Conception et réalisation d'une base de données pour la gestion des micro-crédits à impact visible( Télécharger le fichier original )par Pascal Blaise KADIEBUE Université Notre-Dame du Kasayi - Diplôme de Graduat en Informatique de Gestion 2008 |
CHAPITRE I : GENERALITES SUR LA MICROFINANCE1.1. LE CONTEXTE Si la loi lutte contre les exclusions, elle reconnaît à tout individu le droit à la détention d'un compte, d'un chéquier ou d'une carte de crédit, l'accès au crédit. Cependant, certaines personnes en situation de précarité (bénéficiaires de minima sociaux, travailleurs pauvres, personnes illettrées, etc.) sont frappées par ce type d'exclusion. Celles-ci regroupent des activités aussi diverses que marchands ambulants, petits artisans, kiosques à journaux, taxis, vendeurs de rue, bazars, et autres. Au-delà de leur diversité, ces petites activités économiques de subsistance revêtent des caractéristiques communes : le capital investi est réduit et provient pratiquement exclusivement du patrimoine familial, elles emploient moins de 10 personnes qui proviennent essentiellement du cercle familial, ces personnes sont généralement peu qualifiées et faiblement rémunérées, elles recourent aux horaires de travail flexibles et opèrent bien souvent partiellement ou totalement en marge des règles législatives et administratives. Elles ont en effet besoin d'un capital suffisant pour financer leurs équipements, leurs achats de fournitures, de matières premières, etc. Or, ce capital leur a longtemps fait défaut. C'est pourquoi, différents intermédiaires financiers spécialisés 1.2. MICROFINANCE La microfinance 6se définit comme l'offre de services financiers tels que : le crédit, l'épargne, les assurances... destinés aux populations pauvres, exclues du système financier. Sans revenu et sans propriété, ces populations ne sont pas en mesure d'offrir des garanties bancaires et sont donc en général oubliées des institutions financières et des banques. Tandis que le microcrédit, une des branches de la microfinance, permet de concrétiser des micros projets favorisant ainsi l'activité et la création de richesse. La Microfinance désigne donc l'activité de collecte d'épargne et de financement des petits producteurs ruraux et urbains. Elle peut être aussi définie par deux critères : - la population bénéficiaire, relativement pauvre ou tout du moins exclue du système bancaire classique ; - et des opérations d'épargne et de crédits de faibles montants. 1.2.1. OBJECTIFS La Microfinance a un double objectif : - Favoriser l'accès des petits producteurs exclus du circuit bancaire à des services financiers de proximité et adaptés à la taille de leurs activités (microentreprises/micro-crédits) ; - Réaliser une meilleure collecte de l'épargne des ménages et des petits entrepreneurs pour la réinjecter dans le circuit économique. 6 http://www.european-microfinance.org (Réseau européen de la Microfinance-Loan Officers Training) 1.2.2. PRINCIPAUX AXES - Incitation à la production ; - Accroissement de la productivité ; - Lutte contre la thésaurisation. 1.2.3. LES ACTEURS DE LA MICROFINANCE Les acteurs de la Microfinance en République Démocratique du Congo sont : - Le Gouvernement ; - Les Bailleurs de Fonds ; - Les Organismes Techniques Spécialisés ; - Les Associations Professionnelles Mutualistes et Non Mutualistes ; - Les Programmes, Projets et Organismes d'Appui ; - Les Institutions Bancaires. 1.2.4. LES INTERVENANTS Actuellement, les Institutions Financières Décentralisées (IFD) en activité peuvent être classées en trois catégories : - les Institutions Financières Mutualistes (IFM) ; - les Institutions de Micro-finances Non Mutualistes qui ne sont pas encore régies par un instrument juridique ; - les autres Structures de la Microfinance : on pourrait les appeler aussi Organisations Financières de Proximité (OFP). 1.3. MICROCREDIT 1.3.1. HISTORIQUE 7 De tous les temps dans certaines parties du monde, le micro-crédit est souvent lié à l'usure. De nombreuses activités de taille très réduite (qualifiées habituellement de micro-entreprises) se sont développées dans les pays du Sud comme dans le Nord, pour prêter de petites sommes aux pauvres qui n'avaient pas l'argent pour payer les soins médicaux ou la scolarisation des enfants. Malgré les taux d'intérêts très élevés, souvent camouflés en remboursements en nature au moment de la récolte, les usuriers avaient du succès et se sont enrichis car ils étaient proches des besoins des populations parmi lesquelles ils vivaient. Cette proximité et cette intégration du prêteur dans le milieu culturel des emprunteurs sont importantes car cette connaissance réciproque était le moyen de la couverture du risque. Peu à peu, ces prêteurs furent contestés à cause des intérêts astronomiques qu'ils demandaient. Les églises et les prêtres prirent des initiatives d'organiser le petit crédit local. Les caisses Raiffeisen en Allemagne, puis dans toute l'Europe, les Caisses Desjardins au Canada et d'autres initiatives semblables dans d'autres pays se sont créées. Le premier objectif de ces initiatives fut de rassembler l'épargne des populations et le curé de la paroisse fut souvent le trésorier assurant la garantie que l'argent épargné était bien en sécurité. Mais l'épargne, dans ces caisses locales servait souvent à des dépenses de consommation. Ce n'est que plus tard, que, l'épargne globale de ces caisses devenant importante, furent créées de petites banques qui commencèrent à prêter pour promouvoir des activités économiques et des entreprises locales. Aujourd'hui, les Caisses Raiffeisen en Europe et les Caisses Desjardin au Canada sont des banques importantes qui rivalisent et concurrencent les grandes banques commerciales. Dans le Sud, les missionnaires ont eux aussi lancé les caisses d'épargne et de crédit sur le modèle des mutuelles décrites ci avant où le risque est partagé et les gens regroupés dans un même village ou un même quartier. Mais le terme de "micro-crédit" est devenu connu par l'initiative des Grameen Bank du Bangladesh. Le Professeur YUNUS, las de voir les femmes incapables d'obtenir des banques locales, du crédit pour leur petit commerce prêta aux femmes, de sa propre poche, de petites sommes qui furent remboursées rapidement à 100 %. De cette expérience est née la Grameen Bank qui aujourd'hui prête à des millions de pauvres qui remboursent leurs prêts, totalement et sans problème. Le modèle Grameen repose sur les mêmes principes que les premières caisses Raiffeisen ou Desjardins : prêts et épargne par petits groupes de personnes, surtout des femmes, qui se connaissent, se rencontrent régulièrement (chaque semaine) et qui acceptent de jouer le jeu de la caution mutuelle pour couvrir le risque éventuel que l'une d'elles ne puisse rembourser son prêt. Epargner et prêter dans le même milieu sans laisser l'argent partir à la capitale, auto-contrôle par la connaissance de la situation de chaque membre, solidarité en cas de coup dur, telles sont les valeurs reconnues du système. Les Grameen Bank et des initiatives semblables créées dans d'autres pays se développèrent de 1980 à 1995. Elles sont devenues des banques reconnues par les Etats et les organisations internationales. Récemment, sous l'initiative du Professeur YUNUS, toutes ces organisations de micro-crédit se sont rassemblées à Washington pour le premier Sommet du micro-crédit. Cette "grande messe" permit à des milliers de personnes engagées dans leurs pays, du Sud, de l'Est et du Nord, de prendre conscience de l'importance de leur action et de décider d'éradiquer, par le micro-crédit, la pauvreté du monde. Les dirigeants de ce Sommet mirent sur pied une politique de communication exemplaire. Par leur lobbying, les directeurs généraux des grandes organisations internationales, de certaines banques commerciales, des Agences de coopération internationale multi et bilatérales s'engagèrent avec eux pour financer et développer le micro-crédit, "outil miracle" contre la pauvreté. Dès lors, le micro-crédit devint un terme à la mode dans le langage du développement. Il faut donc nous interroger sur le contenu et l'efficacité du micro-crédit. Est-il vraiment une solution pour le développement et si oui à quelles conditions ? Cette récupération du micro-crédit par les organisations internationales, et demain par les grandes banques, puisqu'il peut être rémunérateur, n'est-elle pas un danger pour les pauvres ? Le micro-crédit, s'il a un effet positif sur le développement social, est-il aussi créateur d'entreprises, et donc d'emploi, et si oui à quelles conditions ? Bref, il faut aller au fond des choses et s'interroger sur les causes des échecs et des succès et sur les limites des expériences effectuées. 1.3.2. DEFINITION Il n'y a pas de consensus parmi les professionnels pour définir ce qu'est le micro-crédit. Les uns, influencés par les dirigeants du Sommet mondial de Washington, estiment que tout crédit de plus de 100 $ US n'est plus du micro-crédit. Les premières expériences de crédit de la Grameen Bank et des organisations prêtant aux femmes pour le petit commerce ou des micro-projets se rangent dans cette catégorie. Les autres, et ce sont les plus nombreux, prêtent des sommes, en monnaie locale, allant de100 à 5.000 voire 10.000 $US et plus et considèrent leurs prêts comme du micro-crédit. Les destinataires du micro-crédit sont généralement des petits entrepreneurs ou des artisans, qui n'intéressent pas les banques, qui ont besoin d'un capital de démarrage afin de trouver un financement pour développer une activité économique, durable et rémunératrice pour son porteur (ventes de vivres, de cigarettes, de boissons, etc.), l'achat d'une vache ou le paiement de l'écolage des enfants, par exemple. Il est destiné à des populations pauvres, exclues du système financier, afin de leur donner la possibilité d'investir et de se prémunir en cas de coups durs (conditions climatiques défavorables à la production, dépenses imprévues liées à une maladie ou à la perte de biens, etc. Le micro-crédit est donc étroitement lié à l'activité des travailleurs du secteur informel. Il est local et proche des gens. Quelquefois seulement, il est lié à l'épargne, en particulier en Afrique (comme c'est le cas à la COOPECDEKOC). « Le microcrédit s'est révélé une arme efficace contre la misère et la faim »8. L'organisation a déclaré 2005 Année internationale du microcrédit, dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le Développement. Le 24 janvier 2005, un rapport de la Banque mondiale a dressé un bilan positif. Le nombre de bénéficiaires y est estimé à 500 millions (sur les 3 milliards de personnes pauvres). L'Asie et le Pacifique totalisent 83 % des comptes ouverts dans les pays en développement, ce qui représente 17 comptes pour 100 habitants. Au Cambodge, cela concerne 400 000 personnes, et 18 000 nouveaux comptes sont ouverts chaque année au Kenya. Toutefois c'est en Amérique latine et en particulier en Bolivie que le système connaît un essor formidable, ce pays apparaît comme un des pays les plus avancés et les plus compétitifs de la micro-finance. Parmi les multiples contraintes auxquelles sont confrontés les microentreprises qui regroupent des activités aussi diverses que marchands ambulants, petits artisans, kiosques à journaux, taxis, vendeurs de rue, bazars,...,il est important de signaler que les petites sommes demandées par ces micro-entrepreneurs, l'absence de garanties à offrir et bien souvent la nature risquée du projet rebutaient les banques commerciales traditionnelles. C'est ainsi que différents intermédiaires sont souvent qualifiés d' « institution de microfinance. » (IMF) 8 Extrait du message vidéo du Secrétaire Général, Kofi Annan, à l'occasion du lancement de l'Année internationale du microcrédit, le 18 novembre 2004. 1.3.3. INSTITUTIONS DE MICROFINANCE Le terme d'institution de microfinance (IMF) recouvre différentes définitions. Certains le comprennent dans un sens plus strict, d'autres l'utilisent pour parler d'organisations et de méthodes de travail très différentes. Au sens large, COOPECDEKOC préfère le terme d'intermédiaires financiers (IF). Il existe trois types d'IF dans le portefeuille COOPECDEKOC et les IMF n'en constituent qu'une catégorie :
Le troisième groupe est constitué des fameuses IMF (institutions de microfinance), impliquées dans ce secteur en raison de leur forte orientation `développement'. La plupart sont issues du monde des ONG (organisations nongouvernementales) dont l'essentiel des programmes et projets de soutien vise les personnes défavorisées des zones où elles opèrent. Nombre de ces ONG se sont transformées en IMF car elles souhaitaient ne pas se contenter de fournir une éducation informelle et de sensibiliser leurs groupes cibles. En tant qu'IMF, elles peuvent fournir les capitaux nécessaires pour améliorer productivité et autosuffisance des populations pauvres, et changer ainsi la vie de ces dernières. Les formes juridiques de ces IF sont variables, de l'ONG à la banque. Le portefeuille COOPECDEKOC inclut divers types d'IF: les institutions de niveau tertiaire (couverture et prêts aux IF de niveau secondaire à l'échelle d'un continent) ; de niveau secondaire (fédération de coopératives ou d'intermédiaires financiers qui prêtent aux IF de niveau primaire) ; IF de niveau primaire, qui octroient des prêts personnels. Les dimensions de ces IMF varient - d'ONG très modestes, d'une capacité de prêt de seulement 100 000 euros, à des banques dont le portefeuille peut atteindre plusieurs centaines de millions d'euros, et qui offrent toutes sortes d'autres services bancaires. 1.4. LES SERVICES OFFERTS PAR L'IMF COOPECDEKOC Les services financiers qu'offre notre maison en étude sont de plusieurs sortes et peuvent être réparties en deux catégories :Les services financiers et les services non financiers. 1.4.1. LES SERVICES FINANCIERS On distingue essentiellement : A) L'EPARGNE L'épargne est la partie du revenu non consommé d'un agent économique. Elle perme de faire face à une consommation différée, un investissement, une incertitude Epargne = Revenu - Consommation Dans une IMF, on peut distinguer l'épargne libre et l'épargne forcée ou obligatoire. Cette dernière est surtout une condition d'accès au crédit dans notre institution de microfinance, la COOPECDEKOC.
En plus de l'épargne et des crédits, l'IMF en étude offre le virement inter agences des fonds à ses clients. 1.4.2. LES SERVICES NON FINANCIERS Ce sont les services offerts en dehors de ses activités principales mais qui sont essentiels pour les clients et pour le développement de l'institution, notamment : la formation, l'accompagnement et l'appui conseil. A) LES FORMES DE SERVICES NON FINANCIERS Les services non financiers peuvent être intégrés dans les opérations de micro finance à travers des services reliés (des IMF partenaires d'autres organisations peuvent fournir une formation à leur clientèle), des services parallèles (les IMF fournissent les services financiers et des formations en utilisant un personnel formé dans chacun des domaines), et un service unifié (les IMF fournissent les services financiers et les formations en utilisant un personnel polyvalent). Comment la fourniture de services non financiers fonctionne dans la pratique? Les services d'éducation sont liés avec le Centre de rencontres habituel où les prêts sont distribués, les remboursements collectés et les questions débattues. Les sessions de formations sont données toutes les 3 semaines et ce pendant environ 25 minutes. Ces formations sont interactives et basées sur des expériences réelles. Chaque session se concentre sur un thème particulier qui répond aux besoins du client. Ces thèmes peuvent inclure : - la santé: la santé des enfants et de leur mère, la prévention sur les maladies sexuelles, l'alcoolisme, les maladies tropicales, la nutrition ; - les droit civiques et l'estime de soi: valeurs, la prise de décision, les droits de l'homme, la violence familiale ; - business: l'argent, le budget, les techniques de vente, l'assistance à la clientèle. Ces modules permettent de développer les connaissances du client et ses compétences et leur permet de prendre conscience d'obstacles non économiques qui les empêche de profiter d'opportunités. Avec les encouragements mutuels des participants des réunions, cela se transforme en un "courage collectif" dont ils ont besoin pour améliorer leur niveau de vie et leur santé. 1.4.3. A QUEL TAUX D'INTERET FAUT-IL PRETER ? Il y a plusieurs "écoles". Les uns, en particulier les donateurs ONG chrétiennes du Nord et leurs partenaires du Sud, défendent le principe que les pauvres ne peuvent payer des intérêts au prix du marché et qu'en conséquence, il faut prêter sans intérêt ou à des taux d'intérêt très bas (1 à 3% quelle que soit l'inflation). Certes ce point de vue est défendable, mais il est clair qu'un tel modèle ne peut fonctionner qu'avec l'aide extérieure ou, dans un milieu très localisé et restreint qui autogére l'épargne et les crédits accordés, grâce au volontariat, sans coûts financiers. Par ailleurs ces programmes ne sont généralement pas en relation avec le secteur financier moderne. Ce modèle a donc de grandes limites et peu d'avenir. Les caisses d'épargne et de crédit et les mutuelles, leurs fédérations et unions, de type Raiffeisen, adoptent des taux d'intérêt en dessous de ceux du marché, quand les états dans lesquels ils fonctionnent les y autorisent. Ils le peuvent, car ils ne rétribuent pas ou peu l'épargne récoltée (à l'exemple des caisses d'épargne et de crédit Nyegigiso du Mali) ou bénéficient de lignes de crédit subventionnées ou/et de dons de l'aide internationale. Ce modèle est appliqué dans de nombreux pays en Asie, comme en Afrique ou en Amérique Latine. De plus en plus nombreuses sont les organisations qui gèrent autrement le micro-crédit. Les taux de prêts du crédit incluent non seulement le coût de l'intérêt bancaire (y compris l'inflation), mais aussi une participation à un fonds de couverture de risque, le paiement proportionnel des appuis reçus en formation et conseils et même des contributions à des caisses de solidarité qui interviennent en cas de décès ou d'événements spéciaux. Ainsi, à l'exemple de nombreuses fondations et ONG du Sud, citées ci-avant, les taux d'intérêt des prêts varient de 2 à 5% par mois pour de petits crédits à court terme. Nombreuses sont les organisations qui prêtent donc entre 30 et 60%, voire plus. Doit-on alors parler, comme certains le font, de taux proches de l'usure ? Pas sûr ! Les bénéficiaires de crédit ne se plaignent pas de ces taux. Ils estiment recevoir des services compétents et fort utiles de ces ONG, et le coût du crédit est de toute façon bien inférieur à ceux des usuriers. En plus, il faut remarquer que ces organisations de gestion du micro-crédit sont les seules capables de s'autofinancer et donc de durer ! Lors d'un colloque d'experts, organisé par l'OCDE à Paris en 1998, nous concluions, en mettant en commun nos expériences, que les programmes qui utilisaient les taux d'intérêts les plus élevés étaient aussi ceux qui étaient les plus performants et les plus efficaces. Dès lors, cette question a une réponse claire. On peut aider les pauvres avec des prêts sans intérêt ou à intérêts subventionnés, mais on ne peut continuer "à jouer les Mères Teresa" sans être conscients que de tels programmes ne sont pas durables et se termineront avec la fin de l'aide. Si ces programmes veulent être financièrement autonomes, ils doivent prendre les moyens de leur politique et facturer les coûts financiers et ceux de l'appui ou de la formation aux bénéficiaires. La question ne semble plus être celle de la pauvreté, mais davantage celle de la formation nécessaire pour que les bénéficiaires augmentent suffisamment leurs revenus pour être non seulement capables de rembourser les intérêts, mais de rentabiliser leurs activités économiques et de faire du profit. Mais est-ce aux bénéficiaires locaux, dans les villages et les quartiers, c'est à dire les plus pauvres, de payer ces frais ? La gestion du micro-crédit est très coûteuse. L'aide internationale pourrait à l'avenir concentrer son intervention sur le subventionnement de ces coûts intermédiaires (formation, participation à la couverture des risques, facilitation de négociations, coûts de gestion des garanties bancaires qui relient progressivement aux banques commerciales locales, etc.) qui doivent être comptabilisés séparément et ne pas entrer dans les coûts de gestion du crédit. 1.4.4. QUELS SONT LES RISQUES ? 9 La plupart des organisations de gestion du micro-crédit annoncent des résultats de remboursement de prêts variant entre 95 et 100 %. Que faut-il en penser? N'y a-t-il pas ou peu de risques à effectuer du micro-crédit ? La réponse n'est pas simple. Souvent, pour des raisons stratégiques, ces organisations ne prennent pas en compte certains coûts ou non remboursements. Par ailleurs, des conditions exogènes peuvent augmenter considérablement les risques. Récemment, au Bangladesh, les inondations qui ont détruit les biens acquis par les femmes, grâce aux crédits, les ont empêché de rembourser leur crédit à la Grameen Bank. Ou encore, selon le Fonds Pérou-Canada, le risque est passé à 20% pour les petits emprunteurs qui ont été touchés par El Nino10, ce qui oblige le programme de se restructurer complètement. L'étude de la réalité démontre que le risque est supérieur à celui annoncé et qu'il est très étroitement lié à la qualité de l'appui et du suivi des prêts. D'où, en conséquence des coûts de suivi importants. La réussite des activités de micro-crédit n'est-elle pas alors liée à des subventions nécessaires de ces coûts qui ne devraient pas entrer dans le calcul de la rentabilité des opérations de gestion des prêts ? Par ailleurs, les risques sont aussi liés aux compétences des organismes de gestion du micro-crédit. Trop souvent des ONG non spécialisées ont prêté et n'ont pas ou peu été remboursées. Aucun suivi sérieux, une comptabilité discutable, de bons sentiments et, en fin de compte de la "casse". Ces organisations ont fait beaucoup de tort. Elles ont confondu "dons" et "prêts". "On ne prête pas à celui qui ne peut rembourser, sinon on le tue..." dit-on maintenant au Sahel. Il est cependant vrai que les risques sont différents selon les catégories de personnes, si celles-ci sont en groupes à caution mutuelle, ou encore s'il s'agit d'avances pour le petit commerce ou un prêt pour la production agricole. "Les femmes remboursent mieux que les hommes". C'est vrai que, si elles sont organisées, leur taux de remboursement de prêts est proche de 100 %. Il est vrai aussi, comme l'a démontré Marie Christine GUENEAU11 que certains secteurs de services ou de production sont moins risqués parce que plus rentables que d'autres. Le problème est que les entrepreneurs pauvres n'ont pas de garanties à offrir, les montants dont ils ont besoin pour financer leurs activités sont généralement trop petits et n'intéressent pas les banques classiques. Le micro-entrepreneur est donc exclu du système financier classique. La délégation congolaise est appelée à plaider auprès des bailleurs de fonds pour renforcer les activités de la micro-finance étant donné qu'elle constitue une alternative dans la lutte contre la pauvreté. Il est aussi question de renforcer les capacités d'interventions des structures d'encadrement des Institutions de micro-finance (IMF) afin de palier au manque de professionnalisme de plusieurs acteurs de la micro-finance. Enfin, une loi appropriée et adaptée est indispensable pour l'émergence des activités de micro-finance appelées à jouer un rôle important dans la lutte contre la pauvreté. Il faut souligner que la faiblesse de l'épargne publique en RDC a motivé la Banque Centrale du Congo à se lancer dans une vaste campagne de promotion et de redynamisation des activités de micro-finance sur l'étendue du territoire national. Certaines Organisations non gouvernementales d'encadrement des institutions de micro-finance telles que la COOPECDEKOK ont depuis quelque temps initié une série de contacts avec les communautés de base pour un encadrement accru des IMF. 10 Amérique Latine, «les banques des pauvres montrent leurs limites", Nicole BONNET, in Journal Le Monde du mardi 16 novembre 1999, p.6 11 Marie Christine GUENEAU, «Les petits projets de développement", Harmattan, s.d., s.p. |
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