UNIVERSITE DE MONTPELLIER1
FACULTE DE DROIT ET
SCIENCE POLITIQUE
Département de Science
Politique
Année universitaire 2008-2009
LA POLITIQUE DE COOPERATION DECENTRALISEE ENTRE
COLLECTIVITES LOCALES
LE CAS : RHONE-ALPES/SAINT-LOUIS
DU SENEGAL
|
Mémoire de Recherche présenté et
soutenu par TOURE El Hadji Abdou Hamid,
Pour le Master2 Régimes et
Politiques en Europe du Sud
« Les opinions exprimées ci-dessous doivent
être considérées comme relevant de la seule
responsabilité de leur auteur »

1
Remerciements
Spécial remerciement à mon directeur de
mémoire M. Mohamed Djouldem, Maitre de conférence en Science
Politique, qui m'a orienté rigoureusement et fait partager son
expérience d'enseignant chercheur.
Je tiens à remercier l'équipe du Conseil
régional de Saint-Louis pour m'avoir guidé et accordé de
leur temps notamment M. Dia Secrétaire général et M.
Babacar Faye chargé des affaires administratives.
Mes remerciements s'adressent également à Mme Gaye
Khady de la DIRCOD de Dakar pour sa gentillesse et l'attention qu'elle a
portée à mon égard.
Je remercie, enfin, toute personne qui, durant mes enquêtes
au Sénégal et même en dehors, m'a accordée de son
temps et fournie des informations pertinentes et précieuses.
Je dédie très chaleureusement ce mémoire
à ma mère Rokhaya Touré pour tous ses efforts consentis
à l'éducation et la bonne orientation de ses enfants.
Table des matières

Introduction 5
PARTIE1 - Enjeux et Acteurs de la coopération
décentralisée
1.A. Les enjeux de la coopération Nord-Sud .19
1.A.1. La coopération décentralisée : une
politique de captation des ressources pour le développement local de
Saint-Louis .19
1.A.2. La solidarité internationale : une politique
d'ouverture bien
ancrée dans la région Rhône-Alpes 25
1.B. Un partenariat dynamique et inscrit sur la durée .
31
1.B.1. Les dynamiques constitutives du partenariat
Rhône-Alpes/
Saint-Louis du Sénégal 31
1.B.2. Vers une harmonisation avec les stratégies
nationales et internationales
de développement: la mobilisation de acteurs .38
PARTIE2 - Modes de traductions et finalités des
projets
2.A. Une coopération dans les sinuosités du
développement local .46
2.A.1. La traduction multiforme des actions 46
2.A.2. Les ambiguïtés sous-jacentes à la mise
en oeuvre des projets : sous-traitance du développement et immixtion
étatique 52
2.B. Rendre opérationnelle la décentralisation
à Saint-Louis ou dépasser la symbolique des donations 60
2.B.1. Aider à la maîtrise d'ouvrage des acteurs
locaux au Sud 60
2.B.2. Renforcer les capacités institutionnelles
d'administration
et de gestion de Saint-Louis .63
Conclusion 66
Bibliographie
Annexes
SIGLES ET ABBREVIATIONS

3
ACED-SUD : Association pour la coopération et le
développement économique du Sud ACP : Afrique Caraïbes
Pacifique
ADOS : Association Ardèche Drôme Ourossogui
Sénégal AFD : Agence française de développement
AFVP : Association française des volontaires du
progrès ARD : Agence régionale de développement
ASER : Agence sénégalaise de
l'électrification rurale CCL : Code des collectivités locales
CDFP : Centre départemental de formation
professionnelle
CEPRAO : Cellule d'échange et de partenariat
Rhône-Alpes/ Afrique de l'Ouest
CIEDEL : Centre international des études pour le
développement Local
CNCD : Commission nationale de coopération
décentralisée CRREJ : Centre régional de ressources pour
l'emploi des jeunes CSS : Compagnie sucrière
sénégalaise
CUF : Cités Unies France
DAECL : Direction de l'action extérieure des
collectivités locales DCL : Direction des collectivités
locales
DSRP : Document stratégique de réduction de la
pauvreté EPT : Education pour tous
ESPS : Enquête de suivi de la pauvreté au
Sénégal FAIL : Fonds d'aide aux initiatives locales
FCFA : Franc des communautés françaises d'Afrique
FDD : Fonds de dotation
FECL : Fonds d'équipement aux collectivités locales
FED : Fonds européen de développement
GECT : Groupe Européens de coopération territoriale
GIE : Groupement d'intérêt économique
MAEE : Ministère des Affaires Etrangères et
Européennes PACCA : Provence Alpes Cotes d'Azur
PADDEL : Programme d'appui à la décentralisation et
au développement local
PDDE : Plan départemental de développement
économique PDM : Programme de développement municipal

PEPAM : Programme eau potable et assainissement du
millénaire PIC : Plans d'investissements communaux
PLD : Plans locaux de développement
PLDE : Plans locaux de développement économique PLE
: Plans locaux d'électrification
PLHA : Plans locaux de l'hydraulique et de l'assainissement PNDL
: Programme national de développement local
PNUD : programme des nations unies pour le
développement RGPH : Recensement général de la population
et de l'habitat RESACOOP : Réseau d'appui à la coopération
Rhône-Alpes

5
INTRODUCTION
La pratique déjà ancienne des jumelages de
l'après-guerre a planté le décor de la coopération
dite « décentralisée ». En effet, naît au
lendemain de la Seconde guerre, en 1951, avec la création de
l'association du Monde Bilingue de Jean-Marie Bressand (figure de la
Résistance), le concept de jumelage promeut l'éducation bilingue
comme élément de compréhension entre les peuples et
vecteur de paix.
Dans un premier temps, les jumelages lient les communes
françaises, animées par la volonté de développer
des liens d'amitié avec les populations des communes allemandes. Puis,
pendant la guerre froide, les jumelages principaux cadres d'échanges
culturels, se sont développés avec les communes des pays d'Europe
de l'Est. Il s'agissait par delà les différences nationales et de
régimes politiques, de reconstruire l'amitié internationale, pas
seulement par le haut, à travers les appareils d'Etats, mais aussi par
le bas, à travers des réseaux d'échanges amicaux
réguliers, (A. Marie, 2005). Et enfin, dans les années 1960-1970,
les indépendances des pays sahéliens changent la nature des
jumelages lorsque des communes d'Europe occidentale s'engagent dans des actions
concrètes de solidarité en Afrique subsaharienne,
formalisées en tant que « jumelages-coopération ».
L'idée d'une solidarité Nord-Sud y trouve son fondement car les
jumelages-coopération unissent des collectivités locales de pays
"industrialisés" avec celles de pays "en voie de développement ".
Dans cet ordre d'idées, dès 1968 les communes de Dakar et
Marseille signent un accord de jumelage. Cette forme de jumelage est
caractérisée par des donations et des échanges
interculturels.
Cependant, deux événements vont remettre
radicalement en cause, ce qu'on a communément désigné
comme coopérations « cadeaux » ou « conteneurs ».
D'une part, avec la crise des années 1970, des
mutations d'ordre économique, social, politique, culturel,
environnemental sont intervenues à tous les échelons de
l'administration des sociétés humaines. Cette conjoncture finit
par avoir raison des Etats providence en Europe. Autrement dit, c'est la fin du
référentiel modernisateur de l'après guerre, qui a
propulsé les Etats au devant de la scène, et l'avènement
du référentiel néolibéral symbolisé par
Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Ainsi dans cette atmosphère de
libéralisation et de plans d'ajustement structurel émergent des
objets politiques marquants tels que: la décentralisation, la
mondialisation, la bonne gouvernance, la subsidiarité, la protection
de

l'environnement et l'immigration, entre autres, ouvrant une
nouvelle ère de la coopération internationale. Devant cet
échec affiché par les Etats, les institutions financières
internationales les ont encouragé à reculer. Ainsi, à
l'occasion du sommet franco-africain en 1990, Mitterrand invite ses pairs
à la démocratisation des Etats africains. Il donne, un principe
d'avenir à la « coopération décentralisée
». Dans cette optique, les collectivités locales françaises,
renforcées par les lois de décentralisation, deviennent les
nouveaux ambassadeurs de la coopération pour le développement en
Afrique subsaharienne.
D'autre part, au début des années 1990 vient
enfin l'heure des premiers bilans des formes classiques d'assistance technique
et financière au coup par coup. Les chiffres étant
mitigés, les collectivités françaises prennent alors
résolument, la décision de réorienter leurs
coopérations vers des objectifs à plus longue portée, dont
le transfert de compétences (en matière de gestion et de services
publics) et l'appui au processus de décentralisation. Dans cette
dynamique, la loi d'orientation du 06 Février 1992, leur confère
une relative autonomie d'action, par la reconnaissance juridique de la
coopération décentralisée.
Néanmoins, si en France, la montée en puissance
de la coopération s'explique par la volonté des élus
locaux d'intervenir dans un champ jusqu'alors réservé aux acteurs
étatiques et aux institutions internationales. Dans les pays
sous-développés comme le Sénégal, la
coopération décentralisée est une politique de captation
des ressources pour le financement du développement des
collectivités locales. Elle représente, ainsi, un enjeu majeur
pour l'appui à la mise en oeuvre du processus de décentralisation
et la lutte contre la pauvreté. Ce qui lui offre, des champs
d'application assez larges appliqués, prioritairement, à la mise
en place de services de proximité, à l'accompagnement des actions
de développement local, à la mobilisation et l'implication des
acteurs sociaux dans la mise en oeuvre des actions et à l'appui
institutionnel aux collectivités locales.
Les projets mis en oeuvre mobilisent une multitude d'acteurs
(collectivités territoriales, hôpitaux, écoles,
universités, associations ad hoc de coopération, comités
de jumelage, bureaux d'études, ONG, ARD, Ministères et leurs
Directions, AFD, UE, CUF, etc.). Ces acteurs sont au centre du processus de
coopération. Par cette place centrale qui leurs est accordée, la
coopération décentralisée a bénéficié
d'un crédit fondé sur l'idée qu'elle associe sans
intermédiaires les « acteurs de terrains » et les «
forces vives » émanant de la « société civile
» (Petiteville, 1996). Ainsi elle a fait l'objet d'un discours de
valorisation teinté sur le

7
thème d'une coopération « souple »,
« partenariale », « à échelle humaine » qui
s'opposerait aux arcanes bureaucratiques traditionnels de la coopération
multilatérale ou aux réseaux clientélistes des
coopérations bilatérales. Cependant, on est progressivement dans
un système de coopération institutionnalisé par les Etats
et les bailleurs internationaux. Il résulte de ce changement que les
procédures sont de plus en plus complexes et l'autonomie des acteurs
préconisée, à la base, n'est plus en phase avec les
nouvelles orientations de la coopération décentralisée.
L'exigence de professionnalisme a induit un phénomène de
bureaucratisation.
Finalement, c'est une coopération entre initiés et
élus ou notables, rares sont les exemples oüles
représentants des populations en difficultés sont mis à
contribution. Vraisemblablement la
stratégie d'impulser un développement
piloté par des « électrons libres » (les acteurs),
même dotés de ressources et réseaux, n'a pas
démontré son efficacité. Leurs choix et orientations sont
guidés par des intérêts matériels ou symboliques. En
outre, l'idée négative d'une politique de coopération
folklorique ne correspond plus à la réalité, même si
l'éparpillement des interventions et la multiplicité des acteurs
provoquent beaucoup d'effets pervers (contradictions et lourdeurs
procédurières). Dans les pays du Sud, les élites au
pouvoir s'adonnent, dans bien des cas, à des luttes intestines pour
l'appropriation des retombés.
Les moyens mobilisés sont importants, pourtant, ils
n'ont pas eu de réels impacts sur les populations d'Afrique
Subsaharienne. Mieux les cibles ne se sentent pas très concernés
et accusent, dans biens des cas, leurs acteurs locaux de détournement
des objectifs du sans doute au manque de circulation des informations. Ainsi
une meilleure rationalisation des actions est souhaitée. A ce titre, les
collectivités locales sont invitées à harmoniser leurs
actions avec les stratégies et politiques sectorielles de
réduction de la pauvreté, engagées à
l'échelon national et/ou international (comme le PNDL, les OMD, le DSRP,
etc.).
Ce changement d'orientation motivé par des offres de
cofinancement, de la part des bailleurs internationaux ou du MAEE en ce qui
concerne la France, pousse à s'interroger sur ses vrais objectifs.
Autrement dit, cette politique d'harmonisation, viserait-elle un alignement des
collectivités du Sud sur les systèmes locaux de gouvernement du
Nord? Si tel était le cas, que deviennent les vrais problèmes
à résoudre dans les pays du Sud qui ont des contextes politiques,
socio-économiques et culturels différents.
Quelques considérations sur la notion de
coopération amènent à mieux comprendre le sujet. Au
préalable, il convient, de définir la coopération
interrégionale, afin d'éviter les risques de confusion.

La coopération interrégionale est de nature
différente de la coopération décentralisée car elle
n'est valable que dans une relation de région à région et
non de région à commune par exemple. Ses relations n'impliquent
pas forcément un voisinage géographique, par conséquent le
partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis du Sénégal en est un
exemple.
Selon l'angle dans lequel il est employé, le concept de
coopération décentralisée est fluctuant.
En France, la coopération décentralisée
est définie, par le « Guide de la coopération
décentralisée : Echanges et partenariats internationaux des
collectivités territoriales », comme l'ensemble des relations
de coopération, d'aide au développement, de promotion à
l'étranger, d'amitié, d'assistance technique, d'aide humanitaire,
de gestion commune de biens et de services... qui lient des
collectivités territoriales françaises et leurs groupements
à leurs homologues étrangers. Ces relations naissent, entre
autres, de la volonté des élus territoriaux des deux
collectivités et sont formalisées par des conventions qui sont
validées, du côté français, avant leur signature par
l'assemblée délibérante.
Cependant, l'action extérieure des collectivités
françaises est encadrée juridiquement par la Loi d'Orientation du
6 février 1992 relative à l'administration territoriale de la
République (A.T.R.)1. Elle complète la loi sur les
droits et libertés des communes, des départements et des
régions du 2 mars 1982, qui autorisait la coopération en son
article 65. La coopération décentralisée est, ainsi,
homologuée, dans la limite des compétences des
collectivités locales et dans le respect des engagements internationaux
de la France. Par cette loi, l'Etat crée également la Commission
nationale de la coopération décentralisée (C.N.C.D.) dont
la mission est de contrôler l'action extérieure des
collectivités territoriales. En outre, cet ancrage juridique de la
coopération décentralisée a connu trois évolutions
plus récentes :
- La loi du 27 janvier 2005 (dite « Oudin - Santini
») stipule que les collectivités françaises responsables de
la production, de la distribution et de l'assainissement de l'eau peuvent faire
financer l'accès à l'eau de l'usager du Sud par l'usager du
Nord.
- La principale modification résulte de la loi du 2
février 2007 (dite « thiollière ». Elle libère
l'action extérieure des collectivités territoriales de
l'obligation de justifier un intérêt local. Cette loi
légalise simultanément les dons humanitaires d'urgence comme
unique exception à l'obligation de signature conventionnelle.
1 Sources : CNCD, MAE, Guide de la coopération
décentralisée : Echanges et partenariats internationaux des
collectivités locales, la documentation française, Paris, 2000

9
- Enfin, la loi du 16 avril 2008, calquée sur le
modèle des Groupement Locaux de Coopération
Transfrontalière (GECT), met le droit interne en conformité avec
le règlement communautaire du 5 juillet 2006. Avec ce nouvel outil
juridique, les collectivités françaises peuvent désormais
signer une convention directement avec un Etat de l'Union Européenne,
là où jusqu'ici un traité international était
nécessaire.
L'Etat français dispose, ainsi, d'un cadre juridique
avancé en matière de coopération
décentralisée et d'action extérieure des
collectivités territoriales. Ce qui est un gage supplémentaire
pour la région Rhône-Alpes dans sa coopération avec la
région de Saint-Louis du Sénégal.
Par " Coopération décentralisée " l'Union
européenne2 entend tout programme conçu et mis en
oeuvre dans un pays du Sud ou de l'Est par un acteur de la
société civile : ONG, pouvoirs publics locaux, coopérative
agricole, groupement féminin, syndicat, " de façon plus
générale toute forme organisée de la Société
civile ".
Une première remarque permet de constater, que
contrairement à l'UE, l'Etat français écarte de la
coopération décentralisée les relations pouvant exister
entre collectivités locales et des organismes tels les ONG,
Associations, etc. Par cette approche, l'Union Européenne opte pour une
uniformisation de l'idée de coopération
décentralisée dans tous ses Etats membres. Mais elle se heurte
à l'obstination des Etats membres soucieux de garder une certaine
autonomie à l'internationale.
Dans les années 1990, Les Etats africains, notamment le
Sénégal, sous l'égide des institutions de Bretton Woods
ont été, également, affectés par la fièvre
de généralisation de la décentralisation,
Ainsi, pour parachever l'édifice de la
décentralisation entamée depuis 1872 à Saint-Louis, l'Etat
sénégalais adopte, la régionalisation par les lois de
décentralisation (96-06 du 22 Mars 1996). Ces lois se
caractérisent par trois avancées fondamentales :
- La refonte du cadre institutionnel des collectivités
locales avec l'élaboration d'un nouveau code des collectivités
locales (CCL).
2 Sources : « Approche de l'Union
européenne en matière de coopération
décentralisée », CE, Direction Générale du
développement, Unité VIII-B2

10
- L'érection de la région jusque-là
simple circonscription administrative, en collectivité
décentralisée dotée d'une personnalité morale,
d'une autonomie financière relative et d'une assemblée
élue au suffrage universel.
- La consécration juridique de la coopération
décentralisée conformément à l'article 17 du CCL.
Il dispose que « Les collectivités locales peuvent, dans le
cadre de leurs compétences propres, entreprendre des actions de
coopération qui donnent lieu à des conventions avec les
collectivités locales de pays étrangers ou des organismes
internationaux publics ou privés de développement ».
Donc, cette réforme reconnait trois principes
fondamentaux: la libre administration des collectivités locales; le
principe de transfert des compétences et de leur compensation
financière; le principe de solidarité entre collectivités
et entre celles-ci et l'Etat. Néanmoins, la régionalisation
rencontre des difficultés inhérentes à l'insuffisance de
formation du personnel, à l'absence du système de
fiscalité locale et au manque de moyens techniques et humains.
Pour prendre la mesure de cette situation des
collectivités sénégalaises, l'ARD de Saint-Louis avait
organisé des ateliers les 14-15 Septembre 2004 afin de faire la
synthèse (ci-dessous) des forces, faiblesses et perspectives de la
décentralisation dans cette localité:
Forces
|
Faiblesses
|
Perspectives
|
- Réduction de la très forte
|
-Non maîtrise des compétences
|
- I. E. C
|
marginalisation des
|
transférées
|
- Réforme financière
|
populations rurales par la
|
- Absence de moyens
|
- Reforme du personnel
|
démocratie à la base ;
|
Financiers
|
|
- Le transfert de certaines
|
|
|
compétences aux élus locaux
|
|
|
- L'allégement de la tutelle et
|
|
|
du contrôle de l'Etat
|
|
|
Confrontées à des difficultés relatives
à l'absence de moyens financiers et de qualification du personnel, les
collectivités sénégalaises ont choisi la stratégie
de nouer des relations de jumelage avec les collectivités du Nord,
notamment leurs homologues français. Par conséquent, l'Etat
sénégalais à travers l'article 17 (ci-dessus) du CCL
reconnait juridiquement la coopération
décentralisée3. Conformément à cet
article, les collectivités peuvent signer des
3 Sources : Base de données de la DIRCOD
(Dakar)

conventions avec leurs homologues étrangers et avec des
organismes internationaux publics et privés.
L'Etat sénégalais va, ainsi, plus loin que son
homologue français en s'alignant sur les approches universalistes de
l'Union Européenne, des Nations-Unies, de l'USAID (son plus grand
bailleur) et de la Banque mondiale. Ce choix trouverait sa
légitimité dans la nécessité de laisser, les
entités locales, profiter des avantages financiers qu'offre la
coopération décentralisée. Cet universalisme introduit,
cependant, une logique de bureaucratisation et de dépendance croissante
vis-à-vis des bailleurs. Certes les moyens augmentent mais il y'a lieu
de se demander si cette donnée correspond à la souplesse
souhaitée dans le fonctionnement de la politique de coopération
décentralisée ?
Eu égard, cette différente de perception de la
coopération décentralisée entre la France et le
Sénégal, les collectivités françaises sont les
premiers interlocuteurs des collectivités sénégalaises.
Ces relations privilégiées sont dues à la bonne marche des
rapports bilatéraux diplomatiques franco-sénégalais. C'est
dans ce cadre, qu'il faudrait inscrire le partenariat entre la région
Rhône-Alpes (France) et la région de Saint-Louis du
Sénégal.
Saint-Louis du Sénégal a un passé
exceptionnel qui lui confère une renommée internationale.
Située au nord du Sénégal, son histoire se lie de
près à celle de la colonisation. Elle fut fondée en 1659
par Louis Caullier et baptisée en hommage au Roi de France, Louis IX,
sous la régence de Louis XIV. Vitrine française en Afrique
pendant deux siècles, Saint-Louis cumulait les fonctions de capitale des
colonies du Sénégal et de celle de l'AOF (Sénégal,
Mauritanie, Soudan, Guinée et Côte d'Ivoire), de 1895 à
1902. Elle était l'une des plus importantes villes d'Afrique, la plus
active politiquement et économiquement et la mieux urbanisée.
Capitale du Sénégal de 1872 à 1957, elle fut,
également, capitale de la Mauritanie de 1919 à 1958. A partir de
1916 les Saint-louisiens étaient citoyens français à part
entière (de même que les habitants de Gorée, Dakar et
Rufisque). C'est pendant les indépendances que Saint-Louis perd son
influence au profit de Dakar. Mais grâce à son patrimoine
historique et architectural, elle reste la première ville historique du
pays. Par conséquent elle a été classée, en 2000,
patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco.
Cependant, la loi 2002-02 du 15 février 2002, modifiant
la loi 72-02 relative à l'administration
territoriale, donne à
la région son organisation actuelle. D'abord elle perd le
département de
Matam érigé en région. Ensuite
Saint-Louis et l'arrondissement de Rao sont réunis pour

12
former le nouveau département de Saint-Louis. Depuis cette
date, le conseil régional administre 3 départements
(Dagana-Podor-Saint-Louis).
Malgré le déclin de ses fonctions
politico-administratives et économiques, la population de la
Région de Saint-Louis est estimée à 802.858
habitants4, en 2007.
La majorité de la population est d'origine rurale. La
commune de Saint-Louis concentre à elle seule 60,4% de la population
urbaine de la région. Hormis le département de Saint-Louis
constitué de sa commune et de l'arrondissement de Rao, les autres
départements de la région sont à majorité rurale et
ce malgré l'érection de certaines localités en commune.
La région de Saint-Louis abrite des ressortissants de
tous les groupes ethniques du Sénégal et de la sous-région
en plus de quelques étrangers d'origine africaine et européenne.
Ils sont composées de : Pulaar (48,1%), Wolofs (43.4%), Maures (4.8%),
Soninkés (1.4%), Sérères (0.9%), autres (1.4%). Une
majorité de musulmans (98.6%), chrétiens (0.4%), autres (1%)
Cette population est caractérisée par sa jeunesse.
72,5% des habitants ont moins de 30 ans.
La région de Saint-Louis dispose de tous les ordres
d'enseignement, de la maternelle au supérieur avec notamment
l'implantation de l'université Gaston Berger.
Les indicateurs de santé montrent qu'un un nombre
important d'infrastructures de santé pour la prise en charge des soins
de santé primaires (case de santé et poste de santé) sont
présents à Saint-Louis.
L'ESPS réalisée en 2005 démontre que
l'emploi des jeunes constitue une préoccupation majeure des
ménages de la région de Saint-Louis.
Il résulte de cette enquête que les secteurs
primaire et tertiaire emploient le plus d'actifs dans la région de
Saint-Louis.
Le secteur secondaire reste par contre peu
développé dans la région. L'agriculture, l'élevage
et la forêt enregistrent 44,0% des actifs occupés de la
région. Ce taux cache, cependant, des disparités importantes
entre les départements, car 59,1% travaillent dans le département
de Podor.
Le secteur du commerce vient après le secteur agricole en
employant ainsi 20,7% du total des actifs de la région mais 42,1%
évoluent dans le département de Saint-Louis.
4 Sources : ANDS, Situation économique et
sociale de la région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008

En outre, les secteurs qui emploient le plus de main d'oeuvre
sont pour plus de la majorité dans l'informel. Les activités
économiques de la région concernent principalement quatre
secteurs :
- Avec la présence de grosses unités
agro-industrielles (CSS, SOCAS, Agroline) et de société
d'exportation de produits agricoles (GDS), le secteur agricole emploie 44% de
la population active, selon l'enquête pauvreté
réalisée en 2005-2006. D'où la nécessité de
renforcer la place de l'agriculture dans la stratégie de
réduction de la pauvreté.
-L'élevage est un secteur aussi important que
l'agriculture pour la région de Saint-Louis où il occupe une part
conséquente de la population active. Les potentialités sont
énormes et peu exploitées. Mais le secteur est en train de se
moderniser timidement à travers certaines initiatives notamment la
création de fermes modernes.
-La pêche figure parmi les plus importants secteurs
économiques de la région de Saint-Louis. A cause de l'ouverture
à la mer et au fleuve Sénégal. Ainsi la population
évoluant dans ce secteur est estimée à 5,5% du total dont
les 87% sont dans le département de Saint-Louis.
-La région de Saint-Louis, riche en patrimoine culturel
et historique, est dotée en parcs, réserves naturelles (parc
national de Djoudj, parc national de la langue de Barbarie et la réserve
spéciale de la faune de Gueumbeul) et rendez vous internationaux tel que
le festival de Jazz. Le dynamisme de ce secteur entraîne la
création d'emplois supplémentaires et le développement du
secteur de l'artisanat et devrait être inclus dans la stratégie de
réduction de la pauvreté.
Les résultats de l'enquête de suivi de la
pauvreté (ESPS)5 au Sénégal de 2005/2006 ont
montré l'existence d'une forte corrélation entre le niveau
d'instruction et le niveau de pauvreté. Par ailleurs même si les
infrastructures de santé consacrées aux soins d'assistance de
base respectent les normes de l'OMS, il est à noter que les deux
hôpitaux sont insuffisants pour les 800 milles habitants de la
région de Saint-Louis. La jeunesse de la population associée aux
fortes pressions qu'exercent les services sociaux de base sur les ressources
des collectivités locales constituent des facteurs explicatifs de la
complexité du problème de l'emploi. En effet avec une proportion
importante de jeunes, la problématique de l'emploi s'y pose avec
acuité.
5 Sources : ANDS, Situation économique et
sociale de la région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008

14
Ainsi Saint-Louis, métropole d'équilibre doit
fournir à son hinterland les services et fonctions économiques,
administratifs, socio-éducatifs, sanitaires et culturels pérennes
qu'il est en droit d'attendre d'elle. Toutefois, elle ne dispose pas de fons
propres et les moyens financiers alloués par l'Etat, à travers le
FDD et le FECL, sont insuffisants. Ce qui ruine de fait les espoirs d'impulser
un développement régional performant. Afin de s'acquitter de
cette lourde mission de service public et réaliser un
développement équilibré de sa région, le Conseil
Régional de Saint-Louis s'est doté d'un vaste réseau de
coopération décentralisée. A ce titre, les liens
historiques avec la France lui ont permis de nouer des relations de
partenariats avec la région Rhône-Alpes, depuis 1997.
Située au Sud-est de la France, la région
Rhône-Alpes est très ouverte sur le monde. La région
bénéficie d'une population plus jeune que la moyenne nationale et
de migrations importantes de populations. D'une superficie de 43.698
Km2 et une population de 6.005.000 personnes, elle est la seconde
région française économique et démographique
après l'Île-de-France. Cette région intègre 25
arrondissements et 335 cantons. On y compte, également, 8
départements et 2.879 communes. Par conséquent, le Conseil
régional administre les départements de l'Ain, l'Ardèche,
la Drôme, la Haute Savoie, l'Isère, la Loire, le Rhône et la
Savoie. Même en Europe, Rhône-Alpes recèle les
données de certains États : même superficie que la Suisse
et population égale à celle de la Finlande. C'est une grande
région européenne qui recèle d'immenses
potentialités. Ainsi le Conseil régional interpellé par la
fracture économique qui oppose le monde des riches et le monde des
pauvres -source de conflits, d'instabilité, de migrations d'importantes
populations dans sa région- promeut le partage des richesses et du
développement à l'échelle de la planète. Avec 10
millions d'euros affectés sur cette ligne budgétaire en 2006, la
région Rhône-Alpes possède le premier budget d'aide au
développement des collectivités françaises, sur fonds
propres.
Pour avoir pratiqué la décentralisation pendant,
au moins, une décennie avant les Etats africains, Rhône-Alpes
dispose d'un savoir faire confirmé dans le domaine de la gouvernance
locale et de l'ingénierie urbaine. Elle inscrit, donc, son action
extérieure dans une logique de renforcement de l'action publique locale
de ses collectivités partenaires. L'objectif étant d'aider les
pays du Sud à réussir leur décentralisation, rapprocher la
prise de décision du citoyen et l'inscrire dans un processus
démocratique progressif. Afin de matérialiser ses engagements, la
région Rhône-Alpes a noué des relations de
coopération décentralisée avec dix sept (17)
régions étrangères, dont Saint-Louis du
Sénégal.

Cet engouement de la région Rhône-Alpes pour la
coopération décentralisée pousse, cependant, à
s'interroger sur ses véritables buts. Sachant que les acteurs locaux du
Nord ne sont pas facilement mobilisables, malgré leur promptitude
à financer les aides ponctuelles au coup par coup. Y aurait-il de la
réciprocité pour ses acteurs ou est-ce une volonté
déguisée de conquérir de nouveaux territoires ?
Par ailleurs, bien que l'ossature de la coopération
décentralisée a été revue et corrigée par
les recompositions institutionnelles, comment justifier qu'on retrouve, peu ou
prou, les mêmes types de réalisations. Est-ce que les discours
philanthropiques de solidarité Nord-Sud reflètent les
véritables enjeux de la coopération décentralisée
?
Les rumeurs de lourdeurs bureaucratiques, la
multiplicité des acteurs et l'opacité des rôles exacerbent
l'image de la coopération décentralisée. Qui sont ces
acteurs ? Dans quelle mesure leur présence impacte sur la
coopération? Comment est-ce qu'ils interagissent ?
Les collectivités du nord délèguent, dans
bien des cas, l'exécution de leurs projets à des
opérateurs, ONG ou professionnels du développement. Quels sont
les axes prioritaires mis en oeuvre à Saint-Louis ? Et comment les
pouvoirs locaux et les Etats essayent de s'adapter face à cette
pluralité d'acteurs et ces dispositifs multi niveaux ?
Si la finalité optimale de la coopération est de
rendre opérationnelle la décentralisation au Sud. Dans quel
cadre, Rhône-Alpes peut aider la région de Saint-Louis à
agir en tant qu'institution publique fiable et performante?
Dans un premier temps, on présentera les enjeux et les
acteurs du partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis. L'occasion de retracer
la dynamique constructive dudit partenariat. Deuxièmement, on analysera
les thématiques privilégiées dans la mise en oeuvre des
projets et leurs finalités réelles. Tout en explorant la variable
du renforcement des capacités de Saint-Louis. Sachant que c'est l'un des
axes qui pourraient permettre aux élus locaux du Sud de renouer avec la
confiance de leurs administrés.
L'originalité de ce travail réside dans sa
vocation à utiliser les différentes matières et
méthodes d'analyses des sciences sociales. Ceci en accordant une
attention particulière aux travaux de science politique et, dans une
moindre mesure, à la littérature administrative. Par
conséquent les données théoriques ont été
croisées avec les informations tirées des investigations
empiriques, composées généralement d'entretiens et
d'interactions avec les acteurs du partenariat Rhône-Alpes/ Saint-Louis
du Sénégal.

16
Les informations théoriques relatives à cette
étude ont nécessité le concours de différentes
sources. Dans un premier temps, il s'est agit de dépouiller les
archives, les documents administratifs, les rapports d'activités et les
comptes rendus de rencontres sur la coopération
décentralisée, disponibles dans les bases de données des
structures en charge dont (RESACOOP, les Conseils régionaux de
Saint-Louis et de Rhône-Alpes, le SCAC et la DIRCOD).
Deuxièmement, les lectures d'ouvrages spécialisés ont
permis d'examiner les différentes approches de la coopération
décentralisée (notamment ceux de Petiteville intitulé
« Les collectivités locales dans la coopération Nord-Sud,
publié en 1996 », et d'Alain Marie « La coopération
décentralisée et ses paradoxes. Dérives bureaucratiques et
notabilières du développement en Afrique », sorti en 2005).
Enfin pour compléter cette revue de la littérature, les articles
de Bernard Husson dont : « la coopération
décentralisée et le renforcement institutionnel une dynamique
à construire » (2007), entre autres, nous ont proposé une
approche alternative au manque d'efficacité des projets
réalités. En outre, certains articles de presse, ont
été utilisés dans une démarche d'évaluation
et de transversalité des opinions.
Le travail de terrain consistait, au préalable,
à effectuer un stage au Conseil régional de Saint-Louis,
après accord du Secrétaire général M. Amath Dia.
L'objectif initial étant de faire une observation sur place, à
chaud, avec le souci de conserver une certaine objectivité. Mais durant
cet exercice au Conseil régional de Saint-Louis (à partir du 06
Avril 2009), il a fallu surmonter le déficit de supports documentaires
et d'échanges avec les acteurs locaux. Non seulement, il n'y a pas de
service technique chargé de la coopération
décentralisée, mais les acteurs n'étaient pas disponibles
car l'organe délibératif du Conseil régional devait se
réunir pour choisir le nouveau Président ou confirmer l'ancien,
suite aux résultats des élections locales de Mars 2009.
Par ailleurs, les documents étaient
éparpillés entre plusieurs services, dont le Secrétariat
général et la gestion des affaires administratives. Ainsi entre
problèmes d'archivages, par-ci, et absence de mise à jour des
documents, par-là, des changements d'ordre méthodologique ont
été opérés. En effet pour sortir de cette impasse,
M. Amath Dia Secrétaire général du Conseil régional
de Saint-Louis et M. Babacar Faye, chargé des affaires administratives
du Conseil régional de Saint-Louis, ont suggéré d'entrer
en contact avec M. Bouna Warr (Directeur de l'Ard de Saint-Louis), M. Adama Sow
(Coordonnateur permanent de Rhône-Alpes à Saint-Louis) et les
responsables de l'association le Partenariat (ONG opérateur permanent du
partenariat Saint-Louis/ Nord Pas de Calais). Ces acteurs locaux
présents à Saint-Louis, ainsi

que les acteurs nationaux rencontrés durant les
enquêtes à Dakar, nous ont accordé des entretiens, fourni
des documents et prodigué des conseils (cf. annexe : liste des
entretiens).
Après le dépouillement de tous ces documents
confondus, ce travail a été marqué par trois principaux
spécialistes. Les raisons et les résultats de cette
sélection sont suivants :
- Petiteville (Maître de Conférences en Science
politique à l'Université de Paris V et à l'IEP de Paris)
propose dans son livre6, réalisé à partir de
ses travaux de doctorat, en 1995, une analyse pionnière de cette forme
nouvelle de coopération. Cet ouvrage révèle la
diversité des pratiques et des motivations qui se nouent sur le terrain,
contrairement à l'homogénéité des idées.
Sans oublier la dimension encore largement expérimentale de cette forme
de coopération, Petiteville dépasse la représentation
folklorique et désuète qui reste encore attachée à
cette coopération décentralisée de la première
heure. Par conséquent, il donne à voir comment par touches
successives a pu se constituer un véritable réseau
franco-africain de coopération municipale. Mais notre travail ne devrait
s'y attarder qu'accessoirement, car les recompositions institutionnelles,
notamment en 1996 au Sénégal, ont catégoriquement
modifié la coopération décentralisée
franco-africaine, à cause de la présence de nouveaux acteurs.
- Alain Marie (Sociologue Maître de conférences
à l'Université Paris 1), à partir d'une série
d'études cas (douze au total) dans 4 pays d'Afrique dont le
Sénégal, se situe dans une approche socio-anthropologique. Dans
un chapitre de son ouvrage7 intitulé, « De l'aide
hétéroclite au développement local, l'épreuve des
réalités », il analyse les paradoxes de la
coopération Nord-Sud : projets éparpillés, intervenants
multiples et bureaucratisation des dispositifs. Néanmoins, pour ce
dernier le développement local a une finalité positive bien
qu'elle doit surmonter deux écueils : la notabilisation, entre
élites modernes et traditionnelles pour s'approprier les ressources, et
la bureaucratisation qui alourdie les procédures et diminue les
financements. Donc, Alain Marie pointe du doigt les vrais obstacles à
surmonter, sans s'inscrire dans une démarche de restructuration
catégorique, partagée par plusieurs observateurs dont Bernard
Husson, économiste et professeur au CIEDEL de Lyon.
- Cette étude entre, donc, dans la filiation de Bernard
Husson qui promeut l'idée d'un renforcement institutionnel des
collectivités locales du Sud. Dans plusieurs articles et
6 F. Petiteville, La coopération
décentralisée : les collectivités locales dans la
coopération Nord-Sud, Paris Harmattan, 1996.
7 A. Marie, La coopération
décentralisée et ses paradoxes. Dérives bureaucratiques et
notabilières du développement local en Afrique, Paris, Karthala,
2005.

18
publications parmi lesquels : « La coopération
décentralisée et le renforcement institutionnel : une
démarche à construire » (, Mai 2007), il s'inscrit sur une
démarche de changement. Pour Husson, le contenu de la coopération
décentralisée ne peut être séparé de ses
modalités de mises en oeuvre. Il appelle les collectivités
françaises, notamment la région Rhône-Alpes, à
intervenir en priorité sur la responsabilisation de leurs partenaires du
Sud par la formation du personnel, la mise en place de fonds locaux propres, le
renforcement de l'information entre les élus et la population et par le
renforcement des capacités de maîtrise d'ouvrage des acteurs. Par
conséquent, les axes d'interventions préconisés par ce
dernier constituent l'avenir de la coopération
décentralisée s'ils s'inscrivent sur la même dynamique que
les collectivités françaises en partenariat avec leurs homologues
du Sud.
Tout en empruntant aux spécialistes de la question les
conclusions de leurs travaux, l'objectif de cette étude est d'analyser
la coopération décentralisée à partir d'une
étude de cas, à savoir le partenariat Rhône-Alpes et
Saint-Louis du Sénégal. Il s'agit, également, de mettre en
évidence le cheminement conceptuel et organisationnel des projets de
coopération décentralisée, les axes d'interventions
privilégiés des acteurs et leurs dynamiques au regard des
objectifs visés et des finalités réelles des projets
notamment en termes d'appui institutionnel au gouvernement local de la
région de Saint-Louis.

PARTIE1- Enjeux et Acteurs de la coopération
décentralisée
1.A. Les enjeux de la coopération Nord-Sud
Depuis les années 1970, la coopération pour le
développement intervient dans les domaines de compétences des
collectivités locales. C'est l'une des raisons pour laquelle l'Union des
Villes Africaines lors de sa rencontre du 25 et 26 janvier, demande que la
coopération décentralisée soit reconnue comme une
catégorie pertinente de la coopération internationale. Auparavant
une enquête réalisée par le Programme de
Développement Municipal (PDM) dans huit pays d'Afrique de l'Ouest et du
centre, révélait une progression de 10 à 100, en six ans
(1989-1994), des accords de partenariat conclus par les collectivités
locales africaines. Des mutuels d'épargne et de crédits à
la réfection des équipements de maisons communautaires, de foyers
des jeunes et divers programmes de renforcement de capacité, en passant,
par le joyau d'un nouveau lycée, que n'a-t-on pas observé comme
fruit de cette coopération décentralisée. A l'occasion du
sommet franco-africain de 1990, le Président Mitterrand invitait ses
paires à oeuvrer pour la démocratisation des États
africains, il donna un principe général d'avenir à la
coopération décentralisée. Les collectivités
françaises étant exhortées, ainsi, à soutenir les
efforts de démocratisation et l'émergence de nouveaux acteurs et
partenaires en dehors de la sphère étatique. Cette
évolution n'est, tout de même, pas ex-nihilo puis qu'elle survient
dans un contexte particulier des années 1980-1990: mesures de
libéralisation et retrait des Etats accompagnés par les plans
d'ajustement structurels sous l'égide des institutions
financières internationales. L'échec du développement
administré par les Etats et les rumeurs de détournement de la
manne financière internationale par les classes dirigeantes finissent
par faire admettre l'idée d'une gouvernance à la base. La loi
d'orientation du 06 Février 1992, va alors sacrer l'ère du «
small is beautiful »8 (E. F. Schumacher) en conférant
aux collectivités locales françaises une relative autonomie
à l'action internationale.
1.A.1. La coopération décentralisée : une
politique de captation des ressources pour le développement local de
Saint-Louis
8 Le « small is beautifull est le titre d'une
collection d'essais de l'économiste britannique E. F. Schumacher. Avec
la crise de l'énergie en 1973 et l'émergence du tiers monde,
c'était l'un des dix livres les plus influents depuis la fin de la
Seconde guerre mondiale et le premier à promouvoir l'idée d'un
développement durable.

20
Au Sénégal, la situation des
collectivités locales découlent de la combinaison de plusieurs
facteurs. Suite aux lois de décentralisation survenues en 1996, l'Etat a
transféré aux collectivités locales, neufs domaines de
compétences9 (domaines ; environnement et gestion des
ressources naturelles ; santé, population et action sociale ; jeunesse,
sports et loisirs ; culture ; éducation ; planification ;
aménagement du territoire ; urbanisme et habitat). Afin de compenser les
charges induites par les compétences transférées, l'Etat
sénégalais avait prévu des moyens d'interventions et des
ressources financières conséquentes. Il s'avère que les
fonds de concours alloués par celui-ci demeurent très
insuffisants. En effet, les fonds de dotations de la décentralisation et
d'équipement des collectivités sont faibles et les régions
n'ont pas de fiscalité propre. Dans ces conditions la
décentralisation ne peut être effective, elle n'existe que dans
les textes et les charges qui se sont rajoutées aux compétences
générales (le budget, la gestion du personnel, l'économie
etc.) des collectivités locales.
Afin d'apprécier la gravité de cette situation,
la région de Saint-Louis a commandité, en 2005, un audit des
compétences transférées. Il ressort de cet audit qu'il
existe un gap profond entre les ressources financières disponibles et
les besoins à prendre en charge. Ce fossé est d'autant plus
profond que le budget de la région, nécessaire pour une
couverture correcte des besoins de gestion des compétences dans toutes
leurs dimensions, est estimé à 7.125.039.625 FCFA contre 861
millions actuellement. La comparaison des deux situations montre que le budget
actuel ne représente que 12% des besoins évalués soit un
déficit correspondant à l'ordre de 88%. Les résultats de
cet audit montrent que si on évalue les transferts financiers entre
Fonds de Dotation à la Décentralisation et Fonds de Concours,
dans une perspective de couverture des besoins, les contributions seraient
portées aux niveaux suivants :
· Fonds de Dotation à la Décentralisation
(73% des transferts): 4.165.298.165 FCFA et
· Fonds de Concours (27% des transferts). 1.463.483.189
FCFA ».
Tableaux 2 et 3: Évolution de la
répartition du fonds de dotation et du fonds d'équipement de
Saint-Louis entre 1997 et 2000:
? Fonds de dotation de la région de
Saint-Louis
Années
|
1997
|
|
1998
|
|
1999
|
|
2000
|
|
Montant en Fcfa
|
502 227
|
423
|
502 227
|
423
|
588 835
|
889
|
628 668
|
188
|
? Fonds d'équipement des collectivités
locales de Saint-Louis
9 Sources : Base de données de la DIRCOD
(Dakar)
Années
|
1997
|
|
1998
|
|
1999
|
|
2000
|
|
Montant en Fcfa
|
61 636
|
400
|
72 631
|
400
|
73 000
|
000
|
66 910
|
000
|
Sources: DCL/CAD
Tableau 4: répartition par collectivité
entre 1999 et 2000 en Milliards de Fcfa
Collectivités
|
Dotation en 1999
|
%
|
Dotation en 2000
|
Régions
|
3 548 785 225
|
61
|
3 980 481 164
|
Communes
|
2 020 264 365
|
35
|
2 121 830 914
|
Communautés rurales
|
222 292 666
|
4
|
242 494 962
|
Totaux
|
5 791 342 256
|
100
|
6 062 374 040
|
Sources: CNDCL/MINT 26 Janvier 2000
Figure 1: répartition de l'enveloppe du FDD entre
1999 et 2000
|
|
|
|
Régions
communes communautés rurales
|
|
|
4000000000
3500000000
3000000000
2500000000
2000000000
1500000000
1000000000
500000000
0

FDD en % FDD en
1999 2000
L'analyse de ces données fait ressortir l'existence
d'une inégalité de considération entre les régions
d'une part et d'autre part les communes et communautés rurales. Pourtant
dans les textes aucune hiérarchie, entre entités
sénégalaises, n'est reconnue. Les régions sortent leur
épingle du jeu. Ce qui laisse penser que les élus locaux ne
disposent pas des mêmes ressources pendant la négociation du
budget avec l'Etat central. Les communautés rurales qui hébergent
56 % de la population ont, en matière d'éducation et de
santé notamment, des charges tout à fait comparables aux
communes. Pendant que ces dernières touchent environ 35 % du FDD. Cette
situation peut trouver une réponse dans le fait que les élus
à la tête d'une région ou d'une commune ne disposent pas du
même capital humain que les présidents des communautés
rurales qui ont un taux d'analphabétisme plus élevé que
leurs homologues.
Par conséquent, ils n'ont pas les mêmes
réseaux, ni les mêmes représentations au niveau des
conseils délibératifs et des instances de validation du budget. A
ce propos le budget de la

22
région de Saint-Louis est choisi par le conseil
exécutif du Conseil régional, voté par l'organe
délibératif et validé par le représentant
étatique en la personne du gouverneur de la région.
Globalement, l'enveloppe du FDD n'a cessé de
croître depuis sa création. Elle est passée de 4,9
milliards en 1997 à près de 12 milliards en 2004, mais reste
toujours très insuffisante (2.5 % du budget national) et très
inégalement répartie. Entre 1997 et 2003, la
part du FDD allouée aux Communautés Rurales ne représente
que 6 % du total du FDD soit moins de 3 milliards de FCFA cumulé sur 6
années. (M. Chassot, 2005)
Une étude10 financée dans le cadre du
PADDEL11 révèle que durant ces années (1997
à 2003), les conseils régionaux ont reçu, en moyenne, 53 %
de l'enveloppe globale. Cependant, il faut souligner que jusqu'en 2000,
l'enveloppe attribuée aux Conseils Régionaux comprenait la
dotation des ARD (agences régionales de développement). Ce n'est
qu'en 2001, que leurs allocations ont été
individualisées.
En tant que cadre de programmation et de coordination des
actions de développement, la région de Saint-louis ne dispose pas
de fiscalité propre et reste entièrement dépendante des
allocations de l'Etat. La paierie régionale n'a pas les moyens
techniques et humains de recouvrer la totalité des impôts. A ce
niveau, deux explications s'imposent. D'abord en 1996, l'Etat n'a pas
osé augmenter les impôts afin que les collectivités locales
qui venaient de se voir transférées des compétences
nouvelles et financièrement coûteuses puissent accroître
leur trésorerie. Ensuite, non content de compenser financièrement
les charges induites par la régionalisation, aux allures de «
désengagement », l'Etat fait valoir un principe d'unicité de
caisse. Par conséquent il y a un concours de circonstances dont la
pénurie des moyens financiers, le manque de qualification du personnel
des services de perception, l'absence chronique de moyens matériels,
techniques et humains et la faible organisation des conseils en tant qu'organe
délibérant de la collectivité locale. Il n'est pas
étonnant, dans ces conditions, de rencontrer des élus locaux qui
ne soient pas en phase avec textes de la décentralisation. Donc
ignorant, naturellement, leur rôle et le fonctionnement des
collectivités locales.
10 Sources : Ministère de l'intérieur et
des collectivités locales, Conseil national des collectivités
locales, 2003
11 Le programme d'appui à la
décentralisation et au développement local du
Sénégal est financé par la coopération
française. Entre autres activités, le PADDEL a commandité
l'élaboration d'un manuel de procédures des contrôles de
légalité et budgétaires du Sénégal. Son
objectif principal est d'adapter la décentralisation et l'appui aux
collectivités locales aux politiques locales de développement.

Afin de mieux appréhender cette réalité,
une étude effectuée par la Cellule d'appui des Elus locaux de la
MEL12, en 1999, révèle que plus d'un tiers des
élus est analphabète (ce pourcentage ne concerne bien
évidemment que l'école française). En
effet, les niveaux d'instruction sont très variables. Selon la position
occupée : 80 % des maires et des conseillers régionaux ont un
niveau d'instruction qui va du secondaire au supérieur alors que 73% des
présidents de communautés rurales n'ont pas dépassé
le primaire. Ce fossé s'explique en partie par l'obligation
légale pour les conseillers régionaux et les conseillers
municipaux de savoir lire et écrire, d'autant qu'ils doivent relever des
défis importants. Mais la même exigence devrait être
adressée aux conseillers ruraux, si l'on sait qu'à Saint-Louis la
majorité de la population est d'origine rurale. Le taux d'urbanisation
représente 37% du total régional, ce qui est en
deçà du taux national de 40,7%, selon le RGPH13 de
2002. Il est donc d'autant plus crucial que les communautés rurales
puissent se reposer sur un personnel compétent indépendamment des
services de l'Etat. L'explication viendrait du contexte même de ces
communautés rurales. Elles sont constituées par regroupement de
villages dont les chefs sont choisis par consensus et nommés par
décret. Donc à l'image des chefs de village, l'activité
politique dans ces localités n'est pas mue par des modes de prise du
pouvoir « modernes ». Le président de la communauté
rurale n'est pas choisie à cause de son savoir faire managérial,
son niveau d'étude ou son programme de campagne mais par ce qu'il fait
preuve d'un dévouement d'ordre moral pour la défense des
intérêts de toute sa communauté ou qu'il est issu d'une
famille traditionnelle de notabilités ou de dignitaires religieux. Sa
légitimité relève de considérations d'ordre
traditionnelle ou charismatique et non d'une légitimité
légale rationnelle au sens wébérien du terme.
Pour lutter contre ce fléau des personnels non
qualifiés, les collectivités pouvaient s'appuyer sur les services
déconcentrés de l'Etat (sous employés) dans le cadre de
convention de mise à disposition, jusqu'en 2001 (Chassot, 2005). Par
ailleurs, non contents de rendre les collectivités très
dépendantes de l'Etat, ces personnels administratifs
déconcentrés considéraient les élus locaux comme
des «politiciens analphabètes». Il va s'en dire que leur
collaboration s'en est très vite ressentie. Malgré le recrutement
de 320 secrétaires communaux en 2002 puis la création (par
décret 98-399) des Agences Régionales de Développement
(ARD) les collectivités locales sont continuellement sous
administrées. Par exemple les
12 La Maison des élus locaux est le
siège de l'UAEL (Union pour l'association des élus locaux du
Sénégal). C'est une association à but non lucratif qui
regroupe l'Association des Maires du Sénégal (AMS),
créée en 1958, l'Association de président de Conseils
régionaux (APCR) et l'Association nationale des conseils ruraux du
Sénégal. Son rôle est de favoriser le dialogue entre les
élus, l'Etat, la population et les partenaires au
développement.

24
conseil régional de Saint-Louis n'est toujours pas
parvenus à développer son propre service technique sous le
prétexte qu'il dispose très facilement (pour des raisons de
proximité sans doute) des agents déconcentrés de l'Etat et
des techniciens de l'ARD.
Ces contraintes majeures de la région de Saint-Louis
constituent des défis non négligeables à relever pour la
région Rhône-Alpes. Par conséquent, la coopération
décentralisée s'inscrit dans une dynamique d'appui à la
planification des secteurs d'activités transférées et
même au delà. Ces activités tournent autour de l'appui
conseil, la formation, l'information, la planification, la communication, la
maîtrise d'ouvrage etc.
Devant la nécessité de répondre aux
demandes sociales pressantes, le Conseil Régional de Saint-Louis
entretient des relations privilégiées de partenariat avec les
régions françaises du Nord Pas de Calais (France) depuis 1997, de
Rhône-Alpes (France) depuis fin 1997, de Midi Pyrénées
(France) depuis 2000 et le Conseil Général du Nord (France)
depuis 2005.
Cette situation n'a rien de particulier car le
Sénégal est l'un des pays qui tirent le plus de
bénéfices des relations que les collectivités locales
territoriales françaises entretiennent avec leurs homologues
étrangers. En Afrique de l'Ouest, c'est le 3ème pays
après le Mali et le Burkina sur le plan quantitatif des projets
réalisés à travers l'aide française au
développement et le 1er sur le plan des allocations
financières. Les propos de Didier BRET chef du SCAC14
(services de coopération et d'action culturelle de l'ambassade de France
à Dakar) décrivent parfaitement cette relation. D'après ce
dernier, au Sénégal, en 2006, on pouvait compter 150 partenariats
entre collectivités françaises et sénégalaises dont
une cinquantaine véritablement active. Cette relation
privilégiée profite bien à la région de Saint-Louis
en tant que leader dans le domaine de la coopération
décentralisée, au Sénégal. La coopération
décentralisée entre Rhône-Alpes et Saint-Louis est donc
« un étage du jeu diplomatique » (Vion et Négrier,
2002) franco-sénégalais.
En outre, rien que pour la seule année 2005, le Conseil
régional de Saint-Louis a obtenu
auprès de ses partenaires de
la coopération décentralisée, le financement de dix huit
(18)
13 ANDS, Situation économique et sociale de la
région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008

projets15 pour un montant d'un milliard cinq cent
soixante trois millions de francs CFA. Sur ce montant les partenaires sont
concernés pour 1,381 milliard soit 88% et la Région de
Saint-Louis pour 182 millions soit 12%. Alors que les programmes nationaux ne
mettent que la maigre somme de cinquante (50) Millions de francs CFA pour le
développement local, le Conseil régional de Saint-Louis tire,
d'après les chiffres de 2005, de la coopération
décentralisée près du triple de sa dotation annuelle et
multiplie ainsi par vingt deux (22) son budget d'investissement. Il peut
réaliser alors en cinq ans, ce qu'il serait amené à faire
en environ 100 ans, s'il s'en tenait uniquement à la dotation de l'Etat.
Même quand on prend le budget de fonctionnement, la coopération
décentralisée représente trois (3) fois le budget de la
région de Saint-Louis. Elle trouve donc un principal fondement dans son
apport financier au Sud. Par ailleurs, lors des comités mixtes qui se
sont tenus en France du 24 Septembre au 06 Octobre 2007 avec ses partenaires
français (principalement Nord pas de calais, Midi-Pyrénées
et Rhône-Alpes), la région de Saint-Louis a décroché
le financement global de presque de 3 Milliards de FCFA (2.950.000.000 FCFA)
durant 2008- 2011, pour la mise en oeuvre de projets de grande envergure.
Cette focalisation financière à outrance
symbolise à elle seule tout l'enjeu qu'ont les collectivités du
Sud à nouer des liens de coopération avec celles du Nord.
Pourtant il semble clair aux yeux des professionnels et observateurs que les
collectivités du Sud gagneraient en renforçant leurs
capacités d'administration et de gestion des politiques locales de
développement.
Afin de mieux situer les rôles, on peut se demander quels
sont les gains pour la région RhôneAlpes ?
1.A.2. La solidarité internationale : une politique
d'ouverture bien ancrée dans la région Rhône-Alpes
Un volontaire de l'AFVP en mission dans le cadre du partenariat
ARDL-PACA-Tambacounda
du Sénégal rapporte: « Quand je
discute avec les habitants [enfin, ce ne sont plus d'antonymes
et
fantomatiques acteurs!], ils me demandent pourquoi les partenaires du Nord se
sont lancés
14 Le service de coopération et d'action
culturelle de l'ambassade de France à Dakar a en charge l'action
culturelle de la coopération franco-sénégalaise. Le SCAC
met à disposition l'expertise de la coopération française
et contribue à la réalisation des projets et programmes des
acteurs Non gouvernement au Sénégal .
15 Sources : Rapport d'activités du Conseil
régional de Saint-Louis, en 2005,

26
dans cette aventure, ce qu'ils en attendent [l'une des vraies
questions, de fond en effet celle qui pose la question des principes de
l'action] (...) ». (A. Marie, 2005)
Ces propos posent la question des vrais motifs de l'action
extérieure des collectivités françaises.
En France, l'ouverture extérieure des
collectivités locales est très souvent utilisée par les
élus comme moyen d'impliquer les jeunes dans une région. A ce
titre, la coopération décentralisée est un outil de
développement mis au service de la citoyenneté en
Rhône-Alpes. C'est également l'occasion de remettre en question
leur propre système de gouvernance locale. Par exemple la
création des comités locaux en pays viennois pourrait provenir
des plans de développement des quartiers mis en oeuvre dans le
département de Bignona (au Sud du Sénégal). Si tel est le
cas, Bignona serait allé plus loin que le pays viennois dans la mise en
place de dispositifs participatifs.
Ainsi afin de renforcer sa communication avec les jeunes, la
région Rhône-Alpes compte sur l'éducation au
développement. Ce secteur a été dynamisé
grâce à l'ouverture extérieure de la région. C'est
la raison pour laquelle des voyages sont souvent effectués à
Saint-Louis par des lycéens ou étudiants afin de terminer leur
cycle d'éducation au développement. Les expériences de la
région de Saint-Louis dans la lutte contre la pauvreté, sont
à ce titre une ressource inestimable pour la mobilisation de la jeunesse
Rhône-alpine. Depuis 2003, 4 voyages d'étude ont été
effectués à Saint-Louis dans le cadre du partenariat entre la
Fédération des Alpages de Lisère et la Maison des
éleveurs de Saint-Louis, par des élèves et leurs
encadreurs. Bien souvent, c'est pour clore un module d'éducation au
développement, mais ces interactions renforcent le degré de
connaissance de la société Saint-Louisienne par la région
Rhône-Alpes.
A présent, avec dix sept (17) coopérations dans
le monde la région Rhône-Alpes a multiplié son influence,
ses réseaux de relations et dispose d'un panorama de territoires
à explorer pour ses entreprises et industriels. M. Amath DIA
secrétaire général du Conseil Régional de
Saint-Louis soulignait à cet égard que « Travailler pour
le développement local du Sud c'est un bénéfice, car
nonobstant l'apport d'expérience humaine, les jeunes et les
désoeuvrés de la région Rhône-Alpes, par exemple,
peuvent y trouver des débouchés pour leur avenir».
A Rhône-Alpes, le budget de la coopération
décentralisée a été quasiment multiplié par
Deux pour atteindre 9,3 M€ en 2008, et devrait s'approcher des 0,7 % du
budget, en 2010. Derrière l'Etat français, c'est le premier
budget consacré à la coopération pour le
développement.


Néanmoins, au-delà des logiques classiques
à vocation « humanitaire » ou « solidaire », il y a
une volonté de promouvoir des intérêts commerciaux ou
industriels. Dans cette optique, la solidarité internationale est, entre
autres, le moyen d'assurer un pole de compétitivité aux acteurs
et structures de la région Rhône-Alpes. Par conséquent, la
base de données de RESACOOP en répertorie 1.217 structures
tournées vers la solidarité internationale dans cette
région. On peut supposer que le nombre total est sensiblement
supérieur, car certaines structures ne sont pas
répertoriées dans ce réseau. Il est cependant probable que
ces dernières ont une activité limitée et qu'une part de
celles-ci n'a pas une activité régulière. Il n'en demeure
pas moins que le nombre est important et la diversité est grande.
Premièrement, les associations sont les plus
nombreuses. Elles sont au nombre de 631 et recouvrent la plus grande
diversité par la taille, les objectifs, les types d'activités,
etc. Deuxièmement, les collectivités locales et les
comités de jumelage qui s'appuient fréquemment sur des structures
associatives pour mettre en oeuvre leurs activités de coopération
décentralisée, sont au nombre de 311 dans le répertoire de
RESACOOP. Troisièmement, il y a les établissements publics,
essentiellement dans les secteurs de la santé et de l'éducation.
C'est des hôpitaux ou établissements d'enseignement primaire,
secondaire et supérieur - qui mettent en oeuvre des projets,
réalisent des échanges et interviennent dans le cadre de projets
initiés avec les acteurs du Sud.
Quatrièmement on y recense des structures
privées non associatives : fondations, entreprises qui interviennent
dans des projets, ou contribuent au financement de projets initiés par
d'autres structures.
Avec ce nombre d'organisations et les 1.300 projets
répertoriés, la Région Rhône-Alpes se situe dans le
peloton de tête des régions françaises avec la
région Nord-Pas-de-Calais (1.950 acteurs actifs et en veille, 1.930
projets) et la région Île-de-France qui bénéficie de
l'implantation de nombreuses organisations dans la capitale.
En 2002, RESACOOP16 a recensé 63
organisations de Rhône-Alpes engagées dans une action de
coopération avec le Sénégal parmi lesquels : 33
associations, 26 collectivités locales, 3 structures « jeunes
» (2 établissements scolaires et une MJC), et une chambre
consulaire.
16 Sources : RESACOOP, évolution des
partenariats entre acteurs de Rhône-Alpes et du Sénégal,
Lyon, Privat, 2002
Tableau4: répartition des partenariats de
coopération décentralisée au
Sénégal
Région
|
Nombre de partenariatS
|
Nombre de partenariats actifs
|
ILE de France
|
23
|
6
|
Rhône-Alpes
|
20
|
11
|
Nord Pas de calais
|
12
|
6
|
Basse Normandie
|
9
|
4
|
PACA
|
9
|
4
|
Bretagne
|
9
|
5
|
Midi Pyrénées
|
8
|
5
|
Alsace
|
6
|
5
|
Sources : base de données des partenariats de
coopération décentralisée -SCAC Dakar- Août 2005
Figures 2: partenariats actifs des collectivités
françaises au Sénégal

12
10
8
6
4
2
0
Partenariats
actifs
Ile de France Rhône-Alpes
Nord pas de calais basse normandie PACA
Bretagne
Midi Pyrénées Alsace

28
Donc, en 2005, par le nombre de partenariats actifs au
Sénégal, la région Rhône-Alpes était le
premier interlocuteur français des collectivités
sénégalaises. Par ailleurs, cette ouverture de Rhône-Alpes
offre une activité lucrative à prés de « 1500
personnes » (M. Dia du conseil régional de Saint-louis), sans
compter les nombreux volontaires prêts à s'engager pour une
première expérience de travail à l'étranger. C'est
un support fondamental pour la promotion des jeunes, notamment ceux qui se
prédestinent à une carrière dans la coopération
internationale. D'ailleurs vers la fin des années 1980,
l'AFVP17 utilisait comme slogan
17 L'association française des volontaires
du progrès est une association laïque créée en 1963.
L'AFVP recrute, forme et encadre des volontaires de la solidarité
internationale qu'elle affecte sur des missions préalablement
identifiées avec ses partenaires (collectivités locales, ONG,
bureaux d'étude...). Association Loi 1901, l'AFVP est désormais
opérateur du Ministère français des affaires
étrangères et européennes (MAEE).

« mettez l'Afrique dans votre CV » dans le
but d'attirer les expériences sanctionnées par un diplôme
de qualité (A. Marie, 2005).
Cet usage que la région Rhône-Alpes fait de ses
relations de coopération trouve son fondement dans le principe
d'intérêt local. En effet les collectivités locales
françaises avaient l'obligation d'inclure cette norme dans leurs actions
extérieures, jusqu'en 2007 sous peine de saisine du tribunal
administratif. Ce qui laisse penser que l'Etat en imposant un tel principe
comptait appuyer les opérateurs français qui vivent de ça.
D'ailleurs dans la plupart des projets financés par Rhône-Alpes,
cette dernière veille à ce que l'achat des matériels se
déroule sur le territoire français..
Le principe d'intérêt local et direct des
populations tel que défini par la circulaire des Ministères de
l'Intérieur et des Affaires Étrangères du 20 avril 2001 a
fait de la coopération décentralisée une politique
exercée dans une logique d'intérêts « mutuels »
et de renforcement d'expertise pour les deux territoires. En
réalité, c'est un contrôle supplémentaire
exercé par l'Etat sur les actes des collectivités locales. Il ne
s'agissait plus pour la région Rhône-Alpes d'aider Saint-Louis
à lutter seulement contre la pauvreté, dans laquelle la
majorité de sa population est exposée, mais de promouvoir son
territoire. La question des bénéfices mutuels pour les deux
territoires était, désormais, élucidée par l'Etat
français.
Par l'adoption de ce principe, la coopération
décentralisée reposait sur le même piédestal que la
coopération transfrontalière dont les finalités sont
strictement matérielles. Néanmoins, ce principe va fragiliser
certaines coopérations décentralisées. En effet suite
à la jurisprudence Charbonneau où l'absence
d'intérêt local a été évoquée comme
motif de censure des actions de coopération décentralisée,
le sentiment de sécurité des acteurs locaux en a reçu un
coup.
Par la suite certains conseils régionaux ou
généraux ont eu des réticences à s'engager en
coopération décentralisée, par peur d'une saisine du
Tribunal administratif au motif de défaut d'intérêt local.
Les élus locaux, soucieux de sortir de l'insécurité dans
laquelle ils baignaient à cause de leur action extérieure, eurent
gain de cause avec la loi Thiollière du 2 février 2007. Elle fait
de la coopération décentralisée une compétence
d'attribution des collectivités territoriales (compétence
à part entière et non mode d'exercice des compétences).
L'intérêt local, s'il reste un moteur des politiques de
coopération décentralisée, ne peut plus en aucun cas
être un motif de saisine du Tribunal administratif. Toutefois, ce
changement de la législation n'a pas induit une inversion des
tendances.

30
Le cas de l'électrification des collèges de Podor
est assez symbolique pour décrire cette stratégie de la
région Rhône-Alpes.
Le conseil régional de Saint-louis constatant que l'un
de ses départements, à savoir, Podor était laissé
en rade notamment dans le secteur éducatif sollicite l'appui de la
région RhôneAlpes. En effet dix collèges de ce
département n'étaient pas électrifiés et donc ne
pouvaient pas recevoir de fournitures informatiques. Faisant suite à la
demande d'appui de son partenaire sénégalais, Rhône-Alpes
va d'abord décliner prétextant être plus compétente
sur les lycées. Mais puisqu'il s'agit d'un travail de compagnonnage,
Saint-Louis a tout à fait la possibilité de relancer son
partenaire et elle s'y est attelée. Ce dernier donnera finalement son
accord à condition que le projet soit confié à un
opérateur de sa région. Rhône-Alpes approche, ainsi, une
entreprise spécialisée dans la pose de panneaux solaires à
Podor pour un devis. L'opérateur propose, après visite des lieux,
l'installation de panneaux dans chaque collège du département
pour un coût total de 100.000 €. Avisée par son partenaire,
Saint-Louis marque son veto car le conseil régional avait
contacté, en aparté et en même temps, la
Sénélec (Société nationale
d'électricité du Sénégal) qui a envoyé,
à son tour, des techniciens pour une expertise. Après diagnostics
ces derniers ont suggéré la construction d'une mini centrale
électrique pour un montant total de 36.000 €. Pour mettre fin aux
négociations, Rhône-Alpes a reconnu que la proposition de son
partenaire était plus judicieuse et moins onéreuse. Aujourd'hui,
avec son appui douze (12) au lieu de dix (10) établissements scolaires
ont été électrifiés à Podor et
équipés en matériels informatiques. La stratégie
consistait donc à élargir les activités d'une entreprise
de sa région. Néanmoins pour avoir finalement
exécuté ce projet, Saint-Louis a renforcé ses
capacités de maîtrise d'ouvrage.
Cette stratégie de promotion internationale des
collectivités du Nord est d'autant plus fréquente que les deux
réactions suivantes18 l'évoquent de manière
explicite:
M. Jean Paul Gandin de l'association Savoie solidaire :
« nous nous sommes aperçus que les sénégalais de
Bignona étaient allés plus loin que nous dans leur pratique
participative. Nous étions partis pour aider les africains à
changer et ce sont eux qui nous ont transformés ».
M. Frédéric Deshayes chargé de missions
des affaires européennes et internationales : « les jumelages
d'origine nous paraissent trop étroits ; nous avons lancé
18 Sources : Actes de Kaolack et Fatick,
Journées de la coopération décentralisée et de la
planification régionale, 2ème Edition, 14-20 Mai 2004, p. 135

un programme dans lequel d'anciens ouvriers du cuir
formaient des cordonniers tunisiens ; l'action internationale nous sert de
moteur pour l'insertion sociale chez eux mais aussi chez nous ».
Les enjeux sont divergents mais le Conseil régional de
Saint-Louis et le Conseil régional de Rhône-Alpes doivent
travailler en étroite collaboration pour relever les défis du
sousdéveloppement. Par conséquent, les dynamiques conceptuelles
du processus de coopération mobilisent un certains nombre de
procédures et une multitude d'acteurs.
1.B. Un partenariat dynamique et inscrit sur la
durée
La coopération décentralisée a beaucoup
évolué, depuis ses débuts, dans le sens de la prise en
considération lente mais progressive des problèmes réels
rencontrés par les collectivités du Sud. A présent, le cap
des gestes de générosité spontanés semble en voix
de disparition et céderait la place à de nouveaux types de
coopération. Il ne s'agit plus simplement d'apporter son financement
à un projet mais de partir sur une relation durable avec un partenaire
sélectionné après un diagnostic serré des deux
territoires. A ce titre, les collectivités locales du Nord
possèdent des compétences spécifiques en matière
d'ingénierie urbaine et de développement local qui constituent
des axes de travail propres à la coopération
décentralisée. C'est ainsi que la dynamique constitutive d'un
processus de coopération est composée de phases successives
rigoureusement débattues entre les futurs partenaires.
Néanmoins, il semblerait que durant les commissions
préparatoires la collectivité demandeuse d'appui n'a pas beaucoup
de marge de manoeuvre. Autrement dit, l'élaboration des projets et les
termes du contrat sont quasiment ordonnés par la région
Rhône-Alpes dans le cadre de son partenariat avec la région de
Saint-Louis du Sénégal, bien que les demandes viennent de
Saint-Louis.
Un document réalisé par RESACOOP permet de faire
la lumière sur cette étape de la coopération
décentralisée. Il reprend les éléments
discutés au cours de sa réunion organisée le 18 novembre
1998 sur le thème "engager ou renforcer une démarche de
coopération".

32
1.B.1. Les dynamiques constitutives du partenariat
Rhône-Alpes/ Saint-Louis
Une première rencontre régionale conduite par
RESACOOP en 1995, a permis de recenser les acteurs de la région
Rhône-Alpes présents au Sénégal afin
d'établir une stratégie commune d'intervention dans les
collectivités Sénégalaises. Il ressort de cette
concertation que les acteurs ont manifesté la nécessité
d'expérimenter de nouvelles approches dont l'ancrage des projets dans
les plans de développement locaux était le plus urgent. La prise
en compte des plans locaux de développement travaillés en
concertation avec l'Etat sénégalais par RhôneAlpes assure
aux actions mises en oeuvre une viabilité, jadis, marginalisée.
Ce qui est exprimé ici, c'est la nécessité de passer de
l'amateurisme à la professionnalisation de la coopération
décentralisée.
Ces conclusions de la région Rhône-Alpes
partagées par les bailleurs et les Etats du Nord ont eu un écho
à travers la dernière étape de la décentralisation
au Sénégal. En effet, la régionalisation (lois 96-06 du 22
Mars 1996) parachève l'édifice de la décentralisation au
Sénégal. Elle est caractérisée par la refonte du
cadre institutionnel des collectivités locales, l'élaboration
d'un nouveau code des collectivités locales (CCL) et la reconnaissance
juridique de la coopération décentralisée (article 17 du
CCL). La principale nouveauté est l'érection de la région,
jusque là simple circonscription administrative, en collectivité
décentralisée dotée d'une personnalité morale,
d'une « autonomie financière » et d'une assemblée
élue au suffrage universel. Ce tournant place la région de
Saint-louis dans les mêmes attributions institutionnelles que la
région Rhône-Alpes. L'Etat sénégalais s'est ainsi
conformé aux exigences posées par les bailleurs internationaux et
les partenaires bilatéraux du Nord, notamment la France, consistant
à s'aligner sur les systèmes de gouvernance locale occidentale.
Cependant il n'a pas tenu compte des conséquences terribles que les
transferts de compétences allaient exercer sur les collectivités
sénégalaises.
Afin de soutenir ces avancées considérables, Mr
Abdourahim Agne nouvellement nommé au Conseil régional de
Saint-Louis, en 1997, s'appuie sur ses réseaux de relations pour entrer
en contact avec le Conseil régional de Rhône-Alpes.
Diplômé de science politique, Mr Agne a été
auparavant, tour à tour, à l'Union sénégalaise de
banques (USB), et inspecteur à la Banque centrale des Etats de l'Afrique
de l'Ouest (BCEAO). Dans cet ordre d'idées, il créa sa

propre entreprise, la Société maritime et
industrielle de la côte occidentale d'Afrique (SOMICOA)19.
Abdourahim Agne était par la suite Ministre de la coopération
décentralisée et de l'aménagement du territoire, avant de
prendre le portefeuille du Ministère des technologies de l'information
et de la communication, le 1er Mai 2009. C'est un personnage,
très bien implanté dans l'échiquier politique, le milieu
industriel, et le circuit financier national et sous-régional Ouest
africain. Par conséquent, c'est un atout de taille qui pourrait
être utile à l'implantation durable de la Rhône-Alpes dans
l'espace Ouest-africain.
Ainsi, en 1997, il a accueilli, une première visite de
prospection du Conseil Régional de Rhône-Alpes à
Saint-Louis afin de dresser un diagnostic du territoire, l'occasion
d'identifier les problèmes et d'entamer quelques négociations.
Espérant conforter les engagements tenus lors de cette visite, le
Conseil Régional de Saint-Louis a organisé, à son tour,
une visite de ces cadres en région Rhône-Alpes, la même
année. A l'issue de ces pourparlers entre élus, le 23
décembre 1997 au siège du Conseil régional de
Rhône-Alpes, un premier accord de convention-cadre est signé entre
le Conseil régional de Rhône-Alpes et le Conseil régional
de Saint-louis du Sénégal. Donc, dès le départ, la
coopération décentralisée entre Saint-Louis et
Rhône-Alpes était d'ordre élitiste. Les « forces vives
» émanant de la « société civile »,
pourtant sans cesse évoquées dans les discours, n'étaient
pas associées aux négociations encore moins à
l'élaboration des projets qui leurs sont destinés.
"Par convention il faut entendre tout contrat ou acte
signé entre des collectivités territoriales, françaises et
étrangères, comportant des déclarations, des intentions,
des obligations ou des droits opposables à l'une ou l'autre partie. Sont
visés par la loi aussi bien les conventions ayant un caractère
déclaratif que celles pouvant avoir des conséquences
matérielles, financières ou réglementaires pour ces
collectivités. Que la collectivité territoriale soit
engagée financièrement, matériellement ou non, la
convention est la voie privilégiée de la coopération
décentralisée pour tous les types d'intervention (...) "
"(...) en toutes circonstances c'est la
collectivité territoriale qui assure la responsabilité de sa
coopération décentralisée même si, pour mener
à bien certaines actions, elle peut déléguer par
convention sa maîtrise d'oeuvre à un établissement public
ou à une association privée." 20
19 Sources : APS, Abdourahim Agne, un redoutable
débatteur doublé d'un expérimenté politique,
Archipo
20 Sources : circulaire relative à la
coopération des collectivités territoriales françaises
avec les collectivités territoriales étrangères,
Ministères de l'intérieur, Ministère des Affaires
étrangères, Mai 1994

34
Cette convention-cadre est, donc, le lieu de définition
des modalités générales de la coopération qui sont
: programmation, définition des axes prioritaires, budgétisation,
maîtrise d'ouvrage ou délégation de maîtrise
d'ouvrage, répartition des rôles entre acteurs, mise en oeuvre,
suivi-évaluation etc.. Conformément à la
législation française, l'objet des actions envisagées et
le montant prévisionnel des engagements financiers doivent être
précisés par les élus de Rhône-Alpes. La convention
indique notamment le dispositif de gouvernance de la coopération puis
elle est soumise au contrôle administratif ou de légalité
du représentant étatique déconcentré, en
l'occurrence le préfet de région pour Rhône-Alpes et le
gouverneur pour la région de Saint-Louis.
S'inscrivant sur une coopération durable, le
partenariat Saint-Louis et Rhône-Alpes sera renouvelé par la
signature de conventions en 2000, 2006 et 2009. Nonobstant ce fait, des
changements structurels notoires sont intervenus dans la poursuite des actions.
Il s'est agit de passer d'une approche générale
(définissant les modalités générales) à une
approche par programme particulièrement ciblée plus conforme
à l'évolution internationale de la politique de
coopération décentralisée.
Les thèmes généralement abordés
par la coopération décentralisée correspondent aux
compétences des collectivités locales. Ce qui offre un champ
très vaste n'excluant concrètement que les questions de police et
de défense. Néanmoins, pour des soucis d'efficacité et de
répartition des actions entre partenaires français,
Rhône-Alpes décline ses axes d'interventions
privilégiés comme relevant de l'amélioration des services
de base offerts par la région de Saint-Louis à ses habitants. Par
conséquent, les thématiques mises en oeuvre sont donc
prioritairement adressées à l'éducation, la jeunesse et la
santé.
Les projets destinés à l'éducation et la
formation professionnelle sont généralement des actions de
renforcement des infrastructures et équipements des lycées comme
l'électrification et d'équipement en matériel informatique
des établissements scolaires du département de Podor. Il s'agit
également d'échanges entre jeunes par correspondance scolaire.
Dans le domaine de la formation professionnelle, des actions visent, par
exemple, à compléter la formation de personnel de santé
à la pratique médicale et à la gestion administrative
comptable. Avec l'appui des Conseils régionaux de
Midi-Pyrénées et Nord-Pas-de-Calais, Rhône-Alpes a mis en
place en place des structures de formation professionnelle
dédiées à l'insertion des jeunes à l'image du CRREJ
(centre régional de ressources pour l'emploi des

jeunes). L'éducation au développement peut
être, aussi, incorporée dans ce secteur par des voyages de fin de
cycle des jeunes Rhône-alpins à Saint-Louis ou des productions
multimédia...
Dans le secteur sanitaire ou de l'assistance, les associations
et les collectivités locales de Rhône-Alpes mènent des
actions de soutien aux enfants de la rue à Saint-Louis, pratiquent
l'envoi de matériel dans les villages, et l'équipement de centre
de santé en comblant le déficit de matériels logistiques
comme le montre l'hôpital de Ndioum. Il s'agit, également,
d'améliorer la qualité des soins par l'appui du Centre
Hospitalier Régional (CHR) de St-Louis et du Centre hospitalier de
Ndioum, par la formation du personnel et la réhabilitation de
maternité ou des urgences.
Dès lors que le système de donation
n'était plus adéquat dans l'évolution du partenariat
Rhône-Alpes/ Saint-Louis, les domaines d'intervention ont
été considérablement élargis. Sur la base de ces
avancées, de nouvelles catégories d'actions sont mises en
exécution.
Dans le secteur du développement agricole et
rural, il s'agit de la mise en place de système
d'échange entre acteurs, à l'image, du jumelage entre la
Fédération des alpages de l'Isère et la Maison des
éleveurs. Par ailleurs, il peut s'agir d'installation de moulin ou de
lancement de fermes expérimentales comme à Guélakh.
Concernant l'économie, l'artisanat, services et
crédits, les projets touchent l'appui à la
création ou au renforcement des activités économiques (par
exemple l'appui aux projets productifs). Ils s'adressent à des jeunes
porteurs de projets, des associations professionnelles, des groupements
féminins etc. Le soutien aux initiatives individuelles fait
également parti de ce volet.
La thématique de « l'appui institutionnel »
donne lieu à des échanges d'expériences dans les domaines
de la décentralisation ou de la gestion communale. Il a aussi trait
à la formation des agents territoriaux par l'organisation de stages
appropriés et la fourniture éventuelle d'une assistance technique
aux responsables de la région de Saint-louis. Cependant ces types
d'initiatives sont très rares pour être soulignés.

36


38
Pour récapituler, les axes privilégiés
dans le partenariat Saint-Louis et Rhône-Alpes sont choisis non en
fonction des besoins réels des publics cibles mais plutôt par
rapport aux orientations de la région Rhône-Alpes. Il semble donc
que c'est un partenariat entre initiés et non une coopération
directe de « population à population », de «
société à société » conformément
au coté « humanitaire » très mis en avant par les
acteurs du Nord.
Afin de bien mener les actions sur le terrain, chaque
partenaire doit mettre en place un dispositif de pilotage soit composé
par les services de la région ou délégué à
un organe externe (comité de pilotage, ou une ONG opérateur).
A Saint-Louis, c'est les services du Conseil régional
qui gère les relations de partenariat avec le Conseil régional de
Rhône-Alpes, depuis 2004. Principalement, il s'agit du Secrétaire
général M. Amath DIA. Toutefois, puisque la coopération
décentralisée a pris une telle ampleur dans la région, ce
dernier est épaulé par le chargé des affaires
administratives M. Babacar FAYE. Concernant les négociations avec
Rhône-Alpes ou la représentation de la région lors des
comités mixtes organisés en France, c'est le Président du
Conseil régional M. Aliou Niang qui en a la responsabilité
directe. Il choisit, dans bien des cas, une équipe composée
d'élus et d'agents de la collectivité pour l'accompagner. Ce qui
lui offre une place stratégique, objet de toutes les convoitises, dans
ses interactions avec les autres conseillers. Cependant ce dispositif politique
a été mis en place en 2004, car auparavant, c'est l'ARD de
Saint-Louis qui gérait la coopération décentralisée
avec les collectivités du Nord. Depuis que le Conseil régional a
repris la main, l'ARD intervient sur le plan de l'appui technique aux projets.
Elle apporte son soutien technique dans l'élaboration, la mise en oeuvre
et le suivi évaluation du développement local. Les organisations
communautaires de base (GIE par exemple), les ONG de développement,
associations de la société civile (des migrants aux associations
de quartiers ...) sont des agents et interlocuteurs omniprésents dans la
mise en place des projets.
A Rhône-Alpes, les élus ont opté pour un
dispositif de pilotage des actions extérieures composé
généralement de services de la région, déjà
en place. En effet, par Philippe Bayon Vice Président de la
région et délégué à la coopération
décentralisée, par la Direction des Relations Internationales
dont Marc Noailly est le responsable de la coopération Afrique,
Méditerranée et de la Francophonie, et par Ivan Dedessus Le
Moustier, responsable de la coopération
Rhône-Alpes/Sénégal, le Conseil Régional conduit de
manière stratégique sa
politique de solidarité internationale. En ce qui
concerne la gestion de son partenariat avec Saint-Louis, c'est un correspondant
sénégalais (Adama Sow) qui en est le coordonnateur sur place.
Ancien de l'ADOS, Adama Sow est le trait d'union entre la région
Rhône-Alpes et les régions de Saint-Louis et Matam. Il est
chargé d'informer la région Rhône-Alpes sur les projets
réalisés à Saint-Louis et est impliqué dans
l'élaboration et le suivi évaluation des projets. Son choix
représente, sans doute, beaucoup de choses notamment la confiance
accordée, par Rhône-Alpes, à un professionnel du
développement originaire de « la région du Fleuve »
(Saint-Louis et Matam) au lieu de faire appel à une ONG,
opérateur de sa région, ou de monter un comité de
jumelage. Mais ça peut vouloir dire aussi que Rhône-Alpes limite
les frais de gestion, de son partenariat avec Saint-Louis, en faisant
plutôt appel à un professionnel sénégalais.
Le centre international d'étude au développement
local (CIEDEL) de Lyon crée en 1990, en tant qu'instrument de propagande
et canal de diffusion, concourt à la formation d'agents techniques des
partenaires du Sud. Il est devenu association loi 1901 en 2005 et peut
désormais sous-traiter totalement ou partiellement, par
délégation, les projets de la région Rhône-Alpes.
Toutefois, la pierre angulaire de ce dispositif est RESACOOP
(réseau d'appui à la coopération Rhône-Alpes). Il
exerce le rôle de facilitation et de coordination des acteurs.
Créé par la région et l'Etat, c'est un outil d'aide
à la mobilisation des acteurs régionaux par l'information, la
concertation et l'appui aux porteurs de projets. D'ailleurs en 1995, c'est
RESACOOP qui a réuni, pour la première fois, tous les acteurs de
Rhône-Alpes en coopération avec les collectivités du
Sénégal.
Dans la dernière marche de cet édifice, il y a
la CEPRAO (cellule d'échange et de partenariat région
Rhône-Alpes Afrique de l'Ouest). C'est un instrument de
coopération qui devrait favoriser les liens et les échanges
d'expériences interafricains (plus précisément entre
Saint-Louis, Tombouctou (Mali) et la région des trois Marigots (au
Birkina Fasso) . Par exemple dans les domaines d'actions communes telles que
l'appui à la décentralisation, à la formation
professionnelle et universitaire.
Donc, à l'origine du partenariat entre le Conseil
Régional de Rhône-Alpes et le Conseil Régional de
Saint-Louis, seuls les élus locaux ont participé aux commissions
préparatoires. Toutefois, l'idée d'une mise en synergie des
acteurs des deux territoires déjà évoquée va
remettre en cause cette coopération entre acteurs institutionnels. Au
lieu de mobiliser,
seulement, les acteurs non gouvernementaux de
Rhône-Alpes et Saint-Louis, les intentions affichées ont ouvert la
brèche à l'immixtion d'une multitude d'intervenants. A ce titre,
les Etats, la France et le Sénégal notamment, les institutions
financières internationales (PNUD...), les ONG et associations de
développement (à l'instar d'Aced-Sud), l'UE (avec le FED...)
n'entendent pas laisser la politique de coopération aux mains des
acteurs locaux. Par le biais des politiques nationales sectorielles et
internationales de développement, réseaux et structures de
concertation entre acteurs, ils ont colonisé la coopération
décentralisée et impactent sur la finalité des projets.
1.B.2. Vers une harmonisation de la coopération
décentralisée avec les stratégies nationales et
internationales de développement : la mobilisation des acteurs
Les collectivités françaises se soucient bien
davantage que par le passé de l'environnement institutionnel des pays
où elles interviennent. Prenons le cas de l'éducation. Avec les
coopérations « conteneurs », beaucoup de municipalités
ont, par le passé, inauguré des écoles au Sud pour se
plaindre ensuite que l'Etat n'était pas capable d'y mettre un
instituteur. A présent, avant de financer la construction d'une salle de
classe, on regarde si la localisation du projet correspond à la carte
scolaire et aux affectations prévues par le ministère de
l'éducation (B. Husson, 2007). En d'autres termes, avant de se lancer
dans un projet ou programme de coopération décentralisée
avec Saint-Louis, il est recommandé à la région
Rhône-Alpes de prendre connaissance des politiques sectorielles dont
s'est doté l'Etat du Sénégal. Donc, il faut
obligatoirement travailler en collaboration avec les acteurs étatiques
et internationaux. En réalité, ce qui est recherché par
les bailleurs, c'est une harmonisation des systèmes de gouvernance
locale et des interventions. A ce titre, la déclaration de
Paris21, en 2005, a engagé les acteurs internationaux,
nationaux et locaux à augmenter leurs efforts d'harmonisation face au
morcellement et au manque d'impacts de l'aide internationale.
Néanmoins l'approche coopération
décentralisée conduit à une inversion des tendances. Elle
place toujours les acteurs au centre des processus de coopération en
leur délégant la gestion des actions qui les concernent, en
négociant avec eux des programmes d'appui, en accompagnant leurs
apprentissages. Or ces acteurs dotés de ressources ont une certaine
autonomie, des stratégies et leurs choix sont, peu prou, guidés
par des intérêts matériels ou
21 Sources : Pôle CNG, Partenariat de
coopération franco-sénégalais 1994-2008, Dakar, 2009


40
symboliques. Par conséquent leur présence impacte
considérablement sur les résultats attendus au grand
détriment des destinataires de l'aide au développement.
Au Sénégal, l'article 17 du code des
collectivités locales dispose que les collectivités
sénégalaises peuvent engager des actions de coopération et
de partenariat avec d'autres collectivités ou organismes de
développement publics ou privés de pays étrangers.
Ça signifie que la région de Saint-Louis contrairement à
la région Rhône-Alpes peut nouer des accords de partenariat, sur
convention, avec des acteurs gouvernementaux ou non gouvernementaux, publics ou
privés. C'est une stratégie mise en place par l'Etat, pour
permettre aux collectivités sénégalaises de profiter de la
manne financière des mouvements de coopération avec le Nord.
Etant donné, que cette reconnaissance juridique de la
coopération décentralisée ouvre la voie aux interventions
multiples des acteurs à Saint-Louis, le gouvernement du
Sénégal cherche à rétablir son contrôle sur
ses territoires. Dans cet ordre d'idées, il met en place de nouvelles
stratégies de développement des collectivités
sénégalaises. Ces politiques sont pilotées au niveau
national, par le Ministère de la décentralisation et des
collectivités territoriales avec la direction des collectivités
locales (DCL) et le Ministère de l'aménagement du territoire et
de la coopération décentralisée qui compte une Direction
de la coopération décentralisée (DIRCOD) depuis 2003 et au
niveau local par les structures déconcentrées tel que L'ARD de
Saint-Louis. Par conséquent, ce stratagème trouve son écho
dans un foisonnement de programmes nationaux de développement et de
lutte contre la pauvreté.
A ce titre, le programme national de développement
local (PNDL) est sans doute l'instrument de mise en oeuvre de la politique
étatique de développement le plus explicite. En effet, le PNDL
constitue le cadre fédérateur des interventions en termes d'appui
au développement local. Ce programme est surtout adressé aux
communautés rurales sénégalaises. L'Etat s'attaque, ainsi,
aux « maillons » faibles de la région de Saint-Louis, car
depuis les années 2000, la situation des communautés rurales
interpelle les bailleurs et devrait par conséquent mobiliser des
initiatives assez onéreuses. D'ailleurs, ce programme porte sur les
mêmes thématiques d'interventions mises en avant, dans le cadre,
du partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis. Les objectifs affichés
sont : l'amélioration des services de base offerts aux habitants des
communautés rurales, le renforcement des capacités des acteurs
locaux et l'accès des populations rurales aux activités
génératrices de revenu.
Il semble y avoir un consensus autour des idées aussi
bien chez les demandeurs du Sud qu'au niveau des bailleurs. C'est à se
demander si la coopération décentralisée Nord-Sud ne
symbolise pas un verrouillage moins visible des pays « pauvres » par
les pays riches ?
Très déterminé à s'aligner sur la
philosophie des bailleurs internationaux, l'Etat du Sénégal
souhaite atteindre les OMD et le programme éducation pour tous (EPT),
par l'adoption d'une stratégie de réduction de la pauvreté
dont est assorti un document, en l'occurrence le DSRP II. Ce document est
présenté par l'Etat comme le cadre référentiel,
pour l'élaboration des plans sectoriels de développement, des
programmes d'investissement et des contributions des partenaires au
développement. C'est ni plus ni moins qu'une réplique des OMD au
niveau national. C'est la raison pour laquelle, dans l'un des secteurs
clés du DSRP II, l'Etat soutient la scolarisation et le maintien des
filles à l'école en repoussant l'âge de la première
union. Avec de telles mesures, l'Etat sénégalais fait fi des us
et coutumes qui sévissent dans certaines couches sociales de la
région de Saint-Louis, notamment chez la communauté Haalpulaar,
où l'âge de la première union était très
précoce. Il fait, également, des efforts démesurés
concernant l'éducation en y consacrant 40% de son budget global, avec
l'élaboration au niveau décentralisé (régional,
départemental, local) de plans de développement de
l'éducation (PRDE, PDDE, PLDE). Le Sénégal espère
ainsi arborer l'étiquette de bon élève auprès des
bailleurs afin d'obtenir de plus amples financements. Malgré ces efforts
le secteur éducatif traverse une crise à tous les niveaux due,
généralement, au manque de moyens et de visions.
Quelques structures spécialisées fleurissent,
notamment dans les secteurs de l'eau, l'énergie et l'assainissement,
branches citées, également, par les OMD. C'est dans ce cadre que
le PEPAM (programme eau potable assainissement du millénaire) et l'ASER
(agence sénégalaise d'électrification rurale) ont
été crées afin de mieux répondre aux demandes en
eau, électricité et assainissement des populations. A l'instar
des secteurs de la santé et de l'éducation, ceux de l'eau, de
l'énergie et de l'assainissement font aussi l'objet d'élaboration
de documents de planifications locales notamment les PLHA (Plans Locaux de
l'Hydraulique et de l'Assainissement) et les PLE (Plans Locaux
d'Electrification). Ces documents constituent des cadres d'interventions des
acteurs plus particulièrement le PEPAM et l'ASER. Le PEPAM s'est
fixé comme objectifs chiffrés, d'une part, de faire passer les
taux d'accès à l'eau potable de 64% en 2004 à 82% en 2015
et le taux d'accès à l'assainissement de 17% en 2004 à 59%
en 2015 en milieu rural.

Et d'autre part, de faire passer le taux d'accès à
l'eau potable par branchement domiciliaire dans zone urbaine de 57,1% en 2004
à 78% en 2015, dans toutes les régions du Sénégal.
En outre, pour la région de Dakar, elle devrait passer de 74,7% en 2004
à 88% en 2015. Concernant le chantier de l'électrification,
l'ASER s'est fixée l'objectif d'atteindre un taux
d'électrification de 60% à l'horizon 2022.
Conformément aux engagements pris par le
Sénégal pour l'atteinte des objectifs du millénaire pour
le développement, la santé fait partie des secteurs prioritaires
de l'Etat du Sénégal. Cela se manifeste à travers le DSRP
II et par l'importance accordée au secteur de la santé dans les
documents de planification des collectivités locales à l'instar
du PRDI (plan régional de développement intégré),
destiné aux conseils régionaux, dont l'ARD de Saint-Louis
était chargé de le réactiver dans sa circonscription. On
trouve notamment, ce volet sanitaire dans le cadre des PIC (plans
d'investissements communaux) réservés aux communes et des PLD
(plans locaux de développement), pour les communautés rurales.
Tous ces programmes entrent dans le prolongement des projets
mis en oeuvre au niveau local par les différents agents du
développement à Saint-Louis, notamment par les élus
locaux, les acteurs communautaires de base, les partenaires du Nord, les ONG et
bailleurs internationaux. Force est de reconnaitre que l'Etat du
Sénégal n'apporte aucune nouveauté dans la prise en charge
des collectivités sénégalaises. Bien qu'il semble
tolérer, l'intervention de tous ces acteurs sur son territoire, il n'en
demeure pas moins que l'Etat voudrait jouer les grands rôles, au risque
de rentrer en contradiction avec les textes de la décentralisation.
Ainsi à défaut de ne pouvoir établir un
réel rapport de force avec l'Etat, les élus locaux
sénégalais veulent à tout prix que cette
coopération reste sous leur contrôle. D'ailleurs en 2004, le
Conseil régional de Saint-Louis a repris la gestion des projets de
coopération décentralisée aux mains de l'ARD de
Saint-Louis. A ce jour, les élus locaux réunissent autour de
l'Union pour l'association des élus locaux du Sénégal
(UAEL) dont le siège se trouve à la Maison des élus locaux
(MEL) de Dakar. Cette structure regroupe l'Association des Maires,
l'association des conseillers ruraux et l'association des Présidents
régionaux du Sénégal. A ce titre, Aliou Niang,
Président du Conseil régional de Saint-Louis, est
également président de l'association des Présidents de
région du Sénégal, d'où l'importance de sa
région dans le dispositif national de coopération. En outre, des
querelles internes entre élus existent mais ils essayent, tout de
même, de former un corps afin d'équilibrer leur dialogue avec
l'Etat central.

42
En France, le cofinancement des projets de coopération
décentralisée a pour vocation de soutenir les initiatives
conjointes des collectivités territoriales françaises et leurs
homologues sénégalais. Ce système de cofinancement mis en
oeuvre par la délégation pour l'action extérieure des
collectivités locales (DAECL) du Ministère français des
Affaires Etrangères et Européennes (MAEE) devrait profiter
à la région Rhône-Alpes. Pour en bénéficier
elle doit transmettre ses projets au Pôle de la Coopération Non
Gouvernementale du SCAC de Dakar pour instruction et avis. Ce pôle
veille, formellement, à la cohérence entre l'action
proposée et les priorités définies, tant par les
politiques locales et nationales au Sénégal, que par la
coopération bilatérale franco-sénégalaise. Ainsi le
Ministère des Affaires Etrangères et Européennes appuie
les collectivités françaises et leurs groupements sous la forme
d'appel à projet (par exemple appel à contrat triennal 2007-2009
publié sur le site de France diplomatie). Les thématiques
privilégiées sont celles où Rhône-Alpes devrait
avoir une forte valeur ajoutée (l'appui institutionnel, la gouvernance
locale, la formation du personnel, l'assistance à la maîtrise
d'ouvrage et le développement durable). Cependant, le cofinancement
sollicité au MAEE ne peut être supérieur au cumul des
moyens mobilisés par la région RhôneAlpes pour
réaliser ses projets à Saint-Louis. Ces cofinancements posent,
donc, beaucoup de trop contraintes pour la région Rhône-Alpes. Par
conséquent, le Conseil régional de RhôneAlpes est l'un des
rares à financer ses projets, sur fonds propres, sans faire appel aux
cofinancements du MAEE. Pour autant, il peut être amené à
collaborer avec le SCAC de Dakar dans l'élaboration et la conduite de
ses projets avec les collectivités sénégalaises.
Ces outils innovants au service de la coopération
décentralisée visent une plus grande coordination de l'action
internationale, mais risquent à long terme de façonner l'action
des collectivités bénéficiaires selon leurs orientations
en réduisant la marge de manoeuvre. C'est le retour en force des Etats
du Nord dans le développement des collectivités locales du
Sud.
Par contre, une structure comme l'Association des
régions de France offre de nouvelles possibilités de concertation
entre acteurs régionaux intervenants à Saint-Louis du
Sénégal. D'ailleurs, ce type de dispositif a permis au Conseil
régional de Saint-Louis de réunir, en 2006, tous ses partenaires
français de la coopération décentralisée
(Rhône-Alpes, Midi Pyrénées, Nord pas de Calais et le
Conseil Général du Nord). Cette rencontre parallèlement
aux comités mixtes sectoriels a été l'occasion de
débattre sur la nécessité d'une meilleure rationalisation
des actions afin d'éviter les risques de doublons.

Certes les collectivités jouent un rôle
prépondérant incontestable dans le financement de l'aide au
développement en raison de leurs pouvoirs et compétences, de
leurs moyens et proximité avec les citoyens, mais force est de constater
que le phénomène de mondialisation a été d'un
soutien positif.
En effet, pendant l'ouverture de la 55ème
session de l'Assemblée Générale des Nations Unies, le 8
septembre 2000, la communauté internationale a adopté une «
Déclaration du Millénaire» à l'unanimité par
les 191 États membres de l'ONU. Très symbolique, cette
déclaration fixe un ordre du jour ambitieux se déclinant en huit
Objectifs du Millénaire pour le Développement (O.M.D.) que les
Etats membres se sont engagés à réaliser d'ici 2015. Ces
OMD visent à réduire la pauvreté, à promouvoir
l'éducation, à améliorer la santé maternelle et
à faire avancer l'égalité des sexes. Ils s'attachent
également à combattre la mortalité infantile, le V.I.H. /
S.I.D.A. et les autres maladies. C'est un petit manuel récapitulatif des
besoins primaires à satisfaire pour améliorer le quotidien des
populations les plus en difficulté notamment en Afrique subsaharienne.
Pour les atteindre, l'Etat du Sénégal est contraint à
mieux gouverner et à investir sur ses populations, par le biais de la
santé et de l'éducation. Une fois ces conditions réunies,
les pays riches se sont engagés à augmenter l'aide publique au
développement, à alléger les dettes et à promouvoir
un commerce plus juste. C'est probablement une source de motivation
supplémentaire mais qui tarde à avoir de réels impacts sur
le niveau de développement.
L'union Européenne constitue, également, un
bailleur non négligeable pour le financement des projets de
Rhône-Alpes. En effet, par l'intermédiaire du FED (fonds
européen de développement), l'EU accompagne les
collectivités européennes dans la réalisation des actions
de coopération décentralisée avec les `'ACP» (Afrique
caraïbe Pacifique). C'est d'ailleurs, l'une de ses stratégies
propres que de renforcer le poids et l'autonomie des régions au
détriment des Etats membres qui ont encore le contrôle sur
certaines compétences relevant de la souveraineté. A ce titre, la
région Rhône-Alpes, considérée comme une grande
région d'Europe, bénéficie d'importants crédits
européens. Entre 2007 et 2013, c'est ainsi près de 1,5
Milliards22 € de cofinancement européen qui arriveront
en Rhône-Alpes.
22 Sources : Rapports sur la stratégie
européenne de la région Rhône-Alpes votée en
assemblée plénière de 2007

MAEE
SCAC (Ambassade de France
à
Dakar)
AFD
HCCI
CUF
AFVP
Dispositifs nationaux de
cofinancement et concertation
Conseil régional
Rhône-Alpes
Délégation à la
coopération
décentralisée
Service de
coopération Afrique,
méditerranée et de
la
Francophonie
RESACOOP
CIEDEL
Conseil régional de
Saint-
Louis
Secrétariat général
Chargé
des affaires
administratives
ARD
Correspondant permanent
de
Rhône-Alpes à Saint-Louis
Ong tel que Aced-Sud
Dispositif de réception- mis en oeuvre et
suivi
Dispositif phare
Ministère de l'aménagement du
territoire et de
la coopération
décentralisée
DIRCOD
Ambassade du
Sénégal en
France
DCL
UAEL (MEL)
Groupe pays
Sénégal de CUF
Dispositif d'harmonisation et
d'ancrage dans les
projets
locaux de développement

44
La coopération décentralisée
représente, également, une forte valeur ajoutée pour les
acteurs non gouvernementaux et les associations de développement, du
Nord et du Sud. Dans cette perspective, les ONG (par exemple SOS international)
ou associations (comme Aced-Sud) interviennent à Saint-Louis pour le
compte de Rhône-Alpes, en tant que maître d'ouvrage,
délégué de maîtrise d'ouvrage ou maîtrise
d'oeuvre.
Organigramme hiérarchique des acteurs
:

Cette multiplicité des acteurs induit, cependant, des
lenteurs sur le plan juridico-administratif avec une rigidité croissante
des règles de la politique de coopération. En conséquence,
les procédures sont compliquées, les financements impliquent des
montages de dossiers complexes. Bien que les protocoles d'accord ou convention
fixent les rôles respectifs du moins, en principe, il y a une
réelle opacité dans les interventions.
Par exemple, en Juillet 1999, une convention de partenariat
signée entre Saint-Louis et Rhône-Alpes a sollicité la
participation de plusieurs acteurs. Les thématiques de cet accord sont
définies comme relevant de l'économie, l'artisanat, les services
et crédit et la formation d'adulte. Conformément à la dite
convention, Rhône-Alpes a apporté son soutien dans la formation et
l'échange d'expérience au processus de décentralisation.
Le budget prévisionnel s'est élevé à hauteur de
500.000 €. Un projet de cette envergure a nécessité le
contrôle d'approbation à priori du gouverneur de Saint-Louis,
comme tous les projets qui dépassent 100.000 €, et le concours de
différents partenaires. A Rhône-Alpes, le Conseil régional
a sollicité les ONG de sa région (ACERA, ADOS, SOS
international). A Saint-Louis, nonobstant le Conseil régional de
Saint-Louis il y avait l'ARD (pour son savoir faire technique) et les communes
d'Ourossogui (Matam) et de Guélakh Rao (Saint-Louis). Ancien village de
l'ex département de Matam, Ourossogui est une commune située dans
la région de Matam qui faisait partie de la circonscription de
Saint-Louis jusqu'en 2002.
Ce type de partenariat avec des intervenants multiples n'est
pas un cas isolé. Dit autrement, la plupart des projets menés par
le Conseil régional de Rhône-Alpes à Saint-Louis mobilisent
une pluralité d'acteurs, au Nord comme au Sud. Dans ces conditions, les
moyens mobilisés ne seront pas tous alloués au projet car une
partie servira à financer les opérateurs de RhôneAlpes
impliqués dans la mise en oeuvre et la gestion. Les discours
séduisants d'une coopération directe entre Rhône-Alpes et
Saint-Louis, ne reflètent pas tout à fait la
réalité sur le terrain, car les intermédiaires sont
multiples, les projets éparpillés et les rôles
cumulés.

46
PARTIE2 - Modes de traductions et finalités
réelles des projets
2.A. Des actions diversifiées dans les sinuosités
du développement local
L'approche coopération décentralisée
repose, à présent, sur le passage de l'aide-projet (les gestes
ponctuels et donations), composé de phases clairement
séparées, limitées dans le temps et basées sur des
objectifs, moyens et budgets définis avant la mise en oeuvre du projet,
à l'adoption d'une approche par programme ciblé et durable. Ce
changement d'orientation a été pressenti, dès le
départ, pour redynamiser les mouvements de coopération notamment
le partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis.
Cependant les acteurs du nord n'ont jamais pu accorder leur
« confiance » aux élus, acteurs et agents locaux du Sud,
à cause des rumeurs de détournements et de corruption qui
gangrènent les pays du Sud. Ainsi, la réussite de ce partenariat
doit passer par une meilleure compréhension entre les acteurs de la
région Rhône-Alpes et leurs homologues de Saint-Louis.
2.A.1. Une traduction multiforme des projets
En 1997, lors de la première convention signée
entre le conseil régional de Rhône-Alpes et le conseil
régional de Saint-Louis, les thématiques
privilégiées étaient : l'appui au développement, la
lutte contre la pauvreté (à travers la santé et
l'éducation). Avec la signature des OMD en 2000, par la
communauté internationale, la région Rhône-Alpes
décline ses actions dans le cadre réalisation des OMD,
l'amélioration des services de base offerts à la population de
Saint-Louis et la promotion des dynamiques du genre. En outre,
Rhône-Alpes met à la disposition de Saint-Louis, ses
expériences acquises dans le cadre de la décentralisation et de
la gouvernance locale. Ainsi elle appuie la capacité des acteurs de
Saint-Louis et oeuvre pour le renforcement institutionnel de son partenaire de
la vallée du Fleuve Sénégal. Ce qui se traduit par une
variation des thématiques mises en oeuvre.
Les réalisations les plus importantes concernent
l'éducation, la jeunesse et la formation professionnelle. En effet, avec
les partenariats de Saint-Louis et Matam une filière de formation en
froid climatisation a été mise en place au centre de formation
professionnel Peytavin de Saint-Louis, en 2000. C'est un programme de formation
technique et

professionnelle qui a mobilisé 180.000 €. Dans cet
ordre d'idée, Rhône-Alpes a financé la création
d'une filière électro-bobinage/ réfection des moteurs,
où le Conseil régional de Saint-Louis a été
placé directement en situation de maître d'ouvrage.
Toujours dans le secteur éducatif, Rhône-Alpes a
subventionné l'électrification et l'équipement en
matériel informatique des collèges de Podor et de NDioum avec un
montant de trente (30) millions de francs CFA depuis 2007, sur la demande de
Saint-Louis.
Toutefois, le programme le plus ambitieux réalisé
concerne l'appui à l'éducation de Podor. On y retrouve plusieurs
aspects inhérents à la coopération
décentralisée Nord-Sud.
En 2006, pour lutter contre le chômage, l'exode rural et
l'immigration clandestine, la région Rhône-Alpes, le Conseil
régional de Saint-Louis associés à l'ARD ont
démarré un programme de formation et d'insertion des jeunes
à Podor. L'Association pour la coopération et le
développement du Sud (Aced-Sud) a été
désignée par Rhône-Alpes comme opérateur dudit
projet. Son fondateur Alain Guérini, est un ancien fonctionnaire des
établissements pénitenciers en France, il met ainsi en oeuvre son
expérience acquise dans l'accompagnement de personnes en
difficultés ou désocialisées au profit de la jeunesse de
Podor. Cependant, le choix porté sur Aced-Sud en qualité
d'opérateur pour conduire le projet témoigne du fameux recours
aux professionnels de développement bien que les acteurs de la
région de Saint-Louis sont très présents dans la mise en
oeuvre.
En choisissant Podor pour réaliser un projet de cette
envergure, Rhône-Alpes réagit aux invitations de Saint-Louis qui
cherchait à rationaliser les interventions sur son territoire,
conformément aux inégalités des collectivités qui
la composent. Par ailleurs, ce projet a mobilisé une dynamique d'acteurs
dont le Préfet de Podor, le Conseil régional de Saint-Louis et
les agents municipaux. Il y avait, également, la participation du Crrej
(centre régional de ressources pour l'emploi des jeunes), le Centre
départemental de formation professionnelle de Podor (Cdfp) et
l'inspection départementale de l'éducation nationale (Iden). En
outre, les domaines d'intervention du centre sont axés sur l'insertion
professionnelle, le sanitaire, le social, le sport et le culturel. Ce programme
offre à la jeunesse de Podor, la possibilité de se former dans
les métiers de l'agriculture, à la mécanique automobile et
informatique. Grâces aux modules de formation en informatique et
électronique de niveau CAP, les ressources humaines devraient être
valorisées, dans ces milieux défavorisés. C'est une
réorientation aux besoins, comme en témoigne l'ouverture d'une
filière d'initiation aux techniques agricoles.

48
Avec un tel centre, il s'est agit surtout d'améliorer
les capacités des élèves de Podor en leur inculquant un
savoir faire technique et une culture d'entreprise. D'ailleurs, à la fin
du programme, un fonds est prévu pour le financement des projets
montés par les bénéficiaires. Dans ce cadre, les
diplômés de la filière agricole et de l'insertion
trouveront d'autres possibilités avec la Grande offensive agricole pour
la nourriture et l'abondance (Goana). Bien que cette politique mise en oeuvre
par le président sénégalais Abdoulaye Wade n'en est
qu'à ses balbutiements et n'a pas encore démontré son
efficacité.
Ce type de réalisation symbolise les avancées
considérables survenues dans la poursuite du partenariat
Rhône-Alpes et Saint-Louis. L'aide-projet qui est très manifeste
dans certains types de partenariat fortement teintés d'humanitaire,
à l'instar de Rhône-Alpes et Tombouctou (Mali), est une variable
latente dans la coopération Rhône-Alpes et Saint-Louis. Pour
illustrer cela, Philippe Bayon, vice-président de la
délégation française de Rhône-Alpes s'est rendu
à Podor en 2008. Il a pu visiter avec Waly Guèye, du Conseil
régional de St-Louis, le tout nouveau lycée de Podor que
Rhône-Alpes a électrifié mais surtout les
réalisations du programme de formation et d'insertion professionnelle
des jeunes de la région par la remise des diplômes aux premiers
sortants. Rhône-Alpes ne se contente plus de financer des projets,
sous-traités par un opérateur, à Saint-Louis mais veille
au suivi et à l'évaluation lors du comité de pilotage
comme celui du 14 Avril 2008 qui s'est déroulé au siège du
conseil régional de Rhône-Alpes sous la présence de
Philippe Bayon, vice président délégué à la
coopération décentralisée, et d'Aliou Niang,
président du conseil régional de Saint-Louis. D'autres
initiatives existent parmi lesquelles les commissions mixtes ou les visites
régulières sur place.
Depuis la mise en fonction du Crrej (centre régional de
ressources pour l'emploi des jeunes) à Saint-Louis en 2005,
Rhône-Alpes soutient et accompagne son autonomisation institutionnelle
financière et son développement en partenariats avec le Nord Pas
de Calais et la région Midi Pyrénées, bien que son
engagement doive se terminer en 2009. C'est l'un des rares projets où la
maîtrise d'ouvrage de Saint-Louis est bien réelle. Mais force est
de constater, qu'une fois encore la question de la mobilisation des ressources,
après 2009, pour maintenir les services proposés par ce centre,
n'est pas encore résolue. C'est une des plus grandes limites de la
coopération décentralisée. Donc, la région
Rhône-Alpes fait beaucoup dans le domaine éducatif mais l'absence
de fonds propres à la région de Saint-Louis ne permet pas de
pérenniser les services.

La santé, l'hygiène et l'action sociale
emboîtent le pas à l'éducation. Secteur prioritaire au
même titre que l'éducation, la santé fait l'objet d'une
attention particulière par Rhône-Alpes. Ainsi, l'hôpital de
Saint-Louis travaille en étroite collaboration avec le CHU de
Rhône-Alpes qui contribue, également, à l'équipement
de l'hôpital de NDioum. Située dans le département de Podor
NDioum est une des 14 communes de Saint-Louis. Cette relation s'est
concrétisée, en 2002, par une session de formation, du personnel
de l'Hôpital de Saint-Louis à la sécurité sanitaire
financée par Rhône-Alpes pour un budget global de 80.000
€.
Pendant longtemps, la plus part des actions était,
donc, axée dans les domaines de l'éducation, l'appui à des
projets en direction des jeunes, ainsi que dans le domaine sanitaire. Cependant
avec les OMD et les maigres impacts que les projets ont sur les populations de
Saint-Louis, de nouvelles thématiques sont mises en oeuvre.
Dans cette optique, l'appui institutionnel a concerné
la réalisation de schémas régionaux d'aménagement
du territoire (SRAT), mais surtout les échanges d'expériences
entre élus des deux collectivités lors de stages
appropriés. En 2003, une séance de formation de trois jours a
été financée par le conseil régional de
Rhône-Alpes pour les élus locaux de Saint-Louis.
Dans le domaine du développement rural, Rhône-Alpes
soutient les activités économiques, parmi lesquelles deux
initiatives :
D'une part, avec l'expérience de Guélakh qui est
très significative à ce niveau. En effet, elle s'est fortement
engagée dans la construction de la ferme de Guélakh qui
connaît une véritable réussite car ce projet est
opérationnel et visible. Même le président
sénégalais s'est laissé tenter en affirmant qu'il
veillerait à l'installation de ce type de ferme dans chaque
communauté rurale.
Et d'autre part, avec la signature d'un accord de partenariat
entre la Fédération des Alpages de l'Isère
(Rhône-Alpes), et la Maison des Eleveurs de Saint Louis du
Sénégal, en Août 2001, après plusieurs années
d'échanges. Les interactions portent sur la formation et la mise en
oeuvre d'un programme d'aménagement dans le Nord du
Sénégal, région sahélienne d'élevage
extensif, pratiqué depuis toujours par les Peuls, ethnie
d'éleveurs semi nomades. Ce jumelage est soutenu financièrement
par la Région Rhône-Alpes. Depuis 2003, 4 voyages d'études
ont été effectués dans le cadre de ce partenariat. Par
exemple en Octobre 2008, pour finaliser leur

50
module d'Education au Développement, 12
étudiants et apprentis du Lycée Agricole et du CFPPA de la
Côte Saint André accompagnés par 3 enseignants et
formateurs se sont rendus à la région de Saint-Louis. Ces
échanges répondent, de manière concrète, aux
critères de la mise en synergie des acteurs des deux territoires.
Tableau 5: récapitulatif des acteurs de Rhône-Alpes
présents à Saint-Louis en 2002 et les types d'action
réalisés :
Acteurs
|
Localités
|
Réalisations
|
Commune de Saint-Pierre de Boeuf (42)
|
Diaranguel et Walla
|
Projet d'adduction d'eau au village
|
Fédération des Oeuvres Laïques
(42)
|
Saint-Louis
|
Construction d'écoles et de salles de classes
|
ACERA (69)
|
|
Suivi et animation de la coopération dans le domaine
économique
|
Le Conseil Régional Rhône- Alpes
(69
|
Saint Louis
|
Coopération décentralisée Appui
à l'aménagement du marché de Matam
|
Fédération des Alpages de l'Isère
(38)
|
St Louis
|
Appui à la maison des éleveurs
|
Nangadef (38)/
|
St Louis
|
Coopération scolaire
|
Sources: RESACOOP, « l'évolution des partenariats
entre acteurs de Rhône-Alpes et du Sénégal », Privas,
28 juin 2002.
Donc, en 2002, les acteurs de Rhône-Alpes
présents à Saint-Louis étaient multiples (Conseil
régional, acteurs non-constitutionnels, une commune, des
établissements scolaires et des associations et ONG) et les projets
diversifiés (le scolaire, l'adduction d'eau, le développement
rural et la coopération économique). Par conséquent, il
s'agissait plutôt de financer ou d'appuyer des projets et non d'impulser
un développement stratégique pérenne de la région
de Saint-Louis.
A présent, suite aux maigres impacts que les projets
ont eus sur la population, un changement d'orientation était
nécessaire. En effet, Pour réduire durablement la pauvreté
à laquelle sont exposées les populations de Saint-Louis,
Rhône-Alpes apporte une contribution manifeste aux FAIL. Le fonds d'appui
aux initiatives locales a mobilisé le montant de 415. 215.000 francs
CFA, dont 88% alloués aux initiatives génératrices de
revenus et le reste accordés au renforcement des institutions de micro
finance (I-M-F) soit 83.043.000 francs CFA.

Ce fonds cherche principalement à rendre effective la
réduction de la pauvreté. D'après les estimations trois
milles (3.000) personnes devraient en profiter pour sortir de la
précarité. Ainsi, l'indice de pauvreté passerait alors de
41,2% à 36,7% soit une baisse de 4,5% dans la région de
Saint-Louis, toujours enclin au paupérisme. En 2007, il a
été prévu dans le cadre du Fail la création d'un
réseau régional des mutuelles avec, d'une part, l'appui aux
financements pour 80% du budget et, d'autre part, le renforcement des
capacités pour 20%. Ses effets programmés du FAIL, ont
motivé les bailleurs, notamment la région Rhône-Alpes dont
la contribution de Rhône-Alpes s'est élevée à
hauteur de quarante (40) millions de francs CFA soit 10,38% du total En 2008,
en 2009 Trente six (36) millions et en 2010 elle devrait tourner autour de
trente deux (32) millions de francs CFA.
Ainsi, la région Rhône-Alpes cherche,
globalement, à améliorer les services de base offerts par la
région de Saint-Louis à ses populations. L'eau qui touche, en
général, des projets d'adduction dans les villages n'est pas une
compétence transférée. Elle est du ressort de l'Etat
central qui à travers le PEPAM essaye d'atteindre les objectifs
prioritaires des OMD, mais quelques projets de Rhône-Alpes sont
orientés dans ce sens. Par contre, la santé et l'éducation
sont bien deux priorités pour les pouvoirs locaux. Les populations
défavorisées de la région de Saint-Louis sont, ainsi
désignés comme cibles prioritaires de la région
Rhône-Alpes. Par conséquent, les réalisations n'ont de sens
que par la reconnaissance des destinataires.
Le secteur du développement économique est
très peu présent. Mais ceci n'est pas la seule
spécificité du partenariat Rhône-Alpes et Saint-Louis. En
effet, au niveau national, l'étude des projets selon leur approche
dominante montre, que seul 1 projet sur 3 présente une approche
économique forte ou modérée tandis que 3 projets sur 4
présentent une approche sociale forte ou modérée.
Le Conseil régional de Saint-Louis doit arriver
à satisfaire durablement les demandes de sa population avec des
politiques de développement local pérennes, des financements
réguliers et des objectifs à long terme. Dans ce cadre si les
contributeurs du FAIL, comme RhôneAlpes, stoppent leurs cofinancements en
2010, et que Saint-Louis ne soit pas en position de mobiliser d'autres fonds,
ils auront encore une fois investi des sommes considérables sans qu'il
y'ait un impact permanent sur les habitants.
Malgré ces interventions plurielles de la région
Rhône-Alpes, se pose un problème de
visibilité des
projets réalisés à Saint-Louis. Les populations ne se
sentent pas concerner et

52
considèrent dans bien des cas qu'il y a, sans doute,
des détournements d'objectifs. L'information ne circule pas entre les
acteurs et les habitants, sauf, quand on accueille les dignitaires de la
région Rhône-Alpes à Saint-Louis, pour des visites de
prospection ou de suivi des projets. Ce type d'événement ne
mobilise, en général, que le coté folklorique de la
population de Saint-Louis et non les vrais dynamiques à appuyer.
Après analyse des actions réalisées par
Rhône-Alpes, il apparaît, d'une part, que le renforcement
institutionnel et la maîtrise d'ouvrage directe de Saint-Louis,
très présents dans les discours, sont très peu
appliqués. Pourtant, les projets n'étaient qu'un prétexte
pour accompagner le renforcement des capacités des acteurs de la
région de Saint-Louis.
Et d'autre part, le développement durable, domaine le
plus mobilisateur avec les changements climatiques, , ne fait pas l'objet d'une
grande considération.
Par ailleurs, l'autonomie financière locale
réclamée par les acteurs de Saint-Louis, conformément aux
textes de la décentralisation, parait illusoire et la responsabilisation
des élus locaux trop ambitieux.
Enfin, l'absence de connaissances suffisantes sur le contexte
politico-culturel local des pays en développement par les
collectivités partenaires du Nord ne permet pas d'instaurer une
coopération de confiance. Mieux, elle légitime le recours aux
opérateurs de terrain par les partenaires du Nord. Sans ébranler
la popularité des mouvements de coopération Nord-Sud, il
s'avère urgent de résoudre cette énigme de la
crédibilité des collectivités du Sud qui impacte sur les
modes de traduction et les usages.
En somme, une fois encore, forces est de constater que l'une
des plus grandes faiblesses des jumelages est de prêter le flanc à
des soupçons de détournements frauduleux et, plus
généralement, des détournements sociopolitiques au profit
de certains groupes privilégiés (...), (A. Marie, 2005).
C'est le cas de se demander si les contradictions
rencontrées dans l'exécution des projets, ont fini par avoir
raison de la coopération décentralisée dont l'ambition
était de redynamiser le développement local au Sud?

2.A.2. Les ambiguïtés dans la mise en oeuvre des
projets : sous-traitance du développement et manoeuvres
étatiques
Il convient, au préalable, de donner une définition
claire et succincte des concepts de maître d'ouvrage et de maître
d'oeuvre afin d'éviter les risques de confusion.
· Le maître d'ouvrage est celui qui est
à l'origine du projet. Il finance et est le futur
propriétaire. C'est l'entité porteuse du besoin,
définissant l'objectif du projet, son calendrier et le budget
consacré à ce projet. Le résultat attendu du projet est la
réalisation d'un produit, appelé ouvrage. Lorsque le maître
d'ouvrage ne possède pas l'expérience métier
nécessaire au pilotage du projet, il peut faire appel à une
maîtrise d'ouvrage déléguée (dont la gestion de
projet est le métier). La maîtrise d'ouvrage
déléguée est chargée de faire l'interface entre le
maître d'oeuvre et le maître d'ouvrage afin d'aider le maître
d'ouvrage à définir clairement ses besoins et de vérifier
auprès du maître d'oeuvre si l'objectif est techniquement
réalisable. La maîtrise d'ouvrage déléguée ne
se substitue pas pour autant à la maîtrise d'ouvrage et n'a donc
pas de responsabilité directe avec le maître d'oeuvre.
· Le maître d'oeuvre est
l'ensemblier. C'est l'entité retenue par le maître
d'ouvrage pour réaliser l'ouvrage, dans les conditions de délais,
de qualité et de coût fixées par ce dernier
conformément à un contrat. La maîtrise d'oeuvre est donc
responsable des choix techniques inhérents à la
réalisation de l'ouvrage conformément aux exigences de la
maîtrise d'ouvrage. Le maître d'oeuvre a ainsi la
responsabilité dans le cadre de sa mission de désigner une
personne physique chargée du bon déroulement du projet (on parle
généralement de maîtrise du projet), il s'agit du chef de
projet.
Sources : M. Chassot, Dix ans de coopération
décentralisée française au Sénégal: Quelle
contribution au processus de décentralisation?, Rapport de Stage
DESS coopération et action humanitaire, Paris Sorbonne, 2004-2005
La coopération décentralisée fait souvent
appel à des traducteurs externes. En raison de leur savoir faire
technique de leurs moyens propres, de leur capacité d'expertise et de
leur expérience, ils exécutent bon nombre de projets pour les
collectivités du Nord. Soit on sollicite une ONG qui a en charge la
délégation de maîtrise d'ouvrage, un professionnel du
développement ou un comité de jumelage (Pays de Savoie Solidaire
pour les départements de Savoie et Haute-savoie par exemple)... Ou les
agences de l'eau si le projet concerne l'adduction d'eau dans un village, les
chambres d'agriculture de commerce et d'industrie si le projet touche le
secteur agraire, commercial ou industriel...

54
Ces opérateurs peuvent mettre en oeuvre la
totalité des projets de la coopération (à l'instar du
Partenariat qui gère l'ensemble de la coopération
Nord-Pas-de-Calais et Saint-Louis) ou se charger d'un seul volet (comme
Aced-sud traducteur d'un projet de Rhône-Alpes concernant le volet
éducation de Podor, département de Saint-Louis). Donc nouer des
rapports de partenariat avec une collectivité lointaine n'implique pas
forcément une présence sur place. D'ailleurs en 2005, sur les 57
partenariats actifs ou nouveaux recensés au Sénégal par le
SCAC, la moitié était en délégation de
maîtrise d'ouvrage. Seule une petite dizaine dispose d'un relais local
permanent (Chassot, 2005). Parmi lesquels il faut compter la région
RhôneAlpes avec un correspondant sénégalais (Adama Sow)
basé à Saint-Louis et Matam.
Par ailleurs, avec ces sous-traitants du développement,
il importe souvent d'établir des accords, de passer des conventions et
de formaliser les rôles et les apports respectifs. Parfois lorsque les
collectivités n'ont pas les moyens de mener, elles mêmes, leur
action sur le terrain, elles leurs confient la maîtrise d'oeuvre sur
place. La formalisation de ces rapports invente de nouvelles routines et par
conséquent alourdie considérablement les charges.
Poumon économique de la « région du fleuve
Sénégal », Saint-Louis ne gère pas la totalité
des fonds qui lui sont accordés par la région Rhône-Alpes.
En réalité, une partie de ce budget servira à solder les
frais de fonctionnement des opérateurs qui, dans certains cas, ont en
charge la totalité des fonds. Finalement l'idée d'une
coopération directe entre Rhône-Alpes et Saint-Louis est
totalement vide en substance. Une analyse cognitiviste de cette situation
permettrait de se rendre compte de la contradiction phénoménale
qui existe entre les idées, autour desquelles il y a un consensus, et
les actes individualisés, éparpillés sans aucun souci de
rationalité. Ainsi, Saint-Louis, se trouve aujourd'hui dans un engrenage
entre une coopération qui risque de lui échapper à cause
des vices cachés et une intervention étatique à dominante
jacobine.
L'extrait23 ci-dessous, témoigne parfaitement
de ce recours aux sous-traitants du développement et ses
conséquences :
« En revanche, il est un domaine où je ne vois
aucune avancée, c'est celui des circuits de financement. Alors que la
coopération décentralisée transfère des fonds
publics vers des institutions publiques, pratiquement aucune
collectivité du Nord ne respecte, sur ce chapitre, les normes de la
comptabilité publique du pays d'accueil. Les fonds sont placés
sur des comptes privés ou transféré à des
associations qui les gèrent pour le compte de la collectivité
partenaire. Résultat, ils ne rentrent pas dans le budget des communes et
leur allocation n'est
23 Sources : B. Husson, il faut en finir avec l'aide
projet, alternatives internationales, Juin 2007

pas nécessairement votée par le conseil
municipal, qui n'a pas de comptes à rendre. La signature,
souvent codétenue par un représentant sur place de la
collectivité française, fait que ce dernier a in fine un fort
pouvoir de décision. Dans plusieurs villes ouest-africaines, ce
représentant est surnommé « le dixième adjoint
». C'est à lui et non aux élus que les associations de
quartier s'adressent pour financer des projets au demeurant fort utiles. La
crainte de la corruption et le souci d'éviter les lenteurs
administratives expliquent ces contournements. Mais de telles pratiques ont des
conséquences désastreuses. Comment prétendre soutenir la
construction de la démocratie et les institutions locales si dans le
même temps l'on s'affranchit du droit et des procédures ? Comment
ces institutions seraient-elles légitimes aux yeux des citoyens si dans
le même temps, les appuis apportés les décrédibilise
?». (B. Husson, 2007)
Cette situation est d'autant plus problématique qu'au
Sénégal le système financier local était
inadapté aux impératifs de développement.
Tout d'abord d'un point de vue global, les budgets des
collectivités étaient entièrement encadrés par le
pouvoir central. Ainsi toutes les décisions prises en matière de
dépenses et de recettes devaient toujours être approuvées
par l'autorité de tutelle en l'occurrence le Ministre de
l'économie et des finances. L'Etat par cette tutelle serrée sur
celle-ci se comportait comme un maître incontesté des finances
locales. Ensuite du point de vue de la gestion financière proprement
dite, les ressources disponibles (taxes, impôts, emprunts) à
défaut d'être recouvrées sont insuffisantes pour assurer la
couverture de l'ensemble des besoins locaux. La finalité optimale de la
décentralisation des transferts de compétences est donc
l'éradication de la faiblesse du système financier local d'alors
par l'octroi d'une autonomie financière à toutes les
collectivités sénégalaises. L'Etat
sénégalais met en place un fonds de dotation destinés au
fonctionnement des collectivités et un fonds d'équipement
destiné aux investissements. Le FECL date de 1977 mais il a
été intégré au budget global de l'Etat depuis 1997.
Malgré ces efforts les collectivités sénégalaises
sont très loin de pouvoir satisfaire leurs nouvelles
compétences.
Il est question d'autonomie financière et d'action afin
que la décentralisation puisse être effective. Une des solutions
était l'ouverture de Saint-Louis aux partenaires étrangers mais
là encore sous prétexte de lutter contre le l'absence de
structures techniques fonctionnelles au Conseil régional de Saint-Louis,
l'Etat s'incruste au coeur du dispositif.

56
Si le Conseil région Saint-Louis dispose de la
co-maîtrise d'ouvrage de ses projets avec Rhône-Alpes
conformément aux accords signés, c'est l'ARD qui en assure
l'appui technique. L'agence régionale de développement
implantée dans chaque région sénégalaise est un
établissement public local à caractère administratif.
Pourtant sa création relève de l'initiative des
collectivités locales (conformément à l'article 37 du
CCL). C'est le décret 98-399 du 05 Mai 1998 qui la complète en
l'espèce et fixe les missions, les organes, les ressources
financières et les règles de gestion de la structure. Elle est
placée sous la tutelle technique du ministère en charge de la
décentralisation et sous la tutelle financière du
ministère des finances. L'ARD est chargée d'impulser de
coordonner et de mettre en oeuvre le développement économique,
social, éducatif, culturel et scientifique de la région de
Saint-Louis. Depuis son installation en Juin 2000, l'ARD de Saint-Louis est
dirigée par Monsieur Bouna WARR. Son personnel est composé d'un
statisticien, d'un géographe, d'un socioéconomiste, d'un
planificateur, d'une assistante, d'un agent administratif et comptable et de
deux chauffeurs. Ils ont des compétences techniques que le personnel
politique de la région ne possède.
Dans cette optique, l'ARD a pour missions d'appuyer la
facilitation et la planification du développement local; de renforcer la
mise en cohérence des interventions entre les collectivités
locales de la région de Saint-Louis et avec les politiques et plans
nationaux d'autre part. Son rôle consiste, également, à la
communication, l'information et la mise en synergie des interventions, la
formation des élus, l'appui institutionnel et le renforcement des
capacités des organisations communautaires de base.
Par conséquent, l'ARD était la porte
d'entrée de la coopération décentralisée à
Saint-Louis jusqu'en 2004, date à la quelle le Conseil régional
de Saint-Louis lui a repris la main. Cependant par rapport à ses
antécédents et la réputation dont elle jouit auprès
des partenaires du Nord, on sollicite régulièrement ses services.
A ce titre, Elle contribue à l'élaboration des projets, l'appui
à l'exécution et le suivi des contrats de mise à
disposition des services extérieurs de l'Etat. Sa place est d'autant
plus rayonnante qu'elle s'occupe du suivi évaluation des programmes et
plans d'actions de développement local, de la recherche de partenaires
financiers et techniques au profit des collectivités et des
opérateurs locaux (bailleurs, coopération
décentralisée, ONG, opérateurs etc.) et de l'appui
technique à la maîtrise d'ouvrage.

La nécessité d'avoir un soutien technique pour
le pilotage des actions remet en jeu l'ARD de Saint-Louis car le Conseil
régional n'a pas ce type de structures. Ainsi, à travers son
antenne technique, l'ARD, contribue à l'amélioration des
méthodologies de la planification à Saint-Louis. Cet
établissement renforce, également, le caractère
participatif pour que tous les partenaires puissent s'approprier les plans
locaux de développement en intégrant un forte capacité de
lecture des enjeux mondiaux. Elle a l'obligation également d'organiser
des conférences d'Harmonisation qui doivent regrouper tous les acteurs
de Saint-Louis. Dans cette perspective, M. Bouna Warr Directeur de l'ARD de
Saint-Louis considère qu': « avec l'approche
développement durable à l'échelon international, les
préoccupations environnementales doivent être inclues dans les
plans locaux de développement ».
Avec l'invention d'une stratégie de relance des
économies locales (SREL) l'ARD a expérimenté une nouvelle
méthodologie de planification composée de 4 étapes dont :
le cadrage; l'élaboration des termes de référence; la
concertation publique pour un consensus basé sur une vision et des
engagements ; et la mise en oeuvre. Elle dispose ainsi d'un savoir faire
confirmé dans les méthodologies de la planification lui
permettant de tirer son épingle du jeu par rapport aux autres services
de la région.
L'ARD représente, désormais, la structure
clé de la coopération à Saint-Louis et tous les
partenaires du Nord, notamment Rhône-Alpes, ont salué ses
prestations. D'ailleurs, en 2008, son budget a été
réévalué pour passer de 85 millions de Fcfa, en 2003,
à 104 Millions, selon un article de l'APS (l'agence de presse
sénégalaise). Ce nouveau budget englobe, alors, la contribution
de l'Etat pour 40 millions, la cotisation des collectivités locales pour
13 millions, la participation de la coopération
décentralisée pour 10 millions et la coopération
luxembourgeoise pour environ 33 millions de Fcfa.
Au cours de ces dernières années l'ARD de
Saint-Louis a enregistré de nombreuses réalisations. Elle a mise
en oeuvre, entre autres réalisations, la construction de la maison du
quartier de Diamaguene pour un montant de 26 millions.
De même, l'appui à la filière avicole
s'est traduit par la création de l'association des aviculteurs, la
constitution d'une mutuelle et l'implantation d'une fabrique d'aliments de
volaille. C'est donc plus qu'un travail d'accompagnateur ou de facilitateur
mais de porteur de projets. Par ailleurs, l'ARD a réalisé des
tableaux de bords pour les communes de Saint-Louis, de Dagana et de
Richard-Toll (les jardins de Richard) et le Plan Régional du
Développement

58
Intégré (PRDI) pour la Région. Même
dans le cadre de l'exécution du Programme d'Appui aux Régions,
(PAR), l'ARD joua un rôle primordial. Toutefois le PAR a eu un coup
d'arrêt depuis la cessation des financements de l'Union
européenne. Tout le problème se situe, donc, au niveau de la
gestion des ressources.
Néanmoins, l'ARD a en charge des projets d'envergure,
parmi lesquels, il y a la réactualisation du PRDI (plan régional
de développement intégré) et la mise en place d'un
système d'information géographique (SIG). Pour renforcer la
démocratie participative, elle a créé de cadres locaux de
concertation. Dans le domaine de l'appui à la planification de
Saint-Louis, elle a piloté la réalisation de PIC (Plans
d'investissement Communaux).
Au fur et à mesure de ses interventions l'ARD est
devenu le poumon de l'action publique locale à Saint-Louis. Ce
truchement du développement local par les organes
déconcentrés reste d'actualité. En effet, les politiques
internationales, à l'image des OMD, sont exécutées
directement par l'Etat bien que c'est destiné aux habitants des
collectivités.
On peut en déduire qu'avec la mise en place de ces
établissements locaux directement rattachés à deux
ministères (finances et décentralisation) occupées par des
« savants » nommés par le « politique », l'Etat
sénégalais a fini par court-circuiter le système de
coopération dans la région de Saint-Louis. Si les mêmes
critères avaient été employés pour doter le Conseil
Régional de Saint-Louis d'une structure technique avec des personnels
à la mesure des compétences requises, la région de
Saint-Louis gagnerait en autonomie.
Ainsi, le Secrétaire général du Conseil
régional de Saint-Louis M. Amath Dia tire la sonnette d'alarme en ces
termes: «Quand on prend les grandes politiques internationales du PNUD
ou des OMD qui sont pilotées au niveau national, c'est le retour du
jacobinisme, de la centralisation après la
décentralisation».
Le principe de libre administration des collectivités
locales est, pour ainsi dire, intégralement vidé en substance par
des pratiques étatiques occultes.
L'Etat sénégalais pratique, également, un
pouvoir exclusif de contrôle sur les collectivités locales. Ce
contrôle administratif ou de légalité est exercé
sans retenue par le représentant de l'Etat auprès des
collectivités (le gouverneur pour la région, le préfet
pour la commune et le sous-préfet pour la communauté rurale).
Pourtant les critères d'objectivité sont parfois

marginalisés par des pratiques souterraines. Une
collectivité qui a à sa tête un élu de l'opposition,
du parti socialiste (PS) par exemple, peut se voir refuser des
réalisations par le contrôleur étatique bien que les
études de faisabilité aient été satisfaisantes et
les textes respectés. Robert SAGNA ex-maire PS en Casamance en aurait
fait les frais. En effet ce dernier a du renoncer à plusieurs projets de
coopération décentralisée avec le Nord au détriment
des populations casamançaises. M. Dia Secrétaire
Général du conseil régional de Saint-Louis disait à
cet égard: « Quelque soit la situation si l'Etat veut bloquer
une collectivité, il a toujours le moyen de le faire. Il est
déjà arrivé à Saint-Louis que le gouverneur pose
son veto pour l'exécution d'un acte, mais généralement on
fait ce qu'il faut pour être conforme aux textes ».
Nonobstant les projets qui dépassent 100 000 € le
contrôle de légalité s'exerce à posteriori par le
gouverneur de la région de Saint-Louis. Ce contrôle est
considéré par certains élus comme une véritable
entorse et un frein à la réussite du processus de
décentralisation.
Toutefois, l'inégalité des rapports
centre-périphérie n'est pas exclusivement un
phénomène qui sévit dans les pays du Sud. Certes l'ampleur
parait moindre mais on localise des comportements similaires en France. A ce
titre la dépendance des collectivités françaises, vis
à vis, de l'Etat tient au fait que ce dernier avec son MAEE est un
acteur important des relations de coopération. En effet, le MAEE met en
oeuvre des budgets de cofinancement réservés à la
réalisation des projets de développement durable et à
l'appui aux actions de coordination et de sensibilisation à la
solidarité internationale. L'objectif optimal étant
d'universaliser, en douceur, les modes de gouvernance locale. Par des
dispositifs de coordination et des cofinancements réguliers, l'Etat
central et ses appareils déconcentrés se sont
révélés être plus que de simples
partenaires-facilitateurs mais de véritables co-maîtres d'ouvrage
des projets de coopération décentralisée.
C'est volonté affichée, en trompe l'oeil, de
mieux soutenir financièrement l'action extérieure des
entités françaises connaît un relatif succès.
Cependant, par ce que la région Rhône-Alpes sollicite des fonds
propres, elle ne devrait par subir cette immixtion dans son partenariat avec la
région de Saint-Louis.
A présent, tout le problème, se situe au niveau
du déficit de concertation entre les collectivités
françaises qui interviennent à Saint-Louis. Elles ne sont pas
très disposées à harmoniser leurs actions afin
d'éviter les risques de doublons. Même si cette rationalisation
permettrait d'équilibrer le niveau d'évolution des
collectivités et de rendre performante la coopération.

60
Le rapport d'activités ci-dessous, de la commission
« coopération décentralisée » des Cités
et Gouvernements Locaux (CGLU), traduit parfaitement cette situation : «
chaque action de coopération décentralisée est encore
trop souvent « une chasse gardée » pour les pouvoirs locaux.
De nombreuses collectivités territoriales du Nord résistent
à mutualiser leurs expertises, partager leurs ressources, coordonner des
actions de coopération en direction du même
partenaire».
La coopération décentralisée prête,
donc, le flanc à une bureaucratisation qui alourdit les
procédures et un contrôle étatique qui en diminue les
effets. Dans ce contexte exacerbé de vices cachés et d'effets
pervers, comment peut-on espérer rendre effective la
décentralisation à Saint-Louis?
2. B. Rendre opérationnelle la décentralisation
à Saint-Louis ou dépasser la symbolique des donations
Depuis sa consécration juridique, même bien avant
la coopération décentralisée a effectué un grand
bon en avant notamment sur l'axe Nord-Sud. Ses principaux objets ont
été revus et corrigés dans certains cas notamment avec les
pays émergents, mais dans d'autres on peut encore identifier les
mêmes types d'actions tels que : les donations, les
coopérations-cadeaux, l'aide-projet ou ponctuelle. Pourtant de nos
jours, les enjeux sont autres. Il s'agit, entre autres, de contribuer au
renforcement institutionnel des collectivités du Sud comme Saint-Louis.
Une réelle orientation aux besoins est, également,
souhaitée. Situation qui devrait permettre d'instaurer une notion de
service public, de prendre en compte les demandes des groupes sociaux
minoritaires, d'inciter à l'élaboration des plans locaux de
développement travaillés en concertation avec l'Etat et
d'appliquer des systèmes fiscalités locales à Saint-Louis.
Autrement dit, l'action publique locale gagnerait à être
recentrée dans le champ du développement à partir des
problèmes concrets que le Conseil régional de Saint-Louis doit
résoudre. Parmi lesquels il y'a l'absence chronique de moyens
financiers, techniques et surtout humains et la non formation du personnel de
l'administration publique locale. Pour y parvenir l'adoption d'une approche
stratégique globale de développement conduite par des structures
et dispositifs fiables et pérennes s'avère indispensable.

2.B.1. Aider à la maîtrise d'ouvrage des acteurs du
développement au Sud
La coopération décentralisée a
été saluée avec enthousiasme dans le monde entier par ce
qu'elle devait oeuvrer à la mise en place d'une coopération des
peuples afin d'offrir un « visage humain à la mondialisation
» pour reprendre M. Bouna WARR de l'ARD de Saint-Louis.
Cependant sur le plan empirique, l'aspect mise en rapport des
acteurs et partage d'expérience fait défaut. En effet pour la
plupart des projets, il y a les acteurs de Rhône-Alpes qui se chargent de
leur exécution.
D'après le secrétaire général du
Conseil régional de Saint-Louis M. Amath Dia : « jusqu'en 2006
seuls 5% des projets étaient gérés par la région de
Saint-Louis ». Ce qui diminue considérablement l'apport
financier et ne permet pas aux élus locaux de se perfectionner dans la
gestion budgétaire. Pourtant la maîtrise d'ouvrage de Saint-Louis
est reconnue dans les accords conventionnels, mais force est de constater,
qu'elle reste lettre morte. Cette attitude partagée par les
collectivités françaises n'est pas tout à fait
déplorable car une collectivité comme Saint-Louis ne dispose
d'aucune structure ou dispositif technique fonctionnelle responsable de la
coopération décentralisée indépendamment des
services étatiques déconcentrés. Par conséquent les
raisons de ce dysfonctionnement sont évidemment à rechercher de
part et d'autres.
D'abord à Saint-Louis, la coopération
décentralisée est une chasse gardée pour certains
responsables. Ça leurs offre une légitimité auprès
des citoyens, des réseaux internationaux de relation et notamment des
voyages en France. Dans cette perspective, ce n'est pas faire injure aux
élus locaux du Sud, en reconnaissant qu'une proportion d'entre eux
considère les voyages à l'étranger, à la solde de
leur collectivité, comme une récompense pour services rendus. Ils
mettent, ainsi, en oeuvre des stratégies de contrôle et
d'accaparement des avantages au grand dam des populations. Pour nourrir des
fins personnelles les élus locaux du Sud font usage de la
coopération décentralisée. Pourtant de tels comportements
ne sont pas méconnus des collectivités du Nord, ce qui peut
laisser penser à des complicités entre élus.
La décentralisation ne signifie pas le retrait des
élites qui détenaient ou détiennent le pouvoir
d'Etat.
Le pouvoir local peut être confisqué par de petits groupes de
personnes, comme l'était
le pouvoir central, confortés par les
appuis extérieurs qu'ils ont négociés. Les
collectivités

62
locales ne sont pas à l'abri d'un contrôle par les
oligarchies locales, écrans entre les aspirations des citoyens et les
opérateurs du Nord (B. Husson)24.
Autrement à Rhône-Alpes, on se pose des questions
sans doute légitimes, car depuis 1997 on finance des projets mais d'un
point de vue qualitatif personne ne peut dire quels sont leurs impacts sur les
cibles. Entre 1997 et 2008, la région de Saint-Louis a englouti
8.245.085 € de la région Rhône-Alpes. Ce montant est colossal
et les résultats peu probables.
Malgré cela, on tend de plus en plus vers la
maîtrise d'ouvrage de la collectivité du Sud. En effet, avec le
CRREJ et l'électrification de Podor (cf. Partie2-A-1), le conseil
régional de Rhône-Alpes concrétise son engagement de
renforcer la maîtrise d'ouvrage de Saint-Louis. Bien que depuis 2003 le
personnel n'a pas été mobilisé pour effectuer des stages
de formation à Rhône-Alpes, il y a de réelles initiatives
dont la création d'une filière électro-bobinage et l'appui
au centre de formation. Dans cette optique, la région Rhône-Alpes
a subventionné la dotation en matériels informatiques des
collectivités de Podor (département de Saint-Louis). Avec un
budget global de 80.000 € Rhône-Alpes a également
financé l'organisation, en 2002, d'une session de formation à la
sécurité sanitaire aux personnels de l'Hôpital de
Saint-Louis. Dans le cadre des échanges interprofessionnels entre
acteurs de Rhône-Alpes et Saint-Louis une première bourse a
été octroyée à M. FAYE Babacar, chargé des
affaires administratives au Conseil régional de Saint-Louis. En outre,
à travers l'université d'été de la francophonie
certains membres du personnel ont bénéficié d'une
formation.
Certes Rhône-Alpes met à disposition ses
expériences acquises dans la conduite des politiques de
développement local, mais elle se heurte à l'absence chronique
d'une administration territoriale de qualité. Par conséquent les
initiatives sont insuffisantes et le recours aux traducteurs et sous-traitants
du développement se substitue à la nécessité de
former des acteurs locaux qualifiés.
L'appui à la maîtrise d'ouvrage de Saint-Louis
passe donc par la formation professionnelle du personnel territorial et
l'échange d'expériences entre élus lors de stages
appropriés ou de visites entre acteurs du développement. Ce types
d'actions entrent dans le domaine des échanges institutionnels et
marginalisent de fait l'idée d'un renforcement des capacités des
acteurs du Sud, indispensable à la réussite du processus de
décentralisation.
24 Sources : B. Husson, la coopération
décentralisée, légitimer un espace public local au Sud et
à l'Est, CIEDEL

Cependant, étant donné que la politique de
coopération ne vaut que par la reconnaissance des publics cibles, on
peut se demander comment la région Rhône-Alpes doit
réorienter ses interventions afin qu'elles répondent
concrètement aux besoins des populations ?
II. B. 2. Renforcer les capacités institutionnelles
d'administration et de gestion de Saint-Louis
Les collectivités françaises ont progressivement
pris conscience de la nécessité de renforcer les capacités
d'administration de leurs partenaires du Sud. Cette thématique connue
sous le terme de « l'appui institutionnel », dans le jargon de la
coopération décentralisée était un
élément récurrent dans les discours. A présent,
elle a franchi un palier car des discours on devrait passer à l'acte.
Dit autrement, l'échange institutionnel basé sur des «
voyages cocktails » entre élus, est entrain de céder, de
manière lente mais graduelle, la place à l'appui
institutionnel.
C'est une probable évolution, bien qu'il ne faille pas
aller très vite en besogne car le stade des promesses n'est pas
complètement désuet. A ce titre une distinction précise
entre les termes d'échange institutionnel et d'appui institutionnel
s'avère nécessaire.
Echange institutionnel
|
Appui institutionnel
|
L'échange institutionnel peut être défini
|
L'appui institutionnel peut être défini comme
|
comme des rencontres, des visites, des
|
le renforcement d'une collectivité :
|
échanges d `expérience sur l'organisation et
|
Dans sa capacité à établir et programmer
des
|
le fonctionnement d'un service ou d'un
|
priorités réalistes en prenant en compte les
|
ensemble de services et plus généralement sur
l'organisation et le fonctionnement d'une
|
contingences sociales, économiques,
politiques et financières ; dans ces
|
collectivité locale.
|
compétences pour assurer la maîtrise
d'ouvrage des équipements relevant de ses attributions,
dans sa capacité à organiser et
pérenniser les services collectifs nécessaires à
améliorer les conditions de vie des populations.
|

64
Sources : B. Husson, «Coopération
décentralisée et renforcement institutionnel, une dynamique
à construire»,CIEDEL, in II conferencia anual del Observatorio de
cooperacion decentralizada UE-AL, Guatemala, Mayo 2007, p.14
Donc, pour ce dernier, à la différence de
l'échange institutionnel, l'appui institutionnel est « un
processus par lequel les organisations, les institutions -dont les
collectivités locales- acquièrent la capacité d'exercer
leurs responsabilités, de se fixer des objectifs et de mettre en oeuvre
les moyens pour les atteindre dans les domaines qui relèvent de leur
compétences ».
Sur la base de cette définition, l'enjeu principal est
celui de la gouvernance locale. Il faut, par conséquent, aider les
agents et acteurs de la région de Saint-Louis à renforcer leurs
capacités de gestion et d'organisation, et non les dessaisir de leurs
responsabilités.
A priori il n'y aurait pas de recette type à appliquer.
Tout dépend de la volonté politique des élus du Nord et du
Sud. Quelques recommandations sont apodictiques à ce niveau.
Le premier est d'aider les collectivités de la
région de Saint-Louis à se doter d'un système de
fiscalité locale malgré la faiblesse des moyens qui sont les
leurs. Cette question exige une réponse urgente par ce que l'aide
étrangère est tout sauf un soutien permanent. A ce tire M. FAYE
Babacar du Conseil régional de Saint-Louis reconnaît que : «
la coopération décentralisée n'est pas un financement
crédible du développement local. Elle doit être
accompagnée d'une vision stratégique de la
décentralisation et du développement local ».
En fait, il y'a des projets qui s'attaquent aux vrais
problèmes (comme l'éducation des jeunes, l'assistance
apportée aux enfants de la rue « les talibés », la
fourniture en équipement sanitaire des hôpitaux ou la construction
de case de santé dans les villages...) de Saint-Louis. Pourtant,
dès que les financements s'estompent, suite à la fin d'engagement
du ou des bailleur(s), tout s'écroule. Tant que les ressources de
financement seront aléatoires, l'idée d'un développement
durable de la région de Saint-Louis restera totalement vide de sens. En
réalité, il s'agit d'un « simulacre » de
développement qui ne vient pas forcément de la région
RhôneAlpes ni des élus de Saint-Louis, mais plutôt du niveau
de développement faible auquel la région Rhône-Alpes doit
faire face. Par exemple, au niveau de la mobilisation des ressources, les
collectivités doivent pouvoir assurer la pérennité des
services proposés à leurs habitants.

Le nombre de prestations offert par Saint-Louis n'a de sens
que si les populations y ont durablement accès. Eu égard cette
situation préoccupante, il y'a lieu d'espérer. Au Nord et au Sud,
la volonté politique affichée par la nouvelle
génération d'élus pourrait redorer le blason de la
coopération décentralisée en effectuant une
réorientation aux besoins. Ainsi, la région Rhône-Alpes,
par exemple, a adopté le principe des fonds locaux de
développement dans certaines de ces coopérations. Il serait plus
adéquat d'appliquer le même principe pour la région de
Saint-Louis. Cependant, faire évoluer les pratiques, améliorer la
qualité de l'aide induit des coûts. Cela nécessite de
l'expertise, de la formation et beaucoup de temps.
Si Rhône-Alpes n'hésite pas à
dépenser de l'argent pour organiser des comités mixtes qui ne
sont qu'un suivi-évaluation politique, elle ne voit pas, en règle
générale, l'importance de consacrer ses fonds à la mise en
place de structures financières opérationnelles. Force est de
constater qu'avec de telles pratiques, c'est encore la logique du don qui
prime.
Par ailleurs, les collectivités locales du Nord ont des
compétences tangibles, mais celles qui appuient leurs partenaires du Sud
dans le recouvrement des recettes se comptent sur les doigts de la main. Il est
d'autant plus urgent d'agir que la situation actuelle entretient des effets
pervers.
En effet, les Etats du Sud comme le Sénégal ne
doivent plus être les concurrents directs de leurs collectivités
locales mais des interlocuteurs sans lesquels la décentralisation ne
pourra jamais être effective. La région Rhône-Alpes, bien
qu'elle écarte toute ingérence étatique dans son action
extérieure, doit reconnaître le rôle central inhérent
à l'Etat sénégalais. Ce dernier à travers les
efforts qu'il entreprend, en toute légitimité, est le lieu
d'élaboration des règles de la vie commune, il est aussi garant
de la cohésion sociale et des instances de définition des
règles de fonctionnement démocratique. Autrement dit, les
collectivités sénégalaises gagneraient en
renforçant leur collaboration avec l'Etat central, plutôt que de
laisser s'instaurer un rapport de force. A cet égard, le responsable du
Partenariat (ONG opérateur permanent du partenariat Nord Pas de Calais
et Saint-Louis) reconnaît que : « les informations circulent
bien entre acteurs locaux à Saint-Louis mais c'est avec les programmes
nationaux de développement qu'il y a très peu de concertation
».
Il faut, deuxièmement, équilibrer les relations
bilatérales de collectivité à collectivité par
la
prise en compte de leur impact sur les collectivités voisines sous
peine d'entretenir des
inégalités locales. Un maire du Sud qui
a fait des études et jouit de relations à l'étranger a

66

moins de mal à établir une coopération
décentralisée avec le Nord, tandis que celui du village voisin,
analphabète et sans relations, restera sur la touche, (Bernard Husson,
2007).
La région Rhône-Alpes devrait inclure dans ses
principes d'action une meilleure articulation et répartition des
interventions à Saint-Louis. Certes, de prime abord, ça
paraît difficile car la population de la région de Saint-Louis est
inégalement répartie sur son territoire mais avec du volontarisme
politique, on peut tout surmonter. En effet, le département de
Saint-Louis, avec seulement 879 km2 soit 5% du total
régional, concentre 30,8% de la population. Le département de
Podor qui constitue 68,0% de la superficie régionale est habité
par 41,5% de la population régionale. Dagana est
caractérisé par l'équilibre entre sa superficie et sa
population qui représentent respectivement 27,4% et 27,7% du total de la
région.
Donc, la densité de la population de Saint-Louis ne
correspond pas à sa situation géographique, ce qui accentue les
déséquilibres régionaux. Par ailleurs, le SIG
(système d'information géographique) mis en oeuvre par l'ARD de
Saint-Louis, est un outil qui doit permettre de situer les localités les
plus exposées à la pauvreté. C'est-à-dire là
où tous les seuils des IDH (indices de développement humain) sont
largement franchis.
Ces inégalités de contexte et de situation se
retrouvent à plusieurs niveaux. Par exemple la ville de Saint-Louis
dispose d'une meilleure couverture internationale, à cause de son
passé, son personnel administratif plus qualifié et ses
élus dotés de réseaux, que les autres collectivités
locales de la même région. C'est la raison pour laquelle, en 2006,
lors des comités mixtes organisés en France, Saint-Louis a
invité le Conseil régional de Rhône-Alpes à
concentrer ses actions sur le département de Podor qui était dans
l'abandon. Des initiatives, de ce type, sont prises par les structures de
coordination, comme RESACOOP, entre autres, ou lors des rencontres annuelles,
à l'instar, des Journées de la coopération
décentralisée organisées au Sénégal, dont
l'édition de 2006 s'est déroulée à Saint-Louis.
Toujours est-il que la concertation entre les différents partenaires
français de Saint-Louis, n'est pas bien ancrée dans les
dynamiques de cette coopération bilatérale des
collectivités franco-sénégalaises.
La réforme consiste donc à rationaliser les
actions menées et à construire une dynamique globale de
développement. Pour y arriver, il faut élaborer une planification
stratégique de la région de Saint-Louis. Ainsi les demandes
adressées à Rhône-Alpes ne ressembleront plus à
«une liste de courses au supermarché» mais plutôt aux
besoins prioritaires identifiés en concertation avec les populations
locales, par le biais des dispositifs de participation bien ancrés
à Saint-Louis.
Enfin, malgré quelques avancées
soulignées précédemment, force est de constater que
l'aideprojet est encore très présente dans la coopération
Rhône-Alpes et Saint-Louis. Pour sortir de cette situation, seule la
région Rhône-Alpes détient les clés. En
finançant des fonds locaux de développement, le Conseil
régional de Saint-Louis serait décideur ultime de l'engagement
des dépenses. Par contre, la région Rhône-Alpes pourrait,
désormais, lui exiger des comptes rendus périodiques sur
l'utilisation des fonds. Certaines initiatives répondent
déjà à cette donnée, mais il faut sortir du cadre
cérémonieux, mondain ou folklorique et dialoguer, en termes, de
technicité et d'expérience. Toutefois, cette situation ne peut
être réalisable que si des structures de suivi-évaluation
des réalisations, d'ordre technique, sont mises en place. D'autant que,
les comités mixtes organisés chaque année pour faire le
point sur les projets mis en oeuvre ou en cours d'exécution,
interviennent uniquement, sur le plan politique. Avec de telles
avancées, la gestion des fonds devrait pouvoir répondre à
aucun souci d'efficacité et de rigueur.

68
CONCLUSION
A présent, certains observateurs s'aventurent à
analyser la coopération décentralisée sur la base des
instruments de mesure de la branche des politiques publiques. A vrai dire, tous
les ingrédients pour justifier de telles initiatives sont à notre
portée. D'abord la coopération décentralisée a
été institutionnalisée à travers des agences
spécialisées, il y'a ensuite un travail d'identification des
problèmes (diagnostic des territoires) et de préparation (avec
des commissions et des négociations internes et externes entres
acteurs). Les acteurs mobilisent des ressources (connaissances ou
réseaux), sont plus ou moins libres, leurs choix sont guidés par
des intérêts ou des idées. Ils mettent en place des
stratégies. Et enfin, il y'a un travail de production (mise en oeuvre)
et de suivi-évaluation. Toutes ces étapes, inhérentes
à la dynamique constitutive des politiques publiques se retrouvent dans
le processus conceptuel d'une politique de coopération
décentralisée.
Récapitulatif des phases du cycle de projet
:

Sources : B. Husson, Coopération
décentralisée et cycle de projet, Approche méthodologique,
CIEDEL
En dépit de cette dynamique semblable, la
spécificité d'une politique de
coopération
décentralisée tient au fait qu'elle ne
mobilise pas les mêmes circuits de mise sur agenda,
qu'une politique
publique. Par exemple, une politique publique aussi controversée que
l'IVG

(interruption volontaire de la grossesse), malgré la
forte influence des milieux conservateurs ou de l'Eglise a été
adoptée, en 1974 en France, car c'était de la
responsabilité des pouvoirs publics. Alors que la coopération
décentralisée dépend entièrement de la
volonté charitable ou des ambitions stratégiques des élus
locaux du Nord et des bailleurs internationaux. Les collectivités du Sud
n'ont rien à leur exiger, sinon, à solliciter leur bonne
volonté.
Eu égard cette controverse, la coopération
décentralisée peut être analysée comme une
catégorie de politique publique afin d'examiner, plus amplement, son
évolution. Le bilan étant mitigé, il y a trois
écueils à surmonter : l'inefficacité,
l'ineffectivité et l'inefficience.
- Elle est inefficace, par ce qu'en dépit des
interventions répétées les populations sinistrées
de la région de Saint-Louis ne voient pas les finalités. Mieux,
elles se sentent léser par les acteurs locaux qui réceptionnent
les subventions. Nonobstant ce fait, l'information ne circule guère
entre le groupe des élus, agents ou acteurs et la population pourtant
des initiatives ont été prises dans ce sens, à l'instar
des comités de quartiers. Le volontarisme souhaité des acteurs
comme moyen d'impulsion du développement des collectivités du
Sud, a lamentablement échoué. Chaque intervenant campe sur ses
positions. Par ailleurs, étant donné que le plus pauvre a besoin
du plus riche, il est tiraillé entre une coopération qui lui
échappe, les besoins urgents à prendre en charge et les
stratégies d'accaparement des objectifs. Finalement la
coopération décentralisée n'est pas différente de
la coopération interrégionale car les régions traitent
avec les régions, les communes avec les communes au grand
détriment des communautés rurales de Saint-Louis qui n'ont pas
d'équivalent en France et dans le monde. Il n'y a pas une
véritable synergie entre les acteurs de Rhône-Alpes et ceux de
Saint-Louis, ni une interconnexion entre différents niveaux de
collectivités territoriales ;
- Elle est ineffective, car des dysfonctionnements sont
intervenus pendant la mise en oeuvre. Par exemple les décisions prises
conjointement, entre le Conseil régional de Saint-Louis et le Conseil
régional de Rhône-Alpes, de travailler en co-maîtrise
d'ouvrage pour la réalisation des projets ne sont pas bien
appliquées. Rhône-Alpes, préfère dans bien des cas,
confiait les exécutions à une ONG ou une association
opérateur de développement qui affiche, certes, une meilleure
connaissance des sociétés du Sud, mais qui n'en est pas moins
qu'un sous-traitant du développement. Pour bénéficier des
cofinancements du MAEE, la région Rhône-Alpes devait harmoniser
ses interventions avec les autres régions françaises en
coopération avec Saint-Louis, tout en prenant en compte les politiques
nationales ou bilatérales francosénégalaises de
développement. Mais en refusant ces cofinancements, le Conseil
régional de Rhône-Alpes montre que la coopération
décentralisée représente une forte valeur ajoutée
pour

70
sa région. Par conséquent, c'est une chasse
fortement gardée pour les représentants des collectivités
et les opérateurs qui vivent de ça ;
- Elle est inefficiente à cause de l'écart qui
existe entre les moyens mobilisés (8.245.085 € entre 1997 et 2008)
par la région Rhône-Alpes, sur fonds propres, et les
résultats obtenus. La région Rhône-Alpes a beaucoup fait
pour l'éducation et la santé dans la région de
Saint-Louis, notamment au niveau des collèges et lycées de Podor.
Toutefois, il y a un tel déséquilibre dans la région de
Saint-Louis, que si on fait une évaluation proportionnelle à
l'ensemble du territoire, les résultats obtenus à un niveau
départemental n'auront aucune valeur à un niveau
agrégé. Par exemple entre 2006 et 2007, les effectifs de
l'enseignement moyen (collège) ont augmenté de 33,8% dans le
département de Podor, alors qu'ils sont de 16,2% à Saint-Louis et
de 0,7% à Dagana25. Ce qui fait une variation totale
régionale de 16,3%, malgré les chiffres exceptionnels de Podor.
Il semblerait, alors, que les collèges de Dagana soient en situation de
très faible fréquentation, contrairement aux départements
de Saint-Louis et de Podor. A partir, de ces données le Conseil
régional de Saint-Louis devrait pouvoir réorienter ses
partenaires français afin d'éviter que de telles
déséquilibres ne persistent entre les trois départements
qu'elle administre. Cependant même si la région Rhône-Alpes,
par bonne volonté, réoriente ses actions de manière
rationnelle, il semble impossible de bâtir un développement
durable sur des ressources aléatoires. D'autant plus que les fonds
alloués à Saint-Louis par l'Etat ont été
diminués de 180 Millions de francs cfa, en 2009. Soit à peu
prés 30% a été enlevé de cette enveloppe par
rapport à 2008. Dans ces conditions si les trois partenaires
français, dont Rhône-Alpes, qui cofinancent le CRREJ
arrêtent leurs cofinancements en 2010, comment le Conseil régional
de Saint-Louis va réussir à maintenir les mêmes types de
prestations offerts à sa jeunesse, avec les maigres allocations
budgétaires de l'Etat. La région Rhône-Alpes investie,
énormément, pour le développement local de Saint-Louis,
sur fonds propres, mais jamais, elle ne va prendre en main le destin de la
population Saint-louisienne. C'est à l'Etat sénégalais que
revient le soin de s'y employer. Il doit reprendre en main le destin de ses
collectivités locales, jouer son rôle de régulateur social
et de garant des bonnes conduites, en inculquant à ses fonctionnaires
une éthique de responsabilité. Sauf l'adoption d'une approche
stratégique globale de développement, la coopération
décentralisée risque de n'être qu'un
épiphénomène sans réel impact sur la
réduction de la pauvreté qui gangrène les populations
sénégalaises et du Sud en général.
25 Sources : Evolution des effectifs du moyen par
département de 2003 à 2007, IA, Saint-Louis

BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages:
F. Dianguitukwa, Migrations internationales,
codéveloppement et coopération décentralisée,
Paris, Harmattan, 2008
B. Husson et B. Sall, Migration et Développement.
Evaluation de la stratégie du GRDR dans le bassin du fleuve
Sénégal, F3E, CIEDEL, Groupe SAHEL Recherche, 2001, 98 p.
A. Marie, La coopération décentralisée
et ses paradoxes. Dérives bureaucratiques et notabilières du
développement local en Afrique, Paris, Karthala, 2005
C. Noizet, La coopération décentralisée
et le développement local: les instruments juridique de
coopération, Paris, Harmattan, 2003
F. Petiteville, Les collectivités locales dans la
coopération Nord-Sud, Paris Harmattan, 1995.
M. SAMBENE et I. KA, Évaluation du programme de
coopération décentralisée, Ardèche Drôme
Région de Matam, Paris ACDIL, F3E, 2005
A. VION et E. NEGRIER, La coopération
décentralisée, un étage du jeu diplomatique, Lille,
Congrès AFSP, 2002.
Articles et chapitres d'ouvrage:
S. Allemand, «Gouvernance locale: le pouvoir
partagé», Sciences Humaines, N°1 Janvier 2000.
B. Husson, «La coopération
décentralisée légitimer un espace public local au Sud et
à l'Est», traverses N°7 juillet 2000.
B.

72
Husson, «Coopération décentralisée
et renforcement institutionnel, une dynamique à construire»,
CIEDEL, in II conferencia anual del Observatorio de cooperacion decentralizada
UE-AL, Guatemala, Mayo 2007
C. Josselin, «La coopération
décentralisée une nouvelle donne institutionnelle favorable
à l'ouverture des collectivités locales sur le monde », in
la vie départementale et régionale, juin 1995, Paris, Annexe A1
p9.
RESACOOP, «l'évolution des partenariats entre acteurs
de Rhône-Alpes et du Sénégal», Lyon, Privas, le 28
Juin 2002.
B. Salamand, «ASI et collectivités locales:
partenaires, collègues ou concurrents?», Territoire, n°1,
Janvier 2000.
Documents divers:
AFVP, Planification et financement du développement
local, Dakar, 2000, 22 p.
ANDS, Situation économique et sociale de la
région de Saint-Louis en 2007, Septembre 2008
Cab Juby Remix, Evaluation de l'action des acteurs non
gouvernementaux au Sénégal Rapport intermédiaire,
Paris, 2005
M. Chassot, Dix ans de coopération
décentralisée française au Sénégal: Quelle
contribution au processus de décentralisation?, Rapport de Stage
DESS coopération et action humanitaire, Paris Sorbonne, 2004-2005
CNCD, Guide de la coopération
décentralisée, La Documentation française, 2000,
97p.
Conseil Régional Rhône-Alpes, Assises
régionales de la solidarité internationale et de la
coopération décentralisée, Lyon, 2005, 54p.

Coopération japonaise, Évaluation de la
décentralisation sénégalaise, Dakar, 2005, 99p.
CUF, Pauvretés et inégalités en Afrique
Sub-saharienne: le rôle des collectivités et apport de la
coopération décentralisée, Paris, 2002
DIRCOD, Les cahiers de la coopération
décentralisée et la lutte contre la pauvreté. Quelles
orientations pour des action efficaces, Saint-Louis, 4ème
édition, 28 au 30 juin 2006
DIRCOD, Journée de la coopération
décentralisée et de la planification régionale, Actes
de Kaolack et Fatick, 2ème Edition, 14-20 Mai 2004
MAE-SCAC de Dakar, Compte Rendu d'Activités
PADDEL, Dakar, 2004, 23p.
Ministère sénégalais des
collectivités locales, Les budgets prévisionnels des
collectivités locales, étude comparée des tendances de
croissance, Dakar, 2002, 10p.
MEL, Annuaire des collectivités locales, Dakar,
2006-2008
Pôle CNG, Partenariat de coopération
décentralisée franco-sénégalais 1994-2008,
Dakar, 2009.
RESACOOP, Identifier un partenaire et
engager une démarche de coopération décentralisée,
Lyon, 1998, 6p.

74
Annexe 1 : Liste des entretiens
(durée moyenne 1h00 à 2h00)
1- M. Marc Noailly de la Direction des Relations
Internationales de Rhône-Alpes (responsable de la coopération
décentralisée Afrique, Méditerranée et de la
Francophonie), le 18 Février 2009 (téléphonique);
2- M. Mohamed SYLLA directeur de l'ADOS (opérateur
permanent de la coopération RhôneAlpes/Matam), le 20 Mars 2009
à 10H00 (téléphonique);
3- Mme GAYE Khady DIENG, responsable de la division accords et
partenariats à la Direction de la coopération
décentralisée, le 09 Avril 2009 à 16H00 à Dakar;
4- M. Etienne TURPIN responsable de la direction des
collectivités locales (DCL), le 10 Avril 2009 à 11H00 à
Dakar;
5- M. Amath DIA Secrétaire général du
Conseil régional de Saint-Louis, le 14 Avril 2009;
6- M. Bouna WARR de l'ARD de Saint-Louis (Le Directeur), le 17
Avril 2009 à 10H00;
7- M. Samba Laobé MBAYE, chargé du programme
d'appui à la gestion urbaine de la commune de Saint-Louis, 17 Avril 2009
à 17H00 à Saint-Louis;
8- M. Babacar FAYE, chargé des affaires administratives
du Conseil régional de Saint-Louis, le 18 Avril 2009 à
Saint-Louis ;
Un travail de documentation à la maison des élus
locaux (MEL) du Sénégal a été, également,
effectué à Dakar. Le responsable du centre de documentation, M.
Abdou GUEYE, a été très disponible durant cet exercice.
Nb : Des contacts ont été établis avec
Adama Sow (représentant permanent de Rhône-Alpes à
Saint-Louis) et Géraldine Tardivel du SCAC de Dakar mais leurs
calendriers trop chargés ne leurs permettaient pas de nous accorder du
temps. Il ya eu néanmoins quelques échanges
téléphoniques.

Annexe 2 : Liste des tableaux et figures
Tableau 1 : Evolution de la répartition du fonds de
dotation de Saint-Louis entre 1997-2000
Tableau 2 : Evolution de la répartition du fonds
d'équipement entre 1997-2000
Tableau 3 : Répartition par collectivité entre
1999-2000 en Milliards Fcfa
Tableau 4 : Répartition des partenariats de
coopération décentralisée au Sénégal
Figure 1 : Répartition de l'enveloppe du FDD entre 1999 et
2000
Figure 2 : Partenariats actifs des collectivités
françaises au Sénégal
Organigramme hiérarchique des acteurs
Tableau 5 : Récapitulatif des acteurs de Rhône-Alpes
présents à Saint-Louis, en 2002, et les types d'action
réalisés

76
Annexe 3 : Cette circulaire signée
conjointement par le Ministère de l'Intérieur et le
Ministère des Affaires étrangères en date du 10 mai 1994
précise les termes de la loi ATR de 1992 :
·
"Par convention il faut entendre tout contrat ou acte
signé entre des collectivités territoriales, françaises et
étrangères, comportant des déclarations, des intentions,
des obligations ou des droits opposables à l'une ou l'autre partie. Sont
visés par la loi aussi bien les conventions ayant un caractère
déclaratif que celles pouvant avoir des conséquences
matérielles, financières ou réglementaires pour ces
collectivités. Que la collectivité territoriale soit
engagée financièrement, matériellement ou non, la
convention est la voie privilégiée de la coopération
décentralisée pour tous les types d'intervention (...) "
· "La possibilité de passer des conventions
est ouverte aux communes, aux départements, aux régions et
à leurs groupements, qu'ils s'agissent des groupements intercommunaux,
des ententes départementales ou régionales ou des syndicats
mixtes".
· "(...) en toutes circonstances c'est la
collectivité territoriale qui assure la responsabilité de sa
coopération décentralisée même si, pour mener
à bien certaines actions, elle peut déléguer par
convention sa maîtrise d'oeuvre à un établissement public
ou à une association privée."
Sources : Circulaire relative à la coopération
des collectivités territoriales françaises avec des
collectivités
territoriales étrangères.
Ministère de l'intérieur, Ministère des Affaires
étrangères, mai 1994.

Annexe 4 : Budgets des
collectivités locales de la région Saint-Louis alloués aux
secteurs de l'eau, l'éducation et la santé en 2007
Collectivités Locales
|
Education
|
Santé
|
Hydraulique
|
E_S_H
|
proportion par col.
Local
|
CR FANAYE
|
1 647 088
|
1 099 489
|
|
2 746 577
|
0,2%
|
CR MPAL
total
|
1 862 925
|
1 685 410
|
|
3 548 335
|
0,2%
|
CR MEDINA NDIATBE
|
1 449 315
|
2 325 770
|
|
3 775 085
|
0,2%
|
CR MBOUMBA
|
1 823 662
|
2 166 476
|
|
3 990 138
|
0,2%
|
CR GALOYA TOUCOULE UR
|
2 191 545
|
2 121 299
|
|
4 312 844
|
0,3%
|
Com NDIOUM
|
12 073 018
|
5 056 816
|
|
17 129 834
|
1,0%
|
CR AERE
LAO
|
1 828 425
|
2 840 881
|
|
4 669 306
|
0,3%
|
CR NDIAYENE- PENDAO
|
1 388 869
|
22 766 547
|
|
24 155 416
|
1,5%
|
Com NDIANDAN E
|
13 344 358
|
10 246 097
|
600 000
|
24 190 455
|
1,5%
|
CR GAMADJI SARRE
|
3 618 361
|
19 885 590
|
9 000 000
|
32 503 951
|
2,0%
|
Corn GOLLERE
|
11 940 745
|
20 971 962
|
|
32 912 707
|
2,0%
|
CR DODEL
|
7 035 450
|
18 460 804
|
10 565 922
|
36 062 176
|
2,2%
|

78
CR GANDON
|
6 752 668
|
35 860 876
|
|
42 613 544
|
2,6
|
CR PETE
|
17 668 981
|
6 387 549
|
19 000 000
|
43 056 530
|
2,6
|
CR GAE
|
5 458 535
|
14 686 504
|
46 053 618
|
66 198 657
|
4,0%
|
Corn PODOR
|
14 104 549
|
57 843 090
|
|
71 947 639
|
4,4%
|
CR RONKH
|
44 637 573
|
17 235 636
|
16 350 108
|
78 223 317
|
4,7%
|
Conseil Rég. Saint-Lo uis
|
84 563 296
|
6 698 267
|
|
91 261 563
|
5,5%
|
Corn ROSSO SENEGAL
|
43 409 778
|
49 132 292
|
|
92 542 070
|
5,6%
|
Corn DAGANA
|
36 298 300
|
62 636 517
|
|
98 934 817
|
6,0%
|
CR ROSS
BETHIO
|
73 945 276
|
27 946 823
|
|
101 892 099
|
6,2%
|
CR GUEDE
VILLAGE
|
13 153 082
|
3 277 981
|
110 807 000
|
127 238 063
|
7,7%
|
Corn SAINT
-- LOUIS
|
33 857 175
|
73 851 703
|
20 827 112
|
128 535 990
|
7,8%
|
CR MBANE
|
97 081 170
|
48 780 601
|
99 968 226
|
245 829 997
|
14,9%
|
Corn RICHARD-TOLL
|
132 453 157
|
136 594 348
|
|
269 047 505
|
16,3%
|
Région de
Saint-Louis
|
663 587 301
|
650 559 328
|
333 171 986
|
1 647 318
615
|
100,0%
|
Sources : Situation économique et sociale de la
région de Saint-Louis en 2007, novembre 2008