INTRODUCTION
Notre réflexion part d'un paradoxe. En effet, c'est au
moment où le processus de décentralisation française a
connu un coup d'accélérateur avec l'acte II de la loi du 13
août 2004 que de nombreuses questions ont été
soulevées non pas quant à l'avenir de la décentralisation
mais en ce qui concerne le rôle et la place des collectivités
territoriales dans le paysage institutionnel de la France.
On a trop souvent pris l'habitude d'envisager cette question
en la réduisant à la stricte problématique des relations
Etat- Collectivités territoriales alors même que de nouvelles
contraintes extérieures viennent agir de plus en plus sur les
décisions publiques locales. Il en est ainsi de l'influence du
phénomène de la mondialisation qui exige, comme le clame le
slogan, de « penser global » et
« d'agir local ». C'est également le cas du
renforcement de la construction européenne qui influence
considérablement le paysage institutionnel des pays membres en ce sens
que les collectivités locales ( et notamment les Régions ) sont
devenues des interlocuteurs et des partenaires publics à part
entière.
Dans ce contexte, le modèle institutionnel de
référence se caractérise par la constitution de
collectivités territoriales fortes et influentes. En la matière,
on peut dire que la France a beaucoup d'efforts d'adaptation à faire. De
ce fait, elle ne peut se permettre de faire l'économie d'une
véritable réflexion sur la refondation de l'action publique
locale. Une telle réflexion est d'autant plus nécessaire qu'elle
participe à la réflexion générale autour de la
transformation des modalités de gouvernement public.
En effet, de nouveaux impératifs sont venus interpeller
la manière dont sont mises en oeuvre les politiques publiques. Ainsi,
l'exigence d'efficacité et le succès du principe de gouvernance
représentent des défis majeurs que doit relever l'action
publique.
Quelle influence peut donc avoir une refondation de l'action
publique locale sur la régulation globale des politiques
publiques ? Tout d'abords, il est évident qu'une réflexion
sur l'avenir des politiques publiques locale n'est pas isolée des
grandes problématiques actuelles touchant le rôle et la place de
l'Etat. Autrement dit, on ne peut militer pour un renforcement et une meilleure
prise en compte de l'action des collectivités territoriales si l'on
était pas convaincu que l'avenir des politiques publiques passe
nécessairement par l'action publique locale.
Il faut dire que le contexte générale de
mutation favorise cette conviction. En effet, qu'il s'agisse de l'essor des
procédures de contractualisation et celles de co-production, il est de
plus en plus admis que le « politiques locales » changent
la Politique.1(*) Ce
phénomène se manifeste dans la quasi-totalité des grandes
questions actuelles sur le renouveau de l'action publique : question sur
l'avenir de la Politique de la Ville, sur l'articulation possible entre
Aménagement du territoire et développement local,
problématiques de gouvernance urbaine et de management public
territorial, questions sur la démocratie participative et la
citoyenneté locale.
Il apparaît cependant que l'un des freins à cette
refondation de l'action publique locale réside dans la complexité
de l'organisation institutionnelle locale. Cette complexité
soulève d'autres questions relatives à la visibilité et
à la légitimité nécessaire à tout cadre
démocratique de mise en oeuvre d'une action collective. Ainsi, la
question de la démocratie nous a conduit à envisager la
refondation de l'action publique sous l'angle de la fiscalité. En effet,
l'impôt est un bon indicateur de changement et contribue au renforcement
de la démocratie locale.
A ce titre, la fiscalité locale constitue un cadre
d'expérimentation adéquate de la capacité du processus de
décentralisation à se renforcer et à accorder aux
institutions publiques locales une place à la mesure des défis
majeurs à venir. Dans ce domaine, si le diagnostic est clairement
posé avec en plus, une forme de consensus général, la voie
de la réforme reste encore à tracer. Il faut dire que le sujet
est sensible à plusieurs égards. En effet, on peut
considérer que quelques deux décennies de décentralisation
ne sont pas suffisantes pour marquer une vraie rupture avec deux siècles
de centralisme. Pourtant, les vingt dernières années ont
contribué à l'instauration d'une nouvelle « culture
administrative » tant du point de vue des citoyens que des acteurs
publics eux-mêmes. L'émergence et le renforcement de la
démocratie participative locale en est une parfaite illustration. En
outre, l'apparition d'un esprit de revendication de la part des
collectivités locales qui se manifeste par une certaine forme de
rapports de force entre celles-ci et l'Etat confirme l'existence d'une nouvelle
« culture administrative ».
Mais au-delà de l'esprit, il y a la
réalité. En fait, les collectivités locales sont devenues
des acteurs économiques importants. Malgré ce tableau qui semble
illustrer le renforcement des pouvoirs publics locaux, le rapport de force
entre l'Etat et les collectivités territoriales se caractérise le
plus souvent par une forme de subordination des secondes vis-à-vis du
premier. De ce fait, le principe d'autonomie financière semble
être en perpétuel conflit avec celui de libre-adminisitration.
C'est la raison pour laquelle la spécialisation fiscale
comme élément de refondation de l'action publique locale peut
concilier à la fois l'impératif d'autonomie financière et
l'exigence de libre-administration. Tout au long de nos développement,
nous tenterons de montrer qu'une véritable réforme de la
fiscalité locale ne peut privilégier un aspect au
détriment d'un autre. Dans ce contexte, la spécialisation fiscale
doit répondre à un double défi : réformer la
fiscalité locale et refonder l'action publique locale (
Deuxième partie ).
Nous montrerons ainsi que la notion d'action publique locale
n'est pas seulement un concept mais devient progressivement une
réalité. Par conséquent, la reforme de la fiscalité
locale doit nécessairement apporter des réponses à de
nouvelles questions telles que le rôle et l'efficacité de
l'impôt dans le contexte nouveau d'émergence des politiques de
développement local ( aspects économiques) ou bien le lien entre
fiscalité et nouvelle citoyenneté locale ( aspects politiques ).
Toutes ces questions partent d'un même constat : les finances
locales sont devenues le miroir des défis et des enjeux de la nouvelle
action publique locale (Première partie )
PREMIÈRE
PARTIE : LES FINANCES LOCALES : MIROIR DES DEFIS ET DES ENJEUX DE LA
NOUVELLE ACTION PUBLIQUE LOCALE
La notion de « action publique
locale » est passée de la phase de concept à celle
de réalité. Nous nous proposons de réfléchir ici
sur les incidences de cette notion en matière de finances et de
fiscalité locale. En fait, on peut très vite se rendre compte que
la volonté politique qui a accompagné le processus de
décentralisation en France s'est manifestée, dans le domaine de
la fiscalité locale, par une certaine prudence de la part du
législateur à ne pas trop renforcer les pouvoirs des institutions
politiques locales.
Et pourtant, il est difficile de poser la question de l'action
publique sans poser celle de l'impôt. En effet, cette question concerne
aussi bien l'efficacité de l'action que la problématique de la
gouvernance des institutions locales.
En survolant tous les questionnements relatifs à la
faiblesse de volonté politique dans le renforcement du processus de
décentralisation par une nouvelle architecture financière et
fiscale locale (Chapitre 1), on peut prendre toute la mesure de l'urgence et de
la nécessité d'engager une véritable réforme qui
répond aux défis actuels de la décentralisation. Des
défis nés de l'affirmation du concept de politique publique
locale (Chapitre 2).
Compte tenu de ces nouveaux défis mais aussi de
l'urgence et de la nécessité de réformer en profondeur la
fiscalité locale, il apparaît que la spécialisation fiscale
répond plus ou moins parfaitement à de nombreuses
problématiques propres à cette nouvelle action publique locale.
CHAPITRE 1. FINANCES ET
FISCALITÉ LOCALES, LES PARENTS PAUVRES DE LA DECENTRALISATION
Notre réflexion sur la spécialisation fiscale
part d'un constat simple et partagé par tous les observateurs : la
décentralisation à la française ne cherche pas à
transformer les collectivités locales en institutions politiques
à part entière à l'instar des régions espagnoles et
italiennes ou des landers allemands. C'est comme si l'Etat
décentralisateur a tenté de répondre à certaines
questions conjoncturelles sans réellement vouloir prendre la mesure des
nouvelles contraintes qui s'imposent à l'action publique.
En effet, la réflexion et les débats sur la
décentralisation ont toujours porté sur la relation exclusive
Etat- Collectivités territoriales alors même que les nouvelles
contraintes de l'action publique sont souvent issues de la mondialisation ou de
la construction européenne.
C'est la raison pour laquelle après avoir posé
le diagnostic actuel de la fiscalité locale (Section 1 ), nous
nous efforcerons de situer la question fiscale dans une perspective globale qui
est celle de l'avenir de la fiscalité locale (Section 2 ) et
l'affirmation du concept d'action publique locale.
Section 1. Les fondements de la
fiscalité locale
Pour mieux appréhender les problématiques
actuelles en matière de fiscalité locale, il faut situer celle-ci
dans leur contexte d'évolution historique. En effet, la fiscalité
locale est un aspect de l'évolution historique de la fiscalité
nationale qui est elle-même un aspect de l'évolution de la
démocratie et du contexte politique général en France.
C'est seulement sur la base de ces éléments que l'on peut
comprendre pourquoi la spécialisation fiscale ne constituerait pas une
révolution intégrale mais plutôt un aspect de
l'évolution compte tenu du contexte politique et institutionnel actuel.
§1. Origines et
fondements de la fiscalité locale
Les origines et les fondements de la fiscalité locale
en France, sont liés à l'histoire de la décentralisation.
On peut dire que, paradoxalement, celle-ci occupe une place centrale dans le
projet politique lié à la volonté de
décentralisation sans que, pour autant, la réalisation
concrète de ce projet ces vingt dernières années soit
accompagnée d'une véritable reconnaissance de l'autonomie
financière et fiscale des collectivités locales.
A ce sujet, la problématique de l'autonomie fiscale
des collectivités locales est révélatrice de l'état
du processus de décentralisation. Il faut reconnaître que toute
l'ambiguïté de cette question provient de ce que l'on n'est pas en
mesure de situer les enjeux. Autrement dit, s'agit-il de l'autonomie
financière ou bien de l'autonomie fiscale ?
Bien évidemment, nous pensons que les deux sont
liées. Cependant, il existe un courant que l'on peut qualifier de
minimaliste qui pose seulement la question des marges de manoeuvre
financières et budgétaires des collectivités locales comme
une fin en soi et qui considère, de ce fait, que l'autonomie
financière est un moyen d'augmenter ces marges. Pour les tenants de ce
courant, l'autonomie fiscale n'est pas une nécessité.
Par ailleurs, un autre courant envisage l'autonomie
financière et l'autonomie fiscale comme à la fois liées et
comme moyens de faire émerger un véritable pouvoir institutionnel
local. Pour les partisans de ce courant, il faut dépasser la simple
problématique financière et engager une véritable
réflexion politique sur le rôle et la place des
collectivités locales dans la conception et la réalisation des
politiques publiques.
On pourrait même affirmer que l'autonomie
financière est une condition de l'autonomie fiscale. D'ailleurs, en
posant la question des origines et des fondements de la fiscalité
locale, on se rend bien compte que si les collectivités locales ont pu
acquérir certaines prérogatives qui ont renforcé leur
autonomie financière, l'organisation actuelle, le fonctionnement et la
nature même de la fiscalité locale semblent constituer un
véritable frein au renforcement des pouvoirs locaux.
1. Les « Quatre
Vieilles »
On rappelle ici que la fiscalité locale est
constituée d'impôts directs et d'impôts indirects. Puisque
la problématique centrale de notre travail ne porte pas sur la
fiscalité mais sur la capacité de celle-ci à impulser une
refondation de l'action publique locale, il ne sera pas de notre propos de
mener une réflexion exhaustive et détaillée sur l'ensemble
des impôts locaux. D'ailleurs, la plupart des analyses portera sur la
seule fiscalité directe et notamment ce que l'on appelle les quatre
« vieilles » constitués par :
· La Taxe Professionnelle (TP)
· La Taxe d'Habitation (TH)
· La Taxe Foncière sur les
Propriétés non bâties (TFPNB)
· La Taxe Foncière sur les
Propriété bâties (TFPB)
L'ensemble des impôts directs locaux constitue la
ressource principale des collectivités locales. Au sein de ces
impôts, les quatre vieilles représentent plus du tiers des
recettes budgétaires des communes et plus de 80% de leurs ressources
fiscales. En ce qui concerne les départements et les régions, ces
quatre impôts représentent environ respectivement plus de 65% et
plus de 55% des ressources fiscales.
On verra au cours de nos développements que parmi les
critiques faites à ces quatre impôts, il y a leur archaïsme.
En effet, l'histoire des quatre vieilles est très ancienne. Elle trouve
ses origines à la Révolution française. A l'origine, il
s'agissait d'impôts d'Etat qui ont été
transférés par la suite aux collectivités locales.
Le principe politique qui a sous tendu la création de
ces impôts est l'égalité. L'objectif était de
supprimer les impôts indirects de part leur absence
d'équité. En d'autres termes, les quatre grands impôts
directs devaient imposer l'ensemble des citoyens sans distinction d'ordre
social.
Il est particulièrement intéressant de
s'arrêter sur le cas de la Taxe Foncière. Impôt issu d'une
période pendant laquelle les idées économiques
étaient dominées par thèses des physiocrates pour
lesquels, la source de la richesse nationale résidait dans
l'agriculture, cet impôt correspondait à une époque qui est
bien évidemment révolue depuis très longtemps. Et
pourtant, la nature et la substance même de la taxe foncière sont
restées inchangées. Mais en même temps, toutes ces raisons
nous renseignent sur les motivations de l'Etat de transférer aux
collectivités territoriales des impôts qui n'étaient pas
rentables.
Ø La Taxe
Foncière sur les Propriétés bâties
La Taxe Foncière sur les Propriétés
bâties ne semble pas présenter un handicap particulier.
Représentant le quart du produit global des quatre taxes, elle est due
par tous les propriétaires fonciers à l'exception des
propriétés de l'Etat, des régions, des
départements, des communes et de certains établissements publics
lorsque ceux-ci sont affectés à un service public ou
d'utilité générale non productif de revenu.
Par ailleurs, les édifices de culte, les ambassades,
les bâtiments ruraux à usage agricole en sont également
exonérés. D'une manière temporaire, les constructions
nouvelles et certaines entreprises nouvelles ne paient pas la taxe
foncière. On fait remarquer enfin que le système
d'exonération et de dégrèvement est plus complexe que
cette présentation.
D'autres types d'exonérations de taxe foncière
sur les propriétés bâties sont prévus par la loi.
Le lieu d'imposition de la taxe foncière sur les
propriétés bâties est la commune où est situé
le bien. Sa base d'imposition est constituée par la moitié de la
valeur locative. A cette valeur locative, chaque commune applique le taux
qu'elle a décidé.
Ø La Taxe
Foncière sur les Propriétés non bâties
Représentant environ 1,5% du produit total des quatre
taxes, la taxe foncière sur les propriétés non
bâties est due par les propriétaires de terrains. La base
d'imposition est constituée, comme pour la taxe foncière sur les
propriétés bâties, de la valeur locative mais
diminuée d'un abattement de 20%. A cette base, la collectivité
applique son taux d'imposition.
Ø La Taxe
d'Habitation
La Taxe d'Habitation représente environ 20% du produit
des quatre taxes. Elle est due par tous les occupants propriétaires ou
locataires d'un local à usage d'habitation. Sa base d'imposition est
constituée de la valeur locative. Le produit s'obtient en appliquant
à cette base le taux voté par la collectivité. Il faut
noter que la loi prévoit de nombreux abattements,
dégrèvements et exonérations.
Ø La Taxe
Professionnelle
En 2003, la taxe professionnelle représentait 22,7
milliards d'euros, soit la moitié du produit total des quatre taxes.
Elle constitue la ressource fiscale la plus importante pour les
collectivités locales. C'est la taxe professionnelle qui concentre
l'essentiel des critiques à l'égard du système fiscal
local.
De part son poids mais aussi par ce qu'elle touche le coeur
même de l'activité économique, c'est-à-dire,
l'entreprise, les critiques à l'égard de la taxe professionnelle
se fondent sur le fait que cet impôt constituerait un frein à
l'investissement et à l'emploi. C'est la raison pour laquelle, la Loi de
Finance pour 1999 a introduit un mécanisme de suppression progressive de
la part salariale de la taxe professionnelle. En 2003, la part salariale a
totalement disparu de l'assiette de la taxe professionnelle.
La taxe professionnelle est acquittée par toutes les
personnes physiques et morales qui exercent à titre habituel une
activité non salariée. Son assiette est composée (à
partir de 2003) des immobilisations corporelles retenues pour les deux taxes
foncières. La valeur locative est la même que pour les deux taxes
foncières à la seule différence qu'elle ne connaît
pas les abattements de 50% et 20% appliqués respectivement à la
TFPB et à la TFPNB. On doit noter que, dans l'optique de soutenir
certaines activités économiques, un système
d'exonérations est prévu.
2. Les mécanismes des
quatre taxes
Nous verrons au cours du développement de notre
problématique de travail l'importance de la Loi du 10 janvier 1980.
Cette loi a introduit des changements concernant les modalités de
fonctionnement des impôts locaux. D'autre part, la Loi du 28 juin 1982 a
introduit des modifications visant à adapter les impôts locaux
à l'évolution du contexte économique et financier.
Bien que le début des années quatre-vingt,
correspondant aux débuts du processus de décentralisation, a
marqué une certaine prise de conscience de la nécessité de
modifier l'architecture et le fonctionnement du système fiscal local, on
ne peut pas affirmer à ce jour, que ce système se trouve
réellement bouleversé.
Depuis ces deux lois majeures, on assiste essentiellement
à des modifications « homéopathiques » non
pas de l'ossature mais de quelques règles de fonctionnement de la
fiscalité locale. D'ailleurs, on peut noter que ces changements passent
le plus souvent par des lois de finance et non pas par une véritable loi
de réforme de la fiscalité locale. Le dernier épisode des
suites réservées par le gouvernement au rapport de la Commission
Fouquet sur la réforme de la Taxe Professionnelle est assez significatif
à cet égard.
Les mécanismes de fonctionnement des impôts
locaux reposent sur les bases (ou assiettes) d'imposition et sur les taux. Les
élus locaux votent directement les taux appliqués à chaque
impôt. Deux mécanismes de vote annuel des taux par les
assemblées locales existent : un premier mécanisme qui
consiste à faire varier proportionnellement tous les impôts d'une
année à l'autre. En d'autres termes, il s'agit de voter
globalement la masse de l'impôt. Un deuxième mécanisme
repose sur une variation différenciée des taux et consiste
à faire évoluer librement les taux entre eux.
Cette liberté de vote des taux que l'on peut
considérer comme un principe majeur de l'autonomie fiscale des
collectivités locales est bien sûr encadrée par la loi. En
effet, il existe des taux plafonds que les communes doivent respecter. En
outre, les taux de la taxe d'habitation et ceux des deux taxes foncières
ne peuvent dépasser une limite fixée à 2,5% fois la
moyenne nationale de l'année précédente ou 2,5% fois la
moyenne départementale.
Le taux de la taxe professionnelle ne peut être
supérieur à deux fois le taux moyen national de l'année
précédente. En ce qui concerne la taxe d'habitation et les deux
taxes foncières, il n'existe aucune limitation à l'égard
des départements et des régions.
La question que l'on peut se poser est de savoir si le vote
des taux par les collectivités locales a contribué à
renforcer l'autonomie fiscale des collectivités locale. Il semblerait
que non même si juridiquement, il renforce le principe de libre
administration. Dans son Xeme rapport, le Conseil des Impôts constate que
l'autonomie fiscale des collectivités locales est en moindre que ce que
l'on attendait de la liberté de vote des taux.
§2. De la libre
administration à l'autonomie financière : la quête
inachevée
La France, Etat traditionnellement jacobin, s'est
engagée depuis une vingtaine d'années dans un processus de
décentralisation qui s'est manifesté par des transferts
considérables de compétences de l'Etat vers les
collectivités locales et surtout par la disparition de la tutelle
étatique sur ces mêmes collectivités locales. Au regard de
ces évolutions que les quelques vingt années ne peuvent suffire
pour mesurer toute la portée, on doit se demander pourquoi cette
décentralisation quasi parfaite ne s'est pas traduit par des reformes en
matières de finances et de fiscalités locales.
Pour M. Bouvier, « les finances locales se
présentent à maints égards comme un parfait
révélateur des évolutions que connaissent les
sociétés contemporaines. Elles apparaissent tout d'abords comme
l'un des éléments essentiels pour juger de l'accomplissement de
la réforme de la décentralisation engagée en 1982 et
relancée en 2003 ».2(*)
Par ailleurs, le même auteur fait remarquer que le
pouvoir fiscal local ne saurait se limiter à la simple gestion des
moyens financiers déterminés par l'Etat. La question de
l'autonomie fiscale et financière des collectivités locales
soulève un certain nombre d'enjeux politiques majeurs. La question
principale est celle de l'incidence du principe de libre administration
reconnue par la Constitution sur la décentralisation
financière.
Il apparaît que la lecture fournie par les
différentes décisions du Conseil Constitutionnelle en la
matière est minimaliste dans la mesure où le lien entre pouvoir
fiscal local et principe de libre administration est interprété
selon une logique de marges de manoeuvre financières. A plusieurs
reprises, le Conseil Constitutionnel a jugé que certaines
décisions fiscales en l'occurrence la suppression de la part salariale
de la taxe professionnelle ne constituaient pas une entrave au principe de
libre administration.
Dans l'optique constitutionnelle, le pouvoir fiscal,
c'est-à-dire, le pouvoir de disposer d'une ressource financière
dont la collectivité locale peut maîtriser le taux n'est pas
crucial pour juger de la force du principe de libre administration des
collectivités locales. C'est quelque peu paradoxal lorsqu'on sait que la
reconnaissance constitutionnelle du principe de libre administration est
perçue comme un renforcement de celui-ci et qu'en même temps, ce
principe ne trouve pas de répercussions fortes en matière de
fiscalité locale.
On ne peut poser la question de la décentralisation et
de la politique publique locale sans faire une interpellation concernant la
problématique de l'autonomie fiscale. Or, en matière politique et
institutionnelle, qui dit autonomie dit pouvoir. De fait, le principe de libre
administration ne s'appréhende que dans ce cadre du pouvoir fiscal.
Contrairement à la logique minimaliste qui soumet l'autonomie fiscale et
financière à une interprétation extensive du principe de
libre administration, la véritable question de la refondation de
l'action publique autour du rôle et de la place des collectivités
locales envisage le principe de libre administration comme un pendant de
l'émergence d'un pouvoir fiscal local.
Malgré les évolutions de ces dernières
années, on ne peut pas affirmer que les collectivités locales
maîtrisent totalement leurs politiques fiscales et financières.
L'impôt local est, en réalité, du ressort de l'Etat au
regard même de sa gestion. En effet, c'est l'Etat qui assure, à
travers sa Direction Générale des Impôts, l'assiette et le
recouvrement.
Comment donc peut -on parler d'autonomie financière
alors que les collectivités locales n'assurent pas directement la charge
et la responsabilité de la gestion de l'assiette et du recouvrement de
l'impôt. En outre, le système du « compte
d'avances » du Trésor Public, bien qu'il présente des
avantages pour les collectivités locales, soumet celles-ci à une
forme de tutelle administrative et financière qui est tout à fait
contraire au principe d'autonomie.
Un autre aspect de la question de l'autonomie
financière et fiscale locale : la nature des rapports financiers
entre l'Etat et les collectivités territoriales. Cette question est au
coeur de notre réflexion sur la spécialisation fiscale comme
instrument de refondation de l'action publique locale. L'histoire des relations
financières de l'Etat et des collectivités locales est
révélatrice de « l'histoire
chaotique »3(*) de
la décentralisation.
En fait, l'un des enjeux majeurs pour l'avenir de la
décentralisation se situe au niveau de la volonté de l'Etat
d'accorder un pouvoir financier et fiscal total aux collectivités
locales ou bien de se réapproprier ce pouvoir fiscal. Dans le premier
cas, on parle de « décentralisation fiscale » tandis
que dans le second, il s'agit d'une « recentralisation
fiscal ». Bien que cette seconde configuration marque un net retour
en arrière, certains observateurs en sont partisans.
En se situant dans la première configuration, on est
obligé de poser la question de la spécialisation des impôts
locaux. Tel n'est pas notre propos à ce stade de l'analyse. Il s'agit de
montrer que la recentralisation fiscale obéit à une logique et
est caractérisée par des modalités de mise en oeuvre dont
la prise en compte nous permettra par la suite de mieux comprendre les
fondements de la spécialisation fiscale.
On dit que l'Etat est le premier contribuable des
collectivités locales. En effet, chaque année, l'ensemble des
concours financiers de l'Etat aux collectivités locales
représente près de 60 milliards d'euros. Les dotations de l'Etat
répondent à quatre objectifs : tout d'abords, il s'agit
d'aider au fonctionnement courant des collectivités locales. Par
ailleurs, les dotations cherchent à soutenir les investissements,
à financer les augmentations de charges induites par les transferts d
compétences et à compenser les exonérations et
dégrèvements consentis par l'Etat. Il faut rappeler que dans sa
volonté de maîtriser l'évolution de ces dotations, l'Etat a
mis en place depuis 1996, « un pacte de stabilité »
remplacé, en 1999, par « un contrat de croissance et de
solidarité » qui devait prendre fin en 2001 mais qui a
été reconduit pour 2002, 2003 et 2004.
Notons qu'il s'agit là d'une forme de substitution du
contribuable national au contribuable local. Ce fait nous servira de base de
réflexion pour introduire la problématique de la
spécialisation fiscale. Les concours de l'Etat aux collectivités
locales se présentent sous la forme de subventions, de compensations
d'exonérations et de dégrèvements législatifs. Nous
présentons ici les différentes formes de concours financiers de
l'Etat aux collectivités locales :
A. Dotations et
subventions de fonctionnement
1. La Dotation Globale de
Fonctionnement (DGF)
La DGF est perçue par les communes et les
départements. Elle représente la subvention la plus importante de
l'Etat, soit près de 19 milliards d'euros pour l'année 2003.
C'est la loi du 3 janvier 1979 qui instaure la DGF en prévoyant un
système de répartition basé sur trois tranches de la
DGF : une première tranche constituée par la dotation
forfaitaire, une seconde par la dotation de péréquation et une
dernière tranche constituée par les concours particuliers. La
dotation de péréquation est, elle-même, basée sur
deux critères : le potentiel fiscal et l'impôt sur les
ménages. Nous reviendrons plus en détail sur la question du
potentiel fiscal. La loi du 13 décembre 1993 a intégré
dans la DGF le fait intercommunal. D'autres part, la Loi de Finance initiale
pour 2004 a crée une DGF pour les régions.
2. La Dotation Spéciale
Instituteur (DSI)
3. La Dotation
Générale de Décentralisation (DGD)
Dès les premières années de la
décentralisation, la loi a prévu que les transferts de
compétences seraient financés par l'Etat. Ainsi, les lois de 2
mars 1982, du 7 janvier 1983 et du 22 juillet 1983 ont reconnu ce principe. On
notera qu'en 2004, ce principe est reconnu par la Constitution.
4. La Dotation Elu Local
(DEL)
5. La Dotation pour
Compensation des Pertes de Base de Taxe Professionnelle
La Dotation pour compensation des pertes de base de taxe
professionnelle est l'un des deux piliers (avec la Dotation de
développement rural) du système qui a remplacé le Fonds
National de Péréquation de la Taxe Professionnelle
supprimé par la Loi de Finance Initiale pour 2004.
6. La Dotation de
Développement Rural
7. Les autres subventions de
fonctionnement
Il s'agit essentiellement de subventions spécifiques
accordées par divers ministères aux collectivités
territoriales et qui ont représenté en 2004 près de 700
millions d'euros.
B. Dotations et
subventions d'équipement
1. La Dotation Globale
d'Equipement
C'est la loi du 2 mars 1982 qui a posé le principe de
la globalisation des subventions d'investissement et a institué ainsi,
la dotation globale d'équipement pour les communes et
départements.
2. Les Dotations de Transferts
de Compétences
3. Les Subventions
spécifiques
4. Les Fonds de Compensation
pour la TVA
5. Le Produit des Amendes de
la Police et de la Circulation
Ces concours financiers ne sont-ils pas un moyen pour l'Etat
d'agir directement ou indirectement sur les politiques locales ? Si la
réponse à cette question n'est pas évidente, il y a un
grand intérêt à poser une telle question compte tenu des
menaces qui peuvent se présenter pour la décentralisation de
certaines compétences. D'ailleurs, une reforme efficace de la
fiscalité locale passe nécessairement par une « mise
à plat » des dotations de l'Etat aux collectivités
locales.
En effet, les conditions actuelles d'organisation et de
fonctionnement des dotations étatiques ne permettent pas de lire
clairement l'action publique du fait des imbrications de dotations et de
complexité dans les modes de calcul. Ici, c'est la question de la
transparence qui est posée. Par ailleurs, compte tenu des
différents critères de calcul des dotations (et notamment de la
Dotation Globale d'Equipement et de la Dotation Globale de Fonctionnement), il
semble que les concours financiers de l'Etat ne jouent pas parfaitement leur
rôle péréquater.
C'est ainsi que le Président du Sénat Christian
Poncelet pense que « le défi des prochaines années
résidera donc dans l'avènement de concours de l'Etat respectueux
de l'autonomie locale, c'est-à-dire stables, pérennes, lisibles
et permettant une réduction des inégalités, sans
pénaliser les collectivités les plus
dynamiques ».4(*)
Section 2. L'avenir de la
fiscalité locale
Compte tenu du diagnostic que nous venons de poser, deux
constats s'imposent. D'une part, tout le monde s'accorde à dire qu'il
est urgent et nécessaire de réformer la fiscalité locale.
Au passage, il nous semble important de s'accorder sur les mots que l'on
emploi. En effet, s'agit-il de réformer la fiscalité locale ou
bien les finances locales ? Selon que l'on parle de l'une ou de l'autre,
on n'a ni le même diagnostic ni les mêmes réponses.
D'autre part, une fois que le consensus de réformer la
fiscalité locale, on se rend compte que la question la plus cruciale au
regard des contraintes actuelles qui s'imposent à l'action publique
concerne les compétences fiscales des collectivités
territoriales. Car s'il y a un consensus sur la nécessité de
réformer, il existe de nombreuses divergences sur les pistes. C'est la
raison pour laquelle, il nous a semblé judicieux de poser la question de
la réforme sous l'angle qui fait le plus d'unanimité, celui des
compétences locales.
§1. Consensus sur un
diagnostic : reformer la fiscalité locale
Le thème de la réforme de la fiscalité
locale est très ancien. Si aujourd'hui, la question se pose avec
beaucoup d'acuité, c'est justement par ce que le temps est passé
sans qu'une solution profonde et adaptée n'ait pu être
trouvée. Déjà, dans les années trente, à la
suite de la crise de 1929, de nombreuses propositions de réformes ont
été proposées : Projet Piétri de 1931 qui
proposait la suppression des centimes additionnels, projets Bonnet de 1937,
Blum de 1938 ou Marchandeau en 1938. Le point commun à ces projets,
c'est qu'ils partaient tous d'un même constat : inefficacité,
archaïsme, inégalité, lourdeur de la pression fiscale.
Le rapport Brunel du Conseil Economique et Social pose la
condition de la reforme des finances locales comme nécessaire à
la réussite du processus de décentralisation. Ce rapport part
d'un constat que l'on peut qualifier d'alarmant en ce sens que la situation
actuelle des finances locales remet en cause le principe de l'autonomie
financière des collectivités locales.
Ce constat est renforcé par le tableau
général des finances décentralisées :
mauvaises compensations des déséquilibres territoriaux,
inexistante ou inadaptation des règles du jeu en matière de
relations financières entre l'Etat et les institutions locales,
complexité et instabilité des mécanismes
d'évolution des concours de l'Etat. Par ailleurs, le rapport fait
remarquer une certaine diversification et une multiplication de
procédures contractuelles et de cofinancement et une faible
lisibilité des dispositifs de péréquation.
L'apport essentiel du rapport est d'avoir posé le
principe de l'autonomie financière non pas comme la simple autonomie de
dépense mais comme le pendant d'une autonomie fiscale forte
« qui constitue un fondement de la démocratie locale, traduit
par le lien fiscal, facteur de responsabilisation qui permet la transparence et
l'autonomie des choix ».5(*) Autrement dit, une bonne reforme fiscale doit
entraîner plus de transparence et de lisibilité et doit mettre en
place un mécanisme régulateur de la pression fiscale ainsi que
des dispositifs efficaces de correction des inégalités. Toutes
ces pistes de reforme peuvent se résumer comme suit :
Ø La création d'un nouvel équilibre entre
l'Etat et les collectivités territoriales
Ø La confortation de l'autonomie fiscale locale
Ø La simplification et l'intensification de la
péréquation financière et
Ø Le renforcement de l'autonomie financière des
structures intercommunales et des régions.
S'agissant de ce dernier point, on ferra remarquer que le
rapport prend en compte la nouvelle configuration de l'action publique locale
en ce sens qu'il propose une fiscalité mieux adaptée à
l'exercice des compétences locales. Ainsi, le rapport préconise
le transfert d'une partie des compétences des communes aux structures
intercommunales jugées seules capables d'assurer un traitement
cohérent et à la bonne échelle des problèmes
d'urbanisme, de logement, d'environnement et de développement
économique.
On notera par ailleurs que le système fiscal local
revêt quelques aspects paradoxaux en ce sens que le
bénéfice de l'impôt ne correspond pas toujours à
l'exercice réel des compétences locales. C'est ainsi que les
régions exercent la compétence quasi-exclusive du
développement économique et de la formation professionnelle alors
qu'elles sont en même temps les collectivités qui ont le plus
faible retour en matière de taxe professionnelle.
Comment donc comprendre ce fait qui veut que les
régions développent des programmes d'investissement et de
développement économique alors qu'en même temps, du fait de
la taxe professionnelle, le retour de ces investissements
bénéficient en priorité aux communes et aux
départements. Du fait du caractère même de ces paradoxes,
certains observateurs mettent l'accent sur les « dangers »
en matière de démocratie locale liés à l'absence de
lien citoyen entre la fiscalité et les compétences locales.
Si c'est tout le système fiscal qu'il faudrait
rénover, il est nécessaire, pour mettre en oeuvre une reforme
efficace, de prendre en compte les difficultés spécifiques
à chaque type d'impôt. Ainsi, on peut se rendre compte que la
grande partie des préoccupations des observateurs de la fiscalité
locale se concentre autour de la problématique de la Taxe
Professionnelle.
Au-delà des critiques techniques et théoriques
que l'on peut apporter à cet impôt, on peut dire que si tous les
regards se portent sur la Taxe Professionnelle, c'est tout simplement par ce
que cet impôt est celui qui reflète le mieux l'activité et
le dynamisme local. Aussi, le problème de la TP, c'est qu'elle ne s'est
pas adaptée aux mutations structurelles locales.
Une fois le diagnostic posé, la question est de savoir
comment moderniser la fiscalité locale car il s'agit bien de reformer la
fiscalité en la modernisant. Moderniser la fiscalité locale,
c'est bien sûr adapter celle-ci au nouveau cadre et aux nouvelles
contraintes de l'action publique locale. Sur ce sujet, deux écoles
s'affrontent. Une première est représentée par les
partisans qui prônent une modernisation de la fiscalité locale
tout en maintenant le cadre existant tandis que la seconde part du postulat
qu'une véritable modernisation de la fiscalité locale exige
nécessairement l'élaboration d'une nouvelle organisation fiscale
territoriale.
Quelques soient les postures prises par les uns et les autres,
il existe un certain nombre de points qui mettent tout le monde d'accord. Parmi
ces points, il y a la rénovation des valeurs locatives ou la
révision des relations financières entre l'Etat et les
collectivités locales. On notera que quelques pistes ont
été esquissées notamment l'instauration d'une taxe locale
sur le revenu, la prise en compte de la valeur ajoutée comme assiette de
la taxe professionnelle, le remplacement de la valeur locative par la valeur
vénale dans le calcul de la taxe foncière etc.
On peut penser que toutes ces pistes aussi
intéressantes qu'elles soient, se limitent aux aspects techniques de la
fiscalité locale et enferment celle-ci dans un cadre procédurier
sans prendre toute la mesure des enjeux institutionnels et économiques
d'une reforme en profondeur de la fiscalité locale.
Si l'on met à part l'ordonnance du 7 janvier 1959, on
peut affirmer qu'aucun véritable projet de réforme de
l'architecture de la fiscalité locale n'a été
réellement engagé depuis cette date. Toutefois, il faut rappeler
ici quelques dates de reformes qui ont marqué les finances locales. Nous
reviendrons ultérieurement sur les différents aspects de chaque
texte de reforme. En effet, chaque étape a marqué une certaine
évolution pour un domaine particulier. On citera ainsi la loi du 31
décembre 1973 dont la principale innovation est la substitution de trois
nouvelles taxes aux anciennes contributions foncières et
mobilières : les deux taxes foncières et la taxe
d'habitation.
Autre aspect de la loi de 1973, c'est la simplification et
l'actualisation des bases à travers l'institution d'une nouvelle
référence fiscale, la valeur locative. La loi du 18
juillet 1974 vient instaurer un mécanisme de mise à jour
régulier des bases d'imposition. Il s'agit de procéder
régulièrement à une révision générale
des valeurs locatives. La loi du 29 juillet 1975 a modernisé l'ancienne
patente et définit les conditions et les modalités de vote direct
des taux par les assemblées locales.
Ainsi, la Taxe Professionnelle est venue remplacer la patente.
Cette loi avait une véritable ambition modernisatrice dans la mesure
où la nouvelle taxe professionnelle devait non seulement être plus
conforme à la réalité économique mais elle devait
également cherchait à réduire les inégalités
entre communes.
Comme nous le suggérions ci-dessus, une réforme
ambitieuse de la fiscalité locale ne peut se limiter aux seuls aspects
techniques et procéduriers. Il apparaît que la reforme de
l'architecture même de la fiscalité locale est doublement
nécessaire. Tout d'abords, elle serait le moyen d'adapter les finances
locales à l'environnement moderne des collectivités locales. Par
ailleurs, elle permettrait une clarification administrative et institutionnelle
dans le cadre du processus de décentralisation.
En effet, la complexité de l'organisation
administrative locale française ne permet pas la pleine reconnaissance
et la totale appropriation de celle-ci par le citoyen. Ainsi, les 36763
communes, la centaine de départements, les 22 régions et les
quelques 20 000 établissements de coopération intercommunale
semblent constituer plutôt un handicap pour l'affirmation du pouvoir des
collectivités locales.
Un texte présente un aspect particulier et essentiel.
Il mérite d'être mis en exergue comme étape majeure dans le
processus de reforme de la fiscalité locale : la loi du 10 janvier
1980. Cette loi a introduit comme principales innovations le vote direct des
taux d'imposition par les collectivités locales, des aménagements
en matière de taxe d'habitation et de taxes foncières, des
nouveautés concernant la taxe professionnelle.
Avec la reforme constitutionnelle de 2003, la question de
l'organisation financière et fiscale locale s'est posée avec
beaucoup plus d'acuité. C'est au même moment que la piste de la
spécialisation fiscale locale a été le plus
envisagée. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard en ce sens que des
questions comme la simplification administrative, la prise en compte de la
nouvelle gouvernance locale ou la montée en puissance de la
démocratie participative locale ont accompagné la
réflexion sur le deuxième acte de la décentralisation.
C'est ainsi que M. P. DEVEDJIAN, alors Ministre délégué
aux libertés locales envisageait la réforme fiscale comme un
moyen de « simplifier notre fiscalité locale qui est
particulièrement opaque en la spécialisant ».6(*)
La Note d'Orientation du 12 juillet 2001 sur la
réforme des ressources fiscales et financières des
collectivités évoque la question de la spécialisation
fiscale comme piste éventuelle de reforme fiscale selon les propositions
faites par le rapport Mauroy sur l'avenir de la décentralisation tout en
mettant l'accent sur les nombreuses difficultés liées à sa
mise en oeuvre pratique. Ainsi, on peut y lire que la spécialisation
pose un problème de transfert entre collectivités locales et
entre contribuables.
Par ailleurs, elle est susceptible d'engendrer des
déséquilibres budgétaires et des transferts de charges
insupportables entre contribuables. En outre, elle nécessiterait
l'organisation d'un dispositif général de
prélèvement et de compensation dont la gestion serait
particulièrement lourde. Enfin, la spécialisation
entraînerait des variations de taux qui risqueraient d'être
difficilement acceptables. On peut remarquer que la crainte principale
exprimée par ceux qui sont contre la spécialisation fiscale
réside dans les inégalités qu'elle risque d'engendrer.
Cette crainte semble quelque peu infondée dans la mesure où le
système actuel n'est pas exempt de toute reproche en matière
d'inégalités territoriales. Par ailleurs, comme nous le
soulignerons ultérieurement, l'objectif de la spécialisation est
de poser la question de l'impôt local comme instrument de concurrence
territoriale tout en revoyant les modalités actuelles de
résorption des inégalités engendrées par cette
concurrence.
1. Le cas spécifique de
la réforme de la Taxe Professionnelle
Dans le cadre de la commission Fouquet sur la réforme
de la Taxe professionnelle, le Premier Ministre de l'époque, M. J-P.
RAFFARIN a établit le cadre devant guider la réflexion
générale sur la reforme de la fiscalité locale. En effet,
celle-ci doit respecter quatre conditions majeures : la
préservation de l'autonomie financière des collectivités
territoriales, le maintien du lien avec l'activité économique des
territoires, l'absence de transferts de charges supplémentaires vers les
ménages et le renforcement de l'intercommunalité.
Il faut rappeler ici le poids particulier de la taxe
professionnelle dans les finances des collectivités territoriales. En
effet, celle-ci constitue, globalement, depuis sa création, un facteur
d'accroissement des ressources pour les collectivités locales, son
produit progressant plus vite que le Produit Intérieur Brut. Et cela,
malgré la suppression de la part salariale. Hors compensations fiscales,
le produit de la taxe professionnelle est une composante importante des
ressources fiscales des collectivités locales : 35,2% pour les
communes et leurs groupements, 31,4% pour les départements et 37,9% pour
les régions.
Ce poids spécifique de la taxe professionnelle tient au
fait que son assiette fiscale(équipements et biens mobiliers retenus sur
la base de leur valeur initiale) est surtout constituée d'un stock, donc
peu volatil. En d'autres termes, même lorsqu'une entreprise n'investit
pas, et quels que soient ses résultats et sa situation
financière, les bases restent identiques.
La thématique de la reforme de la TP est
emblématique non pas de l'absence de pistes de reforme de la
fiscalité locale mais du flou artistique qui entoure les volontés
politiques quant au rôle que l'on veut accorder aux impôts locaux
dans le nouveau contexte de l'action publique locale. Ainsi, le seul consensus
autour de la reforme de la TP réside dans ce que la nouvelle imposition
ne doit pas pénaliser l'investissement local sans que l'on sache s'il
faut supprimer la TP, procéder à un simple aménagement de
celle-ci ou bien la remplacer par un nouvel impôt local sur les
entreprises.
La suppression pure et simple de la TP (sans remplacement)
peut être mise en oeuvre selon les modalités suivantes : soit
son remplacement par une dotation financière de l'Etat soit par le
partage d'un ou de plusieurs impôts étatiques. La solution du
simple aménagement de la TP part de l'idée que la reforme doit
viser seulement à corriger les défauts de celle-ci,
c'est-à-dire sa concentration sur une base étroite, la prise en
compte des immobilisations à raison de leurs coûts d'acquisition
ou le dépassement du plafond en fonction de la valeur ajoutée.
L'aménagement de la TP consisterait à un
élargissement de sa base à d'autres facteurs de production ou
l'instauration d'un nouveau plafonnement effectif en fonction de la valeur
ajoutée. L'instauration d'un tel plafonnement a pour but de corriger
certains effets pervers notamment le poids très important de la TP pour
certaines entreprises malgré l'existence d'un plafonnement en fonction
de la valeur ajoutée.7(*) Enfin, le remplacement de la TP par un nouvel
impôt local serait l'instauration d'un impôt dont la base serait
assise sur une assiette mixte composée de valeurs comptables et d'autres
types de valeurs.
Dans le cadre de la Commission FOUQUET sur la réforme
de la Taxe Professionnelle, plusieurs pistes ont été
envisagées en matière d'assiettes, de modalités de
fixation de taux et de niveaux de collectivités
bénéficiaires du produit de l'impôt. Concernant l'assiette
fiscale, le choix retenu en 1976 d'asseoir la TP sur des facteurs de production
a été abandonné au profit d'une assiette constituée
de soldes comptables. L'une des pistes les plus évoquées est
celle d'asseoir la TP sur la valeur ajoutée. Certains auteurs ont
même proposée que la taxe professionnelle soit remplacée
par « une redevance territoriale d'activité » qui
privilégierait la localisation de l'entreprise.
Ainsi, l'imposition des assiettes comptables présente
un certain nombre d'avantages dans la mesure où celles-ci n'obligent pas
les entreprises à tenir une comptabilité physique et qu'elles
concernent l'entreprise et non de l'établissement. Les assiettes mixtes
ont l'avantage d'instaurer un système d'imposition qui prendrait en
comptes la diversité des situations des entreprises. On cite parmi
elles, les valeurs locatives foncières, l'excédent brut
d'exploitation ou le résultat net comptable.
L'un des aspects des propositions de reformes de la TP
concerne la volonté d'introduire une « dose » de
spécialisation » qui réduirait la superposition fiscale
actuelle. Ainsi, le rapport de la commission Fouquet précise que la
spécialisation fiscale présente un intérêt dans la
mesure où elle correspond à la volonté du gouvernement de
réduire la part de l'imposition locale des entreprises dans le total des
ressources fiscales des collectivités locales. Par ailleurs, tout en
rappelant que le mouvement de spécialisation est déjà
engagé avec la Taxe Professionnelle Unique, le rapport pose le cadre
d'une bonne mise en oeuvre de la spécialisation : la diminution du
nombre de collectivités votant un taux d'imposition sur une même
base, la possibilité pour les collectivités locales de disposer
de plus d'une ressource fiscale, le lien entre fiscalité et territoire.
§2. La question des
compétences fiscales des collectivités
territoriales
L'un des aspects de la compétence fiscale des
collectivités locales, c'est le vote direct par les assemblées
délibérantes locales des taux d'imposition. Comme on l'a
souligné précédemment, c'est la loi du 10 janvier 1980 qui
instaure ce vote direct des taux. A ce titre, cette loi a constitué une
évolution majeure vers l'autonomie financière et fiscale des
collectivités territoriales. On peut donc dire que la question des
compétences fiscales des collectivités locales est cruciale pour
la problématique de l'autonomie.
Le rapport de la Commission Fouquet sur la réforme de
la Taxe Professionnelle pose la question du vote des taux par les
collectivités locales en de termes nouveaux qui prend en compte les
nouvelles modalités d'exercice de l'action publique locale et la
nécessité d'introduire une certaine spécialisation des
impôts locaux. Ainsi, ce vote doit pouvoir concilier l'autonomie
financière des collectivités locales tout en maintenant une
certaine homogénéité de l'imposition des entreprises sur
le territoire national.
Par ailleurs, la question de l'encadrement des taux devra
être examinée sous trois aspects : la fixation d'un taux
plancher et d'un taux plafond dans le but d'éviter des écarts de
taux importants avec notamment l'instauration d'un système de taux pivot
national que les collectivités locales pourraient moduler, le maintien
d'un lien avec l'imposition des ménages et l'instauration d'un lien
entre les politiques fiscales des collectivités locales de niveaux
différents.
Il semble cependant que le vote des taux par les
assemblées locales soit une liberté en trompe l'oeil dans la
mesure où l'Etat continue d'encadrer et d'y jouer un rôle
important. En effet, c'est la Direction Générale des Impôts
qui calcule l'assiette des impôts directs locaux en fonction des
données cadastrales. En outre, l'absence de spécialisation et
l'enchevêtrement des niveaux d'imposition enlèvent aux
collectivités locales tout pouvoir d'agir sur ses propres taux sans
prendre en compte le niveau des taux des autres collectivités locales.
En ce sens la spécialisation fiscale donnerait aux assemblées
délibérantes locales une marge d'action très
importante.
Pour bon nombre de spécialistes des finances locales,
la véritable autonomie fiscale des collectivités locales passe
par la reconnaissance d'un véritable pouvoir fiscal local. En d'autres
termes, la véritable question que pose la réforme de la
fiscalité locale n'est pas tant de savoir si les collectivités
locales ont à leur disposition des ressources financières
suffisantes que de savoir si elles ont la possibilité de maîtriser
et de créer ces ressources.
Au-delà du principe de libre administration des
collectivités territoriales, La Constitution ne reconnaît pas
explicitement un pouvoir fiscal local. Cependant, depuis les années 90,
il apparaît de plus en plus clairement que le Conseil Constitutionnel
penche plutôt vers la préservation (à défaut de
reconnaissance explicite) d'une forme de pouvoir fiscal aux
collectivités locales. Ainsi, dans sa décision du 25 juillet
1990, il précise que « les règles posés
par la loi ne sauraient avoir pour effet de restreindre les ressources fiscales
des collectivités locales au point d'entraver leur libre
administration ».8(*)
Cependant, les positions du Conseil Constitutionnel ne
suffisent pas à consacrer totalement un véritable pouvoir fiscal
local. C'est toute l'organisation des rapports entre l'Etat et les
collectivités locales qu'il faudrait revoir non pas dans un sens qui
effacerait la tutelle hiérarchique mais plutôt dans une
redéfinition de cette tutelle au regard des nouveaux enjeux de l'action
publique. C'est précisément l'esprit des demandes faites par les
partisans d'une « Nouvelle République
Territoriale ». Ce débat permet de faire la distinction entre
compétences exclusives et compétences
partagées pour mieux présenter les limites du système
actuel d'organisation des compétences entre l'Etat et les
collectivités locales mais également entre les
collectivités locales mêmes.
En effet, le système actuel accorde une place
très importante aux compétences partagées au
détriment des compétences exclusives. Ce qui se traduit par une
complexité et une inefficacité de l'ensemble de l'organisation
sans oublier le manque de lisibilité. Sans remettre en cause les
compétences partagées, il apparaît de plus en plus
nécessaire de revoir le système de
« distribution » des compétences pour renforcer
l'importance des compétences exclusives dévolues à chaque
niveau de collectivité.
Une telle révision entraînerait
nécessairement une révision du système de
« distribution » des compétences fiscales et
financières. En d'autres termes, si la spécialisation fiscales
est devenue une nécessité, c'est dans la mesure où elle
est le corollaire de la reforme du système d'exercice des
compétences locales.
Depuis quelques années, on assiste à un
mouvement de transfert de compétences de l'Etat vers les
collectivités territoriales qui a connu son apogée avec le
deuxième acte de la décentralisation. Ces transferts ont eu des
conséquences importantes en matière financière et fiscale
au niveau des collectivités locales. Ainsi, la loi du 27 juillet 1999 a
crée la Couverture Maladie Universelle (CMU) et retiré de ce
fait, aux départements, la gestion de l'aide médicale
généralisée. Ce qui a eu pour conséquence un
allégement de charges qui s'est manifesté par un
prélèvement de 1.4Mds€ sur la Dotation de
Décentralisation.
Cette même loi a simplifié le financement de la
compétence d'aide sociale en supprimant les contingents communaux d'aide
sociale versés aux départements et en les remplaçant par
un abondement de la DGF d'un montant équivalent ( soit 1.7Mds€ ).
En même temps, la DGF des communes a été amputée du
même montant. Bien que ces mesures aient eu une conséquence
financière neutre, elles ont engendré une modification des
structures budgétaires des communes et des départements. En plus
de ces mesures, on peut mentionner d'autres nouvelles compétences comme
la gestion de l'Aide Personnalisée d'Autonomie (APA) par les
départements et la généralisation des compétences
en matière de transport ferroviaire pour les régions. Pour le
financement de ces nouvelles dépenses, les départements
bénéficient d'un concours géré par
établissement public national, le fonds de financement de l'APA. Le
tableau ci-dessous récapitule, pour information, les différents
transferts de compétences vers les collectivités
territoriales.
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TABLEAU
RÉCAPITULATIF DES TRANSFERTS DE COMPETENCES VERS LES COLLECTIVITES
TERRITORIALES
Niveau de collectivitéCompétences
transférées avant la loi du 13 août
2004Compétences transférées par la loi du 13 août
2004Commune et groupement de communesUrbanisme et
transports-Élaboration des plans locaux d'urbanisme et des
schémas de cohérence territoriale ; -Délivrance de
permis de construire ; -Création, aménagement,
exploitation des ports de plaisance.-Si elles le demandent avant le
1er janvier 2006, propriété, aménagement et
gestion de tout port non autonome relevant de l'État situé sur
son territoire ; -Création, aménagement et exploitation
des ports de commerce et de pêche qui leur sont
transférés ; -Peuvent se porter candidates jusqu'au
1er juillet 2006 pour l'aménagement, l'entretien et la
gestion d'aérodromes civils.Enseignement-Propriété,
construction, entretien et équipement des écoles
publiques ; -Intervention dans la définition de la carte
scolaire.Possibilité de créer, à titre expérimental
pour cinq ans, des établissements publics locaux d'enseignement
primaire.Action économique-Participation possible au financement des
aides directes aux entreprises dans le cadre d'une convention avec la
région ; -Attribution d'aides indirectes aux
entreprises.-Possibilité de mettre en oeuvre leurs propres
régimes d'aides après l'accord de la région ; -
Possibilité d'instituer un office de tourisme.LogementDéfinition
d'un programme local de l'habitat pour les communes au sein d'un EPCI.-
Délégation possible au maire ou au président d'un EPCI de
la gestion du contingent préfectoral ; - Possibilité de
participer à la construction, l'entretien et l'équipement du
logement des étudiants ; - Lutte contre l'insalubrité
à titre expérimental.Action sanitaire et socialeAction
complémentaire à celle du département avec les centres
communaux d'action sociale (CCAS).-Possibilité d'exercer des
activités en matière de vaccination, de lutte contre la
tuberculose, la lèpre, le sida et les infections sexuellement
transmissibles ; -Possibilité de gérer totalement ou
partiellement le fonds d'aide aux jeunes (FAJ).CultureResponsabilité des
bibliothèques de prêts, conservatoires et musées
municipaux.-Organisation et financement de l'enseignement artistique
initial ; -Peuvent devenir propriétaire de monuments
classés ou inscrits appartenant à l'État ou au Centre des
monuments nationaux.DépartementAction sociale,
solidarité, logement-Sauf exception, a la charge de l'ensemble des
prestations d'aide sociale : aide sociale à l'enfance, aide aux
handicapés, insertion sociale et professionnelle (gestion du RMI-RMA
depuis le 1er janvier 2004), aide aux personnes
âgées ; -Protection sanitaire de la famille et de
l'enfance.-Définit et met en oeuvre la politique d'action
sociale ; -Possibilité d'exercer des activités en
matière de vaccination, de lutte contre la tuberculose, la lèpre,
le sida et les infections sexuellement transmissibles ; -
Création dans chaque département, financement et gestion de
nouveaux FAJ ; - Expérimentation dans certains
départements de compétences élargies en matière de
protection judiciaire de la jeunesse ; - Création dans chaque
département, gestion et financement de nouveaux fonds de
solidarité pour le logement.Aménagement de l'espace,
équipement- Entretien et investissement concernant la voirie
départementale ; - Organisation des transports routiers non
urbains de personnes et des transports scolaires hors du
périmètre urbain ; - Création, équipement
et gestion des ports maritimes de commerce et de pêche ; -
Élaboration d'un programme d'aide à l'équipement
rural ; - Protection, gestion et ouverture au public des espaces
naturels sensibles boisés ou non ; - Donne son avis lors de
l'élaboration du schéma régional d'aménagement et
de développement du territoire (SRADT) par la région.- Gestion
d'une partie (environ 15 000 km) des routes nationales ; -Peuvent
se porter candidats jusqu'au 1er juillet 2006 pour
l'aménagement, l'entretien et la gestion d'aérodromes
civils ; -S'ils le demandent avant le 1er janvier 2006,
propriété, aménagement et gestion de tout port non
autonome relevant de l'État situé sur son
territoire.Éducation, culture, patrimoine- Construction, entretien,
équipement et financement des collèges ; -
Responsabilité des bibliothèques centrales de
prêt ; - Gestion et entretien des archives et des musées
départementaux.- Propriété du patrimoine immobilier des
collèges ; - Définition des secteurs de recrutement des
collèges après avis du conseil départemental de
l'Éducation nationale ; - Responsabilité du recrutement
et de la gestion des personnels techniciens, ouvriers et de service (TOS) des
collèges ; - Élaboration d'un schéma
départemental de développement des enseignements artistiques dans
les domaines de la musique, de la danse et de l'art dramatique ; -
Gestion, à titre expérimental pour quatre ans , des
crédits d'entretien et de restauration du patrimoine classé ou
inscrit n'appartenant pas à l'État ou à ses
établissements publics ; - Peuvent devenir propriétaire
de monuments classés ou inscrits appartenant à l'État ou
au Centre des monuments nationaux.Action économique-Participation
possible au financement des aides directes aux entreprises dans le cadre d'une
convention avec la région ; -Attribution d'aides indirectes aux
entreprises.Possibilité de mettre en oeuvre leurs propres régimes
d'aides après l'accord de la
région.RégionDéveloppement
économique (domaine dans lequel la région joue un rôle
de coordination)- Détermine le régime des aides directes et les
attribue (primes régionales à l'emploi, à la
création d'entreprise et prêts et avances à taux
bonifiés) ; -Mise en oeuvre et attribution des aides indirectes
(garanties d'emprunt aux entreprises, exonération de la taxe
professionnelle).-Suppression de la distinction entre aides directes et
indirectes aux entreprises, remplacée par la distinction entre aides
économiques et aides à l'immobilier ; -Le conseil
régional définit le régime des aides économiques
aux entreprises et décide de leur octroi ; - Élaboration
d'un schéma régional de développement économique
à titre expérimental pour cinq ans. Aménagement du
territoire et planification- Participation à l'élaboration de la
politique nationale d'aménagement et de développement
durable ; - Élaboration d'un schéma régional
d'aménagement et de développement du territoire
(SRADT) ; - Signature de contrats de plan État-Région,
notamment pour la mise en oeuvre du SRADT ; - Élaboration d'un
schéma régional de transport ; - Organisation des
services de transport routier non urbain des personnes et des transports
ferroviaires de la région, sauf en Ile-de-France où le syndicat
des transports d'Ile-de-France (STIF) remplit ces fonctions.-
Élaboration d'un schéma régional des infrastructures et
des transports (anciennement schéma régional de
transport) ; -Peuvent se porter candidates jusqu'au 1er
juillet 2006 pour l'aménagement, l'entretien et la gestion
d'aérodromes civils ; -Si elles le demandent avant le
1er janvier 2006, propriété, aménagement et
gestion de tout port non autonome relevant de l'État situé sur
son territoire.Éducation, formation professionnelle- Construction,
entretien, équipement et financement des lycées,
établissements d'éducation spéciale et lycées
professionnels maritimes ; - Financement d'une part significative des
établissements universitaires ; -Élaboration du plan
régional de développement des formations
professionnelles ; - Adoption d'un programme d'apprentissage et de
formation professionnelle continue.- Propriété du patrimoine
immobilier des lycées, établissements d'éducation
spéciale et lycées professionnels maritimes ; -
Responsabilité du recrutement et de la gestion des personnels
techniciens, ouvriers et de service (TOS) des lycées ; -
Définition et mise en oeuvre de la politique régionale
d'apprentissage et de formation professionnelle des jeunes et des
adultes ; - Adoption d'un programme d'apprentissage et de formation
professionnelle continue désormais dans le cadre du plan régional
de développement des formations professionnelles.Culture-Organisation et
financement des musées régionaux ; -Conservation et mise
en valeur des archives régionales.-Responsabilité de l'inventaire
général du patrimoine culturel ; -Possibilité de
gérer, à titre expérimental pour quatre ans, les
crédits d'entretien et de restauration du patrimoine classé ou
inscrit n'appartenant pas à l'État ou à ses
établissements publics ; - Peuvent devenir propriétaire
de monuments classés ou inscrits appartenant à l'État ou
au Centre des monuments nationaux ; - Organisation et financement du
cycle d'enseignement artistique professionnel
initial.Santé -Possibilité d'exercer des activités en
matière de vaccination, de lutte contre la tuberculose, la lèpre,
le sida et les infections sexuellement transmissibles ; - Si elles en
font la demande, participation, à titre expérimental pour quatre
ans, au financement et à la réalisation d'équipements
sanitaires.
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Bien que la décentralisation ait confié un
grand nombre de missions aux collectivités territoriales
françaises, il semble qu'elle a surtout entraîné une forte
augmentation des dépenses sans pour autant renforcer le degré
d'autonomie locale. Or, les indicateurs quantitatifs de décentralisation
constitués notamment des montants de recettes et de dépenses
locales peuvent donner une idée erronée du degré de
responsabilité dont jouissent les collectivités territoriales. En
d'autres termes, la part des dépenses et des recettes n'est pas un bon
indicateur d'autonomie locale.
Si le renforcement des compétences locales constitue un
aspect de la nouvelle action publique locale, il faut dire que celles-ci
apportent plus de questionnements que de réponses. En France, les
débats actuels sur le deuxième acte de la décentralisation
portent quasi-exclusivement sur l'exercice des compétences par les
collectivités locales. Il s'agit toujours du même constat.
D'un côté, on observe que les
collectivités locales deviennent de plus en plus des acteurs majeurs de
la nouvelle action publique locale. Et de l'autre, on peut se rendre compte des
carences en matière de moyens financiers. Cependant, il nous semble que
la question financière ne se pose pas en termes de moyens mais
plutôt en termes d'adaptation des principes fiscaux et financiers
à la dépense publique. D'ailleurs, ce deuxième chapitre
est centré sur cette notion de dépense publique locale. Une
notion que l'on ne veut pas reconnaître explicitement et qui constitue
pourtant, un aspect essentiel de la réflexion sur l'avenir de la
décentralisation.
CHAPITRE 2. L'ACTION
PUBLIQUE LOCALE : DU CONCEPT A LA RÉALITÉ
Si la notion de dépense publique locale doit être
un aspect majeur de la réflexion sur l'avenir de la
décentralisation, c'est par ce que les politiques mises en oeuvre par
les collectivités territoriales occupent une place de plus en plus
importante dans les dispositifs de l'action publique. Au même titre que
l'Etat, parfois même plus que l'Etat lui-même, les
collectivités locales sont devenues, au regard de leurs diverses
interventions, des acteurs publics à part entière (Section
1). Aussi, les dispositifs de territorialisation ou de co-production de
l'action publique ont fait naître une notion qui devient progressivement
une réalité, c'est celle de services publics locaux.
Dans ce contexte d'affirmation des collectivités
locales comme des acteurs publics majeurs, on doit se poser la question du
rôle et de la place du budget local (Section 2). En effet, qu'il
s'agisse de la nécessaire mise en cohérence de la
fiscalité locale à la dépense publique locale ou de
l'inadaptation des principes budgétaires locaux au nouveau cadre de
l'action publique, de nombreuses questions restent sans réponse. Nous
tenterons ainsi de montrer que la voie de la spécialisation constitue
une réponse adaptée à ces questions.
Section 1. Les
collectivités locales : acteurs majeurs de la nouvelle action
publique
En quelques années, les collectivités
territoriales sont devenues les premiers investisseurs publics dépassant
même l'Etat. Il faut dire que les dispositifs de contractualisation de
l'action publique ont joué un rôle essentiel dans cette direction.
On parle dorénavant de territorialisation et de co-production de
l'action publique. Une des conséquences importantes de ce
phénomène, c'est l'affirmation des collectivités locales
comme des institutions « productrices » de services
publics. A travers cette section, notre objectif est de montrer que la
spécialisation des compétences locales à l'origine de
cette montée en puissance de l'action publique locale, doit être
accompagnée d'une spécialisation fiscale et financière.
§1. De la
territorialisation à la co-production de l'action publique : le rôle des collectivités
locales
Les collectivités locales jouent un rôle
très important en matière économique et notamment en
matière d'investissements publics. Elles occupent d'ailleurs avant
même l'Etat, la première place pour les investissements publics.
Si, prises individuellement, leurs actions ont un impact limité, on peut
dire que collectivement, leur poids économique et leur dynamisme sont
essentiels. Aussi, assiste-t-on à l'affirmation du concept de politique
publique locale.
Nous verrons par la suite que ces mutations dans les
modalités d'intervention des collectivités territoriales posent
de nombreuses questions quant à la pertinence des principes
budgétaires. La question sous-jacente ici, c'est la compatibilité
entre des principes budgétaires anciens et un environnement politique,
institutionnel et économique totalement bouleversé.
En clair, les collectivités territoriales sont devenues
de plus en plus en plus interventionnistes, et en même temps les
principes budgétaires locaux obéissent à des règles
rigides qui ne prennent pas en compte cet interventionnisme. Traditionnellement
réservées au domaine exclusif de l'Etat, certaines politiques
publiques sont progressivement mises en oeuvre par les collectivités
locales : politique économique, politique environnementale,
politique sociale... L'action publique locale ne se limite pas à la
simple gestion. Les collectivités locales assument de plus en plus un
rôle de conception, de proposition et d'impulsion. En d'autres termes, le
local n'est plus seulement un espace institutionnel mais devient de plus en
plus un lieu de projet.
Dans ce contexte, le processus de décentralisation a
engendré, en confiant aux collectivités territoriales de
nouvelles compétences, de nouveaux questionnements. L'émergence
du « local » replace la problématique du
développement territorial dans une nouvelle perspective. De nouveaux
enjeux et de nouveaux acteurs locaux s'affirment. Les projets locaux de
développement s'inscrivent non seulement dans un contexte de
« démembrement »des politiques nationales
d'aménagement du territoire, mais représentent également
une forme de réaction au phénomène de la
mondialisation.
Ainsi, le développement local prend toute sa
signification, c'est-à-dire qu'il trouve ses fondements dans le principe
de proximité. Pour certains, cette situation explique que tout projet
d'aménagement par le haut ne peut avoir de sens tant la globalisation de
l'économie implique des stratégies de spécialisation
territoriale. Ces stratégies sont rendues opérationnelles
grâce à la territorialisation des systèmes de production et
à une transformation des fonctions de l'espace. La combinaison de ces
deux phénomènes a abouti à faire de l'espace local un lieu
de projet.
Cette nouvelle situation n'est pas sans introduire de
nouvelles modalités et contraintes que ne connaissaient pas jusqu'ici
les collectivités locales : projet, partenariat, financement,
risque, performance... Ce sont toutes ces contraintes et modalités
nouvelles d'action qui accompagnent l'affirmation du concept de politique
locale mais également le renforcent. Compte tenu de ces contraintes, il
semble qu'il existe une opposition fondamentale entre « la
dynamique attachée aux concepts de politique et de projet et les
désormais trop statiques principes
budgétaires ».9(*)
Un phénomène nouveau a accompagné cette
affirmation des politiques publiques locales. Il s'agit du
« démembrement » de certaines politiques de l'Etat.
Et l'un des domaines les plus significatifs en la matière est
illustré par les politiques de développement local. Ces
politiques locales se sont renforcées en même temps que la notion
même de planification et d'aménagement territorial perdait de sa
substance.
§2.
L'émergence des services publics locaux
Les collectivités locales sont devenues, au même
titre que l'Etat, des « productrices » de services publics
locaux. De fait, on peut dire que l'on est passé d'une logique de
territorialisation à une logique de co-production de l'action publique.
Dans ce contexte, on peut observer l'émergence de véritables
services publics locaux que les processus de transferts de compétences
n'ont fait que conforter. Il n'agit pas d'un simple rôle de gestion de
compétences régaliennes. Les collectivités locales
détiennent, dans ce qu'on peut appeler l'offre de services publics
locaux, de véritables pouvoirs d'innovation et d'imagination.
La notion de service public a connu des évolutions
majeures et régulières à travers l'Histoire. Des
évolutions dues aux cadres juridiques de leur mise en oeuvre. Au XIXeme
siècle, l'industrialisation a influencé la définition
même du service public. Aujourd'hui, les deux vagues de
décentralisation et le processus d'intégration européen
continuent à avoir des impacts tout aussi importants.10(*) En ce qui concerne les
processus de décentralisation, il est particulièrement
intéressant d'observer que non seulement le cadre juridique de mise en
oeuvre des services publics s'est trouvé modifié mais
également, on assiste à l'émergence de nouvelles attentes
citoyennes.
C'est dans ce contexte que les services publics locaux
connaissent à la fois une nouvelle organisation et de nouvelles
modalités. Autrement dit, les collectivités locales sont devenues
les moteurs de la modernisation des services publics. La croissance des
compétences des collectivités territoriales a eu pour effet
d'introduire un nouveau cadre de réflexion autour de la
problématique de la modernisation des services publics pour faire face
aux nouvelles exigences de l'économie contemporaine.
Ce cadre rompt avec la logique nationale. Le cadre national
étatique devient un simple cadre de régulation. Les nouvelles
procédures de partenariat et de convention dans la mise en oeuvre des
services publics locaux constituent de nouveaux gages de modernisation et
d'efficacité. Mais le défi de l'égalité des
citoyens face aux services rendus par les différentes
collectivités locales reste à répondre.
L'émergence et la reconnaissance des services publics
locaux soulèvent quelques questions essentielles. Parmi ces questions,
il y a la tarification de ces nouveaux services publics locaux. En posant la
question sous forme de nouveaux services publics et non pas de transferts de
compétence, de tarification et non pas de compensation de charges, on
souhaite montrer qu'il s'agit d'une nouvelle situation qui ne se limite pas aux
seuls aspects financiers.
En fait, les modalités de tarification des services
publics locaux ont des répercussions directes sur le choix des
collectivités locales en matière de politique fiscale. En
d'autres termes, il s'agit de savoir s'il faut, pour la gestion de ces services
publics locaux, faire payer l'usager en lui appliquant un prix de
« marché » ou bien agir sur le niveau des
impôts locaux. Par ailleurs, la problématique de la gestion et
notamment de la possibilité d'établir un partenariat public-
privé influence directement les choix budgétaires et fiscaux des
collectivités locales.
Qu'elle que soit la réponse que l'on peut apporter
à ces questions, on se rend bien compte que la problématique de
l'autonomie financière et fiscale des collectivités locales se
pose par ce que celles-ci doivent faire face à un environnement
économique modernisé et que, de ce fait, on ne peut faire
l'économie d'un débat de fond sur l'inadaptation de
l'architecture financière et fiscale locale à ce nouvel
environnement.
Ce débat est d'autant plus crucial que les
collectivités locales se sont engagées dans une forme de
concurrence qui touche aussi le prix et la qualité des services publics
locaux. Compte tenu de cette nouvelle compétition économique
entre collectivités locales, on est en mesure de se demander si le
système fiscal local actuel n'est pas source d'injustice et
d'inégalité. Nous reviendrons sur cette question de
l'égalité entre collectivités locales et entre citoyens,
mais on peut dire dores et déjà que le système fiscal
actuel est susceptible de constituer une source de traitement inégal des
citoyens face à l'offre de services publics.
Section 2. Le rôle du
budget local
Lorsqu'on parle de budget local, on a souvent l'impression
qu'il s'agit seulement d'une procédure formelle sans incidence sur la
vie des citoyens. Cet état de fait illustre bien le paradoxe dans lequel
opère la réflexion sur la nécessité de
réformer les finances locales. Alors même que l'on veut bien
reconnaître l'importance du budget en termes de renforcement de la
démocratie et de la gouvernance mais aussi de l'efficacité des
politiques économiques locales, on ne pose pas suffisamment la question
du rôle du budget local. Mais peut-être, une des raisons de ce
paradoxe tient de l'impossibilité de reconnaître certaines
réalités pourtant tangibles.
Ainsi, bien que l'interventionnisme économique des
collectivités locales se soit développé ces
dernières années, on continue à vouloir ignorer la
réalité même de la notion de politiques économiques
locales. C'est cette non reconnaissance de la réalité actuelle
des collectivités locales qui semble être à l'origine de la
difficulté à apporter les réponses adaptées
à la nouvelle action publique locale.
§1. Finances locales
et dépenses publiques locales : quelle
cohérence ?
En vingt années de processus de
décentralisation et de transferts de compétences, le poids
financier des collectivités locales s'est considérablement
renforcé. Paradoxalement, au même moment, s'est posée la
question du financement des nouvelles missions dévolues aux
collectivités locales. Il nous semble que le véritable
débat n'est pas tant le financement que le sens que l'on veut donner
à la dépense publique locale. En d'autres termes, il faut rompre
avec cette logique qui place les collectivités locales dans une position
de simples financeurs de compétences. Il faut donner un sens au budget
local au regard de la nouvelle configuration de l'action publique locale.
Dans un contexte de fortes contraintes extérieures, les
collectivités locales se doivent de coordonner leurs politiques
financières, c'est-à-dire, les choix en matière de
dépenses, et leurs prérogatives fiscales. En d'autres termes, il
s'agit de définir des règles de bonne conduite pour que le
financement des compétences et des missions locales obéisse
à une certaine rationalité. D'ailleurs, on constate souvent que
pour une plus grande efficacité de ces règles, les
collectivités locales s'engagent dans une sorte de pacte financier qui
définit les grandes lignes de conduite à observer
mutuellement.
Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si ce genre de pacte
s'observe le plus souvent entre les communes d'un même groupement
partageant la même taxe professionnelle. On peut ainsi y voir la
confirmation que la spécialisation fiscale, c'est-à-dire, le fait
de lier un impôt précis à un niveau de collectivité
donnée renforce non seulement la responsabilisation des institutions
locales mais encourage la collaboration et la coordination des choix
politiques. Ce qui est loin de l'idée d'une exacerbation de la
concurrence.
En fait, les chiffres parlent d'elles-mêmes. En trente
ans, les dépenses des collectivités locales ont augmenté
très fortement en passant de 5 à 10% du PIB avec une progression
annuelle moyenne de 5%. En 1996, la part des budgets locaux dans le total des
investissements publics représentait près de 70%. Par ailleurs,
on constate que depuis le début de la décentralisation, la
croissance en volume des dépenses de l'Etat ne cesse de diminuer par
rapport à celle des dépenses des collectivités locales.
Tenter de lier une réflexion sur l'autonomie fiscale
locale à une autre réflexion sur le rôle des
dépenses locales est presque impossible. Car, le plus souvent on observe
une certaine répartition des dépenses locales qui ne tiennent pas
compte des modalités de leur financement. Par conséquent, les
dépenses locales ne reflètent pas suffisamment les
problématiques de compétences fiscales locales.
En effet, la décentralisation des sources de recettes
se trouve généralement limitée du fait de la rareté
des bases d'imposition et du fait que leur produit permet rarement de financer
l'ensemble des dépenses locales. Ainsi, les impôts sur la
propriété, sources de recettes particulièrement
intéressante pour les collectivités territoriales,
présentent des inconvénients majeurs (par exemple, la
difficulté de tenir à jour l'évaluation des biens) qui
contribuent à limiter leur place dans la fiscalité locale.
§2. L'inadaptation
des principes budgétaires locaux au nouveau cadre de l'action publique
locale
On assiste, avec l'émergence et le renforcement des
politiques publiques locales, à « une crise des principes
budgétaires locaux ».11(*) Comme nous l'avons déjà souligné
ci haut, ces principes s'accommodent difficilement aux contraintes nouvelles de
l'action publique locale. Il faut noter qu'au regard des principes du budget
national, les principes budgétaires locaux revêtent un certain
nombre de spécificités qui sont autant de justifications pour
remettre en cause ces principes.
Pendant longtemps, on a voulu considérer ces principes
budgétaires locaux en dehors de la réflexion institutionnelle
relative aux collectivités locales. Cela explique en partie que le
processus de décentralisation et de transfert de compétence ne
s'est pas accompagné d'un vrai débat sur la nature et le
rôle des finances locales.
Un véritable débat portant sur le nouveau
rôle des finances locales dans le contexte nouveau de l'action publique
locale ne peut faire l'économie d'une réflexion sur
l'efficacité de la dépense publique locale. Au regard de cet
objectif, la question de la reforme des finances locales est soumise à
deux critères d'analyse. Le premier de ces critères est
constitué par la prise en compte de l'interventionnisme des
collectivités locales. Le deuxième critère, c'est
l'impératif nouveau en matière d'évaluation et de
contrôle de l'action publique. Ce dernier entre clairement dans
l'objectif d'efficacité de l'action publique.
La question que l'on pose souvent lorsqu'il s'agit de lier
réforme du droit fiscal et financier local et refondation de l'action
publique des collectivités territoriales concerne les grands principes
issus de la période révolutionnaire et qui continuent à
commander le cadre d'exercice des finances locales. Au nombre de ces principes,
on peut ainsi citer l'équilibre, l'annualité, la
spécialité et l'unité - universalité.
Calqués sur le droit budgétaire et fiscal de l'Etat, ces
principes connaissent une plus grande rigidité d'application lorsqu'ils
concernent les collectivités territoriales.
L'équilibre du budget local est un équilibre
réel. Cela signifie que le déficit est interdit aussi bien dans
le vote que dans l'exécution du budget. Quant à
l'annualité, il s'agit d'un principe « pivot »
autour duquel s'articule les autres principes budgétaires locaux. En
effet, pour que ces principes soient opérationnels mais aussi pour que
le contrôle de leur mise en oeuvre soit effective et efficace, le budget
doit être doté d'un cadre temporel limité. A ce titre,
l'année constitue une bonne référence.
La spécialisation signifie que les dépenses
seront classifiées selon des catégories spécifiques qui
doivent, en principe, permettre une meilleure lisibilité de
l'autorisation budgétaire. Et enfin, le principe de l'unité-
universalité est le plus complexe par ce qu'il est lui-même soumis
à d'autres sous- principes que sont la non- compensation et la non-
affectation des dépenses. Le principe de l'université-
unité veut que le budget soit présenté sur un seul
document reprenant les dépenses et les recettes.
Bien que ces principes budgétaires aient connu une
certaine évolution dans le temps, ils semblent de plus en plus
inadaptés au nouveau cadre de compétences des
collectivités territoriales. Il en est ainsi de l'application
stricto sensu du principe de l'équilibre. Pour certains
observateurs, ce n'est pas le principe qui pose un problème mais les
supports techniques qui le justifient et à travers lesquels il
s'applique.
Tout d'abords, on ne trouve aucune justification
économique à la règle de l'équilibre réel.
Certains y voient même une conception trop archaïque des finances
publiques. Il s'agit plus d'un principe juridique et philosophique fort que
d'un principe économique et opérationnel. D'ailleurs, c'est toute
la problématique de notre travail que de tenter de répondre
à cette question des principes juridiques rigides dans un environnement
fortement influencés par de nouvelles règles plus
économiques. De fait, le principe de l'équilibre
budgétaire aboutit à une conception statique de la gestion des
finances publiques locales.
Quant au principe de l'annualité budgétaire,
s'il pose, lui aussi, un certain nombre de problèmes à
l'efficacité des politiques publiques locales, on peut reconnaître
qu'il a connu des évolutions plus significatives que le principe de
l'équilibre. Peut-être que les diverses contraintes issues de
l'environnement institutionnel, économique et financier ont
été tellement lourdes qu'il était inévitable
d'amender quelque peu le principe de l'annualité.
En effet, qu'il s'agisse des sources directes de financement
des collectivités locales ou de l'environnement partenarial de mise en
oeuvre et de conduite des projets locaux, de règles nouvelles ont
apparu. Le plus souvent, ces règles entraient en conflit avec les
principes budgétaires locaux et notamment avec le principe de
l'annualité. Il en est ainsi de la contractualisation ou des nouveaux
partenariats public- privé qui font des collectivités locales des
acteurs au même titre que d'autres d'un jeu dont les règles
présentent un caractère hybride, c'est-à-dire, soumises
à des impératifs publics et privés.
Dans ce contexte, on peut se demander si la refondation de
l'action des collectivités territoriales ne doit pas passer, au
préalable, par cette reconnaissance que le nouvel environnement local et
mondial limite les institutions locales à un simple rôle d'acteur
parmi d'autres, incapables d'influencer, par leurs propres règles, le
jeu global.
La présentation des problématiques actuelles de
la fiscalité locale nous a permis de considérer la question de la
réforme non pas comme un aspect isolé des autres
problématiques de l'action publique locale mais comme le pendant de ces
problématiques. Dans notre seconde partie, nous nous concentrerons plus
sur la problématique de la spécialisation fiscale. En effet,
celle-ci semble revêtir un double aspect : un aspect
économique lié à l'efficacité de l'action publique
et un aspect politique propre aux questionnements sur la gouvernance locale.
DEUXIÈME
PARTIE : LE DOUBLE OBJECTIF DE LA SPÉCIALISATION DES IMPÔTS
LOCAUX : REFORMER LA FISCALITÉ LOCALE ET REFONDER L'ACTION PUBLIQUE
LOCALE
Les partisans de la solution de la spécialisation comme
voie de réforme de la fiscalité locale y voient un moyen de
refonder l'action publique locale autour des impératifs nouveaux
représentés par le besoin d'efficacité des politiques
proposées par les collectivités territoriales et la
nécessité de gouvernance dans les procédures de mise en
oeuvre de celles-ci. En effet, la notion de spécialisation des
impôts locaux introduit d'autres notions en prise directe avec les moyens
et les finalités des politiques locales.
Aussi, en matière économique (Chapitre
1), la spécialisation fiscale territoriale nous interpelle sur la
question du lien à trouver entre les impôts locaux et les
politiques de développement local. Il s'agit ainsi de
réfléchir sur la problématique du financement des
politiques publiques locales en général. Le point principal de
cette réflexion se situe dans le constat de l'émergence de
véritables stratégies de concurrence territoriale qui pose alors
une autre question, celle de l'efficacité de l'impôt local et de
la pertinence de la superposition de différents niveaux d'imposition.
Cependant, l'essence même de la refondation de l'action
publique locale se situe ailleurs. Autrement dit, l'objectif principal de la
spécialisation des impôts locaux, c'est bien de constituer une
réponse politique (au sens large du terme) à l'émergence
de la démocratie et de la citoyenneté locales(Chapitre
2).En réalité, le concept d'efficacité de
l'action publique va de pair avec celle de gouvernance publique. Il s'agit de
trouver un lien fort entre les impératifs économiques et les
exigences politiques.
CHAPITRE 1. LES ASPECTS
ECONOMIQUES DE LA SPÉCIALISATION FISCALE : LA QUESTION DE
L'EFFICACITÉ DES POLITIQUES PUBLIQUES LOCALES .
L'environnement économique et financier des
collectivités territoriales a considérablement changé ces
dernières années. Toutes les mutations ont eu un double effet.
D'une part, elles ont facilité l'accès aux sources de
financements et d'autre part, elles ont placé les collectivités
territoriales sous de nouvelles contraintes exogènes. Par
conséquent, la question du financement des politiques publiques locales
est devenue cruciale. Cette situation se comprend parfaitement dans la mesure
où plus extensible que la notion de compétences
institutionnelles, le concept de politique publique locale embrasse divers
domaines qui nécessitent à la fois des montants et des
modalités de financement qui échappent au cadre strict et stable
du droit et de l'économie publics (Section 1).Compte tenu de ce
nouveau contexte, il est tout à fait justifié de poser la
question de l'efficacité de l'impôt local (Section 2).
Section 1. Impôts locaux
et développement local
Les politiques de développement local prennent une
place de plus en plus importante au sein des collectivités
territoriales. Mais en même temps que se développent ces
politiques, on assiste à l'émergence de la notion de concurrence
territoriale qui place les collectivités territoriales non pas dans leur
position d'institution publique mais dans celle d'opérateurs
économiques. Dans ce contexte, l'imbrication et la superposition de la
fiscalité locale apparaissent comme en contradiction avec les
stratégies de spécialisation territoriale, conséquence
directe de la concurrence des collectivités locales.
§1. La
problématique du financement des politiques publiques
locales
Le développement des territoires de projet pose
nécessairement la question du financement des politiques publiques
locales. Comme le font remarquer Guy Gilbert, Alain Guengant et
Véronique Hespel, « le cadre institutionnel
français de gestion des territoires, très centralisé, n'a
cependant pas évolué au même rythme que les forces à
l'oeuvre au cours des vingt dernières années. Cette
inadéquation de l'expression institutionnelle par rapport aux besoins et
aux attentes des acteurs, aujourd'hui plus diversifiés, peut
créer des tensions et des concurrences coûteuses, obérer le
développement économique, être plus ou moins supportable
socialement. Les structures territoriales et le système de financement
des politiques conduites par les collectivités territoriales ne se sont
pas adaptés aussi vite aux évolutions économiques et
sociales que cela peut paraître souhaitable ».12(*)
Le paradoxe de la décentralisation réside dans
cette question lancinante du financement des nouvelles compétences. Une
question tellement cruciale que l'on arrive par moments à se demander ce
que vaut l'autonomie financière sans moyens financiers. En ce sens, on
peut dire que si les deux vagues de décentralisation avaient pour
objectif de fournir aux collectivités locales une plus grande autonomie
d'action, elles ont abouti, du fait même de la problématique du
financement, à l'effet complètement inverse. C'est ce que
certains observateurs appellent « l'effet de ciseaux »,
c'est-à-dire, cette situation due au fait qu'avec les transferts de
compétences, les collectivités territoriales voient la proportion
de leurs dépenses incompressibles augmenter fortement, tandis que le
niveau des ressources propres qui leur est garanti reste bas.
Il en est ainsi des principaux transferts de
compétences vers les régions (TOS...) et les départements
(RMI, RMA, TOS, routes nationales...) qui représentent une augmentation
sensible des dépenses de fonctionnement. Ce qui entraîne une
dégradation du rapport entre l'investissement et le fonctionnement des
dépenses.
Le problème essentiel que pose cette question du
financement des politiques publiques locales, c'est celui du rôle et de
la nature que l'on veut donner aux administrations locales à travers ces
mouvements de transferts de compétences. Car, tant que cette question ne
sera pas résolue, l'exercice des compétences locales se limitera
à une administration de gestion au lieu de se muer en une
véritable administration de gestion capable d'affronter les contraintes
nouvelles de l'action publique.
C'est donc un paradoxe préjudiciable pour les
collectivités territoriales françaises qui se caractérise
par cette situation qui veut que la décentralisation et les transferts
de compétences ne réussissent pas à associer poids
économique du territoire et autonomie financière locale. Comment
donc comprendre, par exemple, que la région Ile-de-France,
première région économique d'Europe, représentant
plus de 4.5% du PIB européen, dispose d'une autonomie politique et
financière pour agir sur son territoire moins importante que certains
lands allemands ou certaines régions espagnoles et italiennes ?
La question des financements des politiques publiques locales
ne se limite donc pas aux aspects quantitatifs. Autrement dit, il ne s'agit pas
seulement du débat portant sur les montants nécessaires à
l'exercice des compétences nouvelles mais de la problématique des
sources de financement. Cette problématique est au coeur de la question
du « financement autonomique ». En effet, selon que ces
financements soient assurés par l'impôt ou par des concours de
l'Etat, le visage de la décentralisation ne sera pas le même.
§2. De la
concurrence territoriale à la concurrence fiscale : la
fiscalité au service des « territoires de
projets »
Face à la nouvelle donne constituée par la place
de plus en plus importante qu'occupent les politiques de développement
local, on doit se demander quel rôle peuvent jouer les finances locales
en général et la fiscalité locale en particulier. A
travers cette question, on pose la problématique de la dépense
publique locale. On sait que l'Etat détient le monopole du
déficit public mais n'est -il envisageable que, dans une certaine
mesure, les collectivités locales puissent se servir d'un pouvoir fiscal
renforcé pour appuyer leurs politiques de développement local.
Cette question est d'autant plus légitime qu'on assiste à la fois
au renforcement de ces politiques de développement local au
détriment de la grande politique nationale d'aménagement du
territoire et à une accentuation de la concurrence et du marketing
territoriaux.
En effet, depuis une vingtaine d'années,
favorisés par le processus de transferts de compétences issu de
la décentralisation, les tissus économiques de production se sont
fortement territorialisés. Les systèmes de production locaux se
sont renforcés favorisant ainsi la mise en oeuvre de véritables
politiques économiques locales. Les conséquences de ce
phénomène sont la naissance d'une dynamique productive
territoriale et l'émergence de stratégies concurrentielles des
territoires.
C'est dans ce contexte que sont apparus les milieux novateurs
et s'est renforcée la spécialisation des systèmes de
production locaux. Ce phénomène, étudié depuis de
nombreuses années, et que les collectivités territoriales
commencent à appréhender et à maîtriser fait partie
des paramètres essentielles qui influencent les nouvelles politiques
publiques locales. L'un des aspects majeurs de cette nouvelle situation, c'est
qu'elle a introduit de nouvelles modalités et de nouvelles
procédures d'exercice des missions publiques locales. C'est ainsi que le
partenariat avec le secteur privé marchand a fortement influencé
la nouvelle action publique locale.
On peut ainsi affirmer que la nouvelle approche du
développement local est centrée autour de ce qu'on peut appeler
un dialogue entre les institutions publiques territoriales et les entreprises.
On ne peut, à l'heure actuelle, appréhender les questions de
développement territorial sans prendre toute la mesure des partenariats
public-privé. Par conséquent, l'attractivité du territoire
est un élément majeur de la démarche projet.En parlant
d'attractivité, on vient à considérer la question du
marketing territoire comme élément structurant l'espace en
territoire de projet.
Les théories spatiales de l'entreprise nous aident
à comprendre les critères de localisation de l'entreprise.
L'intérêt d'un tel éclairage par les fondements
théoriques de la localisation territoriale des activités est
d'arriver in fine à une sorte de comparaison entre la
pertinence d'un territoire vue à partir de l'angle économique et
la pertinence prise sous l'aspect institutionnel.
Dès les années 1970, le concept de district
industriel est venu apporter un élément de compréhension
de la localisation spatiale des entreprises. Par ailleurs, le modèle des
systèmes productifs localisés, la théorie des milieux
innovateurs ou l'approche en termes de réseaux sont autant de bases de
réflexion sur les déterminants du développement local. En
effet, l'approche de l'économie spatiale est intéressante en ce
sens qu'elle considère le développement local comme un processus
dynamique fait à la fois de concurrence et de coopération. Dans
une telle approche, le territoire n'est plus un support du développement
mais devient un agent économique à part entière.
Dans ce contexte, l'enjeu principal n'est pas du tout
d'introduire une spécialisation fiscale qui renforcerait les effets
pervers de cette concurrence territoriale mais au contraire, de prendre acte de
cette nouvelle donne et introduire une nouvelle architecture fiscale qui non
seulement stimulerait les initiatives de développement local et
d'attraction de territoires mais serait également en mesure de
préserver l'égalité et la cohérence
territoriales.
L'analyse économique montre que la superposition
fiscale peut engendrer une concurrence fiscale dite verticale entre les
collectivités territoriales qui tend à pousser les taux
d'imposition vers le haut. L'adoption de la spécialisation fiscale aura
comme avantage principal d'atténuer les effets négatifs de la
concurrence fiscale verticale et de renforcer les effets positifs d'une
concurrence fiscale entre collectivités de niveaux identiques, c'est la
concurrence fiscale horizontale.
Une parfaite illustration du lien qui devrait exister entre
fiscalité et territoire dans une logique à la fois de projet et
de spécialisation est donnée par la Taxe Professionnelle Unique
(TPU). L'état actuel de l'Intercommunalité à
fiscalité propre nous donne un certain nombre d'enseignements quant au
nouveau rôle de la fiscalité locale dans le contexte de
reconfiguration de l'action publique locale.
Si on peut s'accorder pour dire que l'avenir institutionnel de
la décentralisation passe nécessairement par
l'Intercommunalité, on peut également envisager que la logique et
l'esprit inhérent à la taxe professionnelle unique constitue une
bonne référence pour la réforme de la fiscalité
locale autour de la refondation de l'action publique locale. En fait, la taxe
professionnelle unique semble répondre aux exigences d'efficacité
et d'équité tout en respectant les nouveaux impératifs de
l'action publique locale, c'est-à-dire, le projet, le partenariat et le
financement.
Depuis la Loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et
à la simplification de la coopération intercommunale, le
processus de décentralisation est entrée dans une nouvelle phase.
Une phase institutionnelle mais aussi une phase opérationnelle.
L'Intercommunalité renforce les projets de territoires et peut donc, de
ce fait, être considérée comme un aspect majeur de la
refondation de l'action publique locale. A la fin de l'année 2000, on
pouvait déjà observer deux milles groupements à
fiscalité propre, ce qui représentait un volume budgétaire
de près de 70 milliards de francs, soit le sixième des
dépenses totales des communes. Par ailleurs, les efforts
d'investissement de ces groupements représentaient près de 15
milliards de francs.
En même temps que nous observons la fulgurante
montée en puissance de l'Intercommunalité, nous nous trouvons
interpellés sur une question essentielle : dans quelle mesure la
fiscalité locale peut être à deux vitesses ? En effet,
face à la taxe professionnelle unique représentant le dynamisme
et l'efficacité, on se demande si la persistance d'une fiscalité
communale, départementale et régionale à la fois complexe,
obsolète et inefficace ne représente pas un frein majeur à
l'action des collectivités territoriales.
Pour tenter de répondre à cette question, on
peut se baser sur une analyse systémique et considérer que la
fiscalité ne peut rester longtemps indépendante aux structures et
aux organisations. En d'autres termes, ce n'est pas le système fiscal
qui détermine le type d'organisation mais l'inverse. Si le
système fiscal local a réussi se maintenir « à
coups » de micro -réformes face aux changements qui ont
affecté les modalités d'intervention des collectivités
locales, il apparaît de plus en plus difficile d'ignorer les
bouleversements institutionnels introduits par la montée en puissance
des EPCI. Car, dans ce nouveau contexte, le paysage local et le
découpage institutionnel ne suffiront pas à appréhender
toute la complexité de l'action publique locale. Bien qu'entrant dans un
cadre institutionnel bien précis, il semble que celle-ci sera de plus en
plus guidée par le concept de territoire au sens large et notamment par
le concept de territoire pertinent. Ce dernier étant lié avec la
logique de mise en oeuvre des projets locaux.
Le concept de territoire
pertinent est essentiel pour comprendre la conduite d'une démarche
projet dans l'espace. Car, l'espace est à la fois lieu
géographique, institutionnel et socio-économique. Par
définition, le territoire est un lien de nombreux enjeux plus ou moins
contradictoires qu'il faut intégrer dans la démarche projet. La
loi d'orientation du 4 février 1995 a introduit une nouvelle
organisation des territoires autours de nouvelles notions telles que les
bassins de vie et d'emplois qui sont eux-mêmes organisés en pays
et les réseaux de villes. Ce qui donne de nouvelles
fonctionnalités aux territoires.
Depuis cette loi, la vision générale qui a
guidé l'aménagement du territoire a consisté à
rejeter l'homogénéité. En effet, le risque est grand de
vouloir imposer, au nom du principe de l'égalité
républicaine, un modèle unique de développement local sur
la base d'un découpage rigide et arithmétique des territoires.
Car, l'intérêt de la rupture avec la politique
d'aménagement par le haut, c'est justement la prise en compte des
spécificités territoires dans la déclinaison des projets
de développement.
D'ailleurs, ce débat sur le territoire pertinent n'est
pas complètement isolé du fait de savoir si les différents
projets de développement locaux doivent servir un projet global
d'aménagement national ou bien faut-il considérer que les projets
locaux sont à la fois autonomes et isolés. Pour les tenants de la
première vision, il faut définir un niveau territorial unique qui
servirait de cadre pour des projets locaux de développement et
d'aménagement qui seraient eux-mêmes le fondement d'une vision
globale et nationale de l'aménagement. Au contraire, certains pensent
qu'à partit du moment où les projets de développement
locaux sont isolés, la notion de territoire pertinent devient plus
souple à appréhender.
Aussi, peut-on considérer, si l'on se fonde sur la
vision rigide du concept de territoire pertinent qu'au vu de
l'émiettement municipal, le territoire communal ne peut servir de cadre
à un projet de territoire. De la même manière,
l'Intercommunalité, sauf si elle se dote d'une fiscalité propre,
ne peut constituer un cadre adéquat. Cependant, on peut penser que la
volonté affichée par le législateur de donner aux projets
intercommunaux un caractère obligatoirement continu et cohérent
constitue une manière de mettre en avant la démarche de projet de
territoire.
Au regard des différentes imbrications
territoriales, le concept de territoire pertinent ne revêt plus de sens.
Dans la mesure les territoires se sont engagés dans une
compétition qui les pousse à structurer leurs systèmes
productifs locaux par rapport à des niches bien
déterminées, on peut affirmer que tous les niveaux territoriaux
présentent toutes les caractéristiques des territoires de
projets.
En d'autres termes, la pertinence d'un territoire
donnée par rapport à un projet donnée se définit en
termes d'attractivité et donc d'offre. Le développement local se
détermine ainsi par une offre territoriale et une demande de
localisation émanant des firmes. Le territoire s'appréhende donc
comme un réseau de production de biens et services. Compte tenu de cette
situation, les territoires intercommunaux doivent se structurer pour offrir les
meilleurs services aux firmes qui cherchent à se localiser dans
l'espace.
Dans cette phase de questionnement sur l'avenir de la
fiscalité locale face aux changements actuels et à venir, il
apparaît de plus en plus clair que la spécialisation fiscale
introduite par la loi Chevènement de 1999 a eu comme objectif de
répondre aux nouveaux défis de l'action publique locale. En
effet, en rendant obligatoire le régime de la TPU pour les
Communautés d'agglomérations, et en incitant très
fortement les Communautés de communes à l'adopter, la loi a
introduit un certain nombre d'effets qui se sont révélés
positifs pour les collectivités locales : outil de cohérence
territoriale et de développement économique, mécanisme de
solidarité entre les communes, clarification des responsabilités
fiscales locales...
La France observe, depuis quelques années, une
révolution tranquille en matière d'aménagement et
d'ajustement du territoire. A l'origine impulsé par l'Etat central,
l'aménagement du territoire se fait par le biais des politiques de
développement local menées par les collectivités locales.
En fait, pour mieux comprendre cette situation, on ne doit pas se limiter aux
seuls acteurs politico-institutionnels que sont les collectivités
territoriales mais envisager les politiques de développement local comme
la mise en synergie d'un certain nombre d'acteurs et d'opérateurs
locaux.
L'activité économique se trouve ainsi soumise
à des facteurs spatialisés qui influencent la nature même
des politiques mises en oeuvre. On assiste alors à une concurrence
territoriale qui engendre des phénomènes de polarisation des
activités économiques dans les territoires capables d'offrir les
ressources adéquates. Certes, ce contexte est susceptible de
créer des inégalités territoriales mais il peut constituer
également une source de stimulation des initiatives et des
compétences locales.
Dans ce contexte d'affirmation des territoires locaux, on ne
peut envisager une politique locale sans prendre en compte les aspects fiscaux
de correction ou d'atténuation des handicaps . Souvent, ces aspects
fiscaux prennent la forme d'aides ou d'exonérations qui constituent
ainsi un fort levier de développement local. Qu'il s'agisse des Zones
Franches Urbaines ( Z F U ), des Zones Urbaines Sensibles ( Z U S ), des Zones
de Revitalisation Rurale ( Z R R ), des Zone de pêche ou des Zones de
montagne, l'objectif de cette discrimination territoriale positive ( ou zonage
fiscal) est de reconnaître à ces territoires une
spécificité soit géographique ou identitaire. En d'autres
termes, même si la décentralisation institutionnel et juridique ne
reconnaît pas expressément ces spécificités, une
politique d'aménagement territorial efficace doit non seulement se baser
sur cette forme de spécialisation des territoires mais elle doit
également adapter la fiscalité selon cette spécialisation.
Face à la production soumise aux impératifs de
la mondialisation, les réponses ne peuvent qu'être locales. C'est
le fameux « Penser global, Agir local ! ». A
la spécialisation de la production, il est logique d'apporter la
réponse de la spécialisation fiscale comme moyen de rendre
l'impôt local plus efficace. En réalité, la
spécialisation fiscale est la réponse la mieux adaptée et
la plus facile à mettre en oeuvre au regard de la complexité du
dispositif institutionnel français qui ne facilite pas
l'émergence des initiatives et des compétences locales soit par
ce que les appartenances locales sont multiples soit par ce que le
système actuel de répartition des ressources fiscales et
financières ne permet pas de stimuler la recherche de
l'efficacité de l'impôt local.
Pour Guy Gilbert, Alain Guengant et Véronique Hespel,
« la complexité des procédures et des financements
ne contribue ni à clarifier les responsabilités ni à
faciliter la mise au point rapide des projets, ni à alléger les
démarches des usagers des services publics. La concurrence des services
de l'Etat et des services territoriaux dans la fourniture d'aides diverses
aboutit trop souvent à une mauvaise utilisation des deniers publics. Il
y a besoin d'une simplification ».13(*)
La montée en puissance de l'Intercommunalité
n'est pas sans avoir des conséquences en matière
financière et fiscale. Ainsi, assiste-t-on à un fort
développement très fort de la TPU. En 2003, on a pu remarquer que
56% des bases de taxe professionnelle étaient soumises au régime
de la taxe professionnelle unique.14(*) Cet essor a engendré une certaine modification
de la répartition des recettes fiscales entre collectivités
locales.
Section 2. La question de
l'efficacité de l'impôt local
L'une des mérites que peut constituer la
spécialisation des impôts locaux concerne la question de
l'efficacité du budget local. Actuellement, compte tenu de l'utilisation
d'une même assiette fiscale par plusieurs collectivités
territoriales, il apparaît que l'impôt n'est pas du tout
opérationnel. Le budget reste une procédure. Avec
l'éclaircissement des niveaux et des compétences fiscales, il est
certain que le budget local deviendrait pleinement un instrument de
prévision et de gestion financière.
§1. De la gestion
budgétaire à la gestion financière : la
spécialisation comme instrument de gestion et de
prévision
L'une des critiques que l'on peut adresser aux principes
budgétaires locaux tels qu'ils sont exprimés actuellement, c'est
qu'ils ne permettent pas aux budgets locaux de jouer pleinement l'un des
rôles d'un budget, c'est-à-dire, la planification. C'est
d'ailleurs en ce sens que le principe même de l'annualité pose un
certain nombre de problématiques relatives à l'efficacité
et à la pérennité des actions publiques locales. Dans un
tel contexte, il est très difficile pour les collectivités
locales de passer d'une approche en termes de gestion à une approche en
termes de prévision.
On ne peut entamer une réflexion sur la
spécialisation fiscale comme moyen de rendre plus efficace la gestion
budgétaire et financière des collectivités territoriales
sans s'arrêter un instant sur les particularités de cette gestion.
Si l'on se fonde sur la définition scientifique de la gestion,
c'est-à-dire la mise en oeuvre des ressources d'une organisation
quelconque en vue d'atteindre des objectifs précis, on ne peut
réellement parler d'une gestion financière des
collectivités locales tant celle-ci ne paraît être
orientée vers la meilleure allocation des ressources compte tenu
d'objectifs bien déterminés.
Bien évidemment, le fait que l'on se situe ici dans la
sphère publique contribue à cette difficulté à
parler d'une gestion financière et budgétaire locale. Cependant,
on observe, depuis quelques années, un mouvement qui se manifeste par la
volonté, de la part des collectivités locales, de rationaliser
l'utilisation des ressources financières. Ce mouvement s'est
accentué avec la libéralisation du
« marché » de financement des collectivités
locales. En effet, celles-ci ont vu leurs sources de financement se
développer notamment avec la possibilité de procéder
à des financements bancaires ou obligataires.
Ce lent passage d'une « culture administrative
à une culture de marché »15(*) n'est pas sans poser un
certain nombre d'enjeux et de défis majeurs auxquels doivent
répondre les collectivités territoriales. La
caractéristique première de ces défis est la
multiplication des techniques et des modes de gestion mais également la
diversification des sources de financement. Une diversification qui
représente certes un atout pour les gestionnaires locaux mais qui
implique une gestion rationalisée et efficace des comptes publics
locaux.
Certains observateurs voient dans cette mutation des modes de
gestion l'essence même du mouvement de décentralisation. En effet,
plus que la reconnaissance et la consécration du pouvoir institutionnel
des collectivités territoriales ou l'utilisation de pratiques nouvelles,
la décentralisation a introduit une nouvelle culture de gestion en
confrontation directe avec la culture juridique traditionnelle. Si ce mouvement
est vrai pour l'ensemble du secteur public, il se manifeste avec plus
d'acuité au sein des collectivités territoriales.
Si l'on doit caractériser les conséquences
directes de ces bouleversements sur les modes de gestion locales, le
développement de l'emprunt bancaire ces quinze dernières
années semble constituer une parfaite illustration. En effet, celui
confirme à la fois la diversification des sources de financement des
collectivités locales et la volonté de celles-ci de s'adapter une
culture de marché.
En outre, la liberté de choix que représente la
possibilité de recourir à l'emprunt bancaire voire même
à l'émission d'obligations constitue une source de renforcement
de l'autonomie financière locale bien qu'il faut savoir distinguer
autonomie financière et liberté financière.
Dans ce contexte, les techniques de gestion financière
sont devenues de véritables instruments d'appréciation des
politiques publiques locales. Aussi, avec notamment la notation
financière, on juge à la fois la santé financière
et la capacité d'investissement des administrations publiques locales.
Par ailleurs, on observe une réelle volonté de la part des
collectivités territoriales d'adopter une démarche de
rationalisation des techniques et des procédures.
Qu'il s'agisse de la mise en place d'un contrôle de
gestion, d'une planification stratégique, le mouvement enclenché
commence à s'imprégner en matière de culture de gestion.
C'est ainsi que la maîtrise de la trésorerie et la gestion active
de la dette locale occupent de plus en plus de place dans la fonction
financière des collectivités locales. Autres domaines dans
lesquels la nouvelle culture de gestion publique locale se manifeste, il s'agit
du contrôle de la satellisation et de la consolidation des comptes mais
également de l'adoption d'une démarche d'évaluation et de
contrôle de la gestion financière.
On voit bien que la sphère financière constitue
une source d'impulsion de nouvelles pratiques. En d'autres termes, la
refondation de l'action publique locale passe nécessairement par la
consolidation de l'autonomie financière locale. Cependant, cette
situation n'est d'ailleurs pas sans accentuer les disparités entre
collectivités locales dans la mesure où les collectivités
locales les mieux armées partent avec un atout instrumental dont ne
disposent pas les collectivités les moins riches.
En matière de techniques de gestion budgétaire
et financière, on ne peut donc pas dire que les volontés de
rationaliser les pratiques ont manqué. En fait, il semble de plus en
plus établi que le problème se situe dans la difficulté
d'imprégner une culture du résultat et de l'efficacité au
sein des administrations locales. On peut donc penser que la véritable
question est l'environnement institutionnel dans lequel les
collectivités locales évoluent. Prenons l'exemple de la fameuse
instruction budgétaire et comptable M 14.
Inspirée de la comptabilité privée et du
plan comptable général, l'instruction M 14 devait constituer un
outil novateur et dynamique de gestion patrimoniale pour les communes et les
EPCI. Il semble aujourd'hui que cet outil, lancé au début des
années 90 et généralisé à l'ensemble des
communes et des EPCI, n'ait pas atteint ses objectifs initiaux. En fait, ce
n'est pas l'outil qui pose un problème mais son application. Autrement
dit, la M 14 impose un trop grand nombre d'écritures et de
procédures aux collectivités locales.
Par ailleurs, selon les professionnels financiers des
collectivités territoriales, le principal intérêt de la M
14, c'est-à-dire, la possibilité de mener un travail d'analyse
financière locale sur la base de ratios pertinents se trouve
limitée. Au regard de ces éléments, on peut dire
qu'au-delà des pratiques et des procédures, la gestion
financière locale a besoin de s'imprégner de la nouvelle culture
de l'action publique locale.
Il semble que l'on n'a pas pris toute la mesure de l'impact de
ces mutations dans la gestion financière des collectivités
locales sur la manière dont sont mises en oeuvre les politiques
publiques locales. Et cela d'autant plus que ces mutations viennent conforter
un fait majeur intervenu ces dernières années dans
l'environnement public local : l'influence de la sphère
privée sur les pratiques publiques.
Dès lors qu'on parle de planification
stratégique, on abandonne non seulement le cadre de l'annualité
budgétaire mais on renforce la visibilité des budgets locaux. En
effet, la planification stratégique visant nécessairement
l'opérationnalité et l'efficacité des budgets locaux, elle
serait d'autant plus utile que la complexité due à la
superposition actuelle des niveaux de fiscalité serait supprimée
au profit d'une spécialisation. En d'autres termes, il faudrait passer
d'une culture administrative à une culture de marché dans la
fiscalité locale.
§2. Les limites
de la vision économique : réflexion autour des notions
d'égalité et de cohérence territoriales
L'une des difficultés que peut rencontrer la mise en
oeuvre de la spécialisation fiscale est le respect du principe
d'égalité des citoyens devant. Mais l'argument peut être
retournée en faisant remarquer que le système actuel est tout
aussi source d'inégalités et d'injustice du fait même de
l'ancienneté des bases d'imposition, des différences dans les
méthodes employées pour évaluer les valeurs locatives, la
multiplication des exonérations ou la disparité des taux
d'imposition au niveau national. Mais pour certains, ces
inégalités n'en sont pas. Il s'agit de diversité de
situations qui sont, par nature, intrinsèque, à tout processus de
décentralisation politique.
Les inégalités peuvent être
observées aussi bien en comparant les niveaux de collectivités
locales qu'en comparant des collectivités de même niveau
administratif. Si l'on prend par exemple le cas des communes, on constate que
les inégalités géographiques sont très fortes. Par
ailleurs, le nombre de populations joue un rôle essentiel dans le poids
des dépenses d'une commune. Les départements ont une structure de
dépenses de fonctionnement semblables à celle des communes bien
que les disparités entre départements ne soient pas du tout
expliquées par des critères tels que la densité de
population ou la situation géographique mais plutôt par des choix
de nature population engendrés par les compétences propres des
départements.
En ce qui concerne les régions, les disparités
sont moins importantes dans la mesure où les budgets et les
« comportements »financiers des régions sont plus ou
moins identiques.
Pour résorber les inégalités
engendrées par l'organisation fiscale locale, on a mis en place des
mécanismes de péréquations, c'est-à-dire, un
système de redistribution qui vise à réduire les
écarts de richesse entre les collectivités territoriales. La
révision constitutionnelle du 28 mars 2003 a érigé la
péréquation en principe constitutionnel puisque
« la loi prévoit des dispositifs de
péréquation destinés à favoriser
l'égalité entre les collectivités
territoriales » (art. 72-2).
Il existe trois formes de mécanismes de
péréquation : la péréquation horizontale qui
s'effectue entre les collectivités territoriales et consiste à
attribuer aux collectivités défavorisées une partie des
ressources des collectivités les plus riches. Cette forme de
péréquation concerne essentiellement la taxe professionnelle.
Elle est assurée par divers fonds départementaux dont les plus
importants sont les fonds départementaux de péréquation de
la taxe professionnelle. En 2001, ces fonds représentaient environs deux
milliards d'euros.
La péréquation verticale est, quant à
elle, assurée par les dotations de l'Etat aux collectivités
locales. La DGF en est le principal instrument. En 2002, elle
représentait environs quatre milliard d'euros. Une troisième
forme de péréquation est représentée par des
dispositifs plus ponctuels à la suite des mouvements de transferts de
compétences de l'Etat vers les collectivités locales. Selon une
étude du Commissariat Général du Plan de juillet 2004, les
dotations de l'Etat on permis, en 2001, une réduction globale des
inégalités de pouvoir d'achat de 40% pour les communes, de 51%
pour les départements et de 54% pour les régions.
Cependant, la péréquation n'est pas exempte de
toute critique. Tout d'abords, on ne peut pas dire qu'elle a permis de
réduire sensiblement les inégalités entre
collectivités. On peut même observer que l'ampleur des
écarts de richesse entre collectivités fait de la France une
exception en Europe. Et cela d'autant que l'acte II de la
décentralisation pourrait aggraver ces écarts.
Le problème majeur provient de l'inégale
répartition de la richesse fiscale sur le territoire. Pour
résoudre ce problème, il y a deux solutions : soit la
nationalisation pure et simple de la fiscalité locale, soit reformer
l'organisation fiscale locale dans le sens d'une introduction d'une plus grande
simplicité et d'une plus forte clarté. C'est la solution de la
spécialisation fiscale qui a l'avantage de préserver l'autonomie
financière locale. Par ailleurs, la solution de la spécialisation
semble la mieux adaptée pour corriger des effets
d'inégalités qui ne sont pas toujours de nature fiscale et
financière. C'est le cas notamment des effets de localisation des
activités économiques ou de potentiel démographique des
territoires.
Il existe un autre mécanisme fiscal qui prend en compte
les écarts de richesses entre collectivités locales, il s'agit
des notions de potentiel financier et de potentiel fiscal qui mesurent la
capacité de la collectivité à lever l'impôt à
partir de la base fiscale de son territoire. En fait, jusqu'à
récemment, les mesures de péréquation financière
étaient basées sur le seul critère de potentiel fiscal qui
ne prenait pas réellement en compte la richesse des
collectivités. C'est la raison pour laquelle, le gouvernement, à
travers le projet de loi de finances pour 2005, a proposé de substituer
un potentiel financier à l'actuel potentiel fiscal afin de mieux mesurer
les écarts de richesse entre collectivités. En
réalité, ce nouvel indicateur comprend l'actuel potentiel fiscal,
auquel sont ajoutées la dotation forfaitaire et les dotations de
compensation des impôts supprimés par l'Etat.
Les questions d'égalité et de cohérence
territoriales ne peuvent être appréhendées que dans le
cadre d'une réflexion générale sur les aspects politiques
de la spécialisation fiscale. Celle-ci ne doit ni conforter ni renforcer
les disparités territoriales mais introduire plutôt un cadre
nouveau de traitement de ces questions. C'est ainsi qu'en posant cette question
des inégalités territoriales dans le cadre de la réflexion
sur la spécialisation fiscale, on cherche à montrer que la
résorption des disparités territoriales n'est non seulement pas
contradictoire avec le renforcement des pouvoirs locaux mais peut aussi trouver
dans ces pouvoirs renforcés une solution.
CHAPITRE 2. LES ASPECTS
POLITIQUES DE LA SPÉCIALISATION FISCALE : VERS LA DÉMOCRATIE
ET LA GOUVERNANCE TERRITORIALES
Réduire la question de la spécialisation fiscale
territoriale aux seuls aspects économiques ne présenterait aucun
intérêt dans la mesure où la réflexion sur
l'efficacité économique ne permet pas de trouver des solutions
sur la critique la plus répandue concernant la spécialisation des
impôts locaux. C'est la raison pour laquelle, il a semblé
essentiel de compléter les aspects économiques par une
étude des aspects politiques de la spécialisation fiscale. Cette
réflexion est rendue d'autant plus nécessaire que les
collectivités locales sont devenues des institutions politiques au sens
large du terme. Autrement dit, elles ne sont pas simplement des organes qui
doivent exercer des compétences transférées au bon vouloir
de l'Etat. Elles sont devenues des institutions d'impulsion et de proposition
qui doivent de plus en rendre des comptes à une « opinion
publique locale » en gestation.
Section 1. L'impôt comme
instrument de renforcement de la démocratie locale
La « crise » de la citoyenneté et
la désaffection à l'égard du politique que l'on constate
au niveau national ne s'observent au niveau local. Au contraire, on assiste
même à un développement et à un renforcement de la
citoyenneté locale. Cette situation est rendue possible par les
possibilités offertes par la démocratie participative. Celle-ci
s'institutionnalise progressivement et ne manque pas de poser de nouvelles
questions. Il est impossible d'ignorer l'impact de cette nouvelle
démocratie locale sur l'architecture financière et fiscale
locale. En effet, comment constater le développement local et le
renforcement de la gouvernance territoriale sans poser la question du lien
fiscal.
§1. De la
démocratie à l'affirmation d'une citoyenneté
locale
Le processus de décentralisation a engendré deux
effets majeurs : un premier effet très souligné par ce
qu'évident, c'est le renforcement des compétences des
collectivités locales et la transformation de celles-ci en
véritables acteurs des politiques publiques. Un deuxième effet
moins souligné mérite d'être rappelé. Il s'agit de
l'émergence d'un espace public et d'une forme de citoyenneté
locale. Face à la crise de participation et d citoyenneté que
connaissent les institutions nationales, les collectivités territoriales
apparaissent de plus en plus comme un nouvel espace d'expression et de
participation citoyenne. La démocratie participative locale est ainsi
appelée à se renforcer dans les années à venir.
En déterminant le cadre institutionnel d'exercice des
compétences des collectivités territoriales, la
décentralisation a eu pour effet de transférer les attentes des
citoyens-usagers à l'égard de l'Etat-Providence vers les nouveaux
espaces de production de service public que sont les collectivités
territoriales. A ce sujet, il serait intéressant d'observer comment
chaque niveau d'institution locale joue un rôle spécifique au
regard des attentes des citoyens. Ce n'est donc pas par hasard si, dans la
définition des politiques publiques locales, ce sont les politiques
communales qui sont les plus marquées par les
consultations-concertations citoyennes. En effet, c'est à ce niveau
marqué par la proximité que la démocratie participative
prend tout son sens.
D'ailleurs, certains observateurs ne manquent pas de rappeler
qu'historiquement, les débats institutionnels liés à la
décentralisation, qu'il s'agisse des lois de 1871 sur le
département ou bien de 1884 sur les communes, ont assimilés la
démocratie à la décentralisation. On peut donc affirmer
que les lois de décentralisation ont apporté les conditions
nécessaires à de nouvelles exigences quant à la
qualité du service public.
En fait, il faudrait préciser que la nouveauté
constituée par les lois de décentralisation n'est pas le
renforcement de la démocratie représentative mais plutôt
l'émergence d'une nouvelle forme de démocratie participative
locale, laquelle associe les citoyens à la décision politique. En
d'autres termes, la crainte que certains exprimaient à propos de
l'émergence de notabilités locales du fait des lois de
décentralisation se trouve quelque peu infirmée par le
« contrepoids » exercé par l'affirmation d'une
nouvelle forme de citoyenneté locale. Aussi, l'apport des lois de la
décentralisation ne se limite pas à l'encadrement juridique de la
participation mais à la « création d'un contexte
général plus favorable à l'association du public aux
décisions et aux politiques municipales ».16(*) Aussi, la
démocratie locale se trouve-t-elle renforcée par de nombreuses
procédures d'expression et de participation.
1. Les
techniques et les procédures de la démocratie participative
locale :
La démocratie participative locale représente un
terme générique qui désigne un ensemble de techniques et
de procédures qui permettent aux citoyens locaux de s'exprimer et de
participer à l'élaboration et à la réalisation des
décisions publiques des collectivités locales. Du referendum
local au conseil des sages en passant par les enquêtes publiques, il
s'agit de dresser un panorama dont l'objectif est d'éclairer sur la
richesse des formes d'expression de la citoyenneté locale.
Il existe deux types de participation citoyenne : la
participation-consultation et la participation-concertation. La première
débouche sur un avis qui n'est pas déterminant dans la prise de
décision de la collectivité locale tandis que la seconde suppose
que l'avis de la population fasse partie du processus décisionnel des
autorités locales. De nombreux textes législatifs ont
renforcé et encadré les pratiques participatives locales. Ainsi,
la loi « Administration Territoriale de la
République » du 6 février 1992 impose l'obligation aux
collectivités locales de rendre compte de leur gestion. Ce qui
représente une forme de consultation du citoyen.
De même, la loi du 25 juin 1999 d'orientation pour
l'aménagement et le développement durable du territoire a
instauré, pour les pays, des conseils de développement pour les
citoyens locaux. Et enfin, la loi du 12 juillet 1999 sur la coopération
intercommunale instaure des commissions d'usagers dans les groupements de
communes.
Au nombre des formes de participation officielle, on peut
dénombrer les Conseils Economiques et Sociaux Régionaux
crées dans le cadre de la loi du 5 juillet 1972 instituant et organisant
les Régions et dont l'objet est de représenter les milieux
économiques locaux. Le referendum local est une autre forme de
participation citoyenne locale qui a dû attendre de nombreuses lois pour
être reconnu comme outil à part entière de renforcement de
la citoyenneté locale. L'enquête publique constitue une forme de
consultation destinée à informer le public et à recueillir
ses avis pour un projet local donné.
Il existe par ailleurs d'autres instances locales de
consultation et de concertation telle que les commissions locales extra
municipales ou les comités consultatifs de services publics locaux. Pour
finir avec ce panorama, il faut faire état du rôle des conseils de
quartier dont la démarche est essentielle. Ces conseils constituent, au
sein des communes, des structures de proximité d'information, de
débat, d'échange et de suivi de projet.
L'une des raisons de l'émergence de la
démocratie participative locale tient donc à sa relative
simplicité pour la mettre en oeuvre sur un territoire bien
délimité souvent de faible taille. Par ailleurs, si la
démocratie représentative a constitué une innovation
institutionnelle majeure à travers l'élection des organes
délibérants au suffrage universel direct, elle a montré
ses limites. Qu'il s'agisse de la représentation géographique ou
du découpage électoral, la démocratie
représentative ne semble pas être en adéquation avec
l'émergence des nouveaux territoires d'action.
A ce sujet, la question de l'élection se pose avec plus
d'acuité à propos du renforcement irréversible de
l'intercommunalité. C'est donc la raison pour laquelle on peut affirmer
que la démocratie de participation correspond mieux à la fois aux
attentes des citoyens et à la multiplication des territoires d'action
locaux. En effet, elle participa au renforcement de la visibilité des
actions publiques locales dans un contexte où l'offre de services
publics se trouve « éclatée ».
Compte tenu de ces éléments, on ne peut
éviter de poser la question de la réforme de la fiscalité
en termes de démocratie. Car, le fondement même de tout
système fiscal, c'est bien l'adhésion et la participation.
Autrement dit, le principe même de consentement à l'impôt
nous pousse à poser la question de la « démocratie
fiscale locale », et d'une manière connexe, la question de la
spécialisation fiscale. En effet, dès lors qu'on pose la question
du consentement à l'impôt local, on est obligé de
considérer que la spécialisation des impôts locaux est le
meilleur moyen de renforcer le mouvement de citoyenneté locale.
La Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de
1789 stipule, dans son article 14 que chacun doit « constater par
lui-même la nécessité de la contribution publique, de la
consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la
quotité, l'assiette, le recouvrement et la
durée ». Aujourd'hui, les citoyens peuvent exercer
plusieurs formes de contrôles des finances locales. Tout d'abords, ils
peuvent exercer un contrôle politique sur la gestion financière
des collectivités locales à travers leur droit de vote. Par
ailleurs, la loi du 6 février 1992 pose le droit à l'information
et à la communication des documents budgétaires comme un principe
essentiel de la démocratie locale. Les élus locaux disposent, eux
aussi, d'un pouvoir de contrôle qui se caractérise par le
débat d'orientation budgétaire, les questions orales ou la
communication des documents budgétaires et leurs annexes.
§2. Lien fiscal et
gouvernance territoriale
La question de la spécialisation fiscale territoriale
ne se limite pas aux seuls aspects pratiques. Pour constituer un
véritable instrument de refondation de l'action publique locale, la
réforme de la fiscalité locale autour de la spécialisation
doit être l'occasion d'un « nouveau contrat social ».
En effet, comme on l'a souligné précédemment, la question
de la spécialisation permet de poser la problématique du
consentement à l'impôt et de la participation des citoyens
à l'offre de services publics locaux.
Pour justifier la nécessité d'un nouveau contrat
social, il faut rappeler les fondements philosophiques, historiques et
politiques de l'impôt dans les sociétés
démocratiques. On n'a pas assez souligné les aspects politiques
du processus de décentralisation. Il semble bien que celui-ci est bien
un mouvement historique à la fois de renforcement et de transformation
de la pratique démocratique. A cet égard, on observe que le
principe de démocratie participative plus facile à appliquer dans
un cadre local que national, a besoin d'être reconnu notamment par
l'instauration d'un véritable lien fiscal.
En effet, l'enjeu majeur de la nouvelle citoyenneté
locale doit nécessairement s'appréhender à travers la
problématique du lien fiscal territorial. En fait, depuis les
premières origines de la démocratie parlementaire, la
citoyenneté est totalement liée, par le biais du consentement
à l'impôt, à la fiscalité.
Cette question se pose avec beaucoup de vigueur avec
l'émergence des compétences institutionnelles des
collectivités locales et avec le renforcement des pouvoirs des
assemblées délibérantes. D'ailleurs, le terme même
de lien fiscal territorial soulève de nombreuses questions qui n'ont pas
encore trouvées de réponse. Compte tenu de l'enchevêtrement
des compétences institutionnelles sans réellement la
possibilité de définir une tutelle d'une collectivité sur
les autres, et au regard également de l'enchevêtrement des
impôts locaux, il n'est pas vraiment aisé de parler de lien fiscal
territorial.
Par conséquent, la citoyenneté locale comme
expression du lien fiscal local reste à déterminer. Une des
solutions que l'on peut envisager est la spécialisation fiscale
territoriale comme outil de renforcement de la démocratie locale et
instrument de gouvernance territoriale. Par ailleurs, la spécialisation
fiscale territoriale participe à rendre plus visible les niveaux et la
nature des interventions des pouvoirs publics locaux. Nous retrouvons ici le
lien qui existe entre la légitimité démocratique et la
visibilité de l'action publique locale.
On ne peut traiter cette problématique sans jeter un
clin d'oeil sur l'émergence des intercommunalités à
fiscalité propre. Aujourd'hui, les Etablissements Publics de
Coopération Intercommunale ayant adopté la taxe
professionnelle unique sont majoritaires dans le paysage intercommunal
français. Au même moment, on assiste à une exigence de
démocratie directe avec les demandes d'élection des membres des
assemblées délibérantes des ces établissements au
suffrage universel direct.
L'évolution des EPCI vers l'élection au suffrage
universel direct représente un facteur majeur d'affirmation de la
citoyenneté dans le cadre de l'intercommunalité. D'ailleurs, on
peut penser que le lien existant mais appelé à se
développer entre projet, fiscalité et élection dans le
contexte du renforcement de l'Intercommunalité illustre parfaitement la
légitimité à venir de la nouvelle action publique locale.
En d'autres termes, si l'impôt est un outil de légitimité,
le projet constitue un instrument de gouvernance.
La gouvernance représente ainsi un instrument
opérationnel majeur dans ce contexte qui voit l'élargissement des
autonomies locales sous des formes diverses notamment sous la forme
d'interférence entre les institutions publiques locales et des acteurs
non institutionnels. Cette gouvernance devient d'autant plus nécessaire
que ces acteurs prennent de plus en plus d'importance sans pour autant que la
question de leur légitimité soit posée.
La notion de gouvernance insiste donc sur
l'interdépendance des réseaux d'acteurs publics et privés,
sur la capacité de satisfaire certains intérêts et sur
l'autonomie d'action. Cela peut sembler contradictoire avec la recherche et le
renforcement d'une légitimité politique propre aux
collectivités territoriales dans la mesure où la gouvernance
consacre la fragmentation des instances de décision locales. En
réalité, il n'y a pas contradiction en ce sens que le
renforcement de la légitimité de la décision politique ne
doit pas se faire au détriment de l'efficience de cette décision
sur le plan de la mise en oeuvre des actions publiques locales.
Les problématiques actuelles de gouvernance s'imposent
aux institutions locales en ce sens que vingt années de processus de
décentralisation ont donné naissance à des systèmes
locaux de pouvoir dont l'importance augmente d'année en année. Un
système de pouvoir qui ne se limite pas aux seuls acteurs politiques. En
effet, le jeu de l'action locale est rendu complexe par l'intervention de tout
un réseau d'acteurs locaux.
En matière d'aménagement et de
développement local, le phénomène est encore plus
réel. De fait, le projet local caractérise l'affirmation des
modes de gouvernement locaux. C'est à travers le projet que les
collectivités locales concrétisent non seulement leurs visions
politiques mais mobilisent également les énergies locales et
sensibilisent les citoyens. Le projet devient ainsi un moyen de mettre en
oeuvre « une démocratie participative fondée sur le
principe d'auto- évaluation collective ».17(*)Le projet territorial
résume les volontés locales et concrétisent celles-ci
à travers les actions.
Le lien territorial pose le problème de la
citoyenneté plurielle dans la mesure où le citoyen s'identifie
à différents niveaux de collectivités communal,
intercommunal, départemental et régional. L'un des principes
majeurs de la citoyenneté est que celle-ci est indivisible. Et pourtant,
cette nouvelle configuration semble introduire un éclatement de la
citoyenneté. Mais, certains y voient, au contraire, une
redéfinition de la citoyenneté. En effet, la multiplicité
des formes de citoyenneté signifie que l'expression de la
citoyenneté est directement liée à l'expression de la
demande sociale.
Section 2. Visibilité et
légitimité de l'action publique locale
Le renforcement de la décentralisation et le
développement des compétences locales ont permis de poser la
question de la légitimité de l'action publique. Il s'agit d'un
« regard neuf » suscité par les transformations
contemporaines de l'action publique. Autrement dit, les pratiques
territorialisées en matière d'action publique ont
bouleversé les mécanismes traditionnels de
légitimité et de visibilité de l'action publique. Dans ce
contexte de transformations qui influencent même le discours politique et
la communication locale, il n'est pas aisé pour le citoyen de situer
l'information politique dans une logique de participation et de
décision.
Si la communication politique a pris une place importante
dans la conduite des politiques publiques locales, il est essentiel pour
l'émergence d'une véritable démocratie citoyenne qu'elle
ne soit une source de « manipulation » de l'information
locale. C'est la raison pour laquelle la recherche de la
légitimité et de la visibilité de l'action publique locale
doit être accompagnée du renforcement des modes de gouvernance.
§1. Pour une
meilleure visibilité et une nouvelle légitimité de
l'action publique locale
Le problème que pose la participation des citoyens
à la vie politique locale est essentiellement celui de la
visibilité et de la légitimité de l'action publique des
collectivités locales. Les collectivités territoriales sont,
à ce titre et le plus souvent, engagées dans des
opérations de communication principalement destinées aux
administrés. Ces opérations que l'on qualifie de maîtrise
d'images lorsqu'elles sont orientées vers l'extérieur, sont des
moyens, pour les décideurs locaux, de donner de la visibilité
à leur offre de services publics.
C'est ainsi que « l'image est l'expression
symbolique de la représentation que produit la collectivité.
Cette image se construit à partir de l'ensemble des messages, des
informations, de l'organisation de l'espace et des services. Elle se
développe à l'interne auprès et avec les personnels et les
habitants, se diffuse à l'externe auprès et avec les touristes,
les entreprises et les institutions ».18(*)
Dans ce processus de structuration de l'image d'une
collectivité locale, les citoyens jouent un triple rôle qui les
place de facto dans une position majeure au sein du processus
d'élaboration et de réalisation des politiques publiques locales.
En effet, ils sont à la fois récepteurs de l'image, vecteurs de
celle-ci à l'extérieur et acteur de son évolution dans le
temps. Ce processus concerne l'élaboration de la visibilité. Par
ailleurs, la communication locale, en même temps qu'elle structure la
visibilité, favorise, par la participation des citoyens, le renforcement
de la légitimité de l'action publique locale. C'est en ce sens
que l'offre de services publics locaux ne peut être
appréhendée seulement en termes de visibilité. Elle
nécessité une légitimité dans la mesure où
elle est sous tendue par le principe de proximité.
Bien sûr, il existe un écart entre l'idéal
et le réel dans le rôle que doit jouer la structuration de la
visibilité et de la légitimité. En effet, compte tenu des
bouleversements introduits en termes de compétences obligatoires et
optionnelles par les lois de décentralisation, la
légitimité est une conséquence de la visibilité et
un aspect de la proximité. En d'autres termes, dans le paysage des
compétences, le citoyen local a besoin de lire clairement les actions
locales pour mieux exprimer la légitimité. C'est-à-dire
que le citoyen- observateur doit se transformer en citoyen- acteur de l'action
publique locale. Or, le plus souvent, les élus locaux
représentants ultimes de la légitimité démocratique
élaborent des opérations de structuration de l'image qui peuvent,
à certains égards, frôler la
« manipulation ».
Le rapport BERT et CHAMPSAUR (2003) préconisait une
simplification et une clarification de l'administration fiscale. Certes, il
s'agit avant tout de l'administration d'Etat mais comme on l'a vu c'est la
logique de fonctionnement de l'administration fiscale d'Etat qui guide
l'organisation du système fiscal local. En effet, au-delà de la
superposition des niveaux d'impôts et des structures administratives, il
existe un véritable problème d'interlocuteur en matière
fiscal.
En fait, cet interlocuteur existe, il s'agit de
l'administration fiscal de l'Etat mais cette situation n'est pas sans engendrer
une confusion des genres dans un contexte où l'on milite pour plus de
gouvernance et de visibilité dans les compétences des
institutions publiques et dans la mise en oeuvre des actions publiques.
La nécessité de reformer la fiscalité
locale se justifie par l'absence de visibilité dans la lecture de
l'action publique locale. Une absence de visibilité due à la
multiplication des décideurs locaux. Si, dans une certaine mesure, cette
multiplication des décideurs locaux peut présenter des avantages,
en matière de fiscalité, il semblerait que les
inconvénients sont plus importants. On soulignera qu'une telle situation
engendre une certaine lourdeur administrative.
Compte tenu de ces éléments, il est urgent de
clarifier la situation en optant soit pour la recentralisation fiscale soit
pour la spécialisation. Si les deux solutions présentent le
même avantage de clarifier et de simplifier le système, il est
indéniable que, pour les raisons d'efficacité et de gouvernance
que l'on évoquait précédemment, le choix de la
spécialisation semble plus judicieux. Par ailleurs, la
spécialisation fiscale marque un pas en avant tandis que la
recentralisation est une forme de retour en arrière dans un contexte
où tout le monde s'accorde à dire qu'il faut renforcer la
décentralisation. La superposition actuelle des impôts locaux
participe, au même titre que la multiplication des décideurs
locaux, à cette confusion.
Une illustration des problèmes posés par
l'imbrication de différents niveaux territoriaux dans l'exercice de
missions plus ou moins identiques est donnée par la cohabitation entre
les pays et les groupements de communes. La question principale
concerne la logique propre à chaque niveau territorial. Autrement dit,
la logique des pays est elle compatible avec celle des territoires
intercommunaux ? On sait que les pays ont été crées
pour répondre essentiellement à un impératif
économique tandis que les « les
intercommunalités » entrent dans une vision institutionnelle
plus large. En ce sens, il ne saurait avoir de concurrence entre les deux
niveaux territoriaux.
Cependant, lorsqu'on réfléchit sur les
problématiques de développement local, les réponses ne
sont plus évidentes. C'est en ce sens que certains observateurs pensent
que l' évolution des fonctions des autres niveaux
d'organisation territoriale conditionne pour une bonne part la place que peut
tenir effectivement les pays en répondant aux objectifs fixés par
ses promoteurs.
La montée en puissance de certains pouvoirs publics
peut rendre plus ou moins nécessaire ou superflu cet échelon de
coordination entres collectivités locales. Lorsqu'on fait le bilan des
dix années d'existence des pays comme niveau de coordination
territoriale, l'affirmation des territoires intercommunaux comme territoire de
projet n'est pas aisée dans la mesure où on s'accorde à
dire que les pays ont rempli leurs missions en la matière.
En effet, comme espace caractérisé par une
souplesse organisationnelle et n'étant pas soumis aux rigidités
institutionnelles, les pays favorisent les initiatives locales et le
partenariat dans une démarche de projet.
En termes de légitimité politique des
institutions locales en liaison avec la question fiscale, on peut se demander
si la problématique de l'élection au suffrage universel des
assemblées communautaires locales se poserait avec autant
d'acuité si les groupements communautaires n'étaient pas
majoritairement soumis au régime de la taxe professionnelle unique. En
d'autres termes, c'est la question fiscale qui dicte les problématiques
politiques. En ce sens, l'impôt retrouve sa véritable essence.
La lisibilité fiscale est non seulement une condition
de bonne gouvernance locale mais elle entraîne également une
clarification et une simplification administrative. Aussi, on ne peut soulever
la problématique de la reforme des finances locales sans poser la
question de la reforme budgétaire dans la mesure où cette
dernière est un aspect majeur de la prise en compte du critère
d'efficacité dans la conduite des financements des projets locaux. En
effet, comme nous le soulignions précédemment, le budget doit
être un instrument de prévision.
A ce titre, il faut rappeler les réformes en
matières de techniques et de procédures budgétaires
locales mises en oeuvre ces dernières années (mise en place de la
M 14 le 1er janvier 1997 permettant ainsi aux communes de s'inspirer
des techniques de comptabilité privée, adoption de la M 52 pour
les départements et de la M 72 pour les régions toujours dans le
même esprit de simplification et de clarification).
§2. De
l'autonomie financière à l'autonomie fiscale, les
modalités de mise en oeuvre de la spécialisation
fiscale.
Quelle est la distinction entre le concept d'autonomie
financière et celui d'autonomie fiscale ? Cette question nous a
semblé majeure en ce sens où une bonne compréhension de la
signification et de la portée de chaque concept permet de situer le
débat sur la définition des ressources financières des
collectivités locales. Or, pour une mise en oeuvre efficace de la
spécialisation fiscale territoriale, il faut déterminer
exactement les capacités (en termes d'atouts et de handicaps) de chaque
collectivité territoriale. La prise en compte récente de la
notion de potentiel financier en complément de celle de potentiel fiscal
prouve l'importance de cette question. Bien que ce changement de critère
concerne d'abords la détermination des concours étatiques aux
collectivités locales, il apparaît être valable pour la
spécialisation de la fiscalité locale.
Depuis son introduction, le concept d'autonomie
financière locale s'est toujours situé entre l'idée d'une
indépendance financière et la réalité d'une tutelle
étatique et d'un contrôle juridictionnel. Bien qu'on évoque
souvent ce concept, celui-ci n'a pas de définition précise. Son
contenu est variable. Ainsi, le principe d'autonomie financière se
présente comme la déclinaison du principe de libre administration
des collectivités locales dans les domaines budgétaire et
fiscal.
Juridiquement, ce principe n'a été reconnu que
par la loi organique du 29 juillet 2004 après avoir été
introduit par la révision constitutionnelle du 28 mars 2003. Le nouvel
article 72-2 de la Constitution stipule ainsi que les collectivités
« bénéficient de ressources dont elles
peuvent disposer librement... peuvent avoir tout ou partie du produit des
impositions de toute nature. ». Par ailleurs,
« les recettes fiscales et les autres ressources propres des
collectivités territoriales représentent, pour chaque
catégorie de collectivités, une part déterminantes de
l'ensemble de leurs ressources ». On notera que la loi organique
du 29 juillet 2004 est venue définir la notion de ressources propres
comme le produit de certaines impositions.
La notion de décentralisation fiscale nous
paraît appropriée pour rendre compte de la nécessité
de renforcer les pouvoirs fiscaux des collectivités locales dans un
souci de développement de la démocratie locale et de la
responsabilité des élus locaux. Aussi, la reforme fiscale doit
s'appuyer sur les notions de proximité et de visibilité. C'est en
ce sens que la spécialisation prend toute son ampleur par ce qu'elle
répond à ces différents impératifs et défis
qui se posent actuellement à l'action des collectivités locales.
Certains observateurs y voient d'ailleurs une manière d'introduire un
concept encore méconnu, la responsabilité fiscale.
Divers scénarios peuvent être envisagés
dans le cadre des modalités concrètes de mise en oeuvre de la
spécialisation fiscale territoriale. Ainsi, l'une des pistes
envisagée est celle qui attribue à la région la pleine
compétence de la Taxe Intérieure des Produits
Pétroliers(TIPP) et aux groupements intercommunaux la Taxe
Professionnelle tandis qu'aux départements et aux commune reviendraient
respectivement la Taxe Foncière et la Taxe d'Habitation
rénovée.
D'autres types de scénarios de spécialisation
fiscale peuvent être envisagés. Tout d'abords, l'institution d'une
nouvelle imposition locale des entreprises (ILE) en remplacement de la taxe
professionnelle et qui serait entièrement réservée aux
communes et aux EPCI. Dans ce scénario, les départements seraient
financés exclusivement par les taxes foncières et les
régions par une fraction des droits de mutations à titre
onéreux(DMTO) et une autre ressource fiscale qui se substituerait au
coût net actuel de la TP pour l'Etat.
Ce scénario présente l'avantage d'une plus
grande transparence et limite les effets négatifs de la concurrence
fiscale verticale. Par ailleurs, en réservant
l'intégralité de la nouvelle ILE, ce scénario permet de
renforcer le lien entre les finances communales et l'implantation des
entreprises. Ainsi, la fiscalité jouerait un rôle d'incitation
à la bonne gestion des finances locales grâce à
l'accentuation de la concurrence fiscale horizontale.
CONCLUSION
En analysant les différentes problématiques de
notre sujet, on arrive au question suivant : est-ce la question fiscale
qui influence la problématique de la refondation de l'action publique
locale ou bien c'est la nécessité de refondation de l'action
publique locale qui exige une reforme en profondeur de la fiscalité. En
fait, les deux semblent intimement liées. Par conséquent, la
question de la réforme de la fiscalité locale ne doit être
appréhendée que dans le cadre de la réflexion sur le
visage que l'on veut donner à la décentralisation. En faisant le
bilan actuel de la situation, on ne peut qu'être perplexe quant à
l'existence d'une réelle volonté politique allant dans ce sens.
Les grandes questions soulevées par la
spécialisation fiscale semblent encore éloignées des
préoccupations du moment. En ce sens, on peut dire que si la voie de la
spécialisation fiscale territoriale paraît théoriquement
intéressante et semble faire consensus parmi les analystes et les
spécialistes des finances locales, elle est majoritairement
rejetée au sein des élites politiques nationales et locales.
Aussi, la question de la spécialisation fiscale ne peut être bien
comprise sans la prise en compte de cette résistance de la classe
politique.
Mais en même temps, cette résistance n'est pas
propre à la spécialisation fiscale. Elle concerne toute forme de
réforme en profondeur de la fiscalité locale. Ce qui nous
emmène à nous demander à quand un véritable
débat sur la décentralisation financière et fiscale en
France. Quelle qu'en soit la posture adoptée face à ce
débat, il est une évidence : tant que la question fiscale ne
sera pas résolue, le processus de décentralisation
français restera inachevé.
BIBLIOGRAPHIE
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Thèse Doctorat, Université Aix-Marseille III,
2002
· G. GASSET : La réforme
des bases d'imposition des impôts directs locaux - Mémoire
DEA, Université Aix-Marseille III, 2003
· C.
PORZIO : Le renforcement de
l'Intercommunalité à fiscalité propre par la loi
Chevènement - Mémoire DESS, Université
Aix-Marseille III, 1999
· F. SKRIVAN : Les effets de la
fiscalité intégrée sur l'organisation locale -
Mémoire DESS, Université Aix-Marseille
III,1997
DOCUMENTS INTERNET :
· « Spécialiser les impôts
locaux par niveaux de collectivités ?une fausse bonne idée
intellectuellement intéressante , mais risquant d'accentuer les
inégalités entre collectivités et
contribuables » ( Article de Monsieur Maxime CAMUZAT,
maire de Saint Germain du Puy et membre du Comité des Finances locales
)
· « La fiscalité
locale » ( Document du Ministère de
l'Intérieur, de la Sécurité intérieure et des
libertés locales - Les collectivités locales en chiffre , 2005
)
· « Les citoyens et les élus
peuvent-ils contrôler les finances locales ? »
( dans Vie publique.fr )
· « Note d'orientation sur le
réforme des ressources financières et fiscales des
collectivités locales »- Document du
Ministère de l'Economie et des Finances (direction de la
législation fiscale, direction du budget) et du Ministère de
l'Intérieur ( direction générale des collectivités
locales )
· « Synthèse des pistes de
réforme de la Taxe Professionnelle présentées dans le
rapport d'étape de la Commission Fouquet » (
Document de l'Association des Maires de France, 2004)
· « La réforme des finances
locales, condition de succès de l'acte 2 de la
décentralisation » (dans intercommunalites.com
)
· « Le financement de la nouvelle
intercommunalité » ( Document Philippe
Laurent Consultants paru dans Maires de France, septembre 2000
· « Qu'est ce que la
péréquation ? » ( dans Vie
publique.fr )
· « Que désigne t-on par
autonomie financière des collectivités territoriales
( dans Vie publique.fr )
· « Quels principes
régissent la fiscalité locale ( dans
Viepublique.fr )
· « La spécialisation
fiscale » ( Document de la Commission de
réforme de la Taxe professionnelle )
ANNEXE
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
- 1 -
PREMIÈRE PARTIE : LES FINANCES LOCALES :
MIROIR DES DEFIS ET DES ENJEUX DE LA NOUVELLE ACTION PUBLIQUE LOCALE
- 5 -
CHAPITRE 1. FINANCES ET FISCALITÉ LOCALES, LES
PARENTS PAUVRES DE LA DECENTRALISATION
- 6 -
Section 1. Les fondements de la fiscalité
locale
- 7 -
§1. Origines et fondements de la
fiscalité locale
- 7 -
1. Les « Quatre
Vieilles »
- 8 -
Ø La Taxe Foncière sur les
Propriétés bâties
- 9 -
Ø La Taxe Foncière sur les
Propriétés non bâties
- 10 -
Ø La Taxe d'Habitation
- 10 -
Ø La Taxe Professionnelle
- 10 -
2. Les mécanismes des quatre taxes
- 11 -
§2. De la libre administration à
l'autonomie financière : la quête
inachevée
- 12 -
A. Dotations et subventions de
fonctionnement
- 14 -
1. La Dotation Globale de
Fonctionnement (DGF)
- 14 -
2. La Dotation Spéciale
Instituteur (DSI)
- 15 -
3. La Dotation
Générale de Décentralisation (DGD)
- 15 -
4. La Dotation Elu Local (DEL)
- 15 -
5. La Dotation pour Compensation
des Pertes de Base de Taxe Professionnelle
- 15 -
6. La Dotation de
Développement Rural
- 15 -
7. Les autres subventions de
fonctionnement
- 15 -
B. Dotations et subventions
d'équipement
- 15 -
1. La Dotation Globale
d'Equipement
- 15 -
2. Les Dotations de Transferts de
Compétences
- 15 -
3. Les Subventions
spécifiques
- 15 -
4. Les Fonds de Compensation pour
la TVA
- 15 -
5. Le Produit des Amendes de la
Police et de la Circulation
- 15 -
Section 2. L'avenir de la fiscalité
locale
- 16 -
§1. Consensus sur un diagnostic : reformer
la fiscalité locale
- 17 -
1. Le cas spécifique de la réforme de la Taxe
Professionnelle
- 21 -
§2. La question des compétences fiscales
des collectivités territoriales
- 23 -
CHAPITRE 2. L'ACTION PUBLIQUE LOCALE : DU CONCEPT A
LA RÉALITÉ
- 32 -
Section 1. Les collectivités
locales : acteurs majeurs de la nouvelle action publique
- 33 -
§1. De la territorialisation à la
co-production de l'action publique :
- 33 -
le rôle des collectivités
locales
- 33 -
§2. L'émergence des services publics
locaux
- 34 -
Section 2. Le rôle du budget
local
- 36 -
§1. Finances locales et dépenses
publiques locales : quelle cohérence ?
- 37 -
§2. L'inadaptation des principes
budgétaires locaux au nouveau cadre de l'action publique
locale
- 38 -
DEUXIÈME PARTIE : LE DOUBLE OBJECTIF DE LA
SPÉCIALISATION DES IMPÔTS LOCAUX : REFORMER LA
FISCALITÉ LOCALE ET REFONDER L'ACTION PUBLIQUE LOCALE
- 41 -
CHAPITRE 1. LES ASPECTS ECONOMIQUES DE LA
SPÉCIALISATION FISCALE : LA QUESTION DE L'EFFICACITÉ DES
POLITIQUES PUBLIQUES LOCALES .
- 42 -
Section 1. Impôts locaux et
développement local
- 43 -
§1. La problématique du financement des
politiques publiques locales
- 43 -
§2. De la concurrence territoriale à la
concurrence fiscale : la fiscalité au service des
« territoires de projets »
- 45 -
Section 2. La question de l'efficacité de
l'impôt local
- 51 -
§1. De la gestion budgétaire à la
gestion financière : la spécialisation comme instrument de
gestion et de prévision
- 51 -
§2. Les limites de la vision
économique : réflexion autour des notions
d'égalité et de cohérence territoriales
- 54 -
CHAPITRE 2. LES ASPECTS POLITIQUES DE LA
SPÉCIALISATION FISCALE : VERS LA DÉMOCRATIE ET LA
GOUVERNANCE TERRITORIALES
- 57 -
Section 1. L'impôt comme instrument de
renforcement de la démocratie locale
- 57 -
§1. De la démocratie à
l'affirmation d'une citoyenneté locale
- 57 -
1. Les techniques et les procédures de la
démocratie participative locale :
- 59 -
§2. Lien fiscal et gouvernance
territoriale
- 61 -
Section 2. Visibilité et
légitimité de l'action publique locale
- 63 -
§1. Pour une meilleure visibilité et une
nouvelle légitimité de l'action publique locale
- 64 -
§2. De l'autonomie financière à
l'autonomie fiscale, les modalités de mise en oeuvre de la
spécialisation fiscale.
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CONCLUSION
- 69 -
BIBLIOGRAPHIE
- 70 -
ANNEXE
- 72 -
* 1 BALME- FAURE-
MABILEAU ( 1999 )
* 2 M. BOUVIER : Les
Finances Locales (2004)
* 3 C. GIRAULT : Les
relations financières de l'Etat et des collectivités
locales : mode d'emploi (1993)
* 4 Ch. PONCELET :
« Concours de l'Etat aux collectivités territoriales et libre
administration des collectivités locales » in MOREAU (1993)
* 5 Rapport BRUNEL -Conseil
Economique et Social
* 6 Interview de P. DEVEDJIAN
dans La Gazette du 3 février 2003
* 7 Le dispositif actuel de
plafonnement consiste à faire bénéficier aux entreprises,
sur leur demande, d'un plafonnement de leur cotisation par rapport à la
valeur ajoutée, dont le taux varie entre 3.5% et 4% selon le montant de
chiffres réalisé. La cotisation éligible au plafonnement
est une cotisation de référence calculée avec le taux de
TP de 1995 (ou le taux de l'année s'il est inférieur).
L'inconvénient majeur de ce dispositif est que les hausses de pressions
fiscales intervenues depuis 1995 ne sont pas prises en compte dans le
plafonnement et restent donc à la charge de l'entreprise.
* 8 CC, décision
n°90-277DC du 25 juillet 1990.
* 9 D. LANDBECK : Les
principes budgétaires locaux (2001)
* 10 On pourra se
référer, à ce sujet, aux débats portant sur les
services d'intérêt économique général dans le
cadre de la Convention sur le projet de traité constitutionnel pour
l'Union Européenne.
* 11 D. LANDBECK (2001)
* 12 G.GILBERT, A. GUENGANT, V.
HESPEL : « Développement des territoires et
financement des collectivités territoriales » - in
Aménagement du territoire -Rapport du Conseil d'Analyse
Economique.
* 13 G.Gilbert, A. Guengant, V.
Hespel (id)
* 14 Ce chiffre était de
7% en 1999.
* 15 M. BOUVIER :
« Les Finances locales »
* 16 P.MOZOL « La
participation du public à la vie municipale » (Tome 1)
* 17 G. LOGIE :
L'intercommunalité au service du projet de territoire
* 18 M. SOUCHARD - S.
WAHNICH : La Communication politique locale
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