1.2 Facteurs de risque
cardio-vasculaire
Des études épidémiologiques
menées dans les pays développés (2,9) et en
Afrique(11,12,16) ont identifié des éléments de
comportements de la vie courante déclenchant, entretenant ou aggravant
le risque cardio-vasculaire d'un sujet ou d'une communauté. Certains
facteurs de risque cardio-vasculaire sont dits classiques (traditionnels ou
majeurs) et d'autres reconnus nouveaux ou mineurs.
1.2.1 Facteurs de risque
cardio-vasculaire classiques
Trois facteurs de risque dominent
l'hypercholestérolémie, l'HTA et le tabac(25-27). A
côté de ces trois facteurs, il ne faut pas négliger
d'autres facteurs de risque indiscutables que sont: le diabète
sucré, l'obésité abdominale(15), les facteurs
nutritionnels, l'inactivité physique, le stress,les facteurs de
thrombose et de coagulation et certaines anomalies de
l'électrocardiogramme (hypertrophie du ventricule gauche (H.V.G),
trouble de conduction intraventriculaire et des anomalies de la
repolarisation). Il ne faut pas oublier non plus le sexe (l'homme et la femme
après ménopause) et l'âge qui sont des facteurs non
modifiables.
a. Cholestérol sanguin et
dyslipidémie
Des nombreuses études ont montré le rôle
indiscutable du cholestérol plasmatique et des ses fractions dans les
maladies cardio-vasculaires par athérosclérose (17,28).
Le rôle péjoratif de ses différentes
fractions s'exprime selon qu'on a une augmentation du cholestérol-LDL,
une diminution de HDL-cholestérol et un rapport cholestérol
total/HDL-cholestérol > 4,5 (29,30). Le risque lié aux
triglycérides reste discutable (31) sauf dans certains groupes de
population: diabétique et féminine avant la ménopause et
dans certaines conditions telles que l'association à un taux bas de
cholestérol et une anomalie de coagulation.
Le taux bas de HDL-cholestérol constitue en soi un
facteur de risque indépendant de maladie coronaire(29). Certaines
études ont montré cependant un gradient direct entre le taux de
cholestérol et la classe sociale(29). Les valeurs idéales
recommandées sont triglycérides < 200 mg/dL;
cholestérol total < 200 mg/dL; HDL-cholestérol > 35 mg/dL;
cholestérol-LDL < 150 mg/dL (32).
b. Le diabète sucré
La fréquence des maladies cardio-vasculaires
paraît en plus nette augmentation depuis des siècles chez les
diabétiques que dans la population générale. On sait
cependant que c'est par le biais d'hyperinsulinisme et de
l'insulinorésistance qu'apparaissent les maladies cardio-vasculaires
(coronaropathie, HTA, cardiopathie diabétique) (32).
Chez les coronariens africains, le diabète est souvent
associé à d'autres facteurs de risque athérogène
tels que l'HTA, l'hypercholestérolémie, le tabagisme,
l'hyperglycémie et la sédentarité(15,31,33).
c. Tabagisme
Qu'il soit actif ou passif, le tabagisme à la
cigarette, intervient comme facteur de risque majeur et indépendant des
artériopathies de membres et des maladies cardio-vasculaires(34,36).
Des études épidémiologiques ont
montré une forte relation entre le tabac et les accidents myocardiques
aigus (infarctus, mort subite) (30,37), l'existence d'une réduction
efficace des récidives d'accidents coronaires en cas d'arrêt de
tabac (pratiquement de moitié) (36) et son gradient social important
aux dépens des ouvriers (38-41).
En Afrique noire, dans une étude faite au
Algérie, le tabagisme à la cigarette apparaît comme le
premier facteur de risque (70%) de l'infarctus du myocarde avec une
consommation de plus de 20 cigarettes/jour exclusivement par les hommes
(42).
d. L'H.T.A
Considérée comme facteur de risque majeur (41),
elle occupe la première place parmi les autres facteurs de risque
cardio-vasculaire en Afrique (32,43) et est citée comme étiologie
principale de la déviation axiale gauche au Congo où sa
fréquence augmenterait avec l'âge, sans différence de sexe
(44).
Des études ont démontré que le type de
l'atteinte vasculaire était corrélé au degré de
l'H.T.A: les types d'HTA légère et modérée
prédisposent aux accidents ischémiques (coronaires et AVC) tandis
que la forme sévère aux accidents hémorragiques
(18,45-49).
e. Obésité
L'augmentation de la masse grasse (obésité et
surcharge pondérale où l'index de masse corporelle 25
kg/m²) constitue un problème de santé publique aux
États-Unis et en Europe(50-52).
Des études ont montré cependant que la
répartition de tissu graisseux fournissait un meilleur reflet de risque
de complications que le poids corporel (15,52).
Ainsi l'obésité centrale (androïde ou
abdominale) donnait une valeur prédictive importante du risque
d'infarctus du myocarde, d'affection coronarienne et de mort subite
(35,49,52,53) chez l'homme et indépendamment du poids corporel. Cette
association agirait par le biais de l'hyperinsulinisme et de
l'insulinoresistance. Tandis que pour l'obésité de type
périphérique ou gynoïde, le risque est celui de
l'intolérance au glucose, du diabète sucré, de goutte et
d'athérosclérose (52).
f. Alcoolisme
Plusieurs études rétrospectives et prospectives
dans le monde, ont fait état du rôle protecteur de l'alcoolisme
modéré (1 à 3 verres de vin) dans les maladies
cardio-vasculaires ainsi que dans les autres maladies comme le cancer (54,55).
En Afrique, Kacou et Monken supposent que les coronariens
consomment plus d'alcool que les groupes témoins (17).
f. Stress et fréquence cardiaque
Le stress, paramètre peu mis en évidence dans
les études épidémiologiques à cause de
difficultés d'évaluation, est toutefois évalué
à partir de plusieurs sortes d'événements et comportements
tels que le surmenage professionnel, les soucis personnels et les autres
changements de situation (56), pouvant être responsables de modifications
biologiques qui favorisent la maladie ischémique:
élèvation de la pression artérielle, agrégation
plaquettaire. Certaines variables psycho-comportementales ont été
étudiées pour leur rôle dans les maladies par
athérosclérose (57). Ainsi, des études ont montré
que les coronariens avaient un comportement de type A (sujets toujours
pressés, impatients, ambitieux) par excès d'influx sympathique au
coeur (élévation de la fréquence cardiaque) et aux
vaisseaux (17, 58-60).
On suggère aussi que les différences dans
l'incidence d'infarctus peuvent être liées aux différents
stress notés dans certains groupes socio-économiques, au niveau
d'éducation, aux difficultés professionnelles et familiales.
Ainsi, l'amélioration de l'état favorable d'une maladie
coronarienne ne dépend pas seulement des autres facteurs de risque
(classique et mineure) mais de l'amélioration du facteur de stress
également (57).
On pense qu'un individu confronté à deux
cultures risque d'être mal adapté à l'une et à
l'autre et qu'il peut en résulter un stress pouvant majorer le risque
coronarien(17).
h. Inactivité physique
Il parait difficile de lui attribuer un rôle
indépendant dans les maladies cardio-vasculaires sans tenir compte des
autres facteurs de risque qui lui sont souvent associés.
Des études épidémiologiques montrent la
place de l'activité physique dans l'effet préventif
vis-à-vis de la survenue des accidents coronariens en Afrique (17,34) et
dans le monde (56).
Il s'avère que les coronariens africains marchent moins
(17).
i. Ethnicité
Dans certains regroupements humains, de structures
familiales, économiques et sociales homogènes, de langues et de
cultures communes, existent des facteurs de risque cardio-vasculaire
prédominants (17).
Ainsi dans l'HTA du noir africain, on note quelques
particularités: elle se complique plus de cardiopathies, de
retinopathies, de néphropathies et d'AVC; et se retrouve chez les
sujets en âge d'activité et l'insuffisance coronarienne est
exceptionnelle, à l'inverse de ce qui est décrit en Occident
(48).
j. Facteurs nutritionnels
· Consommation excessive de graisse
Des études épidémiologiques ont
démontré une relation nette et positive entre la
mortalité par cardiopathie ischémique et le pourcentage moyen
d'énergie apportée par les lipides saturés et une relation
négative par les lipides polyinsaturés de l'alimentation
(61,62).
Le rapport acide gras mono-insaturé/acide gras
saturé constitue les meilleurs prédicteurs de la
rentabilité des maladies ischémiques (63).
Dans une étude africaine, les coronariens consommaient
peu ou pas des lipides d'origine animale (saturés) mais plus des lipides
d'origine végétale (insaturés: monoinsaturé (huile
d'arachide) et polyinsaturé (huile de soja, olive))(17).
· Consommation excessive de sel
Certaines populations primitives ne présentent pas de
risque d'HTA à cause de leur faible consommation en Na+
(12).
Par contre d'autres études africaines
démontrent la grande différence de pression artérielle
liée à des différences de consommation de sel(63).
Les résultats de l'étude multicentrique
Intersalt ont renforcé le rôle on ne peut plus important du
Na+ dans la genèse de l'H.T.A (64).
k. Niveau socio-économique
Il apparaît que les sujets aisés sont plus
souvent atteints par les maladies cardio-vasculaires que les sujets de niveau
modeste en pays en voie de développement, ce qui est inversé dans
les pays développés (10,40).
En Afrique noire, c'est la classe moyenne qui est la plus
touchée.
Dans une étude de facteurs de risques par rapport aux
professions faite par Kacou, les cadres supérieurs sont plus
touchés que les sujets de niveau moyen(14).
l. Age et sexe
L'âge a été retenu comme facteur de
risque non modifiable dans les maladies cardio-vasculaires et
particulièrement dans l'HTA (65-67).
Des études contradictoires suggèrent que la
pression artérielle (P.A) ainsi que la prévalence de l'HTA
accroissent avec l'âge dans les sociétés
industrialisées (68). Mais d'autres par contre ne montrent que peu ou
pas de variation avec l'âge (1, 69, 70).
Les populations primitives africaines et celles de la
société rurale sont caractérisées par un mode de
vie traditionnel sans acculturation où la P.A augmente peu ou pas avec
l'âge et qu'il n'existe peu ou pas d'HTA (71-73).
Des études antérieures réalisées
en Afrique de l'Est, du Sud, de l'Ouest et du centre notent l'augmentation de
la P.A et de l'HTA avec l'âge (11,12,74-76).
Dans les pays développés, le risque de
décès par AVC et maladies coronaires est multiplié par
trois à quatre fois dans chaque décade de sujets
âgés de 45-74 ans (77). Le sexe masculin au-delà de 55 ans
et le sexe féminin au-delà de 65 ans ont aussi été
cités comme facteur de risque cardio-vasculaire. Mais
l'obésité est beaucoup plus prévalent chez la femme dans
plusieurs études (9,15).
m. Migration
La migration un des phénomènes courants de la
société en voie de développement a été
incriminé indirectement dans la genèse des maladies
cardio-vasculaires comme facteur de risque environnemental (11). En effet, la
population rurale qui rue vers le milieu urbain, se voit obliger de changer son
comportement et ses habitudes alimentaires par le biais du tabagisme,
alcoolisme, sédentarité, alimentation riche en graisse animale et
sel qui sont des facteurs directs dans la genèse des maladies
cardio-vasculaires.
Des études ont montré un changement dans la
pression artérielle, dans le poids et dans la fréquence cardiaque
en rapport avec la durée de migration dans la population
africaine(10,11).
n. Association des facteurs de risque
Des études prospectives et rétrospectives ont
souligné le caractère multifactoriel des maladies
cardio-vasculaires et la dépendance d'un certain nombre de
paramètres bioclinique dans leur apparition.
C'est ainsi que chez l'Africain Noir, les études sur
les coronaropathies dénombrent l'association de 3 à 5 facteurs de
risque chez 70% de coronariens (34, 77).
|