SECTION II : ANNULATION DU RISQUE DE CHANGE DANS LA
GESTION DE
LA DETTE EXTERIEURE
Nous disions plus haut que le risque de change avait un
caractère automatique dès lors qu'on réalise une
opération dans une devise dont le taux de change par rapport au franc
CFA n'aurait pas été fixé (régime de change fixe).
On voit alors que pour annuler le risque de change, il faudrait simplement
demander à emprunter à l'extérieure en monnaie nationale,
ou préférer que la dette extérieure soit libellée
dans une monnaie dont le taux de change est fixé
(Régime de change fixe). Nous allons aborder la
faisabilité de ces différentes mesures.
Paragraphe 1 : Vaincre le péché
originel
L'impossibilité d'emprunter dans sa monnaie nationale,
pour un pays, à l'étranger, est qualifiée en finance de
" péché originel". Ce problème affecte presque
tous les pays du monde sauf les émetteurs des cinq principales monnaies
- le dollar américain, l'euro, le yen, la livre sterling et le franc
suisse - de même que quelques exceptions révélatrices.
Lorsqu'un pays est sous le joug du péché
originel, par définition sa dette extérieure sera principalement
libellée en monnaie étrangère. Si le pays accumule une
dette nette, on retrouvera alors une disparité globale de monnaies
dans ces comptes nationaux. Il est clair qu'un tel pays peut recourir à
diverses mesures pour éliminer cette disparité ou
carrément l'empêcher de se produire. Premièrement, il peut
s'abstenir d'emprunter à l'extérieure ; il devra alors
disposer de ressources financières internes suffisantes pour ses
propres besoins, et aucune disparité n'apparaîtra car il n'aura
alors aucune dette extérieure ; mais il souffre tout de même
du péché originel au sens où nous l'appréhendons.
Or une telle abstention est coûteuse car le pays en question renoncera
aux avantages de l'emprunt à l'étranger. Deuxièmement, le
gouvernement, peut accumuler des devises à hauteur de ses engagements
étrangers. Il aurait ainsi éviter la disparité des
monnaies en éliminant sa dette nette (les devises qu'il détient
sont égales à ses emprunts en monnaies
étrangères). Mais cette option reste coûteuse elle
aussi : le rendement obtenu sur les réserves accumulés est
généralement nettement inférieur au coût
d'opportunité des fonds.
La réaction spontanée d'un économiste est
d'attribuer l'incapacité d'emprunter à l'étranger dans sa
propre monnaie aux lacunes des politiques et institutions nationales ou
régionales. Aussi, la majeure partie de la littérature,
s'est-elle préoccupée des déficiences des pays
emprunteurs, en particulier le sous- développement de leurs institutions
vouées à l'élaboration des politiques au soutien des
marchés.
Il est à présent soutenable que, la
première hypothèse qui vient à l'esprit pour l'explication
du phénomène est la crédibilité monétaire.
Dans cette optique, le péché originel n'est pas un
problème en soi, mais un symptôme. On pourrait alors le vaincre
en effectuant des reformes institutionnelles qui permettraient d'augmenter la
crédibilité des autorités par des mesures
anti-inflationnistes. Toujours dans cette approche, les directives habituelles
données par le FMI et la BM concernant les politiques macro-
économiques et les réformes institutionnelles seraient à
la fois nécessaires et suffisantes. Ce remède facile rencontre
malheureusement des problèmes sous - jacents que nous ne pourrions pas
développer ici avec toute la justesse nécessaire.
On peut affirmer que la solution au péché
originel ne peut être l'oeuvre d'un seul pays, encore moins d'une
institution nationale. Elle serait plutôt l'oeuvre de tout le monde
entier. Pour se faire, il faut :
· Que la Banque mondiale (BM) et les autres Institutions
Financières Internationales (IFI), émettent les titres de
créances dans les unités de compte composées de devises de
pays émergents, car généralement, la dette
multilatérale l'emporte de très loin sur celle bilatérale.
Les pays qui ont échappé au péché originel,
(l'Uruguay en 2003, Colombie en 2004, et le Brésil en 2005), le doivent
principalement non pas à leurs propres résidents, mais à
des étrangers et surtout à des institutions financières
internationales.
· Que les pays Africains, par exemple, se dotent d'une
monnaie unique qui aurait le mérite de convaincre les bailleurs
étrangers de sa stabilité financière et les obligerait
à accepter les accords de prêts dans cette monnaie africaine.
Ainsi on assisterait à une rédemption du péché
originel africain, et donc à une annulation du risque de change.
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