
internationales. Ce qui pose deux paradigmes :
- le contrôle comme moyen de contenir le
phénomène, avec des moyens largement supérieurs à
ceux investis pour les pays d'origine ;
- le développement comme moyen de stopper le
phénomène, en supprimant les causes essentielles de la
pauvreté.
Ainsi, les politiques publiques font de la migration un
problème. Les migrants quant à eux, la considère comme
porteuse d'espoir.
Les collectivités territoriales du Nord, qui impliquent
les migrants et les accompagnent dans leurs initiatives de développement
de leur terroir, font de la coopération décentralisée une
autre approche du codéveloppement.
Les migrants et leur association arrivent dans une telle
dynamique, à créer un lien avec les différents territoires
(d'origine et d'accueil), qui leur permettent en revanche, de participer aux
politiques de développement qui y sont définies. Cette
dialectique donne tout son sens au « double espace », dans lequel se
meuvent les migrants.
? Les rapports du développement à la
migration ;
Le phénomène migratoire est un
phénomène qui a existé de tout temps et aussi loin que
l'on remonte dans l'histoire, il ne laisse en effet aucun pays (qu'il soit de
départ, de transit ou d'arrivée) indifférent.
18 Professeur des universités, communication « Jeux
d'acteurs et enjeux territoriaux : quelles migrations pour quel
développement » { l'occasion du colloque « Rôle et place
des émigré/immigrés dans le développement local
», OMRES et MIGRINTER, 26 et 28 février 2003, Agadir-Maroc
La complexification du phénomène traduit dans une
large mesure les tensions et les crises qui causent les
déséquilibres géoéconomiques entre le Nord et le
Sud.
Il préfigure de la modernité du
21éme siècle, mais aussi il est l'un des visages les
plus dramatiques et les plus médiatisés de la misère
économique.
L'Europe qui a toujours été une zone
d'émigration est devenue une terre d'immigration avec une
présence de plus en plus importante de migrants africains.
D'après l'OCDE19, seule l'immigration en provenance
d'Afrique, a connue une augmentation ces dernières années.
En Europe, au regard de l'évolution démographique,
les migrants constituent une main d'oeuvre certaine pour l'économie, qui
assure une viabilité du marché de l'emploi.
Selon les statistiques de la banque mondiale, la main d'oeuvre
mondiale devrait passer de 3 à 3,4 millions d'actifs entre 2001 et 2010,
soit une augmentation de 40 millions par an. Sur cet accroissement, 38 millions
viendront des pays en développement et seulement 2 millions des pays
à revenu élevé. D'ici la fin de cette décennie, 86%
de la population active mondiale viendra des pays en développement
à employer par les pays industrialisés pour compenser leur baisse
démographique, s'occuper de leurs personnes âgées de plus
en plus nombreuses et soutenir leur régime de retraite.
Au-delà de cet apport direct, historiquement, l'Europe a
beaucoup bénéficié du phénomène, par la
migration de sa population.
Au contact d'autres civilisations et d'autres lieux, les
migrants européens ont réussi à tirer profit des
expériences du pays d'accueil et à valoriser leurs territoires
respectifs. Selon le professeur Jeffrey G. Williamson «
l'émigration européenne au 20éme siècle
a fait reculer la pauvreté : les niveaux de vie respectifs des pays de
départ et des pays de destination ont convergé. »20
La problématique migratoire doit être
abordée aujourd'hui en ce sens, car dans leur pays d'origine, les
remises qu'ils envoient contribuent d'une part à la stabilisation de la
balance des paiements et des échanges avec l'extérieur et
à construire un capital social et humain. Et d'autre part, les remises
peuvent contribuer à l'investissement du développement local.
19 Organisation de Coopération et de développement
Economique
20 « Migrations internationales : quels effets sur les
économies, in revue, Ph. éco. N° 2 914, 3 janvier 2007, P.7.
»
Aujourd'hui, il s'agit pour les migrants africains de mieux
s'organiser avec leur pays d'origine, pour pouvoir contribuer au
développement de leurs terroirs et de multiplier les angles de
perception qui améliorent à terme leur image. La vraie mesure de
la plus value, encore négligée ou sous estimée, que
génère cette « population tampon » contribue à
assurer un mieux être aux pays d'accueil, et à produire des
richesses matérielles et immatérielles dont le
développement des territoires au sud a tant besoin.
Relever ce défi organisationnel est incontournable.
Il aiderait à faire bouger l'inertie que
déplorait Mr. De vroey21, conseiller politique et commerce
à la délégation de la commission Européenne
auprès du Sénégal. Selon lui, il n'existe pas un vrai
dialogue entre le Sénégal et l'UE, pour élaborer des
stratégies nationales de migration, qui doivent déboucher
à la conclusion d'un « partenariat pour la mobilité
».
Aujourd'hui au Sénégal il n'y a pas de
politiques migratoires nationales, alors que cette problématique doit
être érigée en priorité de développement.
Ainsi le Sénégal reste au gré des politiques des pays
d'accueil, sans aucune capacité de réaction, en faveur de ses
ressortissants, malgré la création d'un ministère des
sénégalais de l'extérieur.
Alors qu'au Sénégal, selon la BCEAO (Banque
Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest), en 2007, les remises des migrants
étaient estimées 500 milliards de FCFA, selon les circuits
formels (un montant équivalent est estimé pour les circuits
informels), alors qu'à peu prés 10% de ce montant est voué
à l'investissement et à l'épargne.
Selon Mr. André Quesnel, coordonnateur du fond de
solidarité prioritaire à Dakar, les remises des 2 millions de
Sénégalais de l'extérieur représente 3% du PIB
national et favorise un nouveau dynamisme du foncier au
Sénégal.
Cependant, cette description de la situation migratoire sur la
base des remises cache bien des réalités. La capacité
financière des migrants est surévaluée, car rares sont
ceux qui peuvent investir sur leurs fonds propres dans le domaine industriel,
ce qui entraîne leur forte présence dans les secteurs de
l'immobilier, du transport et du commerce.
21 Conférence de presse le 20 Mai 2009 à Dakar,
Par la force des choses, le migrant devient un acteur du
développement, un agent développeur. Mais il faudrait un cadre
adéquat et incitatif pour eux, d'autant plus que leurs accès aux
services financiers modernes s'avèrent difficiles.
Cependant, il faudrait que les orientations arrêtées
dans le pays d'origine correspondent à leurs projets. En d'autres
termes, il faut les associer à la définition des politiques
migratoires.
Il ne fait plus de doute, que les migrants constituent une
véritable force positive pour le développement de leur pays
d'origine. Mais l'enjeu principal est de favoriser une contribution efficiente
de cette force au développement.
De la caisse de solidarité à la réalisation
d'un projet dans son territoire d'origine, le migrant fait du
codéveloppement un moyen et non une fin.
Quand il migre, il porte un projet, qui ambitionne de
manière concrète et réelle à changer ou à
améliorer les conditions de vie de ceux qui sont restés dans son
territoire, au nom de la nécessaire solidarité qu'implique son
départ.
La stratégie consiste aujourd'hui à associer les
migrants dans les dynamiques de développement territorial.
Au-delà de leurs initiatives individuelles, leurs collectivités
locales d'origine doivent s'ouvrir à eux, dans leurs stratégies
de mobilisation des acteurs du territoire.
D'autant plus qu'il est peu probable que le
phénomène migratoire s'arrête dans un avenir
prévisible. La mobilisation de tous pour impulser des dynamiques de
développement territorial local, en collaboration avec les migrants
déjà établis à l'étranger, pourrait
légèrement le limiter, et endiguer en même temps
l'immigration clandestine.
DEUXIEME PARTIE : Méthodologie d'études et
résultats d'enquêtes
A- Positionnement de la coopération
décentralisée Fatick/Poitou-Charentes et mobilisation des
migrants : les deux objectifs de l'étude
? Cadre théorique
Au-delà des deux régions ciblées, le
territoire comme espace de vie, son développement, au grand
bénéfice des populations qui y vivent, peut il être
envisagé sans une forme d'ouverture sur le reste du monde ?
Théoriquement la réponse est négative ;
car les principes qui sous-tendent le processus de développement
territorial supposent : des acteurs organisés, une intelligence
spécifique
mobilisée, une dynamique de participation circonscrite
dans un territoire où les identités territoriales sont mises en
exergue, et que le tout soit en relation avec un réseau qui met le
territoire en lien avec l'extérieur, avec le global.
Le lien avec le niveau national favorise une articulation des
activités de planification. Alors que le lien avec la coopération
offre la possibilité pour les collectivités d'avoir des moyens de
financement supplémentaire.
Mais cette dernière est encore à définir.
Seuls les acteurs sont désignés, à savoir les
collectivités territoriales et leurs groupements, ainsi que la
nécessité de signer une convention.
Ni son contenu, encore moins sa finalité ne sont
définis.
Voilà pourquoi, plusieurs approches ou plusieurs
actions à différents niveaux, communal, rural, ou
régional, sont mises en oeuvre dans les relations entre
collectivités territoriales de la France et du Sénégal,
dans l'optique d'un développement territorial local.
Les résultats dans certains cas de ces approches
s'orientent plus vers une logique de développement localisé, qui
favorise des actions ponctuelles, que d'une vraie logique de
développement local, qui s'intègre dans un cadre planifié.
Les résultats sont alors très souvent en deçà des
attentes.
La première approche, qui ne se distingue pas trop des
modes traditionnels d'appui au développement, s'intéresse plus
à l'équipement du dispensaire, qu'à l'organisation du
système local de santé, à la construction d'une
école qu'à son insertion dans le contexte social, au coût
direct des projets qu'à la mise en place d'un dispositif pérenne
de financement du développement local. Autrement dit, à la
réalisation d'infrastructures plus qu'aux dispositifs et
procédures de soutien aux innovations sociales.
D'autres agissent plus sur le registre du développement
communal, en appuyant la gestion de services urbains par des actions
ponctuelles, du type mise en place de zones artisanales, amélioration de
la qualité des services de santé, enlèvement des ordures
ménagères. Cette approche fonde son action sur le fait que
développement communal et développement local sont deux faces
d'une même pièce. Bien que souhaitable, cette articulation n'est
pas spontanée. Elle est à construire, car les institutions
territoriales nouvelles, même si elles sont détentrices du pouvoir
politique, n'ont pas une légitimité socialement reconnue. Les
dynamiques locales sont souvent portées par des forces sociales
qui ne sont pas souvent mobilisées et associées
à l'oeuvre de développement local, pour engager un avenir
commun.
Une troisième approche, celle vers laquelle les actions de
coopération décentralisée doivent être
orientées.
C'est d'abord un apport à la structuration des
sociétés. Il s'agit d'aider les collectivités
territoriales à se constituer en interlocuteur des populations et des
associations et non à se substituer à elles, de contribuer
à instaurer une notion de service public, aider à prendre en
compte l'existence et les demandes des groupes sociaux surtout minoritaires,
favoriser une attention des services publics nationaux aux demandes
émanant de la base, inciter à l'élaboration de plans de
développement...
Cette approche inciterait les institutions locales à
donner un contenu à la notion d'espace public et au rôle que les
acteurs (associations, populations...) peuvent y jouer.
C'est dans la mise en oeuvre de cette dernière
approche, lourde à conduire, que des liens devront être
trouvés entre le développement territorial et le
développement économique international, au moins sur les moyens
à investir pour soutenir le premier.
En effet, les bailleurs de fonds internationaux sont de plus
en plus attentifs à la « bonne gouvernance locale » (Banque
Mondiale), ou à la concertation des acteurs locaux (Union
Européenne). Cet intérêt se traduit concrètement par
une inflexion des outils de financement.
Ils sont aussi attentifs et préoccupés par la
problématique de la migration internationale. La mobilisation des
migrants, dans le cadre de la stratégie de mobilisation et
d'organisation des acteurs du territoire, multiplie les angles d'analyse, qui
favorisent une approche territoriale du développement. La combinaison de
ces deux problématiques n'est jusqu'ici l'apanage, que de quelques
collectivités, au nord du Sénégal. D'où tout
l'intérêt pour moi d'étudier l'articulation entre les
dynamiques territoriales en cours à Fatick avec la migration.
B- Présentation de la méthodologie
d'enquêtes
Dans le cadre de cette étude, qui consiste
à favoriser une approche territoriale locale qui impulse un
développement endogène, particulièrement à
Fatick, au moyen de la coopération
décentralisée avec la région Poitou-Charentes et de la
mobilisation des migrants, j'ai choisi les approches exploratoire et
descriptive comme méthode d'analyse.
Il était question pour moi d'interroger les faits, de
situer un phénomène : celui du développement soutenable
dans nos territoires, dans le contexte de la mondialisation. Dans cette
étude, je cherche à mobiliser d'autres acteurs, les migrants
communément appelés les acteurs « d'ici et là-bas
», pour les associer aux processus de développement à
Fatick.
Deux raisons justifient un tel choix d'approches.
D'une part, les études existantes et les débats
autour du développement font l'objet de remises en cause, tant de la
part d'auteurs libéraux, qui inspirent la doctrine des institutions
internationales (FMI, Banque mondial), que de la part de critiques radicaux
« post développementistes » qui mettent l'accent sur
l'idée d'une décroissance soutenable22, pour un
développement durable. Je pense que dans ce contexte de recherche de
valeurs nouvelles autour du concept de développement, le territoire doit
jouer un rôle important. Une approche territoriale qui s'appuie sur les
spécificités locales et les acteurs en présence, serait
une perspective heureuse à envisager.
D'autre part, les acteurs des deux territoires se sont
déjà engagés dans un processus de développement de
leurs territoires. Il s'agit dès lors de constater et d'interroger les
faits inhérents aux processus en oeuvre, les types d'acteurs
mobilisés, et de voir dans quelle mesure y associer efficacement les
migrants.
Les territoires des conseils régionaux de
Poitou-Charentes et de Fatick au Sénégal m'ont servi de cadre
d'études, mais aussi les pays de résidence des migrants Fatickois
en particulier et Sénégalais en général, qui vivent
au Portugal, en Italie et en France. Faute de moyens, j'ai suspendu
provisoirement l'étape de l'Espagne.
Des entretiens individuels, des grilles de questionnaire (cf.
table des annexes), des traitements de documents m'ont permis d'atteindre un
échantillon tout hétérogène de 65 personnes.
22 Serge Latouche, 2007
C- Analyse des résultats
d'enquêtes
? Convictions des acteurs du terrain sur le
développement territorial ;
Il ressort de l'essentiel des entretiens
réalisés avec les acteurs des deux régions, que le
développement territorial est un ensemble de pratiques liées les
unes aux autres et non des actions isolées.
A Fatick, le conseil régional, à l'instar de toutes
les collectivités territoriales, dispose de 9 domaines de
compétence transférés par l'Etat.
Ces 9 domaines peuvent être divisés eu 2 blocs de
compétences : gestion des terroirs (urbanisme, aménagement du
territoire, environnement et gestion des ressources, domaines, planification)
et l'action sociale (éducation, santé, jeunesse, loisirs et
sports, culture). Malgré ce transfert des compétences, l'Etat et
ses démembrements gardent une part importante de la
responsabilité de la fourniture d'infrastructures et de services, bien
que les prérogatives des collectivités territoriales se soient
particulièrement accrues.
Ces 9 domaines de compétences transférées
sur 18 prévues, sont-elles suffisantes pour animer le
développement territorial ?
L'ancien Président du conseil régional de Fatick
répond par la négative.
Il affirme que le processus de décentralisation en
cours au Sénégal n'est pas assez courageux, autant sur le plan du
transfert des compétences, que de la mise à disposition des
moyens qui doivent accompagner ce processus.
Selon lui, les institutions locales qui sont issues des
suffrages directs des populations jouissent d'une légitimité
avérée, mais restent encore dépendantes de l'Etat central
dans beaucoup d'aspects, ce qui pose un problème de fond, lié
à la responsabilité réelle des collectivités sur
les enjeux et défis du développement local, par rapport à
celle vécue dans la réalité des choses.
Son analyse confirme l'idée selon laquelle le couple
décentralisation, développement local, est un couple à
problème (P. Gonin)23. La décentralisation descendante
où l'Etat transfert certains de ses pouvoirs aux collectivités
locales s'oppose à l'idée du développement local (Acquino
2002). Le développement local suppose un cadre très strict ou il
y a une très grande liberté des acteurs, dans un espace
délimité socialement approprié, avec le principe de la
participation qui en constitue l'énergie.
Une telle dynamique fonctionne mieux dans le cas où la
décentralisation est ascendante, c'est-à-dire quand elle vient de
la base.
L'entretien réalisé avec le chef du service
économique de la région de Fatick confirme bien cet aspect. Les
aspects liés au développement économique
(l'élevage, l'agriculture, le tourisme, l'industrie...) sont des
compétences encore centralisées, régies dans les
compétences générales pour les collectivités
locales.
Cependant, l'article 25 du chapitre 2, du titre 2, traitant de
la région, des textes de la décentralisation, stipule en son
alinéa 2 « la région a compétence pour promouvoir
le développement économique, éducatif, social,
sanitaire, culturel et scientifique de la région, pour
réaliser les plans régionaux de développement et organiser
l'aménagement de son territoire dans le respect de
l'intégrité, de l'autonomie et des attributions des communes et
des communautés rurales ». Sous ce rapport, les
compétences de la région vont au-delà des 9 domaines
dévolus, ce qui permet au Conseil régional de prendre des
initiatives, selon l'aspiration et la demande des exigences territoriales.
23 Professeur des universités, cofondateur du MICP
Même s'il est vrai que les collectivités locales
n'ont pas la capacité de modifier ou d'infléchir les ressorts de
la création et de la distribution des richesses, par des investissements
structurants sur les infrastructures routières, les industries...( leurs
moyens étant très modestes), il n'en demeure pas moins, que leur
rôle dans l'animation du développement territorial est
fondamental, pour harmoniser le développement de manière
générale et rapprochée.
Par contre, le principe de la participation, nécessaire
pour favoriser la mobilisation des acteurs et enclencher une dynamique de
développement territorial, n'est pas encore une réalité
à Fatick. Alors qu'il est l'énergie même du
développement territorial.
Les acteurs directs du territoire rencontrés, que ce
soit le collectif des piroguiers, des guides, comme du reste certaines
associations comme la COREPA (convention pour la rénovation de
Palmarin)... attendent du Conseil régional et des autres
collectivités, qu'ils résolvent leurs problèmes, et
répondent à leurs besoins déjà
identifiés.
La bonne démarche consisterait plutôt, pour ces
acteurs, à être dans une logique d'accompagnement par les
collectivités et non aux collectivités de se substituer à
eux, pour résoudre à leur place, leurs problèmes.
La clarification du jeu des acteurs dans le processus du
développement territorial passe en premier lieu par la capacité
des uns et des autres à s'approprier les règles du jeu,
définies dans le code des collectivités locales et en second
lieu, par la volonté des collectivités de créer des
dynamiques d'information et de communication. Celles-ci, vont porter sur les
principes du développement territorial et favoriseront une
compréhension et une appropriation des méthodes.
Ceci pose un problème de fond lié à
l'éducation, comme l'écrivait Antoine Bevort24. Selon
lui « la véritable éducation ne se fait pas seulement
à l'école. L'éducation est porteuse de la question
démocratique première : mettre les hommes en capacité de
résoudre leurs problèmes eux-mêmes. »
Les défis et enjeux liés au développement
du territoire sont clairement identifiés, référence faite
au plan régional de développement intégré (PRDI).
Il a été élaboré sur le principe de la
participation de tous les acteurs régionaux et il pose les grandes
orientations du développement territorial régional, dans une
perspective de moyen et long terme.
Mais les mécanismes et les principes par lesquels tous les
acteurs sont mobilisés, pour faire valoir le principe de la
participation, restent un maillon faible des dynamiques en cours.
Le Syndicat d'Initiatives et de Promotion du Tourisme du Sine
Saloum (SIPTTS) pense en effet, que la difficulté dans sa collaboration
avec les services de la région se situe moins sur le principe de la
participation que sur celui du suivi et de l'exécution des
résolutions. Autrement dit, il est fait allusion à la performance
institutionnelle des services du conseil régional, qui en principe, se
mesure à travers sa réceptivité aux attentes des
administrés et son efficience dans la conduite des
dossiers25.
En Poitou-Charentes, l'association Accueil paysan, comme le
Parc interrégional du Marais Poitevin, semblent situer également
leurs difficultés, avec les services de la région à ce
niveau, mais surtout dans la clarification des rôles et l'accompagnement
financier, dans les dossiers de coopération
décentralisée.
Dans ce chapitre de la coopération
décentralisée, les deux régions partenaires sont en train
de réussir des actions dans différents domaines.
24 Dans «Pour une démocratie participative»,
2002, p.79
25 Putnam dans son livre: «Making democracy work. Civic in
Traditions Modern in Italy», 1993
Une analyse de cette coopération, avec la rencontre des
acteurs directement impliqués, était nécessaire dans le
but de mesurer sa portée, ses éléments de succès et
ses perspectives.
La motivation et la mobilisation des élus des deux
régions se manifestent à travers les différentes et
multiples rencontres qui se tiennent périodiquement depuis 2003. Ces
rencontres et échanges ont favorisé des convergences de vue et
d'informations pour éviter tout décalage, qui pourrait constituer
un obstacle à la prise de décisions et servent de cadres de
référence pour évaluer et initier de nouvelles actions.
Mieux, ils ont réussi à créer des mobilisations d'acteurs
au-delà des institutions régionales.
Cependant du côté de la région de Fatick,
on note une faiblesse du réseau d'acteurs qui travaille autour de la
problématique du développement territorial. L'inscription des
partenariats dans la durée passe inexorablement par l'implication des
acteurs territoriaux s'ils sont bien identifiés et organisés.
Les stratégies bâties autour d'une construction
progressive de programmes dans différents domaines, liés les uns
aux autres, comme la filière caprine, le programme de
développement des énergies renouvelables, qui se recoupent avec
le projet de développement de l'économique, qui, intervenant en
dernier ressort, leur servira de débouchés et de cadre
d'expérimentation ou d'application.
La maîtrise d'oeuvre des projets est assurée
conjointement entre les techniciens des deux régions. Des volontaires de
solidarité internationale (VSI), spécialisés dans les axes
de la coopération, sont souvent envoyés à Fatick, pour
aider au lancement des projets.
Le déficit de personnels à Fatick, lié au
manque de ressources, est un des points faibles de cette coopération,
consubstantiel à la politique de régionalisation au
Sénégal.
Ainsi la coopération décentralisée avec
la région de Fatick, avec la présence des VSI, renforce la
régionalisation, en offrant à la région, la
possibilité de répondre au mieux, aux attentes des populations
locales et de renforcer la démocratie. Tel est l'avis du chargé
de la coopération de la région de Poitou-Charentes, service
appartenant à la direction Europe et coopération.
Selon lui, les grandes orientations de la politique de
coopération internationale s'appuient
sur :
- la démarche d'excellence
environnementale, qui, tout en assurant l'amélioration des
conditions de vie des populations, préserve l'environnement;
- sur la démocratie participative qui
favorise l'implication des populations à l'identification de leurs
besoins et à la gestion des projets;
- sur le codéveloppement, qui vise
à associer les acteurs locaux en vue de favoriser des mutualisations et
des échanges de bonnes pratiques.
Il estime, par contre, que la région ne mobilise pas
encore assez les chambres consulaires (chambres de commerces d'agriculture, des
métiers...), pour favoriser des dynamiques stratégiques de
coopération économique.
Les flux d'information entre les deux régions souffrent
de lenteur, nous révèle le chef du service économique de
la région de Fatick. Ces lenteurs sont certainement liées aux
procédures de délibération nécessaires avant toute
mise en oeuvre d'actions ou de projets.
Du point de vue des réalisations de la
coopération, elles sont déjà perceptibles au-delà
de la région de Fatick, à travers le projet de renforcement de la
filière caprine : seul projet évalué sur le territoire
après plus de 3 ans (car les autres sont en cours d'exécution) et
réussi malgré les moyens financiers modestes en jeu. Beaucoup
d'acteurs d'autres régions cherchent aujourd'hui, à s'inspirer du
projet caprin ou à bénéficier de ses effets induits. Ainsi
on peut affirmer que les projets innovants qui réussissent, offrent un
positionnement stratégique.
La coopération Fatick/Poitou-Charentes a en effet
opté pour le renforcement des capacités des acteurs locaux, pour
favoriser à terme l'appropriation des actions par les
bénéficiaires et leur autonomie. Ces effets conjugués
favorisent un développement durable des projets de la coopération
et par voie de conséquence un développement durable du territoire
régional de Fatick.
Pendant combien de temps, la région de Fatick
pourra-t-elle continuer à bénéficier du renouvellement des
mécanismes d'appui surtout financier de la région de
Poitou-Charentes ?
Sur cette question réside en effet tout l'avenir de la
coopération décentralisée entre les deux
régions.
La recherche d'une pluralité de bailleurs et de
financements, en complément des moyens déjà
mobilisés, est devenue nécessaire.
ï La mobilisation et l'implication des Fatickois de
l'étranger à l'oeuvre du développement territorial: une
piste à explorer
Dans le cadre de ce mémoire, je me suis
intéressé aux migrants Fatickois en particulier et de
manière générale aux migrants Sénégalais.
L'enquête s'est déroulée dans trois pays :
la France, le Portugal, l'Italie. 65 entretiens ont été conduits,
pour une durée moyenne de 30 mn chacun, car au-delà des
réponses aux questionnaires, je me permettais d'échanger avec eux
sur la problématique migratoire de manière
générale. Certains questionnaires ont été transmis
par mails (5%) ou réalisés par téléphone (1%).
95% des enquêtés ont entre 35-44-45 et les 5%
restants sont âgés entre1 8-25-34 et au moins 85% parmi eux sont
allés à l'université.
La durée moyenne des migrants enquêtés
dans leur pays d'accueil correspond à 8 ou 9 ans, pour 98% parmi eux. Le
arrivé le plus récemment s'est installé en 2005 tandis que
le plus ancien est arrivé en 1994.
Les métiers qu'ils exerçaient au
Sénégal sont divers. Ils vont d'agent municipal, à un
ingénieur (un parmi eux), en passant par comptable, caissière,
fonctionnaire de l'Etat, et enseignants.
Dans leur pays d'accueil, où 98% sont arrivés
directement, ils mènent des activités en temps plein. Soit ils
sont employés comme ouvriers (95%), soit ils ont réussi à
se réorienter par des formations complémentaires, en vue
d'occuper des postes plus stables (2%).
Seuls 2% des enquêtés sont de sexes féminins.
97% parmi eux sont mariés, mais seulement 30% vivent en couple dans leur
pays d'accueil.
Ils sont tous repartis au Sénégal depuis qu'ils
sont arrivés en Europe, excepté 2 enquêtés, pour des
motifs différents. Pour le premier, il attend de réunir les
conditions financières et d'obtenir des congés d'au moins deux
mois. Pour le second, c'est sa situation irrégulière qui
l'empêche de retourner au pays.
A propos de leur implication dans les initiatives de
développement de leur territoire d'origine, les réponses sont
très nuancées.
D'abord il est question de réaliser leur projet
personnel avant de se lancer dans des dynamiques de développement de
leur territoire, même si l'un n'exclut pas l'autre. Cela est d'autant
plus vrai, que seuls 2% des enquêtés disposent de leur propre
maison au Sénégal.
Mais, tous sont membres d'une association, avec des niveaux
d'engagement totalement différents, des uns aux autres. Les associations
ont d'abord et avant tout pour rôle, d'assurer la solidarité entre
sénégalais, leur bien-être et l'amélioration de
leurs conditions de vie, dans le pays d'accueil. Toutes les associations sont
dans une dynamique de réseau, avec les autres associations de
sénégalais qui sont dans d'autres villes, histoire de favoriser
un flux d'informations entre sénégalais.
Seules trois de ces associations travaillent avec leur
collectivité territoriale d'accueil et bénéficient de leur
soutien, surtout en matière de subventions et parmi elles, deux
travaillent à créer des liens avec leur territoire d'origine. Il
s'agit notamment de « l'association Pistoïa/Fatick
» qui se trouve dans la Province de Pistoïa, dans la région
Nord de l'Italie en Toscan et de « l'association Dionewar
d'Aquitaine » qui est membre du réseau « association
pour la promotion de la culture Sérère » à
Bordeaux.
Une autre dénommée « association
des ressortissants de Colobane », du nom de la communauté
rurale, située dans le département de Gossas, dans la
région de Fatick, travaille en Italie de manière isolée,
sans aucune attache avec une collectivité territoriale.
A la question « Êtes-vous disposé à
vous mobiliser et à soutenir les initiatives du Conseil Régional,
dans le cadre de ses actions de coopération et de développement
territorial », environ 80% des migrants se disent disponibles pour
accompagner de telles initiatives. 5% se disent méfiants, car ils ont
peur d'être victime de manipulations politiciennes et 15%
répondent de manière nuancée, en souhaitant
bénéficier d'un temps d'observation avant de s'engager aux
côtés des actions du Conseil Régional.
Cependant, hormis les 5% qui se disent méfiants
vis-à-vis d'éventuelles manipulations politiciennes, 95%
affichent leur disponibilité à accompagner le projet
d'écotourisme et se montrent disponible pour participer à un
entretien approfondi.
Une telle participation en attendant qu'elle soit bien
définie, peut s'imaginer dans différents domaines
(multimédia, centrale d'achats, transport touristique..), qui sont
nécessaires au décollage du projet de développement de
l'écotourisme à Fatick.
ï Les conditions préalables à la
contribution des migrants, au processus de développement territorial
;
Au-delà de la condition liée au climat de
confiance à créer entre les institutions territoriales et les
migrants, l'organisation de ces acteurs à l'échelon du territoire
régional est incontournable. D'ailleurs une telle stratégie
favorise la création de ce climat de confiance.
Les migrants sont dispersés dans les pays
européens, dans les pays africains, ainsi qu'aux Etats Unis.
Leur disponibilité à participer au
développement territorial régional peut se mesurer en effet,
à travers leurs engagements qui se manifestent dans les actions
initiées en faveur des populations de leur territoire. Ces actions
s'intéressent principalement aux domaines de la santé, de
l'éducation et au renforcement des structures économiques locales
qui améliorent les sources de revenus des plus démunis.
Pour mieux bénéficier de l'apport de ses
ressortissants, la région de Fatick doit prendre l'initiative
d'organiser cette force, en fédération régionale des
ressortissants de Fatick ou en fédération des Fatickois de
l'étranger.
Déjà des points d'appui sont identifiés. Il
suffit dès lors d'approfondir cette démarche de l'élargir
à tous les pays ou un nombre important de ressortissants Fatickois est
identifié.
Une telle démarche, à l'initiative d'un Conseil
Régional comme celui de Fatick sera un positionnement réussi qui
servira d'exemple à toutes les autres régions et à terme
favoriserait la création d'une fédération des
Sénégalais de l'extérieur.
La Fédération des Emigrés
Sénégalais (FES) existe en effet. Elle poursuit des objectifs
nobles et ambitieux. Il s'agit pour elle de travailler à
l'amélioration des conditions de vie des émigrés
sénégalais et de leurs familles restées au pays, tout en
contribuant au développement économique et social de la
nation.
Mais, elle peine à être assez
représentative et assez légitime aux yeux des migrants. Loin de
vouloir créer un doublon, la FES pourrait être associée et
mise à contribution, dans une stratégie qui consisterait à
poser des jalons de base, par la création de fédérations
au niveau de chaque région Sénégalaise pour à terme
les fédérer au niveau national et international.
Une telle fédération est plus que
nécessaire, dans un contexte où la problématique
migratoire figure à l'agenda de toutes les rencontres internationales et
où notre pays ne dispose pas encore de stratégies nationales pour
valoriser le potentiel important que constitue l'apport des migrants.
Ainsi, elle serait une force de propositions et de dynamisation
des politiques nécessaires pour valoriser ce potentiel.
Les capacités des migrants constituent l'une des
ressources disponibles les plus importantes pour contribuer à la
croissance, au développement et à la réduction du niveau
de pauvreté dans leur pays d'origine.
Il ne s'agit pas uniquement du capital humain de chaque
personne (éducation, formation, compétences et connaissances)
mais également du capital financier et entrepreneurial (investissements
pour le développement à l'étranger, commerce, transferts
d'argent, épargnes, investissements commerciaux, achat de biens
immobiliers et soutien de causes humanitaires), du capital social
(réseaux, normes et valeurs qui facilitent la coopération entre
les différents groupes), du capital affectif (engagement et bonne
volonté résultant des liens affectifs du migrant avec son pays
d'origine) et, enfin, du capital local (volonté d'investir / d'agir dans
des régions habituellement délaissées).
L'utilisation productive du capital humain, dans toutes ses
dimensions, est essentielle. Elle permet la mise en place de processus de
développement, tout en contribuant à d'autres progrès,
comme la constitution d'une stabilité politique ou le respect des normes
démocratiques. Ces différents aspects peuvent conduire à
l'amélioration des conditions socio- économiques des pays
d'origine des migrants et, par conséquent, contribuer à
l'atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement.
Pour parvenir à des résultats tangibles et
positifs, plusieurs conditions doivent être réunies. Les parties
prenantes ainsi que les personnes chargées de l'élaboration des
politiques, doivent mettre en place des mesures favorables aux migrants, dans
les pays d'origine et de destination. La migration d'hommes et de femmes
hautement qualifiés, bien que représentant un atout pour le pays
d'accueil, peut créer un phénomène de fuite des cerveaux
ayant un impact négatif sur le développement des pays d'origine.
Ce problème doit être traité via la mise en place de
politiques ciblées.
Les collectivités locales, en participant au dialogue
lié à la problématique migratoire, diversifie la
possibilité pour elles de disposer d'autres mécanismes de
financement du développement de leur territoire respectif.
TROISIEME PARTIE : le
développement de l'écotourisme : un projet ambitieux de
développement territorial de la région de Fatick dans le cadre de
la coopération décentralisée avec la région de
Poitou-Charentes
A- L'écotourisme: une orientation durable du
tourisme ? Définition de
l'écotourisme
Il n'existe pas de définition internationalement reconnue
de l'écotourisme.
Selon l'organisation mondiale du tourisme (OMT)
l'écotourisme « est une forme de tourisme qui a comme motif
principal l'observation et la jouissance de la nature ». Cela veut
que dire presque toutes les activités qui ont lieu dans la nature font
partie de l'écotourisme.
Pour l'organisation EUROPARC ce sont « toutes les
formes du développement, management ou activité touristique qui
assurent la protection et la préservation à long terme des
ressources naturelles, culturelles et sociales et qui contribuent dans une
manière positive et équitable au développement
économique et au bien être des individus habitant, travaillant ou
résidant dans des espaces protégés. »
La définition de R. Ryel et T. Grasse (1991 chez T.
Whelan, éd.) le considère comme « voyage résolu qui
crée une compréhension de l'histoire culturelle et naturelle,
pendant qu'il sauvegarde l'intégrité de
l'écosystème et qu'il produit des bienfaits économiques
qui encouragent la conservation.»
L'écotourisme repose sur quelques grandes
directions26 :
- éducation des touristes : nécessité
d'une sensibilisation avant départ, prise de conscience de la force
d'intrusion du tourisme (cesser de considérer le pays à visiter
comme une carte postale), choix d'un opérateur offrant des garanties,
règles élémentaires de savoir - vivre, économie de
ressources naturelles (eau par exemple), consommer local, attention
sincère à la culture et à la vie du pays, "ne laisser
derrière soi que des empreintes de pied";
26 Extrait vade mecum tourisme (document de travail) 2005;
- formation des professionnels : sensibiliser les
employés et intervenants, instaurer une culture environnementale et
culturelle locale, établir une charte de bonne conduite ;
- respect de l'environnement et des ressources naturelles :
veiller à ne pas léser les habitants en ressources (eau,
énergie, etc.), à ne pas polluer (déchets, eaux
usées), à proposer des loisirs responsables et adaptés,
à établir une juste répartition des
bénéfices, à soutenir et utiliser l'économie et les
ressources locales.
L'écotourisme, en tant que produit touristique, favorise
t-il plus, les retombées économiques, pour les populations que le
tourisme de masse ?
Au-delà d'être un atout économique,
l'écotourisme, certes parfois contesté, car étant avant et
après tout, une activité touristique, est aussi
bénéfique dans d'autres domaines, pour les régions
rurales, comme la région de Fatick.
En effet, il est l'occasion d'une rencontre entre locaux et
citadins, d'un même pays ou de pays différents, qui peut se
révéler positive.
En premier lieu, il faut signaler que l'arrivée et
l'accueil de visiteurs nécessitent souvent de réaliser des
investissements structurants, qui bénéficieront à terme,
aux populations locales.
Parallèlement à cet apport infrastructurel,
c'est une activité qui offre la possibilité aux autochtones de
redécouvrir et de mieux connaitre leur territoire : on parle alors d'une
appropriation du territoire ou de « reterritorialisation
»27.
En effet, l'intérêt que portent les visiteurs
à leur territoire, leurs cultures, peut susciter, chez les locaux, un
nouveau regard. Ce qui n'était que le décor de leur quotidien,
devient soudainement l'épicentre de leur identité et de leurs
différences et une source complémentaire de revenus.
Aussi, face à cette prise de conscience, les
populations rurales vont entreprendre l'éveil de leur histoire assoupie.
Les jeunes générations qui, hier, avaient à coeur
d'oublier leurs racines, les coutumes de leurs ancêtres, qui fondent et
légitiment leur existence, à bien des égards, vont ainsi
prendre goût et intérêt à remettre leur patrimoine en
valeur.
On assiste alors, à la multiplication des
écomusées, des musées en plein air, des expositions et des
spectacles qui mettent en scène leurs cultures locales diverses et d'en
faire un produit éco touristique, certes, mais aussi, un moyen
d'entretenir leurs passés, qui ont tendance à disparaitre, devant
les tentations du modernisme.
Cette valorisation peut concerner :
- le patrimoine bâti, historique et artistique. Ainsi, les
sites et monuments historiques de la région se verront honorer et seront
remis au grand jour.
- Le patrimoine sociologique qui préserve et valorise,
les fêtes et pratiques traditionnelles, le folklore, les chants, et
danses, les habits, et coiffures, les arts culinaires...
Ainsi, l'on constate agréablement, que les
activités liées à l'écotourisme, permettent la
revitalisation et la réappropriation des cultures locales. Sous ce
rapport, il est donc « un ferment de cohésion sociale entre les
villageois, qui renouent avec leur passé, retrouvent par là mrme
leurs propres racines et redécouvrent le sentiment d'appartenance
à une communauté ».28
27 Dewailly, Flament, 1993
28 Conseil de l'Europe, 1993, (tourisme de montagne et rôle
des parcs naturels régionaux, Actes, 3éme colloque
paneuropéen sur le tourisme et l'environnement du 5 et 6 octobre 1993, {
Sofia, Luxembourg, p.32)
Si l'activité touristique favorise une certaine
solidarité au sein des villageois, il est aussi l'occasion d'une
rencontre entre visiteurs et résidents, rencontre d'échanges et
d'enrichissements mutuels, une forme d'ouverture vers l'autre et le reste du
monde. Le patrimoine, que les locaux vont présenter aux visiteurs, est
l'image de leurs valeurs et de leur identité. Le tourisme devient,
dès lors un vecteur d'échanges, de rapprochement culturel, qui
autour des pratiques de découverte d'une région, favorise un
semblant de compréhension réciproque entre personnes, qui ne
sont, somme toute, pas si différentes, compréhension utile pour
promouvoir la paix partout dans le monde.
Cependant, l'activité touristique, doit, pour être
un outil de réappropriation commune, répondre à un certain
nombre d'exigences.
Ainsi, « IOLIIPPIITEaP IMMelr « faire tout,
partout ». Il appartient à chaque « pays » de retrouver
ses racines et de valoriser le patrimoine qui lui est propre, en fonction de sa
culture et de son passé. Face à une demande multiple et
diversifiée, il faut éviter la standardisation et rechercher la
spécificité, sans oublier que la clientèle est devenue
exigeante et veut des prestations de qualité
».29
29 Commission environnement, qualité de vie,
croissance (1992). Mobilisation des acteurs économiques et promotion
d'activités nouvelles par l'environnement, Atelier N°4.
Ce n'est qu'à partir de ce moment, que les diverses
perversités qu'engendrent les activités touristiques, peuvent
être contenues et annihilées.
Ces perversités peuvent être
appréhendées, dans le sens où le tourisme impose des
perturbations dans le rythme de vie habituel des autochtones.
Ce phénomène concerne surtout le tourisme
international de masse, à destination précisément des pays
en voie de développement comme les nôtres, car la rencontre entre
visiteurs et visités, peut faire découvrir les différences
sociales et le fossé économique qui les séparent, ce qui
provoquent toutes formes de tentations.
Aussi, ce tourisme peut détourner les activités
traditionnelles, au profit d'autre formes d'activités, toutes
étrangères aux cultures locales. La fracture est alors
brutale.
La puissante industrie, dans le but d'assouvir sa « faim
de terre » et d'espace vital, entre en compétition avec les
activités locales, qui ne sont que de maigres rivales. Des forces
totalement disproportionnées, que les activités locales, bien
incapables de lui faire face, en pâtissent.
Elle entraine une régression rapide de l'agriculture,
autrefois nourricière des régions rurales, en plus de la
pluviométrie défavorable.
De plus, elle provoque une hausse phénoménale du
prix des terrains, qui résulte du transfert du contrôle foncier et
immobilier.
Par ailleurs, d'autres conséquences sur l'environnement
sont engendrées par les moyens de déplacement utilisés
pour se rendre d'un lieu à un autre. Les gaz à effet de serre
qu'ils émettent et qui entrainent une destruction de la couche d'ozone
et réchauffe dangereusement la planète, créent des liens
de causes à effet. L'avenir du tourisme y est lié.
B- La pertinence du projet à l'échelle du
territoire : une stratégie de positionnement régional
Un projet d'écotourisme pour préserver et
valoriser le potentiel environnemental de la région de Fatick, car,
comme on dit souvent : « à investissement égal, le tourisme
offre plus de possibilités pour les populations ».
La région de Fatick, située au sud-ouest du
Sénégal, à 150 km de Dakar, dispose d'énormes
potentialités dans le domaine de l'écotourisme.
L'activité touristique au Sénégal occupe
une place de choix dans l'économie nationale. Le ministère du
tourisme à travers un plan d'aménagement du delta du Sine Saloum,
vise à accroître les investissements du secteur dans la
région avec un objectif de 10 000 lits supplémentaires à
réaliser.
Dans ce contexte, le Conseil régional en collaboration
avec ses partenaires de la coopération décentralisée,
notamment la région Poitou-Charentes et la province de Pistoïa en
Italie, a initié un programme de développement de
l'écotourisme, dans le but d'en faire profiter les populations
locales.
Le tourisme de masse a montré ses limites face aux
défis du développement durable. Au-delà de ses effets
néfastes sur l'environnement et parfois sur les modes de vie, une
étude de la banque mondiale a montré que 55% des recettes du
tourisme reviennent au nord.
De nombreux spécialistes du tourisme solidaire estiment
que ce taux est largement sous évalué et placent plus volontiers
la part de l'ensemble des opérateurs du nord à hauteur de 75% des
bénéfices. L'écotourisme, par son caractère
durable, vise à fournir à l'ensemble du secteur touristique des
niveaux de développement durable supérieurs. Pour cette raison,
l'année 2002 a été déclarée «
Année internationale de l'écotourisme » par les
Nations-Unies.
Selon la charte Européenne du tourisme, le tourisme
durable est un tourisme qui respecte et préserve, à long terme
les ressources naturelles, culturelles et sociales, et contribue
de manière positive et équitable au
développement économique et à l'épanouissement des
hommes qui vivent, travaillent ou séjournent dans les espaces
protégés.30
En fait, on note une très grande variabilité des
retombées du tourisme car celles-ci dépendent étroitement
du niveau de structuration des économies du pays de destination : plus
une économie est structurée, plus les recettes restent sur place;
moins elle est structurée plus les recettes repartent ou restent dans
les pays émetteurs, soit de 10 à 20% dans les pays
développés de 80 à 85% dans les pays de la Caraïbe et
d'Afrique, et entre 40 et 70% pour les pays moyennement
avancés31.
Ainsi le Conseil régional de Fatick, au regard des
nombreuses îles vierges, et plages qui peuplent le delta et de la
richesse du patrimoine matériel et immatériel de la
région, cherche à organiser les populations et tous les acteurs
du territoire pour faire de la région de Fatick une destination
éco touristique de référence. L'approche plus
équitable de l'activité touristique par le partage de la rente
avec une part accrue pour les acteurs locaux, est commune à tous les
mouvements et entrepreneurs engagés dans le tourisme alternatif. Cette
option a pour ambition de favoriser un développement durable tout en
réduisant un certain nombre d'impacts négatifs environnementaux,
culturels et autres, sources de plusieurs réticences.
- Au-delà du potentiel écologique, le potentiel
historique, culturel sur toute l'étendue de la région sera
valorisé ;
- Une démarche qui peut faire de Fatick la première
destination éco touristique du Sénégal, voir
au-delà ;
C- Le Parc interrégional du Marais Poitevin :
première expérience à l'international dans le cadre du
projet de développement de l'écotourisme à Fatick,
maître d'oeuvre du projet
? Présentation du PIMP ;
Le Parc interrégional du Marais Poitevin (PIMP) est la
deuxième zone humide de France avec plus de 100 000 ha, après la
Camargue (150 000 ha) située dans le delta du Rhône.
La France compte 44 zones humides dans son territoire.
30 Définition de l'OMT
31 Extrait vade mecum tourisme (document de travail) 2005 ;
Le syndicat mixte du PIM P, dont le siège est à
Coulon en deux sèvres, est un établissement public dont le
fonctionnement et l'organisation sont régis par le code
général des collectivités territoriales et par ses propres
statuts. Il compte 4 services : l'agriculture et l'environnement, la
communication et la culture, l'aménagement et le développement
économique, l'éducation aux patrimoines en plus d'un
secrétariat général, d'un service administratif et
financier ; deux antennes existent à Saint Michel-en-l'Herm en
Vendée et à Saint-Sauveur-d'Aunis en Charente Maritime.
La zone humide du Marais Poitevin est un espace au
caractère environnemental remarquable. Ce territoire de rencontre et de
coopération entre trois Départements et deux Régions est
soumis à des enjeux et à des évolutions économiques
et environnementales complexes. C'est pourquoi il doit bénéficier
d'une politique d'ensemble et d'une gestion cohérente. Engagés
dans l'action du Syndicat mixte du Marais poitevin, les Régions,
Départements et Communes s'y emploient actuellement et ont
souhaité conforter cet engagement par le classement du Marais poitevin
en tant que « Parc naturel régional ». La deuxième zone
humide de France a besoin d'une structure capable de lui garantir une
reconnaissance, une protection et un développement à la hauteur
de ses patrimoines et de ses besoins économiques.
La Charte du Parc Naturel Régional du Marais poitevin
réunit les différents enjeux du territoire et se base sur quatre
axes :
AXE 1 : Ressources naturelles
Préserver, exploiter et restaurer les ressources
naturelles du Marais dans une perspective d'équilibre des
fonctionnalités de la zone humide.
AXE 2 : Economie
Valoriser une économie durable, génératrice
d'emploi, basée sur la production de biens et de services de
qualité.
AXE 3 : Culture et société
Favoriser l'engagement des citoyens pour une vie sociale et
culturelle dynamique, durable, solidaire et en harmonie avec les
identités du Marais.
AXE 4 : Aménagement du territoire
Promouvoir et coordonner un aménagement et une gestion
durables du territoire, cohérents à l'échelle du Marais
poitevin.
Cependant, le parc ne dispose d'aucun pouvoir
règlementaire spécifique mais doit jouer un rôle important
de facilitateur et de conciliateur, des acteurs de son territoire. Raison pour
laquelle, le Marais Poitevin, souhaite être labellisé en Parc
Naturel Régional (PNR), pour permettre au syndicat mixte de pouvoir
aider et assister tous ceux qui ont une responsabilité dans la
conservation et le développement du Marais poitevin.
Ce projet de labellisation est encore aujourd'hui, en cours
d'examen par le ministère de l'écologie et du
développement durable.
s PIMP : Structure d'accueil dans le cadre de mon
stage
S'il y'a bien une chose bien partagée dans la vie des
parcs et qui nécessite une coopération, c'est la recherche d'un
équilibre entre un développement économique, et la
préservation des écosystèmes, qui abritent une
biodiversité souvent fragile, ou des erreurs de gestion ne sont pas
permises.
Les politiques territoriales de développement durable
et de préservation de l'environnement qu'ils mettent en oeuvre vont
au-delà des territoires locaux qui abritent ces
écosystèmes. Des emboitements sont créés pour
mutualiser différentes expériences, face aux
problématiques liées à la gestion des zones humides.
Les défis et enjeux liés aujourd'hui au
réchauffement climatique, conséquence de la logique du
développement capitaliste, caractérisée par une course
effrénée et une utilisation déraisonnée des
énergies non renouvelables et la forte utilisation de pesticides
détériorant l'environnement et nos cadres de vie, appellent une
solidarité qui favorise des actions qui vont au-delà de nos
territoires respectifs.
Il s'agira dans une telle dynamique, de capitaliser et de
mutualiser les expériences dans le cadre de la coopération et de
la solidarité internationale entre parcs et sites naturels.
Le Parc interrégional du Marais Poitevin (PIMP), le
parc de Bach Ma au Vietnam, et le Parc National du Delta du Sine Saloum (PNDS)
s'inscrivent dans cette solidarité, au nom de leurs collectivités
territoriales respectives à savoir successivement le conseil
régional de Poitou-Charentes, la Province de Huê et le conseil
régional de Fatick.
Pour cette raison, le PIMP a accepté de me recevoir dans
ses services, pour les besoins de mon stage de mémoire.
A cette occasion, il me revenait la responsabilité
d'élaborer le projet de développement de l'écotourisme,
dans le cadre de la coopération décentralisée
Fatick/Poitou-Charentes.
C'est une coopération qui remonte en novembre 2008
suite à la convention tripartite signée par les
collectivités locales et les Parcs, à l'occasion du
séminaire international organisé par le PIMP.
Les types d'actions engagées s'inscrivent dans la
durée et offrent la possibilité au PIMP, de partager son
expertise et son savoir-faire dans le domaine de l'écotourisme en
particulier et de la gestion des zones humides de manière
générale. Mais aussi, c'est une occasion pour lui de s'enrichir
au contact d'autres réalités, dans d'autres pays, à
l'instar des parcs naturels régionaux Français.
Il se fera une reconnaissance internationale en tant qu'outil
de développement durable territorial, car l'enjeu de la
coopération internationale aujourd'hui est de favoriser la
coopération de territoire à territoire.
Il serait souhaitable dans cette dynamique, que le PIMP
intègre la coopération dans ses stratégies et plans
d'actions et de pouvoir faire preuve d'une ferme volonté, de contribuer
à la préservation des zones humides et des parcs naturels du
monde, qui ne représentent plus que respectivement 6% et 13% de la
superficie de la terre32 . Cette recherche d'équilibres et de
préservation des sites d'intérêt international partout dans
le monde, est une préoccupation de l'ensemble de la communauté
internationale.
ï PIMP, un des maîtres d'oeuvre du projet de
développement de l'écotourisme à Fatick pour le compte de
la région Poitou-Charentes
Mon stage au PIMP, d'une durée de 6 mois, d'avril en
septembre, consistait essentiellement à l'élaboration du projet
de développement de l'écotourisme, à mettre en oeuvre dans
la région de Fatick, pour la période 2010-2012.
L'expérience du PIMP dans le domaine de
l'écotourisme est généralement reconnue dans le territoire
de la région Poitou-Charentes.
32 Extrait du film « Home » de Yann Arthus Bertrand
Les actions conduites par le syndicat mixte du PIMP et ses
partenaires, portent sur un écotourisme de qualité, qui repose
sur la recherche d'un développement touristique, à la fois mieux
réparti dans le temps et dans l'espace. Telle est la principale
difficulté qui interpelle l'essentiel des sites à vocation
touristique, comme ceux de la région de Fatick.
Pour ce faire, le syndicat a développé plusieurs
activités de découverte de la nature.
D'abord en barque, transport par lequel, le syndicat mixte
s'est attaché à concilier, la protection de l'environnement et
l'accueil des visiteurs dès son origine, en développant des
formes douces de découverte comme la randonnée.
Ensuite, les activités pour cheval, pour lesquelles, 10
sites de loisirs équestres sont équipés en
conséquence, pour l'élevage, les concours, les loisirs dont la
Maison du cheval.
En fin des itinéraires cyclables et pédestres ont
été crées, des ballades guidées et partie de
pêche organisées.
Ces activités se sont accompagnées d'une
diversification et d'une amélioration des sites de visites et des
hébergements.
Aux contacts des réalités du territoire,
différentes dans bien des aspects du territoire de Fatick, il me
revenait de m'inspirer des expériences du PIMP, pour voir dans quelles
mesures des propositions d'axes stratégiques pourraient être
construites et mises en oeuvre.
Ainsi, le PIMP interviendra spécifiquement dans
l'étude et la mise en oeuvre d'un plan d'interprétation du
patrimoine (naturel, culturel, historique), qui va déboucher sur la
création d'un centre d'interprétation régionale, voire
lors des temps de formation auprès des guides et piroguiers.
Dans ce sillage, d'autres acteurs du territoire ont
été rencontrés et visités, comme l'exigent les
spécificités du territoire Fatickois.
A Fatick, au-delà de la zone humide du delta du Sine
Saloum qui fait 450 000 ha, la partie continentale qui se situe du centre au
nord-ouest et qui abrite principalement tout le département de Gos sas,
doit faire l'objet d'une valorisation à travers l'esprit et la
démarche « d'Accueil paysan ».
ï Au-delà du PIMP, d'autres acteurs sont
associés à la mise en oeuvre du projet
« Accueil paysan » est une association
française créée en 1987, pensée et organisée
par ceux qui vivent des activités paysannes, dans le but de valoriser le
statut du paysan qui était dans un parfait désarroi, en
intégrant des activités supplémentaires qui portent sur un
concept d'accueil chez le paysan, avec des gîtes, des chambres et des
campings.
« Accueil paysan » c'est d'abord et avant tout un
esprit, une dimension particulière de l'accueil, privilégiant les
relations humaines, égalitaires et conviviales, porteuses de la culture
paysanne, une haute conscience, qui implique et favorise un
développement territorial endogène et durable.
Ses membres s'inscrivent dans une véritable dynamique
de solidarité qui s'appuie sur les activités et commerces du
village ou du territoire d'implantation, pour booster l'économie locale,
en promouvant une consommation biologique. D'ailleurs, c'est
l'élément d'attraction, qui s'ajoute sur un type d'accueil
familial et chaleureux autour de la table paysanne où les convives
disposent d'un service de qualité et d'une alimentation issue des
exploitations paysannes de l'accueillant ou du voisinage.
Dans ses stratégies de développement,
l'association « Accueil paysan » a créé un grand
réseau, présent sur l'ensemble du territoire français,
dans deux départements d'outre mer et à l'international, dans 23
pays, notamment en Europe Occidentale et de l'Est, en Afrique et en
Amérique du Sud.
A travers ce projet de développement de
l'écotourisme à Fatick, l'association cherche à être
présente au Sénégal et à pouvoir organiser tous ses
adhérents potentiels déjà identifiés dans le
pays.
Déjà présente à l'international,
mais jusqu'ici l'association n'a jamais été sollicitée par
une collectivité territoriale dans le cadre de projets aussi importants.
Cette démarche, qui répond parfaitement à ses motivations
bâties sur l'idée d'un appui technique, dans l'organisation d'un
tourisme rural et d'un partage d'expériences avec d'autres paysans dans
d'autre pays, pour des coopérations faites d'émancipation et de
responsabilisation, leur offre la possibilité d'expérimenter la
coopération décentralisée.
J'ai eu l'occasion de mesurer, tout l'intérêt que
l'association « Accueil paysan » Poitou- Charentes porte à ce
projet, après un passage dans plusieurs sites, en Charente Maritime.
D'autres acteurs comme l'Université de la Rochelle
(département tourisme et patrimoine), l'IFREE (Institut de Formation et
de Recherche en Education à l'Environnement) Poitou- Charentes, le tour
Operator « Saïga », prendront part au projet, de manière
spécifique. Les volets formation, renforcement des capacités des
acteurs, valorisation de l'environnement, promotion et commercialisation seront
des composantes du projet. Chacun en ce qui le concerne apportera son
expertise, ce qui du reste favorise une coopération d'acteurs à
acteurs.
Sur le plan européen, la province de Pistoïa dans
la région de Toscane en Italie, dans le cadre de sa coopération
décentralisée avec la région de Fatick, interviendra dans
le projet, à travers le parc Padule Di Fucecchio.
Le volet tourisme constitue l'un des axes prioritaires de cette
coopération.
Il sera plus objet, entre autres, de créer avec eux, un
circuit éco touristique qui visera à valoriser les oiseaux
migrateurs, qui séjournent à la fois dans leur parc, dans
l'île aux oiseaux, située dans le Delta du Sine-Saloum et dans le
PIMP.
Leur mobilisation et leur implication en plus de la
région Poitou-Charentes ouvre la possibilité de solliciter des
fonds européens, ce qui leur offre la possibilité d'enrichir
leurs expériences et de créer une base de données
internationale, concernant les oiseaux migrateurs.
D- Plan d'actions du projet de développement de
l'écotourisme
· Rappel du processus d'élaboration du projet
Dans le cadre de la coopération
décentralisée entre les régions de Fatick au
Sénégal et Poitou-Charentes en France, l'axe éco-tourisme
est retenu, en complémentarité avec les autres axes de la
coopération.
La question de l'éco-tourisme a été
abordée dans une approche multi scalaire et de développement
durable en ce sens :
· qu'il intègre et vise à tous les niveaux
l'autonomisation des populations locales ;
qu'il prend en compte, s'appuie et valorise les ressources
locales pour développer des synergies et des compléments de
revenus ;
ï qu'il renforce des relations interterritoriales ou de
territorialité entre la région Poitou- Charente et la province de
Pistoïa en Italie, qu'il aide à répondre au cahier des
charges qui nous a valu notre admission au sein du club des plus belles baies
du monde en 2006, qu'il aide à créer des relations entre la
région de Fatick et ses ressortissants à l'étranger.
Malgré, le fait que le tourisme ne soit pas une
compétence transférée dans le cadre du code des
collectivités sénégalaises, le conseil régional de
Fatick a entrepris, depuis 2004, une dynamique de préservation de son
écosystème, de promotion, de valorisation du tourisme de la
région, à travers un engagement au sein du club des plus belles
baies du monde (CPBBM)33 en synergie avec le Syndicat d'Initiatives
et de Promotion du Tourisme du Sine Saloum (SIPTSS)34, et de
l'ensemble des populations de la région.
Ce qui répond en effet au rôle d'animation,
d'impulsion du développement socio- économique du territoire,
dévolue aux régions.
L'admission officielle du Delta du Sine Saloum au Club des
Plus Belles Baies du Monde en 2006, a été l'élément
déclencheur au niveau du conseil régional de Fatick, de la
nécessaire mise sur pied d'une politique de développement de
l'écotourisme dans la région de Fatick.
Et depuis juin 2007, des initiatives ont été prises
en prélude au lancement du projet :
- une étude de terrain conduite en juin 2007 a permis
de dresser un premier diagnostic (étude préalable d'un projet
d'éco-tourisme entre les régions de Fatick et de Poitou-
Charentes. Françoise Le Chanjour).
- des assises régionales du tourisme ont
été organisées les 10 et 11 Décembre 2007 à
Fatick, assises auxquelles le club des plus belles baies du monde a pris une
part importante à coté de tous les autres partenaires (conseil
régional Poitou-Charentes, Province de Pistoia en Italie).
33 CPBBM est une association internationale, de lobbying, de
promotion d'un tourisme durable, de valorisation de l'environnement, { travers
un fort engagement de respect des principes qui le régissent.
34 SIPTSS est une structure qui regroupe l'essentiel des
exploitants hôteliers de la région de Fatick ;
- un séminaire a été organisé en
novembre 2008 à Coulon au Parc interrégional du Marais Poitevin,
un des maîtres d'oeuvre du projet pour le compte de la région de
Poitou-Charentes.
Deux phases utiles dans la logique de la gestion du cycle de
projets ont été réalisées :
- L'étude effectuée en juin a
servi de document de stratégie dans la mesure où
il prend en compte tout l'existant, et a servi de programmation pour la suite
à réserver aux autres étapes du projet. Ce document est
fortement complété en effet par la présence d'Accueil
Paysan comme partenaire stratégique. Accueil Paysan devant
s'intéresser principalement aux paysans dans la partie continentale de
la région, pour favoriser une approche territoriale régionale.
- Le rapport issu des assises de décembre 2007, et le
mémorandum signé à Coulon à l'occasion du
séminaire, quant à eux, ont permis
l'identification des axes stratégiques du projet, et de
jeter les fondements de la pertinence et de la durabilité du projet,
dans cette phase de préparation, avec la participation active de
nouveaux acteurs : l'université de la Rochelle, l'IFREE, «
Saïga » et le Parc Padule Di Fucecchio.
Les étapes qui ont suivi, considérant les
approches inductive et intégrée qui ont
caractérisée la démarche, visent à
instruire le projet, en mettant en exergue ses
éléments de viabilité et de durabilité, avant
d'élaborer les actions à mettre en oeuvre ainsi
que le mécanisme d'évaluation finale du projet.
Son financement interviendra dans le cadre de l'appel à projet
2010-2012, du ministère des affaires étrangères
françaises.
Ainsi après une première réunion entre
techniciens le 4 septembre 2009 au siège du PIMP, pour partager les
premières réflexions, concernant les actions à mettre en
oeuvre dans le projet, une seconde réunion avec les élus de la
région Poitou-Charentes a eu lieu le mardi 22 septembre à
l'hôtel de région.
Contexte d'intervention du projet à
Fatick
L'économie de la région repose essentiellement
sur les secteurs de la pêche et de l'agriculture. La pression humaine met
en péril les ressources halieutiques qui deviennent de plus en plus
rares. L'agriculture subit les problèmes structurels liés, d'une
part à la mondialisation (libre échange et circulation des
produits et des biens) et d'autre part, aux aléas climatiques (baisse de
la pluviométrie, avancée de la mer et de la langue salée).
Pour ces
raisons, les conditions de vie des populations locales de la
région de Fatick se dégradent. 59%35 de la population
de la région vivent en dessous du seuil de la pauvreté, ce
chiffre démontre la vulnérabilité d'une part importante de
la population régionale.
La diversification des activités économiques, pour
un complément des revenus, familiaux et/ou individuels, devient
dès lors un enjeu vital.
Située au Centre Ouest du Sénégal
à 150 km de Dakar, la région de Fatick est limitée
à l'Est par la Région de Kaolack, à l'Ouest par
l'océan Atlantique, au Nord et au Nord - Est par la Région de
Diourbel, au Nord - Ouest par la Région de Thiès et au Sud par la
République de Gambie. Elle possède une superficie de 7 930
km2 pour 613 000 habitants, soit une densité de 77 hab.
/km2.
Dans un contexte fortement marqué par la
mondialisation, les régions de Fatick et de Poitou-Charentes ont
noué une dynamique de solidarité, au moyen de la
coopération décentralisée, qui favorise un lien
très fort entre les territoires.
35 Source service régional de la statistique, 2008
La définition de nouvelles fonctions dévolues
aux espaces ruraux, comme la région de Fatick, au regard du processus de
décentralisation au Sénégal qui laisse peu de moyens aux
collectivités locales, ne peut se réaliser qu'avec l'apport de la
coopération décentralisée.
Plusieurs conventions signées depuis 2003, favorisent
aujourd'hui la mise en oeuvre de projets dans la région, parmi lesquels
le projet de développement de l'écotourisme.
Base du plan régional de développement du
tourisme, ce projet de développement de l'écotourisme est
centré sur la dynamisation du secteur économique de la
région, pour une autonomisation des populations locales. Il s'inscrit en
effet dans le processus de réalisation du PRDI (Plan Régional de
Développement Intégré), document de planification
régionale, et s'intègre dans la politique de développement
touristique nationale.
A Fatick, le tourisme occupe une place de choix dans le tissu
économique. Il se développe grâce à ses
énormes potentialités et à l'existence de nombreux
réceptifs.
Le potentiel touristique de la région est
caractérisé par :
· Les conditions climatiques favorables de la zone
côtière,
La présence de nombreux cours d'eau et de plages de sable
fin,
L'ensemble des îles du Saloum (un chapelet d'îles,
d'îlots et de méandres), offre un charme impressionnant au travers
de sa faune et de sa flore variées,
Le Parc National du Delta du Saloum (deuxième parc
national de part sa richesse et sa superficie, après le Niokolokoba) qui
se caractérise par la diversité et la richesse de son
écosystème,
L'important patrimoine historique et socio culturel.
Trois types de tourisme existent dans la région :
· Le tourisme balnéaire localisé à
Ndangane, Dionewar et Foundiougne,
La pêche sportive pratiquée dans les
établissements touristiques de Ndangane, Dionewar, Foundiougne, Sokone
et Toubacouta,
La chasse sportive qui se pratique au niveau des zones
amodiées attribuées aux hôtels et campements.
La Région possède une faune abondante et
variée (faune terrestre, avifaune sédentaire, et migratrice).
Dans la partie Sud-est, la présence de zones humides, avec de nombreux
massifs
forestiers dont le parc National du Delta du Saloum (PNDS) et son
importante mangrove offre un habitat sécurisant pour la faune.
Il est à noter que le tourisme de découverte est
souvent associé à ces différents types de tourisme,
cités ci-dessus. Le tourisme rural intégré pourrait se
développer progressivement avec la création de petits campements
villageois.
En dehors de ces trois principales activités
liées au tourisme, la région présente un potentiel minier
fort intéressant constitué essentiellement par le sel, les
coquillages, les sables titanifères et la tourbe.
A côté du tourisme d'affaires de Dakar, du
tourisme balnéaire de la Petite Côte et du tourisme culturel de
Gorée et de St-Louis, l'écotourisme dans la région
naturelle du Sine Saloum se positionne comme une diversification de
l'offre touristique nationale et répond plus efficacement aux
objectifs de la Stratégie de Croissance Accélérée
(SCA) de l'Etat Sénégalais, qui fait du tourisme un domaine de
croissance par excellence. En ce sens, le ministère du tourisme,
à travers la Société d'Aménagement de la Petite
Côte (SAPCO), a amorcé depuis quelques années un processus
d'aménagement de certains sites de la région, dans le cadre du
plan de développement du tourisme dans le delta du Sine Saloum.
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