Sujet: «LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE
DES ETATS MEMBRES
POUR LES ACTES DES ORGANISATIONS
INTERNATIONALES»
L'introduction
Les Etats sont des sujets de droit international
privilégiés. Cette situation dominante dans l'ordre juridique
international les rend des destinataires des normes du droit international.
La violation de celles-ci est sanctionnée par
l'engagement éventuel de la responsabilité des Etats. La notion
de responsabilité «ne s'entend pas comme une nouvelle obligation
à charge de l'Etat défaillant mais plus largement comme
l'ensemble des nouvelles relations juridiques qui s'établissent entre
lui et les autres Etats intéressés au respect de la
légalité1(*)». Elle se situe à deux points de
vue : la responsabilité des Etats du fait de leurs propres actes et
la responsabilité des Etats du fait des actes des organisations
internationales dont ils sont membres. Dans ce travail, il sera question de ce
dernier aspect.
A ce sujet, «les difficultés rencontrées
par les partenaires contractuels ou conventionnels d'organisations
intergouvernementales pour obtenir de ces dernières la bonne
exécution de leurs obligations ont amené les juristes à
s'interroger sur les possibilités de mettre en cause, aux
côtés des organisations elles-mêmes, les Etats
membres2(*) ». La
personnalité juridique d'une organisation internationale
exonère-t-elle de plein droit ses membres de leur responsabilité
de sorte que ses actes sont et ne peuvent qu'être exclusivement
imputés à elle et à elle seule ? Les Etats
peuvent-ils voir leur responsabilité engagée lorsqu'ils exercent
en pratique un contrôle direct ou indirect sur l'organisation
internationale dont ils sont membres ? Le problème de
justiciabilité des organisations internationales devant certaines
juridictions internationales influe-t-il sur la mise en oeuvre, par les tiers
lésés, de la responsabilité directe des Etats pour les
actes des organisations internationales dont ils sont membres?
Les réponses à ces questions tendent à
permettre de voir dans quelle mesure les Etats peuvent être
considérés comme responsables des actes et comportements,
vis-à-vis des tiers, des organisations internationales dont ils sont
membres.
Nous essayerons de dégager des solutions en nous
appuyant sur principes généraux relatifs à la
responsabilité des Etats (chapitre I) avant de considérer deux
cas jurisprudentiels (chapitre II) de la responsabilité des Etats
membres pour les actes des organisations internationales.
CHAPITRE I. LA THEORIE GENERALE SUR LA RESPONSABILITE
INTERNATIONALE DES ETATS
Section I. La responsabilité internationale des
Etats
L'engagement de la responsabilité internationale des
Etats est soumis à des conditions (§ I) et sa mise en oeuvre repose
sur des mécanismes particuliers liés au statut des divers sujets
du droit international (§ II).
§ I. Les conditions de la responsabilité
Les conditions d'engagement de la responsabilité des
Etats sont en principe au nombre de trois : le fait illicite, le
préjudice ou le dommage et l'imputabilité.
A. L'illicéité
internationale
La responsabilité internationale trouve son
origine dans un fait international illicite. Celui-ci «est le fondement et
l'élément premier de la responsabilité, celui auquel se
rattachent tous les autres : imputation du fait illicite,
préjudice, réparation et éventuellement punition 3(*)». Il y a un fait
internationalement illicite de l'Etat lorsque «un comportement consistant
en une action ou une omission est attribuable, d'après le droit
international, à l'Etat » et «que ce comportement
constitue une violation d'une obligation internationale4(*) ».
L'illicéité internationale découle d'une violation du
droit international ; c'est-à-dire «soit dans la violation
d'une obligation conventionnelle, soit dans la violation d'une obligation
coutumière, soit encore dans une abstention condamnable5(*)». La doctrine fait une
distinction entre «les obligations passives par lesquelles l'Etat
s'interdit d'agir et les obligations actives par lesquelles il s'oblige
à le faire 6(*)».
Il en ressort que la violation peut provenir d'une action ou
d'une abstention dont l'auteur est l'Etat.
Le fait internationalement illicite s'entend comme «une
atteinte à la sécurité des rapports juridiques7(*) » entre sujets du
droit international.
B. Le préjudice
Le préjudice doit être la
conséquence du fait internationalement illicite. « Le
préjudice comprend tout dommage, tant matériel que moral
résultant du fait internationalement illicite de l'Etat8(*) ». Autrement dit, il doit
avoir porté atteinte à un droit ou un intérêt
d'autrui juridiquement protégé. Comme le confirment M. Dailler et
M. Pellet, «les sujets du droit international ne peuvent invoquer un fait
illicite pour fonder leur action que si ce fait a porté atteinte
à un droit juridiquement protégé, un droit dont ils sont
titulaires9(*) ». Il ne
peut donc y avoir fait internationalement illicite, et en conséquence
responsabilité, en l'absence d'une atteinte à un droit d'un
tiers.
C. L'imputabilité
Le fait illicite au regard du droit international ayant
causé un préjudice à une victime doit être
attribué à l'Etat qui en est l'auteur, c'est-à-dire qu'il
doit être son fait. Le procédé d'imputation a pour fonction
«de rendre possible le rattachement de la conduite d'un sujet interne
à un sujet international, aux fins de détermination de la
responsabilité10(*)». Ainsi, «aucune distinction n'est à
établir entre les autorités centralisées et
décentralisées, entre celles qui sont spécialement en
charge des relations extérieures de l'Etat ... et les autres, non plus
qu'en fonction du caractère législatif, exécutif,
administratif ou juridictionnel des activités de l'agent11(*) ». L'Etat peut voir
sa responsabilité engagée alors que le fait est imputable
à son agent «même s'il s'agit d'un agent
subalterne 12(*)» et quel que soit l'organe qui a agi.
§ II. La mise en oeuvre de la responsabilité
La mise en oeuvre effective de la responsabilité des
Etats est invoquée par les sujets du droit international victimes. Il
peut s'agir d'un Etat, d'une organisation ou institution internationale ou
d'une personne privée. Il faut mentionner que la Commission du droit
international est allée loin en admettant que tout Etat est en droit
d'invoquer la responsabilité d'un autre Etat si «l'obligation
violée est due à la communauté internationale dans son
ensemble13(*)». Cette
position a été récemment confirmée par la CIJ dans
avis consultatif sur la construction du mur en Palestine par l'Israël. La
Cour, examinant les conséquences juridiques des faits internationalement
illicites résultant de la construction du mur par Israël en ce qui
concerne les Etats autres que ce dernier, a observé qu'à
«cet égard qu'au rang des obligations internationales
violées par Israël figurent des obligations erga omnes14(*) ».
En conséquence, «tous les Etats parties à
la convention de Genève relative à la
protection des personnes civiles en temps de guerre, du 12
août 1949, ont l'obligation, dans le respect de la Charte des Nations
Unies et du droit international, de faire respecter par Israël le droit
international humanitaire incorporé dans cette convention15(*) ». Selon M.
Gomez-Robledo, même si la question est et demeure controversée
«on ne peut que souscrire à l'argumentation relative à
l'opposabilité erga omnes des obligations qui découlent des
normes fondamentales du droit humanitaire, lesquelles mériteraient
d'être élevées au rang du jus cogens16(*) ».
Un Etat peut mettre en oeuvre la responsabilité d'un
autre pour les préjudices subis par lui-même mais aussi pour ceux
subis par ses ressortissants. Ces derniers préjudices sont
considérés, par le biais du mécanisme de la protection
diplomatique, comme des préjudices de l'Etat ;
« l'endossement... par un Etat de la réclamation d'un
particulier lésé par un fait internationalement illicite d'un
autre Etat ou d'une organisation internationale17(*) ».
Actuellement, contrairement au droit international classique
qui ne connaissait que des relations interétatiques, il y a eu une
évolution due au fait que «il existe des cas, certes exceptionnels,
où des traités entre Etats ont expressément prévu
le droit de saisine directe des individus devant une juridiction
internationale...18(*) ».
Section II : La responsabilité des Etats
membres pour les actes des
organisations internationales
La personnalité juridique internationale des
organisations internationales exclut en principe la responsabilité des
Etats membres du fait des actes illicites dont celles-là se rendent
auteurs (§ I). Cependant, les Etats membres peuvent se voir leur
responsabilité engagée à titre subsidiaire (§ II). Il
existe par ailleurs une tendance à considérer que les Etats
membres ont une responsabilité illimitée (§ III). Enfin, il
sera question de la responsabilité objective des Etats (§ IV).
§ I : Le principe d'exclusion de la
responsabilité des Etats membres
La personnalité juridique de l'organisation
internationale est propre et distincte de celle des Etats membres.
« Titulaires de droits, les organisations internationales doivent
supporter les obligations corrélatives19(*) ». La personnalité juridique de
l'organisation internationale lui confère des droits et obligations
distincts de ceux des Etats qui la composent. Ainsi, les engagements
internationaux pris par l'organisation internationale ne créent en
principe d'obligations que dans leur propre autorité et non dans le chef
de ses membres. « La personnalité permet en effet en
règle générale de désigner l'organisation comme
seul titulaire des engagements auxquels elle souscrit et, partant, comme seule
responsable de leur violation20(*) ». Ainsi, cette personnification n'a-t-elle
pour conséquence que la responsabilité des Etats membres est en
principe exclue pour les actes illicites de l'organisation internationale dont
ils sont membres.
Rappelant la jurisprudence de la Cour internationale de
justice dans son avis consultatif sur la réparation des dommages subis
au service des Nations Unies, M. Klein conclut qu'admettant
« l'existence d'une personnalité juridique objective ou
inhérente des organisations internationales, il est clair qu'une telle
personnalité devrait être considérée comme opposable
à tous, en l'absence même d'actes de reconnaissance
spécifiques21(*) ». Cela veut dire que les tiers
lésés par un acte d'une organisation internationale ne pourraient
pas mettre en cause la responsabilité de ses membres mais uniquement
celle de l'organisation.
« Rares sont les actes constitutifs d'organisations
dans lesquels transparaît clairement la volonté des
parties22(*) »,
mais certains prévoient expressément l'exclusion de la
responsabilité des membres pour les actes des organisations. Tel est le
cas de la limitation de responsabilité pour les actes de
l'Entreprise23(*) selon
laquelle «aucun membre de l'Autorité n'est responsable des actes ou
des obligations de l'Entreprise du seul fait de sa qualité de
membre24(*) ».
§ II. La responsabilité subsidiaire des Etats
membres
La personnalisation de l'organisation internationale,
entité créée par les Etats, autonome dans son
fonctionnement, peut laisser subsister une responsabilité subsidiaire de
ses composantes.
En effet, la personnalité ne signifie pas
nécessairement responsabilité exclusive. En effet, la
personnalité juridique propre et distincte des organisations
internationales n'exclut pas forcément la responsabilité des
Etats membres en droit international. « Il n'existe pourtant aucun
lien logique inéluctable entre personnalité et
responsabilité exclusive de l'entité qui en est
titulaire25(*) ». Dans ce sens, la Cour européenne
des droits de l'homme a jugé que la Convention de Rome «n'exclut
pas le transfert de compétences à des organisations
internationales, pourvu que les droits garantis par la Convention continuent
d'être reconnus. Pareil transfert ne fait donc pas disparaître la
responsabilité des Etats membres26(*) ».
Ainsi, certains actes constitutifs des organisations
internationales envisagent des hypothèses où les Etats membres
viendraient à suppléer à l'inexécution des
engagements pris par elles. A titre illustratif, les Etats membres sont
amenés à supporter les conséquences de la disparition de
l'organisation internationale. Citant les cas de la Banque européenne
pour la reconstruction et le développement et de la Banque africaine de
développement, M. Klein affirme que leurs actes constitutifs stipulent
qu'en cas d'arrêt définitif des opérations de la Banque, la
responsabilité de tous les membres résultant de leurs
souscriptions non appelées au capital social de la Banque subsiste
jusqu'à ce que toutes les créances, y compris toutes les
créances conditionnelles, soient liquidées27(*) ». En
conséquence, les tiers sont habilités à se
prévaloir de cette garantie et peuvent dès lors demander aux
Etats membres l'exécution de leurs obligations envers l'organisation,
afin qu'elle-même puisse exécuter les obligations qui la lient aux
tiers28(*) ». Il
convient de souligner que l'éventuelle responsabilité des membres
ne reste que subsidiaire et leurs engagements sont limités aux parts
souscrites envers l'organisation non encore appelées au capital.
Cependant, «s'il s'agit bien là d'une obligation de droit
international à la charge des Etats membres, celle-ci ne donne, par
contre, aucune prise à une action directe des tiers envers les membres
de l'organisation29(*) ».
En l'absence d'engagements clairs et explicites, les Etats ne
peuvent pas être considérés comme responsables, même
à titre subsidiaire, des agissements de l'organisation internationale
dont ils sont membres.
Les solutions conventionnelles et pratiques de la
responsabilité des Etats pour les actes des organisations
internationales dont ils sont membres ne restent qu'exceptionnelles et
rares ; par conséquent, on ne peut pas en dégager une
règle. A défaut d'une disposition explicite, la tendance est
d'exclure la responsabilité subsidiaire des Etats membres pour les
engagements des organisations internationales.
Il est à noter que la responsabilité subsidiaire
des Etats du fait des actes de l'organisation internationale dont ils sont
membres ne doit reposer que sur des règles spécifiques claires.
Il existe des bases «sur lesquelles la responsabilité des Etats
membres d'organisations internationales pourrait se voir engagée, non
pas pour les faits de ces dernières, mais bien pour les comportements
adoptés par ces Etats en relation avec les faits illicites commis par
les organisations dont ils sont membres30(*) ». Dans le même sens, M. Geslin
affirme que « la responsabilité des Etats membres pourra
être engagée directement et concurremment ou parallèlement
à celle de l'organisation, lorsque l'acte dommageable résultera
d'un fait à la fois imputable à l'organisation et aux Etats ou,
en d'autres termes, lorsque l'acte dommageable imputable à
l'organisation aura ete rendu possible en raison d'un comportement fautif des
Etats membres31(*) » et « à la condition que
la responsabilité primaire de l'organisation soit
reconnue32(*) ».
Il en ressort qu'il n'y a pas de coutume internationale de la
responsabilité subsidiaire des Etats membres ; elle est
conventionnelle parce qu'elle est différente de la coaction ou de la
complicité.
§ III. La responsabilité illimitée des
Etats membres
La responsabilité illimitée serait due au fait
qu'en créant une organisation internationale dotée d'une
personnalité propre et distincte, les Etats n'échapperaient de ce
fait à la responsabilité qui en découlerait.
En d'autres termes, lorsque les Etats créent une
organisation internationale, ils ne doivent pas en même temps ou
simultanément exclure leur responsabilité pour les faits
illicites de celle-ci. En effet, «le droit international ... ne comprend
aucune règle permettant expressément aux Etats de créer de
nouveaux sujets de droit investis de la personnalité juridique et pour
les actes desquels leurs fondateurs ne pourraient être tenus
responsables33(*) ». Et selon certains auteurs, cela doit
être considéré comme une interprétation d'un
principe instituant une responsabilité illimitée des Etats dans
l'ordre juridique international.
Cette thèse ne peut pas être
considérée comme fondée et l'absence d'une disposition
limitative de responsabilité ne peut pas être
interprétée comme une règle de responsabilité
illimitée.
En l'absence d'une règle ou d'une norme précise
prévoyant la responsabilité des Etats, ceux-ci ne peuvent pas
être considérés, en raison de leur seule qualité de
membres, comme responsables des obligations d'une organisation internationale
qu'ils ont créée.
§ IV. La responsabilité objective des Etats
membres : Cas des
dommages causés par les objets spatiaux
La responsabilité d'un Etat peut être
engagée sans qu'un fait illicite lui soit imputable. Seule la survenance
d'un dommage suffit pour engager la responsabilité d'un Etat. C'est une
responsabilité objective de l'Etat ou de l'organisation internationale
pour certains dommages sous la juridiction desquels se trouvent les objets qui
en sont à l'origine. Elle «prend la forme d'une
responsabilité naissant de la seule survenance d'un dommage34(*) ».
La convention du 29 mars 1972 sur la responsabilité
internationale pour les dommages causés par des objets spatiaux (en
vigueur depuis le 1er septembre 1972), dans son article II
prévoit qu'un Etat de lancement a la responsabilité absolue de
verser réparation pour le dommage causé par son objet spatial
à la surface de la terre ou aux aéronefs ; il «est
internationalement responsable des activités spatiales conduites
à partir de son territoire35(*) ».
L'article XXII de ladite convention étend une telle
responsabilité aux organisations internationales intergouvernementales
qui se livrent à des activités spatiales et ayant
déclaré accepter les droits et obligations résultant de
cette convention. Cependant, il faut que la majorité des Etats membres
soient Parties à la convention.
Aux termes du paragraphe 3 dudit article, l'organisation
internationale intergouvernementale responsable d'un dommage est tenue,
solidairement avec ceux des Etats membres parties à ladite convention.
Toutefois, la demande en réparation doit être
présentée à l'organisation internationale et la
responsabilité des membres parties à la convention ne pouvant
être engagée seulement si l'organisation n'a pas versé dans
six mois le montant convenu ou fixé comme réparation.
Il apparaît que cette convention institue, pour garantir
une réparation effective, quant aux dommages causés par des
organisations internationales, une responsabilité à la fois
absolue, subsidiaire et solidaire à l'égard des Etats membres
parties à la convention. C'est une responsabilité
supportée indépendamment de toute illégalité. Une
telle responsabilité objective est justifiée par la
particularité de la matière spatiale, la place
considérable des risques potentiels dont disposent les activités
spatiales et l'étendue des dommages éventuels qui en
résulteraient.
Le traité du 27 mars 1967 sur les principes
régissant les activités des Etats en matière d'exploration
et d'utilisation de l'espace extra-atmospherique, y compris la lune et les
autres corps célestes prévoit que l'Etat «doit surveiller
les initiatives privées et veiller à ce qu'elles soient
poursuivies conformément aux dispositions du traité ...36(*) ».
L'article VI dispose que les Etats parties au traité
ont la responsabilité internationale des activités nationales
dans l'espace extra-atmospherique qu'elles soient entreprises par des
organismes gouvernementaux ou par des entités non gouvernementales. En
cas d'activités poursuivies par une organisation internationale dans
l'espace extra-atmospherique, la responsabilité du respect des
dispositions du présent traité incombera à cette
organisation internationale et aux Etats parties au traité qui font
partie de ladite organisation.
Cette disposition admet les entités non
gouvernementales parmi les acteurs spatiaux mais avec une prise en charge
complète par l'Etat de la responsabilité y relative. Il s'ensuit
qu'on «a assorti celle-ci d'une règle spéciale
dérogeant aux principes communs sur l'imputation des faits illicites
d'après laquelle les comportements spatiaux des particuliers sont
intégralement assimilés à ceux des organes et des
entités de l'Etat, donc imputés à celui-ci37(*) ».
«Toutefois, ici les dispositions précisant le
fonctionnement de la responsabilité semblent plutôt faire des
Etats membres des responsables à titre subsidiaire38(*) ».
Cette responsabilité pèse à l'Etat de
lancement qui peut designer «un Etat qui procède ou fait
procéder au lancement d'un objet spatial » ou «un Etat
dont le territoire ou les installations servent au lancement d'un objet
spatial39(*) ».
« Chaque Etat est responsable des activités
spatiales nationales ou de celles menées à partir de son
territoire ou de ses installations. La responsabilité est, en principe,
absolue pour les dommages causés sur terre ou aux aéronefs par un
objet spatial. Elle est solidaire entre l'Etat de lancement et l'Etat dont le
territoire ou les installations sont utilisés. Les mêmes
règles s'appliquent à une organisation internationale qui se
livre à des activités spatiales, et la responsabilité
solidaire s'étend à l'ensemble des Etats membres parties à
la convention du 29 mars 197240(*) ».
La responsabilité objective des Etats membres pour
des dommages causés par les objets spatiaux «tend à se
présenter dans ce cadre comme une responsabilité subsidiaire,
puisqu'elle ne peut être mise en oeuvre que dans l'hypothèse
où l'organisation n'aurait pas versé dans un délai de six
mois la somme convenue pour la réparation du dommage41(*) ».
CHAPITRE II. LA PRATIQUE SUR LA RESPONSABILITE DES
ETATS POUR LES ACTES DES ORGANISATIONS INTERNATIONALES DONT ILS SONT
MEMBRES
Il sera question dans ce chapitre de la responsabilité
des Etats membres du Conseil international de l'étain, d'une part, et,
d'autre part, de celle des Etats membres de l'Organisation du Traité de
l'Atlantique Nord.
Section I. La responsabilité des Etats membres
du Conseil
international de l'étain
§ I. Les faits
Le Conseil international de l'étain était une
organisation internationale créée en 1954 par International Tin
Agreement 142(*) et qui
avait son siège à Londres. Il avait 23 Etats membres dont 6 pays
producteurs de l'étain et 17 pays consommateurs de l'étain dont
les 10 Etats à l'époque étaient membres de la
Communauté économique européenne et celle-ci était
elle-même membre.
Le Conseil international de l'étain avait pour objectif
de rétablir un équilibre entre la production et la consommation
mondiales de l'étain et de prévenir les fluctuations excessives
de prix.
Il avait deux moyens pour arriver à ces
objectifs : le stock régulateur financé par les membres
destiné à maintenir le cours dans une fourchette en fixant le
prix plafond et le prix plancher et la possibilité d'imposer des
exportations de l'étain.
En 1985, le Conseil international de l'étain a
cessé d'honorer ses engagements. En conséquence, ses
créanciers ont intenté des actions en justice.
Deux affaires vont retenir notre attention par ce qu'elles
mettent directement en cause la responsabilité internationale des
membres du Conseil international de l'étain :
- « J H Rayner (Mincing Lane) Ltd c. Department of
Trade and Industry and others »
- « Maclaine Watson & CO Ltd c. Department of
Trade and Industry ».
Soulignons que ces actions ont été
intentées au niveau interne devant les juridictions britanniques mais le
demandeur de la seconde affaire a introduit une requête devant la Cour de
justice des communautés européennes.
§ II. Les actions devant les juridictions
britanniques
Dans les deux affaires, les demandeurs avaient conclu des
contrats de vente de l'étain avec le Conseil international de
l'étain et avaient obtenu un arbitrage contre lui.
Pour l'exécution de la sentence arbitrale, ils ont
intenté des actions en justice contre les membres du Conseil
international de l'étain.
Ces affaires commencées à la High Court of
Justice, appelées à la Court of Appeal et enfin à la House
of Lords étaient fondées sur des arguments presque semblables
à tous les degrés de juridiction.
A. Les arguments des demandeurs
Les arguments des demandeurs peuvent se résumer dans
les points suivants :
- Le Conseil international de l'étain n'est pas une
personne juridique séparée de ses membres et que les contrats
conclus par lui sont en fait conclus par ses membres ;
- Si le Conseil international de l'étain
possédait une personnalité juridique, celle-ci ne doit pas
éclipser la responsabilité subsidiaire de ses membres ;
- Le Conseil international de l'étain a agi comme un
agent pour ses membres.
B. Les arguments des défendeurs
Les défendeurs prétendent que :
- Le Conseil international de l'étain est une
entité distincte de ses membres tant en droit international qu'en droit
britannique ;
- Les juridictions britanniques n'ont pas la
compétence d'interpréter l'accord instituant le Conseil
international de l'étain;
- Les membres du Conseil disposent de l'immunité de
juridiction.
C. Les décisions rendues
Les décisions rendues dans ces
affaires sont fondées pour l'essentiel sur les motivations
suivantes :
- L'accord instituant le Conseil international de
l'étain a créé une personne juridique
séparée et distincte de ses membres ;
- Les traités sont des transactions entre Etats
souverains pour lesquelles les juridictions internes ne sont pas
compétentes de statuer ;
- Il est douteux que le droit international contienne une
règle selon laquelle les Etats membres d'une organisation internationale
étaient responsables de ses dettes sans que le traité l'ait
expressément prévu.
Parlant de l'étendue de la responsabilité des
membres du Conseil, M. Eisemann avait prédit en 1985 qu'il «faut
déduire des termes de l'accord que la responsabilité
financière des membres du Conseil ne va pas au-delà des
versements ou garanties ayant permis la constitution du stock43(*) ». Le même
auteur poursuit en disant que «ce sont, par la suite, les seules
dispositions du sixième accord qui peuvent servir à
déterminer l'étendue des obligations des pays membres du
Conseil44(*) ».
M. Klein précise à propos de la responsabilité des membres
du Conseil international de l'étain que «la question de la
répartition de la responsabilité entre une organisation
internationale et ses membres renvoie en fait au statut personnel de celle-ci
et doit, à ce titre, être tranchée en se
référant aux règles qui régissent ce statut :
le droit interne de l'organisation et le droit international
général45(*) ».
Relativement à la personnalité juridique du
Conseil international de l'étain46(*), la « High Court, chancery
division » a jugé que « the ITC is an
international organization created by treaty with legal personality in
international law...47(*)» et que « that is because the ITC
is a separate legal person which contracted on its own behalf, not as agent
for its members and without engaging the liability of its members48(*)».
La « Court of Appeal » a confirmé
la même position en jugeant que « the ITC had legal personality
separate and distinct from its members ... the ITC might be held liable in
particular cases would be meangless unless the ITC had a separate legal
existence49(*) ». A l'égard des membres du Conseil
international de l'étain, la même juridiction a
décidé que « on this analysis of ITA 650(*) it is obviously unlikely that
it will prove possible to extract from the general principles of international
law the conclusion that the members of the ITC nevertheless have some direct
liability to the creditors of the ITC51(*)».
Il est à noter que la «House of Lords »
a confirmé les décisions des juridictions inférieures. Se
prononçant sur les actions directes dirigées contre les membres
du Conseil, elle a jugé que « the effect of the 1972 Order
was to create the ITC (which, as an international legal person, had no status
under the laws of the United Kingdom) a legal person separate and distinct from
its members. If there had been any ambiguity in the 1972 Order, it would have
been resolved by reference to ITA6 and the Headquarters Agreement, which
provided that the ITC was to have separatelegal personality52(*)» et, décidant sur
le bien-fondé de la demande, elle a jugé que the receivership
action could not suceed, because the ITC had no justiciable cause of action
against the members which a receiver could pursue. Any right which the ITC
might have to claim an indemnity or a contribution from its members was
ultematly derived from ITA6 was an unincorporated treaty53(*)».
Il est douteux que le droit international contienne une
règle selon laquelle les membres d'une organisation internationale
étaient responsables des actes de cette organisation sans que le
traité l'ait expressément prévu.
De la personnalité juridique du Conseil international
de l'étain institué par un traité dépend la
responsabilité de ses membres pour les actes accomplis par
celui-là. En d'autres termes, la reconnaissance de la
personnalité juridique confère au Conseil une existence juridique
indépendante de celle de ses membres qui le composent et ne peut, en
principe, qu'être un obstacle à l'engagement de la
responsabilité de ses membres tant individuellement que
collectivement.
§ III. La requête devant la Cour de justice des
Communautés
européennes
Maclaine Watson & CO Ltd a intenté une action
contre le conseil et la Commission des Communautés européennes.
Le Royaume-Uni est devenu partie intervenante.
A. Les moyens de la requérante
Certains des moyens présentés par la
requérante sont résumés comme suit :
- La CEE est responsable des agissements du Conseil
international de l'étain. Celui-ci n'ayant pas de personnalité
juridique, ses fautes sont imputables à ses membres ;
- La CEE aurait omis d'avertir la requérante du risque
d'opérer avec le Conseil international de l'étain le Conseil
international de l'étain ;
- La Commission n'a pas réalisé les
démarches auprès des Etats de la CEE sur la contribution au stock
et contributions supplémentaires ;
- Copte tenu de ses voix, la CEE est responsable des actes et
omissions du Conseil international de l'étain.
B. Les moyens des défendeurs
Les défendeurs ont prétendu notamment que :
- Le recours est irrecevable car il vise des actes et
comportements de la CE relatifs à la conduite des relations
internationales ;
- Le recours constitue un détournement de la voie de
droit à faire supporter à la CE la responsabilité
contractuelle du Conseil international de l'étain ;
- Le recours est prématuré par ce que la House
of Lords n'avait pas encore jugé.
C. Les conclusions de l'Avocat
général
Relativement à la responsabilité de la
Communauté économique européenne en tant que membre du
Conseil international de l'étain, l'avocat général
soutient que «cette argumentation ne nous paraît jamais que
l'ingénieux habillage d'une action visant à rechercher, dans le
cadre d'une action extracontractuelle, la responsabilité de la
Communauté, en tant que membre du CIE, pour les dettes contractuelles de
ce dernier54(*) ». Le seul lien qui existe entre
l'insolvabilité du Conseil international de l'étain et la
Communauté réside dans le fait qu'elle est son membre.
Reprenant l'argument de la requérante selon lequel les
membres du Conseil international de l'étain sont contractuellement tenus
responsables devant les créanciers de l'Organisation et de celui des
institutions Communautaires qui soutiennent que le recours tente d'imposer
à la Communauté, du fait de son adhésion à un
accord international, une responsabilité du Conseil international de
l'étain, l'Avocat général indique que le moyen du Conseil
international de l'étain est irrecevable. Selon lui, «la seule
qualité de membre du CIE ne peut pas imputer à la
défenderesse les fautes de l'organisation compte tenu de la
responsabilité distincte de celle-ci 55(*)».
En effet, «le Conseil apparaît bien comme une
entité distincte de ses membres, doté d'un vouloir
propre56(*) »
dont l'imputation de ses comportements à l'un de ses membres serait
«méconnaître l'individualisation de l'organisation par
rapport à ces derniers57(*) ».
Donc, l'impossibilité de pouvoir imputer les actes
d'une organisation internationale à l'un des ses membres tient de
l'existence d'une personnalité juridique distincte et propre.
D. L'ordonnance de la Cour
La Cour de justice des communautes européennes a rendu
une ordonnance étant donné que « la partie Maclaine
Watson & Company Limited, la Commission et le Conseil des
communautés européennes ont informé la Cour qu'un accord
est intervenu pour le règlement du litige entre Maclaine Watson &
Company Limited et le Conseil international de l'étain et que Maclaine
Watson & Company Limited souhaite se désister de son
recours58(*) ».
La Cour a pris acte de la renonciation des parties à
l'instance.
En guise de conclusion, on ne peut que se rallier à M.
Santulli parlant de la responsabilité d'un Etat membre d'une
organisation internationale et dire que si c'est l'organisation internationale
qui «intervient, on ne comprend pas pourquoi l'Etat doive répondre
de son fait. Et si on l'admettait, il faudrait que les membres fussent
liés individuellement par les obligations de l'organisation59(*) ».
Section II. La responsabilité des Etats membres de
l'Organisation
du Traité de l'Atlantique
Nord
Des requêtes ont été introduites contre
les Etats membres de l'OTAN devant la Cour européenne des droits de
l'homme (§ I) et devant la Cour Internationale de Justice (§ II).
§ I. La requête devant la Cour européenne
des droits de l'homme
A. Les faits
La requête Bankovic et autres c. Belgique et 16
autres Etats contractants a été introduite à la Cour
européenne des droits de l'homme par des ressortissants yougoslaves. La
requête est dirigée contre les 17 Etats membres de l'OTAN Parties
à la convention européenne des droits de l'homme. L'affaire
concerne le bombardement de la Radio et télévision serbe à
Belgrade le 23/04/1999 par la «Force Alliée » de l'OTAN.
Ce bombardement a fait 16 victimes tuées et 16 autres blessées.
«La télévision et la radio ne sont certainement pas par
nature, emplacement, destination ou utilisation des objectifs
militaires60(*)»
à moins qu'elles aient été utilisées à des
fins militaires. Or, l'OTAN avance l'argument qu'elles «étaient,
dans ce contexte, des moyens de propagande61(*)» intégrés dans la structure
militaire globale pour le régime du Président Slobodan
Milosevic.
B. Les observations des parties
1. Les requérants
Les requérants invoquent les articles 2, 10 et 13 de
la convention européenne des droits de l'homme. L'article 2 est relatif
au droit à la vie, l'article 10 est relatif à la liberté
d'expression et l'article 13 prévoit que toute personne dont les droits
sont violés a droit à un recours effectif devant une instance
nationale.
Avec l'accord de la Cour, les parties ont limité leurs
observations à la recevabilité. Ainsi, les requérants ont
soutenu que la requête est de la compétence ratione loci de la
Cour. En plus, ils considèrent que «les Etats défendeurs
sont solidairement responsables du bombardement nonobstant le fait que celui-ci
a été effectué par les forces de l'OTAN...62(*) » membres sont
solidairement responsables de ce bombardement.
Enfin, ils affirment qu'ils ne disposent d'aucun recours
interne contre les défendeurs.
2. Les Etats défendeurs
Ils ont soutenu que la requête ne rentre ratione
personae dans les dispositions de la convention européenne des droits de
l'homme étant donné que les requérants ne relevaient pas
de la juridiction des Etats aux termes de l'article 1 de ladite convention.
Ils ont également soulevé le principe «Or
monétaire » ; principe dégagé par la Cour
internationale de justice qui exige que la Cour s'abstienne de statuer en cas
d'absence d'un tiers indispensable à l'instance. Ils considèrent
qu'en effet, «la Cour ne peut statuer sur le bien-fondé de
l'affaire car cela reviendrait pour elle de se prononcer sur les droits et
obligations des Etats-Unis, du Canada et de l'OTAN elle-même, alors
qu'aucune de ces entités n'est Partie contractante à la
convention, ni, en conséquence, partie à la présente
procédure63(*)
... »
Par ailleurs, «le gouvernement français soutient
de surcroît que le bombardement litigieux est imputable non aux Etats
défendeurs mais à l'OTAN, organisation dotée d'une
personnalité juridique internationale distincte de celle de ses
membres64(*) ».
C. L'appréciation et la conclusion de la
Cour
Rappelant le contexte des faits, la Cour a souligné que
la décision d'effectuer les frappes aériennes contre la RFY a
été prise par le Conseil de l'Atlantique Nord (CAN) après
l'échec des efforts entrepris de parvenir à une solution
politique négociée de la crise du Kosovo. Elle note en effet que
«le Traité de Washington créa une alliance,
matérialisée dans l'Organisation du Traité de l'Atlantique
Nord (OTAN) ...65(*) ».
La Cour constate que, où qu'il ait été
décidé ou accompli, le bombardement a produit ses effets en
dehors desdits Etats (acte extraterritorial).
Recherchant la responsabilité des Etats contractants
relativement aux frappes de l'OTAN dirigées contre la République
fédérale de Yougoslavie, la Cour a conclu en l'espèce que
«l'action incriminée des Etats défendeurs n'engage pas la
responsabilité de ceux-ci au regard de la Convention et qu'en
conséquence il ne s'impose pas d'examiner les autres questions de
recevabilité soulevées par les parties66(*) ».
La Cour recherche si les requérants et leurs proches
victimes sont susceptibles d'être considérés comme relevant
de la juridiction des Etats défendeurs. Elle considère qu'au sens
ordinaire, la compétence juridictionnelle d'un Etat est principalement
territoriale et que l'article 1 de la Convention européenne des droits
de l'homme doit refléter cette conception, les autres titres
étant exceptionnels et dépendant des circonstances de
l'espèce.
Néanmoins, la Cour considère que la pratique
montre que la responsabilité extraterritoriale des Etats contractants
était engagée dans des contextes analogues à la
présente affaire. La Cour note qu'il faut que ledit Etat ait
indiqué la notification d'une dérogation au titre de l'article 15
de la Convention67(*).
La Cour évoque en plus sa jurisprudence pour montrer
que la juridiction d'un Etat défendeur ne se limite pas à son
territoire national. La Cour note que cette jurisprudence était
fondée au fait que l'Etat contractant exerce en pratique un
contrôle global en dehors de ses limites territoriales.
Ainsi, à la question de savoir si les requérants
et leurs proches relevaient de la juridiction des Etats défendeurs au
sens de l'article 1 de la Convention, la Cour conclut qu'elle «n'est pas
persuadée de l'existence d'un lien juridictionnel entre les personnes
ayant été victimes et les Etats défendeurs68(*) » et que la
convention européenne des droits de l'homme est un traité
multilatéral opérant dans un contexte essentiellement
régional et plus particulièrement dans l'espace juridique des
Etats contractants ; dont la RFY ne relève pas.
Etant arrivée à cette conclusion, la Cour n'a
pas trouvé opportun d'examiner les autres observations
présentées par les parties sur la recevabilité de la
requête. Parmi les questions qui s'y trouvaient abordées, il y a
celle relative «à la possibilité d'engager la
responsabilité solidaire des Etats défendeurs pour un acte
accompli par une organisation internationale dont ils sont
membres... 69(*)».
Section II. La requête devant la Cour
Internationale de Justice
§ I. Les faits
Dans l'affaire relative à la licéité
de l'emploi de la force, la RFY accuse chacun des Etats défendeurs
(le Royaume de Belgique, la République fédérale
d'Allemagne, le Canada, le Royaume d'Espagne, les Etats-Unis d'Amérique,
la République française, la République italienne, le
Royaume des Pays-Bas, la République portugaise et le Royaume-Uni de
Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord), conjointement avec les gouvernements
d'autres Etats membres de l'OTAN, d'avoir recouru contre elle à l'emploi
de force.
En effet, les avions de l'OTAN « Force
Alliée » ont bombardé entre le 24 mars et 09 juin1999
la RFY et les dommages causés furent considérables.
§ II. La procédure
La procédure dans presque toutes les affaires s'est
déroulée en deux étapes :
- La demande en indication de mesures
conservatoires ;
- Les exceptions préliminaires
A. La demande en indication de mesures
conservatoires
Après le dépôt de sa requête, la
Yougoslavie a présenté des demandes en indication de mesures
conservatoires contre les Etats défendeurs afin de cesser de recourir
à l'emploi de la force contre elle.
Elle soutient que "the Charter prohibition of the threat
or use of armed force is binding on States both individually and as members of
international organizations, such as NATO, as well as on those organizations
themselves ".
La RFY mentionne que la France, le Canada et l'Espagne ont
affirmé que les actions de la structure militaire l'OTAN ne leur sont
pas imputables.
A ce effet, "the acts of force are imputable to the
Respondents". Elle avance que «so, even as a part of the
integrated military force of NATO, military forces of the Respondents are under
their control and guidance70(*)». Et qu'en conséquence,
« the Respondents have used their military forces for bombing.
The military forces are organs of a State and their acts are imputable to a
State71(*)».
Les arguments des Etats défendeurs sont
consacrés à prouver que la Cour est incompétente de
connaître de l'affaire. Mais, en plus de cet argument, certains Etats ont
souligné la question d'imputabilité comme un motif
d'incompétence de la Cour. C'est le cas du Canada qui soutient qu'aucun
acte spécifique ne lui est imputé, en ces termes
«not only are there no relevant particulars; there are no facts
specifically imputed to Canada, either in relation to the Genocide Convention
or in relation to the use of force. The Court will have noted that all the ten
Applications are virtually identical except for the titles of
jurisdiction72(*) ». Selon lui, «cette
impossibilité d'imputer les actes allégués au Canada
lui-même - ni d'ailleurs à l'un quelconque des autres
défendeurs - suffit à établir l'absence de toute
compétence prima facie au titre de la convention sur le
génocide73(*) ».
Les défendeurs ont demandé à la Cour de
déclarer irrecevable la demande en raison de l'absence de toute
compétence.
La Cour a pris des ordonnances rejetant les demandes en
indication de mesures conservatoires. Dans deux affaires, en plus du rejet
de la demande, la Cour a radié du rôle la requête de la
RFY.
1. Le rejet des mesures conservatoires et radiation
de la requête du rôle
Dans les affaires contre l'Espagne et les Etats-Unis
d'Amérique, la Cour a rejeté les demandes en indication des
mesures conservatoires et a décidé de rayer les affaires de son
rôle.
Comme dans toutes les affaires, la RFY demande à la
Cour d'enjoindre aux défendeurs de cesser de recourir à la force
contre elle. Les défendeurs, par contre, demandent à la Cour de
rejeter la demande en indication de mesures conservatoires et de décider
de rayer les affaires du rôle général de la Cour.
La Cour, dans sa première motivation,
considérant qu'elle ne peut indiquer ces mesures que si les dispositions
invoquées par le demandeur semblent prima facie constituer une
base sur laquelle la compétence de la Cour pourrait être
fondée, a considéré que l'Espagne a émis une
réserve dans sa déclaration de reconnaissance obligatoire de
juridiction de la Cour. L'Espagne ne reconnaît pas la compétence
de la Cour en ce qui concerne «les différends dans lesquels l'autre
partie ou les autres parties en cause ont accepté la juridiction
obligatoire de la Cour moins de douze mois avant la date de présentation
de la requête écrite introduisant l'instance devant la
Cour74(*)». Or, la
RFY avait déposé sa déclaration d'acceptation de la
juridiction obligatoire de la Cour auprès du Secrétaire
général le 26 avril 1999, et ayant soumis sa
requête introductive d'instance à la Cour le
29 avril 1999.
La deuxième motivation de la Cour, à la fois
pour l'Espagne et pour les Etats-Unis, concerne la prétention selon
laquelle la RFY entend fonder la compétence de la Cour sur
l'article IX de la convention sur la prévention et la
répression du crime de génocide. La Cour note qu'il n'est pas
contesté que toutes les parties en litige sont parties à cette
convention. Considérant que la convention sur le génocide
n'interdit pas les réserves, la Cour constate que l'instrument
d'adhésion de l'Espagne « comporte une réserve touchant
à la totalité de l'article IX75(*) ». De leur
côté, les Etats-Unis ont fait la réserve selon laquelle
«en ce qui concerne l'article IX de la Convention, pour qu'un
différend auquel les Etats-Unis sont partie puisse être soumis
à la juridiction de la Cour internationale de Justice en vertu de cet
article, le consentement exprès des Etats-Unis est nécessaire
dans chaque cas76(*)» ; et que, dans le cas d'espèce, ils
n'ont pas donné un tel consentement.
Enfin, la dernière motivation de la Cour est relative
à l'argument selon lequel la Yougoslavie prétend fonder la
compétence sur le paragraphe 5 de l'article 38 du Règlement
de la Cour. La Cour considère que l'Espagne et les Etats-Unis indiquent
qu'ils n'ont pas consenti à la juridiction de la Cour au titre du
paragraphe 5 de l'article 38 du Règlement de la Cour.
Considérant que les dispositions
présentées par la RFY ne sauraient fonder la compétence de
la Cour et qu'elles ne constituent manifestement pas une base de
compétence dans la présente affaire, même prima facie; la
Cour a rejeté la demande en indication de mesures conservatoires
présentée par la République fédérale de
Yougoslavie et a ordonné que l'affaire soit rayée du rôle.
2. Le rejet des mesures conservatoires
La RFY demande à la Cour d'ordonner que les
défendeurs cessent immédiatement de recourir à l'emploi de
la force et de s'abstenir de tout acte constituant une menace de recours de
recours à la force. Elle invoque deux arguments juridiques à sa
demande en indication des mesures conservatoires à l'égard des
défendeurs. Le premier argument est fondé sur le paragraphe 2 de
l'article 36 du statut de la Cour. Le second argument est fondé sur
l'article IX de la convention pour la prévention et la répression
du crime de génocide. En effet , la RFY soutient que les
défendeurs ont l'obligation de ne pas soumettre intentionnellement un
groupe à des conditions pouvant entraîner la destruction physique
totale ou partielle.
Par contre, les défendeurs prient à la Cour de
déclarer la demande de mesures conservatoires irrecevable en raison de
l'absence de sa compétence. En plus, ils soulèvent que la RFY ne
peut pas apporter la moindre preuve de leur intention de détruire une
partie de la population yougoslave.
La Cour constate qu'aux termes de sa déclaration du
26/04/1999, la RFY a limité l'acceptation de la juridiction obligatoire
de la Cour « pour tous les différends, surgissant ou pouvant
surgir après la signature de la présente déclaration, qui
ont trait à des situations ou à des faits postérieurs
à ladite signature, à l'exception des affaires pour lesquelles
les parties ont convenu ou conviendront d'avoir recours à une autre
procédure ou à une autre méthode de règlement
pacifique77(*)».
Par ailleurs, la Cour considère que les bombardements
effectués par les Etats membres de l'OTAN ont commencé le
24/03/1999 et se sont poursuivis au-delà du 25/04/1999 et qu'il n'y a
pas de doute pour la Cour que le différend d'ordre juridique a surgi
avant la date de la signature de la déclaration yougoslave acceptant la
compétence de la Cour au sujet de la licéité de ces
bombardements pris dans leur ensemble.
La Cour considère que l'article IX de ladite convention
ne saurait constituer une base sur base de laquelle la compétence de la
Cour pourrait prima facie être fondée.
Sur base de ce raisonnement, la Cour conclut qu'elle
« ne saurait indiquer quelque mesure conservatoire que ce soit
à l'effet de protéger les droits dont la Yougoslavie se
prévaut dans sa requête78(*) ».
Etant donné que la Cour a considéré qu'au
stade de la procédure, elle n'est pas à mesure de conclure que
les actes allégués par la RFY contre les Etats défendeurs
sont susceptibles d'entrer dans la convention sur la prévention et la
répression du crime de génocide et, par conséquent,
réserve la question à la procédure sur le fond.
B. Les exceptions préliminaires
Avant que la procédure sur le fond ne commence, les
huit Etats défendeurs ont présenté à la Cour des
exceptions préliminaires portant sur la compétence de la Cour
pour connaître de l'affaire et sur la recevabilité de la
requête. Parmi les moyens invoqués par les défendeurs
relativement à la recevabilité, à l'exclusion du Royaume
Uni, du Canada et de l'Allemagne, les cinq autres Etats (la Belgique, l'Italie,
la France, le Portugal et les Pays-Bas) ont fait valoir que les demandes
présentées par la RFY sont irrecevables pour des motifs
liés à l'imputabilité.
Nous allons à présent passer en revue les
arguments de chacun de ces Etats avant de parler les contre-arguments de la
Serbie-et-Monténégro.
1. Les arguments des défendeurs relativement
aux exceptions préliminaires sur l'imputabilité
En premier lieu, les Etats défendeurs soutiennent,
chacun individuellement, que les demandes de la RFY sont irrecevables motif
pris de ce que le demandeur n'a pas produit le moindre commencement de preuve
que les prétendues violations reprochées sont leur fait.
En deuxième lieu, certains de ces Etats ont fait valoir
que les violations qui leur sont reprochées s'inscrivent dans le cadre
d'une action collective. Un arrêt rendu à l'égard de l'un
des Etats défendeurs conduit nécessairement la Cour à
trancher un différend entre la RFY et d'autres entités ou Etats
non-attraits devant elle notamment l'OTAN et dont leur absence ne permettrait
pas à la Cour de rendre un arrêt fondé alors qu'il aurait
une incidence directe sur leurs droits et obligations.
a. La Belgique
La Belgique souligne l'argument de la RFY selon lequel
« en l'absence d'allégations spécifiquement
dirigées contre la Belgique, la RFY argumente simplement que les actes
de l'OTAN et de la KFOR peuvent être imputés entre autres à
la Belgique79(*) » et que cette thèse tient au fait
que les organes de l'OTAN prennent leurs décisions par consensus entre
les Etats membres.
En réponse cet argument, la Belgique soutient que la
RFY ne satisfait pas aux conditions de recevabilité de la demande par ce
que celle-ci repose au seul fait que la Belgique a participé au vote en
faveur de l'action militaire de l'OTAN. « Aucune allégation
n'est formulée spécifiquement contre la Belgique. La RFY n'aborde
pas les éléments constitutifs des faits incriminés dans la
mesure où ils ne peuvent s'avérer essentiels au regard des
allégations faites contre la Belgique. Aucun argument n'est
avancé pour ce qui de l'imputabilité des actes de l'OTAN à
la Belgique...80(*) ».
Etant donné que « la RFY n'a pas
individualisé les allégations formulées contre la
Belgique, ni dans sa requête ni dans son mémoire... il s'agit de
l'absence d'une quelconque allégation qui singularise les actes
imputés à la Belgique », elle considère que la
demande de la RFY est irrecevable81(*)».
b. Le Canada
Comme certains autres Etats défendeurs, le Canada a
plaidé la non imputabilité des faits allégués par
la RFY. Selon lui, « pas la moindre allégation factuelle n'est
expressément rattaché au Canada. Celui-ci n'est accusé
d'aucune action ni omission...82(*) ».
« On n'impute au Canada ni le fait de n'avoir pas
tout mis en oeuvre en vue d'empêcher les présumés actes
génocidaires, ni un manque de diligence raisonnable, ni une simple
négligence ou un simple manque de moyens83(*) ».
Concernant le principe de l'Or monétaire, faisant
allusion notamment à L'OTAN, le Canada soutient que « l'objet
même de l'instance requiert la présence d'Etats - et
d'organisations internationales - qui ne sont pas devant la Cour. La conduite
de ces instances sans la présence de ces tierces parties essentielles
pourrait mener à un substantiel deni de justice contre les
défendeurs restants84(*) ».
En conséquence, ces lacunes suffisent pour faire
échec à l'attribution de la compétence à la
Cour.
c. La France
La France affirme que les faits allégués par la
RFY ne sont pas attribuables à la France et se bornant
« à rappeler que ces allégations, qu'aucun
élément de preuve ne vient soutenir, concernent des actions
auxquelles la France aurait pris part dans le cadre des opérations
militaires conduites par l'OTAN 85(*)», elle soutient que « il ne suffit pas
d'affirmer, comme le fait le demandeur, que l'Organisation acts under the
political and miliitary guidance and control of its Member States ... pour
établir la responsabilité individuelle de ceux-ci. Une telle
allégation fait bon marché de la personnalité juridique
internationale qui exclut qu'un Etat puisse être tenu pour responsable
des actes de l'organisation du seul fait de sa qualité de
membre86(*) ».
En réponse à l'argument de la RFY selon lequel
« l'OTAN agit en réalité sous la direction et le
contrôle militaires et politiques de ses Etats membres87(*) », la France dit
« cette curieuse conception de la transparence de l'organisation fait
évidemment fi de la personnalité juridique internationale qui
doit lui être reconnue...88(*) ».
Elle surenchérit en disant que « l'ensemble
des actes auxquels elle a pris part à ces fins ont été
accomplis sous la direction et le contrôle d'organisations
internationales et, au premier chef, de l'OTAN. C'est l'OTAN qui a
conçu, décidé et réalisé l'opération
militaire qui s'est déroulée sur le territoire yougoslave au
printemps 199989(*)».
Elle ajoute enfin que « le fait qu'au sein de l'OTAN
les décisions ne puissent être prises qu'à
l'unanimité, comme le souligne le défendeur (RFY devenue
partie défenderesse) ... montre, au contraire, que la
responsabilité individuelle des Etats membres ne peut être
recherchée isolément et que, s'ils pouvaient être tenus
pour responsables malgré la personnalité juridique de
l'Organisation (ce qui demeure fort douteux), ce ne pourrait être que
solidairement90(*) ».
Il transparaît que, selon la France, la
responsabilité des Etats membres de l'OTAN est en principe exclue du
fait de l'existence de la personnalité juridique de l'OTAN et du
contrôle effectif qu'elle a exercé sur l'opération
militaire en RFY. En plus la responsabilité des Etats membres ne peut
être fondée au seul fait de la qualité de membre et, si
elle pouvait l'être en dépit de la personnalité de l'OTAN,
elle ne pourrait être que solidaire.
d. L'Italie
L'Italie indique que « si les faits dont la
Yougoslavie se plaint sont censés être le résultat des
décisions adoptées par le Conseil Atlantique - personne ne peut
en douter - les Etats en tant que tels ne sont pas concernés. Il est
généralement reconnu que l'OTAN est un sujet international, dont
la personnalité ne peut point être confondue avec celle des Etats
membres. C'est donc à l'OTAN que la Yougoslavie doit adresser ses
plaintes et ses requêtes de dédommagement...91(*) ». En introduisant
des requêtes contre les Etats membres, la RFY «d'un
côté entend entend souligner que la requête a trait
à des comportements tenus par ces Etats dans le cadre de l'Organisation,
de l'autre vise à contourner malicieusement la difficulté
consistant dans le manque de capacité de l'OTAN à ester en
justice devant la Cour92(*)».
Il est clair que l'Italie plaide la non imputabilité
des actes de l'OTAN aux Etats membres notamment lui par ce qu'elle
considère que l'OTAN est une organisation internationale ayant une
personnalité juridique.
Dans ses conclusions, l'Italie prie à la Cour de dire
et juger que «la requête de la Serbie et Monténégro,
telle que complétée par le «Mémorial», est
irrecevable dans sa totalité, dès lors que par celle-ci la
Serbie-et-Monténégro cherche à obtenir de la Cour une
décision concernant la licéité de l'action menée
par des sujets de droit international qui n'étaient pas présents
à l'instance ou qui n'y étaient pas tous présents93(*) ».
e. Les Pays-Bas
Les Pays-Bas ont aussi plaidé l'irrecevabilité
des demandes présentées par la RFY pour plusieurs motifs.
Premièrement, soutiennent-ils, « les demandes
de la RFY sont irrecevables motif pris de ce que le demandeur n'a pas produit
le moindre commencement de preuve que les prétendues violations
reprochées sont le fait des Pays-Bas94(*)».
Ils affirment qu'en admettant que l'OTAN a agi sous la
direction et le contrôle politique et militaire des Etats membres de
l'OTAN, « la RFY fait bon marché de la nature collective de la
prise de décisions au sein de l'OTAN et du caractère organique de
ces décisions 95(*)» et n'indique pas quels actes elle reproche aux
Pays-Bas d'avoir commis en violation des obligations juridiques
internationales qui sont les leurs96(*) ».
Deuxièmement, ils invoquent le principe de
« l'Or monétaire » à l'égard d'autres
entités ou Etats non attraits devant la Cour.
Les Pays-Bas avancent l'argument que « les actes que
la RFY reproche aux Pays-Bas dans l'instance actuellement introduite devant la
Cour ne constituent nullement des actes individuels ou indépendants des
Pays-Bas mais s'inscrivent dans le cadre d'une action menée par une
entité internationale, à savoir l'OTAN, ou d'une action
conjointe et collective menée par un groupe d'Etats,
à savoir des Etats membres de l'OTAN ou bien encore des Etats membres de
l'OTAN...97(*) ».
Ils considèrent que si la Cour statue sur la
responsabilité internationale des entités et des Etats non
présents en la présente instance, en l'occurrence l'OTAN, elle
violerait le principe selon lequel sa compétence est consensuelle. Cela
vaut étant donné que la Cour a déjà radié
deux de celles-ci de son rôle et l'OTAN ne pouvant pas être partie
en la présente affaire.
f. Le Portugal
Le Portugal soutient, dans son premier argument, que les actes
qui font l'objet de la présente instance sont imputables à
l'OTAN. Le premier argument avancé par le Portugal est que l'OTAN est
une organisation internationale dotée de la personnalité
juridique Internationale et, par conséquent, toutes les décisions
politiques et militaires ont été prises par des organes de
l'OTAN, à savoir respectivement par son Conseil, son secrétaire
général ainsi que ses autorités militaires.
« Cette personnalité se trouve
confirmée par sa propre pratique et par celle d'autres
organismes, notamment l'Organisation des Nations Unies. C'est
ainsi que de nombreux Etats Membres et certains Etats tiers ont des
représentations permanentes auprès de l'OTAN qui a conclu des
traités non seulement avec ses propres membres mais aussi avec des pays
tiers, dont la RFY elle-même98(*) » et que « par ces
traités, la RFY a reconnu de jure la personnalité
juridique de l'OTAN. Partant, elle a reconnu que l'OTAN, dans le cadre de ses
attributions, agit en lieu et place de ses Etats membres, en son propre nom et
de sa propre autorité...99(*) ».
En réponse à l'argument de la RFY voulant
imputer des actes de l'OTAN à ses Etats membres par ce que
« l'existence d'un mécanisme d'adoption à
l'unanimité des décisions politiques au sein du Conseil de l'OTAN
signifie que chaque Etat membre exerce un contrôle politique et militaire
sur l'action de l'OTAN et que les actes accomplis par celui-ci peuvent leur
être imputés100(*) », la Belgique soutient « que le
fait que chaque Etat membre dispose d'un siège au sein du Conseil de
l'OTAN n'a pas pour effet de porter atteinte à la personnalité
juridique de l'OTAN au regard du droit international. Celui-ci demeure
responsable à toutes fins utiles. Le nier revient aussi à
affirmer que les Membres permanents du Conseil de sécurité sont
directement responsables des actes illicites de l'Organisation des Nations
Unies même s'ils se sont abstenus de voter en faveur d'une politique dont
la mise en oeuvre aurait conduit à un acte illicite101(*) ».
Cela étant, c'est l'OTAN lui-même qui doit
répondre totalement en droit international de ses actes et non ses Etats
membres.
Le deuxième argument du Portugal est relatif
l'incidence directe qu'aurait la compétence de la cour sur les droits et
obligations de tiers. Le Portugal « a invoqué la règle
de l'Or monétaire par rapport à l'OTAN en soulignant
qu'il existait bien d'autres fondements, préalables à celui-ci,
pour que la Cour ne se prononce pas sur le fond de l'affaire102(*) ».
Le Portugal soutient que la Cour « devrait
décliner sa compétence en l'espèce motif pris de ce que
l'organisation internationale qui a décidé les actes à
l'origine de l'instance introduite par la RFY n'y est pas partie103(*) ». Selon lui, les
droits et obligations des entités et des Etats étrangers à
la présente instance notamment l'OTAN « forment par
conséquent le coeur même de l'objet de celle-ci104(*) ».
« En tout état de cause, et du point de vue
de la règle de l'Or monétaire, il faudrait toujours
statuer, au préalable, sur la responsabilité de l'organisation
internationale, dans le cas d'espèce l'OTAN, ou tout au moins sur la
question de savoir si les actes lui sont attribuables en tant que
présupposé d'une éventuelle responsabilité des
Etats membres sans que l'OTAN ait donné son consentement à la
juridiction105(*) ».
De peur que la Cour ne prononce sur des droits et
responsabilités de tiers sans que ceux-ci y aient consenti, le Portugal
demanda que la Cour décline sa compétence et conclut à
l'irrecevabilité de toutes les demandes de la RFY.
2. Les moyens de défense
présentés par la RFY relativement aux exceptions
préliminaires sur l'imputabilité
a. La mémoire de la République
Fédérale de Yougoslavie
Dans sa requête contre chacun des défendeurs, la
RFY déclare fonder ses demandes à la Cour sur les faits
imputables aux Etats membres de l'OTAN. Elle soutient que «le gouvernement
du défendeur, conjointement avec les gouvernements d'autres Etats
membres de l'OTAN, a recouru à l'emploi de la force contre la
République fédérale de Yougoslavie en prenant part au
bombardement de cibles dans la République fédérale de
Yougoslavie106(*) ».
Ainsi, le différend est relatif à la
responsabilité des Etats membres de l'OTAN et non à l'OTAN
elle-même.
Ce sont « les défendeurs qui ont
violé et violent certaines obligations internationales parmi les plus
importantes portent la responsabilité de cette transgression. Par
conséquent, le demandeur apportera la preuve que les obligations
violées sont en vigueur entre le demandeur et les défendeurs, que
des actes constituant des violations de ces obligations ont été
commis et sont imputables aux défendeurs et, enfin, que la Cour est
compétente107(*) ».
b. Les moyens de défense aux exceptions
préliminaires
La RFY affirme qu'il est clair que les opérations
militaires contre la République fédérale de la Yougoslavie
étaient une action simultanée de tous les Etats membres de l'OTAN
et tous ont participé au choix des cibles.
Selon lui, « it seems clear that the military
operations against the Federal Republic of Yugoslavia were a simultaneous
action of all States members of the NATO alliance. All of them decided to
initiate and continue the military operations. All of them participated
in the choice of targets108(*)».
La Serbie-et-Monténégro ne conteste que l'OTAN a
la personnalité juridique internationale mais c'est par rapport à
certains sujets limités. Cependant, chaque Etat membre de l'OTAN a
individuellement décidé de participer aux opérations
militaires et le fait que cela se fait dans le cadre d'une alliance militaire
ne change en rien le fait que des décisions sur l'utilisation de la
force ont été finalement prises par les gouvernements nationaux.
A cet effet, la RFY cite la décision de l'Allemagne
« Bundeswehr soldiers are also participating in this NATO
mission. This was decided by the German government and the Deutscher
Bundestag in accordance with the will of a vast majority of the German
people. This was not an easy decision for the German
government . . .109(*) ».
La RFY se demanda si « should NATO's legal
personality shield the respondent States from responsibility in the present
case?110(*)».
En conclusion, « it is clear that, as a matter of
principle, the respondent States cannot hide behind NATO's international legal
personality to escape responsibility. Further, the respondent States as
sovereign States made a sovereign decision to initiate and continue the
military operations against Yugoslavia and controlled the choice of
targets. The fact that they did so in concert with other NATO States
cannot shield them from the responsibility because the decisions were theirs,
nevertheless111(*)».
Concernant le principe de «l'Or monétaire»,
la RFY note qu'étant donné que le Royaume-Uni, le Canada et
l'Allemagne n'invoquent pas cet argument montre que les défendeurs n'ont
pas la même attitude envers la nature de l'OTAN et de son rôle dans
l'intervention militaire. En plus, le principe est exclusivement applicable aux
Etats. « Both the application of this principle and the reasoning
behind it have been linked exclusively to States. In its jurisprudence,
the Court has consistently referred to States. There is not even a hint
that the principle could be applied to other subjects of international
law: and this is logical because the Monetary Gold rationale
protects the fundamental principle that the Court's jurisdiction must be based
on the consent of States. The position of other entities is simply
irrelevant because the contentious proceedings before the Court are not open to
them112(*)».
La RFY prie la Cour de statuer sur sa compétence
ratione personae, d'écarter les autres exceptions
préliminaires des Etats défendeurs et d'ordonner une
procédure sur le fond si elle estime qu'elle a compétence
ratione personae.
C. Le raisonnement et la décision de la
Cour
1. La demande de rejet de l'affaire in limine
litis
Les défendeurs en ces affaires ont soutenu que la Cour
pouvait et devait débouter la Serbie-et-Monténégro de ses
demandes in limine litis. Les Etats défendeurs
« ont soutenu que la Cour pouvait et devait débouter la
Serbie-et-Monténégro de ses demandes in limine litis et,
pour ce faire, rayer les affaires du rôle; rendre, dans chacune des
affaires, une décision " pré-préliminaire" ou
sommaire concluant soit qu'il ne subsiste plus de différend entre les
Parties, soit que la Cour n'a pas compétence pour se prononcer sur les
demandes ou n'est pas appelée à le faire; ou encore se refuser
à exercer sa compétence113(*) ». Cette thèse a été
présentée sous différentes formes par les huit Etats
défendeurs à la suite du changement d'attitude du demandeur,
exprimé dans ses observations sur les exceptions
préliminaires.
En effet, « la République
fédérale de Yougoslavie étant devenue
nouvellement Membre de l'Organisation des Nations Unies le
1er novembre 2000, il en découle qu'elle ne
l'était pas avant cette date. Il est donc maintenant établi
que, avant le 1er novembre 2000, la République
fédérale de Yougoslavie n'était pas et ne pouvait pas
être partie au Statut de la Cour en sa qualité de Membre de
l'Organisation des Nations Unies114(*) ». Certains Etats défendeurs ont
interprété cette attitude comme étant un
désistement par le demandeur.
La Cour note que la Serbie-et-Monténégro, dans
ses conclusions, a expressément nié cette position, la
Serbie-et-Monténégro n'a toutefois pas prié la Cour de
juger qu'elle n'avait pas compétence, mais lui a simplement
demandé de «statuer sur sa compétence à la
lumière de l'argumentation exposée dans les présentes
observations écrites115(*)» et elle a demandé plutôt
à la Cour de statuer sur la question de la compétence et a
souligné qu'elle voulait que la Cour poursuive l'affaire en se
prononçant sur cette question. La Cour ne considère pas non plus
qu'en raison des faits nouveaux intervenus dans son statut juridique
vis-à-vis des l'Organisation des Nations Unies, la Serbie et
Monténégro puisse être considérée comme ayant
perdu son droit d'action.
Ainsi, la Cour conclut qu'elle ne peut rayer du rôle ou
prendre une décision mettant fin in limine litis à ces affaires.
Elle doit, au stade actuel de la procédure, examiner la question de sa
compétence en les présentes affaires.
2. L'accès de la
Serbie-et-Monténégro à la Cour en tant que Partie
à son Statut
La Cour avait à répondre à la question
fondamentale de savoir si la Serbie-et-Monténégro était ou
non partie au Statut de la Cour au moment de l'introduction de ses
requêtes. Cela est d'autant important par ce que, si elle n'était
pas partie à la Cour, elle ne lui serait pas ouverte sous réserve
de l'application du paragraphe 2 de l'article 35 du Statut de la Cour.
Il est vrai que la Serbie-et-Monténégro invoque
comme base de compétence le qu'elle a souscrit à la clause
facultative de juridiction obligatoire.
Cependant, se référant notamment à la
résolution 47/1 de l'Assemblée générale des
Nations Unies, « il a été soutenu que «la
République fédérale de Yougoslavie n'[assurait pas la
continuité] de l'ex-République socialiste
fédérative de Yougoslavie [comme] Membre de l'Organisation des
Nations Unies» et que, «à défaut d'avoir
dûment accédé à l'Organisation, la Yougoslavie
n'[était] par suite pas partie au Statut de la Cour ...116(*)».
Toutefois, la Cour constate qu'au cours de la
procédure portant sur cette demande, plus précisément en
2000, une nouvelle évolution avait marqué la fin de cette
situation. Le président de la République de la
République fédérale de Yougoslavie a adressé le
27 octobre 2000 au Secrétaire général une lettre
demandant l'admission de la République fédérale de
Yougoslavie à l'Organisation des Nations Unies. Le Conseil de
sécurité donna sa recommandation à l'Assemblée
générale d'admettre la République fédérale
de Yougoslavie en qualité de Membre de l'Organisation des Nations Unies
et celle-ci décida d'admettre la République
fédérale de Yougoslavie à l'Organisation des
Nations Unies.
La Cour arriva à la conclusion qu'au «moment
où il a déposé sa requête pour introduire la
présente instance devant la Cour, le 29 avril 1999, le
demandeur en l'espèce, la Serbie-et-Monténégro,
n'était pas membre de l'Organisation des Nations Unies ni, dès
lors, en cette qualité, partie au Statut de la Cour internationale de
Justice. Par voie de conséquence, la Cour n'était pas
ouverte à la Serbie-et-Monténégro sur la base du
paragraphe 1 de l'article 35 du Statut117(*)».
3. L'accès de la
Serbie-et-Monténégro à la Cour en tant que Partie à
la convention pour la prévention et la répression du crime de
génocide
La Cour examinera ensuite la question de savoir si elle
pouvait être ouverte à la Serbie-et-Monténégro en
vertu du paragraphe 2 de l'article 35 faisant référence aux
dispositions particulières des traités en vigueur.
La Cour rappela que le sens naturel et ordinaire de
l'expression «traités en vigueur», ne donne pas de
précision sur la date à laquelle ces traités doivent avoir
été entrés en vigueur. Elle note que « le
paragraphe 2 vise à réglementer les conditions d'accès
à la Cour pour ceux qui ne sont pas parties au Statut. Les
conditions dans lesquelles la Cour est ouverte à ces derniers sont, sous
réserve des dispositions particulières des traités en
vigueur, déterminées par le Conseil de sécurité
pour autant qu'en toutes circonstances aucune inégalité ne
résulte de ces conditions pour les parties devant la Cour118(*) ».
La Cour note que le paragraphe 2 de l'article 35
doit être interprété, mutatis mutandis,
« de la même manière que le texte correspondant du
Statut de la Cour permanente, à savoir comme visant les traités
en vigueur à la date de l'entrée en vigueur du nouveau Statut et
prévoyant la juridiction de la nouvelle Cour 119(*)» c'est-à-dire la
Cour internationale de justice. En d'autres termes, il ne s'applique
qu'aux traités en vigueur à la date de l'entrée en vigueur
du Statut de la Cour et non aux traités conclus depuis son entrée
en vigueur. Elle « estime cependant que ni cette circonstance, ni
l'examen de l'objet et du but du texte, pas plus que les travaux
préparatoires ne permettent d'étayer l'autre
interprétation selon laquelle cette disposition avait pour objet de
permettre à des Etats non parties au Statut d'ester devant la Cour sans
autre condition que l'existence d'un traité contenant une clause
conférant compétence à la Cour et pouvant avoir
été conclu à tout moment après l'entrée en
vigueur du Statut120(*) ». Les dispositions du paragraphe 2
de l'article 35 sont conçues comme une exception en vue de
couvrir les cas prévus par les accords conclus par les Etats non
parties au Statut de la Cour avant son entrée en vigueur.
Par voie de conséquence, la Cour conclut que
même à supposer que la Serbie-et-Monténégro ait
été partie à la convention sur le génocide à
la date pertinente, le paragraphe 2 de l'article 35 ne lui donne pas
accès à la Cour sur la base de l'article IX de cette convention
puisque celle-ci n'est entrée en vigueur que le
12 janvier 1951, après l'entrée en vigueur du Statut...
Dès lors, la Cour n'estime pas nécessaire de décider si la
Serbie-et-Monténégro était ou non partie à la
convention sur le génocide le 29 avril 1999, lorsque la
présente instance a été introduite121(*) ».
4. La compétence de la Cour sur base de la
convention de conciliation, de règlement judiciaire et d'arbitrage entre
le Royaume de Yougoslavie et la Belgique
Dans l'affaire contre la Belgique, la
Serbie-et-Monténégro a présenté à la Cour un
complément à la requête en invoquant comme base de
compétence l'article 4 de la convention de conciliation, de
règlement judiciaire et d'arbitrage entre le Royaume de Yougoslavie et
la Belgique. Cette convention a été signée à
Belgrade le 25 mars 1930 et en vigueur depuis le
3 septembre 1930. L'article 4 de la convention stipule que
«Tous différends au sujet desquels les Parties se contesteraient
réciproquement un droit seront soumis pour jugement à la Cour
permanente de Justice internationale, à moins que les Parties ne tombent
d'accord, dans les termes prévus ci-après, pour recourir à
un tribunal arbitral122(*) ». La Serbie-et-Monténégro,
se référant à la lettre du ministre belge des affaires
étrangères du 9 avril 1996 «déclarant que
la Belgique partait du principe que les accords bilatéraux qui la
liaient à la République fédérative socialiste de
Yougoslavie continueraient à produire leurs effets jusqu'à ce
qu'ils aient été soit confirmés soit
renégociés par les deux parties », affirme que cette
convention reste en vigueur.
La Belgique par contre soutient que l'article 4 de la
convention de 1930 ne peut fonder la compétence de la Cour
étant donné que la Serbie-et-Monténégro
n'était pas partie au Statut de la Cour lorsqu'elle a
déposé sa requête et que, avance-t-elle,
« à supposer même que la convention de 1930
fût restée en vigueur, la Serbie-et-Monténégro n'y
avait pas succédé123(*)».
La Cour note que la compétence de la Cour permanente de
justice internationale en vertu de traités en vigueur a
été, sous certaines conditions, maintenue et
transférée à la Cour internationale de justice par
l'article 37 de son Statut. Les conditions énoncées par cet
article sont :
- il doit y avoir un traité ou une convention en
vigueur entre parties ;
- ce traité doit prévoir le renvoi d'une
affaire litigieuse à la Cour permanente de justice
internationale ;
- le différend doit opposer deux ou plusieurs Etats
parties au Statut de la Cour internationale de justice.
Cette disposition doit être interprétée en
ce sens que les parties à un tel traité, étant devenues
parties au Statut de la CIJ, conviennent que la référence
à la Cour permanente de justice internationale contenue dans ledit
traité doit être entendue comme une référence
à la Cour internationale de justice. La Cour relève que cette
disposition ne peut être invoquée que par des parties, tant le
demandeur que le défendeur, à son Statut conformément au
paragraphe 1 de l'article 35.
En conséquence, « la Cour conclut que la
convention de 1930 n'ouvrait pas la Cour à la
Serbie-et-Monténégro sur la base du paragraphe 2 de
l'article 35 du Statut, même à supposer que cet instrument
ait été en vigueur le 29 avril 1999, date du
dépôt de la requête. Dès lors, la Cour n'a pas
à se prononcer sur la question de savoir si la convention de 1930
était ou non en vigueur à cette date124(*) ».
5. Le dispositif de la Cour
La Cour ayant conclu que la Serbie-et-Monténégro
n'était pas membre de l'Organisation des Nations Unies ni, dès
lors, en cette qualité, partie au Statut de la Cour internationale de
Justice et que la convention pour la prévention et la
répression du crime de génocide est entrée en vigueur
après le Statut de la Cour, elle a dit à l'unanimité,
« qu'elle n'a pas compétence pour connaître des demandes
formulées par la Serbie-et-Monténégro dans sa
requête déposée le 29 avril 1999125(*) ».
Etant arrivé à cette conclusion, la Cour a
estimé qu'il « n'est pas nécessaire qu'elle examine les
autres exceptions préliminaires à sa compétence
soulevées par les défendeurs126(*) »
La Cour est, en effet, libre dans le choix des
motifs sur lesquels elle fonde son arrêt et lorsque sa compétence
est contestée pour différents motifs, elle est libre de baser sa
décision sur un ou plusieurs motifs de son choix et, en particulier sur
le motif qui, selon elle, est plus direct et décisif.
LA CONCLUSION GENERALE
Les cas jurisprudentiels de la responsabilité des Etats
du fait des actes des organisations internationales dont ils sont membres sont
très limités. Il convient de noter que dans les deux cas
examinés dans ce travail les juridictions internationales - la Cour de
justice des communautés européennes, la Cour européenne
des droits de l'homme et la Cour internationale de justice - n'ont pas pu se
prononcer au fond.
A. Le Conseil international de
l'étain
S'agissant du Conseil international de l'étain, les
juridictions britanniques - même s'il s'agit des actions internes - ont
écarté la responsabilité de ses membres au motif pris
principalement qu'il a une personnalité juridique propre et distincte de
celle de ses membres.
La Cour de justice des communautés européennes
ne s'est pas prononcée au fond de l'affaire. A son avis, comme nous
l'avons mentionné précédemment, l'Avocat
général a soutenu que le Conseil international de l'étain
apparaît bien comme une entité distincte de ses membres dont
l'imputation de ses comportements à l'un de ses membres serait
méconnaître l'individualisation de l'organisation par rapport
à ces derniers.
Il est fort probable que la Cour de justice eut pu suivre
l'avis de l'Avocat général et décider de la non
imputabilité des actes du Conseil international de l'étain au
Conseil et à la Commission des Communautés européennes et
au Royaume-Uni.
B. L'Organisation du Traité de l'Atlantique
Nord
Concernant la responsabilité des Etats membres de
l'OTAN, nous essayerons d'aborder trois questions : la personnalité
juridique internationale de l'OTAN, le contrôle effectif des forces mises
à sa disposition et la question de justiciabilité de l'OTAN
devant la Cour européenne des droits de l'homme et la Cour
internationale de justice.
1. La personnalité juridique de
l'OTAN
Il est question de savoir si « l'OTAN est-elle
assez différenciée des Etats qui l'ont créée et la
composent ? Son caractère juridique, sa gestion, les
intérêts qui lui sont confiés revêtent-ils un
caractère collectif distinct du caractère individuel de ceux des
Etats membres ? Jouit-elle d'un patrimoine suffisamment indépendant
pour bénéficier d'une personnalité juridique?127(*) ».
Il est vrai que le traité signé à
Washington, le 4 avril 1949, dit « Organisation du Traité de
l'Atlantique Nord » ne contient aucune disposition expresse sur la
personnalité juridique de l'OTAN. Mais , la Convention sur le Statut de
l'Organisation du Traité, des Représentants Nationaux et du
personnel international, spécialement l'article 4128(*), confère à
l'OTAN une personnalité juridique. Une certaine doctrine soutient que
cette personnalité « n'englobe pas les troupes
dépendant de l'O.T.A.N.129(*) » et que « d'une part,
l'Organisation elle-même; d'autre part, les Commandements Suprêmes,
sont investis de la personnalité morale pour tout ce qui regarde
l'exercice de droits privés130(*) ». M. Geslin citant M. Verhoeven131(*) qui
« considère que l'OTAN ne dispose pas de la
personnalité juridique internationale132(*) », dit que de ce fait, « la RFY
pouvait valablement imputer les actes en cause aux différents
Etats ».
Par ailleurs, s'agissant des objets du Traité, les
Etats membres n'ont pas entendu conférer à l'OTAN une partie de
leurs compétences créant une personne indépendante. Deux
raisons principales sont invoquées : « l'Organisation
n'est investie d'aucune autorité supranationale; les décisions
qui sont prises au Conseil Atlantique n'engagent les Gouvernements que dans la
mesure où ils sont unanimes...133(*) ». M. Delmac pense que les Etats membres
de l'OTAN n'ont pas aliéné une part de leur souveraineté
au profit d cette organisation et que, par conséquent, « un
certain libre arbitre ...est laissé aux Etats membres...mais chaque
partie reste, en droit, maître de son action, et dès lors de son
devoir politique et militaire et des moyens à utiliser pour
rétablir la paix et la sécurité134(*)».
Donc, cette tendance soutient que l'OTAN n'a pas
été investie d'une personnalité juridique de droit
international public mais, au contraire, de celle limitée sur le plan
du droit privé.
Contrairement à cette position, la jurisprudence a
confirmé depuis longtemps la qualité de sujet de droit
international de l'OTAN.
Dans l'affaire Branno v. Ministry of war, la Cour de cassation
italienne a jugé, s'agissant de l'OTAN, que « it is an
international organization, its main purpose being the mutual defence of its
members. The North Atlantic Treaty Organization is, therefore, a subject of
international law, and it is autonomous with respect to each and all of the
member contries 135(*)».
L'OTAN « n'est pas seulement une alliance militaire
conclue en vue de prévenir l'agression ou de la repousser si elle devait
avoir lieu ; il prévoit également une action commune et
permanente dans les domaines politique, économique et social136(*) ».
Selon M. Pellet, «l'OTAN est une organisation
internationale et, à ce titre, elle bénéficie de la
personnalité juridique internationale. Il est vrai qu'il s'agit
d'une organisation un peu particulière, don l'institutionnalisation a
été empirique et progressive. Il n'en reste pas moins
qu'elle est dotée d'organes permanents, qu'une mission propre lui a
été assignée, et qu'elle a une capacité juridique
et des privilèges et immunités, autant d'éléments
qui ont conduit la Cour internationale de Justice, s'agissant de l'Organisation
des Nations Unies, à conclure, dans son avis du 11 avril 1949
relatif aux Réparations des dommages subis au service des
Nations Unies, que celle-ci était une personne
internationale137(*) ».
Dans le même sens, Alessandro Buzzi soutient que
« l'OTAN est une organisation intergouvernementale
d'intégration des structures militaires de ses Etats membres oeuvrant
à en assurer une plus grande efficacité par une meilleure
coordination138(*) ».
L'O.T.A.N. ne peut pas être considérée
« ni comme la mise en oeuvre d'une alliance militaire,
interprétation contredite par le fait que le Conseil atlantique prend
ses décisions à l'unanimité et exprime par
conséquent une volonté commune ; ni comme une institution
dépourvue de personnalité juridique mais dotée d'organes
propres, l'existence d'une telle personnalité internationale
résultant au contraire des articles 5,6, 7, 8 et 11 de la convention
d'Ottawa du 20 novembre 1951 relatifs aux immunités de l'O.T.A.N. et de
l'article 25 de la même convention concernant le droit pour le Conseil
agissant au nom de l'Organisation de conclure des accords
complémentaires de cette convention ...139(*) ». Cela signifie
que la personnalité juridique suppose « son autonomie
juridique, en ce sens qu'il exprime sa propre volonté et non celle de
ses membres140(*) ».
M. Dailler et M. Pellet pensent « que les actes de
création soient silencieux sur ce point n'autorise pas à mettre
en doute la possession d'une personnalité juridique internationale.
Celle-ci résulte implicitement mais nécessairement des besoins
exprimés par les Etats fondateurs à l'occasion de
l'établissement de l'organisation internationale141(*) ».
Les contours de la personnalité juridique
internationale se définissent par les pouvoirs attribués, peu
importe qu'il n'y ait pas de disposition expresse ou que cette dernière
soit lacunaire.
Il convient de se référer au critère de
la volonté des Etats de mettre en place une institution permanente sans
qu'il soit obligatoire d'insérer une disposition attribuant
expressément une personnalité juridique internationale.
S'agissant de l'opposabilité de cette
personnalité aux Etats tiers, il faut rappeler la jurisprudence de la
Cour internationale de justice dans son avis sur la
« Réparation des dommages subis au service des Nations
Unies », où elle « constate que la Charte a
conféré à l'Organisation des droits et obligations
distincts de ceux de ses Membres... la Cour est d'avis que les Membres des
Nations Unies ont créé une entité qui possède une
personnalité internationale objective, c'est-à-dire comme une
unité possédant la personnalité internationale et non pas
seulement une personnalité reconnue par eux seuls142(*)».
Les membres de l'OTAN ont voulu mettre en place une
organisation internationale et le fait de traiter avec les tiers confirmerait
sa personnalité objective.
2. b. Le contrôle effectif des
forces
S'agissait de savoir si l'OTAN avait elle-même
engagé l'action militaire ou si les Etats membres avaient utilisé
ses structures revient à répondre aux questions de savoir
« qui a mené l'action militaire, qui a évalué la
situation, qui a pris les décisions, qui a donné les
ordres...143(*) » et qui a un contrôle effectif sur
les forces armées.
Cette question est importante parce que la Cour
européenne des droits de l'homme, citant sa jurisprudence dans
l'arrêt « Loizidou », a
considéré que « compte tenu de l'objet et du but de la
Convention, une Partie contractante pouvait voir sa responsabilité
engagée lorsque, par suite d'une action militaire - légale ou non
-, elle exerçait en pratique son contrôle sur une zone
située en dehors de son territoire national. Elle estima que
l'obligation d'assurer dans une telle région le respect des droits et
libertés garantis par la Convention découlait du fait de ce
contrôle, qu'il s'exerçât directement, par
l'intermédiaire des forces armées des Etats concernés, ou
par le biais d'une administration locale subordonnée144(*) ».
En effet, «l'existence de sa personnalité
juridique pourrait être contestée à raison du
contrôle que les Etats membres exerceraient sur son
fonctionnement145(*) ». Déjà en 1955, M. Flory
avait dit que « les pouvoirs militaires appartiennent à
l'O.T.A.N.146(*)»
et que sa force « est placée sous l'autorité d'un
commandant suprême nommé par l'O.T.A.N. et assisté d'un
état-major international dans lequel sont représentés tous
les pays signataires du traité147(*) ».
Il faut noter que l'engagement des forces armées a
été pris au niveau politique par une décision unanime du
Conseil de l'Atlantique Nord.
Concernant le contrôle effectif des forces, il convient
de remarquer que «la titularité de droits et d'obligations, ainsi
que la responsabilité pour les actes illicites reposent, dans l'ordre
juridique international très largement sur le critère du
contrôle effectif...148(*) » et que celui-ci «s'apprécie
en fonction de divers critères, la chaîne de commandement,
l'allégeance réelle, le statut disciplinaire, l'acceptation de
fait de la responsabilité, la prise en compte de celui qui fournit du
matériel militaire ou paie la solde, etc.149(*) ».
La structure militaire intégrée de l'OTAN se
compose de forces militaires mises à sa disposition par les Etats
membres qui font partie à l'opération. Ces forces militaires sont
soumises cependant à «des commandements internationaux, qui
exercent, sur des forces armées nationales, un pouvoir de commandement
effectif150(*) ». Comme le dit M. Kolb, «ce qui est
décisif, c'est le contrôle principal, non un contrôle
exclusif inexistant151(*) ».
Selon M. Cohen-Jonathan, «l'OTAN est une organisation
internationale ... mais qui dans sa fonction opérationnelle est
tributaire des apports nationaux...qui laisse place à une plus large
autonomie des Etats...152(*) ». Mais il poursuit en disant que «le
principe général demeure cependant celui de la
responsabilité internationale de l'organisation... l'OTAN n'est qu'une
organisation à base de coopération...153(*) ».
En effet, «les Etats membres de la structure de
commandement intégrée ne disparaissent pas entièrement
dans la conduite des opérations militaires, mais ils se soumettent
partiellement à l'Organisation qui prend sa place, quant à elle,
au centre du système de ceux-ci154(*) ». Ce qui conduit à dire que
«l'OTAN était bien partie au conflit contre la RFY en tant que
telle. Elle ne l'était pas seule, mais elle l'était à
côté des Etats membres155(*) ».
3. La question de justiciabilité de
l'OTAN
Il sied d'examiner brièvement comment l'OTAN peut-elle
être justiciable devant la Cour européenne des droits de l'homme
et devant la Cour internationale de justice. « Il n'est pas rare que
la mise en oeuvre de la responsabilité - contractuelle ou
extra-contractuelle - d'une organisation se heurte à l'immunité
de juridiction dont cette dernière bénéficie dans les
ordres juridiques internes ou à l'impossibilité d'attraire
l'organisation devant une juridiction internationale, telle la Cour
européenne des droits de l'homme ou de la Cour internationale de
justice156(*) ».
D'une part, la Cour européenne des droits de l'homme
est chargée d'assurer le respect des engagements résultant pour
les Hautes Parties contractantes de la convention européenne des droits
de l'homme157(*). Or,
l'OTAN n'est pas signataire de cette convention et, par conséquent, elle
ne peut pas être justiciable devant la Cour européenne des droits
de l'homme.
D'autre part, s'agissant de la procédure contentieuse,
seuls les Etats ont la qualité pour se présenter devant la Cour.
Dans cette procédure, les organisations internationales publiques ne
peuvent être entendues par la Cour que pour donner des renseignements
relatifs aux affaires portées devant elle de leur propre initiative ou
à la demande de la Cour internationale de justice158(*). Il s'ensuit que, dans une
procédure contentieuse, l'OTAN ne peut pas être partie devant la
Cour internationale de justice159(*).
Devant ces obstacles, les tiers lésés n'ont
qu'à mettre en cause la responsabilité directe des Etats membres
pour les actes accomplis par l'organisation internationale. « La mise
en oeuvre de la responsabilité directe des Etats membres pour des faits
de l'organisation, en pratique, conduit à un échec160(*) ». C'est ainsi que
«confrontés à cet obstacle que semble constituer la
personnalité morale de l'organisation internationale, les
requérants victimes d'une violation de leurs droits par celle-ci se
voient donc dans l'obligation d'user d'un moyen détourné,
à savoir la mise en cause de la responsabilité des Etats membres
pour leurs faits propres161(*) ». Ici, les requérants tentent de
prouver que les agissements des Etats membres ont conduit l'organisation
internationale à commettre ou à accomplir des actes qui leur sont
dommageables. Tels étaient les arguments tendant à
démontrer le rôle déterminant qu'ont joué les
membres dans le cadre des affaires mettant en cause la responsabilité du
Conseil international de l'étain et de l'Organisation du Traité
de l'Atlantique Nord. Parlant de l'OTAN, M. Geslin dit que « en
apparence, la RFY avait pris soin d'attraire les Etats pour leurs faits
propres et non en tant que membres de l'OTAN162(*) ».
Comme on l'a vu tout au long de ce travail, l'existence de la
personnalité juridique de l'organisation internationale rend toute mise
en cause de la responsabilité des Etats membres - en leur seule
qualité de membre - inefficace. La question de l'imputabilité qui
a demeuré sans réponse dans les deux cas jurisprudentiels
étudiés en dépend plus largement. Il est vrai que «le
problème central autour duquel s'articule la question de la
répartition de la responsabilité entre l'organisation et ses
membres est celui de la personnalité juridique internationale de
l'organisation ou, plus précisément encore, celui de
l'opposabilité de la personnalité morale de
l'organisation163(*) ».
Donc, il en ressort que la responsabilité des Etats
pour les actes de l'organisation internationale dont ils sont membres
dépend principalement de sa personnalité juridique
internationale.
RURAMIRA Bizimana
Zébédée
DES en droit international et européen
Option droit international
* 1 Jean Combacau et Serge
Sur ; Droit international public, 4è éd., Montchrestien,
Paris, 1999, p. 518.
* 2 Pierre Klein, la
responsabilité des organisations internationales dans les ordres
juridiques internes et en droit des
gens, Bruylant, Bruxelles, 1998, p. 426.
* 3 Paul Reuter, Droit
international public, 1ère éd., PUF, Paris, 1958, pp.
245-246.
* 4 L'article 2 du projet
d'articles de 2001 de la Commission du droit international.
* 5 Dominique Carreau ;
Droit international, 2è éd., Ed. A. Pedone, Paris, 1988, p.
405.
* 6 Paul Reuter, op. cit., p.
253.
* 7 Patrick Dailler et Alain
Pellet, Droit international public, 7è éd., L.G.D.J., Paris,
2002, p. 796.
* 8 L'article31, § 2 du
projet d'articles de 2001 de la Commission du droit international.
* 9 Patrick Dailler et Alain
Pellet, op. cit., p. 790.
* 10 Jean Combacau et Serge
Sur ; op. cit., p.534.
* 11 Patrick Dailler et
Alain Pellet, op. cit., p. 774.
* 12 Paul Reuter, op. cit.,
p. 260.
* 13 L'article48 du projet
d'articles de 2001 de la Commission du droit international.
* 14 Cour internationale de
justice, conséquences juridiques de l'édification d'un mur dans
le territoire palestinien
occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004,
paragraphe 155.
* 15 Idem, paragraphe
159.
* 16 Juan Manuel
Gomez-Robledo, « l'avis de la CIJ sur les conséquences
juridiques de l'édification d'un mur dans le
territoire palestinien occupé : timidité
ou prudence ? » in Revue générale de droit
international public, A. Pedone,
Paris, Tome 109/2005/3, p. 534.
* 17 Patrick Dailler et
Alain Pellet, op. cit., p. 809.
* 18 Mohamed Bedjaoui, droit
international, bilan et perspectives, T.I, A. Pedone, Paris, 1991, p. 381.
* 19 Patrick Dailler et
Alain Pellet, op. cit., p. 615.
* 20 Pierre Klein, op. cit., p.
431.
* 21 Idem, pp. 437-438.
* 22 Albane Geslin,
Réflexions sur la répartition de la responsabilité entre
l'organisation internationale et ses Etats
membres, Revue générale de droit international
public, A. Pedone, Paris, T. 109/2005/3, p. 540.
* 23 L'Entreprise est l'organe
de l'Autorité internationale des fonds marins (cfr. articles 156 et 170
de la
Convention des Nations Unies sur le droit de la mer du 10
décembre 1982).
* 24 Article 3 de l'Annexe
IV de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer relative au Statut
de
l'Entreprise.
* 25 Pierre Klein, op. cit., p.
490.
* 26 Recueil des
arrêts et décisions, Cour européenne des droits de l'homme,
1999-I, Matthews c. Royaume-Uni, arrêt
du 18 février 1999, p. 320, paragraphe 32.
* 27 Pierre Klein, op. cit., p.
498.
* 28 Idem, pp. 508-509.
* 29 Idem, p.509.
* 30 Idem, p. 520.
* 31 Albane Geslin, op. cit.,
p. 573.
* 32 Idem, p. 574.
* 33 Pierre Klein, op. cit., p.
514.
* 34 Idem, p. 521.
* 35 Patrick Dailler et
Alain Pellet, op. cit., p. 1263.
* 36 Ibidem.
* 37 Luigi Condorelli, La
réparation des dommages catastrophiques causés par les
activités spatiales (pp. 19 à 46) ; in La
réparation des dommages catastrophiques ; les
risques technologiques majeurs en droit international et en droit
communautaire ; XIII ès journées
d'études juridiques Jean Dabin , LLN, 16,17,18 novembre 1988, p.
23.
* 38 Idem, p. 28.
* 39 L'article premier c) de
la convention de la convention du 29 mars 1972 sur la responsabilité
internationale pour les
dommages causés par des objets spatiaux.
* 40 Jean Combacau et Serge
Sur, op. cit., p. 477
* 41 Pierre Klein, op. cit.,
pp. 521-522.
* 42 International law
Reports, 1989, volume 80, p. 68.
* 43 P.M. Eisemann, Crise du
conseil international de l'étain et insolvabilité d'une
organisation intergouvernementale,
AFDI, 1985, p. 745.
* 44 Ibidem.
* 45 Pierre Klein, op. cit.,
pp. 182-183.
* 46 Le sixième
accord, dans son article 16 § 1, dispose que « le Conseil
possède la personnalité juridique. Il a, en
particulier, la capacité de contracter,
d'acquérir et d'aliéner des biens meubles et immeubles, ainsi que
d'ester en
justice ». L'accord de siège reprend la
même formule en son article 3.
* 47 International law
Reports, 1988, volume 77, p. 44.
* 48 Idem, pp. 98-99
* 49 International law
Reports, 1989, volume 80, p. 51.
* 50 International Tin
Agreement 6.
* 51 International law
Reports, 1989, volume 80, p.105.
* 52 International law
Reports, 1990, volume 81, p. 674.
* 53 Idem, p. 675.
* 54 Recueil de la
jurisprudence de la Cour et du Tribunal de première instance, Cour de
justice des communautés
européennes, conclusions de l'Avocat
général, n° 3, 1990, I-1818, paragraphe 127.
* 55 Idem, I-1819,
paragraphe 131.
* 56 Idem, I-1821, par.
136.
* 57 Ibidem.
* 58 Recueil de la
jurisprudence de la Cour et du Tribunal de première instance, Cour de
justice des communautés
européennes, Ordonnance de la Cour, n° 3,
1990, I-1826, paragraphe 1.
* 59 Carlo Santulli, ONU,
travaux de la Commission du droit international (50 è session), AFDI,
2003, p. 450.
* 60 Alessandro Buzzi,
L'intervention armée de l'OTAN en République
fédérale de Yougoslavie, Cedin Paris I,
perspectives internationales, n° 22, éditions
Pedone, Paris, 2001, p. 191
* 61 Idem, note 431, p.192
* 62 Recueil des arrêts,
Cour européenne des droits de l'homme, 2001-XII, Bankovic' et autres c.
Belgique et autres,
décision du 12 décembre 2001, p. 373,
paragraphe 30.
* 63 Idem, pp. 373-374,
paragraphe 31.
* 64 Idem, p. 374, paragraphe
32.
* 65 Idem, p. 369, paragraphe
14.
* 66 Idem, pp. 389-390,
paragraphe 84 .
* 67 L'article 15 relatif
à la dérogation en cas d'urgence, point 1, dispose que
« en cas de guerre ou en cas d'autre danger
public menaçant la vie de la nation, toute Haute
Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux
obligations prévues par la présente Convention,
dans la stricte mesure où la situation l'exige et à condition que
ces
mesures ne soient pas en contradiction avec les autres
obligations découlant du droit international ».
* 68 Recueil des
arrêts, Cour européenne des droits de l'homme, 2001-XII, Bankovic'
et autres c. Belgique et autres,
décision du 12 décembre 2001, p. 389,
paragraphe 82.
* 69 Idem, p. 389,
paragraphe 83.
* 70 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Serbie et Monténégro c. Belgique),
(Serbie et Monténégro c. Canada),
(Serbie et Monténégro c. Espagne), (Serbie et
Monténégro c. Etas-Unis),
(Serbie et Monténégro c. France),
(Serbie et Monténégro c. Allemagne), (Serbie et
Monténégro c. Italie), (Serbie et
Monténégro c. Pays-Bas), (Serbie et
Monténégro c. Portugal), et (Serbie et
Monténégro c. Royaume-Uni),
demande en indication des mesures conservatoires, compte
rendu de l'audience publique tenue le lundi 10 mai
1999, point 5.5.
* 71 Idem, point 5.1.
* 72 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Serbie et Monténégro c. Canada),
demande en indication des mesures conservatoires, compte rendu
de l'audience publique tenue le lundi 10 mai
1999, p. 15, para. 34
* 73 Ibidem [CR 99/16
(traduction) du lundi 10 mai 1999 ].
* 74 Cour internationale de
justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de la
force (Yougoslavie c. Espagne), demande
en indication de mesures conservatoires, ordonnance du 2
juin 1999, paragraphe 23.
* 75 Idem, paragraphe 29.
* 76 Cour internationale de
justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de la
force (Yougoslavie c. Etats-Unis
d'Amérique), demande en indication de mesures
conservatoires, ordonnance du 2 juin 1999, paragraphe 21.
* 77 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Yougoslavie c. Belgique),
demande en indication de mesures conservatoires, Ordonnance
du 2 juin 1999, paragraphe 23.
* 78 Idem, paragraphe 45.
* 79 Idem, Exceptions
préliminaires du Royaume de Belgique, 5 juillet 2000, paragraphe 469.
* 80 Idem, paragraphe 475.
* 81 Idem, paragraphe 477.
* 82 Cour internationale de
justice, affaire relative à la licéite de l'emploi de la force,
Yougoslavie c. Canada, Exceptions
préliminaires du Canada, juillet 2000, p. 45,
paragraphe 153.
* 83 Idem, paragraphe 154.
* 84 Idem, p. 52, paragraphe
175.
* 85 Cour internationale de
justice, l'affaire relative à la Licéité de l'emploi de la
force (Serbie-et-Monténégro c. France),
compte rendu de l'audience publique tenue le mardi 20 avril
2004, paragraphe 48.
* 86 Idem, Exceptions
préliminaires de la République Française, paragraphe
23.
* 87 Idem, compte rendu de
l'audience publique tenue le mardi 20 avril 2004, paragraphe 51.
* 88 Ibidem.
* 89 Cour internationale de
justice, l'affaire relative à la Licéité de l'emploi de la
force (Serbie-et-Monténégro c. France),
compte rendu de l'audience publique tenue le mardi 20 avril
2004, paragraphe 50.
* 90 Idem, Exceptions
préliminaires de la République Française, paragraphe
24.
* 91 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Yougoslavie c. Italie),
Exceptions préliminaires de la République
d'Italie, 5 juillet 2000, p. 53.
* 92 Idem, pp. 53-54.
* 93 Idem, Compte rendu de
l'audience publique tenue le jeudi 22 avril 2004, paragraphe 37.
* 94 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Yougoslavie c. Pays-Bas),
Exceptions préliminaires du Royaume des Pays-Bas, 5
juillet 2000, p. 35, point 7.
* 95 Idem, p. 37, point
7.1.5.
* 96 Idem, p. 37, point
7.1.6.
* 97 Idem, p. 37, point
7.2.2.
* 98 Cour internationale de
justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Yougoslavie c. Portugal),
Exceptions préliminaires de la République
Portugaise, 5 juillet 2000, paragraphe 132. L'accord signé à
Belgrade le
15 octobre 1998 par le chef d'état-major des
armées de la République fédérale de Yougoslavie et
le Commandant
suprême des Forces alliées en Europe de
l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN), qui prévoit
l'établissement d'une mission de vérification aérienne
au Kosovo (S/1998/991, annexe) en complément de la
Mission de vérification de l'OSCE, Résolution 1203 (1998),
adoptée par le Conseil de sécurité à sa 3937e
séance, le 24 octobre 1998.
* 99 Idem, Exceptions
préliminaires de la République Portugaise, 5 juillet 2000,
paragraphe 133.
* 100 Idem, paragraphe 138.
* 101 Ibidem.
* 102 Cour internationale
de justice, Affaire relative à la licéité de l'emploi de
force (Yougoslavie c. Portugal),
compte rendu de l'audience publique tenue le jeudi 22 avril
2004, point 4.1.
* 103 Idem, Exceptions
préliminaires de la République Portugaise, 5 juillet 2000,
paragraphe 142.
* 104 Idem, paragraphe 145.
* 105 Idem, compte rendu de
l'audience publique tenue le jeudi 22 avril 2004, point 4.7.
* 106 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Yougoslavie c. Belgique,
Canada, France, Allemagne, Italie, Pays-Bas, Portugal et
Royaume-Uni), mémoire de la Yougoslavie, 5
janvier 2000, paragraphe 3.
* 107 Idem, paragraphe 13.
* 108 Idem, Audience
publique tenue le mercredi 21 avril 2004, paragraphe 7.
* 109 Idem, paragraphe 25.
* 110 Idem, point II.
* 111 Idem, paragraphe 28.
* 112 Idem, paragraphe 13.
* 113 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Pays-Bas), exceptions préliminaires,
arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 25.
* 114 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Portugal), exceptions préliminaires,
arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 28.
* 115 Ibidem.
* 116 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Italie), exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 48.
* 117 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Belgique), exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 91.
* 118 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Allemagne), exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 100.
* 119 Idem, exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 111.
* 120 Ibidem.
* 121 Idem, paragraphe
112.
* 122 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
Belgique), exceptions préliminaires,
arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 118.
* 123 Idem,
exceptions préliminaires, arrêt du 15
décembre 2004, paragraphe 119.
* 124 Idem, exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 126.
* 125 Cour internationale
de justice, affaire relative à la licéité de l'emploi de
la force, (Serbie-et-Monténégro c.
France), exceptions préliminaires,
arrêt du 15 décembre 2004, paragraphe 116.
* 126 Idem, exceptions
préliminaires, arrêt du 15 décembre 2004,
paragraphe 114.
* 127 C.L.B.V., La
personnalité juridique de l'O.T.A.N., AFDI, 1955, p. 471.
* 128 L'article dispose
que « l'Organisation possède la personnalité
juridique ; elle a la capacité de contracter, d'acquérir
et d'aliéner des biens mobiliers et immobiliers,
ainsi que d'ester en justice ».
* 129 C.L.B.V., op. cit.,
p. 472.
* 130 C.L.B.V., op. cit.,
p. 474.
* 131 Joe Verhoeven, droit
international public, Precis de la Faculté de droit de Louvain, Larcier,
Bruxelles, 2000, p.
613.
* 132 Albane Geslin, op.
cit., p. 557.
* 133 C.L.B.V., op. cit.,
p. 474.
* 134 Claude Delmac,
L'OTAN, 4è ed., PUF, Paris, 1975, p.38.
* 135 International law
Reports, 1958, volume 22, Part IX, International organization and
administration, p. 756.
* 136 OTAN-Documentation,
service de l'information, Bruxelles, 1969, p.23.
* 137 Alain Pellet,
«L'imputabilité d'éventuels actes illicites
- Responsabilité de l'OTAN ou des Etats membres», Kosovo
and the International Community, dir. de publ.,
Christian Tomuschat, Martinus Nijhoff Publishers, 2002, p. 198.
Cité par la Cour internationale de justice, Affaire
relative à la licéité de l'emploi de force (Yougoslavie c.
Portugal),
compte rendu de l'audience publique tenue le lundi 19
avril 2004, point 4.6.
* 138 Alessandro Buzzi,
L'intervention armée de l'OTAN en République
fédérale de Yougoslavie, Cedin Paris I,
perspectives internationales, n° 22, éditions
Pedone, Paris, 2001, p. 159.
* 139 Charles Rousseau,
droit international public, Tome II, les sujets de droit, Sirey, Paris, 1974,
pp. 686-687.
* 140 Albane Geslin, op.
cit., p. 563.
* 141 Patrick Dailler et
Alain Pellet, op. cit., p. 593.
* 142 Cour internationale de justice,
Réparation des dommages subis au service des Nations Unies, Avis
consultatif du
11 avril 1949, le Site
www.icj-cij.org/cijwww/cdecisions/csummaries/cisunsommaire490411.htm,
paragraphe 8 et 13.
* 143 Alessandro Buzzi,
op. cit., p. 160.
* 144 Recueil des
arrêts, Cour européenne des droits de l'homme, 2001-XII, Bankovic'
et autres c. Belgique et autres,
décision du 12 décembre 2001, p. 384,
paragraphe 69.
* 145 Albane Geslin, op.
cit., p. 565.
* 146 Maurice Flory, les
bases militaires à l'étranger, AFDI, 1955, p. 9.
* 147 Ibidem.
* 148 Robert Kolb, droit
humanitaire et opérations de paix internationales, Bruylant, Bruxelles,
2002, p. 22.
* 149 Idem, pp. 22-23.
* 150 Alessandro Buzzi,
op. cit., p. 163.
* 151 Robert Kolb, op. cit.,
p. 24.
* 152 Gérard
Cohen-Jonathan, Cour européenne des droits de l'homme et droit
international général, AFDI, 2000,
p. 631.
* 153 Ibidem.
* 154 Alessandro Buzzi,
op. cit., p. 164.
* 155 Idem, p. 170.
* 156 Albane Geslin, op. cit.,
p. 543.
* 157 Article 19 de la
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales du 4 novembre
1950 telle qu'amendée par le protocole n°
11.
* 158 Article 34 § 1
et 2 du Statut de la Cour internationale de justice du 26 juin 1945.
* 159 Certains Etats
notamment le Portugal soutient « que la Cour ne pourrait jamais
statuer sur la responsabilité du
Portugal sans que, au préalable, elle se soit
prononcée sur la licéité du comportement de
l'OTAN » (Cour
internationale de justice, Affaire relative à la
licéité de l'emploi de force (Yougoslavie c. Portugal), compte
rendu
de l'audience publique tenue le lundi 19 avril 2004, point
4.8.)
* 160 Albane Geslin, op. cit.,
p. 543.
* 161 Idem, p. 548.
* 162 Idem, p. 557.
* 163 Idem, p. 562.
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