UNIVERSITE MONTESQUIEU - BORDEAUX IV
Institut d'Administration des
Entreprises
Organisation de marchés émergents :
efficience et
risque de sélection adverse
Mémoire en vue de l'obtention du Diplôme d'Etudes
Approfondies en Sciences de gestion
Présenté et soutenu le 7 juillet 2004 par :
M.Donatien AVELE
Sous la direction de Madame Joanne HAMET, Professeur
Année universitaire 2003 - 2004
DEDICACES
Je dédie ce présent mémoire à tous
ceux qui me sont chers :
Spécialement à ma très chère
mère, en témoignage de sa grande affection et de
tout ce qu'elle a fait pour moi.
A mon père
A mes soeurs
A mes frères
A mes cousin (e) s
A Mme Rosine ntsama.
A mes amis
A Béatrice Atangana qui repose dans la
gloire de Jésus Christ ressuscité.
REMERCIEMENTS
Ce mémoire n'aurait pas vu le jour sans le soutien et le
concours de plusieurs personnes, dont les efforts ne sauraient être
estimés à leur juste valeur.
Il me tient à coeur de leur exprimer ici ma profonde
gratitude et leur adresser mes sincères remerciements.
Spécialement, mes remerciements vont à mon
encadreur,
Madame HAMET Joanne
Pour son esprit de collaboration, ses critiques constructives,
ses conseils, sa disponibilité, ses remarques et commentaires permanents
qui m'ont conduit à toujours rechercher le travail bien fait.
Je saisis également cette occasion pour remercier tous
mes professeurs du DEA de Sciences de Gestion pour leur esprit de
collaboration, leur serviabilité et leur surveillance.
Je n'oublierais pas tous mes camarades du DEA pour toutes les
discussions constructives que nous avions eues.
Enfin, mes remerciements vont au directeur du DEA des Sciences
de gestion, M. le Professeur Gérard HIRIGOYEN pour ses nombreux
conseils.
RESUME :
Le marché boursier ne saurait être un moyen
efficient pour les entreprises africaines de collecter les capitaux compte tenu
de la panoplie d'obstacles auquel il est confronté. Croire aujourd'hui
que le financement par les titres peut se substituer à la finance
indirecte en raison de son système bancaire devenu imparfait est
illusoire. Il faudrait plutôt réhabiliter le système
bancaire.
Les marchés émergents d'Afrique se trouvent dans
un contexte qui d'emblée ne leur permet pas d'avoir les mêmes
performances que leurs homologues des pays occidentaux. Administration,
fléaux sociaux et certaines caractéristiques leur sont propres :
volatilité des cours, illiquidité, faible capitalisation
boursière constituent les principaux obstacles à leur efficience
; mais malgré tout, ces marchés enregistrent quelques bons
résultats.
Les opérations d'initiés doivent être
réglementées dans les marchés boursiers émergents
d'Afrique dans le but d'éviter les asymétries d'information et
les risques de sélection adverse.
Mots-clefs : efficience, asymétrie
d'information, risque de sélection adverse, marché
émergent, finance directe.
LISTE DES ABREVIATIONS ET SIGLES.
BAD : Banque Africaine de
Développement BEAC : Banque des Etats de l'Afrique
Centrale
BCEAO : Banque Centrale des Etats de l'Afrique
de l'Ouest
BFR : Besoins en Fonds de Roulement
BOAD : Banque Ouest Africaine de
développement.
BRVM : Bourse Régionale des Valeurs
Mobilières
BVM : Bourse de Valeurs Mobilières
BVMAC : Bourse de Valeur Mobilières de
l'Afrique Centrale
BVME : Bourse de Valeurs Mobilières
Emergentes
CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale DSE : Douala Stock
Exchange
FCFA : Franc de la Communauté
Financière Africaine
FR : Fonds de Roulement
FMI : Fonds Monétaire International
FMN : Firmes multinationales
JSE : Johannesburg Stock Exchange MBE
: Marchés Boursiers Emergents OPEP :
Organisation des Pays Exportateurs de Pétrole
PAS : Plans d'Ajustement Structurels PVD
: Pays en Voie de Développement
SEAQ : Stock Exchange Automated Quotation
SEC : Securities Exchange Commission
SFI : Société Financière
Internationale TCN : Titres de Créances
Négociables.
Sommaire
Introduction générale.
Première partie : L'émergence des marchés
boursiers
Chapitre1: Les facteurs de création des
marchés boursiers
Section 1. Définitions et caractérisation
des marchés boursiers émergents
1. La notion de « Bourse de valeurs mobilières
émergentes ».
2. Eléments d'identification des Bourses de valeurs
mobilières émergentes.
3. Les principales phases de développement des
marchés boursiers émergents.
4. Les facteurs de développement des marchés
boursiers émergents.
Section 2. Création des marchés
boursiers en Afrique.
1. Les mobiles de création des marchés boursiers
émergents.
2. Obstacles au développement des marchés
boursiers en Afrique subsaharienne.
3. Facteurs d'intégration des marchés boursiers
africains.
.
Chapitre2 : Le rôle des marchés boursiers
dans le financement des entreprises Africaines.
Section 1. L'accès au financement des
entreprises africaines.
1. Les modes de financement des PVD.
2. Les moyens de financement des entreprises africaines.
3. Rôles de la Bourse : une lecture par la nouvelle
théorie des institutions.
Section 2. La finance directe peut-elle se
substituer à la finance indirecte ?
1. Intérêts des marchés financiers
émergents.
2. Les liens de complémentarité entre la banque et
le marché boursier.
Deuxième partie. Microstructure des
marchés boursiers émergents.
Chapitre1. Typologie des marchés boursiers.
Section 1. Principes d'organisation des
marchés boursiers.
1. Organisation de marché.
2. Règles d'organisation des marchés boursiers
émergents d'Afrique
Section 2. Autres qualités d'organisation
des marchés boursiers.
1. Critères d'organisation d'un marché
boursier.
2. Risque opérationnel, Système de
règlement- livraison et information
Chapitre 2. Efficience et liquidité des
marchés financiers
Section1. Concept de l'efficience des
marchés financiers.
1. Efficience informationnelle des marchés boursiers.
2. L'impact des opérations d'initiés sur
l'efficience informationnelle des marchés boursiers
Section 2. Liquidité des marchés
boursiers émergents.
1. Définitions et importance de la liquidité des
marchés boursiers
2. Qualité des marchés
réglementés.
3. Conséquences d'opération d'initiés sur
la liquidité.
Conclusion Générale et perspectives de
recherche Bibliographie
Tables des matières.
INTRODUCTION GENERALE.
Les institutions de Bretton-Woods ont encouragé le
développement des marchés boursiers qui constitue une partie
importante de la libéralisation financière dans les années
1980. Durant la décennie 80, le domaine de la finance a connu de
profonds changements tant dans les pays du Nord que dans les pays du Sud. En
occident, les systèmes de financement organisés en circuits
administrés au profit de financements directs via les bourses de valeurs
ont été abandonnés. Cet abandon a permis une meilleure
allocation de ressources financières. Le gaspillage des ressources a
entraîné des déséquilibres majeurs des indicateurs
économiques; ceci étant dû à l'ancien système
qui était porteur d'effets pervers.
En ce qui concerne le tiers-monde, la quasi-totalité
des endettés ont eu la nécessité de trouver des solutions
au début des années 80 à la crise de la dette. Ces pays
ont procédé sous l'effet des programmes d'ajustements structurels
et de nouvelles réalités financières internationales,
à la libéralisation et à l'ouverture de leur
économie. La plupart d'entre eux ont enregistré des taux de
croissance dépassant souvent ceux des pays développés.
Compte tenu de la croissance de leur économie, les places
financières des pays en voie de développement (PVD) ont
réduit sensiblement le recours aux prêts bancaires et ceci les a
conduit à développer d'autres sources de financements. Les
gouvernements de ces pays ont procédé à d'importants
programmes de privatisation sous la pression des grandes institutions
financières internationales entraînant la création des
marchés financiers.
Le concept « marché émergent » est
souvent utilisé pour désigner les marchés financiers des
économies en transition vers les économies de marché. Le
qualificatif d'émergent recouvre deux notions : par émergent, on
peut entendre tout marché développé ou non, pourvu qu'il
soit localisé dans une économie émergente; ce qui suppose
au préalable de qualifier une telle économie. Selon une approche
plus restrictive, un marché émergent est un marché
accessible, qui a entamé un processus de croissance et de modernisation,
susceptible d'intéresser des investisseurs étrangers [Tchemeni E,
1997]. Si on s'entretient à la première définition, on
peut alors
se poser la question de savoir si les marchés comme le
Kenya, ou tout récemment le Cameroun encore embryonnaires et
inaccessibles aux investisseurs étrangers sont dits émergents ?
Un marché ne peut exister dans un pays que si celui-ci est doté
d'une structure boursière suffisamment développée pour
permettre aux agents d'investir [Tchemeni E., 1997]. Sont donc exclus à
ce titre, les petits marchés embryonnaires sans véritables
activités.
Le concept de marché émergent était
uniquement attribué aux nouveaux pays industrialisés durant les
périodes 1970-1980 à l'instar de Hongkong, Singapour et la
Corée du sud. Mais au milieu des années 80, ce concept a
été généralisé et utilisé pour la
plupart des économies en développement. Le développement
des marchés émergents a commencé au cours de la
décennie 1980, mais c'est au début des années 1990 que
leur essor a véritablement débuté. Ces pays ayant
séduit progressivement les investisseurs étrangers sous l'effet
de la mondialisation et de la libéralisation croissante des
activités financières. Par exemple, la Société
financière internationale (S.F.I.) recensait 32 marchés
émergents à travers le monde. Aujourd'hui, elle en
dénombre plus de 70, compte tenu du nombre croissant des pays qui
répondent aux critères d'émergence. La crise qui a
brutalement affecté les marchés émergents d'Asie à
partir de l'été 1997 a constitué l'un des
événements majeurs pour la nouvelle configuration de
l'économie mondiale au début du 21e siècle. Par
là même, elle a représenté une évolution
essentielle à prendre en compte dans les firmes multinationales (FMN)
qui structurent cette économie en voie de globalisation croissante
depuis le début des années 1990, et à la fin de la guerre
froide. Les économies qui avaient enregistré les plus forts taux
de croissance de la seconde moitié du 20e siècle ont
subi une série de reculs tout aussi spectaculaires. Les Dragons
(Corée du sud, Taiwan, Hongkong) et les Tigres (Thaïlande,
Malaisie, Indonésie et Philippines), qui s'étaient imposés
dans la nouvelle répartition mondiale de la production industrielle, et
parmi les marchés les plus porteurs de la planète, ont vu
s'effondre leurs projets de développement surdimensionnés.
L'émergence des marchés boursiers est intervenue
au cours de deux dernières décennies. Le recyclage des
excédents financiers des pays
membres de l'organisation des pays exportateurs de
pétrole (OPEP) par les banques occidentales vers les pays en voie de
développements non pétroliers et aussi vers leurs
économies propres intervient jusqu'en 1970. La réduction de ces
excédents au début des années 1980, a
entraîné au passage des carences de liquidité. Finalement
ceci a conduit à la détérioration du système
d'intermédiation mondiale. Durant cette période, on a
assisté à un changement primordial en matière de politique
économique et financière. Les pays occidentaux ont fait appel
à un financement par les ressources monétaires inflationnistes.
L'importance des marchés financiers et plus particulièrement des
bourses de valeurs mobilières locales capables de mobiliser
l'épargne domestique disponible se faisait ressentir à cette
même période. Au regard de ce qui s'est passé dans les pays
en voie de développement, le Mexique est parmi les premiers victimes de
la crise d'endettement lorsqu'en 1982, ce dernier annonçait son
incapacité à honorer ses engagements.
A la fin des années 70, les P.V.D vont faire recours
à des emprunts extérieurs puisque les ressources d'exploitation
des matières premières vont connaître une baisse
spectaculaire suite au contre-choc pétrolier. Finalement, cette
politique va se solder par des déficits des finances publiques. On
assiste aussi à une crise financière qui va se propager dans la
plupart des P.V.D (Brésil, Maroc, Philippines...) après son
déclenchement au Mexique. Afin de permettre une bonne réussite
des programmes d'ajustement structurels (P.A.S) mis en place et
préconisés par le F.M.I. et la banque mondiale, ainsi que les
programmes de privatisation et attirer un nombre important d'investisseurs
étrangers, les gouvernements des P.V.D vont mettre en place plusieurs
mesures favorisant le développement des marchés financiers, et
particulièrement les marchés boursiers. L'ouverture d'importantes
perspectives à long et moyen terme grâce aux plans d'ajustements
structurels adoptés au milieu des années 80 vont permettre une
réorganisation profonde du mode de fonctionnement de l'économie.
La communauté financière internationale a considéré
les P.V.D comme étant des marchés émergents quand ces
derniers ont commencé à mettre en place des politiques de
libéralisation économique et financière ainsi que des
réformes favorisant le développement des marchés
financiers.
On a souvent déterminé les relations entre les
banques et la croissance économique, mais il reste à
définir le rôle des bourses dans le développement
économique des pays africains. De nombreuses questions se posent :
D'abord, il s'agit d'évaluer les avantages que ces
marchés peuvent procurer aux économies africaines et aux
investisseurs étrangers. Financent-ils véritablement les
activités de production où sont-ils le lieu où peuvent
être amassés? Ensuite le financement de la croissance
économique pouvant être assuré par le système
bancaire, le problème est de savoir si la finance par des titres peut se
substituer à la finance intermédiée ou si à
l'inverse, leur développement et leur bon fonctionnement sont
corrélés. Enfin, le marché peut-il entraîner
l'augmentation des agrégats macro-économiques? Ou fait-il peser
sur le secteur réel des risques inutiles quand on considère
l'importante volatilité des cours et les entrées massives des
capitaux ayant des effets déstabilisateurs sur l'économie.
On ne compte que huit marchés financiers en Afrique
sub-saharienne mis à part celui de l'Afrique du sud. Ce dernier
constitue un cas particulier en raison de son importance et du
développement économique relativement avancé de ce
pays.
Sur les sept marchés (Kenya, Zimbabwe, Ghana, Botswana,
Namibie, Zambie, Côte d'Ivoire)1, un seul se trouvait en
Afrique francophone ( la Bourse d'Abidjan en côte d'Ivoire) bien avant la
création toute récente dans le même espace
économique en Afrique centrale de deux Bourses de valeurs : l'une au
Cameroun, Douala Stock Exchange (D.S.E)2 née suite à
la loi du 22 décembre c1999, créant un marché financier au
Cameroun et inaugurée le 23 avril 2003 et la seconde à Libreville
au Gabon : Bourse des valeurs mobilières d'Afrique centrale
(BVMAC)3. Au Kenya et au Zimbabwe
1 Depuis 1998 une Bourse régionale des valeurs
mobilière (BRVM) a été mise en place en Afrique de
l'ouest. Elles sont constituée des pays suivants : Côte d'Ivoire,
Niger, Mali, Togo, Bénin, Burkina - Faso, Sénégal,
Guinée Bissau). C'est d'ailleurs le premier exemple d'une
bourse de valeur régionale dans le monde.
2 D.S.E (Douala Stock Exchange) est la
dénomination de la bourse des valeurs mobilières du Cameroun
3 BVMAC (bourse de valeurs mobilières de l'Afrique
centrale) est un exemple d'une bourse sousrégionale en Afrique centrale
au sud du Sahara après celle de l'Afrique de l'ouest. Elle a vu le jour
en décembre 2002.
par exemple, pays de fort peuplement blanc, les bourses
fonctionnent depuis l'indépendance, environ quarante ans. Elles
avaient été conçues comme des outils
d'«indigénisation»des sociétés à capitaux
étrangers plus que comme des outils de développement de
secteur privé, aptes à canaliser l'épargne locale et
étrangère. Au Botswana, au Ghana, en Namibie et Zambie, les
Bourses ont ouvert leurs portes à la fin des années 1980 ou
au début des années 1990. Si nous tenons compte du manque de
fiabilité et de transparence dans ces types de marchés
lié à leur fonctionnement, il apparaît nécessaire
de nous interroger sur leur efficience, car dans nos pays, les investisseurs
étrangers se plaignent souvent des lourdeurs administratives et une
absence d'information sur les opportunités d'affaires. Les
marchés boursiers en Afrique au sud du Sahara, sont jeunes
et possèdent les caractéristiques des marchés
pré-émergents. Ils ont été construits suite aux
programmes de libéralisation financière et aux privatisations
massives du début des années 1990. Les marchés
émergents sont hétérogènes. Suivant les pays,
les variations dans le nombre de compagnies cotées, le nombre de
nouvelles cotations par la capitalisation du marché et les valeurs
échangées sont considérables. Ces différences
reflètent les caractéristiques communes. Il s'agit souvent des
marchés risqués, d'une part à cause de la
volatilité importante des cours et d'autre part à cause de
la moindre fiabilité des informations et du manque de transparence.
L'excès de volatilité (souvent compensé par un
supplément de rentabilité) provient généralement
de l'insuffisance de liquidité et de faible capitalisation
du marché. En effet, les échanges concernent souvent quelques
titres et seules quelques sociétés dominent le marché.
Par ailleurs, les marchés émergents sont soumis à des
contraintes réglementaires plus importantes que leurs homologues des
pays développés et très peu de sociétés
étrangères y sont cotées. Ils sont donc peu ouverts et
mal intégrés au niveau international. Or pour que de tels
marchés boursiers puissent attirer le maximum d'investisseurs
possibles et compte tenu de leur étroitesse tant par l'effectif des
sociétés cotées et des investisseurs qui s'y
intéressent que par le volume de transactions, ces marchés
doivent être organisés de façon à maximiser
leur efficience afin de limiter les asymétries d'information et les
risques de sélection adverse pouvant nuire à leur bon
fonctionnement et assurer ainsi leur
crédibilité vis à vis des investisseurs
internationaux. Au regard de nombreuses anomalies auxquelles sont
confrontés les marchés émergents d'Afrique, la
présence d'initiés sur de tels marchés aurait sans doute
un impact sur le contenu informationnel des cours cotés, ce qui
réduirait ainsi l'efficience informationnelle.
La littérature sur l'efficience forte des
marchés financiers contrairement à l'efficience faible et
semi-forte, est assez limitée. Elle est basée principalement sur
les informations que détiennent les initiés sur un tel
marché (efficient sous la forme forte), les cours des titres doivent
refléter rapidement et correctement les informations
privilégiées détenues par les initiés. Ces derniers
sont représentés en général par les investisseurs
qui, soit ils détiennent un certain pourcentage des titres d'une
société, soit ils font partie de la direction. Or en
matière d'asymétrie d'information, la littérature
théorique prévoit que la réalisation des opérations
d'initiés a pour conséquence l'augmentation du degré de
sélection adverse sur les marchés qui devrait se traduire par un
élargissement de la fourchette de prix.
Les délits d'initiés sont
considérés dans la plupart des pays comme une infraction
entraînant une atteinte au bon fonctionnement du marché ; ils
remettent en cause le principe d'égalité entre les investisseurs
vis à vis de l'information même si l'utilisation de cette
information privilégiée sera rendue publique plus tard. En plus,
ces investisseurs privilégiés peuvent réaliser des
rentabilités supérieures à celles attendues pour le risque
encouru.
Il apparaît alors légitime de s'interroger sur le
problème de la qualité des marchés boursiers
émergents (efficience, liquidité, automatisation, information,
système de règlement- livraison ...), les problèmes
d'asymétrie d'information et de risque de sélection adverse, des
obstacles liés au développement des marchés boursiers en
Afrique sub-saharienne et des problèmes de financement des entreprises
Africaines.
Si on estime que la création des marchés
boursiers en Afrique peut à travers les actions et les obligations qui
seront émises favoriser la mobilisation de l'épargne
intérieure et extérieure nécessaires au financement des
activités, il y a lieu de s'interroger si ces pays ne
gagneraient pas en prenant des initiatives de mettre en place des
marchés sous-régionaux comme cela a été le cas en
Afrique de l'ouest.
Or, c'est à ce niveau que notre problématique
prend véritablement corps avec un certain nombre de questions
fondamentales dont les réponses restent à trouver. Il s'agit dans
ce travail de recherche de répondre principalement à la question
suivante :
Le marché boursier est-il un moyen «
efficient » de collecter les capitaux pour les entreprises Africaines ?
Cela suppose-t-il que :
· Les moyens de financement des entreprises Africaines
sont-ils efficaces ?
· La finance directe peut se substituer à la finance
indirecte en raison d'un système bancaire imparfait ?
La principale question posée et le corpus
d'hypothèses attachés engendrent d'autres questions qui
méritent d'être examinées.
· Pourquoi la création des marchés boursiers
en Afrique ?
· Un marché boursier indépendant pour chaque
pays d'Afrique est-il une solution viable ?
· Les Bourses Africaines peuvent-elles se développer
?
· Les opérations d'initiés ont-elles un
impact sur l'efficience informationnelle ?
· Quelles sont les conséquences de telles
opérations sur la liquidité des marchés boursiers ?
Afin d'apporter quelques éléments de
réponse à ces questions, nous envisageons d'élaborer la
principale recherche en proposant un état de l'art sur un certain nombre
de concepts théoriques : marchés émergents, efficience,
asymétrie d'information, risque de sélection adverse,
liquidité, information, sources de financements, initié.
En mettant le problème des marchés
émergents africains au coeur de ce travail, nous avons voulu remplir un
vide ; car peu d'études à notre connaissance ont
été consacrées à la question.
La présente étude se divise en deux parties. La
première examine les conditions de création des marchés
boursiers en Afrique tout en donnant les raisons qui ont conduit à leur
prolifération ces dernières années. Elle aborde
également la question de financement des
marchés boursiers émergents d'Afrique.
La seconde partie quant à elle est consacrée
d'abord à l'organisation des marchés boursiers en Afrique puis
à la problématique posée par l'efficience et la
liquidité des marchés boursiers
Première partie : L'EMERGENCE DES MARCHES
BOURSIERS.
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Chapitre1. LES FACTEURS DE CREATION DES
MARCHES BOURSIERS.
Au cours de la dernière décennie, de nouvelles
places boursières ont fait leur apparition en Afrique d'une
manière générale et plus particulièrement en
Afrique sub-saharienne.
L'objectif poursuivi dans ce chapitre est de présenter
les raisons qui ont conduit à cette abondante création de
marchés boursiers ce, malgré la panoplie d'obstacles auxquels ils
sont confrontés (manque de liquidité, faible capitalisation
boursière, importante volatilité des cours etc.). Face à
tous ces handicaps, les pays Africains continuent de créer des
marchés boursiers nationaux et indépendants pour chaque pays
alors qu'ils gagneraient en prenant des initiatives de mettre en place des
Bourses régionales.
Dans la première section de ce chapitre, nous tentons
de définir le concept de BVME (1), ensuite nous identifions les BVME par
leurs principales caractéristiques (2) et, examinons les principales
phases de développement des marchés boursiers émergents
(3) ; Enfin nous nous intéressons aux principaux facteurs qui permettent
le développement des marchés boursiers émergents (4). La
deuxième section est consacrée à la création des
marchés boursiers en Afrique. En gros, le chapitre 1 essaie de fournir
des éléments de réponses aux questions suivantes : les
Bourses Africaines peuvent-elles se développer ? Cette question trouve
des éléments de réponse aux facteurs de
développement des marchés boursiers émergents (section 1)
; pourquoi la création des marchés boursiers en Afrique ? les
éléments de réponse sont examinés à travers
les facteurs de création des marchés boursiers (section 2) ;
toutefois, nous essayons d'expliquer les obstacles liés au
développements des marchés boursiers émergents en Afrique
sub-saharienne (2) . Enfin, nous tentons de donner une réponse à
la question de savoir si un marché boursier indépendant pour
chaque pays d'Afrique est une solution viable (section 2).
Section 1. Définitions et caractérisation
des marchés boursiers émergents.
Dans cette section, nous définissons tout d'abord les
BVME (1), ensuite les caractéristiques des BVME sont examinées
(2), les principales phases de développement des marchés
boursiers émergents sont étudiées (3) et, enfin nous
analysons les facteurs de développement des marchés boursiers
émergents (4)
1. La notion de « Bourses des Valeurs
Mobilières émergentes » (BVME).
Le qualificatif « émergent » évoque
l'idée d'une économie en phase de démarrage et qui
présente un potentiel de croissance et des opportunités de profit
plus importantes que celles offertes par les marchés
développés. Le concept d'émergence ne concerne pas
uniquement un marché ou une place financière, il concerne aussi
un pays tout entier. Nous pouvons même imaginer des situations dans
lesquelles un marché financier connaît une évolution
importante dans une économie en croissance très faible et,
inversement un marché financier en retard par rapport à
l'évolution de l'économie. En ce qui concerne l'émergence
des marchés financiers, il n'existe aucune définition
universellement reconnue. Les nombreuses tentatives restent simplement des
classifications conventionnelles. Au départ, le concept de marché
émergent a été employé pour les nouveaux pays
industrialisés d'Asie tels que la Thaïlande ou la Corée du
sud, et pour certains pays d'Amérique Latine comme le Mexique ou le
Brésil. Ces nouveaux marchés qui considèrent l'affichage
des prix de marché comme le moyen de favoriser la concentration du
capital local et d'attirer les capitaux internationaux, notamment ceux des
institutionnels, ont libéralisé les mouvements de capitaux et
pris certaines mesures pour développer l'intermédiation
financière à travers l'émission de titres financiers
négociables. Aujourd'hui, le concept s'applique à plusieurs
marchés financiers de l'Est (la Pologne, la République
Tchèque...) et du sud méditerranéen (Turquie, Israël,
Maroc...).
La notion de BVME diffère selon les auteurs, les
institutions et surtout selon la finalité poursuivie ; d'où la
nécessité de retenir une définition comme base de
référence pour la description de ces bourses. Il existe plusieurs
définitions des BVME dont les principales sont celles des investisseurs
et celles de la Société Financière Internationale (SFI).
En effet, pour les investisseurs, une BVME est un marché boursier
accessible, qui a entamé un processus de croissance et de modernisation,
le rendant susceptible d'intéresser les investisseurs, [Tchemeni, 1997].
Tandis que selon la SFI, toutes les Bourses dans les pays en
développement seraient des marchés boursiers émergents,
[Bittner, 1999]. La première définition est restrictive en ce
sens qu'elle ne tient pas compte de toutes les bourses embryonnaires et
inaccessibles aux investisseurs étrangers. En revanche, la seconde
définition est aussi vaste que la notion de pays en
développement. C'est pourquoi, la SFI opère une classification
qui permet de distinguer quatre (4) types de BVME. Le premier type regroupe les
bourses localisées dans les économies en transformation. Les
bourses sont alors considérées comme indispensables dans le
passage d'une économie de plan à une économie de
marché. On peut citer en exemple : la Russie, la Hongrie, la Pologne et
la Tanzanie.
Le second type de BVME est celui des bourses qui sont dans
une phase de création ou de consolidation. C'est le cas de l'Ouganda, de
la Zambie ou du Malawi. Les places financières, du Botswana, du Ghana,
de la Namibie ou de l'Ile Maurice, sont qualifiées par la SFI de
marchés frontières.
Le troisième type est celui des marchés
ré-émergents : ces bourses existaient depuis longtemps, mais
elles ont commencé à s'affirmer depuis quelques années. Ce
sont les exemples de l'Argentine (1872), l'Inde (1887) ou Egypte (1910).
Le quatrième type est celui des pays en
développement qui sont très actives depuis quelques
décennies, mais qui ont été le théâtre de
chutes de cours. Ce sont les cas du Brésil, de Taiwan, ou d'Afrique du
Sud. Ces bourses occupent des places de choix dans le paysage boursier mondial
(importante liquidité, technologie de pointe, négociation de
produits dérivés, contrats à terme etc.).
La proposition de classification faite par la SFI permet de
pallier la généralité de la définition de BVME et
inscrit ces marchés boursiers dans une logique dynamique. Ainsi un
marché embryonnaire comme la BRVM de l'Afrique
de l'Ouest encore au stade de consolidation, peut être
considéré comme une BVME. Le choix d'une définition des
BVME permet de s'accorder sur la compréhension de l'objet de ces
marchés boursiers sans pleinement renseigner sur la
réalité couverte. Il s'agit maintenant de procéder
à une présentation des caractéristiques des marchés
boursiers émergents en mettant particulièrement en exergue les
BVME en Afrique au Sud du Sahara.
2. Eléments d'identification des Bourses de
Valeurs Mobilières émergentes.
Les marchés qualifiés d'émergents par la
société financière internationale (SFI) et par d'autres
banques internationales comme Citibank, Merrill Lynch et Morgan Stanley
répondent à plusieurs critères de taille,
d'activité et d'organisation. Toutefois des caractéristiques
communes peuvent être soulevées sur la majorité des bourses
émergentes comme :
· Des lacunes dans le fonctionnement et dans la
réglementation ;
· Une taille limitée ;
· Une insuffisance de liquidité ;
· Une forte volatilité des cours ;
· Des taux de rentabilité plus élevés
que ceux des pays développés ;
· Un « Price Earning Ratio » PER4
élevé;
· Une part importante des dix (10) premières
entreprises dans la
capitalisation ;
· Une corrélation entre les rentabilités des
titres et celles du marché très
faible ;
· Un attrait pour les investisseurs nationaux et
internationaux.
En ce qui concerne les Bourses émergentes d'Afrique au
sud du Sahara, elles totalisaient à fin décembre 1998 une
capitalisation boursière de 165 milliards de dollars US dont plus de 80%
étaient réunis par la Bourse de la République Sud
Africaine, [Leslie, 1999]. En effet, la Johannesburg Stock Exchange (JSE) se
distingue remarquablement des autres places du continent par la
négociation de valeurs mobilières autres que les actions et les
obligations. Elle est également une des rares places africaines qui
accueille facilement des investisseurs étrangers. Par rapport aux
caractéristiques spécifiques des BVME
4 Le PER est le rapport entre le cours boursier d'une
entreprise et son bénéfice. Il reflète la croissance des
bénéfices espérée par la bourse.
au Sud du Sahara, la JSE n'apparaît pas comme un bon
exemple. De ce fait les caractéristiques suivantes (tableau 1.3) sont
celles des autres places boursières en Afrique au sud du Sahara..
Le tableau 1.3 (page suivante) montre quatre (4) principales
caractéristiques des BVME au Sud du Sahara qui sont des obstacles
à leur développement. Aux caractéristiques
précédentes, il faut ajouter d'autres traits tels que : les
coûts élevés de l'information, les forts taux de taxation
et l'absence d'instruments de couverture, etc. En dépit de ce portrait
peu attirant des BVME, il faut cependant noter que certaines d'entre elles se
hissent souvent parmi les meilleures places boursières avec
d'exceptionnels rendements. En effet, cela a été le cas de la
Ghana Stock Exchange qui a connu en 1998 la deuxième plus forte hausse
de son indice (plus de 70% de l'indice).
En réponse aux nombreuses difficultés
rencontrées par les bourses précédemment décrites,
de nombreuses propositions mettent l'accent sur la nécessité
d'intégration des économies et des bourses sub-sahariennes.
Tableau 1.3 : Caractéristiques des BVM en Afrique au sud
du Sahara
Caractéristiques
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Causes (non exhaustives)
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Absence de liquidité
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·
·
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Faiblesse des transactions Taille réduite des
marchés
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Volatilité de cours
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·
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La faible diversification des
branches : secteurs miniers, brasseries, agro-business
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·
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L'instabilité politique
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·
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L'insuffisance informationnelle :
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manque de systèmes fiables et efficaces de
règlement et de
livraison, manque de
technologies et de qualification...
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Indépendance vis-à-vis des
bourses
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autres
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·
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Absence de corrélation avec les autres bourses
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Absence d'investisseurs étrangers
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·
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Contraintes réglementaires :
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faiblesse des conventions de
protection des investissements et des épargnants
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·
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Mauvaise organisation générale de
l'économie
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Source : Par nos soins à partir de Bittner [1999] et
Leslie [1999]
L'utilisation de technologies modernes de l'information,
l'assainissement du cadre réglementaire et le développement des
compétences sont aussi proposés pour améliorer la
situation [Bittner, 1999]. Tout marché boursier suit une certaine
évolution liée à son développement avant
d'atteindre sa maturité. Ainsi, Azour [1997], présente les phases
de développement des marchés boursiers émergents.
3. Les principales phases de développement des
marchés boursiers émergents.
L'émergence des marchés financiers est un des
faits les plus marquants de cette dernière décennie, d'autant
plus que les marchés émergents ont réalisé des
performances supérieures à celles des marchés
développés. Néanmoins, malgré leurs avantages
potentiels, ces marchés naissants sont beaucoup plus risqués que
les marchés financiers des pays développés, comme en
témoignent les dernières crises Asiatiques et Russes.
Le développement des marchés boursiers des pays
en développement représente une des modifications les plus
importantes de l'environnement financier international. La
nécessité pour ces pays de limiter le recours à
l'endettement, le recours à de vastes programmes de privatisations, le
développement d'une épargne domestique et l'entrée dans la
mondialisation ont été les facteurs principaux de cette
transformation.
Le décollage de ces marchés est le
résultat de leur puissant retour à l'accès au financement
par les marchés internationaux. Ils ont attiré l'attention des
professionnels et des investisseurs en prenant une part grandissante dans le
monde de la gestion des fonds d'investissements. Ils offrent de nouvelles
possibilités de diversification aux investisseurs internationaux dans
l'allocation de leurs actifs. Et c'est le couple traditionnel «
rentabilité-risque » qui est à l'origine de cette nouvelle
diversification financière internationale. Ainsi, les pays en
développement qualifiés par la communauté internationale
comme des pays émergents ont « payé » par des
rentabilités extrêmement élevées l'attrait des
investisseurs et leur intégration financière.
Même si chaque marché financier émergent
évolue à son propre rythme, les ressemblances qui
découlent de ces évolutions permettent néanmoins de
distinguer quatre phases par lesquelles, selon Azour5 (1997), ces
marchés semblent tous passer avant d'atteindre la phase de
maturité et de stabilité.
La première phase est celle qui rend le marché
boursier comme l'un des moyens de financement de la croissance
économique du pays. Les marchés des valeurs mobilières
apparaissent seulement lorsqu'un pays atteint un certain degré de
5 Azour J.B. (1997) « Marchés boursiers
des pays émergents : une grande diversité dans le
développement », Revue Banque n° 582, Juin.
stabilité économique et politique puisque c'est
à ce moment que les investisseurs deviennent confiants dans le
rôle des marchés. Le choix de ce mécanisme d'investissement
au détriment des dépôts bancaires traditionnels et des
obligations du trésor à court terme reste assez limité
à cause de la petite taille et du volume réalisé sur ces
marchés.
La deuxième phase est caractérisée par
une libéralisation du système financier et par une certaine
crédibilité vis-à-vis de ces marchés. Lors de cette
phase active et volatile, le marché des valeurs mobilières
améliore sa réglementation et modernise son organisation afin
d'attirer les investisseurs potentiels, et de faire face à
l'augmentation du volume des titres traités. Dans cette phase, il existe
toujours des facteurs qui limitent l'intérêt des investisseurs
tels que l'étroitesse du marché et la persistance de contraintes
réglementaires inadaptées.
La troisième phase est celle de l'expansion
c'est-à-dire la phase où le marché offre des
rentabilités stables et surtout moins volatiles. Lors de cette phase,
certains marchés voient l'apparition de mécanismes de transfert
des risques, favorisant ainsi la création d'instruments de couverture
des risques en capital et en change, tels que les contrats à terme et
les actifs conditionnels.
La dernière phase est celle où les
marchés deviennent matures, fonctionnant dans les mêmes conditions
que les marchés développés avec un cadre
réglementaire et institutionnel satisfaisant. A ce stade de
développement, la capitalisation boursière des marchés
émergents dépasse parfois celle des pays riches, et cela
grâce à un très grand nombre de sociétés
cotées, une activité assez élevée et une
liquidité très satisfaisante.
Les stades de développement des marchés boursiers
des pays émergents. > Premier niveau (cas de la Pologne,
Hongrie, Maroc...)
o Nombre limité de sociétés
cotées
o Faible capitalisation boursière
o Grande concentration du marché
o Volatilité assez élevée
o Cadre réglementaire et institutionnels
élémentaires.
> Deuxième niveau (cas du Brésil, Chine,
Chili...)
o Niveau de liquidité convenable
o Grande variété de sociétés
cotées
o Présence d'investisseurs internationaux
o Taille des marchés réduite par rapport à
l'économie locale.
Troisième niveau (cas de la Malaisie, de
Thaïlande, Indonésie...) o Rentabilités stables
o Volatilité plus faible
o Capitalisation boursière en forte expansion
o Mécanismes de transfert de risques et de couverture
adéquats. Quatrième niveau (cas de Hongkong, Corée
du sud, Singapour...)
o Marchés matures avec liquidité suffisante
o Activité assez forte
o Prime de risque convergent vers les niveaux de
l'économie locale.
Source : Azour J.B., 1997
4. Facteurs de développement des marchés
boursiers émergents.
Dans de nombreux pays en développement, les
marchés financiers n'ont pas encore atteint le stade de la
maturité. Les interventions de l'Etat sur les marchés de
capitaux, les restrictions aux transactions courantes ou en capital et la
répression financière sont des facteurs qui limitent le
développement des marchés financiers dans ces pays. En outre, la
détention par l'Etat d'une grande
partie du capital des entreprises limite la progression de la
capitalisation boursière et le développement des marchés
d'actions.
Dans cette sous-section, nous nous intéressons aux
principaux facteurs qui permettent de développer les marchés
financiers des pays en développement. Parmi ces derniers figure la
stabilisation des fondamentaux économiques qui doit être
accompagnée de réformes structurelles pour libéraliser
l'économie. Ces réformes consistent en la
dérégulation des marchés internes (taux
d'intérêts, prix, ...) avec une politique d'ouverture sur les
marchés extérieurs (libéralisation du commerce
extérieur et des mouvements de capitaux). Les programmes de
privatisations font aussi partie des réformes nécessaires
puisqu'ils permettent d'augmenter le nombre d'entreprises qui peuvent
s'adresser au marché boursier. Les interventions de l'Etat, les
restrictions aux transactions courantes qui limitent le développement
des marchés boursiers vont céder place à d'autres facteurs
aussi importants parmi lesquels le changement de politique économique
sous l'égide des institutions internationales.
4.1. Le changement de politique
économique.
A la fin de la crise de la dette qui a frappé
plusieurs économies des pays en développement, des efforts
importants ont été entrepris en vue de stimuler l'épargne
interne et d'accroître aussi bien les investissements que les
exportations. L'objectif est tout simplement de rétablir les
équilibres internes et externes, ainsi que de mettre en place les bases
d'une croissance économique saine et équilibrée. De ce
fait, les politiques économiques adoptées par ces pays
endettés étaient fondées sur une démarche
permettant principalement le financement des secteurs productifs, la
restructuration des entreprises industrielles et le relèvement des taux
d'intérêts sur les dépôts pour encourager
l'épargne. La solidité du système financier exige un
contexte macro-économique stable, un secteur privé dynamique et
un cadre juridique favorisant une bonne gestion des institutions
financières. Ainsi, la mise en place d'un système financier
solide n'est possible que si les principaux agrégats de
l'économie évoluent à un rythme stable et régulier.
La stabilisation macro-économique est
considérée comme une condition préalable
majeure au développement du système financier en
général.
Le changement de politique économique des
autorités publiques, sous l'égide des institutions
financières internationales, est considéré comme l'un des
facteurs les plus importants qui favorisent l'émergence des
marchés financiers dans les PVD. Ces pays ont adopté des
programmes de stabilisation macroéconomique et d'ajustement structurel
le plus souvent établis par des organismes comme le FMI et/ou la banque
mondiale. Ces politiques économiques consistent
généralement à améliorer les fondamentaux
économiques soit par une politique monétaire afin de
maîtriser l'inflation, les taux de change et d'éviter les
dévaluations compétitives qui déprécient les avoirs
des investisseurs étrangers détenus en monnaie locale, soit par
une politique budgétaire qui permet de réduire le déficit
de l'Etat d'où la nécessité de procéder à la
libéralisation du système financier.
4.2. La libéralisation du système
financier.
Les systèmes financiers dans les pays en
développement peuvent être regroupés en deux principaux
types. D'abord, les systèmes financiers dit «
réglementés » dans lesquels la détermination des taux
d'intérêts est fixe et établie de manière
réglementaire. Dans ce cas, le gouvernement est de type
interventionniste et contrôle les banques par une forte
réglementation. En suite, les systèmes financiers dits «
libéralisés » dans lesquels les institutions
financières disposent d'une plus grande marge de manoeuvre et sont en
concurrence avec les autres marchés financiers. Dans ce genre de
système, les taux d'intérêts sont variables et librement
déterminés par les forces de marché.
La plupart des pays en développement sont
caractérisés par des systèmes financiers qui ne sont pas
totalement libéralisés. Et c'est surtout en matière de
libéralisation externe que beaucoup de choses restent à faire. Il
existe encore beaucoup de barrières institutionnelles qui limitent les
possibilités d'investissement comme les règles régissant
le rapatriement en devises des bénéfices et des capitaux par les
étrangers, les règles régissant le degré de
participation des étrangers sur le marché et les règles
formelles ou informelles à
l'égard de la propriété
étrangère des sociétés. La libéralisation
externe consiste à réduire le contrôle sur le transfert des
bénéfices et des capitaux, à permettre aux
étrangers d'offrir des services financiers concurrençant les
établissements locaux (banques, assurances...) et à donner la
liberté aux étrangers d'investir dans le marché financier
tout en assurant une liberté totale de conversion. Cette
libéralisation doit être accompagnée d'une fiscalité
boursière souple et bien sûr d'une libéralisation interne
pour laisser le taux d'intérêt fluctuer librement selon l'offre de
la monnaie.
La libéralisation des marchés de capitaux
permet d'accroître la capacité de financement d'un pays lorsque
l'épargne domestique est insuffisante. En effet,la diversification des
sources de financement contribuent à améliorer la
sécurité des projets d'investissements puisque l'existence des
marchés de capitaux permet une meilleure allocation des ressources.
Cette allocation est basée sur la combinaison et la concurrence des
systèmes de financement intermédiés et
désintermédiés.
Cependant, l'afflux de capitaux peut devenir une source de
fragilité de l'économie réelle. Cela dépendra
notamment du degré de dépendance aux capitaux étrangers et
de la structure de ces derniers, mais aussi des conditions de mise en oeuvre de
la libéralisation financière (réformes financières
et fiscales, choix des mesures de contrôle, etc.).
L'afflux de capitaux dans les pays émergents peut donc
poser le problème de leur gestion. C'est la raison pour laquelle
l'ouverture précipitée des marchés financiers aux capitaux
extérieurs peut entraîner d'énormes conséquences.
Pour ce faire, il faut voir si la structure des marchés financiers est
capable d'absorber des capitaux privés étrangers. Gérard
Marie Henry6 (1998) explique comment l'accroissement des fonds
étrangers peut créer l'effondrement du système financier
d'un pays en développement :
Si les banques proposent les dépôts en monnaie
étrangère pour protéger les investisseurs des pertes
résultant des fluctuations des taux de change, mais que dans leurs
bilans elles enregistrent leurs prêts en monnaie locale, ce sont elles
qui en définitive supportent le risque de change.
6 Gérard Marie Henry (1998) « Les
marchés financiers »,Paris, Synthèse, Armand Colin.
Si les prêts issus de capitaux étrangers vont
principalement à des personnalités bien connues (crédits
privilégiés), l'accroissement des ressources des banques ne peut
que conduire à la détérioration de l'allocation des
ressources et à l'augmentation du risque.
Si les entreprises et les banques n'ont pas formé leur
personnel à mesurer correctement les risques de l'accroissement de leurs
placements, la qualité de leurs portefeuilles d'actifs se verra
réduite.
Si les marchés financiers des pays en
développement proposent des taux de rentabilités très
élevés, les investisseurs étrangers n'hésiteront
pas à profiter au maximum de cette situation et à retirer leurs
fonds et à n'importe quel moment.
L'assainissement à effectuer après une telle
crise financière est particulièrement difficile pour les pays en
développement en l'occurrence les pays d'Afrique puisque leurs budgets
publics sont déjà déséquilibrés et que les
petites entreprises qui réalisent l'essentiel de la production et de
l'emploi n'ont accès qu'au crédit bancaire comme source de
financement. Les entrées massives de capitaux peuvent aussi provoquer
une augmentation excessive de la demande globale et avoir ainsi des
répercussions négatives sur le secteur financier en
général. Cette augmentation de la demande peut se traduire par
des pressions inflationnistes, une appréciation du taux de change
réel et une détérioration des déficits des
transactions courantes.
Les autorités des pays en développement ne
doivent donc pas précipiter l'ouverture de leurs marchés aux
capitaux extérieurs. Ils doivent privilégier une
déréglementation progressive, rationnelle et sélective
puisqu'une entrée massive de capitaux étrangers sur ces
marchés peut avoir des conséquences néfastes
entraînant même l'effondrement de leurs systèmes bancaires
et financiers. Les programmes d'ajustement structurel sous l'impulsion des
institutions internationales permettent d'assure le développement des
marchés boursiers des pays en développement d'où la
nécessité de mettre en place des programmes de privatisation.
4.3. Les programmes de privatisation.
La vague actuelle de privatisation7 dans les pays
en développement est la conséquence du manque de performance des
entreprises publiques. En effet, la majorité des entreprises
publiques8 ont subi de lourdes pertes financières
entraînant pour l'Etat des déficits budgétaires importants.
La recherche de l'efficacité de ces entreprises est subordonnée
à la redynamisation de l'économie et de l'intégration dans
l'économie internationale, à la promotion de l'investissement,
à la hausse de leur compétitivité, à la
réduction du déficit des finances publiques et à la
redistribution des revenus.
Les programmes de privatisation peuvent avoir plusieurs
retombées sur les économies des pays en développement
notamment les pays d'Afrique. Ils permettent d'abord une réduction du
poids de l'Etat dans l'économie en le libérant de l'obligation de
soutien aux entreprises déficitaires et en lui fournissant à
court terme des ressources financières, et ensuite de réaliser le
transfert des entreprises publiques au secteur privé afin
d'améliorer leur gestion et leur compétitivité.
La privatisation permet donc de réduire l'intervention
directe des organismes étatiques dans le processus de la production, de
diversifier le droit de propriété et d'introduire de nouvelles
techniques de gestion des entreprises. Les ressources de l'Etat cessent
d'être l'unique source de financement des entreprises et on voit se
développer progressivement le sens de la propriété
privée, de la libre entreprise et de la concurrence.
Le transfert de la propriété des entreprises
issues de la planification vers le secteur privé est l'une des
conditions principales de la mise en place d'une économie de
marché. Ainsi, le développement du moment de privatisation
conduit généralement au développement d'un marché
boursier. Ce dernier constitue un support primordial pour la réalisation
de certains objectifs assignés aux programmes de privatisation,
principalement la diffusion la plus large possible des actions des entreprises
privatisables.
7 La privatisation est le transfert total ou partiel
d'activités relevant du secteur public au secteur privé.
8 Les entreprises publiques ont été
créées pour investir principalement dans les secteurs
stratégiques de l'économie.
Il existe une forte interaction entre la réussite des
programmes de privatisation et la dynamisation des marchés boursiers. En
effet, la privatisation permet de dynamiser le marché boursier. Ce
dernier peut être considéré comme un canal, soit pour la
mobilisation de l'épargne, soit pour l'attrait de capitaux
extérieurs sous des formes non génératrices de dettes.
De ce fait, les programmes de privatisation sont très
important pour le développement des structures financières
efficaces et d'un marché boursier capable de remplir son rôle
principal c'est-à-dire l'évaluation des entreprises en fonction
de la demande et de l'offre de titres financiers. Les pays en
développement en l'occurrence les pays en Afrique sub-saharienne qui
veulent encourager l'essor de leurs marchés boursiers doivent
impérativement favoriser les politiques de privatisation en vue de
transférer l'épargne placée en obligation vers le
marché des actions. Si la privatisation est considérée
comme un facteur nécessaire au développement des Bourses des PVD,
il y a tout de même lieu de s'interroger sur l'importante création
des marchés boursiers en Afrique ces dernières années.
Section 2. Création des marchés boursiers
en Afrique.
Cette section met en perspectives les raisons qui ont conduit
à une floraison des marchés boursiers en Afrique ces
dernières années. Nous tentons aussi de fournir quelques
éléments de réponses à la question de savoir si un
marché boursier indépendant pour chaque pays d'Afrique est une
solution viable.
1. Les mobiles de la création des
marchés boursiers émergents.
La création des marchés boursiers ces
dernières années est toutefois loin d'être un
phénomène de mode car elle émane de différentes
demandes : d'une part des Etats et des collectivités qui voient dans la
création des marchés boursiers un moyen efficient de mobilisation
et d'allocation de l'épargne et ; d'autre part des entreprises et des
opérateurs économiques qui voient dans ces nouvelles places
boursières un moyen de financement et de placement en adéquation
avec des besoins jusque là non satisfaits. De toute évidence
les
enjeux économiques qui sous-tendent la création
des marchés boursiers sont réels et pertinents. La
littérature économique et des sciences de gestion y répond
par un regain d'intérêt pour le débat sur le rôle des
banques et des marchés financiers dans la croissance économique;
plus précisément de l'opposition entre les banques et les
marchés boursiers. Afin de ramener le débat académique
« sur terre », nombre d' auteurs ont cherché à savoir
comment aider ces institutions à satisfaire pleinement à leurs
objectifs, car les banques et les bourses fournissent des services financiers
importants et non opposés [Demirguc-Kunt et Levine (1996) ; Levine
(1996)]. Ainsi La Porta, Lopez-de-Silanes, Shleifer et Vishny [1997] ont
oeuvré dans ce sens en faisant ressortir l'importance de l'environnement
légal relatif à la protection des investisseurs pour le
développement des marchés boursiers. Par ailleurs, d'autres
auteurs ont mis en évidence l'importance de l'environnement
socioculturel dans le développement des bourses [Beck, Levine et Loayza,
2000. Garretsen et Sterken, 2000].
Les raisons qui ont conduit ces dernières
années à une floraison des marchés boursiers dans le monde
et plus particulièrement en Afrique au Sud du Sahara sont pertinentes,
nous allons maintenant expliquer la création de ces marchés par
un certain nombre de faits qui ont aussi servi de motifs à la
création de plusieurs marchés boursiers émergents (MBE).
Il s'agit de facteurs économiques (niveau du revenu national et niveau
de l'épargne), de facteurs institutionnels (option libérale et de
marché) et de l'inadéquation du système financier existant
[Tchemeni, 1997 ; Grimbert, Mordacq et Tchemeni, 1995]. Nous montrons
successivement comment ces trois facteurs peuvent favoriser la création
d'un marché boursier.
1.1. La croissance économique.
La croissance économique a pour conséquence une
augmentation du niveau de revenu national. En réponse à cette
augmentation du revenu, la consommation croît d'une valeur
inférieure à l'accroissement du revenu [Keynes, 1936]. Ainsi, la
proportion du revenu qui n'est pas consommé constitue une offre nette
d'épargne domestique à la recherche de rentabilité.
Parallèlement, l'augmentation de la consommation et
l'existence d'un potentiel de croissance (cas des pays émergents) ont
pour conséquence l'accroissement des besoins en fonds pour faire face
à l'augmentation induite de la production.
Les agents disposant d'une épargne et les agents en
quête de fonds vont tous se tourner vers le système financier. Les
uns pour y placer leur épargne et les autres pour y lever des fonds.
1.2. Les nouvelles options de politiques
économiques.
Les nouvelles orientations économiques participent
d'une logique : celle de l'adoption d'un système d'économie
libérale. Il s'agit pour l'Etat de se désengager de
l'activité économique, de mettre en place des mécanismes
qui assurent le jeu de l'offre et de la demande, qui encouragent et facilitent
l'initiative privée et qui garantissent les droits de
propriété. Le désengagement de l'Etat du secteur
économique pose d'une part, le problème de la transparence de la
rétrocession de ses participations économiques et d'autre part
entraîne une suppression de ses concours (capitaux de participation ou
subventions) dans les unités (entreprises). Deux interrogations majeures
naissent de cette nouvelle donne, à savoir : premièrement comment
l'Etat peut vendre ses participations en y associant le maximum d'agents
économiques, puisque la nouvelle option vise à encourager le
développement de l'initiative privée (culture d'entreprise) ?
deuxièmement comment pallier les suppressions des concours (capitaux de
participation ou subventions) de l'Etat dans les unités
économiques où il intervenait ? La réponse à ces
interrogations trouve une réponse dans la structure du système
financier. En effet pour vendre au plus grand nombre et permettre aux
unités économiques anciennement financées d'avoir
accès aux capitaux, seul le marché financier offre la solution la
plus appropriée.
Le système financier existant permet-il aux Etats de
mettre en oeuvre cette solution ? afin d'apporter quelques
éléments de réponse à cette question, il nous
apparaît nécessaire de présenter l'inadéquation du
système financier.
1.3. L'inadéquation du système
financier.
Le système financier dans lequel sont nés les
MBE ces dernières années reposait sur les banques (banques de
développement, banques commerciales, banques de dépôts).
Les banques interviennent dans l'activité économique en
collectant l'épargne des agents à capacité de financement
(qui en retour reçoivent un intérêt) pour le placer sous
forme de prêts auprès des agents à besoin de financement
(qui supportent un intérêt qui est le coût du capital
reçu).
La crise de la dette des années 1980 (qui a d'abord
été une crise de liquidité avant d'être une crise de
solvabilité) a eu pour conséquence une forte réduction du
montant des prêts (concours bancaires) et surtout une remise en cause de
la cohérence du système financier. Désormais les
prêts bancaires ne se limitent qu'aux crédits commerciaux et aux
prêts multilatéraux pour le financement des projets
d'infrastructures (routes, retenues d'eau, écoles, dispensaires et
hôpitaux etc.). Alors que dans le même temps les banques
commerciales qui constituent l'ossature du système financier sont en
sur-liquidité et baissent les taux d'intérêt sur
l'épargne. Or la croissance économique a suscité
l'émergence d'une offre nette d'épargne qui ne peut pas trouver
dans un tel système financier une rémunération attrayante.
De plus les besoins de fonds, qui résultent d'une part de la croissance
économique et d'autre part de l'option libérale adoptée,
accentuent le problème de financement de l'économie en
général et celui des entreprises en particulier. Enfin un
système financier bancaire ne peut soutenir durablement l'organisation
des rétrocessions des participations étatiques en assurant une
liquidité aux valeurs mobilières qui peuvent être
émises pour toucher un large public.
Dans ce contexte d'inadéquation du système
financier, la diversification des sources de financement et de placement
d'épargne apparaît comme une nécessité. Cette
nécessité est exécutable dans le cadre de Bourses de
valeurs mobilières(BVM), d'autant plus que les privatisations qui
drainent d'importantes sommes (plus de 23 milliards de dollars en 1992 [Plane,
1996]) assureront vraisemblablement un accroissement de la capitalisation et de
la liquidité boursière.
La croissance économique, les nouvelles options de
politique économique et l'inadéquation du système
financier sont les faits qui ont généralement
précédé la création des BVM sur la dernière
du siècle passé [Tchemeni (1997), Grimbert, Mordacq et Tchemeni
(1995)]. En plus des trois facteurs précédemment cités qui
ont contribué à la création des marchés boursiers
ces dernières années en Afrique au sud du Sahara, on note aussi
les programmes d'ajustements structurels (PAS) sous l'impulsion de la Banque
mondiale et du FMI. Ce sont des programmes qui visent à assainir le
cadre macro-économique et à supprimer les obstacles causés
par l'interférence des Etats dans les opérations de
marché. Le but est de promouvoir une économie de marché
régulée par le jeu de l'offre et de la demande9 ; il
s'agit de la politique de taux de l'ajustement et les privatisations.
1.4. La politique de taux d'ajustement et les
privatisations.
Dans cette sous-section, nous ne présentons pas de
façon exhaustive les programmes d'ajustement structurel, mais nous
mettons en évidence deux points qui catalysent la création d'une
BVM. Ces points sont : la politique de taux et les privatisations.
· La politique de taux de l'ajustement.
La politique monétaire et financière de
l'ajustement prône la levée du contrôle du taux de change et
une monnaie flottante (la dévaluation du FCFA10 en 1994
s'inscrit dans ce souci), afin que les taux reflètent les conditions de
l'offre et de la demande et permettent la liberté de mouvement des flux
des investissements à l'intérieur et à l'extérieur
des pays.
En rapport avec la politique financière du taux
prôné par l'ajustement, le modèle de «
répression financière » de Mc.Kinnon R.I [1988] postule que
l'absence de marché boursier conduit à une prédominance du
secteur bancaire. De ce fait l'intervention de l'Etat est suscitée si
bien que l'on en arrive à des situations où les taux
d'intérêts se forment en dessous de leur niveau
d'équilibre. Une telle situation tend à décourager
l'épargne, d'où réduit le montant de
9 Les questions de l'ajustement structurel sont
traitées de manière exhaustive par Quarco [1990].
10 Franc CFA veut dire le Franc de la
communauté Financière d'Afrique
capitaux destinés au financement. Il en résulte
une situation de sous investissement qui est de nature à
hypothéquer la croissance de long terme.
· Les privatisations.
Dans la logique de l'ajustement structurel, l'Etat doit se
désengager de l'activité économique en
rétrocédant par exemple ses participations au privé. En
rappel, les privatisations :
Favorisent l'émergence d'un tissu financier local
(développement des banques d'investissement et des services
financiers).
Encouragent également l'investissement direct des
non-résidents.
Accroissent la capitalisation et la liquidité
boursière, par conséquent agissent directement sur le
développement des marchés boursiers.
Initialement dominé par les entreprises industrielles,
le mouvement de privatisation a gagné l'ensemble des infrastructures
économiques de base [Plane, 1996]. La situation particulière des
pays Africains n'échappe pas à cette logique et augure d'un
potentiel important d'entreprises à privatiser. Par exemple, en fin
1996, le bilan des privatisations chiffrait le total des sociétés
privatisées ou restructurées à 293 sur un total de 757
sociétés à privatiser dénombrées en 1995
[Fargeas, 1998].
D'une manière générale on note que le
rythme de privatisations demeure faible compte tenu de plusieurs raisons dont
la contestation liée aux bradages des entreprises ou leur
rétrocession dans des conditions jugées peu transparentes. Une
privatisation par le marché boursier serait en mesure de réduire
la vague contestataire, car plus transparente.
Les Bourses Africaines sont très mal
intégrées à l'échelle internationale et les
indicateurs institutionnels et réglementaires du Zimbabwe et du Nigeria
sont proches de 0.6 alors que la moyenne internationale se trouve à
1.1911. Les bourses n'inspirent donc pas confiance et les obstacles
à leur développement, aussi bien du côté de l'offre,
de la demande et des institutions, sont nombreux.
11 Dermirguc-Kunt A. et Levine R. (1996). Les
indicateurs institutionnels et réglementaires sont calculés de
telle façon qu'un niveau élevé indique une parfaite
ouverture du marché des capitaux, une bonne comptabilité et
transmission de l'information par les entreprises ainsi qu'une protection
adéquate des investisseurs.
2. Les obstacles au développement des
marchés boursiers en Afrique
Sub- saharienne.
Nous l'avons tout d'abord observé en Côte
d'Ivoire avec la Bourse Régionale des Valeurs Mobilières
d'Afrique de l'Ouest (BRVM). Initialement prévu pour le 18
décembre 1997, le lancement effectif de la BRVM n'a pas eu lieu avant
fin 1998.
Elle remplace la BVA (Bourse des valeurs d'Abidjan) de la
Côte d'Ivoire et, sous la direction de la BCEAO12, elle est
devenue une Bourse régionale.
La Bourse des Valeurs Mobilières de Douala (DSE) au
Cameroun et la Bourse des Valeurs Mobilières de l'Afrique centrale
(BVMAC) à Libreville au Gabon dont le démarrage, prévu
respectivement en avril 2003 et mai 2003 n'est pas encore effectif.
La BRVM est destinée à être un
marché de placement pour les opérateurs locaux et non un
marché spéculatif. Pourtant, les retards successifs liés
à la mise en place du système central mais aussi à
l'installation des antennes nationales dans chaque pays laissent les
opérateurs économiques sur leur faim et les questions sur la
viabilité d'une Bourse Régionale de Valeurs Mobilières
germent dans certains esprits. Ces obstacles se situent côté tant
de l'offre et de la demande d'instruments financiers.
2.1. Les obstacles du côté de l'offre
d'instruments financiers.
Les entreprises s'appuient sur l'autofinancement, le
financement bancaire ou des emprunts divers comme ceux de la finance
informelle. Les grands chefs d'entreprise ne sont pas habitués à
diffuser l'information financière les concernant et
préfèrent le plus souvent cultiver le secret. Les titres
émis sont détenus par des individus ou des groupes fermés
qui se connaissent entre eux.
D'autre part, les crédits sont souvent
subventionnés ou alloués par le gouvernement et les avantages
fiscaux incitent à l'endettement et non au financement des titres. De
plus, la détermination arbitraire des prix auxquels un
12 BCEAO : banque centrale des Etats de l'Afrique de
l'Ouest.
titre peut être offert sur le marché et
l'omniprésence du gouvernement et qui émet des bons de
trésor, constituent deux obstacles supplémentaires.
Finalement, les lourdes procédures de demande pour
l'émission des titres et la mauvaise compréhension des techniques
financières par les entreprises font que, le rôle du marché
est très faible au niveau du financement local.
Au total, les grandes entreprises, qui sont les seules aptes
à émettre des titres sur le marché financier, ne
représentent qu'un très faible pourcentage de la valeur
ajoutée brute des pays d'Afrique sub-saharienne puisque les petites et
moyenne entreprises sont excessivement nombreuses. Par conséquent,
l'offre de titres reste faible et a du mal à se développer. Il en
est de même du côté de la demande.
2.2. La demande d'instruments financiers.
Le manque d'information et de transparence, l'absence de
marchés secondaires assurant un degré de liquidité
suffisant, les faibles performance du marché boursier sont autant
d'obstacles à la demande de titres de la part des agents
économiques. De plus la faiblesse du système juridique sur les
contrats, la mauvaise protection des investisseurs et les contraintes de
convertibilité des changes et de rapatriement des dividendes n'incitent
pas les agents étrangers à placer leurs fonds en Afrique
sub-saharienne.
Au total, le marché n'inspire pas confiance et souffre
d'un manque de surveillance et de transparence. Leur développement
paraît fortement compromis pour les années à venir
étant donné les efforts institutionnels, juridiques,
économiques et liés aux changements des mentalités
à mettre en oeuvre.
Malgré tous ces obstacles, les pays d'Afrique
sub-saharienne ne cessent de créer les bourses de valeurs
mobilières nationales alors que ceux-ci gagneront en prenant des
initiatives de mettre en place les BRVM.
3. Facteurs d'intégration des marchés
boursiers Africains.
Dans cette sous-section, nous essayons de montrer la
nécessité de mettre en place les bourses régionales au
lieu de chercher à se doter d'un marché boursier pour chaque pays
comme c'est le cas d'une création toute récente dans le
même espace économique en Afrique centrale de deux Bourses de
valeurs ( l'une au Cameroun : Douala Stock Exchange et l'autre à
Libreville : BVMAC ).
En partant du principe qu'un environnement financier solide
est la condition sine qua non d'un « épanouissement » du
paysage boursier Africain, on peut considérer que les facteurs suivants
devraient servir de leçons aux pays Africains : la
régionalisation et la coopération supra régionale.
3.1. Régionalisation.
Compte tenu de l'exiguïté et de la faible
liquidité des marchés nationaux de valeurs mobilières, une
intégration sous forme de bourses régionales conduites de
façon professionnelles apparaît inévitable. Tandis que
l'Union monétaire ouest africaine a déjà fait de premiers
pas concrets en ce sens avec la création de la bourse régionale
d'Abidjan, une telle coopération est au moins envisagée dans la
région de la SADC (communauté de développement d'Afrique
Australe) ainsi que dans la nouvelle communauté Est Africaine en
formation. Pour [Bittner, 1999] , une telle intégration de
marchés partiels générera les expériences de
succès dont on a grand besoin sur le continent et suscitera de confiance
en une coopération régionale plus intensive dans d'autres
domaines.
Les sous régions d'Afrique souffrent d'un manque
important de ressources longues susceptibles d'aider au financement des
activités économiques. On y note un décalage important
entre les besoins et les capacités de financement
sous-régionales. La création d'une bourse régionale des
valeurs mobilières peut à travers les actions et les obligations
qui seront émises, favoriser la mobilisation de l'épargne
intérieure et extérieure nécessaires au financement des
activités économiques. La bourse offre ainsi aux
épargnants de nouvelles opportunités de placements et aux
emprunteurs la possibilité de s'adresser directement aux
épargnants pour financer des activités et leurs investissements.
Dans les pays africains, les investisseurs étrangers se
plaignent souvent des lourdeurs administratives et d'une
absence d'information sur les opportunités d'affaires. La
création des marchés boursiers régionaux (ou Bourses
Régionales de Valeurs Mobilières) peut favoriser cet accès
à l'information via les renseignements qu'elle fournira aux
créanciers et investisseurs étrangers sur les entreprises
cotées ; elle peut ainsi les inciter à acquérir des
actions négociées sur le marché sous-régional. Un
tel système offre des possibilités de diversification des
risques, des liquidités, un emprunt plus important et donc des
investissements plus conséquents. Cela évitera les
investissements modestes, faute d'un partenariat plus large. La création
des bourses régionales peut permettre un rapprochement des
économies de l'Afrique. Une sous région soudée pourrait
mieux coopérer avec des marchés financiers extérieurs et
bénéficier des innovations technologiques. La diversification de
la structure financière peut faire jouer la concurrence. Les
entrepreneurs seront désormais tenus de rendre compte aux actionnaires
qui deviennent co-propriétaires et, ont par ce fait, un droit de regard
sur la conduite de l'entreprise. On fait ainsi appel à l'excellence, ce
qui peut faire jouer la concurrence.
Devant la faiblesse des tissus économiques nationaux
et le nombre réduit des entreprises à coter en bourse, il y a
lieu de se demander si une bourse nationale est une opération rentable
du fait du faible volume des transactions par pays. De tels marchés
financiers ne pourront engendrer des recettes suffisantes pour couvrir ne
serait-ce que les investissements initiaux. On a vu le cas de la Bourse
Tanzanienne où seules deux entreprises privatisées ont
été cotées en deux années d'existence. Quelle force
représentera un marché boursier national et indépendant en
Afrique face aux grands marchés qui sont en construction dans le monde
?
Les Etats d'Afrique au sud du Sahara ainsi que tous les pays
du continent ayant en coeur la création d'un marché boursier
national et indépendant devraient tirer des leçons des
échecs constatés sur les autres places boursières en
Afrique. L'Afrique du sud représente à elle seule 80% de la
capitalisation boursière. La tendance aujourd'hui est d'ailleurs au
regroupement pour lutter contre ces faiblesses. Ces marchés boursiers
africains sont caractérisés par leur petite taille, une faible
diversification des branches d'activités, un volume
restreint des transactions, une concentration sur un petit
nombre de titres (200 au Nigeria, 56 au Kenya, 21 au Ghana, 3 au Malawi et 2 en
Tanzanie contre 3000 à New York), un manque de liquidité et des
systèmes fiables de règlement et de compensation, un manque de
technologie de pointe pour les transactions. Si les pays Africains ont le souci
du développement de leurs marchés boursiers, ils doivent nouer
des coopérations supra régionales.
3.2. Coopération supra
régionale.
Comme l'a montré l'exemple de l'accord de
coopération conclu entre la Bourse du Caire et celle de Madrid, il
existe des marges considérables de coopération entre les
continents. La Bourse de Tunis coopère, elle aussi plus
étroitement avec des experts Parisiens des marchés de capitaux en
vue d'augmenter sa liquidité et son attrait. En plus du «
rattachement » à l'espace Européen, ces efforts pourraient
également porter sur le développement d'une coopération
plus étroite au niveau de la région
méditerranéenne, qui est d'ailleurs souvent
réclamée. Des modèles analogues seraient envisageables
pour des pays anglophones (Ghana ou Nigeria) en liaison avec la Bourse de
Londres. Le chapitre précédent a tenté de fournir quelques
éléments de réponse aux questions posées par la
problématique d'une floraison de marchés boursiers en Afrique
d'une part et d'autre part le souci de chaque pays à vouloir se doter
d'un marché boursier national et indépendant. Il s'agit
maintenant de présenter les sources de financement des entreprises
Africaines.
CHAPITRE 2 : LE RÔLE DES MARCHES BOURSIERS DANS
LE FINANCEMENT DES ENTREPRISES AFRICAINES.
. Au cours de ce chapitre, nous étudions les sources de
financement des
entreprises Africaines. La section (1) examine l'accès
au financement des entreprise Africaines à travers les modes de
financement des PVD (1), les moyens de financement des entreprise Africaines
(2), enfin les rôles de la Bourse par une nouvelle théorie des
institutions (3).
Ce chapitre tente de répondre principalement à
deux questions : quels sont les moyens de financement des entreprises
Africaines ? la finance directe peut-elle se substituer à la fiance
indirecte en raison d'un système bancaire imparfait ?
Nous tentons ainsi de fournir quelques éléments
de réponse à ces questions et, pour ce faire, la section (1)
essaie d'examiner la première question) par une analyse des
différentes sources de financement des entreprises Africaines (2). . La
section (2) tente de répondre à la dernière question : la
finance directe peut-elle se substituer à la fiance indirecte en raison
d'un système bancaire imparfait ? Cette question trouve des
éléments de réponse à travers les
intérêts des marchés financiers (1) et les liens de
complémentarité entre la banque et le marché boursier
(2).
Section 1. L'accès au financement des
entreprises Africaines.
Dans cette section, nous étudions les modes de
financement des PVD (1) à travers les fondements des deux modes de
financement (1.2), la transition vers le système financier (1.2).
Ensuite nous examinons les moyens de financement des entreprises Africaines (2)
: le financement interne (2.1) et le financement externe (2.2).
1. Les modes de financement des P.V.D
Les concepts d'économie d'endettement et
d'économie de marché financier connaissent, en
réalité, une distinction purement conceptuelle,
c'est-àdire qu'aucune économie réelle ne peut satisfaire
pleinement aux conditions de l'un ou de l'autre. Il n'en demeure pas moins
qu'il est généralement considéré
que les Etats-Unis et la Grande Bretagne se rapprochent du
système de l'économie de marché financier qui se fonde sur
les mécanismes de la finance directe. Par ailleurs, le mode de
financement qui domine le tiers monde avant la crise de la dette se rapproche
plutôt du système d'endettement, mais depuis c'est vers le
système de régulation par le marché qu'ils se sont
acheminés.
1.1. Les fondements des deux modes de
financement.
Une économie d'endettement est une économie
dans laquelle les agents économiques à excédent de
financement, généralement les ménages, financent les
déficits des agents à besoin de financement (les entreprises et
l'Etat). La caractéristique de ce système réside dans la
prédominance de la finance indirecte c'est-à-dire le recours
massif des agents à besoin de financement13, « les
entreprises », aux organismes de crédits plutôt qu'au
financement par l'intermédiaire de l'émission boursière.
Compte tenu des besoins en investissements de la sphère productive,
c'est la banque centrale qui se trouve contrainte d'alimenter l'économie
en moyens de financement. Dans un tel système, les taux
d'intérêts sont des taux administrés et non des taux
d'équilibre reflétant l'état du marché. Ils sont
utilisés par la banque centrale pour accroître la quantité
de crédit.
Quant aux caractéristiques du système
d'économie de marché financier, la prédominance de la
finance directe reste la base de tous ses mécanismes. Les entreprises
s'approvisionnent prioritairement sur le marché financier lorsqu'elles
ont un besoin de financement. Elles procèdent à l'émission
de valeurs mobilières qu'achètent les ménages qui
détiennent ainsi leur épargne sous forme de titres, et ne
s'adressent aux institutions d'octroi de crédits que subsidiairement.
L'Etat émet des obligations ou des bons de trésor pour satisfaire
ses besoins de financement. Le marché monétaire est dans ce cas
le lieu de rencontre de l'offre et de la demande de la liquidité de la
part des banques, marchés sur lequel peut intervenir la banque centrale
pour agir sur cette liquidité conformément aux besoins de
l'économie. Les taux d'intérêts s'établissent en
fonction de l'état du marché en reflétant la
disponibilité ou la
13 Dans une économie d'endettement, les agents
à capacité de financement, quant à eux
préfèrent les placements dans les banques aux titres émis
sur les marchés financiers.
pénurie de ressources que connaît
l'économie concernée compte tenu de ses besoins
d'investissements.
1.2. La transition vers le système de
marché financier.
Dans de nombreux pays en développement, le mode de
financement des économies a été essentiellement
basé sur l'intermédiation bancaire. L'aggravation de la crise de
la dette au début des années 1980 a entraîné la
fermeture des marchés internationaux de capitaux envers les emprunteurs
de la plupart des pays du tiers-monde. La pénurie qu'a engendré
cette crise a entraîné de forts taux d'inflation.
Au moment où la nécessité de lutter
contre l'inflation est apparue et que les programmes d'ajustements
structurels14 ont commencé à prendre place, la
politique monétaire devait chercher à maîtriser la masse
monétaire. Or l'encadrement du crédit accompagné d'une
politique du taux d'intérêt bas et à la
sélectivité administrative a conduit à
l'inefficacité de la politique monétaire sur les
déséquilibres l'appareil productif.
Cette inefficacité a entraîné le passage
à une politique monétaire et financière basée sur
la révision progressive à la hausse des taux
d'intérêts. Par ailleurs, cette tendance à la hausse du
taux d'intérêts était devenue urgente compte tenu des
opportunités de placement que proposaient les marchés financiers
étrangers. C'est à ce moment là qu'un début
d'innovation a commencé à apparaître de la part des
trésors publics, des entreprises et des institutions financières.
Il en est résulté un développement des innovations
financières et l'établissement de marchés où
peuvent se former des taux d'intérêts par la rencontre de l'offre
et de la demande. Ces taux d'intérêts reflètent
parfaitement la structure des carences en, ressources (en fonction des
maturités) que connaît une économie nationale dans la
globalité.
Le processus d'évolution vers un système
d'économie de marché financier s'installe progressivement au fur
et à mesure du développement du marché boursier. Ce
dernier permet aux entreprises de trouver des fonds
14 A la suite des recommandations du Fonds
Monétaire International, des programmes d'ajustements structurels ont
été adoptés par la plupart des pays en
développement afin de faire face aux problèmes d'endettement
issus du recours excessif aux capitaux étrangers durant les
années soixante-dix.
nécessaires pour financer leurs investissements
à moindres coûts, de même que les ménages trouvent
des produits de placements plus diversifiés et plus rentables.
2. Les moyens de financement des entreprises Africaines.
2.1. Le financement interne.
Le financement interne de l'entreprise trouve ses origines
dans les ressources exceptionnelles résultant d'opérations sur le
capital menées par l'entreprise : cessions d'immobilisations (notamment
de constructions ou de terrains), cessions de participations dans des filiales
qui n'entrent plus dans la stratégie définie par les dirigeants
de la firme. Le financement interne peut tout de même être
dégagé par l'activité courante de la firme après
que celle-ci ait rémunéré l'ensemble de ses stakeholders
(parties prenantes).
· L'autofinancement.
Le financement interne ou autofinancement a une composante
normale et exceptionnelle. La composante normale est au sens strict de
l'autofinancement ; elle est habituellement constituée par la dotation
aux amortissements et le bénéfice net non distribué. Son
niveau est fonction des charges qui viennent en réduction de dividendes
adoptée par les propriétaires de l'entreprise. La seconde
composante du financement interne provient des ressources exceptionnelles
résultantes d'opérations affectant le patrimoine : cessions de
biens meubles et immeubles ou de participations etc. Il s'agit en fait
d'opérations de désinvestissement, par conséquent leurs
flux ne peuvent qu'être conjoncturels.
L'autofinancement en général, est la source
privilégiée de financement des entreprises [Myers et Majluf,
1984]. La raison généralement avancée est la
disponibilité immédiate des ressources, leur usage sans aucune
condition restrictive et, surtout pour le dirigeant d'entreprise ou
l'obligation de révélation de l'information sur la situation
financière de l'entreprise. Toutefois l'autofinancement est non
seulement un frein à la mobilité de l'épargne d'un secteur
à un autre, mais est rarement suffisant pour couvrir tous les besoins de
financement des entreprises [Ginglinger, 1991 et 1997].
Le financement interne dégage d'énormes
avantages pour les dirigeants de l'entreprise : disponibilité,
flexibilité, absence de contrôle explicite par les pourvoyeurs de
capitaux.
Le financement interne ne peut assurer de façon
suffisante le financement de la croissance de l'entreprise. Finalement
l'entreprise se trouve obligée de se tourner vers le financement
externe.
2.2. Le financement externe.
A partir du moment où l'autofinancement n'a pas pu ou
n'est pas suffisant pour répondre aux besoins de l'entreprise, le
financement externe devient un passage obligé. On peut alors soit faire
appel à l'endettement qui est une source dont la durée de vie est
strictement limitée et qui ne confère pas aux pourvoyeurs de
fonds le droit de regard sur la gestion de l'entreprise soit recourir aux
capitaux propres.
· Les banques.
La banque intervient dans le financement des entreprises en
offrant des dettes et des services financiers : c'est la fonction
d'intermédiation de la banque. Celle-ci est importante pour les pays
d'Afrique au Sud du Sahara car il n'existait pas, et cela jusqu'à un
passé récent, un marché boursier dans bon nombre de ces
pays15. Si bien que, en matière de couverture des besoins de
financement de l'économie en général et
particulièrement pour les entreprises, le monopole des banques est
quasi-total. Pour les Etats il faut souligner les aides, les dettes et les
financements spéciaux des projets émanant des banques centrales :
la BEAC (banque des Etats de l'Afrique centrale), la BOAD (banque ouest
africaine de développement), de la BAD (banque africaine de
développement) ; on note aussi ceux émanant de l'étranger
tels que la Banque mondiale, du Fonds Monétaire International, du Fonds
Européen de développement, de l'Union Européenne etc.
Cependant le monopole des banques n'est pas synonyme de
couverture adéquate des besoins de financement de l'économie et
particulièrement de ceux des entreprises. En effet dans leur fonction
d'intermédiation, les banques
15 A titre d'exemple on peut citer la zone UEMOA
(union monétaire et économique ouest africaine) ou encore la zone
CEMAC (communauté économique et monétaire de l'Afrique
centrale)
consentent deux types de prêts : à court terme
(un an au plus) et à moyen ou long terme. Les particuliers sont
éligibles aux prêts de court terme (découverts), et aux
prêts de long terme (crédit de trésorerie et de
fonctionnement) [Merchez, 1998]. Outre les banques centrales, d'autres
institutions du secteur financier participent au financement des entreprises
africaines :
· Les banques commerciales.
Les banques commerciales sont les principaux fournisseurs
officiels des services financiers au monde des affaires. Elles servent
d'intermédiaires financiers en mobilisant les dépôts et
l'épargne pour les céder à titre de prêts personnels
ou de prêts aux entreprises. Les grandes banques commerciales s'occupent
de divers services financiers : non seulement l'épargne, les
dépôts, les crédits, mais aussi les transferts de
l'étranger et les opérations de change, ainsi que l'assurance,
l'acquittement de factures etc.
Les banques commerciales privées, comme toutes les
entreprises, sont mues par la recherche du profit. Cela revient en terme
bancaire, à maximiser son produit net bancaire, c'est-à-dire le
total des intérêts et commissions perçues sur les banques
et la clientèle notamment au titre de la rémunération des
dépôts. En agissant sur les produits des emplois et sur les
coûts des ressources, les banques atteignent leur objectif. En effet agir
sur les produits des emploi pour les banques consiste à jouer sur deux
vecteurs : augmenter le volume des emplois sur la clientèle saine d'une
part et, limiter les risques pour éviter d'avoir ultérieurement
à constituer des provisions pour créances douteuses d'autre part.
Pour être conforme à ce principe, les banques sélectionnent
leur clientèle en tenant compte de leur capacité, de la structure
du personnel de la direction du crédit de la banque et des
opportunités du marché interbancaire. La capacité de la
clientèle est évaluée par son autonomie financière
et la capacité de la gestion [Merchez, 1998]. Tandis que l'autonomie
financière s'évalue par l'importance des fonds propres par
rapport au total du bilan, par rapport également aux immobilisations,
mais aussi par l'importance du fonds de roulement16.
16 Le fonds de roulement est le solde qui
représente la différence entre les ressources permanentes
(capitaux propres et ressources assimilés + dettes et ressources
assimilés) et les actifs immobilisés du bilan. La norme est un FR
positif, dans ce cas il y a suffisamment de ressources de long terme pour
couvrir des emplois de court terme ayant un caractère permanent.
En ce qui concerne le fonds de roulement (FR) requis, il est
recommandé par celui du besoin de financement de l'exploitation ou
besoin en fonds de roulement (BFR)17. Une insuffisance en FR
amène la banque à exiger de l'entrepreneur ou des actionnaires ou
associés des rapports complémentaires en fonds propres
(augmentation de capital ou en comptes courants associés
bloqués), étant entendu que la rentabilité de l'affaire ne
fasse pas ressortir des faiblesses rendant l'avenir de l'entreprise
préoccupant. Autrement l'entreprise doit présenter en plus une
surface acceptable (l'endettement ne doit pas excéder les fonds propres)
et, doit être d'une rentabilité jugée satisfaisante en
comparaison avec d'autres entreprises concurrentes du même secteur.
L'insuffisance du fonds de roulement et l'incapacité des entreprises
à augmenter leurs capitaux propres sont les étapes majeures au
cours desquelles le dossier de crédit est arrêté. En effet,
l'augmentation des fonds propres indispensables pour la plupart des entreprises
confrontées à l'absence d'un marché des actions.
Une fois la question du fonds de roulement
dépassée, la banque examine la qualité de la gestion par
la structure des charge (frais de personnel et frais financiers) et par la
réalité du bénéfice (celui-ci doit être
généré par l'exploitation courante et non par des facteurs
exogènes ou temporaires, tels que les plus values de cessions, gains de
changes ou les sous amortissements des immobilisations etc.). La
non-satisfaction de ces conditions aboutit à l'exclusion de certains
clients, mais paradoxalement la satisfaction des mêmes conditions
n'engendre pas l'octroi systématiquement du crédit. En effet, les
banques n'ont pas d'obligation de faire du crédit à leurs clients
sains si la structure du personnel de leur direction de crédit ne permet
pas de supporter une augmentation d'un éventuel volume des concours,
surtout lorsque les clients sont de petites affaires ponctuelles. De même
les banques refuseront d'octroyer du crédit lorsque les
opportunités du marché interbancaire sont plus lucratives.
Cette brève présentation de l'action sur les
emplois montre les difficultés qui se présentent aux entreprises
désireuses d'obtenir un financement. Toutefois le fait que les banques
soient des entreprises ne justifie pas toute la politique de
17 Le BFR est la différence entre les
actifs circulants et le passif circulant. Lorsque ce solde est positif on parle
de besoin de financement et lorsqu'il est négatif c'est un
déficit de financement donc un pool de ressource. La norme est un BFE ou
BFR positif.
crédit orientée sur le court terme. En effet
l'impact des normes bancaires et des mesures de prudence auxquelles sont
soumises les banques commerciales sont des aspects non négligeables de
la politique bancaire de financement des entreprises. Par prudence et par souci
de respect de la réglementation bancaire, les banques se limitent au
crédit de court terme lorsqu'elles ne placent pas leur excédent
de trésorerie sur le marché monétaire et rarement dans les
participations. Les mesures de prudence tirent leurs raisons d'être dans
le fait que l'octroi de crédit par les banques est créateur de
monnaie.
En effet le phénomène création
monétaire est indissociable du crédit Keynes, [1936].
Prêter de l'agent pour les banques entraînerait une création
de monnaie (les dépôts en banque servent d'assise aux
crédits qui engendrent la création de monnaie). Par
conséquent l'octroi incontrôlé du crédit engendre
une création anarchique de monnaie. Il en résulterait des
distorsions des déséquilibres économiques, à
commencer par l'inflation, qui engendreraient une baisse du pouvoir d'achat de
la monnaie à l'intérieur du pays, mais aussi à
l'extérieur avec une tendance à la dépréciation de
la monnaie nationale par rapport à une monnaie de
référence (l'Euro depuis janvier 200218). Afin
d'éviter de telles conséquences, l'essor des crédits par
les banques est limité par les autorités monétaires. Ainsi
les banques Africaines définissent un certain nombre de règles
dont : n'octroyer des crédits qu'aux clients jugés solvables ;
lier le volume des demandes de crédits de la clientèle à
l'évolution de la conjoncture par le biais du respect des seuils minima
de ratios de gestion, de fixation de plafonds de progression d'encours
(encadrement des crédits), la constitution des réserves
obligatoires non rémunérées représentant une
certaine proportion des dépôts à vue et à terme et,
incitant les banques à arrêter la croissance de leurs ressources
clientèle qui sont les assises de crédits nouveaux etc.
A la lumière de cette présentation, une
conclusion se dégage : les banques Africaines en général
et les banques en Afrique au sud du Sahara en particulier ne peuvent pas
être une source de financement appropriée d'où la
nécessité de recourir à d'autres sources de financement
telles que le crédit interentreprises.
18 La parité est de 1 Euro = 655,956995
FCFA.
· Le crédit interentreprises.
Bien qu'il soit beaucoup plus développé dans
les pays du nord, le crédit interentreprises existe aussi dans les
entreprises des pays en développement en l'occurrence dans les
entreprises Africaines et il serait assez risqué en l'absence de
statistiques de faire une estimation de son importance. Néanmoins, on
note que pour une entreprise quelconque le crédit interentreprises
représente un apport net de ressources si le montant des crédits
consentis à ses clients est inférieur à celui
accordé par ses fournisseurs.
Dans la relation de crédit interentreprises il ne peut
y avoir de crédit s'il n'existe pas de confiance entre les partenaires.
Le plus souvent la confiance s'installe lorsqu'il existe une garantie (caution
ou intermédiaire financier) capable de palier, à
l'échéance, l'incapacité du débiteur. Autrement,
comme la date d'échéance de la dette fournisseur est moins une
variable aléatoire que celle des créances clients
(problèmes de recouvrement), une tierce personne. Il s'agit en
général d'un établissement financier ou d'une banque qui
apporte ce concours ponctuel de court terme moyennant une
rémunération.
Le crédit interentreprises reste alors lié aux
concours ponctuels de court terme des établissements financiers ou
bancaires qui dans la majorité des cas permettent la bonne fin du
crédit.
· Les actionnaires d'origine.
Ils participent au financement de leurs entreprises en
apportant des capitaux propres et, occasionnellement des dettes. Toutefois dans
nombre de cas les actionnaires d'origine arrivent à couvrir
difficilement les besoins de croissance de leurs entreprises. Ils ont soit des
moyens extrêmes limités, soit par souci de diversification ils
préfèrent ne pas tout investir dans une seule affaire.
· Les établissements de crédit-bail.
Le crédit- bail ou leasing permet de financer par
dettes l'acquisition d'immobilisation sans aucune garantie préalable et
en fonction des cash-flows générés par ladite
immobilisation. La société de leasing reste propriétaire
de l'immobilisation pendant l'exploitation jusqu'au remboursement de la
dette.
Le crédit-bail est une source de financement qui offre
des avantages certains pour les PME qui le plus souvent ont des
difficultés à fournir des garanties aux banques pour la demande
de crédit à des fins d'acquisition d'immobilisation ou
d'investissements. Toutefois, les taux d'intérêts appliqués
au crédit-bail restent supérieurs à ce que
prélèvent les banques sur les avances de trésorerie et les
prêts à court terme. La raison est que le marché des
capitaux que doit utiliser les sociétés de crédit-bail
pour financer leurs opérations est peu développé, ce qui
renchérit par conséquent le coût de leurs ressources
[Popiel, 1995]. Néanmoins le crédit-bail malgré son
apparition récente et son coût élevé connaît
une activité relative par rapport au capital risque.
· Le capital risque.
Le capital risque est un financement temporaire sous forme de
capital action ou de prêts, dont la rentabilité est liée
aux profits et qui assure un certain contrôle sur la gestion. Les
entreprises africaines peuvent disposer de cette possibilité d'apport en
capitaux offert par ce genre de sociétés. Le capital risque est
encore embryonnaire et son développement est conditionné à
un environnement qui favorise l'initiative privée, un régime
fiscal qui facilite les opérations de capital risque, un
mécanisme approprié pour absorber les pertes, et une « porte
de sortie », par exemple une bourse de valeurs mobilières. Ces
conditions expliquent en partie pourquoi ce mode de financement demeure non
opérationnel. Toutefois, à ces conditions s'ajoutent des freins
sociologiques d'une grande importance, tel la non prédisposition du chef
d'entreprise à ouvrir le capital de sa société à
des particuliers ou des entités qu'il ne connaît pas
personnellement [Popiel, 1995].
Le capital social a sa place dans le financement des petites
entreprises mais ne peut que combler un « vide » qu'on pourrait
appeler déficit de capital social, en vue d'un équilibre
adéquat entre la dette et ledit capital social. La plupart des
investisseurs en capital-risque n'investiront pas essentiellement dans de
petites entreprises pour lesquelles les possibilités de rendement
élevé sont relativement limitées, les risques
élevés et les possibilités de retrait très
difficiles. Dans les pays occidentaux, les gros investissements sont
réalisés dans de petites entreprises afin de financer la phase de
démarrage, la mise au point de
produits ou l'expansion ou pour préparer une
entreprise à une offre publique, généralement, dans les
domaines novateurs ou de haute technologie.
Dans le contexte africain, il est difficile de trouver de
tels cas, bien que les avantages comparatifs du continent liés à
une faible intensité technologique et aux secteurs des services à
vocation exportatrice puissent déboucher sur des possibilités de
capital-risque. Les agro-industries constituent un domaine qui pourrait
également offrir des possibilités.
Il existe une demande et un marché potentiels de
capital-risque en afrique. Toutefois, les conditions de l'offre du
capital-risque (forte valeur ajoutée et rendement élevés
dans un délai relativement court, en échange d'un niveau de
risque élevé) ainsi que l'acceptation d'une participation
(nécessité de partager la propriété) sont
susceptibles de limiter le nombre de bénéficiaires de ces projets
dans un avenir proche.
· Les titres de créances négociables
(TCN).
Le marché des capitaux offre deux types de financement
aux entreprises : des dettes et des capitaux propres. Les dettes sont
négociées sur deux différents marchés : le
marché monétaire qui est le segment de court terme du
marché des capitaux et le marché obligataire le segment de long
terme. Ce dernier marché et le marché de capitaux existent bien
en Afrique ; à titre d'exemple ces deux marchés sont connus en
Afrique de l'ouest depuis 1998 sous l'appellation de Bourse Régionale de
Valeurs Mobilières (BRVM). Les obligations sont des titres de
créances émises par des collectivités du secteur
privé ou public. Elles peuvent être des obligations classiques
à taux fixes ou variables ou des obligations à taux
révisables.
Le marché obligataire permet de mettre en relation des
agents économiques ayant un besoin de financement par dettes à
long terme, et des intervenants disposant de liquidités à placer
à long terme avec un risque réduit. L'évolution
récente du marché obligataire est caractérisée par
une croissance des émissions et par une explosion des formes
d'emprunts.
Le financement obligataire intervient dès lors que
l'autofinancement se révèle insuffisant pour assurer le
financement de l'entreprise et donc sa croissance (augmentation de production,
rachat d'entreprises). Cette forme de
financement (financement obligataire) s'inscrit bien dans la
politique à terme de l'entreprise. L'apport obligataire est loin
d'être négligeable pour l'économie en général
et particulièrement pour les entreprises. Néanmoins il faut noter
la faiblesse du nombre d'émetteurs, toute chose qui permet de dire que
le recours aux obligations ne touche qu'une infime minorité
d'entreprises.
Le marché monétaire comporte deux compartiments
: le marché interbancaire réservé aux professionnels
bancaires et, le marché des titres de créances négociables
qui propose aux entreprises industrielles et commerciales, des actifs
standardisés. Ce compartiment est une alternative de financement pour
les entreprises non bancaires. Pour se financer sur le marché
monétaire, les entreprises émettent des actifs financiers de
court terme qui sont des billets à échéance
représentant un droit de créance portant intérêt.
Les titres émis sont négociables sur un marché
réglementé, d'où l'appellation de titres de
créances négociables (TCN).
Les billets de trésorerie constituent un mode de
financement nouveau dont l'utilisation s'inscrit dans la gestion de
trésorerie des entreprises. Financement non bancaire mettant en relation
directe les entreprises soucieuses de se procurer de fonds et celles qui
disposent d'excédents à placer ; il s'agit d'un instrument
réservé aux grandes sociétés car les tentatives
d'ouvrir le marché aux petites entreprises ne semblent pas
couronnées de succès. Les billets de trésoreries
correspondent à un dépôt à terme négociable
constitué par une entreprise au profit d'une autre ; ils ne sont ni des
valeurs mobilières ni des effets de commerce.
L'analyse des modes de financement montre leur
inadéquation dans la couverture des besoins de financement de long terme
des entreprises. En effet, l'autofinancement est par essence limitée et
ne saurait couvrir tous les besoins de financement des entreprises. De
même les actionnaires ne peuvent pas continuellement couvrir l'ensemble
des besoins de leurs entreprises. Du moins, s'ils le peuvent, la prudence les
inciterait à se diversifier en investissant dans d'autres projets. La
banque, qui constitue le principal mode de financement, n'est pas de nature
à prêter facilement aux riches encore moins aux pauvres petites
entreprises. Toutefois, lorsqu'elle accepte de prêter, le coût du
crédit élevé et son échéance n'excède
pas l'an. Le crédit inter entreprises, dont la mise
en oeuvre et la survie impliquent une banque pour la bonne
fin des opérations, n'est pas non plus facilité par la
nécessité des garanties et le coût élevé du
service bancaire. Le financement des entreprises par les établissements
financiers spécialisés constitue aussi une part marginale dans la
couverture des besoins de long terme. Les établissements de
crédit-bail parce qu'ils sont encore récents et l'absence d'un
marché boursier a longtemps handicapé le recyclage de
l'épargne en Afrique au sud du Sahara.
Enfin le capital risque parce qu'il est embryonnaire et
cherche ses marques dans un milieu où les freins sociologiques ne sont
pas de nature à faciliter l'admission des personnes à son
initiative. Les titres de créances négociables sont
également marginaux dans le financement et encore limités
à un cercle spécifique d'agents économiques.
Les limites des moyens de financement des entreprises
africaines dans la couverture des besoins de moyen et long terme sont
évidentes. La finance directe est-elle une solution pour faire face
à l'inadéquation de ces modes de financement et surtout de la
finance indirecte en raison d'un système bancaire imparfait ?
3. Rôles de la bourse : une lecture par la
nouvelle théorie des institutions.
Dans cette sous-section, nous utilisons les rôles de la
bourse en général pour montrer comment elle participe à la
réduction des coûts de transactions. Les rôles de la bourse
que nous utilisons sont ceux du marché financier tel défini par
Fabozzi, Modigliani et Ferri [1994]. Ces auteurs intègrent explicitement
les notions de coûts de transactions utiles pour notre analyse. Ils
définissent trois rôles pour le marché financier : la
liquidité des valeurs mobilières et la réduction des
coûts de transactions ; la rencontre des offreurs et des demandeurs de
titres.
3.1. la liquidité des valeurs
mobilières et la réduction des coûts de
transactions : coût de recherches et coût de
l'information. Ici, nous intégrons la réduction des coûts
de transactions et d'information, liés à la mise en relation
entre offreurs et demandeurs de titres en l'absence du marché boursier.
Il s'agit
des frais liés à la rémunération
des capitaux levés et des intermédiaires (coûts explicites)
d'une part et, du temps passé à rédiger les contrats,
rechercher une contrepartie et évaluer un projet ou l'adéquate
utilisation des capitaux élevés, etc. (coûts implicites)
d'autre part.
3.2. La rencontre des offreurs et des demandeurs de
titres .
La rencontre de l'offre et de la demande renvoie aux
fonctions de mobilisation et d'allocation de l'épargne. De ce point de
vue, le marché financier favorise l'émission publique des valeurs
mobilières pour le financement des investissements. En ce sens, le
marché boursier définit un support institutionnel qui fixe les
règles régissant l'émission et les transactions
(achat/vente) des valeurs mobilières pour l'ensemble des acteurs. En
l'absence d'un tel cadre institutionnel pour la rencontre entre l'offre et la
demande de titres, il est difficile de mobiliser efficacement l'épargne
et de l'allouer dans un investissement.
En effet les coûts de mobilisation et d'allocation de
l'épargne sont plus élevés parce que l'activité
sous-jacente implique, pour un agent à besoin de financement,
d'énormes transactions : la recherche d'information sur les
épargnants, les négociations particulières avec chaque
épargnant et la rédaction d'autant de contrats qu'il y a de
contreparties dans l'hypothèse d'un dénouement heureux pour
l'agent à besoin de financement. Par conséquent la mobilisation
de l'épargne et son allocation nécessitent la présence
d'agents spécialisés comme les banques, les établissements
d'épargne ou les bourses.
Car ces intermédiaires étant
spécialisés dans cette tâche réalisent les
économies d'échelle qui réduisent les coûts de la
mobilisation et de l'allocation de l'épargne d'une part ; et les
épargnants sont plus sécurisés en renonçant
temporairement à leur épargne aux mains de tels
intermédiaires, dont ils ne peuvent vérifier la
crédibilité et surveiller efficacement l'utilisation de leur
épargne.
Le gain des économies d'échelle
réalisé par les intermédiaires dans la collecte de
l'épargne et la réduction du coût de l'allocation de
l'épargne est un important aspect sur lequel il convient de revenir. En
effet ces intermédiaires n'ont pas la même politique de
rétrocession de l'épargne collectée auprès des
agents à capacité de financement. Les banques
et établissement assimilés font uniquement des prêts,
tandis que les bourses permettent de lever des capitaux et quasi-capitaux
propres et, d'émettre des emprunts. Les coûts des prêts
bancaires et des emprunts obligataires, de même que le coût des
capitaux propres, sont également différents. Lorsqu'il n'existe
que les banques, les rapports de forces dans l'allocation de l'épargne
sont en leur faveur. Celles-ci peuvent, dans ce cas, prendre en otage un agent
à besoin de suppression de financement en le spoliant des gains de son
activité, car la menace de suppression de financement l'incite à
obtempérer aux désirs des banques[ Rajan, 1992]. Toutefois, en
présence d'un système financier diversifié, la
possibilité de diversification des sources de financement pour les
agents à besoin de capitaux fait jouer la concurrence, ce qui a pour
conséquence la baisse des coûts de financement bancaire [Pagano,
Panetta et Zinagles 1998]. La nécessité d'une diversification des
sources de financement se présente ainsi comme une
nécessité dans la réduction des coûts du capital.
Il est également important de revenir sur la
réduction des coûts de vérification pour les
épargnants, d'un quelconque agent en quête de capitaux. Il est
difficile et coûteux pour un épargnant de collecter et traiter
l'information sur plusieurs agents à besoin de capitaux. Par
conséquent, pour minimiser les risques, il est préférable
pour un épargnant de ne pas investir (il en résulte une
allocation sous optimale des ressources). Cependant il est plus aisé
pour les intermédiaires spécialisés d'exercer cette
fonction parce qu'ils disposent de plus d'expertise et de pouvoir qu'un petit
épargnant. Les banques parce qu'elles sont très proches des
agents à besoin de capitaux, peuvent facilement assurer ces tâches
[Stiglitz, 1985]. Toutefois les banques peuvent abuser de cette position, si
bien que des épargnants à besoin de capitaux, pour
réaliser de nouveaux projets, vont préférer y renoncer. Il
va en résulter un sous investissement et une allocation non optimale des
ressources.
En présence d'un marché boursier, la
possibilité de tirer profit de l'information privée incite
à sa recherche, toute chose qui la rend rapidement publique et favorise
une meilleure allocation de l'épargne [Kyle, 1984]. De plus les menaces
de prise de contrôle hostile qui pèsent en permanence sur les
entreprises cotées et la possibilité d'indexer la
rémunération des gestionnaires
au cours de bourse des titres sont des aspects qui
contraignent à une bonne gestion de l'entreprise et des capitaux
levés [Stein (1988) et Jensen et Murphy (1990)].
Les rôles de la bourse, précédemment
étudiées, ont mis en exergue la rencontre des offreurs et des
demandeurs des titres, renvoyant aux fonctions de mobilisation et d'allocation
de l'épargne. Mais pour savoir si elle a pleinement joué son
rôle, il convient d'examiner si le financement par les titres peut se
substituer à la finance indirecte en raison d'un système bancaire
imparfait.
Section 2. La finance directe peut-elle se substituer
à la finance indirecte ?
Comme cela a été vu à la section
précédente, les banques n'ont pas pu répondre aux attentes
des entreprises et donc à leur financement.
Dans cette section nous examinons si le marché
boursier peut assurer ce rôle en répondant aux questions suivantes
: quel est l'intérêt de la finance directe (1) ? de quelle
façon peut-elle se substituer à la finance indirecte en raison
d'un système bancaire imparfait ? Cette question est examinée
à travers les liens de complémentarité entre la banque et
le marché boursier (2) ; nous mettons un accent sur l'ultime stade de
développement financier (2.1) et les imperfections sur les
marchés financiers (2.2).
1. Intérêt des marchés boursiers
émergents.
Tout d'abord, la vraie création de richesse ne se
situe pas en Bourse, elle se situe dans les entreprises dans le sens où
l'investissement productif est supérieur à l'investissement
spéculatif en termes de croissance. Il semble donc important de rappeler
que la raison d'être d'un marché boursier est de canaliser
l'épargne vers les entreprises en permettant le développement des
émissions nouvelles d'actions et d'obligations. Le marché
boursier doit également, pour réussir sa mission, attirer
l'épargne stable, celle à la recherche d'un placement à
moyen et à long terme. Le rôle du marché apparaît
très proche de celui des banques. Il s'agit de financer les
éventuels investissements et permettre aux économies d'atteindre
des niveaux de croissance plus importants.
L'intérêt principal des marchés
émergents se situe au niveau de la diversification des portefeuilles
mondiaux (ce qui présuppose une facilité d'accès sur le
marché pour les investisseurs étrangers) et non au niveau des
levées de capitaux pour les entreprises locales. Les placements sur ces
marchés ne sont pas uniquement motivés par des
considérations de rendement mais également par des objectifs de
réduction de risque19. D'autre part, leur
développement n'est pas une réponse évolutionnaire aux
forces du marché mais plutôt le fait des gouvernements, qui ont
joué un rôle actif dans les programmes de privatisations et de
libéralisation des mouvements de capitaux.
Par ailleurs, au niveau macroéconomique, les
marchés permettent d'attirer l'épargne étrangère et
d'aider les pays à devenir indépendants des taux
d'intérêts internationaux qui les exposent à une variation
du montant du service de la dette quand ils sont élevés.
Dans l'analyse des deux modes de financement possibles - l'un
direct et l'autre indirect - la question la plus souvent retenue est de savoir
si l'un des systèmes est supérieur à l'autre. Le mode de
financement est en effet susceptible d'affecter à la fois le volume et
la nature des investissements ainsi que la croissance.
Tout d'abord, la finance par les titres a l'avantage de
garantir des liquidités et de contrecarrer la pénurie de capital
dans les pays où les prêts bancaires sont limités à
certains secteurs où se font des taux d'intérêts
élevés. De plus, on associe le marché à une
meilleure discipline financière des entreprises, les actionnaires et les
groupes financiers ayant un droit de regard et le marché faisant planer
la menace de rachat ou de prises de participations.
Néanmoins, le marché décourage les
investissements à long terme (souvent plus risqués) car les
firmes découragent des rendements financiers à court terme pour
satisfaire les actionnaires. En effet, les relations étroites et
anciennes entre les entreprises industrielles et les banques sont
découragées en présence du marché alors qu'elles
permettent d'effectuer des investissements en recherche et développement
à plus long terme. L'intermédiation financière a
19 Même en diversifiant considérablement
un portefeuille national, il n'est pas possible d'éliminer le risque de
marché. L'adjonction de valeurs étrangères, même
à plus haut risque, à un portefeuille uniquement national
réduit le risque total du portefeuille dès lors que la
corrélation entre ces <valeurs et le marché national est
faible.
l'avantage de réduire le risque concernant notamment
le caractère révocable des engagements.
Si les désavantages de la banque existent, les
avantages du marché n'ont pas été prouvés. Mais, il
existe deux modes de financement étant souvent présents dans une
même économie, la question essentielle est de savoir s'il existe
des liens de complémentarité entre la banque et le marché
?
2. Existe- t-il des liens de
complémentarité entre la banque et le marché ?
L'analyse des liens existant entre la banque et le
marché montre qu'il existe une complémentarité entre la
banque et le marché. Autrement dit, la finance directe a du mal à
se substituer aux financements bancaires dans le sens où
l'efficacité de ces deux types de finance est liée. Le
marché boursier d'un pays n'a de chances de se développer que
s'il existe des structures bancaires adéquates et propres à
soutenir son évolution.
2.1. Ultime stade de développement
financier.
Les tenants de la libéralisation financière
n'opposent pas le développement bancaire et le développement des
marchés financiers.
Les différents indicateurs de développement des
marchés boursiers et des intermédiaires bancaires calculés
par King et Lévine [1996] sont fortement corrélés. En
général, une structure bancaire fragile va de pair avec un
marché peu liquide, étroit, volatil et mal intégré
à l'échelle internationale. Les auteurs concluent qu'il n'y a pas
lieu d'opposer le développement des marchés boursiers à
celui du secteur bancaire; les marchés financiers et les banques offrant
des services financiers différents, ils stimulent tous deux et
indépendamment, la croissance.
Par ailleurs, l'expérience prouve qu'un secteur
bancaire raisonnablement efficace est nécessaire au développement
des marchés des titres. Tout d'abord, le système bancaire
contribue au développement du marché en fournissant du
crédit aux participants et favorisant ainsi les échanges de
titres et la liquidité du marché.
De plus, les banques ont des acteurs importants sur ces
marchés auxquels on associe souvent une fonction régulatrice.
A l'inverse, un faible système bancaire
nécessitant une restructuration, une recapitalisation contraint le
développement économique et celui du marché. L'effort pour
développer des marchés des titres face à une
infrastructure bancaire, institutionnelle et réglementaire
inadéquate peut entraîner des risques inutiles à la fois
sur les échanges de titres et plus généralement sur le
système financier tout entier à cause des effets
d'entraînement.
Il faut donc en priorité réformer le
système bancaire avant de libéraliser les mouvements de capitaux
et ouvrir les marchés à la concurrence étrangère.
Ce résultat s'oppose à l'analyse de Cho [1986] et de Mac Kinnon
[1973] dans ses premiers écrits.
Partant du résultat de Stiglitz et de Weiss [1981]qui
met en évidence les défaillances du marché du
crédit en situation d'information imparfaite, Cho
[1986] montre que le développement d'un marché
boursier est une condition sine qua non pour
réduire les problèmes de sélection adverse et de hasard
moral et pour assurer une meilleure affectation du capital.
Cependant, Gurley et Shaw [1960] affirment que le
marché boursier ne peut se développer qu'au dernier stade de
développement du système financier. En effet, il ne peut y avoir
de Bourses que si le marché du crédit est totalement
libéralisé de façon à ne plus offrir de
crédits bancaires préférentiels aux grandes entreprises
[Mac Kinnon, 1988]. Ainsi, et contrairement à Cho [1986], le
marché boursier est tributaire des réformes financières et
du développement du secteur bancaire. De plus, le financement par
émission d'actions ne représente qu'une petite part des
activités productives. Dans une étude effectuée dans huit
pays industrialisés, Mayer (1990) conclut que la part du financement
boursier par rapport au financement total des investissements est de moins 5%.
Les choses ont certainement beaucoup évolué en une
décennie mais il est d'une part très difficile de connaître
l'emploi des fonds levés sur les marchés financiers et d'autre
part, il semble qu'effectivement, les grandes entreprises cotées en
bourse utilisent les fonds de leurs actionnaires à d'autres fins que
l'investissement productif. Pour ce dernier, elles
préfèrent s'adresser traditionnellement au secteur bancaire.
En conséquence, il semble que les marchés
boursiers ne puissent pas jouer de rôle significatif dans le
développement des économies africaines notamment le financement
des entreprises africaines.
2.2. Les imperfections sur les marchés
financiers.
Cho [1986] fonde la nécessité de créer
des marchés boursiers sur l'absence d'imperfections informationnelles.
Mais, ce marché ne présente pas moins d'imperfections que le
marché bancaire.
Tout d'abord, et nous l'avons dit précédemment,
le marché financier favorise le court-termisme à l'instar du
système financier anglo-saxon. Amable et Chatelain [1995] affirment que
les investissements prêtent davantage d'attention aux profits et aux
dividendes de court terme qu'aux rendements de long terme. Ce système
financier anglo-saxon contraste avec les systèmes financiers japonais et
allemand qui assurent une intermédiation bancaire privilégiant
les relations de long terme. Par ailleurs, Stiglitz [1989] montre que l'offre
d'actions peut faire l'objet de rationnement. En effet, les nouvelles
émissions d'actions entraînent une baisse importante de la Valeur
du marché de la firme, de telle manière que peu d'entreprises
sont incitées à émettre de nouveaux titres pour augmenter
leur stock de capital.
De plus, les dirigeants des entreprises favorisent les
intérêts des actionnaires et renoncent à émettre de
nouvelles actions. Ils préfèrent recourir à l'endettement
lorsqu'ils ont besoin de nouveaux capitaux.
Au total, Stiglitz et Weiss [1981] prouvent que les
imperfections sur le marché financier peuvent être plus
accentuées que sur le marché du crédit. En effet, il
semble que les dirigeants des entreprises financées par actions puissent
détourner les profits vers des usages privés plus facilement que
les dirigeants d'entreprises financées par dette. Ainsi, l'argument de
Cho [1986] ne tient plus. Le marché boursier ne peut pas se substituer
à un marché bancaire imparfait.
En fait, le développement du marché financier
nécessite le développement du secteur bancaire et n'est pas pour
autant exempt d'imperfections. Sa création n'est souhaitable qu'au
dernier stade du développement financier, une fois que le secteur
bancaire est bien structuré et fonctionne correctement.
Dans le cas de l'Afrique, il apparaît donc inutile pour
le moment d'inciter à la création de tels marchés. Les
entreprises exclues du financement bancaire seront également exclues du
financement par titres. Il serait coûteux et inefficace de forcer les
gouvernements à posséder leur propre marché boursier. Les
efforts doivent en priorité se tourner vers la réhabilitation du
système bancaire.
DEUXIEME PARTIE : MICROSTRUCTURE DES MARCHES
BOURSIERS EMERGENTS
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CHAPITRE 1 : TYPOLOGIE DES MARCHES BOURSIERS
En comparant les modes de cotation sur le plan international,
on constate qu'il existe deux grands types d'organisation de marché :
les marchés dirigés par ordres (ou marchés d'agence), et
les marchés dirigés par les prix (ou marchés de
contrepartie). Les différences portent notamment sur le mode de
transmission et d'exécution des ordres, le rôle des
intermédiaires, le mode de cotation des prix et les informations dont
disposent les agents pendant la séance des échanges.
L'objectif poursuivi dans ce chapitre est de montrer comment
sont organisés les marchés boursiers émergents en
Afrique.
Section 1. Principes d'organisation des marchés
boursiers.
Au cours de cette section, nous présentons les deux
grands principes d'organisation de marchés boursiers au monde : les
marchés dirigés par les ordres (1.1), les marchés
dirigés par les prix (1.2). Ensuite, nous étudions les
modalités d'organisation et de fonctionnement des marchés
boursiers émergents d'Afrique à l'aide de quelques exemples pris
dans les pays Francophones20.
1. Organisation de marché.
1.1. Marchés dirigés par les
ordres.
Dans un système dirigé par les ordres, ce sont
les ordres introduits sur le marché par les participants qui
déterminent les prix auxquels les actifs doivent être
échangés. Ainsi, l'organisation des échanges
résulte de la confrontation générale des ordres des
clients par l'intermédiaire des sociétés de Bourses en un
lieu unique. La concentration permet un traitement égalitaire des
ordres, quel que soit leur volume.
20 En raison du manque d'information lié
à la pauvreté des sites Internet de la plupart des Bourses
Africaines, et surtout du temps qui nous était limité pour
pouvoir collecter des données, nous n'avions pas procédé
à une analyse exhaustive. Nous espérons tout de même revoir
l'organisation de ces marchés pour les recherches à venir.
Dans un système dirigé par les ordres, les
ordres d'achat et de vente sont stockés puisqu'il n'existe pas de
teneurs de marché. Le rôle de l'intermédiaire
(société de bourse) se limite à la transmission et
à l'exécution éventuelle des ordres de la
clientèle. Plusieurs types d'ordres peuvent être introduits dans
ce types de marché : les ordres à cours limité, les ordres
«au marché » (anciennement à « tout prix »,
puis « au mieux », les ordres à meilleur limite (anciennement
au prix du marché) etc.
Un marché de fixing est par nature un marché
dirigé par les ordres. Il existe également des marchés
continus gouvernés par les ordres où la confrontation des ordres
des investisseurs finaux peut s'opérer suivant différentes
modalités.
· Marché de fixing/marché
continu.
i Marché de fixing.
Dans un marché de fixing, la cotation et
l'exécution des ordres ont lieu à intervalle de temps
réguliers. Toutes les transactions se déroulent à un prix
unique déterminé de façon à équilibrer les
ordres de vente et d'achat transmis au marché jusqu'au moment du fixing.
A ce prix sont exécutés tous les ordres d'achat au mieux ou
assortis d'un prix limite supérieur au prix d'équilibre et tous
les ordres de vente au mieux ou assortis d'un prix limite inférieur au
prix d'équilibre. Le marché de fixing peut être
organisé suivant trois modalités :
> Première modalité : le fixing «
à la criée ». Ici, les participants sont
physiquement rassemblés au même endroit. Des prix
sont
annoncés et pour chaque prix, les négociateurs
annoncent leur
offre ou leur demande. Le processus se poursuit
jusqu'à
découverte du prix d'équilibre.
> Deuxième modalité : elle consiste à
laisser les participants soumettre leur offres d'achat et de vente, sans que
ces offres soient révélées et à
déterminer ensuite le prix d'équilibre.
> Troisième modalité : elle diffère
de la deuxième en ce que des transactions sont
révélées au marché au fur et à mesure
qu'elles elles s'accumulent. De plus un prix d'équilibre indicatif est
calculé chaque fois qu'un nouvel ordre est entré et ce jusqu'au
moment du fixing proprement dit.
La cotation à la criée a trouvé ses
limites à cause de l'importance des transactions réalisées
sur le marché et à la suite des mouvements d'innovations
technologiques qu'ont connu la plupart des marchés financiers des pays
développés et des pays émergents. Le système de
cotation électronique est venu donc de plus en plus remplacer
progressivement les méthodes traditionnelles de cotation à la
criée.
i Marché continu.
Sur un marché continu, la cotation et les transactions
s'effectuent en temps continu. Les agents peuvent transmettre des ordres
à tout moment. Les transactions sont bilatérales contrairement
à un marché de fixing où les transactions sont
multilatérales. De plus sur un marché continu, un nouveau cours
est associé à chaque transaction alors que sur un marché
de fixing est établi un prix unique auquel s'effectuent toutes les
transactions.
i Marché centralisé /fragmenté.
Un marché boursier est considéré comme
« centralisé » lorsque tous les ordres pour un titre doivent
être transmis à un même lieu (parquet ou un ordinateur). Par
contre, un marché boursier est considéré comme «
fragmenté » pour l'une des deux raisons suivantes : lorsqu'un titre
peut-être coté sur différents lieux ou lorsqu'une partie
des transactions est réalisé en dehors du marché central,
notamment celles portant sur des blocs des titres. Dans les deux cas, ceci
détourne une partie des transactions du marché central et
entraîne une fragmentation (décentralisation du marché).
1.2. Marchés dirigés par les
prix.
Dans un marché dirigé par les prix, les teneurs
de marché21 (« market-maker ») spécialiste
de la valeur sont en concurrence. Chaque teneur énonce une fourchette de
prix et une double quantité représentant ses limites
d'engagements. La fourchette comprend le prix auquel il est
immédiatement prêt à acheter appelé « bid price
» et celui auquel il est prêt à vendre « ask price
».
21 Les teneurs de marché sont des
opérateurs qui se placent en contrepartie aux ordres introduits par les
investisseurs, en proposant des prix et des quantités à l'achat
et à la vente des produits financiers.
Le marché est dit « décentralisé
» puisque chaque teneur de marché propose ses propres conditions de
prix d'achat et de vente et se rémunère sur l'écart de
prix qu'il propose (la « fourchette »). Dans ce système, ce
sont donc les prix proposés par les teneurs de marché qui
suscitent l'introduction des ordres de la clientèle et provoquent les
échanges de titres. Ce type d'organisation est utilisé sur les
bourses anglo-saxonnes ; à la bourse de Londres qui diffuse les
cotations des différents teneurs de marché par le système
SEAQ22.
L'organisation des procédures d'échange des
actifs financiers dans les marchés boursiers a parfois une architecture
complexe qui nécessite la combinaison de plusieurs
éléments des deux systèmes de fonctionnement des
marchés cités ci-dessus. Le cas du NYSE (New York Stock Exchange)
illustre cette situation. Ce type d'organisation des marchés est
basé sur la fonction des spécialistes. Ces derniers ont pour
fonctions d'assurer la liquidité des titres dont ils sont responsables
et de gérer le carnet des ordres émanant des investisseurs. Les
cours affichés par le spécialiste ne sont pas toujours les siens,
elles peuvent être notamment des ordres transmis par les investisseurs ou
les courtiers opérant sur le marché pour leur propre compte.
1. Règles d'organisation des marchés
boursiers émergents en Afrique. Dans cette sous-section, nous
prenons les exemples de quelques Bourses en Afrique francophone et
étudions leur fonctionnement.
Nous prenons les exemples des Bourses suivantes :
o Bourse de Casablanca ;
o Bourse de Tunis ;
o Bourse Régionale des Valeurs Mobilières (BRVM)
;
o Bourse des Valeurs Mobilières d'Afrique centrale
(BVMAC) ;
o Bourse des Valeurs mobilières de Douala (DSE).
Fonctionnement des Bourses africaines. i Bourse de
Casablanca.
- Sa structure.
22 SEAQ : Stock Exchange Automated Quotation.
Le marché boursier marocain est
caractérisé par l'existence d'une fragmentation de son
marché : le marché central et le marché de blocs.
- Les méthodes de cotation de la Bourse de Casablanca.
Les cotations de la Bourse de Casablanca se font au comptant,
au fixing et en continu. Mais la Bourse de Casablanca dispose aussi la
méthode de cotation à la criée. Ce système consiste
à confronter oralement les ordres d'achat et de vente en criant «
j'ai » qui signifie je vends, soit « je prends » qui signifie
j'achète.
- Les ordres de bourse .
L'ordre de bourse est l'instruction donnée par une
personne physique ou morale à l'intermédiaire financier qui les
transmet aux sociétés de bourse, qui sont les seuls
intermédiaires habilités à les exécuter. La Bourse
de Casablanca utilise principalement deux types d'ordres : les ordres « au
prix du marché » devenu ordres « à meilleure limite
» et les ordres « à cours limité ».
L'ordre « à meilleure limite » ne comporte
aucune indication de prix. Il peut être exécuté en
totalité ou en partie, comme il peut ne pas être
exécuté.
i Les Bourses de Tunis, BRVM, BVMAC, DSE, fonctionnent de la
même manière que la Bourse de Casablanca.
Ces différents marchés sont des marchés
centralisés et les cotations se font au comptant en continu et par
fixing.
Les ordres de Bourse sont quasiment les mêmes : les ordres
« à cours limité » et les ordres « à
meilleure limite »
Les négociations en Bourse se font au comptant
grâce au système de cotation aux standards internationaux. Par
exemple, depuis deux ans la Bourse de Tunis s'appuie sur un système de
négociation informatisé : le SUPERCAC UNIX
développé par Euronext.
Les seules différences portent sur leur mode de
transmission et d'exécution des ordres, le rôle des
intermédiaires, les séances de cotation.
On peut aussi noter quelques différences ; les Bourses
de Tunis, BRVM BVMAC et DSE, ne disposent pas de cotation à la
criée comme cela est le cas pour la Bourse de Casablanca ni de
marché fragmenté.
Nous résumons dans un tableau les principales
modalités d'organisation de ces marchés. (Tableau 2.1)
Tableau 2.1 Modalités d'organisation des
marchés boursiers en Afrique francophone.
Bourses
|
Princip es de cotation
|
Marchés
|
Type d'intermédi ation
|
Rôle des
intermédiaires
|
Types d'ordres
|
Casablanca
|
Au fixing et en continu
|
Centralisé
et dirigé par les ordres
|
Société de Bourse
|
- Limitation a la transmission et a
l'exécution des ordres
- Ab. de teneur de marché
|
-« a meilleure limite »
(anciennement « au prix du marché »
-« a cours limité »
|
Tunis
|
Au fixing et en continu
|
Centralisé
et dirigé par les ordres
|
Société de Bourse
|
-Limitation a la transmission et a
l'exécution des ordres
-Absence de teneur de marché
|
-« a meilleure limite »
(anciennement « au prix du marché »
-« a cours limité »
|
BRVM
|
Au fixing et en continu
|
Centralisé
et dirigé par les ordres
|
Société de Bourse
|
-Limitation a la transmission et a
l'exécution des ordres
-Absence de teneur de marché
|
-« a meilleure limite »
(anciennement « au prix du marché »
-« a cours limité »
|
BVMAC
|
Au fixing et en continu
|
Centralisé
et dirigé par les ordres
|
Société de Bourse
|
-Limitation a la transmission et a
l'exécution des ordres
-Absence de teneur de marché
|
-« a meilleure limite »
(anciennement
« au prix du marché »
« a cours limité »
|
DES
|
Au fixing et en continu
|
Centralisé
et dirigé par les ordres
|
Société de
Bourse
|
-Limitation a la transmission et a
l'exécution des ordres
-Absence de teneur de marché
|
-« a meilleure limite »
(anciennement « au prix du marché »
-« a cours limité »
|
|
Source : par nos soins a partir des sites
suivants : http://www:casablancabourse.com; http://www:bvmt.com.tn;
http://www.brvm.com.
L'analyse concernant BVMAC et DSE a été faite
à partir des brochures des règles de fonctionnement.
En comparant les principes de cotation des différentes
Bourses en Afrique francophone telles que citées dans le tableau 2.1, on
constate qu'elles ont toutes la même méthode de cotation : la
cotation au fixing et la cotation en continu. De même toutes ces Bourses
sont des marchés centralisés et dirigés par les ordres.
Elles ont toutes ont le même type d'intermédiation : les
sociétés de bourse et, leurs rôles se limitent à la
transmission et à l'exécution des ordres ; par conséquent
il n'existe pas de teneur de marché. Toutes ces Bourses utilisent les
mêmes types d'ordres : les ordres « à meilleur limite »
(anciennement « au prix du marché ») et les ordres «
à cours limité ».
En raison du manque d'informations concernant la plupart des
marchés boursiers Africains, ceci ne nous a pas permis de dégager
une typologie complète et cohérente de ces différents
marchés boursiers. Mais nous avons procédé à deux
hypothèses23 :
· Si on suppose que les marchés boursiers en Afrique
francophone optent pour le modèle des marchés dirigés par
les ordres et, en tenant compte des exemples cités ci-dessus on peut
globalement déduire que toutes les Bourses en Afrique francophones sont
des marchés dirigés par les ordres à l'instar d'Euronex
Paris.
· On suppose que les marchés boursiers des pays
anglophones d'Afrique optent pour le modèle de marché anglo-saxon
et, partant de Bittner (1999) qui stipule qu'à l'instar de l'accord de
coopération conclu entre la Bourse du Caire et celle de Madrid, la
Bourse de Tunis coopère avec les experts Parisiens des marchés de
capitaux et, par ailleurs des modèles analogues sont envisageables pour
les pays anglophone (Ghana et Nigeria) qui coopèrent avec la Bourse de
Londres. On peut conclure en disant que finalement les marchés boursiers
des pays anglophones d'Afrique sont des marchés dirigés par les
prix.
23 Toutes ces hypothèses restent à
vérifier par une étude plus approfondie pour l'avenir.
Section 2. Autres qualités d'organisation des
marchés boursiers.
Une bonne organisation du marché repose sur
l'informatisation et l'automatisation des opérations, sur une bonne
diffusion de l'information concernant les sociétés, sur les
délais de compensation des transactions et de livraison des titres
réduits et, enfin sur l'efficacité des procédures de
contrôle.
Nous abordons ainsi l'automatisation (1.1) et examinons
l'automatisation et avantages concurrentiels (1.2), nous étudions
ensuite le risque opérationnel et le système de
règlement/livraison (2.1) ; un autre critère aussi important dans
le fonctionnement d'un marché est étudiée : l'information
(2.2) ; enfin nous mettons en exergue l'équilibre adéquat entre
la réglementation et déréglementation (2.3).
1. Critères d'organisation de
marché.
1.1. L'automatisation.
Les marchés émergents présentent une
grande diversité en ce qui concerne leur niveau d'automatisation. A
titre d'exemples, les marchés boursiers émergents de Singapour,
de Taiwan et de Thaïlande disposent des systèmes de compensation et
de règlement comparables à ceux des marchés boursiers les
plus développés dans le monde. A contrario d'autres
marchés boursiers émergents dont l'Indonésie et plus
particulièrement ceux des pays en Afrique Sub-Saharienne ont encore des
progrès considérables à réaliser à ce
niveau.
Si on considère que le volume des transactions est
encore faible dans la plupart des marchés boursiers émergents,
les coûts liés à ces transactions sont là quelques
motivations qui doivent conduire à l'automatisation des échanges
sur les marchés boursiers émergents en Afrique sub-saharienne.
Par ailleurs plusieurs aspects du processus des échanges peuvent
être automatisés :
o Le routage des ordres vers les marchés, dans ce
domaine
l'automatisation s'est considérablement
développé surtout dans les
marché boursiers les plus avancés.
o La diffusion de l'information, elle a également fait
l'objet d'une automatisation croissante dans les Bourses
développées et moins dans les Bourses émergentes
d'Afrique.
o L'exécution des ordres, l'exécution
électronique des ordres signifie que le déclenchement des ordres
est géré automatiquement par un système
informatique et n'est pas soumis au contrôle d'un
teneur de marché ou d'un courtier. Peu de systèmes offrent cette
possibilité.
o Le suivi comptable des transactions (règlement et
livraison) doit permettre aux marchés boursiers émergents une
diminution des coûts associés aux activités de back-office
et les délais entre le moment de la transaction et celui de son
règlement.
L'automatisation permet une réduction des coûts
associés aux différentes étapes du processus
d'échange. Pour conserver leur position concurrentielle, les
marchés ont donc dû automatiser tout ou partie du processus
d'échange en l'occurrence les marché boursiers les plus
développés même si tous n'ont pas fait le même choix.
Cependant, les marchés boursiers émergents doivent fournir
d'importants efforts à ce niveau.
En fait l'automatisation d'un marché boursier n'est
pas une simple décision technique. Elle est susceptible de modifier les
caractéristiques du marché déterminantes pour son
efficacité : sa liquidité, sa transparence et les positions
concurrentielles des différents participants.
1.2. Automatisation et avantages
concurrentiels.
La position des courtiers est menacée par
l'automatisation du processus d'échange. En effet, le
développement de système de routage électronique et la
disparition des parquets rendent moins nécessaire l'intervention des
courtiers comme intermédiaire entre l'investisseur final et le
marché. On peut en effet envisager que les investisseurs transmettent
eux-mêmes leurs ordres à l'aide de terminaux informatiques.
Lorsque les échanges continuent de se dérouler sur un parquet,
les courtiers conservent un avantage informationnel sur les investisseurs
finaux qui n'ont pas accès au parquet. La diffusion électronique
de l'information tend également à diminuer cet avantage.
L'automatisation remet également en cause les
avantages concurrentiels des teneurs de marché. Elle permet une
meilleure diffusion de l'information sur les cotations et les transactions des
teneurs de marché. Ceci peut obliger les teneurs de marché
à réduire leur fourchette de prix pour rester concurrentiels.
L'automatisation des marchés fait également apparaître de
nouveaux
concurrents pour les teneurs de marché. Elle rend en
effet possible la création de carnets d'ordres électroniques
où les ordres à cours limité placés par les
investisseurs finaux viennent concurrencer les prix affichés par les
teneurs de marché.
L'automatisation diminue également la
possibilité pour les intermédiaires (courtiers ou teneurs de
marché) d'assurer leur position en se construisant des
réputations.
L'automatisation exerce donc une pression concurrentielle sur
les intermédiaires : courtiers et teneurs de marché. Cette
pression concurrentielle permet de diminuer les coûts de transaction
supportés par les investisseurs finaux. Mais elle risque de menacer la
liquidité des marchés. En particulier, il n'est pas certain que
les teneurs de marché puissent continuer à offrir profitablement
leurs services dans un système totalement automatisé.
Le choix du degré d'automatisation du processus
d'échange est donc un problème délicat qui ne pose pas de
la même façon selon la structure de marché
considéré.
Certains marchés boursiers choisissent un
système mixte ; dans ce cas le processus d'échange est
entièrement automatisé pour les ordres de petite taille. En
revanche, le routage et l'exécution des ordres de taille importante ne
sont pas automatisés et il demeure possible de traiter ces ordres par
négociation bilatérale. Cette architecture permet d'éviter
les risques associés au placement des ordres importants dans les
marchés complètement automatisés (impact de marché,
caractère opérationnel de l'ordre limité,
révélation d'information), tout en diminuant les coûts de
traitement qui sont particulièrement lourds pour les petits ordres.
2. Risque opérationnel, système de
règlement/livraison et information.
3.1. Risque opérationnel et système de
règlement/livraison.
Le risque opérationnel est un obstacle qui
réduit l'intérêt des marchés émergents pour
les investisseurs internationaux. En l'occurrence, peu nombreux sont les pays
qui appliquent les recommandations du Groupe des trente [Grimbert, Mordacq,
Tchemeni, 1995] en matière de compensation et de
conservation des titres telles que le développement
des dépositaires centraux, la livraison contre paiement, un délai
de règlement en J+324. Le respect de ces dispositions
simplifierait la tâche des conservateurs de titres et attirerait
davantage d'investisseurs. Le rôle du conservateur est dons crucial sur
les marchés émergents car le système de compensation et de
conservation est souvent inefficace.
i Système de règlement/livraison.
En matière de règlement et de livraison des
titres, les normes internationales prévoient un dénouement en J+3
(jour de négociation plus 3 jours ouvrés). Or, certaines Bourses
Africaines ne respectent pas encore ces normes.
Toutes les opérations d'achat et de vente de titres
font l'objet d'un règlement de capitaux et d'une livraison de titres.
Lors du démarrage de la BRVM en 1998, elle a retenu un
dénouement des transactions à J+5 (jour de négociation
plus 5 jours ouvrés) et prévoyait une éventuelle
évolution vers les préconisations internationales en la
matière. Mais ce délai n'a pas encore évolué et
demeure toujours en J+5.
Le délai de dénouement des transactions de la
Bourse de Casablanca ainsi que celui de la Bourse de Tunis est de J+3. Mais
jusqu'au 30/06/2000, le délai de dénouement de la Bourse de
Casablanca était encore à J+3.
3.2. Information.
L'information est une caractéristique importante pour
une organisation efficiente d'un marché boursier. Cette information doit
être fiable et disponible pour tous les investisseurs. Or, dans les
marchés boursiers émergents en Afrique au Sud du Sahara, ceci
n'est pas toujours le cas. Finalement on arrive à des asymétries
d'information qui remettent en cause le bon fonctionnement de ces
marchés.
Les marchés boursiers liquides affectent les
motivations des investisseurs à rechercher l'information parce qu'ils
peuvent en tirer un profit avant que l'information obtenue devienne publique.
En plus, elle permet d'améliorer les
24 J est le jour où l'ordre d'effectuer
l'opération est donné.
connaissances sur les entreprises et leurs projets ;
d'où une meilleure allocation des ressources et une
accélération de la croissance économique [Kyle,
1984].
Toutefois, ce rôle n'est pas également admis de
tous les auteurs. Ainsi Stiglitz [1985] soutient que l'émergence des
marchés boursiers révèle rapidement l'information à
travers le changement dans les cours. Cette révélation rapide de
l'information réduit les motivations des investisseurs à
consacrer des ressources à l'obtention de l'information sur les
entreprises parce qu'ils peuvent les obtenir en observant le changement des
prix.
3.3. L'équilibre adéquat entre la
réglementation et déréglementation.
Le développement d'un marché boursier
nécessite un équilibre entre, d'une part la liberté
nécessaire pour stimuler la concurrence et la croissance et, d'autre
part, le contrôle indispensable pour prévenir la fraude et
l'instabilité. La réglementation concernant le fonctionnement du
système financier, la conservation de titres, la garantie de
marché, la fiabilité et la diffusion des informations ne sont pas
au niveau des normes internationales dans les marchés boursiers
émergents. La transparence n'est pas non plus totale.
Ce chapitre nous a permis de présenter une la
typologie des marchés boursiers tout en mettant des
spécificités au fonctionnement des marchés boursiers en
Afrique. La question relative à l'efficience et à la
liquidité des marchés financiers sera abordée dans le
chapitre suivant.
CHAPITRE 2 : EFFICIENCE ET LIQUIDITE DES MARCHES
FINANCIERS.
. Au cours de ce chapitre, nous étudions d'autres
qualités de marché :
efficience et liquidité des marchés financiers.
La section (1) est consacrée au concept de l'efficience des
marchés financiers. Ainsi, nous examinons l'efficience informationnelle
(1) et tentons d'étudier l'impact d'opérations d'initiés
sur l'efficience informationnelle (2). Dans la section (2) nous abordons la
liquidité des marchés boursiers ; nous définissons et
donnons l'importance de la liquidité des marchés boursiers (1).
Ensuite, nous étudions la qualité des marchés
réglementés et, enfin nous tentons de définir les
conséquences d'opération d'initiés sur la liquidité
des marchés boursiers (3).
Section 1. Concept de l'efficience des marchés
financiers.
La notion d'efficience des marchés financiers trouve
ses origines dans la célèbre thèse de Bachelier en
190025 qui étudie le lien entre l'évolution des cours
en bourse et la marche au hasard. Afin d'expliquer les raisons pour lesquelles
les cours sur les marchés financiers sont impossibles, il a
effectué une série de travaux empiriques. Bachelier était
en avance sur son temps puisque les autres études sur le comportement du
cours des actions n'apparaissent qu'au début des années 60 avec
des auteurs comme Samuelson26 [1965].
Les principales références sur l'efficience des
marchés financiers sont sans doute les articles de Fama27
[1965, 1970,1991]. Il a marqué le début de la littérature
moderne sur le sujet en définissant un marché efficient comme
un
25 Bachelier L. (1900) « Thèse de la
spéculation» thèse de doctorat de sciences
mathématiques, Annale de l'Ecole Normale Supérieure,
3e série, T. 27. En Anglais « theory of speculation
», in cootner, P. (ed.), the Random Character of stock Market Prices,
Massachusetts Institute of Technology Press, Cambridge, MA, A964.
26 Samuelson P.A. (1965) «The Proof that
property Anticipated Prices Fluctuate Randomly», Industrial Management
Review, n°6, PP.41-49.
27 Fama E. (1965) «The Behavior of Stock Market
Prices», Journal of Business, 38, Janvier, PP. 34-105.
Fama E. (1970) «Efficient Capital Market : II»,
Journal of Finance, Décembre, 25, PP 338-417. Fama E. (1991) «
Efficient Capital Market : II », Journal of Finance, Décembre, 46,
PP. 1575- 1618.
marché sur lequel les cours reflètent
intégralement l'information disponible. Par ailleurs, il a
distingué trois formes de l'efficience informationnelle des
marchés financiers correspondant à trois niveaux d'informations
progressives : la forme faible, la forme semi-forte et la forme forte. Depuis
plusieurs autres définitions de l'efficience informationnelle sont
apparues. Parmi ces différentes définitions, les plus
fondamentales sont celles de Jensen28 [1978] et de
Beaver29[1981].
1. Efficience informationnelle des marchés
boursiers.
Dans cette sous-section, nous tentons de fournir une
définition complète de l'efficience informationnelle des
marchés financiers en nous intéressant sur les différents
degrés d'efficience tels qu'ils ont été définis par
Fama. Nous abordons en suite la problématique posée par la
présence d'initiés sur les marchés boursiers et l'impact
de leurs opérations sur l'efficience informationnelle. La question
relative sur les conséquences de telles opérations sur la
liquidité des marchés boursiers sera abordée dans la
deuxième section de ce chapitre.
1.1.Définitions.
Fama (1970) définit un marché efficient comme
un marché sur lequel les cours reflètent instantanément
l'ensemble des informations disponibles, c'est-àdire les
conséquences des événements passés, présents
et les anticipations sur les événements futurs. Il admet
plusieurs hypothèses pour une efficience totale du marché
financier.
· Les coûts de transaction (les commissions et les
taxes doivent être nulles) ;
· La gratuité et la disponibilité des
informations pour l'ensemble des investisseurs ;
· Les investisseurs doivent maximiser l'utilité
espérée de leur richesse ;
· Les investisseurs doivent être dans une situation
de concurrence.
28Jensen M. (1978) « Some Anomalous Evidence
Regarding Market Efficiency », Journal of Political Economy, n°
6(2/3), PP. 95-101.
29 Beaver W.H. (1981) « Market Efficiency
», The Accounting Review, Vol. 56 (1) PP. 233-7.
La théorie de l'efficience des marchés implique
qu'il est possible de prévoir les variations des cours car l'ensemble
des informations est intégré dans le cours affiché. En
d'autres termes, le cours affiché pour chaque actif financier sur un
marché efficient est à tout moment une estimation de sa valeur
intrinsèque. La valeur intrinsèque d'un titre est
déterminé par les qualités et les caractéristiques
propres de l'entreprise et non par la manière telle qu'elle est
estimée par les intervenants sur le marché.
La distinction de l'efficience donnée par Fama a
été souvent critiquée30. On lui reproche
principalement l'impossibilité dans la pratique de respecter les
hypothèses ci-dessus. L'accès à l'information est
généralement coûteux et, en plus, chaque transaction
d'achat ou de vente nécessite le paiement de commissions et de taxes.
Plusieurs auteurs ont donc tenté de donner une définition plus
élaborée ou au moins complémentaire à celle de
Fama.
Jensen [1978] décrit un marché efficient en
terme d'absences de profit d'arbitrage, c'est-à-dire qu'il
considère que dans un marché efficient, il est impossible de
réaliser des profits positifs en échangeant des informations. Le
terme « profits » désigne les rentabilités
ajoutées pour le risque, nettes de l'ensemble des coûts. Dans un
tel cas, les cours reflètent l'information jusqu'au point ou le
bénéfice marginal lié à l'utilisation d'information
n'excède pas les coûts marginaux d'information et de transaction.
Cette définition utilise une notion que l'on appelle « l'efficience
économique ».
Beaver [1981] définit le concept d'efficience par
rapport à l'ensemble des signaux donnés par le marché. Il
considère qu'un marché est efficient par rapport à un
signal si la configuration des cours des titres est identique à celle
qu'elle aurait été dans une économie où chaque
agent reçoit à la fois le signal en question et des informations
privilégiées. Quant à Latham31 [1986], il
considère que les marchés sont efficients par rapport à
une information bien précise si l fait de révéler cette
information à tout le monde ne changerait ni les cours
d'équilibre, ni la composition des portefeuilles.
30 Pour une synthèse des critiques, voir
Patrick Roger (1988) « Théorie des marchés financiers
efficients et asymétrie d'information : une revue de littérature
», Finance, Janvier, PP 59-97.
31 Latham M. (1986) « Information Efficiency
Market Subsets », Journal of Finance, 41, PP 39-52.
Plus récemment, Malkiel32 [1992] a
synthétisé ces différentes définitions du concept
d'efficience informationnelle de la manière suivante :
« Un marché financier est considéré
efficient s'il reflète complètement et correctement l'ensemble de
l'information pertinente à la détermination des cours.
Formellement, le marché est efficient par rapport à une certaine
catégorie d'information à tous les agents. L'efficience par
rapport à cette information...implique qu'il n'est pas possible de
réaliser des profits ».
Dans la première partie de cette définition,
l'auteur reprend exactement la définition de Fama alors que dans la
seconde partie, il suggère que si les cours ne sont pas modifiés
quand l'information est révélée, le marché est
considéré comme efficient à l'égard de cette
information. Sa troisième suggestion pour définir l'efficience
d'un marché financier est de prendre en compte les profits
résultant de l'exploitation de cette information. La constatation de
rentabilités excessives permet de conclure que le marché n'est
pas efficient par rapport à cette information.
1.2. L'efficience et les coûts de
l'information.
Grossman et Stiglitz (1980) ont pris en compte
l'activité de recherche et de traitement de l'information dans la
définition de l'efficience. Leur analyse repose sur l'hypothèse
fondamentale que le coût ne peut être nul et par conséquent
que les marchés ne peuvent être informationnellement efficients.
Ainsi, ils énoncent : « dans la mesure où l'information
est coûteuse, le cours ne peut refléter de façon
parfaite toute l'information disponible, puisque, s'il en
était ainsi, ceux quidépensent des ressources pour
obtenir l'information ne recevraient aucune
compensation ».
Selon la définition de Fama (1970), le système
des cours est supposé révéler toute l'information relative
à la valeur intrinsèque du titre. Ceci est vrai puisque l'une des
principales hypothèses du cadre analytique de Fama est la nullité
du coût d'information. Pour Grossman et Stiglitz, le coût
engendré par l'activité de recherche et de traitement de
l'information rend impossible la révélation de toute
l'information disponible dans les systèmes de prix.
32 Malkiel B. (1992) « Efficient Market
hypothesis », in Newman P., Milgate M. and Eatwel J.(eds), News Palgrave
Dictionary of Money and Finance, Macmillan, London.
Ils supposent l'existence de deux groupes de
spéculateurs sur le marché, à savoir ceux qui supportent
des coûts pour obtenir l'information (les agents informés) et ceux
qui ne veulent pas dépenser leurs ressources et qui n'observent que les
cours des titres pour s'informer (les agents non informés). Si les cours
des actifs reflètent la totalité de l'information disponible,
nous nous retrouvons dans une situation où les agents non
informés sont capables de déduire de ces prix l'information des
agents informés, et par conséquent leur coût d'information
est nul. Dans un tel cas, les informés se trouvent dans une situation
où ils ne sont pas incités à collecter de l'information,
et par conséquent le marché ne peut pas intégrer celle-ci
et n'est donc pas efficient.
Dans la situation où les cours ne reflètent pas
la totalité de l'information, les informés profitent de
l'avantage procuré par la recherche d'information sans que les non
informés y accèdent. L'explication est toute simple puisque les
cours sont « bruités » et les non informés ne sont pas
capables de savoir lors d'un changement de cours si celui-ci est la
conséquence d'une nouvelle information ou simplement d'un « bruit
».
1.3. Les trois formes de l'efficience
informationnelle et leurs conséquences. La parfaite efficience
informationnelle n'existe pas en réalité. Nous avons pris
l'habitude de la classer en trois degrés bien qui dépendent de
l'information prise en compte depuis le célèbre article de Fama
[1970].
Les décisions d'investissement sur les marchés
financiers dépendent moins des informations pertinentes disponibles sur
le marché, mais du degré d'efficience informationnelle de
celui-ci. Plusieurs raisons expliquent l'importance de cette hypothèse
sur les marchés financiers. La principale se trouve dans la
définition du concept d'efficience informationnelle. Ce dernier
suggère que le cours constitue la meilleure évaluation de la
valeur d'un titre à un moment donné puisqu'il prend en compte
l'ensemble de l'information disponible sur le passé, le présent
et le future. Ce cours indique donc l'utilité d'un titre en
intégrant l'opinion générale des agents.
Dans un tel marché, l'ensemble des
événements prévisibles dont dépendent les cours des
entreprises sont identifiés ainsi que leurs conséquences. De ce
fait, aucun titre n'est sous-évalué ou surévalué.
Les cours des actifs financiers qui sont déterminés sur un
marché efficient permettent de
fournir des indicateurs d'une grande importance sur la
santé des entreprises et permettent ainsi d'aider les investisseurs dans
leurs choix d'investissements. Ainsi, ils assurent une bonne allocation des
ressources en capital.
Fama (1970) propose trois versions de l'hypothèse de
l'efficience des marchés financiers qui font une distinction entre les
ensembles d'information que le prix d'un titre doit incorporer.
o D'abord, il y a l'information sur les prix passés des
titres ; il s'agit là
de la version faible de
l'hypothèse d'efficience : le prix d'une action reflète toute
l'information contenu dans l'histoire passée du prix du titre, et la
conséquence directe de l'hypothèse
faible est l'analyse technique33 ( qui consiste à regarder
essentiellement les prix passés ou des fonctions de ces prix
passés).
o Ensuite, il y a toute l'information publiquement disponible
concernant le titre qui inclut entre autres les rapports
annuels, les analyses techniques et fondamentales disponibles publiquement,
l'information à caractère macro-économique et sectoriel :
c'est la version semi-forte de l'hypothèse
d'efficience car le prix d'une action reflète toute l'information
disponibles et la conséquence d'une telle
hypothèse est toute analyse basée sur l'information publique
(analyse fondamentale34).
o Finalement il y a l'information publique y compris
l'information privée ou
privilégiée ou celle provenant d'initiés de
la compagnie qui a émis
le(« insider information ») ; il s'agit de la
version forte de l'hypothèse
d'efficience ; le prix d'une action reflète alors
toute l'information disponible qu'elle soit publique ou privée et la
conséquence de l'hypothèse forte est
que toute possibilité de gains inexploités sera
éliminée.
33 L'analyse technique est fondée sur
l'hypothèse que les mouvements antérieurs des cours ont tendance
à se reproduire. Ce qui implique qu'il est possible de prévoir
les retournements de tendance ou de les identifier en utilisant uniquement des
données historiques.
34 Face à l'école chartiste ou
technique, on trouve l'école dite d'analyse fondamentale ou
fondamentaliste. Cette appellation est issue de leur manière de
déterminer la valeur fondamentale des actifs financiers traités
sur le marché. Cette technique consiste à déterminer pour
chaque titre sa valeur intrinsèque. Si le cours du marché est
inférieur (respectivement supérieur) à la valeur
fondamentale, il est possible de réaliser des bénéfices en
prenant une position haussière.
Dans son article de 1991, Fama redéfinit les trois
formes de l'efficience en utilisant trois types de tests empiriques. Ainsi
l'efficience de forme faible devient l'étude de la
prévisibilité des rentabilités ; cette forme d'efficience
est validée par des tests permettant de vérifier s'il est
possible de prévoir les rentabilités futures des titres en se
basant uniquement sur les séries historiques des cours et sur les
dividendes. Par ailleurs, la forme semi-forte regroupe les études
événementielles concernant l'information publique,
c'est-à-dire les tests permettant de vérifier si l'ensemble de ce
type d'information est déjà intégré dans les cours
des titres. Quant à la forme forte, elle regroupe les tests portant sur
l'information privilégiée détenue par certains
investisseurs initiés.
L'étude de la forme forte d'efficience des
marchés financiers a été développée
essentiellement sur le marché boursier américain. Dans un tel
marché, il est impossible de réaliser des profits grâce
à des avantages informationnels privilégiés.
Si l'objectif attendu de cette forme d'efficience est de
savoir si les initiés (ils sont représentés, soit par les
investisseurs qui détiennent une part importante de titres existants
d'une entreprise soit ils font partie des dirigeants de celle-ci), en
réalisant leurs opérations sur la base des informations
privilégiées dont ils disposent, tirent ou non profit
supérieurs à ceux attendus pour le risque encouru, nous nous
interrogeons plutôt sur l'impact de leurs opérations
(d'initiés) sur l'efficience informationnelle des marchés
boursiers.
2. L'impact d'opérations d'initiés sur
l'efficience informationnelle des marchés boursiers.
Dans cette deuxième sous-section, le but est
d'étudier l'impact des opérations d'initiés sur
l'efficience informationnelle. A travers les différentes
hypothèses émises par les auteurs sur la théorie
financière, nous essayons d'en déduire si l'intervention des
initiés peut contribuer ou pas à l'amélioration de
l'efficience informationnelle des marchés boursiers.
2.1. Les opérations d'initiés
peuvent-elles améliorer l'efficience informationnelle des marchés
boursiers ?
Une très vaste littérature traite les
conséquences des opérations d'initiés sur les principales
caractéristiques des marchés boursiers (efficience,
liquidité...).Manne [1966] peut être considéré comme
le précurseur sur la problématique posée à la
réalisation des opérations d'initiés dans les
marchés boursiers. Il affirme que la réalisation de tells
opérations contribue à l'amélioration de l'efficience.
Cette affirmation se justifie par le fait que lorsque les opérations
d'initiés sont permises, les cadres des entreprises exploitent au
maximum leur information privée qui est ainsi incorporée dans les
cours cotés.
Une étude empirique sera menée quelques
années plus tard par Meulbroek [1992] afin de tester l'hypothèse
selon laquelle la présence d'initiés sur un marché
boursier augmente le contenu informationnel des cours. Pour ce faire, l'auteur
utilise une liste des cas d'initiés détectés par la
SEC35 ; il va ensuite montrer que la variation anormale des cours
observée lors de l'intervention des informés représente 40
à 50% de la variation des cours constatée le jour de l'annonce.
Finalement, Meulbroek en déduit que les initiés de par leurs
transactions informées contribuent à la découverte des
vrais prix.
Mais un certain nombre d'auteurs vont remettre en cause les
hypothèses émises par Manne [1966] et Meulbroek [1992] selon
lesquelles la réalisation des opérations délictueuses
permet d'améliorer le contenu informationnel des cours cotés.
Pour Kyle [1985] , si les initiés sont conscients des
conséquences de leurs transactions sur les cours, ils vont adopter une
stratégie d'échange de manière à retarder leur
information et finalement à ne pas la divulguer au reste du
marché. Cette situation va entraîner une diminution de
l'efficience informationnelle des marchés financiers. De façon
identique, Biais et Foucault [1993] vont montrer que si les prix cotés
reflètent une part de l'information privée, alors plusieurs
facteurs limitent cette révélation d'information, notamment le
bruit dû à des chocs de liquidité ainsi que le comportement
stratégique des informés.
Cependant Manove [1989], ainsi que Fishman et Hagerty [1992]
montrent que si les initiés suspectent simplement la présence des
initiés sur le marché,
35 Securities and Exchange Commission
l'hypothèse selon laquelle les opérations
d'initiés améliorent l'efficience informationnelle est remise en
cause et ceci pour les raisons suivantes :
Tout d'abord, pour Manove [1989], lorsque les agents non
informés sont conscients du risque de sélection adverse, ils vont
exiger une prime de risque de compensation, et ceci va nécessairement
engendrer des coûts supplémentaires de liquidité. Manove va
donc conclure en disant que la réalisation d'opérations
d'initiés ne peut contribuer à l'amélioration du contenu
informationnel des cours seulement si les transactions portent sur d'importants
volumes et que de toute évidence l'efficience est meilleure lorsqu'une
information nouvelle est directement communiquée au public plutôt
que par l'intermédiaire du marché.
Ensuite, selon Fishman et Hagerty [1992], la présence
d'initiés sur les marchés peut décourager les non
initiés dans leur recherche d'information ce qui conduit à la
diminution de l'efficience des cours.
Dans une vision beaucoup plus large, Ausubel [1990], montre
que si les initiés sont présents sur les marchés, il y
aura nécessairement une dégradation de la confiance des non
initiés vis-à-vis des marchés ; ceux-ci (non
initiés) prenant en compte les préjudices que les informés
(initiés) peuvent leur causer. Ainsi, lorsque les opérations
d'initiés sont permises, les informés vont tirer profit de
l'information privée qu'ils détiennent sans pour autant rendre
celle-ci publique. Finalement, on arrive à une situation
d'équilibre révélateur d'une manière partielle ;
laquelle conduira les informés à réaliser des
bénéfices aux dépens des autres investisseurs
présents sur le marché. Pour cet auteur la réglementation
de ce type d'opération va obliger les informés à rendre
publique leur information avant de l'exploiter, ce qui va permettre une
augmentation des profits non seulement des non informés mais aussi de
ceux des initiés, l'équilibre devenant alors
révélateur. Finalement, on va aboutir à une situation
où grâce à la réglementation de ces types
d'opérations, les effets bénéfiques seront d'autant plus
importants que l'asymétrie d'information existant entre les
informés et les non initiés est importante.
Restant dans la même logique que celle
évoquée par Ausubel [1990], Bhattacharya et Spiegel [1991] vont
plus loin en affirmant qu'il suffit que les non
informés pressentent la présence
d'initiés sur le marché, pour qu'ils refusent d'effectuer des
transactions compte tenu du risque de sélection adverse. Finalement
l'intervention d'initiés conduit au blocage du marché où
aucune transaction ne se réalise.
En définitive, l'impact des opérations des
initiés sur l'efficience informationnelle des marchés boursiers
n'est pas défini de façon claire et précise par la
littérature théorique, car deux hypothèses s'opposent.
Pour certains auteurs, l'intervention d'initiés
conduit à la découverte de vrais prix et donc améliore
l'efficience informationnelle des marchés boursiers, alors que pour les
autres ces opérations délictueuses vont plutôt
décourager les non initiés à effectuer leurs transactions
car conscients du risque de sélection adverse et contribuer ainsi
à la diminution du contenu informationnel des cours cotés.
L'analyse que nous avons menée concerne l'efficience
informationnelle au sens fort car celle-ci est basée sur la prise en
compte d'informations privilégiée dans les cours des actifs. Les
seuls tests pertinents consistent à déterminer si des
investisseurs initiés sont capables de battre le marché. Il
existe plusieurs difficultés à la réalisation de ce type
de tests compte tenu du manque de données relatives aux
opérations d'initiés dans les pays émergents comme ceux de
l'afrique.
Contrairement aux marchés boursiers des pays
développés, il n'existe aucune source fiable permettant la
réalisation d'étude concernant l'activité boursière
d'investisseurs privilégiés. La seule alternative
opérationnelle pour tester indirectement la forme forte de l'efficience
est la mesure de la performance des gérants de portefeuilles qui sont
susceptibles d'acquérir des informations avant leurs publications. Mais
les marchés boursiers émergents d'Afrique sont encore jeunes pour
effectuer ce genre de tests. Au terme de cette analyse portant sur l'impact des
opérations d'initiés sur l'efficience informationnelle des
marchés boursiers, nous pensons tout de même que les pays
africains doivent réglementer de telles opérations car celles-ci
peuvent avoir des conséquences néfastes sur l'efficience
informationnelle de leurs marchés boursiers même si jusqu'ici les
tests n'y ont pas été réalisés.
Les marchés boursiers émergents d'Afrique d'une
manière générale et particulièrement au sud du
Sahara ne sont pas réglementés comme ceux des
pays développés. Il est de toute
évidence que la présence d'initiés sur de tels
marchés puisse influencer l'influence l'efficience informationnelle qui
déjà souffre du manque de transparence de ces marchés
boursiers.
Contrairement à l'hypothèse émise par
Manne [1966] selon laquelle les opérations d'initiés
contribueraient à l'amélioration de l'efficience informationnelle
des cours cotés, ceci se justifiant par le fait que lorsque ces
opérations sont permises, les cadres des entreprises exploitent au
maximum leur information privée qui est ainsi incorporée dans les
cours cotés, cela semble ne pas être vérifié en ce
qui concerne les marchés boursiers émergents d'Afrique ; ceci
pour des raisons suivante :
o Tout d'abord, il semblerait que les marchés
boursiers émergents d'Afrique ne sont pas efficients compte tenu de leur
manque de transparence d'une part ;
o D'autre part, la corruption qui sévit actuellement
dans ces pays viendrait
simplement aggraver la situation si de telles opérations
sont permises.
Partant de la théorie de l'agence, Brudney [1979] et
Easterbrook [1981], estiment que le fait de pouvoir réaliser des
transactions sur la base d'informations privilégiée, incite les
cadres à retarder au maximum la publication de l'information ; dans le
cadre des marchés boursiers d'Afrique, une telle hypothèse
permettrait aux cadres africains de tirer profit de cette information
privilégiée.
Pour Bagnoli et Khanna [1992], la non interdiction des
opérations d'initiés peut même conduire les gérants
à adopter des stratégies de gestion dont l'objectif n'est plus la
maximisation de la valeur de l'entreprise mais la maximisation des profits que
ces derniers espèrent réaliser sur les transactions qu'ils font
pour leur propre compte sur les titres de leur entreprise.
Dans le cas des marchés boursiers émergents d'
Afrique, nous pensons que les opérations d'initiés doivent
être interdites car compte tenu de la corruption et du manque de
crédibilité de certains dirigeants cadres d'entreprises
africains, ceux-ci chercheraient plutôt à réaliser des
profits de leur information privilégiée aux dépens des non
informés, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les
caractéristiques de marché telles que l'efficience ou la
liquidité et entraînerait même des asymétries
d'informations et des risques de sélection adverse ; ce qui
augmenterait davantage l'impact de telles opérations
sur l'efficience informationnelle des marchés boursiers émergents
d'afrique.
Pour mieux comprendre l'impact des délits
d'initiés sur l'efficience informationnelle des marchés
boursiers, un nombre important de modèles de la microstructure des
marchés financiers étudient la formation des prix dans un
contexte d'asymétrie d'information.
2.2. Formation des cours cotés dans un
contexte d'asymétrie d'information.
Comment peut-on résoudre le problème
d'asymétrie d'information et améliorer le contenu informationnel
des cours en présence d'initiés dans un marché boursier
?
Plusieurs courants de pensée ont essayé de
résoudre ce problème. Grossman [1976] essaie de répondre
à cette question en utilisant les concepts développés par
la théorie des équilibres en anticipations rationnelles. En fait,
Grossman s'attache à montrer que le prix d'équilibre d'un titre
financier peut permettre de résoudre les asymétries d'information
existant entre les initiés sur la valeur du titre et les agents non
informés. Il part d'une intuition simple en supposant qu'un agent
dispose une information lui indiquant qu'une action est
sous-évaluée. Il peut réaliser un gain en plaçant
des ordres d'achat. Mais cet accroissement de la demande va provoquer une
augmentation du prix qui signale au marché que certains agents
considèrent que l'action est sousévaluée.
Si les agents non informés anticipent correctement la
relation qui existe entre le prix et l'information de l'initié, ils
peuvent pour chaque niveau de prix inférer l'information privée
de celui-ci. L'article de Grossman [1976] propose une modélisation
rigoureuse de cette intuition. Il montre qu'il est possible d'obtenir des
équilibres parfaitement révélateurs, c'est-à-dire
tels que les prix reflètent toute l'information des agents
informés36. Il donne ainsi un fondement
36.Grossman montre que le prix d'équilibre
constitue une statistique suffisante de l'information des agents
informés. Ceci signifie qu'un agent qui n'observe que le prix
d'équilibre est en mesure de formuler les anticipations qu'un agent qui
observerait les signaux reçus par chaque initié et qui
disposerait ainsi de toute l'information privée disponible.
micro-économique à la notion d'efficience des
marchés boursiers. Grossman et Stiglitz [1980] montrent que ce
résultat pose un problème lorsque les coûts d'information
supportés par les agents informés sont pris en compte. En effet,
si les prix d'équilibre transmettent toute l'information privée,
les agents informés ne peuvent pas réaliser des profits
supérieurs à ceux obtenus par des agents non informés.
Dans ces conditions aucun agent n'a intérêt à payer un
coût pour s'informer et les prix d'équilibre ne peuvent donc
transmettre aucune information privée.
L'efficience forte est donc incompatible avec
l'équilibre du marché boursier. En fait, Grossman et Stiglitz
[1980] montrent que pour obtenir des équilibres dans lesquels il existe
une proportion non nulle d'agents informés, il est nécessaire que
les prix d'équilibre ne soient pas parfaitement
révélateurs. C'est le cas lorsque certaines variables (par
exemple l'offre totale d'actif risqué) qui influence la
réalisation du prix d'équilibre ne peuvent pas être
observées par les agents non informés. Dans les modèles de
Grossman [1976] et Grossman et Stiglitz [1980], les agents informés
déterminent leur fonction de demande sans tenir compte de leur fonction
de l'information qu'ils révèlent au marché. Ceci revient
à supposer que ces agents ont un comportement concurrentiel puisqu'ils
ne prennent pas en compte l'impact de leurs transactions sur les prix
réalisés à l'équilibre. Deux travaux plus
récents sur la transmission d'information par les prix [Kyle (1985),
Kyle(1989), Gale et Hellewig (1989), Laffont et Maskin (1990)...] abandonnent
l'hypothèse d'un comportement concurrentiel des agents
informés.
Les articles de Kyle [(1985), (1989)] montrent que,
conformément à l'intuition, lorsque les agents informés
sont conscients de leur impact sur les prix, l'efficience informationnelle des
prix est diminuée. Ils soulignent également que
l'asymétrie d'information est un déterminant important de la
liquidité d'un marché. Gale et Hellwig [1989] et de Laffont et
Maskin [1990] reviennent sur le résultat de Kyle en matière
d'efficience informationnelle en montrant que lorsque les agents
informés ont un comportement non concurrentiel, plusieurs
équilibres peuvent être obtenus et que le degré
d'efficience informationnelle dépend dans ce cas de l'équilibre
considéré. Laffont et Maskin [1990] par exemple obtiennent un
équilibre dans lequel toute
l'information de l'agent informé est
révélée et un autre équilibre dans lequel aucune
information n'est révélée par le prix d'équilibre.
D'autres articles Glosten [1989], Bhattacharya et Spiegel [1992], Bossaerts et
Hughson [1991] mettent en évidence que l'existence d'asymétrie
d'information peut conduire à des situations dans lequel le
marché est particulièrement illiquide pouvant conduire même
à une suspension des échanges.
Cette asymétrie d'information peut donc s'expliquer
par le fait que dans un marché boursier certains investisseurs (agents)
détiennent des informations sur les prix des actifs financiers et
d'autres (les non informés) n'ont pas forcément les mêmes
informations. Cette présence d'agents informés (initiés)
peut entraîner des conséquences non seulement sur l'efficience
informationnelle mais aussi sur la liquidité des marchés
financiers.
Section 2. Liquidité des marchés
financiers.
La section précédente a été
consacrée au concept de l'efficience informationnelle ; elle a permis
d'étudier l'impact d'opérations d'initiés sur l'efficience
informationnelle. Au cours de cette section, nous étudions la
liquidité des marchés boursiers . Nous proposons dans un premier
temps des définitions (1.1) ensuite nous étudions l'importance de
la liquidité sur les marchés boursiers (1.2). A travers la
qualité des marché réglementés nous analysons
l'offre de liquidité (2.1), le prix de l'immédiateté (2.2)
et, enfin nous examinons l'interaction de l'offre de liquidité et du
prix de l'immédiateté (2.3). Finalement, pour clore cette
section, nous tentons de proposer un état de l'art sur les
conséquences des opérations d'initiés sur la
liquidité des marchés boursiers.
1. Définition et importance de la
liquidité des marchés boursiers. 1.1.
Définitions.
J.M. Keynes [1930] peut être considéré
comme le précurseur du concept de liquidité. L'auteur
définit pour la première fois ce concept selon lequel un actif
est d'autant plus liquide qu'il est transformable en monnaie à court
terme et sans perte. Cette définition a permis de mettre en
évidence les deux aspects de la liquidité :
o Le facteur temporel exprimé par les termes «
à court terme » ; o Le facteur prix traduit par les termes «
sans perte »
Cette définition peut être adaptée aux
marchés financiers. La liquidité peut se définir comme la
caractéristique d'un marché où l'investisseur peut
effectuer des opérations d'achat ou de vente d'une quantité
importante de titres à un prix et dans un délai raisonnable sans
provoquer de grandes variations de cours. Par ailleurs un titre est liquide
s'il est possible de l'acheter et de le vendre rapidement en supportant des
coûts de transaction modérés, et à un prix
raisonnable.
Ces définitions soulignent deux dimensions de la
liquidité : la dimension temps et la dimension coût ; mais
seulement les deux dimensions évoluent en sens inverse : plus
l'investisseur est pressé de réaliser sa transaction, plus le
coût engendré par celle-ci est importante tandis que plus
l'investisseur est patient plus son coût d'exécution est
avantageux.
1.2. Importance de la liquidité des
marchés boursiers.
L'importance de la liquidité est la thèse
dominante dans la mise en évidence du rôle des marchés
boursiers dans la croissance économique. Les marchés boursiers
facilitent le financement d'investissements rentables en fournissant des
liquidités. Beaucoup d'investissements rentables exigent des
immobilisations de fonds sur le long terme alors que les épargnants
/investisseurs sont souvent très disposés à consentir de
tels sacrifices. La liquidité de la bourse permet de remédier
à cette situation en offrant aux investisseurs des titres liquides,
c'est-à-dire des titres qu'ils peuvent vendre à tout moment pour
réaliser leur épargne. Parallèlement les entreprises
peuvent lever des capitaux à travers l'émission de titres de long
terme. De ce point de vue, la bourse contribue à une meilleure
allocation des capitaux. Ainsi la liquidité des bourses améliore
les perspectives de croissance économique de long terme.
De plus, en rendant les investissements moins risqués
et en permettant aux projets les plus rentables d'être
réalisés, la liquidité des marchés boursiers peut
aussi conduire à plus d'épargne et d'investissements. Sous cet
angle, la
liquidité des marchés boursiers favorise une
accumulation rapide du capital et permet des gains de productivité
élevée.
Plusieurs études ont abordé le rôle de la
liquidité des bourses dans la croissance économique ; on peut
citer par approches les auteurs suivants.
Pour les analyses historiques et qualitatives : Hick [1969],
Habert [1991], Levine [1997] etc. Pour les études
économétriques : Atje et Jovanovic [1993], Demirguc-Kunt et
Levine [1996], Levine et Zervos [1996 et 1998] etc.
Si la liquidité est l'aspect le plus valorisé
pour montrer le rôle des bourses dans la croissance économique, il
faut aussi noter que c'est un facteur dont les effets pervers sont
utilisés pour réfuter la thèse de l'importance de la
liquidité dans la croissance économique. En effet, une plus
grande liquidité accroît la rentabilité des investissements
et réduirait l'incertitude. En retour, de fortes rentabilités
affecteraient de manière ambiguë le taux de l'épargne due
à la bonne connaissance des revenus et des effets de substitution. Une
baisse de l'incertitude en plus affecte également de manière
ambiguë le taux d'épargne. Ainsi, le taux d'épargne peut
indifféremment croître lorsque la liquidité augmente
[Levhari et Srinivasan, 1969]. Si le taux de l'épargne baisse
considérablement et s'il y a des liens (externalités) avec
l'accumulation du capital, la croissance économique peut baisser
malgré une grande liquidité Japelli et Pagano, [1994].
2. Qualité des marchés
réglementés. 2.1. Offre de liquidité.
La diffusion des informations est une variable clef de la
transparence du flux d'ordres. En effet, la transparence d'un marché
peut être définie comme le degré d'information contenu
dans les échanges, à la fois avant la transaction
à travers les ordres (transparence pré-transactions) et
après la transaction à travers les caractéristiques des
échanges réalisés (post-transactions). Alors que la
transparence pré-transactions dépend des mécanismes
d'échange du marché, la transparence post-transactions
découle du degré d'automatisation. D'une manière
générale, les marchés automatisés offrent
aux investisseurs un degré de transparence post-transactions plus
élevé que les
marchés non automatisés. La transparence repose
sur plusieurs caractéristiques : le délai de diffusion de
l'information, le degré d'accessibilité des investisseurs au
détail des échanges et à l'identité des donneurs
d'ordres, la quantité d'information publiée sur les
caractéristiques de l'échange (prix et quantité) etc....la
diffusion en temps réel influence de manière déterminante
le processus d'inférence de l'information. En fonction du statut de
l'investisseur, membre ou non du marché, le degré de transparence
est donc différent puisque le contenu des écrans de cotation est
différent.
L'efficience informationnelle, c'est-à-dire la
rapidité avec laquelle l'information est intégrée dans les
prix, est donc étroitement liée à la transparence du
marché. En effet, si les interventions des agents sont justifiées
par des divergences d'anticipations, le flux d'ordres (la transparence
pré-transactions) est une variable clef dans le processus de
découverte du prix d'équilibre en révélant la
nature des informations détenues par les agents. La transparence du
marché favorise ainsi la concurrence dans l'offre de liquidité en
constituant une incitation à améliorer les prix présents
en carnet pour gagner la priorité temps (undercutting trading process).
Biais, Hillion et Spatt [1995] mettent en évidence un comportement
concurrentiel des agents lorsque l'écart entre le meilleur prix acheteur
et vendeur est normalement élevé par un placement d'ordres
à l'intérieur de ces limites.
La difficulté de définir quantitativement la
transparence ainsi que la difficulté de modéliser le comportement
des investisseurs expliquent des résultats contradictoires. Les
modèles de Madhavan [1995,1996] et de Pagano et Roell [1996] concluent
à l'efficience supérieure des structures transparentes car les
prix s'y trouvent déterminés conditionnellement à un
ensemble d'information plus riche que celui disponible sur les structures
opaques. Les investisseurs peuvent ainsi se protéger des
informés. L'efficience et la transparence sont des facteurs
d'amélioration de la liquidité et de réduction des
coûts de transaction supportés par les non informés car
l'incertitude se trouve réduite.
Une étude empirique de Bloomfield et O'Hara [2000]
confirme qu'un marché transparent révèle plus rapidement
et de manière plus complète l'information existante qu'un
marché semi opaque ou opaque. La même étude
montre également que les investisseurs informés
choisissent plus fréquemment de placer leurs ordres sur une structure
moins transparente pour maximiser leur profit. Ces échanges sont en
conséquence moins rentables pour les teneurs de marché.
2.2. Le prix de l'immédiateté.
La liquidité du marché boursier est
assurée à chaque instant par le carnet et, plus
précisément par les ordres à cours
limité37 en attente d'exécution. En fonction de sa
limite de prix, un ordre limite est soit offreur de liquidité ou
consommateur de liquidité. Il est consommateur s'il provoque une
transaction dès son entrée dans la feuille de marché, dans
le cas contraire il est offreur de liquidité.
Kyle [1985] et Harris [1990] définissent un
marché liquide comme un marché qui permet à un agent
d'effectuer rapidement des transactions non négligeables sans provoquer
de variations de prix importantes : Cette définition utilise trois
concepts : le volume, le temps et le prix. Le manque de liquidité est
mesuré par la différence entre le prix de transaction et la
valeur fondamentale de l'actif.
· Instantanéité : il s'agit de la
composante temporelle de la liquidité. L'investisseur désire une
exécution immédiate ou dans un délai relativement court en
fonction de l'agressivité et de la taille de son ordre.
· Profondeur : il s'agit du nombre de titres pouvant
être échangés sur les différentes limites de prix
à l'achat et à la vente. Il s'agit également d'une mesure
de la capacité du marché à absorber un échange de
taille importante sans décalage de cours. Si cette profondeur est
insuffisante, le demandeur de liquidité risque de subir une variation
importante de prix.
37 Ordre de bourse le plus classique. Il comporte un
prix maximum à l'achat et un prix minimum à la vente. Ainsi, un
ordre d'achat limité à 220 euros n'est pas exécuté
tant que le cours de la valeur dépasse 22O euros. Un ordre de vente
limité à 300 euros n'est pas exécuté tant que le
cours de la valeur est inférieure à 300 euros. Cet ordre permet
de se protéger contre les fluctuations du marché.
· Fourchette : elle mesure la différence entre
le prix vendeur (ask price) et le prix acheteur (bid price) affichés par
les ordres à cours limités sur un marché dirigé par
les ordres ou par un teneur de marché. Celui-ci doit assurer
l'équilibre entre l'offre et la demande par des achats et des ventes sur
son propre stock de titres. Il se rémunère par conséquent
par la fourchette qui est le prix à payer pour
l'immédiateté de l'échange par les investisseurs non
informés. Le coût effectivement payé par les investisseurs,
c'est-à-dire la fourchette réalisée est estimée
à partir des variations successives du prix de transaction.
i Mesure de liquidité.
La liquidité du marché est
déterminée par la demande et l'offre d'immédiateté.
La taille de la fourchette de prix est la mesure la plus utilisée pour
quantifier la liquidité. La fourchette relative est une meilleure mesure
des coûts de transaction car elle est indépendante de toute
échelle. Elle est le rapport entre la fourchette et le milieu de la
fourchette.
100× (Ask-Bid)
Soit Sr la fourchette relative Sr = (Ask+Bid) /2
Sur les marchés organisés où les
cotations se font en continu, qu'il s'agisse de marché de contrepartie
ou de marché d'agence, l'existence d'une fourchette cotée permet
aux investisseurs pressés de trouver de façon immédiate
une contrepartie (pour les échanges de taille normale). Le coût de
l'immédiateté est une bonne mesure de la liquidité sur les
marchés continus comme le confirment Ahmihud et Mendelson [1986]. Le
coût de l'immédiateté peut être estimé par la
fourchette cotée représentant le coût d'un aller et retour
(ou d'un acheté vendu).
Sur les marchés d'agence, il n' y a pas de teneur de
marché cotant une fourchette et assurant la liquidité, sauf pour
les titres où une société de bourses assure une
activité d'animation. Sur ce type de marché, la liquidité
est fournie par des investisseurs plaçant des ordres à cours
limités. Le niveau de liquidité d'un titre résulte de la
confrontation de deux types d'ordres : les ordres
au « marché »38, sans limite de prix,
émanant des investisseurs pressés et les ordres a cours
limité, soumis par les investisseurs patients.
i Comparaison des deux types d'ordres : ordres a cours
limité et ordres au « marché »
Les ordres a cours limité ont une fonction
économique importante pour le marché car ils
révèlent l'information disponible aux investisseurs [Amihud et
Mendelson (1991)]. Ils permettent ainsi aux agents de mieux déterminer
le prix auquel ils acceptent de prendre part aux échanges. Pour qu'un
marché dirigé par les ordres soit viable, le prix payé par
les demandeurs de liquidité pour une exécution immédiate
de leurs ordres doit donc compenser les risques supportés par les
offreurs de liquidité a cours limité. Les investisseurs qui
placent les ordres au « marché » paient un coût
implicite pour l'exécution immédiate. L'investisseur a cours
limité lui fait face a deux coûts : le risque de non
exécution (fonction du prix de l'ordre et de l'évolution du
marché) et le risque de sélection adverse (dû a la
présence d'investisseurs informés). Cependant, l'investisseur qui
place un ordre a cours limité reçoit un meilleur prix
d'exécution qu'un ordre au « marché » car il
économise la différence entre le prix acheteur et vendeur.
L'exécution d'un ordre d'achat a cours limité ne
sera effective qu'en présence d'un vendeur qui valorise le titre a un
niveau équivalent ou inférieur a la limite de prix de l'acheteur.
Le risque de non-exécution dépend donc de la distribution des
agents entre les deux groupes. Ce risque correspond en fait a un coût
d'opportunité car l'investisseur a cours limité
non-exécuté perd une possibilité d'échange certaine
s'il place un ordre au « marché »
L'asymétrie d'information entre les agents est
effective si l'ordre d'achat (de vente) a cours limité est
exécuté contre un vendeur (acheteur) informé qui
échange après réception d'un signal négatif
(positif) sur la valeur du titre. A l'équilibre, les ordres a cours
limité sont évalués tels que l'utilité
espérée soit
38 L'ordre au « marché »
(anciennement « a tout prix », puis « au mieux ». Il permet
une exécution totale, mais ne permet pas de maîtriser le prix de
cette exécution. Il ne doit pas être utilisé pour des
valeurs très volatiles (bons de souscription, warrants) mais pour des
valeurs très liquides.
équivalente à celle d'un ordre au «
marché » c'est-à-dire espérée d'un
échange certain. Le risque d'échange par un ordre à cours
limité est compensé par l'amélioration de prix qui
résulte de l'exécution. Glosten [1994] analyse les
échanges réalisés à cours limité en
présence d'asymétrie d'information sur le marché. Il
montre qu'un investisseur place un ordre à cours limité seulement
si le gain attendu excède le coût de sélection adverse.
La rationalité et la rentabilité des
échanges via un ordre à cours limité sont analysées
par Handa et Schwartz [1996] ainsi que par Hasbrouck [1996]. Le prix
payé par les demandeurs de liquidité pour une exécution
immédiate doit compenser les risques supportés par les offreurs
de liquidité. Le gain obtenu par un investisseur plaçant un ordre
à cours limité près du marché est significativement
supérieur à celui des ordres au « marché ». Les
donneurs d'ordres à cours limité sont donc
rémunérés pour les risques auxquels ils doivent faire
face.
2.3. L'interaction de l'offre de liquidité et du
prix de l'immédiateté.
La liquidité d'un titre est une caractéristique
importante puisqu'elle permet aux investisseurs de réaliser des gains
sur une allocation des risques en utilisant la dynamique des échanges.
Un investisseur peut vouloir échanger immédiatement car il
possède une information privée sur la valeur future du titre ou
parce qu'il veut relancer son portefeuille. La présence d'agent(s)
informé(s) expose les agents non informés au risque de
sélection adverse. La conséquence directe est une modification
des prix cotés.
Sandas [1998] analyse comment l'asymétrie
d'information, le comportement stratégique des investisseurs et les
frictions du marché affectent les coûts de transaction sur un
marché d'ordres à cours limité. Il modélise le
processus d'échange sur ces marchés de la même
manière que Glosten [1994]. Le profit marginal obtenu des ordres
à cours limité est donc nul. Les teneurs de marché offrent
la liquidité aux investisseurs qui la consomment. Chaque investisseur
peut être successivement offreur ou demandeur de liquidité. Rock
[1996] et Seppi [1997] utilisent la même modélisation pour
étudier l'interaction entre le spécialiste et le carnet d'ordres
entre les marchés pour capter le flux d'ordres. Le coût de
sélection adverse est modélisé en fonction de la taille de
l'offre.
Les stratégies de placement d'ordres sont
étudiées par Biais, Martimort et Rochet [2000]. Ils
développent un modèle de concurrence entre les investisseurs sous
l'hypothèse de sélection adverse. Les offreurs de
liquidité affichent une grille de prix non linéaire auxquels ils
sont prêts à échanger avec un agent adverse au risque qui
possède une information privée sur la valeur fondamentale de
l'actif et sur ses propres besoins de couverture. Ils montrent qu'il existe un
équilibre unique où les offreurs de liquidité, en nombre
fini, gagnent un profit strictement positif. En effet, les teneurs de
marché pour prendre en compte le contenu informationnel des
échanges ajustent leur prix à la taille de transaction. Cet
ajustement de prix aux quantités entraîne une demande
résiduelle qui n'est infiniment pas élastique. L'avantage
monopolistique de cet arbitrage prix-quantité est donc maintenu dans un
univers oligopolistique. De ce fait chaque offreur de liquidité affiche
des prix pour lesquels son espérance de profit est strictement
positive.
3. Conséquences des opérations
d'initiés sur la liquidité.
Définir des conséquences des opérations
d'initiés sur la liquidité des marchés boursiers n'est pas
toujours chose facile ; tout comme l'impact de telles opérations sur
l'efficience informationnelle. Les conséquences de telles
opérations sur la liquidité des marchés boursiers ne sont
pas clairement définies. Plusieurs auteurs tentent de définir les
conséquences de ces opérations sur la liquidité des
marchés bousiers.
Pour Leland [1992], l'intervention des initiés
contribue à faire chuter la liquidité. A l'inverse, pour Cornell
et Sirri [1992], la présence des initiés sur le marché
permet plutôt d'améliorer la liquidité en faisant augmenter
le nombre du passage d'ordres par les non informés. Or, en
matière d'asymétrie d'information la littérature
prévoie que la réalisation d'opérations d'initiés a
pour conséquences l'augmentation du degré de sélection
adverse sur les marchés boursiers qui devrait se traduire par un
élargissement de la fourchette de prix39. Mais le
problème qui se pose à ce niveau c'est que les deux auteurs
39 La fourchette de prix est l'écart
séparant la limite supérieure de la limite inférieure
cotée à un instant donné.
ont vérifié cette hypothèse
théorique en étudiant l'évolution de la fourchette autour
des dates des délits d'initiés et ne mettent en évidence
aucun résultat signifIcatif. Cela se justifie par le fait qu'ils
utilisent une fourchette relative mesurée par l'estimateur de Roll
[1984] qui ignore la composante de sélection adverse de la
fourchette.
Dans une autre vision, Glosten et Milgrom [1985] montrent que
l'amplitude de la fourchette dépend notamment de l'arrivée
d'initiés sur le marché. Plus les initiés sont nombreux et
plus la qualité de leur information est grande, plus la fourchette a
tendance à s'élargir.
Guivarc'h [1996] , contrairement à Cornell et Siri
[1992] utilisent des fourchettes cotées et non estimées pour
montrer que la fourchette s'élargit de façon significative les
jours où les initiés réalisent leurs opérations
délictueuses.
CONCLUSION GENERALE ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE
Au terme d'une telle réflexion, conclure revient à
se prononcer sur l'efficience des marchés boursiers émergents
d'Afrique.
En effet, l'on a vu que ces marchés boursiers
connaissent de difficultés qui leur empêchent d'avoir le
même fonctionnement que leurs homologues des pays
développés. Ces difficultés vont de la simple lenteur
administrative à la lourdeur des procédures de demande pour
l'émission des titres, en passant par la mauvaise compréhension
des techniques financières par les entreprise qui engendre la
fragilité du rôle de ces marchés au niveau du financement
local, le manque d'information et de transparence, les faibles performances de
ces marchés etc.
Nonobstant ces difficultés, les marchés
émergents d'Afrique, tant bien que mal participent au financement des
entreprises et ont jusqu'à un passé récent atteint les
objectifs escomptés. Mais depuis quelques années, avec la
faillite des banques, ces marchés ont vu leurs responsabilités
dans le financement des entreprises augmenter. Leurs responsabilités et
leurs difficultés vont donc grandissante et posent le problème de
leur efficience à court, à moyen et à long terme.
Ce qui est vrai est que, dans un système où les
banques ne participent pas au financement des entreprises, il est difficile
qu'il n' y ait pas de problème. Croire que les marchés boursiers
émergents d'Afrique peuvent à eux seuls soutenir le financement
des entreprises Africaines paraît illusoire.
Pis lorsque s'y mêlent les problèmes politiques
si fréquents en Afrique tels les guerres civiles, les coups d'Etat etc,
le capital de confiance des bailleurs de fonds s'effrite et rend
vulnérable ces marchés.
Manne (1966) estime que la présence d'initiés
sur un marché boursier améliore le contenu informationnel des
cours cotés et donc de l'efficience informationnelle ; ceci se
justifiant par le fait que lorsque ces opérations sont permises, les
cadres des entreprises exploitent au maximum leur information privée qui
est ainsi incorporée dans le cours coté. Cette hypothèse
semble ne pas être vérifiée en ce qui concerne les
marchés émergents d'Afrique ; ceci
pour des raisons suivantes : d'abord, il semblerait que les
marchés boursiers émergents d'Afrique ne sont pas efficients
compte tenu de leur manque de transparence. Ensuite, la corruption, un
fléau qui leur est commun, viendrait aggraver la situation si de telles
opérations étaient permises.
En somme, nous pensons que dans le cadre des marchés
émergents d'Afrique, les opérations d'initiés doivent
être interdites compte tenu du manque de crédibilité de
certains dirigeants cadres d'entreprises africaines. Ceux-ci chercheraient
plutôt à réaliser des profits de leur information
privilégiée au dépens de non informés ; ce qui
pourrait avoir des conséquences sur les caractéristiques de
marché telles que l'efficience ou la liquidité et
entraînerait même les asymétries d'information et des
risques de sélection adverse.
Au regard de tout ce qui précède, il se
dégage clairement que l'inefficience ou alors la faible efficience des
marchés boursiers Africains sont inhérentes au contexte dans
lequel ces derniers se trouvent. Si tel est le cas la question que l'on se
trouve en droit de se poser est celle de savoir comment faire pour rendre
efficients les marchés boursiers émergents en Afrique
sub-saharienne.
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