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INTRODUCTION
Un consensus s'est maintenant établi dans la
littérature économique autour de l'idée selon laquelle une
des voies les plus sûres pour rendre la croissance durable et combattre
la pauvreté est d'améliorer le capital humain. Celui-ci constitue
une source d'innovations technologiques qui agit positivement sur la
productivité du travail et, donc, sur la croissance de
l'économie. La théorie de la croissance endogène a
largement mis en évidence les effets positifs du capital humain sur la
croissance. Toute réforme visant à favoriser l'accumulation de ce
capital est susceptible d'atteindre les pauvres. Pour un développement
durable, un accent particulier doit donc être mis sur l'accès
à des services de base. Et du fait des défauts de marché,
l'intervention de l'Etat est vue comme le moyen le plus efficace d'assurer
l'équité et l'efficacité dans la provision de ces
services.
A l'instar des autres pays en développement, le
Bénin s'est engagé depuis 1999 dans la mise en oeuvre d'une
stratégie nationale de réduction de la pauvreté pour un
développement humain durable. Après l'ébauche d'une
Stratégie Intérimaire de Réduction de la Pauvreté
(SRP, 2000), une stratégie triennale (2003-2005) a été
définie et a servi depuis lors comme cadre stratégique de
référence, de programmation et de budgétisation des
actions gouvernementales, ainsi que pour le dialogue avec les partenaires
techniques et financiers. Dans cette première stratégie, le
Gouvernement du Bénin a mis l'accent sur le développement du
secteur social et l'amélioration de la gouvernance pour renforcer
respectivement les ressources humaines et l'efficacité des actions, afin
de bâtir les fondations pour le développement humain durable. La
Stratégie de Croissance pour la Réduction de la Pauvreté
(SCRP) constitue une stratégie de deuxième
génération pour le triennal 2007-2009, et vise à
consolider les acquis du précédent tout en mettant l'accent sur
la diversification de l'économie et l'intensification de la croissance
afin d'accélérer la lutte contre la pauvreté et la marche
du Bénin vers l'atteinte des Objectifs du Millénaires pour le
Développement (OMD).
Ces dernières années le Bénin a accompli
d'importants progrès dans le domaine des services sociaux. Plusieurs
indicateurs sociaux ont affiché des progrès notables avec des
améliorations importantes dans les secteurs de l'éducation, de la
santé, de l'accès à l'eau potable et d'autres besoins de
première nécessité.
Par exemple le taux brut de scolarisation primaire
estimé à 67% en 1995 est évalué à 80% en
2000 tandis que l'espérance de vie à la naissance était de
56,3 ans au cours de la même période. En plus, on assiste à
un taux remarquable au niveau de la fréquentation des services de
santé passant ainsi de 19,6% en 1992 à 44% en 1998
(Troisième Conférence des Nations Unies sur les pays les moins
avancés).
En dépit des améliorations sur le plan social,
la pauvreté persistait passant de 26,5% en 1996 à 33,8% en 2002
(PNUD 2002). Aussi, le retard enregistré par rapport à des pays
comparables reste important; de même que persistent les disparités
d'accès entre les régions, les sexes et les groupes de
ménages. La persistance des inégalités dans l'accès
aux services de base (santé, éducation, accès à
l'eau potable....) va de pair avec la dégradation des conditions de vie
des populations.
Selon le PNUD, le Bénin reste l'un des pays les plus
pauvres du monde. Dans son rapport sur le développement humain, l'IDH
passait de 0,408 en 1997 à 0,437 en 2005 plaçant ainsi le
Bénin au 163è rang sur 177 pays couverts. Les résultats
partiels et provisoires de l'EMICoV révéleraient notamment que
:
· Le taux de pauvreté monétaire au
Bénin en 2006 demeure encore élevé et semble même
avoir augmenté par rapport à 2002 (résultat de
l'enquête QUIBB);
· La pauvreté au Bénin varie
considérablement selon les zones de résidence, l'incidence
étant de 27% en moyenne en milieu urbain contre 40,6% en zone rurale.
Toutefois, les analyses montreraient que la pauvreté d'existence
(c'est-à-dire les conditions matérielles non monétaires de
vie des populations) semble avoir légèrement reculé au
Bénin (de 43% à 41 %), par contraste avec la pauvreté
monétaire, alors que de leur coté, les ménages
béninois estiment qu'ils vivent de plus en plus difficilement, selon les
résultats des enquêtes de perception sur la pauvreté
subjective.
Face à cette situation peu satisfaisante, l'on a
cherché à s'interroger sur le rôle qu'ont joué les
puissances publiques dans la réduction de la pauvreté à
travers les dépenses publiques sociales. A cet effet, un certain nombre
de questions ont suscité notre attention à savoir : L'orientation
et le niveau des dépenses sociales sont-ils de nature à lutter
contre la pauvreté des populations vulnérables? En d'autres
termes, les services sociaux sont-ils ciblés vers les pauvres? Est-ce
que les dépenses publiques sociales ont un effet favorable sur les
conditions de vie des populations vulnérables?
Pour répondre à ces préoccupations, le
présent travail de recherche intitulé «INCIDENCE DES
DEPENSES PUBLIQUES SOCIALES DANS LA REDUCTION DE LA PAUVRETE:
Cas du Bénin» se fixe comme objectif général
d'analyser l'impact des dépenses publiques sociales sur le bien
être des populations vulnérables notamment dans les secteurs de
l'éducation et de la santé. De façon spécifique, il
s'agit d'une part d'analyser les distributions des dépenses publiques
sociales dans ces deux secteurs au Bénin et d'autre part de mesurer
l'effet des dépenses publiques sociales sur la réduction de la
pauvreté au cours de ces dernières années. Pour atteindre
ces objectifs, nous formulons les hypothèses suivantes:
1- Les dépenses publiques sociales sont
inégalement réparties entre les différentes
catégories sociales.
2- Les pauvres profitent moins des dépenses publiques
sociales.
3- Les dépenses publiques sociales influencent
positivement la sensibilité des indices de pauvreté (FGT).
Cette présente étude tentera d'apporter sur le
plan pratique un éclairage quant à l'importance de l'orientation
et de la qualité des politiques de dépenses publiques au
Bénin en matière de réduction de la pauvreté, eu
égard aux considérations théoriques et spécifiques
de l'économie béninoise.
Pour y parvenir, à cet effet, le présent travail
est organisé autour de chapitres : Le premier chapitre porte sur le
cadre théorique et méthodologique de la recherche. Le second
s'articule autour de la situation des dépenses publiques au
Bénin. Et enfin
le dernier chapitre présente l'analyse des dépenses
publiques sociales sur la pauvretépour finir par les
recommandations.
CHAPITRE 1: CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
DE
RECHERCHE
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Section 1: Cadre Théorique
1.1: Cadre conceptuel de
pauvretéLe concept de pauvreté a toujours
existé dans les thèses des économistes
(Larivière et Martin). Mais il a évolué
considérablement depuis le 18e siècle. De nos jours la
pauvreté peut prendre une forme subjective ou objective. L'approche
subjective consiste non pas à se référer à un seuil
minimal de ressources défini conventionnellement ou à des
conditions objectives d'existence, mais à interroger directement les
ménages sur la perception qu'ils ont de ces réalités,
à partir de questions sur leur revenu, le revenu minimum
nécessaire selon eux "pour joindre les deux bouts" et/ou leur
degré "d'aisance financière". Différentes méthodes
permettent ensuite, sur la base de ces réponses, d'établir un
seuil de pauvreté subjectif : les ménages dont le revenu est
inférieur à ce seuil seront alors considérés comme
pauvres (insécurité d'existence objective).
L'approche objective quant à elle retient des
éléments objectifs pour mesurer la pauvreté. On peut citer
: la pauvreté monétaire et la pauvreté par les conditions
d'existence. Parmi les multiples approches de la pauvreté, celle qui
s'intéresse à la mesure de la pauvreté monétaire
est la plus fréquente et est considérée comme pauvre toute
personne dont les ressources sont inférieures à un certain seuil
de pauvreté. La pauvreté par les conditions d'existence se
définie en terme de privation relative et qui a d'abord
été développée par Peter Townsend puis, avec une
démarche différente, par Paul Dickes. Elle cherche à
repérer un certain nombre de difficultés, de manques ou de
privations dans différents domaines des conditions d'existence des
ménages. Ces domaines peuvent renvoyer à une pauvreté de
nature "existentielle" (alimentation, logement par exemple) ou de nature
"sociale" (relations, emploi, loisirs, ...).
1.2. Revue de littérature
On acceptait déjà au 18è siècle le
droit aux individus d'être assistés et à l'Etat, le devoir
de prêter assistance aux populations dans le besoin. Les
économistes classiques comme Smith et Ricardo ont rejeté la
vision pessimiste de Malthus en la matière. Notons que les
économistes classiques considéraient comme important
d'améliorer le capital humain par de meilleurs soins de santé et
un plus grand accès à l'éducation de base pour augmenter
la productivité et favoriser l'émergence d'initiatives
individuelles. Leurs hypothèses ont été confirmées
par la suite dans de nombreuses études empiriques dans les pays en
développement (Welch (1970), Schultz 1981, Jamison and Lau (1982)).
A partir de 1960, deux courants de pensée ont
émergé. D'un côté, certains suggèrent de se
concentrer sur l'augmentation des revenus et de laisser les personnes choisir
l'allocation optimale de ressources selon leurs préférences
personnelles. De l'autre côté, les défenseurs de l'approche
des besoins essentiels privilégient la fourniture de services sociaux de
base de la manière la plus large possible (Larivière et Martin).
Ces deux approchent avec quelques nuances sont désignées
aujourd'hui respectivement par l'approche "welfariste" et l'approche "non
welfariste".
L'approche Welfariste définit le bien être par le
niveau d'utilité qu'atteint un individu. Ce niveau est fonction des
biens et services qu'il consomme. Cette approche attache donc une grande
importance aux perceptions de la personne quant à ce qui lui apporte de
l'utilité, c'est à dire du bien-être. En terme de mesure du
niveau du bien être, cette approche va donc privilégier des
indicateurs plus <<neutres» c'est à dire qui ne
privilégient pas un type de bien sur un autre, l'important étant
que la personne en retire de l'utilité.
A l'opposé, l'approche <<non welfariste»
définit le bien être de manière indépendante des
perceptions individuelles en se basant sur ce que le planificateur estime
être souhaitable pour l'individu d'un point de vue social. En terme de
mesure
du bien-être, cette approche va donc se servir
d'indicateurs sélectifs portant sur certains biens jugés
socialement utiles. En particulier, les planificateurs vont
généralement privilégier une alimentation adéquate,
un meilleur accès à l'éducation, aux soins de
santé, aux logements, à l'eau potable, etc. (Ravallion 1992).
On peut donc dire qu'évaluer les aspects distributifs
des dépenses publics au niveau du bien-être constitue une
préoccupation qui n'est pas nouvelle.
Les travaux d'Aron et Mc Guire (1970), de Meerman (1979) et de
Selowsky (1979) ont défini les deux grandes approches largement
utilisées de nos jours. Dans la synthèse qu'il a faite de ces
approches, Van de Walle et Kimberly (1995) relève deux niveaux de
complexité. Une première complexité porte sur la
valorisation du bien public. En effet les biens publics sont des biens dont les
prix, s'ils sont observables, reflètent rarement la valeur
intrinsèque du bien. La seconde complexité porte sur l'importance
du service public pour l'utilisateur. En effet, l'utilité que procure le
bien dépend de plusieurs facteurs propres au bénéficiaire
et ceci complique la mesure globale du bien-être. Par exemple, une
école primaire pour une famille sans enfant n'a pas la même valeur
comparée à une famille avec des enfants en âge de
fréquenter.
Aron et McGuire (1970) ont cherché à
appréhender la valeur subjective du bien public pour l'individu en
estimant des prix virtuels. Cependant, les difficultés liées
à une telle entreprise en ont limité l'application. Les travaux
se sont orientés vers une approche moins exigeante qui consiste à
valoriser un bien public à son coût marginal (Brennan, 1976).
Là encore, deux tendances se sont dégagées. La
première emprunte la voie d'Aaron et McGuire (1970) en tentant de
prendre en compte les préférences individuelles tandis que la
seconde, plus pragmatique consiste à combiner le coût unitaire des
services publics et l'accès à ces services pour fournir une
distribution des bénéfices.
Van de Walle (1996) a procédé à une revue
critique des méthodes d'évaluation des dépenses publiques.
Il ressort de son étude qu'il existe de nombreuses approches pour
évaluer l'impact des dépenses publiques, mais les méthodes
les plus courantes sont la méthode de l'incidence des avantages
(benefit incidence analysis) et
l'approche basée sur le comportement des ménages
(behavioral approach).
L'approche basée sur l'analyse de l'incidence des
avantages des dépenses publiques a été fortement
influencée par les études de Meerman (1979) et de Selowsky (1979)
qui constituent respectivement une application à la Malaisie et à
la Colombie. Cette approche à été largement suivie et de
nombreuses décisions gouvernementales relatives à la
répartition des ressources budgétaires dans les pays en
développement ont été basées sur des
recommandations formulées sur la base de cette méthode.
Dans la majorité des cas, ces études conduisent
à la conclusion que les dépenses allouées aux secteurs
sociaux de base (éducation primaire et santé) sont progressives
contrairement à celles qui sont destinées à l'enseignement
supérieur et au secteur tertiaire de la santé. La grande audience
dont a pu bénéficier cette méthode s'explique en grande
partie par sa simplicité et la diversité des présentations
des résultats en vue de montrer le caractère progressif (ou
régressif) des diverses composantes des dépenses publiques.
Castro-Leal et al. (1999) ont utilisé cette approche
pour étudier l'impact des dépenses d'éducation et de
santé dans un échantillon de sept pays africains. Leur travail
montre que ces dépenses bénéficient peu aux pauvres
comparativement au quintile le mieux aisé de la population. Pour ces
auteurs, la solution au problème ne se limite pas à un simple
réajustement des dépenses publiques. Il est important de prendre
en compte les contraintes qui empêchent les pauvres de tirer partie des
subventions des services sociaux.
L'approche comporte cependant de nombreuses limites. En effet
l'analyse de l'incidence des avantages donne une vision incomplète de
l'impact des dépenses publiques sur le bien-être. Non seulement
elle ne permet pas de cerner tous les aspects du bien-être, mais la
fiabilité des inférences distributionnelles obtenues à
partir de cette approche reste conditionnée par
l'homogénéité de la participation des différents
groupes de ménages aux programmes mis en oeuvre. Lanjouw et Ravallion
(1998) ont montré que les avantages tirés de l'éducation
et des programmes de lutte
contre la pauvreté profitent d'abord aux non pauvres.
Toutes choses qu'ignorent, selon eux, les approches basées sur
l'incidence des avantages.
Le résultat de Lanjouw et Ravallion (1998) repose sur
un modèle d'économie politique dans lequel le gouvernement, pour
offrir le service public doit prélever des taxes auprès de la
population non pauvre pour le financer. La contrainte de faisabilité
impose que les non pauvres ne soient pas perdants puisqu'ils portent sur eux le
financement. Et ce n'est que lorsque le coût marginal d'expansion du
programme sera plus bas que celui-ci pourra atteindre les couches pauvres de la
population. Pour tester la validité du modèle, les auteurs
procèdent en régressant, pour un quintile donné le taux de
participation du quintile sur le taux de participation global au sein de la
région. L'application à l'Inde a corroboré la conclusion
du modèle.
L'approche basée sur le comportement des ménages
utilise généralement des techniques économétriques
pour explorer les effets des dépenses publiques sur les biens et
services pour lesquels on ne peut pas identifier des usagers spécifiques
de même que l'impact sur d'autres dimensions du bien-être (Van de
Walle, 1996). En général, les variations compensatoires et/ou
équivalentes du revenu servent de moyen pour mesurer les aspects
monétaires du bien-être tandis que les indicateurs sociaux comme
le taux de mortalité, le statut nutritionnel sont utilisés comme
indicateurs non monétaires de l'impact des dépenses publiques.
Cette approche offre l'avantage de rendre compte de la réaction des
différents groupes socio-économiques à une variation du
prix des services offerts.
Cependant, elle comporte au moins deux limites importantes.
D'abord, le recours à l'économétrie pose le
problème de robustesse des estimateurs des effets des dépenses
publiques. Un des problèmes dans l'évaluation des effets des
dépenses est celui de l'identification du bien-être. La
méthode qui est adoptée la plupart du temps est l'utilisation des
informations issues des enquêtes. Il existe des tentatives visant
à combiner l'analyse de l'incidence des avantages et l'approche
basée sur le comportement des ménages. Ce procédé
peut être un moyen commode pour pallier certaines insuffisances
relevées plus haut. Par exemple Cox et Jimenez (1995) ont
évalué l'impact distributionnel des
dépenses gouvernementales aux Philippines en intégrant les
transferts nets reçus en l'absence d'intervention publique dans un
modèle de comportement.
Depuis le début des années 1990, de nombreux
modèles d'équilibre général ont été
construits pour étudier les effets des politiques de stabilisation et
d'ajustement structurel dans les pays en développement. Cependant, la
méthode de désagrégation des ménages en
catégories ou groupes socio-économique qu'impose la matrice de
comptabilité sociale utilisée dans ces modèles revient en
fait à baser l'analyse sur des ménages représentatifs.
Cela constitue l'une des faiblesses de cette approche lorsqu'il s'agit
d'aborder la question de la pauvreté car, dans ce cas, elle
réduit le champ de l'analyse à la seule comparaison intergroupe,
la question essentielle de la comparaison intra-groupe étant
considérée comme impossible (Patry, 2001).
C'est dans ce cadre que Décaluwé, Patry, Savard
et Thorbecke (1999) ont construit un modèle d'équilibre
général calculable (EGC) d'une économie de
développement type incorporant la dimension de la pauvreté. Ce
modèle se distingue par trois éléments. D'abord, il
propose une fonction de distribution Bêta (réputée plus
flexible que les fonctions log-normale et Pareto) pour caractériser la
distribution des revenus dans chaque groupe de ménages. Ensuite, les
distributions intra-groupe des revenus sont spécifiées dans le
but de se conformer aux caractéristiques des groupes
socio-économiques. Enfin, le modèle comporte une ligne de
pauvreté endogène déterminée sur la base d'un
panier de consommation unique couvrant les besoins essentiels de la
population.
Il faut noter cependant que les décideurs de politique
économique sont surtout intéressés de savoir qu'elle
serait l'incidence d'une réforme des dépenses publiques. Plus
spécifiquement, dans quelle proportion une hausse de ces dépenses
améliore l'accès des populations défavorisées aux
services de base. La méthode de l'incidence moyenne ne pourrait
répondre à cette question que si on suppose que l'expansion des
services publics bénéficiera aux catégories de population
proportionnellement au gain actuel. Ceci n'est pas forcément le cas, et
ce n'est généralement pas le cas dans la
provision des services publics. En effet, les mesures
d'expansion des services publics visent généralement à
améliorer l'accès au niveau des groupes de population les plus
défavorisés par la distribution actuelle. Et dans ce contexte, il
est raisonnable de s'attendre à ce que ces groupes de populations
bénéficient relativement plus de telles mesures que ceux qui sont
les mieux favorisés.
L'ambition de la méthode d'analyse d'incidence
marginale est de fournir une réponse à cette
préoccupation. Van de Walle dans Bourguignon et Stern (2003)
présente une synthèse de ces différentes approches. Comme
l'a souligné Younger (2003) ces différentes méthodes ne
mesurent pas toujours la même marge et elles n'ont d'ailleurs aucune
raison de le faire dans la mesure où plusieurs variations marginales
peuvent être d'un intérêt pour le décideur politique
: marge relative à une expansion du programme, à une
réduction de coût de participation, à une
amélioration de qualité des services.
L'approche méthodologique choisie dans cette
étude est dictée par la disponibilité des données.
Elle s'inscrit dans le cadre de l'analyse d'incidence moyenne des
dépenses publiques. Une approche paramétrique sera ensuite
utilisée pour examiner les effets des dépenses publiques sociales
sur la pauvreté.
Section 2 : Approche méthodologique
2.1. Techniques d'analyse
Pour la vérification de nos hypothèses,
l'approche méthodologique utilisée sera basée sur deux
techniques d'analyse, basée d'une part sur l'incidence moyenne pour les
deux premières hypothèses, et d'autre part l'effet marginal par
un modèle paramétrique pour la dernière
hypothèse.
-L'incidence moyenne
L'incidence moyenne permet de connaître la distribution
actuelle des dépenses publiques au sein de la population. Pour faciliter
la présentation, nous prendrons le cas des dépenses en
éducation.
Les dépenses totales d'éducation sont
réparties dans les trois niveaux (primaire, secondaire, supérieur
indexé par i). La population étant
découpée en quintiles de bien-être ou selon tout autre
critère pertinent (région, sexe,...), la part des dépenses
publiques profitable au quintile j peut être estimée par
l'équation suivante:
3
Bj = ? nij .Di / ni
(E1)
i =1
Où nij est le nombre
d'individus du groupe j ayant accès au service
i, ni est le nombre total des individus
fréquentant le niveau d'enseignement i, Di
les dépenses totales en éducation pour le niveau i
(le coût unitaire vaut alors
Di/ni).
L'incidence des dépenses publiques sur le quintile j
dépend ainsi de deux facteurs:
L'allocation intra sectorielle du budget notamment en faveur
des services les plus utilisés par le groupe j et la
fréquentation relative de ces services par le groupe j. Par
exemple, si la couche la moins aisée de la population fréquente
relativement plus le niveau primaire, le bénéfice tiré des
dépenses publiques sera d'autant plus grand que l'allocation des
dépenses publiques accorde une importance plus grande au niveau primaire
qu'aux autres niveaux.
Dans la pratique, on procède selon une méthodologie
qui peut être décomposée en trois étapes :
- 1ère étape : Identifier les usagers des
services publics
Si les données disponibles au niveau des structures qui
fournissent les services publics permettent généralement de
caractériser avec précision les services utilisés,
elles ne sont pas assez détaillées pour
permettre une discrimination des usagers selon le niveau de bien-être.
C'est pourquoi on recourt aux données d'enquêtes auprès des
ménages. Celles-ci malheureusement permettent rarement de distinguer
selon la nature, la qualité des services reçus ou le type de
structure qui a fourni ces services.
- 2ème étape : Estimer la valeur du service
reçu
La manière de valoriser le bénéfice
reçu est certainement l'une des principales faiblesses de la
méthode du benefit incidence analysis. On
procède typiquement en divisant le niveau des dépenses publiques
par le nombre de bénéficiaires de ces services pendant la
période couverte par les dépenses. Il est évident qu'une
telle manière de procéder est loin de refléter les
différences au niveau de la nature ou de la qualité des services
reçus.
L'idéal serait de disposer des données sur les
dépenses courantes aussi bien par région que par type de service
: éducation primaire, secondaire ou supérieure, soins de
santé primaire, secondaire,... Ceci permettrait d'estimer des
coûts unitaires plus proches de ceux des services auxquels ont
accès les ménages. Cependant, il est difficile d'obtenir des
données aussi désagrégées.
- 3ème étape : Imputation des
bénéfices et agrégation
Après avoir identifié les
bénéficiaires et estimé le coût unitaire du service,
la dernière étape consiste à affecter ce coût
unitaire comme proxy du bénéfice reçu et à
agréger les individus selon le découpage adopté pour le
niveau de bien-être. L'objet de l'analyse sera l'individu car il s'agit
de l'accès à la santé et à l'éducation.
-Evaluation d'impact des dépenses publiques sur
les conditions de vie des populations.
La méthode précédente donne une
photographie de la distribution des dépenses publiques à un
moment donné. La critique la plus fréquente qu'on lui porte est
qu'elle ne montre pas l'impact qui résulterait d'une expansion de ces
services publics.
Dans cette étude, il sera question d'analyser l'impact
que revêtent ces dépenses publiques sur la mesure de
pauvreté. Pour analyser cet impact nous permettant de vérifier
notre troisième hypothèse, nous utiliserons un modèle de
données en panel qui mettrait en relation les dépenses publiques
sociales (en éducation et en santé) et les indices de
pauvreté (FGT) au niveau départemental sur la période des
enquêtes effectuées au Bénin et couvrant notre
période d'étude.
Le terme «données de panel» se
réfère à une combinaison des séries temporelles
simples (données portant sur un individu observé sur une
période) et des données en coupe instantanée
(données portant sur plusieurs individus observés à un
moment donné). Un panel présente donc un ensemble d'individus
(ménages, pays, départements, etc...) observé sur une
période donnée. En plus du fait qu'elles permettent de prendre en
compte à la fois les données indexées sur le temps et
celles sur les individus, les données de panel permettent
également d'avoir plus de données, plus de variabilité et
moins de colinéarité.
En matière de données de panel, on distingue
deux types de modèles : les modèles à effets communs et
les modèles à effets individuels. Les modèles à
effets communs sont ceux formulés sous l'hypothèse
d'uniformité des comportements entre les individus. Ceci revient
à supposer que les différents coefficients du modèle sont
indépendants du temps et identiques entre les individus. Ce genre de
modèle se spécifie de la façon suivante :
Yit = á + âXit + vit (E2)
Où vit représente le
résidu (supposé suivre une loi normale).
Les modèles à effets individuels se subdivisent
en deux groupes : les modèles à effets fixes et ceux à
effets aléatoires. Le choix de l'un ou l'autre de ces deux groupes est
déterminé par le test Hausman.
Largement utilisés dans l'analyse des données de
panel, les modèles à effets fixes sont ceux pour lesquels les
effets individuels sont représentés par les constantes
déterministes. Ainsi le modèle s'écrit :
Yit = ái + âXit + vit (E3)
Alors que les modèles à effets aléatoires
s'écrivent :
Yit = u + âXit + åit (E4)
Où on adopte la décomposition suivante pour le
terme d'erreur : åit = ái + vit
Les variables ái désignent ici les effets
individuels qui représentent l'ensemble des spécificités
structurelles ou atemporelles de la variable endogène, qui
diffèrent selon les individus. On suppose ici que ces effets sont
aléatoires. Le processus stochastique désigne la composante du
résidu total åit; orthogonale aux effets individuels et
aux effets temporels.
Pour cette étude, le modèle général
sera sous la forme:
Pit = ái + âXit + åit (E5)
Où P représente la variable endogène
caractérisée par les indices de pauvreté tels que
notifié dans notre hypothèse, Xit désigne les
variables explicatives caractérisées par
le choix des variables, ái étant l'effet
individuel, åit le terme d'erreur, i et t désignent
respectivement les individus et le temps.
L'hypothèse no 3 est formalisée à
partir de la relation fonctionnelle qui pouvait exister entre le montant des
dépenses sociales et les indices de pauvreté.
Ainsi, de façon spécifique, le modèle se
présente de la manière suivante:
Pit = áit + b1éduit +
b2santit + b3indic2000i + b4indic2002i +b5indic2006i
+åit (E6)
Avec P comme indice de pauvreté décomposée
en trois sous variables endogènes à savoir :
-P0 l'incidence de pauvreté.
-P1 la profondeur de la pauvreté.
-P2 la sévérité de la pauvreté.
Les variables exogènes sont caractérisées
d'une part par les dépenses sociales en éducation (édu) et
en santé (sant) prises de façon distincte au niveau
départemental.
Indic représente la variable indicatrice
caractérisée par le montant alloué par l'Etat au cours des
années de l'étude. Elle est une variable binaire qui prend la
valeur 1 pour les dépenses sociales et 0 pour autre, á l'effet
individuel, b1 , b5 représentent les coefficients à estimer,
å est terme d'erreur, i et t
représentent respectivement les individus observés (ici les
départements) et le temps.
L'estimation du modèle se fait par la méthode
des Moindres Carrés Ordinaires (MCO) sur le logiciel STATA (Version9).
Aussi pour la validation du modèle à effet retenu, des tests
économétriques sont nécessaires avant d'interpréter
les résultats au seuil de 5 %.
Il sera donc question de mettre en relation ces dépenses
publiques sociales et la mesure de pauvreté à savoir les indices
FGT.
L'analyse ici étant de montrer qu'il existe une
amélioration du bien-être lorsque le gouvernement pratique de
meilleurs niveaux de dépenses sociales. Le signe attendu est positif et
significatif ; l'objectif est de mieux appréhender la contribution de
chaque secteur social au niveau départemental.
Après la spécification du modèle, nous
procéderons à une série de tests
économétriques pour la validation du modèle avant
l'interprétation des résultats.
- Test d'
hétéroscédasticité
La condition de vérification du test d'
hétéroscédasticité s'écrit alors comme
suit:
V (åi)= s2 i?0
Pour vérifier cette hypothèse nous utiliserons
le test de Breuch-Pagan, qui consiste à vérifier si le
carré des résidus peut être expliqué par les
variables du modèle. Si c'est le cas il y a
hétéroscédasticité.
- la qualité de régression R2
- le test de significativité global du modèle de
Fisher
- le test de normalité de Jarque-Bera
Le modèle développé pour la
troisième hypothèse est essentiellement un outil d'analyse
quantitative qui nous permet d'apporter notre modeste contribution à la
compréhension de l'impact potentiel des ressources internes de la
puissance publique sur le bien-être au Bénin.
2.2. Choix de l'indicateur de
pauvreté
Un indicateur de pauvreté est une variable proxy
mesurable et aussi près de la réalité que possible d'une
dimension particulière spécifié dans l'espace de la
pauvreté. L'indicateur de pauvreté est différent d'une
mesure de pauvreté et aussi d'indice de pauvreté. L'indice de
pauvreté est une fonction de l'indicateur de pauvreté (revenu)
sur l'ensemble de la population. L'indicateur permet de déterminer si le
ménage ou l'unité statistique sur laquelle porte l'étude
est ou non pauvre (mesure de pauvreté). L'indice de pauvreté
mesure la proportion de pauvres au sein d'une population.
La mesure de la pauvreté se fonde sur la
détermination d'une ligne (ou d'un seuil) frontière après
la correction de la consommation pour donner une consommation par tête
ajustée dans le ménage. Il restera à fixer le minimum du
seuil acceptable pour atteindre le niveau de vie standard de la
société de référence. Cela conduit à la
distinction entre ligne absolue et ligne relative. Le seuil de pauvreté
sera le minimum requis pour couvrir les besoins calorifiques par jour
(2400cal/j). On détermine ensuite la dépense qu'il faut pour
atteindre les 2400 calories à partir des produits alimentaires les plus
consommés. En admettant que les besoins non alimentaires
représentent la moitié de ceux alimentaires on arrive à
fixer la ligne. Toute personne dont la consommation par tête
ajustée n'atteindrait pas ce niveau sera considérée comme
pauvre.
Dans notre analyse, Les ménages béninois ont
été subdivisés en cinq catégories suivant le niveau
de bien être mesuré par les dépenses annuelles ; La
dépense moyenne annuelle d'un ménage béninois est de
829286 FCFA soit 69107 FCFA/mois. Les ménages ayant un niveau de
dépense inférieur à la moyenne annuel sont
considérés comme pauvres.
2.3. Source et collecte des
données
Étant donné que l'objectif principal de notre
étude est d'analyser l'impact des dépenses publiques sur le
niveau du bien-être des populations vulnérables, les
données recueillies proviennent des enquêtes ménages
réalisées au Bénin à savoir l'Enquête
Légère Auprès des Ménages (ELAM), Enquête sur
la Conditions de vie des Ménages(ECVR) et l'Enquête Modulaire
Intégrée sur les Conditions de Vie des Ménages(EMICoV) . A
cela s'ajoutent d'autres sources principales: l'INSAE, la DGE, le
Ministère de l'éducation, le Ministère de la Santé,
le Ministère de l'Economie et des Finances.
Dans le cadre de notre étude nous retenons la
période allant de 2000 à 2006. Cette période inclus les
années pendant lesquelles ont été réalisées
les enquêtes ménages au Bénin. Cependant,
premièrement l'analyse liée à la technique d'incidence se
fera à partir des données de l'enquête EMICoV
réalisée en 2006 afin d'appréhender la comparaison
distributive des parts obtenues par les catégories sociales. Ensuite,
nous retenons les trois enquêtes réalisées en 2000, 2002 et
2006 à savoir l'ECVR, le QUIBB et l'EMICoV pour interpréter les
résultats mettant en évidence l'impact des dépenses
sociales sur les indices de pauvreté.

CHAPITRE 2 : SITUATION DES DEPENSES PUBLIQUES
Section 1: Structure des dépenses publiques
1.1. Répartition des dépenses
gouvernementales
Les dépenses publiques constituent un instrument
important dont se sert la puissance gouvernementale pour améliorer le
bien-être collectif et individuel. L'objectif étant de mettre en
place une politique économique favorable à une forte croissance
indispensable à la réalisation des politiques de lutte contre la
pauvreté. Le graphique suivant illustre l'évolution des
dépenses sociales totales de l'Etat béninois au cours de ces
dernières années.
Graphe1: Evolution des dépenses totales de 2000
à 2006 (en milliard de F CFA)
500 450 400 350 300 250 200 150 100 50
0
|
|
|
|
|
Dépenses totales
|
|
|
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
|
|
|
Source: Réalisé par les auteurs à
partir des informations budgétaires de la DGAE/MEF.
L'examen du graphique montre que les dépenses totales de
2000 à 2006 ont connu une évolution assez relative. Mais on
observe une baisse sensible en 2004 qui
se traduit par un creux. L'évolution des
dépenses totales de l'Etat béninois s'explique par les politiques
de stratégies sociales de l'Etat visant à réduire la
pauvreté grâce à des programmes de lutte contre le
paludisme, la politique liée à l'accès à
l'éducation pour tous; en l'occurrence les filles.
1.2 : Répartition des dépenses
gouvernementales sectorielles (en matière d'éducation et de
santé)
Les dépenses de santé et d'éducation sont
justifiées si elles améliorent le niveau de vie des populations
et permettent de prévenir et soigner des maladies. Selon Filmer et al
(1998), la structure des dépenses sociales en conditionne l'impact.
-La répartition des crédits alloués
au secteur éducatif
Les crédits gouvernementaux accordés à
l'éducation ont connu une évolution assez particulière au
cours de la période d'étude comme en témoigne le tableau
cidessous.
Tableau1 : Parts du budget de
l'éducation dans le budget de l'Etat
Années
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Éducation/Budget National(%)
|
10,8
|
17,2
|
3,7
|
4,0
|
4,7
|
4,8
|
23,5
|
Source: Calculs faits à
partir des informations du budget national
Le gouvernent béninois en général affecte
à l'éducation moins de 20% du budget national. La dotation de
2006 est celle qui a dépassé le seuil de 20%. Celle de 2002 est
la plus faible rapportée au budget national. En d'autres termes, les
rapports de crédits affectés à l'éducation
indiquent que les ressources allouées au système éducatif
ont connu une évolution en dent de scie.
Graphe2: Evolution du budget affecté
à l'éducation de 2000 à 2006. (en milliards)

120
100
40
20
80
60
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
éducation
Source: Graphique
réalisé par les auteurs à partir des informations
budgétaires de la DGAE/MEF
L'analyse du graphique montre une évolution en dent de
scie du budget alloué à l'éducation. Les ressources
affectées à l'éducation représentent en moyenne
9,8% des ressources budgétaires. Les dépenses de fonctionnement
absorbent une part plus importante de ces dépenses: près de 20%
des dépenses publiques allouées au secteur en 2006.
Les dépenses en investissement bien que relativement
faibles sont en majorité utilisées pour les besoins en
infrastructures (construction d'écoles primaires, secondaires et
d'amphithéâtre) et l'achat d'équipements.
En ce qui concerne les ordres d'enseignement, les affectations
des ressources présentent plusieurs disparités. Les variations au
niveau de l'enseignement primaire et secondaire sont consignées dans le
tableau ci-dessous.
Tableau 2: Variations des
crédits affectés à l'enseignement primaire et
secondaire
années
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
variations
|
|
1.09
|
1.14
|
1.16
|
1.23
|
1.05
|
1.00
|
Source: Calculs faits à
partir des informations budgétaires.
Tableau 3: Variations des
crédits affectés à l'enseignement supérieur
Années
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
variations
|
|
1.05
|
1.10
|
1.27
|
1.02
|
1.01
|
1.00
|
Source: Calculs faits à
partir des informations budgétaires.
De l'analyse des tableaux, on assiste à une variation
quasi identique des crédits affectés aux ordres de
l'enseignement. Les ressources mobilisées au niveau de l'enseignement
primaire et secondaire puis celui du supérieur ont connu une
évolution en dent de scie. Elle est plus forte respectivement en 2004 et
en 2003 au niveau de l'enseignement primaire et secondaire puis celle du
supérieur. Cependant, elles sont relativement faibles et dû
à la volonté des gouvernements à orienter une bonne partie
des ressources vers des secteurs plus productifs à court terme.
Tableau4: Dotation des directions
départementales de l'éducation de 2000 à 2006(en millier
de F CFA)
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Atacora/Donga
|
2292583
|
2118091
|
2051903
|
2282655
|
2599707
|
2260670
|
2845696
|
Atlantique/Littoral
|
7119588
|
7062487
|
6565645
|
12883432
|
16077096
|
15856461
|
19918527
|
Alibori/Borgou
|
2866389
|
3067321
|
2994369
|
5341490
|
6329532
|
6690685
|
7607833
|
Ouémé/Plateau
|
5876485
|
5639018
|
4734924
|
6763317
|
7373283
|
9118243
|
8822986
|
Mono/Couffo
|
3405789
|
3477623
|
2992751
|
3823187
|
4934020
|
3972729
|
5008177
|
Zou/Collines
|
4596026
|
4703518
|
4582933
|
4972856
|
6128434
|
5879104
|
7069962
|
Total
|
26156860
|
26068058
|
23922525
|
36066937
|
43442072
|
43777892
|
51273181
|
Source: DRFM/ MENRS/MEPS
Les dotations départementales affectées à
l'éducation ont connu une évolution presque en dent de scie de
2000 à 2003. De 26,156 milliards en 2000, on est passé à
23,922 milliards en 2003.
Cette situation se confirme par la baisse constatée au
niveau national au cours de la même période. A partir de 2003, on
assiste à une augmentation de 36,066 milliards à 43,777 milliards
en 2005, puis à 51,273 milliards en 2006.
-La répartition des crédits en
santé
Le secteur de la santé contrairement à
l'éducation connaît un traitement assez difficile malgré
les efforts manifestes des pouvoirs publics. Les parts du budget alloué
à ce secteur bien qu'ils aient connu une augmentation en 2000 jusqu'en
2006 restent relativement faibles. Moins de 5 milliards sont accordés
aux services de santé durant ces dernières années. Les
données sont consignées dans le tableau suivant.
Tableau 5: Parts du budget de la
santé dans le budget de l'Etat
Années
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Santé/Budget
|
2,00
|
7,00
|
7,70
|
8,00
|
8,10
|
9,00
|
9,60
|
National(%)
|
|
|
|
|
|
|
|
Source: Calculs faits à
partir des informations budgétaires.
Contrairement à l'éducation, la part des
ressources mobilisées au profit du secteur de la santé reste
relativement très faible au Bénin. Malgré l'accroissement
peu relatif du rapport de crédit de 2000 à 2006, moins de 10% du
budget national est consacré aux soins de santé des
populations.
Graphe 3: Evolution du budget affecté
à la santé de 2000 à 2006 ( en milliard)

45
40
25
20
50
35
30
15
10
5
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Santé
Source: Graphique
réalisé par les auteurs à partir des informations
budgétaires de la DGAE/MEF
Le graphique ci-dessus présente l'évolution des
dépenses publiques à l'endroit du secteur de la santé. On
constate une augmentation substantielle des dépenses publiques en
santé. Ces ressources mobilisées par l'Etat au profit de la
santé de la période de 2000 à 2006 représentent en
moyenne 7.8% du budget national dont 5.02% en besoin de fonctionnement et 2.78%
pour les besoins en équipement soit la moitié des besoins de
fonctionnement. Cependant, les ressources mobilisées par le gouvernement
au profit de la santé sont restées relativement faibles.
La faiblesse des ressources au niveau de la santé
s'explique par une politique peu développée des pouvoirs
publics.
Dans cette étude, notre analyse sur la santé se
focalisera spécifiquement sur la santé maternelle et infantile
à travers les services de vaccination et des soins de santé
à travers la prévention des maladies (lutte contre le paludisme).
Ce choix est motivé par la contrainte de disponibilité des
données, mais se justifie également du point de vue des effets
distributifs des dépenses publiques. En effet, la santé de la
mère et de l'enfant est liée, et il est certain que l'état
de santé de l'enfant aura un impact sur son état de santé
une fois adulte et ses capacités à accumuler du capital humain.
Bref,
améliorer la santé maternelle et infantile est
bénéfique aux individus, mais aussi à la
société en général du fait des externalités
positives qui peuvent en résulter plus tard.
Les variations liées aux services de santé, aux
soins maternelles et infantiles, puis des services de vaccination sont
consignées dans les tableaux.
Tableau6: Variations des
crédits affectés aux services de vaccination (11-23 mois)
Années
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Variations
|
|
1.018
|
1.021
|
1.041
|
1.15
|
1.20
|
1.31
|
Source: Calculs faits à
partir des données du ministère de la santé publique
Tableau 7: Variations des crédits
affectés à la lutte contre le paludisme
Années
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Variations
|
|
1,045
|
1,035
|
1,056
|
1,15
|
1,21
|
1,19
|
Source: Calculs faits à
partir des données du ministère de la santé publique
Il ressort que les dotations affectées aux services de
la santé ici étudiées ont connu une évolution
presque identique à celle des ressources affectées à la
santé par le budget national. Elle est plus faible en 2000 et plus
élevé en 2006. Malgré la faible part
réservée par le budget national au secteur de la santé,
les services utilisés ont quant à eux connu un accroissement peu
relatif à partir de 2004 avec un taux de 15%, 20% et 31% au niveau des
services de vaccination d'une part et d'autre part de 15%, 21% au niveau des
services de lutte contre le paludisme ; mais avec un recule en 2006 au niveau
de ce service avec un taux de 19%. Cela peut être dû à
l'importance que porte l'Etat béninois à mobiliser les ressources
vers ces services en vue d'améliorer le niveau de besoin substantiel des
populations pour un mieux-être.
Tableau 8: Dotation des directions
départementales de la santé de 2000 à 2006
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
Atacora /Donga
|
300209000
|
680755000
|
639922500
|
692562000
|
937515000
|
1178209000
|
955302000
|
Atlatique/Litto-ral
|
331175000
|
876689500
|
966969000
|
768112000
|
905370000
|
1047530000
|
1076779000
|
Alibori/Borgou
|
276012000
|
647349250
|
619510600
|
847971000
|
1122204000
|
1094223000
|
1005433000
|
Ouémé/Plateau
|
356107000
|
766320500
|
702310800
|
953370000
|
1024575000
|
1073425000
|
1011908000
|
Mono/Couffo
|
281535000
|
619155000
|
587143450
|
680643000
|
706336000
|
944716000
|
867618000
|
Zou/Collines
|
353722000
|
767098250
|
704497850
|
938954000
|
781891000
|
1122132000
|
968147000
|
Total
|
1898760000
|
1386253250
|
220354200
|
4881618000
|
5477891000
|
6460235000
|
5885187000
|
Source: DRFM/MSP
Les dotations départementales ont évolué
de 1,898 milliards de 2000 à 4,881 milliards en 2003, puis de 5,477
milliards en 2004 à 6,460 milliards en 2005 avant de connaître une
baisse en 2006 de 5,885 milliards. Bien que l'évolution soit erratique,
il faut noter que depuis 2002, le seuil des 4 milliards est franchi, indiquant
ainsi toute l'importance que le gouvernement accorde au niveau
intermédiaire et périphérique de la pyramide sanitaire.
Graphe 4 : Part des dépenses
d'éducation et de santé dans les dépenses totales de 2000
à 2006 (en milliard)
5E+11 5E+11 4E+11 4E+11 3E+11 3E+11 2E+11 2E+11 1E+11 5E+10 0
|
|
éducation
santé
dépenses totales
|
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Source: Réalisé
à partir des données de la DGAE/MEF, de DNPP, de DSRP, de SCRP
Globalement, les parts affectées aux deux secteurs
prioritaires du secteur social dans les dépenses totales ont connu une
particularité au niveau de chaque secteur. Un accroissement du budget de
l'Etat a favorisé un accroissement des dépenses au niveau des
secteurs sociaux. Cela peut être dû à la
prépondérance des objectifs fixés par les gouvernements
dans le secteur de l'éducation et de la santé malgré la
multiplicité des besoins ressentis par les autres secteurs. Ceci
témoigne d'une politique sociale volontariste, destinée à
i) accroître le niveau d'instruction des populations et en particulier
des filles, ii) améliorer la santé de toutes les couches de la
population, iii) accroître le revenu par tête d'habitants.
Toutefois, des efforts restent encore à faire, car la part des
dépenses sociales dans le budget national demeure très faible,
surtout en éducation à travers la recherche, la construction
d'infrastructure scolaire et la formation des cadres du système
éducatif et puis en santé à travers la mise à jour
du matériel d'hospitalisation, la construction de nouvelles zones
sanitaires, la gratuité de certains services de santé.
-Evolution des indices de pauvreté
(FGT)
Comme nous l'avons souligné dans l'introduction, la
pauvreté a un caractère multidimensionnel. Elle peut en effet
être analysée suivant une approche monétaire, en fonction
du revenu ou de la dépense par tête ou suivant une approche non
monétaire, fondée sur un indice composite de niveau de vie
construit sur la base des conditions de vie et du patrimoine des ménages
(in SCRP 2007, page45). Dans le présent document, les indices FGT ont
été utilisés comme mesure de bien-être pour des
raisons déjà évoquées dans le chapitre
antérieur. Le graphique suivant présente l'évolution de
ces indices de pauvreté tant au niveau national que départemental
au cours des années correspondant à notre étude ont
été réalisées des enquêtes ECVR, QUIBB et
EMICoV.
Graphe5: Evolution des indices de pauvreté
niveau national de 2000-2002-2006

0,35
0,25
0,15
0,05
0,4
0,3
0,2
0,1
0
2000 2002 2006
P0
P1
P2
Source: Réalisé
à partir des données ECVR (1999/2000), QUIBB (2002), EMICoV
(2006)
Les indicateurs renseignés sont issus de l'exploitation
des bases de données des enquêtes réalisées
auprès des ménages en utilisant les mêmes seuils de
pauvreté
tout en tenant compte de l'inflation entre les
périodes. Les sources utilisées concernent l'Enquête sur
les conditions de vie des ménages ruraux, (ECVR2, 1999/2000),
l'Enquête Légère Auprès des Ménages (ELAM
1999), le Questionnaire des Indicateurs de Base du Bien-être (QUIBB) de
2003 dont les informations sont relatives à l'année 2002 et
l'Enquête Modulaire Intégrée sur les Conditions de vie des
ménages en République du Bénin (EMICOV) dont les
informations sont relatives à l'année 2006.
L'analyse de ce graphique montre qu'au cours des
enquêtes effectuées au Bénin, les indices de
pauvreté ont connu une évolution assez relative.
Globalement, la pauvreté monétaire s'est
aggravée sur la période 1999/2000 à 2006. Au niveau
national, l'incidence de la pauvreté monétaire (P0) a connu un
léger recul passant de 29,6% en 1999/2000 à 28,4% en 2002. Par
contre, on note un relèvement de celui-ci entre la période
2000-2006. Ainsi donc l'incidence de la pauvreté monétaire (P0)
passe de 28,4% en 2002 à 37,5% en 2006. Parallèlement, l'indice
de profondeur de la pauvreté (P1) a connu une faible augmentation,
passant de 0,087 en 1999-2000 à 0,117 en 2006.
L'inégalité parmi les pauvres s'est
aggravée au niveau national. Cette situation s'explique notamment par
l'augmentation très marquée de l'indice de
sévérité au sein des populations.
Graphe6 : Evolution des indices de
pauvreté au niveau départemental de 2000- 2002-2006

0,45
0,35
0,25
0,15
0,05
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
0
Alibori Ata ro
ra Atlantique Borqou Co!lines Couffo Donqa Littoral Mono Ouerne Plateau Zou Alibori Ata
ro
ra Atlantique Borqou Collines Couffo Donga Littoral Mono Ouerne Plateau Zou Alibori Ata
ro
ra Atlantique Borqou Collines Couffo Donqa Littoral Mono Ouerne Plateau Zou
2000
2002
2006
P0
P1
P2
Source : Réalisé à
partir des données ECVR, QUIBB, EMIcOV
L'examen du graphique montre, à travers les
enquêtes effectuées au Bénin que les indices de
pauvreté ont connu une variabilité au niveau des
départements. En 2000, le département du Borgou (45%) et du
Couffo (47,20%) sont les départements qui contribuent le plus à
l'incidence nationale de la pauvreté. On enregistre le même
constat au niveau de la profondeur dans ces mêmes départements.
Cependant, l'inégalité parmi les pauvres est
plus accentuée au niveau des départements de l'Atacora (16,05%)
et du Littoral (9,15%).
En 2002, ce sont les départements de l'Atacora (43,5%),
de la Donga (37,3%) et du Mono(39,8%) qui ont contribué le plus à
l'incidence de la pauvreté, à la profondeur et à la
sévérité de la pauvreté.
Les départements de l'Alibori (42,5%), du Couffo
(40,4%), du Plateau(40,3%), et de l'Atlantique(39,6%) contribuent le plus
à l'incidence nationale de la pauvreté en 2006. Le constat est
pratiquement le même en ce qui concerne la profondeur et la
sévérité de la pauvreté, sauf que le
département du Borgou remplace celui de l'Alibori au sein des quatre
départements contribuant le plus à la pauvreté
nationale.
Section 2 : Consommation des ménages des services
publics
La consommation des ménages des services publics se
traduit par la proportion des catégories sociales ayant accès
à l'éducation et à la santé.
2.1. Le secteur de
l'éducation
Réaliser un accès équitable aux services
publics d'éducation dans un pays oüles ressources sont
limitées constitue un réel défi. Dans cette section, nous
effectuons
une analyse descriptive sur les ménages ayant accès
aux services publics d'éducation pour décrire
l'équité.
Une telle analyse, aussi descriptive qu'elle puisse
paraître présente des disparités intéressantes par
rapport à l'accès des différentes couches à
l'éducation. Un examen de l'utilisation des services d'éducation
selon le niveau de vie est révélateur de la tendance au niveau de
l'équité. Le tableau qui suit présente le taux de
fréquentation selon le niveau de vie, Il porte sur les individus de 6
à 20 ans, tranche d'âge qui correspond à celle des
individus en âge de fréquenter le primaire, le secondaire ou le
supérieur.
Tableau9 : Evolution du taux
d'utilisation des services de l'éducation
|
Primaire %
|
Secondaire%
|
Supérieur%
|
Ensemble%
|
Quintiles
|
Plus pauvres
|
14,18
|
2,65
|
0
|
16,83
|
Pauvres
|
20,2
|
4,77
|
0,08
|
25,05
|
Moyen
|
25,43
|
9,19
|
0,26
|
34,88
|
Riches
|
27,74
|
21,72
|
1,35
|
57,05
|
Plus riches
|
33,98
|
41,28
|
15,42
|
84,44
|
Source : Réalisé à
partir des enquêtes ménages EMICoV (2006)
De par le tableau, il ressort une inégalité au
sein des quintiles. Ainsi, le taux de fréquentation est de 16,83% pour
le quintile le plus pauvre contre 84,44% pour le quintile le plus riche au
moment de l'enquête. Cette faiblesse s'explique par le manque de moyens
de la part des populations pauvres à prendre en charge les besoins en
éducation de leurs enfants.
Qu'en est-il de la consommation des services de santé ?
2.2. Le secteur de la santé
Le tableau qui suit présente, pour quatre types de
vaccins recommandés les taux de participation selon le quintile de
niveau vie. Il ne porte que sur la population ayant effectivement besoin du
service.
Tableau10 : Taux de vaccination selon le quintile
(11-23mois)
|
BCG %
|
DPT %
|
POLIO %
|
|
1
|
2
|
0
|
1
|
2
|
3
|
Quintiles
|
|
|
|
|
|
|
|
Plus pauvres
|
73,11
|
65,42
|
55,41
|
5,90
|
76,87
|
65,13
|
47,49
|
Pauvres
|
82,59
|
75,00
|
65,96
|
12,40
|
80,91
|
70,46
|
52,78
|
Moyen
|
88,52
|
81,61
|
72,21
|
11,00
|
84,13
|
73,61
|
56,24
|
Riches
|
92,47
|
85,63
|
78,76
|
16,40
|
86,84
|
78,51
|
58,64
|
Plus riches
|
97,37
|
93,28
|
88,69
|
22,30
|
92,84
|
87,99
|
69,18
|
Ensenble
|
85,81
|
79,06
|
70,84
|
17,20
|
83,62
|
74,16
|
55,95
|
Source : Réalisé à partir des
enquêtes ménages EMICoV (2006)
Le découpage en quintile est opéré sur cette
même population en imputant à
l'individu la valeur du score obtenu par le ménage dans
l'analyse en correspondances multiples. Le taux de participation relative
représente, au sein d'un groupe donné, la proportion de la
population qui a effectivement utilisé le service.
L'analyse de l'accès aux services de vaccination
présente un intérêt particulier pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, certains de ces services sont généralement
gratuits. D'autre part, ils sont au coeur des préoccupations aussi bien
des autorités publiques que des partenaires au développement
notamment l'UNICEF et l'OMS et les actes le démontrent bien :
gratuité ou subventions, campagnes de vaccination,... . Les taux sont
très variables selon le type de vaccination dans la mesure où
elle est certainement le type de service de santé le plus accessible
à tous.
Pour la polio par exemple, le taux de participation pour la
première dose (dose 0) est peu élevé quel que soit le
quintile. Par contre, il est élevé pour les autres doses,
atteignant même 83.62% pour la deuxième. Ceci peut s'expliquer par
le fait que la première dose est administrée à la
naissance et comme les femmes sont peu nombreuses à accoucher dans les
structures sanitaires, elles sont peu nombreuses à s'y rendre pour faire
administrer à leurs bébés la dose 0. Par contre, pour les
autres doses, les agents vaccinateurs se rendent généralement
dans les ménages et cette politique semble porter fruit au vu du taux de
participation élevé. Le tableau qui suit présente le taux
d'accès à la moustiquaire selon le quintile de niveau de vie. Ce
tableau présente une grande disparité entre les deux quintiles
extrêmes. Contrairement aux services de la vaccination, les taux sont peu
élevés et les disparités sont prononcées selon le
quintile de niveau de vie. De plus, 14,27% des plus pauvres disposent de
moustiquaires contre 23,88% pour le quintile le plus aisé. Soit
près du double du quintile le plus aisé. Cette tendance trouve sa
source dans les profondeurs d'une insuffisance financière de la part des
ménages pauvres d'une part et d'autre part, l'analphabétisme des
chefs de ménage pauvre à connaître l'importance de la
moustiquaire.
Tableau 11 : Taux d'accès
à la moustiquaire selon les quintiles
Quintiles
|
POSSESSION de MOUSTIQUAIRE (%)
|
Plus pauvres
|
14,27
|
Pauvres
|
17,07
|
Moyens
|
19,87
|
Riches
|
22,48
|
Plus riches
|
23,88
|
Source : Réalisé à
partir des enquêtes EDSB (2006)
Il ressort donc que si l'élargissement de la couverture
sanitaire est indispensable pour améliorer l'accès des
populations aux services de santé en général et des
ménages les plus défavorisés, des actions de
sensibilisation de la part des pouvoirs publics doivent viser à modifier
les comportements surtout au niveau de la santé des quintiles les plus
pauvres.
Au regard de toute l'analyse développée dans ce
chapitre, la dynamique de la pauvreté semble contraster avec celui des
efforts consentis par l'Etat pour juguler la pauvreté au Bénin.
L'analyse statistique et économétrique devrait nous renseigner
davantage sur le rôle qu'a joué la puissance publique dans
l'amélioration du bien-être au Bénin.
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CHAPITRE 3 : ANALYSE SUR LES ELEMENTS EMPIRIQUES DES
DEPENSES PUBLIQUES SOCIALES AU BENIN
L'influence des dépenses publiques sociales dans la
réduction de la pauvreté au Bénin pourra être
analysée grâce aux résultats des travaux
réalisés à partir des deux modèles
présentés dans le premier chapitre. A cet effet, il sera
procédé à l'analyse des résultats de l'incidence
des dépenses sociales (éducation et santé) et à
l'analyse de l'impact de ces dépenses sur les indices FGT.
Section 1: Incidence des dépenses publiques
sociales
Cette section présentera les résultats et les
analyses sur l'incidence des dépenses sociales en éducation et en
santé.
1.1. Le secteur de
l'éducation
Dans la présentation du tableau n°12, il faut
rappeler que les estimations de coûts unitaires ont été
combinées aux variables de l'enquête ménage (EMICoV)
relative à la scolarisation pour estimer la répartition des
dépenses publiques courantes à chaque catégorie sociale
définie dans le chapitre antérieur. Le tableau présente
deux statistiques : le montant moyen du transfert par tête et la part
reçue des dépenses publiques dans le total. Cette dernière
statistique est calculée en rapportant le transfert total reçu
par un groupe donné à la dépense de chaque secteur.
Tableau 12 : Incidence des
dépenses publiques en éducation en 2006
Quintiles
|
Primaire et Secondaire
|
Supérieur
|
Ensemble
|
Total (FCFA)
|
part %
|
Total(FCFA)
|
part
%
|
Total(FCFA)
|
part
%
|
|
|
|
|
|
|
Plus pauvres
|
32784306
|
0,04
|
0
|
0
|
3278306
|
0,03
|
Pauvres
|
45824118
|
0,05
|
17353668
|
0,07
|
47559487
|
0,05
|
Moyen
|
62242668
|
0,07
|
5206106
|
0,02
|
67448775
|
0,06
|
Riches
|
104529671
|
0,12
|
27765903
|
0,11
|
132295575
|
0,12
|
Plus riches
|
123587859
|
0,15
|
302532654
|
0,24
|
426120513
|
0,40
|
Source : Calculs fait par les auteurs.
Le tableau ci- dessous montre que le quintile le moins
aisé de la population reçoit environ 3% des dépenses
contre 40% pour le quintile le plus aisé. La disparité est moins
prononcée au niveau des dépenses d'éducation primaire et
secondaire (15% pour le quintile le plus riche contre 4% pour le quintile le
moins aisé).
1.2. Le secteur de la santé
Tableau 13 : Incidence des
dépenses publiques en santé en 2006
Quintiles
|
Vaccination
|
Dotation en moustiquaire
|
Total(FCFA)
|
Part
(%)
|
Total(FCFA)
|
Part (%)
|
|
|
|
|
Plus pauvres
|
3448250
|
0,04
|
2676735
|
0,17
|
Pauvres
|
3700000
|
0,12
|
3659954
|
0,23
|
Moyen
|
3723250
|
0,12
|
3726435
|
0,24
|
Riches
|
3756250
|
0,13
|
4216295
|
0,27
|
Plusriches
|
3802000
|
0,15
|
4469498
|
0,28
|
Source : Calculs fait par les auteurs
Le tableau montre que le même scénario est
observé au niveau de l'incidence des dépenses publiques sociales
en santé en 2006. Le quintile le plus aisé reçoit en terme
de part trois fois plus (soit 15%) que le quintile le moins aisé (4%) au
niveau de
la vaccination et en ce qui concerne la dotation en
moustiquaire, le quintile le plus aisé reçoit presque le double
(soit 28%) de ce que reçoit le quintile le moins aisé (17%).
En somme, les résultats obtenus dans le tableau
n°12 et le tableau n°13 montrent que la catégorie sociale la
plus aisée de la population reçoit en terme de dépenses
publiques sociales plus de transfert que les populations vulnérables.
L'analyse de ces résultats fait ressortir que la politique de l'Etat
à travers le transfert de la distribution des dépenses sociales
connaît une orientation peu satisfaisante en ce sens que l'objectif
étant l'amélioration des conditions de vie des populations
vulnérables ne disposent pas de moyens nécessaires pour la
satisfaction de leurs besoins.
Ainsi, l'on pourrait retenir que la politique de l'Etat
à réduire la pauvreté connaît une défaillance
dans la mesure où la consommation des services publics connaît une
disparité très remarquée au niveau des ménages
pauvres faute de moyens d'une part et d'autre part du mauvais ciblage des
ressources à l'égard des ménages.
A la suite de cette analyse, on accepte l'hypothèse
H1 et l'hypothèse H2 selon laquelle les dépenses publiques
sociales sont inégalement reparties entre les différentes
catégories sociales et les pauvres profitent moins des dépenses
publiques sociales.
Section 2 : Impact des dépenses sociales
publiques sur la mesure de pauvreté
2.1: Effet des dépenses sociales sur les
indices de pauvreté
Nous présentons l'estimation du modèle des indices
de pauvreté et ensuite l'analyse des résultats après les
différents tests économétriques.
2.1.1. Estimation du modèle des
dépenses sociales
Nous adoptons ici les méthodes habituelles d'estimation
des données de panel. Il s'agit pour nous de faire des hypothèses
sur les coefficients et le terme d'erreur. Ceci nous permet de choisir le
modèle adéquat. Ces hypothèses nous conduisent
respectivement à procéder à une estimation par effets
communs, effets fixes et effets aléatoires. Les hypothèses
émises seront testées pour s'assurer de la validité du
modèle retenu.
Ainsi, dans un premier temps nous faisons l'hypothèse
d'uniformité des comportements des indices de pauvreté dans le
temps et entre les différents départements. Ceci revient à
supposer que les différents coefficients du modèle
général sont indépendants du temps et identiques entre les
départements. Ce genre de modèle est appelé
modèle a effets communs.
La spécification du modèle à effets communs
est la suivante :
Pit = b1éduit + b2santit + b3indic2000i +
b4indic2002i +b5indic2006i +åit (E7)
Le terme d'erreur est supposé suivre une loi normale et
le modèle est estimé par la méthode des Moindres
Carrés Ordinaires (MCO) comme nous l'avons définit plus haut au
seuil de 5%. Puis, pour des raisons de multicollinéarité, l'on
fait fi de á. Les résultats de cette estimation sont
présentés dans le tableau qui suit. Ici nous présentons
les résultats de la régression du modèle Pi selon les
trois variables endogènes.
Tableau 14 : Régression du
modèle Pi à effets communs
Variables
|
P0
|
P1
|
P2
|
Education
|
-1,36.10-11
|
6,21.10-13
|
2,50.10-12
|
|
(-1,20)
|
(0,11)
|
(0,68)
|
Santé
|
-4,36.10-11
|
- 2,49.10-11
|
-1,14.10-11
|
|
(-0,35)
|
(-0,41)
|
(-0,28)
|
Indic2000
|
0,3209
|
0,8242
|
0,3018
|
|
(11,14)
|
(5,88)
|
(3,23)
|
Indic2002
|
0,3490
|
0,1219
|
0,6276
|
|
(8,79)
|
(6,31)
|
(4,88)
|
Indic2006
|
0,4429
|
0,1265
|
0,5120
|
|
(8,83)
|
(5,18)
|
(3,15)
|
Observation
|
36
|
36
|
36
|
R2 ajusté
|
0.9464
|
0.8839
|
0.8063
|
F-Statistic
|
128.09
|
55.81
|
30.97
|
Prob(F-Statistic)
|
0.000
|
0.000
|
0.000
|
Notes : Les valeurs entre parenthèses sont les
écarts types.
Les résultats ci-dessus découlent de
l'hypothèse d'uniformité des comportements des indices de
pauvreté dans le temps et parmi les différents
départements. Cependant, il pourrait exister des
spécificités des départements qui influent
significativement sur les indices de pauvreté. La prise en compte des
effets individuels des départements conduit à estimer un autre
modèle appelé modèle à effets
fixes.
On suppose, dans ce modèle que les coefficients sont
identiques et invariants dans le temps à l'exception de l a constante
qui est spécifique à chaque département. Les effets
propres aux départements sont supposés déterministes et le
terme d'erreur est encore supposé suivre une loi normale. La
spécification du modèle à effets fixes qui en
découle est la suivante :
Pit = ái + b1éduit + b2santit
+ b3indic2000i + b4indic2002i +b5indic2006i +åit
(E8)
Les résultats de l'estimation du modèle sont
présentés dans le tableau suivant.
Tableau 15 : Régression du
modèle Pi à effets fixes
Variables
|
P0
|
P1
|
P2
|
Education
|
-1,45.10-11
(2,69.10-11)
|
-1,01.10-11
(1,21.10-11)
|
-7,34.10-12
(7,75.10-12)
|
Santé
|
-1,55.10-10
(2,39.10-10)
|
-7,19.10-11
(1,08.10-10)
|
-5,34.10-11
(6,90.10-11)
|
Indic2002
|
0,069617
(0,0593332)
|
0,466079
(0,0267682)
|
0,0388841
(0,0171069)
|
Indic2006
|
0,1598879
(0,095496)
|
0,708015
(0,408516)
|
0,0451763
(0,0261072)
|
Cons
|
0,3404925
(0,0728241)
|
0,1131774
(0,0328546)
|
0,0582906
(0,0209966)
|
Observation
|
36
|
36
|
36
|
F-Statistic
|
1,98
|
1,86
|
2,49
|
Prob (F-Statistic)
|
0,1362
|
0,1569
|
0,0757
|
R2 intragroupe
|
0,2838
|
0,2712
|
0,3328
|
R2 intergroupe
|
0,4031
|
0, 0000
|
0,1116
|
R2 global
|
0,2840
|
0,0860
|
0,0398
|
Notes : Les valeurs entre parenthèses sont les
écarts types.
A l'issu de la présentation des résultats du
modèle à effets communs et à effets fixes, une question
importante à ce niveau de l'analyse est la significativité des
effets propres aux différents départements. Il s'agit de
vérifier si l'hypothèse
d'hétérogénéité entre les
départements en matière de comportement de l'influence des FGT
est validée. Ce souci de vérification nous conduit à
mettre en oeuvre le test de Fisher.
TEST DE FISHER: Choix entre le modèle à
effets communs et à effets
individuels
Pour le choix du type du modèle de données de
panel, nous présentons la statistique du test de Fisher au seuil de 5%.
Les résultats sont consignés dans le tableau suivant :
Tableau 16 : Résultat du test de Fisher
Indice de pauvreté
|
P0
|
P1
|
P2
|
F test that all u_i = 0: F(11,20)
|
0,30
|
0,65
|
0,86
|
Prob > F
|
0,9774
|
0,7659
|
0,5896
|
Ainsi, à travers les résultats des tests
effectués, l'on constate que la statistique de Fisher obtenu au niveau
de chaque indice de pauvreté montre une absence
hétérogénéité entre les coefficients. Ces
comportements ne sont pas significativement liés à des effets
probablement non observables et non spécifiques aux départements.
En effet, les probabilités du test sont supérieur à 5%. On
a donc une présence d'homogénéité entre les
coefficients dans le temps et le comportement est identique entre les
départements. Ainsi, le modèle à effets communs est
préférable au modèle à effets fixes.
TEST DE SPECIFICATION DES EFFETS COMMUNS
Avant d'adopter le modèle à effets communs, il
convient de vérifier les tests de spécification.
2.1.2. Résultat des tests
Les résultats des tests consignés dans les tableaux
ci-dessous prennent en compte les valeurs de chaque indice de
pauvreté.
Test d'hétéroscédasticité de
Breusch-Pagan
Tableau 17: Résultats du test de
Breusch-Pagan
Variables endogènes (indices de
pauvreté)
|
Probabilités
|
P0
|
0,4146
|
P1
|
0,2180
|
P2
|
0,3975
|
Source : Réalisé à
partir des estimations sur STATA 9
De la lecture du tableau ci-dessus, les résultats
montrent que les probabilités de chaque variable endogène
traduisent le rejet de l'hypothèse nulle faisant apparaître une
absence d'hétéroscédascité.
En plus des test de validation du modèle à effets
communs, on constate que :
9 La statistique de Fischer montre que le modèle est
globalement significatif sur l'ensemble du modèle.
9 Le test de la normalité de Jarque-Bera relève que
la
distribution est normale sur l'ensemble du modèle (Voir
annexe n°2).
Les résultats des différents tests concernant le
modèle sur l'impact de la mesure de la pauvreté sont
présentés dans les annexes.
Après ces différents tests, l'équation du
modèle à effets communs se présente selon un
système d'équation.
P0 = -1,36.10-11édu -4,36.10-11sant +
0,3209indic2000 + 0,3490indic2002 +
(-1,20) (-0,35) (11,14) (8,79) 0,4429indic2006
(8,83)
P1= 6,21.10-13édu - 2,49.10-11sant +
0,8242indic2000 + 0,1219indic2002 +
(0,11) (-0,41) (5,88) (6,31) 0,1265indic2006
(5,18)
P2= 2,50.10-12éduc -1,14.10-11sant +
0,3018indic2000 + 0,6276indic2002 +
(0,68) (-0,28) (3,23) (4,88) 0,5120indic2006
(3,15)
|
Les équations étant données, nous
procédons à l'analyse économique des coefficients
associés aux variables explicatives.
2.2 : Analyse des résultats et
interprétation
Les résultats des estimations du modèle seront
analysés globalement sur les trois variables endogènes et les
variables explicatives.
-L'impact des dépenses sociales sur les indices de
pauvreté
Il ressort des résultats des estimations que
l'interaction entre les indices de pauvreté et les ressources
affectées par l'Etat dans les secteurs de la santé et de
l'éducation ne correspondent pas au signe attendu. Ce qui signifie qu'il
n'existe aucun effet sensible sur l'amélioration des conditions de vie
des pauvres. Une augmentation par exemple de 10 milliards de FCFA rend
insensible la contribution à l'amélioration de la proportion des
pauvres.
Les raisons de cette non significativité peuvent
être de deux ordres : la nature des ressources affectées aux deux
secteurs et l'effet revenu.
En effet, il est important de réaliser des profits de
bien-être important grâce aux budgets alloués par l'Etat
lorsque ceux-ci servent à développer des programmes auxquels sont
intégrés les besoins des populations concernées d'une part
et d'autre part une infrastructure publique et ajoutent ainsi à la
productivité des facteurs privés, notamment des couches
défavorisées (Gupta, Powell et Yang, 2006).
Mais, la mauvaise utilisation des ressources ne parvient pas
toujours à réaliser le transfert de connaissance sollicité
dont la rémunération ne cadre pas avec le coût de la vie au
Bénin (BiPEN, 2000).
L'effet revenu, quant à lui, s'explique par le fait
qu'une augmentation des ressources affectées aux services sociaux
entraîne des pressions sur les salaires. L'augmentation des
dépenses sociales au budget de l'Etat le conduirait à
accroître ses frais de fonctionnement et de personnel, en particulier les
salaires dans les autres secteurs de l'administration, ce qui pousse à
la hausse les salaires du secteur formel ailleurs dans l'économie. La
hausse de ces frais induit une hausse des prix et une appréciation du
taux de change. Or la plupart des pauvres dépendent de l'informel et de
l'agriculture (surtout du coton) et ne bénéficient donc pas
directement d'une
hausse de leur revenu (réel). En revanche,
l'appréciation du taux de change renchérit leurs exportations
agricoles. Il en résulte une baisse de leur compétitivité
prix, qui conjuguée aux déficiences structurelles du secteur
cotonnier, réduit en conséquence leurs gains, et leur
bien-être.
Cependant, les variables explicatives indic 2000, 2002 et 2006
indiquent une significativité positive entre elles et les indices de
pauvreté. Cette significativité peut avoir plusieurs raisons :
d'abord, la capacité financière de l'Etat à mobiliser des
ressources peut contribuer à l'élargissement des dépenses
publiques en générale et sociales en particulier comme le secteur
de la santé et de l'éducation. Ensuite l'allègement des
dettes vis-à-vis des bailleurs de fonds accroissent nos ressources
intérieures et donc favorisent une augmentation des dépenses
sociales au cours des années.
A la suite de cette analyse, l'on rejette l'hypothèse
selon laquelle les dépenses publiques sociales ont une influence
positive sur les indices FGT.
Toutefois, que dire de la faiblesse des coefficients ?
La faiblesse des coefficients des dépenses du
bien-être ne surprend guère. Elle corrobore avec les
résultats d'autres travaux qui ont montré que les ressources
allouées par l'Etat dans les services sociaux ont été
insuffisantes pour réduire substantiellement la pauvreté. C'est
le cas de Sinzogan (2002), Houeninvo et al (2004). Les coefficients sont
très faibles parce que les dépenses dans les secteurs
concernés n'ont pas été ciblés sur les pauvres,
comme en témoignent les résultats de Davoodi, Tiongson et
Asawanuchit (2003) dans une étude sur l'Afrique subsaharienne. La
faiblesse provient aussi du faible taux de consommation des crédits
alloués à ces secteurs et à la corruption. La corruption a
un effet négatif sur les finances publiques, l'inégalité
des revenus et les services sociaux. Elle ralentit la croissance au profit des
pauvres parce qu'elle réduit l'investissement privé, attire les
talents vers des activités improductives et encourage la mauvaise
gestion des
ressources publiques. Elle détourne les dépenses
d'éducation et de santé au profit des dépenses
personnelles. Elle pénalise le capital humain et l'investissement.
Ainsi, plus le niveau des ressources affectées par
l'Etat dans le secteur de l'éducation et de la santé est
important, moins est l'impact sur la mesure de pauvreté quelque soit
l'indicateur de pauvreté utilisé.
Nous concluons donc que l'hypothèse H3 selon laquelle
les indices de pauvretésont influencés positivement
par les dépenses publiques sociales (en éducation et en
santé) n'est pas vérifiée.
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RECOMMANDATIONS
De l'analyse de nos résultats, il ressort d'une part
que le bénéfice reçu par le quintile le plus aisé
est plus important que le quintile le moins aisé. Et d'autre part, les
dépenses publiques sociales en éducation et en santé n'ont
aucune influence sur les indices de pauvreté. En d'autre terme, elles
n'ont apporté aucune condition favorable aux populations
vulnérables. Ceci nous conduit à la formulation des
recommandations.
Au niveau national
Les résultats démontrent dans leur ensemble une
orientation paradoxale des ressources publiques à l'endroit des
populations pauvres. Le défi au plan national sera de créer des
conditions de croissance accélérée et favorable pour
réduire les privations et développer le capital humain de
façon durable. C'est pourquoi nous préconisons entre autres :
- L'élimination des inégalités existantes
entre pauvres et non pauvres et l'accroissement de l'accès des pauvres
aux opportunités de formation adéquates capables de leurs assurer
une meilleure compétence à une participation plus accrue au
processus de production.
- La mise en place d'une infrastructure générale
sociale pour des secteurs tels que l'agriculture, l'artisanat par exemple qui
offre aux pauvres plus d'opportunité de se développer. Il s'agit
d'accroître les infrastructures routières qui permettent aux
habitants des zones rurales d'acheminer leur production vers les marchés
ou les villes. Cela leur permettra de contribuer efficacement à la
croissance économique.
- Renforcer les politiques de dépenses prioritaires.
L'étude conforte bien cette proposition. Le secteur de la santé
et celui de l'éducation doivent recevoir une bonne partie des
ressources. Il importe de veiller à une meilleure gestion des
ressources
financières et leur élargissement en ciblant
principalement les couches les plus défavorisées. La gestion
saine des ressources passera par :
. Une priorité accordée à l'investissement
relativement au fonctionnement dans l'affectation des ressources ;
. Un meilleur suivi de la réalisation physique (BiPEN
2003).
- Créer un environnement institutionnel qui favorise
une liberté économique du pauvre, protège efficacement les
droits de propriété, qui favorise un accès
équitable aux biens et services publics notamment la justice. A cela
s'ajoute l'initiative de la gratuité des services sociaux tels que le
secteur de la santé, l'éducation et des services qui doivent
être renforcés par des mesures plus viables.
- Renforcer un meilleur accès aux structures de
formations à l'endroit des femmes qui constituent tout comme les hommes
un capital humain assez favorable au processus de développement à
travers des programmes de micro finance aux plus pauvres.
- Veiller à l'amélioration de la qualité
des services offerts à travers l'augmentation des effectifs
d'enseignants et du personnel de santé d'une part et d'autre part
assurer leur formation par la mise en place et le renforcement des programmes
de recyclage continus. Aussi faudra-t-il veiller à une meilleure
adéquation formation emploi par la vulgarisation des programmes
d'étude et la collaboration avec le secteur privé.
- Renforcer le partenariat entre le secteur privé et le
secteur public par la motivation de l'Etat à l'endroit du secteur
privé par des investissements plus accrus et favorables à la
création d'emploi. La libération de ce potentiel privé
constitue une force motrice de la croissance et de l'amélioration du
bien-être.
- Renforcer le taux d'imposition sur les personnes physiques
en l'occurrence, les individus les plus aisés en vue de le reverser sur
les pauvres par le biais de la construction de certaines infrastructures
favorables à l'accès gratuit aux plus vulnérables.
Toutefois, il faudra privilégier les effets
d'entraînement plutôt que de s'engager
dans de vastes programmes dont les interactions
génèrent d'autres effets pervers.
En plus de ceci, le Bénin doit orienter sa politique de
réduction de la pauvreté à travers l'apport des services
extérieurs afin de mieux accroître ses ressources pour une
meilleure redistribution du revenu.
Au niveau de l'aide extérieur (bailleurs de
fonds)
La politique de lutte contre la pauvreté et autres
causes de privation humaine et pour promouvoir un développement
harmonieux et durable, exprimée à travers les OMD, ne pourra
être atteinte sans une efficacité accrue de l'assistance
extérieure. Pour cela, les dispositifs d'octroi doivent connaître
une profonde mutation. Il s'agira essentiellement de :
- Veiller à la mise en oeuvre effective des
stratégies de la SCRP.
Elle offre une vision assez virtuelle et claire du
développement que le pays souhaite.
- Demander une aide aussi bien financière qu'en nature
en faveur des secteurs sociaux, notamment l'éducation et la
santé. La réception d'équipements manquants par exemple
permettra non seulement de combler le déficit mais donnera au pays plus
de possibilités dans l'usage de l'aide financière : soit
effectuer des dépenses d'équipements additionnels ou l'employer
à d'autres fins nécessaires.
- Négocier d'avantage de bourses de formation
auprès des partenaires dont la solution favorisera le renforcement des
connaissances et une innovation accrue ; ce qui se traduit par un meilleur
transfert de la technologie.
Le processus de développement économique semble
être un long parcours de combattant, mais rien n'est impossible. Il
s'agira de développer un idéal de mieux être national qu'il
faut s'atteler à construire avec
conviction. Cela engage la responsabilité de tout un
chacun.
Tout ceci ne peut connaître un meilleur rythme de
développement si l'individu pauvre ne s'y investit pas pour son
amélioration. Il doit refuser la fatalité de la pauvreté ;
et cela doit passer par un esprit d'initiative individuelle à travers la
créativité, l'innovation etc... . A cela s'ajoute, la
scolarisation des enfants en général et des filles en
particulier. Elle passe par la participation aux différents programmes
d'alphabétisation quelque soit l'âge surtout quand il s'agit de
son bien-être.
En somme, il s'agira pour la société
entière de savoir ce que l'on veut, l'on peut ou doit faire pour
améliorer son mieux-être : ajouter au patrimoine du Renouveau
Démocratique celui de la croissance du mieux-être. Et la
contribution des pauvres sera importante à double titre.
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CONCLUSION
La présente étude a permis d'analyser
l'incidence des dépenses sociales de certains services sociaux au sens
de la réduction de la pauvreté. Elle a permis d'expliquer d'une
part la répartition des ressources affectées par l'Etat dans le
secteur de la santé et de l'éducation au sein des populations
réparties en catégories sociales. Et d'autre part, expliquer
l'impact de ces dépenses publiques sur le niveau des indices de
pauvreté. Pour cela, nous nous sommes appuyés sur les
hypothèses suivantes :
H1 : Les dépenses publiques sociales sont
inégalement réparties entre les différentes
catégories sociales.
H2 : Les pauvres profitent moins des dépenses publiques
sociales.
H3 : Les dépenses publiques sociales influencent
positivement la sensibilité des indices de pauvreté (FGT).
La présomption que les dépenses publiques sont
inégalement réparties entre les différentes
catégories et profitent moins aux populations vulnérables nous a
amené à établir une relation entre le coût unitaire
et la consommation des ménages des services reçus. Nous avons
fait recours au modèle statistique proposé par Démery et
au terme de l'analyse, il ressort que la part du budget affectée par
l'Etat aux ménages en services sociaux (en éducation et en
santé) est plus orientée vers les ménages les plus
aisés que les ménages les moins aisés.
Par la suite une autre analyse a été
utilisée pour étudier l'impact des dépenses publiques
sociales (en éducation et en santé) sur les indices de
pauvreté (FGT). Pour cela, nous avons utilisé un modèle de
régression en données de panel qui mettait en relation les
dépenses sociales et les indices de pauvreté par
l'intermédiaire des départements considérés comme
individus. Les tests de validation effectués ont été
vérifiés. Les résultats ont montré que les
dépenses publiques n'ont aucun impact sur l'incidence de
pauvreté, la profondeur de pauvreté et la
sévérité de pauvreté.
Au regard des résultats obtenus, l'on peut retenir dans
le premier cas du modèle que le développement du secteur de
l'éducation et de la santé constitue l'une des principales
priorités des pouvoirs publics béninois. Cela se traduit par un
arbitrage budgétaire favorable aux deux secteurs. Si un tel choix
politique est pleinement justifié, l'analyse des dépenses
publiques affectées à l'éducation et à la
santé met en évidence un problème de ciblage de la
population la plus défavorisée et de régression des
dépenses de l'Etat.
Les dépenses publiques affectées à
l'enseignement supérieur sont les plus inadéquates. Or la
réduction durable et significative de la pauvreté passe
nécessairement par l'amélioration du capital humain des couches
sociales défavorisées. L'accès de cette catégorie
de la population facilite l'insertion dans le marché de travail.
Dès lors, il importe de corriger les biais de ciblages et de
régression des dépenses publiques sociales.
Une attention particulière doit être
accordée à cette population défavorisée à
travers l'augmentation de l'offre de ces secteurs et la mise en
oeuvre de mesures
d'accompagnement (transfert de l'Etat) en faveur des
ménages les plus modestes.
Ensuite, dans le deuxième modèle, il ressort que
les dépenses sociales n'ont
pas eu d'impact sur les mesures de pauvreté telles que
définies dans notre étude.
En d'autres termes, les résultats attendus n'ont pas
été vérifiés. C'est dire donc que malgré
l'importance que revêtent les services sociaux en l'occurrence la
santé et l'éducation au Bénin, elle connaît un
recule de satisfaction et d'amélioration sur les indices de
pauvreté au Bénin.
Pour que des actions convergent vers un processus de
croissance visant à réduire directement la pauvreté, il
est nécessaire que les secteurs où sont les pauvres et qui
utilisent les facteurs de production bénéficient d'une attention
particulière car leur facteur de production le plus abondant est donc le
travail auquel s'ajoute la terre. De ce fait, selon Klasen (2001), «
l'expérience de toute les réussites en matière de
développement suggère qu'obtenir des taux élevés de
croissance et de réduction de la pauvreté implique toujours de
mettre l'accent sur la hausse de la productivité et des
revenus. »
Par ailleurs, d'autres variables pertinentes telles que la
variable indicatrice 2000, 2002, 2006 ont été retenues et ont
révélé leur impact positif et significatif sur les indices
de pauvreté. Cela explique la particularité que revêt
l'Etat à accroître ces dépenses en vue d'assurer un
mieux-être aux populations vulnérables.
Pour finir notons que cette étude reste perfectible car
elle comporte des insuffisances. Nous les formulons ici de manière
à ce qu'elles soient prises en compte dans les études
ultérieures. Il s'agit de :
- Désagréger les dépenses globales
d'éducation et
de santé respectivement en dépenses de
fonctionnement et d'investissement. Cela permettrait de connaître la
structure des dépenses de chaque secteur qui influence sur le
bien-être.
- Utiliser le total des dépenses sociales,
c'est-à-dire qu'en plus des dépenses en santé et en
d'éducation, l'on pourrait ajouter les dépenses de logement, de
sécurité sociale, de protection de l'environnement, de la micro
finance etc. Elles jouent un rôle non négligeable en
matière de réduction de la pauvreté.
- Effectuer des régressions séparées en
utilisant un
indicateur de pauvreté respectivement pour la
population rurale et la population urbaine (par exemple les indices FGT de la
zone rurale et urbaine). Cela permettrait de mieux connaître l'impact
dans ces deux milieux.
- Utiliser également les scores d'efficience pour
pouvoir insister sur une meilleure allocation des ressources
publiques dans les secteurs sociaux en particulier et au niveau des
différentes structures gouvernementales en général.
- Effectuer l'étude à partir d'une matrice de
comptabilité sociale (MCS) pour tenir compte des effets
des dépenses sociales totales sur les différentes
catégories d'agents économiques.
Les limites proviennent également de
l'indisponibilité des données sur toutes les périodes et
de la diversité des sources.
Cependant, il convient de souligner que les insuffisances ci-
dessus relevées
n'entachent nullement la portée théorique et
empirique de l'étude dans la mesure oütout travail
empirique n'est à l'abri des difficultés inhérentes
à la construction des modèles économétriques,
lesquelles sont reconnues au moins implicitement par tous les auteurs.
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