Passer à l'action dans le service
public : l'exemple du bureau de Poste de Cergy Grand Centre
La notion de « faire » est très
présente aujourd'hui. Du « ensemble tout devient
possible » (slogan UMP 2007) au « just do
it » (nike), en passant par le « yes we
can » de B. OBAMA, la société actuelle affiche une
volonté claire de « passer à l'action ».
Derrière ces slogans se cache une réalité faite entre
autre de résistance aux changements. L'expérience de terrain
laisse paraître que dans le milieu professionnel de nombreux projets ne
trouvent pas d'aboutissement.
Une littérature très dense fait
référence à la question du changement. Beaucoup d'auteurs
sont des consultants et se fondent sur des expériences de terrain
(DELAVALLEE, 2006 ; VAN DEN BULKE, 2007 ; COVEY, 1995 ; PFEFFER
- SUTTON, 2007). L'intérêt soudain des consultants pour cette
notion démontre à lui seul l'importance qu'on lui accorde en
entreprise. La mise en action est souvent traitée dans le cadre du
changement ou de la conduite de projet. Dans l'ensemble de ces lectures
apparaissent des thèmes récurrents tels que : confiance,
défiance, type de management, accompagnement du changement, coaching,
gestion du stress, évaluation des performances. Ces notions font
également l'objet d'une analyse approfondie dans ce mémoire.
Je souhaite ici porter un regard critique sur mon propre
environnement professionnel. L'intérêt de ce regard est
d'interroger mes pratiques quotidiennes et donc, favoriser l'émanation
de réponses à des problèmes d'entreprise. Et plus
particulièrement au sein du bureau de Poste de Cergy Grand Centre dont
je suis le directeur depuis environ 5 années.
Le groupe La Poste regroupe les métiers du courrier, du
colis, de La Banque Postale et de l'Enseigne. Cette dernière a pour
vocation de vendre les autres métiers au grand public. Mes recherches
s'appuient principalement sur l'observation participante (telle que
définie par BEAUD - WEBER, 2003) des équipes et des
fonctionnements. J'ai tenu jour après jour un journal de bord, fait de
descriptions de comportements et d'analyse de mes ressentis, des semaines 8
à 26 de l'année 2009. L'objectif de la méthode est de
rechercher les éléments qui favorisent ou font obstacle au
passage à l'action dans le quotidien du bureau de Poste.
Le bureau, durant ces dernières années, est
passé d'un statut d'administration à un espace proche de la
vision d'un commerce de proximité traditionnel. Cette révolution
est le théâtre idéal pour identifier le passage d'une
vision (intention) à sa réalisation et sa mise en oeuvre
(action). C'est pourquoi je me suis largement appuyé sur cette
expérience.
Comment ce passage a-t-il été possible ?
Quelles sont les postures récurrentes à la mise en action ?
Pourquoi cette transformation radicale a fonctionné ?
Des auteurs ont déjà utilisé les bureaux
de Poste dans leurs recherches et ont réalisé un travail
remarquable. JEANTET (2003) s'est appuyée sur des observations dans un
bureau de Poste avec des vitres au guichet et une file d'attente. Les relations
entre les usagers et les préposés s'en trouvaient alors
totalement impactées. Les protagonistes se sentaient
protégés par les vitres et ont développé des
comportements de « guerre de pouvoir ». L'usager
revendiquait ses droits et le préposé se sentait intouchable et
garant d'une règle. Puis, HANNIQUE (2004) a montré
l'évolution qu'apporte le bureau A200B (bureau sans vitres) dans les
mentalités des agents et des clients. Les protagonistes se trouvaient
alors face à face sans protection. Les pouvoirs des uns et des autres
s'en sont trouvés diminués sans pour autant totalement
disparaître. Les conflits ont commencé à diminuer. Dans le
cadre de ce mémoire, je propose d'analyser la suite des
évolutions réalisées avec le bureau « Espace
Service Clients (ESC) de Cergy Grand Centre. Les clients et les conseillers
guichetiers occupent dorénavant le même espace composé
d' « îlots-conseils », se côtoient
directement et entretiennent des relations commerciales directes.
L'observation des diverses situations rencontrées au
sein de l'entité permet d'alimenter la réflexion.
J'évoquerai ici les principales qui ont des effets sur la mise en
action : la mission de service public, le positionnement des cadres, les
niveaux de lignes hiérarchiques, le type de management, le dialogue.
On perçoit dans les observations et les
questionnements, la récurrence d'idées : la vision du travail,
les dessous de l'action (partie 1), le manager dans l'action (partie 2),
l'appui des services fonctionnels (partie 3), les limites du sens du travail
(partie 4).
Chaque terme utilisé ici nécessite une
définition claire de ce qui est perçu et une confrontation des
idées déjà maintes fois développées avec la
réalité du terrain au bureau de Cergy Grand Centre.
Durant mes investigations de terrain, j'ai principalement
été guidé par une question de recherche :
Comment passe-t-on d'une vision stratégique
à l'action ?
Vingt semaines d'observation et de lecture m'ont amené
à la conclusion que les enjeux de ce passage se situent dans le
sens que les salariés accordent à leur travail.
Un sens qui n'est pas donné une fois pour toute, mais qui émane
des interactions quotidiennes des différents agents de l'institution.
L'objet de ce mémoire n'est pas de donner la bonne
marche à suivre pour obtenir des résultats. Son objectif est de
montrer de la manière la plus exhaustive possible, comment est
vécu et mis en place le passage de la vision stratégique à
l'action sur le terrain de Cergy Grand Centre.
1ère PARTIE : LA VISION DU
TRAVAIL : LES DESSOUS DE L'ACTION
« Dans un monde qui bouge, il vaut mieux
penser le changement que changer le pansement »
(Francis BLANCHE)
Le travail à l'Enseigne est un peu particulier. La
Poste existe depuis 1477 avec la création des « relais
poste » par Louis XVI* et a su s'adapter à de nombreuses
évolutions. Dans son histoire, l'établissement a connu de
multiples mutations et a joué un rôle important dans
l'économie nationale (ex : création du compte chèque
postal en 1918). Au fil des évolutions des marchés et des
années, des notions apparaissent incontournables.
Nous verrons dans cette partie l'importance de la
stratégie et de la vision qui y est attachée, la notion de
service public et ses contraintes, la vision que se font les collaborateurs de
« leur travail » et de leur rôle, et enfin comment
est vécu et mis en place le changement dans les entités.
1.1 La vision stratégique : donner du sens au
travail.
La stratégie joue un rôle essentiel dans la vie
d'une société. VAN DEN BULKE - MONEME (2007, p. 14)
affirment qu'« un collaborateur a besoin d'une mission clairement
définie ». Cette notion laisse supposer qu'il suffit de
dire ce qui est attendu à son équipe pour que la mise en action
se réalise. Est-ce vraiment le cas ?
Projetons-nous dans la configuration postale. La Poste est un
groupe composé de plusieurs métiers.
*
http://www.laposte.fr/Le-Groupe-La-Poste/Nous-connaitre/Histoire
Le Président du groupe, JP. BAILLY, souhaite une grande
unité du groupe autour des métiers de La Poste. On sait que des
discordances apparaissent : le colis et le courrier reprochent notamment
à l'Enseigne l'attente dans les bureaux de Poste qui nuit à leur
image et menacent de passer par d'autres réseaux. La Banque Postale est
très attachée à la captation des flux dans les bureaux
mais reproche un manque de visibilité de La Banque dans les espaces.
J'ai eu la chance d'être invité
récemment à une réunion avec des cadres
stratégiques de l'Enseigne et de La Banque Postale. L'objet de la
réunion était de présenter et d'envisager la
commercialisation future d'une nouvelle offre au sein de l'Enseigne. Le projet
présenté par l'Enseigne semble très cohérent. Puis
est venu la vision de La Banque Postale qui oppose au projet un risque spatial
(diminution de la visibilité déjà jugée faible) et
un risque de se distraire du métier bancaire. Les 2 visions sont
cohérentes et se défendent. Les divergences de vision
sèment le trouble dans les esprits des directeurs
d'établissements présents et mènent à une forme
d'incompréhension de leur part. (Extrait du journal de bord)
Nous souhaitons que les bureaux de Poste soient des commerces
de proximité. C'est ainsi que le bureau de Poste
« traditionnel » avec des files d'attente interminables et
un accueil médiocre est remplacé par un espace marchand dans
lequel le client est accueilli dès son arrivée et orienté
vers un « îlot » où il réalise son
opération. Cette fragmentation des opérations et les
aménagements de l'espace diminuent considérablement l'attente et
apporte une image moderne. La mutation des espaces est connue sous
l'appellation « espace service client » (ESC). Le bureau de
Cergy Grand Centre est « bureau test ».
Jacques RAPOPORT exprime en 2005* que « toute
organisation humaine a besoin, pour évoluer et pour motiver le
personnel, d'une vision, d'un projet qui l'attire vers l'avant et qui donne du
sens à son travail ». Le terme projet semble pris ici
dans son sens : « décider aujourd'hui de rendre
réel demain ce qui n'est pas encore ». C'est
précisément ce « sens » qui fait l'objet du
travail de HANIQUE (2004), et se trouve au coeur des tensions vécues par
les collaborateurs.
* RAPOPORT Jacques (2005), « Accompagnement du
changement en environnement rigide : la RATP »,
Présentation du centre régional de ressources Journée
du 31 mars 2005 à la MGEN.
La vision stratégique est censée donner du sens
à ce que sera son adaptation sur le terrain. Une contrainte qui revient
de manière régulière au niveau des collaborateurs est
notre mission de service publique. « Le poids de l'histoire
devient une cause principale du manque de réactivité des
entreprises » affirment VAN DEN BULKE - MONEME (2007, p.
68-70). Si cela peut s'appliquer à certaines entreprises privées,
BERTEAUX-WIAME - LINHART (2006) expriment avec justesse que la situation
des entreprises publiques est tout autre. Elles montrent qu'un
établissement du secteur public cultive un sens républicain et
citoyen qui pourraient accompagner les changements s'ils étaient bien
menés. A La Poste, ce sens semble se reporter sur la notion de service
public.
1.2 Notre mission de service public : force ou
faiblesse ?
La notion de service public constitue une dimension centrale
au sens que les postiers accordent à leur travail (HANIQUE 2004, JEANTET
2001, BERTEAUX-WIAME - LINHART 2006). Ainsi, pour mieux appréhender
et comprendre l'objet de mon mémoire, on ne fera pas l'économie
d'un détour sur l'histoire récente de La Poste.
En mai 1990, l'Assemblée Nationale adopte la
réforme des PTT. La Poste perd son statut d'administration et devient un
établissement autonome de droit public.
Le 15/10/2001, Luxembourg vote la loi de
dérèglementation postale qui ouvre les services postaux à
la concurrence pour 2011.
Pour BALLASTRE* (octobre 2002), c'est une mission sensible car
il existe une tradition syndicale contestataire et une culture de service
public. Quant à BERTEAUX-WIAME - LINHART (2006), la notion de
client à La Poste altère la légitimité du travail
en introduisant une inégalité entre
l' « usager » et l'agent.
Le phénomène est simple et complexe à la
fois. La Poste possède une activité qui dépend d'une
mission de service public. De manière globale, ces opérations
sont coûteuses et consomment un temps important. Pour financer cette
mission, La Poste développe des ventes de produits « à
marge ». Ces deux types d'opérations sont compatibles et
complémentaires. Les unes financent les autres sans intervention
pécuniaire des pouvoirs publics.
* BALLASTRE G. (2002), « Un service public
métamorphosé en commerce », Le monde diplomatique,
octobre.
Les Postes européennes sont de manière
générale, confrontées à la même situation.
Faisons un détour par la DeutschePost (Poste
allemande), souvent présentée comme un des modèles de
réussite économique dans l'ouverture des marchés
postaux.
Quelque 12 ans après la privatisation, la DeutschePost
a nettement augmenté ses bénéfices, détient 90% de
son marché avec des diminutions drastiques des effectifs et l'abandon
des activités peu rentables. Il est même envisagé la
disparition des bureaux car trop coûteux en personnel. Les
activités seront déplacées dans des commerces de
proximité (Aldi, épiceries, boulangers)*. On peut s'interroger
alors sur le maintient de la notion de service public et sur le sens que l'on
peut y donner dès lors qu'elle est transférée chez des
commerçants, sans partage de cette valeur.
Il paraît alors intéressant d'interroger des
collaborateurs sur la confrontation de la notion de service public avec une
activité commerciale :
Madame x, Directrice adjointe pense qu'il va falloir
redéfinir la notion de service public à l'Enseigne. Elle
s'interroge également sur comment financer le modèle si on perd
des recettes avec l'ouverture des marchés. « On doit faire une
course avec des concurrents, mais nous on a un boulet aux
pieds »
(Extrait du journal de bord)
Toutes ces remarques sont pertinentes et montrent un
changement radical dans les mentalités des agents ces dernières
années. Il est important de noter que Madame x est fonctionnaire. On a
le sentiment que les agents ont bien compris que nous sommes devenus des
commerçants et que des contraintes commerciales pèsent sur
l'entreprise.
L'exemple ci-dessous insiste sur le sentiment de
réciprocité attaché généralement au secteur
privé :
*S. PICHON la poste allemande : la face cachée de
la privatisation [en ligne]
http://www.rue89.com (page
consultée le 08/05/2009)
Autre exemple issu de mes observations. Une
guichetière rédige un chèque de Banque pour un client.
Elle me demande si elle doit faire payer le client pour cette opération.
Je l'invite à regarder la réglementation. Elle semble
soulagée de voir que l'opération donne lieu à la
perception d'une taxe. Je lui demande pourquoi ? Elle me dit :
« je ne travaille pas pour rien ! ». Elle est
fonctionnaire, proche de la retraite et fervente défenseur du service
public. (Extrait du journal de bord)
La mission de service public reste très
présente dans les esprits. On a du mal à définir ce
qu'elle représente vraiment chez les agents et les clients. Une
certaine dissonance entre les visions semble mener à un quiproquo dans
le sens accordé à la mission de service public.
Les clients mobilisent des droits d'usagers (contribuable) et
des prérogatives de clients (JEANTET, 2003). Cette vision est
altérée par une assimilation de la fonction publique aux
traitements des fonctionnaires payés par l'impôt des
contribuables. Cela n'a jamais été le cas à La Poste, mais
l'assimilation est très présente dans les discours de nos
clients. Il est fréquent dans les bureaux d'entendre des clients
justifier de leur droit par une expression du type « vous êtes
payés par mes impôts, alors faîtes ce que je vous
dis ! ».
Les guichetiers quant à eux, développent un
savoir-faire empathique pour servir les clients. On peut dès lors parler
de « guerre de pouvoirs », où le client asservit le
guichetier et réciproquement, le guichetier exerce une domination sur le
client (JEANTET, 2003). Celle-ci prend souvent une forme
d' « excès de zèle » et d'une
application (trop ?) stricte de la réglementation.
On trouve des limites à ces analyses dans la
proximité des clients et des guichetiers entamés avec les bureaux
A200B telles que montrées par HANIQUE (2004) et plus encore dans les
espaces marchands ESC. Cette proximité, en plus de diminuer
considérablement les incivilités, élimine progressivement
les rapports conflictuels et positionne les protagonistes dans une
réelle relation commerciale.
Lorsque je suis dans l'espace marchand, je suis souvent
étonné de la vision des clients au service public. J'y ai
trouvé des opérations de change que les établissements
bancaires envoient à La Poste (le coût de ces opérations et
le temps nécessaire à son traitement est important), le
rechargement des cartes « monéo » (quasiment plus
d'établissement ne possède ce type d'appareil), faire de la
monnaie pour les commerçants (opération coûteuse puisqu'il
faut convoyer les fonds). (Extrait du journal de bord)
Au cours de mon expérience dans l'espace-marchand, j'ai
souvent noté un formidable fossé entre la notion de service
public et la vision qu'en ont le public et les postiers. Il semble que pour les
uns et les autres, des opérations longues et coûteuses soient
systématiquement du domaine du service public. Or, la mission de service
public dévolue à La Poste concerne :
1°) assurer un service universel de qualité (une
distribution du courrier-colis 6 jours sur 7 sur l'ensemble du territoire)
2°) garantir l'accessibilité bancaire (conciliant
l'accueil de tous et les impératifs économiques afférant
à toute banque)
3°) aménager le territoire (maintenir un niveau
très important d'accessibilité aux services postaux)
4°) distribuer la presse (avec des tarifs postaux
privilégiés).*
L'Enseigne La Poste devient une entreprise commerciale
à part entière. On peut légitimement s'interroger sur le
bien fondé d'un service public (et surtout sa définition tant
pour les clients que pour les collaborateurs) dès lors que l'entreprise
qui le porte est en concurrence sur l'ensemble de ses métiers et doit le
financer.
S'adaptant au contexte relayé par le discours
d'entreprise, les agents se réconcilient petit à petit avec
« leur » notion de service public. Souvent, elle facilite
la volonté d'action de vente des postiers. En effet les postiers se
montrent plus enclins à assurer des fonctions commerciales pour autant
qu'elles assument la pérennité de la fonction citoyenne de La
Poste.
*
http://www.laposte.fr/Le-Groupe-La-Poste/Espace-collectivites/Nos-quatre-missions-de-Service-Public
1.3 Les collaborateurs veulent faire du « bon
travail ».
Une constante est à noter dans les activités
observées chez les collaborateurs : la volonté claire de
bien faire. Une question s'impose alors de savoir : les collaborateurs
ont-ils tous la même notion de ce qui est attendu de lui ? Comment
les collaborateurs du bureau de Cergy Grand Centre peuvent répondre
à cette volonté de faire du « bon travail »,
vendre des produits à valeur ajoutée, lutter contre l'attente des
clients au quotidien et assurer une mission de service public convenable ?
Comment faire lorsque des dissonances importantes surviennent dans son
activité professionnelle ?
Il semble pour cela accepter d'adapter son poste de travail
aux « attendus métier » et à ses
« valeurs propres ». Dans de nombreuses situations, le
collaborateur se trouve à composer entre sa volonté de
« bien faire » et son activité au quotidien. Pour
assumer ses tâches de plus en plus nombreuses, le collaborateur se trouve
confronté au « dirty work »
énoncé par HUGUES (1996). Cette notion regroupe des tâches
(en général peu gratifiantes) que l'on cherche à
déléguer à d'autres, mais doivent être
assumées pour assurer le bon fonctionnement du service.
Les conseillers bancaires doivent générer
leur activité avec du « phoning ». Cette
activité est mal perçue. Les conseillers ont l'impression de
faire du démarchage comme beaucoup d'autres entreprises avec la mauvaise
image que cela véhicule (vente de fenêtres, cuisines...).
Cependant, ils le font. Certains, se sentant si peu à l'aise avec cet
exercice, préfèrent organiser leur agenda avec des
« relances qualifiées ». Ce qui revient à
annoncer au client qu'on le rappellera d'ici x mois pour prendre rendez-vous et
réaliser un suivi commercial de son dossier.
De manière régulière, lorsque des
étudiants réalisent un stage, c'est en priorité la
séance de phoning de phoning et de classement des dossiers qui sont
délégués. (Extrait du journal de bord)
Quand le collaborateur se trouve dans l'obligation de
réaliser une tâche, il se résout à la faire. Il se
trouve alors qu'il réalise sans le savoir une « adaptation
primaire : il donne et reçoit, avec l'état d'esprit requis,
ce qui a été décidé qu'il lui en coûte ou
non » (GOFFMAN, 1968, p. 245-249).
L'adaptation peut aussi se trouver entre le manager et son
(ses) collaborateur(s). REYNAUD (1999) évoque dans ce cas la notion de
régulation, qu'il définit comme une forme de concession
réciproque, de compromis. Il précise que cette régulation
n'est en fait qu'une solution provisoire. Le manager et le collaborateur
entrent par conséquent dans une forme de négociation
quasi-permanente pour que le compromis soit acceptable et raisonnable.
Dans d'autres cas, le collaborateur peut (ou doit) aller plus
loin dans ses adaptations.
Vers 18 heures, je constate qu'un guichetier
réalise le relevage du courrier. Je lui demande des explications sur
cette attitude qui me dérange : le départ du courrier se
fait à 16 heures. Le collaborateur m'explique qu'il
s' « avance » sur le travail à faire le
lendemain. Il y a des clients dans l'espace marchand, je lui demande donc de
s'occuper du travail du jour avant de celui du lendemain. Contrarié par
cet épisode, je décide d'arriver le lendemain matin plus
tôt qu'à l'accoutumée. Je m'aperçois que le
collaborateur arrive avec 20 minutes de retard. Quand je lui demande des
explications, il me répond qu'il effectue un 2ème
travail tôt le matin de temps en temps. Je comprends son attitude de la
veille, le trouve très courageux, mais lui demande de faire un choix.
(Extrait du journal de bord)
On se trouve ici dans des « adaptations
secondaires : cela consiste en des pratiques qui, sans provoquer
directement le personnel, permet d'obtenir des satisfactions interdites ou bien
des satisfactions autorisées par des moyens défendus
(connaître les ficelles, être à la coule, connaître
les « trucs », les occases, les combines, être au
parfum) » (GOFFMAN, 1968, p. 98-100).
Ces adaptations, dites « secondaires »
peuvent prendre 2 formes : désintégrantes (briser la bonne
marche de l'organisation) ou intégrées (infléchir des
forces qui seraient, autrement, désintégrantes).
Ces notions sont très bien illustrées par WAELLI
(2009, p. 25-27) lorsqu'il évoque le défaut de fonctionnement
d'une machine, « réparée » par un coup de
poing. Les collaborateurs utilisent des techniques peu orthodoxes mais
efficaces pour assurer la bonne marche du service. Que se passerait-il si le
collaborateur utilisait la procédure qui consiste certainement à
demander l'intervention des services de maintenance ?
Là encore, le manager se voit contraint de
négocier en permanence avec son (ses) collaborateur(s). C'est cette
capacité à négocier qui semble déterminante mais
difficile à pérenniser avec les mêmes acteurs sur un
même site.
Cette analyse légitime à elle seule de
s'interroger sur le temps passé dans une fonction dans un même
site. Un collaborateur en poste depuis 20 ans (situation fréquente chez
les conseillers du guichet) est ancré dans ses adaptations. Cette
situation peut avoir un effet défavorable sur les évolutions
stratégiques et altérer le sens que donne le collaborateur
à son travail quotidien. Comment peut-on accepter de changer de vieilles
habitudes dans son travail ?
1.4 Le changement à La Poste :
résistance ou intelligence ?
La Poste est une « vieille dame »,
incrustée dans le paysage économique de la France. Nous l'avons
déjà évoqué, dans un futur proche, de grosses
échéances l'attendent avec en ligne de mire le passage en
société anonyme dès le début 2010. Des changements
importants ont eu lieu, d'autres vont intervenir. Comment sont vécus ces
changements dans ce qui était jusqu'en 1991 une administration ?
Pourquoi et comment les collaborateurs « acceptent » les
changements ?
« Mais avant c'était différent. En
fait ça n'arrêtait pas de changer... Mais nous, on restait
pareils... Aujourd'hui, c'est autre chose : La Poste change, et nous
aussi : on est obligé... » (Une guichetière
interrogée par HANIQUE, 2004, p. 10).
La littérature sur le changement dans les entreprises
est très dense. Certains auteurs se hasardent même à donner
des méthodes pour « réussir le
changement ». Ce qui m'intéresse dans le cadre de ce
mémoire est la question préalable commune à ces
analyses : pourquoi changer ?
« Une personne résiste au changement si
elle n'y voit pas son intérêt, ce qui est plutôt un signe
d'intelligence » (JARROSSON - JAUBERT - VAN DEN BULKE, 2007, p.
15-20). Le collaborateur (et peut être bien nous) n'accepte de changer
que pour une situation meilleure, lorsqu'il y trouve son intérêt
personnel. Autrement dit, lorsqu'il voit un sens à ce changement. Pour
REYNAUD (1999), les régulations de travail créées ne sont
plus l'expression clandestine de la résistance au changement mais sont
considérées comme une ressource précieuse. Cette notion
semble intéressante car redonne du sens à une dynamique
considérée négative alors qu'elle est l'expression d'une
volonté positive. Il est amusant de noter que sur le bureau de Cergy
Grand Centre, les personnels qui à mon arrivée
démontraient une forte « résistance au
changement », sont devenus à ce jour acteurs essentiels de
l'organisation et ont pris des fonctions de Responsables de Bureau de Poste
(anciennement appelés annexes). Le sens donné à cette
dynamique s'est tourné vers des responsabilités commerciales
accrues.
Dans les bureaux de l'Enseigne, on explique depuis des
années déjà que la concurrence va se développer
rapidement sur nos métiers traditionnels. De nombreuses
améliorations se sont développées et
accélérées pour anticiper cette situation. Pourquoi alors,
certains collaborateurs acceptent le changement d'une ancienne administration
vers une société commerciale ?
Une idée d'acceptation du changement peut trouver son
origine dans des situations particulières : « Certains
salariés d'une plate-forme pétrolière, pris au
piège d'un terrible incendie, avaient préféré
échapper à une mort certaine en sautant dans la mer du haut de la
plate-forme, se plongeant ainsi dans un avenir plus qu'incertain et à
coup sûr terriblement dangereux » (AUTISSIER - MOUTOT, 2007, p.
51-52). C'est ce qui est appelé la « burning
platform ». Cette anecdote montre combien en situation de
danger, on donne un sens nouveau à ce que nous n'aurions jamais fait de
manière rationnelle.
Il existe d'autres alternatives à l'acceptation du
changement.
2 mois après le passage à l'espace marchand
ESC, j'avais promis à l'ensemble de mes collaborateurs d'organiser un
groupe de travail sur les dysfonctionnements constatés dans la nouvelle
organisation. Des sous-groupes ont été constitués :
ligne guichet (qui traite des opérations bancaires au guichet et le
western union), espace marchand (qui s'occupe de l'accueil des clients et la
vente de produits dans l'espace). Les résultats sont
édifiants : le groupe ligne guichet propose que soit
amélioré l'accueil à la clientèle, ce qui incombe
à l'autre groupe. J'explique que l'idée est intéressante
et qu'il faut que les collaborateurs du guichet participent à
l'accueil ! (extrait du journal de bord)
Cette solution, difficilement acceptable dans les
organisations, se retrouve pourtant régulièrement.
« Si les autres acceptent de changer, cela m'évite
à moi de changer ! » (JARROSSON - JAUBERT - VEN DEN
BULKE, 2007, p. 21-24). Cette notion semble contestable. Globalement, lorsque
l'on évoque cette « résistance au
changement » on se trouve, en fait, face à une formidable
dynamique, qui permet de donner du sens à un type d'action.
1.5 Le poids de la « culture
d'entreprise » : les valeurs postales.
Le dernier postulat à la mise en action se trouve dans
la culture d'entreprise de La Poste. La notion de culture d'entreprise a
l'étrange particularité d'être à la fois
partagée et finalement pas (ou peu) formalisée. Pour se
convaincre de l'intérêt que cette notion suscite, il suffit de
voir qu'une recherche sur
www.google.fr pour :
« définition de la culture d'entreprise » apporte
1 540 000 réponses.
Pour COHENDET - DIANI (2003), la culture d'entreprise est
« cette grammaire commune qui permet aux agents de donner du sens
au monde, de coder l'histoire et les expériences passées, et d'y
développer leurs actions ». Cette approche peut ne pas
s'appliquer à des entreprises de petites tailles et/ou nouvelles, mais
semble cohérente avec l'expérience du terrain à La Poste.
La traduction de ce processus semble permettre de co-créer du sens. Il
faut dès lors se pencher sur les valeurs qui émergent au sein du
groupe.
En cela, BERTAUX-WIAME - LINHART (2006), portent un regard
critique intéressant. Le travail à La Poste y est
présenté comme peu épanouissant mais apte à donner
un sens républicain et citoyen, les auteurs dénoncent
l'individualisation du travail qui est ressenti comme une remise en cause des
règles du jeu. Aux vues des observations du terrain
énoncés précédemment, cette analyse tout en
étant encore présente, semble s'atténuer pour s'orienter
vers une culture d'entreprise plus en phase avec les règles commerciales
sur un marché concurrentiel.
Il est également amusant de noter que lorsqu'un
« extérieur » interroge un collaborateur de La Poste
sur son métier, la réponse est souvent : « je
suis postier ». Cela semble suffire à exprimer son
métier. En cela, le « postier » est proche de
l'artisan qu'énonce par ZARCA (1988). Le collaborateur est
« postier » avant d'être guichetier ou facteur, comme
on est « artisan » avant d'être plombier ou
charpentier. Ce qui démontre une notion de forte appartenance au
groupe.
L'identité du groupe est importante, la construction de
l'identité au métier est également similaire à
celle de l'artisanat (apprenti / guichetier, jeune compagnon / guichetier
confirmé, compagnon confirmé / guichetier animateur, maître
/ cadre de proximité).
Comme pour celle de l'artisanat, la culture vit par la
transmission orale (savoirs, savoir-faire, valeurs, manière
d'être, symboles). Il est intéressant de constater que de nombreux
« postiers » sont fils, petit-fils et/ou époux (se)
de « postiers ».
Même si cette tendance semble s'atténuer depuis
que La Poste n'est plus une administration, de nombreux collaborateurs sont
encore dans cette notion « familiale ». Cela renforce le
sentiment d'appartenance forte des « postiers » à
l'entreprise. En quelque sorte, on porte les « couleurs »
de La Poste et par la même, une tradition. On paraît donner un sens
à notre métier de « postier ».
La Poste est en pleine mutation. Il y a longtemps que les
changements sont annoncés et que les collaborateurs y sont
préparés. Les échéances sont immédiates et
les collaborateurs en prennent conscience.
Nous venons, dans cette première partie
d'énoncer les facteurs de résistance aux changements vécus
à La Poste. Nous avons souligné la difficulté de suivre
une stratégie pour l'entreprise, de prendre en compte le cas particulier
de la mission de service public à La Poste et de composer avec elle, de
reconnaître la valeur des collaborateurs et de comprendre les adaptations
qu'ils ont nécessairement développées.
Nous avons donc pu comprendre que le changement à La
Poste ne peut se faire sans s'appuyer sur des valeurs. Cette prise en compte
nécessite peut-être davantage de temps que d'autres types
d'entreprises, mais repose sur un socle de valeurs qui constitue
également un gage de stabilité et de réussite dans un
univers incertain et concurrentiel.
Le passage à l'action semble dès lors reposer
sur un collaborateur particulier : le manager.
2ème PARTIE : LE MANAGER DANS
L'ACTION
« On considère le chef d'entreprise
comme un homme à abattre, ou une vache à traire. Peu voient en
lui le cheval qui tire le char »
(W. CHURCHILL)
Un coup d'oeil sur internet nous informe de
l'intérêt de la littérature spécialisée pour
le manager1(*). Si tout le
monde s'accorde à donner à la figure du manager une position
centrale dans l'entreprise, sa définition n'en est par pour autant
consensuelle2(*). Elles se
croisent cependant souvent sur les termes : gestion et organisation des
ressources. Parmi toutes celles que j'ai pu consulter, j'en ai retenu deux, la
première pour son exhaustivité et la seconde parce que sa
simplicité est caractéristique des raccourcis trop souvent
empruntés dans les discours sur l'organisation du travail.
Pour MINTZBERG (2006), les rôles du cadre se
décomposent en 3 catégories : des relations
interpersonnelles (symbole, agent de liaison, leader), du traitement de
l'information (observations actives, diffuseur, porte-parole) et des prises de
décisions importantes (entrepreneur, régulateur,
répartiteur de ressources, négociateur). Notons que MINTZBERG a
concentré ces études sur des cadres généraux.
Pour COMMARMOND et EXIGA (2004, p. 112-118), la
définition est beaucoup plus courte : « manager c'est
faire réussir ». Cette dernière est très
(trop) simple et très restrictive sur un métier aussi complexe.
L'opposition de ces définitions montre combien une activité en
apparence simple peut finalement recouvrir une réalité complexe.
Nous nous concentrerons ici d'abord sur une double dimension
du métier : le « management de
proximité » et le management quotidien. Puis, nous reviendrons
sur l'obstacle souvent évoqué du « temps».
2.1 Le manager de proximité, avant tout un
négociateur :
Je propose d'apporter une vision du « manager de
proximité ». Qui est-il ? Que fait-il ? Quelles sont
les forces qui se trouvent sur son chemin ? En quoi son rôle est
important dans le fait de donner du sens ?
Pour comprendre le positionnement du « manager de
proximité » qu'est le Directeur d'Etablissement de l'Enseigne
La Poste, reportons nous au tableau ci-après :
Tableau 1 : Le management selon les 3 niveaux
hiérarchiques
Positions
|
Fonctions
|
Exemples
|
Management sénior
ou top management
|
- définir la mission, les valeurs, la vision globale
- mettre en place des objectifs stratégiques
- suivre les résultats du groupe
- maintenir des relations avec les partenaires
clés : actionnaires, clients, public
- s'assurer de la disponibilité du management
(sénior)
- déterminer le management global et la structure de
l'organisation
- apporter la philosophie et l'exemple sur la façon de
gérer
|
PDG, DG, Membre du Comité de direction
|
Management intermédiaire
|
- mettre en place des objectifs opérationnels de
performance pour chaque entité
- apporter les ressources nécessaires à la
performance
- échanger l'information avec les autres niveaux de
management et les unités
- participer aux relations avec les clients et aux
décisions financières
- développer le management clé et les
compétences
|
Directeur commercial, Responsable de secteur
|
Management de base en contact avec le terrain
|
- mettre en place pour les salariés les
activités, les objectifs de performance
- assurer la formation, l'accompagnement, les ressources
nécessaires à la réalisation de la performance
- donner un retour aux salariés sur les performances
- assurer les reconnaissances, les récompenses et
mesures salariales
- s'assurer que les pratiques sont cohérentes avec les
valeurs désirées
- maintenir le contact avec les clients-clés
|
Responsable des ventes, chef de rayon
|
Réf : J. W. Walker, Human ressource strategy, New
York, MC Graw-Hill, 1992
A la lecture de ce tableau, le directeur
d'établissement semble clairement se situer au niveau du management de
base : il a été appelé « brique de
base » longtemps. Son rôle est axé sur le terrain et la
mise en oeuvre de la stratégie. Il peut d'après ce tableau
être comparé à un « chef de rayon »
dans le domaine de la grande distribution.
Cependant, la vision du terrain ne reflète pas toujours
cet état.
Certains collaborateurs m'appellent chef, d'autres, patron.
Intrigué par ces 2 noms, je questionne une collaboratrice. Elle
m'appelle patron et je lui demande la différence selon elle entre chef
et patron.
- Mme y : C'est simple, la directrice adjointe est la
chef. C'est elle qui est tout le temps avec nous devant les clients. Le patron,
donne les orientations du bureau.
- DET : Quelle est ma position vis-à-vis des
acteurs de La Banque Postale ?
- Mme y : Là vous êtes le chef... Vous
accompagnez les «Cobas » (conseillers bancaires.) Et le patron
en même temps... C'est compliqué !
- DET : donc on peut être chef et
patron ?
- Mme y : non, peut être que c'est votre chef
qui est leur patron ?
- DET : Selon vous, comment se positionne ma chef
à moi (directeur des ventes) et ma patronne (directeur territorial
de l'enseigne la poste) ?
- Mme y : Oh là, moi vous savez, les hautes
sphères... Je sais qui est ma chef, c'est celle qui accompagne le
travail au quotidien. Vous, vous donnez les orientations et vous vous assurez
que le travail se fait comme vous le voulez. Pour le reste c'est flou...
(Extrait du journal de terrain)
Il semble alors que le « chef » est celui
qui accompagne l'équipe au quotidien, celui qui donne du sens à
ce qu'est une stratégie qui semble lointaine pour les collaborateurs du
terrain. Le patron donne les orientations et s'assure de la mise en oeuvre. Le
directeur d'établissement est en fait ces 2 professionnels en même
temps.
Il semble alors intéressant de matérialiser
l'organigramme d'organisation de l'Enseigne pour tenter de clarifier le
positionnement du « manager de proximité ».
La figure 1 synthétise la vision d'un directeur
d'établissement :
Figure 1
VISION DU DET (directeur
d'établissement)
Conseillers bancaires
Conseillers guichetiers
Directeur d'établissement
Directeur adjoint
Guichet animateur
Directeur des ventes
Directeur Commercial Bancaire
Moniteur des ventes CCPE
Moniteur des ventes bancaires
Directeur Territorial de l'Enseigne La Poste
Directeur Réseau Bancaire
Directions Fonctionnelles
Conseiller Spécialisé en Immobilier
Conseiller Spécialisé en Patrimoine
lien hiérarchique
lien fonctionnel
___________________________________________________________________________
Pour étayer cette vision, et en porter un oeil
critique, il m'a semblé important de questionner un collaborateur du
bureau. La figure 2 synthétise sa vision de l'organisation :
Figure 2
VISION D'UN COLLABORATEUR DU TERRAIN
Guichetiers
Directeur adjoint
Directeur d'établissement
Conseillers bancaires
Moniteurs bancaires
Moniteurs CCPE
Gestionnaire pro
Directeur des Ventes
Directeur Territorial de l'Enseigne La Poste
Directeur Commercial Réseau Bancaire
lien hiérarchique
lien fonctionnel
Il est intéressant de voir la complexité de
l'organisation postale, et à contrario la simplicité
avec laquelle les collaborateurs voient l'organigramme du bureau de poste. On
constate dans la vision du collaborateur une vraie reconnaissance de celui
qu'il appelle « chef », celui qui l'accompagne. La notion
de donner du sens à l'action semble bien être primordiale dans
l'organisation du travail. Et pourtant, dans la réalité
quotidienne, il ne suffit pas d'être accompagnant pour obtenir des
résultats. Le « manager de proximité » est
sujet à des contraintes, des guerres de pouvoir au sein de son
entité.
HANIQUE (2004, p. 60-64) note avec justesse le rôle
important du « détenteur local de la
règle ». Dans chaque équipe, se trouve (en
général) un « ancien » qui fait appliquer une
règle propre au bureau. L'appartenance à l'équipe d'un
nouveau collaborateur est conditionnée à l'application de cette
règle. Dans de nombreux cas, le directeur d'établissement reste
(trop ?) peu de temps par rapport à une équipe qui est en
place depuis (trop ?) longtemps. Il est alors attendu du chef qu'il ne
bouleverse pas les habitudes de travail au risque de s'attirer les foudres de
son équipe.
Une des chefs d'équipe du bureau était
présente depuis 27 ans dans l'entité. Logiquement, elle
détenait un pouvoir important et en était consciente. Elle
s'était rendue indispensable à l'équipe par des
connaissances techniques indéniables. Après avoir longtemps
préparé la première étape devant mener à la
mise en place d'un guichet avancé dans la salle, je me suis rendu compte
que son action auprès de l'équipe était
désintégrante. Je lui ai alors demandé de m'expliquer son
attitude. Elle m'a dit une phrase que j'ai notée : « cela
fait 27 ans que je suis ici. J'en ai vu passer des chefs. Ce n'est pas toi qui
va changer les choses. Ici, c'est moi qui commande et cela continuera
après toi ! ». (Extrait du journal de terrain)
On note ici le pouvoir sous-jacent que s'octroie un
collaborateur. Le manager de proximité peut soit
« composer » pour éviter des situations
conflictuelles, soit avoir du courage managérial de conserver sa vision
(et celle de l'entreprise) et de mener à bien ses missions. On trouve
à nouveau une notion déjà évoquée de
négociation, de régulation (REYNAUD, 1999).
Il est intéressant de constater que les collaborateurs,
si le manager ne le fait pas, donnent d'eux même du sens à leurs
tâches et par la même, s'octroient un pouvoir certain. C'est peut
être là une conséquence de ce que BERTAUX-WIAME et LINHART
(2006) expriment par le sens qu'on prête à son travail dans la
fonction public.
Si le « manager de proximité »
semble être celui qui est avec ses équipes « sur le
pont », qu'en est-il dans son management au quotidien ?
2.2 Le management au quotidien, un homme de
terrain :
Le management au quotidien est toujours un exercice
délicat. Le manager se doit de réaliser les objectifs qui lui ont
été fixés par sa hiérarchie. Comment peut-il
(doit-il) amener ses équipes à atteindre ce but ultime ?
Lors d'une enquête auprès d'une
conseillère bancaire, celle-ci m'apporte des éléments
importants : « les objectifs sont essentiels, c'est sûr.
Mais cela ne me motive pas. On a des objectifs quelque fois différents
des besoins de nos clients. L'essentiel est de réussir un acte
commercial : que le client et moi ressortions de l'entretien avec le
sourire ! » (Extrait du journal de terrain)
Revenons sur les bases des techniques de management. DRUCKER
(1955) est considéré comme le père du
« management par objectifs » (MPO).
Selon COMMARMOND et EXIGA (2004), le MPO répond
à un cycle représenté par la figure
ci-après :
Figure 3 : Le cycle du management par
objectifs
COMMARMOND - EXIGA (2004)
Ce cycle devient la référence dans le
management. La première étape (spécifier les
résultats) revient à décider des grands objectifs de
l'entreprise, décliner ces objectifs au niveau des équipes et
décliner les objectifs du collaborateur. La deuxième étape
(piloter jusqu'aux résultats) revient à jalonner l'action, faire
le point régulièrement, alerter en cas de dysfonctionnements.
Enfin, la troisième étape (tirer parti des résultats)
concerne l'évaluation des résultats, lier la rétribution
aux résultats, bâtir des plans de progrès et de
développement individuels et collectifs.
Certains auteurs ont exploré d'autres
« méthodes » de management. On y trouve des notions
de management par les valeurs, par les compétences et/ou par les
règles (DELAVALLEE, 2006), remettant ainsi en question le MPO et
pointant ses limites. La réalité du terrain est tout aussi
nuancée. Si le MPO est toujours très présent, les
évolutions économiques (ex : la mondialisation) et sociales
(ex : la loi sur les 35 heures / la gestion su stress) amènent
à des évolutions vers ces autres formes de management.
Un collègue, directeur d'établissement me
fait part d'une remarque : ce que je crains, c'est qu'un jour on me
demande de réaliser des entretiens avec des « gros
clients » de La Banque Postale. Je n'ai jamais été
« conseiller bancaire ». Moi mon métier,
c'était de vendre du courrier ! (Extrait du journal de
terrain)
Ce bref échange fait référence à
2 notions : l'accompagnement et un des aspects développés
par HUGUES (1996) dans « le drame social du travail ».
HUGUES (1996) avance que celui qui réussit (le
cadre), ne fait plus le métier pour lequel il a été
formé. Cela correspond à une forme de « drame
social » du travail. Dans une entreprise multi-métiers comme
La Poste, ce drame social du travail est d'autant plus présent. Le
directeur d'établissement est souvent issu soit du
« courrier », soit de « La Banque
Postale ». Même si ses compétences commerciales et
managériales se conjuguent au quotidien, il conserve une affinité
évidente pour son premier métier dans lequel il excellait. Il
semble plus aisé de donner du sens au travail des collaborateurs lorsque
l'on maîtrise les tâches à réaliser. Ce qui pose la
question de la capacité réelle à être et directeur
de bureau de poste et directeur de banque ? Il semble difficile de donner du
sens au travail des collaborateurs sur des domaines aussi techniques de
manière aussi efficace dans ces 2 métiers.
L'autre point, qui semble être au coeur du management
quotidien est l'accompagnement. ZARCA (1988) définit cette notion par
« la transmission par des gestes regardés ». Il
souligne que l'apprenti fait comme le maître et le maître fait en
sachant que l'autre le regarde. Le maître, se sachant observé,
agira certainement différemment que s'il était seul. Il insistera
assurément sur le sens de ses gestes. L'apprenti, lui, deviendra
autonome et s'appropriera les gestes jusqu'à lui donner son propre
sens.
JAOUEN - LOUP - SAMMUT (2005) évoquent quant à
elles la relation « gagnant-gagnant » entre
l'accompagné et l'accompagnant. Cette expression indique ici que chacun
trouve un intérêt à cet échange. On parle dès
lors d'un partage de métier, où l'accompagnant
« revit » par la reconnaissance, lui procurant ainsi un
regain de vitalité dans une routine (peut être) installée.
Il semble alors intéressant de noter que cette relation apporte du sens
au travail à l'accompagné et redonne du sens au travail de
l'accompagnant. Cette notion incite à s'interroger sur l'idée de
tutorat qui a déjà été utilisé par
l'Enseigne et mise de côté aujourd'hui.
La notion d'accompagnement s'applique également aux
collaborateurs expérimentés et doit permettre in fine
une meilleure connaissance des spécificités et des
évolutions du métier de l'accompagné.
Le « manager de proximité »
paraît être là encore la pierre angulaire de la mise en
action. Ses modes d'actions sont réels.
« J'ai une idée de la vente. J'ai
l'impression que le travail de relation commerciale n'est pas valorisé.
On n'a pas conscience du travail à faire pour obtenir du CA. Il y a
toujours des périodes à vide dans le
commercial... ».
(1 Conseiller Spécialisé en
Immobilier)
Se pose alors la question du rôle du manager dans ces
actions quotidiennes. Dans son attitude, le manager semble pouvoir utiliser 2
leviers principaux : la proximité et l'exigence.
Figure 4 : les modes d'action du
manager
COMMARMOND - EXIGA (1998)
Proximité
Exigence
+
+
-
-
Le manager
« Copain »
Entraineur
Absent
Autoritaire
Le manager de proximité peut (doit) évoluer dans
les différentes zones représentées dans la figure 4. Dans
la réalité quotidienne, le manager n'est pas cantonné dans
un cadre. Selon les circonstances, il aura vocation à adapter son
management. En cela, il se trouve régulièrement dans une
situation de régulation / négociation avec son collaborateur,
comme le souligne REYNAUD (1999).
Il me semble alors intéressant de s'interroger sur la
perception des collaborateurs à l'encontre du
« manager ». C'est au hasard d'une conversation avec une
guichetière que je perçois une certaine vision :
Je ne comprends pas ce que font les chefs. Vous passez vos
journées en réunions, au téléphone ou
derrière vos ordinateurs. Mais pendant ce temps, c'est nous qui faisons
le travail avec les clients. C'est nous qui vendons les produits. Vous ne
faites que nous dire de vendre plus !
(Mme s, guichetière dans un autre bureau)
Cette réflexion rejoint la base des travaux de
MINTZBERG (2006) qui, quand il était petit, observait son directeur de
père et s'interrogeait sur son activité réelle : que
font les cadres ? Cette question semble aussi s'appliquer au
directeur d'établissement postal.
L'image du « receveur » d'antan,
cloué dans son bureau et donnant ses ordres à la volée est
définitivement révolue. Il semble que pour être
écouté et reconnu, le directeur d'établissement doit
montrer par l'exemple le sens qu'il donne à la mission demandée.
C'est sur le terrain que semble se jouer la partie.
De manière régulière, le manager doit
composer avec des tâches de plus en plus nombreuses (pilotage, ressources
humaines, reportings, sécurité, conformité, qualité
de service, réclamations ...etc.). Se pose alors la question de la
gestion de son temps.
2.3 Le temps et le manager, une alchimie
complexe :
« J'avais prévu de faire les plannings ce
matin. Mais voilà, j'ai dû recevoir un client avec une grosse
réclamation. Après, j'ai la direction qui m'a appelé pour
me demander des reportings. Bilan : je n'ai pas fait mes plannings et j'ai
l'impression de n'avoir rien fait de bon ! »
(Madame x, directrice adjointe)
Pour donner du sens à l'action, il semble qu'il faille
accorder beaucoup temps sur le terrain. La gestion du temps du manager emble
être orchestrée par l'urgence et l'importance. COVEY (1995,
p.41-55) évoque même « la drogue de
l'urgence ».
Figure 5 : la drogue de l'urgence
URGENT
PAS URGENT
IMPORTANT
PAS IMPORTANT
1994 Covey Leadership Centre, Inc.
- Crises
- Problèmes pressants
- Projets, réunions, préparations avec dates
limites
- Préparations
- Prévention
- Clarification des valeurs
- Planification
- Construction de relations
- Véritable re-création
- Habilitation
- Interruptions, certains coups de
téléphone
- Une partie du courrier et des rapports
- Certaines réunions
- Beaucoup d'activités pressantes à faire
immédiatement
- Beaucoup d'activités pour les autres
- Futilités, esbroufe
- Courrier superflu
- Certains coups de téléphone
- Pertes de temps
- Echappatoires
Il n'est pas rare pour le manager de se laisser submerger par
des « fausses » priorités. La figure 5 propose une
liste (non exhaustive) de tâches. Celle-ci apparaît en fait
très incomplète et particulièrement sectaire. Par exemple,
dans le management, une conversation avec un collaborateur à la machine
à café peut soit être considérée comme
futile, soit comme un vecteur important de relation et de
compréhension.
Se pose encore ici la question de savoir si le directeur
d'établissement postal peut accorder le temps nécessaire pour
donner du sens à l'action sur des domaines aussi variés que le
fonctionnement d'un bureau de Poste et la technicité imposée par
le domaine bancaire.
« Le problème est que l'on a
surchargé la fonction managériale d'une quantité
considérable de tâches : développer ses
collaborateurs, motiver son équipe, gérer les désaccords,
être le relais de l'information, sanctionner et féliciter, prendre
les décisions et j'en passe... »*.
Il semble alors que l'importance des responsabilités
qui incombent au directeur d'établissement de La Poste est (peut
être) un frein à l'action.
* ALBERT « managers, faîtes-en moins... mais
faîtes-le mieux » [en ligne]
http://www.journaldunet.com
(page consultée le 26/01/2009)
Le « manager de proximité »
possède apparemment un rôle principal et essentiel de la mise
action. C'est en quelque sorte le « chef d'orchestre » de
l'entité. Son rôle est de lire la partition et de guider son
équipe. Pour cela, il s'appuie sur son expérience et se tourne
radicalement dans l'action en accompagnant au quotidien ses équipes. La
gestion des tâches et de son temps sont précieux.
Le directeur d'établissement n'est pas isolé
face à ce problème. Des soutiens extérieurs au bureau sont
là pour l'aider : les experts. Les relations qu'entretien le DET
avec la Direction De l'Appui et Soutiens Techniques (DAST) fait l'objet de la
3ème partie de ce mémoire.
3ème PARTIE : L'APPUI DES SERVICES
FONCTIONNELS
« Celui qui donne un bon conseil
construit d'une main, celui qui conseille et donne l'exemple construit à
deux mains ; mais celui qui donne de bonnes leçons et un mauvais
exemple construit d'une main et détruit de
l'autre »
(F. BACON)
La fin des années 1970 a vu se développer les
services fonctionnels dans les entreprises. Les difficultés
économiques ont mené à se poser la question du rapport
entre les ressources allouées et leur contribution à l'atteinte
des objectifs. La Poste ne déroge pas à cette règle. Les
services fonctionnels, initialement installés exclusivement dans les
directions départementales, ont fusionné et sont
dorénavant mutualisés en Direction d'Appui et Soutien
Territoriale (DAST).
Malgré son importance, la littérature sur le
service fonctionnel reste beaucoup moins dense que sur le management. La
recherche de « fonctionnel » sur
www.alapage.com n'apporte que 78
réponses. Le service fonctionnel n'est donc pas autant
plébiscité que le management dans la littérature
spécialisée.
Quel est le rôle de ces services ? Comment leurs
interventions peuvent aider au passage à l'action sur le terrain ?
Sont-ils aussi concernés par le sens donné au travail ?
Nous proposerons dans cette troisième partie une vision
globale du service fonctionnel, avant d'évoquer la notion d'expert pour
enfin terminer sur les objectifs des services fonctionnels.
3.1 Le service fonctionnel : rôle et
mission.
Apporter une définition exhaustive du service
fonctionnel n'est pas l'objet de ce mémoire. Il semble néanmoins
important de montrer sa position dans l'entreprise au travers de la vision des
collaborateurs :
Si j'étais hiérarchique je pense que je
ferai appel au fonctionnel. Tel que c'est vécu aujourd'hui, j'ai le
sentiment que le hiérarchique prime sur le fonctionnel... Pour moi il ne
devrait pas y avoir de supérieur l'un par rapport à l'autre.
C'est la dynamique, on est tous dans le même bateau et puis on rame dans
le même sens. C'est comme ça que je vois les choses.
(1 conseiller spécialisé en
immobilier)
Ce qui est intéressant dans cet échange avec ce
conseiller est le positionnement du fonctionnel par rapport au
hiérarchique. Il apparaît que le
« hiérarchique » prime sur le
« fonctionnel » dans ses observations. En fait, la
réalité est beaucoup plus nuancée, nous le verrons.
Cette impression est-elle commune à l'ensemble des
entreprises ou spécifique ? Pour répondre à cette
question, voyons au travers du tableau 2 ci-après, un état des
lieux des rôles et services fonctionnels selon divers auteurs.
Tableau 2 : rôles et tâches des
services fonctionnels (MALLERET, 1998)
|
rôles et tâches
|
|
|
approche taylorienne
|
Planifier, informer et contrôler, former et conseiller,
faire adhérer, converger
|
|
|
Mintzberg
|
|
analystes
|
Formaliser les tâches des opérationnels
|
|
Limiter leur marge de manouvre
|
personnel de soutien
|
Gérer les changements de l'environnement
|
|
|
Pagès
|
Faire respecter les règles, Délimiter le
degré de liberté accordé aux opérationnels dans
l'application des règles
|
|
L'approche taylorienne ne donne pas de pouvoir de
décision au service fonctionnel. MINTZBERG (2006) donne comme
prérogative de définir le cadre d'actions des
opérationnels. Quant à PAGES (1979), il attribue au service
fonctionnel un pouvoir supérieur à l'opérationnel. On le
voit par ces oppositions d'analyses, le service fonctionnel peut prendre un
visage très secondaire ou, au contraire primordial.
Sur le terrain postal, les nuances ne sont pas aussi
catégoriques. Cette notion se rapproche de la vision de MALLERET (1998),
qui propose deux rôles aux services fonctionnels. Un rôle
centralisateur : il fait appliquer des règles définies
à haut niveau. Et un rôle de conseil et
assistance, équivalent à un prestataire de service.
Dans l'organisation de l'Enseigne, les services fonctionnels
sont localisés sur deux sites : la Direction Départementale
(DD) et la DAST qui scindent les 2 rôles précités.
Quand le directeur en a besoin, il contacte la DAST par
l'intermédiaire d'une demande sur un serveur intranet. Cette
unité va soit traiter la demande en prestataire de service, soit la
diffuser pour application des règles.
« Avant c'était simple, on avait un
interlocuteur, on l'appelait et il nous débloquait le problème
immédiatement. Maintenant, il faut envoyer une demande par intranet,
attendre une réponse par mail. Ensuite, il faut souvent appeler
quelqu'un d'autre qui tente de nous aider... C'est plus compliqué et
cela nous fait perdre du temps ». (Extrait du journal de
bord)
Les collaborateurs ont besoin d'une vision claire des
attributions. La multiplicité des sites semble compliquer la tâche
et ne donne pas le sens nécessaire aux acteurs en bureau.
Avec la figure 6, j'ai souhaité faire une liste
exhaustive des services fonctionnels et de leur rattachement.
Figure 6 : Les services fonctionnels à
l'Enseigne
- Direction des projets
- Direction de la sûreté
- Direction de la communication
- Direction de la comptabilité
Rattachement à la Direction
Départementale
Direction Appui et Soutien Territoriale
(DAST) contact par le Guichet Unique
- Direction des Ressources Humaines
- Direction du contrôle de gestion
- Direction de l'Action Commerciale de l'Enseigne
- Direction Réseau Bancaire
- Ressources et performances :
Prévisions (RH, contrôle de gestion)
expertise (fluidité et compétences,
approvisionnement, juridique, achats)
- Vie au quotidien :
Gestion RH
maintenance immobilière
Production
- Déploiement des projets :
Pilotage des projets
Appui technique
Les rôles et missions des services fonctionnels
dépendent de l'importance qu'on leur donne et de leur situation dans
l'organigramme.
A l'Enseigne, les personnels fonctionnels sont nommés
« experts » et disposent d'une localisation proche des
hautes directions. Ce qui par conséquent, accorde un poids important
dans l'organigramme et permet de justifier des positions parfois
éloignées du sens donné au travail quotidien.
3.2 Les experts, des fonctionnels qui font :
Après avoir définit les rôles et missions
du service fonctionnel, voyons maintenant son positionnement et le pouvoir qui
leur est attribué. Possède-t-il un pouvoir (ou un contre pouvoir)
important ?
De manière régulière, des services
fonctionnels réalisent des contrôles sur les opérations
bancaires dans les bureaux. Les grilles d'évaluations ne sont pas
communiquées en amont aux directeurs d'établissement. A l'issue
de cet « audit » réalisé par des experts, un
rapport sur les risques est adressé au directeur avec copie à sa
hiérarchie. (Extrait du journal de bord)
Le service fonctionnel dispose d'une zone d'incertitude
importante par rapport à ses partenaires (FRIEDBERG, 1981). En effet, il
détient un savoir et une technicité qui lui donne un pouvoir
réel. Le fait de se concentrer sur un domaine unique lui permet
d'acquérir une grande technicité. Ce qui doit aider le directeur
d'établissement qui ne peut prendre le temps d'être à ce
niveau de technicité sur l'ensemble de ses fonctions.
De plus, le service fonctionnel siège en comité
de direction avec les cadres dirigeants du département, ce qui conforte
son pouvoir et le rend légitime auprès du terrain. Souvent, les
solutions apportées au bureau sont issues d'expériences et
d'observations d'autres bureaux.
Or, comme cela est rappelé par PFEFFER et SUTTON (2006,
p. 7-16), chaque entité est différente et ce qui fonctionne pour
l'un peut n'avoir aucun effet sur l'autre. Autrement dit, appliquer la
même solution à diverses entités revient à pratiquer
une médecine des siècles passés : procéder
à des saignées à tous les malades quelque soit les
symptômes, ce qui en a tué plus que cela a soigné. La
médecine a beaucoup progressé et des diagnostics
individualisés pertinents sont maintenant réalisés. Pour
donner du sens aux actes managériaux, il semble temps de procéder
de manière équivalente.
HUGUES (1996) attribue à certaines professions des
licences et mandats, c'est à dire qu'un groupe est autorisé
à exercer certaines activités. Cette notion peut amplement
s'appliquer à l'expert. Par sa technicité et son positionnement,
il existe et détient un pouvoir certain. En est-il pour autant efficace
aux yeux du terrain de facto ?
Anecdote 1 : La photocopieuse du bureau n'a
plus d'encre et nous nous apercevons que les cartouches fournies par le
constructeur ne sont pas compatibles. Je sais que nous avons un contrat de
maintenance mais je n'ai pas de contact précis. Je tente de contacter en
vain le constructeur. Las de perdre mon temps, je décide de contacter le
guichet unique de la DAST. Sa réponse par mail : voici le
numéro de fax : xx.xx.xx.xx.xx.
Anecdote 2 : Lors de la mise en place du
projet ESC à Cergy Grand Centre, des services fonctionnels sont
intervenus pour cadencer, orchestrer les travaux des différentes
entreprises. La responsabilité du projet incombe (bien sûr) au
directeur d'établissement. Mais ses connaissances dans ce domaine sont
bien maigres. Je me souviens que ces services ont pris en charge l'ensemble des
travaux et m'ont relaté les avancées au fur et à mesure.
Je me suis senti soutenu et dans ce cas, une relation de prestataire de service
s'est vraiment installée. J'ai assimilé ceci à de la
compétence. (Extrait du journal de bord)
Le directeur d'établissement attend des services
fonctionnels qu'ils agissent comme des prestataires de services
compétents. Définissons alors la notion de compétence.
RUFIN*(2007) nous apporte une définition qui comporte 3
notions : la compétence est proche d'un système
intégré de savoirs au sens large, permet d'aboutir à une
performance et requiert que le professionnel soit en mesure de mener une
activité réflexive au cours et après sa
réalisation.
Cette approche, issue du domaine de la santé, montre
une distance dans les faits entre la compétence et les services
fonctionnels. Si la notion de savoir est limpide, la performance semble
difficile à mesurer, nous y reviendrons. Quant à la
réflexivité de la réalisation, cela implique une parfaite
connaissance de la situation donnée et des acteurs concernés. Les
experts n'intervenant que ponctuellement, il est compliqué pour eux
d'avoir le recul nécessaire aux adaptations déjà
évoquées sur le terrain.
*F. RUFIN Une définition de la compétence
professionnelle [en ligne] http://www.cadredesante.com/spip/spip.php?article368
(page consultée le 28/07/2009)
Dans ce contexte, comment est analysé l'apport du
service fonctionnel ?
LEGOFF (1996) relève que « les
théoriciens et spécialistes sont enclins à
développer des concepts leur permettant de faire appel à toutes
leurs connaissances et fantasmes professionnels mais ne répondant pas
à des besoins réels ». C'est certainement ce qui
provoque des écarts avec les hiérarchiques sur le terrain.
Quel est le risque d'accorder alors un pouvoir aux services
fonctionnels en ne se concentrant que sur la notion de connaissances ?
Alors que des résultats sur l'attente dans le
bureau de Cergy Grand Centre ne sont pas satisfaisants, la Direction propose un
audit par un expert. Présenté comme un ancien directeur
d'établissement, l'expert passe la journée avec nous dans
l'espace marchand. Ce jour là, la directrice adjointe est en repos de
cycle. Repos permettant de respecter les 35 heures hebdomadaires inscrits dans
le code du travail. Le compte-rendu est sans appel : il y est
rappelé des standards de service demandés par le siège et
de réétudier les modalités du « temps
partiel » de la directrice adjointe... La direction me demande de
mettre en place les recommandations ! (Extrait du journal de bord)
L'apport de l'expert est incontestable et précieux. Le
plus souvent, il n'a qu'une vision axée sur son domaine. Ce qu'il
apporte peut se trouver en contradiction avec les orientations prises par le
directeur d'établissement. C'est pourquoi un travail en commun doit
être réalisé pour conserver tout son sens à
l'action.
Dans la majorité des cas, ce travail réciproque
est bien réalisé et donc efficace. Dans sa demande, le
hiérarchique exprime souvent un autre aspect :
Quand j'ai besoins d'une information, c'est tout de suite.
En général, quand je demande du soutien, c'est qu'il y a
urgence... Sans cela, je ne demanderai pas !
(1 Directeur d'établissement)
L'une des difficultés pour les services fonctionnels
est la réponse aux attentes des managers de proximité. Ce dernier
sollicite du soutien en général, quand il a un problème et
attend une gestion (quasi) immédiate. Or l'expert semble comparer la
situation présente à d'autres vécues
précédemment. Il peut considérer alors que l'urgence n'est
pas aussi grande que pourrait le penser le profane (HUGUES, 1996).
Comparons cette idée à la personne qui se rend
à l'hôpital victime d'une une fracture douloureuse. Elle souhaite
être prise en charge par un professionnel compétent. Or, pour
être compétent, ce dernier doit avoir exercé plusieurs
années et rencontré de nombreux cas. Par ce fait, la fracture ne
lui semble pas une pathologie qui nécessite beaucoup d'attention. La
personne souffre et ne comprend pas qu'on ne s'occupe pas plus (ou mieux) de
« son » urgence. Ce même type de situation se
retrouve sur le terrain postal. Le principal pour le hiérarchique
(patient) est le résultat de l'action menée. On peut s'interroger
en conséquence sur les objectifs donnés aux services
fonctionnels.
Le service fonctionnel travaille pour d'autres services, mais
il est difficile de mesurer sa contribution à la création de
valeur (MALLERET, 1998). Les objectifs de ces services ne seraient alors
quasi-exclusivement que qualitatifs. Les experts se retranchent derrière
un domaine maîtrisé qui complique l'estimation réelle de
leur apport. On note ici une spécificité très
éloignée avec les objectifs attribués aux managers
opérationnels qui sont quantitatifs et qualitatifs. Il semblerait alors
intéressant que leurs objectifs, tant quantitatifs que qualitatifs,
soient rapprochés des objectifs demandés au terrain, que pour
donner du sens aux tâches des fonctionnels et des opérationnels,
il faille que les objectifs soient communs et partagés.
Le manager doit donner du sens à son action quotidienne
et pour le soutenir, il peut se tourner vers des experts sur de nombreux
domaines transverses. Il semble par conséquent important de pouvoir se
reposer sur des services fonctionnels qui partagent cette notion de sens, tant
dans l'idéologie que dans les actes.
On se trouve, en réalité, souvent
confrontés à des tensions entre les hiérarchiques et
fonctionnels. Chacun ayant l'impression de posséder des
« professions établies » telles que définies
par HUGUES (1996) : « Dans la mesure où le
professionnel « professe », il demande qu'on lui fasse
confiance ». La 4ème partie de ce
mémoire sera donc consacrée à la confiance, notion
à laquelle nous inclurons la défiance et l'appropriation.
4ème PARTIE : LES LIMITES DU SENS DU
TRAVAIL
« Le chef fait faire, le chef sait
faire »
(Adage de l'armée
française)
Nous l'avons souligné auparavant, les relations entre
le manager et ses collaborateurs, ses pairs, les services fonctionnels sont des
vecteurs. Qu'est-ce qui fait qu'un vecteur est soit intégrant, soit
désintégrant ?
Sur le terrain, lorsque le sens du travail est mal
perçu, le collaborateur se tourne vers des solutions qu'il trouvera
acceptable. On perçoit alors que le collaborateur remet en question
« sa confiance » accordée. Il s'en suit
généralement une période de défiance qui
résonne comme une limite à sa confiance. Dans de nombreux cas,
cette notion n'est-elle pas simplement un manque d'appropriation ?
La dernière partie de ce mémoire est
consacrée à une étude sur la confiance, la défiance
et l'appropriation.
Il semble que l'action du manager doit s'inscrire dans un
contexte serein pour être efficace et pouvoir donner du sens à
l'action. La communication qu'il développe avec ses équipes joue
un rôle essentiel.
Paradoxalement, une recherche sur le site de vente en ligne de
livres
www.alapage.com n'apporte que 6
réponses à « management+confiance ». On peut
en déduire que même si dans le discours des entreprises, la notion
de confiance est porteuse de sens, la littérature ne s'en est pas encore
imprégnée.
Sur le site
www.le-dictionnaire.com la
confiance est définie comme « Impression de
sécurité envers une personne à qui l'on se
remet ». La défiance est définie comme :
« Crainte d'être trompé ». Enfin,
l'appropriation : « fait de s'approprier, de
prendre possession de ». Ces notions semblent trop floues pour
s'appliquer à un management qui tend à donner du sens au travail
quotidien. Ces notions doivent donc avoir une signification particulière
quand elles sont associées au management.
4.1 La confiance, préambule
indispensable :
La confiance est un terme dont l'usage s'est largement
banalisé. Cependant, selon les personnes et les situations, son
interprétation est très différente. Je retiendrai ici la
définition de BIDAULT (1998) : « présomption
que, en situation d'incertitude, l'autre partie va, y compris face à des
circonstances imprévues, agir en fonction des règles de
comportement que nous trouvons acceptables ». Dans la
réalité quotidienne du bureau de Poste, cette idée d'agir
« comme et à la place de », est une ressource
inestimable du fait de la multiplicité des métiers que regroupe
le point de vente (La Banque Postale, courrier, colis, express). Pour
satisfaire ces diverses activités, le manager doit pouvoir
déléguer en toute confiance. Cette notion s'assimile à un
partage de valeurs. Celui-ci est-il imposé ou
déterminé ?
GIDDENS (1987) apporte un élément important :
« les comportements des acteurs ne sont pas
déterminés, ils ont raison de faire ce qu'ils font et sont
capables d'exprimer ces raisons » sous-entendu, ils auraient pu
agir autrement. Ainsi, l'acteur qui réalise une action ne le fait-il pas
parce qu'il lui donne un sens propre ?
Il semble que le collaborateur donne un sens à son
travail même en l'absence de directive claire. Cela a déjà
été évoqué dans ce mémoire. L'apparition
d'injonctions contradictoires contribue alors à une remise en cause de
la confiance établie entre le collaborateur et son manager.
Une caissière du bureau m'alerte sur le fait
qu'elle a terminée beaucoup plus tard un soir. Elle me demande s'il est
possible de compenser ce surplus par des heures supplémentaires pour
l'ensemble du personnel de la caisse. Après vérification, je
m'aperçois qu'elle a raison mais qu'un des collaborateurs de la caisse
arrive très régulièrement en retard. Après
questionnement, il me dit qu'il compense le retard du soir de
lui-même ! Je décide par conséquent de compenser les
collaborateurs, à l'exception de ce dernier en expliquant mon action.
Les caissiers viennent me remercier de ce geste. Je me demande ce qu'il se
serait passé si j'avais compensé l'ensemble des agents sur les
mêmes bases ? J'aurai alors légitimé l'auto-compensation et
créé une dissonance de sens chez certains... (Extrait du
journal de bord)
Il paraît à travers cet exemple de la vie du
bureau que donner du sens au travail nécessite une présence
accrue avec les équipes pour ne pas créer
d'inégalités, et donc de dissonances. Car toute dissonance a pour
effet de mettre en péril la confiance des collaborateurs.
Dans le domaine professionnel, on se trouve quotidiennement en
contact avec des collaborateurs, avec ses collègues ou encore avec sa
hiérarchie. La notion de confiance s'applique-t-elle de manière
identique face à l'ensemble de ces personnes ?
BORNAREL (2004) dénombre deux formes de
confiance : horizontale et verticale.
La confiance horizontale se tisse entre deux personnes de
même niveau hiérarchique.
Je pars ce soir en vacances. Les nouveaux dossiers
passeront par mes collègues. Je préfère qu'ils soient vus
par Mme a (même niveau hiérarchique).
(1 conseiller spécialisé en
immobilier)
De manière générale, chacun dans son
milieu professionnel possède une réputation au niveau de ses
pairs. C'est certainement sur cette base que l'on peut considérer que le
partage de valeur prend toute sa signification.
La confiance que l'on accorde à un collègue de
même niveau n'est pas la même que celle que l'on accorde à
son chef ou à son subordonné.
La confiance verticale concerne elle, des personnes de
hiérarchies différentes. Cette notion ne semble pas strictement
identique selon où l'on se situe dans la relation. Le supérieur
hiérarchique est davantage en situation de contrôler la confiance
accordée à son subordonné. MEYERSON & ali (1996)
suggère même une forme d'illusion du contrôle chez le
hiérarchique.
Se pose alors une question : « sommes-nous
réellement libres de faire confiance ? »
Une conseillère bancaire (CB) rentre dans le bureau de
son directeur d'établissement (DET) :
- CB : vous vous souvenez que le directeur des ventes
m'a demandé d'être capitaine d'équipe lors du dernier
challenge ?
- DET : oui pourquoi ?
- CB : il avait promis aux capitaines un déjeuner
au restaurant... Eh bien je me suis investi dans mon rôle, ça m'a
pris du temps et je n'ai jamais été invité ! La
prochaine fois, je ne le ferai pas...
- DET : tu veux dire que tu n'as plus
confiance ?
- CB : j'ai le choix ? C'est le grand
chef !
Cet exemple est flagrant. Il est des personnes dans le milieu
professionnel à qui on se sent obligé de faire confiance, on peut
alors parler de confiance contrainte. L'analyse de BORNAREL (2004) amène
à affirmer que « plus l'intérêt à
investir est fort, plus la décision de faire confiance sera
contrainte ». Il semble compliqué de ne pas faire
confiance à son supérieur hiérarchique, au moins en
apparence.
Cette notion de confiance amène un réel partage
entre les protagonistes. Une question apparaît alors : la confiance
se mérite-telle ou s'octroie-t-elle ?
Il a un entretien hebdomadaire avec son chef. Elle lui a
demandé la dernière fois d'arrêter de se plaindre lors des
réunions avec l'ensemble des conseillers. Son image en subit des
conséquences et il est remarqué dans le mauvais sens ! Lors
des entretiens, il me dit arriver avec ses résultats, son chef arrive
avec des objectifs. Il me dit qu'à la fin de ses entretiens, son chef
lui demande ce qu'elle peut lui apporter. Il me signale que c'est à elle
d'apporter des solutions pour qu'il atteigne ses objectifs.
(1 conseiller spécialisé en
patrimoine)
D'après INGHAM et MOTHE (2003), la confiance trouve sa
source dans les compétences et est basée sur la
réputation. C'est notamment le cas dans au début de la relation.
Puis vient une confiance de comportement au fur et à mesure des
interactions. Ce qui tend à dire que le temps influe sur la
confiance.
Cette notion, au demeurant vérifiable sur le terrain au
quotidien, semble faire abstraction d'un élément
fondamental : le comportemental.
La seule chose que l'on me demande c'est : combien et
pourquoi je n'ai pas fait...etc. Cela fait 14 ans que je fais ce métier
et je pense que je n'ai pas à prouver quoi que ce soit. Donc le fait que
l'on me piste je le ressens très mal. En fait j'ai le sentiment
aujourd'hui qu'on ne me fait pas confiance.
(1 conseiller spécialisé en
immobilier)
La notion de confiance semble également se rapporter
à un comportement, à condition que celui-ci soit
coopératif (HOSMER, 1995). Dans son comportement quotidien, le
hiérarchique semble devoir faire preuve de connaissance du
métier, d'empathie et d'une bonne compréhension de son
collaborateur. Cela peut être annoncé, mais semble devoir
être démontré dans les actes quotidiens.
« Quand un client n'a pas sa pièce
d'identité pour retirer un recommandé, j'appelle le chef.
Heureusement, il dit au client la même chose que moi ! Tu imagines
pour quoi je passe s'il donne raison au client ! Quand le chef vient dans
l'espace marchand, le client se calme en
général... »
(1 conseillère du guichet)
Le directeur d'établissement doit soutenir son
équipe au quotidien dans le respect des normes édictées
par l'entreprise. S'il légitime une action
« interdite », ses collaborateurs utiliseront cette forme
de soutien comme des facilités. On retrouve cette notion chez
GIDDENS (1987) : « les facilités sont les
ressources d'autorité et d'allocation permettant l'exercice du pouvoir,
entendu comme la capacité transformatrice ou le pouvoir
d'agir ».
La confiance peut s'entendre également au niveau
intrinsèque du collaborateur. Pour travailler sereinement, le
collaborateur (et certainement nous) a besoin d'avoir confiance en soi. C'est
certainement le rôle du directeur d'établissement d'apporter cette
confiance. La communication avec le collaborateur devient alors essentielle
pour amener du sens à son action. Selon LE GOFF (1996)
« le stress et la crainte ne peuvent aboutir qu'à la
confusion et la névrose ». Sur le terrain, il est
fréquent d'observer que le collaborateur qui n'arrive pas à
réaliser une tâche devient fébrile, surtout face à
un client. Cette sensation de pression est génératrice de stress,
elle semble faire perdre ses moyens au collaborateur.
La légitimité du directeur doit se construire en
prenant en compte le travail réel. S'il reste dans une logique
descendante, l'incompréhension grandira (BIQUAND, LABILLE, CASSE, 2001).
Quand cela se produit, il y a souvent une perte de sens du travail
demandé (ex : je ne sais plus ce que je dois faire !). Cette
réaction se traduit alors une perte de confiance en soi, suivie
généralement d'une remise en cause de la confiance envers
l'entreprise. Cette remise en cause se traduit par ce qui est
communément appelé en entreprise de la défiance.
4.2 La défiance, une source
d'énergie :
La défiance est particulièrement
présente dans le management, et donc dans la mise (ou la non mise) en
action à La Poste. Pourquoi une telle défiance, d'où
vient-elle et est-elle en déclin ou en progression ?
La notion de défiance est présente en interne
avec les collaborateurs, mais elle existe également en externe dans les
échanges avec les clients.
4.2.1 La défiance en interne :
Pour LEGOFF (1996), on note dans beaucoup de cas une
incompréhension entre les divers groupes professionnels. Les
théoriciens ne semblent pas comprendre les besoins des directeurs
d'équipes. Eux même ont des difficultés à
réconcilier les discours avec la réalité pratique. Pour
obtenir cette réconciliation, du temps d'écoute et de
communication paraît devoir être apportée et surtout
préparée.
Dans mon parcours professionnel, j'ai eu la chance
d'assister à de nombreuses réunions entre le directeur
d'établissement et ses équipes. Lorsque le message est
compliqué, j'ai entendu plusieurs fois la réunion
commencée par : voilà ce que la direction demande..., les
directeurs veulent..., je suis obligé de faire...
Dans cet exemple, on voit clairement le représentant de
l'institution se désolidariser du message qu'il doit porter. Cela peut
s'interpréter comme une forme de défiance à l'encontre
d'évolutions dissonantes avec ses valeurs intrinsèques, voir
même une certaine remise en cause de la vision stratégique. Cette
notion est peut être d'autant plus présente dans une entreprise
comme La Poste, du fait de son passé et de ses évolutions.
La source de la défiance postale peut provenir de
l'existence de rites au sens de SAURET (1997). C'est-à-dire un
indicateur de l'identité des acteurs (rôle et mise en
scène), de la consistance du groupe (représentation qu'on a de la
structure du groupe) et de l'intégration du sujet (volonté ou non
de perpétuer).
Il y a presque 5 ans, lorsque je suis arrivé au
bureau de Cergy Grand Centre, le bureau possédait des guichets en ligne
et une file d'attente matérialisée par « un guide
file ». Une boutique dans la salle des ventes a vu le jour avec comme
objectif d'accueillir les clients venant faire des achats. Je souhaitais que
les guichetiers captent les clients pour répondre à leurs
attentes :
DET : pourquoi tu restes au guichet
boutique ?
Guichetier : les clients viennent d'eux
même !
DET : et celui qui attend là ?
Guichetier : ah, je ne l'avais pas vu... Je vais le
chercher.
On trouve ici le rite de
l' « usager » qui doit rechercher le bon
interlocuteur, mais aussi celui de donner satisfaction au
« client ».
Le rite a pour but de perpétuer une image
passée, de reconstruire de la culture d'entreprise (SAURET, 1997).
L'analyse de l'auteur va jusqu'à évoquer l'existence de 2 Postes.
La « vieille Poste » définie par une
hiérarchie « militariste », une forte
influence du service public, où l' « usager »
doit s'adapter à la réglementation. Et
l' « entreprise La Poste »
matérialisée par une ouverture à tous les échelons,
une déconstruction d'un ordre hiérarchique et où le
« client » est mis en avant.
Ces différences sont flagrantes entre les services
(Enseigne / courrier / transports), mais sont également visibles au sein
même d'un établissement.
Il semble, aux vu de mes observations que le
phénomène « vieille Poste » est plus
présent chez le personnel en place dans le même
établissement depuis de très (trop) nombreuses années. Une
solution pour accompagner le sens que l'on souhaite donner à l'action
est certainement de gommer certains rites.
« C'est génial depuis le nouveau bureau
(ESC) ! On est proche des clients, il y a beaucoup moins de tensions...
Maintenant je me sens à l'aise et un vrai conseiller. C'est un peu notre
bébé, j'aurai du mal à m'en passer. »
(Mme s, conseillère-guichetière depuis 23
ans)
La notion de rite peut donc être connotée
négativement, par exemple ne pas souhaiter une évolution, ou
positivement en préservant des valeurs de l'entreprise.
JP. BAILLY, Président de La Poste, a
déclaré qu' « il est possible de moderniser
sans se renier »* (octobre 2009). On imagine ici très
bien que la part de négociation quotidienne déjà
développée au cours de ce mémoire, va prendre tout son
sens sur le terrain.
On note au quotidien un énorme changement de
mentalité chez la plupart des collaborateurs et nos clients. La
défiance n'est pas éliminée, les attitudes sont en pleine
mutation.
La défiance évoqué jusque là ne
concerne que la vision interne à l'entreprise. Il semble en exister une
externe, à l'encontre des postiers.
4.2.2 La défiance des clients :
Un matin, je m'occupe de l'accueil des clients dans
l'espace marchand lorsqu'une cliente pénètre dans le
bureau :
Moi : Bonjour Madame, puis-je vous aider ? Vous
êtes venu pour quelle opération s'il vous
plaît ?
Cliente : si je suis obligée de venir, c'est
parce que le facteur n'a pas sonné. Et je dois me mettre où pour
enfin récupérer mon recommandé ?
Moi : je m'occupe de vous immédiatement
Madame.
Cliente : c'est toujours pareil à La Poste, on
attend tout le temps...
Moi : Madame je me suis occupé de vous
dès votre entrée dans le bureau. Il me semble que vous n'avez pas
attendu.
Cliente : de toutes les façons, ce sont mes
impôts qui vous payent...
Moi : non Madame, le contribuable n'a jamais
payé les postiers Madame. Voici votre lettre recommandée.
Cliente : vous les fonctionnaires, vous êtes
tous des fainéants...
Moi : je ne suis pas fonctionnaire mais je vous
souhaite une bonne journée quand même Madame.
Cliente : ah ces administrations françaises,
toujours aussi nulles !
Je ne relève pas cette dernière
réflexion et laisse la cliente partir du bureau.
* JP. BAILLY (2009), « moderniser sans se
renier », Propos recueillis par Olivier Jay et Nicolas Prissette - Le
Journal du Dimanche, Vendredi 23 Octobre 2009.
On peut comprendre que le collaborateur confronté
à ce type de réaction ressent une forme de défiance, qu'il
peut reporter sur l'entreprise. Cela peut avoir des conséquences
négatives sur l'action et/ou renforcer l'appartenance à un groupe
pour s' « auto protéger » et revenir à
une image du passé comme l'affirme SAURET (1997). Là encore, dans
la réalité du terrain, il ne convient pas de faire
l'économie d'une communication sincère (qui s'oppose ici à
une forme de manipulation).
L'adhésion au projet ESC a fait naître une
nouvelle vision : le groupe des « pionniers qui font La Poste de
demain ». Les observations de JEANTET (2003) semblent
dépassées à la lecture de celles de HANIQUE (2004),
où la défiance s'amenuise. Ces dernières le sont à
nouveau dans le cadre de mes observations sur le bureau de Cergy Grand Centre
et la mise en oeuvre d'ESC (2009). Au fur et à mesure que le client (et
sa satisfaction) devient le centre de nos préoccupations et que cette
vision est partagée, la défiance semble
s'atténuée.
Le point de rencontre entre les évolutions
observées et les défiances internes et externes ci-dessus
paraît être la notion d'appropriation.
4.3 L'appropriation, un remède :
L'appropriation constitue la pierre angulaire de la mise en
action. BIA FIGUEIREDO (2008) définit ce terme par
l' « action d'adapter quelque chose à un usage
déterminé ». L'idée d'appropriation renvoie
aux notions de communication et d'accompagnement sur le terrain. Il ne suffit
pas de dire ou écrire des consignes aux collaborateurs pour obtenir une
mise en oeuvre. Il faut que chacun, manager et managé s'approprie
l'action et la partage.
L'accompagnement semble revêtir un double
rôle : appropriation collective et contrôle.
« L'accompagnement est essentiel dans mon
métier. C'est l'oeil extérieur qui permet d'estimer le
degré de qualité de mon entretien. Il faut que cela soit fait
intelligemment. Ce ne doit pas être un simple observateur car cela me met
mal à l'aise devant le client. L'accompagnateur, c'est mon filet de
sécurité dans l'exercice de haut vol qu'est un entretien avec le
client. »
(1 conseiller bancaire)
La répétition des situations de vente permet de
se mesurer dans l'action. Pour GIDDENS (1987), l'action est un flot continu
d'expériences vécues. Encore faut-il pourvoir s'évaluer.
C'est le rôle de l'accompagnement pour le collaborateur. La routine
occupe une place importante dans la reproduction des pratiques. Cette routine
peut être positive et/ou négative et peut passer d'une situation
à l'autre. Cela se perçoit dans la réalité du
travail des collaborateurs et des directeurs.
Pour l'accompagnateur, l'objectif est également de
contrôler les évolutions de son collaborateur. « La
confiance n'exclut pas le contrôle » dixit
LENINE.
Pour BIA FIGUEIREDO (2008), l'appropriation se fait dans la
continuité et la reproduction de pratiques existantes. Il existe une
appropriation idéale. Même si elle est infidèle elle n'en
devient pas forcément mauvaise ou inappropriée. La manager doit
alors accepter cette infidélité si elle génère un
résultat acceptable, au risque de bloquer certaines volontés
et/ou situations. On retrouve ici une notion déjà observée
sur le rôle du manager : la négociation.
Le temps de travail des collaborateurs sur le bureau de
Cergy Grand Centre nécessite des pauses obligatoires.
DET : Il faut absolument mettre en place une gestion
des pauses.
Guichet Animateur (GA) : C'est déjà
fait ! Mais les agents ne le respectent pas.
DET : C'est-à-dire ?
GA : On a demandé à chacun de se
prendre en charge, mais ils ne le font pas.
DET : Est-ce que vous avez expliqué
pourquoi ? Essayons d'expliquer aux collaborateurs que quand il y a moins
de clients, il faut en profiter. Et désignez celui qui part en pause en
expliquant votre organisation.
GA : Ils sont grands !
DET : Oui. Ce que vous avez fait, c'est
décharger la gestion des pauses sur les agents.
(Extrait du journal de bord)
Le rôle du manager est ici d'optimiser la
cohérence. On voit dans cet exemple que le
« guichetier-animateur » s'est dessaisie d'une tâche.
Peut être parce qu'il ne souhaite pas la prendre en charge, ou qu'il ne
sait pas comment se positionner face à ce type de fonction. D'une
manière générale, un discours ambiant et une
représentation collective permettent de donner du sens au travail. Mais
est-ce vraiment suffisant pour aboutir à une mise en
action ?
Lors des mises en place effectuées à La Poste de
Cergy Grand, quatre grands principes ont été
respectés : expliquer les décisions prises en fonction des
observations, aborder concrètement les attendus, accompagner la mise en
oeuvre et motiver les équipes en montrant les évolutions et les
corriger si besoin. Ces actions sont réalisées jusqu'à ce
que l'appropriation soit devenue routinière.
L'appropriation devient alors un point incontournable dans
l'efficacité d'une mise en action. LEGOFF (1993) prône le tutorat
par des personnes expérimentées pour en faciliter
l'exécution. Cette méthode a déjà été
utilisée à La Poste à divers niveaux.
Dans la vie d'une équipe, le manager est en
négociation quasi-permanente avec ses collaborateurs. Il est
confronté à une question de confiance quotidienne sur le sens que
chacun attribue à « son travail ». La perte de cette
confiance amène régulièrement les collaborateurs à
se réfugier dans la défiance, qui peut être analysée
comme une énergie qui s'est déplacée. Une solution qui
s'offre au manager pour orienter cette dernière vers des objectifs
communs est alors l'appropriation.
CONCLUSION THEORIQUE ET IMPLICATIONS MANAGERIALES
Ce mémoire repose principalement sur des observations
de terrain à Cergy Grand Centre où j'ai observé les
conditions de la mise en oeuvre d'« Espace Service
Client ». La confrontation du terrain et de la théorie m'a
permis de mettre le doigt sur des éléments indispensables
à la mise en action. Ainsi, j'ai pu souligner combien à la Poste,
peut-être plus qu'ailleurs, la prise en compte du sens accordé au
travail est essentielle.
Dans l'ensemble alors, l'objectif de ce mémoire n'est
pas de formuler des recettes pour le passage à l'action, mais de montrer
les éléments qui doivent être appréhendés par
le manager dans son travail quotidien.
Dans ce mémoire, nous avons vu que :
- L'entreprise a besoin d'une vision stratégique
clairement définie. C'est une condition essentielle mais pas suffisante
pour passer à l'action, surtout dans une entreprise publique.
- Dans le cas de l'Enseigne La Poste, la mission de service
public peut être un moteur à la mise en action. Les idées
sur ce que regroupe cette notion « fourre-tout » ont pour
conséquence de créer des incompréhensions avec les
clients. Cette même notion n'est pas très claire dans les esprits
des « postiers ».
- Ces derniers démontrent au quotidien leur
volonté de bien faire leur « métier ». En cas
de déficit de sens donné à l'action, ils en créent
un. Ce qui amène le directeur d'établissement à
négocier quotidiennement avec ses collaborateurs et composer avec des
adaptations jugées nécessaires. Ce qu'on appelle alors souvent de
la « résistance au changement » traduit alors
principalement une quête de sens, que le discours de l'entreprise ne
suffit souvent à combler.
- Les bureaux de l'Enseigne ont montré et
démontré leur capacité à changer avec la mise en
place de boutiques, puis aujourd'hui du concept ESC. Pour faciliter cette
évolution, il faut impérativement éviter de
générer des injonctions contradictoires avec la culture postale
et les valeurs des postiers. Ces valeurs, inscrites dans l'histoire de
l'institution, constituent la dimension centrale de l'identité de
Postier et un socle de la mobilisation de la main-d'oeuvre au travail.
- Pour accompagner les changements, le manager doit donc
posséder une bonne connaissance de ce contexte de travail. En cela, il
est essentiel qu'il reste en poste suffisamment longtemps, de 3 à 5 ans
me semble cohérent, mais pas au-delà pour éviter des
« routines managériales » préjudiciables
à la vision stratégique du groupe. Cette même
préconisation s'applique aux personnels des bureaux. Un collaborateur
qui fait sa carrière dans un bureau s'est logiquement installé
dans une « routine » et s'est souvent octroyé un
pouvoir qui peut être nuisible. Je pense qu'il est nécessaire
d'organiser des rotations de personnels au sein des établissements,
voire des métiers.
- Le manager de proximité à l'Enseigne
possède une grande spécificité : il est directeur de
bureau de Poste et directeur bancaire. Ces 2 activités sont des
métiers à part entière dans toutes les autres entreprises.
Bien sûr, il peut s'appuyer sur un directeur adjoint et doit consacrer 80
% de son temps à la partie bancaire. Le directeur adjoint doit se voir
attribuer une responsabilité accrue et devenir
« patron » au lieu de « chef ». Dans la
situation actuelle, nous sommes face à des directeurs adjoints
responsables mais pas coupables, qui ne sont pas les seuls à apporter du
soutien.
- Pour l'aider dans ses différentes entreprises, le
manager peut s'appuyer sur des services fonctionnels ou
« experts ». Ces derniers sont excellents dans
« leur » domaine. Un déficit de sens provoque de
graves dissonances. Il me semble que les objectifs quantitatifs et qualitatifs
des bureaux doivent être partagés par les fonctionnels et les
hiérarchiques. Là encore, on se trouve face à des services
fonctionnels responsables mais pas coupables. Ce qui est nuisible à
l'action, au sens donné au travail quotidien et peut obliger le manager
à (re) négocier avec ses équipes pour apporter de la
confiance.
- Des limites à l'action apparaissent
régulièrement dans le quotidien du directeur
d'établissement. Jacques RAPOPORT, directeur général de
l'Enseigne l'a clairement exprimé : il existe une forte
défiance à La Poste. Cette défiance s'explique par un
déficit de confiance. Le rôle du manager est là encore, de
développer une forme de négociation quasi-quotidienne avec ses
équipes.
- L'appropriation est certainement un moyen efficace pour
concentrer l'énergie vers des objectifs communs. C'est en accompagnant
ses équipes au quotidien dans leurs actions que le manager peut donner
du sens à l'action.
En conclusion, ce mémoire montre que le passage
à l'action est subordonné au fait de donner du sens au travail
des collaborateurs. Entre la vision stratégique et les employés,
le manager se situe donc au coeur des négociations qui conditionnent au
quotidien le passage à l'action.
Ce mémoire est issu d'observations et de
questionnements sur le bureau de Poste de Cergy Grand Centre, elles-mêmes
confrontées à une base théorique importante. Il me
paraîtrait aujourd'hui intéressant de poursuivre cette
étude dans des entreprises d'autres secteurs d'activités (avec ou
sans notion de service public) pour mieux saisir la portée de nos
conclusions.
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___________________________________________________________________________
ANNEXES METHODOLOGIQUES
___________________________________________________________________________
ANNEXE 1 - La démarche de recherche du terrain
d'étude.
La première étape de la recherche a
consisté à identifier et solliciter des collaborateurs et
collègues de travail concernés par notre objet. Les personnes
interrogées l'ont été en fonction de leur positionnement
par rapport à la thématique.
Ainsi, nous y trouvons des agents, des cadres
intermédiaires avec ou sans fonction de management, des cadres
supérieurs fonctionnels et hiérarchiques. L'utilisation de
l'entretien individuel, sous forme de discussion peu structurée a permis
de laisser une part importante à la libre expression des
interrogés. L'utilisation de comptes-rendus de discussions informelles
permet de figer des notions qui ont servies de base de travail.
Le terrain d'étude fût celui du bureau de Cergy
Grand Centre. Ce choix a été guidé par la mise en test de
l' « Espace Service Client » de cette entité.
Pour comprendre les fonctionnements de la mise en action, le choix s'est
porté sur la tenue d'un « journal de bord » durant
14 semaines.
___________________________________________________________________________
ANNEXE 2 - Exemple de retranscription d'entretien avec
une directrice adjointe.
OP - Bon alors je voudrais t'interroger pour mon
mémoire de recherche sur la notion de service public. Mon mémoire
porte sur le passage de l'intention à l'action, cependant je m'interroge
et je vais profiter de ton expérience en thermes de service public, je
m'interroge sur ce service public qui quelque part je ne sais pas si ce n'est
pas une pierre que l'on a dans la chaussure, si ce n'est pas un caillou qui
nous empêche certaines choses, donc ma première question c'est
: en temps que postière et fonctionnaire parce que ça a son
importance quelle est ta définition du service public quelle est ta
vision à toi du service public ? C'est quoi le service public ?
Mme x - Pour moi le service public c'est un service offert
à tous en tous points du territoire quelque soit sa couleur sa race sa
religion son âge son profil sa situation financière etc. .... La
mission de service public pour moi c'est ça. Maintenant offrir la
même chose partout en tous points du territoire à tous citoyens de
ce pays c'est très bien mais il faut avoir les moyens de se l'accorder
ou de se l'offrir.
OP - Qu'est ce que tu entends par là ?
Mme x - Eh bien j'entends par là que le service public
oui, mais dans une société où l'on nous demande une
rentabilité économique ça ne va pas forcément
ensemble. Quand on voit que Bruxelles petit à petit uniformise toutes
les directives Européennes et essaye de mettre tous les pays sur le
même pied d'égalité le service public à la
Française me semble complètement en inadéquation totale
avec ce que Bruxelles veut mettre en oeuvre sur le plan purement
économique en thermes de concurrence totale et absolue.
OP - Donc globalement est ce que, si je résume ou si
je synthétise est ce que l'on n'est pas à la limite de notre
service public ?
Mme x - Je pense que en l'état des lieux avec la
concurrence, enfin l'Europe qui veut mettre une concurrence totale sur tous
les systèmes qu'ils soient de santé, en thermes de transport, en
thermes d'électricité, de répartition, de distribution
de courrier, etc. ..., je pense que oui, on atteint un point limite ou il
falloir soit redéfinir la notion de service public soit carrément
la détruire car je n'imagine pas que l'on puisse être une
entreprise en concurrence et en même temps accepter de perdre de l'argent
en maintenant un service public parce que qui dit service public dit accepter
un moment donné de perdre de l'argent, or on nous demande d'être
en concurrence totale.
OP - Et est ce que c'est totalement incompatible ?
Mme x - Alors ça il n'y a que l'avenir qui pourra nous
le dire, moi je ne le sais pas, par contre moi ce que je vois, je vais
reprendre mon expression favorite :
Quand on met les gens en concurrence ils sont tous sur la
même ligne de départ ils courent tous le 100 mètres. Quand
on se met en concurrence avec une mission de service public derrière, on
part sur la même ligne de départ que les autres mais avec des
boulets aux pieds, donc comment peut on courir aussi vite que les autres avec
des boulets aux pieds ?
OP - Techniquement aujourd'hui quand on regarde un petit peu
ce qu'il se passe (et on en reparlera dans notre réunion de tout
à l'heure), on a deux types de clients dans les bureaux, on a les
clients qui nous font du fric et on est là pour ça puisqu'on est
commerçants, et puis on a notre mission de service public. On le vit
comme étant un boulet parce qu'au quotidien dans les bureaux de poste
c'est ça.
Par contre est-ce que notre incompatibilité
perçue n'est pas que perçue puisque nos clients qui font de la
marge on les favorise, ici on les favorise énormément et quelque
part c'est eux qui permettent de financer notre mission de service
public ?
Mme x - Alors, financement, il faut voir deux choses, il y a
le financement de l'entreprise et le financement du service public. Est-ce que
nos clients à marge aujourd'hui sont à même de financer et
l'entreprise et le service public, et de permettre à l'entreprise de
continuer de se développer ? Car une entreprise qui ne se
développe pas c'est une entreprise qui meure...
OP - Tout à fait, et donc à priori on est
à ton avis où là ?
Mme x - Je pense qu'il faut un autre plan de financement que
nos recettes simples. Alors maintenant est ce que l'état est prêt
à participer à cette mission de service public en financement les
parties totalement non rentables de ce service public.
OP - Et il y en a ?
Mme x - Et il y en a énormément, parce que
l'entreprise par elle même n'est pas à même de subvenir
à ses charges à son développement industriel et
économique et à prendre en charge aussi tout le déficit
généré par la notion de service public pur.
Donc il y a peut être d'autres axes de leviers de
financement à mettre en place mais qui viendraient de la
collectivité, la collectivité veut du service public, à la
collectivité de prendre en charge une partie de ce service public, et
pas à l'entreprise.
OP - Je comprends parfaitement et je partage. Et techniquement
au quotidien quand on regarde dans nos équipes on a des gens qui sont
très attachés au service public ?
Mme x - Mais moi aussi parce que c'est une forme
d'égalité sociale quelque part.
OP - Et dans ce que tu vis avec tes équipes au
quotidien comment tu perçois ce service public ?
Mme x - Alors je pense qu'il y a une différence
déjà au niveau des personnels, entre des personnels qui ont 20
ans et plus d'ancienneté, et des personnels qui sont nouveaux dans
l'entreprise. Je pense que les personnels qui 20 et 30 ans d'ancienneté
ou plus sont des gens qui sont rentrés uniquement dans le service
public, sans notion de marge ni de chiffre d'affaire sans notion de
développement économique donc ils restent très
attachés à ces missions de service public parce que pour eux
ça fait partie de ce qu'ils ont toujours connus et de ce qu'ils sont
venus faire en fait, ils sont venus faire du service public, on ne leur a pas
demandé d'être vendeurs quand ils sont rentrés à la
poste, on leur a demandé d'être fonctionnaires et de faire de la
mission de service public uniquement, donc je pense qu'il y a une
différence entre ces personnels là. Après il y a ceux qui
évoluent et qui comprennent qu'on est devenus une entreprise et qu'ils
doivent évoluer dans le sens ou il faut développer du chiffre
d'affaire etc. .... Mais je pense que intrinsèquement ils sont tous
quand même attachés à la mission de service public, pour
les plus jeunes je dirais que c'est plus flou je ne pense pas qu'ils soient
rentrés à la poste pour faire de la mission de service public ils
sont rentrés dans une entreprise.
OP - D'accord donc il y a une perception totalement
différente au sein de tes équipes ?
Mme x - Oui je pense j'en suis intimement convaincue.
OP - Et au niveau de ta gestion pour les mettre dans l'action,
tu le vis comment ? Tu le ressens comment ?
Mme x - Je pense qu'il est plus difficile de faire bouger les
mentalités des anciens par rapport à ça parce que pour eux
ça fait partie de leur travail profondément. Donc en fait ils ont
beaucoup plus de mal à évoluer vers le commercial ou de bouger
davantage vers le commercial parce que certains qui ont bien
évolué dans ce secteur là mais je pense que certains ont
plus de mal à évoluer parce que pour eux on sert tous les clients
quels qu'ils soient de la même façon et plus il y a de clients qui
viennent faire du service public et plus c'est normal à la limite, donc
c'est pour ça peut être aussi qu'on a du mal à avoir des
guichetiers qui font de la préconisation web, qui font de la
préconisation sur un tas de chose parce que pour eux c'est bien d'avoir
un client en face, ça justifie aussi le fait qu'ils soient
là !
OP - C'est intéressant ça, ça justifie le
fait qu'ils soient là. Et avec les jeunes ?
Mme x - Les jeunes c'est totalement différent, parce
que eux ils ont parfois un passif professionnel qui est déjà dans
le privé la poste n'est pas forcément leur premier métier,
alors que pour les anciens la poste est pratiquement à coup sûr
leur premier métier, et ils n'ont connu que la poste et uniquement la
poste, les PTT et la poste pour les plus anciens. Les jeunes qui rentrent eux
parfois ont connu autre chose ou du moins ils ont fait des stages en
entreprises puisque maintenant les universités les écoles les IUT
envoient les jeunes faire des stages en entreprise, ce qui n'existait pas pour
les anciennes générations non plus. Donc la vision d'un jeune qui
rentre à la poste aujourd'hui n'est pas la même que celle d'un
ancien qui est rentré avant parce que déjà le parcours
scolaire ou universitaire est radicalement différent et parce qu'en plus
ce n'est pas forcément leur premier métier, qu'ils ont
vécu autre chose et qu'ils ont déjà un autre vécu
ne serait-ce par leurs stages et parce que eux ils rentrent dans une entreprise
dont l'activité se tourne de plus en plus vers l'aspect
économique et vers le développement du chiffre d'affaire. Le
service public ils le font parce que ça fait partie des choses qu'ils
doivent faire mais ce n'est pas forcément leur credo, ils le font parce
que ça fait partie du boulot.
OP - Projettes toi dans 5 ou 10 ans, pour toi la poste dans 5
ou 10 ans ça ressemble à quoi ?
Mme x - Ma vision à moi elle est totalement incertaine,
une fois que les marchés seront totalement libérés.
OP - Ca c'est 2011 ?
Mme x - C'est 2011 donc c'est demain je ne sais pas combien de
temps on va tenir.
OP - C'est à dire ?
Mme x - Je ne suis pas convaincue je pense être
rentrée à la poste mais je ne suis pas convaincue de finir ma
carrière à la poste.
OP - C'est à dire ?
Mme x - C'est à dire que en totale concurrence avec la
mission de service public accrochée à nos basques pour l'instant
financée par la boîte et très peu par les
collectivités publiques et territoriales etc...., je ne sais pas si on
va s'en sortir puisqu'on va perdre à priori beaucoup de chiffre
d'affaire puisque le chiffre d'affaire va se répartir sur toutes les
autres entreprises qui vont se mettre sur les rangs. Je ne vois pas comment on
peut continuer de financer un modèle alors qu'on a plus les recettes qui
rentrent dans l'entreprise donc j'ai un doute profond par rapport à
ça.
OP - Ta vision idéale c'est quoi ? Comment tu aimerais
voir la poste dans 5 à 10 ans ?
Mme x - Très difficile, ayant des doutes
déjà sur le fait qu'on puisse subsister j'ai du mal à
imaginer un modèle. De toute façon il ne faut se leurrer soit on
est tout économique et uniquement économique soit il y a une
marche arrière parce que il va y avoir la montée au
créneau des usagers je prends le terme usagers parce que eux ils se
sentent encore usagers de la poste et pas forcément clients nous on
parle de clients quand on parle d'une personne qui rentre chez nous mais dans
la rue ils se considèrent encore beaucoup comme des usagers et pas des
clients. Il est possible que ces usagers clients si ils se rebiffent parce
qu'ils trouvent que le service est de moins bonne qualité etc...., et
qu'ils montent au créneau qu'il y a un maintien d'un service public de
base ou de qualité qui soit maintenu tant sur le plan bancaire que sur
le plan courrier maintenant je dirais affaire à suivre et je pense que
toutes les balles ne sont pas dans notre camp.
OP - Donc en fait tu ne vois pas un équilibre entre les
gens qui nous apportent de l'argent pour financer nous-mêmes ?
Mme x - Non pas dans un contexte de concurrence pure.
OP - Et est-ce que ça au niveau de nos actions parce
qu'on fait des actions au quotidien est-ce qu'on peut le percevoir ? Est ce
qu'on commence à sentir des choses ou c'est encore très
très flou ? Parce que 2011 c'est demain ?
Mme x - Je pense qu'il y a une chose qui est
intrinsèque tant chez nos clients que chez nos agents, c'est que la
poste c'est tellement une vieille institution qui est tellement vieille c'est
la vieille dame c'est quelque chose qui semble tellement monumental que je
pense que pour le commun des citoyens de ce pays et pour le commun des agents
il n'est pas possible que la poste puisse disparaître. Ce n'est pas
possible pour eux et si demain ça venait à arriver je pense que
personne ne comprendrait.
OP - Et est ce que c'est possible ?
Mme x - Je pense que c'est possible qu'on disparaisse
demain.
OP - Donc on a tout intérêt à trouver des
solutions ?
Mme x - Des solutions des points d'équilibre des
financements de ce service public je pense qu'il faut trouver un financement,
on ne peut pas demander à une entreprise de courir 100 mètres
avec les autres et de lui imposer des charges aussi lourdes non
rémunératrices.
___________________________________________________________________________
ANNEXE 3 - Exemple de retranscription de compte-rendu
d'entretien informel.
Lors de sa visite, le conseiller en patrimoine me semble
préoccupé. Il intervient ponctuellement sur le bureau sur des
problématiques patrimoniales soit à la demande des conseillers
bancaires, soit par le travail de son portefeuille. Je connais ce métier
pour l'avoir pratiqué pendant 6 ans. Je lui fais part de mon impression
et lui demande comment se passe son métier actuellement.
Il me dit être mal dans sa peau de conseiller. On lui
demande d'avoir de l'activité et il se sent suivi que sur les entretiens
concrétisés. Il lui semble être loin de sa perception du
métier qui est plus axée sur le conseil.
Je lui demande comment il fait son travail actuellement par
rapport à ce qui lui est demandé.
Il me dit qu'il fait ce qu'on lui demande, c'est-à-dire
qu'il se provoque une activité sur son portefeuille avec des contrats
sans véritable plus value. L'exemple type est la « convention
transmission » qui est gratuite et qui favorise l'intervention de La
Banque Postale dans le cadre d'une succession. Il me dit avoir 9 portefeuilles
à gérer ce qui correspond à 21 bureaux. Il a
déjà rencontré la plupart de ses clients et le
portefeuille n'est pas renouvelé. Il se sent cloisonné. La Banque
Postale ne peut pas entendre ceci car on considère qu'il y a toujours
à faire avec le suivi de la clientèle.
Il se plaint également d'être appelé par
les conseillers sur des points non patrimoniaux (dérogations
tarifaires).
Je lui demande s'il fait part de ceci à sa
hiérarchie.
Il a un entretien hebdomadaire avec son chef. Il lui a
demandé la dernière fois d'arrêter de se plaindre lors des
réunions avec l'ensemble des conseillers. Son image en subie des
conséquences et il est remarqué dans le mauvais sens ! Lors
des entretiens, il me dit arriver avec ses résultats, son chef arrive
avec des objectifs. L'échange lui semble stérile. Il me dit
qu'à la fin de ses entretiens, son chef lui demande ce qu'il peut lui
apporter. Il me signale que c'est à lui d'apporter des solutions pour
qu'il atteigne ses objectifs : « il devrait savoir si il
connaissait le métier ».
Se pose alors la pertinence de la multiplication et de la
cohérence des différents métiers bancaires. Le
gestionnaire de clientèle (GC SF) s'occupe de l'accueil des nouveaux
clients. Le conseiller financier s'occupe d'équiper des nouveaux clients
ou des clients à faibles équipements. Le conseiller
clientèle s'occupe de développer une relation avec des clients
équipés ou à potentiel. Le conseiller en patrimoine
intervient sur demande des conseillers sur des problématiques
patrimoniales et gère un portefeuille de clients à fort
potentiel. Le conseiller en gestion de patrimoine s'occupe des clients à
très fort potentiel.
Il fait un parallèle avec un garage. Il
considère que chacun fait un métier différent
(électricien, carrossier, mécanicien...) et les métiers ne
se superposent pas comme chez nous.
Le client est perdu dans ses interlocuteurs, il souhaite de la
proximité et un suivi de son dossier. Le seul en mesure de le faire est
le conseiller en bureau. Et souvent, le client se tourne vers cet
interlocuteur. Chaque conseiller a des objectifs avec un tronc commun qui
incite à ne pas appeler les divers interlocuteurs.
TABLE DES ANNEXES
ANNEXE 1 - La démarche de recherche du terrain
d'étude 55
ANNEXE 2 - Exemple de retranscription d'entretien avec
une directrice adjointe 56
ANNEXE 3 - Exemple de retranscription de compte-rendu
d'entretien informel 61
TABLE DES ILLUSTRATIONS
FIGURE 1 - Organigramme : vision du directeur
d'établissement 19
FIGURE 2 - Organigramme : vision d'un
collaborateur du terrain 20
FIGURE 3 - Le cycle du management par objectifs
d'après COMMARMOND - EXIGA, 2004 22
FIGURE 4 - Les modes d'action du manager
d'après COMMARMOND - EXIGA, 2004 25
FIGURE 5 - La drogue de l'urgence d'après
COVEY, 1995 27
FIGURE 6 - Les services fonctionnels à
l'enseigne 32
TABLEAU 1 - Le management selon les 3 niveaux
hiérarchiques d'après J.W WALKER, 1992 17
TABLEAU 2 - Rôles et tâches des services
fonctionnels d'après MALLERET, 1998 30
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION 1
1ère PARTIE : La vision du
travail : les dessous de l'action 4
1.1 La vision stratégique : donner du sens au travail
4
1.2 Notre mission de service public : force ou
faiblesse ? 6
1.3 Les collaborateurs veulent faire du « bon
travail » 10
1.4 Le changement à La Poste : résistance ou
intelligence ? 12
1.5 Le poids de la « culture
d'entreprise » : les valeurs postales 14
2ème PARTIE : Le manager dans
l'action 16
2.1 Le manager de proximité, avant tout un
négociateur 17
2.2 Le manager au quotidien, un homme de terrain 21
2.3 Le temps et le manager, une alchimie complexe 26
3ème PARTIE : L'appui des services
fonctionnels 29
3.1 Le service fonctionnel : rôle et mission 30
3.2 Les experts, des fonctionnels qui font 33
4ème PARTIE : Les limites du sens
du travail 37
4.1 La confiance, préambule indispensable 38
4.2 La défiance, une source d'énergie 42
4.2.1 La défiance en interne 42
4.2.2 La défiance des clients 44
4.3 L'appropriation, un remède 45
CONCLUSION THEORIQUE ET IMPLICATIONS
MANAGERIALES 48
BIBLIOGRAPHIE 51
ANNEXES METHODOLOGIQUES 54
TABLE DES ANNEXES 63
TABLE DES ILLUSTRATIONS 64
TABLE DES MATIERES 65
RESUME 66
Passer à l'action dans le service
public : l'exemple du bureau de Poste de Cergy Grand Centre
Résumé
A l'appui du passage à « Espace Service
Clients » au bureau de Poste de Cergy Grand Centre, il a
été permis d'observer un levier primordial pour passer d'une
intention à l'action : donner du sens à l'action.
Ce levier s'entend à tous les niveaux de l'entreprise,
que ce soit la vision stratégique, le management de proximité,
les services fonctionnels. Bien sûr, des limites sont présentes et
identifiées.
Les résultats de cette recherche montrent une
nécessaire cohérence entre les niveaux hiérarchiques et
fonctionnels pour que le projet soit réalisable.
___________________________________________________________________________
Mots clefs : vision stratégique, service
public, adaptation, négociation, résistance aux changements,
management, services fonctionnels, confiance, défiance,
appropriation.
Take action in the public utility: the example of the
post office of Cergy Grand Centre
Summary
___________________________________________________________________________
In support of the passage in "Space Customer services" to the
post office of Cergy Grand Centre, it was allowed to observe an essential
control lever to pass of an intention in the action : give meaning to the
action.
This control lever gets at every level of the company, whether
it is the strategic vision, the management of nearness, the functional
services. Naturally, limits are present and identified.
The results of this research show a necessary coherence
between the hierarchical and functional levels so that the project is
practicable.
___________________________________________________________________________
Keywords: strategic vision, public utility,
adaptation, negotiation, resistance to the changes, the management, the
functional services, the trust, the mistrust, the appropriation.
* 1 Le site Alapage recense 2996
ouvrages consacrés au management.
* 2 Le moteur de recherche
Google recense pas moins de 13`500'000 pages consacrées à la
définition du manager.
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