Section II. La supralégalité du
traité international.
En vertu de l'organisation pyramidale des normes
théorisée par Hans Kelsen, une norme internationale
intégrée au sein de l'ordre juridique national occupe une place
au dessus de la loi ordinaire. Si donc sa supraconstitutionnalité est
ici réfutée, la supralégalité d'un engagement
international par contre y est sans conteste affirmée. ce principe n'a
pas simplement un fondement doctrinal; on le retrouve également dans la
constitution.
En effet, l'article 185 de la constitution congolaise
stipule:«les traités ou les accords régulièrement
ratifiés ou approuvés ont dès leur publication, une
autorité supérieure à celle des lois(...)». La
suprématie établie de l'acte international sur une disposition
législative suppose d'une part un devoir de conformité de la loi
au traité (§1);ce qui pose le problème de
nécessité d'un contrôle de conventionnalité des lois
d'autre part (§2).
§1. La conformité de la loi au
traité.
Une convention internationale régulièrement
intégrée sur le plan interne sert de cadre de
référence pour toute mesure législative adoptée par
l'Etat. Son impact à ce niveau est très important si bien qu'elle
conduit à l'abrogation de la loi antérieure non conforme (A) et
impose un devoir de conformité de la loi postérieure (B).
A. Abrogation de la loi antérieure non
conforme.
L'introduction d'un traité dans le système
juridique national peut avoir des conséquences dans l'application des
normes internes. En effet, lorsqu'une norme internationale intègre
l'ordonnancement juridique national, elle rend inapplicable toutes les lois
antérieures non conformes. Le traité s'appréciant comme
norme supérieure par rapport à la loi, il l'étouffe en
rendant impossible l'application de la loi antérieure non conforme
à ses dispositions. Désormais, la loi devient inopérante
et c'est le régime de l'acte international qui s'impose. Un devoir de
conformité lie le législateur national à prendre des
mesures législatives tenant compte de la nouvelle donne juridique.
D'autres lois doivent être prises, abrogeant les dispositions de la loi
antérieure et se conformant ainsi à la norme internationale.
En cas de conflit opposant l'application d'un traité
à une loi, le juge est appelé à confirmer la
supériorité de la disposition internationale en écartant
l'application de loi même antérieure.
B. La conformité de la loi postérieure
au traité.
La supériorité d'un accord international sur la
loi est un principe qui régit la pyramide des normes juridiques
placées sur le plan interne. L'application de ce principe suppose qu'une
loi même postérieure au traité doit être conforme
à celui-ci.
De l'observation de l'article 185 de la constitution
congolaise (qui pose le principe de la supériorité du
traité à la loi) découle qu'une loi postérieure ne
peut pas modifier les dispositions d'un traité . Par conséquent,
en cas de conflit entre une convention internationale et une loi
postérieure, le juge ordinaire devra faire prévaloir le premier(
le traité).
La supériorité des traités ou accords
internationaux sur la loi même postérieure, a été
affirmée dans l'arrêt Nicolo (CE. Ass. 20 octobre 1989)
abandonnant ainsi la théorie de la loi écran, selon laquelle les
dispositions d'une loi postérieure au traité l'emporteraient sur
ce dernier(CE 1er mers 1968, Syndicat général des fabricants de
sémoules de France; CE. Ass. 30 octobre 1998, Sarrant et Levacher).
Par ailleurs, puisque le Conseil Constitutionnel
français a estimé que les engagements internationaux ne faisaient
pas partie du bloc de constitutionnalité et a appliqué
lui-même sa propre jurisprudence en 1988, le Conseil d'Etat à son
tour accepte désormais d'écarter une loi contraire à un
engagement international, même si elle lui est postérieure dans le
temps, sans craindre les conflits avec le législateur.
Déjà en 1989, le commissaire de gouvernement Patrick FRYDMAN
refusait que le Conseil d'Etat exerçât un contrôle de la
conventionnalité à la constitution en appliquant coûte que
coûte le droit international. Il prévient déjà le
Conseil d'Etat de ne écarter que la loi contraire à l'engagement
international et non pas la norme supérieure.
|