La lutte contre la pauvreté en Afrique sub-saharienne à travers l'amélioration du marché du travail et la contribution au développement de l'emploi des jeunes.( Télécharger le fichier original )par Gaelle CAYAU Université Montpellier 3 Paul Valéry - MASTER 1 Institution-Organisation-Développement Gestion Stratégique des Ressources Humaines 2008 |
Section 2 : Une insertion difficile dans un contexte mondial incontournable : relation entre la compétitivité des entreprises africaines et la productivité du travailL'Afrique d'aujourd'hui à une place très marginale sur le plan mondial. En effet, contrairement à l'Asie du Sud-est et de l'Est, elle n'a pas apparemment su tirer parti des avantages crées sur la scène mondiale. On dira même qu'elle a effectué le processus inverse, s'attachant à des exportations de matières premières et étant quasiment absente des marchés porteurs : ceux des produits manufacturés et des services. Nous pouvons faire un petit état des lieux. Ainsi, les productivités très faibles liées à la surévaluation des taux de change qui ont été remarquées dans de nombreux pays et pendant très longtemps n'ont pas permis à cette région du monde d'être compétitive sur les nouveaux marchés porteurs, mais elles ont lentement détérioré la place qu'elle détenait sur les marchés de matières première, là où elle était assez compétitive (elle a maintenue des parts de marché sur les produits comme le café, le sisal, le coton et le tabac...). Pour illustrer nos propos sur le manque de compétitivité, on utilisera l'exemple des entreprises textiles de l'Afrique de l'Ouest. En 199839(*), la part des textiles africains sur les marchés internationaux est inférieure à 1%, dans un contexte de forte concurrence des pays asiatiques dont les parts de marchés sont solidement acquises, les pays africains et notamment ceux de la zone franc40(*), ont eu très peu de chances de percer. Même sur leur propre marché, ces pays sont très concurrencés en raison de leur manque de compétitivité- prix41(*) mais aussi par leur manque de cohérence dans les choix qu'ils ont effectués. C'est à la suite de la baisse générale du pouvoir d'achat sur les marchés nationaux puis à la suite de l'instauration des plans d'ajustements structurels auxquels on ajoute la concurrence des produits asiatiques que les activités des entreprises textiles africaines on progressivement disparues. Par ailleurs, ces entreprises seraient en difficulté parce qu'elles auraient choisi des stratégies de reproduction d'importation intégrant des technologies trop capitalistiques et non des stratégies de substitution des importations. Ces dernières visent à remplacer progressivement les importations par une production locale en commençant par les industries les plus simples (vêtements, produits alimentaires,...), l'Etat établit des protections douanières dans le secteur des biens de consommation mais instaure des droits de douane faibles sur les biens d'équipements afin d'encourager l'investissement. Dans un contexte de très forte concurrence sur le marché mondial, les marges des entreprises africaines sont amoindries car les choix technologiques d'origine n'ont pas été réalisés conformément aux conditions de production locale. Ces éléments expliquent alors pourquoi aujourd'hui encore les prix de revient sont élevés et justifie donc le manque de compétitivité des entreprises textiles d'Afrique de l'Ouest. Ainsi, l'inadaptation des modes de gestion opérés est à l'origine des écarts de productivité du travail. La productivité du travail est la « quantité de biens et de services que l'on peut obtenir en une heure de travail, grâce à une meilleure formation, à une meilleure organisation du travail, à une automatisation plus poussée de la production, à de meilleurs outillages et à un effort d'équipement sans précédent42(*)». Si on reprend cette définition on peut comprendre qu'il y a différentes façons d'agir sur la productivité du travail par : l'introduction de nouvelles techniques, une meilleure gestion des ressources humaines en adaptant l'éducation et la formation aux besoins (facteurs de productivité et de compétitivité quand ils sont utilisés à bon escient), l'amélioration de la qualité des infrastructures... Nous pouvons constater alors que le lien entre compétitivité-prix et la productivité du travail va dépendre des facteurs qui ont déterminé cette productivité. La hausse de la productivité résulte principalement du fait que les entreprises combinent mieux capital, travail et technologie. Un manque d'investissement dans les ressources humaines, dans les équipements et les technologies peut entraîner une sous utilisation du potentiel de la main-d'oeuvre dans le monde. C'est malheureusement le constat qu'on dresse aujourd'hui, il y a de trop grandes disparités quant à la productivité du travail, elles sont dues à une mauvaise répartition des facteurs de production, du capital et de la technologie. Selon le directeur général du BIT, Monsieur Juan SOMAVIA la situation est préoccupante, il existe un trop grand écart de richesse. Il énonce qu' «augmenter les niveaux de productivité des travailleurs qui ont les plus bas revenus dans les pays les plus pauvres est la clé pour réduire les gigantesques déficits de travail décent dans le monde.» A travers cette grande partie, il convenait de mettre en exergue les nombreuses difficultés auxquelles sont confrontées aujourd'hui toutes les économies de l'Afrique sub-saharienne. En effet, il n'est pas négligeable de dire, que les individus et notamment les jeunes seront parallèlement dans la même situation que leurs prédécesseurs, c'est-à-dire exposés à des emplois inadéquats intégrant des salaires d'existence médiocres. Comme nous l'avons longuement répété, la diminution des emplois dans le secteur public constatée dans le cadre des ajustements budgétaires ne s'est pas suivi d'une relance de l'emploi dans le secteur privé moderne ce qui a condamné certain à rétrécir leurs champs de prospection pour trouver un travail décent. Par ailleurs, cette diminution peut être envisagée pour améliorer la productivité du travail mais en tant que seul facteur utilisé on ne pourra pas connaître l'évolution exacte de cette productivité à long terme. En résumé, le lien productivité du travail et compétitivité-prix en Afrique sub-saharienne est très disparate dans la mesure où les entreprises ne sont pas assez performantes et que la productivité du travail reste très faible. Le rapport sur le KILM (Key Indicators of the Labour Market43(*)) montre qu'un seuil critique de décollage de la productivité du travail peine à être atteint : 7 travailleurs sur dix se retrouvent dans l'agriculture. « En condition d'extrême pauvreté, le travail est long, dur et très improductif », d'où l'extension du phénomène des travailleurs pauvres. Nous voyons alors qu'il n'est pas évident pour ces pays de sortir de la pauvreté. En effet, un autre problème de l'économie, succinctement évoqué ne va pas changer la donne. Il sera alors indispensable de porter un regard particulier sur le secteur informel en Afrique subsaharienne, catalogué aujourd'hui comme un secteur en pleine expansion. * 39 L'Afrique peut-elle être compétitive ?, Claire MAINGUY, Collection Economie et développement, Edition KARTHALA, 1998, 209 pages. * 40 La zone franc est née avec la guerre, en 1939, lors de la mise en place d'une législation de change commune pour l'ensemble de l'Empire français. 14 pays d'Afrique en sont aujourd'hui membres (7 pays rattachés à la Banque Centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest, 6 rattachés à la Banque des Etats d'Afrique Centrale et les Comores). Cette zone repose sur le principe d'une libre convertibilité, à un taux rigoureusement fixe, du franc CFA en franc français. * 41 C'est la capacité à proposer, sur le marché, des produits à des prix inférieurs à ceux de ses concurrents. * 42 Economie : les règles du jeu, Michel Didier, ECONOMICA, 2e édition, 1989. * 43 http://kilm.ilo.org/2005/press/ |
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