le SIDA mine les économies africaines( Télécharger le fichier original )par Brahim Brahamia Université Mentouri - Constantine - Algérie - Doctorat d'Etat en sciences économiques 1991 |
Décroissance de la population active due au VIH/sidaEn Afrique australe (%)
Source : ONU Afrique Relance, d'après les données de l'OIT et la de Division de la population de l'ONU. Au niveau macroéconomique le sida déstabilise les économies des pays africains et freine la croissance. Dans certains pays la croissance du PIB par habitant devient négative. Selon certaines études, elle chute de près de 2,6 % par année dans un pays où la prévalence du VIH/sida atteint les 20 %. A titre l'exemple, le PIB de l'Afrique du Sud, qui est aujourd'hui de l'ordre de 40 % de l'ensemble des pays de l'Afrique Subsaharienne, sera réduit de 17 % d'ici le début de la prochaine décennie à cause du sida. L'impact du VIH/sida sur le secteur industriel entraîne de nombreux effets négatifs, comme on peut l'observer sur le schéma suivant : Impact du VIH/sida sur le secteur de l'industrie : Baisse de moral Perte de connais- sances tacites Perte de compétences Augmentation de la rotation du personnel Augmentation de l'absentéisme Assurance
VIH/sida lors du recrutement Augmentation de la demande de formation et de recrutement Fonds de retraite Santé et sécurité Réduction des investissements étrangers. Déclin du capital intellectuel Diminution des marchés de la main d'oeuvre et des fournisseurs Assistance médicale Coût des obsèques Diminution des réinvestis-sements Diminution de la fiabilité Diminution des bénéfices Diminution de la productivité Coût des obsèques Source : ONUSIDA, 2002. La situation est si grave pour la santé et la survie des habitants de l'Afrique où le VIH/sida constitue une menace très sérieuse aussi bien au plan démographique qu'au plan économique. Rappelons à ce titre l'intervention du Conseil de Sécurité de l'ONU qui en Janvier 2000 s'est saisi pour la première fois de son existence d'un problème de santé publique. Qu'en est-il de la longévité ? Les gains accumulés depuis les indépendances sont compromis à cause du VIH/sida. Evolution de l'espérance de vie à la naissance pour quelques pays africains.
Source : Banque Mondial, Rapport sur le développement dans le monde, 1995, Washington, D.C. Unicef, La situation des enfants dans le monde, 2006, Unicef, 2005. New York. *Espérance de vie en 2004 inférieure à celle de 1970 **Espérance de vie en 2004 comparable à celle de 1970. Qu'on juge de la gravité de la question : dans certains villages d'Afrique près du tiers des enseignants sont morts du sida. Une étude récente de L'UNICEF décline un scénario alarmant, dans la mesure où le système éducatif dans le long terme risque d'être déstructuré : « Si le sida continue de sévir, les écoles n'auront plus ni directeurs, ni inspecteurs ». Dans la plupart des pays africains à faible revenu les fonds consacrés à l'approvisionnement en médicaments représentent déjà plus de 30 % du budget alloué à la santé, lui-même insuffisant. Ces pays sont dépendants du marché mondial du médicament en raison de l'absence d'industrie pharmaceutique locale. Vu les coûts élevés, l'accès au traitement anti VIH/sida devient prohibitif pour les habitants démunis. Partant, au niveau mondial, seulement une personne infectée sur cinq bénéficie d'un traitement antirétroviral. 2(*) Faut-il souligner que l'épidémie progresse dans un grand nombre de pays africains ; les données de l'année 2005 sont inquiétantes : Taux de prévalences du VIH dans la classe d'âge 15-49 ans dans certains pays africains en 2005
Source : ONUSIDA, 2006, cité in UNFPA, Etat de la population mondiale 2006. L'accès à la thérapie contre le VIH/sida est entravé par les prix prohibitifs du traitement d'un côté et de l'autre côté par la réglementation de l'OMC à propos des ADPIC (accords sur les droits de la propriété intellectuelle et commerciale). Les laboratoires pharmaceutiques des pays industriels veulent maintenir leur position de monopole dans la production et la commercialisation des médicaments, notamment ceux de la trithérapie du sida. Les accords de l'OMC imposent de fortes restrictions à l'importation comme à la fabrication de génériques par les pays en développement, malgré l'urgence sanitaire plus qu'alarmante due au VIH/sida. « Comment justifier que des impératifs commerciaux persistent à interdire aux pays du Sud de se procurer des médicaments ? En dépit de la promesse faite par l'OMC à Doha, en novembre 2001, les multinationales pharmaceutiques du Nord livrent une guerre mondiale aux pauvres. Avec la complicité, notamment, des Etats-Unis et de l'Union européenne. »3(*)
Observons ci-après la différence de prix : Comparaison des prix dans les pays à forte protection de brevet (USA, R.U.) et ceux à faible protection (Brésil et Inde) écart allant jusqu'à 4000 %. ($ Mai 2003) Laboratoire d'origine dans un pays industrialisé : 10439 Laboratoire brésilien 2.767 Laboratoire indien A 350 Laboratoire indien B 201 Médicaments : Stavudine +lamivudine + nevirapine Source : http://www.accessmed-msf.org/documents/untangling4thapril2003.pdf. L'Afrique dispose de ressources naturelles encore abondantes mais qui demeurent sous-exploitées. Un rapport du Programme des Nations Unies pour l'Environnement rappelle même que « L'Afrique est un géant minier , qui produit 80 % du platine mondial, 40 % des diamants dans le monde et plus d'un cinquième de l'or et du cobalt ».4(*) Cependant le même rapport ne cite pas les répercussions économiques du sida dans le continent noire, qui a fait des millions d'orphelins qui n'aspirent plus qu'à subsister loin de l'école, qu'ils n'ont ni les moyens de la fréquenter ni de poursuivre leurs études : 9 % des enfants de moins de 15 ans en Afrique ont perdu un parent ou les deux. Les forces vives de l'économie sont en proie à la maladie, à l'ignorance et à la misère. Si elles arrivent à survivre elles sont par conséquents sous-qualifiées et ne peuvent servir efficacement l'économie nationale. Conclusion Nous allons conclure toutefois sur une note d'espoir : le rapport d'ONUSIDA de 2006 révèle que certains objectifs que s'était tracés la Communauté internationale ont été atteints ; les fonds rassemblés par la communauté internationale, consacrés à la lutte contre la pandémie, ont atteint en 2005 un montant de 8,3 milliards de dollars. Faut-il souligner que les besoins de financement pour l'année 2007 sont de loin plus élevés : 17 milliards de dollars. Dans les pays à faible ou moyen revenu la proportion des individus âgés entre 15 et 24 ans infectés par le VIH a baissé de 25 % dans les pays les plus touchés. 50 % des personnes infectées bénéficient d'une thérapie antirétrovirale. La couverture des femmes enceintes séropositives, par la prophylaxie antirétrovirale, a été étendue à 80 %.5(*) En Afrique Subsaharienne, région la plus touchée par l'épidémie du sida, les données indiquent que l'incidence a atteint son point culminant dans la plupart des pays. Dans deux pays on commence à observer une baisse tendancielle de l'incidence au niveau national (Zimbabwe, Kenya), à l'instar d'autres pays de l'Asie (quatre états en Inde,et le Cambodge, la Thaïlande), baisse favorisée par les changements intervenus dans les comportements des personnes. Dans les autres pays la plupart des épidémies semblent se stabiliser, cependant à des niveaux alarmants. En Afrique du Sud, - pays le plus gravement atteint - l'épidémie ne montre cependant aucun signe d'essoufflement. L'Afrique qui a subit les affres du colonialisme hier, risque aujourd'hui un déclin économique certain, non pas à cause de l'absence de technologie et ou par manque de capitaux, mais par la perte inexorable de ses ressources humaines, clé de voûte du développement. * 1 L'Algérie est citée seulement à titre de comparaison. * 2 ONUSIDA, op.cit. * 3 Le Monde diplomatique, Mars 2003, p. 28 et 29. * 4 PNUE, La richesse naturelle de l'Afrique, clé de ses perspectives économiques, http://www.unep.org/Documents.multilingual/Default.asp?..... * 5 ONUSIDA, Rapport sur l'épidémie mondiale du SIDA, résumé d'orientation. 2006. Genève. |
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