WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'imposition des cultures de rente dans le processus de formation de l'etat au cameroun (1884-1914)

( Télécharger le fichier original )
par Sandrine Carole TAGNE KOMMEGNE
YAOUNDE 2 - SOA / CAMEROUN - Diplome d'Etude Approfondie en Science Politique 2006
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

A. LA MANIFESTATION D'UN CERTAIN DESINTERET POUR L'ENTREPRISE COLONIALE PAR BISMARCK ET CAPRIVI

Bien qu'identique sur plusieurs aspects, la politique coloniale des deux chanceliers comportait de légères différences. Ces politiques étaient influencées par la vision de ces acteurs. Quelles étaient donc leurs visions ?

1. Le désintérêt de Bismarck (1871-1890) pour l'entreprise coloniale

Premier chancelier de l'empire allemand, Bismarck avait une idée particulière de la colonie. Après une période marquée par de nombreuses guerres, Bismarck suivait une politique d'équilibre, laquelle pouvait être mise en danger par les conquêtes coloniales. De plus, à son avis, les coûts d'une colonisation dépassaient largement les bénéfices et ne valaient donc pas la peine (Fark-Grüninger 1995 : 43-44). Pour lui, la gestion des colonies devait être laissée aux commerçants qui les avaient créées et non aux bureaucrates. Cette façon de penser se matérialise avec les signataires du traité du 12 juillet 1884 où les chefs Doualas, King Bell et King Akwa ne cédaient pas leur droit de souveraineté à l'Allemagne, mais à des firmes allemandes représentées par leurs gérants à Douala (confère annexe 6). Ce n'est que par la suite qu'il y eut une appropriation par le gouvernement allemand. En effet, bien que les chefs Doualas aient cédé leurs droits sur le territoire désigné Cameroun à la maison Woermann, cette dernière avait l'intention de la rétrocéder au Reich et à l'empereur. « Cette rétrocession se matérialise par une convention signée le 12 juillet par les commerçants Allemands et le commissaire impérial Nachtigal et légalisée par le consul d'Allemagne au Gabon, Emil SCHULZE » (Nkot 2001 : 24).

L'idée de Bismarck était d'appliquer le système des compagnies à charte tel qu'il était pratiqué par l'Angleterre au Nigéria et en Rhodésie.

« Dans un tel système, des firmes commerciales réunies en compagnie sont chargées de maintenir l'ordre et d'assurer le gouvernement dans les territoires où elles ont des maisons de commerce (...) il permettrait à Bismarck d'éviter de lourdes dépenses qu'occasionneraient l'envoi outre-mer de nombreux fonctionnaires et surtout de ménager la susceptibilité de l'Angleterre avec qui il n'entend pas entrer en conflit. Mais nulle part ce système de compagnie à charte ne donne satisfaction, surtout quand il s'agit d'appliquer la doctrine de l'hinterland et de délimiter les frontières des pays. La formule est donc abandonnée », (Ngongo 1987 : 45-46).

Par la suite, Bismarck s'est vu contraint d'engager l'administration allemande dans la gestion des colonies. La politique qui prévalut fut alors une orientation purement mercantile et le gouvernement se limita à la protection des nationaux et de leurs intérêts. Ceci se note dans le comportement du gouverneur par intérim nommé par Nachtigal, Max Büchner qui, fidèle à la politique de Bismarck « croyait encore que la colonie pouvait être efficacement administrée avec 10 ou tout au plus 20 agents et quelques indigènes pour le maintient de l'ordre » (Etoga Eily 1971 : 151). Seulement, cette politique de l'engagement minimum de Bismarck qui était soucieux de préserver la puissance nouvellement acquise de l'Allemagne, rencontrera de farouches oppositions notamment chez les commerçants installés sur le territoire, engagés dans les plantations coloniales.

Face à ces diverses pressions, le chancelier nomme le 3 juillet 1885 Julius von Soden comme gouverneur du Cameroun. Ce dernier répondait au profil d'administrateur des colonies à la différence de Max Büchner. Toutefois, les élections de 1890 qui voient percer les sociaux-démocrates et le centre catholique longtemps combattus par Bismarck poussent ce dernier à démissionner. Guillaume II, attaché au développement de la puissance militaire et de la richesse de l'empire allemand, va s'engager après le départ de Bismarck en 1890, dans une politique d'expansion commerciale, coloniale et maritime. Il nomme le comte Léo Von CAPRIVI pour le remplacer

2. Un intérêt mitigé de Léo von CAPRIVI (1890-1894) pour l'entreprise coloniale

Le général Caprivi symbolise l'orientation nouvelle imprimée à la politique allemande à l'intérieur et à l'extérieur. Avec lui, on en vint à admettre de moins en moins de réserve devant l'idée de la mise en valeur du territoire colonisé. Après avoir succédé à Bismarck, Caprivi a mené une politique de « continuité dans le changement ». Ce que Bismarck avait amorcé sur le plan colonial, Caprivi l'achève avec peu d'enthousiasme. N'étant pas un fervent partisan de l'expansion coloniale, il a préféré gérer les acquis. Lui-même disait en 1894 en ironisant sur son enthousiasme modéré pour l'expansion coloniale ceci :

« Je crois que j'éprouve pour les colonies la chaleur que m'impose ma charge et qui me paraît souhaitable pour la prospérité de nos colonies, dans l'intérêt de l'Allemagne. Mais je crains de ne pouvoir jamais parvenir au degré de chaleur qui me ferait souhaiter de transformer toute l'Afrique en une possession allemande même si je me trouvais dans un état de chaleur fébrile ».

Comme on le constate, ces deux chanceliers ne voyaient pas l'importance d'une prise de possession plus poussée de la colonie du Cameroun. Que ce fut Bismarck qui n'avait au départ aucune envi d'engager l'empire dans la course aux colonies, ou Caprivi qui s'y est engagé bien que modérément, la politique des deux chanceliers n'a pas favorisé l'émergence d'une exploitation économique poussée du protectorat du Cameroun. Ce laxisme peut être expliqué par le fait que tous les deux étaient des militaires mais surtout par le fait que le véritable problème d'une organisation effective de la colonie ne s'était pas encore posé. Ceci à cause de la pacification du pays par les forces armées allemandes.

Ne peut-on pas aussi voir cette timide imbrication de l'Etat dans les affaires coloniales comme le manque d'intérêt de celui-ci pour les préoccupations coloniales ? Ce manque d'intérêt peut être expliqué par la situation agricole prévalant en Allemagne. Dans le souci de résorber les effets de la crise, l'Allemagne avait mis sur pied une politique protectionniste et ne pouvait pas dans ce contexte chercher à investir ces capitaux hors du contexte national. Cette situation peut donc expliquer dans une certaine mesure la raison pour laquelle se sont d'abord les acteurs privés qui se sont intéressés à l'aventure coloniale car le protectionnisme était néfaste pour les investissements comme on l'a vu au chapitre précédent. Coloniser supposait engager des capitaux pour mettre sur pied une administration coloniale. Comment se ressentira donc ces hésitations dans le processus de construction étatique ?

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote