WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'action des ong internationales dans les camps de refugies de Gore au Tchad


par Auriol DJEKODOUM NADJI
Institut des relations internationales du Cameroun/Université de Padoue - Master II en Relations Internationales Option« Coopération Internationale et Action Humanitaire  2019
  

Disponible en mode multipage

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

SOMMAIRE

CONCLUSION GENERALE Erreur ! Signet non défini.

BIBLIOGRAPHIE Erreur ! Signet non défini.

DÉDICACE ii

REMERCIEMENTS iii

SIGLES ET ABREVIATIONS iv

LISTE DES TABLEAUX ET FIGURES vi

RESUME vii

ABSTRACT 0

INTRODUCTION GENERALE Erreur ! Signet non défini.

PREMIERE PARTIE L'ACTION DES ONG AU TCHAD : UNE DYNAMIQUE

UNIVERSELLE 26

CHAPITRE I : LES FONDEMENTS ET L'ETAT DES LIEUX DU DEPLOIEMENT

HUMANITAIRE DES ONG INTERNATIONALES AU TCHAD 28

SECTION I : LES FONDEMENTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES AU

TCHAD 28

SECTION II : L'ETAT DES LIEUX DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES

DANS LES CAMPS DE GORE 48

CHAPITRE II : L'OPERATIONNALISATION DES ONG INTERNATIONALES DANS

LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : LE CADRE OPERATIONNEL 57

SECTION II : L'EFFECTIVITE DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE

REFUGIES DE GORE 64

CONCLUSION PARTIELLE 71

DEUXIEME PARTIE Erreur ! Signet non défini.

IMPACTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE

REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE III : L'IMPACT POSITIF DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES

DANS LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES SUR LA VIE

DES REFUGIES DE GORE 75

SECTION II : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES POUR LE

TCHAD 85

CHAPITRE IV : LIMITES DE L'AIDE HUMANITAIRE AU TCHADET

PERSPECTIVES D'AMELIORATION Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : LES LIMITES DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS LES

CAMPS DE GORE 96

SECTION II : PERSPECTIVES D'AMELIORATION DE L'ACTION DES ONG

INTERNATIONALES A GORE 105

DÉDICACE

II

Á

V' DJIMTINGAR DIMNGAR, notre admirable père.

Pour tous ses sacrifices, son éducation et toutes ces valeurs humaines respectables qu'il nous a inculquées ;

V' NGUEMNODJI MANNRO Elizabeth, notre adorable mère.

Pour cet amour inconditionnel et indéfectible, tous ses encouragements et réconfort dans des moments de doute et de tourment.

REMERCIEMENTS

III

A l'issue de ce travail, nous tenons à exprimer notre reconnaissance et notre gratitude à tous ceux qui ont contribué d'une manière ou d'une autre à son aboutissement.

Nos remerciements s'adressent en particulier :

- Au Pr Paul Elvic BATCHOM pour la qualité de la formation qu'il nous a donnée, pour sa disponibilité et son encadrement tout au long de ce travail ;

- A la Direction de l'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) et l'ensemble de tout le corps enseignant pour la qualité de la formation reçue ;

- A tous nos camarades de la 7e promotion CA2D pour cette convivialité et ces encouragements mutuels qui désormais ont fait de nous une famille ;

- A notre Oncle ALDINGANGAR ALNGAR DIMNGAR pour ses riches conseils, son soutien et ses encouragements ;

- A notre grande soeur OMMEL NADJI Rosine, nos petits frères KOUMNDE NADJI Clotaire, NGUETOG Gérard, MBAINDIGUIM NADJI Ampère, MBAIAM NADJI Macaire et notre nièce KEINODJI Djemima Velázquez ;

- A NGABO MBAIADE Emmanuel, RONDOUBA LAOUMBATNA, Mikail MAHAMAT, DJELASSEM KOUMDE Armand, ALLARAMADJI Alfred, BERAL NODJITELRE Wilfried, DINGAMADJI OUNITANGAR Firmin, DJASRABE Bruno, LABA ALLO, Abakar Mahamat DJIDDA, MEMTOLOUM Gloria, MBAIRAMADJI Kevin, Assanié BOURZABE ;

- A ABAKAYE Aristide Bertrand, DJINA RANGAR Ibraker, GOLBE Jean MAOBELEDE, BALNODJI Elyse, TAHA NANGAR, NENODJI DJIMTOINGAR Carole, NERIBAR Carélie, NAITOROUM GUELMIAN Prosper.

SIGLES ET ABREVIATIONS

iv

ACF Action Contre la Faim

ACRA Association de la Coopération Rurale en Afrique et en Amérique Latine

ADES Agence de Développement Economique et Social

AGR Activités Génératrices de Revenus

APD Aide Publique au Développement

BM Banque Mondiale

CARE Cooperative for American Remittance to Europe

CCO Comité de Coordination des ONG

CDCJ Comité Européen de Coopération Juridique

CEFOD Centre d'Etude et de la Formation pour le Développement

CH Coordonnateur Humanitaire

CRT Croix Rouge Tchadienne

CNAR Centre National d'Accueil et de la Réinsertion des Réfugiés

DONGAH Direction des ONG et des Affaires Humanitaires

DPHR Détachement pour la Protection des Humanitaires et des Réfugiés

DUDH Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

ECOSOC Conseil Economique et Social des Nations Unies

EMV Enquête Multisectorielle de vulnérabilité

FICR Fédération Internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge

FLM Fédération Luthérienne Mondiale

HCR Haut-commissariat des Réfugiés

HEA Household Economy Approach

HIAS Hebrew Immigrant Aid Society

IDO International Developpement Organisation

IFT Institut Français du Tchad

IRIC Institut des Relations Internationales du Cameroun

MEPD Ministère de l'Economie et de la Planification du Développement

MEU Mission Evangélique Unie

MSF Médecins Sans Frontière

ODD Objectifs du Développement Durable

ONAPE Office National de Promotion de l'Emploi

V

ONG Organisation Non Gouvernementale

ONU Organisation des Nations Unies

OUA Organisation de L'Unité Africaine

OXFAM Oxford Committee for Famine Relief

PAM Programme Alimentaire Mondial

PCA Poste de Contrôle Administratif

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

PPTE Pays Pauvres Très Endettés

PSLCP Programme de Soutien et de Lutte Contre le Paludisme

RCA République Centrafricaine

RI Relations Internationales

ROCARE Réseau Ouest et Centre Africain de Recherche en Education

SCF Sahara Conservation Fund

SECADEV Secours Catholique pour le Développement

SIF Secours Islamique France

SGBV Sexual and Gender Based Violence

UCAC Université Catholique d'Afrique Centrale

UNHCR United Nations High Commissionner for Refugees (Haut-commissariat des
Nations Unies pour les Réfugiés)

UNICEF United Nations Children's Fund (Fonds des Nations Unies pour l'Enfance)

USAID United State Agency for International Developpement

LISTE DES TABLEAU ET FIGURES

vi

Tableau 1 : Représentation des ONG internationales dans les différents camps de Goré 51

Tableau 2 : Revenus moyens en FCFA générés au cours 10 derniers mois pour les ménages par

activité principale 70

Figure 1 Les réfugiés centrafricains à Amboko 54

Figure 2 : Réalisations sectorielles des ONG internationales dans les camps de Goré 67

RESUME

En 2013 la Centrafrique s'est retrouvée enlisée dans une crise militaro-civile ayant causé beaucoup de morts des populations civiles. Face à cette situation, ces dernières étaient obligées de se mettre à l'abri trouvant refuge hors des frontières de leur pays notamment au Tchad. Ce déferlement s'est effectué au sud du Tchad dans plusieurs localités dont Goré. Cependant, un tel déferlement dans un pays provoque conséquemment des interrogations et des préoccupations mais surtout des actions. Ces actions proviennent de différents acteurs à savoir l'Etat Tchadien, les acteurs de la société civile mais surtout les ONG plus particulièrement celles internationales. Ces ONG affluent au Sud du Tchad pour assister les milliers de réfugiés centrafricains. Suite à ce constat, nous avons intitulé notre étude « L'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré au Tchad ». Cette étude se veut à la fois un travail théorique et pratique. Théoriquement, il vise à asseoir une réflexion sur la situation que traversent les réfugiés centrafricains dans cette zone du pays et aussi l'étude des actions menées par les différents acteurs humanitaires notamment les ONG internationales. Sur le plan pratique, l'on veut dresser un constat sur les conséquences de ces actions pour les réfugiés et pour le Tchad. Ainsi, ces préoccupations sont centrées autour d'une question principale qui constitue la ridelle de cette étude, elle est formulée comme suit : « Comment appréhender l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré? ». Pour mieux satisfaire cette interrogation, nous avons structuré ce travail sur deux axes qui sont la première et la seconde partie. Compte tenu de la réglementation en vigueur au Tchad, toute action entreprise dans les frontières du Tchad par une quelconque entité ou structure doit suivre un certain canal administratif qui est considéré comme fondement. Ces fondements sont gage de mécanisme de suivi et d'encadrement juridique préalablement aux éventuels écarts que peuvent engendrer les actions des ONG. Au-delà des fondements, l'on a effectué un état des lieux de la situation que vivent les réfugiés avant l'intervention des ONG internationales (Première partie). Puis, s'en suit l'étude des impacts des actions de ces ONG d'abord dans la vie des réfugiés, ensuite les impacts pour le Tchad. Toutefois, il est important de souligner que toutes ces actions ne sont pas dénuées de limites, ainsi, il a été question de suggérer quelques pistes de solutions afin d'y remédier ou du moins atténuer ces limites pour prétendre mener des actions beaucoup plus optimales (Deuxième part).

ABSTRACT

In 2013, the Central African Republic was mired in a military-civil crisis that caused many deaths among the civilian population. In the face of this situation, they were obliged to take shelteroutside their borders, particulary in chad. This surge took place in southern Chad in several localities, including Goré. However, such a surge in a country is causing questions and concerns, but above all, action. These actions come from different actors, namely the Chadian state, civil society actors, but especially NGOs, especially international ones. These NGOs flock to southern Chad to help the thousands of Central African refugees.

As a result of this finding, we titled our study « The work of international NGOs in the Goré refugee camps in Chad ». This study is both theoretical and pratical. Theoretically, it aims to reflect on the situation of Central African refugees in this part ofthe country and also to study the actions of various humanitarian actors, including international NGOs. In pratical terms, we want to make a statement about the consequences of these actions for refugees and Chad. Thus, these concerns are centererd around a main issue that is the rationale for this study, and it is stated as follows : « How can we understand the work of international NGOs in the Goré refugee camps ? ». To better satisfy this question, we have structured this work on two axes, which are part one and part two. In view of the regulations in force in Chad, any action taken within the borders of Chad by any entity or structure must follow a certain administrative channel wich is considered to be the basis. These foundations provide a mechanis for monotoring and legal guidance inadvance of any discrepancies that may arise from NGO actions. Beyond the foundations, an assessment of the situation of refugees was made prior to the intervention of international NGOs (Part I). Then there is the study of the impact to these NGOs' actions first in the lives of refugees, the the impact on Chad. However, it is important to point out thatall these actions are not without limits, for example, i twas suggested to suggest some solutions in order to remedy them or at least to milgate those limits in order to claim to carry out much more optimal actions (Part two).

1

INTRODUCTION GENERALE

2

I- CONTEXTE DE L'ETUDE

Depuis la première guerre mondiale, la scène internationale est marquée par des crises humanitaires avec pour causes les conflits et les catastrophes naturelles. Les premières années post-guerre froide semblaient apporter l'espoir de paix internationale comme l'a affirmé Francis Fukuyama dans son livre la fin de l'histoire1. Toutefois, cet espoir était de courte durée. Aujourd'hui, nous assistons à une accélération et à la multipolarisation des zones des crises humanitaires dans le monde, avec les nouvelles mutations des guerres. Il s'agit d'une transformation extraordinaire du passage des guerres classiques aux guerres asymétriques2. A partir de 1960, l'Etat postcolonial en Afrique connait des défis sociopolitiques en termes de stabilité et manque à jouer le rôle du pouvoir régulateur, l'on ne cesse de voir la recrudescence des conflits et des guerres, entrainant ainsi des déplacements et des fuites des populations. Le continent africain, à la différence des autres continents, est devenu le terreau fertile des guerres et des crises humanitaires. Sous ce rapport, l'on peut répertorier la crise humanitaire au Darfour3, en République Centrafricaine (RCA), et récemment dans la zone du Bassin du Lac Tchad depuis la montée en puissance du groupe terroriste Boko Haram4 et les conséquences des dérèglements climatiques avec le tarissement du Lac-Tchad.

Ce nouveau climat d'insécurité généralisée, place le Tchad au coeur d'une région conflictogène et une terre d'accueil des réfugiés. D'ailleurs, les chiffres donnés par le Haut-commissariat aux Réfugiés (HCR)5ont fourni un cadre d'illustration.

Et si l'on peut parler des crises humanitaires à travers le monde, il faut toutefois rappeler que pour répondre aux questions qui minent l'humanité, des mécanismes processuels et institutionnels ont été conçus et mis en oeuvre par les acteurs de la scène passant par les

1 Francis FUKUYAMA, La fin de l'histoire, et le dernier homme, Paris, Flammarion 1992. p.452

2 Barthélemy COURMONT, Darko RIBNIKAR, Les guerres asymétriques : Conflits d'hier et d'aujourd'hui, terrorisme et nouvelles menaces, Paris, Presses Universitaires de France, 2002. p.22

3 Marc FRONTIER, Le Darfour, Organisations Internationales et crise régionale 2003-2008, Paris, L'Harmattan, 2009, p.312.

4Pauline GUIBBAUD. BOKO HARAM, Histoire d'un islamisme sahélien. Paris, L'Harmattan mai 2014. p.208. Quelle est donc cette secte Boko Haram ? Fait-elle partie intégrante de ce que l'on appelle communément »l'arc islamique sahélien » ? Il semble en effet que ce groupe ait tissé des liens avec d'autres organisations islamistes sahéliennes notamment AQMI. Elle pose aujourd'hui de graves problèmes sécuritaires et humanitaires au Nigeria, dans les pays voisins et au niveau international. Les civils sont les premières victimes des attentats islamistes et de la violence armée.

5 Rapport de HCR Tchad, « La population totale de réfugiés et demandeurs d'asile est passée de 393161 en Décembre 2016 à 394279 personnes en janvier 2017. Ceci représente une augmentation globale de 1118 personnes composées de 957 nouveaux nés, de 19 nouveaux arrivants et de 142 personnes régularisées au travers des procédures mises en place dans le cadre de l'enregistrement continu », janvier 2017.

3

Organisations Non Gouvernementales qui ont pour vocation la gestion et l'assistance humanitaire. Il s'agit des ONG répertoriées dans le registre des ONG internationales au Tchad telles que : Hebrew Immigrant Aid Society (HIAS), Sahara Conservation Fund (SCF) et biens d'autres. Tenant compte de la nécessité, les ONG ont des prérogatives qui leur permettent d'agir dans les camps, mais parfois leurs actions ne sont pas rationnellement contrôlées et ceci pose un problème de délimitation de leur champ d'action.

Partant de ce postulat, la thématique suivante a été construite : « L'Action des Organisations Non Gouvernementales Internationales dans les camps de réfugiés de Goré au Tchad ». Sur les fondations d'une étude scientifiquement rigoureuse, il est essentiellement important d'identifier les mots clés et de faire la présentation de l'opérationnalisation conceptuelle.

II- DELIMITATION DU CHAMP DE LA RECHERCHE

Tout travail scientifique doit obéir à une certaine délimitation au risque de créer un manque de connaissance approfondie sur la question. Ainsi, de peur de tomber dans un imbroglio sans détour, ce travail ne dérogera pas à la règle et s'inscrit dans la logique de la délimitation tant spatiale que temporelle.

1- Délimitation spatiale

La question des réfugiés est une question qui touche le Tchad dans sa plus grande partie, notamment à l'Est avec les réfugiés du Soudan, dans la région du Lac, puis plusieurs camps au Sud parmi lesquels les camps de Goré qui font l'objet de notre étude. Ainsi, le cadre spatial de l'étude consiste à présenter l'espace géographique dans lequel va être menée l'étude. Comme nous l'avons précédemment énoncé, nous situerons Goré géographiquement et historiquement par rapport au Tchad.

Le canton de Goré est situé à une dizaine de kilomètres de la frontière. Par sa situation géographique, il sert de refuge aux milliers de centrafricains qui sont en quête d'abri suite aux violences perpétrées en RCA. Appelé jadis poste de Goré, la ville de Goré fut créée en 1909 par le capitaine Mercier. En 1992, elle devient la circonscription de la Pendé dépendant de l'Oubangui et un canton en 1926. Par arrêté du 30 avril 1950, Goré est devenu Poste de Contrôle Administratif (PCA). Par décret n°132 du 12 Aout 1964, elle est transformée en sous-préfecture, puis le 23 Octobre 1997, Goré est érigée en commune et devient fonctionnel en

4

Février 1999. Enfin, avec le nouveau découpage lié à la politique de décentralisation, la commune de Goré est devenue chef-lieu du département de la Nya Pendé par décret n°419/PR/PM/MAT/02 du 17 Octobre 2002. Ce département compte 4 sous-préfectures à savoir : Donia, Bekan, Yamodo et Goré rural.

Goré abrite plus de 42.000 réfugiés centrafricains chassés par les violents combats qui ont débuté depuis 2003. Ces réfugiés sont installés dans les camps d'Amboko, de Gondjé, de Dosseye et de Doholo, ils vivent grâce aux nombreuses ONG humanitaires qui les assistent dans le cadre de leur prise en charge. Cependant leur présence influence considérablement l'environnement socioéconomique et a des répercussions sur le développement économique de la localité. La commune de Goré est limitée au Nord par le Département de la Pendé, au Sud par la RCA, à l'Est par le Mandoul et à l'Ouest par les Monts de Lam. La majorité de la population de Goré est chrétienne ou animiste. On note également la présence des musulmans (commerçants et éleveurs) dans cette circonscription. La ville de Goré est animée par des échanges commerciaux internes, facilités par un réseau dense des marchés hebdomadaires et quotidiens mis en place par les autorités traditionnelles et administratives locales. Au niveau national, ces échanges sont développés avec les marchés de Moundou, Doba, Bébedja, Bodo, ainsi que dans les pays voisins notamment M'baimboum au Cameroun et Betoko en RCA. Les principales voies de communication sont le tronçon qui relie la ville de Goré à Moundou construit à base de latérite sur une distance de 112km, qui continue jusqu'en RCA. Depuis plus d'une décennie par sa situation géographique, cette localité a servi de refuge à des milliers des réfugiés centrafricains qui ont fuis les violents combats répétitifs du Nord de la RCA.

2- Délimitation temporelle

Notre étude couvre la période allant de 2013 à 2018. En effet, l'année 2013 est le point de départ du véritable enlisement de la crise centrafricaine. Allant de coups d'Etat en coups d'Etat, engendrant des crises économiques et crises humanitaires. Occasionnant l'instabilité chronique de la RCA, cette situation conduit à l'émergence d'une multitude de groupes armés rebelles. Et depuis 2013, une nouvelle crise politique a surgi, prenant rapidement des dimensions ethniques et religieuses dont les civils sont les premières victimes. Cette prise à partie de la population civile pousse les habitants à fuir les exactions et les représailles pour se réfugier au Tchad précisément au Sud. Alors depuis 2013 jusqu'à 2018 période couvrant notre étude, il y'a eu plus de 42.000 réfugiés qui sont arrivés à Goré. C'est cette affluence qui oblige

5

les ONG internationales à se ruer dans ces camps afin de secourir les réfugiés d'où l'étude de leur action qui fait l'objet de ce travail.

III- CLARIFICATION CONCEPTUELLE

Pour Madeleine GRAWITZ6, « Le savant doit d'abord définir les choses dont il traite afin que l'on sache bien de quoi il est question... ». Quant à PLOUFFE et GUILLEMETTE7, ils pensent que « ces concepts sensibilisateurs favorisent une plus grande acuité dans la lecture des données et permettent au chercheur de reconnaitre ce qui émerge des données ». Pour ce faire, il est impératif de clarifier quelques concepts nécessaires à l'appréhension de notre étude au premier rang desquels on a les concepts d'ONG et de réfugié.

1- Organisation Non Gouvernementale (ONG)

L'Organisation Non Gouvernementale ayant pour acronyme ONG8 est une association à but non lucratif d'intérêt public qui ne relève ni de l'Etat ni d'organisations internationales. Elles n'ont pas le statut de sujet de droit international. Les ONG ont une histoire qui remonte au XIVème siècle. Cependant, l'expression « organisation non gouvernementale » n'est entrée dans le langage courant qu'avec la création de l'Organisation des Nations Unies en 1945 avec les dispositions de l'article 71 du chapitre 10 de la charte des Nations Unies qui donne un rôle consultatif à des organisations qui ne sont ni les gouvernements ni les Etats. Elles sont des entités d'intérêt public à initiative sociale et aux fins humanitaires, qui sont indépendantes de l'administration publique et qui n'ont pas de but lucratif. Elles peuvent avoir plusieurs formes juridiques : association, fondation, coopérative. L'essentiel, c'est de ne jamais chercher à se faire de l'argent, étant donné que ce sont des entités de la société civile qui se basent sur le bénévolat et qui visent à améliorer un aspect donné de la société. Les ONG sont généralement financées au moyen de la collaboration des citoyens, des aides de l'Etat, des revenus, des donations et des legs de la part des membres et des sympathisants. Leur champ d'action peut être local, national ou international. L'assistance sanitaire, la protection de l'environnement, le développement économique, la promotion de l'éducation et le transfert technologique, et biens d'autres domaines. La charte des Nations-Unies reconnaissait déjà à l'époque, en 1945,

6 Madeleine GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Paris, L'Harmattan, 1986, p. 398

7 PLOUFFE et GUILLEMETTE, MTE comme apport au développement de la recherche en art, Université de Québec, 2012, p.96

8 Helen CLARK, 8e Administrateur du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a félicité la journée mondiale des ONG.

6

l'importance des ONG à plusieurs niveaux. Toutefois, il faut retenir que les ONG ne cherchent surtout pas à remplacer ni l'Etat, ni les organismes internationaux. En effet, le but est d'aider à complémenter leurs fonctions9.

Le terme ONG, malgré qu'il soit consacré par l'article 71 du chapitre de la Charte des Nations Unies pose un problème de définition. Marcel MERLE le définit comme « tout groupement, association ou mouvement constitué de façon durable par de particuliers appartenant à divers pays en vue de la poursuite d'objectifs non lucratifs »10. Cette définition semble plus légère ainsi, par la résolution 1996/31, le Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC) a pour sa part défini l'ONG comme : « une organisation qui n'a pas été constituée par une entité publique ou par voie d'accord intergouvernemental, même si elle accepte les membres désignés par les autorités publiques mais à condition que la présence de tels membres ne nuise pas à sa liberté d'expression »11. La définition donnée par l'ECOSOC reste une définition institutionnelle provenant de l'organe des Nations-Unies en charge des ONG en question. Alors, dans un souci de cohérence et du respect des bases juridiques qu'exige ce travail nous retiendront la définition de l'ECOSOC.

2- Refugié

Selon le rapport conjoint du Haut-commissariat aux Réfugiés et du Centre National d'Accueil et de la Réinsertion des Réfugiés (CNARR) du 31 janvier 2017, il y'a en ce jour 391.610 réfugiés au Tchad. Ainsi, pour mieux appréhender la notion, nous retiendrons d'abord la définition de la convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés qui définit un réfugié comme étant : « une personne qui se trouve hors du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle a sa résidence »12. Cette définition est très restreinte et prête à amalgame avec d'autres termes tels que les migrants. Etymologiquement, réfugier vient du latin refugere qui signifie fuir en rebroussant chemin, reculer, chercher un refuge, s'enfuir. Un réfugié est une personne qui a quitté son pays d'origine par crainte de danger (catastrophe naturelle, guerre, persécutions politiques, raciales, religieuses) et qui a trouvé refuge dans un autre pays.

9 Professeur Laurent ZANG, « cours d'Histoire, architecture organisationnelle et gouvernance des ONG » IRIC Master CA2D, 2018.

10 Marcel MERLE, Sociologie des relations internationales, Paris, Dalloz, 4e édition 1988, p.362

11 ECOSOC, Relations aux fins de consultations entre l'Organisation des Nations Unies et les ONG. Résolution 1996/31 du 25juillet 1996.

12 Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés

7

Une définition complète est donnée par la convention de Genève du 24 juillet 1951 selon laquelle un réfugié est une personne « craignant avec raison d'être persécuté du fait de sa race, sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner »13. Cette clarification a été consolidée par d'autres textes juridiques, comme la convention de l'OUA de 1969 sur les réfugiés. Ces textes demeurent les pierres angulaires de la protection des réfugiés. Les principes juridiques de ces documents énoncés ont été intégrés à d'innombrables autres législations et pratiques internationales, régionales et nationales. La convention de Genève de 1951 définit ce qu'est un réfugié et rappelle les droits fondamentaux que les Etats devraient leur garantir. L'un des principes essentiels énoncés par le droit international humanitaire est celui voulant que les réfugiés ne doivent pas être expulsés ni renvoyés vers une situation où leur vie et leur liberté seraient menacées. La protection des réfugiés revêt de nombreux aspects. Ceux-ci comprennent l'assurance de ne pas être renvoyés chez eux face aux dangers qu'ils ont fuis ; l'accès à des procédures d'asile justes et efficaces et des mesures visant à assurer que leurs droits fondamentaux sont respectés afin de leur permettre de vivre dans la dignité et la sécurité tout en les aidant à trouver une solution à long terme. Les Etats assument la responsabilité de les protéger. En ce qui concerne les réfugiés centrafricains, il est important de rappeler que le Tchad est limité au sud par la Centrafrique. De ce fait, il reçoit dans la zone Sud un grand nombre de réfugiés centrafricains. En effet la crise centrafricaine a entrainé la migration forcée des milliers de personnes vers le Tchad notamment à Goré.

IV- REVUE DE LA LITTERATURE

La revue de la littérature permet de consigner le condensé des lectures sur les travaux qui traitent notre thème ou des sujets similaires. Elle permet d'avoir une vision plus large et intellectuellement consistante sur le thème de l'étude ainsi que des thèmes connexes. Selon Olivier LAWRENCE, « la revue de la littérature consiste à identifier les auteurs, les ouvrages et les articles scientifiques qui ont façonné la connaissance dans la discipline donnée sur ce

13 Convention de Genève du 24 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et son protocole additionnel de 1967.

8

sujet précis »14. La revue de la littérature consiste à saisir l'état des connaissances sur un sujet dans un espace cognitif donné, (la science politique, l'histoire, la psychologie, la sociologie, le travail social, etc.). Il faut évidemment connaître les fondements théoriques des problèmes qui ont déjà fait l'objet de recherche et ceux qui restent à résoudre.

De ce fait, un certain nombre de travaux traitent d'une manière ou d'une autre notre thème. Compte tenu du champ vaste et varié de la notion d'ONG ainsi que leurs actions, nous aborderons les travaux précédemment effectués par différents auteurs et qui traitent de la littérature relative à l'action humanitaire des ONG.

? Littérature relative aux ONG en général.

Bon nombre de chercheurs ont abordé les pistes de réflexion sur les ONG. Parmi eux, nous avons François RUBIO dans son ouvrage Les ONG acteurs de la mondialisation15, souligne l'existence officielle et la consécration universelle des ONG par la Charte des Nations Unies. Il mentionne l'intérêt porté par les Nations-Unies (UNHCR, UNICEF, PNUD), et d'autres institutions internationales (Conseil de l'Europe, Organisation des Etats américains, Union Africaine) pour les ONG. Les ONG vont devenir des acteurs ou des partenaires incontournables du paysage politique contemporain dans le domaine du développement, de l'humanitaire, de la défense des droits de l'homme. Elles sont devenues des interlocuteurs des institutions internationales et des gouvernements, des populations et territoires en guerre, drainant à leur compte un portefeuille financier colossal. Cet ouvrage aborde la consécration et le rôle des ONG sur les terrains d'intervention ainsi que leur contribution en tant que partenaires des Etats dans le processus de développement, mais l'on mentionne que l'auteur ne touche que l'aspect lissant des ONG tout en omettant leurs dérives qui souvent font couler beaucoup d'encre notamment sur la question des détournements des fonds et des vivres destinés aux réfugiés sans oublier l'enrichissement abusif des dirigeants de ces ONG. Mais plus précisément en ce qui concerne ce travail, l'auteur n'a pas abordé succinctement la question des réfugiés. Ainsi, le travail se veut un complément à ces manquements énumérés plus particulièrement sur l'aspect de leurs actions dans les camps des réfugiés.

Philippe RYFMAN dans son ouvrage intitulé Les ONG 16 nous fait comprendre que les ONG font quotidiennement l'objet d'une certaine médiatisation en fonction des diverses causes

14 Olivier LAWRENCE, Ferron JULIE, Bedard GUY, L'élaboration d'une problématique de recherche, sources, outils et méthodes, Paris, L'Harmattan, 2005, p.10

15 François RUBIOT, Les ONG, acteurs de la mondialisation, Paris, Scientifique, 2002, p.135

16 Philippe RYFMAN, Les ONG, Paris, La Découverte, 2009, p.128

9

qui sont par exemple le domaine humanitaire, le développement, les droits humains, l'environnement, la santé, le commerce équitable, ainsi que l'éducation. Malgré cette médiatisation et cet activisme quotidien suscitant une large littérature, les ONG restent mal connues. Cet ouvrage met préalablement en exergue l'ancrage historique de ces dernières avant de traiter de l'amalgame que peut causer ce terme pour son appréhension en dépit d'une présence continuelle dans des champs divers et nouveaux. Cependant, il s'efforce à apporter des éléments de réponse à quelques questions primordiales et récurrentes à savoir leur définition, les domaines de compétence, leur financement, la sociologie, leur gestion, leur gouvernance, la concurrence à leur égard, la professionnalisation, les ressources humaines, leur légitimité, la transparence, leur place dans la « société civile », la transnationalisation et les réseaux internationaux. Enfin, il martèle que, si la croissance exponentielle des ONG des pays du (sud) et des pays émergents redessine le paysage non gouvernemental, ces organisations sont désormais en butte à l'hostilité d'un nombre significatif d'Etats, tout en étant plus que jamais partenaires d'autres Etats, d'organisations internationales, de l'Union européenne, de fondations ou d`entreprises17. L'auteur traite des ONG sous tous les angles néanmoins, il souffre d'un regard critique sur ces dernières car il n'aborde pas de l'influence qu'elles peuvent avoir sur le fonctionnement d'un Etat étant donné leur rôle incontesté dans le processus de développement des Etats notamment ceux du sud. S'inscrivant sur la même lancée que l'auteur ce travail a pour but de contextualiser cet ouvrage tout en l'adaptant à la question de recherche qui est la nôtre et concerne particulièrement les camps de réfugié de Goré. Dans un contexte plus restreint le présent travail traitera de la question des ONG allant de leur historique à la délimitation de leur champ d'action tout en énumérant leurs limites et faire des suggestions pour une amélioration de leur assistance aux réfugiés.

Michel DOUCIN dans son ouvrage intitulé, Les ONG : le contre-pouvoir ?18 propose une réflexion approfondie en ce qui concerne leur rôle dans le jeu des acteurs multiples, qu'il s'agisse du rôle qu'elles jouent dans la construction des Etats, de leur légitimité face aux droits de l'homme, ou de bien d'autres aspects de leurs relations avec les autres acteurs de la vie internationale comme dans la vie intérieure des Etats. L'essentiel des témoignages et réflexions porte ainsi sur leur légitimité, notamment en rapport avec les droits de l'homme, et sur leur place dans un jeu à plusieurs acteurs. En ce qui concerne les Etats en développement, l'auteur retient par exemple que la gestion des politiques de développement est souvent devenue un

17 Www.amozon.fr

18 Michel DOUCIN, Les ONG : Le contre-pouvoir ?, Paris, Toogezer, 2007, p360

10

ménage à quatre : Etats, donateurs, multinationaux et bilatéraux, société civile locale et ONG internationale. La masse foisonnante de faits et de réflexions puisée à la source d'une expérience assez unique, confère de fait à l'ouvrage un caractère et une qualité de somme qui le rendent pratiquement incontournable pour celui qui s'intéresse de près aux ONG, et pour le militant, qui entend porter chaque jour un peu plus loin son action. Si cet ouvrage peut être un guide pour quelqu'un qui s'intéresse aux ONG, l'on peut déplorer cependant un manque de concision et de précision qui peut engendrer tout une confusion notamment dans le domaine de leurs actions. Même si l'ouvrage évoque le rôle des ONG dans le développement des pays, il l'évoque d'une manière générale alors le souci de ce travail est de l'aborder dans un cadre succinct à savoir le cas du Tchad très particulièrement.

Henri ROUILLE D'ORFEUIL, dans son ouvrage La Diplomatie Non Gouvernementale, les ONG peuvent-elles changer le monde ?19, s'interroge sur les questions relatives à la survie de la planète et une vie habitable pour tous en son sein. Ensuite prolonge cette interrogation comme suit : Comment atteindre les objectifs du millénaire pour le développement qui visent à réduire de moitié la pauvreté et la malnutrition qui minent les sociétés ? Dans cet ouvrage, il évoque un bon nombre de points allant des questions environnementales aux guerres, il touche du doigt les problèmes qui mettent à mal le bon fonctionnement de notre planète notamment la pauvreté. S'il recouvre un intérêt particulier pour nous en ce qui concerne la réflexion sur le bon fonctionnement de notre monde par l'entremise des ONG, ce livre ne se penche pas véritablement sur la question des réfugiés qui constitue la mamelle nourricière de notre étude ainsi nous nous servirons des quelques réponses apportées aux questions énumérées par R. O. HENRI pour les adapter à notre étude qui concerne les camps de réfugiés, et ceci constituerait une complémentarité entre ces travaux.

Dans son analyse, l'auteur suggère d'inclure l'action des citoyens dans la gestion gouvernementale pour la rendre plus efficace, et l'intervention des ONG dans l'espace publique mondial. L'auteur jette les bases d'une participation plus active des citoyens aux gouvernements du monde, et décrit l'étonnant pouvoir d'influence des ONG au regard de leurs modestes moyens. Cependant, il est vrai qu'il serait envisageable d'inclure les populations dans la gestion gouvernementale mais l'auteur n'a pas élucidé comment faire participer plus précisément un réfugié dans ce processus. Cet ouvrage met en exergue une participation plus

19Henri ROUILLE-D'ORFEUIL, La Diplomatie Non Gouvernementale, Les ONG peuvent-elles changer le monde, Paris, édition de l'atelier, 2006. p. 38

11

globale or, contextuellement l'on doit prendre en compte les réfugiés qui généralement font l'objet de la principale préoccupation des ONG. L'objectif visé par ce travail est de trouver les réponses adéquates à une participation active des réfugiés dans le processus de développement par le biais des ONG internationales.

Laetitia ATLANI-DUAULT et Vidal LAURENT dans le livre Anthropologie de l'aide humanitaire et du développement. Des pratiques aux savoirs, des savoirs aux pratiques20, placent au centre de leurs préoccupations, les hommes et les femmes en action qui font au quotidien leurs sociétés, culture et développement. Ces auteurs relèvent le défi de mettre en relation, les mondes souvent divergents, conflictuels et leur donner un sens, une forme sur lesquels il est possible d'agir. Ainsi, en s'appuyant sur les anthropologues de nationalités diverses penchés, chacun sur un domaine d'intervention : les réfugiés, le monde rural, l'environnement, l'assainissement urbain, la santé, l'alimentation ou le genre, les auteurs nous aident à découvrir comment se déploie l'aide humanitaire et les interventions de développement sur le terrain. L'on déplore dans ce livre l'aspect lissant des ONG sans invoquer une fois encore les dérives de ces ONG qui prennent aujourd'hui de plus en plus de l'ampleur dans les territoires en état de guerre faisant de ces territoires des points stratégiques dans le jeu des puissances.

Laetitia ATLANI-DUAULT dans son ouvrage Les ONG à l'heure de la bonne gouvernance 21a bien démontré cet aspect peu glorieux des ONG dans les Etats où elles interviennent et servant de tremplin aux grandes puissances comme moyen de pression sur les pays pauvres. L'auteure soutient qu'au nom de la « Gouvernance », les pays du Nord et les ONG internationales maintiennent les pays du sud dans un état de dépendance par le canal de l'Aide Publique au Développement (APD). Pour mieux comprendre ce phénomène, elle procède par un ensemble d'interrogations. La première interrogation est de savoir « dans quel sens le terme gouvernance est-il porteur dans les politiques d'Aide Publique au Développement ? »22. Pour mieux satisfaire cette préoccupation, l'auteure procède par l'historique de la notion de « Gouvernance », après l'historique L. ATLANI-DUAULT passe au décryptage du concept avant de le contextualiser dans le domaine des APD. Mais, pour finir, elle pose une question très importante qui constitue le point focal de notre recherche à savoir, la

20 Laetitia ATLANI-DUAULT et Vidal LAURENT, Anthropologie de l'aide humanitaire et du développement, des pratiques aux savoirs, des savoirs aux pratiques. Paris, Armand colin, 2009, p.311.

21 Laetitia ATLANI-DUAULT, Les ONG à l'heure de la bonne gouvernance, Paris, Presses de Sciences Po , 2005, p.3-17

22Ibid, p.04

12

« gouvernance constitue-t-elle une réelle opportunité de changement des pratiques et de la culture politique, ou se réduit-elle à une simple légitimation d'un système mondial voué à la préservation des intérêts du secteur privé des pays du Nord ? ». Cette interrogation, comme susmentionnée porte un intérêt capital pour ce travail. Ainsi, l'on ne se contentera pas de s'interroger mais aussi de proposer des éléments de réponses tout en proposant des pistes de solution.

Jean-Daniel MULLER, dans son livre Les ONG ambiguës, aide aux Etats, aides aux populations,23 mentionne le caractère hétérogène de l'aide non gouvernementale qui suscite bien des déconvenues sur le terrain, à partir des recherches effectuées au Mali et en Mauritanie. Il propose comme solution à l'aide des ONG, des actions coordonnées. Pour lui, la coordination est bon révélateur de la nature paradoxale des relations entre les ONG du Nord et les sociétés du Sud. Cet ouvrage, contrairement aux autres aborde les dérives des ONG mais ne fait pas mention explicitement du cas du Tchad. Pour ce faire notre travail ne consistera pas à aborder les ONG sur leurs aspects pervers mais plutôt de parler de leurs réalisations dans les camps de réfugiés, d'en déceler leurs limites et proposer des idées nouvelles en vue du peaufinage de leurs taches.

Alain PIVETEAU dans son livre Evaluer les ONG 24démontre qu'à partir des années 1980, il y'a eu un déclin institutionnel et économique des Etats, cette situation a renforcé la mise en place de politiques d'inspirations libérales, qui ont mis en lumière une série de projets alternatifs portés par les nombreuses ONG. Mais, étonnamment, la question de l'évaluation reste surprenante en comparaison de la réputation que les ONG ont par ailleurs acquise, tant auprès d'un large public que des acteurs traditionnels de la coopération. Pourquoi procèderait-on à leur évaluation et comment ? Sous quelles conditions les petites opérations de développement des ONG peuvent-elles se prêter à cet exercice critique ? Sont-elles justiciables d'une approche économique, même si elles y sont irréductibles et appellent une pluralité de regards disciplinaires ? En définitive, est-ce qu'une évaluation économique peut contribuer à améliorer les projets des ONG ? L'Ouvrage traite des enjeux d'une évaluation organisationnelle. L'évaluation peut difficilement se réduire à un calcul économique dès lors qu'est reconnu le caractère conflictuel et les effets de cette décision restent soumis à l'incertitude. L'ouvrage conclut aux liens étroits qui existent au sein des organisations, telles

23 Jean-Daniel MULLER, Les ONG ambiguës, aide aux Etats, aides aux populations, Paris, l'Harmattan, 1989. p.250

24 Alain PIVETEAU, Evaluer les ONG, Paris, Kartala, 2004, p.384

13

que les ONG et leurs projets, entre l'évaluation, les dynamiques d'apprentissage et la performance socio-économique. Si l'ouvrage soulève quelques interrogations qui se résument à comment procéder à l'évaluation des ONG pour que leurs actions soient adaptées aux besoins des bénéficiaires, ce travail quant à lui se veut un complément car il envisage proposer des solutions pour un agencement de l'action des ONG plus précisément dans les camps de réfugiés de Goré. Cela pourrait être un parangon pour les actions des ONG en général et dans d'autres camps de réfugiés en particulier.

? Littérature sur l'action des ONG dans les Etats.

Richard BATLEY et Pauline ROSE25, évoquent la collaboration entre les Etats et les prestataires non publics de services de base à savoir les ONG qui retiennent l'attention croissante des agences internationales et des décideurs nationaux. Elle vise à soutenir des objectifs communs pour parvenir à une prestation de service universelle. En se basant sur des recherches menées au Bangladesh, en Inde et au Pakistan. Cet article montre que la collaboration peut porter ses fruits lorsque les ONG ne dépendent pas des sources limitées pour leur financement, et investissement du temps dans la construction d'une relation informelle avec les gouvernements. Non seulement la collaboration peut renforcer la prestation de service par les ONG, mais elle donne également l'occasion à celles-ci de s'engager dans des activités de plaidoyer plus large. L'article donne l'impression que les auteurs parlent des entreprises privées à buts lucratifs, or il serait judicieux de préciser le caractère onéreux de ces prestations notamment en fonction des nécessités des domaines d'intervention de ces ONG. Dans notre contexte, les ONG internationales qui s'installent au Tchad ont pour mission de l'accompagner étroitement dans le processus de développement. Pour ce faire, l'assistance aux réfugiés faisant partie de ce processus et que le Tchad ne disposant pas de moyens nécessaires pour assister les réfugiés de manière efficace compte tenu de sa pauvreté, le concours des ONG est incontournable pour une assistance adéquate. Le présent travail s'inscrit dans le cadre de réflexion sur la question de l'intervention des ONG internationales dans les camps de Goré afin de servir d'exemple sur tout le territoire national et dans divers domaines.

Dans l'ouvrage d'Inger ULLEBERG26, l'auteur scrute le cas des ONG qui sont devenues l'un des principaux prestataires de service public dans les pays où l'Etat n'est pas en mesure de fournir les services nécessaires. Désormais le discours international de

25 Richard BATLEY et Pauline ROSE, « Collaboration in delivering education : relations between governements and NGOs in South Asia », Birmingham, Developpement and practice, p. 579-585

26 www.iiep.unesco.org

14

développement est dirigé de plus en plus vers l'amélioration de compétence et de moyen pour renforcer la société, de ce fait les ONG sont contraintes de s'adapter à cette nouvelle donne. Ce travail fait un examen sur le rôle des ONG dans le développement international à travers l'amélioration des capacités, domaine où les ONG sont de plus en plus impliquées. Les activités de développement des capacités complètent les fonctions principales des ONG. La nouvelle interprétation du développement des capacités peut affaiblir l'Etat central, mais peut également le renforcer sur le long terme. Les ONG pouvant apporter des changements s'adaptent plus aisément que les Etats ; elles peuvent parfois faire obstacle aux efforts de l'Etat. Si les ONG ont un impact non négligeable sur le processus de développement des capacités, elles continuent de souffrir du manque de ressources et de l'éloignement de l'Etat. Dans tous les cas, les activités des ONG sont de plus en plus diverses. Dans ce travail, l'on constate que les ONG se substituent à l'Etat, ce qui leur accorde plus de force qui leur permettra de le maintenir dans une situation de dépendance et si l'auteur évoque les avantages de l'Etat à long terme dans cette situation, il ne faut pas oublier que cela peut être un couteau à double tranchants et donc la dépendance risquerait d'être pérenne.

? Littérature relative à l'action des ONG en Afrique.

Mikako NISHIMUKO dans son article intitulé « The role of non-governemental organisations in achieving education for all : the case of Sierra Leone »27, aborde le cas de la Sierra Leone qui est l'un des pays les plus pauvres du monde, qui a connu la guerre civile de 1991 à 2002. Les efforts de ce gouvernement à améliorer le secteur de l'éducation restent faibles et 30% des enfants n'ont pas accès à l'enseignement primaire. Ce document traite du rôle des ONG et des organisations confessionnelles dans ce secteur et notamment de leur appui au gouvernement. L'auteur conclut que le travail mené en collaboration entre le gouvernement, les ONG et les organisations confessionnelles a permis des progrès vers la réalisation de l'éducation pour tous. Dans un premier temps, ce document n'est que descriptif comme si c'était un rapport d'activité, l'auteur n'a pas lui-même préconisé des pistes de solutions ou proposé des idées afin d'améliorer davantage ce travail conjoint entre l'Etat et les ONG. Et dans un second temps, il n'a malheureusement évoqué que le domaine éducatif pourtant après la guerre, il y'a eu l'intervention des ONG dans plusieurs secteurs que l'auteur pourrait aborder, surtout les besoins fondamentaux des réfugiés qui sont entre autre la question de

27Mikako NISHIMUKO, « The role of non-governemental organisations in achieving education for all : the case of Sierra Leone », journal de comparaison et de l'éducation internationale, 2009, p.281-285

15

l'alimentation, d'abris, de sécurité. Alors, ces manquements recouvrant un intérêt particulier, feront l'objet de notre étude.

Brehima TOUNKARA dans son travail intitulé, « le rôle des ONG dans l'éducation de base au Mali »28, indique qu'au Mali, souvent cité en exemple pour l'implication des ONG dans le développement de l'éducation, le rôle des ONG est apprécié de diverses manières. La nature des relations entre les bailleurs de fonds, les représentants de l'Etat et les ONG fluctue selon l'envergure nationale ou internationale de ces dernières. La problématique de l'intervention des ONG dans le secteur de l'éducation, essentiellement axée sur le développement des écoles communautaires, aboutit à un certain nombre de constats souvent controversés. Les ONG sont en mesure de s'implanter dans le secteur quand une politique de tolérance est mise en oeuvre tôt. L'auteur préconise de légiférer et de définir les cadres et les modalités d'intervention dans le développement de l'éducation. Ce travail nous permet effectivement de comprendre l'un des secteurs d'intervention des ONG en Afrique mais l'on déplore son caractère restreint car le secteur de l'éducation n'est qu'une infime partie d'intervention et d'action des ONG internationales en Afrique.

? Littérature relative à l'action des ONG au Tchad

Dans son article, « Darfour : Des réfugiés indésirables au Sud comme au Nord ? »29, Marc-André LAGRANGE explique qu'en 2003 le conflit du Darfour a regagné en intensité et en retentissement sur la scène internationale. Ce regain de violence a provoqué l'exode de 200 000 Soudanais, principalement issus des ethnies Massalite et For, dans l'Est du Tchad. Ces réfugiés sont accueillis dans 12 camps où ils sont sous la protection des Nations unies. Cette opération humanitaire sous l'égide du Haut-commissariat aux Réfugiés (HCR) et financée par la communauté internationale est mise en oeuvre par des ONG nationales et internationales. Dans un premier temps, les autorités administratives locales firent face à une intrusion d'acteurs étrangers (le HCR et les ONG internationales, qui interviennent dans son sillage) dans leur espace de pouvoir, avec bienveillance malgré la perte de contrôle (théoriquement temporaire) que cette intrusion induisait. À cette restriction officielle d'autorité s'ajoute l'apport dans la région d'une population allogène qui, malgré sa nationalité tchadienne, ne fut pas forcément la bienvenue. Les ONG internationales amenèrent, en effet, du

28Brehima TOUNKARA, « Le rôle des ONG dans l'éducation de base au Mali », USAID, ROCARE, Bamako, 2001, p.40

29Marc-André LAGRANGE, « Darfour : Des réfugiés indésirables au Sud comme au Nord ? », Paris, Afrique contemporaine, 2006, P.151 à 161.

16

personnel tchadien et en partie originaire du sud, donc non musulman. Ne pouvant trouver du personnel qualifié sur le lieu d'intervention, les ONG internationales font appel à du personnel recruté dans les capitales, sur la base de leurs compétences et ce sans tenir compte des particularismes locaux. Or au Tchad le clivage Nord/Sud étant très affirmé, ce personnel fit souvent figure d'« étrangers de l'intérieur » pour les autorités locales

L'arrivée massive de réfugiés a bien évidemment déséquilibré l'économie précaire des populations hôtes en accroissant la concurrence pour l'accès à la terre et à l'eau. Dans cet environnement de pauvreté, les tensions entre hôtes et réfugiés ne tardèrent pas à se manifester en dépit des liens ethniques. Cette cohabitation tendue et forcée engendre une interrogation à savoir le retour ou le rejet des réfugiés ? Mais dans son plan d'action pour 2006, le HCR prévoit le retour d'au moins 20 000 réfugiés soudanais au Darfour. Pour l'administration tchadienne, au-delà des considérations de sécurité, l'objectif est le même.

V- OBJECTIFS D'ETUDE

Dans le souci de rester dans les limites de l'exigence de la recherche scientifique, notre travail se fixe des objectifs dont un objectif général et des objectifs spécifiques.

1- Objectif général

Le présent travail vise à comprendre les modalités d'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés au Tchad et d'en déceler les limites car dans bon nombre de cas, les ONG internationales débarquent sur leurs terrains d'opération, notamment au Tchad avec une puissance financière colossale leur ouvrant toutes les portes et bénéficient des autorisations avec une facilité déconcertante qui souvent nous amène à nous interroger sur les limites de leur champ d'action ainsi que leur efficience.

2- Objectifs spécifiques

En ce qui concerne les objectifs spécifiques, ils visent entre autres à :

- Analyser les modalités tant administratives que légales d'autorisation de fonctionnement des ONG internationales au Tchad ;

- Délimiter les champs d'actions des ONG internationales ;

- Appréhender les mécanismes de suivi-évaluation des projets de ces ONG ;

17

- Déceler les limites de ces actions et d'en proposer des solutions pour l'accomplissement d'une mission efficiente au service des bénéficiaires à savoir les réfugiés.

VI- PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

La problématique est définie selon Robert PINTO et madeleine GRAWITZ comme étant« l'approche ou la perspective théorique que l'on décide d'adopter pour traiter le problème posé par la question de départ»30.Cette clarification est bien en adéquation avec notre travail car pour l'aborder avec diligence, il serait judicieux de procéder par un certain nombre d'interrogations qui nous permettront de mieux orienter notre étude.

1- Problématique

Depuis 2013, le nombre des réfugiés centrafricains dans les camps de Goré a considérablement augmenté, cette situation pose un réel problème d'assistance de ces derniers malgré les énormes efforts consentis conjointement par l'Etat tchadien et les ONG internationales. Tenant compte du nombre des réfugiés, il y'a également un nombre pléthorique des ONG internationales qui interviennent dans ces camps afin d'assister ces personnes. Cependant, pour qu'une ONG internationale puisse s'implanter au Tchad et puisse mener des activités, elle est soumise à un certain nombre de formalités administratives qui sont assorties de conditions. Ces conditions font office de sureté et procurent un caractère coercitif et contraignant à ces textes et servent de ligne directrice aux ONG dans l'accomplissement de leurs tâches.

Certes, les ONG sont présentes et actives dans les camps de réfugiés de Goré, mais après des enquêtes menées auprès des réfugiés, l'on constate des plaintes en ce qui concerne le déploiement de l'aide, la non prise en compte des réalités locales malgré des multiples études et enquêtes consistant à s'enquérir de la réalité et prendre connaissance des besoins des réfugiés.

Ce constat a conduit à une réflexion qui aboutit à un questionnement :

Question principale : Comment appréhender l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré?

De cette question principale découlent deux questions secondaires

30Robert. PINTO et Madeleine GRAWITZ, Méthodes de sciences sociales, Paris, Dalloz, 1964, p.54

18

Question secondaire 1 : Comment s'effectue le déploiement des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré ?

Question secondaire 2 : Quels sont les impacts de ce déploiement dans le quotidien des réfugiés ?

2- Hypothèses

L'hypothèse est définie par Madeleine GRAWITZ comme « une proposition de réponse à la question posée. Elle tend à formuler une relation entre des faits significatifs »31. Nous dégagerons naturellement une hypothèse centrale d'une part et des hypothèses secondaires d'autre part.

Hypothèse principale : Les actions des ONG internationales dans les camps de Goré sont animées par le souci de la protection internationale conformément à la Déclaration Universelle de Droit de l'Homme. Ces actions ont aussi pour but d'assister les réfugiés notamment sur les questions d'ordre alimentaire, sanitaire, et éducatif ; tout en identifiant les défis auxquels l'assistance et la protection des réfugiés sont confrontées afin d'explorer les possibilités de leur renforcement au moyen de nouvelles approches, qui respectent les préoccupations et les contraintes de l'État tchadien.

Hypothèse secondaire 1 : Le déploiement des ONG internationales dans les camps de Goré s'effectue sur la base d'un certain nombre de mécanisme administratif et d'instruments juridiques qui l'encadrent, ensuite l'effectivité de ces actions sur le terrain suit un canal précis propres aux ONG internationales notamment par les programmes, les projets et les plans de réponse.

Hypothèse secondaire 2 : Le déploiement des ONG a des conséquences positives dans la vie des réfugiés, car il permet non seulement d'assurer leur protection mais aussi d'assurer les besoins vitaux à savoir la satisfaction des besoins en eaux, en nourriture, en éducation, en santé et des activités connexes telle que l'agriculture.

VII- CADRES THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE

La mise en corrélation du cadre théorique et méthodologique de ce travail permet de mieux assimiler les enjeux de l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés au

31 Madeleine GRAWITZ, Op Cit, p.353

19

Tchad. La théorie, est une expression systématique et cohérente de la réalité32. Selon Madeleine GRAWITZ, la méthode est « l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre qu'elle poursuit, les dénombre, les vérifie »33. En principe, il existe deux principales grilles théoriques, notamment celles relatives aux droits de l'homme fondées sur le positivisme juridique. L'autre grille repose sur les théories relations internationales (R.I). Dans le cadre de ce travail, nous allons nous intéresser à quelques théories des RI, à savoir l'approche Transnationaliste, Réaliste, et Néolibéraliste.

A- CADRE THEORIQUE

Les Relations Internationales en tant que science sociale et autonome se définissent par leur objet, ce par quoi la discipline se constitue.

Les théories des Relations Internationales sont un ensemble cohérent et systématique des propositions ayant pour but d'éclairer la sphère des relations sociales que nous nommons internationales34. Elles sont donc la simplification de la réalité rendant compte des phénomènes compliqués et servent à faire accepter une certaine lecture du monde aux autres. Pierre-Marc DAIGNEAULT est éloquent lorsqu'il affirme que « la théorie constitue une lentille conceptuelle qui permet de simplifier le réel en distinguant ce qui est important de ce qui ne l'est pas »35. C'est selon cette optique que notre étude s'inscrit dans le registre des théories du transnationalisme (1), le réalisme (2) et le néolibéralisme (3).

1- Le transnationalisme

Ce paradigme de transnationalisme est développé par Robert KEHOANE et Joseph NYE pour qui, « le phénomène des relations internationales n'est pas le seul fait des entités étatiques, mais aussi celui des autres acteurs du système international36 ». De plus ils poursuivent en disant qu'il existe « des relations transnationales. Contacts, conditions, et interactions transfrontalières qui ne sont pas contrôlés par les organes centraux de la politique

32Philippe BRAILLARD, Théorie des Relations Internationales, Paris, PUF, 1997, p13-14

33 Madeleine GRAWITZ, Méthodes des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 11e édition, 2001 p.398

34 BRAILLARD, Théorie des Relations Internationales, Paris, P.U.F, 1977. p.48

35 Pierre-Marc DAIGNEAULT, « Les approches théoriques en évaluation », Incahiers de la performance de l'évaluation Printemps, N°4, 2011, p.12

36 Robert KEHOANE, Joseph NYE, Transnational relations and world politics, cités par D.BATTISTELLA, Théories des relations internationales, Paris, Presses des sciences po, 4e édition, 2012, p.225.

20

étrangère des gouvernements »37. A cet effet, l'affluence des réfugiés n'est pas encadrée par les normes étatiques. Elle est la volonté des populations désireuses de s'établir ailleurs que dans leur pays d'origine. Elle relève du transnationalisme car il y'a à la base une traversée des limites d'une frontière nationale indépendamment de la volonté de l'Etat hôte, mais aussi l'intervention des autres acteurs en l'occurrence les ONG et les individus.

Cette théorie nous permet de montrer la place déterminante des nouveaux acteurs dans la politique étrangère. Marie-Claude SMOUTS38 en est l'une des principales théoriciennes. Sa mobilisation va permettre de comprendre pourquoi l'Etat ne détient plus le monopole en matière des relations internationales. Il s'agit d'analyser les actions des ONG internationales dans un Etat à savoir le Tchad ainsi que le comportement de ce dernier face à ces actions. La théorie du transnationalisme permet de comprendre l'importance et la place des individus dans la structuration des systèmes politiques mondiaux, particulièrement dans les Etats en ce qui concerne le respect du droit à l'établissement39 notamment des réfugiés. Même si le traité de Westphalie consacre le principe de la souveraineté étatique, les acteurs non étatiques jouent un rôle déterminant sur la scène internationale. Il sied pour cela de voir comment les rassemblements de personnes lors d'un colloque ou après une décision prise par l'Etat, font fléchir les politiques étatiques.

Certes, dans les relations internationales, il y'a des acteurs non étatiques mais il serait judicieux de relativiser tout cela. L'Etat est communément défini comme « une collectivité qui se compose d'un territoire et d'une population soumise à un pouvoir politique organisé »40 se caractérisant par la souveraineté41. L'individu qui est le réfugié et les ONG lui sont soumis, et l'Etat devient à la fois leur mandataire. Mais avec le transnationalisme, dans le cadre de cette étude, l'individu en l'occurrence s'émancipe de l'Etat, il viole les règles de l'Etat en ne s'y soumettant pas ; puisqu'il décide d'entrer dans un territoire sans la permission des autorités. En somme, cette situation se transforme en un thème de sécurité par excellence : crainte de l'invasion démographique, de la perte de contrôle des frontières, des altérations de l'identité culturelle, enfin de la déliquescence de l'Etat providence.

37Robert KEHOANE, Joseph NYE, Transnational relations and world politics, cités par D.BATTISTELLA, Théories des relations internationales, Paris, Presses des sciences po, 4e édition revue et argumentée, 2006, p.194 38Marie-Claude SMOUTS, Les nouvelles relations internationales. Pratiques et théories, Paris, Presses de sciences po, 1998, p.410

39Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale du 09 Janvier 2001

40Ch. ROUSSEAU, L'indépendance de l'Etat dans l'ordre international, Paris, RCADI, 1948, p167-178. 41 P. DAILLIER, M. FORTEAU, A. PELLET, Droit International Public, Paris, LGDJ, 2009, p.450

21

2- Le réalisme

Le réalisme est un paradigme dominant des relations internationales depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Même s'il a été l'objet d'attaques et de remises en cause, la plupart de chercheurs ne peuvent s'empêcher de se reconnaître dans l'aveu émis en son temps par Martin WIGHT : « De nos jours, nous sommes tous réalistes42». Justement parce que le réalisme a su s'adapter et maintenir sa suprématie sur la discipline. Cette théorie a pour principaux auteurs : Thucydide d'Athènes, Machiavel Nicolas, Thomas Hobbes, Raymond Aron, Hans Morgenthau, etc. Pour Raymond ARON43, l'Etat est considéré comme l'acteur unitaire et rationnel des relations internationales. Ce paradigme admet l'existence d'autres acteurs, mais ces derniers dérivent leur existence et leur importance relative des Etats, car leurs actions ne peuvent être comprises que dans le contexte d'un système composé d'Etats souverains44.

L'approche stato-centrée des relations internationales fait de l'Etat le concepteur de toute politique nationale et étrangère, le seul enclin à créer des mécanismes de suivi, de gestion et de protection de sa population ainsi que tous les résidents de son territoire. De même, le concept d'intérêt national, comme motivation principale de toute politique étrangère de l'Etat peut se voir dans la matérialisation du souci de préserver ses ressortissants nationaux de l'affluence d'une vague de population d'un pays voisin fuyant la guerre. Elle va permettre donc de choisir les motivations de l'Etat tchadien dans l'exercice de la protection de son territoire exposé à un envahissement d'une population étrangère susceptible de lui créer des problèmes d'ordre sécuritaire et socioéconomique.

La théorie réaliste est l'une des grilles d'analyse qui rentre dans le moule de ce travail de recherche en ce sens que nous aurons à étudier les ONG internationales intervenant au Tchad. Cette théorie place l'Etat comme une entité animée par la maximisation de ses intérêts tout en affirmant sa suprématie et son hégémonie sur tout et tous ceux qui se trouvent dans son espace. De ce fait, étant donné que les ONGI interviennent au Tchad, bien que cela soit dans un but humanitaire, l'Etat tchadien dans le souci de protéger ses populations, ce qui entre effectivement dans le cadre de ses prérogatives, veille à être épargné de toute éventualité de

42Raymond ARON, Paix et guerre entre les Nations, Paris, Calmann-Lévy, 1984, cité par Dario BATTISTELLA, Théorie des Relations Internationales, Paris, Presses de la Fondation Nationale de Sciences Politiques, 2006, p. 113

43Dario BATTISTELLA, Théorie des relations internationales, Paris, Presses de la fondation nationale des sciences politiques, 2006, p.113

44 M-C SMOUTS, Dario BATTISTELLA, Pascal VENNESSON, Dictionnaire des relations internationales, Paris, Dalloz, 2006, p.453-454.

22

surprise de la part des ONG dans l'accomplissement de leur mission. Motif qui anime le Tchad à contrôler et encadrer toutes les actions des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré.

3- Le néolibéralisme

Le courant néolibéral a eu en France une vie particulièrement brève avec le colloque Walter Lippmann de 1938 à la fin des années soixante45. Sa création tient à une volonté de réagir à la domination des idées planistes et dirigistes de la fin des années trente et de montrer que la manière la meilleure de faire face aux problèmes de l'heure résidait dans un libéralisme reconstruit. Parmi les principaux auteurs de ce courant on compte Jacques RUEFF un disciple de Clément COLSON, Maurice ALLAIS, Louis BAUDIN et Daniel VILLEY.

Ce faisant, Caroline BROUDIC46 pourrait bien nous aider à comprendre, par un détour par les politiques de développement, ce qui se joue dans la « libéralisation de l'humanitaire » par l'entremise des ONG. L'aide humanitaire et le développement sont fréquemment traversés par de nouvelles sémantiques à l'apparence neutre. Elles s'inscrivent dans une politique affichée de réduction de la pauvreté et/ou des « vulnérabilités » et se structurent autour de termes tels que « gouvernance », « réduction des risques », « changement climatique », « protection et assistance des réfugiés ». Si, dans les années 1980-1990, des mouvements alternatifs portés par la société civile à l'image des altermondialistes émergeaient, laissant entrevoir l'éventualité d'autres modèles économiques, force est aujourd'hui d'admettre que la doctrine libérale est dominante. Le modèle néolibéral se propage sans grande confrontation idéologique et en s'appuyant même sur des acteurs tels que les Organisations internationales et les ONG portant des valeurs parfois en contradiction. Il s'agit d'apporter des éléments de réponse aux deux questions suivantes : Les ONG ont-elles pleinement conscience du modèle auquel elles participent et y adhèrent-elles ? N'y a-t-il pas une confrontation entre les valeurs et principes défendus par les ONG et les actions auxquelles elles participent ?

La protection sociale et l'assistance aux vulnérables font partie des mesures utilisées depuis une quinzaine d'années par les institutions internationales, telle la Banque mondiale, dans les pays en développement. Il pose également une question éthique sur la légitimité des

45Francis Urbain CLAVE, Walter LIPMAN et le Néolibéralisme de la cité libre, Paris, Cahiers d'économie politique, 2005. p 79 à 110.

46 Caroline BROUDIC, « Les ONG, cheval de Troie du Néolibéralisme ? », Humanitaire, Paris, 2014, p.64 à 75

23

ONG à réaliser des programmes de protection sociale tandis que la redistribution est une des prérogatives de l'État. Il ne s'agit pas de remettre en question le bien-fondé de la protection sociale en général, mais au contraire de défendre l'idée qu'il n'existe pas une approche unique transposable à tous les pays et que la préférence pour un modèle est politique et vient d'un choix de société. Il relève en quelque sorte de la souveraineté de l'État. Enfin, il s'agit de poser la question du rôle des ONG et notamment de s'assurer qu'elles ont bien conscience du modèle auquel elles participent, et ce d'autant plus qu'elles sont aujourd'hui l'un des principaux acteurs de la mise en oeuvre de cette politique de développement des Etats. La technicité grandissante de nombreuses ONG en réponse à des programmes de plus en plus complexes a pu les détourner d'une réflexion politique sur le sens de leur action. Plus qu'un éloignement du champ politique des individus qui les constituent, la dépolitisation des ONG est plus probablement le fait de leur forte dépendance à des bailleurs institutionnels porteurs d'un modèle uniformisé. La dépolitisation des ONG participe également à leur instrumentalisation. Les exigences pour évaluer la qualité des projets ont fortement augmenté ces dernières années, mais ces évaluations ne disent rien du modèle qui est promu à travers chacune de ces actions. En plaçant les ONG hors du champ politique et sur le terrain de l'universalité des valeurs, la critique reste possible, mais la contestation devient embarrassante, voire suspecte. On ne saurait en effet contester le bien-fondé de son action puisqu'elle repose sur des valeurs humanistes et universelles : « Nés après la Révolution française, les Droits de l'homme sont devenus depuis les années 1980 l'antithèse même de tout engagement révolutionnaire ». Le seul engagement valable et désintéressé est alors une cause humanitaire. De ce point de vue, l'humanitarisme est un peu l'idéologie d'une ère qui se voudrait «post-idéologique».

Les ONG qui s'inscrivaient parfois dans une démarche contestataire se retrouvent ainsi l'instrument du modèle qui génère les tensions auxquelles elles tentent de répondre. En prendre conscience permettra de s'en affranchir et de regagner en indépendance.

Ainsi, les ONG internationales au Tchad, grâce à leurs actions dans les camps de réfugiés jouent un rôle prépondérant dans la stabilisation du Tchad et la maitrise du flux des réfugiés dans son territoire. Ceci contribue inéluctablement à sa politique de développement.

24

B- CADRE METHODOLOGIQUE

La méthodologie dans un sens plus large est « l'ensemble des opérations intellectuelles par lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités qu'elle poursuit, les démontre, les vérifie47 ». Plutôt qu'une fin en soi, les approches méthodologiques constituent des plans d'observation, des moyens d'investigation auxquels est subordonné l'objet étudié pour atteindre une finalité qui est le but de la recherche. Le bon usage de la méthode renforce à coup sur la fiabilité des résultats d'une étude. Elle s'apparente alors à un moyen, un outil permettant au chercheur de voir loin et clair. Ainsi, pour les commodités de notre travail, nous procèderons à deux méthodes qui sont celles de la technique de la collecte des données (1) et l'analyse des données collectées (2).

1- La technique de collecte de données

Appelée observation documentaire, cette méthode consiste à consulter des documents dans le but d'extraire des informations sur notre travail. Nous avons procédé préalablement à la relecture de nos cours magistraux, ensuite nous nous sommes ressourcés dans diverses bibliothèques tant physiques que virtuelles. Pour ce qui est du physique, nous citerons en premier lieu la bibliothèque de l'Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) dans laquelle nous avons consulté des documents, des ouvrages, des rapports ainsi que des mémoires qui font mention de notre sujet d'étude, il en est de même avec la bibliothèque de l'Université Catholique d'Afrique Centrale, Institut de Yaoundé (UCAC), celle du Centre d'Etude et de Formation pour le Développement (CEFOD) au Tchad ainsi que celle de l'Institut Français du Tchad (IFT). Quant aux bibliothèques virtuelles, il s'agit des consultations de différents sites appropriés. Elle nous a été d'une grande utilité et a été l'occasion pour nous de sélectionner des données pertinentes sur notre thème de travail.

Ensuite des enquêtes sur le terrain selon la même technique de collecte de données notamment avec l'entretien de différentes personnes à savoir le Directeur et l'ensemble du personnel de la Direction des ONG et affaires Humanitaires (DONGAH) du Ministère de l'Economie et de la Planification du développement du Tchad. Ensuite tour à tour les Représentants du MSF, de ACF/France, de Secours Islamique/France car étant en stage à la DONGAH l'on avait la possibilité ainsi que la facilité de s'entretenir avec ces responsables

47 Madeleine GRAWITZ, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1979, p.34.

25

puisqu'ils ont été courtois et ouverts. Il y'a aussi quelques témoignages des réfugiés des camps de Goré. Puis l'observation directe qui nous a permis d'évaluer la réalité des faits dans l'optique de la vérification des informations collectées.

2- La technique d'analyse des données

L'analyse des données est selon L. BARDIN est une « technique mise au point par et pour les sciences humaines visant une lecture seconde d'un message pour substituer à l'interprétation intuitive ou interprétation construite48 ». Nous avons appliqué une analyse de contenu à plusieurs ouvrages, ceci nous a permis d'obtenir des données ayant contribué à la réalisation de ce travail. Ainsi, les entretiens ont été une très grande source d'information et ont participé tout en jouant un rôle justificatif le long de ce travail. Néanmoins, il serait prétentieux de dire que tout ceci a été effectué dans la plus grande quiétude car justement l'on a fait face à quelques difficultés. Pour ces difficultés, il y'a en tête le contexte socioéconomique actuel du Tchad qui n'a pas du tout facilité les taches notamment pour le voyage et le séjour dans les camps mais avec ténacité et détermination nous sommes parvenus à nous y rendre et collecter les informations nécessaires. Ensuite, l'on soulignera la réticence voire la méfiance des réfugiés qui d'ailleurs est justifiée au vu de toutes les situations qu'ils ont subies d'une part et d'autre part les représentations sociales49 qu'ils peuvent avoir sur le fait qu'un individu puisse les interroger sur leur situation peu importe la présentation personnelle au préalable de l'entretien.

VIII- ANNONCE DU PLAN

Le présent travail sur le thème « l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré au Tchad » sera composé de deux grandes parties dont l'action des ONG : Une dynamique universelle (Première partie) puis l'analyse de l'impact de l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré(Deuxième partie).

48 Laurence BARDIN, « L'analyse de contenu »,In communication et langages, vol35, N°1, 1977, p.123-124

49 Jean-Claude ABRIC, Méthodologie de recueil des représentations sociales, Paris, PUF, 1994, p.21.

PREMIERE PARTIE

PREMIERE PARTIE

L'ACTION DES ONG AU TCHAD : UNE DYNAMIQUE LACTION DES ONG AU TCHAD : UNE DYNAMIQUE UNIVERSELLE

26

27

Selon Jean-Jacques Rousseau, l'homme nait bon mais c'est la société qui le corrompt50. Au vu de cette assertion, l'on en déduit que la vie en société est une question de solidarité, d'où l'histoire de la solidarité humaine est aussi vielle que le monde. Cette solidarité a existé sous diverses formes structurées ou non. En ce qui concerne la forme structurée de la solidarité universelle l'on notera l'assistance apportée aux membres d'une communauté ou un groupe précis suite aux catastrophes telles que les guerres, la famine ou les catastrophes naturelles. Cette solidarité évolua en franchissant le cap restreint sur le plan local pour atteindre le niveau national ensuite transnational ou international.

La fin des 1950 et le début des années 1960 sont marqués par les indépendances de pays africains, dont le Tchad51 qui entrent dans l'échiquier international. Ces Etats qui viennent d'accéder à l'indépendance ne sont que des pays pauvres et donc ont besoin de se développer notamment sur le plan socio-économique. Ainsi, ils sollicitent l'aide ou l'assistance des pays riches appelés pays du Nord52 afin de les aider à sortir de cette situation de pauvreté. Les Nations Unies interviennent par le biais de la création des programmes et Organisations ayant pour but de combler ce déficit. La société civile des pays développés manifeste un élan de solidarité à l'égard des populations nécessiteuses et vulnérables des pays africains, ainsi que des organisations non gouvernementales d'origine occidentale affluent progressivement dans l'optique de porter secours aux personnes défavorisées. Les premières ONG Internationales s'installent au Tchad dans les années 1960 et y mènent des activités à but non lucratif et d'intérêt général comme inscrit dans leur feuille de route.

De nos jours, les ONG internationales représentent des acteurs majeurs dans le processus du développement au Tchad en général et très particulièrement dans les camps de réfugiés de Goré. Alors il serait judicieux dans cette partie d'élucider les fondements et l'état des lieux de l'action des ONG internationales au Tchad (Chapitre I) avant de nous pencher sur leur opérationnalisation (Chapitre II).

50Jean-Jacques ROUSSEAU, Du contrat social, ou principes du droit politique, in Collection complète des oeuvres, Genève, 1780-1789, vol. 1, in-4°, édition en ligne www.rousseauonline.ch, version du 7 octobre 2012

51Roland COLIN, Au Tchad, mirages et déboires d'une révolution démocratique espérée : 1968-1972, Paris, Présence Africaine, 2015 p.33 à 53

52Moise TSAYEM DEMAZE, Le protocole de Kyoto, le clivage Nord-Sud et le défi du développement durable, Paris, l'Espace géographique, 2009, p.27

CHAPITRE I : LES FO T L'ETAT DES LIEUX DU

CHAPITRE I : LES FONDEMENTS ET L'ETAT DES LIEUX DUDEPLOIEMNT HUMANIT S ONG INTERNATIONALES AU
DEPLOIEMENT HUMANITAIRE DES ONG INTERNATIONALES AU
TCHAD
TCHAD

28

La solidarité internationale a connu une évolution singulière de même que les pratiques et les méthodes liées à cette pratique. Ceci a permis de voir apparaitre plusieurs sources qui vont des considérations historiques à celles contemporaines qui mettent en valeur la philanthropie, la religion, ainsi que les sciences sociales telles que la philosophie, la sociologie, et le droit international. Une recherche efficiente de la solidarité internationale signifie une organisation logique et structurée de ces divers fondements. Ainsi, pour parler des fondements de l'action des ONG, il est judicieux de prendre en compte les fondements historiques et sociologiques mais aussi de considérer les instruments juridiques qui encadrent ces actions et les mécanismes institutionnels veillant à l'observation efficace de ces instruments juridiques.

Considérant la présence massive des ONG internationales à Goré, l'on procédera à un état de lieux pour s'enquérir des réalisations et des réalités sur les terrains d'opérations à savoir les divers camps de réfugié de la région.

Dans le souci d'une structuration pertinente nous procéderons préalablement à l'étude des fondements de l'action des ONG internationales au Tchad (Section I) avant de nous pencher en second temps sur l'état des lieux des camps de réfugiés de Goré (Section II).

SECTION I : LES FONDEMENTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES

AU TCHAD

Les ONG incarnent l'esprit de solidarité entre les hommes. Pour aller à leur source, il faut rechercher dans le temps les traces de la manifestation de cette solidarité. Elles apparaissent dans le domaine religieux ; elles sont présentes sur les champs de bataille ; elles viennent de la philosophie, elles s'observent dans le renforcement du sentiment de coopération observé après les guerres et qui donne naissance aux organisations internationales gouvernementales. Ensuite, sociologiquement, face aux malheurs que sont les catastrophes naturelles et les guerres, l'aide s'exerçait avant tout dans le cadre familial, patriarcal ou professionnel53. Cette aide primordiale est instituée dès l'organisation des premières sociétés et a progressivement évolué vers d'autres formes d'assistance plus visibles, car plus organisées et

53Gregor STANGHERLIN, « Les organisations non gouvernementales de coopération au développement », Paris, Courier hebdomadaire du Centre de recherche et d'information sociopolitique, 2001, p.5 à 59

29

institutionnalisées. Partant de ces considérations nous parlerons dans le premier paragraphe des fondements historiques et sociologiques des ONG, puis dans le second des instruments juridiques et les mécanismes institutionnels régulant l'action des ONG au Tchad.

Paragraphe I : Les fondements historiques et sociologiques de l'action des ONG

internationales

Les prémices des ONG sont fondées sur les dogmes religieux dominants et la philosophie (A), ainsi que les valeurs morales de nos sociétés à savoir l'obligation d'assistance aux personnes nécessiteuses (B).

A- Les fondements historiques

Sur le plan historique, si l'on voit les catastrophes naturelles ou les guerres, l'aide a commencé dans le cadre familial avant de s'étendre sur une échelle allant de la religion (A) à la sociologie (B).

1- Bases religieuses

Dans les religions traditionnelles africaines se retrouvent aussi la notion de partage. C'est donc avec le concept de la charité, présent sous des appellations différentes mais similaires dans le principe pour les grandes dénominations religieuses, que les premières actions humanitaires de développement ont été créées. En plus d'être une vertu recommandée aux adeptes des différentes religions, la charité a été pratiquée par les institutions qui les gouvernaient. Aussi les églises assumaient la charge de nombreuses activités telles que l'éducation mais aussi le soin aux malades dans des dispensaires, les orphelinats. Elles aidaient les nécessiteux, venaient au secours des victimes des catastrophes. Cependant, les religions dominantes qui ont contribué aux fondements des ONG sont les trois plus grandes religions54 à savoir le christianisme, l'islam et le judaïsme. Le christianisme s'appuie sur le concept de charité ; l'apôtre Paul en déclame la vertu comme étant le fondement de l'être : « Si je n'ai pas la charité, je ne suis rien », alors que l'Islam avec ses préceptes de zakat et sadaqa (une des cinq obligations religieuses musulmanes) définit le principe du don aux pauvres. Le judaïsme quant à lui prône la tsedaka à l'égard du pauvre, de la veuve, de l'orphelin et de l'étranger.

54Paul POUPARD, Les religions, Paris, PUF, 2007, p.128

30

2- L'apport de la philosophie

Pendant la période des Lumières, au XVIIIe siècle, apparait la notion d'Humanité que Diderot voit comme étant « un noble et sublime enthousiasme se tourmente des peines des autres et du besoin de les soulager ; il voudrait parcourir l'univers pour abolir l'esclavage, la superstition, le vice et le malheur »55. Cette notion sort cette fois du cadre religieux pour atteindre une portée philosophique. La réflexion sur l'action humanitaire est désormais de plus en plus ancrée dans les mentalités et, en 1755, lors du tremblement de terre de Lisbonne56, la question de l'action de crise est réellement abordée. C'est en effet grâce à la gestion de crise reconnue comme excellente du premier ministre Sebastiaõ DEMELO que les secours ont pu être administrés rapidement à la population et que Lisbonne fut entièrement reconstruite en un an. Il faudra cependant attendre le XIXe siècle pour que l'engagement associatif prenne un réel essor et abandonne son aspect d'action individuelle pour devenir collective. C'est au début de ce siècle que vont apparaître les prémices du lobbying aux États-Unis. En 1812, la guerre civile d'indépendance entre Vénézuéliens et Espagnols fait rage à Caracas57. C'est en plein milieu de ce conflit armé qu'un tremblement de terre, suivi d'une série de raz de marée, ravagea la ville, tuant entre 15000 et 20000 personnes. Le lobbying associatif américain poussa le gouvernement fédéral à prêter secours aux habitants de Caracas. Face au poids grandissant de ces mouvements nouveaux, le gouvernement américain céda à ces pressions humanitaires et envoya des denrées alimentaires sur le lieu de la crise. Alexander VON HUMBOLDT58 écrira par la suite son témoignage personnel de l'après crise lors de son voyage à Caracas : « le congrès, assemblé à Washington, décréta unanimement l'envoi de cinq navires chargés de farines aux côtes de Venezuela, pour être distribués aux habitants les plus indigents ». Cette action humanitaire internationale, la première notoire, fut accueillie avec une forte reconnaissance et permit de palier les besoins alimentaires d'un peuple en péril et de surmonter cette situation de crise. Dès lors, le mouvement associatif américain et mondial prit une ampleur toute nouvelle, portée par le concept émergent de lobbying. En 1823, en Grande-Bretagne, est créée la « British and Foreign Anti-Slavery Society » qui est ce qu'on pourrait qualifier une ONG de nos jours et qui, comme son nom l'indique, avait pour vocation de lutter

55Denis DIDEROT, Pensées philosophiques, paris, princeps, 1746, p.200

56Jean-Paul POIRIER, Le tremblement de terre de Lisbonne, Odile Jacob, Paris, 2005, p.284

57Dominique Jean LARREY, Mémoires de chirurgie militaire et campagnes 1786-1840, Paris, Rémanences p.67 tome 5

58 Friedrich Karl, Wilhelm, Heinrich Alexander, baron Von Humboldt, plus connu sous le nom d'Alexander Von Humboldt ou Alexandre de Humboldt, est un naturaliste, géographe et explorateur allemand, né le 14 septembre 1769 à Berlin et mort le 6 mai 1859 à Potsdam

31

contre l'esclavage en Grande-Bretagne. Cet engouement populaire est une fois de plus couronné de succès car l'association obtient l'abolition de l'esclavage en 1833, soit seulement 10 ans après sa création. Dès lors, nous voyons que l'action humanitaire n'est plus simplement un mouvement isolé, l'action de quelques hommes qui veulent faire progresser la société de leur côté. Il s'agit désormais d'un réel élan mondial dont les démocraties font office de terre fertile. De cette volonté humaine et individuelle de coupler la charité pour les plus démunis au soulagement des souffrances des blessés est née une volonté collective, qui a gagné en puissance, d'apporter un soutien aux peuples en péril. Ces fondements philosophiques sont concrétisés par les pratiques militaires. De ce fait, la pratique de l'action humanitaire urgentiste sur le terrain semble remonter au médecin militaire de la légion romaine, DIOSCORIDE D'ANAZARBA59, qui aurait créé une école de médecine. Là encore, la prise en compte sur le terrain d'une situation d'urgence (les blessés sur le champ de bataille) a amené une réponse qu'on pourrait qualifier d'« humanitaire ». En effet, le fait de prodiguer des soins gratuits aux personnes dont l'intégrité physique est en danger rejoint très clairement les buts des ONG urgentistes modernes. Au fil des années, philosophie et religions se mêlèrent afin d'imposer des normes en accord avec ces préceptes. On remarque notamment de grands progrès en temps de guerre où les prisonniers et parfois les civils blessés étaient désormais protégés par des règles de conduite sur le champ de bataille. On citera notamment l'aboutissement de ces procédures que représente la convention de Genève (première en 1864, complétée en 1949 et 1977) qui édicte les règles fondamentales du droit humanitaire international. Mais, bien que les prémices de l'activité humanitaire dite « de développement » soient apparues dans les premiers siècles de notre ère, il ne s'agit pas pour autant de l'action telle que nous la connaissons aujourd'hui. Ses apports en termes de médecine militaire ont permis de soigner de nombreux blessés, mais surtout d'insuffler une réelle volonté de soutien aux victimes dans un contexte où les guerres étaient particulièrement violentes et le soutien aux blessés quasiment inexistant.

B- Les fondements sociologiques de l'action des ONG internationales

En effet, dès l'antiquité la première assistance « étatique » est instaurée par l'empire romain. Au moyen âge, dans les villes, émergea une sociabilité professionnelle basée sur le

59Pedanius DIOSCORIDE, est né entre les années 20 et 40 ap. J.-C., à Anazarbe en Cilicie et mort vers 90 ap. J.-C. C'est un médecin, pharmacologue et botaniste grec dont l'oeuvre a été une source de connaissances majeures en matière de remèdes de nature végétale, animale ou minérale, durant les 1 500 ans que couvrent les époques de l'Empire romain, de l'Empire byzantin, de la période arabe classique et du Moyen Âge au début de l'époque moderne en Europe.

32

principe d'entraide entre les membres d'un corps de métier. Progressivement cette sociabilité s'est étendue au-delà du cadre familial ou professionnel pour s'intéresser aux membres de famille des collègues, puis aux pauvres de la cité. Bien qu'exceptionnel, ce lien entre assistance mutuelle et statut professionnel fut le support essentiel de l'actuel système de solidarité sociale.

Les philosophes des Lumières, qui fondent leur réflexion sur la raison plus que sur la religion, disent qu'il est du devoir de l'homme de combattre les inégalités sociales et de défendre la solidarité et le progrès60. Il ne s'agit plus alors de soulager les souffrances des démunis, mais de contester l'ordre établi. Ainsi, l'obligation d'assister les pauvres n'a plus de fondement exclusivement religieux, mais puise également son origine dans l'humanisme et la philanthropie. Au XVIIIe siècle, la pauvreté n'est désormais plus perçue comme un vice individuel, mais comme une faille du « contrat social » rousseauiste61. Fort de cette nouvelle orientation, durant le XIXe siècle, des mouvements mutualistes instituèrent la solidarité et la prévoyance avec pour principes, de distribuer une aide aux plus démunis et d'apprendre à la population à prévoir les catastrophes.

D'autre part, alors que l'industrialisation et l'urbanisation s'accélèrent en Occident, convaincue de la supériorité de sa civilisation, l'Europe du XIXe siècle chercha à exporter les bienfaits de l'éducation, du progrès technologique et la science, mettant en place des grands programmes de développement dans les pays pauvres notamment en Afrique. C'est ainsi que l'opinion publique occidentale construite par le « fardeau de l'homme blanc » du poète et écrivain britannique Rudyard KIPLING62, a contribué à l'émergence de l'intervention des ONG internationales dans les camps de réfugiés au Tchad.

Par ailleurs, à cause de sa complexité, l'histoire de l'humanité n'est rectiligne. D'autres facteurs ont contribué au cours des diverses périodes à une modification de la structure internationale. Le mouvement de décolonisation des années 1960 a soumis l'ordre international à une nouvelle structuration, due à l'accès à l'indépendance de nouveaux acteurs étatiques, dont les pays en voie de développement et parmi lesquels le Tchad. Ces nouveaux sujets de droit international intègrent la collectivité des nations souveraines et au vu difficultés rencontrées, ils réclament une participation de la société internationale à leur processus de développement. Les

60Jean Jacques ROUSSEAU, Du contrat social et Principes du droit politique, version numérique rédigée par Jean-Marie TREMBLAY, Les classiques des sciences sociales, l'Université de Québec, Chicoutimi, canada, 2002. 61ibid

62Rudyard KIPLING, « The white man's burden : the United States and the Philippine Islands », in McClure's Magazine, vol. 12, n 4, Février 1899, p. 290.

33

organismes des Nations Unies furent progressivement créés à cet effet. L'expression d'Organisation Non Gouvernementale (ONG) apparait alors dans le vocabulaire international à l'article 71 de la charte des Nations Unies63, qui reconnait au Conseil Economique et Social le pouvoir de consulter les Organisation Non Gouvernementales qui s'occupent des questions relevant de sa compétence.

Les organisations de la société civile des pays du Nord expriment aussi un élan de solidarité à l'endroit des populations de ces jeunes Etats. Les premières d'entre elles s'installent au Tchad au cours des années 1960. Leur émergence témoigne tout d'abord de la compassion de ces acteurs non gouvernementaux, mais aussi du faible niveau de développement du jeune Etat. Leurs actions couvrent des domaines variés et ont pour but commun avoué, le développement. Depuis les indépendances des pays africains parmi lesquels le Tchad, ont aussi contribué d'une manière significative à l'émergence des ONG et à leur déploiement au-delà des frontières de leurs pays d'origine. L'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré au Tchad trouve en ces deux faits socio-historiques ses fondements.

1- La conception occidentale de la solidarité

Recommandation formelle à l'homme blanc, le devoir de « civiliser » de venir en aide et d'administrer les populations colonisées, une démonstration de la mentalité progressiste des occidentaux d'alors, qui se considèrent être porteurs d'un devoir de civilisation du reste du monde. Symbole de l'eurocentrisme de l'époque précoloniale, le « Fardeau de l'homme »64 n'a pas eu raison que la justification de la colonisation en tant que mission civilisatrice. L'oeuvre de R. KIPLING est au centre de la construction mentale de la supériorité de la race blanche par rapport aux autres, car, plusieurs décennies après les colonisations, animées par le même complexe de supériorité, les occidentaux continuent de porter sur eux la « croix » de l'humanité. Pour mieux illustrer cette affirmation, le langage de Charles CONDAMINES en est le reflet : il faut en finir avec la faim et la misère qui accablent des centaines de millions d'habitants de notre petite planète. Il faut que ça change !65

Au moment où l'occident accentuait son boum industriel et urbain, convaincu de la supériorité de sa civilisation, l'Europe du XIXe siècle chercha à exporter les bienfaits de

63 Charte des Nations Unies.

64Rudyard KIPLING, « The White Man's Burden: The United States and the Philippine Islands », McClure's Magazine, vol. 12, no 4, 1899, p. 290.

65 Charles CONDAMINES, « L'aide humanitaire entre la politique et les affaires », Paris, L'Harmattan, 1989, p.161

34

l'éducation, du progrès technologique et de la science. L'action humanitaire des colonisateurs, si elle aboutit à une soumission politique et culturelle, se prévalut d'un réel progrès des maladies, de vaccination et de soins.

Le discours du président Truman lors de son investiture au Congrès américain le 20 janvier 1949 va dans la même logique. Il reconnait que l'hémisphère sud de la planète est sous-développé et incapable d'améliorer la production. Le président Truman affirma en effet qu'il était temps de lancer un nouveau et audacieux programme mondial pour exploiter les avantages du progrès technologique américain dans le but d'éliminer les souffrances de nombreux peuples qualifiés de sous-développés. Ce discours marqua également le début de l'ère de la coopération internationale au développement66.

Dans le souci de comprendre ce que pensent les occidentaux au sujet de l'aide au développement, des relations Nord-Sud, des pays en voie de développement et de la faim dans le monde, des sondages ont été réalisés. Il en ressort un certain nombre d'indications chiffrées à base desquelles l'on peut constater que deux tiers d'européens pensent que dans dix ans, la faim et la pauvreté n'auront pas reculé dans le Tiers-monde et que le fossé entre les pays riches et les pays pauvres se sera élargi67.

L'ambition de la prise en charge du sort de l'humanité par les occidentaux est donc une évidence. Mais cette prise en charge est davantage envisagée dans une nouvelle approche, celle qui consiste à financer les « petits » projets de développement dans les pays pauvres à travers les ONG internationales. Cette approche semble mieux garantir l'atteinte de l'aide octroyée aux populations pauvres des pays en développement. Grâce aux multiples critiques et pressions des observateurs de l'aide au développement, il apparait clairement dans l'opinion publique occidentale qu'il faille rompre avec la forme d'aide qui conduit aux grands projets n'ayant que peu d'impact direct sur le sort des plus démunis. Le manque de participation des bénéficiaires de l'aide constituant un obstacle important à la réussite des projets de développement qui se privent ainsi d'apports multiples, il s'avère plus qu'impératif d'impliquer des acteurs non gouvernementaux, c'est-à-dire les ONG internationales, dans la définition et la mise en oeuvre

66 ELAME ESOH, « Histoire et fondements du concept de développement durable » : Unité 6 Développement et interculturalité : concepts et outils, Master Course « Coopération internationale, Action humanitaire et Développement Durable » Centro Interateneo per la Ricerca Didattica e la Formazione Avanzata, Universita Cà Foscari di Venezia, 2011, p.4.

67 Sondage réalisé dans le CEE par European Cooperation and Solidarity en 1983 et 1987. Dans chacun des pays membres de la CEE, des questions identiques ont été posées à des échantillons représentatifs de la population âgée de plus de 15 ans

35

des politiques de développement. C'est ainsi que l'opinion publique occidentale a contribué à l'émergence des ONG internationales et leur déploiement en Afrique en général et au Tchad en particulier, notamment à Goré. Cependant, si l'opinion publique occidentale est un facteur déterminant de l'oeuvre des ONG internationales dans cette région, il y'a lieu de noter qu'elle n'est pas une exclusivité. Il importe d'évoquer également le rôle « communauté internationale » dans cette évolution.

2- De la conception occidentale à la carence des politiques locales de développement depuis les indépendances en Afrique

Après la période coloniale, l'ordre international a été soumis à une nouvelle structuration. Celle-ci est due à l'accès à l'indépendance de nouveaux acteurs étatiques, dont plusieurs pays africains. Ces nouveaux sujets de droit international intègrent la collectivité des nations souveraines, mais pas sans difficultés. Par exemple, au vu des multiples embuches qui jalonnent le processus de développement de ces jeunes Etats, et de l'écart qui les distingue de la métropole, il leur est successivement attribué des appellations de : « pays du tiers-monde », « pays sous-développés », « pays en voie de développement », ou même « pays pauvres très endetté (PPTE) »68.

Dès leurs indépendances, les jeunes Etats ont adopté des vastes projets dans les domaines de l'industrie et des infrastructures, sur le modèle ultra-capitaliste occidental. Ayant heurté de front les exigences socioculturelles locales, ces grands investissements qui n'avaient pour but que la mise en oeuvre des politiques de développement calquées sur le modèle des pays occidentaux, les organismes internationaux et les programmes d'aide bilatéraux Nord-Sud. Au profit des projets dont les pays occidentaux tiraient avantage et qu'ils étaient les seuls à s'offrir, le développement local a été négligé69. Quand il avait même été démontré que les populations locales étaient bénéficiaires d'une action, celle-ci avait été réalisée soit en marge de leur participation ou alors à travers une implication forcée, au mépris de la dignité humaine. L'on peut prendre l'exemple du Cameroun voisin pour signaler la construction du chemin de

68Le 20 janvier 1949, le président des États-Unis Harry S. Truman prononce le discours d'investiture de son deuxième mandat à la Maison Blanche. À cette occasion, il désigne du doigt la grande pauvreté qui affecte la moitié de l'humanité. C'est la première fois qu'est employée l'expression « sous-développé » à propos des pays qui n'ont pas encore atteint le stade industriel. Elle fait florès de même que l'expression « tiers monde » inventée peu après, en 1952, par le démographe Alfred Sauvy.

69 Alexander KING et Bertrand SCHNEIDER, « Questions de survie, la révolution mondiale a commencé », Calmann-Levy, 1991, p.147

36

fer par la REGIFERCAM en 196970. Ainsi que la construction de l'oléoduc du projet Pipeline Tchad-Cameroun71. Les conséquences directes de ces politiques de développement ont été et ont encore aujourd'hui : l'endettement de nombreux pays africains, l'importation des produits de première nécessité, la crise alimentaire et le rejet des projets par les populations locales pour ne citer que celles-là.

Ces projets que M.C. GUENEAU désigne sous le vocable « non-sens économique »72 se sont attiré beaucoup de critiques, car l''on peut dresser un catalogue des désastres tels que les expropriations ou la destruction de l'environnement local et dont les leçons semblent n'avoir pas été apprises. Face à cette situation, les pays occidentaux ont dû revoir leur politique d'aide au développement. Il semble plus qu'impératif d'impliquer dans le processus de développement, une nouvelle catégorie d'acteurs, parmi lesquels les ONG. Celles-ci se positionnent comme des véritables accompagnateurs des populations, qu'elles ont le mandat d'aider à s'organiser et à se poser en interlocuteur des acteurs en place.

Conscientes de ce que facteur primordial de la réussite d'un projet, de développement est la participation effective et la responsabilisation des bénéficiaires à toutes les phases de sa mise en oeuvre, les ONG trouvent en la promotion de cet idéal, un fondement à leur oeuvre dans les pays en voie de développement. La nouvelle conception de la solidarité humaine qui s'est construite à travers l'opinion publique occidentale et renforcée par l'insuffisance des politiques de développement semble universaliser et légitimer toute action visant à soulager les souffrances et lutter contre la pauvreté. Il convient à cet effet de nous pencher sur les bases juridico-institutionnelles de l'action de ces dernières au Tchad précisément à Goré dans les camps de réfugiés.

Paragraphe II : Les instruments juridiques et les mécanismes institutionnels de l'action
des ONG internationales au Tchad

Les ONG internationales sont des organisations dont le siège et situé en dehors du pays dans lequel elles interviennent. Autrement appelées « association étrangère », elles accompagnent l'Etat dans la conception et la mise en oeuvre des politiques de développement

70 Bernard NKUISSI, « Nkongsamba, les années obscures de la fondation », mémoire DES en histoire, université de Lille, 1977, p.47.

71 Jean Hermann WAYA, « Analyse de la gestion environnementale du projet Pipeline Tchad-Cameroun dans la localité de Bélabo », monographie de DCJA en Sciences Techniques d'Animation, INJS de Yaoundé, 2010, p.22. 72Marie-Christine GUENEAU, « Les petits projets de développement sont-ils efficaces ? », Paris, L'Harmattan, 1986. P.25

37

conformément aux dispositions légales. Au vu de leur tâche importante, l'on a besoin de mettre sur pied des structures et mécanismes pouvant réguler leur fonctionnement d'où la nécessité d'étudier les instruments pouvant encadrer ces ONG (A) ainsi que les instances compétentes pour veiller à l'observation de ces instruments juridiques(B).

A- Les instruments juridiques

Pour mieux appréhender les instruments juridiques, nous évoquerons ici les textes des principes généraux de droit qui président la reconnaissance du statut et l'activité des ONG internationales en édictant les règles de Droit International et national reconnaissant sa personnalité juridique en tant qu'acteur non étatique, garantissant leur exercice de la liberté d'association, et partant légitimant leur déploiement au Tchad. Très souvent le droit se heurte à la définition de cette entité, qui côtoie les termes d'association, association étrangère, organisation étrangère, organisation de solidarité internationale. Loin d'être un concept aisément saisissable dans l'espace et dans le temps, la notion d'ONG internationale semble se conjuguer au pluriel. Ainsi nous procéderons préalablement aux textes internationaux (1) avant de nous pencher sur les textes nationaux (2).

1- Les textes internationaux

Les ONG internationales étant des acteurs oeuvrant hors de leur cadre national ne font pas du seul droit interne qui doit reconnaitre leur statut ou réguler leur action. Ainsi, il y'a un arsenal de textes juridiques internationaux qui entre dans la délimitation de leur domaine d'action.

a- La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) est le document des droits humains le plus connu. Elle est la base de la protection internationale des droits humains. Jusqu'à la deuxième guerre mondiale, les droits humains n'étaient mentionnés que dans les constitutions nationales. Il existait alors peu de règles internationales. La terreur du national-socialisme et la cruauté de deux guerres mondiales en un tiers de siècle ont provoqué ce changement. On ne voulait plus répéter de telles expériences. Tous les hommes et les femmes doivent pouvoir vivre en paix, sans peur et sans faim. C'est pourquoi la Charte des Nations Unies de 1945 a inscrit que les états doivent garantir les droits humains.

38

La Déclaration énonce en quelque sorte le « programme général des droits de l'homme». Elle pose les bases des droits civils et politiques ainsi que des droits économiques, sociaux et culturels. La Déclaration protège la dignité humaine. Elle est valable pour tous les êtres humains dans le monde. Tous les hommes et toutes les femmes sont nés égaux, ont la même dignité et les mêmes droits. Tous les membres de l'ONU doivent signer la Déclaration universelle des droits de l'homme.

La Déclaration n'est pas une loi. Elle a cependant une grande signification. Toutes les autres conventions des droits humains découlent de ce premier document. Elle a un rôle politique et moral essentiel. Le préambule de ce document se fonde sur la dignité humaine « La dignité est inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ».

Elle est l'un des premiers instruments juridiques de portée universelle proclamant les droits de l'homme opposables à tous et partout. Proclamé le 10 Décembre 194873, il a pour but principal le respect de la dignité humaine à travers « le respect universel des droits de l'homme et des libertés fondamentales »74. L'article 20 de cette déclaration stipule que « ... toute personne a droit à la liberté de réunion et d'association pacifique. Nul ne peut être obligé à faire partie d'une association ». Même si elle n'a pas force obligatoire, la DUDH reste un pilier juridique majeur des libertés dans leur généralité et la liberté d'association plus spécifiquement.

b- Convention européenne (n°124) sur la reconnaissance de la personnalité juridique des organisations non gouvernementales et leur protection en Droit International

Depuis 1945, le nombre des organisations internationales non gouvernementales a considérablement augmenté et la diversité de leurs objectifs s'est accrue. Or les ONG exercent leur action dans plusieurs pays, tiennent des réunions en des lieux divers, emploient du personnel de différentes nationalités, etc., du fait que leurs objectifs ont un caractère international. Toutes ces activités « transnationales » étant naturellement génératrices de problèmes, les ONG connaissent des difficultés plus grandes et plus complexes que les associations ou fondations nationales. Bien que plusieurs tentatives aient été faites pour leur faciliter la tâche au plan national, il n'existe pas encore d'instrument international en vigueur. Le Conseil de l'Europe a, dès 1951, reconnu l'importance des ONG et leur contribution aux activités de l'Organisation, chacune dans son domaine particulier. Il a donc adopté une

73 Par l'Assemblée Générale de l'ONU à New York dans sa résolution 271A(III)

74 Déclaration Universelle des Droits de L'homme, préambule.

39

résolution prévoyant la consultation des ONG sur des questions relevant de sa compétence, puis, en 1954, des principes directeurs pour l'octroi du statut consultatif à un groupe d'ONG75; enfin, en 1972, son Comité des Ministres a adopté la Résolution (72) 35 sur les relations du Conseil de l'Europe avec les ONG, dotées ou non du statut consultatif. Le Comité des Ministres, également conscient de l'absence de tout instrument international visant à faciliter les activités des ONG au niveau international, a chargé en 1981, sur proposition du Comité européen de coopération juridique (CDCJ), un comité d'experts d'un mandat exploratoire consistant à étudier dans ce domaine la possibilité d'une action intergouvernementale au niveau européen. Sur la base d'un rapport du CDCJ inspiré des travaux dudit comité, le Comité des Ministres a chargé le Comité restreint d'experts sur les organisations non gouvernementales d'élaborer un instrument approprié sur les ONG. Personnalité juridique des OING Le CJ-R-OR a tenu trois réunions en 1982 et 1983 et soumis pour approbation au CDCJ un projet de convention européenne sur la reconnaissance de la personnalité juridique des organisations internationales non gouvernementales. Ce projet de convention, avec quelques amendements par le CDCJ, a été adopté par le Comité des Ministres le 24 octobre 1985 et la Convention a été ouverte à la signature des Etats membres à Strasbourg le 24 avril 1986. Ainsi l'article 1 a pour but de définir les conditions auxquelles une organisation internationale non gouvernementale doit satisfaire pour bénéficier des avantages prévus par la Convention. Quant à l'article 2, il souligne que : « la personnalité et la capacité juridique d'une ONG telles qu'elles sont acquises dans la partie dans laquelle elle a son siège statutaire sont reconnues de plein droit dans les autres Partie ». Entrée en vigueur le 1er Janvier 1991, son principe général veut que le droit qui régit la personnalité et la capacité juridique des ONG soit le droit de l'Etat où se trouve le siège indiqué sur l'acte constitutif de l'ONG. Ce qui implique, selon certains, que : « l'ONG aura dans tous les Etats contractants les mêmes capacités et la même personnalité juridique que celles obtenues dans l'Etat où se trouve son siège ».

2- Les textes nationaux

Le Tchad est un pays souverain disposant un bon nombre d'instruments d'encadrement en ce qui concerne les ONG, cependant, vouloir les aborder dans leur totalité risquerait de nous trainer loin des rivages que nous nous sommes fixés. Ainsi dans ce travail il serait question d'aborder les piliers des textes encadrant l'action des ONG internationales sur le plan national.

75Marie-Odile WIEDERKEHR, La Convention du Conseil de l'Europe sur le statut des Organisations non-gouvernementales, Paris, Editions du CNRS, 1987, p.749-761

40

a- La constitution (article 28 de la constitution de 2018)

La constitution est le mode de fonctionnement d'un pays, d'un état, c'est un document noble qui désigne principalement soit un corps d'état, soit le texte qui les consacre, soit un acte juridique établissant une situation. La constitution révèle son importance dans la vie de tous les jours car elle garantit les droits et les libertés des individus d'une société. La constitution tchadienne de 2018 dans son article 28 dispose « Les libertés d'opinion et d'expression, de communication, de conscience, de religion, de presse, d'association, de réunion, de circulation, de manifestation sont garanties à tous... »76. La constitution est la norme suprême dans l'agencement juridique, de ce fait, ses dispositions ont force obligatoire. Dans cette optique, l'article 28 est le fondement principal des ONG car il dispose expressément et explicitement que les libertés d'association, de réunion sont garanties. Il est à noter que l'ONG est définie comme une association qui fonctionne aussi par le biais des réunions. Ainsi comme norme suprême, elle joue un rôle de garde-fou dans une République. Au-delà de la reconnaissance, elle garantit et protège les libertés fondamentales notamment la liberté associative.

La constitution est une garantie du peuple, en effet cette dernière dispose de la façon où est organisé le pouvoir, il nomme le plus souvent le peuple ou la nation comme chef qui transmet ses compétences entre les mains d'un Homme ou de plusieurs afin que ces personnes puissent les représenter eux et leurs intérêts. Cette garantie du peuple par la constitution va de pair avec le Droit, cette garantie est observable car la constitution est la source principale du Droit, des lois ne peuvent être créées si ces dernières ne sont pas conforment et en adéquation avec la constitution. Ainsi les ONG tant nationales qu'internationales tirent leurs fondements dans la constitution. Après la constitution, il y'a d'autres lois, décrets et ordonnances qui viennent étayer et confirmer ces fondements juridiques des ONG au Tchad.

b- L'ordonnance n°27/INT-SUR du 28 Juillet 1962

Le début des relations entre les ONG et le Tchad remonte aux années 20 (plus précisément en 1926) avec l'implantation de la Mission Evangélique Unie (MEU), qui tout en s'occupant de la reconversion des populations autochtones menaient également des actions humanitaires. Après la seconde grande guerre, Le Tchad comme nombre de pays Africains va profiter de l'apport des ONG sur le continent. En effet, après s'être regroupées spontanément

76Article 28 de la constitution tchadienne de 2018

41

pour contribuer à la reconstruction de l'Europe, les associations se sont tournées vers les pays du sud pour porter concours à ces pays qui voient se profiler à l'horizon la fin de la période coloniale et l'air des Indépendances. ONG caritatives et humanitaires d'inspirations religieuses elles vont surtout oeuvrer au travers d'actions d'urgences à l'occasion de catastrophes diverses (famines, pandémies, conflits). C'est ainsi que compte tenu du rôle important que jouent les ONG dans le développement et l'assistance de tout genre, le Tchad a décidé de règlementer les ONG notamment par le biais de l'ordonnance 62-27 du 28 juillet 1962 qui est l'une des premières lois instituant et régissant les ONG au Tchad, cette loi a été élaborée au lendemain des indépendances et déjà dans l'article 1er il consacre les ONG « L'association est la convention par laquelle deux ou plusieurs personnes physiques ou morales mettent en commun de plein gré et en connaissance de cause, d'une façon permanente et pour un temps assez long, leurs connaissances ou leur activités dans un but déterminé autre que de partager des bénéfices ». Pour ce qui est des ONG internationales, elles sont définies aux termes de l'article 12 comme « Sont considérées comme associations étrangères au Tchad et par là même soumises à un régime et un contrôle plus sévère, les associations qui ont leur siège principal à l'étranger, ou qui ayant ce siège au Tchad, sont en fait, dirigées par des étrangers. Sont également considérées comme associations étrangères, celles dont le président ou le quart au moins des membres est étranger ». Quant à ce qui est de la procédure pour l'autorisation de fonctionnement, elle est prévue par l'article 13 de la même ordonnance. Ainsi, la présente ordonnance constitue l'un des fondements majeurs des ONG aux Tchad.

c- Décrets n°166 du 25 Aout 1962

Dans le champ du régime juridique des ONG au Tchad, il y'a le décret n°166 du 25 Aout 1962 qui vient étayer ce champ très peu structuré et encadré par les textes d'autant plus qu'il y'a une insuffisance cruelle des textes juridiques encadrant les ONG au Tchad. Néanmoins parmi le peu des textes existant l'on a ce décret qui régit aussi les ONG étrangères, les fondations, les associations à caractère religieux, associations de bienfaisance ou d'assistance, associations créées dans le but de favoriser l'enseignement ou de dispenser une aide culturelle et à toutes les associations en général. Cependant, les associations fondées sur une cause ou en vue d'un objet contraire aux lois, aux bonnes moeurs ou qui auraient pour but ou porteraient atteinte à l'intégrité du territoire national, à la constitution, ou à la forme du gouvernement, ne peuvent être autorisées.

42

d- Ordonnance n°023/PR/2018 du 27 Juin 2018

À la suite de l'avènement de la quatrième République du Tchad77 et après que le Tchad ait promulgué une nouvelle Constitution en mai 201878, les autorités tchadiennes ont modifié un certain nombre de lois, dont l'Ordonnance n°023/PR/2018 du27 juin 2018 portant régime des associations. Cette ordonnance vient s'inscrire dans le sillage du régime juridique des ONG. L'article 1 de ladite ordonnance stipule que « la liberté d'association proclamée par la Constitution et régie par les dispositions de la présente Ordonnance », ensuite l'article 2 de la même ordonnance vient définir ce que c'est une association. Pour ce qui est associations étrangères, elles sont régies par l'article 23. Mais il en fait aussi mention explicitement à l'article 27 des ONG. Cette ordonnance, non seulement, vient compléter cet univers juridique peu dense mais vient restructurer l'organisation et le fonctionnement des ONG car elle s'applique également aux associations de défense des droits humains, aux associations de jeunes, aux associations scolaires, aux associations sportives et culturelles, aux associations étrangères, aux associations religieuses, aux ONG, ainsi qu'aux unions ou fédérations d'associations. L'Ordonnance comprend aussi des règles particulières en ce qui concerne les associations étrangères, qui doivent faire renouveler régulièrement leur autorisation, mais elle ne précise pas à quelle fréquence.

B- Les mécanismes institutionnels

Les mécanismes institutionnels chargés de la promotion et de la réglementation des ONG sont multiples, ils sont d'ordre international (1) et d'ordre national (2).

1- Les mécanismes institutionnels sur le plan international
a- Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC)

Les organisations non gouvernementales (ONG) sont actives auprès de l'Organisation des Nations Unies (ONU) depuis la création de cette dernière en 1945. Elles concourent de plusieurs manières, aux côtés du Secrétariat des Nations Unies, de ses programmes, fonds et agences, aux objectifs de l'Organisation. Consultées par les Etats membres, les ONG participent à quantité d'activités comprenant la diffusion d'information, la sensibilisation et

77La République récemment instituée au Tchad est la quatrième depuis que le pays est devenu indépendant en 1960.

78En mai 2018, le Président a promulgué la nouvelle Constitution, qui a étendu ses pouvoirs avec un régime totalement présidentiel, supprimant le poste de Premier ministre.

43

l'éducation, le plaidoyer politique, les projets opérationnels, la participation aux processus intergouvernementaux et l'offre de services et d'expertise technique. L'Article 71 de la Charte des Nations Unies, créant le Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC), stipule ce qui suit :Le Conseil économique et social peut prendre toutes à dispositions utiles pour consulter les organisations non gouvernementales qui s'occupent de questions relevant de sa compétence. Ces dispositions peuvent s'appliquer à des organisations internationales et, s'il y a lieu, à des organisations nationales après consultation du Membre intéressé de l'Organisation. Charte des Nations Unies, Chapitre 10, Article 71.L'article 71 de la Charte des Nations Unies ouvrait ainsi la porte afin d'établir les bases d'une consultation avec les organisations non gouvernementales. Cette relation avec l'ECOSOC est encadrée aujourd'hui par la Résolution 1996/31 du Conseil, qui établit les conditions d'admissibilité au statut consultatif, les droits et les obligations des ONG dans ce cadre, les procédures de retrait du statut consultatif ou de sa suspension, le rôle et les fonctions du Comité pour les ONG de l'ECOSOC, et les responsabilités du Secrétariat de l'ONU pour appuyer ce processus. L'Organisation des Nations Unies a oeuvré afin de renforcer la coopération avec les ONG à l'échelle du système et dans toutes ses sphères d'activité. En conséquence, des composantes des Nations Unies ont développé de nouvelles modalités visant à promouvoir et à accroître la participation stratégique des ONG Plusieurs documents ont insisté sur le besoin de renforcer les relations entre l'ONU et les ONG, en particulier La Déclaration du Millénaire de septembre 2000. L'importance de l'engagement des États membres visant à faciliter le travail des ONG a été réaffirmé dans le Document final issu du Sommet mondial de 2005 et dans la Résolution 68/1 de l'Assemblée générale sur le renforcement de l'ECOSOC. Dès le départ, le Conseil économique et social (ECOSOC) a été la principale porte d'entrée des ONG au sein du système onusien. L'ECOSOC demeure le seul organe de l'ONU ayant un mécanisme officiel pour la participation des ONG. En 1946, 41 ONG ont reçu le statut consultatif de la part du Conseil. En 1992, plus de 700 ONG avaient obtenu ce statut et ce nombre croît constamment depuis pour atteindre près de 5000 organisations en 201879

Les fondements institutionnels des ONG sur le plan régional ont en leur tête l'institution suprême régionale à savoir l'UA

79csonet.org/content/documents/ecosoc

44

b- L'Union Africaine (UA)

En août 1999, la Conférence des chefs d'Etats et de gouvernements de l'OUA a décrété par une déclaration le remplacement de l'OUA par l'Union africaine (UA). L'UA a été fondée en juillet 2002 par 53 Etats africains à Durban en Afrique du Sud. L'UA compte 54 membres de l'UA, soit tous les pays d'Afrique, à l'exception du Maroc (qui s'est retiré de l'OUA en 1984 pour protester contre l'admission de la République arabe sahraouie démocratique en 1982), et du Somali land (qui n'est reconnu par aucun État). Elle siège à Addis-Abeba, en Ethiopie. Le but de ce changement institutionnel était l'accélération et l'approfondissement du processus d'intégration régional sur un plan socio-économique. Elle vise notamment à encourager la coopération internationale en tenant compte de la Charte des Nations unies et de la Déclaration universelle des droits de l'homme ; de promouvoir la paix, la sécurité et la stabilité du continent ; de promouvoir et protéger les droits des populations en accord avec la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples et de promouvoir la coopération dans tous les domaines d'activité humaine pour élever le niveau de vie des peuples africains. L'UA est constituée de plusieurs organes dont le Conseil économique, social et culturel (ECOSOCC) qui est un organe consultatif dont les membres sont issus des différentes couches socioprofessionnelles des États membres. Il ressemble à son homologue européen, le Comité économique et social. Outre son rôle consultatif, l'ECOSOCC est chargé de règlementer les activités des ONG sur le continent.

2- Les mécanismes institutionnels sur le plan national

a- Le Ministère de l'économie et de la planification du développement (La Direction des ONG et Affaires Humanitaires)

Placée sous l'autorité d'un Directeur assisté d'un Adjoint, la Direction des Organisations Non Gouvernementales et des Affaires Humanitaires (DONGAH) a pour mission la coordination et le suivi des affaires humanitaires et des activités des Organisations Non Gouvernementales80 (ONG).

A ce titre, elle est chargée de :

80Le Ministère de l'économie et de la planification du développement-La Direction des ONG et Affaires Humanitaires, les statuts.

45

- Coordonner les politiques, stratégies et programmes humanitaires et appuyer leur mise en oeuvre en collaboration avec le ministère en charge des Affaires Etrangères, de l'Administration du Territoire et de la Solidarité Nationale ;

- Assurer l'orientation et la coordination des activités humanitaires en cohérence avec les plans d'urgence et de développement ;

- Participer à l'élaboration des plans de contingence, d'urgence et des réponses aux

situations de crises humanitaires en collaboration avec la Direction en charge du plan ; - Coordonner et assurer le suivi de la mise en oeuvre des plans de réponse et en faire des

rapports périodiques en collaboration avec la Direction du Suivi - Evaluation ;

- Organiser et suivre les activités du forum des urgences en collaboration avec le Coordonnateur Humanitaire, les ministères concernés et les ONG ;

- Agréer en ONG nationales les associations remplissant les missions de développement et remplissant les critères requis;

- Instruire et faire approuver les programmes et projets soumis par les ONG en fonction des priorités définies dans les stratégies et plans nationaux de développement après avis technique des ministères concernés ;

- Planifier, orienter et contrôler les interventions des ONG en collaboration avec le Ministère en charge de la Sécurité et les ministères techniques concernés ;

- Analyser les demandes de franchise et toutes les requêtes introduites par les ONG

- Préparer et faire signer le protocole d'accord d'établissement des ONG et en assurer éventuellement leur renouvellement après évaluation de leurs activités;

- Veiller au respect du protocole d'accord de coopération et des accords des projets et programmes qui lient les ONG à l'Etat ;

- Assurer le suivi et l'évaluation des projets et programmes des ONG ;

- Organiser des réunions périodiques d'information et de coordination avec les ONG en collaboration avec les ministères techniques concernés ;

- Produire des rapports périodiques sur l'impact des interventions des ONG ;

- Créer une banque de données dans le domaine des affaires humanitaires et des ONG au niveau du ministère;

- Coordonner et suivre les affaires humanitaires, les programmes, projets activités des Organisations Non Gouvernementales (ONG) en collaboration avec les ministères concernés ;

46

- Assurer l'orientation, la coordination et la cartographie des activités des ONG nationales et internationales en cohérence avec la politique nationale du développement - Produire les rapports annuels de la direction

b- Le Ministère des Affaires Etrangères, de l'Intégration Africaine et de la Coopération Internationale (Direction Générale de la Coopération Internationale)

Le Ministère des Affaires Etrangères, de l'Intégration Africaine et de la Coopération Internationale est une structure administrative publique en charge de la conduite de la politique étrangère du Tchad. Il est créé depuis l'accession de la république du Tchad à l'indépendance en 1960, plusieurs ministres se sont renouvelés à la tête de ce ministère qui l'on conduit à subir diverse mutation tant sur le plan structurel que formel. Ainsi du secrétariat général rattaché à la présidence de la république en 1960, il devient par la suite Ministère des Affaires Etrangères et de l'Intégration Africaine, puis Ministères des Relations Extérieurs et prend la dénomination Affaires Etrangères, de l'Intégration Africaine et de la Coopération Internationale depuis avril 2008. Ce ministère est chargée de veiller à la diligence de la politique extérieure du Tchad mais pour ce qui est des ONG il est chargé de :

- Rechercher, identifier et mobiliser les financements extérieurs des projets de développement conformément aux priorités nationales ;

- Négocier et signer les Accords et Conventions concernant tous les financements extérieurs et portant sur le développement et la coopération économique, technique et financière dont bénéficient l'Etat, les établissements publics nationaux et les sociétés d'Etat

- Préparer et organiser avec les autres départements concernés des tables rondes et autres concertations des bailleurs de fonds sur le développement du Tchad ;

- Coordonner et suivre avec les départements concernés les financements extérieurs ; - Préparer, organiser et présider les réunions des commissions mixtes ;

- Centraliser les besoins en assistance technique, en faire la demande et en assurer le suivi ;

- Etablir un rapport annuel sur la coopération au développement entre le Tchad et ses partenaires extérieurs ;

- Elaborer et suivre la mise en application du programme de coopération technique ;

- Suivre les activités des Organisations Internationales à caractère Politique, Economique, Culturel, Scientifique et Technique ainsi que leurs rapports avec le Tchad ;

47

- Suivre les activités bilatérales à caractère politique, économique, culturel, scientifique et technique ;

- Traiter toutes les questions relatives aux Organisations Non Gouvernementales81 ;

c- Le CNARR

Le cadre institutionnel national d'accueil des réfugiés au Tchad est constitué des acteurs étatiques, des organisations de la société civile, des travailleurs humanitaires nationaux et des populations hôtes. Le Tchad a institué la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR) qui reste le principal organe étatique en charge de la question des réfugiés et de l'encadrement des activités des ONG82. L'importance stratégique de cette commission est perceptible au niveau même déjà de sa composition. Au terme de l'article 2, la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés est composée comme suit :

· Ministre en charge de l'Administration du Territoire, Président ;

· Ministre en charge des Affaires Etrangères, membre;

· Ministre en charge de la Sécurité Publique et de l'Immigration, membre;

· Ministère en charge des Finances, membre ;

· Ministre en charge de l'Action Sociale;

· Ministre chargé des Droits de l'Homme et de la Promotion des Libertés, membre ;

· Ministre en charge de l'Economie et du Plan, membre ;

· Ministre en charge de l'Education Nationale, membre ;

· Ministre en charge de la Santé Publique, membre ;

· Représentant du Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés auprès de la République du Tchad, membre observateur.

Pour ce qui est des compétences de cette commission, l'article 3 du décret l'instituant stipule que « La Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés est rattachée au Ministère de l'Administration du Territoire ».

81DECRET N" 1I53 PR/MAEIACID/2018 portant l'Organigramme du Ministère des Affaires Etrangères, de l'intégration Africaine, de la Coopération internationale et de la Diaspora.

82Décret 11-839 2011-08-02/PR/PM/MAT/11, portant création de la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR). AU Tchad, cette institution est le principal orange de l'Etat en charge de la question des réfugiés.

48

SECTION II : L'ETAT DES LIEUX DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES
DANS LES CAMPS DE GORE

D'un point de vue général, les ONG internationales dans les camps de Goré ont pour objectif d'assister les réfugiés sur divers plans. Les actions qu'elles entreprennent pour atteindre ces objectifs sont communément perceptibles à travers des réalisations dans les différents camps. Elles viennent en aide aux réfugiés en leur portant secours d'urgence et de première nécessité par le biais de l'aide médico-sanitaire, alimentaire, sécuritaire, logistique. Cependant, il est certes important de s'interroger sur l'effectivité et la pertinence de ces actions, mais avant, il serait judicieux que l'on fasse un état de lieux efficient de toutes ces actions.

Malgré le caractère crucial de l'état des lieux, il faut comprendre que l'action ne se limite pas seulement à la seule aide humanitaire, encore moins l'humanitaire d'urgence. En effet, il convient de dissocier ici « l'humanitaire d'urgence », « l'humanitaire de reconstruction » et « l'humanitaire de développement »83. Le premier renvoie à l'assistance apportée aux victimes de crises diverses (crise alimentaire, conflit armé, catastrophe naturelle...) en leur fournissant les soins primaires, les premiers secours, les produits de première nécessité, la logistique. Il est question de satisfaire primordiaux des populations tant nécessiteuses que vulnérables, ou rendues ainsi par le fait d'une situation de crise donnée. C'est une aide qui se déploie dans l'extrême nécessité. Par conséquent, sa durée dans le temps est assez limitée. Elle prend fin dès lors que les risques représentés par la situation d'urgence sont atténués voire éradiqués. La deuxième forme d'aide humanitaire, renvoie à la restructuration ou la réhabilitation des infrastructures détruites lors des catastrophes et de grandes crises. Quant à la dernière forme, la plupart des professionnels s'accordent à réserver le substantif de « coopération au développement », s'inscrit quant à elle dans une dynamique de plus long terme. Elle renvoie généralement aux diverses activités menées par les ONGI pour accompagner les Etats dans leurs politiques de développement. Ces activités s'inscrivent dans la lignée des programmes gouvernementaux et se consacrent à un secteur de développement précis.

Pour ce qui est de notre étude, il s'agit de la première forme d'aide à savoir l'humanitaire d'urgence. De ce fait, il s'agira dans le premier paragraphe (I) de faire un aperçu

83Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 189, n° 150 ; Nations Unies, Recueil des Traités, vol. 606, n° 267.

49

général sur les camps de réfugiés de Goré avant d'étudier leur situation initiale à leur arrivée (II).

Paragraphe I : Aperçu général sur les camps de réfugiés de Goré

Aujourd'hui, dans les camps de Goré on dénombre 42.975 réfugiés84. Sur la base des multiples rapports du HCR et autres organisations internationales, l'on peut, sans risque de se tromper, affirmer que la crise des réfugiés centrafricains n'est pas une abstraction mais une réalité quotidienne. La question des réfugiés étant un problème mondial, la situation du Tchad, plus précisément celle de Goré ne saurait être abordée de façon isolée. Ainsi nous étudierons le dénombrement des réfugiés dans les camps de Goré (A) avant d'aborder la question de la pluralité des ONG intervenant dans les camps de Goré (B).

A- Le dénombrement et organisation des réfugiés dans camps de Goré

Les effectifs totaux des réfugiés centrafricains ont diminué après la vérification biométrique conduite entre juin et Aout 2018, malgré les afflux observés suite aux conflits intercommunautaires. Les réfugiés centrafricains appartiennent principalement aux ethnies Kaba, Peul, Arabes, Mbaye, Runga et Baya. Les peuls sont majoritaires dans le camp de Dosseye. On dénombre 16.188 dans le camp de Dosseye, 10.964 à Amboko, 9.168 à Gondjé et 6.655 à Doholo pour un total estimé à 42.975 réfugiés à Goré85.

Chaque camp est subdivisé en blocs ou en zone à la tête duquel les réfugiés élisent un Chef qui les représente au niveau du comité central. Le comité central est dirigé par un président et des membres issus des différents comités dans lesquels les femmes sont représentées. Des comités de relais sont également mis en place pour gérer les différentes activités du camp : comité des sages, comité mixte population réfugiée et hôte ; comité de vigiles, comité de femmes, comité de distribution, comité de jeunes, comité pour la gestion de l'eau, comité des éleveurs, comité des agriculteurs, comité de gestion des plaintes du ciblage, comité de gestion des conflits, etc.) En outre, des points focaux sectoriels et des groupes sont établis pour suivre les aspects relatifs à la violence sexuelle basée sur le genre. La responsabilité principale de la protection, de l'enregistrement et de l'administration des refugiés revient à la CNARR et au HCR. Le Détachement pour la Protection des Humanitaires et des

84Chiffre des personnes relevant de la compétence du HCR au Tchad à la date du 31/10/2018 85Idem

50

Réfugiés (DPHR) a la responsabilité d'assurer la sécurité des réfugiés dans les camps et dans les environs, de même que celle des acteurs humanitaires. Les ONG présentes dans ces zones couvrent divers domaines notamment : l'assistance juridique, les services communautaires (assistance aux personnes à besoin spécifique et le développement communautaire),les activités génératrices de revenus (AGR), la gestion et la mobilisation communautaire, la distribution de vivres, les secteurs de l'éducation, de la santé, du WASH, des abris, de l'agriculture, de l'élevage et de l'environnement.

B- La pluralité des ONG internationales intervenant dans les camps de Goré

Les ONG internationales oeuvrant à Goré présentent quelques traits communs, mais ont en général beaucoup de différences les unes des autres. Elles sont pour la plupart d'origine occidentale. Quant aux divergences, elles sont plus nombreuses et portent sur plusieurs aspects allant des objectifs principaux jusqu'aux ressources humaines et financières en passant par les domaines d'intervention, la nature et les catégories des personnes cibles. Cette disparité d'éléments caractéristiques décrit une mosaïque hétérogène qui s'avère difficilement intelligible, si l'on dispose des repères et d'outils de catégorisation pouvant nous servir de clé de lecture. A cet effet, il nous revient d'une part d'effectuer une classification de ces organisations en fonction des diverses caractéristiques propres à chacune d'entre elles et d'autre, de donner une description panoramique de l'environnement dans lequel elles évoluent, ainsi que du cadre des différents partenariats mis en place. Dans le cadre de notre étude, les données recueillies auprès des ONG internationales présentes dans la région de Goré nous ont permis d'élaborer une classification de ces dernières. En effet, plusieurs critères peuvent être retenus pour distinguer ces différentes organisations.

Ces ONG agissent dans les camps de Goré dans divers domaines. Leurs initiatives répondent à des besoins identifiés soit directement par les réfugiés auprès desquelles elles interviennent, soit les ONG elles-mêmes ou encore en fonction des priorités existants. Il s'agit notamment de l'éducation, les droits de l'homme, le genre, la santé, l'eau et l'assainissement. Le tableau ci-dessous récapitule les divers domaines dans lesquels, interviennent les structures.

51

Tableau 1 : Représentation des ONG internationales dans les différents camps de Goré

 

AMBOKO

GONDJE

DOSSEYE

DOHOLO

Education

ACRA, SIF,

RET

ACRA, SIF,

RET

ACRA, SIF,

RET

ACRA, SIF,

RET

Eau, hygiène,

assainissement

ADES, FICR,

SIF, IDO,

OXFAM

ADES, FICR,

SIF, IDO,

OXFAM

ADES, FICR,

SIF, IDO,

OXFAM

ADES, FICR,

SIF, IDO,

OXFAM

Moyens de

subsistance

ADES, CARE

ADES, CARE

ADES, CARE

ADES, CARE

Protection

ACCRA, ADES, FICR

ACCRA, ADES, FICR

ACCRA, ADES, FICR

ACCRA, ADES, FICR

Santé et

nutrition

ADES, CARE,

Jhpiego, MI,

MSF-France

ADES, CARE,

Jhpiego, MI,

MSF-France

ADES, CARE,

Jhpiego, MI,

MSF-France

ADES, CARE,

Jhpiego, MI,

MSF-France

Sécurité alimentaire

CARE, ADES

CARE, ADES

CARE, ADES

CARE, ADES

Abris

ADES, FLM,

FICR, OXFAM

ADES, FLM,

FICR, OXFAM

ADES, FLM,

FICR, OXFAM

ADES, FLM,

FICR, OXFAM

Source : HCR/PAM 2018

Paragraphe II : De la situation initiale aux conditions actuelles des réfugiés

La solidarité humaine est le fondement de la vie en société. Elle a toujours fait partie intégrante de la vie en groupe. C'est dans ce sens que les actions visant à alléger les souffrances et à améliorer les conditions de vie des démunis ont toujours existé, et c'est ce qui anime l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré. Les ONG internationales exprimant ainsi un élan de solidarité à l'endroit des populations vulnérables et nécessiteuses. Cependant, avant que ces dernières n'assistent ces populations venues de la RCA, les réfugiés

52

se trouvaient dans des situations précaires(A) mais cette situation est passée d'un niveau à un autre grâce à l'intervention des ONG internationales (B).

A- La situation de précarité des réfugiés

Pour mieux s'enquérir de la situation initiale, un exercice conjoint d'étude entre le PAM et le HCR au Tchad avec méthodologie participative et qualitative et largement inspirée par l'approche «Wealth Ranking» du HEA (Household Economy Approach) a permis de faire une typologie des ménages en fonction de leur niveau de richesse. Cette méthodologie, appelée Enquête Multisectorielle de Vulnérabilité (EMV), a été menée dans plusieurs camps ciblés. Ainsi, quatre groupes de richesse ou catégorie socio-économique ont été définis et caractérisés (Très Pauvres, Pauvres, Moyens et Nantis) dans les camps de réfugiés au sud du pays comme établis dans les EMV. Lors des focus group dans les camps de réfugiés non encore ciblés, des questions relatives à cette catégorisation des ménages ont été discutées et selon les réfugiés, en général quatre groupes économiques peuvent être considérés dans leurs camps (très pauvres, pauvres, moyens et aisés).

Cette différence entre les groupes réside dans les biens possédés pour subvenir à leurs besoins, la disponibilité alimentaire, le revenu journalier, la production agricole, la possession de ruminants et le commerce. Ainsi :

Les plus aisés ont plusieurs sources des revenus, comme le commerce, le maraichage, ils mènent des activités de transport (charrette, moto ou même la voiture), ils disposent de bétail, et certains ont des motopompes. Sur le plan social, ils sont bien considérés dans la société et ont la capacité d'inscrire tous leurs enfants à l'école (écoles de fortune). Les activités principales des moyens sont le petit commerce, l'élevage et l'agriculture. Les pauvres ne disposent pas des moyens financiers et économiques, ils sont souvent employés parles groupes les plus aisés. Ils dépendent principalement de l'assistance humanitaire. Ils ne possèdent pas de véhicules et ne pratiquent pas le commerce. Les ménages très pauvres n'ont pas de ressources et dépendent presque principalement de l'assistance alimentaire et de la solidarité pour vivre.

Toutefois, dans les camps de réfugiés il existe des systèmes traditionnels d'octroi de prêts, basés sur la confiance entre réfugiés et souvent par le biais d'un garant. L'accord de prêt ou de crédit par les commerçants (externes et internes aux camps) se fait sur la base des capacités à rembourser du demandeur. La plupart des prêts se remboursent en espèces ou en nature, ou parfois en échange d'un travail domestique. La pratique de l'usure dans ces milieux

53

est très courante et le non-remboursement peut engendrer certaines tensions entre les communautés et a des recours à des stratégies de survie extrêmes.

Les réfugiés pratiquent des activités diverses, mais très peu de ménages ont plus de deux sources de revenus (7% des ménages). De manière globale, la vente des produits agricoles, le petit commerce non alimentaire et le travail journalier sont les trois activités principales génératrices de revenus dans les camps de réfugiés.

Les activités économiques que les réfugiés ont citées sont l'agriculture, l'élevage, le petit commerce, la fabrication de briques et la maçonnerie, mais aussi dans le travail journalier rémunéré chez les familles autochtones (soit dans leurs champs soit à la maison comme domestiques). La vente de poisson séché, de bois de chauffe et la paille pour les animaux, constitue une source de revenu importante pour les réfugiés. Il a été mis en exergue l'existence de possibilités d'emploi dans les ONG, comme traducteurs, animateurs, enseignants et agent de santé dans le camp. Certaines opportunités se présentent en dehors des camps, comme commerçants, gardiens, enseignants ou d'autres petits métiers (forgerons, maçons, menuisiers, réparateurs de vélos et de motos).L'artisanat, la cueillette et vente de miel sont les sources génératrices des revenus pour les réfugiés. Certains réfugiés reçoivent des transferts monétaires de la part de certains membres de familles installées à l'étranger. La population hôte est principalement active dans les cultures pluviales et le maraichage, l'élevage, le petit commerce ainsi que la collecte et vente de bois de chauffe. Les hommes parcourent habituellement de longues distances à la recherche de travail, pendant que les femmes cherchent habituellement une occupation autour de la maison, de manière à pouvoir continuer à gérer la famille et prendre soin des enfants. Unanimement les réfugiés indiquent que la possibilité de trouver un travail rémunéré reste très limitée. L'insécurité aussi est une contrainte majeure pour trouver des opportunités en dehors des camps, surtout pour les femmes qui peuvent être confrontées à des violences ou des abus. Le manque de moyens et de matériels, l'absence de microcrédit affectent le commerce et d'autres petits métiers.

Le statut socio-économique des ménages influe sur leurs dépenses et principalement sur l'alimentation et les autres secteurs (santé, éducation, transport, habillement, etc.). Selon les résultats des enquêtes, environ 60% des ménages enquêtés consacrent au moins 75% de leurs ressources à l'achat de nourriture avec une moyenne de 63%. Les discussions de groupe dans les camps et la communauté hôte montrent aussi que les ménages réfugiés consacrent essentiellement leurs dépenses aux besoins alimentaires. En effet, les femmes du groupe des

54

pauvres et des très pauvres déclarent consacrer 60 % de leurs revenus à l'alimentation. Les 40 % restant des dépenses permettent de couvrir divers autres besoins dont l'éducation, la santé, l'habillement, les combustibles domestiques, les abris, etc. L'accès au crédit formel pour les populations réfugiées reste problématique à cause de leur statut dans le pays d'accueil qui ne leur permet pas d'avoir accès aux banques et institutions d'épargnes et de crédits car ne remplissant pas les conditions d'éligibilité.

En effet, l'insécurité alimentaire touchait 22.6% des ménages contre 44.1% cette année. La dégradation de la situation alimentaire est aussi en grande partie liée à la mauvaise qualité de la campagne agricole qui affecte tant les ménages réfugiés que ceux autochtones globalement dans le pays et au niveau des zones qui abritent les camps de réfugiés. L'insécurité alimentaire à globalement progressé, quoi que légèrement, de 5% au niveau national et 1.5% dans les régions du Logone Oriental et Moyen Chari. Dans les camps de Goré 56,2 % des ménages étaient en insécurité alimentaire, en grande partie due à une consommation pauvre et à un usage accru des stratégies qui érodent les moyens d'existence des ménages.

Le nouvel afflux illustre le fait que des retours volontaires massifs sont improbables dans le court terme. Lors du dernier afflux, une approche de « villagisation » a été adoptée pour intégrer les réfugiés au sein des populations d'accueil86.

Figure 1 : Les réfugiés centrafricains à Amboko

86Mission d'évaluation conjointe HCR/PAM de la situation des réfugiés centrafricains au Tchad

55

Source : CNAR, Mars 2019

B- L'amélioration des conditions de vie des réfugiés grâce à l'action des ONG internationales à Goré

En 2015, le HCR et le PAM ont commencé à développer un Programme conjoint pour l'autosuffisance des réfugiés et des populations hôtes du Tchad dont l'objectif est de réduire progressivement la dépendance des réfugiés vis-à-vis de l'assistance humanitaire et de renforcer proportionnellement les moyens d'existence dans une optique d'autonomisation. L'approche proposée consiste à optimiser l'utilisation des ressources à travers une assistance multisectorielle ciblée fournie selon les besoins spécifiques de chaque ménage d'une part et, d'autre part, un investissement dans les moyens d'existence de sorte à favoriser l'auto prise en charge. A ce jour, le plan de mise en oeuvre du programme est élaboré par le concours des ONG internationales et les différents objectifs, bien qu'ils ne soient pas atteints sont en cours d'exécution. On constate donc que des liens entre les activités de renforcement des moyens d'existence et d'assistance alimentaire sont établis et que les deux programmes fonctionnent souvent en collaboration. Le programme conjoint pour l'autosuffisance des réfugiés et des populations hôtes du Tchad, 2015-2020 est péniblement en marche. Malgré cela, une nouvelle stratégie nationale de promotion des moyens d'existence durables 2015-2020 pour les réfugiés a été récemment adoptée par le HCR. Pour la mise en oeuvre, le HCR et ses partenaires à savoir les ONG internationales ont fait un effort pour réaménager son budget interne afin d'accorder une part plus importante aux activités d'autosuffisance. L'assistance alimentaire continue du PAM est tout aussi cruciale car il a permis aux ménages de maintenir ou renforcer leurs activités de subsistance. D'où la pertinence toujours d'actualité du programme conjoint, surtout que le PAM envisage des coupures imminentes de l'assistance alimentaire. Ici, il convient de noter que certains réfugiés sont restés toujours dépendants au moins en partie de l'assistance alimentaire, étant donné l'environnement où ils vivent et les activités de subsistance que leur permet leur statut ou leur condition.

En partenariat avec les deux agences, les ONG ont développé et utilisent plusieurs outils pour collecter des données sur l'évaluation des besoins, le suivi et l'évaluation dans le domaine de la sécurité alimentaire et nutritionnel. Les réfugiés Centrafricains sont à Goré depuis le début de la crise. Leur retour dans leur pays d'origine n'est pas motivé par le fait de l'instabilité. Ils reçoivent une assistance du Gouvernement appuyé par la communauté humanitaire. Dans les différents secteurs les avancées ont été notées, mais pour le moment il

n'existe pas des solutions durables pour la majorité des réfugiés. Au niveau de renforcement de moyens de subsistance. Dans les camps de Goré, le programme d'assistance des refugies et population hôte dans le cadre des programmes de production agricole et petit élevage a permis d'améliorer la situation socio-économique des bénéficiaires. La situation de la sécurité alimentaire des réfugiés est restée quasiment stable à Goré. Par ailleurs l'afflux des nouveaux réfugiés et des retournés Tchadiens venant de Centrafrique a négativement influencé les disponibilités et l'accès aux produits alimentaires dans les régions hôtes du Sud. Faute des ressources les actions d'accompagnement de cette catégorisation n'ont pas pu être mises en place. Ainsi un programme conjoint pour renforcer les moyens de subsistance et les opportunités des revenus a été élaboré. Néanmoins, la situation de la malnutrition aigüe globale est élevée dans la communauté hôte comparée aux camps des réfugiés87.

56

87ibid

CHAPITRE II : L'OPERATIONNALISATION DES ONG

INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE

57

L'opérationnalisation des ONG internationales à Goré est encadrée par un arsenal d'instruments juridiques et mécanismes institutionnels, mais au-delà de ces mécanismes et instruments il y'a le problème d'opérationnalisation qui consiste à se déployer sur le terrain notamment dans les différents camps de Goré afin d'assister au mieux les réfugiés. Pour ce faire, cette phase suit un certain nombre de stratégies bien spécifiques aux ONG (Section I) ensuite il y'a l'effectivité qui consiste mettre en oeuvre les projets à travers des réalisations tant visibles qu'appréciables (Section II).

SECTION I : LE CADRE OPERATIONNEL

L'espace humanitaire doit être un espace de liberté d'action. Cela ne doit pas être pour autant un espace de désordre, sans coordination, responsabilité ou exigence de rendre compte. Faire cohabiter ces différentes exigences est un enjeu fondamental. Il se construit autour de trois grands axes à savoir : la coordination (entre les agences ainsi qu'avec les autorités tchadiennes pour la prise en compte de politiques nationales, etc.),la mise à disposition des ressources et enfin la mise en oeuvre de la responsabilité de chacun à rendre compte.

Entre « se coordonner avec » et « être coordonné par », il y a la nuance entre indépendance et subordination. Cette question, toujours sensible, a été rendue plus complexe encore du fait de difficultés de coordination entre trois grosses composantes : la composante Organes onusiens, celle autour des ONG et celle du gouvernement. Les liens entre coordination opérationnelle, coordination budgétaire et allocation des fonds occupent une place centrale dans les débats sur l'indépendance des acteurs humanitaires. Les expériences de Pool Funds laissent de nombreuses ONG sur la défensive car ces mécanismes d'attribution des fonds contrôlés par l'ONU induisent une perte d'indépendance des ONG, les transformant en simples prestataires de service. Ce sujet de préoccupation existe depuis longtemps parmi les ONG qui sont en forte dépendance de financements du HCR, de l'UNICEF ou du PAM et qui voient avec inquiétude les bailleurs de fonds transférer de plus en plus de ressources aux mécanismes onusiens de type Trust Fund tout en limitant les financements directs vers les ONG.

Paragraphe I- La mise en oeuvre de l'action des ONG internationales à Goré

L'opérationnalisation de l'action des ONG est un mécanisme suivant plusieurs canevas et nécessitant une certaine exigence allant de l'état des lieux qui est une étude préalable pour

58

s'enquérir de la situation avant tout interventionnisme. Après l'étude des lieux, les acteurs humanitaires, en l'occurrence les ONG internationales comme dans notre cas précis procèdent à un déploiement ou encore une opérationnalisation. Cette phase nécessite la coordination des activités et la mise en place des partenariats avec différents autres acteurs humanitaires (Organes onusiens, le gouvernement ou dans la moindre mesure les ONG nationales) (A). L'étape préénoncée est suivie par l'observation des stratégies spécifiques pour l'effectivité des actions à entreprendre (B).

A- Les partenariats entre les ONG internationales et les organes des Nations Unies Collaboration et mise en oeuvre

La présence de l'ONU au Tchad est structurée autour du Représentant Coordinateur (RC) et Représentant Résident du PNUD, qui assume aussi la fonction de Coordinateur Humanitaire (HC). Présentes au Tchad pour des programmes de développement, les Nations Unies ont vu leur rôle se diversifier avec la crise des réfugiés du Soudan à l'Est et de la RCA au Sud (HCR, PAM) ainsi que celle des déplacés dans l'Est (HCR, PAM, UNFPA, UNICEF, FAO, avec OCHA pour la coordination). La coordination reste assez compliquée en raison d'une multiplication des instances, réunions et mécanismes, ceci notamment suite à la mise en place, dans le cadre de la Réforme Humanitaire des Nations Unies, du système des Clusters. La famille des « ONG internationales » comprend aussi bien des acteurs dotés d'une présence ancienne, liés aux églises ou à des projets de développement, que des nouveaux arrivés, les ONG humanitaires. A l'exception de quelques grosses structures, les équipes des ONG sont souvent relativement jeunes et parfois peu expérimentées pour le niveau de complexité des tâches qui leur sont confiées. Les ONG humanitaires sont souvent très dépendantes des financements des Nations Unies et des grands bailleurs humanitaires classiques (ECHO, OFDA, DFID). Face aux défis des dernières années, la majeure partie des ONG humanitaires au Tchad se sont regroupées au sein d'une instance de coordination, le Comité de Coordination des ONG (CCO), afin de pouvoir mieux définir des positions communes face aux autorités tchadiennes, aux Nations Unies. Les choses se sont modifiées quand les ONG ont commencé à se déployer dans la zone d'intervention.

La portée et les objectifs de la collaboration entre les ONG internationales et les organes des Nations Unies sont décrits dans la lettre d'entente de janvier 2011 ;

59

Au Tchad, la collaboration opérationnelle entre ces acteurs est basée sur des mécanismes de coordination au niveau central et des sous-délégations/bureaux. Des partenariats de mise en oeuvre et opérationnels existent avec les organisations humanitaires internationales, nationales et gouvernementales qui sont présentes dans les camps et qui interviennent dans les différents domaines (santé, nutrition, eau, assainissement et hygiène, protection, services communautaires, etc.) Par ailleurs, il existe peu de contacts avec les acteurs du développement (comme le FAO, le PNUD ou le secteur privé par exemple), qui sont souvent absents des zones où les réfugiés se trouvent, et où les structures étatiques d'aide au développement n'ont elles-mêmes que très peu de moyens.

B- Le partenariat entre les ONG internationales, l'Etat tchadien

Pour ce qui du partenariat entre les ONG internationales et le gouvernement tchadien, il faut noter que le gouvernement fonctionne en termes de Plan de Réponse. Ce Plan de Réponse pour les Réfugiés contribue à la mise en oeuvre du pacte mondial en articulant des réponses multi-acteurs au profit des réfugiés et des communautés d'accueil, tels que définis par le gouvernement et ses partenaires. Dans l'application d'un cadre global de réponse pour les réfugiés, en tant qu'approche globale et inclusive de la société, un large éventail de parties prenantes collaborera avec le Tchad pour l'aider à faire face à l'impact de l'accueil des réfugiés sur ses communautés hôtes, à renforcer la résilience et à s'engager dans des programmes de développement au niveau national et provincial. Dans ce contexte, le gouvernement du Tchad sera soutenu par les agences des Nations Unies, la Banque mondiale à travers l'IDA, l'Union européenne et d'autres donateurs importants, les acteurs du développement, les organisations gouvernementales et non-gouvernementales (ONG), les acteurs de la société civile, les donateurs traditionnels et le secteur privé.

Lors de la table ronde des donateurs qui s'est tenue à Paris en septembre 2017, le gouvernement, appuyé par les agences du Système des Nations-Unies, a réussi à recueillir en promesses environ 20 milliards de dollars. Le présent plan de réponse aux réfugiés du Tchad (CRRP) s'aligne sur le PND qui garantit l'inclusion progressive des réfugiés dans les structures de développement nationales. À cette fin, les partenaires humanitaires à savoir les ONG internationales collaboreront étroitement avec les ministères et les institutions gouvernementales, en particulier avec le ministère en charge de l'Administration (y compris la CNARR et la DAPEC); le ministère en charge de la Planification, le ministère en charge de la

60

Santé, le ministère en charge de l'Éducation, le ministère en charge de la Formation Professionnelle, le ministère en charge de l'Agriculture, le ministère en charge de la Justice et des Droits de l'homme et le ministère en charge de la Femme. Le Plan Cadre des Nations Unies d'Assistance au Développement (UNDAF Tchad 2017-2021) et le Plan de Réponse Humanitaire (HRP), dans lequel s'intègre ce Plan de Réponse pour les Réfugiés. Comprennent plusieurs points dont l'encadrement des réfugiés, la gouvernance, la paix et la sécurité. Ce point est crucial car il comprend aussi la protection de l'enfance, le système de protection sociale, la préparation aux situations d'urgence, les interventions en cas de crise et de catastrophes ainsi que le relèvement rapide.

La synergie entre les agences humanitaires se poursuivra en 2019-2020 pour répondre aux besoins des réfugiés (les nouveaux arrivés comme les personnes en situation de déplacement prolongé) à travers des actions en faveur de la protection, l'assistance, la résilience et la recherche de solutions durables. Les réponses aux situations prolongées sont basées sur un ciblage plus différencié et des initiatives complémentaires visant à améliorer la sécurité alimentaire, la nutrition et la résilience des réfugiés et de leurs communautés d'accueil. Un certain nombre d'ONG internationales (ACF, ACS, ADRA, AIRD, Care Worldwide, COOPI, CRS, HIAS, IRC, LWF, OXFAM, RET, WCDO, World Vision, World Concern) et nationales (ADES, APLFT, CRT, SECADEV) ont confirmé leur engagement à soutenir l'intégration socio-économique des réfugiés, des rapatriés et des personnes déplacées au Tchad. À cette fin, des partenariats sont établis avec des acteurs clés du secteur privé et des entreprises technologiques de premier plan. De ces partenariats peuvent émerger des modèles pour donner aux réfugiés les moyens de mettre en oeuvre des activités d'apprentissage et de subsistance au sein des communautés. La Commission Nationale d'Assistance aux Réfugiés (CNAR), dont tous les acteurs soulignent l'engagement, a été en charge d'une triple fonction : gérer les processus d'enregistrement des réfugiés bonafide en appui au HCR (CNAR Civile), la sécurité des camps (CNAR Gendarmerie) et enfin la mise en place, dans certaines zones, des mécanismes de médiation entre réfugiés et populations hôtes.

Paragraphe II : L'implantation des actions des ONG internationales à travers des

stratégies spécifiques

Contrairement aux autres instances ou structures, les ONG internationales fonctionnent à travers des stratégies spécifiques qui sont entre autres les programmes et les projets (A) d'une part et les plans de réponse (B) d'autre part.

61

A- Les programmes et projets des ONG

Un programme est un outil de planification visant à financer les projets jugés pertinents pour atteindre les objectifs spécifiques bien précis qu'on s'est fixé. Il s'agit de fonds pouvant être publics ou privés visant à aider des projets à but non lucratifs et dans certains cas des projets d'affaire à prendre de l'envol à travers des subventions, contributions et aides financières. Le programme s'appuie par conséquent sur les objectifs généraux et spécifiques bien précis, une combinaison d'instruments notamment les actes juridiques, les engagements institutionnels, politiques et des financements bien précis. Le financement dans un programme, est un outil important qui complète les mesures législatives. Un programme a pour but de mieux répondre aux besoins de la planification stratégique et de la gestion axée sur les résultats (GAR), d'atteindre les objectifs spécifiques qu'on s'est fixé en mobilisant plusieurs parties prenantes, de renforcer le partenariat avec les parties prenantes. Il permet aussi de prendre en compte l'environnement politique, social, économique en constante évolution et d'optimiser le rendement d'un système. Il assure, par un processus rigoureux, l'élaboration et la mise en oeuvre de projets pertinents, cohérents et applicables ; en permettant une responsabilisation accrue des institutions publiques et organisations privées dans la gestion des projets.

Un programme normalement finance donc les projets qui correspondent ou s'inscrivent dans les actions prévues dans son plan d'action. Ainsi un bon programme de subvention est la résultante d'une approche globale permettant de finaliser les actions prioritaires d'une planification stratégique bien précise. Il est défini par compétence. La compétence étant un pouvoir d'agir, de réussir et de progresser qui permet de réaliser adéquatement des tâches ou des activités et qui résulte d'un ensemble intégré de connaissances, d'habiletés, d'attitudes et de comportements. Le programme sert justement à changer une situation de départ et exige pour cela l'acquisition de compétences. A travers les actions qu'il va réaliser via le financement des projets, il permet d'acquérir des compétences fonctionnelles ou opérationnelles. Il permet aussi d'exercer un changement dans le milieu d'intervention. Cela pourra se traduire aussi par le transfert d'apprentissage et l'adaptation à des situations nouvelles. Un programme répond à des objectifs spécifiques sur des thèmes ou des domaines politiques précis.

Quant à un projet, il peut être défini comme une « entreprise» complexe, unique et ayant une durée déterminée, orientée à l'atteinte d'un objectif préfixé grâce à un processus continu de planification, exécution, contrôle des différentes ressources et avec des facteurs interdépendants

62

de objectifs-coûts-délais. Un projet est donc un système dynamique à maintenir en équilibre car chaque changement le déséquilibre. A l'origine d'un projet, se trouve une situation problème qui se définit comme la différence entre une situation initiale et une situation finale, lorsqu'il n'y a pas de méthode préétablie pour atteindre la situation finale. Le projet doit venir résoudre partiellement ou totalement le problème identifié. Pour cela, le projet se doit de proposer une solution valide qui ne peut être à un problème suite à une analyse de la situation qui a été correctement menée. L'analyse consiste à rassembler les données utiles pour dresser un état des lieux de la situation pour rédiger l'énoncé du problème. Elle débouche sur l'identification de problèmes ou besoins qui ont les caractéristiques suivantes : Un besoin est de nature matérielle ou immatérielle. Un besoin doit être effectif, consistant, palpable, il doit être futur doit être un besoin actuel et non pas futur, il doit être caractérisé, précisé, clairement identifié.

Partant de ces éclairages, les ONG, dans le souci d'une efficience opérationnelle, mènent leurs actions par le biais des programmes qui sont des structures regroupant plusieurs projets pouvant être connexes ou distincts. Un projet suit un état de lieu ou un diagnostic, une planification ensuite la matérialisation. Pour ce qui est du programme, l'on peut citer les organes des Nations Unies à savoir le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), le Programme Alimentaire Mondial (PAM). Ceux-ci font généralement des appels à projet et des ONG élaborent des projets afin de gagner cet appel. Au-delà des appels, il y'a des relations de coordination, de partenariat, des consortiums entre les ONG eux-mêmes ou entre les Programmes, les Organes onusiens et les ONG. Outre cette stratégie de fonctionnement des ONG, il y'a aussi les plans de réponse.

B- Les plans de réponse

Dans le même élan du partenariat entre l'Etat et les autres acteurs humanitaires, le plan de réponse s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre du Cadre d'Action Global pour les Réfugiés (CRRF)88. Le Plan de Réponse pour les Réfugiés est axé sur le renforcement des liens entre les autorités tchadiennes, les acteurs humanitaires et de développement afin d'améliorer

88L'assemblée générale des Nations unies, Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, résolution adoptée par l'Assemblée générale le 19 septembre 2016, A/RES/71/1, 3 octobre 2016. Le Cadre d'action global pour les réfugiés (« Comprehensive Refugee Response Framework », ou « CRRF » en anglais), l'une des deux annexes de la Déclaration de New York pour les réfugiés et migrants, trace les contours d'une réponse globale aux mouvements de réfugiés à grande échelle, en s'appuyant sur une démarche collective impliquant un éventail d'acteurs et d'approches. Son objectif est « d'alléger les pressions exercées sur les pays d'accueil concernés, d'accroître l'autonomie des réfugiés, d'élargir l'accès à des solutions faisant appel à des pays tiers et d'aider à créer dans les pays d'origine les conditions nécessaires au retour des réfugiés dans la sécurité et la dignité

63

l'environnement de protection des réfugiés et soutenir tant les réfugiés que les communautés hôtes. Cela sous-entend un plaidoyer conjoint à l'endroit du Gouvernement pour l'adoption d'une loi nationale d'asile garantissant les droits socio-économiques des réfugiés au Tchad. Ceci entre dans la logique des recommandations du forum national sur l'inclusion durable et socio-économique des réfugiés de 201789. Par ailleurs, des initiatives ciblées visant à renforcer l'autosuffisance et la résilience seront essentielles dans les zones d'accueil de réfugiés, ciblant à la fois et les réfugiés et les communautés hôtes. Les partenaires tels que la Banque mondiale et l'Union européenne seront étroitement associés à la réponse aux réfugiés dans la logique de leurs programmes respectifs pour les zones d'accueil de réfugiés. L'inclusion des réfugiés dans les programmes locaux et nationaux sont prioritaires dans le cadre de la mise en oeuvre du CRRF afin que les réfugiés bénéficient des services sociaux existants. Ceci entre dans la logique des engagements pris par le Gouvernement dans sa Lettre de Politique de Développement (annexée à la demande de financement du Tchad adressée au Groupe de la Banque Mondiale) ainsi que des recommandations issues du Forum sur l'inclusion socio-économique durable des réfugiés organisés en juillet 2017. Pour ce qui est du plan de réponse 2019-2020, il est prévu :l'augmentation et le renforcement de la participation des acteurs du développement du secteur privé et d'autres partenaires non traditionnels à la réponse aux problèmes des réfugiés :

1- L'engagement et l'accord des acteurs humanitaires et de développement sur un ensemble de priorités communes visant à renforcer le développement et le bien-être de la communauté dans les zones d'accueil des réfugiés et à améliorer la prestation de services aux réfugiés et aux communautés d'accueil ;

2- La promotion de l'autonomie des réfugiés dans le cadre d'une approche basée sur le développement communautaire.

3- D'évaluer la situation et la capacité du Gouvernement et des autres parties prenantes à fournir des services dans les zones d'accueil afin de déterminer les besoins à couvrir ;

89Le ministère de l'administration du territoire et de la gouvernance locale avec l'appui du HCR a organisé un forum national sur l'intégration socio-économique et durable des réfugiés au Tchad du 25 au 27 juillet 2017.Ce forum porte sur l'échange des principaux acteurs sur des mesures qui pourraient faciliter l'inclusion et réunit tous les représentants des agences du système des Nations Unies et partenaires, refugiés, les bailleurs et le gouvernement tchadien

4-

64

D'adopter, de manière consensuelle, une feuille de route indiquant les actions à entreprendre et les responsabilités clairement définies de chaque acteur afin d'atteindre un niveau optimal de services dans les zones d'accueil ;

5- De mettre en place un mécanisme de suivi de la mise en oeuvre des activités prévues dans le plan d'action CRRF avec la participation des parties prenantes ;

6- De faire un suivi régulier de la mise en oeuvre des actions convenues de manière consensuelle afin d'adapter la feuille de route aux progrès accomplis.

Grace à ces stratégies, les ONG internationales et leurs partenaires mènent leurs activités tout en respectant leur cahier de charge. De ce fait, il est important de voir quelles sont effectivement les réalisations des ONG dans les camps de Goré.

SECTION II : L'EFFECTIVITE DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS
DE REFUGIES DE GORE

L'effectivité des ONG consiste à constater toutes les réalisations des ONG dans les camps. Ces réalisations vont des secteurs prioritaires aux besoins secondaires.

Paragraphe I : Les réalisations dans les secteurs prioritaires A- La satisfaction des besoins vitaux

1- Éducation

Après une longue période de grève au Tchad, les cours ont repris sur l'ensemble du Territoire. Dans les camps de Goré, les réfugiés n'ont pas été touchés par la grève, car les écoles situées dans les camps ont continué à fonctionner. Au niveau national, des mesures importantes ont été prises pour intégrer les réfugiés dans le système éducatif national. Ainsi, 75 écoles primaires et 21 écoles secondaires situées dans des camps de réfugiés ont été officialisées par le ministère de l'Éducation. Dans le Sud, des milliers de réfugiés nouvellement arrivés de République centrafricaine ont été et continuent d'être intégrés dans des écoles locales et des camps. Pour ce qui est des chiffres, avec le concours des ONG comme ACRA, le Secours Islamique France (SIF) et RET International. 16.712 enfants réfugiés sont scolarisés. Il y'a eu 24 TLS et 3 salles de classes construites. 6880 élèves du primaire ont bénéficié des cours d'été.

2- Eau, hygiène et assainissement

Le système d'approvisionnement en eau potable dans les camps de réfugiés de Goré se fait avec du nouveau matériel grâce à l'aide apportée par ADES, du SIF, de la FICR,

65

d'OXFAM et de l'International Developpement Organisation (IDO) et aussi avec les efforts fournis par le HCR et ses partenaires. Actuellement, le taux d'approvisionnement est de 47 litres par personnes par jour. La couverture des latrines familiales est de 71% à 58. Quant aux réalisations, 977 latrines communautaires construites. 45 forages réalisés et 22 autres réhabilités. 45 kits d'assainissement fournis.

3- Moyens de subsistance

Selon le rapport d'évaluation de BEDRAT mené au début de 2018, la production de sorgho (récolte) est passée de 500 kg /ha à 900 kg /ha à Goré. 5019 personnes ont reçu une assistance en activités de subsistance. Les réfugiés ont bénéficié des formations professionnelles, l'on compte un total de 466 bénéficiaires. Quant aux plants mis en terre ils sont au nombre 600 et 1199 hectares de terres agricoles négociées pour les nouveaux réfugiés. Ce secteur est géré par l'ADES et de CARE.

4- Protection

La protection est l'un des points cruciaux dans les camps de réfugiés de Goré, car ils sont exposés aux pillages, vols, agressions et des exactions de toute nature. Dans le souci de leur garantir un certain standard de confort sécuritaire, les ONG internationales, à savoir l'Association de la Coopération Rurale en Afrique et en Amérique latine (ACRA), l'Agence de Développement Economique et Social (ADES), la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR)s'activent dans le domaine avec la collaboration de l'OIM. Ainsi, pour mieux assurer cette protection il a été effectué un enregistrement. 22010 réfugiés ont été enregistrés et 513 cas de violence sexuelle assistés. 728 incidents de protection enregistrés. 410 assistances juridiques offertes. 1668 enfants à risque, 19260 actes de naissance délivrés aux enfants. 2600 enfants bénéficiaires de la cantine scolaire. Et enfin 48 dossiers BID conduits.

5- Santé et nutrition

La prévalence de malnutrition aigüe est globalement en dessous du seuil d'alerte de 10% aussi dans les camps de Goré (6,8%) mais cette tendance est baissière. Cette diminution s'explique par les efforts multisectoriels des différents intervenants dans les camps. Cependant ces efforts doivent être maintenus dans les camps avec une prévalence acceptable. La

66

prévalence de malnutrition chronique globale, malgré le fait qu'elle diminue, reste critique dans la quasi-totalité des camps (la prévalence étant partout supérieure à 40%). La prévalence globale de l'anémie chez les enfants de 6 à 59 mois est élevée (65%) et interpelle sur la poursuite des activités de diversification alimentaire et de fortification. Les ONG comme l'ADES, CARE International, The Johns Hopkins University (Jhpiego), Mentor Initiative (MI), Médecin Sans Frontière France (MSF-F) conscients de la situation, ont construit 1 centre de santé et en ont réhabilité 3. Puis 9027 enfants pris en charge dans les programmes de soins et prévention de la malnutrition.

6- Sécurité alimentaire

La dégradation de la situation de sécurité alimentaire des ménages réfugiés, est liée au mauvais déroulement de la campagne agricole. La situation de la sécurité alimentaire des réfugiés s'est beaucoup détériorée. Les discussions avec les réfugiés, la réduction des quantités de la ration a entrainé une diminution de la fréquence des repas. Ainsi, pour améliorer cette situation, les ONG à l'instar de l'ADES, et de Cooperative for American Remittance to Europe (CARE International) en collaboration avec le PAM et le FAO ont porté assistance à 10550 ménages sur les 42010 que comptent les camps de Goré.

7- Abris

Les ménages vulnérables ont bénéficié chacune de 350 dollars américains pour la construction de leurs abris. Au delà de cette somme, 5464 abris d'urgence ont été construits avant que 1339 abris ne viennent compléter. Ensuite 116941 articles ménagers essentiels ne puissent être distribués par ADES, la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM), la FICR, l'Oxford, Committee for Famine Relief (OXFAM).

B- L'assistance dans le secteur de développement et de l'environnement

Le Tchad présente déjà une situation précaire au niveau environnemental. L'exploitation des ressources naturelles a exacerbé par le durcissement des conditions climatiques, qui ont dû accueillir une charge démographique supplémentaire. Les réfugiés en situation de survie n'ont eu d'autres alternatives que de puiser abondamment dans la nature les ressources nécessaires à leur subsistance. Ces mécanismes amplifient considérablement la destruction de l'environnement et peuvent agir comme facteurs déclencheurs de tensions sociales dans la mesure où l'accès aux ressources hydriques, agricoles pastorales et ligneuses

devient concurrentiel avec les populations hôtes. Ainsi pour pouvoir préserver l'environnement et le protéger, des activités ont été menées par les réfugiés sous le pilotage des ONG internationales. Ces activités vont de la sensibilisation sur les avantages de préservation de l'environnement à la plantation des arbres dans les camps. Les ONG chargées de ce pilotage sont assistées par le FAO. Quant aux ONG en question, il s'agit de ADES et CARE.

67

Figure 2 : Réalisations sectorielles des ONG internationales dans les camps de Goré

68

Source: UNHCR/2018 Juin, Réponse humanitaire.

69

Paragraphe II : Les stratégies d'adaptation et les modalités de distribution A- Les stratégies d'adaptation

Lors des discussions, les réfugiés ont déclaré être contraints de réduire la quantité et la fréquence des repas ou d'avoir recours à des emprunts chez les commerçants ou chez les grossistes, bien que d'habitude un grand esprit de solidarité caractérise la communauté, quand les ménages n'ont pas assez à manger. Les stratégies d'adaptation changent selon le groupe socio-économique et le genre :

? Chez les pauvres les femmes s'endettent pour se procurer la nourriture ou demandent aux voisins et aux parents de l'aide, tandis que les hommes recherchent du travail ;

? Chez les moyens les femmes se consacrent à la vente de bois ou de fourrage, tandis que les hommes vont à la recherche de travail ou ont recours à l'endettement. Pendant la soudure les stratégies les plus utilisées sont l'exploitation des ressources naturelles (bois de chauffe, paille, collecte d'igname sauvage et de karité, etc.) ainsi que la pratique du maraîchage et le travail journalier. Les enfants sont également mis à contribution pour augmenter les revenus, notamment comme travailleurs domestiques chez les autochtones. Les mécanismes mis en place par les ménages moyens pour couvrir les besoins alimentaires et non alimentaires en période de soudure sont l'intensification de la main d'oeuvre et le crédit en nature remboursable avec un taux d'intérêt élevé. Les ménages ont déclaré réduire le nombre de repas à un par jour. Au niveau des ménages pauvres ces mécanismes vont de l'emprunt auprès des commerçants, à l'artisanat et la vente des services chez les hommes tandis que chez les femmes les travaux journaliers agricoles et non agricoles, la recherche de bois pour la vente, la vente de légumes sauvages (roquette) sont les stratégies les plus usitées. Par ailleurs, les ménages dirigés par les femmes sont plus vulnérables, faisant plus recours aux stratégies de survie par rapport à ceux dirigés par les hommes. Les stratégies qui concernent la sphère alimentaire sont mesurées avec l'indice des stratégies de survie simplifié (Coping Strategy Index -CSI), qui apprécie la fréquence de cinq comportements du ménage : la consommation d'aliments moins préférés car moins chers, l'emprunt de la nourriture, la diminution des portions, la réduction de la consommation au profit des enfants et la réduction du nombre de repas par jours. Plus le score est élevé plus les ménages font recours à ces stratégies d'adaptation. Au niveau de la population hôte, les ménages en insécurité alimentaire ont vu leur consommation alimentaire se détériorer malgré le recours aux stratégies d'adaptation, qui ont des effets négatifs sur leurs moyens d'existence à court, moyen et long terme.. La soudure agricole a été plus longue que d'habitude

en raison de l'arrivée tardive des pluies et cela a poussé les ménages à recourir à ces stratégies même en début des récoltes. En effet, 37% ont, au moins une fois, limité la portion des repas, indiquant un accès limité de tous les membres à une nourriture suffisante. Les ménages qui n'avaient pas encore récolté ont dû réduire le nombre de repas et emprunter la nourriture. L'adoption de stratégies de survie qui peuvent entraver sur le long terme la capacité des ménages à accéder à une alimentation adéquate est très courante dans les zones fortement déficitaires. Il s'agit en particulier de la vente de femelles, de la vente d'animaux plus que d'habitude et de la réduction des dépenses de santé.

Tableau 2 : Revenu moyen en FCFA générés au cours 10 derniers mois pour les ménages par activité principale

Rang de l'activité

Source de revenus

Revenus moyen

1

Vente d'animaux

201.500

2

Vente de produits de pêche

82.500

3

Vente produits agricoles autoproduits

60.507

4

Salaire/pension

59.333

5

Commerce de produits alimentaires ou animaux

42.398

6

Vente produits maraichers

36.609

7

Petits commerces de produits non alimentaires

33.456

8

Travail journalier

32.456

9

Artisanat/petits métiers

29.520

10

Transport

17.318

11

Aide/don ou Transfert

14.260

12

Autres

12.196

70

Source : HCR décembre 2018

71

B- Les modalités de distribution

En 2015, le HCR a complété un processus de vérification d'enregistrement des réfugiés, incluant les données biométriques aux données déjà disponibles. En effet, l'enregistrement biométrique a mené à une réduction moyenne de 18% du nombre de réfugiés dans le pays, en passant à presque 42000. Ceci est fait dans le cadre d'un programme conjoint pilote sur cinq ans, lancé en 2014, qui vise à promouvoir l'autonomisation progressive des réfugiés de longue durée. Ainsi un programme conjoint pour renforcer les moyens de subsistance et les opportunités des revenus a été élaboré. Une étude socio-économique de base a été conçue pour élaborer les critères des niveaux des richesses, identifier les proportions de chaque catégorie socioéconomique par camp, définir un modèle statistique pour les groupes de richesse (Très Pauvres, Pauvres, Moyens et Nantis), établir les indicateurs de base pour le ciblage et décrire la situation socio-économique de base pour mieux comprendre les causes et ainsi définir les opportunités d'intervention dans les camps et leurs alentours. Cette étude comporte deux grandes parties : un volet qualitatif et un volet quantitatif. Le volet qualitatif a été conçu au même titre que le «Wealth Ranking» du HEA (Household Economy Approach) pour permettre aussi de mieux connaitre la situation socio-économique incluant les défis et opportunités, dans les camps et autour des camps. Tous les indicateurs des niveaux de richesse définis pendant l'enquête participative de définition de niveaux de richesse sont obligatoirement inclus dans le questionnaire utilisé pour l'enquête ménage pendant le volet quantitatif. L'enquête de catégorisation des ménages est un recensement exhaustif et quantitatif qui est mené au niveau de tous les ménages dans le camp. Un questionnaire simple est utilisé et porte sur les déterminants de richesse, et qui sont modélisés et pondérés avec les données collectées pendant l'enquête multisectorielle approfondie. A la fin de l'exercice, les données sont analysées selon le modèle statistique, cette étape aboutit à la première liste de catégories selon le niveau de richesse (Très Pauvres, Pauvres, Moyens et Nantis). Il est toutefois important de souligner que les déterminants de richesse varient d'un camp à un autre et doivent ainsi être considérés pour cas spécifique. Les camps sont localisés dans des zones avec une meilleure sécurité alimentaire, plus d'opportunités d'exploitation agricole et des AGR.

CONCLUSION PARTIELLE

Le Tchad est devenu depuis quelques années une terre d'accueil des réfugiés. L'accueil des réfugiés centrafricains dans le sud du pays notamment dans les camps de réfugiés de Goré

72

en est une parfaite illustration. Cette situation nécessite des moyens importants pour un pays comme le Tchad qui sur le plan interne, économiquement est au bord de l'asphyxie. De ce fait, étant une obligation mondiale et un principe universel, l'assistance aux réfugiés s'impose d'où la nécessité de soutenir le Tchad dans ce processus. Les camps de réfugiés de Goré font ainsi désormais l'objet d'une avalanche des ONG internationales. Avant d'étudier les actions de ces ONG à Goré il a été question d'étudier les divers fondements des ONG car selon le dicton populaire, « pour savoir où tu vas, il faut savoir d'où tu viens ». Ces fondements vont de l'histoire à la sociologie. Après avoir élucidé la question des fondements, l'on a procédé à un état des lieux des camps de Goré car avant toute étude qui se veut efficiente, il est important de s'enquérir de la situation au préalable. Une fois l'état des lieux effectué, nous avons procédé à l'étude de l'opérationnalisation qui est une phase qui se déroule selon des stratégies bien définies à savoir des programmes et projets d'un coté et les plans de réponse de l'autre.

Cependant, ces stratégies aboutissent à des actions concrètes sur le terrain qui nécessitent une étude diligente. Cette étude a mis en évidence les réalisations des ONG dans les camps de Goré, qui témoigne de la nécessité d'assistance de ces populations vulnérables qui, l'on le rappelle est un principe universel.

DEUXIEME PARTIE

IMPACTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE

73

74

S'il est vrai que la présence des réfugiés sur un territoire, lorsqu'elle n'est pas bien organisée ou lorsqu'elle n'a pas fait l'objet d'une planification stratégique au préalable, peut constituer un facteur important de risque pour le pays d'accueil, elle ne constitue pas pour autant un fardeau. Au contraire, elle peut, à plusieurs égards, positivement impacter des leviers importants du processus du développement socio-économique et politique du pays hôte et ceci ne peut se faire diligemment que par le concours des ONG. C'est le sens de l'affirmation du Haut-commissariat des Nations Unies selon laquelle «L'impact économique des réfugiés sur les pays hôtes n'est toutefois pas nécessairement négatif. La présence des réfugiés peut stimuler l'économie et conduire à l'ouverture et au développement de régions d'accueil »90.Pour le cas du Tchad, les résultats des recherches et des observations effectuées dans le cadre la présente étude confirment que l'accueil des réfugiés dans les camps de Goré avec la présence massive des ONG internationales constitue un atout important pour le Tchad sur plusieurs plans mais avant d'évoquer l'impact de ces actions pour le Tchad, il serait judicieux d'aborder les impacts de ces actions dans le quotidien des réfugiés eux-mêmes (Chapitre III) , cependant, ces actions ne sont pas exempts de limites à savoir des éventuelles difficultés qu'il serait rationnel d'aborder et dans une moindre mesure suggérer des pistes d'amélioration (Chapitre IV).

90UNHCR Standing Committee : « Impact social et économique d'importantes populations réfugiées sur les pays hôtes en développement », 1997. Source : http://www.unhcr.org/fr/ le 27 février 2017

CHAPITRE III : L'IMPACT POSITIF DE L'ACTION DES ONG
INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE

75

Le Tchad est un pays à faible revenu de l'Afrique centrale91entouré par la Lybie au Nord, le Niger et la Nigeria à l'Ouest, le Cameroun au Sud-ouest, la République Centrafricaine (RCA) au sud et par le Soudan à l'est. Le développement économique reste faible et les défis du pays sont nombreux. Les pluies irrégulières, des sécheresses cycliques, les invasions de criquets et des mauvaises pratiques agricoles affectent négativement la production céréalière et constituent les principales causes de l'insécurité alimentaire chronique qui affecte le pays. En plus de l'insécurité alimentaire, le Tchad est confronté à une malnutrition endémique, un problème majeur à la fois de santé publique et de développement qui affecte une forte proportion de la population, particulièrement les enfants de moins de cinq ans, les femmes enceintes et allaitantes. La malnutrition est la manifestation d'un ensemble de déterminants multifactoriels: une insuffisance d'accès à l'eau potable et à un assainissement et hygiène adéquats, l'insécurité alimentaire, l'accès difficile aux soins de santé et les pratiques alimentaires inadéquates du nourrisson et du jeune enfant (ANJE). Malgré cette situation économique délicate le Tchad fait office de terre d'accueil des réfugiés notamment en provenance de la RCA92. L'une des régions importantes qui accueille ces réfugiés est la région de Goré.

Avec tous ces problèmes internes, le Tchad ne peut à lui seul faire efficacement face à l'afflux des réfugiés. Alors, avec l'appui des agences du système des Nations Unies et les ONG internationales le Gouvernement du Tchad est engagé dans l'assistance de ces derniers. Cependant, notre travail se veut d'étudier l'impact des actions des ONG internationales sur la vie des réfugiés (Section I) ensuite l'impact de ces actions pour le Tchad dans son ensemble (Section II).

SECTION I : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES SUR LA
VIE DES REFUGIES DE GORE

A ce jour, la situation politique et sécuritaire en RCA demeure toujours assez précaire et personne ne peut véritablement prédire quand un retour des réfugiés centrafricains serait

91Pierre-George FERNAND, Raimi FASSASSI, « Démographie et développement en Afrique : éléments rétrospectifs et prospectifs », Québec, cahier Québécquois de démographie, Volume 40, n°2, automne 2011, p 33 92Propos rapportés par le Journal le Grand Soir du 19 octobre 2016, dans un article intitulé : « Tradition d'accueil des réfugiés : quand le Tchad donne une leçon à l'Europe »

76

envisageable. Et même si le Tchad n'a pas encore adopté le cadre légal national en faveur des réfugiés, il se conforme à la plupart des dispositions de la convention de Genève sur le statut du refugié93 tout en admettant le concours d'autres partenaires à savoir les ONG. De ce fait, l'objectif de cette partie est d'évaluer l'efficacité des interventions des ONG internationales dans les camps des réfugiés de Goré. Plus spécifiquement il serait question d'évaluer l'état de la sécurité alimentaire et nutritionnelle, sanitaire, éducatif, et l'aspect sécuritaire (Paragraphe I) et d'analyser les activités de soutien aux moyens d'existence dans une perspective de réduction progressive du besoin d'assistance (Paragraphe II).

Paragraphe I : Etude de l'impact dans les domaines prioritaires

Les initiatives menées au profit des réfugiés varient en fonction des besoins, des capacités d'action prenant en compte les ressources disponibles et même des domaines ciblés. S'agissant de ces domaines, la priorité qui leur est accordée varie, ne serait-ce qu'en partie, en fonction de l'analyse situationnelle faite par chaque structure et des priorités qu'elle s'est définie.

A- La protection

Le secteur de la protection est concentré sur les objectifs qui sont fondés sur des mécanismes de surveillance de la protection et un système adéquat de collecte et d'analyse de données. Ce secteur est assuré par les ONG internationales à savoir l'Association de la Coopération Rurale en Afrique et en Amérique latine (ACRA), l'Agence de Développement Economique et Social (ADES), la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR). Ces ONG actionnent en partenariat avec les agences Onusiennes à savoir l'UNICEF et l'Organisation Internationale pour les Migrants (OIM) et les ONG locales telles que l'Association des pour la Promotion des Libertés Fondamentales au Tchad (APLFT), le Secours Catholique Développement (SECADEV), la Croix-Rouge du Tchad (CRT), l'Initiative Humanitaire pour le Développement Local (IHDL).

Il est compartimenté en différentes étapes qui sont :

Convention du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés93

77

1- Protection communautaire

La section a renforcé les capacités des ONG internationales en matière de protection et d'appui aux personnes à besoins spécifiques. L'accès aux recours juridiques et à l'assistance seront également renforcés grâce à la mise en place de tribunaux itinérants et à des visites dans les centres de détention. Les ateliers de renforcement des capacités visent à la fois les autorités administratives, les forces de défense et de sécurité, les représentants des tribunaux ainsi que les réfugiés et leurs communautés d'accueil afin de faciliter l'accès à la justice et de lutter contre l'impunité.

2- Enregistrement et documentation

Une vérification régulière des réfugiés est organisée depuis 2018 dans les différents camps. Les mécanismes de délivrance des documents d'état civil sont renforcés en soutenant les autorités tchadiennes compétentes et en plaidant pour un enregistrement systématique des enfants réfugiés nouvellement nés. Le plaidoyer qui porte sur la liberté de circulation de tous les réfugiés dans les camps de Goré est suivi tend à être effectif. La libre circulation et l'accès à la terre sont des droits essentiels pour faciliter l'inclusion socio-économique et l'accès aux opportunités économiques.

3- Prévention et réponse aux violences sexuelle et sexiste (SGBV): Action contre les violences sexuelles et sexistes

Le secteur a renforcé les capacités des autorités à se déployer de manière concrète dans certaines zones et encouragé la mise en place de mécanismes à base communautaire pour prévenir et traiter les incidents de SGBV. Cela nécessite :

- Un partenariat solide avec les réfugiés dans une approche Âge, Genre et Diversité ;

- L'appui à la mise en place de structures communautaires ;

- La formation et l'autonomisation de la communauté pour organiser la sensibilisation sur la prévention et la réponse à la violence sexuelle et sexo-spécifique ;

- Le renforcement des mécanismes de soutien y compris l'assistance médicale et juridique. Le secteur s'est employé également à offrir des moyens de subsistance

78

et un accès à l'éducation et à la formation professionnelle pour les femmes à risque et les survivantes de la violence.

Globalement, l'aspect multisectoriel de la prévention et de la riposte a été renforcé. Le Groupe de travail sur la violence sexuelle et sexiste, créé en 2018 sous la direction des autorités tchadiennes avec le soutien du HCR et de l'Association pour la Promotion des Libertés Fondamentales au Tchad(APLFT), veille en vue de la transversalité de la prévention, de la prise en compte des questions de SGBV dans tous les aspects de la réponse aux réfugiés. Il s'agit donc d'intégrer les violences sexuelles et sexistes dans tous les secteurs humanitaires, en dispensant une formation aux partenaires et en sensibilisant les réfugiés.

4- Protection de l'enfance

Le secteur s'est concentré sur la sensibilisation aux droits des enfants dans les communautés afin de prévenir le travail des enfants, les mariages précoces et la violence sur les enfants. Les espaces amis d'enfants et le soutien socio-éducatif des enfants ont été élargis et réhabilités. Il s'est employé à réduire le nombre d'enfants à risque en procédant à la détermination de leur intérêt supérieur (BID) en vue de leur orientation et de leur assistance.

Dans le cas des enfants non accompagnés et séparés, le système de familles d'accueil temporaires a été renforcé. En collaboration avec les partenaires gouvernementaux notamment les ministères en charge de l'Action sociale, de l'Administration du territoire ainsi que la CNARR, le secteur de la protection a:

- Évaluation des structures de protection de l'enfance disponibles au niveau central et régional ;

- Renforcé les capacités de la Direction en charge de la Protection de l'enfance dans les provinces ;

- Identifié les enfants à risque pour une prise en charge adéquate ;

- Renforcé la capacité des acteurs au sein des réseaux de protection de l'enfance basés dans les communautés ;

- Mis en place des mécanismes d'orientation pour la prise en charge des enfants à risque.

79

5- Coexistence pacifique

Les ONG internationales et leurs partenaires ont renforcé les capacités des comités mixtes de règlement des conflits et soutiennent les activités conjointes au niveau communautaire. Cela a inclus la promotion d'une utilisation rationnelle des ressources locales, telles que la gestion communautaire de l'eau et la gestion des conflits. De plus, les acteurs du secteur de la protection ont travaillé conjointement avec toutes les parties prenantes pour prévenir le risque d'apatridie et y faire face.

B- Education

En matière d'éducation, les ONG en charge sont ACRA, le Secours Islamique France (SIF) et RET International en partenariat avec l'IHDL, le SECADEV et l'UNICEF. Toutes ces structures travaillent à aider les autorités centrales et locales à s'approprier l'éducation des réfugiés suite à l'officialisation des écoles des camps de réfugiés. Un appui continu à la construction, à l'entretien et à la réhabilitation des infrastructures scolaires, à la formation d'enseignants et à la fourniture de matériel pédagogique est essentiel pour consolider l'intégration des écoles de réfugiés dans le système tchadien. Les acteurs de l'éducation s'attèlent à faciliter l'accès à l'éducation et à améliorer les taux de scolarisation et de fréquentation. Une attention particulière est accordée aux filles et aux enfants ayant des besoins spécifiques. Toutes les activités éducatives ont pour cible la communauté locale, que ce soit dans des camps ou dans des villages hôtes. En termes de qualité de l'éducation, l'accent est mis sur la durabilité des interventions en fonction du contexte local94. Ainsi, à Goré, la priorité est la transformation d'espaces d'apprentissage temporaires (TLS) en bâtiments scolaires durables afin de répondre aux besoins du nombre croissant d'élèves. La qualité de l'éducation est également améliorée notamment par une formation adéquate et des motivations pour retenir les enseignants qualifiés.

C- Sécurité alimentaire

Les efforts visant à pérenniser la situation nutritionnelle des réfugiés ont été compromis par la diminution des financements. Il convient de noter que la ration alimentaire mensuelle couvre actuellement la moitié des besoins nutritionnels quotidiens (2100 Kcal/personne/jour).

94Unité de coordination du partenariat éducation pour la population rurale, les ONG françaises et le programme FAO/UNESCO « Education pour les populations rurales », 2005, p.76. Disponible sur le site http : www.fao.org

80

Cette situation expose les réfugiés les plus vulnérables à une insécurité alimentaire accrue et à la malnutrition, surtout dans un contexte nutritionnel difficile que connait la bande sahélienne.

Cela risque de compromettre les acquis enregistrés pour stabiliser la situation nutritionnelle des réfugiés d'où la nécessité d'accroître l'aide alimentaire pour les plus vulnérables tout en investissant dans les moyens de subsistance et dans la prévention des activités de malnutrition.

Le secteur Sécurité alimentaire a élaboré, en collaboration avec les acteurs du développement, un programme pluriannuel des moyens de subsistance et de la résilience, fondé sur le profil socio-économique CNARR-HCR-PAM avec l'appui de l'ADES, et de Cooperative for American Remittance to Europe (CARE International) afin de garantir un cadre favorable à la résilience. Une approche progressive visant à autonomiser les ménages est mise en oeuvre depuis le début de l'année 2019 avec une assistance alimentaire qui cible les ménages considérés les comme moins susceptibles de devenir autonomes. Cette aide alimentaire est alors considérée comme un filet de sécurité sociale pour une protection multisectorielle.

Les investissements dans les moyens de subsistance ont été significatifs pour avoir un impact significatif et éviter de laisser les catégories les moins vulnérables retomber dans la pauvreté. La région de Goré offre de nombreuses possibilités de développement des activités agricoles grâce à un environnement favorable et sûr.

D- Santé et nutrition

La situation sanitaire et nutritionnelle dans les camps de réfugiés de Goré est caractérisée par la prévalence des maladies transmissibles, du paludisme, des infections respiratoires, de la rougeole, de la diarrhée ainsi que par une situation nutritionnelle instable et précaire. Les taux de malnutrition sont en hausse sur l'ensemble des camps et une urgence nutritionnelle avait été déclarée en 2018.

Cependant, il convient de noter que la situation est devenue meilleure ces six derniers mois avec le concours des acteurs humanitaires qui ont mis en place davantage de structures de santé. Ces acteurs sont entre autre l'ADES, CARE International, The Johns Hopkins University (Jhpiego), Mentor Initiative (MI), Médecin Sans Frontière France (MSF-F) en partenariat avec le PNUD, l'UNFPA, l'UNICEF, le PAM. Ainsi, avec l'augmentation de la population de réfugiés, les établissements de soins de santé primaires sont constamment débordés. Les centres

81

de santé existants fonctionnent souvent au-delà de leur capacité en raison des ressources limitées. En moyenne, 24% des patients qui se rendent dans des centres de santé des camps de réfugiés sont de la population hôte.

Le secteur santé nutrition s'est concentré sur le renforcement des services de santé et l'appui au transfert progressif des réfugiés dans le système de santé national. Une attention particulière est accordée au renforcement des capacités en termes de ressources humaines et techniques. Le secteur de la santé passe de la fourniture gratuite de services de santé dans les camps à une intégration dans le système national. Un système de recouvrement des coûts est mis en place et les réfugiés payent déjà une petite contribution (100 XAF soit 0,2 USD) pour avoir accès aux services de santé. Les contributions sont gérées par un comité et permettent de couvrir les petits travaux d'entretiens et de réparations. Cela permet aux réfugiés d'avoir accès aux services de santé au même titre que les communautés d'accueil.

Une attention particulière est accordée à la santé maternelle et reproductive, à la santé mentale ainsi qu'au programme de lutte contre le VIH / SIDA pour les communautés en général et pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans en particulier. En termes de réponse nutritionnelle, le secteur continue à soutenir le traitement de la malnutrition tout en mettant l'accent sur une réponse multisectorielle afin de s'attaquer à ses causes profondes de la malnutrition (accès limité à la terre et à l'eau potable, précipitations imprévisibles, absence d'habitudes alimentaires diversifiées et d'allaitement au sein non exclusif des nourrissons). Cela se fait en étroite collaboration avec les activités liées aux moyens de subsistance, la sensibilisation de la communauté aux questions de santé et WASH ainsi que l'autonomisation des femmes. La production alimentaire dans tous les camps de réfugiés de Goré, est entravée par des terres agricoles limitées, des régimes de précipitations peu fiables, un accès limité aux semences, aux outils agricoles et aux moyens de subsistance.

E- Moyens d'existence et environnement

Tout en continuant de fournir une assistance vitale, les acteurs humanitaires se sont concentrés sur l'intégration effective des réfugiés dans la sphère socio-économique du Tchad. Un programme d'autonomisation dépendant fortement de l'agriculture est mis en place malgré les incertitudes liées aux changements climatiques, à la pression démographique et à l'infertilité des sols. Des mécanismes de sécurisation de l'accès aux terres arables avec les autorités administratives et les dirigeants traditionnels ont été mis en place. Les chaînes de valeur sont

82

explorées pour créer de nouvelles opportunités tandis que les offres de formation professionnelles ont augmenté. Les activités liées aux moyens de subsistance ont visé simultanément le renforcement de la coexistence et la cohésion sociale entre les réfugiés et les communautés d'accueil.

L'objectif du secteur était de passer de l'aide humanitaire à un plan de développement durable et à long terme grâce à une collaboration étroite avec les acteurs du développement. Cela a pris en compte la construction de systèmes d'irrigation et de systèmes d'eau répondant aux besoins de l'agriculture et de l'élevage, l'expansion des services vétérinaires et le renforcement des capacités de formation professionnelle.

L'inclusion financière a été promue en tant que catalyseur essentiel de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté car l'accès au financement peut stimuler la création d'emplois, réduire la vulnérabilité aux chocs et augmenter les investissements dans le capital humain. Pour atténuer l'impact des réfugiés sur l'environnement, le secteur a continué à promouvoir les mécanismes communautaires de gestion des bois, du reboisement ainsi que les meilleures pratiques en agroforesterie et en agriculture. Des comités de villages et des clubs de l'environnement ont été mis en place pour sensibiliser le public aux défis environnementaux. L'Inspection des Eaux et des Forêts a été également étroitement associée afin de soutenir les comités dans la production de plants, le reboisement, la régénération naturelle et la gestion des sites de défense. L'accès à l'énergie est une préoccupation majeure pour les réfugiés. L'approvisionnement en combustibles de substitution à la dépendance au bois de chauffage. Des équipements permettant d'économiser de l'énergie, tels que des poêles en banco et les fours sont produits et distribués localement tandis que des séances de sensibilisation à l'utilisation rationnelle et aux pratiques d'économie d'énergie sont organisées. Ce secteur est sous la houlette de l'ADES et de CARE en partenariat avec le FOA.

F- Abris et articles non alimentaires

Ce secteur a couvert les besoins en abris pour les nouveaux réfugiés et amélioré ceux des refugiés déjà installés en leur permettant de disposer d'abris conformes aux standards. Ainsi, le secteur continuera de fournir aux réfugiés nouvellement arrivés des abris d'urgence et des articles de première nécessité. Il a également passé des abris d'urgence vers des abris semi durables adaptés aux conditions locales et similaires à ceux des populations hôtes. La stratégie en matière d'abris vise à responsabiliser les communautés en privilégiant les interventions en

83

espèces tout en veillant sur la qualité technique des abris réalisés, la formation des bénéficiaires sur la construction des abris et la distribution des kits. Outre la distribution des kits d'urgences aux réfugiés nouvellement arrivés et le remplacement de certains articles pour les anciens réfugiés, le secteur se concentre, conformément aux normes, sur la distribution de kits de dignité aux femmes en âge de procréer. Les séances de sensibilisations et le suivi post-distribution se poursuivent. Le secteur est assuré par ADES, la Fédération Luthérienne Mondiale (FLM), la FICR, l'Oxford, Committee for Famine Relief (OXFAM) en partenariat avec l'OIM, l'UNICEF en ce qui concerne les organes onusiens et avec le SECADEV et la CRT pour ce qui est des ONG nationales.

I- Eau, Hygiène et Assainissement

La quantité d'eau potable disponible par personne et par jour varie considérablement d'un camp à un autre, certaines zones étant bien en deçà des normes. L'objectif du secteur était d'assurer la disponibilité d'un minimum de 20 litres par personne et par jour dans toutes les zones d'accueil des réfugiés de Goré.

À moyen et long termes, des infrastructures hydrauliques durables telles que le système de mobilisation des eaux de surface (mini barrages, seuils d'épandage, etc.), et les pompes à motricité humaine, sont mises à disposition pour couvrir non seulement la consommation pour les populations mais aussi pour les besoins des animaux et des activités agricoles. Des investissements conséquents ont permis de réaliser des économies à long terme. A titre d'exemple, cela a permis de réduire le cout en carburant pour la production d'eau, et de réduire les risques du water-trucking qui consomme beaucoup de ressources. La préférence est donnée à des systèmes de pompage solaire innovants, afin de réduire les coûts de production et de maintenance. Le secteur se concentrera également à l'assainissement, avec la construction de latrines familiales et institutionnelles tout en tenant compte des aspects protection (intimité, sécurité), ainsi que la gestion des déchets ménagers et déchets médicaux, afin de limiter les risques de propagation des maladies liées à l'eau, l'hygiène et l'assainissement.

L'accent est aussi mis sur le renforcement de la gestion communautaire de l'eau et des déchets solides par l'intermédiaire des « Comités Eau, Hygiène et Assainissement ». Le secteur oeuvre à cet effet pour le renforcement de la transition effective vers un système de recouvrement des coûts d'ici 2020. Le secteur veille également à promotion à l'hygiène avec les sensibilisations sur les bonnes pratiques d'hygiène et la mise à disposition des kits de gestion de

84

l'hygiène menstruelles (MHM). Enfin, sur le plan coordination, un accent fort est mis sur le renforcement du partenariat avec les services techniques de l'Etat et la mobilisation des partenaires opérationnels. Le secteur veille également à la promotion à l'hygiène avec les sensibilisations sur les bonnes pratiques d'hygiène et la mise à disposition des kits de gestion de l'hygiène menstruelles (MHM). Il est sous la responsabilité d'ADES, du SIF, de la FICR, d'OXFAM et de l'International Developpement Organisation (IDO) en collaboration avec l'UNICEF et le SECADEV.

Paragraphe II : Perspective de réduction progressive du besoin d'assistance

En 2015, les acteurs humanitaires ont commencé à développer un Programme commun pour l'autosuffisance des réfugiés et des populations hôtes de Goré dont l'objectif est de réduire progressivement la dépendance des réfugiés vis-à-vis de l'assistance humanitaire et de renforcer proportionnellement les moyens d'existence dans une optique d'autonomisation95. L'approche proposée consiste à optimiser l'utilisation des ressources à travers une assistance multisectorielle ciblée fournie selon les besoins spécifiques de chaque ménage d'une part et, d'autre part, un investissement dans les moyens d'existence de sorte à favoriser l'auto prise en charge. Cependant, jusqu'à présent, le plan de mise en oeuvre du programme n'est toujours pas élaboré et des cibles pour les différents objectifs n'ont pas encore été établies. On constate donc que des liens entre les activités de renforcement des moyens d'existence et d'assistance alimentaire ne sont pas établis et que les deux programmes fonctionnent souvent en parallèle. Malgré cela, une nouvelle stratégie nationale de promotion des moyens d'existence durables 2015-2020 pour les réfugiés a été récemment adoptée par le HCR. Pour la mise en oeuvre, le HCR a fait un effort pour réaménager son budget interne afin d'accorder une part plus importante aux activités d'autosuffisance. L'assistance alimentaire continue du PAM est tout aussi cruciale pour permettre aux ménages de maintenir ou renforcer leurs activités de subsistance. D'où la pertinence toujours d'actualité du programme conjoint, surtout que le PAM envisage des coupures imminentes de l'assistance alimentaire. Ici, il convient de noter que certains réfugiés resteront toujours dépendants au moins en partie de l'assistance alimentaire, étant donné l'environnement où ils vivent et/ou les activités de subsistance que leur permet leur statut ou leur condition96.

95HCR et PAM. 2015. Draft: Programme conjoint pour l'autosuffisance des réfugiés et des populations hôtes du Tchad, 2015-2020.

96Mission d'évaluation conjointe HCR/PAM de la situation des réfugiés centrafricains et soudanais au Tchad

85

SECTION II : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES POUR LE

TCHAD

La présence des ONG internationales et les réfugiés à Goré a été d'un apport certain sur le développement du Tchad dans bon nombre d'aspects. Il renferme plusieurs avantages tant sur le plan interne (Paragraphe I) que sur le plan international (Paragraphe II).

Paragraphe I : L'impact de l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés
de Goré sur le plan interne

Les impacts de l'action des ONG internationales sur le plan interne sont d'ordre socioéconomique (A) et politique (B).

A- Les avantages socio-économiques

Par ONG, on entend des associations de droit privé qui se spécialisent dans le plaidoyer aussi bien que dans le développement ou les secours d'urgence. La thèse défendue ici est que les chiffres sont intrinsèquement liés à l'économie et favorisent les approches comptables du développement. Dans cette partie, il sera question de scinder les avantages sociaux (1) ensuite les avantages économiques (2).

1- Les avantages sociaux

Les ONG internationales dans la région de Goré ont développé des projets en faveur des populations locales, car, même s'ils sont des autochtones, leur situation n'est pas pour autant meilleure que celle des réfugiés.

Certaines localités bénéficiant de cette aide n'abritent pas les réfugiés. Au bénéfice des populations de Goré, les interventions humanitaires concernent principalement les secteurs de la santé, de l'eau, hygiène et assainissement, de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

S'il faut considérer l'impact de la contribution du secteur humanitaire au Tchad, l'on retiendra que son impact dans le processus de développement socio-économique national se mesure par le nombre impressionnant des bénéficiaires de son action. L'aide humanitaire au Tchad concerne 2,3 millions de personnes parmi lesquelles, les réfugiés (17%), déplacés internes (2%), les retournés (3%) et les populations locales compris (78%) tel que précisé dans

86

le document stratégique de l'Equipe Humanitaire Pays 201697. En agissant ainsi, les ONG internationales assistent l'Etat du Tchad, voire se substituent à lui dans l'accomplissement de ses obligations régaliennes qui sont celles de fournir des services sociaux de base et plus généralement, de veiller au bien-être des populations. En plus de l'aide directe donnée aux populations, les opportunités d'affaires générées par d'importants flux financiers humanitaires mobilisés pour l'assistance des réfugiés au Tchad concourent également à la promotion du développement socio-économique du pays.

L'affluence des organisations humanitaires internationales et l'émergence des organisations locales est d'autant plus utile pour l'émergence sociale et économique des populations et du pays tant celles-ci contribuent fortement à son désenclavement aussi bien sur le plan interne qu'externe, en plus de l'aide directe qu'elles apportent aux populations et aux opportunités d'affaires qu'elles créent.

2- Les débouchés économiques

L'accueil des réfugiés à Goré et l'action des ONG internationales ont des grands débouchés économiques allant de la création et des opportunités d'emploi (a) au flux financier comme opportunité d'affaire pour les opérateurs économiques (b).

a- Les créations d'emploi

Parlant des réfugiés et des ONG, en rapport avec la question de l'emploi, Thibault Gajdos, directeur de recherche au Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), affirme que les réfugiés coutent cher au pays d'accueil. Mais, dit-il, à long terme « ils permettent de créer de l'emploi et de pousser les natifs vers des métiers qualifiés, donc mieux payés, pointent les économistes»98. Cet avis reflète la réalité de la situation du Tchad, tant il est vrai qu'en dépit des risques encourus par le pays, la présence des réfugiés sur le territoire national a généré des milliers d'emplois directs et indirects au profit des nationaux. En effet, même s'il n'y a eu d'études spécifiques permettant de mesurer concrètement l'impact positif de l'emploi du secteur humanitaire au Tchad, il va sans dire que pour la mise en oeuvre de leurs énormes projets d'aides humanitaires en faveur des dizaines de milliers de réfugiés de Goré, le gouvernement de la République du Tchad et ses partenaires internationaux, notamment, les

97 https://www.humanitarianresponse.info/system/files/documents/files/tchad_hno_2016

98 http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/oui-les-migrants-et-refugies-representent-unechance-pour-l-economie-et-les-salaires.

87

agences des Nations Unies, les organisations internationales, ONG internationales et nationales confondues, ont eu recours à des milliers de tchadiens qu'ils ont employés sous différentes formes, directement ou indirectement. Selon des données extraites de l'annuaire statistique de la Division des Statistiques, Etudes et Evaluation de l'Office National de Promotion de l'Emploi (ONAPE) de 2018. En 2018, le secteur humanitaire représente 25,72% de l'emploi créé au Tchad et occupe la troisième place, après l'Etat et le secteur privé. Même s'il n'existe pas de statistiques disponibles permettant de déterminer le nombre exact d'emplois généré par l'accueil des réfugiés à Goré, l'ampleur du déploiement perceptible à travers la région et le nombre impressionnant d'acteurs humanitaires internationaux et nationaux présents sur le terrain ainsi que le volume annuel du flux financier humanitaire et la gigantesque logistique déployée à cet effet permettent de se faire une idée. Selon le rapport du bureau de Coordination Humanitaire des Nations Unies (OCHA) d'avril 2017, 127 acteurs humanitaires sont opérationnellement présents au Tchad. Parmi ces 127 acteurs institutionnels, il y a 11 agences des Nations Unies, 3 mouvements de la Croix Rouge, 48 ONG internationales et 65 ONG nationales. Le même rapport indique que ces institutions sont présentes dans toutes les 23 régions du pays, avec une présence variant entre 2 et 41 organisations par région. Chaque organisation intervient en moyenne dans 3 de 7 principaux domaines, à savoir : la santé, la sécurité alimentaire, eau/hygiène et assainissement, la nutrition, l'éducation, protection et l'abri. L'on voit clairement la supériorité du niveau de traitement accordé aux travailleurs du secteur des organisations internationales en termes d'avantages salariaux et extra-salariaux. Au-delà de la qualité d'emplois que le secteur humanitaire au Tchad offre au personnel local, il est aussi à noter que des postes de hautes responsabilités sont de plus en plus occupés par les tchadiens, tant il est vrai que ceux-ci ont énormément gagné en expérience et ne sont pas moins compétents que les employés venus d'ailleurs. En plus de la compétence dont ilsfont preuve, les organisations humanitaires ont de plus en plus recours aux tchadiens pour des postes de hautes responsabilités parce qu'ils sont moins couteux et moins délicat en terme de gestion.

En plus des emplois créés localement, l'accueil des réfugiés au Tchad a permis aux travailleurs humanitaires tchadiens qualifiés d'acquérir de l'expérience dans le milieu, les exposant ainsi aux opportunités de carrière internationale. Grace à cette expérience, de nombreux tchadiens devenus des expatriés et occupent des postes internationaux au sein des organisations internationales humanitaires partout en Afrique et ailleurs. Une chose qui était très rare dans un passé encore récent. Dans un pays pauvre comme le Tchad, avec un taux de

88

chômage de personnes ayant d'études supérieures de 16,8%99déjà en 2014 Institut National de la Statistique, des Etudes Économiques et Démographiques mais qui s'est sérieusement aggravé du fait de la chute vertigineuse du prix du pétrole, première ressource du pays, l'importance de l'apport du secteur humanitaire en matière d'emplois n'est plus à démontrer. Il est important de rappeler ici que depuis le début de l'année 2016, les entreprises pétrolières ont gelé les recrutements et procédé au licenciement massif des employés. L'Etat du Tchad quant à lui, a totalement gelé les recrutements et procédé à une déduction drastique des avantages et autres primes. Le secteur humanitaire reste donc le seul qui continue à offrir de l'emploi et où les travailleurs continuent à bénéficier de tous leurs avantages.

b- La manne financière humanitaire comme opportunités d'affaires pour les opérateurs économiques

Selon les données extraites des rapports du Bureau de Coordination Humanitaires des Nations Unies (UNOCHA), contenus dans un document dénommé Financial Tracking Services Tracking Global Humanitarian Aid Flow100, depuis le début de la crise des réfugiés et de la crise humanitaire en général au Tchad, d'importants flux financiers sont déployés chaque année pour les opérations d'aide humanitaire. Ce sont en moyenne, 443 588 286 Dollars Américains, soit266 152 972 140 FCFA qui sont investis chaque année et ce, depuis 2003. Sur la base des données extraites de ces rapports, il ressort que sur la période allant de 2007 à 2016, soit dix ans, un total de 4 435 902 98 Dollars Américains, soit 2 661 541 790 400 FCFA en moyenne ont été investis pour les opérations humanitaires au Tchad101.Ces sommes astronomiques sont injectées dans l'économie nationale en nourriture, eau et assainissement, soins de santé, bâtiments et travaux publics, transport et sous d'autres formes d'aides directes, engendrant de nombreux emplois et activités pour les commerces locaux. Contribuant ainsi significativement au développement d'opportunités d'affaires pour les opérateurs économiques. Mais aussi à la promotion de l'auto emploi pour les populations hôtes. Bien plus, l'arrivée massive des réfugiés, des ONG internationales, des travailleurs humanitaires venus des autres régions du Tchad et de l'extérieur ayant considérablement augmenté le

99Selon Institut National de la Statistique, des Etudes Economiques et Démographiques, dans un document dénommé « Tableau de bord Social du Tchad 2014 », le taux de chômage chez les personnes ayant le niveau d'études supérieures est de 23 ,6% chez les femmes et de 15,4% chez les hommes, avec une moyenne nationale de 16,8%.

100 Https://ftsarchive.unocha.org

101Données extraites des rapports du Bureau de Coordination Humanitaire des Nations Unies (OCHA), contenus dans un document dénommé Financial Tracking Services - Tracking Global Humanitarian Aid Flows

89

nombre des populations des régions d'accueil, crée de nombreux nouveaux besoins et augmente des demandes. Cette situation a permis le développement de plusieurs secteurs d'activités commerciales et économiques aussi bien sur le plan local que national. Sur le plan agroalimentaire par exemple, l'explosion des besoins en denrées alimentaires dans les zones d'établissement des réfugiés et dans les grands centres urbains a pu se révéler positif pour les autochtones : les paysans, les maraîchers et les éleveurs locaux ont pu davantage produire et écouler. Ce qui leur permet ainsi de voir leurs revenus augmenter et d'améliorer leurs conditions de vie. Sur le plan de l'habitat, l'augmentation des besoins a amené les opérateurs économiques et les populations hôtes à investir davantage dans le secteur immobilier. Non seulement le secteur immobilier a connu un véritable boom dans les régions d'accueil et même dans le reste du pays, générant ainsi d'énormes retombés en termes de loyer, mais il a aussi fortement contribué à l'urbanisation de certaines villes. Sur le plan commercial et entreprenariat en général, l'on observe dans les régions hôtes, surtout dans les grands centres urbains, l'émergence de grandes structures commerciales oeuvrant dans l'agroalimentaire, le développement des0 entreprises de prestation de services, des sociétés de gardiennage et de sécurité privée, des entreprises de transport, bâtiments et travaux publiques etc. A côté de ces secteurs commerciaux plus ou moins formels, la présence des réfugiés et des travailleurs humanitaires a également permis un développement extraordinaire des activités du secteur informel. Interrogées sur la question, les opérateurs économiques, les populations hôtes, surtout les jeunes, ont confirmé voir en la présence des réfugiés, des organisations et travailleurs humanitaires, des opportunités d'affaires sans précédent102. Sur le terrain, l'on a vu que plusieurs se sont lancées dans les activités génératrices des revenus telles que la restauration, la coiffure, la vente des vêtements, le transport mototaxis, le développement des petits élevages, de l'agriculture et du maraîchage. Les résultats d'une étude réalisée conjointement par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) et l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur les impacts de l'aide humanitaire sur l'économie libanaise depuis le début de l'arrivée des réfugiés syriens en 2011 permet d'apprécier l'impact de l'accueil des réfugiés sur le processus de développement socio-économique du pays hôte. En effet, cette étude montre que pour chaque dollar dépensé aux fins de la réponse humanitaire, un demi-dollar supplémentaire est injecté dans l'économie par le biais d'effets démultiplicateurs. Et il estime que, les quelques800 millions de dollars dépensés annuellement pour les réfugiés,

102UNHCR Standing Committee : « Impact social et économique d'importantes populations réfugiées sur les pays hôtes en développement », 1997. Source : http://www.unhcr.org/fr/excom/standcom/4b30a5b11d/impact socialeconomique-dimportantes-populations-refugiees-pays-hotes.html, consulté le 27 février 2017

90

occasionnent un impact positif total de 1,2 milliard de dollars. L'étude estime que l'aide humanitaire contribue au PIB libanais à hauteur de 1,3 pour cent au total. Dans le contexte tchadien, en l'absence d'une étude similaire, il est difficile d'arriver de faire des analyses similaires103.A la lumière des résultats de cette étude, l'on voit aisément l'importance que représentent les flux financiers humanitaires pour l'économie tchadienne. Car, si l'on estime que pour chaque dollar dépensé aux fins de la réponse humanitaire, un demi-dollar supplémentaire est injecté dans l'économie par le biais d'effets démultiplicateurs104, on peut donc dire - même si l'on sait que les réalités au Liban et au Tchad ne sont pas identiques, que plusieurs centaines de milliards de Francs CFA sont injectés dans l'économie tchadienne depuis le début de la crise humanitaire. Au-delà de l'impact économique, l'accueil des réfugiés constitue aussi un enjeu majeur de politique intérieure et extérieure du Tchad.

C- Les avantages administratifs

L'action des ONG internationales à Goré en partenariat avec l'Etat Tchadien renferme des enjeux stratégiques de politique intérieure en ce qu'il contribue au renforcement de l'intégration et de la cohésion nationale (1) et au renforcement de la présence de l'Etat dans les régions d'accueil (2).

1- Accueil des réfugiés comme outils de l'intégration locale

Depuis l'indépendance du Tchad, plusieurs régions, surtout des localités rurales se trouvent tenue en périphérie du pouvoir central et du reste du pays, du fait, à la fois de leur éloignement géographique et des difficultés d'accès. De ce fait, cette situation isole ces régions du reste du pays, causant ainsi un véritable problème d'intégration aussi bien du point de vue géographique, socioculturel, économique et financier, voire politique et administratif. On ne peut donc parler d'intégration nationale dans une telle situation. Car, dans le contexte du Tchad comme partout ailleurs, l'intégration nationale à plusieurs connotations ; que ce soit dans les discours, les politiques publiques et même dans l'analyse populaire. Elle s'exprime par des transactions multiformes. Avant l'arrivée des réfugiés, la situation des régions d'accueil ne

103 http://www.irinnews.org/fr/report/accueillir-des-réfugiés-aussi-ses-avantages.

104Les résultats de l'étude réalisée conjointement par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l'agence des Nations Unies pour les Réfugiés (HCR), sur les impacts de l'aide humanitaire sur l'économie libanaise depuis que les réfugiés syriens ont commencé à fuir la guerre en 2011 attestent que pour chaque dollar dépensé aux fins de la réponse humanitaire, un demi-dollar supplémentaire est injecté dans l'économie par le biais d'effets démultiplicateurs

91

correspondait pas aux critères de définition de l'intégration nationale. Les populations des régions d'accueil des réfugiés vivaient une sorte d'exclusion ou d'autarcie involontairement imposée. Vu sous cet angle, on peut, sans risque de se tromper, affirmer que l'accueil des réfugiés à Goré plus précisément a significativement contribué au renforcement de l'intégration nationale, ou du moins, au rapprochement de la région au reste du pays. Cet isolement, faut-il le rappeler, n'était pas seulement géographique mais aussi socioculturel, économique et financier, voire politique et administratif. L'accueil des réfugiés a occasionné une affluence massive des travailleurs humanitaires venus des autres régions du pays et de l'extérieur. Cela a permis aux populations de Goré de découvrir ces régions et aux populations locales d'entrer en contact avec leurs concitoyens des autres régions. Avant l'arrivée des réfugiés, la région de Goré ne faisait pas l'objet d'une telle affluence de la part de l'Etat d'une part et celle des humanitaires d'autre part, les opportunités d'affaires et d'interactions quasiment inexistantes. C'est donc en cela que l'on peut affirmer que l'accueil des réfugiés à Goré est un vecteur de désenclavement géographique et socioculturel des populations et de renforcement de l'intégration nationale.

Sur le plan régional et continental, l'accueil des réfugiés à Goré peut servir de fil conducteur pour le renforcement de l'intégration régionale et africaine. Car, les contacts des réfugiés avec les populations locales tchadiennes va entrainer inévitablement des échanges au plan culturel, civilisationnel, coutumier et économique et créer ainsi un brassage tangible entre les tchadiens et les réfugiés, donc, avec les peuples des pays d'origine des réfugiés (RCA).

2- L'accueil des réfugiés comme moyen de renforcement de la présence de l'Etat et de la bonne gouvernance

Du fait de leur éloignement géographique et des difficultés d'accès, la région de Goré étaient une zone où l'Etat était très peu. Les conditions de vie et de travail dans cette région étaient tellement rudes que certains fonctionnaires de l'Etat affectés dans la zone trainaient les pieds pour y arriver. Mais la présence des réfugiés dans cette partie du pays a conduit l'Etat tchadien à renfoncer sa présence. Avec le soutien financier et technique des partenaires internationaux à savoir les ONG internationales et les organisations internationales humanitaires, notamment le Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés, le Programme des Nations Unies pour le Développement et le Programme Alimentaire Mondial. L'Etat s'est déployé à Goré en mettant en place des délégations départementales. Sur le plan

92

sécuritaire et socio-sanitaire, l'on a pu voir un déploiement considérable de l'Etat à travers une présence massive des forces de sécurité, notamment les gendarmes et le Détachement Intégré de Sécurité pour assurer la protection des réfugiés, des personnes déplacées internes et des acteurs humanitaires et la réhabilitation et la construction des centres de santés et des points d'eau. En plus du déploiement de l'Etat, les organisations humanitaires et les associations de la société civile se sont également massivement investies dans la région tant en faveur des réfugiés que des populations locales. L'arrivée des réfugiés et les opérations d'aides aux réfugiés dans ces régions ont permis de les désenclaver, les revitaliser et de les rendre plus attractives.

Paragraphe II : L'impact de l'action des ONG internationales dans les camps de Goré sur le plan international

Il est vrai que la présence des réfugiés au Tchad n'est pas exempte de risque a été à l'origine de l'exacerbation de nombreux conflits et risques sécuritaires. Mais aussi paradoxal que cela puisse paraître, cette présence a plutôt significativement contribué au renforcement de l'image du Tchad sur le plan international, notamment dans la promotion de sa politique extérieure (A) et la montée en puissance de sa diplomatie (B).

A- L'action des ONG internationales à Goré, canal de rayonnement international

pour le Tchad

Dans la mise en oeuvre de sa politique extérieure axée sur la solidarité probante, entre les peuples voisins et amis en particulier et africains en général, le Tchad considère comme un devoir naturel de recevoir ces milliers de réfugiés sur son territoire. Mais il n'en demeure pas moins que cette solidarité humanitaire contribue fortement à son rayonnement diplomatique tant sur le plan sous régional, continental qu'international. En effet, les Etats, de par leur engagement en faveur de la protection des réfugiés, créent les conditions de rayonnement de leur diplomatie bilatérale et multilatérale. La protection des réfugiés s'inscrit dans la dynamique de la diplomatie des droits de l'homme et fait partie des enjeux diplomatiques. Elle comporte une activité diplomatique qui a pour cadre les organisations internationales intergouvernementales, au moyen des délégations permanentes. L'ONU constitue le centre de cette diplomatie bilatérale et multilatérale. Elle est le cadre indispensable accessible à tout Etat désireux d'assumer un rayonnement universel. Ainsi, tout Etat africain épris de la protection des droits des réfugiés et qui s'y engage, en respectant les

93

dispositions internationales en la matière, crée les conditions du rayonnement de sa diplomatie, dans le cadre onusien notamment, au sein des instances en charge des questions des droits de l'homme. Il devient, de ce fait, un acteur crédible et susceptible de marquer sa présence dans des postes clefs au sein des instances régionales internationales, par voie d'élections. Sur le plan régional, la question relative au respect des droits de l'homme et des peuples a constitué l'essentiel des travaux de l'Organisation de l'Unité Africaine, au cours des années 1970-1980. Cette dynamique de protection des droits de l'homme et des peuples, plus particulièrement celle des réfugiés en Afrique, est marquée par la mise en place d'un cadre juridique, notamment la Convention de l'O.U.A. régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique, adoptée le 10 septembre 1969 et entrée en vigueur le 20 juin 1974. L'Union Africaine, qui a succédé à l'Organisation de l'Unité Africaine, en juillet 2000, a également inscrit sa politique de protection des réfugiés dans le droit fil du corpus juridique de 1969 ci-dessus cité. En respectant l'engagement pris dans le cadre régional selon le principe «Pacta sunt servanda»105,106 les Etats mettent en exergue non seulement le principe de solidarité qui est l'une des caractéristiques fondamentales de l'Afrique, mais renforcent aussi leur présence et rayonnement au sein des instances diplomatiques régionales. En s'engageant de bonne foi, les Etats contribuent à la consolidation des capacités de l'Union Africaine, dans la résolution des problèmes régionaux liés aux droits de l'homme. De ce point de vue, l'on peut affirmer que la diplomatie tchadienne a véritablement bénéficié de l'accueil des réfugiés sur le territoire national. Car, aussi surprenant soit-il, le Tchad qui, récemment encore, était qualifié d'« État néant »107, est étonnement devenu une puissance diplomatique et militaire dans la sous-région, en Afrique et même sur le plan international. La montée en puissance du Tchad a commencé d'abord dans sa sphère immédiate, la Communauté économique et monétaire des Etats de l'Afrique centrale (CEMAC) qui regroupe six pays de l'Afrique centrale à savoir le Tchad, la République centrafricaine, le Cameroun, le Congo, la Guinée Equatoriale et le Gabon. « Aucune institution de cette organisation sous régionale n'échappe à l'heure actuelle au diktat du Tchad », affirme TchadInfos.com, un Journal en Ligne108.

105Pacta sunt servanda « Les conventions doivent être respectées » est une locution latine signifiant que les parties sont désormais liées au contrat venant d'être conclu et qu'à ce titre elles ne sauraient déroger aux obligations issues de cet accord.

106Code civil français, art 1103

107Tchad : « État néant », titrait Jeune Afrique à la une de son no 905, daté du 10 mai 1978. 108 http://tchadinfos.com/tchad/tchad-agitation-diplomatique-monte-puissance-dun-gant-aux-piedsdargile

94

En réalité, l'intérêt du rayonnement international d'un pays ne s'apprécie pas de manière mathématique, mais il est certain que son importance réside dans le fait qu'il constitue un argument de poids pour alimenter sa diplomatie aux fins de la défense de ses intérêts dans le concert des nations. On peut ainsi dire que la protection des réfugiés constitue un moyen de pression diplomatique dont le pays hôte peut se servir pour s'imposer au sein de la communauté internationale.

Il faut aussi noter que l'accueil des réfugiés au Tchad notamment à Goré lui a permis de bénéficier d'une exposition médiatique sans précédent, tant cette crise migratoire a suscité l'émoi dans le monde entier et mobilisé la communauté internationale dans son ensemble. Cette mobilisation a engendré un déferlement des hautes personnalités internationales et des célébrités mondiales venues au Tchad, soit pour s'enquérir de la situation de réfugiés, soit pour faire le plaidoyer auprès des bailleurs de fonds et de la communauté internationale. L'on peut citer entre autres, Koffi Annan et Ban Ki-Moon tous deux les Secrétaires Généraux de l'Organisation des Nations Unies, de John Holmes Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, Président de la Commission de l'Union africaine. Le déferlement de ces personnalités et célébrités mondiales a joué un rôle prépondérant dans la campagne internationale de mobilisation sur la tragédie humanitaire du Darfour et son débordement au Tchad. Cette exposition médiatique a également été d'un apport très important pour la promotion de l'image du Tchad et partant, de sa diplomatie109.

B- L'action des ONG internationales à Goré, un moyen de la montée en puissance de la diplomatie tchadienne

Dans un article de Jeune Afrique en ligne intitulé « Idriss Deby, le parrain », Tshitenge Lubabu M.K., Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République démocratique du Congo, de l'Afrique centrale et de l'Histoire africaine, rapportait qu'à ce sommet, le président tchadien ne s'est pas privé de secouer le cocotier en demandant à ses homologues, à propos du Mali, de passer de la tergiversation aux actes. Dans le même article il a rapporté qu'à la clôture du sommet des chefs d'Etat, Idriss Deby Itno s'est adressé à ses homologues en ces termes « Nous ne pouvons nous complaire dans cette incapacité à assurer notre propre sécurité un demi-siècle après nos indépendances. Aussi avons-nous l'impérieuse nécessité de mutualiser nos efforts pour faire face à tous les périls. Alors, nous serons moins

109Joseph ZIMET, Les ONG. De nouveaux acteurs pour changer le monde, Editions Autrement, Paris, 2006. P.86

95

vulnérables ». Tshitenge Lubabu M.K. poursuit en parlant du président tchadien en affirmant que « Son ascendant psychologique est tel qu'il n'est pas exagéré de dire que le chef de l'État tchadien peut se prévaloir d'un leadership régional incontesté, même au sein de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC) »110.Comme on peut le constater, la fulgurante montée en puissance de la diplomatie tchadienne démontre à suffisance l'importance du rôle de la diplomatie de la défense dans la promotion de la politique extérieure d'un Etat. Un autre exemple concret de l'importance de la puissance militaire dans la montée en puissance d'un Etat est celui des Etat Unis d'Amérique. En effet, la montée en puissance de l'imperium américain s'est appuyée, initialement au moins, autant sur les aspects les moins militaires de la puissance, le soft power, que sur une supériorité militaire aujourd'hui incontestée. S'il en était encore besoin de le démontrer, les Etats-Unis illustrent bien à quel point l'efficacité d'une diplomatie est inséparable du bras armé qui lui confère sa crédibilité et ce n'est pas un hasard si l'Union européenne a entrepris de se doter de capacités militaires, en parallèle et en soutien à sa Politique Extérieure et de Sécurité Commune, dès lors qu'elle entendait « jouer pleinement son rôle sur la scène internationale » comme l'ont déclaré les quinze chefs d'Etat et de gouvernement au Conseil Européen de Cologne (3-4 juin 1999)111.L'intention ici n'est pas d'affirmer que la montée en puissance de diplomatie militaire du Tchad est exclusivement due à l'accueil des réfugiés sur son territoire. Mais de toute évidence, la présence des réfugiés en est un des facteurs déterminants, sinon le facteur déterminé. En effet, comme nous l'avons relevé ci-haut, la présence des réfugiés, surtout des réfugiés à Goré, a fortement contribué à l'intensification et à la généralisation des multiples conflits armées menaçant directement la sécurité nationale du Tchad et la survie régime en place à N'Djamena. Cette situation a obligé l'Etat du Tchad à se lancer dans la course effrénée aux armements et à la militarisation du pays.

110Propos rapporté par Tshitenge Lubabu M.K., Ancien journaliste à Jeune Afrique, spécialiste de la République Démocratique du Congo, de l'Afrique centrale et de l'Histoire africaine, dans un article intitulé « Idriss Deby, le parrain » publié le 20 mars 2013 sur http://www.jeuneafrique.com

111www.europarl.europa.eu

CHAPITRE IV : LIMITES DE L'AIDE HUMANITAIRE

AU TCHAD ET PERSPECTIVES D'AMELIORATION

96

Dans un contexte de flux de migrations de populations manifestement pérenne, marqué par une rareté généralisée des ressources dans le pays d'accueil comme c'est le cas du Tchad, l'aide humanitaire est d'un apport très important, voire vital, aussi bien pour les réfugiés que pour les populations hôtes. Mais dans sa mise en oeuvre par l'entremise des ONG internationales, elle connaît un certain nombre de limites qu'il convient de relever (Section I) pour ensuite, proposer des pistes d'amélioration (Section II) afin de la rendre davantage économiquement et socialement bénéfique pour les bénéficiaires directs, mais aussi pour le pays.

SECTION I : LES LIMITES DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS
LES CAMPS DE GORE

L'accueil des réfugiés à Goré et le déploiement des ONG internationales de manière générale connaissent un certain nombre d'insuffisances qui amenuisent considérablement leurs impacts positifs. Ces insuffisances tiennent à la fois à la faiblesse du cadre législatif et institutionnel (Paragraphe I) et la faiblesse de la prise en compte des dimensions socio-économique et environnementale dans la définition des programmes d'aide (Paragraphe II).

Paragraphe I: Les insuffisances sur le plan législatif, institutionnel et fonctionnel

La présentation de l'insuffisance des instruments de gestion des réfugiés précèdera (A) celle de la faiblesse des structures étatiques de coordination (B).

A- Insuffisances législatives et stratégiques

En dépit de sa volonté politique manifestée par la ratification de la totalité des conventions internationales relatives à la question des réfugiés, le Tchad n'a toujours pas encore incorporé les principes issus des ces instruments internationaux et régionaux dans sa législature nationale. Ainsi, il n'existe pas de textes juridiques régissant spécifiquement le fonctionnement des organisations non-gouvernementales, la question des migrations des populations et de l'aide humanitaire au Tchad. A ce jour, les Organisations Non-Gouvernementales et les acteurs humanitaires au Tchad en général, évoluent dans un cadre

97

législatif inadapté ou du moins peu étoffé. En septembre 2013, un projet de loi devant régir la question des réfugiés avait été élaboré et devait ensuite être soumis à l'Assemblée Nationale pour adoption. Mais ce projet est resté sans suite jusqu'à ce jour. Alors qu'au regard des enjeux que représente la question des réfugiés et l'action des organisations humanitaires au Tchad, une telle loi devient plus que nécessaires pour rationnaliser et optimiser ce secteur. Ce qui a amené Mme Aminata Gueye, représentante résidente du HCR au Tchad à tirer la sonnette d'alarme en déclarant que «l'adoption d'une loi nationale sur l'asile devient une nécessité impérieuse en ce sens qu'elle permettra de fournir un cadre légal national de protection des réfugiés et des demandeurs d'asile». Elle avait à cet effet, exhorté l'Etat, les responsables politiques, les dirigeants locaux, la société civile et les médias tchadiens à «contribuer à créer un climat de tolérance permettant de le gérer de manière appropriée le processus, afin de rendre concret cette volonté politique de légiférer en la matière.

Pour ce qui concerne le cadre de fonctionnement des institutions internationales en général et des organisations humanitaires en particulier, l'expérience de terrain montre que depuis plus d'une décennie, le Tchad entretient avec elles d'excellentes relations de coopération tant sur plan de leurs investissements, dans l'assistance humanitaire que dans l'aide au développement. Mais il n'en demeure pas moins que l'existence d'un cadre juridique spécifique permettrait de mieux canaliser ces investissements tous azimutes pour faire en sorte qu'ils soient mieux alignés à la stratégie nationale de développement. Il est vrai que le fonctionnement des organisations humanitaires, surtout des ONG est soumis aux principes d'indépendance et de neutralité. Mais étant donné qu'elles opèrent sur le territoire tchadien, définir un cadre de base pour harmoniser les opérations en la matière ne saurait être contraire à ces principes. A l'image du seul texte juridique national relatif à la question des réfugiés, notamment le Décret n°839/PR/PM/MAT/2011 du 02 août 2011112 portant création de la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR) qui, en plus d'avoir institué ladite commission, a eu le mérite de clarifier ses compétences et son fonctionnement, d'autres lois en la matière permettraient de rendre beaucoup plus fluide le secteur des Organisations Non-Gouvernementales et de l'aide humanitaire au Tchad. Au terme de ce décret, la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés est rattachée au Ministère de l'Administration du Territoire. Quant à l'instrument d'encadrement stratégique, il s'agit en réalité d'un instrument non juridique ayant pour objet, la

112Décret n°839/PR/PM/MAT/2011 du 02 août 2011 portant création de la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR)

98

planification stratégique de la gestion des réfugiés et de l'aide humanitaire en rapport avec le plan national de développement. Le Tchad dispose certes d'une base de données relative à la question des réfugiés issue des résultats du Deuxième Recensement Général de la Population et de l'Habitat (RGPH2, 2009) et des différents rapports du Haut Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés. Mais cette base de données statistique n'a pas été suivie d'un plan d'action stratégique de gestion des réfugiés. Alors qu'un tel plan aurait pu permettre d'aborder par exemple la question de l'intégration des dimensions socio-économique et environnementale dans la gestion des réfugiés, laquelle constitue d'ailleurs le gage de l'efficacité de l'action humanitaire. Même s'il est vrai que des textes juridiques peuvent prescrire la nécessité de prise en compte de telles dimensions, les instruments d'orientation stratégique et le plan national de développement sont mieux indiqués pour servir de base d'orientation et de définition des programmes humanitaires intégrant réellement les réalités socioculturelles des réfugiés et des populations hôtes et les préoccupations socio-économiques et environnementales du pays du Tchad. A ces insuffisances liées au cadre juridique et stratégique, il faut ajouter celles relatives à la faiblesse, ou même l'inexistence de structures étatiques et la faiblesse de coordination entre les services de l'Etat et les organisations humanitaires.

B- Les insuffisances institutionnelles et fonctionnelles

Pour un Etat, quelque soit le secteur d'activité, l'existence d'institutions dédiées et d'une coordination entre les différents acteurs est un gage supplémentaire de succès. L'accueil des réfugiés au Tchad et l'encadrement de l'action des ONG sont quelque peu caractérisés par une insuffisance institutionnelle au niveau étatique et une faible coordination entre les organes étatiques existants d'une part et les Organisations Internationales d'autre part. Globalement, le niveau d'implication de l'Etat du Tchad dans l'organisation de l'accueil des réfugiés et la gestion de l'aide humanitaire reste très insuffisant. Du point de vue institutionnel étatique, il existe principalement trois structures qui interviennent directement dans ce secteur. Il s'agit notamment de la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR) chargée de mettre en application les instruments juridiques internationaux et les lois nationales relatives aux réfugiés et aux demandeurs d'asile et d'autres fonctions ci-dessus citées, du Détachement Intégré de Sécurité (DIS), chargé d'assurer la sécurité des réfugiés, des personnes civiles et des travailleurs humanitaires et de la Direction Nationale des ONG et des Affaires Humanitaires (DONGAH) qui s'occupe des aspects administratifs ayant trait au fonctionnement des ONG et techniques relatifs au contenus des programmes exécutés

99

parles acteurs humanitaires. Mais dans les faits, à l'exception de la CNARR et du DIS qui sont effectivement présents sur le terrain, la DONGAH traine les pieds pour assurer son implication réelle dans la mise en oeuvre effective des programmes humanitaires portés par les différents acteurs. La faiblesse de la DONGAH peut, dans une certaine mesure, résulter de l'absence de textes juridiques l'instituant et définissant des attributions mais au-delà de ce problème, on relève aussi le manque de moyen financier conséquent attribuer à cette structure qui a un rôle crucial à jouer dans l'encadrement des actions des ONG. Elle dépend majoritairement des allocations et dons faits par les ONG, ceci affecte son efficacité et son objectivité notamment dans l'accomplissement de ses missions de suivi-évaluation des actions des ONG. De façon générale, tous ces organes de l'Etat ne disposent pas suffisamment de moyens matériels, financiers et techniques pouvant garantir l'autonomie et l'efficacité de leurs actions. Ils sont largement dépendants des appuis multiformes des partenaires internationaux. Pour ce qui est de la CNARR et du DIS, étant donné qu'ils ont des rôles très importants, voire indispensables pour les opérations humanitaires, des moyens conséquents sont mis à leur disposition par les acteurs internationaux. Par contre la Direction Nationale des ONG (DONG) dont le rôle reste le plus important pour l'Etat du Tchad. L'importance du rôle de la DONG pour l'Etat tchadien tient en ce qu'il est chargé du contrôle de l'action des ONG sur le plan administratif et sur le plan de la qualité des programmes qu'elles mettent en oeuvre. L'insuffisance, voire l'absence des moyens mis à la disposition de cette structure de contrôle fait que l'Etat n'a pas la possibilité d'avoir un regard effectif sur les opérations des ces organisations. Ce qui peut permettre un certain nombre de pratiques répréhensibles de la part de certains de ces acteurs. Car, même si la majorité des organisations humanitaires présentes au Tchad ont des actions très objectives, effectivement altruistes et recherchant essentiellement la satisfaction des besoins vitaux des populations vulnérables, certaines ont des visées inavouées et se versent parfois dans des pratiques affairistes. D'où l'importance pour l'Etat du Tchad de mettre en place des structures ou de renforcer les compétences de celles qui existent et de les doter des moyens conséquents pour leur permettre de se déployer proprement. Cela aura l'avantage de permettre au pays d'avoir une vue générale sur les opérations humanitaires sur son territoire. En l'état actuel des choses, l'Etat du Tchad semble déléguer la gestion des opérations humanitaires aux agences des Nations Unies et aux Organisations Non-Gouvernementales organisées autour de Coordination Humanitaire. La Coordination Humanitaire est constituée des Représentants des Agences chefs de File des Clusters, des représentants des agences humanitaires y compris le PNUD.

100

Au delà de la non-prise en compte réelle des intérêts stratégiques du pays dans les décisions opérationnelles, l'on remarque également que la non-implication réelle du Tchad dans le système de coordination humanitaire se traduit également par la non-prise en compte des réalités socio-économiques et culturelles des populations bénéficiaires des programmes et l'implémentation des projets ou la délivrance d'aide humanitaire non-adaptés. Pierre MICHELETTI, président de Médecins du Monde, affirme à cet effet que « Les projets en cours qui visent à standardiser ou à quantifier les interventions humanitaires sont inquiétants, car ils font courir le risque d'une approche normative de la solidarité internationale. Moins que jamais, la complexité des terrains ne peut se satisfaire de telles modalités. Si ces recherches de nationalité sont louables, la démarche comporte cependant le risque de réduire l'aide humanitaire à une mise à disposition d'une logistique, négligeant l'étude des mécanismes sociaux et politiques du contexte d'intervention et niant toute collaboration des populations et des professionnels locaux à la définition même des besoins »113. De cette affirmation, il apparait clairement que Pierre MICHELETTI, éprouve de la réserve quant à la quantification des opérations humanitaires. L'on peut donc être conduit à relever que, pour un Etat qui entend inscrire son action humanitaire dans une planification stratégique nationale à l'effet de mettre en adéquation l'accueil des réfugiés avec ses capacités ou ses possibilités d'accueil, la démarche de quantification n'est pas sans importance. Et parce que le mécanisme devant permettre au Tchad d'avoir une lisibilité réelle sur les opérations humanitaires est insuffisant, il est indiqué qu'il entreprenne des études appropriées dont les résultats lui permettraient d'orienter sa politique de gestion des réfugiés et de l'action humanitaire afin de mieux l'aligner à sa stratégie nationale de développement. Aux insuffisances relatives aux cadres institutionnels (structures étatiques de coordination) et de coordination (instruments de gestions des réfugiés), vient s'ajouter la faiblesse de prise en compte de la dimension socio-économique et environnementale dans la définition des programmes de l'aide humanitaire au Tchad.

Paragraphe II : Insuffisance de la dimension socioéconomique et environnementale dans
la définition des programmes d'action à Coré

La question de l'environnement est aujourd'hui un problème sensible qui mobilise l'attention des tous. Cependant, les ONG internationales dans leurs actions à Goré ne lui accorde qu'une place marginale. De ce fait, il serait adéquat d'étudier les limites de cette prise

113Pierre MICHELETTI, Humanitaire : s'adapter ou renoncer, Paris, Hachette Marabout, 2008, p. 124

101

en compte. Néanmoins, nous procéderons préalablement à l'élucidation des insuffisances socioéconomiques.

A- Limites liées à la dimension socioéconomique et culturelle

Eu égard aux résolutions prises au niveau international en matière de gestion des réfugiés, toute action humanitaire doit pouvoir s'inscrire aussi dans une approche de développement, surtout du développement durable. Autrement dit, les acteurs humanitaires en apportant assistance aux réfugiés, sont appelés à s'organiser de manière à ce que leurs actions puissent non seulement conduire à l'autonomisation des réfugiés ou à l'instauration des solutions durables, mais aussi de veiller à ce que leurs actions ne soit pas source de conflits menaçant l'intégration sociale des réfugiés. Cette approche est consacrée à l'Annexe II des Principes d'action dans les pays en développement (A/AC.96/645) qui précise que « Les problèmes de réfugiés exigent des solutions durables. Une solution authentiquement durable signifie l'intégration des réfugiés dans une société : soit la réintégration dans le pays d'origine, après rapatriement librement consenti, soit l'intégration dans le pays d'asile ou le

pays de
réinstallation »114.
L'autonomisation des réfugiés ou l'instauration des solutions durables passe aussi par l'intégration de la dimension socioéconomique tant dans la conception que dans la mise en oeuvre des programmes d'aide humanitaire. Cette dimension est certes présente dans les opérations humanitaires à Goré, mais elle reste largement insuffisante au regard des besoins réels des réfugiés et ceux des populations hôtes. Michael Boyce et Ann Hollingsworth ont justement relevé à ce sujet que « Pendant la plupart de leur 12 ans d'exil, les réfugiés soudanais au Tchad ont été traités par les donateurs et les agences d'aide sur une place strictement humanitaire. Le HCR, le PAM, et des autres organisations ont fourni les types d'assistance directe que toute la population de réfugiés pourrait attendre: des rations alimentaires, de l'abri, des articles non alimentaires, de l'eau, les services de santé, l'éducation et la protection. Il semble que peu de réflexion ait été consacrée à la viabilité de cette aide, ou aux manières de rendre les réfugiés plus autonomes »115.Alors qu'il est évident que si l'on vise une aide durable qui consisterait à redonner aux individus la capacité non seulement de survivre mais également de vivre dignement après la catastrophe, il faut élargir le

114UNHCR Standing Committee : « Impact social et économique d'importantes populations réfugiées sur lespays hôtes en développement », 1997. Source : http://www.unhcr.org

115M. BOYCE et A. HOLLINGSWORTH, « Les réfugiés soudanais au Tchad: passer le relais à personne »,2015, publié sur : https://static1.squarespace.com/static

102

concept d'aide traditionnelle d'urgence et de reconstruction à une aide au développement sur le long terme et à de la prévention. Du point de vue culturel, les rivalités nées des difficultés d'accès aux ressources naturelles (bois de chauffe, terres agricoles, eau, etc.) d'une part, et de l'assistance apportée exclusivement aux réfugiés d'autre part, n'ont pas été propices à l'intégration socioculturelle des réfugiés au sein des populations hôtes.. De telles difficultés surviennent précisément en l'absence ou insuffisance d'une démarche stratégique de gestion des réfugiés. De manière précise, la cohabitation entre les réfugiés et les populations hôtes est sujette à des conflits incessants dans la mesure où les principes ou modes de vie sont loin d'être partagés par les deux communautés. Nonobstant les forts liens historiques et culturels existant entre les populations hôtes et les réfugiés, la communauté humanitaire à Goré n'a pas su mettre à profit ses interventions pour davantage les rapprocher. Car, même s'il est vrai que les conflits entre ces deux communautés peuvent aussi avoir des sources en dehors de celles que nous avons soulignées, il faut noter que dans le cas d'espèce, ce sont principalement les difficultés d'accès aux ressources naturelles qui en sont les causes. Si l'approche participative a depuis longtemps été intégrée dans les programmes d'aide au développement, elle est peu prise en compte lors des aides humanitaires d'urgence. Alors que nul n'est besoin de rappeler que l'efficacité de l'aide humanitaire procède aussi de la prise en compte des réalités culturelles des bénéficiaires. Pour rendre leurs interventions efficaces, les acteurs humanitaires doivent autant que possible fonder leurs interventions sur les réalités locales. Le meilleur moyen de le faire, c'est de traiter avec des entreprises locales, collaborer avec les ONG locales en matière de planification et de mise en oeuvre des opérations, trouver des moyens d'associer les bénéficiaires des programmes à la gestion des secours, favoriser les démarches participatives et faire en sorte que l'aide ne soit jamais imposée aux bénéficiaires. Bref, il faut toujours tendre plus vers une meilleure participation des populations bénéficiaires au processus d'assistance humanitaire. Quoi donner ? Comment donner ? Ces questions ne se posent pas assez souvent dans les opérations humanitaires, et les conséquences sont pour le moins préoccupantes. Car, pour donner, il faut savoir exactement ce dont les populations ont besoin, et également quels sont les éléments qui sont en pénurie dans le pays ainsi que dans la région avoisinante. S'il y a la possibilité de s'approvisionner surplace, alors on privilégiera les dons en espèce permettant d'acheter de la nourriture ou des médicaments localement. Au début des opérations humanitaires à Goré et même jusqu'à récemment, l'on a plusieurs fois assisté à des vives tensions autour de la qualité de l'aide alimentaire livrées aux bénéficiaires. Les types d'aliments apportés ne correspondent pas aux besoins et habitudes alimentaires des dentinaires.

103

Malgré l'interdiction de vendre, certains bénéficiaires sont obligés de les vendre ces articles pour s'en acheter d'autres, correspondant mieux à leurs besoins et habitudes. A ce jour, des milliers de containers entiers, de matériel humanitaire inutile ou avarié attendent encore sur le tarmac des aéroports ou dans les principaux ports pour être éliminés116. Les grosses ONG sont maintenant familiarisées avec ces questions sur le don et ses implications, et ce sont les petites qui posent le plus de problèmes. Les gens pensent bien faire en envoyant des médicaments ou des habits, mais ils font malheureusement souvent plus de mal que de bien, car les procédures administratives et l'élimination représentent un coût important pour ces populations déjà affaiblies économiquement, ou alors pour l'environnement si aucune solution, à terme, n'est trouvée. Pour revenir au cas du Tchad où la persistance des conflits laissent présager que la fin de la crise migratoire n'est pas pour demain, l'on est en raison de s'interroger sur ce qu'il y a lieu de faire pour optimiser la présence des réfugiés et les opérations humanitaires. A notre sens, l'Etat tchadien et les acteurs humanitaires internationaux doivent pouvoir s'organiser de manière à trouver des solutions durables, ou à tout le moins, à renforcer l'autonomisation des bénéficiaires pour une perspective d'accueil maitrisé des réfugiés et d'aide humanitaire réussie.

B- Manque de programme d'action adéquat à Goré

Que ce soit en endommageant directement la terre, l'eau ou la biodiversité, ou par le truchement de stratégies de survie qui exercent de façon indirecte une pression sur des ressources naturelles rares, les impacts environnementaux post-crise peuvent largement porter atteinte aux ressources naturelles et rendre les populations affectées particulièrement vulnérables aux évènements futurs. Aussi, les opérations de secours et de relèvement qui suivent les conflits et les catastrophes naturelles peuvent sans doute causer autant de dégâts environnementaux que les crises elles-mêmes. En effet, l'utilisation durant l'intervention humanitaire de techniques non durables ou causantes des dommages environnementaux, peut laisser des régions dans des logiques de dépendance de l'aide ou de surexploitation de leurs ressources naturelles et ainsi devenir sujettes à de nouveaux conflits. Bien plus, la simple opération d'une importante présence humanitaire conçue pour des opérations rapides et intenses, laisse trop souvent derrière elle, une traînée de déchets polluants, une hyper-utilisation concentrée des ressources et une urbanisation lourde non durable. La non-prise en compte de

116R., PHILIPPE, J. MARGOT, MARGOT A., Les limites de l'aide humanitaire, Lausane, Ecole Polytechnique Fédérale deLausanne, 2007, p. 33

104

ces risques ainsi que l'intégration insuffisante des considérations sur la question environnementale dans les opérations de secours peut réduire l'impact positif des secours en causant davantage de morts, de déplacements, de dépendance à l'aide et de vulnérabilité. Bien que ce lien ait été documenté dans des études de cas et soit communément admis par les acteurs humanitaires sur le terrain, de nombreuses opportunités sont perdues et de nombreux risques environnementaux ignorés tout au long de l'action des ONG internationales à Goré. Les acteurs humanitaires à Goré semblent accorder peu d'intérêt aux considérations environnementales dans la gestion des réfugiés. Les contenus des programmes d'aide humanitaire en attestent. Ces derniers ont été installés dans des zones à écosystème fragile sans la mise en place des mesures de préservation ou de restauration. L'on a ainsi noté que l'écosystème des régions hôtes, plus celui du reste du pays s'est considérablement dégradé, ceci du fait de la pression des populations hôtes et réfugiés sur le peu de ressources naturelles disponibles. Ce phénomène va malheureusement grandissant. Les pouvoirs publics et les organisations humanitaires sont beaucoup plus portés à trouver des moyens de subsistance immédiate ou de secours, à savoir nourriture, santé, eau, éducation, etc... Ce qui n'est pas mauvais en soi, mais reste limité du point de vue des solutions durables ou de l'autonomisation des réfugiés. Les résultats des enquêtes menées sur le terrain dans le cadre de la présente étude, révèlent que les considérations environnementales ont été insuffisamment prises en compte. Dans les localités abritant les camps des réfugiés, l'on perçoit aisément des grandes superficies déboisées, créant par conséquent des conflits ouverts entre les populations hôtes et les réfugiés. Il est à déplorer que très peu des projets visant à préserver ou à améliorer l'écosystème ont été mis en oeuvre dans à Goré où sont installés les camps des réfugiés. Les quelques projets environnementaux implémentés dans la région ne résultent pas nécessairement d'une réflexion visant à combiner la protection de l'environnement à l'assistance humanitaire.

A l'issu de cette littérature, il est à relever que même si les dimensions socio-économiques et environnementales sont présentes dans les programmes d'action des ONG internationales à Goré, elles restent largement insuffisantes du point de vue des exigences d'une démarche d'instauration des solutions durables ou d'autonomisation des réfugiés et des populations hôtes. De telles insuffisances, ainsi que celles relatives à la dimension législative, institutionnelle, fonctionnelle ci-dessus évoquées méritent que l'on s'y penche pour apporter des ajustements requis.

105

SECTION II : PERSPECTIVES D'AMELIORATION DE L'ACTION DES ONG
INTERNATIONALES A GORE

Comme nous l'avons vu dans le chapitre précédent, l'accueil des réfugiés à Goré quoique portant de nombreux risques sécuritaires et environnementaux, est porteur d'énormes retombés impactant positivement son processus de développement socio-économique. Au regard des réalités du terrain et considérant la persistance des conflits à l'origine des multiples flux migratoires sur le territoire national, l'on peut sans risque de se tromper, affirmer que la crise des réfugiés au Tchad s'inscrit dans une perspective à long terme. D'où la nécessité pour l'Etat du Tchad de prendre un certain nombre de mesures dans le sens d'apporter des améliorations non seulement sur les plans juridique, technique et institutionnel (Paragraphe I), mais aussi sur les plans socio-économique et environnemental (Paragraphe II) pour mieux capitaliser les retombés de l'action humanitaire et le rendre davantage profitable pour ses bénéficiaires et pour son développement.

Paragraphe I : La restructuration du cadre législatif et institutionnel de l'action des ONG internationales au Tchad

Dans ce paragraphe, seront exposées tour à tour les mesures relatives au renforcement du dispositif textuel de gestion des réfugiés d'une part (A), et le renforcement des structures étatiques de coordination de l'action des ONG internationales d'autre part (B).

A- Renforcement du cadre juridique et technique de l'aide humanitaire

La présente étude se propose de suggérer des pistes susceptibles de contribuer à corriger ces insuffisances. Pour ce qui est de l'aspect législatif, il semble plus qu'urgent pour le Tchad de définir un cadre juridique spécifique à la question des réfugiés et de l'aide humanitaire. L'intérêt d'une telle loi réside dans le fait qu'elle permettra de contextualiser la gestion des réfugiés et plus généralement, d'apporter des précisions pratiques que l'on retrouve très peu dans les instruments internationaux ou régionaux. A titre d'illustration, l'on peut se référer au Cameroun où il existe une telle loi, en l'occurrence la Loi n°2005/006 du 27 juillet 2005 portant statut des réfugiés au Cameroun. Tout en rappelant la définition du concept de réfugié et les droits et devoirs attachés au statut de réfugié, cette loi détermine et délimite les démarches procédurales à suivre au Cameroun pour acquérir et jouir des droits attachés au statut de réfugié. Une telle loi a le mérite de rendre opérationnel les dispositions des

106

instruments internationaux et régionaux relatifs à la question des réfugiés. A titre illustratif, l'on peut citer ici l'article 7 alinéa 2 de ladite loi qui stipule que « Tout demandeur d'asile doit, à l'entrée du territoire national, se présenter aux autorités compétentes dans un délai de quinze (15) jours». L'alinéa 3 du même article consacre qu'« un saufconduit d'une validité de deux mois non renouvelable est délivré à l'intéressé par l'autorité l'ayant entendu qui transmet sans délai le dossier à la commission d'éligibilité au statut de réfugié visée à l'article 16 ci-dessous »117.Parmi les pays africains à s'être dotés d'une loi nationale régissant le statut des réfugiés, l'on peut citer ; le Sénégal (Décret N° 2004-205 du 17 février 2004 portant octroi du statut de réfugié), le Burkina Faso (Loi N°042-2008/AN Portant Statut des Réfugiés au Burkina Faso. JO N°51 du 18 décembre 2008), le Mali (Loi N°1998-40 du 1998 portant statut des réfugiés) etc. Tout comme dans la loi camerounaise portant statut des réfugiés, celles des pays ci-dessus cités abordent aussi les aspects pratiques relatifs aux démarches procédurales à suivre pour acquérir et jouir des droits attachés au statut de réfugié. Ces aspects pratiques n'existent pas toujours dans les instruments internationaux ou régionaux, et c'est le cas avec ceux relatifs à la gestion des réfugiés. Il apparaît ainsi que le fait pour le Tchad de se doter d'une loi portant statut des réfugiés et de la question de l'aide humanitaire n'est pas juste qu'un effet de mode, mais il constitue un élément d'encadrement pratique qui lui permettrait de gagner en efficacité dans les actions en vers les réfugiés présents sur son territoire. Pour ce qui est du plan d'action stratégique de gestion des réfugiés et de l'aide humanitaire, il constituera une espèce de poteau indicateur pour orienter les actions concertées de l'Etat et de ses partenaires opérationnels en faveur des réfugiés et des populations et contribuera à allier le tout à son plan stratégique de développement national. Le contenu de ce plan abordera principalement les questions relatives aux mesures techniques à prendre pour améliorer les conditions d'accueil et d'intégration des réfugiés et du dimensionnement de l'aide humanitaire en prenant en compte les exigences sociale, économique, culturelle et environnementale des bénéficiaires et de l'orientation stratégique de la politique nationale de développement. A titre d'exemple, l'on peut citer ici le Plan d'Action Humanitaire de la République Démocratique du Congo de 2011118dont la pertinence des dispositions confirme la nécessité pour le Tchad de s'en doter. Il faut noter que pour plus d'opérationnalité et d'efficacité, un tel plan doit résulter d'un consensus entre le pouvoir public national et les organisations humanitaires internationales et locales. Ce plan peut être conçu pour gérer un cas spécifique de gestion des réfugiés, ou pour orienter toutes les

117R., PHILIPPE, J., MARGOT, MARGOT A., Les limites de l'aide humanitaire, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, 2007, p. 33

118 https://www.humanitarianresponse.info/rapport_annuel_pah_2011_final.pdf

107

opérations humanitaires de façon générale. Au-delà du renforcement des instruments d'encadrement juridique et technique des réfugiés, les structures étatiques ont aussi un rôle immense à jouer dans la coordination de l'accueil des réfugiés et de l'action humanitaire au Tchad. D'où la nécessité de s'investir à leur amélioration pour les rendre davantage performantes.

B- La redynamisation du cadre institutionnel et fonctionnel

Améliorer la coordination de l'action humanitaire au Tchad du point de vue des structures étatiques, c'est allier à la fois l'organisation de l'accueil des réfugiés et le pilotage des opérations humanitaires. Ceci peut se faire à travers le renforcement des capacités et la mise à disposition des moyens de fonctionnement aux organes existants, notamment la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés (CNARR) et la Direction Nationale des ONG et des Affaires Humanitaires (DONGAH). Mais pour plus de pragmatisme et d'efficacité, nous recommandons la création d'un organe supplémentaire spécifiquement chargé d'observer l'impact de l'accueil des réfugiés et de l'action des ONG internationales sur le processus de développement socio-économique du pays. En réalité, la coordination de l'action humanitaire pour un pays ne saurait seulement être le fait de s'assurer du bon déroulement des opérations humanitaires et la sécurité des acteurs comme cela semble être le cas actuellement, mais c'est aussi collecter et traiter les données et informations utiles à la prise de décision. Et c'est précisément ces données et informations collectées et traitées qui permettront par exemple d'apprécier l'impact des réfugiés sur le développement socio-économique du pays d'accueil, de formuler des pistes de capitalisation de la présence des réfugiés. Dans le contexte du Tchad où les crises se sont pérennisées, il devient de plus en plus difficile de distinguer les actions de l'aide humanitaire et celles de l'aide au développement. Inversement, les organisations de développement se retrouvent parfois à gérer des situations d'exception et les organisations humanitaires se retrouvent à gérer des actions relevant du domaine de développement. Dans ce contexte, les limites entre les deux secteurs sont d'autant plus difficilement perceptibles que fondamentalement, le développement touche à deux aspects fondamentaux de l'action humanitaire, à savoir la prévention des conflits et la reconstruction. L'idée ici est de conférer une cohérence dans l'action, laquelle donnerait aux agences d'aide humanitaire et de développement et aux donateurs, des éléments susceptibles de mieux orienter leurs interventions.

108

Paragraphe II : L'intégration effective des facteurs socio-économiques et
environnementaux dans l'action des ONG internationales dans les camps de Goré

Traiter du renforcement des dimensions socio-économique (A) et environnementale dans les programmes d'aide humanitaire au Tchad (B), revient en réalité à s'appesantir sur la question du renforcement des liens humanitaires et développement.

A- Intégration de la dimension socio-économique dans les programmes d'action des ONG internationales à Goré

Au Tchad, les besoins humanitaires découlent de nombreux défis, principalement de la rareté des ressources naturelles, des crises sociopolitiques et des multiples conflits armés qui caractérisent la vie du pays et celle de la majorité de ses voisins. Cette situation expose les populations à des crises humanitaires récurrentes, exacerbant ainsi leurs vulnérabilités et affectant leur capacité de résilience. L'extrême pauvreté et les inégalités, l'accès limité aux services de base, la dégradation de l'environnement, le changement climatique et la croissance démographique plus rapide que la croissance économique et le progrès agricole, auxquels se rajoutent les chocs venus des pays voisins, expliquent en partie la persistance des situations humanitaires dans le pays. Dans ce contexte de pauvreté chronique et de faible développement socio-économique, l'action humanitaire, ne peut être efficace sans une programmation intégrée humanitaire développement. L'analyse des besoins humanitaires au Tchad, essentiellement basée sur les trois crises majeures à savoir, l'insécurité alimentaire et la malnutrition, les mouvements de populations et les urgences sanitaires, a permis de mettre en évidence les causes profondes génératrices des besoins humanitaires multisectoriels qui exposent les populations à une vulnérabilité aigüe ou chronique. Dans l'optique d'apporter une réponse à la problématique de l'autonomie des réfugiés, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés a développé une approche alliant l'assistance aux réfugiés et l'aide au développement, connue sous la terminologie de la stratégie de l'aide aux réfugiés et du développement. Cette approche connue sous le nom de l'aide durable, marque un point d'honneur sur la nécessité pour les secours d'être orientés d'emblée vers le développement. L'objectif étant de faire passer les réfugiés à l'autosuffisance et à la mise en oeuvre d'une solution durable à leur situation. Reymond Philippe, Margot Jonas et Margot Antoine disent de l'aide humanitaire durable qu'elle « est une aide dont les effets s'inscrivent dans le long terme. Il ne s'agit pas d'une aide qui dure, mais plutôt d'une aide qui sait évoluer et donner aux populations les conditions nécessaires pour retrouver leur autonomie. Elle doit permettre aux

109

populations une cohabitation sans confrontation, prévenant ainsi l'apparition de nouveaux conflits »119.Une telle approche éviterait aux réfugiés et aux populations locales d'être dépendants de l'aide humanitaire. Sachant que la limitation de la dépendance ou l'autonomisation impacte positivement sur le développement socio-économique du pays d'accueil, l'approche aide durable ne sera que avantageuse pour le Tchad. Si les acteurs humanitaires internationaux n'interviennent pas de manière satisfaisante en matière d'autonomisation des bénéficiaires, il revient à l'Etat du Tchad de s'investir pour rendre cela possible, parce qu'il y va avant tout de son intérêt. Dans la perspective d'apporter de réponses efficaces à ces problématiques, la communauté humanitaire s'est dotée d'un cadre de réponse pluriannuel couvrant la période de2019-2020 aligné à l'UNDAF 2017-2021 (United Nations Development Assistance Framework ou Plan cadre des Nations Unies pour le Développement), lui-même ancré sur le Plan National de Développement du Tchad (PND 2016-2020). Ledit cadre permettra d'engager des actions humanitaires et d'impliquer davantage les acteurs de développement et le gouvernement dans des programmes de réduction progressive des vulnérabilités identifiées au sein des populations réfugiés et locales, grâce à un diagnostic partagé des problèmes de développement et leurs effets sur la persistance des crises humanitaires. S'il est vrai que ce cadre de réponse pluriannuel se trouve en adéquation avec le Plan de Développement National du Tchad, pour ce qui est précisément de la gestion des réfugiés, la démarche aurait pu gagner davantage en efficacité s'il existait un plan stratégique national d'action humanitaire, en plus du Plan National de Développement. Pour le comprendre davantage, il faut dire que le Plan de Développement National fixe en réalité les grandes orientations du développement, mais il revient à chaque secteur d'élaborer des instruments de planification spécifique. Au Tchad, il reviendra par exemple à la Commission Nationale d'Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Rapatriés, ou à un autre organe dédié et le ministère de tutelle, d'élaborer le plan stratégique national d'action humanitaire. L'approche constitue donc un acquis, mais c'est sa matérialisation dans le contexte tchadien qui pose problème, et ce, en raison de l'insuffisance des instruments d'orientation et de planification stratégique du développement local dans les localités hôtes et du plan d'action stratégique de gestion des réfugiés. A ceci, l'on peut aussi ajouter l'insuffisance de la ressource humaine. S'agissant du renforcement de l'approche de l'intégration des services humains, les acteurs

119R., PHILIPPE, J., MARGOT ET A. MARGOT, Les limites de l'aide humanitaire, SHS Développement Durable et Développement Nord-Sud, Ecole polytechnique de Lausanne, 2006-2007, p. 50.Pour eux, l'aide humanitaire durable s'articule donc autour de cinq piliers : coordination des actions pendant la crise ; approche participative ; aide à la réhabilitation socio-économique ; maintien des traditions locales ;prévention.

110

humanitaires opérant au Tchad doivent pouvoir davantage tenir compte des difficultés des populations hôtes et intégrer ces derniers dans leurs actions d'assistance. Ceci parce qu'en réalité, la présence des réfugiés complexifie leurs conditions de vie. Et pour ce faire, des mesures doivent aussi être prises pour davantage tenir compte de leurs conditions de vie. A ce niveau, il sera concrètement question de mettre sur pieds des mécanismes visant à développer la résilience des populations hôtes face aux difficultés nées de la présence des réfugiés dans leurs villages, mais aussi à développer la résilience des réfugiés pour une autonomisation ou du moins, pour préparer leur intégration ou leur réinstallation. Les mesures visant à renforcer la dimension socio-économique dans l'action humanitaire doivent pouvoir être aussi bien le fait des acteurs humanitaires nationaux que des acteurs humanitaires internationaux.

B- Intégration de la dimension environnementale dans les programmes d'action des ONG internationales à Goré

D'après l'UNHCR Standing Committee, « Il n'est pas toujours possible de contrôler les modifications des écosystèmes. Si l'on modifie un ou plusieurs facteurs avec un but spécifique tel que le défrichage pour la culture ou le nivellement aux fins d'irrigation, et que cette modification se fonde sur une planification saine, tenant compte de l'impact sur les conditions écologiques, l'écosystème nouvellement établi n'est pas nécessairement inférieur à l'ancien. Le développement d'un nouveau système peut dans ce cas être qualifié de développement contrôlé. Mais si un changement soudain et non planifié survient, il peut conduire à un déséquilibre grave et incontrôlé ayant une incidence sur l'écosystème tout entier, tant dans la région directement touchée qu'au-delà. Le mouvement massif de réfugiés constitue un exemple d'une situation où l'impact sur l'écologie n'est pas totalement contrôlé car le caractère d'urgence du mouvement ne permet pas généralement une planification précoce et adéquate du nouvel habitat »120affirme le Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés. De cette affirmation, l'on retient que l'entreprise de préservation de l'environnement dans un contexte d'accueil massif des réfugiés n'est pas chose aisée. Elle peut l'être dans le cas où les activités susceptibles de porter atteinte à l'environnement ont fait l'objet d'une conception et d'une planification stratégique en amont. L'accueil des réfugiés au Tchad est en réalité chose spontanée et ne relève pas d'unetelle démarche, et c'est ce qui explique la dégradation de l'écosystème dans les régions où sont installés les réfugiés. Puisque l'environnement est déjà

120UNHCR Standing Committee : « Impact social et économique d'importantes populations réfugiées sur les pays hôtes en développement », 1997. Source : http://www.unhcr.org/fr

111

considérablement dégradé et que le départ des réfugiés n'est pas pour demain, des mesures méritent d'être prises à l'effet de réduire l'impact sur l'écosystème. S'il est vrai qu'il revient à une instance internationale, en l'occurrence le Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés de coordonner l'action des différents acteurs devant permettre la gestion efficace des réfugiés et la restauration de l'écosystème138,il y a lieu de relever que c'est d'abord l'Etat du Tchad qui est interpellé en premier chef. Il devra donc faire preuve d'une démarche diplomatique efficace pour mobiliser les acteurs internationaux autour de la question de restauration de l'écosystème dans les régions dont les écosystèmes ont été affectés par la présence des réfugiés. En plus de la mobilisation des acteurs internationaux, l'Etat tchadien devra en interne, prendre aussi des mesures de protection ou de restauration de l'environnement. Les actions des organisations humanitaires internationales et celle du Tchad, devront donc conduire à la mobilisation des compétences et des ressources financières nécessaires à la restauration de l'environnement des zones d'implantation des camps de réfugiés. La grande détresse que provoquent les crises humanitaires pousse les organisations humanitaires à intervenir. Mais comment peuvent-elles intervenir afin d'alléger les souffrances des personnes sans alimenter les conflits, sans entraver les efforts locaux et sans induire des effets pervers de dépendance ? Un élément de réponse est apporté aujourd'hui au travers des programmes de soutien à la résilience. Un programme qui oeuvre au renforcement des capacités à résister et à absorber les chocs lors de la crise. La mise en oeuvre de ce programme permettrait de diminuer le degré de vulnérabilité de la population et d'éviter la dégradation de la situation humanitaire. Cette stratégie doit être envisagée à plusieurs niveaux socio-économiques. Il s'agira notamment de la : Résilience des individus : permettre aux personnes de faire face aux chocs épidémiologiques et climatiques, ainsi qu'aux stress dus au manque de nourriture et de sécurité. Pour ce faire, il faut mettre en place des programmes qui, tout en comblant leurs besoins vitaux, ne les mettent pas dans une position de dépendance, par exemple dans le en développant un programme d'aide combinant aide alimentaire limitée - soutien à la relance agricole. De fait, cela consistera en la limitation et/ou réduction de l'aide alimentaire directe et un investissement massif dans le développement de l'agriculture. Mais pour réussir, il est fondamental d'être d'abord à l'écoute, de cerner les besoins réels et de voir ce qui est encore à disposition. Un exemple concret de réussite en matière de relance de l'agriculture qui pourrait inspirer est celui du Malawi amplement détaillé par Mathilde Douillet de Fondation pour l'Agriculture et la Ruralité dans le Monde (FARM)121.

121M., Douillet, La relance de la production agricole au Malawi : succès et limites, FARM, mars 2011 p. 3. Dans

112

CONCLUSION PARTIELLE

En principe lorsqu'on pose une action, on s'attend à une conséquence, autrement dit un impact. Partant de cette base, l'action des ONG internationales à Goré comporte inexorablement des conséquences ou impacts. On remarque dans un premier temps ces impacts sur la vie des réfugiés des camps de Goré et ensuite sur le Tchad en général. Les réfugiés se trouvaient dans des situations de vulnérabilité criante et leurs quotidiens étaient constitués d'une précarité alarmante, mais avec l'affluence des ONG internationales et la mise en oeuvre de leurs actions, ces derniers ont vu leur vie s'améliorer même si l'on ne pourrait parler de confort de base. Ces améliorations concernent particulièrement les secteurs de la protection, de l'éducation, de la santé et de l'hygiène, de l'environnement mais aussi des programmes d'autonomisation et de réduction de la situation de dépendance. Quant aux impacts pour le Tchad, ils ne sont non plus des moindres. Car, non seulement, les ONG internationales de Goré à travers leurs actions, permettent à l'Etat tchadien d'avoir des débouchés sur le plan socioéconomique et politique en interne, mais, ces actions constituent un moyen pour le Tchad de redorer son blason à travers une promotion reluisante de sa politique extérieure et la montée en puissance de sa diplomatie.

Si les actions des ONG internationales impactent positivement sur la vie des réfugiés, des populations hautes et du Tchad dans sa généralité, il ne serait pas judicieux de passer sous silence les limites de ces actions. Ainsi, nous relevons un certain nombre d'insuffisances à savoir les insuffisances sur le plan législatif, institutionnel et stratégique d'une part et d'autre part, les limites sur le plan économique et environnemental. Pour ce faire, compte tenu des limites, l'on a préféré faire quelques suggestions en guise de contribution car il ne serait pas constructif d'étudier une situation, d'analyser ses contours, d'en déceler les impacts positifs et les limites sans pouvoir faire des suggestions.

cet article, Mathilde Douillet explique comment le Malawi, un des pays les plus pauvres et les plus densément peuplés d'Afrique subsaharienne, est en passé de devenir une star grâce à la croissance spectaculaire de sa production de maïs, aliment principal de sa population. En quelques années, le Malawi a doublé la production de maïs, ce qui lui permet même d'en exporter à ses voisins. Ce succès s'explique essentiellement par une réorientation massive du budget de l'Etat vers le secteur agricole. Cette note fit le point des mesures mises en oeuvre dans le secteur agricole malawien. Elle souligne leurs succès et leurs limites. En particulier, elle analyse la subvention à l'utilisation des intrants et montre comment cette mesure a permis aux agriculteurs les plus pauvres d'accéder aux engrais et aux semences, levant ainsi la contrainte principale à l'augmentation des rendements.

CONCLUSION GENERALE

113

Le choix d'un thème traitant de la question de l'action des ONG et portant notamment sur« L'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré au Tchad » n'est pas anodin. Nous nous sommes fixés pour objectif de comprendre comment s'effectue le déploiement des ONG internationales dans les camps de réfugiés de Goré et l'influence que leurs actions peuvent avoir sur les réfugiés ainsi que sur le territoire tchadien. Pour atteindre cet objectif, nous avons émis des hypothèses de départ dont une hypothèse principale et deux hypothèses secondaires, formulées respectivement comme suit : Hypothèse principale : Les actions des ONG internationales dans les camps de Goré sont animées par le souci de la protection internationale conformément à la Déclaration Universelle de Droit de l'Homme : « tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sureté de sa personne »122. Ces actions ont aussi pour but d'assister les réfugiés notamment sur les questions d'ordre alimentaire, sanitaire, et éducatif ; tout en identifiant les défis auxquels l'assistance et la protection des réfugiés sont confrontées afin d'explorer les possibilités de leur renforcement au moyen de nouvelles approches, qui respectent les préoccupations et les contraintes de l'État tchadien.

Hypothèse secondaire 1 : Le déploiement des ONG internationales dans les camps de Goré est précédé par un certain nombre de formalités administratives. Après ces formalités s'en suit la descente sur les terrains d'opération des différentes ONG en fonction de la spécialité de chacune d'elles.

Hypothèse secondaire 2 : Le déploiement des ONG a des conséquences positives dans la vie des réfugiés, car il permet non seulement d'assurer leur protection mais aussi d'assurer les besoins vitaux à savoir la satisfaction des besoins en eaux, en nourriture, en éducation, en santé et des activités connexes telle que l'agriculture.

C'est donc sur la base de ces hypothèses que nous avons entrepris les recherches. Les résultats issus des investigations menées dans le cadre de ladite étude montrent que l'action des ONG internationales à Goré a un impact globalement positif pour le pays. Ces résultats

122 Article 3 de la Déclaration Universelle des droits de l'Homme du 10 Décembre 1948.

114

attestent que, sur le plan socio-économique, l'accueil des dizaines des dizaines de milliers de réfugiés à Tchad a engendré une mobilisation sans précédent de la solidarité internationale en faveur du pays. Cette mobilisation se caractérise par une affluence massive des organisations humanitaires internationales et un déploiement d'énormes ressources financières et matérielles pour la mise en oeuvre des projets d'assistance aux réfugiés, mais aussi aux populations locales dont la situation n'est parfois guère meilleure que celle des réfugiés. Ce déploiement massif des organisations humanitaires internationales et des ressources financières permettent non seulement d'apporter de l'aide directe aux populations réfugiés et autochtones en leur fournissant gratuitement, entre autres, des soins de santé, de l'eau potable et de l'aide alimentaire, mais elles permettent aussi de générer de l'emploi, de l'auto-emploi et de créer de nombreuses opportunités d'affaires pour les opérateurs économiques et les populations locales.

Sur le plan politique et diplomatique, les résultats de cette recherche montrent que l'action des ONG internationales à Goré recouvre des enjeux stratégiques de taille pour le pays, récemment encore considéré comme « un pays néant » en ce qu'il lui permet de bénéficier d'une exposition médiatique que a largement contribué à la promotion de son image sur la scène internationale comme un pays faisant preuve d'une volonté à respecter ses engagements issus des conventions internationales et régionales en matière des réfugiés.

Outre l'impact positif sur le processus de développement socio-économique et politique du Tchad, les résultats de la recherche montrent que la gestion réussie des milliers de réfugiés au Tchad peut servir de vecteur de promotion du renforcement de l'intégration nationale et régionale, voire africaine.

Par ailleurs, même si les résultats de l'étude nous révèlent que la République du Tchad fait preuve de volontarisme et d'exemplarité en accueillant tant de réfugiés sur son territoire national, il ne reste pas moins que l'accueil de ces réfugiés et la gestion de l'aide humanitaire qui s'en est suivie restent caractérisés par un certain nombre d'insuffisances qui amenuisent l'impact positif de cette hospitalité humanitaire. Ces insuffisances relevées tiennent aussi bien au niveau législatif, institutionnel que fonctionnel, notamment à l'absence de lois régissant spécifiquement les questions des réfugiés, des Organisations Non-Gouvernementales et la gestion de l'aide humanitaire, à la faiblesse des organes de l'Etat en charge de la question des réfugiés, à l'absence d'organe de l'Etat dédié à la gestion de l'aide humanitaire et à la faiblesse de la coordination entre les services publics et les organisations humanitaires

115

opérationnelles au Tchad ainsi qu'à la faible de prise en compte des réalités socioculturelles des populations bénéficiaires et de du renforcement de l'intégration de l'aspect durabilité dans la définition des programmes d'aide humanitaire. Les différents résultats obtenus nous amènent à conclure que nos hypothèses de départ, se vérifient. Considérant que la crise des réfugiés au Tchad s'inscrit dans la durée, du fait de la persistance des crises sociopolitique, économique et sécuritaire au Tchad et dans les différents pays d'origine des réfugiés, il est important, voire urgent que le Tchad, de concert avec ses partenaires humanitaires internationaux et nationaux, prenne des mesures qui s'imposent pour pallier à ces insuffisances afin de mieux capitaliser les retombés de la présence des réfugiés et de l'aide humanitaire au profit des bénéficiaires et de son développement socio-économique et politique. C'est pourquoi, en guise de contribution, nous avons suggéré un certain nombre de pistes d'améliorations - allant de l'adoption des lois spécifiques à la question des réfugiés, de l'aide humanitaire et du fonctionnement des organisations humanitaires au renforcement de la coordination entre les services de l'Etat et les organisations humanitaires, en passant parle renforcement de capacités des organes publics en charge de la question des réfugiés et de la gestions des organisations non-gouvernementales, à la révision du contenu des programmes d'aide.

116

BIBLIOGRAPHIE

I- OUVRAGES

A- OUVRAGRES GENERAUX

ARON Raymond, Paix et Guerre entre les nations, Paris, Calmann-Lévy, 1984

BRAILLARD, Théorie des Relations Internationales, Paris, P.U.F, 1977

COLIN Roland, Au Tchad, mirages et déboires d'une révolution démocratique espérée .
· 19681972
, Paris, Présence Africaine, 2015

COURMONT Barthélemy, RIBNIKAR Darko, Les guerres asymétriques .
· Conflits d'hier et d'aujourd'hui, terrorisme et nouvelles menaces
, Paris, Presses Universitaires de France, 2002.

DIDEROT Denis, Pensées philosophiques, paris, princeps, 1746

FINNEMORE Martha, National interest in international society, Ithaca, Cornell University Press, 1996

FRONTIER Marc, Le Darfour, Organisations Internationales et crise régionale 2003-2008, Paris, L'Harmattan, 2009

FUKUYAMA Francis, La fin de l'histoire, et le dernier homme, Paris, Flamarion, 1992

GUIBBAUD Pauline, BOKO HARAM, Histoire d'un islamisme sahélien, Paris, PUF, mai 2014 KLOTZ Audie, The struggle against apartheid Norms and International relations, Ithaca, Cornell University Press, 1995

POUPARD Paul, Les religions, Paris, PUF, 2007

ROUSSEAU Jean-Jacques, Du contrat social, ou principes du droit politique, in Collection complète des oeuvres, Genève, 1780-1789, vol. 1, édition en ligne, www.rousseauonline.ch, version du 7 octobre 2012

TSAYEM DEMAZE Moise, Le protocole de Kyoto, le clivage Nord-Sud et le défi du développement durable, Paris, l'Espace géographique, 2009

B- OUVRAGES SPECIALISES

ATLANI-DUAULT Laetitia, Les ONG à l'heure de la bonne gouvernance, Presses de Sciences Po, Paris 2005, p.176-189

117

ATLANI-DUAULT Laetitia et LAURENT Vidal, Anthropologie de l'aide humanitaire et du développement, des pratiques aux savoirs, des savoirs aux pratiques. Paris, Armand colin, 2009

BANGOURA Mohamed Tétémadi, Violences politiques et conflits en Afrique : cas du Tchad, Paris, Budapest, Kinshasa, L'Harmattan, 2015

CONDAMINES Charles, L'aide humanitaire entre la politique et les affaires, Paris, L'Harmattan, 1989, p.161-178

DOUCIN Michel, Les ONG : Le contre-pouvoir ?, Paris, Toogezer, 2007

D'ORFEUIL Henri Rouillé, La Diplomatie Non Gouvernementale. Les ONG peuvent-elles changer le monde, Paris, édition de l'atelier, 2006

GUENEAU Marie-Christine, Les petits projets sont-ils efficaces ?, Paris, L'Harmattan, 1986. P.25-32

HAROUEL-BURELOUP Véronique, Histoire de la Croix-Rouge, Paris, PUF, 1999

KING Alexander et SCHNEIDER Bertrand, Questions de survie, la révolution mondiale a commencé, Paris, Calmann-Levy, 1991, p.147

LARREY Dominique Jean, Mémoires de chirurgie militaire et campagnes 1786-1840, Paris, Rémanences, tome 5

MICHELETTI P, Humanitaire : s'adapter ou renoncer, Paris, Hachette Marabout, 2008 MULLER Jean-Daniel, Les ONG ambiguës, Aide aux Etats, aides aux populations, Paris, l'Harmattan, 1989

PEROUSE DE MONTCLOS Marc-Antoine, Les ONG et La mesure du développement : entre performance et communication, Paris, Tiers monde, 2013, p.71 à 86

PHILIPPE R., MARGOT J, MARGOT A., Les limites de l'aide humanitaire, Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne, 2007

PIVETEAU Alain, Evaluer les ONG, Paris, Kartala, 2004

POIRIER Jean-Paul, Le tremblement de terre de Lisbonne, Paris, Odile Jacob, 2005 POURTIER Roland, Les réfugiés en Afrique Centrale : une approche géopolitique, Afrique contemporaine, 2005

RUFIN Jean-Christophe, L'aventure humanitaire, Paris, Edition Gallimard, 1994

RYFMAN Philippe, Les ONG, Paris, La Découverte, 2009

TOUNKARA Brehima, Le rôle des ONG dans l'éducation de base au Mali, Bamako, 2001 TROUBE Christian, L'humanitaire en turbulences, les ONG aux défis de la solidarité internationale, Paris, Editions Autrement, 2006

118

ZIMET Joseph, Les ONG. De nouveaux acteurs pour changer le monde, Editions Autrement, Paris, 2006

II- OUVRAGES DE METHODOLOGIE, LEXIQUES ET DICTIONNAIRES

ABRIC Jean-Claude, Méthodologie de recueil des représentations sociales, Paris, PUF, 1994 GRAWITZ Madeleine, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1986

LAWRENCE Olivier, JULIE Ferron, GUY Bedard, L'élaboration d'une problématique de recherche, sources, outils et méthodes, Paris, L'Harmattan, 2005

PLOUFFE et GUILLEMETTE, MTE comme apport au développement de la recherche en art, Université de Québec, 2012.

III- ARTICLES

BATLEY Richard et ROSE Pauline, « Collaboration in delivering education: relations between governements and NGOs in South Asia », Birmingham, Developpement and practice, vol.20, 2010, p. 579-585

CHECKEL Jeffrey, «The constructivist turn in international relations theory», World politics, 50(2), 1998, p 24-62

DAIGNEAULT Pierre-M., Les approches théoriques en évaluation, In cahiers de la performance de l'évaluation Printemps, N°4, 2011

FERNAND Pierre-George, FASSASSI Raimi, « Démographie et développement en Afrique : éléments rétrospectifs et prospectifs », cahier Québécquois de démographie, Volume 40, n°2, automne 2011, p 33-55

KIPLING Rudyard, « The white man's burden: the United States and the Philippine

Islands », in McClure's Magazine, vol. 12, n 4, février 1899, p. 282-290.

NISHIMUKO Mikako, « The role of non-governemental organisations in achieving education for all: the case of Sierra Leone », journal de comparaison et de l'éducation internationale, 2009, p.281-285

STANGHERLIN Gregor, « Les organisations non gouvernementales de coopération au développement », Paris, Courier hebdomadaire du Centre de recherche et d'information sociopolitique, 2001, p.5 à 59

TOUNKARA Brehima, « Le rôle des ONG dans l'éducation de base au Mali », USAID, ROCARE, 2001, p.7-40

IV- TRAVAUX DE RECHERCHES A- THESES

119

HAREK Mc Sameh, L'approche transnationale dans les relations internationales, Doctorat en Droit Public, Université de Nantes, sous la direction d'Anne-Sophie GOURDIN, 2014

B- MEMOIRES

MBOUWE Nankam Nguewo Marcelle, L'action des ONG humanitaires dans la gestion de la logistique en situation d'urgence à l'Est du Cameroun, Mémoire de master en Coopération Internationale, Action Humanitaire et Développement Durable, spécialité : Coopération au Développement et Action Humanitaire, IRIC, 2015

NKUISSI Bernard, « Nkongsamba, les années obscures de la fondation », mémoire DES en histoire, université de Lille, 1977, p.47-53.

PADOUM Aïba Aristide, L'accueil des réfugiés et son impact sur le Développement socio-économique du pays hôte : Le cas du Tchad depuis 2003, Master en Relations Internationales, option Coopération au Développement et Action Humanitaire, IRIC, 2014

WAYA Jean Hermann, Analyse de la gestion environnementale du projet Pipeline Tchad-Cameroun dans la localité de Bélabo, monographie de DCJA en Sciences Techniques d'Animation, INJS de Yaoundé, 2010

WAYA Jean Hermann, Etat des lieux de l'oeuvre des ONG internationales la région centre du Cameroun, Master en Relations Internationales, option Coopération au Développement et Action Humanitaire, IRIC, 2013

V- COURS

ZANG Laurent, Historique, architecture organisationnelle et gouvernance des ONG, Master en Relations Internationales, IRIC, 2017

BATCHOM Paul Elvic, Les missions de maintien de la paix, Master CA2D, IRIC, 2017

VI- OUVRAGES DE METHODOLOGIE, LEXIQUES ET DICTIONNAIRES

ABRIC Jean-Claude, Méthodologie de recueil des représentations sociales, Paris, PUF, 1994 GRAWITZ Madeleine, Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 1986

LAWRENCE Olivier, JULIE Ferron, GUY Bedard, L'élaboration d'une problématique de recherche, sources, outils et méthodes, Paris, L'Harmattan, 2005

LOUFFE et GUILLEMETTE, MTE comme apport au développement de la recherche en art, Université de Québec, 2012.

VII- DOCUMENTS ET TEXTES OFFICIELS A- RAPPORTS

120

Rapport de HCR Tchad, « La population totale de réfugiés et demandeurs d'asile est passée de 393161 en Décembre 2016 à 394279 personnes en janvier 2017 Rapport du HCR à la date du 31/01/2017

Rapport d'activité annuel de l'année 2017 de l'ONG SAHARA Conservation fund (SCF) sur le « projet de réintroduction de l'oryx au Tchad »

Rapport annuel des activités des services communautaires dans les camps de réfugiés soudanais à l'Est du Tchad en 2017, ONG Hebrew Immigrant Aid Society (HIAS), projet de « Protection dans l'attente de solution durable a

B- TEXTES OFFICIELS

Article 28 de la constitution tchadienne de 2018

Convention de Genève du 24 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et son protocole de 1967.

Déclaration Universelle des Droits de L'homme

Recensement Général de la Population et de l'habitat 2 (RGPH2), 2009

VIII- WEBOGRAPHIE

www.unhcr.org

www.mboangila.afrikblog.com/archives/2007 www.thèses.fr/s50661

www.amazon.fr

www.googlescholar.com

www.fao.org www.cairn.info www.humanitarianresponse.info www.tempsreel.nouvelobs.com/economie www.irinnews.org

www.tchadinfos.com

121

www.jeuneafrique.com

https://static1.squarespace.com/static www.europarl.europa.eu

TABLE DES MATIERES

DÉDICACE ii

REMERCIEMENTS iii

SIGLES ET ABREVIATIONS iv

LISTE DES TABLEAU ET FIGURES vi

RESUME vii

ABSTRACT 0

INTRODUCTION GENERALE Erreur ! Signet non défini.

I- CONTEXTE DE L'ETUDE 2

II- DELIMITATION DU CHAMP DE LA RECHERCHE 3

1- Délimitation spatiale 3

2- Délimitation temporelle 4

III- CLARIFICATION CONCEPTUELLE 5

1- Organisation Non Gouvernementale (ONG) 5

2- Refugié 6

IV- REVUE DE LA LITTERATURE 7

V- OBJECTIFS D'ETUDE 16

1- Objectif général 16

2- Objectifs spécifiques 16

VI- PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES 17

1- Problématique 17

2- Hypothèses 18

VII- CADRES THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE 18

A- CADRE THEORIQUE 19

1- Le transnationalisme 19

2-

122

Le réalisme 21

3- Le néolibéralisme 22

B- CADRE METHODOLOGIQUE 24

1- La technique de collecte de données 24

2- La technique d'analyse des données 25

VIII- ANNONCE DU PLAN 25

PREMIERE PARTIE 26

L'ACTION DES ONG AU TCHAD : UNE DYNAMIQUE UNIVERSELLE 26

CHAPITRE I : LES FONDEMENTS ET L'ETAT DES LIEUX DU DEPLOIEMENT

HUMANITAIRE DES ONG INTERNATIONALES AU TCHAD 28

SECTION I : LES FONDEMENTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES AU

TCHAD 28

Paragraphe I : Les fondements historiques et sociologiques de l'action des ONG

internationales 29

A- Les fondements historiques 29

1- Bases religieuses 29

2- L'apport de la philosophie 30

B- Les fondements sociologiques de l'action des ONG internationales 31

1- La conception occidentale de la solidarité 33

2- De la conception occidentale à la carence des politiques locales de développement depuis

les indépendances en Afrique 35

Paragraphe II : Les instruments juridiques et les mécanismes institutionnels de l'action des

ONG internationales au Tchad 36

A- Les instruments juridiques 37

1- Les textes internationaux 37

a- La Déclaration Universelle des Droits de l'Homme 37

b- Convention européenne (n°124) sur la reconnaissance de la personnalité juridique des

organisations non gouvernementales et leur protection en Droit International 38

2- Les textes nationaux 39

a- La constitution (article 28 de la constitution de 2018) 40

b- L'ordonnance n°27/INT-SUR du 28 Juillet 1962 40

c- Décrets n°166 du 25 Aout 1962 41

d- Ordonnance n°023/PR/2018 du 27 Juin 2018 42

B- Les mécanismes institutionnels 42

1- Les mécanismes institutionnels sur le plan international 42

a-

123

Conseil économique et social des Nations Unies (ECOSOC) 42

b- L'Union Africaine (UA) 44

2- Les mécanismes institutionnels sur le plan national 44

a- Le Ministère de l'économie et de la planification du développement (La Direction des

ONG et Affaires Humanitaires) 44

b- Le Ministère des Affaires Etrangères, de l'Intégration Africaine et de la Coopération

Internationale (Direction Générale de la Coopération Internationale) 46

c- Le CNARR 47

SECTION II : L'ETAT DES LIEUX DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES

DANS LES CAMPS DE GORE 48

Paragraphe I : Aperçu général sur les camps de réfugiés de Goré 49

A- Le dénombrement et organisation des réfugiés dans camps de Goré 49

B- La pluralité des ONG internationales intervenant dans les camps de Goré 50

Paragraphe II : De la situation initiale aux conditions actuelles des réfugiés 51

A- La situation de précarité des réfugiés 52

B- L'amélioration des conditions de vie des réfugiés grâce à l'action des ONG internationales

à Goré 55

CHAPITRE II : L'OPERATIONNALISATION DES ONG INTERNATIONALES DANS

LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : LE CADRE OPERATIONNEL 57

Paragraphe I- La mise en oeuvre de l'action des ONG internationales à Goré 57

A- Les partenariats entre les ONG internationales et les organes des Nations Unies

Collaboration et mise en oeuvre 58

B- Le partenariat entre les ONG internationales, l'Etat tchadien 59

Paragraphe II : L'implantation des actions des ONG internationales à travers des

stratégies spécifiques 60

A- Les programmes et projets des ONG 61

B- Les plans de réponse 62

SECTION II : L'EFFECTIVITE DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE

REFUGIES DE GORE 64

Paragraphe I : Les réalisations dans les secteurs prioritaires 64

A- La satisfaction des besoins vitaux 64

1- Éducation 64

2- Eau, hygiène et assainissement 64

3- Moyens de subsistance 65

4- Protection 65

5-

124

Santé et nutrition 65

6- Sécurité alimentaire 66

7- Abris 66

B- L'assistance dans le secteur de développement et de l'environnement 66

Paragraphe II : Les stratégies d'adaptation et les modalités de distribution 69

A- Les stratégies d'adaptation 69

B- Les modalités de distribution 71

CONCLUSION PARTIELLE 71

DEUXIEME PARTIE Erreur ! Signet non défini.

IMPACTS DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS LES CAMPS DE

REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

CHAPITRE III : L'IMPACT POSITIF DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES

DANS LES CAMPS DE REFUGIES DE GORE Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES SUR LA VIE

DES REFUGIES DE GORE 75

Paragraphe I : Etude de l'impact dans les domaines prioritaires 76

A- La protection 76

1- Protection communautaire 77

2- Enregistrement et documentation 77

3- Prévention et réponse aux violences sexuelle et sexiste (SGBV): Action contre les violences

sexuelles et sexistes 77

4- Protection de l'enfance 78

5- Coexistence pacifique 79

B- Education 79

C- Sécurité alimentaire 79

D- Santé et nutrition 80

E- Moyens d'existence et environnement 81

F- Abris et articles non alimentaires 82

I- Eau, Hygiène et Assainissement 83

Paragraphe II : Perspective de réduction progressive du besoin d'assistance 84

SECTION II : L'IMPACT DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES POUR LE

TCHAD 85

Paragraphe I : L'impact de l'action des ONG internationales dans les camps de réfugiés de

Goré sur le plan interne 85

A- Les avantages socio-économiques 85

1-

125

Les avantages sociaux 85

2- Les débouchés économiques 86

a- Les créations d'emploi 86

b- La manne financière humanitaire comme opportunités d'affaires pour les opérateurs

économiques 88

C- Les avantages administratifs 90

1- Accueil des réfugiés comme outils de l'intégration locale 90

2- L'accueil des réfugiés comme moyen de renforcement de la présence de l'Etat et de la

bonne gouvernance 91

Paragraphe II : L'impact de l'action des ONG internationales dans les camps de Goré sur le

plan international 92

A- L'action des ONG internationales à Goré, canal de rayonnement international pour le

Tchad 92

B- L'action des ONG internationales à Goré, un moyen de la montée en puissance de la

diplomatie tchadienne 94

CHAPITRE IV : LIMITES DE L'AIDE HUMANITAIRE AU TCHADET

PERSPECTIVES D'AMELIORATION Erreur ! Signet non défini.

SECTION I : LES LIMITES DE L'ACTION DES ONG INTERNATIONALES DANS LES

CAMPS DE GORE 96

Paragraphe I: Les insuffisances sur le plan législatif, institutionnel et fonctionnel 96

A- Insuffisances législatives et stratégiques 96

B- Les insuffisances institutionnelles et fonctionnelles 98

Paragraphe II : Insuffisance de la dimension socioéconomique et environnementale dans la

définition des programmes d'action à Goré 100

A- Limites liées à la dimension socioéconomique et culturelle 101

B- Manque de programme d'action adéquat à Goré 103

SECTION II : PERSPECTIVES D'AMELIORATION DE L'ACTION DES ONG

INTERNATIONALES A GORE 105

Paragraphe I : La restructuration du cadre législatif et institutionnel de l'action des ONG

internationales au Tchad 105

A- Renforcement du cadre juridique et technique de l'aide humanitaire 105

B- La redynamisation du cadre institutionnel et fonctionnel 107

Paragraphe II : L'intégration effective des facteurs socio-économiques et environnementaux

dans l'action des ONG internationales dans les camps de Goré 108

A- Intégration de la dimension socio-économique dans les programmes d'action des ONG

internationales à Goré 108

126

B- Intégration de la dimension environnementale dans les programmes d'action des ONG

internationales à Goré 110

CONCLUSION PARTIELLE 112

CONCLUSION GENERALE Erreur ! Signet non défini.

BIBLIOGRAPHIE Erreur ! Signet non défini.






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway