Chapitre 1
INTRODUCTION
1.1- GENERALITES
Les tendances actuelles de la mondialisation dans le contexte
du continent africain semblent se traduire à la fois par un
ralentissement des taux de croissance annuelle, la faiblesse des
investissements, le recul de l'agriculture et, par contre, une
réactualisation des secteurs miniers et énergétiques.
Ainsi la part de l'Afrique dans les exploitations mondiales de minerais et de
minéraux est passée de 6 à 13,5 % du total entre 1980 et
1995 (Carton, 2000). Les données concernant l'activité
pétrolière en Afrique reflètent une évolution
similaire. Les pays africains s'investissent de plus en plus dans le secteur
minier et pétrolier pour accroître leurs exportations pour faire
face à la crise de la dette et au recul des activités agricoles
et manufacturières.
Depuis 1969, de nombreux gisements pétroliers dont la
réserve est estimée à 900 millions de barils ont
été découverts au Sud du Tchad dans la zone de Doba. La
guerre civile qui a éclaté en 1979, le manque de ressources
financières et le manque d'expertise nécessaire dans l'industrie
pétrolière n'ont pas permis au Tchad de les exploiter. En 1988,
le Tchad a signé une convention accordant jusqu'en 2004 le droit
d'exploration au consortium composé d'EXXON, SHELL et ELF. Cette
convention a été modifiée en 1995 et une nouvelle a
été signée. Dans celle-ci, en plus de l'exploration elle
définissait les relations entre le consortium et la république du
Tchad en ce qui concerne l'exploitation, la protection de l'environnement,
l'indemnisation des populations et le paiement des redevances et des
impôts. Bien que le projet concerne l'exploitation du pétrole
tchadien, sa réussite dépendait énormément du
Cameroun parce que le Tchad est un pays enclavé. Il ne dispose pas de
côte ni de cours d'eau de grande importance navigable. En 1996, le Tchad
et le Cameroun ont donc signé un accord bilatéral qui
prévoyait la construction d'un oléoduc traversant le Cameroun.
Ledit oléoduc part des champs pétroliers de Doba au Sud du Tchad
(Site des puits de pétrole), traverse le Cameroun et se termine au large
de la côte Atlantique à Kribi (Cameroun) où a lieu le
chargement des tankers. Dans son parcours au Cameroun, il touche 5 provinces,
12 départements et 242 villages. Les cartes 1 et 2 présentent la
région pétrolière de Doba (Sud du Tchad) et le
tracé de l'oléoduc en terre camerounaise.
Carte du Cameroun et champs pétroliers de Doba
(Tchad)
![](Impacts-socioeconomiques-du-projet-de-pipeline-Tchad-Cameroun-le-long-du-corridor-dans-la-province-d1.png)
Source : Petry et Naygotimti (2005)
Tracé du pipeline en terre
camerounaise
![](Impacts-socioeconomiques-du-projet-de-pipeline-Tchad-Cameroun-le-long-du-corridor-dans-la-province-d2.png)
Source : Willbros (2002)
Le Tchad et le Cameroun sont classés parmi les pays
pauvres dans le monde. Le Tchad a un produit national brut (PNB) de 360.992
F.CFA/habitant tandis que celui du Cameroun est de 598.096 F.CFA/habitant
(BEAC, 2005).
Ce projet devrait générer sur une durée
de 30 ans des recettes (Impôts et taxes, retenues sur le pourcentage des
ventes et bénéfices sur le capital de TOTCO) de 8,5 milliards de
dollar USA (5.100 milliards de F.CFA) à la république du Tchad et
des recettes (Droits de transit, impôts et taxes sur le transport et
bénéfices sur le capital de COTCO) de 900 millions de dollars USA
(540 milliards F.CFA) à la république du Cameroun. Ces revenus
permettront aux deux pays de promouvoir le développement au sein de
leurs communautés sur un double plan. Sur le plan
social : des écoles et des centres de santé devaient
être construits, certaines routes devaient être bitumées.
Sur le plan économique : une amélioration des gains dans
l'agriculture, l'élevage et la création d'emplois étaient
attendues.
Par ailleurs, la Banque Mondiale a joué un rôle
central dans le projet notamment celui d'arbitre, de caution et de
parrain. Elle a accordé les prêts aux Etats tchadiens et
camerounais. Elle affirme jouer un rôle de soutien aux Etats
concernés pour que le projet soit défini et géré
d'une manière qui serve et protège les intérêts
nationaux et également pour atténuer les risques politiques de
l'investissement. Enfin elle garantit une plus grande consultation publique,
une participation locale et une préoccupation quant aux enjeux
environnementaux et socio économiques. La Banque Mondiale entend
être le piston du projet car au 20e siècle, aucune
autre matière première - fut-elle très
précieuse - n'a causé autant de conflits voire des guerres et de
flux financiers occultes comme le pétrole (World Bank, 1998). Le
rôle que joue la Banque Mondiale est important car la Mission
Parlementaire Française (1999) a constaté que la rente
pétrolière est fréquemment synonyme de guerre,
d'instabilité sociale et de corruption.
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