Structure de l'offre et demande des soins de santé dans la zone de santé rurale de Minova/RDC( Télécharger le fichier original )par Blaise KIBALONZA KABWENDE UNIGOM - Licence 2007 |
0. INTRODUCTION GENERALE0.1. ETAT DE LA QUESTIONLes études précédentes nous ont permis de cerner la littérature de manière dont elle a été abordée dans différentes études réalisées par d'autres chercheurs à travers les pays. Ce sont ces résultats qui sont présentés dans cette partie du travail. Dans une étude réalisée par le CRDI dans les pays de l'Afrique de l'Ouest sur les politiques publiques et la protection contre l'exclusion, il ressort que les systèmes de santé des pays en développement et plus particulièrement en Afrique de l'ouest ont connu des transformations majeures durant ces dernières décennies. Alors que certaines politiques ont permis d'améliorer l'accessibilité et parfois l'efficacité des services de santé, la question de l'équité d'accès aux soins de santé n'est toujours pas résolue. Elle s'est même aggravée dans de nombreux cas, contribuant ainsi grandement à l'augmentation de la pauvreté. Les inégalités de santé et d'accès aux soins demeurent considérables dans la région. Certains sont exclus des soins de manière permanente. D'autres plus nombreux sont exclus de façon temporaire, leurs capacités de payer, de se déplacer ou encore de se libérer pour aller se soigner ou soigner une personne à charge, variant au gré de saisons et du rythme d'activités. On observe que le fardeau de la santé tend à s'accroître avec la pauvreté et que la maladie est une des sources d'appauvrissement des ménages démunis. Aussi, ces derniers sont plus fréquemment exposés à des soins ou des traitements de mauvaise qualité et à des pratiques non éthiques, notamment de surfacturation.1(*) Dans leur manuel sur le financement des soins de santé en Afrique subsaharienne par la tarification des services et l'assurance, Paul SHAW et Charles GRIFFIN montrent que la tarification des soins dispensés dans les établissements de santé publics sont un facteur d'équité parce que la demande de soins de santé augmente d'une façon disproportionnée avec le revenu. Les gens de condition aisée sont plus en mesure et acceptent plus volontiers de payer pour des services coûteux, si bien que faire payer les gens relativement riches pour des services qu'ils demandent et qu'ils peuvent s'offrir, particulièrement dans les hôpitaux et en utiliser le produit pour subventionner ceux qui sont le moins à même de payer pour se faire soigner est un moyen d'améliorer les prestations de services de santé aux pauvres. Selon leur observation, une enquête sur l'utilisation des services de santé dans l'Etat d'Ogun, au Nigeria, a révélé qu'environ la moitié des ménages situés dans le quintile supérieur de revenu bénéficiait des services gratuits ou fortement subventionnés dans les cliniques ou hôpitaux publics. Ce quintile supérieur était aussi cinq fois plus porté à se faire soigner dans les hôpitaux privés que les gens de quintile le plus pauvre, montant ainsi une grande disposition à payer pour se faire soigner. Une enquête sur les ménages réalisée en 1993 en Tanzanie prouve de manière frappante qu'une part disproportionnée des subventions de l'Etat à la santé va aux ménages relativement riches. Les riches sont les plus gros utilisateurs des services de consultation et d'hospitalisation des hôpitaux, dispensaires et centres de santé privés et payants, avec un nombre de visites qui représente près de la moitié du total. Les riches sont aussi plus nombreux que les pauvres à se faire soigner dans les établissements payants dirigés par des missions, entrant pour 35% des malades hospitalisés et 25 à 29% des malades non hospitalisés dans les hôpitaux, centres de santé et dispensaires de ces missions. Ce qui est plus surprenant, c'est la prédominance des riches parmi les malades hospitalisés dans les hôpitaux d'Etat où ils représentent de 35 à 37% de l'ensemble des patients. Ces hôpitaux fournissent une part substantielle de l'ensemble des soins avec hospitalisation dans le pays. Si les subventions publiques de santé allaient à ceux qui en ont besoin, un plus grand nombre de tanzaniens des quintiles inférieurs pourraient se faire soigner gratuitement dans les établissements publics. Les ménages relativement aisés ont aussi tendance à bénéficier davantage que les autres des services coûteux et subventionnés dispensés dans les hôpitaux tertiaires. Ceci provient du fait que les ménages relativement aisés se rencontrent surtout en milieu urbain, près des hôpitaux centraux et des hôpitaux universitaires. Ici encore, la Tanzanie nous en fournit la preuve. 47% des hospitalisations en Tanzanie concernent des personnes qui vivent en milieu urbain et 62% d'entre elles appartiennent aux deux quintiles supérieurs des revenus.2(*) Dans son ouvrage les fondements de l'économie de la santé, Charles E. PHELPS note quant à lui que, comme pour tout autre bien économique, la demande des soins médicaux, dépend des revenus. Des revenus plus important créent une demande des soins plus importante. Il fait remarque cependant que ce genre de déclaration doit être accompagnée d'une mise en garde : toute chose restant égale par ailleurs. Pour ce qui est du prix de l'argent, le raisonnement économique affirme que les personnes vivant dans les limites des contraintes budgétaires achètent moins un certain type de biens au fur et à mesure que leur prix augmente. En sens inverse, elles achètent davantage quand leur prix baisse. Si des études expérimentales sont nécessaires pour montrer l'importance du prix dans l'influence exercée sur les consommateurs de soins médicaux, la logique nous enseigne que sa possibilité existe. D'autres choses étant égales, la demande des individus devrait diminuer quand le prix des soins médicaux augmente. Concernant le temps, suivant l'adage « le temps c'est de l'argent, nous pouvons nous attendre à ce que les personnes obligées de consacrer beaucoup de temps aux soins médicaux en useront moins, toute chose restant égale par ailleurs. Il signale en plus que la demande des soins devrait varier directement avec la gravité de la maladie, aussi longtemps que ces soins seront aptes à guérir le patient.3(*) Au Rwanda, une étude de 2004 sur le rôle de l'assurance dans l'amélioration de l'accessibilité aux soins révèle que les mutuelles de santé ont montré un très grand potentiel à améliorer l'accessibilité financière de la population aux soins de santé. En effet, dans les zones de rayonnement des CS où les MS sont déjà fonctionnelles, l'on a constaté une très grande augmentation de la fréquentation de la population membres de la mutuelle par rapport aux non - membres. Alors que la moyenne nationale du taux d'utilisation des services curatifs est tombée à 0,3 consultation par an ; les taux annualisés des consultations dans la plupart des MS atteignent 1 à 1,3 consultations par an. Ainsi donc, chaque membre mutualiste, grâce aux MS est à même de fréquenter son CS de premier contact. Dès lors que la barrière financière à l'accessibilité aux soins de santé est enlevée par les MS, en cas de maladie, les membres sont susceptibles d'utiliser 4 fois plus que les non membres les services de santé modernes. Outre que les MS contribuent à l'accessibilité financière aux soins de santé, elles renforcent aussi l'amélioration de la qualité des soins dans les FOSA à travers une mobilisation des ressources financières additionnelles et la constitution d'une coalition des consommateurs des soins de santé au niveau local qui questionnent en permanence la qualité des soins de santé.4(*) Au Burkina Faso, une étude de ZOUBGA Alain portant sur les services des soins et qualité montre que, sur le plan financier, le coût de prestation des soins et des médicaments, même génériques est généralement élevé par rapport au pouvoir d'achat de la majorité de la population surtout après la dévaluation du Franc CFA, cette situation s'explique en partie par les prescriptions irrationnelles et le non fonctionnement du système de prise en charge des indigents. Il s'y ajoute l'absence de mécanismes de prise en charge des coûts des soins.5(*) Pour le Projet sphère version 2004, selon la norme1 relative aux systèmes de santé et aux infrastructures de santé ; classement des services de santé selon leurs priorités : « Toutes les personnes ont droit à l'accès à des services de santé qui sont classés selon leurs priorités afin d'aborder les principales causes de mortalité et de morbidité excessives. L'accès aux services de santé se basera sur le principe d'équité à savoir assurer un accès égal selon les besoins, sans discrimination pouvant entraîner l'exclusion des groupes spécifiques. Dans la pratique, l'emplacement et la dotation en personnel des services de santé devraient être organisés de manière à assurer un accès et une couverture optimaux. Les besoins particuliers des groupes vulnérables qui ne peuvent peut- être pas y accéder facilement seront abordés lors de la conception des services de santé. Lorsque les honoraires sont demandés aux utilisateurs, il faudra prendre des dispositions pour veiller à ce que les personnes n'ayant pas les moyens de verser ces honoraires aient tout de même accès aux services.6(*) Selon un rapport du groupe d'étude de l'OMS de 1993 sur l'évaluation des récentes reformes opérées dans le financement des services de santé, la méthode de financement peut avoir une incidence sur l'augmentation du coût des soins de santé, la localisation et le type de services fournis ainsi que sur le nombre et le type du personnel employé. Il existe à l'évidence un besoin de comprendre de quelle manière les objectifs qu'un pays s'est fixé en matière de politique sanitaire peuvent se trouver modifiés suite aux réformes opérées à l'échelon du financement. Les changements opérés dans le mode de financement peuvent avoir des effets d'une portée considérable. Une restructuration du mode de financement, des soins ou de rémunération des dispensateurs, vu qu'elle modifie le nombre des incitations, peut changer le type et la qualité des relations entre les dispensateurs, de même qu'entre les dispensateurs et les consommateurs des soins. Elle peut restreindre la possibilité sur le plan financier d'avoir accès aux soins et altérer de ce fait l'état de santé de divers groupes des populations.7(*) Ce rapport présente une enquête sur la santé nationale des Philippines dans laquelle on observe que tandis que la fréquentation des installations publiques des soins de santé primaires diminue avec le revenu, les établissements hospitaliers publics sont utilisés de manière égale par les groupes disposant des revenus les plus bas et ceux disposant les revenus les plus élevés. Cela signifie que les premiers bénéficient d'autant de subvention que les derniers, ce qui n'était pas forcement recherché à l'origine.8(*) Ce rapport note en plus que, l'on a vu dans la facturation des soins aux usagers un moyen d'améliorer la répartition des prestations et des charges parmi la population, mais les preuves empiriques démontrant des effets sur l'équité sont mitigés. Les analyses les plus sophistiquées concernant la demande qui existent à ce jour et qui tiennent compte à la fois des coûts monétaires et du temps passé à obtenir des soins de santé émanant de personnes plus pauvres recule à mesure que les frais augmentent. En d'autres termes, à des niveaux supérieurs de revenu, l'élasticité par rapport au prix des soins de santé n'existe pratiquement pas, alors qu'à des niveaux inférieurs de revenu elle augmente.9(*) Au Burundi, Selon l'enquête menée par MSF Belgique de novembre 2003 à janvier 2004 sur les soins des personnes vulnérables, plus de 17% de la population ne se rend pas à une simple consultation, principalement pour des raisons financières (82% de ces malades ne consultent pas par manque d'argent). A cela, il faut ajouter que parmi les patients qui ont trouvé le moyen financier de payer la consultation, certains (quelque 4.8%) n'ont pas l'argent nécessaire pour financer un traitement ou seulement partiellement. Or sans argent, pas de médicaments. Pour payer la consultation et se soigner, la majeure partie des Burundais est contrainte de recourir à des moyens extrêmes, tel l'endettement ou la vente d'un bien, les poussant dans une pauvreté encore plus grande. Le recours à l'endettement auprès d'un centre de santé est une pratique courante dans le pays. Les titulaires de ces structures signalent d'ailleurs une forte augmentation des patients s'endettant au niveau de leur centre. Les patients ont recours à l'endettement aussi bien à l'hospitalisation que pour une simple consultation ambulatoire, pour lesquelles les sommes varient fortement.10(*) * 1 CRDI: Gouvernance, équité et santé : Politiques publiques et protection contre l'exclusion, Montréal, 2003. p.5 * 2 SADIO A. & DIOP F. : Utilisation et demande de services de santé au Sénégal, Bethesda, USA, août 1994, p.31 * 3 E. PHELPS Charles : Les fondements de l'économie de la santé, Publi-Union, France, 1995, p.74 * 4 MINISANTE Rwanda : Amélioration de l'accès aux services de santé au Rwanda. Le rôle de l'assurance, Kigali, 2004., p.15 * 5 ZOUBGA A. D.: Services des soins et qualité au Burkina Faso : Une interprétation et une gestion de la question sanitaire particulièrement avancée, les difficultés et les carences, Ouagadougou, Burkina Faso, 2000, p.22 * 6 Projet sphère : Charte humanitaire et normes minimales pour les interventions lors de catastrophes, Genève, 2004., p.18 * 7 OMS : Evaluation des récentes reformes opérées dans le financement des services de santé. Série de rapports du groupe d'études de l'oms n°829, Genève, 1993, p.5 * 8 OMS : Macroéconomie et santé : Investir dans la santé pour le développement économique, Genève, Suisse, décembre 2001, p.16 * 9 OMS : Evaluation des récentes reformes opérées dans le financement des services de santé. Série de rapports du groupe d'études de l'oms n°829, Genève, 1993, p.32 * 10 MSF/Belgique, Burundi : les vulnérables privés des soins de santé, Bujumbura, Avril 2004, p.6 |
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