UNIVERSITE OMAR BONGO
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FACULTE DE LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
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DEPARTEMENT D'ANTHROPOLOGIE
Mémoire de maîtrise
La dynamique des rapports de la femme ntumu à la
forêt : cas des femmes d'Oyem et de Bolossoville (Gabon)
|
Option : Anthropologie
régionale
Présenté par : Sous la direction
de :
Judith Sylvie ELLA Paulin KIALO
Attaché de recherche à l'IRSH/CENAREST
et du
Pr Raymond MAYER
Juillet 2006
Dédicace
L'ambition d'un être est toujours motivée par le
désir d'aller de l'avant et de réaliser ses rêves et ceux
des siens.
A vous mes pères,
A vous mères
A vous mes grands-pères et grands-mères
A belle-soeur Monique
Même dans la douleur des disparitions précoces,
je continue à nourrir l'ambition que vous soyez fiers de moi.
De-là où vous êtes, continuez à guider nos pas et
regarder ce que nous sommes devenus.
REMERCIEMENTS
Nos remerciements vont d'abord à l'endroit de
Dieu, le Père pour nous avoir permis de poursuivre nos
études et surtout d'avoir toujours veillé sur nous dans les
moments les plus durs.
Au moment où nous achevons ce rapport, nos
pensées vont à l'endroit du professeur Raymond Mayer pour sa
rigueur dans la recherche ainsi qu'à la qualité de ses
orientations et de ses enseignements. Nos remerciements vont également
à l'endroit de Monsieur Kialo Paulin qui, malgré ses multiples
occupations, a toujours été disponible, quelque soit le moment.
Nos remerciements s'adressent à l'ensemble du corps
professoral du département d'anthropologie pour les enseignements
reçus durant ces années.
Nous tenons aussi à remercier nos parents et
amis : ma mère qui a su jouer son rôle malgré la
distance, mes tantes, oncles, grands-parents qui ont fait de nos études
une de leur priorité. Nous n'oublions pas ma grande soeur Hortense, ma
soeur jumelle Huguette, mes beaux-frères, notamment Antoine, Gabriel,
Vincent, mes petits frères, mes petites soeurs, tous mes enfants pour
leur soutien respectif sans cesse renouvelé. Et surtout pour
l'intérêt qu'ils ont attaché à nos études.
Nos remerciements vont aussi à l'endroit de Monsieur
Mbomeyo François et son épouse qui ont toujours marqué
leur attention à leur égard, à mon beau-
frèré Ngomba jean jacques pour son soutien matériel et sa
disponibilité. Notre gratitude va l'ensemble de nos informateurs et
interprètes qui, malgré leurs occupations, nous accordé
leur temps. Mes amis de « route », Nadia, Jean Noël,
Eddy, Annie, Yeno, Manuella, Ida, Wolgang, Eboua, Stéphane, Nadine,
Essimengane, Olivier. Percevez ici l'expression de notre gratitude. Nous
pensons aussi à ceux qui nous soutenu de près ou de loin.
Nos remerciements vont enfin à l'endroit de MEBALE
Mathurin pour son amour, son soutien moral et affectif permanent qui nous ont
aidé dans l'élaboration de ce travail.
Table des matières
Introduction
Première partie : Cadre théorique et
méthodologique
Chapitre1. Cadre théorique
Section 1: Les auteurs
Section 2: Les concepts
Chapitre 2 : Enquête de terrain
Section 1 : La pré-enquête et le
questionnaire
Section 2 : L'enquête et ses résultats
Deuxième partie : Les activités
féminines dans la forêt
Chapitre 3 : L'inventaire des activités et
la recension
Section 1 : L'agriculture
Section 2 : La pêche
Section 3 : Le ramassage et la cueillette
Section 4 : La médecine
Chapitre 4 : Le contexte culturel des
activités
Section 1 : Le rapport homme/ femme
Section 2 : Le rapport religieux
Section 3 : L'exercice du pouvoir et les liens de
parenté
Troisième partie : L'évolution du
rapport féminin à la forêt
Chapitre5 : Les activités maintenues et la
raison du maintien
Section 1. : Les constats
Section : les raisons
Chapitre6 : Les activités
transformées et les activités abandonnées
Section 1: L'observation
Section 2: Les causes du changement
Conclusion.
INTRODUCTION
Notre étude porte sur l'évolution des rapports
de la femme ntumu à la forêt dans la province du Woleu-Ntem, plus
précisément à Oyem et Bolossoville. La question sur la
femme en rapport avec la forêt avait déjà été
abordée par Pierre-Philippe Rey (1971), Claude Meillassoux (1975,
réed. 2003). D'autres auteurs tels que Galley Yawo Ganyo (1985), Roland
Pourtier (1989), Stéphanie Carrière (2001), Andrée
Corvol-Dessert (2004) se sont intéressés aux pratiques paysannes
et écologiques forestières et aux activités agricoles au
Woleu-Ntem et au sud du Cameroun (Stéphanie carrière). Ces textes
ont traité partiellement ou totalement des rapports de la femme à
la forêt.
Pour trouver des solutions et élucider notre
problème, nous avons eu recours à une enquête de terrain
auprès de vingt informateurs dont quatorze femmes et six hommes
âgés de 40 à 70 ans. Les personnes interrogées sont
du même groupe linguistique résidant respectivement à Oyem
et à Bolossoville. Nous nous sommes entretenus plus
précisément avec 5 femmes mariées, 5 femmes
célibataires, 4 veuves, 4 hommes mariés retraités, 2
hommes célibataires. Notre enquête nous a permis de collecter les
récits relatifs aux activités menées par la femme ntumu
dans la forêt.
Nous avons pu constater une certaine évolution sur
l'importance et la connaissance de la forêt. Malgré cette
évolution, il ressort que la forêt constitue le lieu par
excellence où la femme tire l'essentiel de ses ressources à la
fois dans le domaine alimentaire et dans la production des biens. Elle les
obtient en faisant de l'agriculture, de la pêche, du ramassage, de la
cueillette, et de la médecine. Le recours à la forêt a un
fondement mystico-spirituel, la femme ntumu a un « esprit »
en elle qui finalement la lie à la forêt. Ce qui lui
confère le monopole de la culture vivrière. Le corpus
collecté nous a permis de comprendre les mutations qui s'opèrent
à partir de l'arrivée des Occidentaux et
« l'intrusion » de la monnaie comme étalon dans tous
les échanges. Malgré ce fait, l'ambition des femmes ntumu est de
préserver la coutume des pratiques culturales afin de les léguer
aux générations futures. Toute la socialisation de la jeune fille
ntumu en porte la marque : elle continue, comme par la passé
à accompagner ses aînées en forêt. On peut donc dire
que la forêt, malgré son exploitation
« abusive » par les hommes, est une richesse qui occupe une
place prépondérante. Ainsi, ces deux faits : femme à
forêt et mutation dans ce milieu nous a permis de comprendre le recours
de la femme à ce milieu qui représente un tout :
garder-manger et pharmacie. La forêt, pour la femme ntumu remplie aussi
des fonctions symboliques que nous avons relevées. L'analyse des
interdits relatifs à la gestion des écosystèmes permet de
comprendre les rapports de la société ntumu à la
forêt. Ces interdits apparaissent comme fondant une attitude qui impose
à cette société de se construire avec son
écosystème. Elle présente la forêt comme
l'alliée sans laquelle la vie de la femme ntumu n'aurait finalement plus
de sens. On ne postule pas qu'elle est complètement
écrasée par la forêt, elle l'exploite dans sa
totalité. C'est une question de vie, ce qui justifie le respect à
travers les différents interdits qui encadrent la gestion ce milieu.
Ce mémoire de maîtrise vise pour objectif
l'analyse diachronique des activités que mène la femme ntumu dans
la forêt. Il porte sur les rapports de la femme ntumu à la
forêt dans le Woleu-Ntem, plus précisément à Oyem et
à Bolossoville. La forêt constitue un lieu où la femme
ntumu tire l'essentiel de ses ressources à la fois dans le domaine
alimentaire que dans la production des biens. Elle les obtient en faisant de
l'agriculture, de la pêche, du ramassage et de la cueillette, la
médecine.
La forêt se présente ainsi non seulement comme
une source inépuisable mais aussi comme une pépinière
naturelle pour agriculture itinérante. L'itinérance s'applique
aussi aux autres activités, par exemple la pêche. Comme le
souligne à juste titre Isabelle Droy « l'évolution des
conditions sociales et politiques a suscité, ces dernières
années, un regain d'intérêt pour la femme comme objet de
recherche. » Cela est inhérent au fait que « le
développement d'un pays passe par les femme, ces dernières
constituant à la fois qualitativement et quantitativement une part
importante de populations de nos pays. »
Les femmes occupent, en Afrique sur le plan social et
économique, une place déterminante. Les femmes rurales sont en
particulier d'un grand apport parce que sans développement rural, le
développement national est impossible. Par leur surplus de production,
elles participent à la vie économique d'un pays, ce surplus
étant vendu en vue de l'achat des produits d'autres produits de
première nécessité.
Dans la société traditionnelle du Woleu-Ntem,
la femme est considérée comme un bien. La puissance d'un homme,
dans ce cadre, se mesure au nombre de femmes dont il dispose. En effet, la
femme ntumu constitue la clé de voûte de l'économie
agricole. On constate en fait que par la maternité, elle assure
l'existence du capital humain. Ainsi, on peut affirmer qu'elle est la source du
maintien de cette économie. D'autre part, cette femme a le monopole de
la production vivrière. Cet et état de fait lui confère le
rôle indéniable de responsable de tout le groupe dans lequel elle
évolue.
En outre elle constitue une main-d'oeuvre d'appoint dans
l'agriculture marquant son apport de travail dans la récolte des
produits. Si on examine cette situation de près, on rend vite compte la
femme ntumu est le pilier des activités agricoles, quelle qu'elle soit.
Elle entretient de ce fait des rapports très étroits et
quotidiens avec la forêt. Elle y passe toutes les journées. Si
elle ne plante pas, elle collecte, ramasse, collecte, pêche, survenant
ainsi aux besoins de sa famille. Son absence dans ce domaine précis
aurait des conséquences « terribles » sur la vie de
la famille.
Dans ce sens, le thème que nous abordons, la dynamique
des rapports à la forêt, mérite une réflexion
approfondie. Nous cherchons plus précisément le rapport que la
femme entretient avec la forêt et ce qui sous-tend cette relation
malgré les mutations que nous pouvons observer. Pour notre part, nous
avons des corpus qui mettent en avant d'une part, les activités
agricoles de la femme en milieu rural et d'autre part la dynamique des
changements observés. Notre étude se limite à
l'observation des femmes de la ville et de celle de Bolossoville. Elle
s'articule autour de trois moments : L'approche théorique,
L'approche méthodologique et La restitution et les premières
analyses des corpus collecté.
Première partie
Cadre théorique et
méthodologique
Chapitre 1. Cadre théorique
Ce chapitre rend compte des lectures effectuées pour
nous saisir de notre objet d'étude. Ces auteurs vont des anthropologues
aux géographes, etc. Ils nous permettent ainsi la saisie totale de notre
objet d'étude.
Section 1: Les auteurs
« L'homme ne naît pas seul et ne connaît
pas seul, il lui est impossible de faire l'expérience de quoi que ce
soit en l'absence d'un univers de références, lequel forme le
creuset de son expérience.1(*)»
Nous rendons compte ici des documents que nous avons
consultés qui entrent dans les différentes rubriques de notre
interrogation.
LEVI-STRAUSS, Claude 1962 - La
pensée sauvage. Paris, Plon, 389 p.
Il est ethnologue de nationalité française.
C'est un des penseurs importants du XXe siècle. Son nom est
lié au structuralisme, dont il est un des représentants
principaux. Il est né à Bruxelles en 1908 et après des
études de philosophie, il s'est tourné vers l'ethnologie: en
1935, il part pour le Brésil comme professeur de sociologie à
l'Université de São Paulo. Au cours des années qui vont
suivre, il va étudier les tribus indiennes de l'Amazonie. C'est le
récit de ses voyages à l'intérieur de ces
sociétés dites «primitives» qu'il racontera, en 1955,
dans le livre qui l'a rendu célèbre. Exilé à New
York pendant la guerre, entre 1941 et 1945, il s'attache à une
réflexion théorique sur les systèmes matrimoniaux et il en
fera le sujet de sa thèse, qui paraîtra en 1949 : Les
structures élémentaires de la parenté.
Après s'être imprégné des
données accumulées par certains chercheurs qui ont tenté
de comprendre les rapports des sociétés
« traditionnelles » aux êtres de la nature à
travers les représentations sociales qu'ils s'en font, Claude
Lévi-strauss (1962) va critiquer la thèse selon laquelle le
«sauvage est gouverné exclusivement par des raisons organiques ou
économiques2(*)». Pour ce faire, il entame un travail de
déconstruction de ce qui avait été dit sur les
comportements et les manières d'agir des sociétés
traditionnelles, pour construire ensuite une nouvelle façon de
comprendre la pensée traditionnelle. Pour Claude Lévi-strauss, la
pensée primitive n'est pas une ``pensée prélogique'' sous
prétexte qu'elle serait noyée dans les mythes et les croyances
qui semblent être irrationnelles.
Mais, il s'agit d'une pensée qui se pose des
problèmes pour concilier la nature et la culture, parce qu'elle est elle
même- issue d'une séparation originaire de la nature et de la
culture. Autrement dit, de cette division de la nature et de la culture
découle un chaos ; un désordre. Et, la pensée sauvage est
manifestement cette médiation qui vient parer, par la classification de
l'univers, à tout «désordre» et impose
l'«ordre» puisque la nature est par essence
«désordre» et l'esprit humain se réfère à
la culture pour établir l'«ordre».
Ainsi, Lévi-strauss, après avoir
constaté la richesse et la précision des connaissances des
sociétés dites traditionnelles, société
dépassent le cadre utilitaire ou éthologique, va soutenir la
thèse selon laquelle: les connaissances naturelles visent d'abord
à mettre de l'ordre dans la nature en instaurant un classement des
choses et des êtres. Ce souci de classement, « de mise en
ordre », repose sur une logique binaire qui aime les principes de
contradiction et de ressemblance. La pensée sauvage n'est pas la
pensée des sauvages mais toute pensée humaine qui est sujette
à toute classification.
DESCOLA, Philippe 1986 - La nature
domestique : symbolisme et praxis dans l'écologie Achuar. Paris,
Maison des Sciences de l'Homme, 450 p.
Né en 1949, Philippe Descola est anthropologue
français. Il est directeur d'étude à l'Ecole des Hautes
Etudes en Sciences Sociales (E.H.E.S.S) et membre du Laboratoire
d'anthropologie sociale au collège de France. Son parcours intellectuel
est parsemé par de brillantes études en philosophie, puis il
découvre l'ethnologie et les sociétés exotiques auxquelles
il restera attaché. Philippe Descola s'intéresse alors aux
travaux d'éminents anthropologues, notamment Maurice Godelier auquel le
nom est associé à l'anthropologie économique, mais surtout
à l'approche structurale des mythologiques amérindiennes de
Claude Lévi-strauss dont - il affirme être le disciple.
Philippe Descola se consacre à l'étude des
modes de socialisation de la nature, dont il tire une analyse anthropologique
comparative. Ses recherches de terrain l'ont amené en
Amazonie, auprès des
Jivaros
Achuar. Il est marié
à
Anne-Christine
Taylor, directrice de recherche au CNRS, qui est détachée
depuis février 2005 au musée du quai Branly, où elle
dirige le département de la recherche et de l'enseignement.
En 1976, il bénéficie de la mission du CNRS
(centre national de recherche en sciences sociales) par le biais du laboratoire
d'anthropologie à l'époque dirigé par Claude
Lévi-strauss. A son retour, il rédige une thèse qui sera
publiée sous le titre: la nature domestique. En sus de cet ouvrage
majeur, il a publié de nombreux ouvrages par exemple, Les Lances du
crépuscule. Relation jivaros, haute Amazonie (1993) ou bien Les
Idées de l'anthropologie en 1988 (avec G. Lenclud, C .Severi et A.C.
Taylor). Il a aussi publié plus d'une quarantaine d'articles.
Dans l'ouvrage qui nous concerne, l'auteur présente la
société indienne achuar, d'Amérique du Sud, comme une
société dont l'imaginaire donne à la nature toutes les
apparences de la société humaine. Divisant le milieu naturel en
trois espaces (la forêt, la rivière et le jardin), la
société achuar, dans ses rapports à l'environnement,
estime Philippe Descola, ne sépare pas « les
déterminations techniques des déterminations mentales.3(*)» Aussi, montre-t-il qu'il
s'agit d'une écologie symbolique qui établit une filiation entre
la société et la nature. De ce fait, elle n'est pas une
représentation illusoire de la réalité, car la symbiose
qui existe entre cette société et la nature est influencée
par cette construction sociale du milieu
Cette lecture qu'il fait des rapports d'une
société et son espace, ne se démarque pas de sa ligne
idéologique .Pour lui, la société se pense non pas
à travers la culture, mais à travers la nature. L'homme en
inventant la culture croit qu'il cesse d'être un participant de la
nature. C'est le désire de s'affranchir, de se singulariser du reste de
la nature, qui pousse l'homme, à se doter d'un moyen (la culture)
capable de lui permettre de passer de la perception du monde à la
conception du monde, du rang de chose du monde à celui de cause du
monde. Or, l'analyse de Philippe Descola consiste à montrer que la
culture n'est pas hors de la sphère de la nature mais à
l'intérieur.
« Les cultures sont des natures », dans
la mesure où c'est en référence à la nature que
l'homme peut entreprendre toute construction : la culture sans la nature est
vide de sens. C'est parce que l'animal existe que l'homme peut prétendre
penser la société. Il n'y a pas de totems sans
référence aux éléments de la nature.
Cet ouvrage nous apporte beaucoup au chapitre consacré
au rapport de la femme achuar à la forêt, surtout à sa
plantation. En effet, celle-ci considère la plante comme son enfant,
elle lui apporte donc tous les soins possibles. Elle lui parle même, mais
elle est au moins consciente que ce n'est pas elle qui a accouché de la
plante.
DESCOLA, Philippe, 2004. Par-delà
nature et culture, Paris, Gallimard, 630 p.
Sur les bords de la rivière Kapawi, en Haute-Amazonie,
sur le territoire des Jivaros, Philippe Descola, alors jeune ethnologue,
s'interroge sur le sens du mot «nature». Devant les eaux
tourbillonnantes, il vient de s'installer dans un défrichement
adossé à des milliers d'hectares d'arbres, de mousses et de
fougères, chez les Indiens Achuar. Un monde où les bêtes
sauvages viennent habiter sur le seuil des maisons de palmes, où les
femmes font pousser le manioc en parlant aux plantes comme à des
enfants, où les hommes partent à la chasse en s'adressant au
gibier comme à des membres de leur famille.
Pour les Achuar, animaux, plantes et humains ont le
même statut. Ils ne se voient pas comme des êtres tout-puissants
face à une nature à dompter. Et les guerres, qui occupent une
grande partie de leur énergie, ne servent pas à conquérir
des territoires ou à se procurer des biens, mais à
acquérir de nouvelles identités, afin de compenser les vides
laissés par les morts, dans un système où circulent sans
cesse les êtres de chair et les âmes. L'élève de
Claude Lévi-Strauss, le père du structuralisme, tirera de cette
expérience amazonienne un livre magnifique: Les lances du
crépuscule (Plon). Un modèle de récit ethnographique.
Douze ans plus tard, devenu professeur au Collège de
France, au poste de son ancien maître à penser, Philippe Descola
publie un document fondamental qui va secouer le monde des sciences sociales.
Intitulé Par-delà de nature et culture, le livre propose de
nouveaux outils et une nouvelle approche pour classer les groupes sociaux. Une
révolution pour l'anthropologie. L'auteur, passant au crible les
récits d'autres ethnologues, ceux du passé comme ceux de ses
contemporains, raconte, avec brio, comment, des Pygmées et des Bushmen
d'Afrique aux Inuit de l'Arctique, des Samoyèdes de Sibérie et
des Papous de Nouvelle-Guinée aux Indiens d'Amérique, nombre de
peuples pratiquent le même usage du monde que les Jivaros. Un usage en
totale opposition avec l'attitude occidentale, imbue de technique,
affamée de domination, soucieuse de faire entrer dans le rang la face
sauvage de la planète.
Certes, Descola n'est pas le premier à avoir
arpenté des territoires mal connus et constaté que notre
manière de considérer nature et culture comme deux pôles
inconciliables de l'existence est peu répandue. Racontant l'historique
de ce «grand partage» proposé par la pensée
européenne, le chercheur note que la nature y est devenue
progressivement muette, inodore, impalpable. Vidée de toute vie.
Seulement, de ce constat, il tire une méthode d'analyse et esquisse une
théorie. D'un côté, dit l'auteur, il y a les corps, la
physicalité. De l'autre, l'intention, l'intériorité. Selon
les relations entre ces deux éléments, les sociétés
peuvent se répartir en quatre catégories: le naturalisme,
l'animisme, le totémisme et l'analogisme.
Ainsi, après des années pendant lesquelles
l'ethnologie, par méfiance des grandes idées, a accumulé
des monographies toujours plus fouillées, Philippe Descola, qui ne renie
pas son passé de structuraliste ni sa première formation de
philosophe, ose se lancer dans un travail théorique que personne,
actuellement, n'a entrepris. Ce travail, il l'a déjà testé
auprès de ses étudiants de l'Ecole des hautes études en
sciences sociales, à Paris, et de la London School of Economics,
à Londres.
Ce livre vient à son heure. Voilà des
siècles que les anthropologues et autres scientifiques occidentaux sont
imprégnés par l'idée que l'homme est possesseur et
dominateur de la nature. Voici qu'ils s'interrogent sur l'impasse où les
a menés cette confiance aveugle dans la technique. En proposant
d'analyser, dans d'autres sociétés, les autres arrangements avec
le visible - les objets du réel - et l'invisible - l'homme, le temps, la
mort, l'au-delà - Descola permet à l'anthropologie de repartir
sur de nouvelles bases, et de répondre aux questions de
l'époque.
Or ce penseur possède aussi un véritable talent
d'écrivain pour raconter les mythes. Il restitue ainsi une pensée
prétendument sauvage. Comme celle de ses amis Achuar, où tout
n'est que vibrations, effleurements, reflets. Où la mort ne peut
être évoquée qu'à travers une incantation: «La
lance du crépuscule arrive, esquive-la. Que chacun de tes pas te
déguise en palmier chonta.»
CLAVAL, Paul. 2003 - Géographie
culturelle: une nouvelle approche des sociétés et des
milieux. Paris, Armand Colin, 287 p.
Paul Claval, né en 1932, est géographe,
professeur émérite à l'université de Paris
Sorbonne. Il consacre ses recherches à l'histoire et à
l'épistémologie de la géographie, à la
géographie économique, sociale et politique, à la logique
des systèmes territoriaux et aux problèmes culturels.
Son ouvrage repose sur une réflexion qui
présente l'emprise de la culture sur la structure spatiale des
sociétés. Il analyse la construction de la société
et du territoire et pense que la culture fournit aux hommes les moyens de
s'orienter, de découper l'espace et d'exploiter les milieux .En plus
d'analyser la nature comme une composante de la culture, il montre que les
cultures subissent dans leur apparente stabilité des profondes crises de
restructurations. Ce qui semble être le cas d'Ekouk.
Les manières d'habiter, de travailler, de se distraire
et de prier reflètent la spécificité des groupes humains.
Elles changent d'un lieu à un autre et marquent profondément les
paysages. L'action humaine est modelée par les codes et les
représentations que les individus apprennent au cours de leur enfance et
tirent de leur expérience. Les processus de transmission des savoirs, de
construction des identités et d'établissement des normes
conditionnent les répartitions géographiques, comme le montre
l'ouvrage de Claval qui complète et approfondit les notions
exposées dans La géographie culturelle paru aux Editions
Nathan en 1995.
CORVOL, Andrée-Desser et al. (dir.)
1997 - La forêt : perceptions et représentations, Paris,
L'harmattan, 401 p.
Andrée Corvol-Désert est la responsable du
groupe de recherche sur l'histoire des forêts au CNRS français. A
travers cet ouvrage, dont elle assure la coordination scientifique, la
forêt est un univers aux richesses variées : c'est une source
d'énergie et un espace nourricier au service de l'homme. L'histoire a
évolué d'une gestion parcimonieuse à une gestion
capitaliste pour finir dans une gestion parcimonieuse sous la pression des
Organisation non gouvernementales. Les différentes étapes sont
traversées par des relations fortes entre l'homme et la forêt.
Espace de liberté, parangon d'une nature et
généreuse, source d'imaginaire pour petits et grands mais aussi
mais aussi patrimoine à conserver et à valoriser, soumises aux
impératifs de rentabilité économique : la
forêt, dont la représentation a profondément
évolué au fil du temps, est aujourd'hui l'objet d'appropriations
et d'enjeux contradictoires dans tous les pays du monde. Fruits d'une approche
interdisciplinaire réunissant historiens, géographes, forestiers
et archéologues, cet ouvrage s'efforce d'explorer les multiples facettes
de cette richesse.
Espace nourricier de l'humanité, et de bien d'autres
créatures, son existence est davantage menacée par l'augmentation
perpétuelle des besoins d'une population mondiale en constante
croissance. Par ailleurs, ces auteurs militent dans le sens de faire
accréditer l'idée d'une gestion et d'une préservation des
forêts en vue de leur exploitation durable.
LUTO, 2004 - ``Les formes traditionnelles de
gestion des écosystèmes'' in Revue Gabonaise des sciences de
l'Homme, n°5, Libreville, PUG, 331 p.
Au cours d'un colloque organisé par le Laboratoire
Universitaire de la Tradition Orale, LUTO En ce début de siècle
où l'humanité dans presque sa totalité témoigne un
intérêt profond à l'endroit d'une préservation plus
efficiente des écosystèmes, le Gabon, par le biais de ses
universités, ne s'exclu pas de cette logique. La réflexion au
cours de ces débats tournaient autour des patrimoines identifiés
et constitutifs de l'écosystème forestier, notamment les
patrimoines botanique, animal, aquatique et halieutique, foncier et enfin
humain.
Le séminaire visait plus précisément
l'identification et l'inventaire des techniques traditionnelles de
l'environnement mises en oeuvre par les ethnocultures gabonaises. Ces
techniques visent à la préservation des patrimoines
identifiés. Les croyances et les prescriptions relatives à
l'application de ces techniques n'ont pas été laissées en
marge. Toutefois, il ressort que les populations gabonaises semblent
désormais se désintéresser de ces modes de gestion.
Soulignons que ce séminaire avait réuni des
spécialités diverses : anthropologie, géographie,
histoire, botanique, médecine, environnementaliste, écologue,
etc. La mise en commun de leurs différentes problématiques a
abouti à la publication de ce numéro.
Projet Forêt et Environnement.
2000 - Etude de faisabilité des forêts communautaires
au Gabon, Rapport final, LUTO, Université Omar Bongo, 156 p.
Cette étude est initiée par les experts du
Laboratoire universitaire de la tradition orale (LUTO) de concert avec le
Ministère de l'économie forestière. Elle était
composée d'une équipe interdisciplinaire : d'un juriste (Zeh
Ondoua Jean), d'un anthropologue (Kialo Paulin), de deux économistes
(Okoué Metogo Fabien et Zomo Yébé Gabriel), d'un
écologue (Ngoye Alfred). Elle était assistée de trois
agents du Ministère des Eaux et Forêts. L'étude s'est
déroulée dans cinq provinces du Gabon : Estuaire (Ekouk et
certains villages de la Pointe Denis), Ngounié (Yétsou),
Ogooué-Lolo (Baniati et Bassegha), Ogooué-Maritime
(Idjembo-M'Pivié, Diambou) et Woleu-N'Tem (Nkang)4(*).
Elle vise à déceler, si possible, parmi les
modes de gestion traditionnelle des forêts qui existent un mode de
gestion qui correspondrait au concept de «forêt communautaire».
Après avoir sillonnés les sites préalablement choisis, les
experts constatent qu'il n'existe pas de mode de gestion répondant au
modèle dit de «forêt communautaire». La mission a
simplement constaté qu'il existe une diversité de modes de
gestion villageois des espaces et des ressources forestières. Le premier
est une gestion individualisée (Ekouk), le deuxième est gestion
lignagère (Baniati et Nkang), le troisième est une association
(Bassegha), le quatrième est une gestion locale mixte (Yétsou).
Ainsi, l'inexistence d'un modèle traditionnel unique
de gestion rend problématique la mise en place d'une gestion de type
communautaire des forêts au Gabon au sens défini par la Banque
mondial : « Mon village est plus vieux que le Gabon »
dit un informateur aux hommes de sciences au cours de cette
enquête5(*), pour dire
que l'Etat du Gabon n'a pas de prérogatives sur les terres des villages
ou encore « Mon grand-père, c'est l'Etat » pour dire
que les lignages n'existent plus à Ekouk comme structures qui
gèrent les terres, puisqu'elles sont gérées par l'Etat. Ce
qui expliquerait peut-être le « désordre »
constaté dans la gestion de la forêt.
Les experts étaient confrontés au
problème de l'identification d'un mode de gestion standard susceptible
de garantir une gestion durable des espaces forestiers. Le texte se termine par
des recommandations à l'endroit du Ministère des Eaux et
Forêts et par la proposition d'un cadre juridique relatif aux
forêts communautaires.
CARRIERE, Stéphanie.
2003, Les orphelins de la forêt, Paris,
éd. de l'IRD.
Stéphanie Carrière est docteur ès
Sciences (Ecologie, Montpellier) et chercheur (écologue, ethnobotaniste)
à l'Institut de recherche pour le développement (IRD, ex-ORSTOM).
Depuis près de 10 ans, elle porte une attention particulière
à l'écologie des paysages forestiers tropicaux à travers,
entre autres, l'étude des systèmes agricoles et de leur influence
écologique sur la régénération, principalement en
Afrique (Guinée Conakry, Tanzanie, Cameroun, Guyane). Elle est
actuellement en affectation au sein du programme conjoint IRD-CNRE Gestion des
espaces ruraux et environnement à Madagascar (GEREM-Fianarantsoa).
Dans cet ouvrage, l'auteur dénonce comment aujourd'hui
certaines pratiques ancestrales comme la protection d'arbres orphelins dans les
champs vivriers sont garantes de la durabilité du système. A
travers les phénomènes écologiques complexes, ces arbres
contribuent en effet à accélérer la
régénération forestière dans les jachères,
condition indispensable au maintien d'un équilibre en forêt et
parcelles cultivées.
Dans notre étude la présence des gros arbres
assure la protection de la forêt et de l'homme. Ce sont des
représentations symbolique et même culturelle (ou même
encore écologique, écologie elle-même étant
culturelle au sens où c'est l'homme qui pense l'écologie)
à long terme que l'homme met en place. La forêt présente la
mère nourricière des orphelins. Elle constitue pour eux un
environnement où se trouve la matière de leur survivance et leur
vie est indispensable à ce milieu. Cet aspect peut être
vérifié dans notre étude au niveau des relations que les
femmes entretiennent avec la forêt. Précisons que les orphelins de
la forêt sont les arbres qui n'ont pas été abattus.
Cet ouvrage, qui porte sur les Ntumu du Cameroun pose une
question simple mais pas moins importante : pourquoi les hommes ntumu
n'abattent-ils pas tous les arbres de leurs plantations ? L'auteur arrive
à la conclusion que les arbres abandonnés ont une certaine valeur
utilitaire et symbolique, elle en dresse d'ailleurs la liste. Dans la
même lancée, elle présente le rôle de chaque agent
dans l'exploitation de la forêt : l'homme qui s'occupe des grands
travaux (la chasse, la grande pêche), la femme qui plante, ramasse,
collecte, cueille, les enfants qui pratique le ramassage, la collecte et la
petite chasse (aux oiseaux).
MEILLASSOUX, Claude. 2003, Femmes,
greniers et capitaux. Paris, l'Harmattan, 251 p.
Claude Meillassoux est né à Roubaiv en
1975 dans une famille de la bourgeoisie textile, il obtient le diplôme de
l'institut d'étude politique en 1925, puis étudie
l'économie et les sciences politiques à l'université de
Michigan (USA) en 1949. Il est décédé le 2 janvier
2005.
A partir d'une analyse en profondeur de la production
et de la reproduction dans les sociétés agricoles
d'autosubsistance, l'ouvrage de Meillassoux apporte à la fois une
théorie du mode production domestique, les éléments d'une
critique radicale de l'anthropologie classique et structuraliste et les base
d'une critique constructive de la théorie du salaire de Marx.
Dans cet ouvrage, l'auteur fait avec promptitude une analyse
en profondeur de la production et de la reproduction dans les
sociétés agricoles d'autosubsistance. Dans notre étude, la
femme joue un rôle influant dans le domaine agricole par la
maternité, elle assure l'existence du capital humain. On peut affirmer
que la femme est la source du maintien de l'économie. Elle constitue la
main d'oeuvre d'appoint marquant son apport de travail dans la récolte.
La femme est le moteur de l'économie agricole dans les
sociétés dites traditionnelles. Mais l'introduction de la monnaie
et les outils importés déstructurent plus ou moins cette
organisation.
Cet ouvrage parut en 1975 Femmes, greniers et
capitaux, qui examine d'une part les logiques du mode de production
domestique et de l'autre les effets de sa surexploitation par le système
impérialiste. Cet ouvrage ne fait que poursuivre et développer
les idées pionnières de l'article de 1960 et de leur
explicitation dans Anthropologie économique des Gouro. La
relecture de ces textes par les autres anthropologues marxistes français
leur ont assigné une qualité quasiment biblique. Le commentaire
le plus fameux, et qui à lui seul symbolise cette réception des
idées de Meillassoux, est celui de Emmanuel Terray (1969) qui constitue
l'un des deux textes de Le marxisme devant les sociétés
« primitives » : « Le matérialisme historique devant
les sociétés segmentaires et lignagères ». Cette
réinterprétation althusserienne confirme, malgré les
désaccords mis à jour, la portée historique de l'intrusion
du marxisme de Meillassoux dans l'anthropologie.
Section 2: Les concepts
1.1. Forêt
Le concept existe dans le lexique des populations ntumu et
renvoie au terme afan, pour designer des forêts
déjà exploitées. Nous avons ici affaire à un terme
générique. Il faut préciser que les ntumu n'opèrent
pas une définition théorique de la forêt, mais leur
approche est plutôt fonctionnelle. D'autres termes existent :
ekoro (jachère), tsi (champ en exploitation de la
petite saison sèche). Mais au-delà de la simple fonction
économique que lui assigne la « modernité de
l'Occident »,
« la forêt est à la fois un ensemble de
ressources renouvelables (bois, faune, produits forestiers non ligneux, etc.)
et un espace qui, comme tel, peut faire l'objet d'utilisations
différentes et alternatives6(*)».
Cependant, nous pouvons dire que le concept forêt ne se
résume pas à la présence ou à l'absence de la faune
et de la flore. La densité du peuplement considéré est un
élément essentiel et, pour que le concept soit utilisable, il
convient que les espaces ouverts restent assez limités. Aussi, la
forêt sera-t-elle qualifiée de dense, ou ferme, si les arbres y
sont pratiquement jointifs, alors qu'on ``la tiendra pour claire, ouverte,
s'ils n'occupent qu'entre 25 et 65% de la surface totale
considérée7(*). En deçà, plutôt que de notion de
forêt proprement dite, on pourra alors parler de parc, de savane, voire
de steppe ou recourir à d'autres appellations encore selon les latitudes
des pays.
Il faut dire qu'aujourd'hui, pour arriver au concept de
forêt, des mutations successives de dérivations de sens se
seraient produites à travers le temps. Ainsi, ce serait
« Childebert II qui aurait, le premier, en 558,
utilisé le terme forêt (qui dérive du bas latin
forestare, lequel est affine lui-même à foris =
en dehors) pour designer une réserve de pêche! Par contre, le
premier usage dans l'acception de ``terrain couvert d'arbres ne remonterait
qu'à Sigebert II, en 648 8(*)».
Si l'on se réfère à la genèse du
concept, il s'agit d'un espace exclu sans doute pour le plus grand plaisir du
seigneur chasseur. Par opposition à l'espace
cultivé(l'ager) ou livré au bétail (le
saltus ), le vocable foresta (réserve soustraite
à l'usage commun) désignait à l'origine toute partie
boisée, tout périmètre dont le seigneur (dès
l'époque romaine) se réservait l'usage personnel. Le terme sylve
trouve son origine dans le latin silva (sauvage). On le confond
souvent au terme forêt. La filiation étymologique qui existe entre
sylve et sauvage (ce dernier mot est fécondé par
salvaticus et de silva) ne saurait souffrir d'oubli. C'est
semble t-il une manière de rappeler l'attitude de l'homme de forêt
des temps immémoriaux, lequel n'agressait peut-être pas son
biotope, mais assez sauvage pour arriver à vivre dans un milieu
hostile.
Grosso modo, la forêt est loin d'être un
simple ensemble d'arbres. C'est un environnement dont la définition
souffre d'une instabilité qui est fonction des données du moment
et des intérêts. Chaque société définit ce
concept selon les aspirations qui sont les siennes et les rapports
immédiats qu'elle entretient avec le dit espace.
La forêt chez les Fang se désigne
génériquement sous le terme afàn. Mais il faut
aller au-delà de ce terme pour saisir la totalité de la
nomenclature appliquée à cet espace. La jachère est
appelée ékoro. C'est cet espace mis en exploitation
pendant un certain temps, qui varie en fonction des plantes (pour la banane, la
durée peut varier de 10 à 15 ans ; pour l'arachide, 5 ans).
La forêt primaire est dite tsi, la savane XXX,
la plaine XXXX). Ce à quoi est affectée la
forêt et la végétation détermine la
dénomination donc de la forêt.
Chapitre 2. Enquête de terrain
Section 1 : La pré-enquête et le
questionnaire
1.1. La pré-enquête
La recherche scientifique est par excellence une recherche
ordonnée. Pour cette raison, chaque science dans sa singularité,
conformément à son domaine de compétence, mène son
étude suivant un ordre méthodologique qui lui est
particulière. Ainsi, «la méthodologie sur laquelle repose
l'anthropologie est l'ethnographie9(*)». Notons toutefois, que pour structurer notre
recherche nous nous sommes référé à deux rudiments
méthodologiques essentiels notamment la pré-enquête et
l'enquête.
Nous ne saurons nous en passer d'elle car
l'objectivité de notre étude y est tributaire. C'est le point de
départ de la recherche. C'est parce que nous nous sommes attelé
à la respecter que nous avons commencé d'abord par voir
l'état de la documentation c'est -à- dire, s'imprégner de
tout ce qui existe comme travaux se rapportant à notre étude. La
pré-enquête nous a donc servi sur le plan théorique
à mieux cerner notre objet par le biais de la lecture des travaux
existant. Autrement dit, la pré-enquête a occupé une place
fondamentale dans la construction de notre objet d'étude.
Sur un tout autre plan, la pré-enquête nous a
permis de préparer l'enquête avec dextérité. En
effet, l'enquête de terrain est un moment délicat. De ce fait la
pertinence des résultats est fonction de la préparation qui est
faite au départ. Ainsi, en respectant le cadre méthodologique de
la pré-enquête, des premiers contacts ont été
établis, des stratégies de collecte ont été
également élaborées. Parallèlement, nous nous
sommes rendus sur le lieu qui nous sert de terrain d'enquête pour
l'identifier, mais aussi pour évaluer les difficultés auxquelles
on pourrait être confronté.
1.2. Enquête
« Il n'y a pas d'ethnologie sans terrain
(...)10(*) » car le terrain constitue comme le
souligne Georges Condominas11(*) « le moment le plus important de notre
vie professionnelle », «notre rite de passage »
« qui transforme chacun de nous en véritable
anthropologue. » Dés lors que la pratique du terrain est une
tradition inaliénable, alors le choix des techniques de collecte
appropriées des données relatives à notre objet
d'étude s'impose.
Pour notre part, la technique de collecte des données
qui sied avec notre étude est l'observation indirecte où
« le chercheur s'adresse au sujet pour obtenir
l'information.12(*) » Il est d'une évidence certaine que
l'usage d'une telle technique implique une relation de communication qui doit
être soutenue par un guide d'entretien. Nul doute que le guide
d'entretien qui correspond est le semi- directif. C'est le plus usité en
science sociale. Il est dit semi -directif parce que « le
chercheur dispose d'une série de questions guides relativement ouvertes,
à propos desquelles il est impératif qu'il reçoive une
information de la part de l'interviewé13(*)». Toutefois, en
dépit du fait que l'observation indirecte a été la
technique de collecte qui a dominé notre enquête, nous nous sommes
tout de même permis d'utiliser légèrement l'observation
directe pour collecter certains matériaux qui consolident les
récits collectés.
Par ailleurs, la pratique du terrain au-delà de la
simple collecte des matériaux permet de rendre visible des faits
méconnus, parfois négligés, mais dont l'importance
s'avère être significative au sortir d'une analyse scientifique
méticuleuse. Cependant, l'analyse des données ne peut-être
possibles que dés lors qu'elles sont enregistrées dans des
supports. Ainsi, pour collecter nos données, nous nous sommes muni d'un
magnétophone, d'un appareil photo, d'un cahier de notes et bien d'autres
accessoires utiles pour les prises de notes.
1.2. Le guide d'entretien
- Nom
- Prénoms
- Situation matrimoniale
- Village
- Clan
- Lignage
1- Quelles sont les activités féminines en
forêt ?
2- Quelle tranche d'âge pratique ces
activités ?
3- A quelle période les pratiquent-t-elles ?
4- Comment choisit-on l'espace à mettre en
valeur ?
5- Qui choisit l'espace à mettre en valeur ?
6- Ces activités sont-elles pratiquées de la
même manière aujourd'hui qu'avant ? Si non, quel est le
changement ?
7- Y a-t-il des interdits liés à ces
activités ? Si oui lesquels ?
8- Quelles sont les tâches spécifiques que chacune
d'elles exerce ?
9- Quels sont les différents types de champs ?
10- Quel rapport existe-t-il entre la femme et la
forêt ?
11- Y a-t-il des champs pour les femmes et champs pour les
hommes ?
12- Y a-t-il des produits hommes et les produits femmes ?
13- La notion d'espace est toujours respectée de nos
jours ?
14- Parlent-t-elles aux animaux qui viennent détruire ces
champs ? Si oui , que leur disent-elles ?
15- Parlent-t-elles aux plantes ?
16- L'utilisation des plantes pérennes pose-t-elle des
problèmes particuliers aux femmes ?
17- Quels sont les espaces interdits aux femmes en
forêt ?
18- Comment nomme-t-on les espaces en langue ?
19- Quelles sont les conséquences en cas de
violation ?
20- Quelle est la tranche d'âge à laquelle
s'applique ces interdits ?
21- Qui produit ces interdits ? (Hommes ou femmes)
22- Quelle est la fonction de ces interdits ?
23- Qui sanctionne la violation de l'interdit ?
comment ?
24- Y a-t-il possibilité de réparation après
sanction ? Si oui comment se fait-elle ?
25- Qu' est-ce qui a changé avec l'arrivé de
l'argent dans ces activités spécifiques à la
forêt ?
26- Quels sont les outils utilisés par les
femmes ?
27- Qui les aiguise et pourquoi
28- Comment éviter tout accident les utilisant ?
Présentation de la zone d'étude
Situé au nord du Gabon, le Woleu-Ntem est une province
essentiellement agricole. Notre enquête s'est déroulée dans
deux localités de la Province du Woleu-Ntem : Oyem et Bolossoville.
Section 2. Approche théorique
2.1. Objet d'étude
L'anthropologie a pour ambition de comprendre l'unité
de l'homme à travers la diversité des moyens qu'il se donne pour
objectiver un monde dont il n'est pas dissociable. Dans cette perspective,
notre étude a pour objet les rapports des femmes ntumu à la
forêt. Plus précisément, notre objet d'étude cherche
à poser les bases théoriques d'une réflexion visant
à comprendre les rapports des femmes à la forêt. C'est en
réalité l'objectif que nous poursuivons, pour passer de
l'ethnographie à l'ethnologie pour aboutir à l'anthropologie.
Pourquoi interroger spécifiquement les femmes ?
Nous avons constaté au cours de nos investigations
préliminaires que les femmes ntumu étaient plus attachées
à la forêt que les hommes14(*). Effet, après le débroussaillage et
l'abattage, les espaces mis en valeur étaient laissés à la
disposition des femmes après le brûlage. La femme va donc
s'atteler à nettoyer, planter, sarcler et récolter les plantes.
Toutes choses qui fondent des liens très étroits avec la
forêt dans tous ses comportements. L'homme, pendant ce temps, s'adonne
à d'autres activités : réfection des toitures de
maisons, nettoyage des concessions, s'il ne passe son temps dans un corps de
garde. Notre étude vise donc à relever les rapports
spécifiques de la femme à la forêt.
2.2. Champ d'étude
Notre étude s'inscrit dans le champ d'étude
appelé anthropologie écologique. Cette discipline traite
des rapports de l'homme à son environnement. Elle traite plus
précisément des formes de sociabilité que l'homme applique
à la nature à travers des faits pratiques et théoriques.
L'anthropologie interroge de plus les problèmes contemporains ce qui
fait dire à Marc Augé et Jean Paul Colleyn que « Ce
qui définit la contemporanéité, c'est le fait de vivre
à la même époque et de partager des
références communes15(*)».
Si l'on considère que le problème de
l'exploitation de l'environnement est le fait surtout des femmes, il importe
d'interroger les logiques en jeu dans cette exploitation. En effet, la femme
contrairement à l'homme, passe plus de temps dans la forêt que
l'homme. Ce qui fait d'ailleurs dire à Roland Pourtier (1989) que la
femme est plus proche de la forêt que l'homme.
L'anthropologie écologique est un pan de
l'anthropologie générale qui, avec le regard qui est celui de
l'anthropologie, analyse les « rapports dialectiques entretenus par
l'homme et la nature16(*)». Par ailleurs, les rapports d'une
société à son milieu le plus immédiat ne sont pas
seulement l'apanage de l'anthropologie mais ils deviennent une
problématique mobilisatrice de plusieurs disciplines connexes ou annexes
notamment la géographie, l'histoire, l'écologie, etc. Toutes ces
sciences peuvent d'un apport fécond dans les analyses à appliquer
à notre problématique.
Pour ce qui est spécifiquement de l'anthropologie,
dès lors qu'on parle de dialectique société-milieu,
certaines écoles de pensées sont convoquées. Dans le cas
d'espèce, nous interpellons le structuralisme. En effet, Claude
Lévi-strauss en parlant de structuralisme et d'écologie17(*) estime que
« l'univers est objet de pensée au moins autant que moyen
de satisfaire des besoins18(*)». L'un de ses successeurs, Philippe
Descola19(*) qui a
étudié l'écologie des Jivaro Achuar, Indiens de
l'Amérique latine, s'inscrit dans le sillage. C'est donc en
référence à l'existence d'une telle école de
pensée que nous inscrivons notre étude.
2.3. Intérêt
anthropologique
Il s'agit dans cette partie de montrer en quoi l'étude
que nous entamons peut intéresser l'anthropologie. Notre
réflexion sur Les rapports des femmes ntumu à la
forêt revêt un intérêt majeur. En effet, nous
avons constaté que la femme ntumu est de plus concurrencée par
l'intrusion des hommes dans son univers forestier. Et cela se justifie par
plusieurs raisons, notamment : l'introduction de la monnaie, l'utilisation
des outils perfectionnée (tronçonneuse), l'usage des
râteaux, etc. Ces apports technologiques sont maîtrisés
partiellement ou totalement par les hommes.
D'autre part, étant donné que la
« modernité » des nouvelles façons de faire,
l'étude menée pourrait contribuer à fournir à
l'anthropologie des connaissances nouvelles sur la dynamique des rapports des
femmes à la forêt, sur les logiques et les comportements que
produisent et mettent en placent des populations face à la culture du
marché. Nous croyons fermement que cette étude offre à
l'anthropologie l'occasion d'explorer des nouvelles pistes de réflexion
qui mettront en lumière, à partir de la description
ethnographique, les formes de pensées qu'élaborent des
sociétés qui vivent au contact quotidien des principes qui
guident le marché20(*).
La femme ntumu dispose des méthodes qui lui sont
favorables dans l'exercice de ces fonctions. La pratique culturale courante va
du défrichement qui est le moment après lequel le champ prend
forme mais cette étape vient après le choix de l'endroit
cultivable qui incombe à la femme la plus âgée de la
famille qui a non seulement la maîtrise de la répartition des
espaces en forêt mais aussi l'expérience du milieu. Souvent comme
les aires cultivables sont en perpétuelles mutations, personne n'a le
droit d'exploiter les jachères anciennes d'autrui. La jachère est
une période de la mise en repos du champ, la reproduction du sol
exploitable. Soulignons ici dans ces forêts, on ne peut utiliser que sur
autorisation du premier occupant qui peut cependant perdre les droits de
possession et d'utilisation dans le cas où il quitte
définitivement le village pour aller s'implanter ailleurs ou simplement
lorsqu'il meurt sans laisser de véritable proches parents.
La jachère chez les femmes fang ntumu dure de huit
à quinze ans mais peut-être écourtée. Les femmes
ntumu ne calculent pas le temps de jachère mais, déterminent le
moment où un ancien champ redevient cultivable par observation de
l'aspect du boisement ou la densité de la strate inférieure qui
constitue un critère d'appréciation la jachère intervient
pour laisser reposer la terre et pour lui rendre sa fertilité.
Ici la main-d'oeuvre féminine à une moyenne
d'âge de 45 ans et les plus jeunes (6 à 12 ans). La femme dans les
travaux champêtres n'est aidée par son mari que pour le
déforestage, la femme veuve est secourue par un de ses
beaux-frères qui souvent finissent par l'épouser. Dans le cas
où aucune assistance masculine ne lui est apportée et qu'elle ne
dispose d'aucun moyen pour le financement de l'exécution de ses travaux
préparatoires, la femme est contrainte d'oeuvrer toute seule.
En outre, selon la pré-enquête, il
s'avère que la femme cultivatrice se trouvait souvent soit en
état de vieillesse donc de fatigue physique, soit de maladie. Il y a
donc faiblesse de la population masculine. En plus de ces problèmes
d'aide pratiquement dérisoire reçue de la part d'une
main-d'oeuvre masculine, la femme était également
confrontée aux problèmes posés par son outillage. En
effet, ce dernier ne permettait pas d'optimiser la production et même le
travail. On peut observer que la femme a souvent des ampoules aux mains dues
à la machette.
Les moyens de production rudimentaires étaient
à sa merci. Comme les autres formes d'agriculture traditionnelle, celle
du Woleu-Ntem ne modifie pas la structure du sol. L'absence d'attelage et
autres matériels modernes n'influençait pas encore à ce
niveau. La femme utilisait ici une gamme d'outils très simples il s'agit
de la machette " fa" pour nettoyer la parcelle après
brûlés, les semés et la récolte. La houe à
manche ebak s'utilise pour les sarclages, les semis et parfois aussi
pour la récolte notamment celle de l'arachide ou il faut
déraciner la plante avec ses fruits. Pour les boutures de certaines
plantes comme les ignames, la pioche fang ofak est pratique. Il y a en
outre la lime pour aiguiser ces différents outils. La femme adapte
cependant bien ces moyens de production à des méthodes culturales
auxquelles elle est confrontée.
Dans la province du Woleu-Ntem, la pratique culturale
courante va du défrichement qui est le moment après lequel le
champ prend le nom de tsi à ékoro, la
jachère. Ici, nous ne tiendrons pas compte de la déforestation
qui est une tâche reversée aux hommes.
Ce type de champ est par excellence celui qui est le plus
éloigné du village ou bien dans les campements, la
présence de gros arbres ou d'une végétation vieille y est
nécessaire, pour la production de la forêt et de l'homme. Aussi
cet excédent serait les représentations sociales, symboles que
l'homme met en place. C'est la base de la vie psychique car, c'est a elle que
nous faisons le plus facilement et le plus spontanément appel pour nous
repérer dans notre environnement physique et humain, les arbres
constituent un fond inépuisable de science et de savoir (Les
orphelins de la forêt).
Au Woleu-Ntem, le paysan ne cherche pas à transformer
profondément et définitivement l'écosystème
naturel, il préfère le modifier en douceur, par touches
successives, tout en lui conservant ses caractéristiques essentielles de
biomasse, de diversité génétique, de structure verticale
et horizontale. Ainsi, de génération en génération,
s'édifie un système de production, qui limite autant que possible
l'écosystème naturel de la région
considérée.
Il existe diverses opérations champêtres et les
cultures adoptées le brûlis est souvent la première
technique culturale de la femme. Il consiste à mettre du feu trois
semaines à un mois après le déforestation. Mais comme la
végétation n'est jamais totalement bien brûlée, les
femmes coupent les branches et les touffes d'herbes à
demi-calcinées qu'elles entassent par endroits et qu'elles brûlent
à nouveau.
Le dessouchage intervient ensuite par un labourage
très superficiel du sol effectué à l'aide d'une petite
houe à manche courte ebak. Cette opération que les fang
appellent a tok consiste simplement à égaliser le sol et
à faire disparaître les repousses d'herbes. Ce travail est
ailleurs mené de pair avec les derniers feux de nettoyage.
A ce moment commence les semis qui se pratiquent
généralement après les premières pluies. Durant
cette période, la femme transmet à la terre sa
fécondité. C'est une tâche très pénible car,
elle contraint la femme à rester courbée pendant de longues
heures. Suivant les plantes, il existe plusieurs types de semis. Ainsi,
l'arachide owone et le maïs fon sont semés
à plat dans un trou pratiqué avec l'ebak ou la femme
dépose deux à trois graines qu'elle recouvre avec le même
outil. Ces trous sont à intervalles de 20 à 30
centimètres. Lors de cette opération, la femme est munie d'un
petit panier de pêche nkun attaché à sa hanche au
moyen d'une ficelle de liane et contenant les semences.
Le manioc et la canne à sucre sont plantés par
bouturage qui consiste à ouvrir le sol d'un coup de machette et de
planter obliquement une bouture unique dont une extrémité sort de
terre. Les cucurbitacées ou ngone sont semées en paquets
à un ou deux mètres de distance. Parmi ces ngone, on
distingue : l'abok appelée " citrouille" de couleur verte
dont on consomme la chair après cuisson, le ndak ou calebasse
fournissant de récipients en forme de bol et le ngone"
concombre dont les petits fruits ovoïdes sont très
appréciés pour leurs graines. Outre les arachides, le manioc, les
courges, la canne à sucre, les femmes ntumu cultivent également
la banane (ekone), les ignames (andia), les légumes
(bilok), les tarots (ekamane), etc.
Après les semis, les femmes ne se reposent pas. Elles
entrent dans une autre cycle de travail de leur champ : le sarclage et les
entretiens quotidiens divers. La femme va entretenir avec son champ des
rapports très forts, on dirait même des rapports d'intimité
au sens où quotidiennement elle sera présente dans le champ en
contact permanent avec les plantes qu'elle cajolera, à qui elle parlera
parfois. Le soir venu, elle jettera un coup d'oeil pour mesurer le travail
abattu et ainsi apprécier ce qu'elle fera le lendemain.
Le sarclage intervient au moment où les mauvaises
herbes commencent à pousser. Généralement un premier
sarclage même soigneusement fait ne suffit pas à éliminer
les herbes qui prolifèrent dans les champs pendant la saison pluviale.
Les femmes sont donc obligées d'exécuter plusieurs fois cette
tâche (deux ou trois fois). Ceci est important pour les champs
d'arachides surtout qui donnent de mauvais rendement lorsqu'ils n'ont pas
été méticuleusement sarclés.
Le sarclage est une opération que les femmes
effectuent en adoptant la même position que lors de semis. Elles
utilisent également la même houe qui va soulever une mince couche
de sol sectionnant ainsi les touffes d'herbes. Cette technique est suivie des
récoltes qui différent selon les cultures. Pour les arachides,
les femmes emploient toujours l'ebak avec lequel elles piochent d'une
main et arrachent les touffes de l'autre pour faciliter la venue des gousses
qui sont rassemblées et mises à sécher dans le champ. Ces
gousses, généralement posées sur de gros troncs
calcinés, sont cueillies le lendemain et transportées au village
dans les paniers à dos ou des corbeilles. Ces arachides sont mises
à sécher sur de larges plateaux en bambous ou " étang".
Accrochés au dessus des maisonnette en forêt.
La femme les versent dans les paniers et les amènent
au village pour les mettre dans de gros greniers cylindrique ou angun.
Ces récoltes d'arachide s'effectuent en décembre pour les
plantations d'oyon21(*) et en mai-juin pour celle d'esep22(*). Elles se font
parallèlement à celle du maïs. Souvent, au moment ou les
plantes commencent à donner des fruits les animaux ou les oiseaux
viennent dévaster le champ. Les femmes emploient
généralement des symboles23(*) pour faire fuir les oiseaux et les pièges tout
autour de la plantation pour freiner les petites bêtes, sans ces
stratégies les femmes ne peuvent rien récolter.
La récolte du manioc se fait durant toute
l'année au fur et à mesure que les besoins se font sentir. Les
femmes cueillent les feuilles les plus jeunes pour préparer une bouillie
mendza'a aussi pour permettre à la plante de mieux grossir.
Elles arrachent en outre les tubercules soit pour les bouillir après les
avoir épluchées, soit pour les tremper dans un coin du marigot
pour la préparation ultérieure des bâtons de manioc qui
accompagnent la majorité des plats. Quant aux courges, elles sont
récoltées vers le mois d'octobre, lorsque les ses feuilles ont
séché. Les fruits sont cueillis et amassés et mises
à ablatir pendant deux ou trois semaines afin de faciliter la collecte
des graines. Celles-ci sont ensuite lavées au marigot à l'aide du
filet de pêche féminine afin de les débarrasser de la pulpe
pourrie.
Les femmes les ramèneront ensuite au village où
elles sont mises à sécher au soleil. C'est le moment qu'on les
saupoudre de terre rouge pour qu'elles soient moins glissantes lorsqu'on les
casera pour la préparation des mets. En outre, la banane et la canne
à sucre sont récoltées au fur et à mesure que les
besoins se font sentir le long de l'année. Lorsqu'un champ est
vidé par suite de la récolte de toutes ses cultures, les femmes
l'abandonnent pour une période de huit à quinze ans qui permettra
au sol de reprendre sa fertilité en régénérant une
végétation exubérante.
La société ntumu se caractérise par
l'esprit communautaire (ekama) et de fraternité qui s'y
règne. Au moment où les travaux agricoles s'accumulent, une femme
à la possibilité de faire appel à ses proches parents. La
durée du temps de travail du groupe dans le champ de chacune des membres
varie de quelques jours. Il s'agit généralement des femmes
appartenant à un même lignage et possédant des exploitation
dans le même bloc parcellaire. Elles ne sont liées par aucune
obligation et cette alliance de circonstance peut-être rompue à
tout moment. Or a quoi assiste-t-on aujourd'hui ? Quel est le changement
qui s'opère depuis l'avènement du capitalisme et les mutations
comme l'exode rurale ?
Les activités de la femme et l'avènement du
capitalisme et nouvelles technologies la pratique de l'agriculture n'est plus
réservée essentiellement aux femmes les plus âgées,
où l'homme ne s'occupait que du déforestation et le reste du
travail était essentiellement assigné à la femme. A
présent dans le Woleu-Ntem, nous assistons à un changement
où l'homme est de plus en plus impliqué dans tout le processus de
l'activité agricole.
La terre devient, un bien marchand ou un étranger qui
voulait s'installer devait s'intégrer socialement en prenant une fille
ou un fils du village en mariage, ou participer à la vie communautaire
etc. Il devait nécessairement parler la langue du terroir afin de ne pas
troubler les esprits autochtones de ces lieux. Cette conception sous-tend une
idéologie d'assimilation tranquille, car l'étranger en vertu du
fait qu'il établit sa résidence, partage le même
environnement que les autres habitants.
En réalité, il s'agit d'une véritable
mutation dans les modes culturaux. Les anciens du village en pratiquant la
jachère se soumettaient à un mode parcimonieux d'exploitation de
l'environnement où la notion de recyclage était mise en valeur,
c'est-à-dire qu'à l'exploitation succède le repos pour une
mise en jachère. Mais depuis un certain temps il est constaté que
les engrais chimiques sont de plus en plus utilisés. L'utilisation des
engrais chimiques ne permet donc plus de laisser le sol au repos. Ils sont
utilisés pour l'amélioration de la qualité des produits et
pour la rapidité à être consommés.
Tout le monde est aujourd'hui en situation de campeur
permanent tant dans son propre village que partout ailleurs. La monnaie aidant,
on passe de l'exploitation parcimonieuse dont le souci était la
préservation du milieu, qui garantissait aux générations
futures des ressources nécessaires pour leur épanouissement,
à une exploitation totale des terres dominée par le cours terme.
Les interdits qui existeraient en matière de forêt ont
été mis de coté, alors que Jean-Emile Mbot, du temps de
nos pères :
« [ ...] domaine par domaine qu'il s'agisse de la
gestion des eaux, des forêts, des sols, de l'espace habité comme
de l'espace exploité, des centaines d'interdits et de prescriptions
imposent des formes spécifiques de gestion des écosystèmes
en dictant à la société les conduites à tenir dans
des rapports avec l'environnement » (Mbot 1997 : 17).
La main d'oeuvre n'est plus essentiellement féminine,
certaines femmes à présent ont des ouvriers qui travaillent
à leurs champs pour un minimum de revenu. Une femme peut être
salariée et avoir un champ ou elle s'y rend chaque week-end afin
d'améliorer les conditions d'existence. Les hommes aussi exercent
maintenant des activités agricoles dans le Woleu-Ntem. Comme les autres
formes d'agriculture à présent les femmes ntumu utilisent une
gamme d'outils moderne, il s'agit du déforestage qui est un travail
masculin la tronçonneuse só a remplacé la hache.
La machette qui sert de nettoyage a été perfectionnée au
niveau de la matière. Comme nous l'avons observé du
paléolithique à la métallurgie en passant par le
néolithique, l'homme adapte les outils en fonction du milieu. La lime
est remplacée par la machine déguisement.
Dans les techniques culturales, toutes les tâchent
incombent maintenant aux sexes. Les femmes ntumu abattent des arbres surtout si
elles n'ont plus de mari et qu'elles ne possèdent non plus les moyens
financiers. De même, à présent l'homme est impliqué
dans tout le processus du brûlis, dessouchage, labourage jusqu'au semis.
Il faut souligner que les types de semis sont toujours les mêmes.
Le remplacement des outils traditionnels par les outils
modernes a rompu le lien spirituel existant entre la femme et ses instruments
de travail, malgré ce changement la femme reste toujours au centre des
activités agricoles. En outre, les femmes produisent maintenant pour un
but économique. L'avènement du capitalisme (arrivée de la
monnaie) et l'exode rurale (l'homme à la recherche de son mieux
être) ont fait en sorte que l'activité agricole soit
exploitée non plus pour une production de subsistance mais pour
multiplier la production avec des méthodes qui suivent afin que le
surplus soit vendu et qu'elles acquièrent d'autres produits de premiers
nécessités. A présent nous remarquons au Gabon chaque
année le Ministère de la Famille octroie des prix aux femmes
meilleurs agricultrices. Cette innovation permet de « renvoyer la
femme à son écosystème ».
2.4. Le problème et les
hypothèses
2.4.1. Le problème
Ce rapport de licence à pour objet le Rapport de la
femme fang Ntumu à la forêt. Dans ce travail nous voulons monter
que dans la province du Woleu-Ntem, la femme contrôle presque
exclusivement l'activité agricole. Cette situation apparaît
nettement par l'éminence de son rôle dans les activités en
forêt. Les activités en forêt se distinguent en
générale dans le Woleu-Ntem par des productions rudimentaires,
l'insignifiance des forces de production, l'itinérance des champs et par
la faiblesse des rendements. Compte tenu de ces caractéristiques
traditionnelles et celle de ses techniques culturales conduiront en dernier
ressort à l'étude de la production agricole.
Les différents droits fonciers traditionnels ce sont
ceux qui régissent les lois concernant la terre et la jachère
entre plusieurs villages voisins à l'intérieur de ceux-ci. Ces
droits sont aliénables et les ayants droit sont simplement usufruitiers.
Les terres du Woleu-Ntem sont comme dans toutes les sociétés
rurales du Gabon domaniales. Cependant ce caractère juridique est
quelque peu fictif car, bien qu'appartenant à l'Etat, elles sont avant
tout mises à la disposition des villageois qui en font usages.
Dans un village, la terre appartient à toute la
« collectivité » mais, le simple fait de
déchiffrer un espace inculte donne au premier occupant le " droit de
propriété". Ce droit reste permanent, transmissible aussi
longtemps que l'on vivra dans le village. Les membres des familles qui
composent cette communauté sont considérés comme des
ayants droit mais ne sont qu'usufruitiers et à ce titre. Ils ont le
droit d'exploiter la partie de terre qui leur revient. Le droit de terre est
lié aux fruits qu'elle porte. Toutefois, l'introduction des plantes
pérennes (café, cacao) a bouleversé les conceptions du
droit de propriété de la terre et implique le prolongement
indéfinie du droit d'un individu sur une parcelle donnée et tend
à faire de celle-ci la propriété du paysan planteur. Des
groupes claniques eux-mêmes subdivisés en lignages
possèdent à l'intérieur de chaque village un territoire
agricole sur lequel ils étendent leurs droits. Les limites
lignagères ou entre deux villages se reconnaissent par des
repères souvent naturels que respecte chaque femme.
Le cas de regroupement de population en gros villages
(Sougoudzaville), Bolossoville, Bissok) pose un problème de terre aux "
nouveaux venus", surtout aux habitants des villages qui se sont
déplacés et qui ont abandonné leur terre. Ces terres
deviennent des campements que les femmes vont exploiter saisonnièrement.
Les " intrus" négocient les accords d'occupation d'une parcelle avec les
propriétaires des sols sur lesquels les " étrangers" n'ont pas le
droit de cultiver que sur l'approbation des propriétaires. Ce droit de
culture s'exerce gratuitement sous formes de prêts temporaires
octroyés aux niveaux venus que ne s'approprient que des produits de leur
champ et par la suite, la parcelle cultivée peut être reprise.
La dialectique société humaine-milieu naturel a
souvent attiré l'attention des chercheurs en anthropologie (Steward
1956, Mauss 1993, Carrière 2003). Notre regard est orienté vers
les rapports de la femme ntumu d'Oyem et de Bollossoville à la
forêt. Dans son analyse des rapports société-milieu
naturel, Claude Lévi-strauss (1962) estime que les
sociétés traditionnelles gèrent parcimonieusement leur
milieu naturel. Ce qui lui fait d'ailleurs écrire :
« Si différentes que ces dernières
sociétés soient les unes les autres, elles concordent pour faire
de l'homme une partie prenante, et non un maître de la création.
Par des sages coutumes que nous aurions tort de reléguer au rang de
superstition, elles limitent la consommation par l'homme des autres
espèces vivantes, et lui en imposent le respect moral, associé
à des règles très strictes pour assurer leur
conservation.24(*)».
Dans la même perspective, Philippe Descola en 1986
écrivait
« la finalité d'un bon usage de la nature
n'est pas l'accumulation infinie d'objets de consommation mais l'obtention d'un
état d'équilibre (...).25(*)».
Cette gestion mesurée, dont font montre les
sociétés traditionnelles, ne fait nullement pas mention de
l'existence d'une certaine cohabitation de plusieurs types d'attitudes dans un
même espace pour en savoir un peu plus sur le comportement qu'elles
afficheraient vis-à-vis de la nature, particulièrement la
forêt. Face à la richesse des travaux des différents
auteurs, nous nous posons les questions suivantes : Quels sont les
rapports spécifiques de la femmes ntumu à la forêt ?
Qu'est-ce qui soutient cette relation, quand nous savons qu'aujourd'hui, les
phénomènes externes comme le capitalisme, l'exode rural, les
marchés ont pris une grande place dans nos
sociétés ?
2.4.2. Les hypothèses
- La forêt comme matrice de la vie des femmes fang
renvoie à l'idée que toute la vie des femmes, toutes les
activités agricoles voire même toute leur existence n'a de sens
que rattachée à ce milieu. La forêt nourrit tant sur le
plan spirituel que sur le plan physique.
- La forêt est un « Internet
traditionnel » ou les femmes vont apprendre à
échanger leur savoir faire. Chaque forêt correspond à un
site où les femmes peuvent exploiter d'autres connaissances. Une
école d'apprentissage de mère à fille. La femme ntumu a
une richesse qui dépasse celle de l'argent qui fini, cette richesse
liée à la forêt qui est inépuisable.
DEUXIEME PARTIE :
APPROCHE METHODOLOGIQUEChapitre Résultat de
l'enquête
Section 1. Les corpus
1.1. Corpus factuel
1.1.1. Les informateurs
Pour collecter les informations, nous avons opté pour
un guide d'entretien. Nous l'avons administré auprès de 20
informateurs composés de 15 femmes et 5 hommes. Cette
répartition se justifie par le fait que les femmes constituent l'objet
de notre travail.
La première informatrice est madame Mbang
Delphine que nous rencontrée à Bolossoville. Elle est
veuve, âgée de 61 ans et mère d'une nombreuse famille. Elle
est du clan eba'a. Elle est de confession chrétienne
protestante. Son activité principale est l'agriculture. Elle est
présentée en photographie 3. Elle nous a accueillie
chaleureusement, nous avons même passée une nuit chez elle, dans
une chambre mise à notre disposition. Le matin après le
petit-déjeuner, nous l'avons accompagnée aux champs. Nous avons
marché pendant une bonne heure. Aussitôt arrivée au champ,
nous avons démarré notre entretien qui a duré 45 minutes.
Bien entendu, cet entretien était entrecoupé de quelques
tâches.
La deuxième informatrice Zang
Madeleine, 74 ans, native du village Konoville, est veuve et
mère de 6 enfants. Elle est du clan éba'a. Son
activité principale est l'agriculture et de confession chrétienne
protestante. L'enquête a été menée dans son
d'arachide en situation. Nous avons expérimenté la plantation
d'arachide dans une portion de terre de son champ. Cela en souvenir de notre
rencontre. Elle nous édifiée sur la forêt source comme de
vie. Notre entretien a duré 1 heure.
Le troisième informateur, Abagha Nguéma
Emmanuel, retraité de la gendarmerie, que nous avons
rencontré au village Bolossoville, est marié à trois
femmes et père d'une nombreuse famille. Il est de confession
chrétienne protestante. Nous avons réalisé notre entretien
en présence de ses frères du village autour d'un repas. Nous
avons collecté plusieurs données relatives à notre
préoccupation. Notre entretien a duré 30mn.
La quatrième informatrice est madame Abagha
Micheline dont l'âge est de 56 ans. Elle est du village Abame
Andok, du clan esadumgo. Il est marié sans enfant. Son
activité principale l'agriculture. Elle est protestante. Elle nous a
reçu sans soupçon et l'entretien s'est déroulé dans
des bonnes conditions malgré la chaleur et les insectes. Elle nous a
exprimé sa joie et a répondu à toutes nos questions. Elle
s'exprimait correctement en français. Elle nous a édifié
sur les mutations relatives aux instruments utilisés par les femmes dans
le cadre des leurs travaux champêtres.
De retour au village, nous avons rencontré la
cinquième informatrice Esseng Jeanne du clan
esabok. Elle est divorcée sans enfant. Elle fait de
l'agriculture d'auto-subistance. Cette informatrice nous encadré durant
notre enquête de terrain. Elle s'est montrée accueillante et
ouverte. Elle nous conduisait de maison en maison afin de rencontrer d'autres
informatrices. Celles-ci nous remettaient chaque fois de l'arachide, de la
banane, produits de leur activité.
Le sixième informateur, Obame Cassi,
de nationalité équato-guinéenne, vit avec une femme de
Mebane Endama. Il est né en 1962, de religion chrétienne
protestante. Il a reçu au domicile de ses beaux-parents. A cause de ses
multiples activités en forêt, il a préférée
ce jour-là très tôt. Peu après notre entretien, il
avait regagné son campement de plantation de banane.
De retour sur Oyem, nous nous sommes rendue au domicile de
Ndogo Philomène, notre septième informatrice.
Elle est née en 1950, est divorcée et mère de 7 enfants.
Elle est du clan nkodjè. Elle est originaire du village Methui.
Retraitée de Gabon Poste, elle pratique de l'agriculture. Elle
catholique pratique. Elle nous a accueillie à bras ouvert et nous avait
mis un seau d'eau à la douche. Nous avons plutôt du mal à
nous adapter au changement de climat. Après nous avons été
conviée à un repas. Le lendemain, nous avons accompagnée
notre informatrice en forêt et l'enquête s'est
déroulée en situation après 1h30mn de marche.
Malgré son état de santé, elle a répondu à
toutes nos questions. Nous avons commencé par l'ancienne plantation,
où elle collectait ses semences à la nouvelle. Notre entretien a
duré toute la journée.
En forêt, nous sommes entretenu avec notre
huitième informatrice, Obone Anastasie du clan
nkodjè. Elle est veuve et mère 4 enfants. Elle
réside au quartier Methui. Retraitée de l'Ecole des cadres ruraux
d'Oyem, elle vit de l'agriculture. Elle est née en 1936. Avec elle nous
sommes entré dans le vif du sujet, et n'avons rencontré aucune
difficulté. Elle était informée de notre et nous
attendait. Nous nous sommes entretenue avec elle autour d'un repas.
La neuvième informatrice, Obone Madeleine, elle est
originaire de Bolossoville, du clan esabok. Veuve sans enfant, née vers
1930, elle vit de l'agriculture. Cette informatrice nous a édifié
sur les rapports de la femme à la forêt. Elle n'arrivait pas
à s'exprimer correctement parce qu'elle souffrait de la grippe.
Le dixième informateur, Mba Ondo Jean
de Dieu du clan oseseigne. Marié et père d'une nombreuse
famille, il est né en 1953. Nous avons rencontré cet informateur
au Boulevard Triomphal à Libreville. La discussion s'est
déroulée dans une bonne ambiance, sauf qu'il avait refusé
de faire enregistré. Notre entretien a duré 15mn. Il nous a
présenté les bananiers plantés par lui dans sa concession,
preuve qu'il est resté attaché aux travaux de la terre.
Informateur 1 - Entretien en fang en mars
2006 avec Abagha Nguéma Emmanuel26(*) sur Les mutations des
activités en forêt27(*).
Texte en fang ntumu
|
Traduction libre proposée
|
1. okwa aba tsi embe ésè dè. minga
asum ésè eyong be nga tok tsi ye ke kwi badzi. befame ba bo
bisè bi fe. embe éki na fam evole minga atsi eyong akome.
|
Jadis, après le débroussaillage qui était
notre tâche spécifique à l'homme, la femme prenait la
relève à partir du nettoyage jusqu'à la récolte.
Les hommes se reposaient, mais cela n'était interdit d'apporter de
l'aide à la femme quand elle en avait besoin.
|
2. abong di befam be nga bo mefup ane binga nkane we se ki
fe miang amana zu sanle mame me. more ase a anga kube ya fave nkobe
miang.
|
A présent les hommes exercent les mêmes
activités que les femmes. Il n'y a plus d'exclusivité. L'argent a
bouleversé nos façons de faire d'avant. Tout le monde parle
maintenant en termes d'argent.
|
3. beyong benga zua some bebak mesi, ebe bia; naba
bègne bake kwane bidzi bakul ékas. Bakang ki fe efu si. Bot be
nga dzeng miang.
|
Il y a des étrangers qui viennent acheter les portions
de terre chez nous pour planter ; ils vont vendre leur production au
marché. Le droit foncier n'est plus respecté, l'homme est
à la recherche du profit.
|
4. ema ma kobe myè va, mebele afube bikone. maba
abong di édi menga tare ba embu yate menga dzia ya de.
|
Moi qui vous parle, j'ai une plantation de banane que je suis
entrain d'abattre en ce moment. Celle de l'année dernière est
déjà en exploitation.
|
5. babeme yebe bikone amuna ede da kulu abui mone. Ekone
dasiliki abui ésè. eyong meke afan, makik nsa ekone mefure nkuegn
mekèn adzè nbong asile abui èsè na be kwane
wo
|
On préfère la banane parce qu'elle produit plus
d'argent que les autres produits. De plus la banane n'exige beaucoup de soins.
Quand je pars en forêt, je coupe le régime de banane que je mets
dans mon panier et je transport au village. Alors que le manioc
nécessite plusieurs étapes avant sa mise en vente.
|
6. na be dzi afub ekwane ene ayap. évong dafe otene
otene. ekone batsik dali bone befe asi te. badzi nbong ye bidzi bivo eyong
de.
|
La plantation de banane peut être exploitée sur
une longue durée. Les rejets de bananes germent au fur et à
mesure. Le régime qui a été coupé est
aussitôt remplacé. Ce n'est pas le cas pour le manioc et les
autres espèces.
|
7. mabo mefup bikone amuna ma dzeng miang ma se ki fe me
bele binga bele ye bone abui ma yale. nge ma boke se, ndzang bot wome, we boye.
ese ntang da mane, begna bot benga li bie akum afan. akum te da mane ki. da bir
fe eyong base de.
|
Je fais les plantations de banane parce que je cherche de
l'argent. Je suis un retraité et j'ai trois femmes et des enfants sous
ma charge. Si je croise les bras, que va devenir ma famille ? En dehors du
travail du Blanc qui finit, nos ancêtres nous ont laissé une
grande richesse qui est la forêt. Cette richesse ne finit pas, au
contraire elle se renouvelle au fur et à mesure qu'on l'exploite.
|
La femme entretient une relation à double dimension
avec la terre. En effet, la gestion traditionnelle de la forêt par la
femme ntumu dépasse le seul domaine du monde visible (champ, cueillette,
ramassage, pêche, etc.) pour s'étendre au monde invisible. La vie
est donc une affaire d'équilibre et d'harmonie. La femme, grâce
à son esprit, fait le choix entre deux possibilités à
travers le respect ou non des habitudes de la vie et des lois de la nature.
Toute femme possède un principe appelé « particule
spirituelle ».
Informateur 2 - Entretien en fang avec
Mbang Delphine28(*) sur Le lien de la femme avec la
forêt29(*)
Texte en fang ntumu
|
Traduction française
|
1. afan ene bie e nde mebiang de evem bia lere akone de
eyong bia larane bilok, bia let ka ke nda biang
|
La forêt est pour nous un hôpital, où on
trouve la guérison de certaines maladies. Le simple contact avec la
forêt est un remède, sans avoir recours à l'hôpital
des Blancs.
|
edene eyong bia kore evem we na bia evem afe, bi seki nvoa
abwi mam da mak bia, bise ki fe ye misisim mie bi nga kome bulan edze
de.
|
C'est pour cela que quand nous quittons notre milieu pour
aller ailleurs, nous ne sommes pas tranquilles. Il y a plusieurs choses qui
nous manquent. Nous ne sommes plus en contact avec nos esprits. Et on tendance
à vouloir retourner au village.
|
edzam da sanle binga be ye adze ye binga beye akison enena
minga ye akison asom bidzi ekas na ayale ndzang bot we, minga ye adze asom ye
ngu dze afan.
|
La différence entre la femme du village et la femme de
la ville, est que la femme urbaine achète avec de l'argent les produits
qu marché pour nourrit sa famille, alors que la femme du village
achète avec sa force physique dans la forêt.
|
afan éne ekas da mane ki. ekas ye akison bidzi,
bidzi ba kwane bine mane, adzè bia dzi bi bugu akal na bia yem na bibera
so okiri na bia ze dzeng dzom ya dzi. akison bidzi. Akison bakuan na ba dzeng
abui miang ka faan bugu akale okiri.
|
La forêt est un marché qui ne finit pas. Or dans
le marché de la ville, il peut avoir rupture de stocks. Au village on
mange avec modération, sachant qu'on reviendra demain récolter.
En ville par contre, on vend suffisamment pour gagner de l'argent sans aucun
souci de réserve.
|
mefu me ne etsine bise binga beye adze. binga bese ba
yirane mbe mbe akal bise biye afan. ebio ba ninghe bio.
|
L'agriculture est l'une des activités de base des
femmes rurales. Toutes les femmes actives se livrent de façon permanente
aux travaux agricoles parce qu'elles ne vivent que de ça.
|
bilgan ne mot se ye bine va abele mefup mele ebe
mbu : afup bikon, afup mbong, afup awone. afup de ene mane bele bidzi bite
bise.
|
Remarquez que chacune de nous a au moins trois champs en une
année : une champ de banane, un champ de manioc et un champ
d'arachide. Le plus souvent tous ces produits peuvent planter dans le
même champ30(*).
|
Afan éne ening dè. Minga ye adzè ane
ebane fave afan. Éminga aboki bisè biye afan éning
adzè, ébore bevo ba dzam gne.
|
La forêt est pour nous une source de vie. La femme
rurale n'a de sens que dans la forêt. Une femme qui n'exerce pas les
activités de la forêt et qui vit au village est rejetée par
les autres.
|
Les activités de la femme ne sont plus exclusivement
liées aux femmes. De nos jours, l'introduction de la monnaie fait que
tous genres s'investissent dans les activités champêtres, amenant
les hommes les hommes à s'y mettre de plus de plus. Ils exercent de ce
fait les mêmes tâches que les femmes, de l'abattage, au
débroussaillage (activités exclusivement masculines) à la
collecte des produits (activités traditionnellement féminines)
sans avoir recours à une « main d'oeuvre »
féminine. Les hommes les plus impliqués sont les
retraités, les sans emplois rémunérés. Les
activités champêtres peuvent constituer un palliatif aboutissant
à l'amélioration de leurs conditions de vie.
Informateur 3 - Entretien en fang en mars
2006 avec Ndogo Ella Philomène31(*) sur La forêt :
une école de la vie32(*)
Texte en fang ntumu
|
Traduction française
|
afan éne evem bayaghe sikolo ye ening minga ntumu
me ne. éminga aboki bisè metsi aseki minga.
|
La forêt est un lieu d'apprentissage, une école
de la vie de la femme ntumu que je suis. Une femme qui ne fait les plantations
n'est pas normale.
|
benie be be mbe belong bie bone minkuegn na bia ke belere
miyeng. be mbe be yanle bie bise binga babo afan bia ke sum sikolo mintang mot
ato mimbu zembwe, mome ese bia tare bo ene ese ye afan.
|
Nos mamans, dès l'âge de six ans, nous
fabriquaient des petits paniers pour les accompagner au champ. On nous initiait
aux activités des femmes en forêt. On commençait
l'école des Blancs un peu tard, c'est-à-dire vers l'âge 10
à 12 ans. L'activité première était la forêt.
|
eyong mone minga ake aluk ba fiale e ndzeng bot we ye
avale akang bot, ye ngu ye egnule dze, avale abo bise bi ye afan. ye avale
abelan bot beye aluk de. ke mite na mot mbo ane efonan ngura ndzeng bot
ose.
|
Quand une fille va en mariage, on juge sa famille à
travers l'éducation que manifeste la mariée et par sa force
physique, la manière d'exercer les travaux champêtres et la
manière se servir sa belle-famille. Donc tu vois que l'image de toute la
famille est représentée à travers un seul individu.
|
bia yaghe ébobè bisè na babe yaghe
ebobaba. Sikolo mintang ane bo ka wulu ve ba shimi sikolo ye adzè.
Moneminga asese ayène yaghe sikolo té.
|
On apprend ces activités à nos enfants pour
qu'à leur tour ils inculquent à leurs enfants la même
éducation. C'est comme ça que de génération en
génération l'école des Blancs peut ne pas marcher, mais on
n'aura jamais « l'école du village ». Toute jeune
fille doit passer par là.
|
éyong biake bone afan, bia baghe be efus si na be
yaghe abègne. mone ase ayème edzame abo éévu
niè nge vam.
|
En amenant les enfants aux champs, on leur donne des
tâches ou une portion de terre pour qu'elles apprennent à cultiver
elles-mêmes. Chacune d'elle est bien conscience de ce qu'elle fait en
imitant sa mère ou sa grand-mère.
|
menga biè mimbias mi binga. mbo anga biale eki
mbong. Eyong anga kui mimbu mome esang wome ake gne yaghe adu mbong oswigne
emiène anga yam.
|
J'ai eu à faire deux jumelles. Dès leur
naissance, une était née avec une interdiction de manger le
manioc. A l'âge de 8 ans, ma marâtre avait décidé
d'aller lui apprendre à tremper le manioc (dans l'eau) et à le
préparer.
|
nyene benga mane tègne beke du medzim, bevè
benga tsak nabe bo mimbo mi mbong. Betele odzi nyène mbong onga
bègne a nga dzi akuane anto mimbu mome. afan énga sale mome
éki ye ke gne yaghe bisè.
|
Après avoir déraciné, trempé dans
l'eau, enlevé de l'eau, pillé et faire des bâtons, elle a
mis le manioc au feu. Après la cuisson, elle a décidé de
manioc 8 ans après sa naissance. L'initiation de l'enfant à la
forêt lui a permis d'être en contact avec le milieu et de casser
son interdit.
|
La forêt est un milieu où la femme ntumu
échange son savoir-faire, toute sa vie tourne autour des
activités forestières. Contrairement à la femme
« moderne », qui exerce un métier en milieu urbain,
la femme rurale exerce dans la forêt. Toutes deux ont un même
objectif, la survie de leurs enfants. Aussi, la forêt constitue pour
cette dernière une richesse renouvelable qui lui offre une grande
variété de ressources alimentaires. Cette variété
d'aliments assure l'équilibre nutritionnel des populations par rapport
à leur régime alimentaire traditionnel. Toute femme active se
libre de façon permanente aux travaux agricoles. Mais l'agriculture
demeure l'activité dominante.
Informateur 4 - Entretien en français
en mars 2006 avec Mba Ondo Jean de Dieu33(*) sur La relation de la
femme avec la terre34(*).
« La relation que la femme entretient avec la
terre a un fondement mystico-spirituel. La dimension spirituelle :
« Quand Dieu créa l'homme et la femme, il dota à la
femme un pouvoir de procréer, la femme a été la
première personne a établir le contact le fruit de du jardin
d'éden. De ce contact, il s'est établi une relation mystique
entre la femme et la nature. C'est la raison pour laquelle lorsque la femme est
en contact la terre, elle la rend fertile. Tout ce qu'elle plante de ses mains
produit.
La dimension sociale, la femme est le socle d'une famille,
elle est la matrice, elle nourrit non seulement de part elle-même, mais
également par tout ce qu'elle produit de ses mains dans le cadre des
activités agricoles. Par extension, elle est la nourrice de toute la
société. Elle est au centre de toute la production agricole. Dans
ses activités, elle développe l'esprit de solidarité, de
cohésion, d'entente et de paix dans le groupe.
La femme rurale est aussi impliquée dans les
activités commerciales. De ses récoltes, elle vend pour se
procurer les produits de premières nécessité : le
sel, du savon du pétrole lampant, etc. La femme rurale alimente
également les centres urbains en produits agricoles (banane, manioc,
tarot, etc.) Elle est également impliquée dans les
coopératives agricoles35(*).
A titre d'illustration, il est de coutume que chaque
vendredi, les femmes de Bolossoville quittent le village pour venir organiser
une foire36(*) au
marché d'Oyem. Chaque femme met ses produits à
l'appréciation des clients. Elle réalise des recettes qui leur
permettent de couvrir le panier de la
ménagère. »
La femme est dotée d'une intelligence qui
confère la possibilité de s'affirmer dans son
écosystème : une école. Dès le plus bas
âge, tous les enfants vont apprendre à connaître leur
environnement, ce qui à l'âge adulte leur permet de s'appliquer
aux pratiques de ce dernier. Cette culture se transmet de
génération en génération, c'est une pratique
évolutive permet à la femme ntumu de s'assumer et d'assumer ses
responsabilités. Il est nécessaire de ce fait qu'elle recourt
à des éléments de l'éducation traditionnelle, cela
favorise une meilleure adaptation des activités à mettre en place
en vue de la préservation de leur écosystème forestier.
Informateur 5 - Entretien en fang en mars
2006 avec Nzang Madeleine37(*) sur La forêt comme source de
vie38(*).
Texte en fang ntumu
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Traduction française
|
afan de ye o woleu-ntem ebele mba basi, akum dzam anga ke
bie. eyong bia begne bidzi bise ki ebuk ye engrais mintang ene ndzuk na be yene
de da dzimli bia eyong.
|
Notre forêt du Woleu N'Tem est très riche, c'est
l'héritage que Dieu nous a laissé. Pour planter, on n'a pas
besoin d'engrais chimique qui est difficile à trouver, et son
utilisation est une perte de temps pour nous.
|
eminga ya dzè mene magnong ve asup nge ki ebuane ye
akun na me veme bidzi élok ase ebele avale mbène wè
engrais mintang dave ki elok azak.
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La femme du village que je suis a juste besoin de la cendre ou
des ordures du fumoir pour faire pousser les plantes. Chaque plante a sa
méthode, les engrais des Blancs ne donnent pas un goût naturel
à la plante.
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ekane te fe one bidzi biva yame o nduane fan ye ébi
beva yame nduame mintang mia bé bidzi na bi bo abui biè bia
bé bidzi na bi bo mbeng
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C'est la même différence qu'il y a entre une
nourriture préparée au feu et celle préparée au
gaz. Les Blancs aiment la quantité et nous nous aimons la
qualité.
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bie bianing adze bine ndzalane ye afan de dave bie emame
se bia kome, ede bia ning de ayap. emam me se ntang asome mene abe. mia wu avo
akale te. okwa bong be mbe ki be wu ane emu mimame ya ndzame emam betar be nga
lik bie na minto mintang. mame te ma yene ki ye misut mibot.
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Nous qui vivons au village, nous sommes comblés avec
notre forêt. Elle nous offre tout ce qu'il nous faut, c'est pour cela que
nous vivons longtemps. Tout ce que les Blancs nous apporte est mauvais. Vous
mourez tôt à cause de cela. Jadis, les jeunes ne mouraient pas
comme aujourd'hui. Vous avez abandonné les choses que les ancêtres
nous ont laissé pour devenir des Blancs. Or ces choses ne conviennent
pas avec l'organisme de l'homme noir.
|
mot ane mane ngura ening de vena adzi bidzi bibor mimbu
abue ete. wa dzi tsit kayeme etsit ene minga ntumu adzi, eyale ndzeng bot we ye
bi bidzi bivem osi keghe na besanle bio. ma begne, ma dzem, me dzi,
amane.
|
Comment quelqu'un peut-il passer toute sa vie à manger
une nourriture qui a déjà fait des années et des
années dans le congélateur ? Tu manges la viande, tu ne sais
même pas de quelle viande il s'agit. La femme ntumu mange et nourrit sa
famille avec la nourriture qui sort de terre, sans aucune transformation. Je
plante, je récolte, je mange, c'est tout.
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makoro ndè dzam ekuna kiri, na ma ke afup, ma mane
lot mos ye afan. afan éne me édzè bè dam eyong make
ki afan. me se ki vo édene na éyong ma keki afan, ma yène
ane ngura ndzma wa mak ma. Ede ma nyaghe ki make ekena. Meme voghe
édzè dame ye afan dam.
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Je quitte ma maison très tôt, le matin pour me
rendre dans mon champ où je passe toute ma journée en contact
avec le monde la forêt. La forêt est presque mon deuxième
village. Quand je n'y vais pas, je sens qu'il y a quelque chose qui manque.
L'esprit n'est pas tranquille. C'est pour cela que voyager, c'est difficile
pour moi. Je suis très à l'aise dans mon village et avec ma
forêt
|
La femme ntumu estime que l'usage des engrais est
« compliqué » ; il constitue une perte de
temps. La cendre, seule, suffit pour faire pousser la plante. De même la
mise en jachère permet naturellement de se
régénérer ; ce, contrairement aux engrais chimiques
qui passent par plusieurs étapes avant d'être mis dans la terre.
L'engrais chimique, selon informatrice, soutire à la plante toute son
essence. Ces méthodes occidentales causent des préjudices
à la femme rurale. Ce fait, elle perd sa valeur si elle associe dans ses
activités les pratiques des Blancs.
Informateur 6 - Entretien en français
en mars 2006 avec Obone Anastasie39(*) sur L'importance des campements40(*).
1. Les activités de chasse, de pêche, de
cueillette et de champs nécessitent parfois l'installation des
populations à côté de la ressource à collecter,
(dire chasse, ramassage et pêche) ou à protéger (champ). Le
campement est l'antécédent du village. Dans le campement, les
produits tels que la banane, le manioc, l'arachide, etc. sont
plantés.
2. Pendant la période de champ, les femmes ntumu se
rendent dans les campements construit avec des matériaux durables, les
familles transportent leur réserve de nourriture pour un séjour
pouvant durer jusqu'à deux à trois semaines et plus.
3. Des lites de bambou et de matelas d'herbe y sont
rapidement confectionnés. La femme ntumu améliore le milieu pour
le petit temps qu'elle séjournera.
4. Les campements de culture sont une réponse
à la distance, mais pour d'autres raisons. En période de gros
travaux, il peut être avantageux de séjourner dans le champ, pour
s'épargner des trajets quotidiens.
5. L'essentiel cependant n'est pas, mais c'est beaucoup
plus pour assurer la sécurité de nos champs. Les champs sont
toujours enchâssés dans la forêt, assez fortement
isolés et d'autant plus exposés à prédateurs qu'ils
sont éloignés du village. Les campements sont faits pour
empêcher la destruction des champs par les éléphants.
6. Le campement est notre lieu de travail, notre bureau,
aller au campement c'est comme si nous allions en mission. Et le rapport de
mission c'est la récolte que nous ramenons. Moi je suis une femme de
Bolossoville, je peux dire que le campement c'est mon second village. C'est lui
qui me permet de vivre correctement. Le village est juste s'occuper des enfants
qui vont à l'école et les biens de mon mari.
7. On ne peut pas habiter un campement sans avoir des
maisons au village, c'est impossible. De toutes les façons, on est parti
de la forêt pour le village. J'aime bien rester dans la forêt, pour
protéger mes plantations contre les éléphants. Je gagne
beaucoup d'argent quand je rentre au village avec les récoltes
(plusieurs sacs d'arachide, de concombre, etc.).
Le campement est un espace d'exploitation provisoire, un lieu
de résidence permanent, commandé en cela par la recherche de
l'autosuffisance alimentaire et les moyens financiers. La femme ntumu trouve
son compte dans cet espace. Cette double résidence a été
analysée en son temps par François Gaulme (1981), qui faisait
remarquer que les population de la forêt avait deux
résidences : le village et le campement. Ce qui change pour
certains, c'est que le campement n'existe qu'en période de grandes
récoltes. Evidemment, la femme nutumu obéit au principe du
campement, la gestion parcimonieuse de la forêt qui lui a permis de
traverser des siècles sans endommager durablement son
écosystème. Cette gestion parcimonieuse est mise au premier plan,
parce que sa mise en pratique lui permet de nourrir sa famille.
On observe chez le Ntumu comme les autres
populations gabonaises un habitat double : on alterne des
séjours dans un hameau ou un village administratif situé en
bordure de piste, et des séjours plus courts dans des campements de
forêt (pour des activités saisonnières de chasse, de
collecte ou de pêche), certains groupes ayant même des camps dans
leurs essarts s'ils sont éloignés du village. Ainsi à la
saison sèche, la saison des chenilles ou bien des "mangues sauvages"
(Irvingia), également propice à la pêche au
barrage, l'ensemble du village se transportera en forêt pour y passer des
semaines, voire des mois. Le village (regroupement administratif de hameaux)
compte en moyenne plusieurs habitants. Trois principaux types d'habitat selon
les saisons et les activités : le village de bordure de piste,
entouré de forêts secondaires et de cultures vivrières,
composés de plusieurs lignages. Les gens y passent toute l'année.
Les hameaux de forêt avec champs de manioc, composés de plusieurs
segments de lignages; occupés de 3 à 4 mois par an. Les hameaux
de forêt sans champs de manioc, composés des membres d'une ou
plusieurs familles. Ils sont de plusieurs types : campement de chasse
individuelle et piégeage; campement de chasse collective au filet.
Informateur 7 - Entretien en français
en mars 2006 avec Abagha Micheline41(*) sur Les interdits de la forêt42(*).
1. La notion d'interdit a un fondement important dans de
nombreuses sociétés, les rapports sexuels font partie
intégrante de la reproduction humaine et doivent avoir lieu uniquement
dans les villages et non dans la forêt. La femme qui transgresse les
règles est sanctionnée par une mauvaise santé
humaine ; la perte de la raconte peut en résulter. La femme peut
devenir stérile ou la récolte mourir parce que les moments des
cycles de reproduction humaine et végétale se sont
mélangés de façons inappropriées
2. S'il y a un tel système d'interdit, c'est parce
que la forêt est essentiellement conçue comme une forêt qui
vit comme nous, elle n'est pas morte. Les règles sont établies
comme dans un village. Chaque interdit rappelle des fonctions multiples de la
forêt.
3. Plus il y a d'interdits, plus la forêt est riche.
On peut considérer que la relation de la femme ntumu à la
forêt n'est pas une relation dialectique faite de négociation. Au
Woleu-N'Tem la nature est appréhendée comme un immense ensemble
d'êtres vivants, visibles ou invisibles, tous assumant une
responsabilité.
4. La femme ntumu occupe une centrale dans la forêt
et sa position dans cette forêt est celle d'un membre des
communautés d'êtres vivants. La sagesse exige le respect, elle ne
cultive pas le souci de s'opposer totalement à son environnement, son
comportement commandait plutôt la communion avec la forêt dont elle
dépend totalement. La sagesse recommande sous une forme ou une autre le
principe de la réalité qui impose la coexistence, la
solidarité, la communion et la vie en symbiose avec la
forêt.
L'analyse des interdits relatifs à la gestion des
écosystèmes permet de comprendre les rapports de la
société ntumu à ce milieu. Les interdits apparaissent
comme fondant attitude qui impose à cette société de se
construire et de construire avec cet écosystème. En effet, elle
présente la forêt comme l'alliée sans qui la femme ntumu ne
pourrait vivre, c'est-à-dire se soigner, se nourrir et mener des
activités qui ont trait aux aspects spirituels. La femme est ainsi
habitée par des êtres surnaturels, dont l'irrespect peut convoquer
la colère, mais aussi dont le respect attire la sympathie, et finalement
la réussite dans la récolte, la bonne santé physique et
mentale. Ce qui justifie par ailleurs cette parcimonie dans les rapports
à la forêt, les associations chargées de faire respecter
les interdits et de sanctionner ceux qui ne respecteraient ces interdits.
Informateur 8 - Entretien fang en mars 2006
avec Obone Madeleine43(*) sur Les tâches de la femme ntumu en
forêt44(*).
Texte en fang ntumu
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Traduction française
|
minga ntumu ase bui. ane ese ene mbe mbe ye ndzuk. nge me
fulan abim ese minga abo mitsi bevaghale ye ebi dzi akulu biyene na ebi akulu
bine avitsang ye abim ese abo.
|
La femme ntumu a un travail qui demande beaucoup
d'énergie physique. C'est un travail permanent et pénible. Si on
fait la somme des travaux de la femme dans le champ vivrier, et que l'on
compare à celle de la production, on constate que ces dernier sont son
faible, eu égard au travail effectué.
|
bia gni afan ekuna, bia bera kui fave alu. ngura mos
wè bia lot wo mefup. nge bika bo bisè, eza aye yale ndzang bot
wè?
|
Nous rentrons en forêt très tôt le matin
pour ressortir seulement à la tombée de la nuit. Toutes nos
journées nous les passons dans nos champs. Si nous ne travaillons pas,
qui va nourrir nos familles.
|
bia binga, bi bele bise bie, befam bebele ebiaba. afang bo
na abong di bise binto nfulan afan. bise bise bia bo bine ndzuk, efonan ene ane
mbong. ese mbong ene etsine ese binga bese beye owoleu-ntem babo. abim baku ene
abui
|
Nous les femmes, nous avons nos tâches
spécifiques et les hommes ont les leurs, même si ces derniers
temps les tâches ont tendance à être
mélangées. Toutes les activités que nous faisons sont
pénibles. Prenons le cas du manioc qui est l'une des principales des
femmes du Woleu-Ntem. La majorité d'entre la pratique et les
quantités produites sont considérables.
|
ayam mbong dasum nduan bemane kom ngura vem wa bi medzim
melu mebe, melu mele melor. beke tos, be mane ngnot madzim, be furu nkuegne ete
abaghe mbong da lighe befuru mbaghe ete na ba tsak. minga evenghane mbong ye ve
minkang ebera sum tsak ye kekui mbong wa mame bo ndanle.
|
La préparation du manioc commence par son
« trempage »45(*) dans un coin de la rivière
aménagé à cet effet et qui forme une sorte de retenue
d'eau. Deux ou trois jours après, ce manioc trempé est sorti de
l'eau et est pressé dans un panier. Le but est de le débarrasser
de l'excès d'eau. La pâte obtenue est pilée dans un bac en
bois dur. Puis la femme arrête de piler et fait passer la pâte
d'une extrémité à l'autre du bac, poignée par
poignée pour en ôter les fibres. Le pillage recommence au moment
où la pâte est jugée suffisamment mole par elle46(*).
|
be nga woghe minbo minbogh yakie bevule ye ndenane. binga
be ne yam mintet mi mbogh niane bia ve abim biadzi bi ke kuane abim da lighe na
bidzeng edzom bi ne som de karesine, ntsap ye biom bife, biyong bizing mot azu
asom mbong ye metua eke milam milam. eme embo mbong wake awome dol, ekas oyem,
mbo mbong wake ntet.
|
Elle est mise en bâton dans des feuilles47(*) très larges et
attachées à l'aide des ficelles faites avec les tiges des
marantacées. Les femmes en préparent par centaines car en dehors
de l'autoconsommation, nous allons vendre au marché d'Oyem pour avoir de
quoi à acheter du pétrole, du savon, etc. Quelques fois, un
acheteur au volant ou d'une voiture bâchée passe dans les
différents villages et en achète en quantité importante.
Dans les villages, le bâton de manioc coûte 50 francs et au
marché d'Oyem, il coûte 100 francs.
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binga bezing bakulu mintet mimbong mitan, ebe nkuan ye ebe
ngone. ane yene toyini ébè ye mintet. Mitane. ébinga bene
kafe ngu ye éba bebele abui mam bakulu ki abui. Ebe mbong bone bo ntet
nge ki ntet ye memowome tan ébe nkwan. Mone ane kui toyine étan
nge ki toyine zambwè yé étan, esiki dzom nge be daghe
ésè bia bo.
|
Certaines femmes produisent seulement 500 bâtons par
vente et par mois, ce qui fait une recette d'environ 25.000 francs. D'autres,
les moins valides et les femmes empêcher font des quantités moins
importantes de 100 à 150 par vente et par mois d'où un revenu
total de l'ordre de 5.000 à 7.500 francs, ce qui est insignifiant par
rapport à l'activité que nous faisons.
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éfem waka ntet ye dol étan
amudzé ? mbong wé seki tan dzè, asese ane
édziga.
|
Le pain coûte 125 francs, pourquoi le manioc ne peut pas
avoir le même prix que le pain ? Et pourtant, tous sont des
compléments !
|
Vivant dans un cadre rural, la femme ntumu du village dans sa
vie quotidienne peine sous le poids des travaux domestiques et agricoles qui
lui permet d'assurer la ration alimentaire de sa progéniture. Elle
travaille plus qu'elle ne se repose. Le poids de ces travaux n'est pas
proportionnel au gain tirer de la vente de ses produits. Ses journées
sont planifiées sur la base des tâches qu'elle exerce dans la
forêt
Informateur n°9 : entretien en
avril 2007 avec Mekui Hortense sur la pêche au
barrage
Texte en fang ntumu
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Traduction française
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eyong bia ke alock y'otong,bia bellane mefè,
ékana, nkun ,nkwegne
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Lorsqu'on va à la pêche dans une petite
rivière, on utilise une machette, une cuvette en bois, une corbeille en
forme de cône et un panier
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eyong mina kui oshing, minalik meta ya zum. ba beme zum
oshing, be yak ya meta, ba lade na « akame miok »akor ye
va'a be nga yak miok ye bibane, be fulane nving na bibane bi yeme ;ba lade
na « nome miok » be nga ve adzia na'a ayeme.ba yak miok
akui ya ankiène.
|
Arrivé à la rivière, on coupe les piquets
et les branches en forme de Y. Nous plantons les piquets dans la rivière
et nous les soutenons avec les branches. On appelle cela
« akame miock ».Après cela on
complète la barrière en ajoutant des tourbes cela s'appelle
« nome miock ». On construit la barrière en
amont et aval.
|
niene bia mane yak miok, bi nga lo'o medzime ya bikana.bia
same, bia bi kwas. niane medzime ma ve'e, bia kik etok ozang, bia bwi metane a
miok, be nga lom medzime ete. bia nie kwas ankun ostini engueregue. yonte bia
twa mipwere bia lare ngo'o ye becara mi mbii ete. eyong alok émaneyang,
bia mane ku'u miok bia wè mintem bil oshing na bone be kos be vem.
|
Après la construction de la barrière, on vide
l'eau à l'aide des cuvettes en bois. On plonge les nasses dans l'eau et
on les retire pour saisir le poisson. Lorsqu'il n'y a presque plus d'eau, on
divise la rivière en deux, on place la nasse sur le barrage et on vide
entièrement la rivière en versant de l'eau dedans. Le poisson
tombe dans les nasses et on le met dans la corbeille en forme de cône qui
est attachée autour des reins. Lorsqu'il ne reste plus que la boue pour
dégager les silures et les crabes. A la fin de la pêche, on ouvre
légèrement les barrages pour laisser circuler l'eau, et on y
jette des branches d'arbres pour nourrir les petits poissons.
|
eyong ba ke melok ba dzi ki abjing nge ki minkok, oshing
oza bo'o avnegne.
|
Lorsqu'on va à la pêche on ne mange ni la banane
douce, ni la canne à sucre sinon la rivière sera
« froide » : improductive.
|
La pêche collective regroupe toutes les techniques
pratiques, initiatiques et capture qui nécessite la coopération
minimale de deux êtres humains pour la réalisation d'une
même tâche. La pêche comme ayant été le point
autour duquel s'est organisé pendant des milliers d'année
l'ensemble des activités humaines. C'est-à-dire que les pratiques
humaines coexistent à la pêche au paléolithique,
l'organisation des sociétés a pu profondément
marqués par cette activité. La pêche à cette
époque est une activité collective, du fait de la grandeur et de
la profondeur de la rivière à l'opposé de la cueillette
qui si elle peut parfois être entreprise collectivement reste
essentiellement une activité individuelle.
Les femmes ntumu doivent réunir ensemble leurs
ressources physique et intellectuelle pour mener à bien leur
activité. Elle suppose la coopération d'un nombre assez
élevé d'individu, leur intégration en vue de
l'accomplissement des tâches voisines, pour un but qui concerne toutes.
Par ailleurs la pêche collective implique certaines conditions à
remplir. L'appartenance à une communauté au sein de laquelle il y
a une grande rivière. En outre dans cet entretien il ressort qu'il y a
de similitudes en ce concerne les préparatifs et les interdits d'une
pêche. On peut aussi noter les points de convergences au niveau du
travail. Par contre les pratiques divergent au niveau des rites. Ici on prie
aux esprits de l'eau et on parle aux esprits des ancêtres. On note
également la différence en ce qui concerne le partage qui se fait
au sein d'une maison avec le système de trois paniers appliqués.
Consommation immédiate, consommation future et une réserve pour
les étrangers. A travers ce partage, on lit les sociétés
qui ne sont plus attachés aux principes ancestraux qui voulaient par
exemple que lorsqu'une personne part à la pêche, ce soit toute la
communauté qui en bénéficie. Ce sont les
sociétés à perte de valeur.
Informateur n°10 : Entretien en
avril 2007 avec M. EYI Huguette sur la au wolo (plante
poison)
1. La veille on cueille le wolo en brousse et on le pile
la nuit
2. Très tôt le matin on descend à la
rivière pour commencer le travail. On barre la rivière avec les
déchets qui sont dans l'eau (feuilles mortes, boue, brindilles).On
laisse l'eau couler légèrement, ça permet au produit de
s'étendre rapidement. C'est une pêche rapide, si le poison se
dissout, il devient inefficace et le poisson peut vite pourrir ou se
réanimer. On le verse dans la rivière, on attend quatre heures
pour que le poisson sorte des trous. On l'attrape avec les nasses et on le met
dans le nkun.
3. C'est l'aînée qui se charge du partage.
On met le poisson dans une assiette et on verse à chacune une part dans
sa nasse. Lorsque chacune pêche de son côté, il n'y a pas de
partage, mais si c'est en groupe, on partage. Souvent, à cause de son
statut d'aînée, la plus grande emporte une grosse part. Sinon les
paris sont égaux. Si le produit n'est pas pour vous, vous devez d'abord
allez monter le fruit de la pêche au propriétaire, ou vous lui
réservez sa part.
Les techniques de pêche sont multiples et
variées. Le wolo est une plante qui pousse en brousse. Le plus souvent,
elle est domestiquée par les femmes qui la plantent dans leurs champs.
C'est un poison que les femmes utilisent lors des parties de pêche pour
tuer ou faire endormir le poisson. Arrivées en bordure de la
rivière, deux anciennes passent devant et à l'aide d'un
bâton mesurent le niveau de l'eau en plusieurs endroits afin de trouver
le lieu propice à la nivrée Après avoir reconnu le site,
les femmes profèrent une prière de bonne chance et commencent le
travail. Il existe des interdits alimentaire, sexuels ou verbaux concernant les
parties de pêche qui, selon les femmes ntumu, ne doivent surtout pas
être évoqués sur le lieu même de la pêche ou
sur le site où l'on pile poison,sous peine de ne pas capturer le
poisson.
Informatrice n°11 : Entretien en
avril 2007 avec Mme Avome Ninon sur la pêche au
meyè
Texte en fang ntumu
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Traduction françaies
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eyong ba du meye, bia belane bikut bidzi, minbang melen,
mbong na kwas enyi aye ete.
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Lorsq'on pose le « meyè », on
utilise des déchets de noix de palme, le manioc ou de la nourriture
pourrie pour attirer le poisson.
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niène bikua oshing, bia kik meta ya zum na bi yak
moick ba be me zum oshing, be yak ye meta.ba yak miock ye bibane, be fulane ye
mbwarga. ba lik ngura vom bé beme ayè, vomte wa yiène bo
édock.
|
Arrivé à la rivière, on coupe les piquets
et les branches en forme de Y. On plante les piquets dans la rivière et
on les soutient avec les branches. On construit le barrage avec des
déchets de feuilles et de bois qui se trouvent dans la rivière,
et aussi avec de la boue. On laisse une place ou on va fixer le
« meyè » cette place doit être profonde.
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ayè da tebe kenegue oshing
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On place l' « ayè »
horizontalement dans l'eau.
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ba ve meye ekuna kiri, nge okele omos de cara ye minwas be
mane dzi kwas, ba tsi aye na ve kwas. meyème bing abwi biome, bitugue,
bengo, be cara minwas, édzome se da tobe oshing.
|
On retire le « meyè » très
tôt le matin, si on y va la journée les crabes et les crevettes
auront déjà mangés le poisson. On détache le
« meyè » pour retirer le poisson. Le
« meyè » attrape beaucoup de choses, serpent,
crabes, etc. Tout ce qui reste dans l'eau.
|
Cette technique est pratiquée par les hommes et par les
femmes ntumu. De longues et lourdes nasses, à ouverture en cône
inversé, composées de deux compartiments, sont
déposées sur les fonds sablonneux dans des eaux calmes, profondes
et ombragées. Les nasses sont attachées à la berge par une
corde de rotin et sont ballottés au gré des courant. Des
appâts (cossettes de manioc cuit, des feuilles de manioc, des palmes
récoltées dans les jachères, des écorces et des
viscères de gibiers) sont placés dans le premier compartiment.
Attirés, les poissons s'introduisent dans le deuxième
compartiment et y restent, pris au piège. Le contenu de la nasse est
déversé dans le panier par l'ouverture du lien de rotin qui
retenait le sommet conique. Pour finir la femme ntumu un appât dans la
nasse et se plonge l'ensemble dans l'eau.
Informatrice n°12 : Entretien
français en avril 2007 avec Mme Mbazogo Alix sur les techniques de
production du ndock
1. Le chocolatier est fruit tiré d'un arbre
naturel qui pousse en forêt par le biais des excréments des
éléphants ; c'est un arbre saisonnier qui produit une
fois dans l'année, durant les périodes de
décembre à mars ; on le retrouve sur toute la surface
forestière du Woleu-Ntem
2. Lorsque ce fruit est mûr, il peut être
mangé. Les fruits sont collectés une fois que l'arbre les a fait
tomber ; puis fendus en deux à i'aide d'une machette (lorsque le
fruit est frais) ou un bâton (lorsque les fruits sont secs ou
fermentés) pour ressortir l'amande qui sera par la suite
séchée.
3. Le séchage des graines peut faire plus d'un
mois au soleil et au fumoir selon l'intensité du feu. Après avoir
séchées les graines, on les fait frire au feu dans une marmite ou
sur une tôle perforée jusqu'à ce que les amandes virent au
brun foncé.
4. Une fois que les graines sont frites, on les pile dans
un mortier jusqu'à ce qu'on obtienne une pâte, qui est
après formée en bloc dans divers récipients.
Les femmes ntumu connaissent l'utilité des arbres. Un
grand nombre de raison conduisent l'agricultrice à préserver tel
ou tel arbre dans son champ. Le clivage entre un acte
délibéré, motivé par l'effet
bénéfique que les arbres auront sur les cultures. Les arbres les
souvent protégés dans les champs peuvent être utiles sur le
plan alimentaire. La graine de la mangue sauvage (andock afan) est
utilisée dans la préparation d'une sauce très
appréciée ; cette graine est consommée au village ou
vendue à la ville à très bon prix. Les activités
forestières de la femme ntumu occupent une place importante dans le
savoir et le savoir faire traditionnel de la population rurale.
Informatrice n°13 : Entretien
français en avril 2007 avec Mme MBA Sylvie sur
médecine traditionnelle.
1. Jadis, on n'avait pas besoin de l'hôpital. Notre
forêt était notre hôpital.
2. Quand quelqu'un tombe malade, on essayait d'abord de
prendre de l'herbe par ci par là selon la manière dont la
personne se portait. Si la santé s'empirait, on allait voir une
guérisseuse ou un guérisseur pour voir si on peut la soigner. La
guérisseuse n'allait nulle part en dehors de la forêt pour prendre
des écorces ou de l'herbe qui constituait le traitement à
suivre.
3. De nos jours, comme le noir est influencé par la
peau blanche, on tourne maintenant le dos aux choses que nos ancêtres
nous ont légué. La mort devient monnaie courante tout simplement
parce que nos ancêtres sont nos dieux. La bible dit tu honoreras ton
père et ta mère pour mieux vieillir. Si on bafoue ce que nos
ancêtres nous ont laissé, cela veut dire qu'on n'a plus les pieds
sur terre.
4. Dieu sait pourquoi il nous a donné la
forêt, ce n'est pas pour rien. Si nous même nous ne prenons pas
cette forêt au sérieux ce n'est pas quelqu'un d'autres qui viendra
le faire.
Pour les femmes ntumu la forêt est
sacrée, elle est gérée selon les règles
régies par la tradition. Pendant longtemps l'équilibre
écologique a été respecté, du fait de l'isolement
relatif des peuples les uns des autres. Mais avec leur brassage et la
sédentarisation, des interdits totémiques ou alimentaires
s'affaiblissent, causant de ce fait la dégradation de
l'écosystème. Cependant, les villages se meurent sans que
beaucoup d'entre elles, soient connues des scientifiques, les savants
illettrés pendant qu'on dilapide le trésor naturel. Les faits
sont là : le fossé entre la ville et le village se creuse
davantage ; mais le monde ne se trompe pas. Pour sauter haut, il faut
d'abord mieux s'enraciner. Pour pallier cette insuffisance, il est
proposé, comme alternative, pou préserver les ressources
fauniques.
Informatrice n°14 : Entretien
français en avril 2007 avec Mme MENGUE Blanche sur la
forêt un écosystème vivant et riche
1. Dans la forêt du
Woleu-Ntem, les femmes ntumu
exploitent quotidiennement la
diversité des espèces. Pour
cuire les aliments, les femmes ntumu qui ne connaissent
pas le gaz, utilisent le bois de chauffage. Pour la consommation des fruits,
elles savent que la forêt est très riche. Il suffit d'y aller
pendant des périodes précises pour ramasser dans les sous-bois
des fruits de nombreuses espèces de nos arbres.
2. Pour se soigner, les femmes ntumu connaissent bien des
centaines d'application médicinales fondées sur la flore de la
forêt. Ainsi de nombreuses plantes sont utilisées. On a de
nombreux exemples où les plantes sont recherchées pour la cuisine
comme les feuilles de légumes ou pour étancher la soif telle que
la liane à eau
3. L'exploitation des plantes médicinales se
limitait à la récolte des écorces, des racines, des
feuilles. Les arbres étaient recouverts de terre sur les parties
blessées après extraction des écorces
4. Pour les cultures sur brûlis, pendant les
opérations de défrichement, de nombreux arbres fruitiers ne sont
pas abattus, ils sont plutôt préservés.
Les connaissances et les compétences
développées par les femmes ntumu au cours des milliers
d'années d'adaptation et manipulation de la terre, de leur flore et de
leur faune, constituent une ressource inestimable. Dans les pratiques
traditionnelles, les femmes ntumu détentrices du savoir ne
prélevaient en forêt que ce qui leur était
nécessaire ; une écorce pouvait suffire comme
ingrédient. Toutes ces précautions étaient prises pour que
la forêt ne subisse aucun dommage on prenait soin par exemple de mettre
un peu de terre pour aider l'écorce à se
regénérer.
Informatrice n°15 : Entretien fang
ntumu en avril 2007 avec Mme Bilogho Margueritte sur le
procès de production des arachides
Traduction en fang ntumu
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Traduction française
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1. Ba li sti oyone ye essep,enome ekoro
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On fait le champ d'arachide pendant la grande et la petite
saison sèche dans une vieille plantation
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Minenga nge fame a ne fiè ekoro
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Le choix du site peut se faire par la femme ou par l'homme
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Etale bi nga bo bi yagale biere na bidzi biboabuine,bia
bôfede abondi
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Avant on priait le biéré pour que la
récolte soit bonne, mais à présent on ne le fait plus
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Be fame ébeba li tsi ye baà ;ye
ovone,fa
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Les hommes débroussent et abattent la plantation avec
les haches et les machettes
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Binenga ye bone ebeba begne tsi owone
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Les femmes et les enfants sont chargés des semailles
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Ba begne tsi owono ye muane otutune fa mikus
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On cultive l'arachide avec une petite machette
carrée
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Eminga ane megni mabume ayane ki tebe afup eyong ba begne
owono
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La femme en début de grossesse ne doit pas participer
aux semailles encore moins y assister
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Ba wi owone eyong a mbele nguikiegne ya eba
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On sarcle le champ d'arachide avec la houe lorsque les
feuilles sont déjà jaunâtres
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Buane ye binga ebe ba tegne owono
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Les femmes et les enfants qui sont chargés de la
récolte
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Ngene bamane tegne bega kap owono agun été,
agun badzi, agun ba barle akale beyeng, agun be ibra beign
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Après la récolte, on repartit en plusieurs
greniers : un grenier pour la consommation un grenier pour échange,
un grenier pour la prochaine semaille
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Le champ d'arachide se fait en saison sèche sur un
terrain déjà cultivé dans le passé. Cette culture
se fait sur des cultures en jachère. Le choix du site peut se faire sans
distinction de sexe ; l'essentiel est de reconnaître le sol fertile
et approprié. Après ce choix les hommes procèdent à
la prière de « Biere ». Mais aujoud'hui, ce rituel a
fait place aux prières chrétiennes. La division du travail se
fait de telle sorte que les tâches sont reparties en fonction du
sexe ; les hommes abattent et débroussent, les femmes du reste. Ce
travail se fait aussi avec les enfants repartis selon les âges et les
sexes. Les outils usités pour ce travail sont : la houe, machette,
hache, et les machettes à bout carré pour l'enfouissement en
terre des grains d'arachide. Au titre des interdictions, il faut dire qu'une
femme en début de grossesse ne doit pas venir au champ pendant les
semailles ; surtout aux premières, puisqu'elle présente
l'impureté et apporte la stérilité au sol cultivé.
Le sarclage se fait quand les feuilles prennent une teinte jaunâtre,
signe de la maturité des gousses. La répartition se fait aussi au
pied des greniers. On dégage la part à consommer, celle
réservée aux échanges, à la vente et aux prochaines
semailles.
Informateur n°16 : Entretien fang
ntumu en avril 2007 avec Angonsang Pauline sur le champ de
courges
1. Le bananier plantain est couramment associé
à la courge. Plusuieurs possibilités sont offertes, il peut
être planté dans ce champ avant l'abattage et le brûlis,
soit après le semis de la couge. Ce choix dépend de la
méthode de production de la femme ntumu. Le produit recherché
dans la couge est sa graine, utilisée comme condiment dans les sauces ou
comme constituant d'une pâte agrémenée de viande ou de
poisson « le gâteau de courge », comme l'appelle les
femmes ntumu.
2 .La courge est appréciée de
manière très variable par les ntumu et ne constitue pas un
élément essentiel de leur cuisine. Elle est donc surtout vendue
en cas de surplus. Pour certaines femmes ntumu, elle fait réellement
l'objet d'une culture de rente malgré une qualité trè
aléatoire.
Les femmes ntumu obtiennent de la vente des graines de courge
un gain monétaire qui leur revient directement alors que les hommes ne
reçoivent que peu d'argent. La tactique des femmes sera d'utiliser ce
produit le plus souvent possible dans l'alimentation afin d'en tirer un profit
maximal avant que la récolte soit vendue. Les paramètres qui
influencent la production de cette cucurbitaceae ne semble absolument pas
maitriser par la femme ntumu. Pour mettre toutes les chances de leur
côté, et avoir une probabilité plus grande de
bénéficier d'un sol productif des femmes ont tendance à
augmenter les surfaces défrichées pour la courge afin de disposer
d'une production minimale pour la vente. Les cultures de bananes plantains
post-courges ou post-arachides, à superficie égale ou superieure
aux champs de courges, sont essentiellement destinées à la
vente.
Informatrice n°17 : Entretien
français en avril 2007 avec NTSAME ABA'A sur le choix
du site
1. Le choix du site est important pour la production
d'arachide, Le terrain doit avoir certains arbres et herbes.
2. Le champ se fait sur le terrain ancestral où on
a déjà planté, après viennent le
débroussaillage et l'abattage à la machette, à la hache
età la tronçonneuse.
3. La division du travail : les hommes
débroussent et abattent, les femmes brûlent et sèment avec
les enfants.
4. Avant de cultiver, les femmes ne doivent pas aller avec
leurs maris. C'est pourquoi avant, on faisait semer les enfants
5. Avant les femmes plantaient ensemble, elles
commençaient par un chant (...)
6. Le sarclage s'effectue quand les feuilles des plants
d'arachides sont jaunes ou mortes.
7. Pour la récolte tout le monde peut
participer.
8. Dans la répartition, il y a ce que l'on mange,
ce qui permet de faire des colis aux enfants qui sont loin et ce permet
d'échanger avec les autres. Parfois, on donne aux soeurs qui n'ont pas
beaucoup produit. Et l'année suivante, elle se doit de rendre le
même nombre de sacs.
Chez les ntumu, le titre foncier joue un rôle
primordial. Le champ se fait sru des terres ancestrales. Cette règle
intervient dans toute la communauté ntumu.
Par ailleurs, nous avons comme outils de travail, la machette,
la houe, la hache, la troçonneuse, la corbeille pour porter les graines
à semer. La répartition des tâches doit satisfaire au deux
sexes. Les hommes représentent la main d'oeuvre complémentaire,
ils doivent débrousser, abattre. Les femmes et les enfants
sèment, sarclent quand les feuilles de la plante d'arachide sont
devenues jaunes, après quelques temps vient la récolte. Pour les
interdis, les femmes doivent suspendre tout rapport intime avec leurs
époux avant leurs époux avant la récolte. C'est ce qui
explique le fait que les enfants sont appelés à semer en premier.
Avant les femmes cultivaient ensemble, mais de nos jours elles le font de
manière individuelle, ce qui dégrade la cohésion sociale
c'est chacun pour soi. Les rapports de parenté ne priment plus chez les
femmes ntumu, les familles vivent en autarcie.
La récolte peut fare intervenir tout le monde :
les femmes, les hommes, les enfants. La recolte terminée, le partage
suit. Il se fait par propriétaire du champ et non par
l'aîné du clan, lors du partage il donne à qui il veut et
selon le mode de remboussement. On peut donner ou vendre à une soeur qui
n'a pas eu une bonne récolte.
Informatrice n°18 : Entretien en
français en avril 2007 avec Mme MEDZA Nicole sur la
médecine
1. L'apprentissage se fait dès l'âge de dix
ans. Généralement il se fait sur terrain c'set à dire en
forêt.
2. Les femmes ntumu prennent des écorces ou des
feuilles les présentent à l'apprenti en lui donnant les conseils
et partage les expériences vécues. Sur le terrain, on montre le
geste qu'il faut par exemple pour tenir la machette, pour prendre
l'écorce qu'est ce qu'il faut dire c'est le rôle de la femme
expérimentée
3. La transmission de manière globale se fait de
mère à fille ou de la grand-mère à la petite fille.
C'est comme tu vois maman Madelaine, elle a appris à soigner
auprès de sa grand- mère dès l'âge de 15ans, elle
aussi transmet déjà aux enfants. La transmission peut varier en
fonction des aptitudes de chacun et l'intérêt qu'on y
accorde.
Avant à l'époque nos grand-parents lorsque
la personne était admise dans ce groupe, cette femme était
désormais considérée comme une femme à part
entière.
Chez les femmes ntumu, la connaissance était
léguée par nos parents et se transmettait de
génération en génération. Une femme
détentrice d'un savoir médicinal cherchait toujours à
laisser cet héritage à un des siens. En forêt, elle amenait
un des enfants prédisposés à faire la médecine sur
les lieux pour lui apprendre à connaître à s'habituer aux
espèces qu'il a à cotoyer tout le temps (écorces,
feuilles, racines etc.) Comme toute société à
oralité, la femme ntumu transmettait ses savoirs par la parole qui se
manifestait sur l'individu.Le pouvoir de ses paroles assure de multiples
fonctions qui concourent au maintien de l'équilibre social à
travers les proverbes, la généléalogie, les devises, les
prières. Elle perpétue les valeurs culturelles du groupe et
transmet les enseignements. La gestion moderne expliquant la loi écrite
remplace la loi coutumière orale pour fixer les règles de gestion
durable des ressources.
Informateur n°19 : Entretien en
français en Avril 2007 avec M. MBIAME Calixe sur les changements des
activités.
Nous avons constaté qu'il ya un changement global
de la forêt. L'année était répartie en saison
mais à présent ce n'est plus le cas.
2. Nous voyons aujourd'hui que le blanc est venu gaspier
notre milieu. Au niveau de la pêche, ce ne sont plus les mêmes
instruments, les étangs ont remplaçé les rivières,
les femmes , pour faciliter leur travail, vident maintenant l'eau avec des
motopompes. On ne boit plus l'eau des rivières c'est maintenant l'eau de
la pompe.
3. Quand les femmes faisaient leurs plantations, il y
avait des outils adaptées, les ntumu avaient leur tronçonneuse
traditionelle qui a été remplaçée par celle des
blancs. Certaines femmes ntumu commencent à remplacer le panier la
brouette. La canne qu'on pressait avec notre machine (ékili) a
été remplaçée par la presse canne moderne.
4. La femme ntumu d'aujourd'hui n'est plus la même
que celle d'hier, les femmes abandonnent le village pour aller s'installer en
ville sans rien faire.Elles sont devenues paresseuses. Avant on jugeait la
femme par les activités qu'elle faisait dans la forêt.
L'écosystème forestier de la femme ntumu a subi
un changement. Actuellement, on se rend compte que la forêt a subi une
pression considérable. L'arrivée des occidentaux a modifié
toute la vie de la femme ntumu, les pratiques ne sont plus les mêmes. Les
facteurs modernes dont l'émergence est liée au
développement de nouvelles activités ou de nouveaux modes de vie
menaçant la regénération de la ressource de la
forêt. La mise en valeur du système colonial au-delà de
l'introduction de la monnaie scripturale et fiduciaire a énormement
influencé l'organisation des activités forestière de la
femme ntumu.
Informateur n° 20. Entretien en
français en Avril 2007 avec M. NKOGHE ASSOUME. Sur le rituel et les
interdits de la pêche.
1. Il existe des rituels qui interviennet dans la
pêche, mais pas n'importe comment. A vant de pouvoir travailler,un membre
du clan ou de la famille prend la parole en s'adressant aux génies, elle
fait des sacrifices, jetant des aliments ou des objets sacrés dans
l'eau.
2. En ce qui concerne les interdits, une femme enceinte et
une femme avec des menstrues ne doit pas pêcher.Le jour où on va
à la pêche, si tu as des enfants, il ne faut pas surtout qu'ils te
piétinent encore moins une des autres femmes sur le chemin sinon, tu ne
vas rien tuer. Pour laver ce mauvais sort, il suffit de tirer queques cheveux
de la tête et les frotte à l'endroit où on a
été piétiné.
3. Il existe également des aliments que l'on ne
doit pas consommer à la veille, sinon la pêche sera moins
fructueuse.
La pêche (alock) peut faire l'objet du rituel. Pour que
la pêche soit fructueuse, et que la partie se termine sans accident,
certains rituels ont organisés avant. Par ces rituels, les femmes ntumu
se concilient avec les forces de la nature, car la forêt est
habitée par des génies. Dans la pratique des activités,
les femmes ntumu se doivent d'observer les interdits pour le bon
déroulement et un meilleur rendement de la pêche. D'abord, il ne
faut pas se faire piétiner les une les autres sur la route cela porte
malheur. Ensuite, li y a des interdits concernant des aliments consommés
à la veille ou le jour de la pêche. Il est également
interdit d'uriner dans l'eau où se déroule la partie de
pêche.
1.1.2. Premières analyses
Dix informateurs d'un même groupe linguistique, nous
ont permis de collecter des récits relatifs aux activités de la
femme dans la forêt. Nous avons ainsi pu dégager une certaine
dynamique. Qu'avons-nous pu retenir de ce corpus ? Son examen critique
nous fait état de faits majeurs que nous soumettons à une analyse
sommaire. En effet, la plupart des récits collectés mentionnent
les rapports de la femme ntumu à la forêt. Selon nos informateurs,
le recours à la forêt a un fondement mystico-spirituel. La femme
ntumu a un esprit en elle qui est lié à la forêt. Ce qui
lui confère le monopole de la culture vivrière.
Le corpus nous permet de comprendre les mutations qui
s'opèrent à partir de l'arrivé des Occidentaux
malgré cela, l'ambition des femmes ntumu est de préserver la
coutume afin de génération en génération.
La forêt, malgré son exploitation abusive par
les hommes, est une richesse qui est toujours renouvelable. Ainsi ces deux
faits : forêt à la forêt et mutation dans ce milieu,
nous ont permis de comprendre le recours systématique de ma femme
à ce milieu. Il y a un effectivement un échange entre la femme et
ce milieu.
La perspective dynamique consiste à montrer le
changement au niveau de ses activités de hommes, des outils, de la
récolte. Cet état de fait nous a permis de comprendre le dualisme
écologique.
L'enquête de terrain est un moment crucial dans
l'étude anthropologique. Au-delà de la compréhension des
logiques qui gouvernent la vie d'une société, c'est le refus de
spéculer, d'attribuer à un groupe des discours arbitraires qui
fonde la méthode anthropologique. L'enquête de terrain n'est pas
toujours facile quelque soit le terrain d'enquête. Il y'a des
difficultés qui surgissent toujours même lorsqu'on l'a bien
préparée.
Nous pouvons affirmer de façon générale
que cette enquête s'est effectuée dans les conditions et la
rigueur exigée par la méthode anthropologique. Evidemment, il y a
des éléments en faveur de ce fait. Nos motivations avaient bien
comprises par les informatrices, malgré le manque d'enthousiasme de
certaines. Cette réticence s'explique par le fait que nous étions
cataloguée comme étant une politique au service des hommes
politiques de la ville d'Oyem ou de Bolossoville.
L'autre difficulté est liée aux aspects
financiers. En effet, nous avons fait l'expérience du principe du don
qui exige un contre-don. Certaines informatrices nous exigeaient qu'en retour
des informations livrées, je leur verse un tribu. Les moyens financiers
se sont révélés, tout au long de notre enquête,
insuffisants. Il nous fallait en plus du contre-don dépensé de
l'argent ou en prévoir, en plus, pour nos différents
déplacements d'un village à un autre.
Au final, nous avons quand même pu collecter des
données qui sont consignées en partie dans ce rapport de licence.
Ces données montrent que la forêt occupe une place importante dans
la vie des femmes ntumu d'Oyem et de Bolossoville. Elle pourvoit en ressources
alimentaires, en ressources financières. Elle est aussi présente
dans la littérature orale fang. Au-delà de ce constat, on a aussi
remarqué que la forêt interpelle la femme moderne, qui y va
pendant les week-ends s'adonner à des travaux champêtres non moins
importantes, comparativement au travail salarié. On retrouve au village
des personnes retraitées qui s'adonnent aux travaux champêtres.
C'est ainsi que la femme ntumu ne se départit pas de
cette activité. Ses enfants s'en trouvent même impliqués.
Toute leur éducation se repartit entre la
« modernité » de produits par l'école des
Blancs et la « vie traditionnelle » léguée
par les « anciens ».
L'objectif que vise tout travail de la femme, qu'elle soit
employée de bureau ou agricultrice est le même : assurer
à sa famille (époux et enfants) « quelque chose
à manger ». Cette continuité est ce qui ressort des
entretiens que nous avons eu avec nos informatrices. Bien entendu, nous ne nous
arrêterons pas là. Ici, nous avons tout simplement planté
le décor d'une étude qui se poursuivra en master 1 l'année
prochaine.
1.2. Corpus photographique
Corpus est constitué des photographies pises au
village Bolossoville et à Oyem (capitale). Elles présentent les
différentes étapes des travaux champêtres du point de vue
des femmes.
Photographie n°1 - Utilisation des
outils modernes
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-2.png)
Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006
Au premier, on peut apercevoir une forêt
composée d'une diversité d'arbre qui longe le champ. Au second
plan, nous avons des arbres à moitié séchés qui se
dressent dans le champ, d'autres par contres sont longés sur le sol. On
peut voir la cendre qui est couvre une partie du sol. A côté, il y
a une femme qui se tient débout vêtue d'une robe, d'un pantalon,
d'un foulard et des chaussures, tenant à la main un râteau
utilisé pour nettoyer la plantation. Devant elle, il y a une machette
accrochée à un tronc d'arbuste.
Photographie n°2 - Mise en terre de
grains d'arachide
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-3.png)
Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006
Au premier plan nous apercevons une forêt dense avec
une diversité d'arbres amassés les uns contre les autres, avec un
feuillage verdâtre. Au second plan, on aperçoit des arbres de
grandes tailles aux feuillages séchés et des arbres
dressés les uns à côté des autres. Il y a
également d'autres arbres qui ont été abattus. Sur le sol,
on peut voir de la cendre, des troncs d'arbres calcinés. On peut surtout
voir des jeunes filles qui s'adonnent à l'activité du
moment : la mise en terre des grains d'arachide. Ces jeunes filles sont
vêtues de robes longues et courtes pour certaines, avec des foulards,
d'autres n'en portent pas. Elles portent des chaussures, chacune tient à
la main un ébak, genre de houe à courte manche, servant
à labourer la terre. Les unes adoptent une position droite et les autres
sont plutôt courbés. Photographie n°3 -
Mise en terre d'une igname
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-4.png)
Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006
A premier plan, on a un forêt qui présente un
feuillage humide, au second plan des arbres des feuilles séchés
et des troncs dressés débout et éparpillés dans le
champ. Devant, il y a une femme vêtue d'un pantalon et d'une longue
manche portant un collier et sa tête couvert d'un chapeau. A
côté, il y a récipient en métal. Elle met en terre
une igname.
Photographie n°4 - Mise en terre d'un
rejet de bananier
Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-5.png)
Au premier plan, on peut voir des arbres au feuillage
abondant. Au second plan, on remarque des arbres à moitié et
entassés sur un partie du sol. Une femme accroupit portant un foulard,
un pull-over, une robe, un pantalon et des chaussures. En face d'elle, un rejet
de bananier est enfoui, à moitié sous la terre. A
côté d'elle, est posé à même un panier. On
peut également voir un tas de cendre avec du bois calciné. C'est
à cet endroit que sont plantés les légumes.
Photographie n°5 - Transport de
boutures de manioc
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-6.png)
Cliché de Ella Judith, à Oyem, avril 2006
Au premier plan, on remarque une forêt parsemée
d'une multiplicité d'arbres, à côté il y a des
arbres abattus couchés à même le sol. Au second, on voit
deux femmes qui marchent portant des vêtements qui couvrent leur corps,
exceptées les mains et les faces. Elles portent sur le dos des paniers
remplis de boutures de manioc. Sur les boutures que porte la première
femme est un sac de riz vide contenant des semences de légumes et des
provisions. A coté de cette denier, de trouvent deux chiens suivant qui
déplacent aux pas des femmes. Le long de la piste est couvert d'une
forêt non encore exploitée.
Photographie n°6 - Collecte des
feuilles de manioc dans un champ pluricultural
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-7.png)
Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006
Au premier plan, on remarque une pluralité d'arbres de
tailles différentes, certains portant de feuilles, d'autres ayant leur
feuillage. Au second plan, on peut apercevoir une femme débout dans son
champ entrain de cueillir les feuilles de manioc. Dans ce champ, on peut
également apercevoir des bananiers, des légumes, du maïs.
Cette femme porte un foulard sur sa tête, un robe avec un pull-over
longue par-dessus, un pantalon ; juste à côté d'elle
il y a panier couché à même le sol qui servira à
transporter les produits collectés. On peut aussi voir des adventices
aux pieds des plantes.
La pluriculture est un trait caractéristique des
techniques culturales traditionnelles.
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-8.png)
Dans ce champ au premier plan nous avons des boutures d'ananas
enfuies sous terre également des rejets de banane et du follong. Au
second plan nous avons le maïs, des bananerais, du manioc qui ont atteint
une hauteur moyenne. Certains maïs commencent déjà a montrer
leur barbe, nous aussi les restes de bois séchés qui
représentent une forêt vierge non exploitée.
Immédiatement après la récolte des
arachides comme nous le constatons dans ce champ, chaque afup owono
évolue en un champ polycultural, formé des cultures mises en
terre au même moment que l'arachide et d'autres ajoutées par la
suite,il est appelé kunu. Le terme « champ vivrier
polycultural correspond aux champs de féculents (plantain, ananas,
manioc, ignames, taro...). Il y a chaque année autant de kunu
crées une saison plus tard que de champs d'arachides
récoltés. La mise en terre des boutures de manioc, des dragons de
plantain et plus rarement les semis du maïs marquent la fin de la saison
des arachides.
Les aliments de base, la ration amylacée sont produits
dans le kunu deux fois par an. La notion de vieillesse
caractérise le kunu car ce n'est plus un jeune champ,
contrairement au champ d'arachides, ce champ vivrier polycultural se
caractérise par des cultures qui approchent de la maturité comme
le macabo, la patate douce, les différentes variétés
d'aubergines, les tomates, les oignons, les ignames, le maïs, les plantes
ichtyotoxines... Après le bouturage du plantain et du manioc, toutes ces
cultures évoluent ensemble pendant quelques années, en
générale entre trois et cinq ans. Les premiers à entrer en
production sont les légumes ou brèves : tomates, piments,
amarantes, gombos, oignons, et le maïs. Puis suivent les tubercules
(patates douces) et le manioc (mbong) qui dominent en quantité
pendant deux à trois ans au maximum. Le plantain est
préférentiellement planté dans les parties les plus
ombragées du champ.
Photographie n°7 - Technique de
portage
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-9.png)
Cliché de Ella Judith, à Oyem, avril 2006
Au premier plan se trouvent des arbres aux feuilles vertes.
Au second, une femme débout portant un foulard, un haut longe manche, un
pantalon et des chaussures. Elle porte sur son dos un panier remplit de manioc.
A la main droite, elle tient une machette, et à l'autre main, tient un
morceau de bois. Empreinte la piste qui mène au village.
Photographie 8 - Les mutations : Les
hommes deviennent des agriculteurs
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-10.png)
Dans ce champ, au premier plan nous voyons un homme debout
dans son champ pluricultural habillé avec les vêtements qui
couvrent son corps de la tête au pied. Au second plan prolongement de son
champ présentant une diversité de culture à une hauteur
suffisamment élevée (maïs, canne à sucre, manioc,
bananerais). A l'arrière plan c'est une forêt vierge avec des
arbres très élevés. Ici les hommes seuls font leurs champs
sans l'intervention de la femme. Généralement ils cultivent le
plantain dans le champ de courges afin d'obtenir un champ de bananiers
après la récolte. Dans ce cas précis, la production est
principalement destinée à la vente. Ces hommes nourrissent leur
famille grâce à leurs revenus. Ils court-circuitent la phase des
cultures entièrement par les femmes (semis, désherbage,
récolte, des arachides et du vivrier autre que le plantain), pour
obtenir un champ enrichi principalement en culture de rente (plantain,
fruitiers, bananes douces, macabo et quelques fois ananas). L'argent
issu de la vente des cultures de rente leur permet de participer aux frais du
ménage auprès duquel ils vivent et d'épargner.
Photographie 9 - La monoculture, trait du
« capitalisme » fait son entrée dans les moeurs. Les
villageois recherchent de plus en plus de l'argent pour satisfaire leurs
besoins.
![](La-dynamique-des-rapports-de-la-femme-ntumu--la-fort--cas-des-femmes-dOyem-et-de-Bolossoville-11.png)
Dans ce champ nous remarquons au premier plan du maïs
à une hauteur très élevé
DEUXIEME PARTIE
Les activités féminines dans la
forêtChapitre 3. L'inventaire des activités et la
recension
Les peuples actuels de l'Afrique bantu,
leurs visions, leur représentation et leurs explications du monde, leurs
cultures et leurs langues paraissent être aujourd'hui l'aboutissement
d'une longue histoire, façonnée par leurs relation avec les
éléments physiques et les ressources naturelles dont ces peuples
tiraient tout ce dont ils avaient pour vivre.
Section 1 : L'agriculture
1.1. Organisation de l'espace agricole
Les Ntumu, l'une des branches de l'ensemble de l'ethnoculture
fang, se sont installées au nord du Gabon où ils constituent
sûrement le groupe ethnique le plus homogène. Par la rigueur de
leur organisation sociale, ils sont parvenus, sinon a s'imposer à une
nature hostile, du moins à s'y adapter et en tirer des ressources
suffisantes à leur survie. L'activité agricole ntumu, sans doute
fondée sur la cueillette à l'origine, s'est transformée en
une agriculture tournée essentiellement vers l'autoconsommation, puis
depuis l'ère coloniale, elle inclut une production marchande par
l'adoption des cultures de rente à savoir le cacao. L'introduction dans
le milieu traditionnel de ses nouvelles spéculations, loin de
bouleverser fondamentalement et de manière négative les
structures préexistantes ont été parfaitement
intégrées au monde traditionnel qui n'a opéré que
de légers rajustements.
A la stratégie paysanne plusieurs fois
séculaire de l'occupation des sols, s'est ajoutée celle à
caractère socio-économique des objectifs agricoles fixés
l'une et l'autre conjuguées aux facteurs naturels et humains, ont
engendré dans le terroir une triple originalité :
originalité dans la propriété foncière,
originalité dans la répartition des taches agricoles et enfin
originalité dans l'expression spatiale des structures agraires. Partout,
il s'agit d'une agriculture semi-itinérante complétée, en
général, par des jardins de case agroforestiers. Le
défrichage n'est pas toujours accompagné de brûlis. Chaque
année, une famille défriche entre 0,18 et 3 ha de forêt,
pour y créer une ou deux plantations vivrières par an, en
même temps que l'on abandonne les parcelles cultivées deux ou
trois ans auparavant, laissées en friche. Chez les Fang (Sud Cameroun,
Nord Gabon), une femme cultive annuellement 0,52 ha pour nourrir sa famille (Carrière 2003). Dans les ménages polygynes,
les co-épouses exploitent des terrains mitoyens, les terres de ces
familles étant plus vastes que celles des familles monogames.
1.2. Calendrier agricole de la femme ntumu
Il est fort bien rempli, la femme ntumu du Woleu-Ntem restant
chargée toute l'année par diverses opérations
champêtre dont elle assure la conduite. S'agissant des travaux de
désherbage de déforestage sur les champs vivriers et du
débroussage sur les plantations, une mise au point s'impose, il n'en
demeure pas moins vrai que certaines femmes ne bénéficient pas de
ces avantages, il s'agit surtout des divorcées, veuves ou
célibataires qui prennent elles mêmes en charge la direction de
ces opérations. Les femmes interviennent également à
plusieurs niveaux de la production commerciale dans le s travaux de nettoyage
dans les corvées d'eau pour la lutte phytosanitaire, dans le ramassage
dans l'écabossage et enfin dans le postage des produits des plantation
jusqu'au village.
Tableau : La Dynamique des relations des
femmes ntumu à la forêt
Activités
|
Hommes
|
Femmes
|
Choix du site
|
+
|
+
|
Débroussaillage
|
+
|
0
|
Abattage
|
+
|
0
|
Brûlis
|
+
|
+
|
Nettoyage
|
0
|
+
|
Plantation
|
+
|
+
|
Entretien de la plantation
|
+
|
+
|
Récolte des produits
|
+
|
+
|
Transport des produits
|
+
|
+
|
Source : Construction personnelle
Ce tableau montre que l'on passe d'une société
dans laquelle ces rapports économiques sont organisés selon les
deux sexes, l'exécution des travaux étaient destinés aux
hommes alors qu'aux femmes il revenait les travaux qui, théoriquement,
sont faciles à une sociétés indifférenciée.
Ce d'autant plus que l'introduction de la monnaie et l'affaiblissement des
interdits toute difference à outrance. De nos jours, pour les ntumu la
répartition des tâches n'est plus pertinente. La femme ntumu peut,
du fait de l'argent issu des ventes des produits, s'investir plainement, et par
la même marquée son « indépendance ».
Nous avons affaire de plus en plus à des femmes et des hommes qui ne
sont plus différenciés sur la base du genre, mais sur celle des
« revenus ». On peut certainement pas préjuger avec
certitude ce que seraient les sociétés dites traditionnelles,
mais on peut postuler que les femmes ntumu pourraient à terme rejoindre
le cadre de leurs consoeurs urbaines. Il est vrai que les pesanteurs de la
société font d'elle encore la principale productrice mais en ce
qui concerne les produits commerciaux ou qui rapporteraient de l'argent.
1.3. Les cultures de rente : la femme ntumu dans la
plantation cacaoyère
Comme les activités annexes constituées de la
pêche, de l'élevage, de la cueillette et du ramassage des fruits
et enfin de la préparation des produits destinés à la
vente, la cacaoculture est un travail d'appoint que les femmes ntumu font
exclusivement dans le but d'aider leur mari. Etant donné
l'intensité des activités agricoles dans le vivrier, la femme
ntumu n'a pas un calendrier chargé dans la cacaoculture. En effet, la
première intervention de la femme dans les plantations cacaoyères
se situe au moins de février et moins en mars et avril pour les travaux
d'entretien. Sa part de travail à ce niveau est très
insignifiante et les femmes qui le font réellement sont peu nombreuses.
Ici, les femmes ntumu font le ramassage des cabosses qui sont coupées
par les hommes.
Ces cabosses sont mises ensuite dans des paniers ou des
hottes. De là, elles procèdent à la mise en tas qui suit
tout de suite le ramassage le jour même de la récolte. Cette mise
en tas se fait à un endroit précis aménagé dans le
champ même ou en marge de celui-ci. Après l'opération de
mise en tas, les femmes ntumu associées aux enfants procèdent
à l'écabossage qui consiste d'abord à casser la cabosse
à l'aide d'un bâton ou d'un « dos » de
machette, ceci pour ne pas blesser les fèves très
délicates, ensuite à l'extraction à la main des graines
qui sont mises progressivement dans les paniers et transportées par les
femmes ntumu au lieu de fermentation. Pendant les journées de
récolte, quelques jours à l'avance afin de faire des provisions
de nourritures, elles confectionnent des mets qui se conservent quelques jours
comme les bâtons de manioc. On observe fréquemment quelque
cultures vivrières (plantain macobo bananes douces et fruitiers divers)
aux abords des campements dans les cacaoyères, afin aux femmes de faire
un détour par les champs pour y prélever le repas. Pendant la
récolte du cacao, un deuxième village s'établit dans des
bassines et certains y passent la nuit dans une cabane prévue à
cet effet afin de veiller sur les cabosses. A cette période, no voit
augmenter la quantité de produits secondaires (feuilles et
écorces médicinales, fruits sauvages, escargots achatines,
champignons...) prélever dans les cacaoyères, tout comme le
nombre de visites des membres de la famille. Après la récolte et
la fermentation qui se déroulent dans la plantation, les planteurs font
sécher les fèves au village sur des claies de séchage
qu'il faut entretenir et remettre en état chaque année.
Introduites et développées pendant la
période coloniale, les cultures de rente sont désormais
quasi-générales : rares sont les villages qui n'ont aucune
parcelle qui leur soit consacrée. Selon les régions et la
pluviométrie, le café et le cacao sont les principales
cultures.
Toutefois ces activités subissent le contre-coût
des variations mondiales des cours des matières premières, en
plus des incertitudes politiques et économiques de ces pays. Ainsi
certains pays tentent-ils de monopoliser l'achat des récoltes dans les
villages, fréquemment mal rémunéré aux paysans; par
ailleurs l'état de dégradation des routes empêche souvent
l'évacuation des récoltes. Aussi n'est-il pas rare que les
paysans ne puissent pas vendre chaque année leurs produits, perdant
ainsi une de leur seule source d'apport monétaire.
Tableau sur les outils de travail de la femme
ntumu
Noms en français
|
Noms en fang ntumu
|
Sarcleur
|
Ebakh
|
Machette
|
Fa
|
Panier
|
Nkuengn
|
lime
|
Nyos
|
Comme les autres formes d'agriculture traditionnelle, celle du
Woleu-Ntem ne modifie pas la structure du sol. L'absence d'attelage et autre
matériel à caractère moderne ne doit pas surprendre. La
femme ntumu utilise une gamme d'outils très simples dans les travaux
champêtres, qui servent principalement à désherber la
plantation, à déterrer les tubercules ignames, à fouiller
les arachides, à couper, à sarcler.
Section 2 : La pêche
[melok]
Dans le Woleu-Ntem, la pêche féminine se
pratique en forêt surtout en saison sèche dans les rivières
les mares et les marigots .la pêche dans le fleuve est quelque peu
réservée aux hommes. Bien que la pêche ne mobilise pas plus
de temps que les autres activités de subsistances, les femmes ntumu se
disent avant tout des pêcheurs expérimentés. C'est une
activité traditionnellement valorisée dans le Woleu-Ntem comme
peuvent en témoigner nombre de techniques, règles, interdits et
symbole qui s'y rattachent. Grâce à la proximité du
fleuve,après les travaux des champs, chacun peut vaquer à ses
activités de pêche, les femmes ntumu comme les jeunes et les
parties de pêche s'organisent individuellement ou collectivement. Les
techniques de pêche sont extrêmement variées et
adaptées à des lieux et à des périodes bien
précises. Elles s'adresse à des individus particuliers, et se
pratiquent sur l'ensemble du territoire forestier villageois. Les femmes ntumu
tirent le meilleur parti de la ressource halieutique en développant une
connaissance fine des matériaux issus du milieu et du comportement des
différentes espèces de poisson, et en portant une attention
particulière aux variations du débit des eaux. La pêche,
destinée le plus souvent à la consommation familiale, se pratique
quasiment toute l'année.
1.1. La pêche individuelle
La pêche individuelle c'est celle ou la femme va
pêcher seule pour quelques heures. Elle peut aller avec d'autres femmes
pour ce type de pêche, mais la technique n'est pas de nature collective.
Elle a comme outil un filet de pêche tane, une machette
fa et un récipient servant à mettre le
poisson capturé appelé nkun .ce
récipient s'attache à la ceinture avec une liane. Grâce
à ses petits trous il évacue l'eau et n'y laisse que des poissons
capturés. La technique de ce genre de pêche consiste à
faire avancer le filet dans l'eau et à soulever assez souvent pour
récolter le poisson qui s'y est pris. Signalons que cette forme de
pêche ne permet que la capture de très modeste qualité
1.2. La pêche collective
La pêche occupe une place de choix dans les rapports de
la femme ntumu à la forêt. Fréquemment, en saison
sèche, les femmes pratiquent collectivement la pêche à
l'écope dans les petits ruisseaux de forêt. La pêche
collective au poison est par ailleurs très répandue. Souvent
aussi, des nasses sont utilisées. Les femmes ntumu qui se procurent
surtout du poisson auprès de pêcheurs de la région
pratiquent aussi la pêche au filet avec pirogue.
Cette technique est également utilisée par les Kwele du Sud
Cameroun.
Les femmes vont en groupe après avoir
apprêté leur outils : petits filets (tane), paniers,
(mikuegn) machettes (mefa) récipient
pour vider l'eau ou ékana. Lorsqu'elles arrivent à la
rivière préalablement choisie, elles font une grande digue qui
entraîne l'assèchement partiel de la partie avale. Ensuite, elles
descendent le long de cette rivière pour y choisir les parties
réputées poissonneuses. Elles se diviseront ainsi en petits
groupes en vue de vider l'eau qu'elles verseront toujours du côté
de l'aval. Cette technique se fait grâce à l'ékana
ou récipient en bois conçu pour cet usage.
C'est au moment ou cette partie barrée en amont et en
aval commence à se vider de son eau que les femmes capturent le poisson
qu'elles se partageront avant leur retour au village, le plus souvent à
la nuit tombante. Cette activité est très pénible car les
femmes restent courbées pratiquement pendant toute la durée de la
partie de pêche. Ici les femmes peuvent obtenir une grande
quantité de poisson selon les cours d'eau.
Cependant, lorsqu'elles veulent en avoir au point d'en faire
des provisions, elles vont chercher des rivières très
éloignées du village et très poissonneuses où elles
s'installeront pendant deux ou trois semaines voire un mois en pratiquant cette
pêche collective qui prend cette fois le nom de mvane melok.
Le comportement est différent ici. En effet, au
campement, les règles qui régulent le comportement au village ne
sont plus guère respectées. Parties de pêche
obéissent à la logique du campement : prendre le maximum de
poisson en utilisant des techniques reprouvées au village. Ces pratiques
sont tolérées parce qu'ici les visites sont plutôt rare. La
ressource peut donc se reconstituer. Cette pratique se fait surtout pendant la
saison sèche après que les travaux champêtres,
activité principale de cette période, aient été
sérieusement entamés.
Cette technique collective peut interpeller soit toute la
famille, soit la famille et les alliées. Le plus souvent la
présence des hommes est nécessaire pour protéger les
femmes contre les fauves. L'homme s'adonnera pour s'occuper aux
activités liées à la chasse ou à la recherche des
fruits ou d'autres produits de la forêt. La nuit venue, il ne dormira. Il
veillera à la sécurité des femmes et des enfants parce
qu'il faut signaler que ce déplacement en masse dans la forêt se
fait le plus souvent avec les enfants des deux genres. Il y a derrière
cette activité, un souci de pédagogie de la forêt.
La pêche à la nivrée
Les femmes ntumu comme les autres
populations de l'Afrique centrale bantues utilisent les poisons de pêche.
La pêche à la nivrée est une technique de pêche
collective, ancienne, essentiellement féminine et pratiquée
pendant la saison sèche. Elle consiste en l'aménagement d'une
retenue d'eau plus ou moins grande, hermétiquement fermée en
amont par un barrage puis vidée à l'écope dans laquelle
des plantes aux propriétés ichtytoxiques sont
déposées. Le poison ainsi empoisonné remonte à la
surface où les femmes ntumu le capturent soit à l'aide de filets,
soit à l'aide d'une machette ou encore à la main dans les trous
d'eau et les recoins de la berge. Ce type de pêche, assez rare de nos
jours, est considéré comme très efficace.
Barrages et écopes
Ces techniques donnent lieu à une pêche
collective, diurne et féminine, à laquelle participent des
adultes et des jeunes femmes ntumu entre deux activités agricoles. Elles
consistent à créer à proximité ou dans le terroir
agricole (pour limiter les déplacements) une retenue d'eau (50m²
environ). Grâce à la mise en place d'un barrage principal en
amont, l'eau s'écoule, faisant baisser le niveau. Les barrages
secondaires sont construits en aval puis, grâce à l'écope
(pièce de bois incurvée), l'eau est vidangée hors de la
retenue. Le poisson pris au piège est ramassé à la
machette pour les plus gros.
Nasses
Les femmes ntumu utilisent la pêche
à la nasse. Le premier consiste à cumuler les effets des barrages
placés en travers du cours d'eau et des nasses fermées
(tane). Il se pratique en eau claire et vive mais de faible profondeur
(saison sèche). C'est une technique nocturne essentiellement
féminine, individuelle ou en binôme, voire en trinôme. Les
nasses en rotin, placées sous l'eau, sont orientées ouverture
vers l'aval (en forme de cône inversé). Le barrage
(miock) a pour fonction ralentir le débit de l'eau mais
également de concentrer les voies de passage possibles vers l'ouverture
des nasses. Grâce à cette technique, les femmes ntumu capturent
les poissons remontant le courant pour rejoindre les zones de frai.
Tableau sur les outils de pêche des
femmes ntumu
Noms en français
|
Noms en fang ntumu
|
Corbeille
|
Nkun
|
nasse que l'on trempe dans la rivière
|
Aya
|
Nasse
|
Tane
|
Cuvette en bois
|
Ekana
|
Source : Construction personnelle
Les outils utilisés par les femmes ntumu à la
pêche servent à vider l'eau, à mettre le poisson, capturer,
à filtrer les eaux.
Section 3. Le ramassage et la collecte
Les femmes du département de la province du
Woleu-Ntem, comme partout au Gabon, font entrer dans leur alimentation outre
les produits de leur agriculture, ceux de la cueillette, du ramassage et de la
collecte qui en constituent une part importante. Elles
bénéficient du droit du premier occupant de manière
définitive le défrichement du lieu de récolte lors de sa
découverte et par la suite à chaque saison productive marque
cette appropriation.
1.1 Le ramassage
L'activité de ramassage est une activité
féminine. Elle se fait soit en groupe soit individuellement et peut
nécessiter le déplacement de plusieurs personnes et même la
mise en place de campement. Contrairement au ramassage qui se passe
également en saison sèche, cependant la première revient
à l'adzap ou arbre à beurre (Baillone toxis
perma) et au ndok (Iringia gabonensis). Du premier, les
femmes ntumu savent extraient une matière grasse servant à la
cuisine et qui s'appelle mbôn adzap ou huile de medzap.
Du second, elles font une pâte sèche, qui durcie en prenant la
forme du récipient dans lequel on l'a versée, c'est le chocolat
indigène dont les sauces sont beaucoup appréciées
localement et font également l'objet d'une activité dite
extrativiste saisonnière à production très variable.
Les fructifications étant massives et les zones
à manguiers éloignées du village, les femmes se regroupent
en unités résidentielles nda bot ou en familles
élargies pour partir à la collecte souvent pendant plusieurs
jours. La femme et à travers elle la famille propriétaire du
manguier se chargera du partage àkaban et
bénéficière de la part la plus important.
1.2. La collecte
Malgré les apparences, les collectes quotidiennes et
saisonnières de partie végétaux (écorces, fruits,
feuilles, bois, etc.) et d'insectes ou champignon sont omniprésents et
représentent une part qualitative non négligeable de la ration
alimentaire. La collecte améliore sensiblement la qualité de la
vie en fournissant des matériaux d'appoint pour la chasse (appeaux) et
le piégeage ( liane et tendeurs) des matériaux de cuisine, de
construction et de vannerie, des plantes médicinales et ichtyotoxiques,
des gommes pyrogènes et des pions pour le jeu ( songo) La collecte
quotidienne concerne essentiellement le bois de chauffage et les feuilles
destinées à confectionner les bâtons de manioc une grande
part de la collecte concerne les parties végétaux (feuilles,
racines, écorces, fruits, ou graines.) utilisées dans la
pharmacopée traditionnelle, les escargots, les champignons et les larves
de coléoptères parasites de palmier sont également
prélevés dans la forêt et consommés plus ou mois
tout au long de l'année. Les fruits forestiers
« sauvages » saisonniers sont souvent consommés par
les enfants : raisin pahouin, tricoscypha abut (Anacardiaceae),
safoutier sauvage, Dacryodes edulis (Anacardiaceae). Ils sont parfois
cueillis puis vendus par les femmes ntumu comme la noisette d'Afrique,
coula edulis (olacaceae). Plusieurs graines protéagineuses sont
à la base de sauces très appréciés localement et
font également l'objet d'une activité dite extractiviste (et donc
de rente) saisonnière à production très variable :
mangue sauvage, irvingia gabonensis (irvingiaceae), noix, panda oleosa
(Pandaceae) et Ricinodendron heudelotii (Euphobiaceae).
Elle comprend la cueillette des végétaux, le
ramassage d'invertébré et la collecte du miel. Les
végétaux les plus couramment collectés sont les noix
d'oléagineux et de nombreux champignons, principalement les champignons
de termitières. Cette cueillette se pratique par groupes de 2 à 6
femmes. Le ramassage d'invertébrés, essentiellement les
chenilles, est effectué par groupes de 2 ou 3 couples, parfois
même en famille, avec bivouac.
Les femmes Ntumu distinguent le ramassage à terre, la
cueillette à la main, la cueillette au couteau, l'extraction du sol. Les
femmes ntumu connaissent des centaines de plantes et leur cycle de
reproduction. Dans le domaine des fruits, par exemple, leur connaissance est
impressionnante : ainsi des centaines de fruits sont distinguées, pour
lesquelles, tout, depuis l'écosytème.
Tableau - sur les produits de la collecte et
du ramassage chez les femmes ntumu
Noms scientifiques
|
Noms ntumu
|
Famille
|
Coula edulis baillon
|
Ewème
|
Olacaceae
|
Irvingia gabonensis
|
Ndock
|
Irvingiaceae
|
Pseudospondias microcarpa
|
Ofwass
|
Annacardiaceae
|
Tricoscypha abut Engl.
|
Amvut
|
Annacardiaceae
|
Baillonella toxisperma Pierre
|
Adzap
|
Sapotaceae
|
Gambeya africana
|
Abam
|
Sapotaceae
|
Ricinodendron heudelotü
|
Ezang
|
Euphorbiaceae
|
Section 4. La cueillette
La technique de cueillette est également
utilisée par les femmes ntumu. Celle-ci, comme les autres techniques
d'accès à la ressource, se pratique soit individuellement, soit
de manière collective. Les produits de cueillette ne peuvent être
considérés comme secondaire, même s'ils complètent
les produits issus de champs. La cueillette de certains fait l'objet des
expéditions en forêt.
La cueillette occupe une place importante dans les rapports
de la femme ntumu à la forêt. Mais il nous faut signaler
que les femmes ne grimpent guère aux arbres, cette activité leur
est interdite. Il arrive de temps en temps que la femme s'adonne à cette
activité éminemment masculine. La cueillette concerne une
multitude d'activités qui va des fruits au miel. Celle qui
intéresse la femme est celle relative aux fruits de tous genres.
Il existe plusieurs espèces dont nous ne parlerons
que des plus utilisés. C'est pendant l'esep, la petite saison
sèche et l'oyon, la grande saison sèche que la plupart
des fruits mûrissent. Ainsi, les femmes accompagnées souvent des
enfants vont cueillir les fruits de tom (Dacryodes
macrophylla), de l'ofos (érable d'Afrique Poga
oléosa), d'asas (Dacryodes edulis) qui est la
forme sauvage du safoutier, etc. La cueillette est soumise a des règles
d'appropriation individuelle, ele djam (transmise matrilinéaire
ment aux épouses des fils). Les arbres produits inclus dans le terroir
villageois font l'objet d'une exploitation de type extractive (cueillette
destinée à la vente) préférentiellement au
bénéfice des femmes. Le caractère prioritaire qui peut
exister sur cette maîtrise « exclusive » correspond
à l'impossibilité pratique de contrôler l'accès aux
arbres éloignés du village (Karsenty et Marie 1997).
Ainsi la récolte et les revenus monétaires
procurés par les fruits sauvages appartiennent aux femmes. Elles
bénéficient du droit du premier occupant de manière
définitive. Le défrichement du lieu de récolte lors de sa
découverte et la suite à chaque saison productive marque cette
appropriation. Les fructifications étant massives et les zones à
manguiers éloignés du village, les femmes ntumu se groupent en
unités résidentielles (nda bot) ou famille
élargies pour partir à la cueillette souvent pendant plusieurs
jours. La femme ntumu et à travers elle la famille propriétaire
du manguier se chargera du partage (akaban) et
bénéficiera de la part la plus importante. Cette situation
recoupe partiellement des observations plus anciennes sur le droit foncier
appliqué dans le terroir agricole chez les femmes ntumu du Woleu-Ntem.
En effet, quelques études montrent que les terres de jachères
étaient héritées de mère en fille (ou belle-fille)
et donc de femmes à femmes (Nguema, 1970 ; 1985). Les autres fruits
extraits de la forêt, comme la noisette d'Afrique (coula edulis)
et la noix (panda oleosa), ne donnent pas lieu à un
extractivisme comme la mangue sauvage mais font l'objet des mêmes modes
de gestion que celle-ci.
Tableau sur les produits de la cueillette chez les
ntumu
Noms scientifiques
|
Noms ntumu
|
Dacryodes macrophylla
|
Atom
|
Macaranga sp.Thouars
|
Assas
|
Tricoscypha arborca
|
Engong
|
Pour évaluer l'efficacité de l'agriculture, il
faut donc au moins esquisser les autres composantes du système
général de production. Il est parfois difficile de séparer
culture et cueillette. Le cas de l'arboriculture est frappant. On plantait
les noix d'élais mais ce palmier poussait aussi de
façon subspontanée notamment près des villages et sur les
anciennes jachères. Là où les conditions physiques
étaient très favorables, de vastes palmeraies
« naturelles » se créaient. Elles n'étaient
pas vraiment naturelles puisque les gens débroussaillaient autour des
jeunes palmiers et plantaient parfois.
On plantait rarement le safoutier (Pachylobus edulis G.)
pratiquement jamais L'Irvingia Gabonensis, qui fournissait pourtant des
matières grasses fort appréciées (le chocolat odika du
Gabon), ni le canarium schweinfurthü, dont les fruits étaient
appréciés. Par contre on plantait le colatier
(variétés acuminata et Ballayi surtout). On a mentionné le
cas des plantes subspontanées de jachère dont les feuilles
servaient de légumes et qui apportaient des compléments
minéraux souvent cruciaux. Ajoutons à la cueillette encore celle
des termites (deux fois l'an), des champignons (parfois pendant le long du mois
et des chenilles (différentes espèces à différentes
dates, et protection des arbres à chenilles). Enfin, les femmes ntumu
mentionnent la pratique de ne prévoir une récolte agricole que
pour dix mois par an. Pendant deux mois, on se nourrissait de fruits venant en
maturité à la même époque. Un peu partout dans le
Woleu ntem, on partait pendant un mois en saison des eaux basses pour
pêcher et récolter à partir des camps temporaires.
Tableau - Utilisation des principales
essences
Noms scientifiques
|
Noms ntumu
|
Partie prélevée
|
Utilisation
|
Tricoscypha abut
|
Mvut
|
Fruit, écorce
|
alimentation, médecine
|
Rauwolfia macrophylla
|
Esombo
|
écorce, sève, fruit
|
médecine
|
Spathodea campanulat
|
Evovon
|
Fleurs
|
ornement, médecine
|
Ceiba pentandra
|
Dum
|
Bois
|
bois de chauffe
|
Canarium schweinfurthii
|
Otou
|
Fruit, graine, sève
|
alimentation, résine, pyrogène
|
Funtumia elastica
|
ndama afan
|
feuilles, résine
|
résine, sève
|
Dacryodes edulis
|
Asa
|
Fruit
|
alimentation
|
Terminalia supreba
|
Akom
|
feuilles, bois
|
chenille, bois de chauffe
|
Ricinodendron heudelotii
|
Ezang
|
Graine
|
sauce
|
Macaranga sp
|
Assas
|
Bois
|
bois de chauffe
|
Irvingia gabonensis
|
andok afan
|
Fruit, graine
|
alimentation, sauce
|
Desbordesia glaucescens
|
Alep
|
écorce, feuilles
|
médecine
|
Anthocleista schweinfurthii
|
Elolom
|
feuilles, fruit
|
médecine
|
Tetrapleura tetraptera
|
Akpwaa
|
Fruit, graine
|
alimentation, sauce
|
Penthaclethra
|
Abe
|
Fruit
|
sauce
|
Albizza adianthfolia
|
Sayema
|
Feuilles, écorce, fruit
|
Médecine
|
Myrianthus arboreus
|
Engokom
|
Fruit, couronne
|
alimentation
|
Musanga cecropioides
|
Asseng
|
Fruit, bois
|
alimentation, bois de chauffe
|
Chlorophora excelsa
|
Abang
|
feuilles, écorce, bois
|
médecine, habits
|
Ficus sp.
|
|
Fruits, sève, écorce, couronne
|
alimentation, médecine, habits
|
Pycnanthus angolensis
|
Eteng
|
Fruit, couronne
|
médecine
|
Pterocarpus soyauxii
|
Mbee
|
écorce, feuilles, bois
|
médecine, bois de chauffe
|
Zanthoxylum macrophyllum
|
olon
|
écorce, fruit, feuilles
|
médecine, poison de pêche
|
Eribroma oblongum
|
Ndjong
|
couronne, écorce, fruit, bois
|
médecine, bois de chauffe
|
Triplochiton scleroxylon
|
Ayos
|
feuilles, bois
|
chenilles, bois de chauffe
|
Une raison très souvent évoquée par les
femmes ntumu pour expliquer la présence d'une espèce
arborée dans un champ est son utilité extra-agricole dans le
système de production (Carriere 2002). Ces arbres procurent une
multitude de produits forestiers ligeux et non ligneux. En effet, ils
fournissent des fruits, sons ornementaux ou encore certaines de leurs organes
sont employées dans la préparation des médicaments
traditionnels. Les graines de ces arbres peuvent parfois servir de base
à la préparation de sauces très appréciées
dans la cuisine locale de la femme ntumu comme cela est le cas pour la mangue
sauvage. D'autres espèces fourniront au moment opportun des
matériaux de construction, mortiers, pilons, des systèmes de
piégeage, les articles de pêche. Le latex et la résine de
quelques essences sont utilisés comme combustibles pour
l'éclairage, comme savon ou détergent ou encore comme substance
ichtyotoxiques pour les parties de pêche collective.
Certaines espèces sont appréciées pour
l'attraction qu'elles exercent sur les animaux comestibles tels que les
chenilles, les singes ou les oiseaux (Carriere 2002). Les « arbres
orphelins » représentent également une réserve
de bois de chauffe. Tous les arbres ne sont pas nécessairement
utilisés pendant le cycle de culture en cours, mais ils
représentent un potentiel de ressources utilisables dans le futur pour
faire face à des besoins inattendus. La gestion de l'agrosystème
passe donc par une attention très grande de ce capital vivant. La foret
contribue en cela aux stratégies de subsistance elles-mêmes
encrées au sein des cosmogonies locales « qui
préconisent » une utilisation rationnelle et
modérée des ressources sauvages (Bahuchet 1997).
Le calendrier des activités de la femme
ntumu
Déc.
|
Janv.
|
Févr.
|
Mars
|
Avril
|
Mai
|
Juin
|
Juillet
|
Août
|
Sept
|
Oct
|
Nove
|
Petite saison sèche
|
Pte saison des pluies
|
Grande saison sèche
|
Gde saison des pluies
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Activités agricoles (essartage, brûlis, semis)
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Activités agricoles (essartage, brûlis, semis)
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Culture de rente (récolte, entretien cacao)
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Piège
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Pèche
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Récolte de l'aliment de base (manioc,
plantain) toute l'année
|
En forêt tropicale humide, l'environnement naturel est
riche en ressources. Les possibilités d'exploitation du milieu sont
multiples et variables au gré des contraintes inhérentes au
milieu naturel et des objectifs de chaque agricultrice. Traditionnellement, les
modes d'exploitation des ressources animales et végétales se
limitent souvent à des méthodes extensives. En plus de
l'agriculture itinérante sur brûlis, les femmes ntumu recourent
à toute une gamme d'activités de subsistance. L'agriculture de
subsistance (banane, manioc, patate douce, ignames, macabo...) produit la part
principale de l'apport glucidique (hydrates de carbones) du régime
alimentaire des agricultrices forestières. En revanche, la part
qualitative (protéines, lipides, glucides, vitamines et sels
minéraux) de l'alimentation provient d'activités
saisonnières de prédation. Des activités de pêche,
de cueillette, de collecte... se superposent dans l'espace et dans le temps
pour compléter les activités agricoles.
La cueillette, la pêche, la collecte, la
médecine, sont omniprésentes dans le calendrier de la femme
ntumu, mais chaque ressource est prélevée selon le calendrier
saisonnier spécifique. En effet, les essences forestières
fructifient à différentes périodes. Par exemple le
manguier sauvage, andok (irvingia gabonensis, irvingiaceae) produit
des fruits pendant la petite saison sèche. Les techniques et les
espèces prélevées varient au fil des saisons et des
sites.Ainsi, la pêche au barrage ou au poison ne se pratique que pendant
une période d'étiage la plus prononcée au cours des
saisons sèches. Dans chaque cas, les activités
s'interpénètrent au sein des différents espaces du terroir
villageois et, de ce fait optimisent bon nombre de déplacements. La
pêche, le piégeage, et la cueillette sont des activités
quotidiennes auxquelles chacune s'ordonne tout au long de l'année en
fonction des opportunités saisonnières. De nombreuses techniques
entrent à la fois dans les sphères de la prédation et de
l'agriculture. Ainsi, les piéges barrières servent à la
capture du petit gibier.
Section 4 : La vannerie
La femme ntumu a le monopole de la fabrication des produits de
la vannerie qui étaient utilisés pour les travaux
champêtres, récoltes, voyage... Ces objets sont aussi
utilisés lors des grandes cérémonies d'initiation.
Section 6 : La médecine
La forêt du Woleu-Ntem est riche en biodiversité
végétale compte tenu de la diversité d'habitats existant
dans cette province. Les femmes ntumu extraient à partir de nombreuses
plantes, une gamme de produits nécessaires pour leurs survie :
médicaments, aliments bois divers. Mais la forêt ntumu qui
renferment un grand nombre d'espèces fruitières constitue de
véritables vergers naturels composés d'arbres à usages
multiples. Chaque espèce a son utilité spécifique. Les
plantes contribuent bien aux soins de santé primaires dans un pays
où les problèmes réels de santé se posent avec
acuité.
Les femmes ntumu en plus de l'activité agricole, qui
est l'activité dominante, pratiquent la médecine traditionnelle
en utilisant les éléments de la faune et de la flore, et
même le minéral. En effet pour la femme ntumu , soigner, prendre
soin de, apparaît alors comme le premier art celui qui
précède tous les autres arts et qui a permis à chaque
société à la lumière d'une lecture symbolique de
l'univers et de la nature d'instaurer au fil du temps, en vue d'assurer la
survie du groupe et de l'espèce, des savoirs, des savoirs être,
des savoirs faire,des façons de dire et des façons de voir qui
sont à l'origine des habitudes de vie de chaque groupement humain c'est
dans ce sens que Marie Françoise Collière souligne que
« les soins se situent au carrefour de ce qui fait vivre ce qui
permet de vivre et de ce qui fait obstacle à la vie... de ce qui
l'entrave et la menace ; à la charnière de la vie et de la
mort, affermissant l'une, faisant reculer l'autre, cheminant avec l'une
jusqu'à s'éteindre avec l'autre ».*
D'innombrables plantes médicinales, bien connues de
nos ancêtres pour leur leurs vertus qui font courir les occidentaux dans
les tropicales, sont utilisées pour soigner des maladies variées.
Le savoir médicinal de la femme ntumu se transmettait à des
personnes prédisposées. La transmission se faisait par filiation,
par voie initiatique, par habitude ou par délégation. Au
départ, les plantes médicinales étaient utilisées
pour aider uniquement les membres de la famille, du clan, ou du village,
à faire à certaines affections. Les différents organes
étaient prélevés sur les arbres de façon
rationnelle. La connaissance des plantes nécessite un certain nombre de
données. L'écologie de la plante, la ou les maladies
soignées,les parties utilisées
(racines,tiges,feuilles,fruits,graines,sève,ou latex etc.) ; les
procédés d'extraction : décoction, macération,
infusion, broyage, pilage, bain de vapeur, centre, etc. les voies
d'assimilation : voie orale, lavement, inhalation, massage, friction au
corps, scarification,etc. Dans les pratiques traditionnelles de la femme ntumu
la détentrice du savoir ne prélevait que ce qui était
nécessaire pour constituer son breuvage ; une écorce pouvait
suffire comme ingrédient. Toutes les précautions étaient
prises pour que l'arbre ne subisse aucun dommage : on prenait soin, par
exemple, de mettre un peu de terre pour aider l'écorce à se
régénérer.
La transmission du savoir en matière de
médecine se faisait toujours en étroite harmonie avec
l'environnement, aucun organe du végétal ne pouvait être
prélevé sans rituel préalable. Cette façon de faire
contribuait à la gestion de l'écosystème, car dans un
village, il n'y avait pas mille et une tradipraticienne ; on comptait sur les
doigts de la main. La femme ntumu peut aussi, après avoir jugé
des aptitudes de ses enfants, choisir celui qui est apte à recevoir les
recettes pour soigner certaines affections ; les recettes se transmettent
aussi de bouche à oreille : si une personne a des problèmes
une tierce peut lui apprendre une vraie recette de grand-mère qui
souvent arrive à remédier au mal, surtout pour les maladies
courantes comme le rhume, la toux, le mal de tête etc.
Tableau - Connaissances écologiques de
la femme ntumu
Nom de la maladie
|
Nom fang
|
Nom scientifique
|
Partie utilisée
|
Préparation
|
Administration
|
Douleurs menstruelles
|
Atom
|
Dacryodes macrophylla
|
écorce
|
bouillie
|
Boire
|
Les problèmes rhinites
|
Eteng
|
Pycnanthus angolensis
|
écorce
|
décoction
|
Boire
|
Infection pulmonaire du nouveau-né
|
Eteng
|
Pycnanthus angolensis
|
écorce
|
décoction
|
Boire
|
Infections
|
Ebeng
|
Cordia plathithyrsa
|
écorce
|
décoction
|
Boire
|
Maux de dents, autres infections de la bouche
|
Okwa
|
Lophira alata
|
écorce
|
décoction
|
Boire
|
Douleurs mentruelles
|
Tom
|
Pachypodanthium barteri
|
Ecorce + pierre taillée
|
Décoction
|
Boire
|
dysenterie
|
Akom
|
Terminalia superba
|
écorce
|
décoction
|
Boire
|
Traitement des vers
|
Dum
|
Ceiba pentandra
|
feuilles
|
décoction
|
Boire
|
cicatrisan
|
Eteng
|
Pycnanthus angolensis
|
sève
|
|
pose
|
Source : Construction personnelle
La culture de la femme ntumu est diversifiée. En
forêt, l'environnement naturel est riche en ressources. Les
possibilités d'exploitation du milieu sont multiples et variables au
gré des contraintes inhérentes au milieu naturel et des objectifs
de chaque femme.
En effet, l'histoire des civilisations nous enseigne qu'un
des premiers besoins ressentis par nos ancêtres était la
nécessité d'assurer leur survie, le but de la vie étant ,
de se prolonger, de se reproduire, et de reculer l'échéance de la
mort c'est-à-dire qu'il existait déjà des soins avant
toute maladie. Ceux-ci étaient mélés à l'expression
même de la vie avec laquelle les femmes ntumu se confondaient, car il
fallait prendre soin de la vie, de l'enfantement à la mort, en
participant au mystère de la vie qui se cherche.
Ces objectifs sont à l'origine des besoins de survie
à satisfaire, ces besoins de survie à satisfaire, ces besoins
donnant eux-mêmes naissance à des formes d'organisation en
réponse aux besoins de santé qui se sont progressivement
développés avec la lutte contre les maladies.
Mais pour satisfaire ses besoins vitaux, la femme ntumu a
commencé par s'interroger et interroger la nature en lien avec l'univers
dans lequel il était inséré et, par tâtonnement,
essais et erreurs, cette intérrogation lui a permis de déccouvrir
ce qui est bon pour entretenir la vie et ce qui peut lui être nuisible.
C'est la prise de conscience du bien et du mal, à partir de laquelle se
sont élaborés les habitudes de vie et les croyances qui sont
devenues plus tard les coutumes, les traditions, les lois etc.
Tout s'est donc organisé à partir d'une lecture
symbolique de l'univers en cherchant à comprendre les forces poteuses de
mort donc de maladie. Cette necessaire relation
« femme-nature » a amené chaque femme ntumu à
doter chaque facette de l'univers d'attributs qui sont porteurs de
significations symboliques, participant à la désignation du
sacré, c'est-à-dire ce qui donne un sens au monde et impose
à la nature et aux relations humaines une transformation par rapport
à son sens originel dans les représentations sociales et les
mythes qui restent intimement liés à l'écosystème
de chaque groupe ntumu.
Chapitre4. La forêt source de
connaissance
Section 1. Le contexte culturel des
activités
1.1.
De nombreux aspects assurent de multiples fonctions qui
concourent au maintient de l'équilibre social. Ils perpétuent les
valeurs culturels du groupe et transmettent des enseignements portants non
seulement sur la langue, la morale sociale en vigueur, les pratiques sociales,
les coutumes, les croyances mais aussi sur le milieu naturel dans lequel
évoluent les individus. Les connaissances très fines des femmes
ntumu ne se limitent pas aux relations entre processus écologiques et
production agricole.
Nées et accumulées par la tradition et
l'expérience quotidienne, ces connaissances empiriques sont
spécifiques à la forêt, elles sont souvent relatives aux
caractéristiques des espèces et aux relations qu'elles
entretiennent avec le milieu biotique et physique. La société
ntumu dépendant pour sa survie de la chasse de la pêche de la
cueillette et la médecine était régie par le respect d'un
ensemble de règles coutumières. L'écrit n'étant pas
un support de communication pour les femmes ntumu, un ensemble d'us et coutumes
acquis par les anciennes était admis, pratiqué et transmis aux
jeunes filles. Depuis des millénaires la femme ntumu puise dans les
ressources de sa forêt pour satisfaire le premier de ses besoins :
se nourrir. Les habitudes alimentaires sont les mêmes dans tout le
Woleu-Ntem, les femmes ntumu exploitent quotidiennement la diversité des
espèces. Elle ne cherche pas transformer profondément et
définitivement la forêt, elle préfère la modifier en
douceur, par touches successives, tout en lui conservant ses
caractéristiques essentielles de biomasse, de diversité
génétique, de structure verticale et horizontale.
Même quand on abat et brûle des arbres, elle ne
fait qu'un accroc dont elle sait qu'il se cicatrisera. Il ne substitue pas son
ordre à celui des choses naturelles, sa fille fera de même, et sa
petite fille après elle. Ainsi de génération en
génération, s'édifie un système de production qui
imite autant que possible la forêt. C'est fort de ces
considérations que les femmes ntumu ont agi en exploitant
rationnellement leur forêt. La recherche du bois de chauffage par exemple
se limitait essentiellement au bois mort ; la collecte de fruits se
limitait au ramassage ; l'exploitation des plantes médicinales se
limitait à la récolte des écorces, des racines, de
feuilles. Les arbres étaient recouverts de terre sur les parties
blessées après extraction des écorces ; pour les
cultures sur brûlis, pendant les opérations de
défrichement, de nombreux arbres fruitiers ne sont pas abattus, ils sont
plutôt préservés.
1.2. L'influence des méthodes modernes sur les
pratiques traditionnelles
Le passage d'une société traditionnelle
à une société moderne qui se traduit par l'acceptation de
nouvelles règles qui obéissent aux lois de l'économie de
marché et non plus à celles de l'économie de subsistance.
Pour répondre à l'appât du gain, les activités
traditionnelles deviennent des activités commerciales. Pour ces raisons,
les femmes ntumu considèrent que les activités de subsistance
sont en voie de disparition dans le Woleu-Ntem. D'après notre
étude, la chute du cours de cacao aurait poussé la
majorité des femmes ntumu à se reporter à l'exploitation
de la forêt comme première source de revenu.
Les connaissances et les compétences
développées par les populations traditionnelles au cours des
milliers d'années d'adaptation et de manipulation de leur terre, de leur
flore et de leur faune, constituent une ressource inestimable. C'est un fait.
Mais aujourd'hui, il y a un problème. Les campagnes se meurent, et avec
elles, les savants illettrés pendant qu'on dilapide le trésor
naturel. Les faits sont là : le fossé entre la ville et la
campagne se creuse davantage ; mais le monde ne se trompe pas. Pour sauter
haut, il faut d'abord mieux s'enraciner. C'est pourquoi, nous reconnaissons
tous aujourd'hui que la connaissance des stratégies et des pratiques
locales d'utilisation des ressources naturelles peut contribuer à
l'élaboration des politiques de conservation ainsi qu'au
développement de nos pays.
Section 2. La symbolique
2.1. Relation de la femme à son
milieu
Si la relation avec la forêt nous apprend à
connaître l'environnement et définit les rapports de la femme avec
son milieu naturel, elle apparaît aussi comme un outil de gestion de
l'environnement. Nombreux récits parlent du respect de la femme
à la forêt .C'est le cas du mythe fang de l'evus (maux,
sorcellerie). On serait tenté de comprendre ici que cette abondance est
une conséquence du respect de l'interdit qui vise la préservation
de la forêt de toutes actions socioculturelles de la femme ntumu.
Certains contes conduisent les femmes qui pratiquent par exemple à
certaines périodes de l'année (saison sèche) et qui
assurent à travers leurs différentes activités des
fonctions nourricières, à préserver les ressources du
milieu naturel pour le bien être de leurs progénitures et de
toutes la société. Le respect des règles de gestion des
écosystèmes apparaît également dans l'histoire de la
forestière qui extermine la forêt à préserver la
faune.
2.2. Le respect des interdits
Dans le domaine des interdits qui touche la femme ntumu, les
clans que les groupes ethniques. La littérature orale qui est le mode
transmission de la connaissance chez les femmes ntumu explique et justifie
l'origine de l'interdit au moyen d'un récit. Cette méthode
consiste à faire comprendre l'interdit afin d'amener les femmes à
y adhérer et à y conformer aux respects des interdits. Cela
fonde des rapports de solidarité qui entraîne un lien affectif qui
garantit de fait le respect des interdits de la forêt.
Il existe également toute une symbolique à
travers les outils que la femme utilise en forêt. La hache, symbole de la
force et du pouvoir judiciaire. La symbolique rituelle de la hache est
associée à la force d'action et du savoir pour trancher un
conflit. Lors du mariage, le mari doit offrir au lignage de sa femme une hache,
par laquelle il s'assure de la fécondité de son foyer. Pour punir
son mari, une femme qui se sent négligée, se dénude devant
sa hache pour la maudire. D'après la conviction populaire, le mari se
blessera au travail avec cette hache envoûtée. Avant de couper
l'arbre à sorciers, la hache doit passer par une préparation
spéciale chez le chef du village.
La houe, outil principal du travail agricole, symbolise la
femme. La houe est considérée comme un neuve représente
une femme en pleine force, une houe très usée est appelée
« grand-mère ». Dans le rituel de transmission de
l'outil de labourage, c'est avant tout la grand-mère qui donne la houe
à sa petite-fille, lui donnant en même temps le courage et
l'efficacité du travail. La mère également peut assurer ce
rituel de transmission de l'outil à sa fille, lui donnant la chance et
la force dans le travail agricole. Lors du mariage, le lignage maternel offre
une houe à la mariée avec tous les voeux pour un bon rendement
dans les travaux de champs.
Une série de rites sert à bénir la
houe : laver la houe, y frotter les ingrédients d'une statue, y
appliquer de la terre du cimetière, de la cendre du foyer ou y cracher.
Certaines cultivatrices déposent la houe pour une nuit chez le chef du
village, chez un chargé de culte, sur le fumier ou sous le lit. Elles y
versent du vin de palme, font toucher la joue par les jumeaux ou par le
benjamin de la famille considéré comme quelqu'un qui
possède la chance. Tous ces gestes servent à rendre la houe
efficace pour le labourage.
Augmenter le rendement du champ à d'une houe
usée. Enterrer une houe usée (qui a déjà servi
à des récoltes abondantes) dans son champ permettrait d'augmenter
le rendement du champ. Il est interdit de toucher la houe d'une cultivatrice ou
de la jeter par terre. Une femme qui désire accoucher d'une fille, met
sous le lit conjugal une houe, symbole de la femme. Une houe
envoûtée par une rivale jalouse doit être purifiée
avant l'usage, sinon son travail ne donnerait aucun résultat valable.
On connaît une épreuve de vérité,
au cours de laquelle la femme accusée doit enjamber une houe pour
prouver son innocence. A la mort d'une femme, la cadette pleure son
aînée en portant une houe et en montrant comment elle labourait de
son vivant. Pour empêcher la décomposition du corps d'une femme
morte, on place parfois sur son ventre une houe, l'outil qui déracine
les mauvaises herbes. Avant l'enterrement d'une grand-mère, sa
petite-fille peut s'asseoir sur son cercueil en demandant la houe et la chance
de cette cultivatrice célèbre.
La corbeille, symbole de la femme. La symbolique de la
corbeille s'associe à l'idée d'une femme féconde. Lors du
mariage, la belle-mère offre à son beau-fils une corbeille de
pâte de manioc en disant « Ma fille ressemble à cette
corbeille ». Les corbeilles utilisées pour pêcher sont
parfois fustigées avec un fouet d'herbes vertes, afin d'en expulser la
malchance. On les fait toucher par des jumeaux ou par le de la famille, pour
leur donner la chance d'une pêche heureuse. Il en est de même pour
les corbeilles de cueillette.
Section 3. La fabrication de la femme chez les
Ntumu
3.1. La transmission du pouvoir
La femme ntumu est détentrice d'un savoir qu'elle
transmet de génération en génération. La
transmission du savoir en matière des activités se faisait
toujours en étroite harmonie avec la forêt. Les jeunes filles sont
initiées à la forêt dès le bas âge (6 à
10 ans). Les femmes ntumu sont pilliers de la société ntumu,
elles sont responsables des activités agricoles, de la collecte des
fruits sauvages et de certaines techniques de pêche sans pour autant
négliger leur rôle de mère. La forêt obéissant
à une répartition, des regroupements claniques subdivisés
en lignage possèdent à l'intérieur de chaque village un
territoire agricole sur lequel ils étendent leurs droits.Les limites
lignagées ou entre deux villages se reconnaissant par des repères
souvent naturels que chaque paysan accepte. Les jeunes filles ont le droit de
maîtriser ces espaces. Ces enseignements donnés aux jeunes filles
assurent de multiples fonctions qui concourent au maintien de
l'équilibre social.
Les femmes ntumu perpétuent les valeurs culturelles du
groupe et transmettent des enseignements portant non seulement sur la langue,la
morale sociale en vigueur, les pratiques sociales, les coutumes,les croyances
mais aussi le milieu naturel dans lequel évoluent ces jeunes filles.
Elles sont assujetties aux exercices (chants, contes, proverbes). Par la
littérature orale l'enfant apprend à connaître
l'environnement et définit les rapports de la femme ntumu avec son
milieu naturel, elle apparaît également comme un outil de gestion
de l'environnement. La forêt est présentée pour la jeune
fille comme lieu d'abondance. Cette abondance entraîne le respect des
interdits qui vise la préservation de toutes actions socioculturelles de
la femme ntumu. Cette méthode consiste à faire comprendre
l'origine des interdits afin d'amener les individus à y adhérer
et à s'y conformer.
3.2. Le pouvoir de la parole
La littérature orale sert ainsi d'arguments en fondant
le respect des interdits. Il y a un lien affectif qui garantit de fait le
respect de l'interdit portant sur la forêt. Toutes les voies de
transmission de savoir sur les activités de la femme ntumu exigent une
certaine forme de filiation. En effet, comme pour tous autres savoirs, il faut
être « l'enfant » ou pour prétendre recevoir
un quelconque savoir ; tout simplement parce que les anciennes ne
peuvent pas léguer leur savoir au commun des mortels qui ne fait pas
partie de la famille. Les jeunes filles, à force de vivre autour des
femmes ntumu, et de voir utiliser telle plante pour telle affection, finissent
par s'y référer dès qu'elles se trouvent dans une
situation similaire, et le geste, facile à accomplir, suit ;
Troisième partie:
L'évolution du rapport féminin à
la forêt
Chapitre 5. Les activités transformées et
les activités abandonnées
Les sociétés, les cultures et les langues se
sont influencées au cours d'une histoire longue et compliquée
dont on connaît relativement peu de choses. Les cultures en rapport
étroit avec les valeurs sociales, ont évolué tout comme
les sociétés, sous l'influence d'un dynamisme interne qui
modèle sans cesse les rapports du passé, en les transformant, en
les adaptant et en les complétant. Les valeurs quant à elles sont
les résultantes complexes et évoluées de l'histoire et du
milieu écologique, économique, social et psychologique.
Section 1. Les causes du changement
Il n'est plus à rappeler que chaque jour toute
société humaine connaît des évolutions tant sur le
plan social, économique, technologie, etc. Que ce soit d'une
manière lente, brusque ou imperceptible.
Avec la colonisation, cet instrument important pour le
processus vers la modernité, beaucoup de choses vont changer. Le
capitalisme apporte la scolarisation et le travail salarié qui va
permettre une certaine autonomie à la femme. Aujourd'hui, on parle
d'émancipation de la femme, chose toujours mal perçue par les
hommes. En effet, une femme peut se retrouver Ministre, chef de service, etc.
En fait, les femmes occupent maintenant des postes de responsabilité.
La mise en valeur du système colonial, au delà
de l'introduction de la monnaie scripturale et fiduciaire a
énormément influencé l'organisation des activités
forestières. Avec la modernité de nos sociétés, la
société traditionnelle est intégrée dans une forme
d'échange. Les produits consacrés à la consommation
directe sont désormais l'objet d'un échange monétaire qui
vise le profit et sont vendus sur le marché de l'offre et de la demande.
L'introduction de la monnaie a permis d'étendre le marché et
d'amplifier la consommation. On part donc de la consommation domestique
à la consommation de masse. Une telle mutation nécessite de
nouveaux modes de consommation et de production.
Les modifications qui s'exercent dans la
société ntumu à un rythme croissant depuis plus d'un
siècle (notamment avec l'introduction du cacao et du café), ont
bouleversé les rapports entre les populations et leur milieu,
ralentissant sur les sociétés et leurs cultures. Sous l'influence
des circonstances, des groupes vivants de la cueillette, ont pu devenir
cultivateurs ou pasteurs. D'autres éleveurs de gros bétail, ont
pu adopter des activités agricoles ou se livrer à la cueillette.
Il n'y a pas d'immobilisme, mais bien une suite ininterrompue de changements en
fonction des circonstances historiques notamment et de l'évolution du
milieu biologique. Mais dans le passé, ces changements étaient
lents, on assiste à l'heure actuelle à des bouleversements
brutaux, nous amenant à considérer dans l'analyse des rapports
écosystèmes/cultures, non seulement le facteur temps mais encore
la vitesse et l'intensité de ces changements.
Face à l'occidentalisation, leur système social
subit actuellement des changements importants, qui se répercutent sur
leurs rapports à la nature. Ainsi, pêche et chasse sont parfois
pratiquées pour la vente à Maripasoula, où les Aluku, ne
chassant plus guère eux-mêmes, sont très demandeurs de tels
produits. De même la pêche à la nivrée -- une
technique traditionnelle et collective utilisant des poisons
végétaux qui asphyxient les poissons et facilitent leur prise
à l'épuisette ou à la flèche-harpon -- est souvent
pratiquée à des fins commerciales, provoquant un grand
gâchis : elle n'engage souvent que deux ou trois adultes, seules les
grosses prises étant ramassées. Couplés à la
sédentarisation des villages, ces changements provoquent une
surexploitation du milieu naturel, dont les effets commencent à se faire
sentir. Ainsi Amérindiens et Aluku estiment qu'il faut aller plus loin
pour chasser, que la pêche est moins fructueuse, et que les terres
fertiles pour pratiquer l'agriculture sont moins accessibles [
6].
Il faut donc de plus en plus d'essence pour alimenter les pirogues à
moteur afin de pratiquer ces activités, qui sont à la base de
l'économie domestique des Amérindiens. Ceux-ci dépendent
alors de manière croissante de ressources monétaires.
Cependant, malgré ces problèmes d'accès
aux ressources, les habitants du futur Parc ne ressentent absolument pas la
nécessité d'une protection environnementale : « La
forêt est immense, et il suffit d'aller un peu plus loin pour la
retrouver intacte. » La plupart des habitants ont donc beaucoup de mal
à comprendre les enjeux écologiques du Parc national. Si certains
en espèrent des retombées positives, particulièrement en
termes de créations d'emplois -- une soixantaine de postes sont attendus
--, beaucoup craignent que les réglementations n'entravent leur libre
circulation et leur accès aux ressources : chasse, pêche, abattis
-- ces parcelles de forêt abattues, brûlées,
cultivées puis mises en jachère -- mais aussi orpaillage, selon
les locuteurs. La perception par les habitants de la création d'un Parc
est donc ambivalente et empreinte de scepticisme.
Quant aux collectivités locales, elles la
perçoivent comme une réappropriation du territoire par
l'État, une sorte de retour au statut du territoire de l'Inini, en
vigueur de 1930 à 1969, qui plaçait l'intérieur, donc la
majorité du territoire de la Guyane, sous l'autorité directe du
gouverneur, au nom du développement économique. Elles ont
exigé la rétrocession des terres de l'État vers les
collectivités comme préalable à la mise en place du Parc ;
de plus, elles souhaitent un parc multipolaire qui serait réparti sur
l'ensemble du territoire. L'actuel projet est donc loin de faire
l'unanimité en Guyane, et a été refusé en octobre
2005 par le Congrès des élus régionaux et
départementaux.
Section 2. L'observation
2.1. La nouvelle division du travail
Les bouleversements sociaux que la colonisation va
entraîner auront un impact important sur la division du travail. Ici, la
spécialisation du travail se retrouve un tout petit peu
altérée. Les femmes peuvent désormais faire des centaines
d'activités qui, autrefois étaient réservées
uniquement aux hommes. Certaines femmes sont d'ailleurs en mesure d'employer
d'autres femmes et /ou hommes dans des tâches
rémunérées. Désormais, les hommes peuvent
planter.
Sur le plan agricole, l'on peut passé d'une
agriculture de traite à celle de plantation en passant par l'agriculture
paysanne. Dans l'agriculture de trait, on vend (le cultivateur) ses produits
contre ceux des industries. Ici on retrouve des cultivateurs et cultivatrices.
Dans l'agriculture paysanne on vend une partie des produits agricoles sur le
marché. A cet effet, nous avons le cas du café, du cacao, etc.
Dans ce cas, on parle de complémentarité des tâches entre
les hommes et les femmes et non de spécialisation des tâches selon
une division sexuée.
Sur le plan artisanal, nous remarquons la disparition de la
vannerie, la poterie et du travail des produits occidentaux. L'exemple du
raphia est très parlant à cet effet. Il est remplacé en
effet par les vêtements venus d'occident. De même les vases en
argile ont disparu pour faire place aux marmites en aluminium ou aux
cocottes.
Ici, la dynamique est synonyme de mouvement, de changement ou
d'évolution, mais conçue comme un processus naturel. Il s'agit
alors d'une évolution suivant un sens déterminé :
c'est un progrès dont toutes les sociétés parcourent
successivement les étapes. Le changement social est pensé comme
un processus d'adaptation continu aux diverses contraintes technologiques ou
comme un processus d'innovation contenue. Le changement est aussi un
mécanisme sa cohésion morale et son unité profonde
Il est utile de dire en définitive que les
sociétés traditionnelles ont connu beaucoup de mutation au cours
de ces dernières années avec l'intervention de la monnaie. Ces
sociétés qui avaient une économie de subsistance,
connaissent aujourd'hui les échanges monétaires. La division du
travail par genre n'existe pratiquement plus car on est dans la
complémentarité des tâches. On assiste non pas à une
spécialisation des tâches mais plutôt à une
contribution mutuelle des deux sexes dans toutes les activités.
Chapitre 6. Contexte économique
Section1. Les constats
Dans la province du Woleu-Ntem, la femme ntumu contrôle
presque exclusivement l'economie agricole. Cette situation apparaît
nettement par l'éminence de son rôle dans les activités de
la forêt. La femme ntumu est toujours attachée à la
forêt, toute leur vie tourne autour de ce milieu.
Section2. Les raisons
2.1. Endogène
Pour des raisons d'ordre économiques, les femmes
ntumu, dans leurs activités se préoccuppent de trois moments lors
de la récolte de leurs produits (arachide, concombre, chocolat) à
savoir la consommation, les échanges, la reserve.
D'abord, les femmes ntumu font leurs activités pour
les besoins de consommation, elles doivent nourrire leur progéniture. La
première préoccupation de la femme ntumu c'est d'avoir un grenier
qui permet de subvenir au besoin de la famille des enfants et des parents
éloignés.
Ensuite, ses activités ayant un calendrier cyclique
font l'objet d'une resrve aux prochaines semailles pour l'année
suivante. Ce qui permettra de reproduire à nouveau et de respecter
l'adage qui dit « on ne sait jamais ». Il faut envisager
tous les contours sachant que l'année suivante peut ne pas être
fructueuse, dans ce cas, la reserve pourra compenser ce déficit. Enfin
la femme ntumu n'exclue pas le grenier pour l'entraide, l'échange, qui
permettrait de troquer entre alliées. Le produit échangé
permettait aux femmes de varier les produits de leurs repas.
2.2 Exogènes
Le passage d'une société traditionnelle
à une société moderne se traduit par l'acceptation des
nouvelles règles qu'obéissent les lois de l'économie de
marché et non plus à celles de l'économie de subsistance.
Pour répondre à l'appât du gain, des activités de la
femme ntumu deviennent des activités commerciales. Pour ces raisons, on
remarque que les activités de subsistance sont en voie de disparition.
D'après notre étude, la chute du cours de cacao aurait
poussé la femme ntumu à se reporter sur l'agriculture comme
première source de revenus. Parmi les femmes interrogées,
l'agriculture demeure l'activité principale. Elles ajoutent que la
majorité des femmes vendent des produits provenant de leurs
activités. Ce phénomène est probalement plus grand dans
les zones rurales qui ravitaillent la ville. D'autres considèrent que
c'est la demande croissante émanant d'une urbanisation galopante qui a
entrainé le développement des activités commerciales.
Avec la disparition progessive de l'apprentissage et de
l'initiation des enfants, les activités ne sont le privilège des
femmes ntumu. Elles sont ouvertes à quiconque pouvant les exercer peu
importe ses qualifications dans le domaine et son rapport aux valeurs de
gestion durable. Ces nouveaux adhérants (hommes) participent à
l'introduction de nouvelles techniques (outils, méthodes etc) qui sont
une complémentarité aux techniques utilisées par les
activités de subsistance.
Droit foncier coutumier
Chez les essarteurs traditionnels, le droit foncier coutumier
porte à la fois sur les terres de culture (y compris les
jachères) et sur le terroir forestier. Partout, les vastes
forêts de chaque unité clanique ou lignagère forment un
tout aux limites définies par des cours d'eau ou des montagnes. En
général, le droit sur la terre n'est qu'un droit
d'usufruit tandis que l'attachement à la terre est de type
symbolique, une priorité étant donnée aux descendants du
premier défricheur. La terre appartient au lignage, et tous les membres
de celui-ci ont les mêmes droit à l'utiliser et à la
défricher, mais nul n'a le droit de la céder hors du lignage :
qu'il s'agisse de la terre de culture ou des terres de parcours forestier, la
terre est un bien collectif inaliénable et le droit
d'exploitation est imprescriptible. Les lignages exercent un droit de
propriété sur le territoire forestier de leur village. Les
limites en sont clairement définies mais généralement
maintenues par un simple respect mutuel.
A l'intérieur du lignage, c'est par la concertation,
surveillée par le chef du village ou du hameau, que les parcelles sont
allouées. Toutefois, dès qu'une parcelle est
défrichée, le défricheur et ses descendants conservent une
prééminence sur ce qui deviendra jachère, pour la
défricher à nouveau une dizaine d'années après. On
hérite des jachères de son père. Toutefois, quelques
ethnies transmettent les jachères de mère en fille ou à
défaut en belle-fille, donc de femme à femme. C'est le cas des
Fang et des Ntumu (Cameroun, Gabon).
Fréquemment, une personne possède aussi des
droits d'installation sur le terroir du lignage de sa mère, permettant
ainsi un certain choix de mobilité. Partout, le village et ses terres
(de culture et de chasse) s'inscrivent dans la terre des ancêtres : par
delà les attaches économiques, existent les liens spirituels et
affectifs. Cette territorialisation des terres concerne non seulement les
usages agricoles, mais également les activités de
prélèvement, chasse, pêche, collecte et matériaux.
La pratique de la chasse, ou la simple poursuite d'un gibier,
sur l'aire forestière d'une autre communauté entraîne
fréquemment des contestations. Chez la chasse et tous les
problèmes qui y touchent occasionnent de fréquentes palabres
entre les personnes qui possèdent des terres en commun. En cas de
conflit, le propriétaire coutumier porte la dispute devant les
autorités traditionnelles, tandis que le nouvel occupant remet
plutôt la chose entre les mains de l'administration. Cependant, peu de
litiges sont relevés entre anciens et nouveaux propriétaires car
les territoires de chasse sont très vastes, ce qui permet
d'éviter de chasser à proximité les uns des autres
La plupart des problèmes de propriété ne
peuvent se résoudre que par référence aux
généalogies et à la hiérarchie des droits
(priorité des naissances). Lorsque les rapports
généalogiques exacts entre deux groupes sont oubliés ou
contestés, la seule solution est de se rendre autonome l'un par rapport
à l'autre, en partageant les biens. Lorsqu'une unité clanique
déménage à plusieurs reprises, elle restera
néanmoins co-propriétaire des terres de son clan (tant que le
souvenir persiste).
Actuellement, la dynamique des droits fonciers est
influencée par la mobilité de certains groupes et l'insertion
dans l'économie de marché avec, notamment, le payement de
redevances locatives. La terre n'est plus seulement un moyen de subsistance
mais aussi un moyen de rapport financier. Néanmoins, ceci ne porte que
sur l'usufruit et non sur la terre en tant que telle.
Dynamique des rapports à la terre et à
la forêt
Les cultures de rente
Ce régime s'est modifié à la suite de
la moindre mobilité des familles, de l'augmentation démographique
et surtout de l'adoption des cultures de rente c'est-à-dire
d'une utilisation permanente des terres, sans jachère et sans
itinérance, qui fixe les hommes pendant plusieurs
générations. Celles-ci ont
entraîné le renforcement du sens de la propriété, et
orienté le droit foncier, en passant d'un droit né du travail
à un droit sur le sol. Dans ces régions où les ethnies et
les clans se mélangent de façon inextricable, le problème
de l'accès aux terres pour les étrangers est très
fréquent. Ces derniers sont tenus de demander une terre au chef de
famille auprès duquel ils s'installent.
Celui-ci les autorise à défricher une parcelle
pour les cultures vivrières (exploitation de courte durée, sans
droit sur les jachères) mais il leur est interdit de planter
caféiers ou cacaoyers. En dehors des personnes originaires d'un village
particulier ayant le droit de cultiver les terres du lignage (sauf
autorisation), on engage les autres paysans à exploiter le terroir de
leur village d'origine. Ceci explique
l'éloignement de certaines plantations et la création de
campements de plantation isolés. Le regroupement et l'immobilisation des
villages rend le régime foncier hétérogène, la
tendance étant à l'individualisation et à l'apparition de
terres d'appartenance familiale à l'intérieur de l'espace
collectif clanique.
Conclusion
Au terme de notre recherche, la construction de notre objet
nous a permis d'identifier clairement les différentes composantes du
lien de la femme ntumu à la forêt. Notre objet d'étude
cherche à poser plus précisément les bases
théoriques d'une réflexion visant à comprendre les
rapports de la femme ntumu à la forêt (agriculture, la
pêche, la médecine, la cueillette, le ramassage). C'est en
réalité l'objectif que nous poursuivons pour passer de
l'ethnographie à l'ethnologie pour aboutir à l'anthropologie.
L'anthropologie ayant pour ambition de comprendre l'unité de l'Homme
à travers la diversité des moyens qu'il se donne pour objectiver
un monde dont il n'est pas dissociable. Pour nous l'articulation principale est
celle qui gère les rapports dialectiques entre l'Homme et la nature.
La problématique que nous avons
développée dans ce mémoire s'est focalisée
principalement autour de la question des rapports de la femme ntumu à la
forêt. La gestion mesurée dont font les femmes dans la
société traditionnelle ne fait nullement pas mention de
l'existence d'une certaine cohabitation de plusieurs types d'attitudes dans un
même espace pour en savoir un peu plus sur les comportements qu'elles
afficheraient vis- à- vis de la nature, particulièrement de la
forêt. Face à la richesse des travaux des différents
auteurs, nous avons identifié une série de questions qui nous ont
permis de circonscrire les aspects majeurs de notre travail à savoir,
pourquoi la femme ntumu maintient toujours les rapports avec la forêt
quand nous savons qu'aujourd'hui, les phénomènes externes comme
le capitalisme, l'exode rural, les nouvelles technologies, les marchés
ont pris une grande place dans nos sociétés ? Comment
entretient-elle ses rapports avec la forêt, comment gère- t- elle
la forêt de nos jours ?
La forêt est un « Internet »
traditionnel où les femmes vont apprendre à échanger leurs
savoir-faire. Chaque forêt correspond à un site où les
femmes peuvent exploiter d'autres connaissances, une école
d'apprentissage de mère à fille. La femme, contrairement à
l'homme passe plus de temps dans la forêt. La forêt comme matrice
de la vie des femmes ntumu, renvoie à l'idée que toute la vie des
femmes, toutes les activités voire même toute leur existence n'a
de sens que rattaché à ce milieu. La forêt a un fondement
mystico spirituel qui lui confère le monopole de la culture
vivrière.
Tous les milieux forestiers sont touchés par les
mutations de notre ère. Cependant, bien que la « modernisation
est une matrice qui fermente le processus de transgression sociale »
les changements des modes de vie de nos sociétés
n'empêchent pourtant pas à la femme ntumu de respecter la
forêt. Ses prélèvements ne sont pas abusifs, ils sont
proportionnels à ses besoins. Cette procédure d'exploitation qui
associe la conservation est une stratégie de bon sens.
Nous rendons compte ici des théories des auteurs
consultés, qui nous ont permis de juger la pertinence de nos travaux qui
ont été confirmés par Claude Meillassoux (2003)
Femmes, greniers et capitaux ; « fait avec
promptitude une analyse en profondeur de la production et de la reproduction
dans les sociétés agricoles d'autosubsistance ». Pierre
Philippe Rey (1971) Colonialisme, néocolonialisme et transaction du
capitalisme, montre le rapport de la femme au sol, le dynamisme qui
s'opère, il montre les facteurs qui ont lancé un processus dans
les rapports à l'environnement. Paul Claval (2003) Géographie
culturelle :une nouvelle approche des sociétés et des
milieux, analyse la construction de la société et du territoire
et pense que la culture fournit aux hommes les moyens de s'orienter , de
découper l'espace et d'exploiter les milieux. Il montre que les cultures
fournies aux hommes les moyens de s'orienter, de découper l'espace et
d'exploiter les milieux. Il montre que les cultures subissent dans leur
apparente stabilité des profondes crises de restructuration.
Nous ne saurions prétendre affirmer que, ce que nous
appliquons chez les femmes ntumu soit généralisable à
toutes les sociétés traditionnelles, la femme occupe sur le plan
social et économique une place déterminante. La femme rurale est
en particulier d'un grand apport parce que sans développement rural, le
développement national est impossible «le développement
d'un pays passe par la Femme. Ces dernières constituant à la fois
qualitativement et quantitativement une part importante de la population de nos
pays ». La forêt se présente ainsi non seulement comme
une source inépuisable, mais aussi comme une pépinière
naturelle pour les activités de la femme.
Références bibliographiques
1. Sources orales
ABAGHA, Micheline, mars 2006, née en
1950. Les interdits de la forêt.
ABAGHA NGUEMA Emmanuel, 65 ans, Bollosoville,
Esabok, retraité. Les mutations des activités en
forêt. Né en 1935, clan Esabok, village Bollosoville,
retraité de la gendarmerie.
MBANG Delphine, 61 ans, Esabok, Bolossoville,
agricultrice. Le lien de la femme à la forêt. Née
en 1957, en mariage à Bolossoville, village d'origine Konoville.
NDOGO ELLA Philomène, née en
1950, clan nkodjè, retraitée, agricultrice. La forêt,
une école de la vie. Née en 1950, clan Nkodjè,
retraitée de la Poste et Communication.
MBA Ondo Jean de Dieu mars 2006.
Né en 1953. Le rapport de la femme à la terre.
Né en 1953, clan Osesègne, ressortissant du village Bissok.
NZANG, Madeleine mars 2006. Née en
1932. La forêt comme source de vie.
OBONE, Anastasie mars 2006. Née en
1941. L'importance des campements. Clan Nkodjè,
retraitée de l'Ecole des Cadres Ruraux d'Oyem.
OBONE, Madeleine, mars 2006. Les
tâches difficiles de la femme ntumu en forêt. Née vers
1930, clan Esabok, village Bolossoville.
2. Sources écrites
BALANDIER, Georges. 1955 - Sociologie
actuelle de l'Afrique. Paris, PUF.
DESCOLA, Philippe 1986 - La nature
domestique : symbolisme et praxis dans l'écologie Achuar. Paris,
Maison des Sciences de l'Homme.
CARRIERE, Stéphanie. 2003 - Les
orphelins de la forêt. Les pratiques paysannes et
écologie forestière. (Les Ntumu du Sud Cameroun). Paris,
éd. de l'IRD.
CLAVAL, Paul. 2003 - Géographie
culturelle: une nouvelle approche des sociétés et des
milieux. Paris, Armand Colin.
CORVOL, Andrée et al. (dir.) 1997 -
La forêt:perceptions et représentations, Paris,
L'Harmattan, 401 p.
FRETIGNE, Cédric. 2003 - Article :
questions à l'anthropo-écologie
LEVI-STRAUSS, Claude 1962 - La
pensée sauvage. Paris, Plon.
LUTO, 2004 - ``Les formes traditionnelles de
gestion des écosystèmes'' in Revue Gabonaise des sciences de
l'Homme, n°5, Libreville, PUG.
Projet Forêt et Environnement.
2000 - Etude de faisabilité des forêts communautaires
au Gabon, Rapport final, LUTO, Université Omar Bongo.
MEILLASSOUX, Claude. 2003, Femmes,
greniers et capitaux. Paris, l'Harmattan.
REY, Pierre-Philippe. 1971, Colonialisme,
néocolonialisme et transition du capitalisme, Paris.
DESCOLA, Philippe. 1989 - La nature
domestique. Paris, CNRS
MEILLASSOUX, Claude. 2003 - Femmes,
greniers et capitaux. Paris, l'Harmattan
REY, Pierre-Philippe. 1973. - Capitalisme
et néocapitalisme et transition au capitalisme. Paris, Maspero.
3. Sources photographiques
Photographie n°1 - Utilisation des
outils modernes. Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville,
avril 2006
Photographie n°2 - Mise en terre de
grains d'arachide. Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville,
avril 2006
Photographie n°3 - Mise en terre
d'une igname. Cliché de Ella Judith, au village Bolossoville, avril
2006
Photographie n°4 - Mise en terre
d'un rejet de bananier. Cliché de Ella Judith, au village
Bolossoville, avril 2006
Photographie n°5 - Transport de
boutures de manioc. Cliché de Ella Judith, à Oyem, avril
2006
Photographie n°6 - Collecte des
feuilles de manioc dans un champ pluricultural Cliché
Photographie n°7 - Technique de portage. Cliché de
Ella Judith, à Oyem, avril 2006
* 1 Pierre Paillé et Alex
Mucchielli. L'analyse qualitative ... Paris. Armand Colin.2003, p.
38
* 2 Claude
Lévi-strauss, La pensée sauvage. Paris, Plon, 1962, p.
6
* 3 Philippe Descola, La
nature domestique, p. 12.
* 4 Page 126 bis du rapport.
* 5 P.F.E.
* 6 Paulin Kialo. `'Les
formes traditionnelles de gestion de l'écosystème du village de
Moutouyeni (Ogooué-Lolo)'' in Revue gabonaise des sciences de
l'Homme. Actes du séminaire les formes traditionnelles de gestion
des écosystèmes au Gabon, Libreville, LUTO, Université
Omar Bongo, n°5, juin 2004, p. 160.
* 7 Bernard Boullard.
Petite encyclopédie de la forêt. Paris, Ellipses, 1992,
12.
* 8 Bernard Boullard.
Petite encyclopédie de la forêt. Paris, Ellipses, 1992,
p. 12
* 9 Marc, Augé,
Jean.paul, Colleyn, .p. 19
* 10 Jean, Copans,
L'enquête ethnologique de terrain, Paris, Nathan, coll. 128,
1998, p. 106.
* 11 Cité par
François Laplantine in La description ethnographique, Paris, Nathan,
1996. p. 14
* 12 Raymond, Quivy et Luc
van Campenhoudt, Manuel ... Paris, Dunod, 1995, p. 16
* 13 Raymond Quivy et Luc
van Campenhoudt. Manuel ... Paris, Dunod, 1995, p. 16
* 14 Roland Pourtier (1989) le
signale déjà.
* 15 Marc Augé et
Jean Paul Colleyn. L'anthropologie. Paris, PUF, Coll. « Que
sais-je ? », 2004, p. 19.
* 16 Cédric
Frétigné, article. Questions à
l'anthropo-écologique, vol. 05, n 1 dossier thématique,
hiver 2003.
* 17 Catherine
Clément. Claude Lévi-strauss. Paris, PUF, coll.
« Que sais-je ?», 4e éd. 2003, p. 85
* 18 Claude
Lévi-strauss. La pensée sauvage, Paris, Plon, 1962, p.
5
* 19 Philippe Descola.
La nature domestique. Paris, MSH, 1986.
* 20 Voir
Les Gouro de Côte d'Ivoire.
* 21 La grande saison
sèche.
* 22 La petite saison
sèche.
* 23 Les morceaux
d'étoffe de couleur rouge, ou des bande cassette. Le but est faire fuir
les oiseaux. Ce sont des espèces d'éventail.
* 24 Claude Lévi-strauss
cité par Catherine Clément. Claude Lévi-Strauss.
Paris, PUF, 2003, p. 91
* 25 Philippe Descola, La
nature domestique. Paris, MSH, 1986, p. 380.
* 26 Né en 1935, clan
Esabok, village Bollosoville, retraité de la gendarmerie.
* 27 Collecté par Ella
Judith, le 30 mars 2006 à laide d'un magnétophone.
* 28 Née en 1957, clan
éba'a en mariage à Bolossoville, village d'origine
Konoville.
* 29 Collecté par Ella
Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 30 C'est dans
l'ekoro (faite dans la jachère) qu'il est planté
plusieurs produits.
* 31 Née en 1950, clan
Nkodjè, retraitée de la Poste et Communication.
* 32 Collecté par Ella
Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 33 Né en 1953, clan
Oseseigne, ressortissant du village Bissok.
* 34 Collecté par
Ella Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 35 Il existe au sein du
village Bolossoville, une coopérative agricole.
* 36 Les produits sont
exposés en vue de leur vente. C'est véritablement un grand
marché.
* 37 Née en 1932, du
clan éba'a, en mariage à Bolossoville, village d'origine
Konoville.
* 38 Collecté par
Ella Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 39 Née en 1941,
clan Nkodjè, retraitée de l'Ecole des Cadres Ruraux
d'Oyem.
* 40 Collecté par
Ella Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 41 Née en 1950, clan
Esadumngo, femme en mariage à Bolossoville, retraitée de
la société Electo Hall.
* 42 Collecté par Ella
Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 43 Née vers 1930,
clan Esabok, village Bolossoville.
* 44 Collecté par
Ella Judith, le 31 mars 2006 à l'aide d'un magnétophone.
* 45 Rouissage.
* 46 Le terme exact en
langue est ndanlé.
* 47 Dans des feuilles de
marantacées.
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