UNIVERSITE JEAN MOULIN LYON 3
FACULTE DE DROIT
Analyse comparée des stratégies de
désendettement public
Présenté par :
SANGARE Drissa
Dirigé par :
Mr. Jacques BICHOT, Professeur d'Université
à Lyon 3
Mémoire présenté et soutenu en vue de
l'obtention du
Master 2 DROIT PUBLIC RECHERCHE
Mention
FINANCES PUBLIQUES ET SOCIALES ET FISCALITE
Année universitaire 2006/2007
SOMMAIRE
Introduction
générale...............................................................1
Partie I
Délimitation et Mesure de la Dette publique
Chapitre I : Concept de la dette
publique........................................5
Chapitre II : Structure et spécificités de la
dette publique des pays en
développement.....................................................................18
Chapitre III : Origines et Crises de
l'endettement.............................35
Chapitre IV : Problèmes de la dette
publique..................................53
Partie II
Les politiques de désendettement
Chapitre V : Le remboursement par
anticipation..............................67
Chapitre VI : La doctrine de la dette odieuse et
répudiation.................74
Chapitre VII : La politique d'austérité
budgétaire comme instrument de désendettement
public.......................................................................83
Chapitre VIII : Le désendettement dans le cadre de
l'initiative PPTE et le
recours à une
législation...................................................92
Conclusion........................................................................106
INTRODUCTION
Le problème de la dette des pays
pauvres est devenu l'un des problèmes de premier plan dans les relations
internationales et se pose de plus en plus dans des termes de justice
d'où la notion de la dette odieuse ou dans des considérations
humanitaires, sortant ainsi du champ qui est le sien, c'est-à-dire un
problème économique. Désormais un sujet majeur dans les
instances internationales au sens où la Banque mondiale s'y
intéresse dans son rôle de lutter contre l'extrême
pauvreté et la promouvoir le développement, le FMI en prend
partie dans le cadre de sa mission de surveillance monétaire
multilatérale ; le problème de la dette des pays pauvres
semble consensuellement perçu comme un obstacle à leur
développement.
Les crises répétitives de la dette
commencées dans les pays d'Amérique latine, ont été
précurseur d'une prise de conscience des créanciers de la
fragilité des pays endettés, ce qui nécessitera des
traitements allant des réaménagements dont le plus connu en la
matière est le rééchelonnement, jusqu'aux abandons massifs
de créances au cours de la décennie écoulée. La
politique du rééchelonnement ayant montré ses limites, la
stratégie d'abandon de créance obéit le plus souvent
à des considérations géopolitiques, chaque grand pays
créancier étant très actif en la matière dans sa
zone d'influence. Un problème aussi majeur que le problème de la
dette des pays pauvres aux regards des domaines connexes et notamment de son
impact sur les perspectives économiques des pays concernés, ne
doit pas rester l'apanage exclusif des relations internationales, mais
redevenir dans le champ de l'analyse économique afin de comprendre ses
contours et ses enjeux. Si le recours à l'emprunt peut être
justifié du point de vu économique, son traitement quand il y a
problème ne doit pas lui échapper. Si le poids de la dette des
pays pauvres est de telle que son remboursement par leur propre effort
économique pourrait leur amputer les moyens d'un développement
rapide, une aide internationale permettant un allègement doit
s'accompagner des réformes économiques de sorte que si
souscription d'emprunt il y a, qu'elle soit investie dans des dépenses
d'investissement.
Le problème de la dette, bien qu'il soit un
problème économique majeur pour les pays concernés, il
n'en demeure pas moins un problème politique au sens large du terme.
L'absence d'évaluation des investissements nécessitant l'emprunt
et notamment de leurs effets structurants, la nature des régimes
politiques qui souscrivent les emprunts et l'usage qu'ils en font, le
traitement budgétaire de la dette et son remboursement, sont entre
autres des facteurs qui font du règlement du problème de la dette
des pays pauvres, une approche d'ensemble. Notre étude se limitant
à l'aspect économique et juridique de la dette, nous nous
intéresserons dans un souci de précision à l'endettement
des pays à faible revenu et notamment ceux de la zone Union Economique
Monétaire Ouest Africaine abrégée tout au long du travail
sous le sigle UEMOA. Le choix d'un ensemble comme l'UEMOA constitué de
huit pays, a plusieurs raisons dont entre autres :
- Ces huit pays ont adopté et ratifié
l'institution d'un espace économique (UEMOA) dans lequel circule une
monnaie commune (le Franc CFA en parité fixe avec l'euro et dont la
convertibilité est garantie par le Trésor français),
- Historiquement liés et politiquement
homogènes, a quelques différences près, les
différentes Lois Fondamentales (Constitutions) présentent
quasiment les mêmes termes quant à l'autorisation accordée
à l'exécutif pour la gestion de la trésorerie et
l'émission d'emprunt d'Etat (autorisation donnée parfois aux
Président ou au Ministre en charge des Finances, selon les pays),
- Homogénéité juridique par les
différentes directives appelées à être
transposées dans les différentes législations nationales
pour l'harmonisation des procédures budgétaires et
judiciaires,
- Economiquement homogène, de part leur appartenance
à la catégorie de pays en développement (en terme de
PNB/Hbt), leur structure économique (largement orientée vers
l'exportation des matières premières) et de la politique
d'intégration des différentes économies,
- Cinq parmi les huit pays de la zone
bénéficient l'annulation de dettes multilatérales au titre
de l'initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés -PPTE-
(Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal),
- Homogénéité en fin par rapport
à la structure de la dette publique, détenue essentiellement par
des créanciers publics bilatéraux et multilatéraux.
L'endettement au sens large du terme, n'est pas un
phénomène nouveau, il n'est pas spécifique aux pays
pauvres et sera rythmé tout au long de l'histoire par des crises et des
périodes d'euphorie. Si la crise de la dette n'est pas elle aussi un
phénomène récent, la période récente marque
un tournant décisif en la matière.
Ainsi, depuis le recourt massif à l'emprunt pour
financer l'effort de guerre de 1914 à 1918, en passant par les
remèdes adoptés durant la crise des années trente et le
plan Marshall pour la reconstruction de l'Europe après la guerre de
1945, le problème de la dette publique n'a cessé de constituer
une pierre d'achoppement dans les relations internationales jusqu'à
l'éclatement de la crise de la dette des pays du tiers monde,
début 1980.
La hausse constante de l'endettement des pays du tiers-monde,
depuis trente ans, et les crises répétées de la dette
expliquent en partie l'importance et la récurrence du
phénomène. Jusqu'à la fin des années des
années 1970, l'endettement massif des pays en développement
auprès des banques commerciales, a été encouragé
par un fort effet de levier durant toute la décennie soixante-dix. A
cette époque, les taux d'intérêt sont très faibles.
En outre, la croissance des exportations des pays en voie de
développement vers les pays industrialisés et le prix soutenu des
matières premières renforcent la capacité d'endettement
des pays en voie de développement en les rendant attractifs aux
investisseurs. L'apparition des pétrodollars explique par ailleurs
l'abondance des capitaux dont ont bénéficié les pays en
voie de développement. Enfin, la faiblesse de l'épargne interne
et la faible capacité de mobilisation, ont contraint les pays en
développement à recourir au financement externe.
Au début de la décennie 1980 se produit un effet de
ciseau : hausse des taux d'intérêt réels (poids du
remboursement) et baisse du cours des matières premières
(capacité de remboursement) ; créant une situation de
surendettement de certains pays.
Recourant massivement à l'emprunt dans des conditions
favorables au motif de financer les infrastructures jugées
nécessaires pour le développement des économies naissantes
post colonisation, les pays du tiers monde se sont enfoncés dans des
crises financières aigües lors du retournement de la conjoncture
économique et financière internationales.
La crise financière éclatée en 1981-1982 au
Mexique, des suite du durcissement de la politique monétaire
américaine, qui marquai la fin d'une période de flux de capitaux
extérieur et bon marché vers les pays en développement,
signifiait aussi le début de la crise de l'endettement, accentué
en 1994 puis en 1997 par la crise financière asiatique, avec des
caractéristiques différentes certes, mais le problème de
la dette est devenu un phénomène récurent
n'épargnant aucune catégorie de pays. Le ralentissement
économique de la fin des années 1970 et début 1980, porta
atteinte gravement aux économies des pays mono-exportateurs de
matières premières comme ceux de l'UEMOA. Ces pays ne tarderont
pas à connaître des difficultés financières dues
à la baisse des recettes d'exportations pour tenir leurs engagements
financiers. Ces difficultés financières obligeront ces pays
à demander des rééchelonnements de leur dette.
Les grands pays de l'Union Européenne sont en dessus du
seuil de 60% (proportion du stock de la dette publique dans le PIB),
définie par le traité de Masstricht de 1992. Les Etats-Unis aussi
bien que le Japon ne font pas exception à la matière.
Récemment, la commission présidée par Michel
Pébereau , dressait un constat alarmant de la dette publique en
France.
Dans les pays pauvres du Sud, le fardeau de la dette est
dénoncé par tous les acteurs (sociétés civiles
religieuses et altermondialistes, et économistes), immoral et injuste
pour les premiers, faisant obstacle à la lutte anti- pauvreté ou
pour atteindre les objectifs de développement du Millénaire
définis par les Nations unies pour les seconds.
La nécessité de diminuer son encours fait
l'unanimité, pourtant les stratégies ou politiques
adoptées par les pays ou pour les pays diffèrent, du paiement par
anticipation à l'annulation pure et simple sous parfois des
conditionnalités (comme ce fût le cas pour les 18 pays élus
au titre du Programme de l'annulation de la dette multilatérale des Pays
Pauvres Très Endettés de l'été 2005), plusieurs
démarches sont adoptées.
Certains pays autrefois lourdement endettés (Canada,
Espagne etc.) s'en sont remis par une politique de réformes
économiques, d'autres en revanche notamment ceux de l'UEMOA demeurent
largement surendettés et ce malgré les retraitements
effectués et l'ajustement financier. L'intervention d'organisations
internationale (du type G7 ²) est alors devenue nécessaire pour
équilibrer le fardeau de l'ajustement entre les créanciers, les
débiteurs et les institutions multilatérales.
Notre travail a pour but, à partir d'une analyse succincte
des différentes stratégies de désendettement, de montrer
en quoi telle ou telle stratégie serait favorable pour la croissance
économique dans les pays de la région étudiée.
Ce travail sera composé de deux parties. Une
première consacrée à la délimitation et à la
mesure du concept de dette publique tant du point de vu juridique
qu'économique. A partir d'une définition du concept de la dette
publique, nous décriront la structure, les spécificités,
les origines de la crise de la dette des pays du tiers monde en
général et en particulier celles des pays de l'UEMOA, et les
effets économiques qui en découlent.
Dans une seconde partie, après avoir passé en revu
les différentes stratégies de désendettement, nous
montrerons par la suite laquelle de ces stratégies peut être
adoptée par les pays de la zone UEMOA pour se désendetter et
promouvoir la croissance.
Président du Conseil de surveillance du Groupe
BNP-PARIBAS.
² G7, groupe des sept pays les plus
industrialisés (Allemagne, Canada, États-Unis, France,
Grande-Bretagne, Italie et Japon) organisant des réunions annuelles
consacrées à l'économie.
Partie I : Délimitation et Mesure de la
Dette publique
Face aux problèmes suscités par
croissance de l'endettement public, l'idée que les conséquences
à moyen terme des déficits publics limitent la possibilité
d'utiliser la politique budgétaire pour soutenir l'activité
économique s'est répandue. L'endettement public, malgré
l'intérêt qu'il porte, soulève quelques difficultés
sémantiques qui se résument en quelques questions et qui
méritent d'être expliciter afin de poser la problématique
de la dette publique.
Au-delà de la difficulté de définition de la
notion de dette publique, quelles sont les caractéristiques de la dette
publique ?, pour l'appréhender faut-il tenir compte d'autres
composantes du compte de patrimoine du secteur public, telles que le stock de
capital, les engagements au titre des retraites futures et les actifs
proprement financiers de l'Etat ?
Quelles conséquences peuvent avoir des niveaux
élevés et/ou croissants d'endettement public et notamment dans
les pays pauvres, Existe-t-il un niveau d'endettement soutenable, la crise de
la dette des pays pauvres est-elle un problème structurel ; sont
autant de questions qui méritent d'être explicitées afin de
résoudre la problématique de la dette publique, c'est cette
démarche que nous tenterons de suivre tout au long de cette
première partie.
Chapitre I : La notion de la dette publique
I- Définition et aspect juridique de la dette
publique
1- Définition
Les opérations financières publiques sont
traditionnellement marquées par de fréquents déficits
annuels dont le cumul a, depuis longtemps, engendré un important
endettement public.
Si la dette publique peut être entendue au sens
étroit comme l'ensemble des engagements financiers de l'administration
centrale (Etat, Collectivités locales et Organismes de
Sécurité Sociale en France, Etat tout court dans les pays de la
zone UEMOA), elle est due à plusieurs facteurs nécessitant le
recourt à l'emprunt, dont essentiellement :
- le décalage en cours d'année entre le
système de perception des recettes et le calendrier des
dépenses ;
- le déficit budgétaire constaté en fin
d'année ;
L'appréhension de la dette publique au sens large pose
quelques difficultés essentiellement comptables :
- faut-il considérer la dette brute (ensemble des
engagements financiers) ou la dette nette (total des engagements financiers
diminués des actifs financiers) ?
- est-il préférable la prise en compte de la dette
de l'Etat, celle des administrations publiques ou celle du secteur public dans
son ensemble (c'est-à-dire entreprises publiques comprises) ?
Habituellement, lorsqu'on aborde la dette publique, il s'agit de
la dette brute (c'est-à-dire les engagements financiers totaux de l'Etat
au sens large), étant donné que les chiffres correspondants sont
plus facilement disponibles et donc plus largement diffusés et qu'il
existe un lien direct entre la dette brute et le montant des versements
d'intérêt au titre du service de la dette.
La dette nette, résultant des engagements financiers bruts
diminués des actifs financiers, reflète en revanche plus
précisément le volume total des déficits
budgétaires accumulés dans le passé, lequel
représente les emprunts nets contractés par les administrations
publiques au cours de chaque période. On peut apprécier la
différence entre ces deux concepts en examinant la nature des actifs
financiers du secteur public puisque ce sont eux qui constituent l'écart
entre la dette brute et la dette nette.
Ces actifs sont essentiellement ceux détenus par l'Etat en
tant qu'intermédiaire financier ou actionnaire.
En tant qu'intermédiaire financier, l'Etat emprunte des
fonds sur le marché (qui gonflent sa dette financière brute) afin
d'octroyer des prêts (prêts d'équipement pour le
développement régional en France par exemple). Les actifs ainsi
acquis rapportent normalement à l'Etat des intérêts et
devraient donc légitimement représenter une contrepartie de sa
dette brute.
Il existe cependant trois problèmes liés à
ces actifs :
Premièrement, dans certains cas, les intérêts
versés à l'Etat par les particuliers ou les organismes
emprunteurs ne permettent pas à celui-ci de couvrir les coûts
financiers (le profit n'étant pas son objectif par principe).
Deuxièmement, si la qualité des actifs financiers
détenus par l'Etat est un sujet à controverse, la valeur
réelle de ces actifs peut être moindre que leur valeur comptable.
Ce peut être le cas des prêts à des sociétés
insolvables ou à certaines entreprises publiques.
Troisièmement, l'Etat détenant
généralement des actions d'entreprise publique, actions qui ne
sont pas comptabilisées parmi ses actifs financiers (du moins à
leur valeur réelle par opposition à leur valeur
d'acquisition) ; les ventes de ces actions peuvent modifier la dette nette
et la dette brute de l'Etat. Les entreprises du secteur public sont souvent
utilisées comme instrument de la politique gouvernementale, les pertes
qu'elles accusent de ce fait sont couvertes par des emprunts garantis par
l'Etat et non par des subventions d'exploitation en général. Ces
emprunts n'apparaissent pas dans les chiffres des déficits ou de
l'endettement de l'administration centrale.
La deuxième grande question que soulève la
définition de la dette publique concerne le type de l'administration
considérée. Dans certains pays, comme notamment les pays de la
zone UEMOA, on se préoccupe essentiellement de la dette de l'Etat (ou
administration centrale) seule entité pouvant souscrire des emprunts,
alors que dans d'autres pays, qui souvent par souci du respect des engagements
internationaux (notamment les pays de l'Union Européenne) on
s'inquiète surtout du solde de l'ensemble des administrations publiques
(Etat, Collectivités locales, Administrations de sécurité
sociale).
Vu que la mesure de la dette du secteur public dans son ensemble
soulève d'importants problèmes de données et de
définition au plan international, l'utilisation de la dette de
l'administration publique dans son ensemble parait plus approprié
puisqu'elle permet non seulement de comparaisons entre pays, mais elle est
aussi compatible avec les définitions désormais uniformes des
comptabilités nationales (s'inspirant du SCN- Système de
comptabilité des Nations Unies).
Une définition large du concept de la dette publique
présente donc beaucoup de difficultés tant sur le plan juridique
qu'au sens de la comptabilité.
2- Les aspects juridiques de la dette
publique
Une dette peut être entendue comme un engagement
financier de payer un service ou l'acquisition d'un bien ; ou de
rembourser une somme d'argent prêtée, cela à un certain
moment et selon un prix, l'un et l'autre convenu à l'avance.
Appliquée à la personnalité de l'Etat, cette
courte définition « microéconomique » de la
dette ne peut rendre compte de la diversité des approches possibles
mesurant le concept global de dette publique de par son caractère
spécifique. Cette difficulté tient, du problème de
définition de son périmètre, du concept qui peut
être très extensif de la notion de l'engagement, de la
multiplicité des créanciers, du problème posé par
le rassemblement des statistiques exhaustives et cohérentes.
2.1- L'encadrement du recours à
l'emprunt :
En France, les pouvoirs publics ont essayé d'en
définir juridiquement de manière précise, les contours et
les caractères:
Ainsi, l'ordonnance du 2 Août 1959, dans son article 15,
décide que c'est le trésor public qui détient la
responsabilité de procéder aux émissions et aux
remboursement d'emprunts à l'aide « d'émission de
rentes perpétuelles et de titre à moyen ou court terme pour
couvrir l'ensemble des charges de la trésorerie et notamment les charges
résultant de la dette publique » par l'intermédiaire
d'une autorisation donnée chaque année en loi de finances.
L'article 124 du décret 1962 précise qu'«
aucune dette de l'Etat ne peut être contractée sous forme
d'émissions de rentes perpétuelles, de titre à long, moyen
et court terme, sous forme de prise en charge d'emprunts émis par des
organismes publics ou privés ou sous forme d'engagement payable à
terme ou par annuités, aucune opération de conversion de la dette
ne peut être opérée que conformément aux
autorisations données par les lois de finances ».
En outre l'article 73 de la loi du 23 Décembre 1946
décide qu'« aucune opération de crédit à
court, moyen ou long terme ne peut bénéficier de la garantie de
l'Etat qu'en vertu d'une loi »
Il ressort de ces règles légales que les
engagements de l'Etat donnant lieu à constitution de dette, qu'ils
résultent d'émission de titres nouveaux, de conversion ou de
garanties, n'ont le caractère de dette publique que s'ils
bénéficient d'une autorisation législative. Ainsi dans le
cadre de cette autorisation, le Trésor peut gérer sa
trésorerie en utilisant tout un ensemble de titres divers.
En Allemagne, l'article 115 de la Loi Fondamentale
(Constitution) dans sa rédaction originale, est ainsi
libellé :
«Il ne peut être recouru aux ressources de
trésorerie qu'en cas de besoins exceptionnels et, en principe,
uniquement pour couvrir des dépenses productives, exclusivement en vertu
d'une loi fédérale. Des crédits ne peuvent être
accordés et des sûretés ne peuvent être
constituées à la charge de la Fédération lorsque
leur effet s'étendrait au-delà d'un exercice, qu'en vertu d'une
loi fédérale. Cette loi doit préciser le montant du
crédit ou l'étendue de l'obligation dont la
Fédération assume la responsabilité ».
Il ressort du contenu de cet article (réaffirmé
lors de la révision constitutionnelle de 1969) que le recourt à
l'emprunt ne peut avoir pour objet que de financer les investissements. Ainsi,
en Allemagne, l'emprunt doit être autorisé et chiffré par
le législateur.
En somme, l'autorisation législative pour le recourt
à l'emprunt est un principe de démocratie d'autant plus qu'elle
permet davantage de contrôle du parlement sur les finances publiques.
Toutefois, l'autorisation peut être donnée dans la loi de finances
(comme c'est le cas dans les pays francophones), comme dans une loi ordinaire
(en Grande Bretagne, par exemple), elle peut être donnée au
Ministre en charge des finances (le plus fréquent) ou au Chef de l'Etat
(comme en Côte d'Ivoire).
La prise en charge de la dette de l'Etat par le Trésor est
la suite logique du financement du déficit, mais dans certains pays,
elle est confiée à un institut spécial (Suède,
Belgique, Royaume Uni depuis 1998) ou en partie, à la Banque Centrale
(Allemagne, Japon, Royaume Uni jusqu'en 1998).
2.2- Le régime juridique des emprunts de
l'Etat
L'ensemble des règles de droit applicables
aux emprunts d'Etat, notamment les règles de compétence, de
procédure, qui encadrent l'émission d'emprunt, peut
résulter de diverses sources.
L'émission d'emprunt, comme toutes les activités de
l'Etat dans un « Etat de droit », obéit à des
règles de droits et d'obligations de l'Etat emprunteur, des
prêteurs ou des intermédiaires, qui même résultent
selon les pays, de la constitution et/ou d'une loi organique, de la loi, de
décrets, des règles librement posées par les responsables
du Trésor.
3- Dette publique dans le droit
international
En droit international, il existe un principe qui
règle les relations internationales : sur la base de la
continuité de l'Etat, celui-ci est obligé de respecter et
d'honorer les obligations internationales qu'il a consenties. Le principe
implique en ce qui concerne la dette publique, que tout gouvernement (en tant
qu'organe d'Etat) est tenu légalement de payer la dette
contractée par le gouvernement précédant. Par
conséquent, chaque fois qu'un gouvernement agit en tant qu'entité
publique et organe d'Etat, c'est l'Etat lui-même qui assume l'engagement
financier et, en conséquence, l'obligation de remboursement. En ce sens
la continuité de l'Etat selon l'Institut du Droit International (IDI)
signifie que « la personnalité juridique dans l'ordre
international subsiste malgré les changements de territoire, de
population, de régime politique et juridique et de nom »
Selon cette doctrine, le changement de régime n'aurait pas
d'incidence sur les obligations de l'Etat, il n'existe que des dettes
légales puisqu'il existe une obligation de remboursement sur la base de
la continuité de l'Etat.
IDI, La succession d'Etats en matière de biens et de
dettes, Session de Vancouver, 2001,
article
3.
Dans ces conditions, le gouvernement postérieur n'aurait
pas la compétence nécessaire pour se prononcer sur la
légalité ou la légitimité des dettes
contractées au nom de l'Etat par des gouvernements
précédents qu'ils soient démocratiques ou non.
Lorsqu'un accord est signé entre un Etat et une banque
multinationale ou un groupe bancaire privé, en
conformité avec les conditions de forme et de fond requises, nous nous
trouvons devant l'existence d'une dette publique , qui constitue un contrat
international soumis aux règles des contrats internationaux. Par contre,
lorsqu'un accord d'emprunt est conclu entre deux Etats ou entre un Etat et une
Institution Economique Internationale (Banque Mondiale, FMI etc.), il s'agit
d'un accord international (contrat d'emprunt) régit exclusivement par le
Droit des Traités ².
Cette distinction a des conséquences juridiques
concrètes : dans le cas d'un contrat international, le règlement
des différends s'opère généralement au niveau de la
Cour Internationale des Règlements des Différends Internationaux
(CIRDI), laquelle comprend normalement, en son sein, son propre
« tribunal arbitral ».
Dans le cas d'un accord international, les recours aux tribunaux
ordinaires, aux tribunaux arbitraux internationaux ou à toute autre
instance internationale sont possibles. Ainsi, par exemple, il a
été admis que, dans le cas de différends suscités
par les accords entre le FMI et la dictature du gouvernement argentin de
1976/89 et les gouvernements successifs, le seul tribunal
considéré compétent pour traiter cette matière
était un tribunal nord-américain, étranger à la
relation juridique en question.
Le droit international prévoit des situations dans
lesquelles un Etat peut légitimement décider, soit de ne pas
payer, soit de payer sa dette suivant ses nécessités et
capacités.
Un des cas prévus par le droit est celui de la force
majeure. La force majeure peut couvrir les cas suivants, entre autres, dans
lesquels un Etat décide de:
a. suspendre le
paiement, déclarer un moratoire unilatéral, ou payer la dette
seulement après avoir couvert les besoins de la population, ou
b. annuler la dette, si la circonstance de
force majeure se prolonge indéfiniment.
La force majeure peut, en conséquence, être
invoquée en droit international, appliquée comme argument
juridique, et exempter un Etat de ses obligations financières
internationales et, par ailleurs, constituer une cause qui le décharge
de sa responsabilité internationale.
Jeze GASTON, "La garantie des emprunts publics d'Etat"
RCADI, 1925.
² Convention de Vienne sur le droit des traités
conclus entre Etats de 1969 et Convention de Vienne sur le droit des
traités entre Etats et Organisations Internationales, et entre
Organisations Internationales du 21 Mars 1986.
La Convention de Vienne sur le droit des Traités de 1969
et la Convention de Vienne entre Etats et organisations internationales ou
entre organisations internationales
²
contiennent la règle de base dans ce domaine: tout traité en
vigueur oblige les Parties et doit être respecté par ces
dernières en toute bonne foi.
Ceci implique que si une convention ou un accord signé par
un Etat l'engage à payer une dette contractée auprès d'un
autre Etat ou auprès d'une organisation internationale, cet accord est
contraignant en droit international et un manquement sans motif valable
constitue une violation du droit international pouvant faire l'objet de
sanction (comme saisie des avoirs extérieurs du dit Etat, par
exemple).
4- L'émission d'emprunt public :
4.1- Le régime juridique des opérations
d'emprunt d'Etat :
Les opérations relatives aux emprunts sont
d'une part les opérations d'émission, de remboursement, de
transformation des emprunts qui s'inscrivent dans la gestion de la dette
publique ; d'autre part, à côté d'elle, les
opérations de gestion administrative et comptable. Ces dernières
sont relatives au service des emprunts qui nécessite la tenue d'une
comptabilité des titres, celle des titres restant à rembourser,
le payement des intérêts, l'actualisation des changements de
propriétaires etc.
4.2- Les opérations
d'émission :
L'opération d'émission dans les
démocraties fait l'objet d'un partage des compétences entre le
parlement (autorisation législative) et le gouvernement, et en son sein
le Ministre en charge des finances. Dans le droit francophone, les conditions
et les modalités des émissions sont fixées par des
décrets.
- Compétence de
l'exécutif :
- Le décret : en
général, préparé par les services du Trésor,
le décret fixe les conditions d'émission, le type de titres
émis et leurs caractéristiques.
Convention de Vienne sur le droit des Traités de 1969, article 26
²
Convention de Vienne entre Etats et organisations internationales ou entre
organisations internationales du 21 Mars 1986, article 26.
La compétence du Ministre des finances en matière
d'emprunt, se borne en principe dans le droit francophone, à fixer, par
arrêté, le détail des émissions et les
modalités de mise en oeuvre : le jour des émissions, le
montant, l'échéance et la date de clôture éventuelle
de la souscription, elle s'étend aussi à la technique
d'émission.
- Compétence du
législateur : elle réside dans toutes les
démocraties, dans son autorisation accordée au pouvoir
exécutif, pour assurer la gestion de la trésorerie.
5- Les procédures ou techniques
d'émission :
5.1- L'adjudication :
C'est une procédure qui consiste à mettre en
concurrence les soumissionnaires et permet d'obtenir des taux
d'intérêt bas et proches de ceux du marché.
L'opération d'adjudication est en général prise en charge
par la Banque Centrale ce qui permet une distinction entre l'opérateur
et l'émetteur en garantissant mieux le déroulement et l'objectif
de l'émission. De manière générale, les
participants à l'adjudication des bons de caisse ou des bons du
trésor, sont des banques.
La
procédure d'adjudication se décompose essentiellement en deux
méthodes :
a- La méthode de prix uniforme : c'est une
méthode dans laquelle les soumissionnaires dont les offres sont
retenues, paient le même prix, qui est le prix unique de l'adjudication
et qui correspond au prix d'émission le plus bas permettant de couvrir
le contingent demandé.
b- L'adjudication dite compétitive ou "à la
hollandaise" : elle consiste à appliquer à chaque soumission
retenue après classement par ordre décroissant du taux
d'intérêt jusqu'à l'épuisement du montant de
l'émission, le taux d'intérêt qu'elle proposait, lequel
peut varier de l'une à l'autre. Cette méthode a l'avantage de
réduire le coût pour le Trésor.
5.2- Le placement
privé : Le titre est cédé
directement par le gestionnaire de la dette à des investisseurs.
5.3- La technique de syndication
ou de prise ferme :
Elle consiste pour l'émetteur à
« vendre » la totalité d'un emprunt à une
banque ou à un syndicat qui peut être constitué de banques
commerciales, de caisses d'épargne, de coopératives de
crédit, des agents de change, associés à la banque
centrale qui assure le rôle de chef de file. Elle a l'avantage de
garantir le placement intégral de l'emprunt.
La banque ou le syndicat, peut par la suite céder les
titres au public à un prix plus élevé que le prix de
souscription, la différence représentant leur
rémunération.
5.4- La méthode de souscription publique ou
la méthode dite du « guichet ouvert » :
Elle consiste à vendre directement les titres aux
souscripteurs par l'intermédiaire de guichets, selon les pays, de la
banque centrale, des comptables publics ou de certaines banques commerciales,
rémunérés par une commission. Une fois le montant de
l'emprunt souscrit, la clôture du placement est prononcée.
5.5- Le recours au marché
financier :
Utilisée au Royaume Uni pour l'émission des bons du
trésor, elle consiste en une adjudication auprès
d'intermédiaires opérant en bourse ou spécialement sur le
marché des valeurs d'Etat et réalisée selon la
méthode dite « à la hollandaise »,
c'est-à-dire que les soumissionnaires dont les offres sont retenues,
sont appelés à payer le prix qu'ils ont proposé.
6- Les clauses d'emprunt d'Etat
Les clauses de souscription d'un contrat ou d'un accord
d'emprunt, couvrent :
- Le mode de remboursement ou
d'amortissement, qui peut être progressif, constant,
différé ou à l'échéance. Mais globalement,
on retient deux, l'amortissement par annuités (fréquemment
utilisé, qui consiste à rembourser chaque année une somme
qui correspond à l'intérêt et une fraction du capital) et
le remboursement à l'échéance finale, largement
utilisée pour l'extinction des emprunts publics britanniques. Le
remboursement en totalité se réalisant ainsi en principe à
l'échéance finale, pour éviter d'éventuelles
difficultés de financement, une grande partie des obligations d'Etat
britanniques par ailleurs correspond à des titres comportant une clause
de remboursement anticipé, à une date librement
choisie par la trésorerie.
- Le taux
d'intérêt : l'intérêt de
l'emprunt peut faire l'objet de trois options :
· Le taux fixe : comme son nom
l'indique, un titre de dette à taux fixe signifie que le titre de dette
a un taux de rémunération fixé au moment de
l'émission du titre. Sa détention expose au risque de taux car la
valeur du titre de dette varie en fonction du taux du marché.
· Le taux
indexé : le coupon d'une obligation peut
être indexé sur n'importe quel prix ou indice à condition
qu'il soit nettement défini à l'avance. Sur le marché
monétaire européen, le principal indice employé est
l'EURIBOR.
· Le taux
variable : une obligation à taux variable est un
titre de dette dont l'échéancier de flux n'est pas parfaitement
connu à l'émission. Le taux d'intérêt est en
règle général fixé par référence au
taux interbancaire observable, généralement un taux à
court terme, l'EURIBOR en six mois, par exemple. A chaque
échéance du coupon, la valeur de celui-ci sera calculée en
fonction de ce taux du marché.
Ceci permet d'annuler le risque de taux car l'émetteur de
ce titre est sûr qu'à tout instant, il est endetté au taux
du marché. Mais, compte tenue de l'instabilité monétaire
lié notamment aux fluctuations des conditions sur le marché
monétaire, les emprunts à taux variable, en général
l'option la plus choisie par les banques privés, ont
précipité la crise de la dette notamment en Amérique
latine dans les années 1980 en alourdissant les charges
d'intérêt.
Les autres caractéristiques d'un accord ou d'un contrat
d'emprunt sont essentiellement la garantie qui peut être précise
c'est-à-dire gagée sur une recette propre comme c'est le cas pour
la CADES en France² ou générale, elle est naturellement
offerte par l'Etat pour le capital et les intérêts et assise sur
son pouvoir souverain de prélever l'impôt. Pour ce qui concerne
l'échéance de l'emprunt, elle est fonction du titre émis
et constitue en soi l'élément le plus important pour la
distinction entre les emprunts (qui peuvent être qualifiés selon
la terminologie utilisée, de court, moyen et long terme).
European Interbank Offert Rate
² CADES (Caisse d'Amortissement de la Dette Sociale), ayant
repris les déficits cumulés de l'ACOSS (Agence Centrale
d'Organismes de Sécurité Sociale), se refinance en grande partie
sur le marché obligataire en émettant des obligations
gagées sur la CRDS (Contribution pour le Remboursement de la Dette
Sociale).
II Instruments et gestion de la dette publique
1- Les instruments de la dette
Les instruments de la dette, c'est-à-dire
les moyens par
lequel l'Etat a recours pour financer le
déficit budgétaire, ou
rembourser les emprunts
parvenus à
échéance, sont aujourd'hui d'ordre divers :
- Le financement monétaire, historiquement, dans tous les
pays où la banque centrale n'est ou n'était pas
indépendante du pouvoir exécutif en général et en
particulier en France, le financement de court terme de l'Etat, a longtemps
reposé sur les crédits que lui accordait la banque centrale.
Le Trésor couvrait ainsi son besoin de trésorerie
quotidien grâce à des avances sollicitées auprès de
la banque centrale. Cette dernière joue dans ce système le
rôle de financier de dernier ressort de l'Etat. Bien que interdit dans
les pays de l'Union Européenne au terme du Traité Maastricht
instituant l'Union Economique et Monétaire, au profit d'une certaine
indépendance des banques centrales des pouvoirs exécutifs comme
aux Etats-Unis.
Les aides directes des banques centrales à
l'administration assurant la gestion de la trésorerie publique, tend
à disparaître dans la plupart des pays, les uns sous les accords
de constitution de groupements économiques régionaux (UE, UEMOA
etc.), les autres sous l'impulsion voire sous les conditionnalités des
interventions des institutions multilatérales plus
précisément le FMI et la Banque Mondiale.
En revanche, les aides indirectes peuvent exister, elles
consistent essentiellement en une souscription indirecte des titres publics,
soit en réfinançant les banques ayant en portefeuille des titres
publics ou en intervenant sur les marchés pour réguler la
liquidité, soit en achetant ou en prenant en pension les titres publics,
ce qui peut contribuer au succès des émissions de valeur du
trésor.
Dans le système autorisant la banque centrale d'intervenir
auprès du Trésor, ce dernier participe à la
création monétaire de deux sortes.
Premièrement, les bons du trésor en compte courant
en appel au système bancaire à la différence des bons du
trésor sur formule, constituent un moyen rapide d'emprunt auprès
du secteur bancaire et permet de contrôler l'évolution des
crédits. Ces bons participent au processus de création
monétaire puisqu'en l'échange de ces titres, les banques mettent
à disposition du Trésor des disponibilités
monétaires qui permettent de financer des dépenses publiques. Ces
créations monétaires inflationnistes ont largement
constituées l'argumentaire d'une restriction de cet instrument.
- Les emprunts à long terme : essentiellement
constitués d'obligations du Trésor, les emprunts à long
terme, sont des emprunts émis généralement par voie
d'adjudication, pour une durée initiale supérieure ou
égale à cinq ans. En France, cette formule s'identifie à
l'Obligation Assimilable du Trésor (OAT) dont
l'échéance est d'au moins sept ans; Emprunts de la
Fédération (Bundesanleihen), Obligations de la
Fédération (Bundesobligationen) et les Bons d'épargne
(Bundesschatzbriefe) en Allemagne avec des échéances au moins
respectivement de huit, cinq et six ans ; ces emprunts peuvent même
être parfois de très long terme comme le Treasury Bonds (T-Bond)
émis par le Trésor des Etats-Unis pour une échéance
au moins de dix, trente ans, voire plus.
- Les emprunts à moyen terme, émis pour une
durée variant entre un et cinq ans, cette formule s'identifie en France
au Bon du Trésor à Intérêt Annuel (BTAN).
- Les emprunts à court terme, Bon du Trésor
Français en sa formulation en France, Treasury Bills (T-Bills) aux Etats
Unis, ces emprunts ont pour échéance maximale d'un an. Ils sont
émis en dessous du pair et remboursés au pair, la
différence constituant ainsi sa rémunération.
Ces différents emprunts, autrefois à
côté des avances de la Banque centrale aujourd'hui très
restreins voire interdit parce que génératrices d'inflation,
constituent la partie de la dette publique, dite négociable et occupe
une place prépondérante dans le total de la dette publique .
2- La gestion de la dette publique
La gestion de la dette consiste, après avoir lancé
les emprunts sur le marché primaire (marché où
l'acquisition des titres se fait directement auprès de
l'émetteur), à intervenir ensuite sur le marché secondaire
(où l'investisseur peut acquérir ou vendre ses titres à un
intermédiaire) afin de réduire le coût par l'usage des
moyens ou techniques d'intervention, de plus en plus diversifiés. Cette
gestion, largement inspirée des Etats-Unis, est retracée en
France, depuis 2000, dans un compte spécial (compte de commerce
« gestion active de la dette et de la trésorerie de
l'Etat »).
ce mode de financement du déficit budgétaire
fût longtemps utilisé en France grâce au lien étroit
d'alors entre l'exécutif (responsable de la politique monétaire)
et la Banque de France. Il est interdit par le traité de Maastricht,
sous sa forme directe puisque les banques de second rang ayant souscrits des
titres publics peuvent se refinancer auprès du SEBC (Système
Européen de Banque Centrale).
Ainsi, l'article d'équilibre dans le droit
budgétaire français, depuis 1991, suivi d'un décret du
Premier ministre, autorise le ministère des finances (notamment l'Agence
France Trésor et récemment la Caisse de la Dette Publique)
à intervenir, par divers procédés, sur le marché
secondaire. La gestion de la dette par des procédés autrefois
propres au marché financier, est désormais au centre des
activités du trésor ou l'administration en charge de la gestion
de la dette publique, est pratiquement utilisé par tous les pays ayant
accès au marché des capitaux. Elle a notamment conduit le
trésor français à s'entourer à partir de 1987,
d'établissements financiers « Spécialistes en Valeurs
du Trésor » comme les primary dealers aux Etats-Unis,
chargés, en contrepartie de certains avantages , de le conseiller et de
l'aider dans l'émission, puis dans la gestion des titres.
Cette gestion active de la dette poursuit essentiellement deux
(2) objectifs :
- rendre le marché de valeurs d'Etat plus liquide, donc
plus attractif pour les investisseurs, ce qui peut aider à
réduire le coût de l'emprunt
- dans un contexte de concurrence, de libre circulation des
capitaux et de besoins financiers publics, la confiance des investisseurs
parait politiquement et financièrement essentielle.
Ainsi, en France, la Caisse de la Dette Publique (CDP), est
appelé à assurer, en coordination avec l'Agence France
Trésor (chargé de l'organisation de l'émission des
emprunts publics) la gestion de la dette.
Cet établissement peut, aux termes de la loi qui
l'institue, « effectuer sur les marchés financiers toutes les
opérations concourant à la qualité de la signature de
l'Etat ». Ainsi, il peut acheter des titres émis par l'Etat ou
garanti par ce dernier, en vu de leur conservation, de leur amortissement ou de
leur cession.
Les techniques d'intervention pour la gestion de la dette
publique sont très variées et s'apparentent aux instruments
financiers habituels, il peut s'agir :
- de rachats de titres pour rapprocher l'échéance
ou profiter d'une décote. Ainsi, la banque d'Angleterre responsable de
la gestion de la dette publique jusqu'en 1998, a coutume de racheter une partie
des titres publics sur le marché secondaire avant l'arrivée de
leur échéance.
- de pensions portant sur des titres que le Trésor met en
pension (mise en pension), qui consiste à émettre des obligations
assortie d'une clause de rachat, ce qui lui permet d'acquérir des
liquidités. Le Trésor peut aussi, effectuer l'opération de
« prise en pension » qui consiste à placer
temporairement des liquidités.
Notamment la possibilité de
présenter des « offres non compétitives »
lors des appels du trésor, ainsi que la possibilité de
démembrer ou remembrer les Obligations Assimilables du Trésor
(OAT).).
- d'opérations sur produits dérivés :
contrat d'échange (SWAPS) de devises, de taux, achat et/ou vente
d'options ou de contrat à terme sur titre d'Etat.
- d'opération d'arbitrage, qui consiste d'acheter
certaines obligations et d'en vendre d'autres, selon les prévisions sur
l'évolution des taux d'intérêts, ce qui peut
générer des gains pour le Trésor.
- d'opérations de prêt-vente, qui consiste à
mettre à la disposition d'un tiers assortie d'une clause de reprise, ou
de vendre, des titres dont les valeurs sont plus appréciées. Ce
qui permet de faciliter la liquidité du marché.
La prise en compte du facteur risque, risque lié
l'évolution du taux d'intérêt qui peut parfois être
préjudiciable aux prévisions budgétaire pour le service de
la dette à taux variable, risque également lié au taux de
change pour la partie externe de la dette, a donné naissance au concept
de management de risque.
Chapitre II : Structure et
spécificité de la dette des pays en
développement (PED)
Le montant total de l'endettement ne fournit qu'une image
globale du phénomène. En désagrégeant l'endettement
public, plusieurs catégories de dettes sont traditionnellement
distinguées, selon la nature, les conditions et l'échéance
du prêt.
Dans l'ensemble dettes publiques, on distingue les emprunts des
administrations publiques au sens strict et les emprunts des entreprises
privées ou non, bénéficiant de garantie publique. Le
critère essentiel de classification est le statut juridique du
débiteur. Ainsi, l'engagement d'un gouvernement vis-à-vis d'une
banque privée fait partie de la dette publique. En revanche, la
créance d'un organisme public extérieur notamment (Banque
Mondiale à travers sa filiale Société Financière
Internationale, par exemple) détenue sur une entreprise privée
d'un pays donné n'en fera pas partie. Ainsi définie, la dette
publique comprend la dette de l'Etat et éventuellement celle de ses
institutions dépendantes. Les emprunts de débiteurs
bénéficiant d'une garantie de l'Etat y sont comptabilisés
par de nombreuses institutions en raisons notamment de
l'éventualité de sa mise en jeu.
La diversité des sources, l'échéance plus ou
moins longue et les conditions de l'emprunt, font de l'analyse de la structure
de l'endettement public, un exercice nécessaire pour déceler les
sources de la crise de la dette dans les pays en développement.
Le terme Pays en Développement (PED) concerne l'ensemble
des pays non développés, ce qui exclu les pays de l'OCDE, sauf la
Turquie. Les pays de l'Europe de l'Est sont intégrés dans cet
ensemble.
La part relativement importante de la dette bilatérale et
multilatérale dans l'endettement des pays pauvres, révèle
en soi le caractère spécifique de leur endettement. Une
spécificité, qui tout au long des deux décennies
précédentes, a abouti à leur exclusion du marché
international privé des capitaux.
I Structure de la dette publique
Le financement du déficit budgétaire dans
les pays en développement en particulier exige à opérer
des choix qui peuvent parfois apparaître délicats car demandant,
dans un souci de gestion, à préférer tels ou tels
instruments de prêt par rapport à d'autres en fonction du
coût lorsqu'il s'agit des pays à revenu intermédiaire
victimes de crises répétées et ayant accès au
marché international des capitaux. Le choix demeure encore plus
délicat en ce qui concerne les pays pauvres pratiquement devenus exclus
du marché des capitaux et dont l'essentiel de leur source de financement
est officiel.
Les statistiques, qui servent de référence en la
matière, sont fournies par la Banque des Règlements
Internationaux (Evolution des marchés financiers), la Banque mondiale
(World Debt Tables) et l'OCDE (Financement et dette extérieure des PED)
.
Ces statistiques, généralement annuelles,
opèrent une désagrégation de l'ensemble « dette
publique » en permettant de distinguer plusieurs sortes de dettes,
selon la qualité du prêteur et les conditions de souscription. On
distingue ainsi :
- la dette bilatérale et multilatérale, constituant
ce qu'on appelle l'endettement extérieur qui s'oppose à la notion
de dette intérieure ;
- de dette privée c'est-à-dire l'ensemble des
emprunts souscrits par l'Etat auprès du système bancaire
privé. Elle est comptabilisée dans la catégorie de
l'endettement extérieur si ces emprunts sont souscrits à
l'étranger ;
- la dette due par l'Etat et ses institutions dépendantes
et la dette garantie par celui-ci ;
- la dette constituée de prêt à taux du
marché et de celle constituée de prêt à taux
concessionnel.
Ces statistiques s'obtiennent essentiellement par le biais du
Système de Notification des Pays Débiteurs (SNPD), crée en
1951 et fondé sur des renseignements statistiques fournis par des pays
emprunteurs auprès de la Banque Mondiale (World debt table) et
complété en 1967 par un Système de Notification des Pays
Créanciers (SNPC) élaboré par la Banque Mondiale et l'OCDE
(Financement et dette extérieure des PED).
1- la notion de dette publique extérieure :
dette multilatérale et dette bilatérale :
Malgré la récurrence du
phénomène de l'endettement extérieur, la notion de la
dette extérieure n'a jamais fait l'objet d'une définition
harmonisée, acceptée par l'ensemble des acteurs. La
définition retenue est celle commune aux trois grandes institutions que
sont la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International (FMI) et
l'Organisation pour la Coopération et le Développement
Economiques (OCDE).
La définition dite « centrale » de la
dette extérieure retenue est celle du FMI : « la dette
extérieure brute est égale au montant, à une date
donnée, des engagements contractuels en cours et ayant donné lieu
à versement des résidents d'un pays vis-à-vis de
non-résidents, comportant obligation de remboursement du capital avec ou
sans paiement d'intérêts, ou de payement d'intérêts
avec ou sans remboursement du capital ».
Le statut d'extranéité de la dette est donc
établi en fonction du critère de résidence, ceci en
conformité avec les statistiques portant sur les comptes nationaux ou
plus précisément sur les balances des paiements. Toutefois, la
prise en compte du statut juridique du prêteur contribue largement
à l'analyse de l'endettement public des pays en développement.
1.1- Dette publique multilatérale :
La dette publique multilatérale d'un pays est
constituée de l'ensemble des emprunts souscrits par l'Etat auprès
des organismes financiers multilatéraux dont les plus connus en la
matière, sont le Fond Monétaire International, la Banque Mondiale
et les Banques régionales de développement comme la Banque
Africaine de Développement.
Ces emprunts, sont vus le plus souvent comme de dernier recours,
constituent, de fait, le seul recours pour de nombreux pays pauvres. Ils sont
très largement conditionnés dans la période récente
à la mise en oeuvre de programmes de redressement connus sous le nom de
Programme d'Ajustement Structurel notamment pour ceux qui concernent les
institutions des accords de Bretton Woods. Perçu en
général, comme des prêteurs en dernier ressort voire les
seules dans certains cas et créanciers prioritaires en raison notamment
de leur statut. Les prêts de ces organismes, notamment ceux du FMI,
interviennent le plus généralement pour contenir des tensions
telles que les difficultés de paiement ou des crises économiques.
En revanche, la Banque Mondiale ayant intégré dans ses missions
la question du développement des pays pauvres, ses prêts sont
destinés le plus souvent à financer des projets plus
ciblés.
La dette multilatérale, relativement très faible
voire inexistante dans la structure de la dette des pays industrialisés,
acquiert à partir de la crise de l'endettement des années 1980,
une dimension relativement très importante dans le stock de dettes des
pays en développement et notamment dans les pays de l'UEMOA, pour des
raisons liées notamment à leur difficulté d'accès
aux marchés financiers et de capitaux internationaux privés
(Tableau n°1).
Les conditions d'octroi de crédit, étant en
pratique spécifiques d'une institution à une autre, la Banque
mondiale finance des projets de développement dans une dimension
microéconomique et ses crédits sont en général de
long terme, allant parfois jusqu'à cinquante ans avec des
périodes de grâce. Par contre, le FMI, de par son statut
d'institution de surveillance multilatérale, intervient surtout dans la
gestion macroéconomique du développement, ses prêts sont en
général destinés à contenir des tensions et sont de
court terme par rapport à ceux de la Banque Mondiale.
Tableau n° 1 : Dette
multilatérale/encours de la dette (en %)
BENIN
|
1970
|
1980
|
1990
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
1,0
|
24,5
|
41,6
|
53,5
|
56,5
|
56,7
|
59,7
|
59,6
|
62,6
|
70,8
|
73,5
|
BURKINA
|
0,1
|
42,9
|
67,7
|
75,4
|
76,7
|
73,7
|
70,7
|
70,5
|
77,5
|
79,2
|
85,9
|
C. I.
|
3,8
|
7,0
|
20,8
|
21,1
|
23,5
|
23,9
|
24,4
|
23,7
|
25,8
|
27,0
|
29,4
|
GUIN. BIS
|
-
|
24,5
|
39,5
|
42,0
|
42,5
|
42,7
|
48,6
|
54,6
|
55,8
|
58,6
|
62,4
|
MALI
|
2,4
|
23,6
|
36,3
|
46,1
|
49,0
|
50,5
|
50,8
|
52,2
|
61,9
|
66,2
|
68,5
|
NIGER
|
13,4
|
16,5
|
40,6
|
56,5
|
58,5
|
59,9
|
60,4
|
64,8
|
67,6
|
67,8
|
81,5
|
SENEGAL
|
9,2
|
17,9
|
36,5
|
49,3
|
49,8
|
49,8
|
52,9
|
53,1
|
54,1
|
58,4
|
74,7
|
TOGO
|
4,8
|
10,3
|
43,7
|
53,4
|
54,4
|
52,1
|
53,6
|
53,6
|
51,9
|
53,2
|
52,8
|
Sources : FMI (de l'année 1970 à 2003) ;
Rapport Zone Franc, Banque de France 2005.
Dans la décennie précédant le
déclenchement de la crise de la dette (1980), la dette
multilatérale ne représentait qu'une partie faible dans l'encours
de la dette des pays en développement. Le resserrement de la politique
monétaire américaine, les défauts de paiement qui ont
suivi et les instabilités notamment politiques ont rendues les Banques
méfiantes à l'égard des pays pauvres.
1.2- La dette publique
bilatérale :
La dette bilatérale d'un pays, est l'ensemble
constitué par des emprunts contractés par un Etat auprès
d'un autre. Les réaménagements (rééchelonnement ou
annulation) de la dette bilatérale sont négociés au sein
du Club de Paris. Avec les emprunts multilatéraux, les emprunts
bilatéraux constituent l'essentiel des sources de financement de la
frange très pauvre des pays en développement. Les prêts
bilatéraux, à la différence des prêts
multilatéraux, obéissent le plus souvent à des
considérations politiques et parfois géopolitiques. Ainsi, la
France est plus largement créancière en Afrique en particulier
dans la zone Franc, comme le Japon en Asie.
La notion de dette publique extérieure couvre deux
autres concepts, il s'agit de :
- la dette publique extérieure remboursable en devise
étrangère : cette dette correspond au montant des
engagements contractuels en cours et ayant donnée lieu à
versement d'un Etat vis-à-vis des non résidents, comportant
obligation de remboursement du principal et paiement d'intérêt en
devise étrangère et qui n'est viable qu'à condition d'une
amélioration durable de la balance des paiements. Cette dette est
relativement exposée au risque de change.
- la dette publique extérieure remboursable en monnaie
locale : elle concerne les titres publics détenus par des
institutions financières ou des simples agents économiques,
à l'extérieur du pays, mais dans le même ensemble
monétaire tel que la zone Euro. Cette dette ne subit qu'indirectement le
risque de change.
2- Dette publique intérieure :
La dette intérieure publique est constituée
par des emprunts ou des obligations émis par l'Etat ou de ses
entités dépendantes auprès des agents économiques
ordinaires nationaux. Sont aussi inclus, les arriérés de
traitement des fonctionnaires et les créances sur l'Etat des
fournisseurs locaux. Les statistiques en la matière ne sont que rarement
disponibles en raison de leur caractère le plus souvent de court
terme.
La différence entre dette intérieure et dette
extérieure est basée sur le critère de résidence
tel que défini par la cinquième édition du manuel de la
balance des paiements (1993) du FMI.
La dette publique intérieure, faute de statistiques
disponibles, si elle est importante, ce qui est rarement le cas pour ce qui
concerne les pays pauvres, peut considérablement dégrader la
situation budgétaire du pays en question.
La dette publique détenue localement,
généralement de court terme, est traditionnellement
négligé dans les analyses consacrées à la question
de la dette dans les pays en développement et n'a pas encore fait
l'objet d'initiative de politique internationale. Etant
généralement au taux du marché, le service de la dette
intérieure peut être source d'une grande difficulté pour de
nombreux pays, avec des conséquences budgétaires non
négligeables.
L'engagement à la stabilité macroéconomique
peut déconseiller l'option inflationniste consistant à un
financement du déficit par le système bancaire, tandis que la
volonté de développer un marché financier à
l'intérieur du pays, exige le plus souvent des titres publics,
supposés « sans risques ou de risque moindre »
pour fournir de normes de référence.
3- Dette bancaire privée :
Ce sont des emprunts contractés auprès du
secteur financier privé international et essentiellement bancaire. A
l'origine du gonflement spectaculaire de l'encours de la dette notamment dans
les pays de l'Amérique latine dans les années 1970 suite au
durcissement de la politique monétaire américaine, cet
endettement bancaire a été stimulé par la conjonction de
plusieurs évènements dont la hausse du prix des matières
premières et le niveau élevé de la croissance, justifiant
l'engouement des grandes Banques (Chase Manhattan, Manufacters Hanover,
Citicorp etc.) à devenir des créanciers de l'Amérique
latine. De très faible intensité dans le stock de la dette des
pays pauvre de l'Afrique subsaharienne, cette catégorie de prêt
n'est pratiquement plus accessible depuis le début des années
1970. La restructuration de la dette bancaire est négociée au
sein du club de Londres (véritablement né au début des
années quatre-vingt avec la crise des payements mexicains).
Les caractéristiques de la dette bancaire diffèrent
de celle contractée auprès des créanciers publics
notamment pour ce qui concerne l'échéance et le taux
d'intérêt. La dette bancaire totale des pays en
développement, recensée en 1986, représentait 406
milliards USD. L'essentiel du stock de cette dette a été
contracté par vingt pays sur un ensemble estimé de cent soixante
pays en développement. Cette dette est pour 75 % en dollars et pour 90 %
à taux variable ; sa maturité moyenne est de neuf ans.
Très concentrée, la dette bancaire se répartissait
à la fin des années 1980 comme suit : l'Amérique
latine comptait pour 58 % du total, l'Afrique 12 %, l'Asie 20 %. Le nombre de
créanciers n'était pas concentré en revanche, plus
d'un millier d'établissements bancaires étaient concernés
par l'ensemble de la dette bancaire.
4- Dette garantie par l'Etat
D'un point de vue juridique, l'expression de
« garantie d'emprunt » a une signification très
générale : elle désigne les situations, la plupart du
temps d'origine contractuelle, dans lesquelles un tiers en la personne de
l'Etat, s'engage à coté du débiteur (une entreprise,
généralement de droit public), en cas de défaillance de la
part de ce dernier, à assurer à son créancier le service
d'un emprunt en intérêts, amortissements, frais et accessoires.
Cette catégorie d'engagement financier de soutien et
éventuellement transformée en dette, tend à s'effriter
tant dans les pays industrialisés que dans les pays pauvres, en raison
de l'adoption progressive des règles du marché et du retrait
progressif de l'Etat de la production.
Tableau n° 2 : Structure de la dette
des pays de la zone franc de l'Afrique de l'Ouest
Pays
|
Dette multilatérale
|
Dette bilatérale
|
Dette commerciale
|
Bénin
|
2001
|
2002
|
2001
|
2002
|
2001
|
2002
|
81,0%
|
82,2%
|
19,0%
|
17,8%
|
-
|
-
|
Burkina Faso
|
83,4%
|
87,2%
|
16,6%
|
12,8%
|
-
|
-
|
Côte d'Ivoire
|
38,2%
|
35,3%
|
39,7%
|
43,0%
|
22,1%
|
21,7%
|
Guinée Bissau
|
42,0%
|
48,3%
|
58,0%
|
51,7%
|
-
|
-
|
Mali
|
71,4%
|
73,0%
|
28,6%
|
27,0%
|
-
|
-
|
Niger
|
74,5%
|
75,1%
|
22,5%
|
24,9%
|
-
|
-
|
Sénégal
|
66,3%
|
67,3%
|
33,7%
|
32,7%
|
-
|
-
|
Togo
|
62,9%
|
61,4%
|
37,1%
|
38,6%
|
-
|
-
|
Source : rapport de Banque centrale des
Etats de l'Afrique de l'ouest, janvier 2005.
Dans la structure de l'endettement des pays de l'UEMOA, seule la
Côte d'Ivoire possède encore une dette commerciale de garantie
publique.
II Les spécificités de la dette des pays en
développement (PED)
La situation de l'endettement des pays en
développement est contrastée. Au niveau absolu, leur endettement
n'est pas considérable par rapport à celui des pays riches.
Déjà à la fin de l'année 2000, la
dette des pays en développement (PED) représentait selon la
Banque Mondiale près de 2100 milliards de dollars, dont plus de 85%
à long terme.
En revanche, le poids du service de la dette et la croissance du
stock se révèlent bien plus élevé (ainsi, selon le
FMI, le stock de dette des 28 pays les plus endettés en 1999
représentait
130,5 % de leur PIB et le service de la dette 5,1 %, qu'on peut
comparer à leurs efforts en matière d'éducation (3,4 %) ou
de santé (1,7 %). Ainsi, le 21 Septembre 1970, Robert S. McNamara
président de la Banque Mondiale de 1968 à 1981,
déclarait : « la préoccupation principale des pays
en développement est le poids écrasant de leur dette
extérieure qui s'élève déjà à 55 Mds
$ US et qui augmente de 15 % par an ». La dette du tiers monde
représentait encore en 2004, 2600 Mds $ US selon la Banque Mondiale.
Les prêts accordés étaient pour l'essentiel
à taux d'intérêt variable, instrument redoutable en cas de
tension sur les taux d'intérêts comme cela fut le cas lors du
durcissement de la politique monétaire américaine des
années 1980. Ces prêts à taux variable ont essentiellement
concerné les pays de l'Amérique latine.
Pour l'essentiel, l'endettement des pays en développement
est donc concentré en valeur absolue sur des pays à revenu
intermédiaire de la tranche inférieure (590 à 2900 $ US
par an et par personne selon la Banque Mondiale). Ces pays se sont
endettés dans les années 1970 et 1980 auprès du
système bancaire international.
En termes de distribution géographique, l'endettement est
particulièrement important en volume dans les pays d'Amérique
latine. La part de cette région dans le total de la dette a eu
toutefois tendance à diminuer passant de 48 % en 1980 à 38 % en
2000. Ceci reflète le caractère extrêmement marqué
de la crise de la dette dans cette région, qui a conduit les
créditeurs, notamment bancaires, à réduire leurs nouveaux
crédits. La dette de la région de l'Asie de l'Est passait de 17 %
en 1980 à 31 % en 2000 de la dette totale des pays en
développement. Replacé dans une perspective historique, il
s'agissait d'un phénomène nouveau car, avant la seconde
guerre mondiale, l'endettement extérieur était vis-à-vis
d'agents privés, mais sous forme d'obligations détenues par un
grand nombre de porteurs, plutôt que sous forme de prêts bancaires.
De façon diverse, l'endettement extérieur est un
phénomène qui affecte la quasi-totalité des PED.
Tableau n° 3 : Répartition
géographique de l'endettement en 2004
En Mds $
|
Stock
|
Service
|
Amérique latine
|
770
|
121
|
Afrique Subsaharienne
|
220
|
15
|
Moyen-Orient et Afrique du Nord
|
160
|
23
|
Asie du Sud
|
180
|
16
|
Asie de l'Est
|
540
|
83
|
Ex-bloc soviétique
|
730
|
116
|
Total
|
2600
|
374
|
Source : Banque Mondiale.
En comparant le montant de la dette rapporté au PIB des
différentes régions, c'est le continent africain qui
apparaît, de loin, le plus endetté : la dette de l'Afrique
subsaharienne dépassait déjà son PIB en 1987 soit 100,1
%.
L'endettement des pays en développement revêt de
caractéristiques diverses. Classiquement, la Banque Mondiale
répertorie ces pays en fonction de leur degré d'endettement
grâce à trois critères :
- Le stock de dettes en pourcentage du PIB;
- Le service de la dette en pourcentage des exportations des
biens et services ;
- Le remboursement des seuls intérêts, en
pourcentage des exportations des biens et services.
Cette institution distingue les pays fortement endettés
(respectivement pour chacun des trois ratios, plus de 50 %, plus de 30 %, plus
de 20 %), les pays moyennement endettés et les pays faiblement
endettés (moins de 30 %, moins de 18 %, moins de 12 %).
La dette des pays les plus pauvres (revenu par tête
inférieur à 546 $ US de 1988) est relativement faible par rapport
à celle des pays à revenu intermédiaire de la tranche
supérieure (revenu par tête compris ente 2200 et 6000 $ US de
1988 dont la classification des huit les plus endettés, est
établie par le PNUD.
Figure 1 : Les Pays en développement
les plus endettés en 2003.
Source : PNUD, Rapport mondial sur le développement
humain, 2003.
Les pays les plus endettés en valeur absolue
(Brésil, Chine, Russie etc.), comparativement à leur production
annuelle, ne sont pas ceux dont le taux d'endettement brut est le plus grand.
En revanche, plusieurs pays, dont l'endettement est en valeur brute
relativement faible, apparaissent surendettés au regard de leur
production annuelle. Parmi ces derniers, l'Angola, le Mozambique, le Soudan,
l'Indonésie ou la Guinée Bissau ont une dette
représentant, pour certains d'entre eux, près de trois fois leur
PIB. On retrouve de nombreux pays d'Afrique sub-saharienne dans ce groupe de
petits pays, pour lesquels la dette représente une charge très
lourde, mais dont on parle moins dans la mesure où leur dette brute,
plus faible, est moins susceptible de mettre en danger le système
financier international.
Après la crise de la dette déclenchée en
Amérique latine au début de l'année 1982, les emprunts
auprès du système bancaire traditionnel ont été peu
à peu remplacés par les recours à des prêts publics
(bilatéraux ou multilatéraux).
1- L'échéance
Le délai de remboursement en matière de dette
publique, diffère selon le type de créancier. Les dettes
contractées auprès des institutions multilatérales ou
auprès d'autres Etats, ont des délais de remboursement
relativement longs et comportent des périodes de grâce largement
avantageuses et des raccourcissements des échéanciers. Ainsi, la
maturité des crédits accordés par des créanciers
publics aux pays en développement, est environ le double de celle des
crédits bancaires privés (en moyenne environ vingt ans au lieu de
dix ans). Les pays africains à faible revenu constituent de ce point de
vue une exception notable. La maturité de leurs dettes dépasse
cette moyenne, allant parfois jusqu'à trente ans.
La dette de long terme représente ainsi l'essentiel de
l'encours de la dette des pays pauvres notamment ceux de l'UEMOA, laissant par
conséquent une place très faible à l'endettement de court
terme c'est-à-dire de moins d'un an.
Tableau n° 4 : Dette de court terme/encours de la dette
(en %) des pays de l'Union
BENIN
|
1970
|
1980
|
1990
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2,1
|
17,3
|
4,3
|
8,4
|
5,2
|
7,2
|
4,1
|
4,7
|
4,0
|
1,6
|
BURKINA
|
0
|
10,6
|
10,1
|
4,9
|
4,0
|
6,4
|
5,8
|
4,1
|
3,3
|
3,7
|
C. I.
|
28,6
|
14,2
|
20,8
|
17,0
|
10,6
|
9,5
|
8,6
|
10,1
|
7,9
|
7,5
|
GUIN. B
|
-
|
3,6
|
8,2
|
7,7
|
7,9
|
8,8
|
8,0
|
2,7
|
2,0
|
1,6
|
MALI
|
1,1
|
3,3
|
2,5
|
8,7
|
5,8
|
5,9
|
4,5
|
3,5
|
5,3
|
1,6
|
NIGER
|
0
|
18,5
|
8,9
|
5,9
|
3,9
|
4,7
|
5,0
|
2,4
|
1,9
|
1,9
|
SENEGAL
|
0
|
14,9
|
11,3
|
5,6
|
6,7
|
7,8
|
4,1
|
5,5
|
7,1
|
3,5
|
TOGO
|
0,1
|
10,7
|
8,8
|
3,3
|
3,5
|
10,1
|
9,3
|
10,4
|
12,5
|
10,3
|
Source : FMI, Global Development Finance, 2004
Il apparaît clairement dans ce tableau que la dette de
court terme ne représente qu'une part relativement faible dans le stock
de la dette des pays de l'Union.
2- Les prêts concessionnels
Un prêt concessionnel, est un prêt dont le taux
d'intérêt est inférieur à celui du marché.
Ainsi, les emprunts accordés aux pays en développement, sont
généralement caractérisés par de bas taux
d'intérêt et de longue échéance, ce qui devraient
permettre d'avoir un service de la dette assez réduit en valeur absolue
Sur recommandation du FMI, notamment dans le cadre des programmes d'ajustement
structurel, les pays pauvres recourent le plus souvent aux financements
officiels (dons, prêts à taux bonifiés). L'accès aux
prêts bancaires privés et aux marchés internationaux des
capitaux demeurant ouvert aux pays dont leur endettement est jugé
soutenable.
Depuis des décennies, les prêts concessionnels
constituent un élément non négligeable de l'aide
internationale aux pays en développement, qui, souvent, pour les plus
pauvres, est accordée à un taux d'intérêt
égal ou inférieur à 1 % sur plus de 30 ans.
Tableau n° 5 : Prêts
concessionnels en % de l'encours total de la dette des pays de l'UEMOA
Pays
|
1970
|
1980
|
1990
|
1997
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
BENIN
|
70,3
|
39,2
|
78,1
|
77,7
|
80,7
|
80,6
|
84,3
|
84,9
|
86,2
|
90,1
|
BURKINA
|
84,3
|
67,0
|
71,6
|
83,4
|
83,9
|
82,8
|
83,0
|
84,3
|
85,5
|
86,9
|
C. I.
|
32,5
|
5,9
|
17,9
|
28,9
|
33,3
|
33,5
|
34,0
|
33,4
|
38,4
|
40,9
|
GUIN. B
|
-
|
62,0
|
56,7
|
72,2
|
72,3
|
71,6
|
75,4
|
85,1
|
86,8
|
89,5
|
MALI
|
93,0
|
84,4
|
91,1
|
83,6
|
82,8
|
82,7
|
84,1
|
85,1
|
87,7
|
91,9
|
NIGER
|
91,6
|
17,9
|
48,3
|
67,0
|
70,1
|
72,6
|
72,4
|
77,1
|
80,1
|
78,6
|
SENEGAL
|
59,8
|
27,1
|
52,7
|
66,1
|
71,4
|
71,5
|
75,6
|
75,0
|
75,5
|
79,8
|
TOGO
|
78,9
|
28,3
|
55,1
|
71,4
|
71,4
|
68,7
|
70,2
|
70,2
|
68,7
|
70,4
|
Sources : Rapport sur la dette, Etude de la BCEAO, 2003.
A partir de la fin des années 80, les pays
créanciers se sont concertés pour assouplir progressivement les
conditions de remboursement offertes aux pays pauvres en proie à des
difficultés de paiement de leur dette.
La logique de l'allégement de la dette des pays les plus
pauvres, Etude thématique du FMI, septembre 2002.
Bien que cet assouplissement ait été
conditionné à l'application des politiques visant à
stimuler leur croissance, il a abouti à des réaménagements
de dettes qui se succéderont jusqu'à l'actuel programme de
réduction de la dette des pays dits pauvres et très
endettés.
3- Une exclusion de fait des pays pauvres du
marché international des capitaux
A la suite des crises répétées de la
dette et de la difficile négociation d'accord de prêt, les pays
pauvres recourent plus aux financements officiels (dons, prêts à
taux bonifiés d'organisations internationales...) contrairement aux pays
à revenu intermédiaire et les pays industrialisés qui ont
accès aux prêts bancaires privés et, parfois, aux
marchés internationaux de capitaux.
La Banque Mondiale, contrairement au FMI, se finance sur le
marché financier pour ensuite prêter aux pays incapables d'en
obtenir directement par le marché. En effet, pour les pays les plus
pauvres, les recours à l'endettement sur les marchés
internationaux de capitaux a été réduit pendant les
années 1970 du fait de la réticence des banques à
prêter à des pays jugés peu solvables. Ils ne sont donc
plus dans la capacité d'obtenir des fonds privés comme c'est le
cas des autres pays en développement notamment émergents. Ces
réticences des banques se manifestent par la prise en compte du risque
de solvabilité qui pourrait induire des défauts de paiement.
L'analyse de la notion de risque-pays a fait l'objet d'une prise
en compte progressive de plusieurs facteurs. Historiquement, sa naissance se
situe dans les années 1950 avec notamment la nationalisation par Nasser
du Canal de Suez en 1956 en Egypte. Au cours des années 1960-70, le
risque-pays s'est identifié au « risque politique » et a
concerné essentiellement les nationalisations intervenues dans
l'industrie pétrolière, au Moyen-Orient ou en Algérie
(expropriation d'Elf, par exemple). Ensuite, les années 80 l'ont
confondu avec le «risque souverain», à savoir la
possibilité que des Etats emprunteurs tels que le Brésil ou
l'Argentine soient en défaut sur le paiement de leur dette externe. Dans
les années 90, il s'est transformé en «crise des pays
émergents» (crise mexicaine de 1994, crise asiatique en 1997, crise
russe en 1998), sans oublier les retombées des conflits armés,
toujours plus nombreux (Koweït, guerres civiles africaines, Kosovo,
etc.).
De nombreux essais de définition ont été
proposés. Pour sa part, Bernard Marois retient celle ci : «Le
risque-pays peut être défini comme le risque de
matérialisation d'un sinistre, résultant du contexte
économique et politique d'un Etat étranger, dans lequel une
entreprise effectue une partie de ses activités» . Le
«sinistre» peut, selon cet auteur, être causé par
l'immobilisation d'actifs, pour une entreprise multinationale (par exemple, la
confiscation de biens détenus à l'étranger) ; une
répudiation de dettes par un Etat souverain, pour une banque ; la perte
d'un marché commercial, pour une entreprise exportatrice ; une atteinte
à la sécurité des personnes (rapt d'un
expatrié).
De ce fait, le risque-pays peut englober deux composantes
principales : une composante «risque politique», résultant
soit d'actes ou de mesures prises par les autorités publiques locales ou
du pays d'origine, soit d'événements internes (émeutes) ou
externes (guerre) ; une composante «risque économique et
financier», qui recouvre aussi bien une dépréciation
monétaire qu'une absence de devises se traduisant, par exemple, par un
défaut de paiement.
De plus en plus, ces deux sources de risque sont
interdépendantes, ainsi que l'ont montré les crises asiatique et
russe.
Compte tenu de la croissance du commerce mondial et des
investissements internationaux, les enjeux liés à
l'appréciation du risque-pays tendent à prendre une place
primordiale dans les préoccupations des banques, des entreprises et des
institutions financières. Cette préoccupation fait l'objet des
évaluations dans les agences de notation (Standard & Poor, Mc
Donough, Credit Risk International, etc.).
Les méthodes d'évaluation diffèrent d'une
agence à une autre aussi bien que les facteurs pris en compte. Le
tableau ci-dessous présente les indicateurs pris en compte par l'agence
Credit Risk International pour la notation du risque de défaut de
paiement appelé aussi risque financier ou risque pays, au moyen des
quatre facteurs suivants : Risque de défaut souverain sur la dette
publique : (1) Poids de la dette publique par rapport au PIB et aux
exportations ; (2) ratio du service de la dette sur les exportations de biens
et services ; (3) structure et soutenabilité de
l'échéancier de la dette dans les deux prochaines années ;
(4) Situation des rééchelonnements en Club de Paris et prise en
compte de l'initiative de réduction du stock de la dette des Pays
pauvres très endettés (PPTE).
Cette notation s'appuie sur une base de données
regroupant, depuis 1981, de plus d'une centaine de critères sur 110 pays
dont les calculs sont basés sur des estimations statistiques de
paramètres.
Les notes sont exprimées de 1 (risque dangereux) à
7 (risque excellent), en passant par 2 (risque très
élevé), 3 (risque élevé), 4 (risque assez
élevé), 5 (risque modéré) et 6 (risque faible).
Marois Bernard., Le risque pays, Que Sais-Je, PUF,
1990.
Tableau n° 6 : Risque financier des
pays de l'UEMOA publié auprès de l'agence Investir en Zone Franc
(IZF) en 2005.
PAYS
|
Quatre facteurs de risque financier
|
Note finale de risques financiers
|
Risque de défaut de la dette publique
|
Équilibres budgétaire et des paiements
|
Risque inconvertibilité et dévaluation
|
Santé du système bancaire
|
Pondération
|
30%
|
30%
|
20%
|
20%
|
(en 7 classes de risque)
|
Benin
|
3.6
|
3.3
|
5.9
|
4.3
|
5 (risque modéré)
|
Burkina Faso
|
2.1
|
2.6
|
5.7
|
4.1
|
4 (risque assez élevé)
|
Côte d'Ivoire
|
1.9
|
2.0
|
5.3
|
3.7
|
2 (risque très élevé)
|
Guinée Bissau
|
1.3
|
1.8
|
5.6
|
2.8
|
2 (risque très élevé)
|
Mali
|
2.9
|
3.0
|
5.7
|
3.2
|
3 (risque élevé)
|
Niger
|
2.7
|
2.9
|
5.6
|
3.3
|
3 (risque élevé)
|
Sénégal
|
3.7
|
3.6
|
5.6
|
3.9
|
5 (risque modéré)
|
Togo
|
2.8
|
3.1
|
5.7
|
2.9
|
3 (risque élevé)
|
Source : CREDIT RISK INTERNATIONAL, 2005
Remarque : Les risques financiers
notés ici le sont par rapport à des données objectives
d'endettement et autres ratios de liquidité/solvabilité. Il
s'agit donc de la capacité à payer. La volonté de l'Etat
débiteur d'honorer sa signature et ses engagements financiers n'est pas
été notée en tant que telle.
Devant la situation explosive de l'endettement des pays pauvres,
dans un premier temps les apparences sont maintenues au travers du report des
échéances. Après que ces rééchelonnements se
sont montrés insatisfaisants, les mesures particulières ont
été progressivement adoptées.
4- Les réaménagements de dette
Les pays pauvres diffèrent, à bien des
égards, des autres pays en développement. Ils diffèrent
par leur structure économique, mais aussi par les financements
extérieurs spécifiques auxquels ils ont seul accès, et par
des modalités particulières de traitement de leurs dettes.
Exclu des marchés internationaux des capitaux, ces pays
n'ont pas à craindre les vastes mouvements de flux et de reflux qui
caractérisent les crises financières classiques.
Dépendants de l'aide au développement, ils reçoivent des
dons ou des prêts à condition très favorable (taux
inférieur à celui du marché, période de grâce
et de maturité relativement longue). Ces flux ne s'inscrivent pas
toujours dans une logique financière, des considérations
humanitaires, politiques, commerciales ou même
géostratégiques s'interpénètrent
étroitement.
Le retournement de la conjoncture à la fin des
années 1970 entrainant une dégradation brutale des recettes
d'exportations et un tarissement des sources extérieures de
financement, précipite l'apparition des difficultés de paiement.
Le remboursement de la dette devient le premier problème à
régler, pour la plupart des pays en difficulté, le retrait des
banques privées rend de plus en plus nécessaire un recours
à l'aide du FMI pour négocier des réaménagements de
dettes. Ces réaménagements prennent le plus souvent la forme d'un
accord multilatéral notamment avec la mise en place d'instances comme le
Club de Paris pour les emprunts bilatéraux et le Club de Londres
négociant le retraitement pour les créanciers privés
essentiellement bancaires, et l'intervention de partenaires financiers, comme
la Banque Mondiale et le FMI dont les créances ne sont pas en principe
négociables en raison de leurs statuts de créancier
privilégié, conféré par l'accord de Bretton
Woods.
La restructuration au sein du Club de Londres est
organisée par un comité bancaire chargé de négocier
avec le pays débiteur et de faire accepter l'accord à l'ensemble
des banques impliquées. Un comité économique est
chargé, quant à lui d'évaluer les besoins de financement
du pays.
Les techniques de gestion de la dette privée se composent
essentiellement pour les pays pauvres du rachat avec décote et des
restructurations financées par des facilités accordées par
les bailleurs de fonds ou les Etats.
En revanche, les techniques de retraitement de la dette
bilatérale au Club de Paris, sont mieux rodées et mieux connues.
Le retraitement de la dette bilatérale, bénéficie ainsi
d'un cadre quasi institutionnel et multilatéral, qui a une longue
expérience en la matière. Le Club s'est réuni pour la
première fois en 1956 pour coordonner l'action financière des
pays créanciers de l'Argentine qui demandait un
rééchelonnement de sa dette. Le club de Paris disposant d'un
secrétariat permanent auprès de la Direction du Trésor
français, ne traite en principe que le principal et non les
intérêts des dettes bilatérales et celles garanties par les
agences officielles. Le réaménagement est régit
principalement par deux principes : le pays débiteur doit
être en situation de « défaut de payement
imminent » et avoir conclu avec le FMI un accord sur le programme
d'ajustement économique qui comporte deux composantes :
- un programme de stabilisation qui doit être
appliqué en premier, a pour objectif d'ajuster les ressources
intérieures au niveau réduit de ressources extérieures. Il
s'agit donc de prendre des mesures qui visent, à court terme, à
rétablir les grands équilibres financiers.
- et un programme d'ajustement structurel qui doit permettre
à long terme de rendre la dette soutenable.
5- Cas particulier des Pays de l'UEMOA
La dette de l'Afrique subsaharienne représente en
valeur absolue seulement 10% de l'endettement de l'ensemble PED. Cependant, le
ratio de la dette sur le PIB est le plus élevé au monde car
fréquemment supérieur à 100%.
Au sein de l'ensemble des pays en développement, un groupe
de pays présente une crise de grande ampleur, bien que de forme
différente et d'enjeux moindre, en terme quantitatif (231 milliards de
dollar US déjà en 2000 selon la Banque Mondiale), pour les
créanciers, ce sont les pays à faible revenu d'Afrique dans
lequel se trouvent les huit pays de la zone UEMOA. La dette de ces pays
dépasse en moyenne 100 % de leur PIB. Leur crise de l'endettement est
encore bien plus profonde que le groupe des pays émergents fortement
endettés. Bien que plus de la moitié de la dette de ces pays ait
été contractée sous forme concessionnelle, elle pose
problème et apparaît comme un fardeau faisant obstacle au
développement.
En effet, depuis l'accession à l'indépendance de
ces pays, les recettes publiques n'ont jamais permis de couvrir
l'intégralité des charges des Etats naissants, ce qui avait par
ailleurs sa justification pour le financement des infrastructures
nécessaires pour leur développement, mais conduira à des
déficits chroniques dont l'ampleur varie en fonction de
l'évolution des cours mondiaux largement volatiles des principales
matières premières exportées (Café, Cacao, Cotton,
Or et Arachide) et de la pluviométrie, l'agriculture, principale
activité, en étant fortement dépendante.
Ainsi, l'appel à l'emprunt extérieur en raison de
l'absence de l'épargne intérieure disponible, du moins non
bancarisée, a été systématique, les autres
instruments de financement du besoin financier public traditionnel étant
hors de porté pour plusieurs raisons :
- L'instrument monétaire :
Le financement monétaire que constitue les avances du
système monétaire est difficilement mobilisable en raison
notamment des accords monétaires liant les pays de la zone Franc
à la France, aux termes desquels, cette dernière garanti le
maintient de la parité entre le Franc CFA et le Franc Français,
un engagement demeurant garanti dans le cadre de la monnaie unique
européenne.
En contrepartie de cette garantie qui met les pays
concernés à l'abris de risque de change du moins directement, le
Trésor français exerce un contrôle plus rigoureux par le
biais d'un mécanisme de dépôt de 65% des réserves de
change de la zone dans un compte d'opération ouvert auprès de la
Banque de France et par les dispositions organisant la composition du conseil
d'administration des Banques centrales des Etats de la zone Franc. Le statut de
la BCEAO exige aux termes de l'article 51, l'unanimité pour ce qui
concerne les décisions importantes. Sachant que le conseil
d'administration est composé de deux administrateurs par pays membre et
deux Français (article 49), l'instrument monétaire est donc
difficilement utilisable en l'absence de consensus.
- L'instrument fiscal :
Les recettes fiscales sont essentiellement douanières, la
fiscalité directe frappe les rares sociétés
déclarées et la rémunération des fonctionnaires et
toute augmentation de taux peut paraître dissuasive. La très forte
propension de l'économie informelle et l'inefficacité de
l'organisation du système fiscal, rend rigide cet instrument pourtant
indispensable.
Au regard de ces facteurs, l'endettement international
apparaissait donc nécessaire et coïncidait avec un environnement
financier favorable aux prêts notamment des taux d'intérêt
relativement bas suite au ralentissement de la croissance dans les pays
industrialisés et l'afflux des pétrodollars dans les banques
occidentales.
Les organisations financières internationales ont acquis
un rôle particulièrement important dans la gestion de la dette
des pays les plus pauvres. Cela tient tout d'abord au fait qu'ils disposent
d'une grande part des créances. Mais aussi surtout à leur pouvoir
(tout au moins pour la Banque Mondiale et le FMI), qui les place dans une
position différente que celle des autres bailleurs officiels. Ces deux
institutions ont en effet réussi à imposer aux autres
créanciers mais aussi aux débiteurs un statut de créancier
prioritaire qui interdit en principe jusqu'à une date récente, de
négocier tout réaménagement de dette avec un
débiteur en difficulté. Ce statut particulier notamment pour le
FMI s'expliquait par son rôle de prêteur en dernier ressort.
Chapitre III : Origines et Crises de
l'endettement
L'endettement n'est pas un phénomène nouveau.
Au cours du XIXème siècle, des capitaux quittent l'Europe
occidentale vers des pays comme les Etats-Unis, le Canada ou des empires
coloniaux. Les divergences entre les obligations de remboursement des pays
débiteurs et leurs possibilités d'y faire face ont aussi
marqué l'histoire du monde moderne. Une première vague de crise
de l'endettement international des pays en développement apparaît
dans les années 1820, une période durant laquelle, la plupart des
nations nouvellement indépendantes d'Amérique latine, se sont
largement endettées. Cet endettement avait pris surtout la forme
d'émission d'emprunts publics obligataires. Pendant la période de
retournement de la conjoncture, de nombreux défauts de paiement sont
apparus, aussi bien dans plusieurs Etats du Sud des Etats-Unis. Ces
défauts de paiement n'ont pourtant pas empêché l'apparition
de nouvelles périodes d'endettement extérieur des pays en
développement et de nouvelles crises financières comme celles des
années 1850, du début des années 1870, celle de la fin des
années 1880, marqué par la crise financière de
l'Argentine. En effet, à la suite de l'expansion économique des
années 1880, l'Argentine avait connu un afflux de capitaux
extérieurs et un accroissement de la charge de sa dette. Dès 1890
une crise de confiance apparaît et se traduit par la disparition
progressive des apports de capitaux extérieurs et engendre en
conséquence des répercussions sur l'ensemble du système
financier mondial, par l'intermédiaire de la faillite de certaines
grandes banques créancières. En cette même année la
charge de sa dette représentait 40% de ses recettes d'exportation et
dès 1891, le gouvernement argentin est en cessation de paiement et
répudie le service de sa dette. Mais comme le dit David Hume :
après les crises de dette, les crédits apparaissent encore
florissants. Les années 1910, ont été aussi
marquées par d'importants défauts de paiement dont les principaux
seront dus à l'effondrement de l'empire ottoman et à la
révolution mexicaine.
David Hume (économiste et moraliste écossais du
XVIIIe siècle) disait à ce propos que « la plupart des
êtres humains sont de telles dupes que même si une banqueroute
volontaire (...) assenait un coup violent au crédit, il ne faudrait
probablement pas longtemps pour voir le crédit renaître aussi
florissant qu'auparavant ».
En 1917, à l'arrivée des bolchevicks au pouvoir, le
nouveau gouvernement répudie une grande partie de la dette
extérieure de la Russie, une répudiation s'inspirant plus
à une orientation idéologique que de difficultés
économiques. Cette crise de la dette russe semble ne pas correspondre
à une crise financière typique des pays en
développement.
La crise des années 1930 :
La crise des années 30 est considérée
par les historiens comme la plus importante crise d'endettement de la
période contemporaine. Sa caractéristique principale, est que la
plupart des pays débiteur - tous les pays d'Amérique latine, la
plupart des pays d'Europe orientale, la Turquie et la Chine- ont
été simultanément en défaut de paiement.
Son origine réside dans la crise économique qui a
débuté aux Etats-Unis en 1929. La crise de 1929 a en effet
provoqué en premier lieu une chute des recettes d'exportation des pays
endettés, en raison de la récession dans les pays
industrialisés, de la montée du protectionnisme et de
l'effondrement des prix des matières premières. La crise a aussi
provoqué une hausse des taux d'intérêts réels. La
grande différence de la crise des années 30 et les suivantes,
c'est que les porteurs d'obligations disposaient de peu de moyens de pression
sur leurs débiteurs. En général les détenteurs
d'obligation étaient nombreux et dispersés et avaient à
négocier avec le débiteur défaillant par
l'intermédiaire de comité indépendant (la British
Corporation of Foreign Bondholders en Grande Bretagne, le Foreign Bondholders
Protective Concil aux Etats-Unis).
La crise économique de 1929 durera plusieurs
années, le chômage et la chute de la production atteindront des
niveaux catastrophiques et dans de nombreux pays, la situation politique
devient instable, aboutissant en fin de compte à la seconde guerre
mondiale. A la sortie de cette guerre, les mouvements internationaux de
capitaux sont devenus extrêmement rares et la plus grande
opération d'endettement d'envergure fut le plan Marshall pour la
reconstruction d'après guerre en Europe occidentale.
Avec la fin de la guerre et les mouvements d'indépendance
des colonies qui ont suivis, l'endettement va concerner des pays autrefois
absents en tant que pays souverain dans les mouvements de capitaux, il s'agit
des pays en développement, qui empruntèrent massivement pour
combler leur retard de développement.
I. Aux sources de la dette actuelle des pays en
développement
La genèse de la dette actuelle est beaucoup plus
liée à la définition donnée au
phénomène du sous-développement à la fin des
années 1950.
Ces explications considéraient de manière presque
unanime que la pauvreté des pays du
Tiers Monde avait deux causes essentielles : le manque de moyens
financiers et de technologies. On retrouve là aussi l'explication
donnée notamment par R. Nurske avec sa théorie des « cercles
vicieux » du sous-développement. En effet, selon cette conception
les pays du Tiers Monde ne manquent ni de main-d'oeuvre, ni de matières
premières et pour pouvoir accroître la productivité de la
première et mieux valoriser les secondes, on considérait alors
qu'il fallait de l'argent et des machines.
En 1961, l'ONU vota une résolution intitulée
Première décennie du développement, fixant un certain
nombre d'objectifs en termes de croissance : 5 % pour les pays du Tiers Monde.
Les pays développés devaient sous forme d'aides et
de prêts, transférer 1 % de leur PIB vers les pays du Tiers Monde
(dans la même période, les Etats-Unis transférèrent
4,5 % de leur PIB pendant le Plan Marshall). La dette des pays du Tiers Monde
qui représentait alors 7,6 milliards de dollars US en 1960 monte en
1970 à 66 milliards de dollars US. Cette somme représentait alors
14 % de leur PNB en moyenne et un peu plus de 100 % de leurs exportations
annuelles. Cet endettement était jugé raisonnable car le service
de la dette représentait environ 15 % des leurs exportations.
Pour ce qui concerne les objectifs de croissance, les
résultats ont été inégaux. Les 5 % sont atteints,
mais la croissance est déséquilibrée. C'est avant tout
l'industrie et les mines qui en ont profité, alors que l'agriculture
principalement vivrière diminue.
Les exportations des pays industriels d'alors vers ceux en
développement doublent.
Jugés satisfaisants, ces résultats entraînent
dans la foulée de la première décennie du
développement, une deuxième décennie couvrant la
période allant de 1970 à 1980. Ayant pour principal cible
l'indicateur PNB, la plupart des gouvernements des pays industrialisés
comme ceux des pays en développement, maintiennent une stratégie
identique en misant à nouveau sur des objectifs de croissance : 8 % pour
l'industrie et 4 % pour l'agriculture.
A la fin de la deuxième décennie, la dette atteint
650 milliards de dollars US, mais de bons taux de croissance dans plusieurs
pays maintiennent l'impression que la voie adoptée était la
bonne. De plus, la dette, inflation aidant, ne représentait encore que
20 % du PNB. Mais, pour les plus endettés, la dette représentait
alors environ 160 % de leurs exportations annuelles.
La deuxième décennie a été
marquée par une rupture importante avec le choc pétrolier de
1973. Alors que les pays industrialisés connaissent une récession
à partir de 1974, seuls les pays en développement semblent
susceptibles de faire un bon usage des
"Pétrodollars", placés dans le système
financier international. Malgré le choc pétrolier, l'endettement
dans pays en développement continuait à croître. De plus,
ces pays semblent d'autant plus solvables que le monde entier est sous le choc
des prévisions alarmistes données par le Club de Rome en 1972
concernant les pénuries prévisibles pour la plupart des
matières premières minérales. Or, le Tiers Monde est avant
tout fournisseur de matières premières.
Vient alors la troisième décennie du
développement, devant couvrir la période 1980-90. Les rapports
entre les pays riches et les plus pauvres se sont tendus. Ces derniers,
réunis pour partie dans « le groupe de 77 », plaident pour une
plus grande ouverture des marchés mondiaux à leurs produits. Une
convention est signée début 1981 (Convention de Lomé I).
La crise économique rencontrée à partir de
1974 dans les pays industrialisés, n'a pas tardé à se
faire sentir dans les pays en développement, essentiellement
exportateurs des matières premières.
Origines de la crise de l'endettement
Après plusieurs années consécutives de
hausse, le cours des matières premières (hors énergie)
s'inscrit à la baisse dès la fin des années 1970. Les pays
en développement ont été brutalement confrontés
à une dégradation de leurs recettes d'exportation mais aussi
à un tarissement des sources extérieures de financement à
la fin des années 1970.
1- Le retournement à la baisse des prix des
matières premières :
La baisse des prix des matières premières
intervenue la première, puis du cours des produits pétroliers,
vont se traduire par une détérioration des recettes d'exportation
de la plupart des pays en développement. Mais c'est surtout la
récession consécutive au deuxième choc pétrolier
dans les pays industrialisés qui va être capital en tant que
précurseur des difficultés financières des pays en
développement. Dans ces pays fortement demandeurs de matière
première, la croissance ralenti, ce qui a eu pour conséquence une
baisse de la demande de matière première, qui par le simple du
mécanisme du marché, les prix de cette dernière chute.
Ainsi dans la seule année 1980, le cours du cuivre
(essentiel pour la Bolivie et le Chili) chute de 27 %, celui de l'étain
de 24 %. L'indice des prix à l'exportation des produits primaires
(combustibles exclus) établi par la CNUCED baisse de près de 30 %
entre 1980 et 82.
Les prix de nombreux produits primaires vont tomber, au cours des
années 1980, au niveau le plus bas depuis la seconde guerre mondiale. En
revanche, les prix des produits des pays industriels ayant augmenté de
17 % tandis que ceux des produits de base après avoir augmenté de
12 % par an entre 1970 et 1980, chutaient de 26 % en moyenne, il en a
résulté une détérioration des termes de
l'échange et ainsi qu'une diminution de la capacité d'importation
des pays en développement.
Les pays ont en partie compensé la dégradation de
leurs termes de l'échange par un recours accru à l'emprunt.
2- Un contexte financier plus défavorable aux
pays en développement :
Le coût de l'endettement a aussi brusquement
monté à la suite d'un retournement de la politique
monétaire des Etats-Unis.
En effet, sous l'influence de Paul VOLCKER, président du
Federal Reserve, influencé lui-même par les principes de la
théorie monétariste, la politique monétaire
américaine devient plus restrictive à partir de 1979. Le taux du
marché monétaire passe de 7,93 % en 1978 à 18,38 % en
1981. Les taux d'intérêt réels pendant les années
1980 sont près de six fois supérieures à ceux de la
période 1974-79.
Tableau n° 7 : Evolution du taux
d'intérêt nord américain durant la période de
l'endettement massif.
Année
|
Taux nominal
|
Taux réel (inflation déduite)
|
1970
|
7,9 %
|
2,0 %
|
1975
|
7 ,9 %
|
- 1,3 %
|
1979
|
12,7 %
|
1,4 %
|
1980
|
15,3 %
|
1,8 %
|
1981
|
18,9 %
|
8,6 %
|
Source : données publiées par le CADTM
(Comité d'Annulation de la Dette du Tiers Monde) en 2005.
De plus, les capitaux affluent aux Etats-Unis, provoquant ainsi
une hausse du dollar qui augmente le coût des emprunts libellés en
dollars. Comme dans les années 1975-80, de nombreux pays ont
cherché à mener une politique de relance économique,
l'endettement était le moyen de compenser l'évolution
défavorable du cours des matières premières, pour financer
les dépenses publiques. Mais les effets de la relance se heurtent
à la récession mondiale et à la montée du
protectionnisme des pays industriels freinant les exportations des pays en
développement. La dette ayant été alourdie par la hausse
des taux d'intérêts et de l'appréciation du dollar, les
pays en développement vont chercher à emprunter pour faire face
à une charge de remboursement croissante. La crise des payements se
profile à l'horizon et les banques deviennent de plus en plus
réticentes à prêter. Ce revirement des banques s'est
accentué par la disparition de leur surliquidité.
La conjonction de cet ensemble de facteurs va provoquer une
contraction des crédits accordés aux pays en
développement. Les crises de paiements se précipitent, elle
éclate en premier pendant l'été 1982 au Mexique : la
crise mexicaine.
En effet, en 1982, le Mexique dont la dette représentait
85 milliards de dollars US annonce qu'il est dans l'incapacité de faire
face à ses échéances. Le service de sa dette
représente, en effet, plus de 100 % de ses recettes d'exportation, les
intérêts à eux seuls représentent plus de la
moitié de ses exportations. Le Mexique décrète un
moratoire sur le service de sa dette. Cette crise mexicaine
révèle la fragilité des pays en développement.
Le Mexique sera suivi par d'autres pays. Certains brandiront
l'arrêt des remboursements comme une menace, d'autres fixeront des
limites à leurs remboursements, calculées par rapport à
leurs recettes d'exportation .
Un certain nombre de solutions de réaménagement ont
été mises en place pour éviter la faillite du
système bancaire, mais la dette ne baisse pas. En 1985, elle
dépasse les
1000 milliards de dollars, pour approcher les 2100 milliards
à la fin de l'année 2000.
La seconde crise mexicaine de janvier 1995 et ainsi que les
crises plus récentes des pays asiatiques (1997), du Brésil (1999)
et de l'Argentine (2001) sont beaucoup liées à la
volatilité des capitaux. Elles résultent pour l'essentiel de la
libre circulation des capitaux dont le FMI en fut le grand défenseur en
adoptant des mesures en vue de l'instauration de la convertibilité du
compte de capital².
En 1985, le Pérou annonce qu'il ne consacrerait que 10 %
de ses recettes à l'exportation au service de la dette.
² « Le mythe du laisser-faire
financier », Jagdish BHAGWATI, article paru dans la revue
Foreign Affairs de mai-juin 1998.
Ces crises ont rappelé la problématique de la dette
aussi pour cette catégorie de pays à revenus
intermédiaires, même si ses caractéristiques
diffèrent de celles que rencontrent les pays pauvres, notamment pour ce
qui concerne la maturité des crédits dont les emprunts de court
terme étaient fortement prédominants.
En effet durant la décennie 1990, le contexte change. Les
autorités monétaires américaines reviennent à une
politique monétaire plus stricte, les dollars deviennent plus rares et,
fort logiquement, les taux d'intérêt s'élèvent.
Autre changement, l'inflation, très élevée à la fin
des
années 1970, ralentit fortement et les crédits
deviennent de fait de plus en plus coûteux en termes réels pour
les débiteurs (Tableau n°4). Pire, la
désinflation étant en partie obtenue par la baisse des cours des
matières premières, les recettes à l'exportation des pays
du Tiers Monde s'en ressentent. Elles baissent alors que leur dette, elle,
s'alourdit. Ils deviennent de moins en moins solvables. A l'évidence,
ces retournements de conjoncture n'expliquent pas à eux seuls le
problème de la dette, l'usage fait de celle-ci explique en partie.
3- Une utilisation inefficace des ressources de la
dette :
L'endettement pour financer l'investissement et la
croissance n'est pas économiquement condamnable par principe : en
théorie la croissance qui en résulte peut permettre d'obtenir les
devises nécessaires au remboursement des sommes empruntées.
L'exemple le plus pertinent en la matière est le plan Marshall et la
reconstruction japonaise de l'après guerre.
En règle générale, tout dépend de la
productivité du financement extérieur. Il est nécessaire
que la dette serve à l'investissement productif. Parfois, même
lorsque l'endettement externe a été utilisé dans un but
productif, les erreurs d'appréciation sur la finalité et la
rentabilité de grands projets structurants ont été
nombreuses dans les pays en développement. Certaines installations
énergétiques, sidérurgiques, aéroportuaires etc. se
sont traduites par une surcapacité par rapport à la demande
réelle ou potentielle, et finalement par un gaspillage des ressources,
comme ce fut le cas de la politique d'industrie lourde en Algérie
après l'indépendance.
Les coûts financiers et les délais de mise en
fonctionnement ont été la plupart du temps sous-estimés.
Ainsi, une fraction considérable des emprunts extérieurs a
été gaspillée dans des projets inadaptés et n'a pu
servir à renforcer à long terme les capacités de
production, ou de mobilisation des devises nécessaires au remboursement
des dettes contractées. Les aléas atmosphériques, les
guerres civiles interminables, les politiques économiques faibles et la
mauvaise gestion des affaires publiques sont autant de facteurs qui ont
également joué un rôle dans l'explosion de
l'endettement.
En somme, les événements mondiaux des
années 1970 et 1980, en particulier les chocs pétroliers, les
taux d'intérêt élevés et les récessions dans
les pays industrialisés, et la faiblesse des prix des produits de base
ont fortement contribué à l'endettement des pays pauvres avant de
les précipiter dans une profonde crise de la dette et dont le traitement
continu d'animer les relations économiques internationales dans leur
ensemble.
II. Traitements de la crise de la dette
La dette devenue le premier problème des pays en
développement, grevant les budgets publics des rares ressources
disponibles. Par ailleurs, le remboursement qui exige un effort
considérable d'exportation au regard du statut externe de la dette, dans
un contexte de retournement des conjonctures ayant soutenu l'endettement,
précipite les pays endettés dans les difficultés
économiques.
A partir de 1983, la suspension des prêts bancaires est
presque totale. Les transferts de capitaux vers les pays en
développement deviennent négatifs c'est-à-dire que le flux
de ressources des pays en développement vers les pays
développés est devenu supérieur à celui provenant
des pays industrialisés (notion de transfert net). Avec le tarissement
des prêts, les arriérés de payement s'accumulent. Les pays
de la zone UEMOA en totalité sont confrontés à des
déséquilibres commerciaux et financiers croissants (la Côte
d'Ivoire, principale économie de la région, a connu de
déficit de la balance des paiements courants spectaculaire). Le
remboursement de la dette devient le premier problème à
régler, nécessitant un effort d'exportation puisque la dette est
en quasi-totalité libellé en devise étrangère et
notamment en dollar. Pour la plupart des pays en difficulté, le retrait
des banques privées rend de plus en plus nécessaire un recours
à l'aide du FMI dont l'adoption de ses programmes constitue une
étape nécessaire pour obtenir des réaménagements de
dettes.
Ces réaménagements prennent le plus souvent la
forme d'un accord multilatéral et s'appuient sur l'adoption de la part
des pays débiteurs d'une sorte de « code de bonne
conduite », dans la définition duquel le FMI joue un
rôle directeur.
Ce code de bonne conduite appelé
« conditionnalités », conduit à la mise en
place de politique de stabilisation pour finir en général par
l'adoption de politique d'ajustement structurel sous l'égide du FMI et
de la Banque Mondiale et qui, constitue une étape préalable et
indispensable, sauf quelques exceptions près à l'accès, au
rééchelonnement des deux Clubs informels de retraitement de la
dette.
1- Les contraintes financières ont conduit
à la crise économique :
Dans les pays en développement, le début des
années 1980 correspond à un retournement de la conjoncture.
Ainsi, avec une dizaine d'années de retard sur le déclenchement
de la crise économique dans les pays industrialisés, les chocs
externes (échanges internationaux et les mouvements de capitaux) vont
faire basculer les pays de la région dans la récession.
L'activité économique interne doit donc désormais
s'adapter à une capacité d'importation plus réduite et
à la raréfaction des capitaux étrangers. Pour l'ensemble
des pays de la zone, ce marasme économique rend nécessaire le
recours à l'aide du FMI. Ce dernier conditionne son intervention
à l'adoption de programme d'ajustement structurel qui repose sur le
dosage des éléments suivants : réduction des
dépenses publiques, dévaluation de la monnaie nationale,
réduction du poids du secteur public, blocage des salaires, reforme
fiscale, des mesures qui ont été pleinement appliqué par
l'ensemble des pays de l'UEMOA. Il réussit à s'ériger pour
les pays en difficulté en une institution incontournable pour obtenir
des réaménagements de dette aux deux clubs de
réaménagement de dette (Club de Paris et celui de Londres) en
jouant un rôle clé de coordination grâce à son
appareil statistique et à son implantation sur le terrain.
- Rôles du FMI dans les négociations de
réaménagement de dette :
Le Fonds joue un rôle d'information et de
coordination devenu incontournable dans le cadre du
réaménagement de la dette des pays en développement.
- Le rôle d'informateur :
Les clubs de Paris et de Londres sont de petites
structures, seul le FMI est capable de collecter l'ensemble de l'information
économique et financière relative à un pays donné.
Il existe trois principaux degrés dans la recherche de cette information
sur un pays membre.
Le premier degré est commun à l'ensemble des pays.
L'article IV des statuts du Fonds prévoit en effet qu'il doit mener, une
fois par an, une consultation auprès de chaque membre.
Au début des années 1980, la Pologne n'a
signé aucun accord préalable pour obtenir le
réaménagement de sa dette, ce qui tenait beaucoup plus à
de considérations géostratégique propre à la guerre
froide.
La mission séjourne quelques semaines sur place et
rédige une étude qui est soumise au conseil d'administration du
Fonds. Ces consultations servent à la rédaction du World Economic
Outlook.
Le second degré est la surveillance renforcée,
créée en 1985. Ce mécanisme prévoit que le pays
doit établir un programme financier détaillé comprenant
les objectifs macroéconomiques tels la maîtrise de
l'évolution du stock de la dette, le retour à une croissance
soutenue, l'équilibre de la balance des paiements, qui s'apparente au
programme triennal de l'évolution des finances publiques que chaque pays
membre est tenu d'adresser à la commission européenne. Il
prévoit aussi que le Fonds procède à des missions
régulières de surveillance en général deux fois par
an.
Le troisième degré concerne l'envoi d'une mission
ad hoc dans le pays débiteur pour préparer la signature d'un
accord d'ajustement avec le Fonds.
- Le rôle de coordination du
Fonds :
Le Fonds coordonne les négociations entre
débiteurs et créanciers notamment dans le cadre des demandes de
rééchelonnement de dette au sein des deux clubs. Le Fonds
élabore en concertation avec le pays concerné le programme
d'ajustement et négocie avec les créanciers la couverture des
besoins financiers. Par ailleurs, la conclusion d'un accord avec le Fonds est
préalable à l'ouverture des négociations sur le
rééchelonnement de dette des deux Clubs.
2- Réaménagements de la
dette :
Malgré l'ampleur de la crise de la dette, il n'y pas
eu, à proprement dire, de répudiation de dette unilatérale
parce qu'il s'agit de la pire solution qui aurait conduit à l'isolement
des pays débiteurs. Il existe, à cet égard, quatre moyens
de modifier le profil d'une dette :
- Le rééchelonnement, il consiste à
étaler la période de remboursement d'un prêt sur une
période plus longue que prévue initialement. Seule la
durée du prêt est modifiée, ses autres
caractéristiques, comme le taux d'intérêt par exemple,
restent inchangées.
- Le refinancement, il s'agit de la révision, plus ou
moins étendue, des conditions du contrat d'origine. Les autres
paramètres du contrat ne sont pas modifiés.
Le World Economic Outlook du FMI, retrace les évolutions
les plus marquantes de l'économie mondiale dans les six derniers
mois.
- La conversion, la créance d'origine dans les cas
précédents n'est en rien modifiée. Ici, la dette change de
nature. La créance peut être convertie en actifs réels et
n'être plus constitutive d'un titre financier. Ces actifs réels ne
donnent plus lieu normalement à transfert de capitaux.
- Le quatrième est l'annulation des créances, une
technique qui vise à diminuer le stock de la dette pour diminuer son
poids (service de la dette).
Dans la pratique et dans un premier temps, les apparences sont
maintenues au travers du report des échéances
(rééchelonnement), puis progressivement des mesures de
réduction, voire d'annulation de la dette vont s'imposer.
2.1- Le rééchelonnement de la
dette :
Le rééchelonnement de la dette qui n'est
autre que la modification des termes contractuels d'une dette, en modifiant,
par exemple, les échéances ou en reportant le paiement du
principal et/ou des intérêts à une date donnée. Il
est traditionnellement la première phase par laquelle passe un
débiteur se trouvant dans l'incapacité de faire face à ses
engagements avant la mise en place d'un programme d'ajustement
économique. Le principe fondamental du rééchelonnement est
l'analyse du problème rencontré par le débiteur comme un
problème de liquidité ce qu'on a appelé stratégie
du créancier qui consiste à assurer la continuité du
service de la dette. A ce titre, il apparaît opportun aux
créanciers de procéder à un aménagement de
l'échéancier de la dette permettant en principe au
débiteur de continuer à faire face à ses engagements en
raison de la baisse du service de la dette.
Ce n'est qu'à partir du sommet de Londres (juin 1984), que
des négociations portant sur des accords de
rééchelonnement pluriannuels débutent au sein des
deux clubs de retraitement de la dette (Club de Paris et Club de Londres) qui
loueront un rôle clé. Ces négociations conduisent à
des restructurations de la dette sur des périodes plus longues assorties
de baisse des taux d'intérêt.
2.1.1- Le Club de Paris :
Réuni sous la présidence du Directeur du
Trésor du Ministère français des finances, le Club de
Paris regroupe les créanciers publics des pays développés
et, à titre d'observateurs, des organisations financières
internationales (Banque Mondiale et FMI essentiellement). Ses membres s'y
réunissent pour s'accorder sur le rééchelonnement des
obligations financières de gouvernements débiteurs
vis-à-vis de créanciers publics. Un certain nombre de principes
président à son fonctionnement.
Pour un débiteur, les conditions d'accès au
rééchelonnement en Club de Paris sont strictes. En effet, tout
pays endetté ne peut accéder directement à une
restructuration sans répondre à deux conditions :
- être en situation de « défaut
imminent ». En effet, la restructuration ne peut être
accordée qu'à un pays confronté à des
difficultés de balance des paiements. L'existence d'un
arriéré de paiements est en par ailleurs perçue en quelque
sorte comme un critère déterminant.
- avoir conclu avec le FMI un accord sur le programme
d'ajustement économique qui vise, en général, à
obtenir une croissance non inflationniste et à accroître la
capacité de remboursement du pays demandeur.
Une fois que le débiteur est déclaré
éligible à l'aide du Club, une autre étape s'engage. Il
s'agit du traitement du problème de sa dette, lequel obéit
à des règles techniques précises et immuables pour tous
les créanciers et débiteurs du Club de Paris.
Premièrement, le club ne rééchelonne que
deux types de créances : celles qui correspondent à des
dettes contractées auprès de créanciers publics (les
organismes de financement étatiques : Agence Française de
Développement (AFD), Fonds Abu Dhabi, Fonds Saoudien de
Développement (FSD), Fonds Koweitien de Développement (KFAED),
Italie-Mediocredito etc.) et celles qui correspondent à des dettes
commerciales à garantie publique. Ainsi, les dettes dues aux
organisations financières internationales et intergouvernementales (FMI,
Banque Mondiale etc.), celles à court terme (moins d'un an) et la dette
publique contractée auprès de pays non membres du club en sont
exclues. En outre, le rééchelonnement porte sur le principal et
non les intérêts, et comporte toujours une date butoir (depuis mai
1984 en général) : seule la dette contractée avant
cette date peut être rééchelonnée.
2.1.2- Le Club de Londres :
Contrairement au Club de Paris, le Club de Londres n'a
pas véritablement d'existence formelle et officielle. On regroupe
parfois sous cette expression les comités ad hoc réunissant les
principales banques créditrices dans les cas où la situation
financière d'un pays débiteur pousse la communauté
bancaire internationale à chercher à négocier avec
celui-ci un accord d'aménagement de ses obligations financières.
Le Club de Londres -- ou Comité consultatif des banques commerciales,
selon son appellation officielle -- est une instance chargée de la
restructuration de la dette consentie par des banques privées (sans
garantie publique). Comme le Club de Paris, il n'a pas de statuts et ses
membres varient selon les dossiers dont il est saisi. À la
différence de ce dernier, il n'a ni secrétariat ni lieu de
réunion fixe.
Bien qu'étant de nature complètement
privées, les renégociations de dettes au Club de Londres, ne sont
pas indépendantes de l'action des institutions financières
officielles. Ceci est dû en particulier au fait que les banques exigent
le plus souvent de leur débiteur que celui-ci ait obtenu l'aide du FMI,
ce qui implique la mise en place d'une politique de stabilisation
économique. Les principes de négociation du club de Londres, sont
inspirés notamment, de ceux du club de Paris. Ils en ont trois en
commun :
- pour accéder à une restructuration de sa dette
bancaire, il faut qu'il se trouve en situation de défaut imminent de
paiement. Il faut, en outre, qu'il ait signé au préalable un
accord avec le FMI. Cette condition n'est pas devenue obligatoire qu'à
partir de 1976 avec le réaménagement péruvien.
- Ensuite, le Club de Londres a imposé comme principe le
suivi par le FMI de l'ajustement du débiteur.
La particularité du club de Londres par rapport à
celui de Paris, c'est que les banques participantes touchent des commissions de
l'ordre d'environ 1 % pour le rééchelonnement. Par
conséquent, le coût d'intervention du club de Londres est
sensiblement plus élevé que celui de Paris.
2.2- Le bilan de l'action des deux
clubs :
Le Club de Paris, de 1956 date de sa première
réunion à 1984, a mis en oeuvre la stratégie du
créancier qui consiste à mettre les débiteurs en situation
de rembourser leurs dettes. Le diagnostic des créanciers publics
concluait à une crise d'illiquidité situation dans laquelle la
valeur actualisée des remboursements est inférieure à
l'encours de la dette. La crise de la dette était
considéré comme conjoncturelle. Par conséquent, les moyens
utilisés par le Club consistaient en des rééchelonnements
classiques qui avaient pour but de repousser les échéances des
prêts contractés par les pays débiteurs. En plus,
progressivement, un marché gris des dettes publiques de mauvaise
qualité » s'est constitué, animé par des Fonds
qui rachètent les créances de mauvaise qualité avec
décote.
L'année 1984 marque la prise en compte d'une
véritable situation d'insolvabilité des pays endettés. De
1984 à 1988, le Club amorce une reforme de ses modes d'intervention.
Plusieurs principes techniques, en vigueur dès 1956, ont
été révisés. Ainsi, la période de
rééchelonnement a été allongée, faisant de
la consolidation pluriannuelle une pratique désormais courante.
Le Club de Londres a, certes vu son fonctionnement
profondément évoluer. Le plan Baker (1985) a permis, en donnant
une liberté aux acteurs notamment bancaires, d'initier un mouvement
d'innovations de techniques financières de traitement de la dette
(reconversion de dette etc.) en inaugurant une approche par menu . Cette
approche donnant le choix aux banques d'intervenir auprès des
débiteurs de la manière quelles désirent essentiellement
sur la participation, le mode de négociation et le choix des options
(nouveaux prêts directs, les conversions des financements nouveaux en
fonds propres, l'achat d'obligation du débiteur).
Ce plan connu un échec en ne permettant pas une reprise de
la croissance en Amérique latine pour rendre la dette soutenable.
Dès le printemps 1986, le Mexique demandait le secours des
créanciers et obtient un nouveau rééchelonnement de sa
dette. La position des débiteurs se durcit : en janvier 1987, le
Brésil obtient du Club de Paris un rééchelonnement qui
pour la première n'est pas soumis à l'accord du FMI sur
l'orientation de sa politique économique. Le mois suivant le
Brésil suspend le paiement des intérêts dus aux banques
commerciales.
2.3- Les nouvelles innovations de retraitement de la
dette des pays pauvres
Les réaménagements de dette, tant du Club de
Londres que du Club de Paris, ont été insuffisants face à
l'ampleur de l'endettement structurel des pays pauvres. Les causes de
l'échec du Club de Paris ne lui sont pas spécifiques. Elles
appartiennent aussi au Club de Londres.
Les réorganisations des dettes opérées par
le Club de Paris n'ont pas réussi à résoudre le
problème l'endettement officiel. Ces mesures excluaient, le menu et les
options différentes selon des parties, au profit d'un accord
général de principe qui cadre les négociations
bilatérales. Elles étaient, surtout, faites de
rééchelonnements, c'est-à-dire de reports de la date de
remboursement d'un montant limité du principal de la dette, le reste des
sommes dues demeurant soumis aux conditions de remboursement initiales.
programme pour une croissance soutenue, proposée par le
Secrétaire d'Etat Américain au Trésor James Baker en 1985,
principalement destiné aux pays débiteurs des prêts
bancaires notamment d'Amérique latine.
Ces rééchelonnements n'ont pas permis aux pays
concernés de sortir des difficultés liées au poids de la
dette pour plusieurs raisons :
- les mesures exigées par l'accord d'ajustement du FMI,
ont privilégié les aspects financiers de la dette aux
impératifs de production du pays débiteur, portant parfois
préjudice aux perspectives de croissance à long terme ;
- les rééchelonnements accordés par le Club
de Paris n'ont souvent servi qu'à repousser dans le temps le service de
la dette. Et la mise en oeuvre des rééchelonnements de dettes
ayant été rééchelonnées
(procédé accepté à partir de 1985 par les
créanciers privés) a rendu encore plus complexe la situation de
certains débiteurs.
Ces échecs ont rendu nécessaires de nouvelles
concessions des créanciers face aux difficultés que rencontrent
les pays endettés. A l'évidence, la situation des pays à
faible revenu en particulier les pays de l'UEMOA, diffère de celle des
pays fortement endettés à revenus intermédiaires
essentiellement d'Amérique latine, ce qui appelle à des
traitements différents. Alors que le réaménagement de la
dette des pays à faible revenu passe nécessairement par l`action
de gouvernements créanciers des pays industrialisés, le
réaménagement des dettes bancaires des pays fortement
endettés repose pour partie sur l'initiative privée et le
fonctionnement des marchés.
2.3.1- L'accord de Toronto :
Les premières propositions de
réaménagement visant à réduire, voire à
annuler, la dette publique des pays à faible revenu ont vu le jour en
juin 1988, à l'occasion du sommet du G7 de Toronto. Ces propositions,
adoptées lors de la réunion annuelle de la Banque Mondiale et du
FMI à Berlin en 1988, portent sur l'ensemble des créances
éligibles au Club de Paris. Elles reposent sur un menu de trois options
qui sont ouvertes aux pays créanciers :
- la première option soutenue par la France, consiste
à une annulation pure et simple d'un tiers des créances
publiques, le restant devant être rééchelonné au
Club de Paris aux conditions habituelles, sur une période de quatorze
ans, avec une période de grâce de huit ans.
- la seconde option, qui a la préférence des
Etats-Unis, consiste en un allongement de la période de remboursement de
vingt cinq ans au lieu de quatorze, avec une période de grâce de
quatorze ans. Cette solution consiste donc en un étalement des
paiements, avec capitalisation des intérêts.
- la troisième option, soutenue par la Grande Bretagne et
par l'Allemagne fédérale, consiste en une réduction du
taux d'intérêt en vigueur sur les créances publiques, pour
l'abaisser à 3,5 % ou à la moitié du taux initial si
celui-ci était inférieur à 7 %.
Dans le cadre de l'accord de Toronto, en février 1991, un
prêt spécial de la Banque mondiale a permis au Niger de racheter
sa dette commerciale (108 M de dollars US, soit 10 % de la dette
extérieure, mais 20 % du service de celle-ci). Cette dette a
été rachetée à 18 % de sa valeur nominale, avec
l'accord de la grande majorité des créanciers. Le Togo a pu
bénéficier des mêmes possibilités.
Le caractère limité de l'impact de l'accord de
Toronto car concernant essentiellement les pays pauvres dont le montant, en
absolu, de leurs dettes est très inférieur à celui des
pays à revenu intermédiaire, a conduit les pays du G7 notamment
lors du sommet de Houston aux Etats-Unis en 1990, à étendre aux
pays à revenu intermédiaire et lourdement endettés la
possibilité de bénéficier les termes de l'accord de
Toronto.
Cette proposition, connue sous le nom du Programme de Houston,
pour en bénéficier, les débiteurs doivent remplir
plusieurs conditions dont essentiellement :
- leur PNB par habitant doit être inférieur à
1 235 dollars en 1991 ;
- un ratio « dette bilatérale/dette
commerciale » supérieur à 150 % ou un service de la
dette trop élevé (les ratios dette /PIB et dette /exportation,
respectivement supérieurs à 50 % et
275 %. Quatorze pays ont bénéficié de ce
programme, jusqu'en 1993.
En 1991, le Club de Paris prend conscience de l'insuffisance de
ses efforts envers les pays à faible revenu, en proposant un menu de
Toronto renforcé c'est-à-dire amélioré en
élargissant les options :
- le rééchelonnement est porté à
vingt trois ans avec une réduction de 50 % en valeur actualisée
des remboursements venus à échéance, au titre de la dette
publique non concessionnelle.
- le rééchelonnement au taux concessionnel
d'origine, des créances dues sur une période de trente ans, dont
douze de grâce. Ce rééchelonnement de la dette
concessionnelle comporte une remise de l'ordre de 50 %.
- la possibilité pour les créanciers qui le
souhaite, de mettre en oeuvre des conversions de dette en monnaie locale en vue
d'investissement sur place.
- une clause de bonne volonté qui ouvre la facilité
d'un traitement du stock de la dette, après une période
probatoire de quelques années pendant laquelle le débiteur devra
avoir maintenu des relations satisfaisantes avec ses créanciers. Dans la
zone UEMOA, le premier à en bénéficier fut le Bénin
(1991) suivi par le Mali, le Togo et le Burkina Faso.
Mais cet aménagement de dette ne semble pas être
à la mesure des problèmes liés à la crise de la
dette d'où l'adoption d'un nouveau dispositif nommé menu de
Naples qui voit passer l'annulation des sommes aménagées de 50 %
à 67 %. La plus récente innovation est l'idée d'une
réduction du stock de la dette. Elle se manifeste le projet d'une
annulation pure et simple qui concerne pour l'instant le stock la dette
multilatérale des pays pauvres estimés très
endettés.
2.3.2- Les innovations de réaménagement
des créances privées
Concernant essentiellement les pays à revenu
intermédiaire fortement endettés d'Amérique latine, les
réaménagements des créances privées initiés
par les gouvernements des pays industrialisés et les institutions
financières internationales se sont traduits par un certain nombre
d'innovations destinées à résoudre la crise
financière.
- Le plan Baker :
Présenté par le secrétaire américain
au Trésor à la réunion de la Banque Mondiale et du FMI
tenue à Séoul en octobre 1985, en effet le plan Baker mettait en
avant la nécessité d'un ajustement par la croissance plus que par
la contraction de l'activité économique, en opposition avec la
pratique des politiques de stabilisation mises en oeuvre jusqu'alors.
L'argumentation soutenue, reposait sur la nécessité du retour une
croissance durable pour sortir de la crise d'endettement. Le plan avait pour
but de fournir les moyens notamment financiers d'un retour à la
croissance, par un accroissement de flux nouveaux de capitaux essentiellement
en prêts bancaires. Ce plan s'est heurté à la
réticence des banques d'augmenter leurs financements.
Dans la foulée de l'échec de ce plan, qu'est
née l'initiative Brady en 1989 du nom du successeur de James Baker au
Secrétariat américain du Trésor, Nicolas Brady.
- L'initiative Brady :
Cette initiative qui constitue une innovation nouvelle du
réaménagement de la dette, consistait en un dispositif permettant
aux banques de répondre aux besoins de financement des pays en
développement. Le fondement de l'initiative Brady est de diminuer les
risques « subis » par les banques, pour se faire,
l'initiative propose des opérations d'échange de dette avec une
décote, les nouveaux titres de dette pouvant être assortis d'une
garantie par le FMI et la Banque Mondiale.
Tout comme l'accord de Toronto, l'initiative Brady repose aussi
sur la proposition de menu d'options entre lesquelles les différents
créanciers pourraient choisir. Ces options sont essentiellement en ordre
de trois :
- la première consiste à convertir les
créances en obligation avec une décote (décote de 35 %) et
rémunérées au taux du marché.
- la seconde propose une conversion sans décote, mais
contre des obligations portant un taux d'intérêt réduit
(6,25 %).
- la troisième option est la constitution par un apport de
nouveaux prêts étalé sur quatre années, pour un
montant égal à 25 % des concours initiaux.
Appliquée au traitement de la dette mexicaine, les banques
ont largement opté pour les deux premières options, ce qui
atteste la confiance limitée des banques pour de nouveaux
prêts.
Ce manque d'engouement des banques a limité fortement le
succès de l'initiative Brady.
En marge, d'autres innovations ont fait leur chemin sur la
résolution de la crise de la dette notamment le marché secondaire
des titres de créances qui pratique des conversions de dette avec
décote. En 1991, les dettes du Pérou s'échangeaient
à 10 % de leur valeur nominale.
La persistante du surendettement montre que les mécanismes
traditionnels de réduction de la dette des pays pauvres,
c'est-à-dire que les différents passages devant le Club de Paris
et le Club de Londres, n'ont pas été suffisants. Cette
persistance, fait le problème de la dette un phénomène
récurrent dans la problématique du développement des pays
pauvres notamment de par le poids que représente son remboursement dans
les budgets publics. Il y a environ vingt ans, dans les pays pauvres,
l'endettement était soutenu dans l'espoir de générer le
développement économique, aujourd'hui il leur faut se
développer pour se désendetter. Ainsi, les vertus de
l'endettement sont mises en causes, la traditionnelle controverse sur les
conséquences de l'endettement dans le fonctionnement de
l'économie ressurgit.
Chapitre IV : Problèmes de la dette
publique
En théorie, l'endettement peut être
bénéfique, lorsqu'il permet à un pays d'accroître
ses capacités de production et de s'industrialiser. L'augmentation de
production permet à terme de rembourser les capitaux empruntés.
C'est ce discours qui prévalait durant la période d'endettement
du tiers monde. Les crises répétées de la dette ont
contribué à la résurgence de la vieille controverse sur
l'utilité de la dette publique.
I. Effets économiques de la
dette
1- Les objectifs économiques de la politique
d'endettement
La dette publique qu'elle soit appréhendée en terme
d'endettement nouveau (flux) ou d'encours (stock), est par sa nature même
un instrument d'action de politiques économiques publiques dont le mode
opératoire s'inscrit dans la trilogie fonctionnelle d'analyse de
l'intervention de l'Etat présentée en 1959 par Musgrave à
savoir (allocation-redistribution-stabilisation).
Les objectifs économiques poursuivis par la politique
d'endettement peuvent être synthétisés autour de quatre
axes essentiels :
- un des moyens de financement des déficits et par la
même des dépenses publiques. La finance publique dans la
théorie classique vouait par tradition la dette au financement des
dépenses d'investissement public, les impôts devant
nécessairement financer les dépenses de consommation et de
transferts publics. L'analyse keynésienne de la finance publique,
insistait sur la fonction de stabilisation de la dette, promue au rang
d'instrument de régulation de la demande globale, qui peut contribuer
efficacement, via le ressort multiplicateur/accélérateur, au
financement de divers types de dépenses publiques, en agissant
directement sur la consommation et l'investissement publics, et (ou) en
influençant le partage consommation/épargne des ménages et
par la même l'investissement privé.
- un second objectif de la dette publique est aujourd'hui mis en
oeuvre par les tenants de la nouvelle économie classique. Pour ces
derniers en effet, même si la dette publique n'influence pas le partage
épargne/consommation, il peut être intéressant pour l'Etat
de recourir à la dette publique afin de lisser dans le temps les
variations du poids de l'impôt.
- un troisième objectif de la dette publique fait de cette
dernière dans l'optique de la fonction de répartition et de la
redistribution des ressources et des patrimoines, un instrument de transfert de
charges intra ou intergénérationnel.
- le dernier objectif apparaît dans l'examen de la
dimension strictement financière de la dette. Le « debt
management » classique insiste sur l'articulation nécessaire
entre dette publique et politique monétaire.
Malgré l'importance de la question de la dette, il est
difficile de déterminer au-delà de quel seuil la dette compromet
la performance économique tout comme le chiffrage de son incidence sur
la croissance.
Au demeurant, certaines tentatives de détermination du
seuil d'endettement continuent à alimenter largement la controverse.
Ainsi le Pacte de Stabilité et de Croissance dans l'Union
Européenne impose un certain plafond en matière d'endettement. Il
en est ainsi le plafonnement du déficit budgétaire et de la dette
publique, respectivement à 3 % et à 60 % du PIB. Ce
plafond s'impose en effet à tous les pays membres, quelles que soient la
position dans le cycle de croissance et les conditions économiques du
pays. La limite des 3 % de déficit ne correspondait d'ailleurs
qu'à un calcul purement théorique : c'est le niveau qui
assure la stabilité d'une dette publique de 60 % avec une inflation
de 2 % et une croissance en volume de 3 %. Ces seuils sont au moins
aujourd'hui contestés par certains économistes. Selon Jean Paul
Fitoussi de l'OFCE « le niveau optimal d'endettement au-delà
duquel un pays serait en faillite, serait un niveau d'endettement si
élevé qu'il impliquerait le renoncement aux dépenses
publiques nécessaires à assurer la cohésion
sociale » ².
Par ailleurs, certains pays dont le niveau de la dette est
jugé inquiétant (le Japon 130 % du PIB, l'Italie 120 %, la
Belgique 100 %) continuent d'avoir de très bonne note dans les agences
de notation et la souscription de leurs emprunts considérée comme
de placements sans risque.
Cette considération ne s'applique pas aux pays en
développement et encore moins aux pays pauvres notamment africains, ce
qui permet d'appréhender la notion de risque de défaut de
payement en termes de capacité de mobilisation de ressources.
Par ailleurs, l'analyse économique de la dette publique
s'intéresse habituellement à un double perspectif :
- la fiscal policy : qui traite les problèmes
afférents au niveau et à l'extension de la dette,
- le debt management, traite de la structure, de la composition
de la dette.
OFCE : Observatoire Français de Conjoncture
Economique
² Débat avec Jean Paul Fitoussi paru sur le site
du monde en date du 11 Janvier 2006.
Cette double analyse peut être schématisée
en macrodynamique de la dette (approche en niveau qui met en évidence
la place de la dette au sein des grands agrégats, du fonctionnement
global de l'activité économique) et microdynamique de la dette
(approche en structure centrée sur la spécificité de
l'unité économique Etat ou administration publique face à
la gestion de la dette, avec impact différencié sur les autres
unités économiques).
L'ambivalence des effets issus de cette double analyse a conduit
à une schématisation autour des thèmes d'effets
d'entraînement et d'effets d'éviction.
2- Les effets économiques de la dette dans
la théorie économique
Au cours des trente dernières années, les
pays en développement ont bénéficié de prêts
considérables, assortis souvent de conditions très
concessionnelles qui devaient permettre leur décollage rapide en
favorisant l'investissement et en accélérant la croissance.
Mais, devant les sommets atteints par les ratios d'endettement
dans les années 80, un constat s'est imposé : pour de nombreuses
économies, et en particulier pour quelques pays d'Amérique latine
à revenu intermédiaire, le remboursement de la dette serait non
seulement un frein aux performances, mais une tâche quasiment
impossible.
La théorie économique est habituellement
mobilisée à la fois par ceux qui justifient et par ceux qui
condamnent les déficits publics.
Les premiers s'appuient surtout sur les travaux du
célèbre économiste anglais John Maynard Keynes. En effet,
face à la crise de 1929, celui-ci estimait que l'Etat avait vocation
à injecter de la dépense dans le circuit économique,
quitte à creuser temporairement les déficits publics lorsque
l'économie tourne en sous régime. Ses thèses sont devenues
dominantes après la seconde guerre mondiale, contribuant notablement aux
succès de ce qu'on a appelé les Trente Glorieuses années
en Occident.
En montrant ses limites de promotion de la croissance au
début des années 70, en raison d'un certain nombre de facteurs
exogènes dont entre autre le premier choc pétrolier de 1973, la
thèse keynésienne de déficit conjoncturel a largement
été mis en cause notamment sur le plan théorique par les
tenants du monétarisme dont Milton Friedman et les influences que cette
école a exercé sur les politiques économiques à
partir des années 1980 plus précisément aux Etats-Unis
sous Reagan et au Royaume Uni sous Thatcher. La politique de relance
économique n'est pourtant pas abandonnée. L'endettement des
Etats de l'UEMOA, nouvellement indépendants, au début des
années 60, s'inscrivait dans le but de fonder les bases d'une
économie de croissance et ceci dans la logique de la définition
du concept du sous- développement de l'époque.
Du côté des seconds, de nombreux économistes
considèrent que donner « artificiellement » un
supplément provisoire de revenu aux ménages, ne les incite pas
réellement à consommer davantage car ils ajusteraient leur
consommation sur une vision de long terme de leurs ressources (théorie
du revenu permanent). En outre, constatant aujourd'hui l'augmentation des
déficits publics, les ménages anticiperaient les augmentations
d'impôt nécessaires demain et renonceraient à consommer
d'avantage pour épargner (effets dits
« ricardiens ») qui ne sont pas observés
actuellement dans les pays jugés fortement endettés. Par
ailleurs, les emprunts contractés par l'Etat pour financer ses
déficits capteraient tous les capitaux disponibles et feraient, de ce
fait, monter les taux d'intérêt selon le processus de
l'élémentaire loi de l'offre et de la demande.
Cette augmentation affecterait négativement les
capacités d'emprunt et d'investissement des entreprises privées.
Ces effets appelés effets d'éviction ne caractérisent pas
non plus les grands pays fortement endettés (les Etats-Unis, le Japon,
la France etc.) dans lesquels les taux d'intérêt demeurent
relativement bas. Certains économistes reconnaissent cependant que la
dépense publique peut jouer un rôle déterminant dans la
croissance de long terme, si elle est investie dans le capital humain
(éducation, recherche etc.) ou dans les infrastructures, élevant
ainsi la productivité, donc le rythme d'activité (théorie
de la croissance endogène).
La théorie suggère que l'emprunt, contenu dans
des limites raisonnables (difficilement quantifiables), peut aider les pays en
développement à affermir leur croissance. L'idée est que
les économies qui sont au stade initial de leur développement
disposent d'un stock de capital limité et offrent souvent des
possibilités d'investissement plus rentables que les économies
matures. Aussi longtemps qu'elles emploient les capitaux empruntés pour
financer des investissements productifs et échappent à certains
maux (instabilité macroéconomique, adoption de mesures faussant
les incitations, chocs de grande ampleur), leur croissance devrait
s'accélérer et leur permettre de rembourser à
l'échéance les dettes contractées. Malgré cette
argumentation vraisemblable, l'endettement des pays pauvres en particulier pose
d'énormes difficultés quant au remboursement et son effet sur la
croissance n'a pas été totalement avéré, là
se pose la problématique de l'usage des fonds prêtés.
L'explication la plus connue est avancée dans les
théories du «surendettement» : si l'on peut penser que la
dette future dépassera les capacités de remboursement des pays
débiteurs, le coût de son service découragera les
investissements intérieurs et extérieurs, pénalisant ainsi
la croissance. En revanche, la réalité de l'usage des fonds
prêtés, n'a fait l'objet d'aucune étude approfondie pour
mettre en évidence la mauvaise gestion imputable aux gouvernements
emprunteurs ou à l'organisme prêteur, le plus souvent au motif de
considération politique et géopolitique. Bien que les
modèles n'analysent pas explicitement l'impact du surendettement sur la
croissance, on peut en déduire que l'accumulation de lourdes dettes
ralentissant l'expansion en freinant notamment l'investissement paraît
plus nuancé, notamment si l'on se penche sur le cas de certains pays
industrialisés comme le Japon.
Il semble donc, d'une part, qu'une évolution
raisonnable de la dette devrait être bénéfique à la
croissance et, de l'autre, que l'accumulation d'une lourde dette risque
d'entraver l'expansion, ce qui résume en quelque sorte le débat
controversé de la relation entre dette et croissance. Les
théories du surendettement ne retracent pas à vrai dire cet
impact. Globalement, la théorie conduit à penser que l'emprunt
extérieur a un effet positif sur l'endettement et la croissance s'il ne
dépasse pas un certain seuil et au-delà duquel, son effet devient
négatif.
L'endettement des pays en développement, en particulier
les pays sous étude, étant par essence un endettement
extérieur public, pose la problématique relation entre dette et
commerce extérieur, le second devant dégager un excédent
(rentrée de devise) permettant d'honorer le payement du service de la
dette extérieure.
La dette extérieure a le potentiel de stimuler la
croissance économique à condition qu'elle serve à financer
des investissements.
En revanche, le service de la dette extérieure (par
opposition à l'encours total de la dette) peut en outre influer sur la
croissance en évinçant les investissements privés s'il est
l'objet de nouvelles émissions de titre notamment auprès du
système financier national (effets d'évictions) ou en modifiant
la composition des dépenses publiques. Toutes choses étant
égales par ailleurs, un service plus lourd peut accroître le
déficit budgétaire de l'Etat et réduire ainsi
l'épargne publique. Un tel service peut en outre réduire le
montant des ressources disponibles pour l'infrastructure et la formation du
capital humain, avec les effets négatifs à en attendre sur la
croissance ce qui est typique au cas des pays de l'UEMOA.
Au-delà de ces controverses théoriques sur le
déficit, donc de la dette publique, un consensus semble se
dégager sur les conséquences du niveau élevé et
croissant de la dette publique notamment en termes de rigidité
budgétaire et de soutenabilité.
2.1- Endettement et rigidité
budgétaire
Le niveau de la dette est jugé préoccupant
tant dans les pays développés du point de vu de son effet sur la
redistribution, sur la génération future et notamment de la
rigidité pour promouvoir ou accompagner la croissance dans l'optique
keynésienne, que dans les pays pauvres du point de vue poids du service
de la dette sur les finances publiques au regard des besoins de financement
dans la lutte contre l'extrême pauvreté.
Les effets économiques de la dette doivent être
distingués de ceux dus aux déficits budgétaires (lesquels
sont à l'origine des engagements financiers croissants du secteur
public). Les implications de déficits durables sur les taux
d'intérêt notamment durant les périodes d'expansion de la
demande (du moins en théorie), ont largement contribué à
la mise en oeuvre des tentatives de politiques d'assainissement des finances
publiques dans la plupart des pays de l'OCDE depuis 1979 par le biais de
programme d'ajustement structurel qualifié par certains milieux
notamment syndicaux, de néolibéral du fait des vastes programmes
de privatisation et de l'ouverture des frontières économiques.
Ces réformes avaient pour but de rompre avec la croissance
molle. Il en a été autrement pour les huit pays de l'UEMOA, vu la
dégradation des indicateurs macroéconomiques qui sont les leurs,
en raison notamment de la chute des recettes d'exportations de matières
premières, rendant « insoutenable » la dette. Ces
pays n'ont pas tardé à connaître des difficultés de
paiement lié au service de la dette. A la lumière de ces
difficultés, de nombreux rééchelonnements ont
été opérés accompagnés de programme
d'ajustement structurel en vu de rendre soutenable la dette.
La dette des pays pauvres et celle des pays de l'UEMOA en
particulier étant totalement publique et dont les créanciers
sont essentiellement de l'extérieur, les emprunts sont souscrits en
devise étrangère, le remboursement pose vraisemblablement des
problèmes de balance de payement, de change et de problème
budgétaire.
2.2- Effet sur le taux de change :
Dans ce contexte de dette
essentiellement publique et contractée en devise étrangère
comme c'est le cas des pays de l'UEMOA, la capacité de remboursement
peut s'apprécier du point de vue de la viabilité de la balance
des paiements.
Pour rembourser leur dette, les gouvernements doivent disposer de
ressources importantes en devises. Pour cela, il faut que l'économie des
pays en questions puisse disposer d'une capacité de production
échangeable sur le marché international, qu'il s'agisse de biens
d'exportation ou de substitut aux importations génératrice de
devise, ce qui pose sans doute problème aux pays concernés du
fait de leur spécialisation dans l'exportation de matières
premières dont les cours fluctuent en permanence .
Dans cette situation, traditionnellement, le seul moyen
utilisé pour équilibrer les ressources et les emplois en devises,
en l'absence d'une dévaluation réelle suffisante, est de
réaliser une contraction du niveau de l'activité
économique. Cette contraction le plus souvent provoqué par le
programme de stabilisation préalable à l'application du programme
d'ajustement structurel, vise à assurer avec les moyens disponibles,
l'équilibre de la balance des paiements. Cette réduction massive
de l'activité économique a des conséquences
économiques notamment une déstructuration de l'économie et
provoquant le plus souvent des tensions sociales.
2.3- La crise de la dette et la
surévaluation du taux de change :
Le diagnostic qui est fait par le FMI dans les
économies endettées est que la solution de la crise
financière passe inévitablement par une dévaluation de la
monnaie nationale, condition indispensable à la création de
ressources supplémentaires en devises, qui manquent pour assurer le
service de la dette. Cette vision a conduit à la dévaluation du
Franc CFA de 50 % en 1994, ce qui n'a véritablement pas permis de
résoudre le problème de la dette à la suite de la crise
des cours des matières premières exportées.
2.4- Le problème budgétaire
associé au renversement des transferts nets :
De 1973 à 1982, les pays en développement
ont bénéficié, par le biais de l'endettement
international, de transfert net de ressources considérables. Reprenant
la définition utilisée par la Banque Mondiale, le transfert net
de ressources est le solde entre les apports financiers constitués par
le flux brut d'emprunt à long terme et les charges de cette dette sous
forme de remboursement du principal ou de rémunération des
créanciers. Pendant les années 1970, jusqu'en 1982, la croissance
de la dette était telle que les nouveaux crédits obtenus
dépassaient largement les charges de la dette antérieure, de
telle sorte que, les pays en développement ont
bénéficié de transferts nets de ressources
considérables. La hausse des taux d'intérêts internationaux
à partir de 1979 a radicalement modifié les conditions de cette
évolution. Le transfert net de ressources est devenu négatif pour
la plupart des pays en développement.
Cet aspect du problème de la dette renvoi au rôle
de la production de biens échangeables dans la détermination de
la capacité de remboursement de la dette internationale, donc de
soutenabilité de la dette.
Face à ces difficultés, les
réaménagements de dette sont devenus, le plus souvent,
différents car les modes de financement sont opposés,
possibilité de recourir aux marchés internationaux des capitaux
pour ceux qui concernent respectivement les pays à revenu
intermédiaire et l'exclusion des pays pauvres de ces marchés de
capitaux. Ce qui rend ces derniers largement tributaires des prêts
publics (bilatéraux ou multilatéraux).
L'endettement croissant des pays ex-communistes répond
à une logique de transition vers une économie de marché.
Les causes de cet endettement diffèrent radicalement des deux autres.
Pour les pays industrialisés, la fin des trente
glorieuses, marquait aussi le début de l'endettement, dont les contours
sont fort différents de ceux des autres catégories de pays. Cet
endettement a surtout servi à contenir les tensions sociales
liées au chômage de masse et une politique keynésienne de
soutien à l'activité économique.
Si le recourt à l'emprunt parait se justifier pour toutes
les catégories de pays, la nature des emprunts et les objets
financés, prêtent à discutions.
La conception du problème de développement,
résumée à un problème de finance et de technologie
qui a prévalu lors de la présidence de Robert S McNamara à
la tête de la Banque Mondiale, sans véritablement se
préoccuper des projets à financer, fait naturellement partie des
explications de la crise de la dette de nombreux pays, dont les solutions
adoptées reposent essentiellement sur l'analyse de la
soutenabilité.
II Le concept de soutenabilité de la dette
Le niveau d'endettement ne peut s'apprécier qu'au
regard de la capacité du débiteur à mobiliser des
ressources pour faire face au service de la dette . C'est toute la
différence entre les pays industrialisé et les pays pauvres. Le
problème de l'endettement se pose en termes de flux et non de stock.
Ainsi les grands pays industrialisés trouvent toujours facilement des
emprunts sur le marché obligataire et demeurent bien noté par les
Agences de notation.
Cette analyse revient à poser le problème de
l'endettement des PVD en termes d'un problème de balance de paiement.
L'endettement en affecte le solde en raison des sorties de capitaux au titre du
service de la dette.
La capacité de mobilisation des ressources
déjà très faible, le démantèlement des
barrières douanières, faisant partir des conditionnalités
du programme d'ajustement structurel, a contribué à la perte de
recette publique sans avoir permis de réelle compensation en termes de
mobilisation d'autres ressources.
Par ailleurs, sans excédent de la balance des transactions
courantes, il est impossible à long terme pour des pays comme ceux de
l'UEMOA de remplir leurs engagements largement exprimés en devise
étrangère.
Devant la situation de crise, les organisations de Breton Woods
ont fini par réagir, après avoir longtemps fait accepter
l'idée que leurs créances devaient rester indiscutables. Fin
1996, une initiative ouvrant la voie à la réduction de la dette
multilatérale a été mis en oeuvre (Initiative de
réduction de la dette des pays pauvres très endettés,
PPTE). La procédure, fort complexe, repose sur l'idée
suivante : les pays qui présentent les caractéristiques d'un
endettement excessif par rapport à leurs ressources se verront octroyer
de la part du FMI et de la Banque mondiale une réduction de dette de
telle qu'ils ramènent leur endettement à un niveau jugé
« soutenable ». Cette réduction n'entre
définitivement en jeu qu'après une période probatoire
d'une durée initialement fixée à six ans, pendant laquelle
les bénéficiaires potentiels devront mettre en oeuvre des
« efforts d'ajustement redoublés ».
Fin 1998, l'initiative PPTE avait démontré sa
lenteur et ses limites : sept pays seulement avaient été
sélectionnés et les réductions de dette prévues
restaient souvent symboliques. Ceci a conduit le G7 à adopter, en juin
1999 sous la pression des organisations humanitaires et religieuses
regroupées dans la coalition Jubilé 2000, une résolution
qui ouvre la voie à un traitement rapide et plus généreux
de la dette des PPTE. Les seuils à partir desquels la dette est
jugée insoutenable ont été réduits (150% au lieu de
200 à 250% par exemple pour le ratio valeur actuelle de la dette
extérieure/exportations des biens et services).
Ainsi, au coeur de l'initiative PPTE se trouve donc la notion de
soutenabilité de la dette : il s'agit de mesurer dans quelles
conditions les pays concernés peuvent être mis à condition
de rembourser leurs dettes.
1- Soutenabilité de la dette
De manière très générale,
l'analyse de la soutenabilité consiste à confronter les flux de
remboursement avec des flux de ressources.
Une dette publique est réputée soutenable, si son
encours est inferieur à la valeur actualisée des futures
excédents primaires (solde budgétaire positif hors
intérêt de la dette).
La soutenabilité repose à la fois sur la valeur des
excédents budgétaires futurs et du taux d'actualisation.
Le but de l'Initiative PPTE est de résoudre
définitivement le problème du surendettement en proposant des
réductions de dette bilatérale et multilatérale, afin que
les pays éligibles atteignent des niveaux soutenables de dette.
L'étude de cette soutenabilité de la dette
extérieure publique revient de manière classique
à :
- préciser la notion de soutenabilité
retenue ;
- spécifier les caractéristiques et les
déterminants de la croissance de l'économie ou, de manière
générale, des facteurs qui améliorent les capacités
de remboursement ;
- spécifier la façon dont ces déterminants
sont liés avec le financement extérieur créateur
d'endettement ;
- spécifier les causes de l'endettement
extérieur ;
- spécifier les caractéristiques du financement
extérieur.
La plupart des évaluations pratiquées dans
l'analyse de la soutenabilité de la dette extérieure sont
fondées sur un modèle « standard » qui est
lui-même la synthèse d'un courant d'analyse de l'endettement
extérieur apparu il y a une cinquantaine d'année dans l'analyse
économique à travers les écrits d'Harrod Domar vers les
années 1944. Le modèle standard effectue des choix aux cinq
niveaux indiqués ci-dessus.
Au plan théorique, le critère de solvabilité
est que la dette finisse par s'annuler.
En pratique, ce qui importe, c'est que le pays puisse continuer
à recevoir des financements extérieurs (ou que les nouvelles
émissions de titres publics soient souscrites). La condition pour cela
est qu'il paye régulièrement les intérêts sur
l'encours de ses dettes. Cette condition diffère de la première,
puisqu'elle est compatible avec le fait que l'encours de la dette progresse
régulièrement. Pour traduire cette condition sur le plan
quantitatif, on utilise la notion de soutenabilité. Le critère de
soutenabilité repose sur l'hypothèse générale d'un
ratio déterminé (généralement le rapport D/Q,
encours de la dette divisé par le PIB) qui tend vers une limite finie.
Cette limite est par exemple fixée à 60 % au sein de l'UE et de
l'UEMOA. Dans les modèles théoriques, ce critère est en
général considéré suffisant : le fait que les
ratios d'endettement ne connaissent pas de tendance explosive suffirait
à assurer la possibilité de continuer à s'endetter.
Dans la littérature économique, il existe plusieurs
méthodes pour évaluer la soutenabilité selon l'angle de
référence choisie. La dette publique est souvent dite soutenable
si les intérêts qu'elle engendre ne font pas accroître
indéfiniment le niveau de son stock rapporté au PIB. Ainsi, en
prenant la dette extérieure comme une donnée exogène, le
solde budgétaire avant paiement des intérêts (dit
primaire) rapporté au PIB est soutenable s'il est supérieur au
seuil défini par la formule :
DB Ix - Fx ÄA
SPseuil = ---- (r - n) + ------ - ----
Y Y Y
|
SPseuil : seuil de soutenabilité pour le Solde
rapporté au PIB
Fx : financement extérieur net
Ix : intérêts de la dette extérieure
Y : Produit Intérieur Brut
DB : dette publique intérieure
r : taux d'intérêt nominal apparent de la dette
intérieure
n : taux de croissance économique nominal
A : variation des arriérés
2- Difficultés liées à
l'évaluation de la soutenabilité
Pour établir une projection permettant
d'évaluer la soutenabilité, il est habituel du moins dans les
modèles utilisés par le FMI et la Banque Mondiale, de
préciser les ressources avec lesquelles l'économie
endettée assurera les remboursements (taux de pression fiscale ou flux
des nouveaux prêts), et les déterminants de leur croissance
(capital physique et humain, investissement public et privé, taille du
marché etc.).
L'analyse d'un niveau minimum est difficile à mener sur le
seul plan économique, car il dépend de la capacité des
gouvernements à mobiliser d'avantage de ressources ou d'accepter une
diminution des dépenses publiques.
Quelques que soient les modèles de croissance
sous-jacents, la plupart des analyses de la soutenabilité de
l'endettement extérieur utilisent des paramètres (coefficient de
capital, taux de pression fiscale, etc.) fixes ou, dans une approche plus
raffinée, des variations régulières de ces coefficients.
Ceci implique de nombreuses limites, qu'on regroupe en général en
deux grandes catégories :
- absence de prise en compte du changement structurel ;
- absence de prise en compte de l'instabilité.
Etude sur « Soutenabilité,
finançabilité et relance budgétaire », Direction
des Etudes et des Prévisions financières du Maroc, Document de
travail n° 19, Mai 1997.
De manière générale, l'analyse de la
soutenabilité consiste à confronter des flux de remboursement
avec les flux de ressources, après avoir spécifié le
déficit qui est à l'origine de la dynamique de la dette. Quand on
passe de la théorie aux pratiques d'évaluation de la
soutenabilité, les instruments de formalisation mathématique, qui
ne sont généralement valides que sous leurs hypothèses,
prêtent sujet à discussion comme dans toute
modélisation.
Cette limite de la pertinence de l'analyse de la
soutenabilité est aussi confortée le plus souvent de la
confrontation aux avancées de la théorie économique. Par
exemple, la réflexion sur la croissance, a depuis une dizaine
d'année, avec la théorie de la croissance endogène, mis en
évidence le rôle décisif des externalités
(accumulation de capital humain, économie d'échelle,
infrastructures publiques etc.), à côté de la simple
accumulation du capital physique sur la croissance économique.
Certaines approches classiques de la soutenabilité de la
dette extérieure, prennent essentiellement en considération le
déficit de la balance des payements, ce qui est aussi la
référence principale des organisations internationales dans le
cadre de l'initiative pays pauvres très endettés (PPTE).
L'endettement des pays pauvres étant public, le
problème se pose principalement en terme budgétaire notamment la
problématique de la mobilisation des ressources.
L'analyse de la soutenabilité au-delà de la
définition des paramètres théoriques retenus à son
évaluation, est le plus éclairée par des projections
combinant de disciplines telles que la mathématique et la statistique,
dont le calcul ou test s'effectue sous des hypothèses discutables et
discutées.
Classiquement, le test de soutenabilité de la dette se
fait généralement à l'aide d'une formalisation assez
simple et qui se traduit par la formule classique suivante (en notant b :
rapport dette/PIB ; b' : son accroissement par unité de
temps ; G : le montant des dépenses publiques hors
intérêts ; T : le montant des recettes publiques ;
r : le taux d'intérêt ; Y : le PIB et g :
son taux de croissance) :
b' = [( G -T ) /Y ] + b(r - g)
Si b' est positif, le ratio b augmente sans cesse : la dette
est dite explosive,
Si b' est négatif, le pays est solvable
c'est-à-dire que la dette s'annule à un moment donné,
Si b' est égal à zéro, le ratio b se
stabilise : la dette est soutenable.
L'usage de cette méthode d'évaluation en 1996 par
certains économistes dont Daniel COHEN, a montré la situation
insoutenable de l'encours de la dette de nombreux pays africains. Cette
étude a en outre contribué à la prise en conscience
générale sur la problématique de la dette des pays
pauvres, aboutissant à l'initiative PPTE.
Cette méthode d'évaluation diffère des
autres modèles (en particulier celle qu'utilisent la Banque Mondiale et
le FMI dans le cadre des évaluations de la soutenabilité de la
dette, qui constituent la première étape pour
bénéficier de l'initiative PPTE) sur un point crucial : la
dynamique de l'endettement y est générée par le
déficit des opérations financières de l'Etat et non par le
déficit extérieur.
L'évolution de l'analyse de la soutenabilité a
conduit tout au long des cinquante années de problème de la
dette, à des propositions visant à la rendre viable ou soutenable
à travers des rééchelonnements
d'échéanciers. L'endettement des pays pauvres est demeuré
malgré tout élevé. Au milieu des années 90, il
était devenu manifeste que les mécanismes d'allégement de
la dette, les nouveaux concours officiels et l'ensemble de mesures visant
à ramener la dette à un niveau soutenable, n'étaient pas
suffisants.
La persistance du problème a clairement montré, du
moins pour ce qui concerne les pays pauvres dont les huit pays de l'UEMOA, que
les solutions adoptées ont non seulement pas permis de rendre la dette
soutenable, mais ont été la plupart du temps la cause des
difficultés économiques que rencontrent ces pays d'où les
critiques aux programmes d'ajustement structurel et aux procédés
de rééchelonnement au sein des deux clubs de renégociation
de la dette.
En 1996 à Lyon, le sommet du G7, le FMI et la Banque
mondiale ont lancé conjointement l'initiative en faveur des PPTE afin de
proposer une solution exhaustive aux problèmes d'endettement des pays
pauvres. Cette initiative s'appuyant aussi sur l'analyse de la
soutenabilité, marque une rupture par rapport aux pratiques anciennes
qui excluaient de la renégociation de dette, les créances
multilatérales.
Daniel COHEN, est Professeur de sciences économiques
à l'Université Paris I (Panthéon-Sorbonne).
Deuxième Partie : les stratégies de
désendettement public
Dans la pratique, un débiteur public dans
l'incapacité de faire face à ses engagements peut en
théorie adopter plusieurs attitudes :
- Il peut essayer de se désendetter à tout prix, en
appliquant une austérité budgétaire immédiate
visant en premier lieu de stabiliser le ratio de l'encours de la dette en
pourcentage du PIB en adoptant des réformes structurelles limitant le
déficit, et ce pour obtenir une baisse progressive du ratio de
l'endettement.
- Il peut répudier purement et simplement sa dette et
cesser tout paiement.
- Il peut quand ses capacités le lui permettent de
rembourser par anticipation tout ou partie de sa dette avant
échéance.
- Il peut aussi suspendre de manière temporaire ses
paiements en déclarant attendre de nouveaux accords ou des conditions
favorables. C'est la solution qu'ont adopté certains pays comme le
Mexique en 1982. On parle de moratoire, qui en général dure
jusqu'un accord international intervienne.
- Il peut demander un rééchelonnement de sa dette.
En pratique, cela revient à étaler des engagements de court terme
vers le long terme. La dette est renégociée, les
créanciers acceptent de reporter leurs exigences. Cette solution a
été couramment pratiquée par nombre de pays en
développement, toute fois, elle contient une perversion
fondamentale : financer le court terme par du long terme soulage sans
doute la trésorerie immédiate, mais repousse le problème
en l'accroissant vers les années suivantes.
Toutes ces stratégies, comme nous le constatons, sont
à la disponibilité des pays débiteurs et peuvent
être mises en oeuvre leur initiative.
Pour des motivations différentes, un créancier
dispose, par ailleurs, d'une multitude d'instruments lui permettant
d'alléger souvent de façon temporaire le poids du service de la
dette de son débiteur.
Ainsi, dans des circonstances le plus souvent exceptionnelles, il
peut annuler tout ou partie de sa créance comme c'est le cas des
créances multilatérales des pays pauvres dont l'endettement est
jugé insoutenable dans le cadre de l'initiative en faveur des pays
pauvres très endettés. Cette solution est le plus souvent mise en
oeuvre par des créanciers publics bilatéraux. A titre
illustratif, François Mitterrand, président français de
1981 à 1995, avait annoncé lors du sommet de la Baule en 1989,
que la France annulait la totalité de ses créances sur trente
cinq pays africains, tous situés dans la tranche des pays à
faible revenu. Les abandons de créance bilatérale
obéissent dans la majorité des cas à des
considérations géopolitiques que purement économiques.
En fin, le créancier peut accepter ou proposer un
moratoire, une restructuration ou simplement un rééchelonnement
de la dette.
Vue la limite des stratégies autrefois appliquées
pour le désendettement public notamment le rééchelonnement
et la pratique des moratoires, dans cette deuxième partie, nous abordons
les stratégies qui de notre avis peuvent être entreprise par les
pays pauvres et notamment les pays de l'UEMOA en élucidant leurs
conséquences éventuelles, pour sortir du cercle vicieux de
l'endettement. Aux trois stratégies (le remboursement par anticipation,
la répudiation et la réduction du déficit structurel) que
nous nous efforcerons d'analyser les contours et qui peuvent décider et
appliquer par un pays endetté, nous aborderons une quatrième voie
qui, d'initiation des créanciers, accompagnée des mesures
permettant d'éviter les erreurs du passé, peut permettre aux pays
endettés et notamment les pays de l'UEMOA de sortir du
surendettement.
Chapitre V : Le remboursement par anticipation
Le remboursement par anticipation comme toute
stratégie de désendettement a pour but d'annuler ou diminuer
l'encours de la dette. C'est une pratique qui consiste à rembourser
avant l'échéance contractuelle le tout ou une partie de la dette.
Relevant d'un contrat entre débiteur et créancier,
toute modification des termes du contrat de prêt fait en principe l'objet
d'un accord bilatéral entre pays débiteur et pays ou groupe de
pays créanciers, définissant les modalités. Les conditions
du remboursement anticipé, diffèrent qu'il soit effectué
au profit des créanciers publics réunis dans le club de Paris ou
aux créanciers multilatéraux.
I- Remboursement par anticipation dans le cadre du club de
Paris
1- Contexte historique :
Une des caractéristiques des créances du Club de
Paris, contrairement à celles du Club de Londres, est leur
illiquidité. Ces créances, à la différence des
émissions obligataires, ne sont pas cessibles et il n'existe aucun
marché sur lequel elles pourraient être négociées.
Il en résulte un monopole de rachat par le débiteur. Le prix de
cession résulte, en théorie, d'une négociation
bilatérale. Pour maintenir une égalité de traitement et
concilier les intérêts des créanciers et des
débiteurs, le Club de Paris s'accorde sur des règles communes.
D'un coté, les débiteurs souhaitaient pouvoir racheter leurs
créances avec décote, comme cela s'était produit pour
certains pays pour des créances commerciales (émission
obligataires). D'un autre coté, certains créanciers,
désiraient en cas de remboursement anticipé de pouvoir exiger des
pénalités compensant les coûts de rupture.
Ces deux positions demeuraient inconciliables. Pour ces raisons,
les membres du club de Paris choisirent une voie médiane et un
compromis : ni décote ni pénalité permettant
d'envisager, vers la fin des années 1990, sous réserve du
consensus des créanciers, le remboursement par anticipation au pair de
leurs créances, chaque partie conservant la possibilité à
titre individuel, de refuser le remboursement anticipé. Malgré
cette règle, il a fallu attendre le retournement de la conjoncture qui
prévalait au début des années 1980 en matière de
taux d'intérêt, pour voir le mouvement de remboursement
anticipé de la dette s'accéléré.
En effet, au début des années 1980, les taux
d'intérêt nominaux mondiaux à long terme dépassaient
10 %, compte tenu du niveau élevé de l'inflation. C'est dans ce
contexte de taux élevé que l'Algérie, la Russie, la
Pologne et le Pérou ont souscrits leurs emprunts initiaux. Ces emprunts
furent restructurés et rééchelonnés par le club de
Paris dans les années 1990.
La désinflation commencée depuis le milieu des
années 1980, a conduit à une baisse importante des taux, qui sont
passés en dessous de 5 % à partir de 2003 dans les deux
principales économies de référence en matière de
taux d'intérêt (Etats-Unis, Allemagne).
Figure 2 : Taux d'intérêt
à 10 ans
En %
Source : Banque de France.
De cette baisse significative du taux d'intérêt, il
en a résulté une hausse de la valeur actuarielle des anciennes
créances et donc, un intérêt croissant pour leur
refinancement.
2. Les remboursements anticipés au Club de
Paris :
La baisse des taux d'intérêt (figure 1) s'est
accompagnée de l'amélioration de la santé
financière des principaux pays débiteurs (l'Algérie, le
Brésil, la Russie etc.) exportateurs de matières
premières, plus précisément grâce à la hausse
des cours du pétrole. Il en a résulté un relèvement
général des notes des principales agences de notation, ce qui par
nature rend l'accès facile aux marchés des capitaux à bas
taux d'intérêt.
Dans ce contexte, les conditions de financement des pays
débiteurs exportateurs de pétrole se sont considérablement
améliorées et la valeur actualisée de leur dette a
dépassé le pair. Il est devenu rentable de rembourser par
anticipation, notamment, grâce à la règle du « ni
décote ni pénalité » des années 1990.
Ainsi, à partir de 2005, le remboursement par anticipation a pris de
l'ampleur pour un certain nombre de débiteurs de poids.
Depuis 2005, au total, plus de 57 Mds $ de créances ont
été remboursés par anticipation par les débiteurs
du Club de Paris.
Tableau n° 8 : Remboursements
anticipés par Pays aux créanciers du Club de Paris
Pays
|
Montant en Mds $
|
Fédération de Russie
|
37
|
Algérie
|
7,9
|
Pologne
|
5,4
|
Pérou
|
1,5
|
Brésil
|
1,5
|
Source : Banque de France, 2006.
Ces rachats ont pris la forme de payement anticipé des
échéances futures en principal, les intérêts
à échoir n'étant pas versés. Ils portaient donc sur
la valeur nominale de la dette restant due (au pair) et n'ont pas donné
lieu à pénalité pour rachat anticipé, à
l'exception du remboursement de la dette russe en 2006 où certains
créanciers ont bénéficié d'une prime d'un montant
total d'un milliard de dollar US et dont 700 Millions pour l'Allemagne.
II- Remboursement par anticipation des créances
multilatérales
Le remboursement par anticipation qui constitue une rupture
de contrat, est régie par des règles et procédures. Ces
règles sont différentes lorsque l'éventualité est
prévue dans les clauses du contrat et de ce dont le contrat n'y
prévoit pas, ce qui nécessite le recourt au droit commun. Dans
ce qui suit, nous nous intéresserons aux cas plus précis de la
Banque mondiale, principal bailleur de fonds des pays pauvres. Dans les accords
de prêt de la Banque mondiale, les emprunteurs ont le droit de payer, par
anticipation, avant l'échéance et à une date acceptable
pour la Banque : a) l'encours du principal du prêt ; ou b) le montant en
principal dû à une ou plusieurs dates d'exigibilité du
prêt.
La prime de remboursement devant être acquittée
à ce titre est fonction du type de prêt considéré.
Les emprunteurs doivent informer la Banque par voie de notification de leur
intention de rembourser tout montant avant l'échéance au moins 45
jours à l'avance.
Cette notification préalable est nécessaire car,
elle permet semble-t-il à la Banque de fournir à l'emprunteur
une estimation détaillée du montant du remboursement
anticipé.
La Banque Mondiale a élaboré des règles qui
régissent les remboursements anticipés mais qui diffèrent
selon les types de prêts.
Pour les prêts à échéance fixe, les
montants remboursés de manière anticipée sont
imputés selon les modalités définies par l'emprunteur ou,
en l'absence de toute spécification de la part de l'emprunteur, de la
manière suivante : a) si l'Accord de prêt dispose que des
décaissements spécifiques doivent être remboursés de
manière distincte, comme dans le cas des prêts à
échéance fixe liés aux décaissements, les montants
remboursés de manière anticipée sont imputés dans
l'ordre inverse des dates desdits décaissements, en fonction de la date
de décaissement (le montant décaissé en dernier est
remboursé en premier) puis en fonction de la date d'exigibilité
(dans chaque tranche, c'est le montant qui est exigible à la date la
plus éloignée qui est remboursé en premier) ; et b) dans
tous les autres cas (c'est-à-dire pour les prêts dont le
calendrier de remboursement est défini lors de l'engagement), le montant
remboursé de manière anticipée est imputé dans
l'ordre inverse des échéances du prêt, en commençant
par les montants dus à la dernière échéance.
La valeur nominale d'une créance est le montant
emprunté minoré des remboursements en principal
déjà effectués. En d'autres termes, c'est le capital
restant dû. Ce montant dépend de l'échéancier de
remboursement en principal, mais ne dépend ni du taux
d'intérêt du contrat ni du taux d'intérêt actuel.
La prime prélevée en cas de remboursement
anticipé d'un montant quelconque d'un prêt est
déterminée par la Banque en fonction du coût du
redéploiement des fonds remboursés d'avance entre la date du
remboursement anticipé et la date d'exigibilité de ce montant.
Pour les prêts à échéance variable, la
Banque prélève une prime de remboursement anticipé qui est
en fonction du coût du redéploiement des fonds remboursés
d'avance entre la date du remboursement anticipé et la date
d'exigibilité de ce montant. Le calcul de la prime prend en compte la
différence entre le l'échéance payable pour le prêt
remboursé de manière anticipé et l'échéance
applicable à tout le prêt en la devise du prêt à la
date du remboursement anticipé. Les montants versés de
manière anticipée sont imputés aux paiements dus au titre
de l'amortissement du prêt aux dates les plus tardives.
Dans les conditions générales applicables aux
crédits de développement de l'IDA (guichet concessionnel de la
Banque mondiale), l'emprunteur a le droit de rembourser par anticipation tout
ou partie de l'encours du principal d'une ou de plusieurs
échéances de remboursement du crédit
désignées par lui. Actuellement, aucune prime de remboursement
anticipé n'est prélevée en cas de remboursement
anticipé des crédits de développement de
l'IDA.
A quelques exceptions près lié à la nature
même des crédits, les règles et procédures du
remboursement anticipé des institutions financières
multilatérales, sont identiques : notification de l'intention du
paiement anticipé, indemnité tenant compte du coût du
redéploiement des fonds remboursés en anticipation payée
par le pays débiteur.
III. Les enseignements de la stratégie du
remboursement par anticipation.
Les économies réalisées sur les
services futurs de la dette ne justifient pas en elles seules le rachat. En
fait, le gain doit être évalué par rapport au coût du
capital, c'est-à-dire au coût de refinancement ou au coût
d'opportunité. Ainsi, un refinancement de durée identique n'est
intéressant pour le débiteur que lorsque le nouveau taux
d'intérêt est inférieur à l'ancien. Dans le cas
contraire, la charge d'intérêt du débiteur sera alourdie.
De façon plus générale, le remboursement par anticipation
de dette n'est intéressant pour le débiteur que lorsque la valeur
actualisée de la même créance est supérieure
à son prix de rachat.
Le remboursement anticipé par un pays endetté peut
améliorer son rating (notation), lui permettant d'accéder aux
prêts à taux bas et permettre des économies sur le service
futur de sa dette. De ce point vu, il peut constituer une politique de
désendettement favorable au développement des pays de l'UEMOA,
dans le sens où les économies réalisées sur le
service futur de la dette ou les nouveaux prêts éventuels à
faible taux, serviront à des investissements dont les pays ont besoin
pour promouvoir une croissance économique durable.
Malgré les avantages qu'elle présente, cette
stratégie demeure inaccessible aux pays de la zone UEMOA, car elle
suppose la possession d'une réserve de change relativement importante.
Sauf à emprunter à taux bas pour rembourser les emprunts dont les
coûts sont élevés, or, les taux bas sont
généralement proposés par les marchés aux pays
présentant moins de risque.
Le remboursement de la dette par anticipation reste par
conséquent l'apanage des pays disposant de réserves de change
importantes grâce à leurs exportations de matière
première.
Les précédents du remboursement
anticipé :
La hausse des cours du baril du pétrole a
accéléré le mouvement récent de remboursement par
anticipation. L'Argentine avec une dette publique s'élevant à
141,252 Mds de dollar US soit 53,7 % de son PIB, décide sous la
présidence de Nestor Kirchner de rembourser la totalité de la
dette du FMI (9,81 Mds USD) par anticipation. Cette décision
interprétée comme une décision politique plus
qu'économique avait pour objectif d'assurer une certaine
indépendance du pays vis-à-vis du Fonds, lui laissant des marges
de manoeuvre en matière de politique économique.
Au point de vu strictement économique, ce remboursement
par anticipation n'a que peu d'effet puisqu'il a simplement consisté
à s'endetter pour honorer le FMI, l'encours de la dette demeurant
inchangé en conséquence. Seul changement, la créance passe
du portefeuille du FMI à celui de la Banque centrale (BCRA) dont les
réserves ont été sollicitées à la hauteur de
40 %.
Tout comme le Brésil, l'Argentine, l'Indonésie ou
encore la Russie, l'Algérie a aussi utilisé ses réserves
de change pour procéder à des remboursements anticipés de
sa dette extérieure.
En 2004, elle décide de se lancer dans le remboursement
anticipé de ses dettes et paie 1,6 Md USD à ses créanciers
bilatéraux et multilatéraux. Le processus
s'accélère quand le 11 Mars 2006, le gouvernement algérien
signe un accord multilatéral avec le club de Paris, portant
remboursement de la dette rééchelonnée entre 1994 et 1995.
Cet accord multilatéral qui ouvre la voie à des accords
bilatéraux, lui permet de rembourser de manière anticipée
ses dettes bilatérales estimées à 7,9 Mds USD. En quelque
mois, le pays signe douze accords avec ses créanciers. Fin juin 2006,
l'Algérie avait déjà remboursé par anticipation 4,3
Mds USD à ses créanciers du club de Paris. La partie
privée de sa dette environ 1 Md USD, devrait également être
remboursé avant terme.
Ainsi, la dette extérieure algérienne passe de 21,4
Mds en fin 2004 à 15,5 Mds USD en fin 2005 et devrait tomber aux
alentours de 5 Mds à la fin 2006, soit moins de 5 % du PIB et un peu
plus de 10 % des recettes d'exportation. Au niveau de sa dette publique totale
(intérieure et extérieure), elle passe de 99 % du PIB en 2005,
à 57 % en 2001, 40 % en 2003 et ne représente plus que 15 %.
Le coût d'opportunité de la stratégie du
remboursement anticipé fait l'objet de nombreuses controverses. Ainsi,
il paraît nécessaire que le choix du remboursement de la dette par
anticipation obéisse au calcul du coût-bénéfice. Les
sommes mobilisées par anticipation pourraient servir, selon certains
économistes, à investir pour promouvoir la croissance
économique et rembourser la dette grâce au surplus des recettes
fiscales générées. Pour d'autres, le paiement
anticipé permet non seulement de réaliser des économies
sur les intérêts futurs, mais permet, en outre, d'assurer une
indépendance du pays par rapport aux institutions financières
internationales (FMI, Banque Mondiale essentiellement) qui exercent une
supervision de la politique économique des pays dont elles sont
créancières et édictent dans la plupart du temps, les
programmes d'austérité budgétaire.
Le désendettement par le remboursement anticipé,
n'exige pas de reforme structurelle de nature à dégager de
recettes supplémentaires, mais dépend plutôt, de
manière générale, d'une aisance financière
conséquence, le plus généralement, d'une augmentation plus
que prévu des cours des matières premières dont le pays
débiteur est exportateur. Il obéit comme toute stratégie
de désendettement, à un choix délibéré soit
de s'affranchir de la surveillance des créanciers comme ce fût le
cas de l'Argentine de Nestor Kirchner, soit d'assurer une certaine
sécurité financière (le service de la dette étant
lié à la variation des taux d'intérêt).
Une telle stratégie devrait faire l'objet néanmoins
d'une analyse économique plus précise, afin de déterminer
les incitations et les éventuelles externalités qu'elle pourrait
susciter.
Chapitre VI : La doctrine de la dette odieuse et
répudiation
I- La doctrine de la dette odieuse
1- Contexte historique
L'utilisation des concepts incorporés par la
doctrine de la dette odieuse apparaît à la fin du 19ème
siècle lors de la décolonisation de l'Amérique Latine.
A cette époque l'emploi du droit international et des
thèses jus naturalistes par les grandes puissances
dans leurs relations avec les autres Etats est fréquent. La
période qui s'étend de 1890 à 1905 correspond à un
changement majeur dans les relations internationales. L'un des
éléments de ce changement est l'entrée des Etats-Unis sur
la scène internationale.
En effet, c'est à partir de cette période que la
politique extérieure des Etats-Unis oscille entre la Doctrine Monroe,
qui prône l'isolationnisme continental et fonde la politique
américaine tout au long du XIXème, et celle du Manifest
Destiny qui les pose en défenseurs de « l'ordre et de la
sécurité de la société civilisée
». L'intervention américaine à Cuba, en 1898, illustre
cet « élargissement de la doctrine Monroe».
C'est lors de la résolution de ce conflit hispano-américain, que
la doctrine de la dette odieuse fait son entrée dans la jurisprudence
internationale.
2- Conceptualisation
Est classiquement considérée « odieuse »
toute dette contractée par un gouvernement illégitime et/ou dont
l'usage est contraire aux besoins et intérêts du peuple.
C'est Alexander Nahum Sack, ancien ministre de Nicolas II ²
et professeur de droit à Paris, qui en 1927 formula cette doctrine suite
aux pratiques étatiques qu'il observa : « Si un pouvoir
despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les
intérêts de l'État, mais pour fortifier son régime
despotique, pour réprimer la population qui le combat, etc., cette dette
est odieuse pour la population de l'État entier. Cette dette n'est pas
obligatoire pour la nation; c'est une dette de régime, dette personnelle
du pouvoir qui l'a contractée, par conséquent elle tombe avec la
chute de ce pouvoir.»
Selon la thèse jus naturaliste, le droit
international est la « réactualisation d'un ordre inscrit dans
les
desseins divins ou les décrets de la nature
». En se référant à des considérations
morales qui transcendent la sphère étatique, la doctrine jus
naturaliste impose l'idée de civitas maxima : la
communauté internationale.
² Nicolas II Aleksandrovitch, empereur de Russie
(1894-1917), renversé par la Révolution russe de 1917.
Cette doctrine s'oppose au principe de succession d'Etat
énoncée par la Convention sur la succession d'Etats en
matière de biens, archives et de dettes d'Etats de 1983. En
effet, selon l'auteur, le principe de succession d'Etat ne concerne
pas les dettes de régime.
De plus, face aux préoccupations des créanciers,
Sack argumente en faveur d'une responsabilisation de ces derniers. S'ils
connaissent les desseins de l'emprunteur, ils commettent « un acte hostile
à l'égard du peuple » et s'exposent eux-mêmes
au risque de non-remboursement si le régime est déchu. Ils ne
peuvent donc pas réclamer leur dû.
Les dettes de régime ne sont donc pas soumises au principe
de droit international pacta sunt servanta, selon lequel : «Tout
traité en vigueur lie les parties et doit être
exécuté par les parties de bonne foi» .
L'approche de Sack, empruntant le discours naturaliste, manque
cependant d'applicabilité. Une définition plus
opérationnelle des dettes odieuses est offerte par le Centre for
International Sustainable Development Law (Centre du Droit International pour
le Développement Soutenable). Elle établit trois critères,
sur lesquels s'accordent plusieurs auteurs, qui fondent le caractère
« odieux » d'une dette :
- l'absence de consentement : la dette a été
contractée contre la volonté du peuple.
- l'absence de bénéfice : les fonds ont
été dépensés de façon contraire aux
intérêts de la population.
- la connaissance des intentions de l'emprunteur par les
créanciers.
On remarque que l'affectation des fonds constitue un
critère plus pertinent que celui de la nature du régime dans la
distinction des obligations publiques. En effet, elle détermine la
régularité des dettes d'Etats. La jurisprudence penche
plutôt dans ce sens.
II- Les précédents de la
répudiation :
1. Le Mexique :
Dans la pratique, le Mexique est le précurseur de
la répudiation de dette odieuse. En
1861, le gouvernement mexicain déclare un gel de deux ans
du remboursement de la dette extérieure. Cette dette contractée
par différents régimes conservateurs, dont le dictateur Antonio
López de Santa Anna, ne constitue pas un impératif pour le
gouvernement qui souhaite se consacrer à la reconstruction du pays suite
à la guerre civile de 1858-1861.
Convention de Vienne sur le droit des traités,
Partie III : Respect application et interprétation des
traités,
Section 1, Art.26, 1969.
Cependant, l'acte unilatéral du président mexicain,
sévèrement réprimé par la France et le Royaume Uni
et l'Espagne, se solde par l'occupation française et la fondation d'un
empire dirigé par Maximilien d'Autriche. Celui-ci contracte de
nombreuses dettes à fort taux d'intérêt afin de maintenir
sa domination. Il est déchu en 1867.
Une quinzaine d'année plus tard, la loi du 18 Juin 1883,
dite loi sur le règlement de la dette nationale, répudie
effectivement les dettes contractées de 1857 à 1860 et de 1863
à
1867. L'expérience mexicaine s'inscrit comme l'un des
exemples de la « politique de la
Canonnière » chère aux grandes
puissances européennes, à l'époque, consistant à
user de la force dans le recouvrement de leurs créances. Cette pratique
a progressivement disparu en laissant place à une reconnaissance de la
souveraineté de la dette publique, c'est-à-dire au maintien
théorique de l'intangibilité des privilèges de
l'État, fût-il débiteur.
De plus, l'affaire mexicaine suggère que seul un Etat
occidental possédant un certain crédit sur la
scène internationale pouvait imposer une telle doctrine. En effet, trois
décennies plus tard l'action des Etats-Unis a un tout autre
rayonnement.
En 1897, embrassant la cause du peuple cubain et soucieux de
leurs propres intérêts géostratégiques, les
Etats-Unis entrèrent en guerre contre la couronne hispanique, mirent
rapidement fin au conflit et remportèrent, entre autres, la
souveraineté de l'île.
2- Les Etats-Unis :
Dès lors, l'Espagne, déchue, réclama
aux Etats-Unis le paiement des créances qu'elle et d'autres puissances
européennes (notamment la France et la Belgique) détenaient sur
Cuba. Ces créances avaient étés contractées par les
agents de la régence espagnole sur les marchés internationaux
sous formes d'obligations. La requête espagnole s'appuyait sur des faits
analogues, notamment le comportement de ses anciennes colonies qui avaient pris
à leur charge la part de la dette publique espagnole ayant servit
à leur colonisation. De plus, les
Etats-Unis eux-mêmes avaient reversé plus de 15
millions de livres sterling au Royaume Uni lors de leur accession à
l'indépendance.
En dépit de cette tendance respectée à
l'époque par toutes les grandes puissances, puisque conforme à
leurs intérêts, les Etats-Unis refusent toute
responsabilité et le postulat selon lequel la dette espagnole incombait
au peuple cubain.
Dominique Carreau, Rapport du directeur d'études de
la section de la langue française du centre, in Centre d'Etude et
de Recherche de Droit International et de Relations Internationales, 1995, p.
8.
La raison évoquée est que, cette dette a
été imposée au peuple cubain sans son accord et par la
force des armes et constituait l'un des motifs de la rébellion cubaine.
Ces créances contractées par les autorités locales
servaient leur domination en finançant l'appareil répressif,
étouffant toute insurrection cubaine. De plus, les Etats-Unis
déclarèrent que les créanciers avaient pris le risque de
leurs investissements : ils savaient que ces dettes servaient l'asservissement
d'un peuple.
En effet, en 1898, lors du Traité de paix de Paris,
l'Espagne reconnaît qu'avant 1860, une partie du revenu de l'île a
financé les dépenses nationales espagnoles. Elle ne nie pas non
plus qu'entre 1861 et 1880, les dettes contractées par la régence
ont été affectées au financement de l'expédition
espagnole au Mexique, aux dépenses liées à la tentative de
récupération de San Domingo, et à la répression des
soulèvements populaires cubains entre 1968 et 1878. Les dettes
contractées après 1880 visaient à rembourser les emprunts
précédents, ainsi qu'à maintenir la domination espagnole
à Cuba.
Au final, les dettes de la régence avaient
été contractées sous le droit espagnol et non cubain, et
obligeaient l'Espagne et non l'île.
Ni les Etats-Unis qui soutenaient la cause cubaine, ni Cuba ne
remboursèrent cette dette, et les créanciers ne
recouvrèrent jamais leur dû. La décision des Etats-Unis
fût enregistrée dans le Traité de paix de Paris qui mit fin
la guerre hispano-américaine.
On retrouve dans le précédent cubain les trois
critères évoqués plus haut.
A partir de cet événement, la communauté
internationale reconnaît implicitement le concept de dette odieuse. Le
terme implicite suggère que les Etats ne déclarent pas adopter
cette doctrine, mais que leurs pratiques reflètent son acceptation comme
instrument juridique.
3- L'Union soviétique :
Ainsi, en 1918, suite à la révolution qui le
mène au pouvoir, le parti Bolchevik répudie la dette tsariste que
le gouvernement provisoire avait décidée d'honorer.
Cependant, les détracteurs de la doctrine avancent que le
contexte radical du changement de régime de l'empire russe isole cette
répudiation du champ d'application de celle-ci.
De plus, cette répudiation constitue un acte
unilatéral non sanctionné par une cour arbitrale. Enfin, en 1996,
la Fédération de Russie s'est engagée à apurer ces
dettes envers la France .
La France et la Russie ont signé, le 26 novembre 1996, un
accord relatif au paiement par la
Fédération de Russie d'une somme de 400 millions de
dollars, en règlement définitif des créances
réciproques entre la France et la Russie antérieures au 9 mai
1945.
4- Les traités de paix des première et seconde
guerres mondiales :
Un exemple plus emblématique est celui du Traité de
Versailles qui, en 1919, annule officiellement la dette réclamée
par l'Allemagne et la Prusse au nouvel Etat polonais.
Les deux vaincus soutenaient que les prêts qu'ils avaient
contractés afin d'occuper la
Pologne incombaient à cette dernière.
De même, le traité de paix signé entre
l'Italie et la France le 10 février 1947 déclare «
inconcevable que l'Ethiopie assure le fardeau des dettes contractées par
l'Italie afin d'assurer sa domination sur le territoire Ethiopien ».
5- Le Costa Rica :
L'affaire entre le Costa Rica et la Grande Bretagne constitue le
principal élément de jurisprudence de la doctrine de la dette
odieuse.
En 1922, le gouvernement costaricain vote une loi annulant tous
les contrats passés de
1917 à 1919 entre le gouvernement précédent
de Federico Tinoco, général puchiste, et les personnes
privées. Par cet acte, le gouvernement vise particulièrement les
porteurs de titres émis par la Banco Internacional de Costa Rica.
En effet, avant de quitter le pays en août 1919, le
général Tinoco et son frère ont détourné les
fonds mis à disposition de la Banco Internacional par la Royal Bank of
Canada, une banque britannique, en échange de bonds. Suite à
l'annulation des contrats, la Grande Bretagne en vertu de son droit de
protection diplomatique accusa l'Etat costaricain et la Banco Internacional
d'avoir rompu ses engagements envers la Royal Bank of Canada.
La Grande Bretagne affirma que le gouvernement de Tinoco
était un gouvernement légitime et que ses actes
incombaient au nouveau gouvernement. Pour le Costa Rica cet argument
était d'autant plus absurde que la Grande Bretagne, comme de
nombreuses puissances européennes, n'avait pas reconnu le
gouvernement puchiste.
D'autre part, selon la Constitution les ressortissants
britanniques lésés devaient s'adresser directement à une
juridiction costaricaine et non étrangère, et renoncer à
la protection diplomatique. Cette clause, incluse dans de nombreux contrats de
dette sud-américains, vise à protéger l'Etat
débiteur.
Le juge Taft, président de la Cour suprême des
Etats-Unis, qui arbitra l'affaire, conclue que malgré la
légitimité du gouvernement de Tinoco, gouvernement de
facto capable d'engager l'Etat, les contrats étaient inapplicable,
car la Bank of Canada n'avait pas agi en vertu du principe de « bonne foi
». En effet, la dette avait été contractée alors que
la popularité de Tinoco avait disparu et que les forces d'opposition
politiques et militaires montaient en puissance. De plus, le
général Tinoco avait usé de l'argent prêté
par la Royal Bank of Canada à la Banco Internacional à des fins
purement personnelles, donc contre l'intérêt public. La
nullité de la dette (Law of Nullities) costaricaine fut
déclarée valide.
6- L'Indonésie :
Le cas le plus récent de répudiation de dette dite
« odieuse » est celui de l'Indonésie qui, en 1949, lors de la
Conférence de la Haye, accepte d'assumer une partie de la dette publique
hollandaise contractée avant l'occupation japonaise de 1942, mais refuse
de participer aux remboursements des fonds ayant financés la
répression militaire du mouvement de libération nationale.
L'accord débouche sur une participation indonésienne à
hauteur de 4,5 milliards de guildes hollandaises. Cependant en 1956,
l'Indonésie dénoncera cet accord comme « odieux ».
III. La difficile re-appropriation du droit international par les
pays issus de la décolonisation.
La décolonisation est l'un des évènements
majeurs ayant transformé le droit international entre 1945 et 1990. Du
XIXème siècle à la création de l'ONU, le droit
international était déterminé par les grandes puissances
pour asseoir leur suprématie sur le monde. En 1945, avec la signature de
la Charte des Nations Unies, un code de conduite établissait les
principes généraux des relations internationales qui seront
complété par des traités internationaux.
1- Le traité de Vienne.
La Convention de Vienne sur le droit des traités,
conclue en 1969, reflète les attentes du Tiers Monde et des pays
socialistes. En effet, en codifiant des principes issus de la coutume
appartenant au corpus du droit général, la Convention introduit
des restrictions à la liberté invétérée des
Etats. Dans le cadre de la dette odieuse, la convention offre plusieurs recours
possibles, dont le plus pertinent est l'article 50 sur la corruption .
Art. 50 Corruption du représentant d'un
Etat : « Si l'expression du consentement d'un Etat à
être lié par un traité a été obtenue au moyen
de la corruption de son représentant par l'action directe ou indirecte
d'un autre Etat ayant participé à la négociation, l'Etat
peut invoquer cette corruption comme viciant son consentement à
être lié par le traité ».
L'évocation de l'article 50, n'est pertinente que dans le
cadre de contrats liant deux Etats. Cependant, les cas potentiellement
concernés restent nombreux. La convention accorde une importance
particulière à la malhonnêteté potentielle des
dirigeants et des créanciers.
Ainsi, le Pérou avait adopté dès 1860 une
loi stipulant que tous les actes commis par un gouvernement usurpateur seraient
déclarés nuls et non avenus, et contraires à la
Constitution péruvienne . Cet article offre une opportunité
considérable aux Etats à faible stabilité politique
souhaitant préparer de futurs cas de dettes « odieuses ».
Les répudiations ex-post étant au jour
d'aujourd'hui incertaines, car liées aux rapports de force de l'ordre
mondial actuel, la prévention des prêts frauduleux par leur
invalidation dans le droit interne, voire au sein même de la
Constitution, permettrait une réappropriation significative du droit.
2- La non-application de la doctrine
Malgré les avancées juridiques citées,
qui renforcent la portée des précédents examinés,
la non-application de la doctrine de la dette odieuse n'est pas
étonnante.
Son principal motif est l'opposition des grandes puissances. Il
s'agit cependant de préciser que le débat ne porte pas sur les
dettes contractées par les colonisateurs. Celles- ci ne furent pas mises
à la charge des nouveaux Etats ipso jure et ceux qui les
assumèrent le firent volontairement, surtout pour des raisons politiques
notamment dans le but du maintien des relations financières.
Les mêmes raisons freinèrent plus tard les Etats
à répudier leurs dettes odieuses. Et pour cause : un Etat
répudiant sa dette est un Etat qui s'isole de la communauté
financière internationale. Or, en 1982, la crise de la dette mexicaine
mit un terme à l'octroi frénétique de prêts au
Tiers-Monde. La finance internationale s'en détourna et les taux
d'intérêts pratiqués augmentèrent dangereusement. De
plus, les Etats du Nord, touchés par la stagflation réduisirent
considérablement leur aide publique au développement.
C'est donc la peur de la sanction des marchés financiers
qui réfrènent les pays du Tiers
Monde. Lorsque les Sandinistes prirent le pouvoir au Nicaragua en
1979, ils reconsidèrent rapidement leur répudiation initiale des
dettes.
L'article 10 de la Constitution du 10 Novembre 1860 stipule que
« sont nuls les actes de ceux qui ont usurpés les fonctions
publiques et les emplois confiés sous les conditions prescrites par la
Constitution et les lois ».
De même le gouvernement sud africain de Nelson Mandela
endossa les dettes de l'apartheid, malgré la pression du mouvement
catholique.
La seconde restriction importante à l'application de la
doctrine de la dette odieuse provient du fait que celle-ci n'a pas atteint le
stade de l'opinio juris. Dès lors, son emploi reste
aléatoire, car il repose sur les rapports de force sous-jacents.
La probabilité de création d'une règle de
droit décroît avec l'importance ou la sensibilité du sujet
abordé. La notion de dette odieuse reste donc un élément
de la doctrine, celle-ci n'étant pas une source classique de droit
international. Parmi les décisions judiciaires, seule l'affaire Tinoco
fait jurisprudence. Cependant, ce précédent lie fermement le
caractère légal des dettes publiques au respect de
l'intérêt public.
Une autre source du droit international est contenue dans les
principes généraux du droit. Parmi ceux-ci, ont peut citer la
bonne foi, utilisée dans l'affaire Tinoco, et la théorie de
l'enrichissement injuste. La bonne foi reste cependant un élément
subjectif, dont l'invocation est nécessaire mais non suffisante.
Enfin, la coutume forme une source première du droit
international, si et seulement si elle est la preuve d'une pratique
générale acceptée comme étant le droit. Or, la
pratique récente des Etats ne montre pas que la doctrine de la dette
odieuse ait atteinte le statut de droit. Les auteurs ne s'accordent pas sur
l'opinio juris de la doctrine, c'est-à-dire le fait qu'elle
soit perçue par les Etats comme leur conférant des droits et des
obligations tels, qu'ils doivent se conformer à celle-ci. Pour beaucoup,
elle reste un élément de la morale et n'a pas valeur de loi.
3- La répudiation et le désendettement
La reconnaissance des organisations non-gouvernementales
comme de nouveaux acteurs des relations internationales, représentant la
« société civile » voire la « communauté
internationale » offre le renouveau de la doctrine de la dette odieuse.
Ainsi, la médiatisation de la doctrine de la dette odieuse
par les mouvements pour l'annulation de la dette du Tiers-Monde, tels que le
CADTM, Jubilée 2000, ATTAC ou le Collectif Odious Debt, par des
manifestations crée l'idée d'effectuer un audit de la dette des
pays tiers monde, afin de juger leur légitimité.
Dès lors, la considération grandissante
des sphères juridique et politique pour les revendications des ONG,
laisse espérer une amélioration du statut de la doctrine. Ainsi,
le parlement anglais a explicitement reconnu la doctrine dans le cadre des
dettes rwandaises .
De même, le gouvernement fédéral
américain, pour des motifs peu altruistes, a récemment fait
référence à la doctrine dans le but de légitimer
une annulation partielle de la dette irakienne contractée par la
dictature.
De plus, la Sentencia Olmos du 13 juillet 2000 de la
Cour Criminelle et Correctionnelle de Buenos Aires, qui condamne la dictature
argentine et ses créanciers dont le FMI, valide le recours à la
justice nationale dans la condamnation de ce type de dette ².
Si les ONG semblent déterminées à
internationaliser le débat sur la dette « odieuse » afin
d'obtenir des annulations pures et simples de la plupart des dettes des pays
pauvres en s'appuyant sur la nature des régimes qui les ont souscrits,
les démarches juridiques quant à elles, émanent d'une
décision nationale.
Leurs réussites peuvent dépendre de leur
coordination à l'échelle régionale par exemple.
Parallèlement, le FMI a publié en juin 2002
l'article de deux économistes d'Harvard affirmant la viabilité
d'une institutionnalisation des dénonciations a priori de
dettes odieuses afin d'éviter leur répudiation ex-post,
ou de la création d'une nouvelle norme exonérant les pays
victimes de toute responsabilité . Par cet acte, le FMI montre une
perméabilité à ces idées. Celle-ci suggère
une surestimation historique du pouvoir des créanciers sur les
débiteurs.
En effet, la stabilité financière du Nord
dépend largement du Sud. En sont la preuve, les perpétuels
rééchelonnements de dettes accordés aux économies
débitrices.
Dans l'histoire récente, aucun pays n'a pris le risque de
répudier sa dette. Au point que la répudiation s'apparente
beaucoup plus à une méthode s'appuyant sur des faits historiques
reposant essentiellement sur la gouvernance, qu'à une véritable
stratégie pour un pays de sortir de l'endettement.
Les organismes non-gouvernementaux à but humanitaire
(CADTM, CETIM, ATTAC etc.) développent l'idée de placer la
plupart des dettes des pays ayant connus des dictatures
International Development Comitee of the House of Common, Third
Report, 14 May 1998.
² En effet, selon la Sentence du Juge fédéral
argentin, les institutions financières internationales (IFI) et les
firmes financières privées ont fourni des fonds (sous forme de
prêt) à une dictature (gouvernement usurpateur), qui, en outre, a
planifié et exécuté des crimes contre l'humanité,
ces institutions internationales ne peuvent prétendre que : le
gouvernement postérieur légitime est juridiquement tenu par le
droit international à rembourser les dettes de la dictature
militaire.
M. Kremer and S. Jayachandran, Odious debt, in Finances
& Development, vol. 39, n°2, Juin 2002.
notamment en Afrique, dans la catégorie des dettes
odieuses, en légitimant purement et simplement leur annulation. Dans ce
sens, les audits sont préconisés. Celui récemment
effectué par le Sénat belge avec l'appui du CADTM est un exemple.
Au demeurant, il n'y a pas eu de répudiation de dette unilatérale
dans la période récente, à la fois crainte de
représailles (gel des avoirs détenus à l'étranger,
perte de confiance etc.), mais aussi parce qu'il s'agit de la pire des
solutions qui aurait conduit à l'isolement des pays pauvres
débiteurs de la communauté financière internationale. En
outre, les déficits budgétaires chroniques des pays de l'UEMOA et
le recours restrictif du financement monétaire résultant de
l'indépendance de la Banque centrale vis-à-vis du pouvoir
exécutif, les rendent fortement dépendants des financements
extérieurs qu'un risque de répudiation rendra inaccessibles.
Chapitre VII : La politique
d'austérité budgétaire comme instrument de
désendettement public
Jusque là, nous avons abordé des
stratégies qui tenaient plutôt à des circonstances
particulières, la disponibilité d'une réserve de change
importante pour ce qui concerne les remboursements anticipés
constatés, la prise en compte du fait historique pour la
répudiation ; qu'à une réelle stratégie
s'inscrivant dans une démarche de réforme structurelle capable
d'assurer le financement futur des investissements dont les pays ont besoin.
La récession économique du début des
années 1990 dans les pays développés membres de l'OCDE, a
nécessité dans nombre de pays membres de cette organisation des
réformes économiques et notamment budgétaires qui sont
riche d'enseignements.
En effet, la récession a accentué la
détérioration de la situation budgétaire de la plupart des
pays membres. En 1993, le déficit des administrations publiques
s'élevait à 4,2 % du PIB, pour l'ensemble des pays membres. Pour
rééquilibrer leur situation budgétaire, beaucoup de pays
ont entrepris des réformes budgétaires structurelles visant
à réduire leurs ratios d'endettement.
Vue comme la condition première d'une politique de
réduction du fardeau de la dette, la nécessité d'une
économie dynamique et en croissance seule capable de soutenir un niveau
élevé d'endettement et, éventuellement, de le
réduire est devenu un consensus. Pour se désendetter, le recours
à «l'effet de dénominateur» c'est à dire la
marginalisation de la dette par rapport à la production totale, visant
à diminuer progressivement le ratio grâce à la croissance,
est apparu comme la stratégie viable pour nombre de pays. Cette
stratégie est à la différence des autres stratégies
de désendettement que nous avons abordées, une politique
basée sur des réformes budgétaires structurelles. Cette
démarche que nous appelons de politique d'austérité
budgétaire comme instrument de désendettement, apparaît
à certains égards comme la principale politique viable pour un
pays de sortir de la dette. Avant de déduire les enseignements pour les
pays de l'UEMOA de cette stratégie qui consiste à stabiliser
l'encours de la dette pour obtenir une baisse progressive du ratio Dette/PIB,
à titre illustratif, nous présentons ce qui suit quelques
expériences réussies servant d'exemple en la matière.
I. Les politiques de réduction du déficit
structurel
Plusieurs exemples réussis sont riches
d'enseignements en matière de stratégie de désendettement
public par réduction du déficit structurel. Nous analyserons, en
particulier, le cas du Canada, de l'Espagne, de la Suède. Une
synthèse de ces enseignements nous permettra d'illustrer les
caractéristiques essentielles d'une consolidation budgétaire
réussie.
Depuis le milieu des années quatre-vingt pour les premiers
d'entre eux et le début des années quatre-vingt-dix pour
d'autres, beaucoup de pays se sont engagés dans la voie du
désendettement public en concentrant les réformes sur le
contrôle des soldes publics et, en particulier, des dépenses.
Tableau n° 5 : Exemples de consolidation
budgétaire réussie
Pays
|
Année
pic du ratio de dette
|
Niveau pic ratio de dette (1)
|
Ecart pics ratio de dette et 2005
|
Pic ratio de
dépenses
|
Niveau pic ratio de dépenses
|
Ecart pics ratio de dépenses et 2005
|
Année de déficit maximum
|
Niveau de déficit maximum
|
Solde public en 2005
|
Début
ajustement
|
Belgique
|
1993
|
140,7
|
42,4
|
1983
|
62,0
|
11,9
|
1981
|
- 15,3
|
- 0,1
|
1983
|
Canada
|
1995
|
100,8
|
31,5
|
1992
|
53,3
|
14
|
1992
|
- 9,1
|
1,7
|
1993
|
Espagne
|
1996
|
75,6
|
25,2
|
1993
|
48,6
|
10,4
|
1993
|
- 6,9
|
1,1
|
1994
|
Suède
|
1996
|
84,4
|
25,1
|
1993
|
72,4
|
16,0
|
1993
|
- 11,3
|
2,7
|
1994
|
Finlande
|
1996
|
66,0
|
17,4
|
1993
|
63,6
|
12,8
|
1993
|
- 7,2
|
2,4
|
1993
|
(1) : Les données utilisées dans ce tableau
sont celles de l'OCDE. La dette publique brute, ici présentée,
correspond au total des engagements financiers des administrations publiques.
Elle ne comprend que la dette certaine et n'intègre pas les engagements
implicites (retraite, etc.) et conditionnels (garanties données par
l'administration). Elle est évaluée en valeur de marché au
sens de la comptabilité nationale et non en valeur nominale comme la
dette au sens de Maastricht.
Remarque : les chiffres contenus dans ce
tableau sont en pourcentage du PIB, les rubriques Ecart pics ratio de (...) et
2005, signifient l'écart entre le niveau maximal atteint et le niveau de
2005 et traduisent le niveau de baisse en point de l'indicateur
concerné.
Source : OCDE, perspectives économiques n°79, juin
2006 pour les données chiffrées.
1- L'exemple Canadien : audit exhaustif des dépenses
publiques
Au cours de la récession de 1982-84, les
dépenses publiques ont augmenté à un rythme
accéléré, les recettes ont baissé et le
déficit a connu un niveau important atteignant 6,8 % du PIB en 1984.
Face à ce dérapage, l'élimination du déficit a
constitué un objectif que les gouvernements canadiens successifs se sont
fixés depuis le début des années 1980.
Au début des années quatre-vingt-dix, le Canada
connaît à nouveau une crise profonde qui a fait apparaître
de façon évidente le déséquilibre budgétaire
resté latent jusque-là. La dette totale a dépassé
100 % du PIB en 1995, dont les trois quarts imputables aux finances
fédérales. La structure et le niveau des dépenses
publiques se sont révélés insoutenables dans un contexte
de faible croissance et de taux d'intérêt élevés.
A la suite d'une campagne de communication comme ce fût le
cas en France avec le rapport Pébereau sur la dette, la population
canadienne et les gouvernements des provinces ont pris conscience du lien entre
la persistance de déficits élevés, le niveau des taux
d'intérêt et l'augmentation de la pression fiscale
inévitable dans un futur proche. Dès lors, une réforme
profonde a été mise en oeuvre dès 1993, par application du
Fiscal Spending Control Act de 1992 (la loi sur le contrôle des
dépenses). Cette réforme s'est articulée autour de trois
principaux axes stratégiques :
- Se doter d'un objectif de déficit public de moyen terme
raisonnable, ce qui est jugé plus efficace qu'annoncer le retour
à un déficit nul à un horizon plus éloigné.
Cet objectif est associé à l'engagement ferme de respecter des
cibles intermédiaires de déficit.
- Afin de pouvoir procéder à des coupes drastiques
dans les dépenses publiques et respecter la limite de progression
nominale, un vaste processus d'audit a permis de sélectionner celles qui
s'avèrent efficaces, d'identifier les secteurs où des gains de
productivité sont possibles et ceux où les dépenses ne
sont pas justifiées. L'analyse exhaustive a pris six mois au terme
desquels une baisse des dépenses d'environ 20 % à partir des
niveaux de 1994 a été réalisée en trois ans. Six
critères ont permis de sélectionner les dépenses publiques
autorisées : l'intérêt public du programme de
dépenses, son efficacité, la contribution du programme à
l'exercice des missions régaliennes de l'État, la capacité
des provinces à l'assumer en lieu et place de l'État, la
capacité des contribuables à le financer et la
disponibilité de services privés alternatifs.
Etude sur « Les stratégies de
désendettement du secteur public : enjeux économiques et
enseignements des expériences étrangères » parue
dans le Bulletin de la Banque de France N° 154, Octobre 2006.
- Recueillir l'adhésion à la réforme de tous
les acteurs économiques grâce à la réalisation de
consultations de grande ampleur dans le secteur public avant d'établir
le budget. Les coupes budgétaires ont concerné toutes les
catégories de dépenses et représentent environ 4 points de
PIB d'économies entre 1993 et 1995.
Elles se sont particulièrement concentrées sur les
transferts aux provinces et les prestations sociales, notamment les allocations
chômage et l'assurance maladie. Le nombre de fonctionnaire a
diminué de 15 %, soit 60 000 agents partis en retraite anticipée,
licenciés (avec forte indemnité) ou reclassés dans le
secteur privé. Les salaires publics ont été gelés
pendant trois ans, et certaines subventions aux entreprises ont
été fortement réduites. Pour certains ministères
(industrie, transports), il s'agit d'une diminution en termes absolus des
dépenses et pas seulement d'un ralentissement de croissance.
Par ailleurs, le marché du travail a été
réformé pour accroître la flexibilité et
l'accès à la formation. Le régime d'assurance
chômage a également été modifié afin de
favoriser l'encouragement au travail.
Enfin, le Canada a profité de la dévaluation de sa
monnaie face au dollar américain et du dynamisme du PIB des
États-Unis. La progression de son commerce extérieur a, dans un
premier temps, contrebalancé l'impact de l'ajustement budgétaire
sur la croissance, puis dynamisé celle-ci qui est demeurée
très élevée à la fin des années
quatre-vingt-dix. Outre l'action menée sur les dépenses
publiques, un des facteurs clé de la réussite canadienne semble
être la forte adhésion des agents privés à cette
démarche.
Or, ceci n'a été possible que parce que les actions
mises en oeuvre ont semblé relativement justifiées et
équitables (grâce à l'audit) et conformes à la
restauration à moyen terme de la croissance et de l'emploi. Si aucun
ajustement des dépenses primaires n'avait été entrepris,
le ratio de dette canadien, toutes choses étant égales par
ailleurs, aurait atteint aujourd'hui près de 140 %.
En réalité, le retour à des finances
publiques saines, dans un contexte de baisse des taux d'intérêt, a
permis de ramener le ratio de dette totale de près de 100 % en 1993
à environ 70 % du PIB en 2005. Le Canada est souvent
présenté comme le meilleur exemple d'un ajustement
budgétaire réussi, grâce à la combinaison d'une
totale refonte des dépenses publiques et d'une réforme profonde
des institutions budgétaires accompagnée d'autres réformes
structurelles.
Les enseignements qu'on peut tirer de la conception et de la mise
en oeuvre de la stratégie canadienne du désendettement sont entre
autres :
- un audit exhaustif des dépenses publiques, permettant de
réaliser des économies et d'orienter celles-ci vers des objectifs
bien définis ;
- fixer des objectifs de court terme (ramener le déficit
à 3 % du PIB en trois ans), a constitué un moyen efficace pour
progresser vers la réalisation des objectifs finals ;
- le choix de priorités en matière de
réduction de dépenses semble préférable à
une approche de réduction générale qui est plus radicale,
mais peut entraîner des réductions dans les programmes à
forte priorité comme dans ceux à faible priorité.
La combinaison, essentiellement, de ces différents
instruments, a permit au Canada de baisser de manière continue son
déficit, ce qui permet de stabiliser la dette. La dette se stabilisant
et la croissance du PIB faisant, le ratio de l'encours de la dette en
pourcentage du PIB diminue et tend vers zéro.
La réforme canadienne est donc riche d'enseignements et
peut inspirer les pays confrontés à une situation
budgétaire fortement déséquilibrée comme les pays
de l'UEMOA. Toutefois, les spécificités du pays (État
fédéral, économie développée, politiques
monétaire et de change autonomes...) diffèrent des
caractéristiques des pays de l'UEMOA.
2- L'exemple espagnol
Depuis les années soixante-dix, l'Espagne a connu une
croissance prononcée de ses dépenses publiques, notamment en
raison de la montée en puissance des systèmes de protection
sociale. En dépit de la hausse de la pression fiscale, accentuée
par une première tentative de consolidation budgétaire dans les
années quatre-vingt, des déficits importants sont apparus. Mais
le financement de la dette par monétisation avait réussi à
empêcher que celle-ci n'explose jusqu'à la grave récession
du début des années quatre-vingt-dix.
L'Espagne a alors été confrontée de nouveau
à une dégradation insoutenable de ses finances publiques. C'est
alors qu'a été décidé un assainissement
budgétaire d'ampleur, à la fois pour initier un cercle vertueux
associant forte croissance économique et inflation
modérée, et pour parvenir à satisfaire aux critères
de Maastricht en 1997. Les caractéristiques de la réforme de 1994
ont été déterminées afin de maximiser la
crédibilité de l'ajustement (composition des dépenses,
ancrage du retour à la discipline budgétaire dans un cadre
institutionnel solide, lutte contre la fraude fiscale) et permettre d'en tirer
rapidement les fruits en termes de croissance et d'emploi. Les efforts
budgétaires réalisés, quoique très significatifs (3
points de PIB en deux ans), ont bénéficié dès le
début du soutien d'une croissance très forte de
l'activité, largement supérieure à celle de la zone euro
pourtant en phase de reprise, et du bénéfice tiré de la
baisse des taux d'intérêt nominaux. Ainsi, la réduction
massive des dépenses courantes (transferts sociaux en particulier les
allocations chômage et la réforme du financement de la
santé en liant les augmentations de dépenses de santé
à la croissance économique et en retenant comme critère
d'affectation des ressources la proportion de la population assurée,
masse salariale publique, subventions) a pu être réalisée
rapidement sans induire un coût de court terme trop prononcé sur
la croissance.
Parallèlement, d'autres réformes structurelles ont
été mises en oeuvre : réforme des retraites, de la
fiscalité des sociétés (1995) et des ménages (1998)
afin de simplifier le système fiscal et de le rendre plus incitatif tout
en augmentant les élasticités budgétaires, réforme
du marché du travail (libéralisation et flexibilisation accrues
notamment en 1997). Enfin, l'Espagne a bénéficié, au
début du processus de consolidation budgétaire, d'un afflux de
recettes exceptionnelles liées à la réforme du secteur
public (privatisations d'entreprises du secteur de l'énergie et des
télécommunications) et aux importants versements des fonds
structurels européens.
En l'absence d'ajustement des dépenses primaires à
partir de 1994, le ratio de dette espagnol serait aujourd'hui proche de 110 %
du PIB selon les estimations de l'OCDE. Cependant, la réduction
effective du ratio de dette, ramené de 65 % en 1993 à environ 50
% du PIB en 2005, aurait pu être plus forte si une partie des gains
n'avaient pas été orientée vers la diminution des recettes
fiscales après 1997, en lien notamment avec la décentralisation
massive des décisions fiscales et budgétaires. La Loi de
stabilité budgétaire votée en 2003 vise à
garantir institutionnellement le prolongement de l'effort et à
éviter, comme cela s'est produit au Canada, de voir déraper les
finances publiques locales.
Ce qu'on peut retenir de l'exemple espagnol pouvant inspirer les
pays de l'UEMOA, c'est que la politique budgétaire consistant à
réduire le niveau d'endettement, se justifiait avant tout par le respect
des objectifs de réduction du déficit fixés dans le
programme de convergence pour l'union monétaire européenne. Ce
cadre quasiment institutionnel de contrainte dans un but de respect aux
engagements pris comme à ceux du traité de Maastricht pour
l'Espagne, est analogue pour les pays de l'UEMOA qui partagent la même
monnaie, doivent par principe, comme l'Espagne, respecter leurs critères
de convergence notamment budgétaire définis en commun accord (un
déficit public inférieur ou égal à 3 % du PIB et le
ratio de l'encours de la dette publique inférieur ou égal 60 % du
PIB). Par ailleurs, l'existence même d'une contrainte de nature
communautaire peut permettre à certains niveaux d'initier des
réformes structurelles de manière durable.
3- L'exemple suédois :
Au début des années quatre-vingt-dix, la
Suède s'est trouvée confrontée simultanément
à une grave crise bancaire et à une forte récession
économique. Cette situation a coïncidé avec la croissance
des déficits publics, du ratio de dette et du chômage. En 1994, le
gouvernement suédois a décidé de réagir en
engageant un processus d'assainissement massif renforcé par la
réforme des procédures et institutions budgétaires.
L'ajustement budgétaire s'est concentré, comme ce
fut le cas dans d'autres pays, sur la réduction des dépenses (une
baisse de 16 points du PIB depuis 1994), en priorité les transferts
sociaux, les subventions et la consommation publique.
Dans le même temps, la pression fiscale est restée
forte, tandis qu'un programme de privatisation du secteur des
télécommunications contribuait à réduire la dette
par ses recettes affectées.
Cependant, la pérennité de l'effort a, avant tout,
été garantie par la transformation définitive des
institutions et des procédures budgétaires. Le but était
de réduire la taille du secteur public et d'en accroître
l'efficacité et le contrôle. Ainsi, celui-ci a été
réformé afin d'être constitué d'un petit nombre de
ministères (treize) et de 300 agences publiques ou mixtes qui regroupent
99 % des fonctionnaires.
En ce qui concerne les procédures budgétaires, la
réforme permet d'imposer des plafonds de dépenses primaires
nominales (hors pensions) pour trois ans glissants sur vingt-sept
catégories de dépenses.
La fixation est dite « top-down »,
c'est-à-dire que le budget global est établi, il sera
ensuite réparti entre les différents programmes, avec
l'impossibilité de dépasser les limites imposées.
Tout programme de dépenses supplémentaires doit
être financé par des coupes dans d'autres domaines.
De plus, les plafonds de dépenses ont été
scindés en 1997 pour séparer les objectifs de l'État
central, des collectivités locales et des systèmes de
retraite.
La priorité est donnée aux dépenses
productives (éducation, certaines prestations de santé, services
liés à l'enfance) plutôt qu'aux dépenses dites
« palliatives » (transferts sociaux). Le processus
budgétaire aboutissant au vote de la loi de finances a été
simplifié et implique davantage le Parlement, y compris sur les
objectifs triennaux. Enfin, la discipline budgétaire s'inscrit dans le
cadre d'un objectif de moyen terme de surplus budgétaire de 2 % du PIB.
Au total, la stratégie suédoise, favorisée par le retour
rapide d'une croissance dynamique du PIB via l'essor des exportations,
a permis de ramener le ratio de dette de près de 85 % du PIB en 1996
à près de 60 % en 2005. De plus, la sensibilité du budget
à l'activité économique, autrefois très
marquée, a été réduite ce qui limite les erreurs de
prévision et stabilise les finances publiques.
L'expérience suédoise basée sur la
réforme institutionnelle et simplification des procédures
budgétaires, suppose l'existence d'un contrôle efficace pour
limiter les abus dans la souplesse de gestion des crédits ce qui pour le
cas des pays pauvres en général et en particulier des pays de
l'UEMOA n'est pas le cas. Au demeurant, cette stratégie de
rationalisation peut inspirer, dans la mesure où elle permet comme dans
de nombreux exemples réussis de recentrer la puissance publique sur des
objectifs clairs.
II Les caractéristiques nécessaires d'un
ajustement budgétaire réussi
En dépit de spécificités nationales
complexes et diverses, l'analyse des principales caractéristiques des
réformes budgétaires ayant conduit des pays à
réduire leur taux d'endettement permet de dégager plusieurs
points communs dont la présence semble nécessaire à la
réussite du projet.
1- Éléments de contexte :
- Les déséquilibres budgétaires durables
sont généralement d'origine structurelle et découlent
essentiellement de l'impossibilité d'infléchir facilement les
tendances croissantes et incontrôlées des dépenses
publiques. La solution peut se trouver dans des réponses structurelles
et des améliorations permanentes des finances publiques et non dans une
réaction conjoncturelle inadaptée.
- Un ajustement budgétaire sera d'autant moins
coûteux d'un point de vue social et politique qu'il sera entrepris dans
un contexte macroéconomique favorable. Ainsi, une période
marquée par une reprise de la croissance et de faible taux
d'intérêt peut être un moment favorable pour réaliser
les réformes structurelles nécessaires.
2- Contenu et mise en oeuvre de l'ajustement
- Les expériences réussies se sont appuyées
sur une maîtrise durable de la dépense publique plutôt que
sur la hausse des prélèvements obligatoires.
- La baisse des dépenses publiques s'est, la plupart du
temps, concentrée sur les transferts sociaux, les subventions et la
masse salariale publique.
Les gouvernements ont du sélectionner les dépenses
prioritaires, qui peuvent progresser, et restreindre les autres. Les
réformes se sont accompagnées de la recherche de gains de
productivité dans le secteur public, de l'amélioration de
l'organisation des institutions (création d'agences
spécialisées, transferts de personnel, modes de
rémunération liés à la performance, davantage de
contrôle de la réalisation des objectifs, nouveaux modes de
recrutement, déplacement de la frontière entre les
dépenses publiques et privées etc.).
- La plupart des programmes de consolidation budgétaire
ont cherché à répartir le coût de l'ajustement sur
l'ensemble des agents privés afin d'obtenir l'adhésion la plus
large au projet.
- L'ajustement budgétaire s'est la plupart du temps
inscrit dans une logique de rupture. La réforme a été
globale, de taille importante et a été mise en oeuvre d'un seul
coup afin de montrer la cohérence d'ensemble du projet, de gagner en
crédibilité et d'inciter les agents privés à
anticiper une baisse future de la pression fiscale.
- Les consolidations réussies ont fait l'objet d'un
programme précis et d'engagements politiques fermes incluant des
objectifs budgétaires de court et/ou moyen terme, des cibles ou des
plafonds de dépenses, la définition de règles de
comportement rigoureuses notamment en ce qui concerne l'allocation de recettes
exceptionnelles ou inattendues, une implication plus forte du Parlement et une
responsabilisation accrue des gestionnaires publics.
- Enfin, ces réorientations ont cherché à
rendre symétrique le jeu des stabilisateurs automatiques en maintenant
le niveau des prélèvements obligatoires et en récusant la
création de nouvelles dépenses non financées en phase
ascendante du cycle économique tant que les finances publiques ne sont
pas revenues sur une trajectoire soutenable.
3- Accompagnement et communication autour de l'ajustement
budgétaire
- Les gouvernements ont cherché à rendre les
processus d'ajustement aussi transparents et compréhensibles que
possible afin d'éviter des réactions indésirables des
marchés, un manque de crédibilité ou de soutien de la
population.
- Les réformes doivent être encadrées par un
cadre légal qui les rend plus robustes aux pressions de groupes sociaux
qui refusent de perdre des avantages acquis, aux changements de gouvernement ou
aux clivages politiques.
- Les ajustements budgétaires ont été
accompagnés d'autres réformes structurelles, principalement dans
le but d'augmenter la flexibilisation du marché du travail, de
réduire les distorsions et la complexité de la fiscalité
et de modifier le système des retraites.
4- Ajustement budgétaire et désendettement des
pays de la zone UEMOA
A l'issue de la crise économique de années 1982
entrainant des difficultés de paiement du service de la dette,
l'ensemble des économies des pays de la zone ont été sous
ajustement structurel en vu de rééquilibrer les grands
indicateurs macroéconomiques et dont ceux concernant l'endettement
public. Si ces mesures ont permis aux pays en question de continuer le
remboursement, elles n'ont pas permis d'adopter une vraie stratégie de
désendettement consistant à une réforme du cadre
budgétaire permettant de réduire le déficit structurel.
Les coupes budgétaires ont eu lieu dans la majorité des cas dans
les programmes d'investissement plutôt que dans les dépenses de
fonctionnement. A plusieurs égards, les quelques expériences de
réduction du déficit structurel doit inspirer les pays souhaitant
se désendetter et favoriser la croissance pour permettre de lutter
contre la pauvreté. Un audit des dépenses publiques
conjugué à une réforme fiscale permettant d'élargir
l'assiette fiscale (effet, plusieurs activités économiques
échappent à l'impôt dans les pays de l'Union), peut
permettre de réduire de manière durable le déficit public
source essentielle de dette.
Chapitre VIII : Le désendettement dans le
cadre de l'initiative PPTE et le
recours à une
législation
Jusqu'à présent, nous avons
évoqué dans les précédents chapitres les grandes
stratégies, à notre vue, pouvant être utilisées par
les pays endettés pour sortir de la crise de l'endettement. Dans ce
chapitre, nous nous pencherons sur une démarche qui n'est pas
initiée par les pays endettés, mais d'initiative des
créanciers, qui vise à alléger le poids de la dette de la
frange très pauvres des pays en développement. Cette initiative
qui permettra à terme de réduire de manière significative
le poids de la dette extérieure, doit être accompagné par
des mesures visant à prévenir contre un nouveau
surendettement.
I- Initiative en faveur des pays pauvres très
endettés
L'initiative en faveur des pays pauvres très
endettés dénommée Initiative PPTE, est une mesure des
créanciers visant à réduire l'encours de la dette des pays
pauvres et à le rendre soutenable. Conditionnée par l'application
d'un certain nombre de mesures d'ajustement, l'initiative PPTE n'en demeure pas
moins une mesure dont les pays pauvres et notamment ceux de l'Union
économique et monétaire ouest africaine, peuvent profiter pour
redresser leurs finances publiques et sortir de la spirale de la dette.
Dans ce qui suit, après avoir rappelé le contexte
historique, le contenu et les modalités d'application de cette
initiative des créanciers de réduire l'encours de la dette des
pays pauvres très endettés, nous nous appliquerons de proposer
des mesures qui peuvent permettre d'instaurer un garde-fou contre la
répétition des erreurs du passé.
1- Contexte historique
Initiée en 1996 à l'occasion du sommet du G7 de
Lyon, l'initiative PPTE est née de l'échec des différentes
stratégies autrefois utilisées pour rendre soutenable
l'endettement des pays pauvres.
Pour atteindre un niveau de dette soutenable, l'Initiative PPTE
envisage une réduction de la dette envers les créanciers
multilatéraux, ce qui rompt avec les mécanismes dits
traditionnels, où les annulations ne concernaient que les
créances bilatérales. Devant la situation de crise, les
organisations de Breton Woods ont finis par réagir, après avoir
longtemps fait accepter l'idée que leurs créances devaient rester
indiscutables. Fin 1996, une initiative ouvrant la voie à la
réduction de la dette multilatérale a été mis en
oeuvre (Initiative de réduction de la dette des pays pauvres très
endettés, PPTE). La procédure, fort complexe, repose sur
l'idée suivante : les pays qui présentent les
caractéristiques d'un endettement excessif par rapport à leurs
ressources se verront octroyer de la part du FMI et de la Banque mondiale une
réduction de dette telle qu'elle ramène leur endettement au
niveau jugé « soutenable ». Cette réduction
n'entre définitivement en jeu qu'après une période
probatoire d'une durée initialement fixée à six ans,
pendant laquelle les bénéficiaires potentiels devront mettre en
oeuvre des « efforts d'ajustement redoublés ».
Fin 1998, l'initiative PPTE avait démontré sa
lenteur et ses limitations : sept pays seulement avaient été
sélectionnés et les réductions de dette prévues
restaient souvent symboliques. Ceci a conduit le G7 à adopter, en juin
1999, sous la pression des organisations humanitaires et religieuses
regroupées dans la coalition Jubilé 2000, une résolution
qui ouvre la voie à un traitement rapide et plus généreux
de la dette des PPTE. Les seuils à partir desquels la dette est
jugée insoutenable ont été réduits (150% au lieu de
200 à 250% par exemple pour le ratio valeur actuelle de la dette
extérieure/exportations des biens et services).
Désormais, il ne s'agit plus de proposer uniquement des
rééchelonnements, mais de réduire la dette afin qu'elle
atteigne des niveaux soutenables (mesurés par le ratio « valeur
actuelle nette de la dette/exportations »).
Ainsi, au coeur de l'initiative PPTE se trouve donc la notion de
soutenabilité de la dette : il s'agit de démontrer sous
quelles conditions les pays concernés peuvent être mis en
condition de rembourser leurs dettes.
De plus, alors que les réductions
précédemment appliquées ne concernaient que la dette
officielle bilatérale ou la dette privée, désormais, afin
que les pays concernés par l'Initiative PPTE aient une dette soutenable,
il est envisagé de réduire la dette envers les institutions
multilatérales. La dette extérieure totale des quarante et un
PPTE représentait 201 milliards de dollars (en nominal) en 1997,
c'est-à-dire en moyenne 125 pour cent du PNB, soit 157 milliards de
dollars en VAN.
2- Critères d'éligibilité
arrêts par des créanciers
Pour être éligibles à l'Initiative PPTE, les
pays doivent remplir différents critères :
- être éligible pour recevoir une assistance
à titre concessionnel du FMI (FASR) ou de la Banque mondiale (AID) ;
- avoir entrepris des programmes de réformes avec l'appui
du FMI et de la Banque mondiale avant septembre 1998 (clause d'extinction).
Afin de prendre en compte les pays africains qui sortent de conflits, le
délai initial pour entreprendre des réformes avec les bailleurs
de fonds a été étendu jusqu'à la fin de
l'année 2000 ;
- avoir une dette insoutenable après l'application des
mécanismes traditionnels d'allégement (c'est-à-dire,
après l'application des termes de Naples²).
La valeur actuelle (ou actualisée) nette (VAN) de la
dette est la somme des futures obligations au titre du service de la dette
(intérêt et principal) sur le stock de dette existant,
actualisées au taux du marché.
Cette mesure prend en compte le degré de
concessionnalité de la dette ; par exemple, si le taux
d'intérêt appliqué est plus faible que le taux du
marché, la VAN de la dette est inférieure à sa valeur
faciale.
² La réduction du service de la dette est
plafonnée à 67%. Les périodes de remboursement sont
étalées jusqu'à 23 ans. Ne sont éligibles à
ce traitement que les pays les plus pauvres, c'est-à-dire ceux qui ont
un PNB par tête inférieur à 500 dollars ou dont le ratio
dette / exportation dépasse 350%.
La soutenabilité de la dette est définie comme la
capacité d'un pays à faire face à ses obligations sans
rééchelonnement ni accumulation d'arriérés dans le
futur. Concrètement, pour les PPTE, la soutenabilité de la dette
est définie au cas par cas. La dette d'un pays est
considérée comme soutenable si :
· le ratio « valeur actuelle nette de la
dette/exportations de biens et de services » se situait entre 200 et 250
pour cent avant d'être réduit à 150% ;
· le ratio « service de la dette/exportations
de biens et de services » se situe entre 20 et 25 pour cent ;
· pour les pays très ouverts aux
échanges, un ratio « valeur actuelle nette de la dette/exportations
de biens et de services » inférieur à 200 pour cent pourra
être recommandé au point d'achèvement. Pour cela, le pays
doit satisfaire deux critères au point de décision : avoir un
ratio « exportations de biens et de services/PIB » d'au moins 40 pour
cent, et faire des efforts fiscaux, c'est-à-dire avoir un ratio «
recettes fiscales/PIB » d'au moins 20 pour cent.
3- Les conditionnalités
Pour bénéficier de l'initiative PPTE, l'application
des Programmes d'ajustement structurel (PAS) reste de rigueur pendant au moins
3 ans. Une nouvelle conditionnalité sur l'utilisation des fonds viennent
s'ajouter aux PAS. On évalue le délai supplémentaire
à 1 an.
Les annulations de dette envisagée dans le cadre de
l'initiative PPTE sont conditionnées à l'application de
Programmes d'Ajustement Structurel (PAS) pendant plusieurs années.
3.1- Les délais de mise en oeuvre des
annulations
Point de décision, point d'achèvement :
Le point de décision intervient après une
période d'environ 3 ans (le délai est devenu « flottant
») d'ajustement structurel. A cette date, le FMI et la Banque mondiale se
prononcent sur l'éligibilité ou non du pays.
Le point d'achèvement est la date à laquelle le
pays reçoit les allégements de dette. La période entre le
point de décision et le point d'achèvement, "période
transitoire", initialement fixée à 3 ans est devenue flottante :
le point d'achèvement intervient lorsque le pays a satisfait les
conditions d'ajustement demandées.
Le risque existe que les conditions de plus en plus importantes
exigées par les Institutions financières internationales (IFI),
retardent le processus, la responsabilité de ce retard retombant sur le
pays sous ajustement plutôt qu'aux institutions qui ont
élaboré les demande.
3.2- Modification de la
conditionnalité
Les critiques à l'égard des ajustements
macro-économiques demandés et la pression des ONG en faveur de la
lutte contre la pauvreté, ont poussé les IFI à envisager
une modification des conditions demandées, intégrant notamment la
notion de lutte contre la pauvreté et celle de bonne gouvernance. Ainsi,
les Facilités d'ajustement structurel renforcé (FASR, ESAF en
anglais) sont devenues des "Facilités pour la réduction de la
pauvreté et la croissance" (FRPC, PRGF en anglais). Au centre de cette
FRPC se trouve un nouveau document le CSLP, « cadre stratégique de
lutte contre la pauvreté » (PRSP en anglais), qui sera
élaboré par le pays débiteur comme cadre pour
l'utilisation des fonds dégagés (et aussi de l'aide
internationale à venir). Ce nouveau document s'insère dans une
stratégie "d'appropriation" par le pays débiteur des
réformes exigées. En dehors du changement de nom, ce nouveau
programme d'ajustement implique une coopération plus étroite
entre le FMI, la Banque mondiale et le pays débiteur. Cependant le
principe de l'ajustement structurel n'est pas remis en cause et celui-ci reste
à la base des conditions exigées, même si les IFI entendent
les assortir de moyen accrus pour compenser leurs effets négatifs pour
les plus pauvres.
4- Le déroulement de l'Initiative
PPTE
L'application de l'Initiative PPTE se déroule en deux
phases, chacune suivie par un point (décision et achèvement) au
cours desquels une évaluation de la soutenabilité de la dette est
effectuée ; des mesures de réduction sont alors appliquées
si nécessaire. Chaque phase est censée durer trois ans, mais, au
cas par cas, des aménagements peuvent être apportés.
Première phase
Le pays doit appliquer pendant trois ans des programmes
d'ajustement structurel avec le soutien de la Banque mondiale et du FMI. Il
reçoit une assistance à titre concessionnel des créanciers
multilatéraux. Les créanciers bilatéraux du Club de Paris
accordent une réduction du service de la dette basée sur les
termes de Naples, et les créanciers bilatéraux non membres du
Club de Paris doivent accorder des réductions équivalentes.
Point de décision
Il s'agit d'évaluer la soutenabilité de la dette
et, en particulier, de déterminer si une nouvelle opération de
réduction de dette suivant les termes de Naples portant sur l'encours de
la part des créanciers du Club de Paris, complétée par une
action au moins aussi favorable de la part des créanciers
bilatéraux non membres du Club de Paris, est suffisante pour rendre la
dette soutenable. Trois situations sont envisageables :
- si la dette est soutenable après les réductions
de dette, le pays n'est pas éligible ;
- si la dette du pays reste insoutenable malgré
l'application des termes de Naples, le pays entre dans la deuxième
phase. Les objectifs à atteindre en termes de ratio de
soutenabilité au point d'achèvement sont fixés à ce
stade ;
- si un doute existe quant à la soutenabilité de la
dette, des réductions supplémentaires sont appliquées.
Deuxième phase, ou période
intermédiaire
Lorsqu'un pays est éligible, il doit mettre en place des
programmes de réformes économiques pendant trois ans. Toutefois,
cette période peut être plus courte si, grâce aux
réformes, les performances économiques s'améliorent
rapidement.
Au cours de cette deuxième phase, les créanciers
fournissent des concours sous différentes formes. Par exemple, les
créanciers bilatéraux ont apporté une réduction de
80 pour cent de la VAN des flux de la dette à la Côte d'Ivoire et
au Mozambique car, contrairement aux autres pays éligibles à
l'Initiative PPTE, ils n'avaient pas bénéficié de
réductions importantes de la part du Club de Paris sur l'encours de leur
dette. Cette mesure permet notamment de réduire le service de la dette
et de remplir le plus rapidement l'objectif de ratio.
Point d'achèvement
Pour atteindre le ratio objectif « VAN de la
dette/exportations » fixé lors du point de décision, les
créanciers bilatéraux et multilatéraux réduisent la
VAN de leur dette. Les créanciers membres du Club de Paris proposent une
réduction de la VAN du stock de la dette de 80 pour cent. Les autres
créanciers commerciaux et bilatéraux doivent entreprendre des
actions au moins équivalentes. Le FMI (via les fonds de la
FASR), la Banque mondiale (via le Fonds fiduciaire PPTE) et les autres
institutions multilatérales procèdent également à
des réductions de la VAN de leurs créances, de manière
à assurer un traitement global et équitable pour tous les
créanciers impliqués.
Facilité d'ajustement structure renforcé, ligne
de crédit consacré à refinancer des Etats en grave
difficulté économique.
Si un pays affiche des retards dans la satisfaction des
critères de performance, son point d'achèvement est
reporté. En revanche, si les performances concernant le ratio « VAN
de la dette/exportations » sont différentes de celles
prévues, mais se situent dans une fourchette de +/- 10 pour cent de
l'objectif fixé, le volume de l'aide fixé au point de
décision ne change pas.
Devant cette démarche plusieurs critiques ont
été formulées :
La période durant laquelle le pays doit appliquer des
mesures avant de pouvoir bénéficier d'une réduction de
dette est souvent jugée trop longue.
Les institutions multilatérales notent qu'il est
indispensable que le pays entreprenne des réformes pour que les
réductions de dette soient efficaces.
Par ailleurs, l'ensemble des mesures que le pays doit appliquer
est vaste et nécessite du temps. Enfin, la période de
six ans peut être réduite en fonction des performances
économiques des pays bénéficiaires de l'Initiative
PPTE.
La définition de la soutenabilité de la dette
serait trop restrictive. Le FMI souligne que si la soutenabilité de
la dette est définie par rapport aux exportations, il a
été introduit un autre critère en fonction des recettes
budgétaires pour les pays très ouverts.
Le critère de 200-250 pour cent pour le ratio «
VAN de la dette/exportations » et celui de 20-25 pour cent pour le ratio
du service de la dette semblent trop élevés. Le FMI note
que les objectifs fixés pour chaque pays sont situés dans le
bas de la fourchette et que pour les pays très ouverts, le
ratio objectif « VAN de la dette/exportations » est inférieur
à 200 pour cent.
Enfin, les mesures durant la période
intermédiaire semblent trop légères. Face à
cette critique, les institutions multilatérales rappellent qu'au cours
de la période de transition, des prêts FASR et des concours AID
sont accordés aux pays bénéficiaires, ainsi que des
réductions de dette bilatérale.
5- L'apport global de l'Initiative PPTE
L'Initiative PPTE permettra, selon les estimations du FMI, de
réduire la dette des 26 pays éligibles de 12.5 milliards de
dollars US en VAN de 1998 au point d'achèvement.
Après Toronto en 1988, Londres en 1991, Naples en 1994 et
Lyon en 1996, c'est le sommet de Cologne en 1999 qui fera
référence en matière d'annulation de dette.
Lors de ce sommet, les pays du G7 se sont mis d'accord pour
accorder une réduction aux quarante et un PPTE de 70 milliards de
dollars US en nominal (sur un endettement total de 180 milliards de dollars si
l'on exclut le Liberia, la Somalie et le Soudan, comme c'est le cas dans la
plupart des estimations).
Sur la réduction consentie, 50 milliards correspondent
à la réduction de la dette des bilatéraux et des
multilatéraux au sein de l'Initiative PPTE, et 20 milliards
correspondent à l'annulation de la dette au titre de l'aide publique au
développement des pays du G7 .
La première version de l'initiative PPTE s'est rapidement
avérée très insuffisante puisque sur les quarante et un
pays initialement sélectionnés par la Banque mondiale, seuls sept
étaient finalement concernés, pour des montants très
faibles et sous des conditions jugées par la suite inadaptées.
Après avoir décrit en quoi consiste l'Initiative PPTE
renforcée, nous chiffrerons l'ampleur des premières
réductions consenties dans l'ensemble des pays de l'Union.
5.1- L'Initiative PPTE
renforcée
Fin 1998, l'initiative PPTE avait démontré sa
lenteur et ses limitations : sept pays seulement avaient été
sélectionnés et les réductions de dette prévues
restaient souvent symboliques. Ceci a conduit le G7 à adopter, en juin
1999- sous la pression des organisations humanitaires et religieuses
regroupés dans la coalition Jubilé 2000-une résolution qui
ouvre la voie à un traitement rapide et plus généreux de
la dette des PPTE. Les seuils à partir desquels la dette est
jugée insoutenable ont été réduits (150% au lieu de
200 à 250% par exemple pour le ratio valeur actuelle de la dette
extérieure/exportations des biens et services.
L'Initiative PPTE a ainsi été modifiée, les
ratios ont été assouplis, le pourcentage de réduction a
été augmenté, et la période nécessaire pour
pouvoir bénéficier d'une réduction de dette a
été réduite.
Assouplissement des ratios pris en considération pour
déterminer la soutenabilité de la dette d'un pays :
- le ratio cible « VAN/exportations », auparavant
situé dans une fourchette de 200- 250 pour cent, a été
abaissé à 150 pour cent. Cela permettra à la fois
d'augmenter le volume de l'aide et le nombre de pays admis à
bénéficier de l'initiative. Selon le FMI, cette mesure devrait
coûter sept milliards de dollars de plus (au point de décision, en
VAN de 1998) ;
Le Comité d'aide au développement de l'OCDE
définit l'aide publique au développement comme « l'ensemble
des apports de ressources fournis aux pays en développement et aux
institutions multilatérales par des organismes officiels, y compris les
collectivités locales, ou par leurs agents d'exécution et qui,
considérés au niveau de chaque opération, répondent
aux critères suivants :
- être dépensés dans le but essentiel de
favoriser le développement économique et l'amélioration du
niveau de vie dans les pays en développement ;
- revêtir un caractère de faveur et comporter un
élément de libéralité d'au moins 25 pour cent
».
- pour les pays ouverts, le critère est désormais
d'avoir un ratio « exportations de biens et de services/PIB » de 30
pour cent au lieu de 40 pour cent. Pour que les pays ouverts puissent
bénéficier de l'initiative, le ratio « recettes fiscales/PIB
» doit désormais être égal à 15 pour cent au
lieu de 20 pour cent. Enfin, pour ces pays, le ratio cible « VAN de la
dette/recettes budgétaires » a été abaissé de
280 pour cent à 250 pour cent. Selon le FMI, ces mesures devraient
représenter un coût supplémentaire de trois milliards de
dollars (en VAN de 1998).
Grâce à ces mesures, le nombre de pays remplissant
la condition d'entrée devrait passer de 29 à 36. Les sept
nouveaux pays éligibles sont le Bénin, le Ghana, le Honduras, le
Laos, la République de Centrafrique, le Sénégal et le
Togo.
Augmentation du taux d'annulation des dettes
bilatérales :
- le taux d'annulation de la dette contractée
auprès des créanciers bilatéraux du Club de Paris est
passé de 80 pour cent à plus de 90 pour cent ;
- pour les PPTE non éligibles à l'Initiative, le
taux de réduction désormais appliqué est de 67 pour cent.
Auparavant, selon les termes de Naples, il se situait entre 50 pour cent et 67
pour cent selon les pays.
Mise en place de points d'achèvement flottants :
Désormais, les pays pourront bénéficier des
réductions de dette dès qu'ils appliquent des politiques
économiques appropriées et que leurs performances correspondent
à la trajectoire prévue.
Apport d'une aide au cours de la période
intermédiaire :
Alors qu'il est prévu que les réductions de dette
aient lieu au point d'achèvement, les créanciers
bilatéraux et multilatéraux pourront fournir une assistance au
cours de la période intermédiaire23. Les pays débiteurs
pourront ainsi bénéficier plus rapidement d'une réduction
de dette.
5.2- La réduction de dette obtenue
grâce à l'application de l'Initiative PPTE
et l'initiative PPTE
renforcée
Alors que la réduction engendrée par
l'Initiative PPTE avait été estimée à 12.5
milliards de dollars en VAN de 1998 (9.1 pour cent de la VAN de la dette des
PPTE en 1997), elle a augmenté à la suite des modifications
apportées à l'Initiative PPTE et représente, selon les
estimations de la Banque mondiale et du FMI, 27.4 milliards de dollars en VAN
de 1998 (19.9 pour cent de la VAN de la dette des PPTE en 1997).
L'estimation de la réduction engendrée par la
première version de l'Initiative PPTE est réalisée en
prenant en compte la dette et les exportations pour l'année
précédant le point d'achèvement. En revanche, l'estimation
de la réduction engendrée par l'Initiative PPTE renforcée
est réalisée en prenant en compte la dette et les exportations
pour l'année précédant le point de décision. Ainsi,
lorsque l'on raisonne au point d'achèvement (comme pour la
première version de l'initiative), la réduction estimée
grâce à l'Initiative PPTE renforcée est de 22.3 milliards
de dollars en VAN de 1998 (c'est-à-dire 16.2 pour cent de la VAN de la
dette des PPTE en 1997).
L'Initiative PPTE, même si elle représente un
progrès non négligeable, ne permettra pas de réduire de
manière conséquente la dette des PPTE. De plus, en prenant en
compte les réductions bilatérales de dette depuis 1995, la
contribution des institutions multilatérales était moins
importante que celle des bailleurs de fonds bilatéraux jusqu'au dernier
sommet du G8 à Gleneagles en été 2005.
Dans les pays de l'UEMOA, au cours de l'année 2002, la
première phase de l'exécution des décisions de mise en
oeuvre de l'initiative en faveur des PPTE pour les pays ayant atteint le point
de décision ou le point d'achèvement, ont
bénéficié des allégements de dette. Ces
allègements, principalement, de la part des créanciers membres du
Club de Paris, ont été pour un montant global de 894,6 milliards
de Franc CFA (1.266,2 millions de dollars) contre 314,0 milliards Franc CFA
(421,9 millions de dollars) en 2001.
La question qui préoccupe les milieux économiques
et les organisations de la campagne pour l'annulation est de savoir si les
économies réalisées pourront être réellement
utilisées pour le développement.
Il est en effet nécessaire de prendre en compte plusieurs
éléments :
- Les annulations de dette se traduisent par une marge de
manoeuvre supplémentaire dans les budgets des Etats. A ressources
constantes, l'allégement de la dette signifie une réduction du
service de la dette payé annuellement, donc une possibilité de
ressources supplémentaires pouvant être utilisées.
- Le montant de cette marge de manoeuvre dépend du niveau
de remboursement effectif du pays concerné. En effet si le pays ne
remboursait rien, ce qui correspond en général au moratoire sur
le service de la dette comme ce fût le cas à un moment
donné dans certains pays d'Amérique latine, l'annulation de la
dette n'aura que peu d'impact à court terme sur les finances de l'Etat
débiteur.
Il est à noter que les différents types de
créances, influent sur les marges de manoeuvre dégagées.
En effet, l'endettement des pays pauvres très endettés comme nous
l'avons souligné dans le chapitre 2, prend différentes formes
:
- créances vis-à-vis des organisations
multilatérales : FMI, Banque Mondiale, BAD, etc.
- créances d'Etat à Etat, dont créances
d'origine « commerciale » et créances d'Aide
Publique au Développement.
- dettes vis-à-vis de créanciers
privés.
Les mesures d'allégements aujourd'hui envisagés
auront des conséquences variables en fonction des types de
créances : annulation des créances APD, allégement des
créances commerciales et multilatérales, etc.
Faute de données disponibles sur l'impact réel de
cette initiative, sa relative mise en oeuvre récente, font que nous
n'avons pu appuyer notre réflexion sur de cas concret de pays.
L'initiative en faveur des pays pauvres doit régler
définitivement dans la conception de ses auteurs, le problème de
l'endettement des pays pauvres. Cette initiative est par ailleurs
appuyée vient d'être appuyé par une initiative de G-8 qui
s'engage à accroitre l'aide au développement de 50 Mds de dollar
US par an.
Cette augmentation annoncée de l'aide et l'initiative PPTE
sont utiles, cependant, elles ne constituent pas une panacée aux
problèmes économiques, source de dette, que rencontrent les pays
de l'UEMOA. Ces allègements doivent être suivis par des
réformes visant dans un premier temps à stabiliser l'endettement
et à favoriser la croissance. Par « l'effet de
dénominateur » l'encours de la dette en pourcentage du PIB
baissera.
Aussi bien qu'elle permet à terme de diminuer l'encours de
la dette des pays qui en bénéficient et notamment les pays de la
zone UEMOA, l'initiative en faveur des pays pauvres très
endettés, peut si elle est accompagnée des mesures permettant
d'éviter les erreurs du passé, ouvrir la voie à une
véritable sortie du cercle vicieux de la dette auquel les pays de
l'union se sont enfermés. Par conséquent, nous pensons il est
judicieux pour limiter le risque de dérapage budgétaire,
d'imposer une limite aux nouveaux emprunts par le biais de règle
budgétaire.
II Le recours à une législation
Limiter par la loi le recours à l'emprunt peut être
un instrument efficace pour prémunir les pays pauvres du surendettement.
L'emprunt doit être réservé pour financer les
investissements. S'endetter pour investir comme nous l'avons souligné au
chapitre quatre, ne pose pas de problème particulier à condition
que le choix ces investissements puissent faire l'objet a priori d'une
évaluation quant à leur impact sur la croissance, devant
permettre le remboursement à l'échéance. Cette idée
n'est pas par ailleurs nouvelles, aussi bien en Allemagne pour ce qui concerne
le budget fédéral, en France pour ce qui les collectivités
territoriales, qu'au niveau de l'Union européenne, la soumission du
recours à l'emprunt à des règles particulières est
formelle.
1- Le cas Allemand :
En Allemagne, l'article 115 de la Loi Fondamentale dans sa
rédaction originale, est libellé ainsi : «Il ne peut
être recouru aux ressources de trésorerie qu'en cas de besoins
exceptionnels et, en principe, uniquement pour couvrir des dépenses
productives, exclusivement en vertu d'une loi fédérale.
Des crédits ne peuvent être accordés et des
sûretés ne peuvent être constituées à la
charge de la fédération lorsque leur effet s'étendrait
au-delà d'un exercice, qu'en vertu d'une loi fédérale.
Cette loi doit préciser le montant du crédit ou l'étendue
de l'obligation dont la fédération assume la
responsabilité ».
Il ressort du contenu de cet article (réaffirmé
lors de la révision constitutionnelle de 1969) que le recourt à
l'emprunt ne peut avoir pour objet que de financer les investissements. Ainsi,
en Allemagne, l'emprunt doit être autorisé et chiffré par
le législateur.
2- Le cas des Collectivités territoriales en
France :
Les collectivités locales en France doivent à la
différence de l'Etat, respecter un principe d'équilibre
budgétaire. Cet équilibre consacré par plusieurs
jurisprudences dont celle du Conseil d'Etat (CE, 23 décembre 1988,
Département du Tarn), est une obligation qui s'impose non seulement au
budget primitif des collectivités locales, mais aussi au budget
résultant de tout acte administratif ultérieur.
Cette exigence ancienne est traditionnellement justifiée
par le souci de protéger à la fois la situation financière
des collectivités locales et celle de l'Etat le plus souvent
appelé en garantie.
Elle se traduit par l'obligation de présenter le budget en
équilibre et d'en résorber un éventuel déficit
d'exécution.
Au terme de la loi du 2 mars 1982, codifié actuellement
sous les articles L.1612-4, L.1612-6 et L.1612-7 du code général
des collectivités territoriales, les collectivités locales
peuvent équilibrer leur budget par l'emprunt, qui est
budgétisé à la différence des emprunts de
l'Etat.
Le remboursement de l'emprunt étant
budgétisé, les collectivités locales doivent être en
mesure de rembourser le capital des emprunts arrivant à
échéance dans l'année par des ressources
définitives. Ce qui constitue une interdiction de « rembourser
l'emprunt par l'emprunt ». L'équilibre par section, est par
ailleurs une règle qui complète ce dispositif, car chacune des
deux sections (fonctionnement et investissement) doit être votée
en équilibre. La section d'investissement peut être
équilibrée par des prélèvements sur la section de
fonctionnement.
Le contrôle de cet équilibre budgétaire est
effectué par les chambres régionales des comptes et par le
préfet qui procèdent en cas de non respect à des
redressements.
3- Le cas de l'Union
européenne :
Le principe d'équilibre budgétaire est un principe
posé par les traités de l'Union, il implique que dans le budget
de l'Union, le plafond des dépenses est limité par les ressources
propres. Les articles 268 du TCE, 171 du traité Euratom et 20 du traite
dit de « fusion des exécutifs » de 1965, disposent
que « le budget doit être équilibré en recettes
et en dépenses ». Le principe d'équilibre
budgétaire interdit donc le déficit ou l'excédent. Par
ailleurs, cet équilibre doit être atteint sans recours à
l'emprunt : l'article 269 du TCE prévoit en effet que
« le budget est, sans préjudice aux autres recettes,
intégralement financé par des ressources propres ».
L'union n'est en effet pas autorisée à recourir à
l'emprunt que pour éventuellement financer des prêts hors budget.
En fin, l'article 14 du Règlement financier général de
2002, indique que les Communauté « ne peuvent souscrire des
emprunts ».
L'équilibre budgétaire prôné par la
conception classique est assurément à la mode : aux
Etats-Unis, plusieurs Etats ont adoptés de règle visant à
rendre obligatoire l'adéquation des dépenses aux recettes.
En effet, depuis le sommet du G8 de Gleneagles au Royaume Uni en
été 2005, portant l'annulation de la dette multilatérale
des pays pauvres très endettés, les idées de
réglementer le recours à l'emprunt fait son chemin.
A la sixième conférence annuelle du réseau
parlementaire sur la Banque mondiale (PNOWB), du 21 au 23 octobre 2005 à
Helsinki (Finlande), quelques deux cents législateurs de quatre
vingt-et-dix pays environ se sont joints à des représentants
d'organisation de la société civile, d'institut de recherche et
d'organismes multilatéraux pour y réfléchir.
Les législateurs devraient suivre les emprunts
contractés par le pouvoir exécutif pour éviter d'accumuler
de nouveau une dette insoutenable. Charles Mutasa représentant le Forum
et réseau africain sur la dette et le développement, a
suggéré la mise en place d'un bureau de gestion de la dette
placé sous le contrôle du parlement.
A l'instar des collectivités locales en France, un
contrôle parlementaire efficace de l'endettement comme l'a
réclamé la conférence annuelle du réseau
parlementaire sur la Banque mondiale, passe par une budgétisation des
opérations d'emprunt et d'amortissement de dette.
CONCLUSION
Nous avons vu que le problème de la
dette, malgré les réaménagements effectués par les
créanciers afin de rendre les débiteurs solvables, la dette des
pays pauvres reste un problème récurrent.
L'option en faveur d'une annulation de la dette est
défendue par les représentants de la société civile
que l'on range habituellement sous l'appellation d'altermondialiste. Pour cette
mouvance, par ailleurs très hétérogène par ses
discours et ses projets, la dette des pays du Tiers Monde est illégitime
et constitue une forme de « criminalité financière contre le
développement humain ». L'effet « boule de neige » de la
dette, en rendant impossible toute perspective de développement au Sud,
justifierait largement que celle-ci soit annulée. L'audit du stock de la
dette est préconisée dans le but de déceler des dettes
odieuses et donc illégitimes.
Cependant, pour d'autres, le plaidoyer en faveur de l'annulation
de la dette reposerait sur des postulats qu'il conviendrait de
démystifier.
Pour ceux-ci, « annuler n'est pas aider ». Rien ne
justifie que l'on considère la dette comme étant
intrinsèquement pernicieuse. Pour progresser, les pays, comme les
individus, doivent emprunter. Ce qui importe, c'est que les fonds obtenus
soient utilisés à des fins productives et rentables. La
réalité démontre que les pays du Tiers Monde les plus
endettés ne sont pas victime de l'exploitation du secteur privé.
Le manque d'intérêt des entreprises multinationales à leur
égard constitue leur handicap principal.
Ensuite, « l'allégement de la dette n'est pas
nécessairement conforme au principe de justice». Parmi les 1,4
milliard de personnes très pauvres dans le monde, 30% environ
vivent en Inde. Or, ce pays n'est pas éligible à
l'allègement de la dette car il gère ses affaires avec une
relative sagesse. Les pays qui ne peuvent rembourser leurs dettes sont, dans
l'ensemble, les plus mal gérés. C'est pour cette raison qu'il est
injuste d'annuler la dette d'un pays sans tenir compte de ses
résultats.
Enfin, « l'allègement de la dette ne favorise pas
nécessairement la réduction de la pauvreté ». Si le
poids de la dette enlève des marges de manoeuvre réelles aux pays
endettés, à l'inverse, l'annulation de la dette ou même son
allègement ne débouche pas nécessairement sous la forme
d'une amélioration du sort des populations les plus démunies.
L'élimination de la pauvreté de masse ne peut être
conditionnée à la seule annulation de la dette internationale.
Seule une croissance soutenue et rapide peut permettre d'y parvenir. Cette
croissance dépend à son tour de la mise en oeuvre d'un ensemble
de mesures de politiques macroéconomiques, dont la stabilisation
budgétaire et monétaire, la liberté du commerce et
l'assainissement de l'administration.
Entre ces deux idées, la problématique de la dette
des pays pauvres demeure.
Lorsqu'un endettement public excessif et croissant s'est
accumulé, un gouvernement dispose, en théorie, d'un ensemble
important de dispositifs lui permettant de sortir de cette situation.
Toutefois, en pratique, peu de voies sont à la fois réalisables
et efficaces dans le contexte actuel des pays de la zone UEMOA :
- La voie privilégiée dans le passé est
l'inflation, conséquence du financement monétaire de la dette.
Toutes choses égales par ailleurs, une hausse de
l'inflation érode une part de la dette à moyen terme. Le taux
d'intérêt réel diminue, voire devient négatif, et
cela permet par monétisation (création monétaire
destinée à financer les dépenses publiques) d'absorber une
part importante de la dette. Cette voie, observée par exemple en France
dans l'entre-deux guerres, est désormais exclue, du moins dans les pays
de l'UEMOA, du fait du contrôle de l'inflation par une banque centrale
commune et indépendante.
- Une autre pratique courante autrefois, principalement dans les
pays en développement, mais également dans les pays
industrialisés, est celle de la répudiation de la dette. Le
risque de perte de confiance et de crédibilité est majeur et la
période pendant laquelle le gouvernement trouve difficilement des
prêteurs peut s'avérer longue. Enfin, faute de changement
structurel dans la nature et la structure des recettes et dépenses, le
gonflement de la dette recommence, appelant de nouveaux ajustements.
- Certains pays ont fait dans le passé, le choix de
réduire leur dette par recours à une taxe unique et ponctuelle
sur le revenu ou sur le capital (ceci a été utilisé par
plusieurs pays, dont la France en 1924 qui, à la suite de la
première guerre mondiale, porte le taux supérieur de
l'impôt sur le revenu à 90 % pour les couples sans enfant). Les
risques sont alors semblables à ceux de la répudiation à
ceci près que le poids de la dette est largement réparti.
- Dans une logique voisine, une réduction de dette peut
être obtenue en consacrant des recettes exceptionnelles à cette
fin. C'est le cas par exemple de recettes de privatisations ou du produit des
ventes de certains actifs de l'Etat. Cette solution peut permettre d'impulser
une politique de réduction de l'endettement en produisant un effet
immédiat et visible avant d'engager une réforme des facteurs qui
ont généré la dérive des comptes publics et
compléter ou se substituer à des formes plus traditionnelles de
financement. En plus de la dégradation du bilan de l'État, cette
politique trouve ses limites dans le fait que le stock d'actifs
éligibles à la privatisation n'est pas illimité et
notamment quant il s'agit des pays de la zone UEMOA. Par ailleurs, comme dans
les cas précédents, cette méthode n'a aucun impact sur les
causes initiales de l'endettement excessif qui risque de
réapparaître à moyen terme. Enfin, avant de procéder
à une vente totale ou partielle d'actifs publics pour rembourser la
dette, des recherches sont essentielles, notamment des simulations de l'impact
potentiel de la vente des actifs sur la taille relative de la dette publique,
une évaluation minutieuse de la juste valeur des flux de revenus futurs
des actifs concernés, et une analyse approfondie de l'impact d'un
accroissement du contrôle privé dans les secteurs
économiques touchés, peuvent éclairer la décision
de cession.
- La gestion active de la dette peut, également,
participer à la réduction de l'endettement en optimisant la
structure et la nature des titres. Cependant, les gains susceptibles
d'être réalisés demeurent limités et ne peuvent
réussir à eux seuls à inverser une dynamique cumulative de
la charge de la dette.
- Le remboursement de tout ou une partie de l'emprunt par
anticipation, n'exige pas non plus de réforme structurelle de nature
à dégager de recettes supplémentaires, mais dépend
plutôt, de manière générale, d'une aisance
financière, le plus généralement conséquence d'une
remontée plus que prévu des cours des matières
premières dont le pays débiteur est exportateur.
- L'action directe sur les déficits primaires pourrait
être d'une certaine façon la voie incontournable pour
réduire l'endettement public. Une baisse du déficit primaire
appelle une augmentation des impôts ou une amélioration de leur
perception et/ou une réduction des dépenses publiques, si
possible en optimisant leur efficacité. Mais, comme énoncé
plus haut, cela comporte des coûts politiques et économiques.
De même, la réduction des dépenses publiques
ne doit pas grever la croissance potentielle à moyen terme. De fait, les
dépenses publiques réputées productives (recherche et
développement, éducation supérieure, soutien aux
entreprises innovantes ou de haute technologie, investissement en
infrastructures...) doivent être préservées.
- Le plus sûr moyen de réduire le ratio
d'endettement est certainement d'augmenter la croissance économique.
À court terme, les conséquences sont immédiates sur un
plan comptable (le dénominateur plus élevé fait diminuer
le ratio à numérateur constant), mais aussi sur le plan
économique puisqu'une hausse du produit national implique moins de
dépenses publiques, notamment sociales, et plus de recettes grâce
au dynamisme des assiettes budgétaires.
Le problème de la dette des pays de l'UEMOA réside,
à notre avis, dans les grandes difficultés qu'ils peuvent
rencontrer pour augmenter, même à moyen terme, leur croissance
(potentielle) de façon non négligeable. Il est admis qu'un
contrôle des finances publiques ne nuit pas nécessairement
à la croissance à moyen terme et, pour certains, peut même
être une condition nécessaire, mais pas suffisante, à son
rebond. En conséquence, une baisse du ratio de dette par des
réformes structurelles conduisant à des baisses de
dépenses publiques improductives, moyennant un éventuel
coût transitoire, est une condition nécessaire et/ou suffisante
pour relancer l'activité. Toutefois, les estimations statistiques du
lien entre variables de finances publiques et croissance sont fragiles.
Nous croyons que dans le contexte actuel de réduction de
la dette décidée par les créanciers au titre de
l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés, les
gouvernements respectifs des pays de la zone UEMOA pourraient adopter une
politique de réduction du fardeau de la dette en procédant en des
réformes structurelles, permettant de définir le
périmètre d'intervention de l'Etat et partant des dépenses
publiques. Les dépenses d'investissement doivent être
préservées. La mise en place de ce procédé,
permettra d'impulser la croissance, seule facteur, à notre avis, de long
terme permettant un désendettement durable.
Enfin, un contrôle parlementaire efficace de l'endettement
comme l'a réclamé la conférence annuelle du réseau
parlementaire sur la Banque mondiale, doit passer par une budgétisation
des opérations d'emprunt et d'amortissement de dette.
Les nouveaux moyens de financement des Etats doivent donc
être à la fois les moins dommageables possibles sur le plan
économique et les plus acceptables sur le plan politique.
Jusqu'à une période très récente,
des accommodements techniques (rééchelonnement, approches par
menu) ont permis de rendre artificiellement le fardeau de la dette supportable.
Mais, ces accommodements n'ont pu empêcher la dette d'enfler au point
devenir un obstacle majeur au développement des économies des
pays pauvres.
En définitive, sortir de la logique de l'endettement
oblige à repenser les mécanismes et les politiques de croissance
et du développement.
TABLE DES MATIERES
Introduction .......................................................................................1
Partie I : Délimitation et Mesure de la Dette
publique.........................................5
Chapitre I : La notion de la dette
publique.......................................................5
I- Définition et aspect juridique de la dette
publique................................................5
1-
Définition............................................................................................5
2- Les aspects juridiques de la dette
publique......................................................7
2.1- L'encadrement du recours à
l'emprunt...................................................7
2.2- Le régime juridique des emprunts de
l'Etat..............................................9
3- Dette publique dans le droit international
.....................................................9
4- L'émission d'emprunt
public...................................................................11
4.1- Le régime juridique des opérations
d'emprunt d'Etat..................................11
4.2- Les opérations
d'émission.................................................................11
- Compétence de
l'exécutif................................................................11
- Compétence du
législateur.............................................................12
5- Les procédures ou techniques
d'émission.......................................................12
5.1-
L'adjudication...............................................................................12
5.2- Le placement
privé.........................................................................12
5.3- La technique de syndication ou de prise
ferme........................................12
5.4- La méthode de souscription
publique...................................................13
5.5- Le recours au marché
financier..........................................................13
6- Les clauses d'emprunt
d'Etat.................................................................13
II Instruments et gestion de la dette
publique................................................15
1- Les instruments de la
dette....................................................................15
2- La gestion de la dette
publique...............................................................16
Chapitre II : Structure et spécificité de la
dette des pays en développement (PED).18
I Structure de la dette
publique...............................................................19
1- La notion de dette publique
extérieure : dette multilatérale et dette
bilatérale.....20
1.1- Dette publique
multilatérale.........................................................20
1.2- La dette publique
bilatérale.........................................................21
2- Dette publique
intérieure....................................................................22
3- Dette bancaire
privée........................................................................23
4- Dette garantie par
l'Etat.....................................................................23
II- Les spécificités de la dette des pays en
développement ................................24
1- L'échéance
...................................................................................27
2- Les prêts
concessionnels....................................................................28
3- Une exclusion de fait des pays pauvres du
marché international des capitaux.....29
4- Les réaménagements de
dette..............................................................32
5- Cas particulier des Pays de
l'UEMOA...................................................33
- L'instrument
monétaire............................................................34
- L'instrument
fiscal..................................................................34
Chapitre III : Origines et Crises de
l'endettement........................................35
La crise des années
1930...............................................................36
I- Aux sources de la dette actuelle des pays en
développement...........................37
Origines de la crise de
l'endettement................................................38
1- Le retournement à la baisse des prix des
matières premières..........................38
2- Un contexte financier plus défavorable
aux pays en développement.................39
3- Une utilisation inefficace des ressources de la
dette ....................................41
II- Traitements de la crise de la
dette..........................................................42
1- Les contraintes financières ont conduit
à la crise économique.......................43
- Rôles du FMI dans les
négociations de réaménagement de
dette................43
- Le rôle
d'informateur.................................................................43
- Le rôle de coordination du
Fonds...................................................44
2- Réaménagements de la
dette.............................................................44
2.1- Le rééchelonnement de la
dette....................................................45
2.1.1- Le Club de
Paris.............................................................45
2.1.2- Le Club de
Londres........................................................46
2.2- Le bilan de l'action des deux
clubs...............................................47
2.3- Les nouvelles innovations de
retraitement de la dette .........................48
2.3.1- L'accord de
Toronto......................................................49
2.3.2- Les innovations de
réaménagement des créances privées...........51
- Le plan
Baker...........................................................51
- L'initiative
Brady ......................................................51
Chapitre IV : Problèmes de la dette
publique............................................53
I- Effets économiques de la
dette ............................................................53
1- Les objectifs économiques de la
politique d'endettement.............................53
2- Les effets économiques de la dette dans
la théorie économique.....................55
2.1- Endettement et rigidité
budgétaire.................................................57
2.2- Effet sur le taux de
change..........................................................58
2.3- La crise de la dette et la
surévaluation du taux de change ........................59
2.4- Le problème budgétaire
associé au renversement des transferts nets.........59
II Le concept de soutenabilité de la
dette....................................................60
1- Soutenabilité de la dette
....................................................................61
2- Difficultés liées à
l'évaluation de la
soutenabilité......................................63
Deuxième Partie : les stratégies de
désendettement public..............66
Chapitre V : Le remboursement par
anticipation........................................67
I- Remboursement par anticipation dans le cadre du club de
Paris.......................67
1- Contexte
historique.........................................................................67
2- Les remboursements anticipés au Club de
Paris.........................................69
II- Remboursement par anticipation des créances
multilatérales.........................70
III- Les enseignements de la stratégie du remboursement
par anticipation.............71
Chapitre VI : La doctrine de la dette odieuse et
répudiation...........................74
I- La doctrine de la dette
odieuse..............................................................74
1- Contexte
historique...........................................................................74
2-
Conceptualisation............................................................................74
II- Les précédents de la
répudiation...........................................................75
1- Le Mexique
..................................................................................75
2- Les
Etats-Unis.................................................................................76
3- L'Union soviétique
..........................................................................77
4-Les traités de paix des première et
seconde guerres mondiales.........................78
5- Le Costa Rica
...............................................................................78
6-
L'Indonésie...................................................................................79
III. La difficile re-appropriation du droit international par les
pays issus de la
décolonisation....................................................................................79
1- Le traité de
Vienne............................................................................79
2- La non-application de la
doctrine..........................................................80
3- La répudiation et le
désendettement.......................................................81
Chapitre VII : La politique d'austérité
budgétaire comme instrument de désendettement
public.......................................................................83
I. Les politiques de réduction du déficit
structurel..........................................84
1- L'exemple Canadien : audit exhaustif des
dépenses publiques.........................85
2- L'exemple espagnol
..........................................................................87
3- L'exemple
suédois ...........................................................................89
II Les caractéristiques nécessaires d'un
ajustement budgétaire réussi....................90
1- Éléments de
contexte.........................................................................91
2- Contenu et mise en oeuvre de
l'ajustement................................................91
3- Accompagnement et communication autour de
l'ajustement budgétaire..............91
4- Ajustement budgétaire et
désendettement des pays de la zone UEMOA.............92
Chapitre VIII : Le désendettement dans le cadre de
l'initiative PPTE et le
recours à une
législation...................................................92
I- Initiative en faveur des pays pauvres très
endettés.......................................93
1- Contexte
historique...........................................................................93
2- Critères d'éligibilité
arrêts par des créanciers
............................................94
3- Les
conditionnalités...........................................................................95
3.1- Les délais de mise en oeuvre des
annulations........................................95
3.2- Modification de la
conditionnalité....................................................96
4- Le déroulement de l'Initiative
PPTE.......................................................96
Première
phase................................................................................96
Point de
décision..............................................................................96
Deuxième phase, ou période
intermédiaire...............................................97
Point
d'achèvement..........................................................................97
5- L'apport global de l'Initiative
PPTE......................................................98
5.1- L'Initiative PPTE
renforcée...........................................................99
Augmentation du taux d'annulation des
dettes bilatérales.......................100
Mise en place de points
d'achèvement flottants..................................100
Apport d'une aide au cours de la
période intermédiaire..........................100
5.2- La réduction de dette obtenue
grâce à l'application de l'Initiative PPTE
et l'initiative PPTE
renforcée.............................................................101
II- Le recours à une
législation...............................................................103
1- Le cas
Allemand ...........................................................................103
2- Le cas des Collectivités territoriales en
France.........................................103
3- Le cas de l'Union
européenne.............................................................104
Conclusion.......................................................................................106
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