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La protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun


par André Junior BEDJOKO BEDJOKO
Université Catholique d’Afrique Centrale - Master en Droit Public 2023
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE

INSTITUT FACULTE

DEPARTEMENT

REPUBLIQUE DU CAMEROUN REPUBLIC OF CAMEROON

Paix-Travail-Patrie Peace-Work-Fatherland

******* *******

CATHOLIQUE D'AFRIQUE CATHOLIC UNIVERSITY OF CENTRAL

CENTRALE AFRICA

******* ********

CATHOLIQUE DE YAOUNDE CATHOLIC INSTITUTE OF YAOUNDE

********** ***********

DE SCIENCES JURIDIQUES FACULTY OF LAW AND POLITICAL

ET POLITIQUES SCIENCE

********** **********

DE DROIT PUBLIC DEPARTMENT OF PUBLIC LAW

 
 

LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS
POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE AU CAMEROUN

Mémoire présenté et soutenu publiquement en vue de l'obtention du Master en Droit Public
Option : Droit Public Fondamental

Par :

BEDJOKO BEDJOKO André Junior

Maitrise en Droit Public

Sous la Direction de :
Dr. Pierre Thibaut BATA

Chargé de cours à l'Université Catholique d'Afrique Centrale

Sous la Supervision de :

Pr. Jean Didier BOUKONGOU

Professeur titulaire de droit international à l'Université Catholique d'Afrique Centrale

Année académique 2022-2023

 
 

AVERTISSEMENT

L'Université Catholique d'Afrique Centrale n'entend accorder ni approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire, celles-ci doivent être considérées propres à l'auteur.

« Gouverner, c'est d'abord loger son peuple »

II

Abbé Pierre.

DEDICACE

III

Je dédie ce travail à ma mère, MBAZOA MEKEME Pauline épouse BEDJOKO

iv

REMERCIEMENTS

Nous tenons d'abord à remercier L'administration de l'Université Catholique d'Afrique Centrale, la Faculté de Sciences Juridiques et Politiques et le département de Droit Public pour l'expérience enrichissante qu'ils nous ont fait vivre durant notre formation.

Ensuite, mon Directeur de Mémoire, Docteur Pierre THIBAUT BATA pour le temps qu'il nous a consacré lors de nos échanges, la transmission de ses connaissances et son professionnalisme qui nous ont aidé à la rédaction de ce travail, sans oublier ses précieux conseils qui nous ont tout autant aidé dans cette démarche.

Ensuite, Professeur Jean Didier BOUKONGOU, qui a eu la bienveillance de superviser la rédaction de ce travail de recherche.

Le Docteur Maurice ONANA, Coordonnateur des étudiants de Master 2 Droit Public, pour son accompagnement tout au long de l'année académique.

Notre famille, pour les encouragements et le soutien qu'elle a eu à m'octroyer depuis mon enfance et surtout lors de mon cursus académique à l'Université Catholique d'Afrique Centrale.

Notre encadreur de stage académique à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale, Madame DJOPMO NONO Marie Gisèle, pour les connaissances et les conseils qu'elle a portés à mon attention lors de mon stage académique.

Enfin, notre frère MEKEME BEDJOKO Michel Legrand, pour le soutien qu'il ne cesse de m'accorder au quotidien.

V

 
 

SIGLES ET ABBREVIATIONS

 

AAU

Actes Administratifs Unilatéraux

 

CADHP

Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples

 

CAY

Chambre Administrative de Yaoundé

 

CC

Conseil Constitutionnel

 

CFJ

Cour Fédérale de Justice

 

CONAC

Commission Nationale Anti-Corruption

 

COVID-19

Corona Virus Disease 2019

 

CTD

Collectivité Territoriale Décentralisée

 

DSCE

Document Stratégique pour la Croissance et l'Emploi

 

DUDH

Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

 

DUP

Déclaration d'Utilité Publique

 

FAO

Food and Agriculture Organization

 

MAETUR

Mission d'Aménagement et d'Equipement des Terrains Urbains et Ruraux

 

MINADER

Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural

 

MINAT

Ministère de l'Administration Territoriale

 

MINDCAF

Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières

 

MINDUH

Ministère du Développement Urbain et de l'Habitat

 

MINUH

Ministère de l'Urbanisme et de l'Habitat

 

ONU

Organisation des Nations Unies

 

OUA

Organisation de l'Unité Africaine

 

PM

Premier Ministre

 

PR

Président de la République

 

PRD

Pouvoir Réglementaire Dérivé

 

PRO

Pouvoir Réglementaire Originaire

 

RGP

Recours Gracieux Préalable

 

SE

Son Excellence

 

SND30

Stratégie Nationale de Développement 2030

 

TGI

Tribunal de Grande instance

 

TPI

Tribunal de Première instance

 

UCAC

Université Catholique d'Afrique Centrale

vi

RÉSUMÉ

A ce jour, l'Etat ne possède pas assez de terres dans les zones désenclavées. Pour cette raison, il s'attarde à engager de différentes mesures qui lui permettront d'enrichir d'avantage son domaine public dans ces zones. Parmi celles-ci, l'on distingue la réquisition, la nationalisation, la saisie immobilière, l'expropriation pour défaut de mise en valeur, l'expropriation pour cause d'utilité publique, pour ne citer que celles-ci. Une observation accrue des activités de l'Etat en la matière nous permet de constater que celui-ci a tendance à recourir beaucoup plus au dernier mécanisme, dans l'exercice de ses missions régaliennes. L'expropriation pour cause d'utilité publique étant entendue largement comme la cession forcée du bien immeuble d'un particulier à une personne morale de Droit Public, avec pour motivation majeure la satisfaction de l'intérêt général, apparaît donc comme une procédure indispensable pour l'Etat dans l'accomplissement de ses missions régaliennes.

Le présent travail de recherche a été mené dans l'optique de renforcer le cadre juridique en ce qui concerne la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Pour cette raison, nous avons gambergé sur la question de savoir comment ces droits sont protégés au Cameroun. Nous avons pu observer que ces droits sont protégés à travers l'existence de normes à la fois internationales que nationales, mais aussi à travers des mécanismes juridictionnels et non-juridictionnels. Néanmoins, force a été de constater que cette protection demeure lacunaire à cause de diverses pesanteurs, en l'occurrence, l'obsolescence des textes régissant les indemnisations suite aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il a finalement été impératif pour nous de proposer quelques reformes afin de protéger de manière optimale les droits des victimes de ce type d'expropriation. Des reformes comme la révision des textes régissant les expropriations pour cause d'utilité publique ou encore la sensibilisation de la population sur ce sujet, ont été proposées dans ce travail de recherche.

MOTS CLÉS : Domaine Public - Réquisition - Nationalisation - Saisie Immobilière - Expropriation pour défaut de mise en valeur - Expropriation pour cause d'utilité publique - Bien immeuble - Personne morale de Droit Public - Intérêt Général - Indemnisations

vii

ABSTRACT

To date, the Cameroonian State doesn't possess a lot of pieces of land in landlocked areas. For this reason, it focuses on engaging in different measures that will enable it to enrich its public domain in these areas. Amongst these, we distinguish requisition, nationalization, real estate seizure, expropriation for lack of development, expropriation for public purpose, just to name a few. An observation of the State's activities in this area allows us to see that it tends to make much more use of the last mechanism, during the exercise of its sovereign missions. Expropriation for public purpose widely understood as the forceful transfer of the immovable property of an individual to a moral person of Public Law, with the primary objective to satisfy the general interest, therefore appears to be an essential procedure for the State in the performance of its sovereign missions.

The present work of research was conducted in order to strengthen the legal framework which governs des rights of victims of expropriations for public purpose in Cameroon. For this reason, we had to reflect on the question to know how the rights of these victims are protected in Cameroon. It was observed that these rights are protected through the existence of different norms, both at the international and national levels, but also through different mechanisms of jurisdictional and non-jurisdictional orders. Nevertheless, we could identify a good number of vices which render this protection weak in practice, such as the outdated character of the texts which govern the compensations due to victims of expropriations for public purpose in Cameroon. It was therefore mandatory for us to suggest certain reforms which could render this protection much stronger in practice. Reforms such as the revision of texts related to expropriations for public purpose or the sensitization of the population about this topic, were mentioned in this work.

KEY WORDS: Public Domain - Requisition - Nationalization - Real Estate Seizure - Expropriation for lack of development - Expropriation for public purpose - Real estate - Legal person of Public Law - General Interest - Compensations

VIII

SOMMAIRE

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : LA PROTECTION PERCEPTIBLE DES DROITS DES VICTIMES

DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 16

CHAPITRE I : LA CONSÉCRATION JURIDIQUE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 18

SECTION I : La Consécration Normative Des Droits Des Victimes Des Expropriations Pour Cause

D'utilité Publique Au Cameroun 18

SECTION II : La Consécration Institutionnelle Des Droits Des Victimes Des Expropriations Pour

Cause D'utilité Publique Au Cameroun 37

CHAPITRE II : L'OPÉRATIONNALISATION DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 52

SECTION I : Le Dynamisme Des Instances Juridictionnelles Dans La Mise En OEuvre De La Protection Des Droits Des Victimes Des Expropriations Pour Cause D'utilité Publique Au Cameroun

53

SECTION II : L'implication Des Instances Non-Juridictionnelles Dans La Mise En OEuvre De La Protection Des Droits Des Victimes Des Expropriations Pour Cause D'utilité Publique Au Cameroun

58

DEUXIÈME PARTIE : LA PROTECTION LACUNAIRE DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 64

CHAPITRE I : LES LACUNES GANGRÉNANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 66

SECTION I : Les Limites Juridiques Fragilisant La Protection Des Droits Des Victimes Des

Expropriations Pour Cause D'utilité Publique Au Cameroun 66

SECTION II : Les Limites Sociologiques Gangrenant La Protection Des Droits Des Victimes Des

Expropriations Pour Cause D'utilité Publique Au Cameroun 74

CHAPITRE II : LES MESURES PALLIATIVES POUR UNE PROTECTION OPTIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 82

SECTION I : L'apport De L'etat Camerounais Au Renforcement De La Protection Des Droits Des

Victimes Des Expropriations Pour Cause D'utilité Au Cameroun 82

SECTION II : La Contribution De La Population A La Reduction Des Violations Des Droits Des

Victimes Des Expropriations Pour Cause D'utilité Publique Au Cameroun 88

CONCLUSION GÉNÉRALE 95

BIBLIOGRAPHIE 96

LISTE DES ANNEXES 101

TABLE DES MATIERES 122

1

INTRODUCTION GÉNÉRALE

L'expression « Il n'y a ni justice ni liberté possible lorsque l'argent est toujours roi » du célèbre philosophe français Albert Camus élargit son sens dans les matières relatives aux cessions des propriétés privées à l'Etat. Ce dernier est doté de prérogatives exorbitantes en matière administrative en général et en matière foncière de façon plus particulière. Ceci se dégage par les dispositions du Code Civil de 1804 qui établit inter alia que « Nul ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n'est pour cause d'utilité publique »1. Alors, pour des besoins d'intérêt général, toute personne peut être appelée à céder une partie ou la totalité de sa propriété immobilière à l'Etat.

Cette procédure a été développée au Cameroun lors de la période coloniale. Elle fut introduite par les colons allemands par un arrêté daté du 27 mars 1888, pris par le gouverneur allemand de l'époque. Cet Arrêté avait pour objet de poser les jalons de l'acquisition, la perte et la limitation des droits fonciers au Kamerun allemand. À partir de là, les populations devinrent au parfum des différentes procédures qui leurs permettraient de devenir légalement des propriétaires terriens et jusqu'où elles peuvent jouir de ces terres. Elles peuvent en jouir justement jusqu'à ce que l'Etat décide d'intervenir dans leurs domaines

Cette intervention se manifeste beaucoup plus en matière d'expropriation avec pour motif de promouvoir l'utilisation collective de cette propriété terrienne. Ceci est établi dans le classique de FOUDA MBALLA Maurice c/ Etat du Cameroun Oriental, suivant l'arrêt no 160/CFJ/CAY du 08 juin 1971 où le requérant FOUDA s'est vu retiré son bien immeuble pour des besoins d'intérêt général.

La règle est que pour toute expropriation pour cause d'utilité publique, une indemnisation équitable doit s'en suivre. Il faudrait noter que cette indemnisation préalable n'est pas toujours évidente pour un Etat qui fait face à des réalités budgétaires. Ceci se fait donc généralement de façon réductionniste au détriment des victimes expropriées. Plusieurs hypothèses peuvent alors naître de cette aberration. L'on suppose tout d'abord un niveau inapproprié de laxisme juridique ou encore une faible instauration organique de mécanismes de garantie du respect des procédures mises sur pied en matière d'indemnisation dans le cadre de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Il est alors nécessaire de relever les lacunes juridiques et institutionnelles que font face ces procédures et établir des méthodes pour les combler et répondre aux attentes des populations.

1 Article 545 du Code Civil français de 1804.

2

I - CONTEXTE DE L'ETUDE

Le caractère inattaquable, intangible et définitif du titre foncier2 au Cameroun devient de plus en plus sujet de controverses au fil du temps. Ceci est dû à l'expropriation abusive des propriétés immobilières privées par l'Etat aux fins d'utilité publique. Il est certes indéniable que les expropriations sont consacrées, mais elles sont tenues de suivre une certaine procédure et de respecter un certain nombre de règles.

Le Cameroun a pour objectif de devenir un pays émergent à l'horizon 2035. Pour cette raison, celui-ci oeuvre de toutes les manières possibles afin de multiplier ses offres d'infrastructures nécessaires à sa population dans leurs différents domaines d'activités. Dans les zones urbaines, il n'est pas surprenant que les expropriations pour cause d'utilité publique se multiplient pour construire des infrastructures de base nécessaires au développement. La population qui est au parfum de cet objectif d'émergence visé par le gouvernement a néanmoins tendance à être susceptible à de telles procédures d'expropriations, quand elle est directement concernée. Ceci n'est pas essentiellement dû à des motivations égocentriques et individuelles mais à des violations graves aux procédures d'expropriation.

Les populations au Cameroun sont dans certains cas lésées lors des procédures d'expropriation. Elles ne sont pas très souvent indemnisées à la juste valeur de leurs propriétés expropriées. Le motif d'utilité publique n'est pas fondé lors de ces procédures. Les délais ne sont pas respectés lors de ces procédures. Pour des raisons d'analphabétisme et de manque de moyens en règle générale, ces victimes ne mènent aucune action pour que justice leur soit rendue. Tout ceci fait en sorte que tous les efforts consentis par l'Etat camerounais pour garantir une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique juste et équitable soient remis en question. C'est sur ces différents motifs que cette étude visant à garantir une protection beaucoup plus appuyée des droits des victimes de ces expropriations est menée.

II - DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE

La présente étude a été faite selon une délimitation des faits bien précise. Tout d'abord selon une délimitation spatiale (A). Ensuite, selon une délimitation temporelle (B) et finalement selon une délimitation matérielle (C)

2 Article premier du décret n° 76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et complété par le décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005.

3

A - DÉLIMITATION SPATIALE

Le cadre de recherche du présent travail est observé dès la lecture du thème retenu. En d'autres termes, l'étude a été menée dans un cadre strictement national, c'est-à-dire, sur l'étendue du territoire camerounais. Ceci est dû au fait que l'objectif du présent travail est de reconnaître les failles internes en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, pour y apporter des solutions conjoncturelles, voire même structurelle. Ainsi, cela ne nécessite logiquement pas une extension Internationale de recherche en la matière.

Aussi, l'étude menée au Cameroun ne s'est pas faite dans une zone précise mais en fonction des différents cas d'expropriation recensés par les juridictions compétentes. Toutefois, la plupart des données retenues dans ce travail sont celles récoltées à partir des travaux menés dans les régions du Centre et du Littoral.

Le cadre loci3 de cette étude s'est accompagné par une délimitation temporelle bien précise.

B - DÉLIMITATION TEMPORELLE

Les terrains existent depuis aussi longtemps que la terre existe. Les litiges relatifs à ces précédents existent néanmoins depuis qu'un accaparement individualiste de ceux-ci a débuté. Ainsi, il serait assez fastidieux de mener cette étude depuis cette période. Les travaux menés pour le compte de ce travail se sont attardés sur la période post indépendance du Cameroun4. C'est à partir de cette période que les premiers jalons régissant les domaines fonciers et domaniaux ont été posés. Il était donc indispensable pour cette étude de débuter à cette période jusqu'à date.

La présente étude s'est aussi limitée sur un champ matériel bien précis.

C - DÉLIMITATION MATÉRIELLE

L'expropriation pour cause d'utilité publique tire son origine du domaine foncier et du domaine domaniale. L'on constate que ces deux (02) domaines sont issus d'un régime assez hybride5 dû à des traces du régime public et du régime privé en la matière. Ainsi, le présent travail est fondé à la fois sur le Droit public interne et le Droit privé interne. Cela n'exclut pas que référence soit parfois faite à des textes externes dont le champ d'application s'étend sur le

3 Latin pour « géographique ».

4 A compter du 1er janvier 1960.

5 Droit Public et Droit Privé.

4

territoire camerounais, à l'instar du Code Civil français de 1804 et des textes internationaux relatifs à la protection des individus en matière foncière et domaniale par l'Etat camerounais6.

Parmi les différents textes utilisés dans ce travail, l'on dégage principalement : La Constitution du 18 janvier 1996 révisée en 2008, la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation, le décret n° 76/165 de 1976 organisant les procédures d'obtention du titre foncier, L'ordonnance n° 74-1 du 06 juillet 1974 fixant le régime foncier, l'ordonnance n° 74-2 du 06 juillet 1974 fixant le régime domanial, l'ordonnance n° 74-3 du 06 juillet 1974 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

III - DÉFINITION DES CONCEPTS

Le thème du présent travail comprend un certain nombre de termes qu'il faudrait éclaircir avant d'envisager une quelconque analyse de fond. Une précision sur les termes Protection (A), Expropriations (B) et Cause d'Utilité Publique (C) sera donc apportée dans le développement ci-après.

A - PROTECTION

Le Dictionnaire Larousse définit la notion de protection comme l'action de défendre un quelconque fait, une personne, une idéologie7. Elle peut aussi être comprise comme la chose qui protège et assure contre le risque, un danger ou encore un mal. La protection renvoie aussi à l'ensemble des mesures destinées à protéger certaines personnes et organismes chargés de l'application de telles mesures.

Une définition un peu plus avancée est donnée par Gérard CORNU. Il définit cette notion comme « une précaution qui, répondant au besoin de celui ou de celle qu'elle couvre, et répondant en général à un devoir pour celui qui l'assure, consiste à prémunir une personne, un bien contre un risque, à garantir sa sécurité et son intégrité, etc..., par des moyens juridiques ou matériels. Elle désigne aussi bien l'action de protéger que le système de protection établi (mesure, régime, dispositif) »8. L'idée de la protection que voudrait faire ressortir CORNU ici est celle d'une prévention contre un quelconque risque qui pourrait

6 Notamment la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

7 Dictionnaire Larousse, édition 2022.

8 Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, Quadrige/PUF, 1987, Paris p.618. Cité dans le mémoire de Pythagore NONO KAMGAING, « la protection des droits de la personnalité par le juge Camerounais », UCAC-Master Droits de l'homme, 2009. www.memoireonline.com, (Consulté le 05/07/2023).

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frapper un individu, à un moment donné. François BRUGNION pour sa part essaye plutôt de démontrer le caractère essentiellement pratique de la notion de protection. Il précise que « le concept de protection possède une dimension essentiellement pratique : protéger n'est ni dire ni écrire, c'est aussi essentiellement intervenir, agir. » 9 Ainsi, pour que la notion de protection prenne tout son sens, elle devrait se détacher d'une simple théorie et embrasser un cadre beaucoup plus pratique.

Selon le Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires (UNOCHA), la protection est un terme général lié aux activités visant à obtenir le plein respect des droits de l'individu, conformément au droit international, dont le droit humanitaire international, les droits de l'homme et les droits des réfugiés, quel que soit son âge, genre ou origine sociale, ethnique, nationale, religieuse et autre10. Ce Bureau étant un organe des Nations Unies s'est appesanti sur le Droit International, ce qui est tout à fait justifiable. Cependant, il ne serait en aucun cas fallacieux si une telle définition prenait comme source le Droit Interne d'un pays. Ainsi, la protection comprend aussi les activités liées au respect des droits des individus, conformément à la législation interne d'un pays.

Aussi, dans l'affaire SERAC et Autres c. Nigeria, une définition plus intéressante est donnée par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples. Celle-ci s'est basée sur l'institution de Banjul qui précise que la notion de protection est une obligation à la charge de l'Etat en vertu de ses obligations en matière de droits de l'homme. Selon la Commission, l'Etat est tenu de protéger les détenteurs de droits contre d'autres individus, par la législation et la mise à disposition de recours effectifs. Cette obligation selon elle, requiert de l'Etat de prendre des mesures pour protéger les bénéficiaires des droits protégés contre les ingérences politiques, économiques et sociales. La protection conclut-elle, exige généralement la création et le maintien d'un climat ou d'un cadre par une interaction effective des Lois et Règlements, de manière à ce que les individus puissent exercer librement leurs droits et libertés.11 La définition proposée par La Commission Africaine des Droits de l'Homme parait la plus appropriée dans le cadre du présent travail. Ceci est dû à la clarté et le vide d'ambiguïté que

9 François BRUGNION, « Le Comité International de la Croix-Rouge et la protection des victimes de guerre », in Revue Internationale de la Croix-Rouge, no 775, janvier-février 2005, p 11. Cité dans le mémoire de Pythagore NONO KAMGAING, « la protection des droits de la personnalité par le juge Camerounais », UCAC-Master Droits de l'homme, 2009. www.memoireonline.com, (Consulté le 05/07/2023).

10 Bureau des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires, OCHA d'une seule voix : la protection, Juin 2010.

11 Social and Economic Right Action Centre c. Nigeria RADH 2001 63, p. 45. Cité dans le mémoire de Pythagore NONO KAMGAING, « la protection des droits de la personnalité par le juge Camerounais », UCAC-Master Droits de l'homme, 2009. www.memoireonline.com, (Consulté le 05/07/2023).

6

présente ladite définition. Dès lors, en considérant les éléments compris dans la définition de la Commission dans le présent travail, la protection est perçue comme toute action prise par le gouvernement camerounais pour protéger et prendre la défense des personnes qui sont frappées d'expropriation pour cause d'utilité publique sur son territoire.

B - EXPROPRIATIONS

L'utilisation du terme expropriation se fait le plus souvent dans un contexte concernant des biens immeubles. C'est pour cette raison que la majorité des définitions vont dans ce sens. La définition proposée par l'administration française par exemple dispose que l'expropriation est une procédure qui permet à une personne publique (État, collectivités territoriales...) de contraindre un particulier ou une personne morale (entreprise) à céder la propriété de son bien, moyennant le paiement d'une indemnité. Cette procédure contribue notamment à la réalisation d'ouvrages publics (équipements sociaux, réseaux d'assainissement...)12.

Selon Joseph OWONA, l'Etat peut acquérir des biens mobiliers ou immobiliers par voie contractuelle. Il fait alors recourt à des mécanismes qui peuvent être : des procédés de contrat administratif ; ou des procédés de contrainte ou de cession forcée. L'expropriation constitue un de ces procédés de cession forcée13. La définition proposée par OWONA est intransigeante sur le fait que les expropriations sont ipso facto des procédures de cession forcée de biens immeubles.

Aussi, l'expropriation peut être définie comme la possibilité pour une personne publique (c'est-à-dire l'État ou une collectivité territoriale) de priver de sa propriété un propriétaire foncier. Il s'agit d'une vraie dérogation au droit de propriété qui affirme que nul ne peut être contraint à céder son bien. La personne publique peut ainsi dépouiller, en totalité ou en partie, une personne privée (un particulier) ou une personne morale (une société) de son immeuble, de son terrain, ou encore d'un usufruit ou d'une servitude (on parle de droit réel immobilier)14.

Une définition un peu plus poussée est donnée par le Cabinet Jordan AVOCATS qui précise que l'expropriation est la possibilité pour l'expropriant, qui peut-être une personne publique (l'Etat, une Collectivité Territoriale Décentralisée, un Etablissement Public) et

12 www.service-public.fr (Consulté le 05/07/2023).

13 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, le Harmattan, 2012, p 49.

14 www.justice.ooreka.fr (Consulté le 05/07/2023).

7

parfois une personne privée d'acquérir un bien alors que son propriétaire n'en est pas vendeur15.

A la lecture de ces différentes définitions, l'on retient qu'elles peuvent toutes être assimilées dans la présente étude. Ainsi, l'expropriation peut être comprise ici comme la cession forcée d'un bien immobilier à une personne morale de Droit Public pour des motifs d'intérêt général.

C - CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

La notion d'utilité publique a été au fil du temps un sujet de controverse. En effet, il a toujours été difficile de cerner exactement à quoi revoit cette notion, en quoi consiste réellement une cause d'utilité publique. Alexia RIVET dégagera même qu'il n'existe pas de définition stricte de l'utilité publique. Celle-ci doit se définir en fonction de l'opération et l'environnement qui la caractérisent.

Aussi, la notion d'utilité publique a été forgée à l'origine pour justifier l'expropriation. L'expropriation se définit comme un transfert forcé de la propriété de tout ou partie d'un bien immobilier au nom de l'utilité publique. En d'autres termes, procédure parmi les plus coercitives, elle permet de contraindre une personne, publique ou privée, à céder son bien moyennant une juste et préalable indemnité. L'on observe qu'il est relativement difficile de définir la notion d'utilité publique sans celle de l'expropriation.

Néanmoins, une définition assez révélatrice a été adoptée par Choné & Associés NOTAIRES, qui établit qu'elle renvoie à une déclaration officielle de l'autorité publique dont est investie une institution d'intérêt général (association reconnue d'utilité publique, fondation) ou une opération (expropriation) en considération de l'intérêt général qui s'attache à celle-ci et qui entraîne l'application d'un régime juridique dérogatoire à celui du droit commun.16 A l'analyse de cette définition, il faudrait noter que l'utilité publique entretient une relation très intime avec la satisfaction de l'intérêt général.

Dès lors, il convient de noter que la définition de l'utilité publique à retenir dans ce travail est celle de Choné & Associés NOTAIRES. En l'espèce. Elle apparaît comme la satisfaction de l'intérêt général comme priorité des expropriations au Cameroun.

15 www.jordan-avocats.com (Consulté le 05/07/2023).

16 www.chone.notaires.fr (Consulté le 05/07/2023).

8

IV - INTÉRÊT DE L'ETUDE

Le présent travail revêt d'un double intérêt, qui est à la fois scientifique et social. Pour des raisons de présentation, avant de présenter l'intérêt social du traitement de ce thème(B), il sera présenté l'intérêt scientifique (A) de cette même recherche.

A - INTÉRÊT SCIENTIFIQUE

Les populations ont le droit de jouir de leurs propriétés immobilières sans discrimination quelconque. D'ailleurs, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (DUDH) voudrait que chaque individu ait droit à un logement décent. Elle précise explicitement que « toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »17 On constate néanmoins qu'au Cameroun, ce droit au logement est bafoué lors de la plupart des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique. Ceci est dû au fait que les droits des victimes de ces expropriations ne sont pas toujours respectés. La suite de cela est le recours à des logements indécents par ces mêmes victimes. C'est pour cette raison que la présente étude est menée afin de renforcer la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Cette protection qui est garantie à travers un certain nombre de textes et de mécanismes, demeure relativement souple dans la pratique. Ainsi, la présente étude s'attardera à démontrer pourquoi malgré les efforts consentis par le gouvernement camerounais, la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique demeure aussi fragile dans la pratique.

B - INTÉRÊT SOCIAL

En protégeant les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique, les droits de l'Homme consacrés par les textes internationaux le sont également18. Ces droits qui sont également consacrés par la Constitution en vertu de l'appartenance intégrale du préambule à la Constitution, sont ainsi protégés par ce canal. Ainsi, la présente étude qui est

17 Article 25 alinéa 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

18 Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, Pacte International relatif aux droits économiques sociaux et culturels de 1966 pour ne citer que ceux-ci

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au demeurant un reflet de la société actuelle, aidera la population à être au parfum des différents droits qui leur sont dévolus en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Les acteurs de la société civile qui ne cessent de s'interroger sur les stratégies qu'ils pourraient engager pour limiter les violations de ces droits, pourraient s'inspirer des travaux de la présente étude. Dans une certaine mesure, les administrations étatiques pourraient aussi adopter des politiques sur la base des recommandations précisées dans cette étude. Si cela est fait, les bienfaits que la mise en oeuvre de ces politiques pourrait générer, auront la possibilité d'être affectés dans d'autres secteurs. Ainsi, la vision d'émergence qu'a le gouvernement camerounais à l'horizon 2035 sera atteint en toute fluidité.

V - REVUE DE LA LITTÉRATURE

Une série d'auteurs camerounais s'est intéressée aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Néanmoins, leurs travaux ne se sont pas directement questionnés sur l'effectivité du respect des droits des personnes victimes de telles procédures. L'on peut s'appesantir sur certains, qui pour nous, ont donné des opinions importantes sur le nécessité de protéger les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Dans l'étude menée par Joseph OWONA19, sur la domanialité publique et les expropriations pour cause d'utilité publique nous fait comprendre dans un premier temps comment les terres de l'Etat sont organisées20 et dans un second temps, la méthode par excellence utilisée par l'Etat pour contraindre un particulier à lui céder sa propriété immobilière21. C'est la deuxième partie de ce travail qui nous est intéressante ici. L'auteur fait une présentation succincte de cette procédure en passant par son bien-fondé jusqu'à son corolaire direct qu'est l'indemnisation compensatrice. Selon lui, et en se basant sur la disposition de la Constitution du 18 janvier 1996, « L'indemnisation est donc un droit en cas d'expropriation. Elle ne peut être supprimée ni par un texte ayant valeur de loi ni par un quelconque acte administratif »22. L'auteur rappelle donc au gouvernement Camerounais qu'une indemnisation à la suite d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique n'est pas facultative mais obligatoire. On peut comprendre qu'il milite en la faveur d'une

19 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2012

20 Ibid, pp. 11-45

21 Ibid, pp. 49-97.

22 Ibid, p. 88

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protection sans faille du droit à l'indemnisation dévolu aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Joseph OWONA voudrait donc que l'Etat camerounais mette tous les moyens nécessaires en place, afin de protéger les droits des victimes de ces expropriations. Les différentes étapes pour procéder aux expropriations pour cause d'utilité publique ne sont pas consacrées pour des raisons fantaisistes. Elles le sont pour garantir une sécurité juridique optimale des victimes, ce qui contribue à faire du Cameroun un Etat de Droit stricto sensu.

Le même point de vue est partagé par Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA23 quand ils procèdent à une étude empirique des indemnisations qui ont été versées dans les expropriations pour cause d'utilité publique occasionnées à Lom Pangar, Mekin et Kribi. Pour ceux-ci, les indemnisations suite à ce type d'expropriation sont versées afin de préserver la paix et éviter les conflits. En leurs termes « pour éviter les conflits et préserver la paix, la législation camerounaise a-t-elle prévu des indemnisations dans le cadre des expropriations pour cause d'utilité publique »24. L'on observe ainsi la volonté du gouvernement camerounais à faire de la nation un réel Etat unitaire et décentralisé, à la lumière des dispositions de la Constitution de 199625. Ce qui est aussi intéressant avec les travaux de ces auteurs, est la reconnaissance qu'ils font des politiques camerounaises en matière d'indemnisation, qui sont essentiellement basées sur l'ordonnance de 197426 et la loi de 198527 créant un cadre juridique bien structuré en matière d'indemnisation pour cause d'exploitations de cette nature28. L'objectif visé par ces travaux est clair, l'indispensable nature des indemnisations qu'il faudrait toujours reverser aux victimes des expropriations de cette nature. Dans leurs travaux ils énoncent même certains maux qui fragilisent la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ils relèvent par exemple l'anachronisme des textes en la matière et les actes de corruption au cours de ces procédures. Dès lors, Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA voudraient que la protection de ces

23 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, le Harmattan, 2021

24 Ibid. pp. 24-25

25 Article 1 alinéa 2.

26 Ordonnance n° 74-3 du 06 juillet 1974 relative aux expropriations pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

27 Loi qui est venue abroger l'ordonnance de 1974 relative aux expropriations et aux modalités d'indemnisation

28 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021, pp. 35-70 (Consulté le 05/07/2023).

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victimes soit renforcée. Pour ce faire, les vices qu'ils ont présentés dans leur travail, devront être éradiqués sur le long terme.

Selon un article publié sur les médias numériques par Samuel NGUIFFO29, les procédures d'expropriation doivent être aussi améliorées que les mécanismes d'indemnisation. Selon l'auteur, les procédures d'expropriation doivent être menées avec la plus grande délicatesse possible. Les terres sont tellement vastes qu'il serait facile pour l'Etat de commettre des erreurs non seulement sur la superficie à exproprier, mais aussi sur les personnes directement concernées par la procédure. Samuel NGUIFFO s'est appuyé sur les Directives de l'organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) qui établissent inter alia que ; « Les États devraient veiller à ce que les expropriations soient planifiées et réalisées dans la transparence et de façon participative. Toute personne susceptible d'être touchée devrait être identifiée, et correctement informée et consultée à toutes les étapes du processus. Des consultations conformes aux principes énoncés dans les présentes Directives devraient permettre de donner des informations sur d'autres approches envisageables pour la réalisation des objectifs publics et de prendre en compte des stratégies permettant de réduire au maximum la perturbation des moyens de subsistance. Les États devraient être attentifs lorsque l'expropriation vise des zones ayant une importance culturelle, religieuse ou environnementale particulière ou lorsque les terres, pêches ou forêts visées sont particulièrement importantes pour les moyens de subsistance de personnes pauvres ou vulnérables » 30 . A l'analyse, l'on observe qu'il y'a une nécessité pour les procédures d'expropriation de débuter par une identification précise des personnes pouvant être affectées de près ou de loin par celles-ci. Ces personnes doivent être mises au parfum des différentes étapes qui vont s'en suivre et des garanties qui leur incombent eu égard à l'expropriation dont ils sont victimes.. Le même auteur voudrait aussi que les droits des victimes prévus par la législation en vigueur soient respectés à la lettre. L'on distingue le décret N°87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi N°85/9 du 4 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation qui précise que l'indemnisation n'est pas facultative et doit se faire avant d'engager la procédure

29 Samuel NGUIFFO, Améliorer le système d'expropriation et de compensation dans un contexte de pluralisme

juridique : leçons du Cameroun, https://archive.uneca.org/sites/default/files/uploaded-
documents/CLPA/2019/Papers/Land-Based-Investments/nguiffo_ameliorer_le_systeme_dexpropriation_et_de_compensation_dans_un_contexte_de_pluralis me_juridique.pdf (Consulté le 05/07/2023).

30 Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture, Directives volontaires pour une Gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts Dans le contexte De la sécurité alimentaire nationale, Rome, 2012, p. 28.

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d'expropriation. Ce même décret précise aussi qu'un préavis de trois (03) à six (06) mois doit être servi aux victimes pour qu'ils puissent avoir le temps de déguerpir. Samuel NGUIFFO interpelle donc les acteurs des expropriations pour cause d'utilité publique à faire preuve d'une méticulosité sans pareil au cours de ces procédures. Cela aura pour conséquence d'observer comme il se doit les droits reconnus à ces victimes.

KOUAYEP Prosper, pour sa part s'est directement mis à énumérer les failles majeures des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun31. En ses termes ; « mettre en exergue les problèmes liés à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux indemnisations, consécutivement à la mise en oeuvre des projets d'envergure. A ce propos, il s'agit, entre autres, de la mauvaise évaluation ou sous-évaluation des biens, la mauvaise qualification juridique des biens à indemniser, le non-paiement de certaines victimes, le versement des indemnisations aux personnes fictives, le barème dérisoire des indemnisations ». Tout comme NGUIFFO, l'on observe dans son travail la persistance des problèmes liés à l'évaluation des biens à exproprier. Ainsi, la volonté d'une protection optimale démontrée par KOUAYEP Prosper ne pourra être atteinte que si ces différents fléaux sont abolis. L'auteur porte donc à la connaissance de l'Etat camerounais ce différents maux, qu'ils devraient supprimer sans plus tarder.

A la lecture de ces différents travaux, le constat est fait que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun est perceptible mais reste et demeure perfectible. Ces différents auteurs voudraient faire retentir l'alarme sur la nécessité de protéger au maximum les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

VI - PROBLÉMATIQUE

La législation camerounaise répond de jure32 aux problèmes liés à la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Sur le plan pratique, l'on note un certain nombre d'incohérences. L'on s'interroge alors sur plusieurs questions, notamment celle de l'effectivité de ces modalités de protection des droits des victimes de telles expropriations. La question est en quelque sorte paradoxale, parce que nous ne pouvons

31 KOUAYEP Prosper, Expropriation pour cause d'utilité publique et indemnisations, entre Loi et pratique au Cameroun : le Projet LandCam échange avec les journalistes sur les thématiques, https://www.relufa.org/fr/wp-content/uploads/2017/03/Article-sur-lExpropriation-pour-cause-dutilit%C3%A9-publique-et-indemnisations-entre-Loi-et-pratique-au-Cameroun-finale.pdf

32 De fait

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parler d'une effectivité remarquable mais nous ne pouvons non plus parler de dispositions exclusivement statutaires, aux vues des efforts consentis par les autorités nationales en charge de cette procédure d'expropriation au Cameroun. Toutefois, la question qui nous amène à beaucoup plus gamberger est celle de savoir : Comment les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sont-ils protégés au Cameroun ?

VII - HYPOTHESE

La protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique est perceptible au Cameroun à travers l'existence de divers instruments juridiques et d'une variété de mécanismes pratiques en la matière. Néanmoins, cette protection demeure lacunaire, dû à l'existence de divers vices qui fragilisent celle-ci, d'où la nécessité de prendre en compte un certain nombre de suggestions.

VIII - CADRE MÉTHODOLOGIQUE DE L'ETUDE

« La méthode dicte surtout de façon concrète la manière d'envisager ou d'organiser la recherche »33. Pour cela, il faudrait une méthode bien structurée pour mener au bien ce travail. Celle utilisée dans ce travail est donc duale, avec d'une part des méthodes et techniques d'analyse (A) et d'autre part, des techniques de recherches (B).

A - LES MÉTHODES D'ANALYSE

Dans le cadre de ce travail, deux méthodes d'analyse ont été utilisées : la méthode juridique et l'approche stratégique.

Dans un premier temps, la méthode juridique nécessite une méticulosité sans pareil. Selon Charles EINSENMANN, cette méthode comprend deux (02) composantes : la dogmatique et la casuistique34

La dogmatique consiste selon lui à analyser des textes et évaluer leurs conditions d'édition. Il s'agit là d'étudier les différents textes juridiques qui régissent un domaine particulier et de mesurer son niveau d'application dans la réalité. Dans le cas de la présente étude, il sera donc question de scruter en profondeur les lois, décrets et autres textes législatifs et réglementaires qui ont été établis afin de protéger convenablement les droits des victimes

33 Madeleine GRAWITZ

34 EINSENMANN Charles, Cours de Droit administratif, cité par NACH MBACK Charles, Démocratisation et décentralisation, « genèse et dynamiques comparées des processus de décentralisation en Afrique subsaharienne », Paris, Karthala-PDM, 2003, p.45

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des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Cela nous permettra de voir si dans la pratique les dispositions de ces différents textes sont respectées et par ricochet donc, évaluer leur portée réelle.

Afin que ce travail de recherche « échappe au danger de la spéculation abstraite »35, il faudrait une interférence entre des cas réels et les dispositions textuelles. Ceci est la quintessence même de la casuistique préconisée par EINSENMANN. Pour ce faire, ce travail évoquera des différents cas d'expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, afin d'avoir un avis objectif sur la question de savoir si le respect des droits des victimes concernées est réel ou juste utopique.

Dans un second temps, l'analyse stratégique est une théorie sociologique des organisations issue des travaux de Michel CROZIER et d'Erhard FRIEDBERG. Elle s'intéresse aux relations de pouvoir entre les acteurs de l'organisation et aux règles implicites qui gouvernent leurs interactions (désignées sous le terme de « jeux »). Plus précisément, les auteurs cherchent à comprendre la nature des relations qui se créent entre des acteurs interdépendants, dont les intérêts peuvent être divergents ou contradictoires.36 Ainsi, dans le cadre de ce travail, nous procéderons à une analyse des acteurs directement concernés par les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. L'analyse de ces différents acteurs nous permettra de déterminer dans quel contexte les droits des victimes de ces expropriations a été établi.

B - LES TECHNIQUES DE RECHERCHES

Concrètement, ces techniques de recherches sont conçues comme des moyens et procédés qui permettent de rassembler le maximum de données possible sur un sujet bien précis. Pour ce travail, deux (02) principales techniques ont été utilisées, à savoir l'enquête et la recherche documentaire.

L'enquête est un outil qui est utilisé pour les travaux de recherche et qui est organisé par la méthode. Cette technique implique des étapes différentes qui comprennent des opérations pratiques, nécessaires pour l'élaboration du travail de recherche. Pour ce travail, l'enquête s'est faite à travers la recherche d'informations relatives aux expropriations pour cause d'utilité publique dans les différentes régions du Cameroun.

35 BATTIFOL Henri, Aspects philosophiques du Droit International privé, Paris, Dalloz, 2002, p. 6.

36 www.cairn.info (Consulté le 06/07/2023)

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La recherche documentaire quant à elle comprend la fouille systématique de tout document relatif de près ou de loin à une question de recherche donnée. Le type de document ici importe peu dans la mesure où l'objectif est d'obtenir une information relative à un sujet donné ou non et pas d'exploiter un document d'une nature précise. Ainsi, dans ce travail, il nous a été donné d'exploiter des documents tels que des ouvrages, des articles, des rapports, des mémoires, des jurisprudences, des grosses et des textes juridiques. Ces documents provenaient de différents lieux, notamment de la bibliothèque de l'UCAC, des librairies dans les zones urbaines, des tribunaux de droit commun et des plateformes numériques.

IX - ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN

Afin de répondre à la problématique retenue dans le présent travail, il serait intéressant de reconnaître dans un premier temps les efforts consentis par le gouvernement camerounais pour garantir un cadre favorable de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. En faisant cela, l'on reconnaitrait en quelque sorte une protection avérée des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Première Partie). Malgré ces efforts, il va falloir avouer que dans la pratique, certains vices existent qui gangrènent énormément cette protection et nécessite donc des réformes pour peaufiner la protection des droits des victimes de telles expropriations au Cameroun. Cela voudrait ainsi dire que cette protection reste toutefois perfectible dans la pratique (Deuxièmement Partie). Tout ceci permettra de faire de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun une procédure qui protège les droits de ses victimes et ce, de manière optimale.

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PREMIÈRE PARTIE : LA PROTECTION PERCEPTIBLE DES DROITS DES
VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN

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Parler d'une protection avérée des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, voudrait sous-entendre une perception indiscutable de cette protection. Bien que le gouvernement Camerounais ait mis en place une législation bien précise en la matière, il a voulu concrétiser cela avec des mécanismes réels dans la pratique. Dès lors, la certitude de cette protection se dégage aussi bien par une consécration juridique bien structurée (Chapitre I), que par une opérationnalisation (Chapitre II), de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

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CHAPITRE I : LA CONSÉCRATION JURIDIQUE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

La consécration juridique dont il est question ici renvoie aux sources positives du Droit Objectif 37 d'une part qui donne une force légale aux droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. D'autre part, cette consécration juridique voudrait aussi mettre en exergue les institutions aménagées dans le cadre des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. En d'autres termes, c'est à travers ces sources que les différentes victimes des expropriations pour cause d'utilité publique peuvent se prévaloir d'être investies de différents droits en la matière. Le fait pour le Cameroun de consacrer juridiquement ces droits, témoigne à quel point il milite pour protéger les différentes victimes des expropriations pour causes d'utilité publique au Cameroun. Cette consécration revêt de deux ordres. Le premier avec une consécration normative (Section I). La deuxième avec une consécration institutionnelle (Section II).

SECTION I : LA CONSÉCRATION NORMATIVE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Le cadre normatif qui aménage les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun correspond aux différents textes légaux en la matière. Selon, la pyramide Kelsenienne, la Constitution est au sommet des textes légaux en Droit. Dans le cadre de ce travail, il existe des textes supra-législatifs qui consacrent les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Paragraphe I). Bien que ceux-ci aménagent convenablement ces droits, le cadre normatif en la matière est renforcé par de différents textes législatifs et infra-législatifs (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LES FONDEMENTS SUPRA-LEGISLATIFS DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

A l'analyse de la hiérarchie des normes établies par Hans KELSEN, l'on observe qu'il

n'existe que deux (02) types de textes qui sont supérieurs aux lois votées par le parlement d'un Etat donné. Dans le cas des droits des victimes d'expropriations d'une telle nature au

37 Hans KELSEN, auteur de la Constitution autrichienne de 1920, établit une série de textes qui sont considérés comme les sources positives du Droit Objectif. Il les place dans une pyramide appelée la pyramide Kelsenienne. Celle-ci, est une hiérarchie des Sources du Droit Objectif, organisée en fonction de la portée des différents textes, leurs auteurs et bien d'autres facteurs encore.

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Cameroun, l'on constate que ces mêmes textes consacrent les droits en la matière. Dès lors, il s'agit de présenter ici d'une part les fondements constitutionnels des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (A). D'autre part, il s'agirait aussi d'évoquer les fondements internationaux des droits des victimes des expropriations de la même nature (B)

A - Les fondements constitutionnels des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

La Constitution du Cameroun est organisée en deux parties. A l'analyse, l'on observe que ces deux parties, soit, le préambule et le dispositif consacrent toutes les deux les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité au Cameroun.

D'abord, La Constitution est placée au sommet de la hiérarchie des normes élaborée par KELSEN. Pour cela, elle est considérée comme la norme suprême dans un Etat, sur laquelle tous les autres textes internes doivent se conformer. Elle organise de manière générale le fonctionnement de l'Etat et les droits dévolus à sa population.

Au fil du temps, de nombreuses interrogations sont nées sur l'appartenance du préambule à la Constitution du Cameroun. Toutefois, certaines jurisprudences sont venues clarifier cela en affirmant son appartenance à la Constitution 38 . Avec la révision Constitutionnelle de 1996, plus de précisions ont été apportées sur l'appartenance du préambule à la Constitution. Elle dispose que : « Le préambule fait partie intégrante de la Constitution »39. Cette disposition est donc venue lever l'équivoque qui gravitait autour de l'appartenance du préambule à la Constitution camerounaise.

Dans le présent travail, nous pouvons donc dire avec convictions que les dispositions du préambule de la Constitution camerounaise en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, consacrent légalement les droits des victimes concernées. Une appréciation objective à la lecture de ce préambule nous a permis de relever deux instances où les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sont consacrés. La première est relativement implicite, tandis que la deuxième est beaucoup plus explicite.

Implicitement, le préambule relève que « L'Etat assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones ». C'est la deuxième partie de cette assertion qui est assez révélatrice en la matière. La préservation des droits des populations autochtones

38 CFJ/CAY, Arrêt n°178 du 29 mars 1972, Eitel MOUELLE KOULA et Arrêt n°194 du 25 mai 1972, Daniel Roger NANA TCHANA

39 Article 65 de la Constitution de 1996

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implique la protection des populations enclavées, et donc, leurs droits en matière d'expropriations pour cause d'utilité publique. Par la présente, l'Etat se porte garant pour toujours assurer le respect des droits dévolus au peuple camerounais. Dans la pratique, on peut observer que la plupart des personnes expropriées sont des propriétaires terriens qui ont hérité d'une propriété coutumière leur permettant de jouir du bien immeuble concerné. Ces personnes qui ont toujours grandi sur ces terres, entrent normalement dans le groupe de personnes appelées « autochtones » par le préambule de la Constitution de 1996. Le peuple autochtone qui se fait déguerpir à la suite d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique possède donc des droits dont l'Etat camerounais est tenu d'assurer la protection.

Cette consécration est faite de manière un peu plus explicite dans ce même préambule lorsqu'il dispose que « la propriété individuelle est le droit d'user, de jouir et de disposer de bien garantis à chacun par la loi. Nul ne saurait en être privé si ce n'est pour cause d'utilité publique et sous la condition d'une indemnisation dont les modalités sont fixées par la loi. » Pour Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, « l'Etat reconnaît à tout camerounais le droit de posséder une propriété et d'en jouir en toute quiétude » 40 . Pour Joseph OWONA, « l'indemnisation est donc un droit en cas d'expropriation. Elle ne peut être ni supprimée ni par un texte ayant valeur de loi, ni par un quelconque acte administratif. C'est une obligation constitutionnelle pour les pouvoirs publics. »41 Ces analyses faites par ces auteurs sur cette disposition migrent toutes vers une conclusion identique qu'est la reconnaissance constitutionnelle des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Nonobstant, une analyse un peu plus poussée nous a été donnée d'effectuer. A partir de cette disposition, l'on constate que trois (03) différents droits sont consacrés aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique à partir de là. Chronologiquement, l'on relève d'abord le droit à la jouissance de l'utilité publique, ensuite, l'on relève surtout le droit à une indemnisation compensatrice et finalement, l'on relève le droit au respect des procédures.

Le droit à la jouissance de l'utilité publique est tiré de l'extrait «...Nul ne saurait en être privé si ce n'est pour cause d'utilité publique... ». Le principal motif de ce type d'expropriation doit toujours être la satisfaction de l'intérêt général qui a pour corolaire,

40 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 39.

41 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2012. p. 88.

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l'utilisation collective du bien exproprié. Dès lors, les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique doivent toujours se reconnaître parmi ceux qui pourront jouir collectivement du bien exproprié. L'on a pu observer cela récemment, le 25 mai 2023, quand le Tribunal Administratif du Littoral a déclaré caduque la Déclaration d'Utilité Publique (DUP) d'un terrain exproprié à Douala-Bali, pour la Construction d'un Hôtel 5 étoiles par un opérateur étranger42. Dans le cas d'espèce, les populations n'ont pas vu en quoi un tel Hôtel leur servirait, eu égard à leurs conditions de vies et leurs projets respectifs.

Le droit à une indemnisation compensatrice est sans doute le droit le plus important en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. Il est tiré de l'extrait « ...et sous la condition d'une indemnisation... ». L'indemnisation peut être sujet de controverses, ce qui a conduit plusieurs auteurs à gamberger à ce sujet. Dans l'ouvrage « Domanialité publique et expropriations pour causes d'utilité publique au Cameroun » de Joseph OWONA, plusieurs thèses sont évoquées relatives aux indemnisations. Il dispose dans cet ouvrage la thèse de l'indemnité juste, la thèse de l'indemnité préalable, l'indemnité par une compensation à naitre, le montant de l'indemnité d'expropriation et la contestation de l'indemnité d'expropriation43. Si une indemnisation ne répond pas aux critères d'un ou plusieurs de ces critères, ce droit dévolu aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique est considéré comme n'ayant pas été respecté.

Le droit au respect des procédures est tiré de l'extrait «...la condition d'une indemnisation dont les conditions sont fixées par la loi... ». Le respect des procédures est sacro-saint en droit administratif processuel, sous peine de voir un acte déclaré « nul et de nul effet »44. Pour cette raison, le législateur a voulu préciser dans l'espèce que les procédures d'expropriations et d'indemnisation sont faites en suivant des procédures bien précises prévues par la réglementation en vigueur. Cela a pour conséquence de garantir une sécurité juridique certaine aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Ces dernières pourront saisir les juridictions compétentes pour que justice leur soit rendue, dans l'espèce où lesdites procédures ne sont pas respectées ad litteram.

42 Annulation de la Déclaration d'Utilité Publique n°000033/MINDCAF/A10 du 14 mars 2019 sur DIKOLO-BALI.

43 Pages 90-95.

44 Maurice KAMTO, « Droit administratif processuel du Cameroun », Yaoundé, Presses Universitaires du Cameroun, 1990.

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Le préambule de la Constitution est donc incontournable quand il s'agit de préciser les sources des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il en est de même pour le dispositif de la Constitution.

Ensuite, comme établi plus haut, le dispositif de la Constitution est considéré comme le corps même de la Constitution. C'est là que les dispositions principales qui régissent l'Etat sont établies. On y retrouve aussi la pierre angulaire sur laquelle repose les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

La consécration des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique par le préambule de la Constitution est beaucoup plus implicite qu'explicite. Il établit de manière générale les régimes sous lesquels de telles procédures sont menées et pose les jalons donc des activités foncières et domaniales qui sont régies par la législation nationale. L'on observe par exemple que « ...sont du domaine de la loi...le régime de la propriété mobilière et immobilière... »45. A travers cette disposition, les bases régissant les biens des personnes morales de Droit Public et de Droit Privé sont établies. L'Etat dispose d'un patrimoine catégorisé sous trois (03) angles : le Domaine Public de l'Etat, le Domaine Privé de l'Etat et le Domaine National. Il existe plusieurs textes qui régissent ces différents domaines, qui tirent tous leurs fondements de cet article46. Les biens qui sont acquis par l'Etat à la suite des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, entrent directement dans le domaine privé de l'Etat. Un fait qui n'aurait jamais eu lieu sans les dispositions de cet article.

45 Loi 2008/001 du 14 avril 2008 portant révision de la Constitution du 18 janvier 1996, article 26 alinéa 1(b)

46 Joseph OWONA fait un distinguo assez cristallin entre ces trois différents domaines appartenant à l'Etat. Le domaine national de l'Etat est selon lui composé de deux (02) catégories de terres qui n'appartiennent ni au domaine public, ni au domaine privé de l'Etat. L'Etat joue beaucoup plus un rôle de gérant sur ces terres en permettant quelques exploitations privatives, à titre exceptionnel. Pour qu'une terre soit considérée comme appartenant au domaine national, elle peut ne pas être classée directement dans ke domaine public, privé ou celui d'une personne morale de Droit Public. Aussi, les terres qui n'ont pas fait l'objet d'une mutation de titre de propriété en titre foncier dans les délais impartis à compter du 06 juillet 1974. Enfin, toutes les terres faisant l'objet d'une exploitation privative par un particulier (Pages 39-40). Le domaine public de l'Etat par contre comprend des biens affectés à l'usage direct du public et aux services publics. Les biens du domaine public sont classés soit sous les biens du domaine public naturel ou sous les biens du domaine public artificiel (Pages 13-18). Le domaine privé finalement est régi par les règles de droit commun de la propriété privée. Six (06) catégories de bien explicites font partie de ce domaine au Cameroun : les biens meubles et immeubles acquis par l'Etat à titre gratuit lu onéreux selon les règles du droit commun constituant le domaine privé mobilier et le domaine privé immobilier ; les terrains qui supportent les édifices, constructions ouvrages et aménagements réalisés et entretenus par l'Etat ; les immeubles dévolus à l'Etat en vertu de l'article 120 du traité de Versailles de 1919, la législation sur les séquestres de guerre, un acte de classement, un acte de déclassement du domaine public, l'expropriation pour cause d'utilité publique ; les concessions rurales ou urbaines frappées de déchéance ou de droit de reprise ainsi que les biens des associations dissoutes pour faits de subversion, atteintes à la sûreté intérieure ou extérieure de l'Etat ; les prélèvements décidés par l'Etat sur le domaine national par application des dispositions de l'article 18 de l'ordonnance fixant le régime foncier ; les propriétés des zones rurales qui, depuis 10 ans au moins, n'ont fait l'objet d'aucune régénération (Pages 33-34).

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Dans la même veine, le dispositif précise aussi que « sont du domaine de la loi...le régime domanial, foncier et minier »47. Une analyse succincte de cette disposition nous permet d'observer qu'elle a la même orientation que la précédente. Elle établit de manière générale les bases sur lesquelles reposent tous les textes de lois en matières domaniales et foncières. Ces différents textes ont à leur tour une incidence particulière sur les expropriations pour cause d'utilité publique et les droits reconnus à leurs victimes.

Il est clair que les textes législatifs de la république du Cameroun tirent leurs fondements de la Constitution. Grâce à cela dès lors, un cadre bien précis en matière foncière et domaniale encadre les populations et leurs dirigeants à ce jour.

Bien que la Constitution du Cameroun encadre comme il se doit les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, d'autres textes, notamment internationaux viennent l'accompagner dans cette dynamique.

B - Les fondements internationaux des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

Il est important de rappeler ici que seuls les textes internationaux dûment ratifiés par l'Etat du Cameroun peuvent être applicables sur l'étendue du territoire camerounais. Déjà parce que dans la pyramide Kelsenienne, on constate une certaine inféodation des textes internationaux à la Constitution du territoire. Ensuite, la Constitution elle-même prévoit cette inféodation en précisant plusieurs dispositions relatives à leur entrée en vigueur. Elle précise inter alia que « le Président de la République négocie et ratifie les traités et accords internationaux. Les traités et accords internationaux qui concernent le domaine de la loi, défini à l'article 26 ci-dessus, sont soumis, avant ratification, à l'approbation en forme législative par le Parlement. »48 Ainsi, on constate une double validation avant entrée en vigueur de ces textes au Cameroun. Ensuite la Constitution précise aussi que « les traités ou accords internationaux régulièrement approuvés ou ratifiés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie »49 Cette disposition place ces traités et accords internationaux directement au-dessus des lois nationales et en dessous de la Constitution. Dès lors, leur application dans l'espace camerounais ne pourrait faire l'objet de contestation, eu égard à ces différentes dispositions. Dans le cas des droits des victimes des expropriations pour cause

47 Article 26 alinéa 1(d) de la Constitution de 2008.

48 Article 43 Ibid

49 Article 45 Ibid.

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d'utilité publique, l'on observe que ce sont principalement les Déclarations internationales et les Chartes internationales ratifiées par le Cameroun, qui les consacrent.

En ce qui concerne les Déclarations Internationales, l'on retient deux (02) principaux textes, dont l'un d'entre eux a également été retenu par Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA dans leur ouvrage. Il s'agit là de la Déclaration Universelle des droits de l'homme50 qui est applicable dans tous les pays l'ayant ratifiée.

La Déclaration universelle des droits de l'homme (DUDH) a été ratifiée par l'Etat du Cameroun dès son intégration à l'Organisation des Nations Unies (ONU) le 20 septembre 1960 51 . L'on y relève principalement une disposition qui protège les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Cette disposition précise que « toute personne, aussi bien seule qu'en collectivité, a droit à la propriété. Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété. » 52. A l'analyse, le terme le plus important ici est « arbitrairement ». L'utilisation de celui-ci dans cette disposition laisse sous-entendre que les particuliers peuvent être privés de leurs propriétés à la condition que cela ne soit pas fait de façon arbitraire. L'arbitraire est appréhendé comme un acte illégal allant à l'encontre des règles de forme et/ou de fond. Dans ce cas d'espèce, peut être considéré comme un acte arbitraire, la cession d'un bien privé à l'Etat sans respecter les procédures en vigueur. L'Etat doit donc en tout temps respecter les procédures et s'assurer qu'il a rempli toutes les conditions pour pouvoir procéder aux expropriations pour cause d'utilité publique. Éventuellement, l'intérêt des victimes de ce type d'expropriation est sauvegardé en leur accordant une sécurité juridique considérable.

La DUDH a permis l'élaboration d'autres déclarations dans des domaines beaucoup plus précis, ce qui élargit en quelque sorte son application matérielle. Par exemple, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones53.

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones est la deuxième des rares déclarations qui protègent les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique dans le monde en général et au Cameroun en particulier. Les populations autochtones sont protégées par la DUDH et les Nations Unies ont voulu accroître cette protection avec un texte particulier en la matière. Raison pour laquelle, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a été adoptée. Au demeurant, elle précise

50 Texte adopté le 10 décembre 1948 et entré en vigueur le 13 décembre 1951.

51 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 40.

52 Article 17 de la DUDH de 1948.

53 Déclaration adoptée le 13 septembre 2007

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que les peuples autochtones ont le droit de jouir des droits qui leurs sont reconnus par la DUDH54. On y retrouve des dispositions garantissant la propriété individuelle des autochtones et leur droit d'en user et d'en jouir librement. Précisément, cette déclaration dispose que « les peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources qu'ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu'ils ont utilisés ou acquis. Les peuples autochtones ont le droit de posséder, d'utiliser, de mettre en valeur et de contrôler les terres, territoires et ressources qu'ils possèdent parce qu'ils leur appartiennent ou qu'ils les occupent ou les utilisent traditionnellement, ainsi que ceux qu'ils ont acquis. Les États accordent reconnaissance et protection juridiques à ces terres, territoires et ressources. Cette reconnaissance se fait en respectant dûment les coutumes, traditions et régimes fonciers des peuples autochtones concernés »55. Plusieurs différentes parties de cette disposition protègent les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Il conviendrait alors de disséquer cette disposition afin de mieux l'appréhender.

Le début de cette disposition qui établit que « les peuples autochtones ont le droit aux terres, territoires et ressources qu'ils possèdent et occupent traditionnellement ou qu'ils ont utilisés ou acquis » voudrait porter à l'attention des Etat que les populations autochtones peuvent jouir d'un droit de propriété sur les terres comme tout autre individu normal. A ce titre, peu importe les mécanismes utilisés pour obtenir un titre de propriété, leurs droits sur ces terres doivent être impérativement protégés. L'on comprend indirectement alors qu'ils ne peuvent pas être dépossédés de leurs terres comme des malpropres, mais en conformité avec la législation qui encadre ces dépossessions des biens immobiliers des personnes privées.

La deuxième partie de cette disposition qui précise que « les peuples autochtones ont le droit de posséder, d'utiliser, de mettre en valeur et de contrôler les terres, territoires et ressources qu'ils possèdent parce qu'ils leur appartiennent ou qu'ils les occupent ou les utilisent traditionnellement, ainsi que ceux qu'ils ont acquis », embrasse un peu le premier pan de cette disposition. Ceci dans la mesure où, l'ONU ne voudrait pas que les peuples autochtones soient vus comme des sous personnes, surtout en matière d'exploitation terrestre.

La dernière partie de cette disposition vient un peu confirmer l'analyse sus évoquée. Elle stipule que « cette reconnaissance se fait en respectant dûment les coutumes, traditions et

54 « Les peuples autochtones ont le droit, à titre collectif ou individuel, de jouir pleinement de l'ensemble des droits de l'homme et des libertés fondamentales re- connus par la Charte des Nations Unies, la Déclaration universelle des droits de l'homme et le droit international relatif aux droits de l'homme. » Article premier de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

55 Article 26 Ibid.

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régimes fonciers des peuples autochtones concernés ». En d'autres termes, les Etats ne doivent pas se limiter à reconnaître statutairement les droits des peuples autochtones sur leurs terres. Ils doivent également se conformer au régime foncier qui leur sont applicable, pour garantir cette reconnaissance. Au Cameroun, les autochtones sont assujettis au régime général en matière foncière et domaniale. Dès lors, ceux-ci sont protégés comme il se doit dans l'utilisation et l'exploitation de leurs terres.

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ne s'arrête pas là. En effet, elle précise aussi que « les États mettront en place et appliqueront, en concertation avec les peuples autochtones concernés, un processus équitable, indépendant, impartial, ouvert et transparent prenant dûment en compte les lois, traditions, coutumes et régimes fonciers des peuples autochtones, afin de reconnaître les droits des peuples autochtones en ce qui concerne leurs terres, territoires et ressources, y compris ceux qui les possèdent, occupent ou utilisent traditionnellement, et de statuer sur ces droits. Les peuples autochtones auront le droit de participer à ce processus » 56 . Ici, les Etats sont priés d'appliquer le principe d'intégration surtout pour la prise d'initiative relative aux exploitations privées des terres. Les populations autochtones sont vraiment considérées comme des citoyens normaux et sont donc approchées afin d'avoir leur opinion sur comment ils pourraient d'avantage jouir de leurs terres.

Nonobstant les dispositions susmentionnées, la Déclaration fait preuve d'un peu plus de pragmatisme en matière de protection des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Cela se dégage de l'article 28 de la même Déclaration qui stipule que « Les peuples autochtones ont droit à réparation, par le biais, notamment, de la restitution ou, lorsque cela n'est pas possible, d'une indemnisation juste, correcte et équitable pour les terres, territoires et ressources qu'ils possédaient traditionnellement ou occupaient ou utilisaient et qui ont été confisqués, pris, occupés, exploités ou dégradés sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Sauf si les peuples concernés en décident librement d'une autre façon, l'indemnisation se fait sous forme de terres, de territoires et de ressources équivalents par leur qualité, leur étendue et leur régime juridique, ou d'une indemnité pécuniaire ou de toute autre réparation appropriée. » Cette disposition présente l'indemnisation comme un dédommagement sacro-saint en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. Non seulement elle précise les critères que l'indemnisation doit

56 Article 27 Ibid.

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observer57, mais elle établit aussi les différentes formes que l'indemnisation peut prendre. Selon l'ONU, l'indemnisation peut être sous forme de terres, de territoires, de ressources équivalentes en qualité ou encore sous forme d'indemnité pécuniaire. Il est vrai qu'au Cameroun, la forme d'indemnisation la plus résurgente est l'indemnisation pécuniaire.

L'on doit une reconnaissance considérable dès lors aux déclarations internationales pour le rôle qu'elles jouent dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Cette même reconnaissance est due aux chartes internationales qui les protègent tout autant.

Pour les Chartes Internationales, la différence entre une charte et une déclaration qu'il faudrait relever ici est que la première est un accord par lequel plusieurs États s'engagent sur un domaine précis, tandis qu'une déclaration est une simple manifestation de la volonté d'un Etat ou d'une organisation internationale. Ainsi, les États qui ratifient une Charte internationale témoignent l'intérêt qu'ils ont à faire respecter un certain nombre de normes dans leurs espaces nationaux. La Charte africaine des droits de l'homme et des peuples (CADHP)58 en l'occurrence a été adoptée à la suite d'un intérêt commun visé par les États africains, signataires de ladite Charte. Ce qui nous intéresse dans ce travail est l'intérêt que visait les Etats africains à protéger les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique dans leurs Etats respectifs. Cette Charte a été ratifiée par le Cameroun le 20 juin 1989, la rendant ainsi applicable sur l'étendue du territoire national59. Cette Charte protège les victimes d'expropriations d'une telle nature en deux temps.

D'abord, la Charte précise que « le droit de propriété est garanti. Il ne peut y être porté atteinte que par nécessité publique ou dans l'intérêt général de la collectivité, ce, conformément aux dispositions des lois appropriées »60. À travers cela, les Etats africains signataires en général et le Cameroun en particulier reconnaissent que le droit de propriété est garanti aux propriétaires terriens, ce qui leur permet d'en jouir librement. En outre, ils ne peuvent être contraints à céder leurs propriétés qu'en cas de nécessité d'utilité publique, qui voudrait une satisfaction de l'intérêt général. Dès lors, le droit de jouir de l'utilité publique est garanti aux victimes des expropriations de cette nature. Comme il a été mentionné plus tôt

57 Quand elle précise que « ... indemnisation juste, correcte et équitable pour les terres... »

58 Charte adoptée le 28 juin 1981 à Nairobi au Kenya par l'Assemblée générale de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA)

59 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 41.

60 Article 14 de la CADHP de 1981.

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dans ce travail, ces victimes doivent se reconnaître dans l'utilisation collective du bien exproprié, afin que la procédure soit légale et puisse être menée sans désagrément quelconque. Aussi, la même disposition précise que « ...ce, conformément aux dispositions des lois appropriées ». Cela laisse sous-entendre que ces procédures d'expropriation doivent respecter les prescriptions du législateur en la matière. En d'autres termes, les différentes étapes relatives aux expropriations doivent être respectées, ce qui fera en sorte que le droit au respect des procédures soit garanti aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique.

L'OUA s'est sans doute rendue compte que s'arrêter là sans parler du droit principal en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique serait une aberration. Pour cette raison, elle établit que « en cas de spoliation, le peuple spolié a droit à la légitime récupération de ses biens ainsi qu'à une indemnisation adéquate »61. Le terme « spoliation » utilisé dans la Charte ici renvoie à l'action de déposséder quelqu'un d'un bien ou d'une chose62. La dépossession forcée du bien d'un individu pour le compte de l'Etat implique donc une indemnisation compensatrice juste et équitable. Les expropriations pour cause d'utilité publique font justement partie des différents types de dépossession forcée des biens privés pour le compte de l'Etat.

A la lumière donc de cette charte, les citoyens camerounais sont en théorie, dans une certaine sécurité juridique quand il s'agit des expropriations pour cause d'utilité publique.

Malgré ces textes internationaux, l'Etat camerounais a voulu renforcer la protection dévolue aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Pour cette raison, il a procédé à l'élaboration de divers textes internes en la matière.

PARAGRAPHE II : LES AMÉNAGEMENTS LÉGISLATIFS ET REGLEMENTAIRES DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

En interne, plusieurs textes ont été élaborés par les autorités compétentes en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique. Ici encore, l'orientation est la même, c'est-à-dire, la recherche d'un cadre favorable de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. L'on observe d'une part, le rôle joué par les législateurs, en établissant plusieurs textes législatifs en la matière (A). D'autre part, les autorités administratives de l'Etat ont aussi dû apporter plus de précisions à ces textes en

61 Article 21 Ibid.

62 Dictionnaire Le Robert, édition 2023

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établissant de divers textes réglementaires avec pour motif la garantie des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (B).

A - L'aménagement législatif des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

La Constitution camerounaise révisée le 14 avril 2008 précise que « Dans les matières énumérées à l'Article 26 alinéa 2 ci-dessus, le Parlement peut autoriser le Président de la République, pendant un délai limité et sur des objets déterminés, à prendre des ordonnances. Ces ordonnances entrent en vigueur dès leur publication. Elles sont déposées sur le Bureau de l'Assemblée Nationale et sur celui du Sénat aux fins de ratification dans le délai fixé par la loi d'habilitation. Elles ont un caractère réglementaire tant qu'elles n'ont pas été ratifiées. Elles demeurent en vigueur tant que le Parlement n'a pas refusé de les ratifier »63. L'analyse de cette disposition nous fait comprendre que le Président de la République peut lui aussi légiférer à travers des ordonnances. Quand elles sont ratifiées par le parlement, elles ont une valeur législative64. Quand elles ne le sont pas, elles ont une valeur réglementaire et donc infra-législative. Cette précision nous fait donc comprendre qu'il existe deux (02) types de textes législatifs au Cameroun, à l'instar des Lois parlementaires et les Ordonnances ratifiées par ce même parlement. En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, ces deux types de textes législatifs aménagent les droits des victimes concernées. Ainsi, dans un premier temps, les lois parlementaires qui protègent les victimes d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun seront présentées. Dans un second temps, les ordonnances ratifiées avec le même intérêt le seront davantage.

Premièrement, plusieurs lois existent aux Cameroun qui aménagent les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Toutefois, les plus pertinentes ont été retenues dans le cadre du présent travail de recherche.

Tout d'abord, nous avons la Loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation. Cette loi est venue régler les problèmes qu'une Ordonnance antérieure n'arrivait pas à résoudre 65 . Cette Ordonnance aménageait elle aussi la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et les

63 Article 28 de la Constitution camerounaise.

64 Elles sont placées au même niveau que les lois votées par le parlement.

65 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 41-42.

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modalités d'indemnisation66. La loi en question est perçue comme le texte de référence quand il s'agit de cette procédure. Elle établit les raisons pour lesquelles l'Etat pourrait recourir à ce type d'indemnisation, mais précise surtout les droits dévolus aux victimes de telles procédures. Ce texte dispose d'ailleurs de toute un chapitre qui consacre les indemnisations suites aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun67. Aussi, une précision est portée sur la personne sur qui le paiement des indemnités repose. En ses termes : « les indemnités dues pour expropriation sont à la charge de la personne morale bénéficiaire de cette mesure. »68 . Cela voudrait tout simplement dire que la personne morale à l'origine d'une expropriation et pour qui la procédure est avantageuse, est tenue de payer les indemnités redevables aux victimes. Par exemple, si une Collectivité Territoriale Décentralisée (CTD) est à l'origine d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, alors c'est le budget de cette même collectivité qui doit être utilisé pour indemniser les victimes, et non pas le budget général de l'Etat. Une précision est également apportée sur la nature de l'indemnisation quand le législateur dispose que « (1) l'indemnité est pécuniaire ; toutefois, en ce qui concerne les terrains, la personne morale bénéficiaire peut substituer une compensation de même nature et de même valeur à l'indemnité pécuniaire. (2) En cas de compensation en nature, le terrain attribué doit, autant que faire se peut, être situé dans la même commune que le terrain frappé d'expropriation. (3) Si la valeur du terrain alloué en compensation est supérieure à celle du terrain frappé d'expropriation, la soulte est payée par le bénéficiaire de l'indemnité. Si elle est inférieure, le bénéficiaire de l'expropriation alloue une indemnité pécuniaire correspondant à la soulte »69. L'on observe deux types principaux d'indemnisation ici ; en nature et pécuniaire. Le législateur a voulu que pour les indemnisations en nature, le terrain soit à la portée géographique de la victime, ceci dans l'optique de faciliter l'exploitation de cette nouvelle propriété, comme si la victime était toujours sur la précédente.

Toujours dans le cadre des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, on retient la Loi n° 80/21 du 14 juillet 1980 modifiant et complétant certaines dispositions de l'Ordonnance n° 74/1 du 6 juillet 1974 fixant le régime foncier. Cette Loi a été établie principalement avec pour objectif d'autoriser les personnes étrangères à

66 Ordonnance n° 74-3 du 06 juillet 1974

67 Chapitre II

68 Article 6 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

69 Article 8 Ibid.

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procéder à l'acquisition des biens immobiliers. En ses termes ; « Les personnes physiques ou morales de nationalité étrangère désirant investir au Cameroun ainsi que les missions diplomatiques et consulaires et les organisations internationales peuvent conclure des baux ou acquérir des propriétés immobilières, sauf dans les zones frontalières. » 70 . Ici les personnes étrangères sont investies du même droit de propriété que les nationaux. Ainsi, ils sont régis par la même réglementation et jouissent donc des mêmes droits que les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique, le cas échéant.

L'on observe que le cadre législatif en ce qui concerne les lois parlementaires, est bien achalandé en ce qui concerne les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Un cadre précis de ces droits est également prévu par les Ordonnances ratifiées.

Deuxièmement, les ordonnances ratifiées en la matière ici sont principalement de trois (03) ordres : l'Ordonnance fixant le régime foncier, celle fixant le régime domanial et celle relative aux expropriations pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

Pour ce qui est de l'Ordonnance fixant le régime foncier au Cameroun 71, une disposition dont une attention particulière est requise, est établie. Il s'agit de l'article premier de cette Ordonnance qui établit que « L'Etat garantit à toutes les personnes physiques ou morales possédant des terrains en propriétés, le droit d'en jouir et d'en disposer librement. L'Etat est le gardien de toutes les terres. Il peut, à ce titre, intervenir en vue d'en assurer un usage rationnel ou pour tenir compte des impératifs de la défense ou des options économiques de la nation. Les conditions de cette intervention seront fixées par décret. ». Le constat immédiat qui est fait est celui de la suprématie de l'Etat sur les terres nationales quand il est précisé que « ...l'Etat est le gardien de toutes les terres... ». Le fait que l'Etat soit le gardien de toutes les terres implique qu'il assure son intégrité et veille à sa préservation. En outre, elle peut intervenir sur toutes les terres sur l'étendue du territoire national en respectant les règles prévues par la réglementation en vigueur.

C'est cette même ordonnance qui pose les jalons d'une propriété terrienne légale au Cameroun. Il est connu de tous, sinon, par une bonne majorité que le titre foncier est le document officiel faisant foi de propriété terrienne au Cameroun. Tout va de cette ordonnance qui établit inter alia que « (Ordonnance 77-1 du 10 janvier 1977). Les titulaires de jugements

70 Article 10 (nouveau) de la loi n° 80/21 du 14 juillet 1980 modifiant et complétant certaines dispositions de l'Ordonnance n° 74/1 du 6 juillet 1974 fixant le régime foncier.

71 Ordonnance n° 74-1 du 06 juillet 1974

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définitifs constitutifs ou translatifs des droits sur terrains en milieu urbain doivent également sous peine de déchéance, en saisir le service des domaines compétent dans un délai de dix ans à compter du 15 août 1974, date de publication de l'ordonnance n°1 du 6 juillet 1974, en vue d'obtenir leur transformation en titres fonciers ; ledit délai est porté à 15 ans pour les terrains en milieu rural. Toutefois, lorsque ces jugements portent sur des immeubles habités par des occupants de bonne foi, ceux-ci jouissent en cas de vente desdits immeubles d'un droit de préférence qui n'exerce dans le cadre de l'aménagement de la zone concernée. Tous les litiges fonciers pendants devant les juridictions et introduits en dehors de la procédure de l'immatriculation sont de la compétence des commissions prévues à l'article 16 ci-dessous. Les dossiers y relatifs sont transférés à ces commissions dès l'entrée en vigueur de la présente ordonnance. »72. Cette disposition assez explicite voudrait que les titres de propriété terrienne antérieure à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance du 06 juillet 1974 soit transformés en titres fonciers. Aujourd'hui, ce titre foncier peut être annulé pour expropriation pour cause d'utilité publique à cause de cette Ordonnance. Aussi, grâce à ce titre foncier, les personnes expropriées pourront être indemnisées comme il se doit pour leurs pertes.

Dans la même mesure, l'ordonnance sur le régime foncier consacre directement les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Elle précise que « Pour la réalisation des objectifs d'intérêt général, l'Etat peut recourir à la procédure d'expropriation.

Cette procédure est engagée soit directement lorsqu'elle vise à réaliser des opérations d'intérêt public, économique ou social, soit indirectement à la demande des communes, des établissements publics ou des concessionnaires de service public, lorsque les tentatives de règlement à l'amiable entre ces organismes et les propriétaires se sont révélées infructueuses. La procédure d'expropriation et les modalités d'indemnisation sont fixées par un texte particulier. »73. A la lecture de cet article, on constate que le législateur est pour une expropriation légitime et fondée. Elle doit se conformer aux règles que des textes postérieurs viendront établir. Une bonne nouvelle pour les populations déguerpies, qui peuvent se baser sur cette disposition afin de faire respecter la procédure d'expropriation dont ils sont victimes.

L'Ordonnance fixant le régime domanial au Cameroun74 consacre aussi une protection certaine des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. L'on

72 Article 5 Ibid

73 Article 12 Ibid.

74 Ordonnance n° 74-2 du 06 juillet 1974.

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retient particulièrement que « font partie du domaine privé de l'Etat...les immeubles dévolus à l'Etat en vertu...de l'expropriation pour cause d'utilité publique »75. Ici, il est beaucoup plus question d'une reconnaissance de ce type de procédure par l'Etat. Ce dernier peut recourir à ce type de procédure en affectant le bien directement dans le domaine privé de l'Etat. Avant d'en arriver là toutefois, l'Etat doit respecter et suivre les dispositions prévues par la réglementation en vigueur.

Enfin, l'Ordonnance relative aux expropriations pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation76 était le texte de base relative aux expropriations de cette nature, avant l'entrée en vigueur de la loi de 1985. Celle-ci précise les différentes procédures à respecter en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Elle précise que « L'expropriation pour cause d'utilité publique est prononcée par décret au terme de la procédure définie par la présente ordonnance. Ce Décret entraîne immédiatement transfert de propriété et permet de muter les titres existants ou d'immatriculer d'office les terrains libres au nom de l'Etat. Il entraine envoi en possession dans un délai de six mois pour compter de sa signature. Toutefois ce délai est ramené à trois mois lorsque l'urgence est déclarée. »77 Les procédures d'expropriation doivent dès lors se conformer aux étapes prévues par la réglementation, sous peine d'être frappées de caducité.

Le droit de jouissance de l'utilité publique est aussi consacré par cette Ordonnance qui précise que c'est le Ministre en charge des domaines qui prend un arrêt déclarant l'utilité publique des travaux à entreprendre sur l'immeuble exproprié. Précisément, l'Ordonnance précise que « le Ministre chargé des Domaines prend un arrêté déclarant d'utilité publique les travaux projetés et prescrit une enquête préalable qui est conduite par le Préfet du Département où est situé l'immeuble à exproprier. » 78 Sans cette déclaration d'utilité publique, aucune procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique ne peut avoir lieu. Pour cette raison, le Ministre en Charge des domaines doit veiller à ce que le projet pour lequel les particuliers sont expropriés revêt d'un objectif d'intérêt général.

Le droit à l'information est aussi consacré par cette Ordonnance qui voudrait que les potentielles victimes soient informées bien avant l'engagement de quelconque procédure d'expropriation. L'Ordonnance établit que « Les populations concernées, préalablement informées par le Préfet de l'objet de l'expropriation, au moins quinze jours à l'avance,

75 Article 10 alinéa 3.

76 Ordonnance n° 74-3 du 06 juillet 1974.

77 Article premier Ibid.

78 Article 4 Ibid.

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doivent être invitées à participer à toutes les phases de l'enquête. »79 Cette mesure est prise pour renforcer la transparence des expropriations pour cause d'utilité publique. Cela permet aux victimes de voir comment leurs biens sont évalués avant l'engagement des procédures d'expropriation.

L'Ordonnance consacre aussi l'indemnisation des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique80. Ici, l'indemnisation est perçue une fois de plus comme un élément sensible en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique qu'il faudrait reverser aux victimes avec le plus grand soin possible.

Dès lors, il apparaît que le cadre législatif des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun est bien précis et concis. C'est dans cette même mesure que le cadre réglementaire en la même matière est établi.

B - L'aménagement réglementaire des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

Les actes réglementaires sont pris par les autorités administratives dans l'exercice de leurs fonctions. Initialement le pouvoir réglementaire originaire (PRO) est prévu par la Constitution du Cameroun81. Ce pouvoir est considéré comme originaire parce qu'il est directement consacré par le constituant camerounais, ce, pour juste deux (02) autorités, le Président de la République et le Premier Ministre, Chef du Gouvernement. Toutefois, les autres membres du gouvernement sont investis du Pouvoir réglementaire dérivé (PRD), qui leur permet de prendre des actes administratifs unilatéraux (AAU) dans l'exercice de leurs fonctions. En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique des actes protégeant les

79 Article 5 Ibid.

80 Article 7 Ibid qui établit que « L'expropriation ouvre droit à l'indemnisation pécuniaire selon les conditions définies par l'article 9 ci-dessous. Toutefois, l'autorité bénéficiaire de l'expropriation peut substituer à l'indemnisation pécuniaire des terrains, une compensation en nature de même valeur. » Dans le même sillage, l'article 9 du même texte précise que « Sous réserve des dispositions de l'alinéa 2 de l ' article 13 de l'ordonnance fixant le régime foncier, l'indemnité d'expropriation comporte les éléments suivants : - la valeur des cultures détruites déterminée conformément aux barèmes en vigueur ; - la valeur des constructions et autres aménagements déterminée par la commission d'évaluation visée à l'article 4 ; - la valeur du terrain nu calculée sur les bases ci-après : a) lorsqu'il s'agit de terrain urbain résultant d'une attribution domaniale à titre onéreux, l'indemnité ne peut dépasser le prix officiel des terrains domaniaux du Centre considéré ; b) lorsqu'il s'agit de terrain résultant d'une transaction normale de droit commun, l'indemnité est le prix d'achat majoré des frais divers d'acquisition et de conservation ; c) lorsqu'il s'agit de terrain résultant d'une détention coutumière ayant donné lieu à l'obtention d'un titre foncier, l'indemnité ne peut dépasser le montant des frais engagés pour l'obtention du titre foncier. »

81 Article 12 alinéa 3 qui établit que « Le Premier Ministre exerce le pouvoir réglementaire et nomme aux emplois civils, sous réserve des prérogatives reconnues au Président de la République dans ces domaines. », l'article 8 alinéa 8 qui précise aussi que le Président de la République exerce le pouvoir réglementaire et enfin l'article 27 qui énonce que « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ressortissent au pouvoir réglementaire. »

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victimes concernées sont pris en conformité soit avec le Pouvoir réglementaire originaire ou alors avec le Pouvoir réglementaire dérivé.

De nombreux textes émanant du PRO garantissent une protection considérable des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Premièrement, le Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 15 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation. L'on remarque tout de suite que ce décret est le texte d'application de la loi de 1985 mentionnée plus tôt dans ce travail. Ce Décret précise davantage les étapes à suivre en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique. Selon ce Décret, le Ministre chargé des Domaines joue un rôle prépondérant lors de ces procédures. On observe que « tout département ministériel désireux d'entreprendre une opération d'utilité publique saisit le Ministre chargé des Domaines d'un dossier préliminaire en deux exemplaires comprenant .
· - Une demande assortie d'une note explicative indiquant l'objet de l'opération ,
· - une fiche dégageant les caractéristiques principales des équipements à réaliser en précisant notamment .
· a) la superficie approximative du terrain sollicité dûment justifiée ;b) l'appréciation sommaire du coût du projet y compris les frais d'indemnisation ,
·

c) la date approximative de démarrage des travaux ,
· d) la disponibilité des crédits d'indemnisation avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous les autres moyens d'indemnisation »82.
Ainsi, les opérations d'expropriation pour cause d'utilité publique ne peuvent avoir lieu si le Ministre chargé des domaines n'est pas saisi. La nécessité du Ministre en charge des domaines est encore constatée lorsqu'il est dit que « (1) dès réception du dossier, le Ministre chargé des domaines apprécie le bien-fondé des justifications du projet. (2) lorsqu'il juge le projet d'utilité publique, il prend un Arrêté déclarant d'utilité publique les travaux projetés en définissant le niveau de compétence de la commission chargée de l'enquête d'expropriation dite commission de constat et d'évaluation »83. Une fois de plus, le caractère d'utilité publique d'un projet d'expropriation doit être reconnu avant que cette procédure ne soit engagée. On observe donc que le Ministre en Charge des domaines se substitue à la population pour déterminer si un projet va satisfaire ou pas l'intérêt général. Ce décret fixe aussi les modalités d'indemnisation en la matière84.

82 Article 2 du Décret de 1987

83 Article 3 Ibid.

84 Articles 17-19 Ibid

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Un autre décret en la matière qu'il conviendrait d'évoquer ici est le Décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier85. Selon ce texte, le titre foncier est inattaquable, intangible et définitif. Les indemnisations liées aux expropriations pour cause d'utilité publique viennent donc compenser la violation de ces différentes caractéristiques occasionnée par ces procédures.

Bien d'autres textes émanant du PRO consacrent les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il s'agit du : Décret n° 76-166 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine national ; Décret n° 76-167 du 27 avril 1976 fixant les modalités de gestion du domaine privé de l'Etat ; Décret n° 2003/418/PM du 25 février 2003 fixant les tarifs des indemnités à allouer au propriétaire victime de destruction pour cause d'utilité publique de cultures et d'arbres cultivés ; Décret n° 2005/178 du 27 mai 2005 portant organisation du Ministère des Domaines et des Affaires foncières ; Décret n° 77-193 du 23 juin 1977 portant création de la Mission d'aménagement et d'équipement des terrains urbains et ruraux (MAETUR) ; Décret n° 0001 du 22 mars 1994 portant Prix minima de vente des terrains domaniaux ; Décret n° 2005/118 du 15 avril 2005 portant Organisation du Ministère de l'Agriculture et du Développement rural (MINADER) ; Décret n°2006/3023 du 26 décembre 2006 fixant Les modalités d'évaluation administrative des immeubles en matière fiscale ; Décret n° 2016/1430 du 27 mai 2016 fixant Les modalités d'organisation et de fonctionnement de la commission consultative en matière foncière et domaniale.

Ces différents Décrets forment une base solide sur laquelle repose les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Dans leur application, ils sont accompagnés par des textes émanant du pouvoir réglementaire dérivé.

En ce qui concerne les textes émanant le PRD, ils sont compris comme des Actes Administratifs Unilatéraux (AAU) pris par les membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions. En matière de droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, l'on retient l'Arrêté qui fixe les modes de calcul des indemnisations dues aux victimes des expropriations de cette nature.

En effet, l'Arrêté n° 00332/Y.15.1/MINUH/D C00 du 20 novembre 1987 fixant les bases de calcul de la valeur vénale des constructions frappées d'expropriation pour cause d'utilité publique. Cet arrêté précise que les montants des indemnités sont calculés par la commission de constat et d'évaluation. Précisément, il dispose que « Conformément aux dispositions de l'Article 10 de la loi n°85/09 du 04 juillet 1985 susvisée, la valeur des

85 Texte modifié et complété par le décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005

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constructions en vue du calcul des indemnités d'exploitation pour cause d'utilité publique est déterminée par la commission de constat et d'évaluation. Dans l'exercice des prérogatives ainsi dévolues, les commissaires devront s'appuyer sur les règles définies par le présent arrêté. »86 Ainsi, l'Arrêté précise les critères sur lesquels la commission devra se baser pour calculer le montant d'indemnisation dû. Le Ministre précisa alors que « La valeur des constructions visées à l'Article 1 er ci-dessus est calculée sur la base d'un taux forfaitaire au mètre carré variant suivant leur qualité. A cet effet, les constructions sont classées en 06 catégories conformément à l'Annexe I du présent Arrêté. Les taux de calcul sont fixés conformément à l'Annexe II »87 La commission de constat et d'évaluation devra donc se baser sur le type de construction entrant dans l'une des catégories énumérées par l'Arrêté.

Toutes ces mesures sont prises afin de sauvegarder les droits des victimes des expropriations en leur accordant une indemnisation compensatrice digne de ce nom.

A ce stade, on peut dire sans risque de se tromper que le cadre juridique régissant les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun consacre comme il se doit les droits des victimes de telles expropriations. Il se pose à présent la question de la matérialisation de ces textes dans la pratique.

SECTION II : LA CONSÉCRATION INSTITUTIONNELLE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Le gouvernement camerounais, ayant pour objectif l'atteinte de l'émergence à l'horizon 2035 et parallèlement la protection des droits de ses citoyens, se retrouve souvent dans une certaine difficulté dans la préservation d'une adéquation entre ces deux objectifs. En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, il ne bat pas en retrait et cherche toujours à appliquer les dispositions prévues par le législateur. Pour cette raison, des mécanismes de sauvegarde des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sont mis en exergue dans la pratique. Ces mécanismes passent parfois par les tribunaux où se trouvent les juges ayant pour rôle de protéger les intérêts des citoyens camerounais. Avant d'en arriver là, les autorités administratives en place et les institutions en la matière sont aussi tenues de faire respecter les textes juridiques. Dès lors, il conviendrait de

86 Article premier de l'Arrêté de 1987

87 Article 2 Ibid.

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présenter les mécanismes juridictionnels (Paragraphe I) et Non-juridictionnels (Paragraphe II) de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

PARAGRAPHE I : LES INSTITUTIONS JURIDICTIONNELLES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Le domaine foncier est un domaine assez transversal qui touche plusieurs secteurs d'activité dans le monde. Ces différents secteurs d'activités qui sont encadrés par des juridictions de différents régimes interviennent tout aussi en matière foncière. Précisément, pour les expropriations pour cause d'utilité publique, plusieurs instances juridictionnelles interviennent afin de préserver les droits des populations expropriées. Les juges de droit commun en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique (A) jouent un rôle aussi important que les juges exceptionnels en la matière (B).

A - Les juges de droit commun

Le juge de droit commun du contentieux administratif au Cameroun est le juge administratif88. Toutefois, l'on retrouve l'intervention des autres juges dans le domaine administratif, ce qui lui permet de réduire sa masse de travail. En ce qui concerne les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, les juges de droit commun sont naturellement le juge administratif et le juge judiciaire.

Selon Bertrand- Raymond GUIMDO DONGMO, l'expropriation pour cause d'utilité publique constitue une emprise irrégulière qu'il définit comme « une dépossession irrégulière d'une propriété immobilière par l'administration »89.

Le contentieux de l'emprise irrégulière commence par une constatation des faits. Selon la Loi de 2006 régissant les tribunaux administratifs au Cameroun, c'est le juge administratif qui constate les expropriations pour cause d'utilité publique. Selon les termes de ladite loi, « ...Toutefois, il est statué par la Chambre Administrative de la Cour Suprême sur

88 Article 14 alinéa 1 de la Loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 qui stipule que « Les tribunaux administratifs sont, sauf dispositions contraires de la loi, juges de droit commun du contentieux administratif en premier ressort »

89 Bertrand-Raymond GUIMDO DONGMO, Cours de Contentieux Administratif, Janvier 2021, p. 32.

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l'exception préjudicielle soulevée en matière de voie de fait administrative et d'emprise. »90 On constate que le juge administratif joue un rôle secondaire dans les procédures arbitraires d'expropriation pour cause d'utilité publique. L'Etat est tenu de se conformer aux procédures préétablies afin de procéder aux expropriations pour cause d'utilité publique. Si une victime estime que ces procédures ont été violées et donc que l'expropriation pour cause d'utilité publique a été faite de manière illégale, elle peut saisir le juge administratif qui devra constater l'illégalité de l'expropriation. Le juge administratif ne fera que constater l'expropriation sans pour autant instruire le dédommagement de la victime concernée. C'est pour cette raison qu'on observe le rôle secondaire que joue le juge administratif dans le contentieux des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Dans un article numérique publié le 7 décembre 202091, l'on observe que la procédure des expropriations pour cause d'utilité publique peut être scindée en deux (02) phases : une phase administrative et une phase judiciaire. C'est lors de la phase administrative que le juge administratif intervient. Le respect des étapes administratives doit être à l'ordre du jour dans cette phase, sous peine de constat d'une procédure illégale par le juge administratif.

Aussi, le juge administratif intervient en cas de contestation de la Déclaration d'Utilité Publique (DUP). Cette déclaration est un arrêté pris par le Ministre en charge des domaines déclarant l'utilité publique des projets de travaux sur un espace à exproprier92. Cet arrêté est un acte administratif unilatéral comme tous les autres et peut donc faire l'objet de contestation par les personnes affectées par cet acte. Un AAU est défini comme un « acte juridique unilatéral pris par une autorité administrative pris dans l'exercice de ses pouvoirs administratifs, qui crée des droits et/ou des obligations à l'égard des particuliers »93. L'on constate que l'Arrêté portant déclaration d'utilité publique peut être rattaché à cette définition.

La loi de 2006 qui régit les tribunaux administratifs au Cameroun stipule que « Le contentieux administratif comprend : a) les recours en annulation pour excès de pouvoir et, en matière non répressive, les recours incidents en appréciation de légalité. Est constitutif d'excès de pouvoir au sens du présent article : - le vice de forme ; - l'incompétence ; - la

90 Article 3 alinéa 2 de la loi de 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux

91 Répartition des compétences entre le juge de l'expropriation et juge administratif pour connaître des actions en responsabilité en cas d'expropriation irrégulière, décembre 2020. https://www.adden-leblog.com/repartition-des-competences-entre-juge-de-lexpropriation-et-juge-administratif-pour-connaitre-des-actions-en-responsabilite-en-cas-dexpropriation-irreguliere/

92 Article 3 du décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987

93 Définition donnée dans l'affaire AP/CFJ, arrêt n° 20 du 20 mars 1968, NGONGANG NJANKE Martin c/ État du Cameroun

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violation d'une disposition légale ou réglementaire ; - le détournement de pouvoir ».94 Il s'agit là du Contentieux de l'annulation avec qui le juge administratif est très familier. Ce contentieux comprend de différentes caractéristiques et peut être ouvert pour les motifs mentionnés dans le précédent article, qui sont repris par Joseph OWONA dans son ouvrage, « Le contentieux administratif de la république du Cameroun », 2011. Pour lui, si une ou plusieurs de ces irrégularités sont constatées, l'AAU doit simplement et purement être déclaré caduc et ce, ab initio95.

Dès lors, si l'arrêté qui déclare l'utilité publique comprend des irrégularités, soit sur la forme, son auteur, son bien-fondé ou l'objectif qu'il vise, le juge administratif peut l'annuler en la faveur de la victime expropriée.

Le juge administratif joue alors un rôle très important dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il a été dit plus haut que le juge administratif joue toutefois un rôle secondaire en la matière. Cela est dû au rôle prépondérant que joue le juge judiciaire dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Le juge judiciaire est considéré comme le juge de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ceci est dû au fait que la loi de 2006 lui consacre les pouvoirs pour trancher sur les litiges relatifs aux emprises et aux voies de fait administratives96.

Après l'expropriation irrégulière constatée par le juge administratif, les deux dernières étapes de ce contentieux sont finalisées par le juge judiciaire. Il s'agit là de la réparation et de l'extinction. Ainsi, le juge judiciaire répare l'emprise immobilière et y met fin97.

Dans l'étape de la réparation, le juge administratif ayant constaté l'expropriation illégale effectuée par l'administration, saisit le tribunal judiciaire compétent pour qu'une réparation juste et équitable soit reversée à la victime. Le tribunal judiciaire qui est saisi ici est le Tribunal de Grande instance (TGI) du lieu d'implantation du terrain pour les montants excédants dix millions et le Tribunal de Première instance (TPI) pour les montants inférieurs à dix millions98. Le juge judiciaire ici va se baser sur les textes en vigueur pour déterminer quel

94 Article 2 alinéa 3(a)

95 Dès son entrée en application. Cela fera en sorte que le texte sera comme s'il n'avait jamais existé

96 Article 3 alinéa 2 de la loi de 2006 régissant les tribunaux administratifs au Cameroun

97 Bertrand-Raymond GUIMDO DONGMO, Cours de Contentieux Administratif, Janvier 2021, p. 32.

98 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2012. p. 94

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montant allouer à la victime. Ces décisions sont données en vertu de la procédure de droit commun et peuvent donc faire l'objet de voies de recours de droit commun également99.

Dans l'étape de l'extinction, le juge judiciaire met fin à la procédure illégale d'expropriation en allouant une indemnité à être reversée à la victime expropriée. Cela a pour conséquence la rétrocession du bien exproprié à la victime. Dès lors, ce sera comme si la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique n'avait jamais existé.

Le juge judiciaire intervient aussi dans le contentieux de l'indemnisation relative aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun100. Quand le Décret portant expropriation pour cause d'utilité publique et indemnisation des populations expropriées est arrêté, il appartient aux personnes concernées qui ne sont pas satisfaites du montant d'indemnisation, de saisir le tribunal compétent101 afin que justice leur soit rendue.

Il faudrait noter que le juge judiciaire en la matière ici est nul autre que le juge civil. C'est le juge de droit commun pour le paiement des indemnités, à l'opposé de son homologue, le juge répressif dit juge pénal.

Les actions devant les tribunaux de droit commun garantissent une certaine sécurité juridique aux personnes victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Elles savent qu'il existe des juridictions habilitées à les entendre pour servir et valoir ce que de droit. Il faudrait néanmoins reconnaître le rôle d'autres juges, qui jouent un rôle beaucoup plus complémentaire mais toutefois important dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

B - Les juges d'exception

Parler de juges d'exception ici voudrait dire qu'il existe des autorités juridictionnelles qui ne sont pas directement concernées par les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique mais qui affectent néanmoins celles-ci à cause de leurs activités. Il s'agit globalement du juge constitutionnel et du juge des comptes.

Au Cameroun, il n'existe pas de Cour Constitutionnelle comme en France. Les juges constitutionnels au Cameroun sont les membres du Conseil Constitutionnel (CC), nommé pour un mandat de six (06) ans éventuellement renouvelable102. Ils sont au nombre de onze (11), désignés de la manière suivante : « Les membres du Conseil Constitutionnel sont

99 Ibid, p 95

100 Ibid.

101 TGI pour les montants excédant 10millions et TPI pour ceux en dessous

102 Article 51 alinéa 1 de la Constitution du 14 avril 2008.

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nommés par le Président de la République et désignés de la manière suivante : - trois (03), dont le Président du Conseil, par le Président de la République ,
· - trois (03), par le Président de l'Assemblée Nationale après avis du Bureau ; - trois (03), par le Président du Sénat après avis du Bureau ,
· - deux (02), par le Conseil Supérieur de la Magistrature. »103.

Le Conseil Constitutionnel a pour rôle principal la garantie de la Suprématie de la Constitution comme l'a voulu Hans KELSEN. A ce titre, « Le Conseil Constitutionnel statue souverainement sur : - La constitutionnalité des lois, des traités et accords internationaux... »104. Garantir la Suprématie de la Constitution voudrait dire qu'elle veille à ce que les lois et les conventions internationales promulguées dans la législation camerounaise soient conformes à la Constitution. Si une Convention internationale n'est pas conforme à la Constitution, elle ne pourra entrer en vigueur dans l'espace camerounais, que si la Constitution est révisée avant sa promulgation 105 . Ainsi, si une loi est votée par le parlement et proposée au CC pour appréciation de la légalité, celui-ci doit faire en sorte que ses dispositions n'aillent pas à l'encontre des dispositions de la Constitution.

En ce qui concerne les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique, avant que les textes de loi relatifs à la matière n'entrent en vigueur, le CC vérifie s'ils respectent les termes de la Constitution. Si le Conseil constate même implicitement une violation de la Constitution, le texte ne pourra pas entrer en vigueur. Il a été précisé plus tôt dans ce travail que la Constitution aménage les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Alors, le juge constitutionnel doit veiller à ce que les lois qui entrent dans ce domaine garantissent tout autant une protection des droits de ces victimes, comme le veut le Constituant camerounais.

Il faudrait à ce stade lever l'équivoque qui pourrait naitre en matière d'appréciation de la légalité des arrêtés portant déclaration d'utilité publique et les décrets portant expropriation pour cause d'utilité publique et indemnisation des populations victimes des expropriations. Ces actes sont des Actes Administratifs Unilatéraux (AAU) dont l'appréciation de la légalité ne pourrait se faire par le juge constitutionnel. Il s'agit pour lui d'une question préjudicielle qui ne peut être appréciée que par le juge administratif, à la lumière de la loi de 2006 régissant les tribunaux administratifs au Cameroun. Ce texte prévoit que « Le contentieux administratif

103 Article 51 alinéa 2 Ibid

104 Article 47 alinéa 1 Ibid.

105 Article 44 Ibid stipulant que « Si le Conseil Constitutionnel a déclaré qu'un traité ou accord international comporte une clause contraire à la Constitution, l'approbation en forme législative ou la ratification de ce traité ou de cet accord ne peut intervenir qu'après la révision de la Constitution ».

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comprend : a) les recours en annulation pour excès de pouvoir et, en matière non répressive, les recours incidents en appréciation de légalité »106. Le juge Constitutionnel n'est donc en aucun cas compétent pour apprécier la légalité des textes réglementaires, mais uniquement les textes législatifs.

A la lecture de l'analyse ci-dessus, on pourrait être tenté de dire que le juge constitutionnel est le premier défenseur des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ceci est dû au fait qu'il intervient bien avant l'entrée en vigueur des textes consacrant leurs droits comme il a été le cas avec la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

Il est important de relever que le juge des comptes joue un rôle beaucoup plus auxiliaire que les juges présentés plus haut. Néanmoins, son activité est relativement importante dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Le juge des comptes au Cameroun est la Chambre des comptes de la Cour Suprême, consacrée par la Constitution du Cameroun107 en attendant l'implémentation des tribunaux régionaux des comptes, voulue par la même Constitution108 Cette consécration des tribunaux régionaux des comptes est aussi faite par la loi n° 2006/017 du 29 décembre 2009 qui dispose que « Il est créé un tribunal régional des comptes par région. Son siège est fixé au Chef-lieu de ladite région. »109

Le juge des comptes a pour mission de vérifier les activités des comptes des administrations publiques et des autres personnes morales de droit publiques. En les termes de la loi de 2006, « Le Tribunal Régional des Comptes est compétent, sous réserve des attributions de la Chambre des Comptes, pour contrôler et statuer sur les comptes publics des collectivités territoriales décentralisées de son ressort et de leurs établissements publics. »110

En ce qui concerne les expropriations pour cause d'utilité publique, c'est à partir du Contrôle des comptes de ces puissances publiques que les indemnisations peuvent être reversées aux victimes de ces procédures. Dès lors, le juge des comptes vérifie la légitimité

106 Article 2 alinéa 3(a) de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs au Cameroun.

107 Article 41 de la Constitution de 2008

108 Article 42 Ibid.

109 Article 1 alinéa 2 de la Loi n° 2006/017 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation, les attributions et le fonctionnement des tribunaux régionaux des comptes.

110 Article 9 alinéa 1 Ibid.

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des comptes d'une personne morale de Droit Public voulant procéder à des travaux d'utilité publique. Quand le montant total lié aux travaux des expropriations et aux indemnisations est arrêté, le juge des comptes assure son suivi, afin qu'il serve l'intérêt pour lequel il a été déboursé. Grâce à cela, les montants des indemnisations à reverser aux victimes des expropriations font l'objet d'un véritable suivi et protège donc convenablement ce droit dévolu à ces victimes.

Dès lors, il est irréfutable que le juge des comptes joue un rôle auxiliaire mais toutefois important dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Les instances juridictionnelles sus analysées ne font qu'une partie du travail de protection des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. On constate une participation active d'acteurs non-juridictionnels qui font le reste du travail, selon les dispositions prévues par la réglementation en vigueur.

PARAGRAPHE II : LES INSTITUTIONS NON-JURIDICTIONNELLES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Ces mécanismes sont observés à travers les activités d'acteurs qui ne sont pas de rôle dans les institutions juridictionnelles du Cameroun. Il s'agit là des autorités qui jouent un rôle prépondérant dans la sauvegarde des intérêts des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il s'agit largement des membres de l'administration active (A) et des acteurs indépendants (B).

A - Les membres de l'administration active

Les membres de l'administration active sont perçus ici comme les autorités exerçant leur pouvoir administratif au quotidien et qui peuvent être rattachées au gouvernement camerounais. L'on observe que presque tous les départements ministériels au Cameroun sont impliqués de près ou de loin aux procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique. Cependant, nous avons dû nous limiter dans ce travail de recherche à deux principaux

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membres de l'administration active qui agissent dans cette mesure. Il s'agit là du Ministre des Domaines, du Cadastre et des affaires foncières et du Premier Ministre Chef du Gouvernement.

Le Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières est le chef du Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (MINDCAF), nommé par décret présidentiel, sur proposition du Premier Ministre Chef du Gouvernement111.

Selon l'Article 3 du Décret du 18 septembre 2012112, le MINDCAF est responsable de l'acquisition et de l'expropriation des biens immobiliers au profit de l'Etat et des autres personnes morales de Droit Public113. Au sein de ce département ministériel, il existe une Direction des Domaines qui gère les questions relatives aux indemnisations. Cette direction coiffe la sous-direction des expropriations et des indemnisations, et le service des indemnisations.

La sous-direction des expropriations et des indemnisations s'occupe inter alia de « la vulgarisation des normes et procédures d'expropriation et d'indemnisation à respecter par les administrations publiques, les collectivités territoriales décentralisées et les autres personnes morales de droit public, initiatrice de projets publics ayant une emprise sur le sol ; la conduite des procédures légales d'acquisition des terrains par voie de droit public et de l'apurement des droits indemnitaires des personnes expropriées »114. Cette sous direction joue alors un rôle prépondérant dans la sensibilisation des administrations publiques sur la pertinence de respecter les procédures prévues en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux indemnisations au Cameroun.

Le service des indemnisations qui fait aussi partie de la Direction des Domaines au MINDCAF, est chargé d'élaborer et de suivre l'application des normes d'indemnisation. Il est chargé du contrôle de l'apurement des droits indemnitaires des personnes expropriées et du suivi de la gestion du contentieux de l'indemnisation en liaison avec la Division des Affaires Juridiques115.

111 Article 10 alinéa 1 de la Constitution du 14 avril 2008

112 Décret n° 2012/390 du 18 septembre 2012 portant Organisation du MINDCAF

113 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 72.

114 Ibid, p. 72-73.

115 Ibid.

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Le Ministre chargé des domaines quant à lui joue un rôle transversal dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il est perçu comme la clé de voûte des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Tout d'abord, sa saisine constitue la porte d'entrée vers les travaux d'utilité publique au Cameroun. Le Décret de 1987 prévoit à ce sujet que « tout département ministériel désireux d'entreprendre une opération d'utilité publique saisit le Ministre chargé des Domaines d'un dossier préliminaire en deux exemplaires comprenant .
· -une demande assortie d'une note explicative indiquant l'objet de l'opération ,
· une fiche dégageant les caractéristiques principales des équipements à réaliser et précisant notamment .
· a) la superficie approximative du terrain sollicité dûment justifiée ; b) l'appréciation sommaire du coût du projet y compris les frais d'indemnisation ,
· c) la date approximative de démarrage des travaux ; d) la disponibilité des crédits d'indemnisation avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous autres moyens d'indemnisation »116
. Le Ministre chargé des Domaines reçoit donc toutes les demandes pour effectuer des opérations d'utilité au Cameroun. Les départements ministériels concernés sont tenus de veiller à ce que leurs dossiers comportent tous les documents précités.

Ensuite, le Ministre en charge des Domaines est tenu d'apprécier le bien-fondé des travaux. Si le Ministre estime que les travaux sont dans l'intérêt de la population toute entière, il prend un arrêté déclarant le projet d'utilité publique. Concrètement, « (1) dès réception du dossier, le Ministre chargé des Domaines apprécie le bien-fondé des justifications du projet.(2) Lorsqu'il juge le projet d'utilité publique, il prend un arrêté déclarant d'utilité publique les travaux projetés en définissant le niveau de compétence de la commission chargée de l'enquête d'expropriation dite commission de constat et d'évaluation. »117 Nous avons relevé plus haut que le Ministre chargé des domaines doit se substituer à la population pour déterminer si des travaux leur seront collectivement bénéfiques ou pas. Si le Ministre estime qu'en effet, les projets ont une orientation de satisfaction de l'intérêt général, il prend par voie d'arrêté une déclaration d'utilité publique. Cette déclaration a pour conséquence d'introduire la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, qui sera confirmée par le Président de la République ou, le cas échéant, par le Premier Ministre Chef du Gouvernement.

116 Article 2 du décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

117 Article 3, Ibid

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On constate que le rôle du Ministre des Domaines, du Cadastre et des affaires foncières revêt d'une importance irréfutable. Toutefois, l'exercice de ce rôle doit se faire avec une précision chirurgicale de la plus haute délicatesse. Ceci est dû au fait que le Ministre a en quelque sorte l'hygiène de vie des populations entre ses mains. Il ne peut pas faire de jugement limitatif ou passif mais doit agir dans l'intérêt de protéger les intérêts des populations à exproprier. En faisant cela, il contribue inéluctablement à la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Nonobstant, le Ministre chargé des domaines ne peut pas à lui seul régir la totalité d'une procédure d'expropriation. C'est pour cette raison que son rôle est inféodé à l'exercice des prérogatives du Premier Ministre Chef du Gouvernement, en la matière.

Le Premier Ministre (PM) est hiérarchiquement le patron du Ministre chargé des Domaines, qui fait partie du gouvernement. Il intervient dans la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun à trois (03) niveaux.

Premièrement, le Premier ministre est au sens de la loi chargé de l'exécution des lois118. Ainsi, est chargé de combler les lacunes observées dans les textes de loi adoptés par le Parlement. A la lumière du Décret n° 92/089 du 04 mai 1992, « Le Premier Ministre dispose en tant que de besoin du pouvoir de signer les décrets d'application des lois votées par l'Assemblée Nationale. »119. Il joue donc un rôle important dans la précision des termes et de l'orientation des dispositions législatives.

En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, l'on peut observer cette prérogative à travers l'entrée en vigueur d'un décret du Premier Ministre qui fixe les tarifs des indemnités à allouer aux personnes qui ont subies des destructions pour cause d'utilité publique des cultures et d'arbres cultivés120. Ce décret est venu matérialiser la volonté de la loi de 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation qui prévoit que « les modalités de détermination de la valeur des cultures détruites sont fixées par décret »121. Dès lors, le PM est vu comme l'autorité en charge de l'implémentation des procédures détaillées des expropriations pour cause d'utilité publique et des modalités d'indemnisation des différents types d'immeubles expropriés.

118 Article 12 alinéa 2 de la Constitution du 14 avril 2008

119 Article 3 du décret n° 92/089 du 04 mai 1992 portant attributions du Premier Ministre

120 Décret n° 2003/418/PM du 25 février 2003 fixant les tarifs des indemnités à allouer au propriétaire victime de destruction pour cause d'utilité publique de cultures et d'arbres cultivés

121 Article 10 alinéa 1 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

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Deuxièmement, le Premier Ministre Chef du Gouvernement peut prendre des décrets portant expropriation pour cause d'utilité publique. Initialement, cette prérogative essentiellement dévolue au Président de la République (PR). Cependant, les textes prévoient que le PM peut lui aussi prendre des décrets de cette nature, sous réserve des prérogatives dévolues au PR en la matière et d'une approbation expresse de celui-ci122. Le Premier Ministre prend alors les décrets portant expropriation pour cause d'utilité publique en se conformant à la législation en vigueur, ce qui garantit une incontestable sécurité juridique aux personnes expropriées.

Troisièmement, le Premier Ministre prend les Décrets fixant les indemnisations des victimes frappées d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. En outre, « il certifie, par décret, les montants des indemnisations à allouer aux populations expropriées » 123. Le Premier Ministre se base sur le rapport qui lui est soumis par la commission d'évaluation et de constat pour prendre ce Décret. À partir de là, et à la suite du précédent type de Décret en la matière, l'expropriation pour cause d'utilité est dite d'avoir été déclarée.

Pour préserver d'avantage les intérêts des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique, les Décrets portant expropriation pour cause d'utilité publique et indemnisation des victimes sont portés à la connaissance générale du Publique. Cela est fait pour garantir la transparence des procédures et offrir la possibilité de contester leurs formes et/ou fonds. En règle générale, ils sont publiés en français et en anglais dans le Journal Officiel et affichés partout ou besoin, pour servir et valoir ce que de Droit124.

Il faudrait aussi reconnaître les rôles joués par le Ministère de l'administration Territoriale et de la Décentralisation (MINATD), le Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural (MINADER) et le Ministère du Développement urbain et de l'Habitat (MINDUH) dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun125.

122 Article 2 alinéa 2 du décret n° 92/089 du 04 mai 1992 portant attributions du Premier Ministre

123 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 76.

124 A titre d'illustration, l'article 5 du Décret n° 2012/1872/PM du 04 juillet 2012 portant expropriation et allouant des indemnités aux personnes victimes de perte des droits fonciers et de destruction des biens dans le cadre des travaux de construction de la ligne d'évacuation d'énergie électrique et de deux stations de transformation, sise au lieu-dit Mékin, Arrondissement de Meyessala, Département du Dja et Lobo, précise que « le présent décret sera enregistré, puis publié au Journal Officiel en français et en anglais ».

125 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique

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Dès lors la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun est ferme, objective et réelle grâce à ces membres de l'administration active. Les acteurs indépendants en la matière contribuent aussi efficacement à cette protection

B - Les acteurs indépendants

Les acteurs indépendants en matière des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun sont ceux qui ne peuvent ni n'être rattachés aux institutions juridictionnelles, ni à l'administration active. Cependant, ils jouent un rôle tout aussi important que les précédents. Il s'agit concrètement de la Commission d'évaluation et de constat et des populations directement affectées par la procédure d'expropriation

La Commission d'évaluation et de Constat est une commission ad hoc créée pour mener les enquêtes relatives aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Elle est chargée « au niveau national, provincial ou départemental sur décision du Ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat : - de choisir et de faire borner les terrains concernés, aux frais du bénéficiaire ; - de constater les droits et d'évaluer les biens mis en cause ; - d'identifier leurs titulaires et propriétaires ; - de faire porter les panneaux indiquant le périmètre de l'opération, aux frais du bénéficiaire. »126. On constate alors que c'est grace à cette commission que d'une part, la superficie exacte de la zone à exproprier est obtenue et d'autres part, les personnes pouvant être affectées directement ou indirectement par cette procédure, sont identifiées.

Concernant l'organisation de la Commission, elle comprend au niveau départemental127 : le Préfet ou son représentant (Président) ; le responsable du Service Départemental des Domaines (Secrétaire) ; le responsable du Service Départemental du Cadastre (Membre) ; le responsable du Service Local de l'Urbanisme et de l'Habitat (Membre) ; le responsable compétent des Mines et de l'Energie (Membre) ; le responsable du Service Départemental de l'Agriculture (Membre) ; le responsable du Service Départemental des Routes (Membre) ; le représentant du Service ou de l'organisme demandeur (Membre) ; le ou les Député (s) concerné (s) (Membre) ; le ou les Magistrat (s) Municipal (aux) (Membre) ; la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s) (Membre).

des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 74-75.

126 Article 4 du décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

127 Article 5 alinéa 1 Ibid.

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Au niveau Régional, la Commission comprend 128 : le Gouverneur et son représentant (Président) ;le responsable du Service Provincial des Domaines (Secrétaire) ;le ou les Préfet (s) concerné (s) ou leurs représentants (Membre) ; le responsable du Service Provincial du Cadastre (Membre) ; le responsable du Service Provincial de l'Urbanisme et de l'Habitat (Membre) ; le responsable du Service Provincial chargé des Mines et de l'Energie (Membre) ; le responsable du Service Provincial de l'Agriculture (Membre) ; le responsable du Service Provincial des routes (Membre) ; le représentant du Service ou de l'organisme demandeur (Membre) ; le ou les Député (s) concerné (s) (Membre) ; le ou le Magistrat (s) Municipal (aux) concerné (s) (Membre) ; la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s) (Membre) Au niveau National, la Commission comprend129 : le Ministre chargé des Domaines ou son représentant (Président) ; le Directeur des Domaines ou son représentant (Secrétaire) ; le ou les Préfet (s) concerné (s) (Membre) ; le Directeur du Cadastre ou son représentant (Membre) ; un représentant du Ministre de l'Agriculture (Membre) ; un représentant du Ministre des Mines et de l'Energie (Membre) ; le Directeur de l'Habitat ou son représentant (Membre) ; le représentant du Service ou de l'organisme demandeur (Membre) ; le ou les Député (s) concerné (s) (Membre) ; la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s) (Membre)

Ces différentes commissions sont nommées au niveau départemental, régional et national par le Préfet, Gouverneur et Ministre en charge des domaines, respectivement130.

L'organisation succincte de la commission d'évaluation et de constat, permet une fluidité des procédures d'expropriation et permet une récolte d'informations fiable, pour pouvoir indemniser les victimes.

Dès réception de l'arrêté déclarant les travaux d'utilité publique, le président de la commission de constat et d'évaluation le notifie aux autorités administratives intéressées c'est-à-dire le préfet et le magistrat municipal du lieu. Le président en assure la publicité par voie d'affichage à la préfecture, à la mairie, à la sous-préfecture, au Service départementale des domaines et à la chefferie du lieu de situation du terrain. Les populations concernées sont informées au moins trente (30) jours à l'avance, du jour et de l'heure de l'enquête par convocations adressées aux chefs et notables131. L'enquête est menée dans toutes ses phases en présence des propriétaires des fonds et des biens qu'il supporte. Les notabilités et les

128 Article 5 alinéa 2 Ibid.

129 Article 5 alinéa 3 Ibid.

130 Article 6 Ibid.

131 Article 6 Ibid.

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populations doivent y être associées. La commission peut avoir au préalable arrêté elle-même la liste exhaustive des propriétaires des biens à détruire. Elle peut constituer une sous-commission technique de trois membres (03) au moins à l'effet d'expertiser une catégorie de ces biens. Le travail de la sous-commission est exécuté sous la responsabilité et le contrôle de la commission entière qui en contresigne les documents. « À la fin de l'enquête, la commission de constat et d'évaluation dresse trois procès-verbaux132 : un procès-verbal d'enquête relatant tous les incidents éventuels et les observations des personnes évincées ; un procès-verbal de bornage et le plan parcellaire du terrain retenu, établis par le géomètre membre de la commission ; un état d'expertise des cultures signé de tous les membres de la commission. »133

Le dossier ci-dessus est ensuite transféré au Ministre chargé des Domaines pour pouvoir préparer le décret portant expropriation pour cause d'utilité publique d'un domaine précis134.

A ce stade, il faudrait apprécier l'énorme rôle que joue la Commission d'évaluation et de constat dans la préservation des intérêts des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Pour faciliter d'avantage ces procédures, les populations victimes sont tenues de collaborer avec la Commission.

Le législateur a voulu que les victimes des expropriations ne soient pas juste frappées de cette procédure, mais qu'elles y participent. Pour ces motifs, les populations expropriées doivent autant que faire se peut collaborer avec la Commission d'évaluation et de constat dans les enquêtes préalables aux procédures d'expropriation.

Les victimes expropriées doivent participer aux négociations préalables pour fixer avec la Commission le montant de l'indemnisation qui doit leur être reversé. Les textes prévoient que « Avant le recours à l'expropriation pour cause d'utilité publique en faveur des collectivités publiques locales, des établissements publics, des concessionnaires de service public ou des sociétés d'Etat en vue de la réalisation des travaux d'intérêts général, ces derniers doivent procéder aux négociations préalables avec des propriétaires ou ayants-droits concernés. »135

132 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2012. p. 80.

133 Article 12 Ibid.

134 Ibid.

135 Article 15 du Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

Avec cette participation, il est mis en exergue le principe de la gouvernance participative qui voudrait une implication particulière des populations dans la mise en oeuvre des politiques de l'Etat.

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CHAPITRE II : L'OPÉRATIONNALISATION DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

L'Etat du Cameroun après avoir établi un cadre juridique consacrant les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique, se doit d'oeuvrer de façon beaucoup

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plus pratique. Cela forgera comme il se doit la protection des droits des victimes de ces procédures au Cameroun. Pour ce faire, on constate un fort dynamisme des instances juridictionnelles qui agissent pratiquement dans le cadre de cette protection (Section I). L'on note aussi la mise en oeuvre de divers politiques par l'administration publique afin d'atteindre le même objectif (Section II).

SECTION I : LE DYNAMISME DES INSTANCES JURIDICTIONNELLES DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Comme il a été présenté plutôt dans ce travail, il existe plusieurs tribunaux compétents en matière de contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. On constate que ces tribunaux agissent de manière dynamique au travers des décisions qu'ils auraient rendues en la matière. Ces différentes décisions fortifient concrètement la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Nous avons retenu l'implication du juge administratif (Paragraphe I) et du juge judiciaire (Paragraphe II) dans le cadre de cette étude.

PARAGRAPHE I : L'IMPLICATION DU JUGE ADMINISTRATIF DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Malgré le rôle secondaire136 que joue le juge administratif dans le contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, celui-ci prend de sérieuses décisions qui impactent sur la protection des droits des victimes de ces expropriations. Ainsi, l'on distingue l'annulation des actes liés aux expropriations (A) et le constat de l'illégalité des procédures d'expropriation (B) par le juge administratif.

A - L'annulation des actes liés aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun par le Juge Administratif

136 Dû à la prépondérance du juge judiciaire en la matière

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Afin de pouvoir procéder à une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, il a été établi que le Ministre chargé des Domaines doit au préalable prendre un Arrêté déclarant d'utilité publique les projets de travaux sur l'espace à exproprier137. Le juge administratif si saisi, a le pouvoir d'annuler cet Arrêté pour « excès de pouvoir ». L'excès de pouvoir est constaté ici si le projet ne va pas dans le sens d'une satisfaction collective de l'intérêt général. Ainsi, le juge administratif en annulant une DUP, protège les intérêts des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

A titre d'illustration, dans l'affaire Dikalo-Bali du 25 mai 2023, le Tribunal Administratif du Littoral a statué en délibéré sur l'annulation de la Déclaration d'Utilité Publique prise par le Ministère chargé des Domaines. En 2022, le Ministre chargé des Domaines prit une DUP pour les travaux de construction de « l'Hotel Marriott » sur un espace appartenant à environs 80 familles. Ces familles possédaient des titres fonciers justifiant leur propriété sur cet espace depuis plusieurs années déjà. Toutefois, pour des motifs « d'utilité publique ». L'Etat décida le 14 mai 2022 de procéder à une procédure de déguerpissement en détruisant les constructions se trouvant sur ce vaste espace situé à Dikalo-Bali, à Douala. Les victimes de ce sinistre ont saisi le juge administratif en recours collectif afin de contester la DUP prise sur cet espace.

Un an plus tard, le 25 mai 2023, le juge administratif déclara que la construction d'un Hôtel de luxe ne constitue en aucun cas une cause d'utilité publique. Ainsi, il déclara l'Arrêté pris par le Ministre en charge des Domaines, caduc.

On constate là une protection perceptible des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Le droit de jouissance de l'utilité publique devant exister dans les expropriations pour cause d'utilité publique était absent dans l'affaire Dikalo-Bali. Le juge ne pouvait donc pas statuer en faveur de l'Etat. Grâce à cette décision, la population a été mise au courant sur l'indispensable nécessité pour une expropriation de servir l'utilité publique. Il serait donc difficile dans l'avenir pour une DUP non fondée de voir le jour après une telle décision.

Le juge administratif en constatant l'illégalité d'une expropriation pour cause d'utilité publique protège aussi les droits des victimes en la matière.

137 Article 3 du décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987, Op cit.

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B - Le constat de l'illégalité des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique par le juge administratif au Cameroun

GUIMDO est clair sur le fait qu'une expropriation pour cause d'utilité publique illégale est assimilée à une emprise irrégulière138. La jurisprudence a retenu que c'est le juge administratif qui est habilité à constater ces cas d'illégalité. En faisant cela, les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sont sauvegardés.

Une affaire un peu plus ancienne démontre à quel point les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sont protégés au Cameroun. Il s'agit là de l'affaire Veuve André TESTAS née Mathilde Jeanne c/ Etat du Cameroun. Dans cette affaire, Dame TESTAS était une veuve qui possédait un terrain dans les années 1970. Elle s'est vue saisie de son terrain en 1978 pour reclassement dans le domaine public artificiel de l'Etat. Ce qui attire notre attention dans cette saisie est le fait qu'aucune procédure d'expropriation n'a eu lieu avant de procéder à cette dépossession. Ainsi, elle a saisi le juge administratif afin qu'il puisse constater l'expropriation illégale qu'a effectué l'Etat sur son terrain. En 1982, le juge administratif déclara « Attendu que cette dépossession de son immeuble dont a été victime la requérante n'a été précédée d'aucune procédure d'expropriation, ni d'une autre ayant un caractère régulier ; que cela est d'autant vrai que c'est seulement le 27 février 1978 qu'intervint le Décret n°78/064 portant classement au domaine public artificiel de la parcelle de terrain propriété de dame veuve Testas, alors que les trottoirs étaient déjà achevés ; Attendu que cette dépossession irrégulière constitue à n'en pas douter une emprise »139. L'objectif pour le juge administratif dans cette affaire était de déterminer si la dépossession constituait une emprise irrégulière. Cela a été affirmé lorsqu'il établit que « attendu que cette dépossession irrégulière constitue à n'en pas douter une emprise ».

Ainsi, le juge administratif démontre que le respect de la procédure d'expropriation est indispensable pour qu'elle soit valide. Ainsi, la protection des droits des victimes de ces expropriations est observée à travers de telles décisions rendues par le juge administratif au Cameroun.

La suite de ce constat d'emprise irrégulière est comme il a été établi plus haut, la réparation et l'extinction par le juge judiciaire.

138 Bertrand-Raymond GUIMDO DONGMO, Cours de Contentieux Administratif, Janvier 2021, p. 32. Op Cit

139 Jugement n°46/CS-CA/81-82 du 27 mai 1982, Madame veuve André Testas née Mathilde Jeanne c/ Etat du Cameroun. In Bertrand-Raymond GUIMDO DONGMO, Cours de Contentieux Administratif, Janvier 2021, p. 33.

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PARAGRAPHE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR LE JUGE JUDICIAIRE AU CAMEROUN

Le juge judiciaire occupe une place prépondérante dans le contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. On a pu observer qu'après le constat de l'illégalité d'une expropriation pour cause d'utilité publique par le juge administratif, il appartient au juge judiciaire de réparer les victimes et de mettre fin au contentieux. Dès lors, la réparation des victimes (A) et l'extinction du contentieux par le juge judiciaire (B) au Cameroun.

A - La réparation des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique par le juge judiciaire au Cameroun

Une fois qu'une emprise irrégulière a été constatée par le juge administratif, il appartient au juge judiciaire de réparer la victime d'une telle irrégularité. En faisant cela, le juge judiciaire garantie une protection des intérêts des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Une jurisprudence assez révélatrice en la matière sert de bouclier aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il s'agit de l'affaire MEDOU Gaston c/ Etat Fédéral du Cameroun du 23 mars 1971. En l'espèce, Sieur MEDOU Gaston était propriétaire d'une concession dans le département du Dja-et-Lobo. Malheureusement pour lui, des éléments de forces armées se sont accaparés de cette concession pour une période de huit mois, sur autorisation du Préfet de l'époque. Cet accaparement n'a été précédé d'aucune procédure d'expropriation, ce qui a été énormément préjudiciable pour Sieur GASTON. A la suite de cela, il a saisi les juridictions compétentes afin qu'une indemnité de 15.300.000 FCFA lui soit versée à titre de dommage et intérêt. La Cour Fédérale de Justice décida que « les éléments des forces armées ont pris possession de la concession du sieur MEDOU et qu'ils l'ont occupée pendant huit mois à la suite d'un ordre de l'autorité préfectorale du DJA et LOBO ; que cette occupation d'une propriété privée immobilière constitue une emprise qui, de surcroît, se trouve être irrégulière comme n'ayant pas été

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précédée d'une réquisition régulière des autorités militaires ni des autorités civiles »140. Le juge judiciaire ordonna à la suite de ce jugement le paiement des indemnités demandées au requérant.

Une fois de plus, une sécurité importante est garantie aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Grace à ce type de décision, les populations sont au parfum des indemnisations qu'elles doivent recevoir en cas d'illégalité d'une procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun.

A la suite d'une réparation par le juge judiciaire, ce même juge a pour mission de mettre fin au contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun.

B - L'extinction du contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique par le juge judiciaire au Cameroun

La troisième et dernière étape dans ce type de contentieux est l'extinction141. Une fois que le juge administratif ait constaté l'emprise irrégulière et que le juge judiciaire a ordonné la réparation de la victime, le juge judiciaire encore doit mettre fin au contentieux. Cela a aussi pour conséquence de protéger les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité au Cameroun. Ceci dans la mesure où ce n'est qu'en mettant un terme au Contentieux que le bien illégalement exproprié peut être restitué à la victime.

Dans l'affaire KOUM JEMBA Joseph du 24 avril 1986, ce n'est qu'après que le juge administratif ait constaté l'emprise irrégulière et que le juge judiciaire ait ordonné le paiement des dommages et intérêt que le contentieux prend fin. En ses termes « s'il appartient au juge administratif de constater l'existence d'une emprise, d'en apprécier le caractère régulier ou irrégulier, seul le juge judiciaire a compétence pour octroyer des dommages-intérêts »142.

Dès lors, la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique est un fois de plus matérialisée à travers le rôle important que joue le juge judiciaire en la matière.

140 Jugement Arrêt N° 157/CFJ/CAY du 23 mars 1971, MLDOU Gaston c/Etat Fédéral du Cameroun. In Jean Calvin ABA'A OYONO, La compétence de la juridiction administrative en droit camerounais, Thèse de Doctorat, 1994, p. 327.

141 Bertrand-Raymond GUIMDO DONGMO, Cours de Contentieux Administratif, Janvier 2021, p. 33. Op Cit.

142 Jugement affaire KOUM JEMBA Joseph du 24 avril 1986. In Jean Calvin ABA'A OYONO, La compétence de la juridiction administrative en droit camerounais, Thèse de Doctorat, 1994, p. 329.

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Il apparait que les institutions juridictionnelles consacrées pour entendre le contentieux des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun prennent des décisions importantes pour assurer les droits des victimes de ces expropriations. On constate que les institutions non-juridictionnelles elles aussi agissent dans une dynamique similaire.

SECTION II : L'IMPLICATION DES INSTANCES NON-JURIDICTIONNELLES DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Les instances non-juridictionnelles dont il s'agit ici renvoient aux acteurs qui interviennent dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique qui ne sont pas du ressort des tribunaux. On constate que l'administration publique met en place plusieurs mécanismes qui permettent une protection perceptible des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. La Commission d'Evaluation et de Constat qui est un organe ad hoc dans ces procédures elle aussi agit d'une manière similaire. Ainsi, après avoir présenté les mécanismes mis en place par l'administration publique camerounaise afin d'opérationnaliser la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Paragraphe I), les initiatives prises par la Commission d'Evaluation et de Constat seront aussi précisées (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA VIVACITÉ DE L'ADMINISTRATION PUBLIQUE CAMEROUNAISE DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Lors des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, l'intervention de différents départements ministériels est constatée. Dans le cadre de cette étude, nous avons relevé une forte prise d'initiatives par deux principaux départements ministériels dans l'optique de protéger les droits des victimes de ces expropriations au

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Cameroun. Il s'agit du Ministère du Développement Urbain et de l'Habitat (A) et du Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières (B).

A - L'opérationnalisation de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique par le Ministère du Développement Urbain et de l'Habitat au Cameroun

Le Ministère du Développement Urbain et de l'Habitat (MINDUH) au Cameroun outre son rôle direct dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun 143 , est chargé d'établir une politique de planification urbaine. C'est à cette politique que les populations doivent se conformer afin de bénéficier des indemnisations en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun144. Ainsi, le MINDUH met en place de différents mécanismes pour amener les populations à se conformer aux différentes règles d'urbanisme.

Récemment, Le Ministre de l'Habitat et du Développement Urbain (MINHDU),, a présidé le 18 avril 2023 à Yaoundé l'atelier Bailleurs couplé à la signature des Contrats de ville avec les communes de Bélel du département de la Vina dans l'Adamaoua, Foumban du département du Noun dans la région de l'Ouest et Mouanko du département de la Sanaga Maritime, région du Littoral. Le Contrat de Ville est un instrument de mise en oeuvre à moyen terme, de la politique urbaine telle que définie dans les Documents de Planification Urbaine. Il s'agit d'un outil de mise en cohésion des actions de l'Etat avec la vision de développement émanant des magistrats municipaux et des populations. Il concourt à la réduction des écarts de développement entre les quartiers défavorisés et leurs unités urbaines et l'amélioration des conditions de vie des habitants, en luttant notamment contre toute forme de discrimination145. Grâce à cet atelier d'échanges, les populations de la zone ont pu prendre connaissance de la politique urbaine définie par les Documents de Planification Urbaine. La prise en compte de cette politique permet aux populations d'être en marge avec la légalité et auront donc droit aux indemnisations en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique. Dès lors, l'on constate les actions entreprises par le MINDUH dans la mise en oeuvre de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

143 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 74-75. Op Cit.

144 Article 10 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

145 Site Officiel du MINDUH, www.minhdu.gov.cm (Consulté le 06/07/2023)

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C'est dans cette même dynamique que les activités du Ministère de l'Administration Territoriale s'inscrivent.

B - La Mise en oeuvre de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique par le Ministère du Cadastre, des Domaines et des Affaires Foncières

Le MINDCAF est l'administration directement chargée des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. C'est auprès d'elle que les demandes d'expropriation sont déposées par les autres administrations de l'Etat. Plus important encore, elle a pour mission de protéger les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il faudrait noter ici que c'est le MINDCAF qui est habilité à délivrer les titres fonciers au Cameroun146. La possession du titre foncier étant une condition sine qua non pour bénéficier des indemnisations en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique doit donc être promue par ce ministère. Ceci afin de protéger les intérêts de la population.

En 2021, nous avons assisteé à l'annulation de cinq faux titres fonciers par le Ministre chargé des Domaines au quartier PK17 à Douala. C'était alors une occasion pour le Ministre de rappeler aux détenteurs de tels titres et à la population toute entière, la nécessité d'obtenir des titres fonciers légitimes.

En faisant cela, le MINDCAF assure les arrières de la population dans l'éventualité de futures procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique. Ainsi, les droits de ces victimes sont sauvegardés à travers les activités de cette administration.

L'administration publique camerounaise joue dès lors un rôle remarquable dans la mise en oeuvre de politiques de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. L'instance ad hoc créée dans le cadre de ces procédures agit aussi favorablement dans la protection des droits de ces victimes

PARAGRAPHE II : LES INITIATIVES DE LA COMMISSION D'ÉVALUATION ET DE CONSTAT DANS LE CADRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES

146 Décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et complété par le décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005

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VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Le principal souci de cette commission doit, en tout temps être la sauvegarde des intérêts des victimes de ces expropriations. Pour cette raison, on constate une collaboration entre ladite commission et les populations expropriées d'une part (A) et une célérité d'exécution de ses missions (B).

A - La collaboration de la Commission d'Evaluation et de Constat avec les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique

Afin de faciliter les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique, les Commissions sont tenues de collaborer avec les victimes de ces expropriations147. Au cours de ces collaborations, d'importantes informations sont transmises aux victimes, qui sont toutes à leur intérêt. Par exemple, le délai de déguerpissement des lieux fixé à 6mois148 leur est transmis.

Aussi, les commissions établissent des rencontres avec les populations expropriées afin de discuter avec elles sur le montant qui devrait leur être reversé en guise d'indemnisation. Ceci est sans doute la partie la plus délicate de cette procédure. Si les négociations sont mal menées, les droits de ces victimes seront bafoués. Pourtant, il est question ici que les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique soient en tout temps respectés.

A titre d'illustration, un projet de mobilité urbaine a récemment été engagé dans la ville de Douala. Il faudrait alors que les personnes qui pourraient être affectées de près ou de loin par ce projet, collaborent avec la Commission d'évaluation et de Constat afin que des indemnisations puissent leur être reversées. A ce titre, la Commission est aussi tenue de collaborer avec la Communauté Urbaine afin qu'elles recensent ensemble toutes les pièces devant être présentées par les personnes affectées par ledit projet. Entre autres pièces exigées par la Communauté urbaine, figurent la photocopie de la Carte nationale d'identité (CNI), titre foncier, attestation de propriété, certificat de vente, etc). Le maire de la ville, invite les populations de se munir à toutes fins utiles, au passage des membres de cette commission,

147 Joseph OWONA, Domanialité Publique et expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2012. p. 80. Op cit.

148 Article 4 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

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desdits documents permettant la prise en compte de leurs biens potentiellement impactés par le projet de mobilité urbaine de Douala. Il s'agit des populations installées le long de certains itinéraires de la ville, déclarés d'utilité publique par le Ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (MINDCAF).

La conséquence de cette collaboration sera sans l'ombre d'un doute une protection un peu plus solide des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Le même résultat est obtenu quand cette même commission travaille en toute célérité.

B - La célérité de la Commission d'Evaluation et de Constat dans l'exercice de ses missions

La Commission d'évaluation et de Constat fonctionne en marge avec des délais bien précis. Si ces délais sont respectés, les droits dus aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique leur seront aussi reversés dans un laps de temps raisonnable.

La Commission est tenue d'informer la population au moins 30 jours à l'avance du jour et de l'heure des enquêtes par convocations adressées aux chefs et notables. Si ces délais ne sont pas respectés, les populations ne pourront pas se préparer à temps pour les enquêtes. Cela aura pour conséquence de biaiser les droits des victimes des expropriations en la matière.

Dès lors, le respect des procédures apparaît comme un élément sacro-saint devant être respecté par la Commission. En faisant cela, la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun obtient une certaine crédibilité.

CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE

Il était question dans cette partie de présenter dans quelle mesure il peut être dit que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique est effective au Cameroun. Il a été observé dans un premier chapitre que cette protection passe par la consécration juridique des droits de ces victimes en la matière. Dans le deuxième chapitre, il a été observé qu'il existe des mécanismes bien précis pour matérialiser la protection de ces droits dans la pratique. À travers ces textes et actions, il est irréfutable que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun est effective, néanmoins, pas de façon absolue. L'absolutisme de cette protection ne peut pas être affirmé eu égard à la présence de certains vices qui la gangrènent dans sa

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mise en exergue. Il est donc nécessaire à présent d'évoquer ces différents maux et de présenter quelques réformes pour limiter, voire éradiquer leur influence sur la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

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DEUXIÈME PARTIE : LA PROTECTION LACUNAIRE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

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Dans la première partie de ce travail, nous avons présenté les mesures prises par le gouvernement camerounais afin de garantir une protection satisfaisante des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il serait toutefois fallacieux pour celui-ci de prétendre à une protection absolue de ces droits. Il existe quelques irrégularités dans la pratique qui empêchent une protection optimale des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ces mesures ne restent toutefois pas irrémédiables. Pour cette raison, après avoir présenté les lacunes relatives à la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Chapitre I), il sera judicieux d'énoncer les réformes envisageables pour les éradiquer (Chapitre II).

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CHAPITRE I : LES LACUNES GANGRÉNANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Il a été vu dans la première partie de ce travail que les expropriations pour cause d'utilité publiques sont des activités transversales, qui touchent plusieurs domaines d'activités au Cameroun. C'est aussi pour cela qu'on constate des bémols de divers natures dans la mise en oeuvre des droits des victimes en la matière. Dans le cadre de ce travail, nous avons concentré nos recherches sur les limites juridiques (Section I) et les limites sociologiques (Section II) qui minent la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

SECTION I : LES LIMITES JURIDIQUES FRAGILISANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Les limites juridiques dont il est question ici concernent les éléments présents ou omis dans les textes qui fragilisent la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Objectivement, nous avons pu relever des limites textuelles (Paragraphe I) et des limites juridictionnelles (Paragraphe II) en la matière.

PARAGRAPHE I : LES LIMITES TEXTUELLES RÉDUISANT L'EFFECTIVITÉ DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Le calcul de la mercuriale terrestre constitue un véritable obstacle au paiement des indemnités liées aux expropriations pour cause d'utilité publique149 (A). Dans une autre mesure, on observe que les délais en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique ne sont généralement pas en la faveur des victimes expropriées (B).

149 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021.

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A - L'obsolescence des mercuriales en matière d'indemnisation

Au fil du temps, les zones vivables au Cameroun deviennent de plus en plus modernes et luxueuses, surtout dans les espaces urbains. Le Président de la République, S.E Paul BIYA, est le premier protagoniste de cet avancement en modernité avec la mise en oeuvre de divers projets structurants 150 . Cela s'est fait à travers l'adoption de diverses politiques de développement151, ce qui a permis au Cameroun d'accroître son offre d'infrastructures depuis l'année 2000. A ces politiques se sont ajoutées des diverses stratégies afin de prétendre à une l'émergence à l'horizon 2035. Ces stratégies ont d'abord été consacrées par l'adoption d'un texte appelé Document Stratégique pour la Croissance et l'Emploi (DSCE) en 2010152 pour la période allant de 2010 à 2020. Le DSCE était fondé sur le développement et la modernisation des infrastructures, le développement humain, l'intégration régionale et le financement de l'économie153. Arrivé au terme de sa période d'exercice, ledit document a été remplacé par la Stratégie Nationale de développement (SND30), toujours pour une période de dix (10) ans, soit, de 2020 à 2030. Toutes ces différentes démarches ont pour conséquence d'augmenter le rythme de développement sur l'étendue du territoire camerounais, surtout en zone urbaine.

Avec cet avancement dans le développement, les cours des terres augmentent parallèlement. Il y'a 10 ans, si une zone qui était pratiquement invivable devient de plus en plus moderne et sécurisé, il est évident que cette zone sera beaucoup plus convoitée, ce qui augmentera son coût sur le marché foncier. Toutefois, les textes ne prévoient pas cette évolution en la matière. Selon Samuel ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, la mercuriale des terres est aujourd'hui « anachronique », au regard de la hausse de la demande de ces terres aujourd'hui154.

En effet, la commission d'évaluation et de constat se base sur les textes prévus par la législation en vigueur pour négocier le montant des indemnisations avec les populations concernées. En l'espèce, pour l'indemnisation des terrains, la Loi de 1985 prévoit que « l'indemnisation des terrains nus et non viabilisés est faite selon les modalités ci-après : (1)

150 Ils sont appréhendés comme des projets de grande envergure qui ont pour objectif d'accroître le rythme de développement d'un pays.

151 Notamment les politiques de grandes ambitions entre 2004 et 2011, les politiques de grandes réalisations entre 2011 et 2018 et depuis lors, les politiques de grandes opportunités.

152 Document qui aménage la première phase du projet d'émergence visé par le Cameroun à l'horizon 2035

153 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 24.

154 P. 128 Ibid.

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lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une détention coutumière ayant donné lieu à l'obtention d'un titre foncier, l'indemnité ne peut dépasser le taux minimum officiel des terrains domaniaux non viabilisés. (2) lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une transaction normale de droit commun ou d'une acquisition des terrains domaniaux, l'indemnité due est égale au prix d'achat, majoré des frais divers d'acquisition ».155 Au sens de cette disposition, les indemnisations calculées pour les terrains vierges sont obtenues au prix d'achat qui comprend tous les frais d'acquisition d'un terrain. Cela paraît relativement absurde dans la mesure où l'indemnité reçue aujourd'hui ne reflèterait en aucun cas sa valeur actuelle sur le marché, eu égard aux avancements en termes de développement. Il sera donc difficile, voire impossible pour une victime de s'installer sur un autre terrain de la même valeur aujourd'hui avec indemnisation qui est dix fois moins que ce qui lui est demandé156.

Dans la même veine, les terrains aujourd'hui sont largement plus coûteux que les tarifs fixés par la Circulaire ministérielle de 1994157. C'est aussi le cas pour le Décret de 2003 qui fixe les indemnités dues aux cultures et arbres cultivés expropriés158. Aujourd'hui, les cours des ressources agricoles ont triplés, surtout avec la récente pandémie de COVID-19. Lors de cette pandémie, toutes les activités économiques et commerciales étaient en stand-by, ce qui faisait les activités en général et les activités agricoles en particulier, très difficiles à cause d'un arrêt de production de ressources liées à ces activités, ce qui rendait les frais d'agriculture très couteux dans la pratique. Pour cette raison, il est incompréhensible qu'aujourd'hui, les cultures de jeunes cotonniers soient indemnisées à FCFA 100 (cent)/pied159, pourtant il faudrait beaucoup plus que ça pour qu'un agriculteur produise cette ressource par saison. Cela fragilise énormément le droit à l'indemnité dû aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Une obscurité juridique160 peut aussi est observée dans la loi de 1985 quand elle dispose que « la valeur des constructions et des autres mises en valeur est déterminée par la

155 Article 9 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

156 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 129.

157 Circulaire n°0001 du 22 mars 1994 du Vice-Premier Ministre chargé de l'urbanisme et de l'habitat fixant les prix minima de vente des terrains domaniaux.

158 Décret n° 2003/418/PM du 25 février 2003 fixant les tarifs des indemnités à allouer au propriétaire victime de destruction pour cause d'utilité publique des cultures et d'arbres cultivés.

159 Article 1(V) Ibid

160 Paul FORIERS, les lacunes du Droit, Journal Article, Avril 1967, www.jstor.org .

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commission de constat et d'évaluation »161. Par cette disposition, rien ne précise sur quelle base la Commission d'évaluation et de constat devrait se baser pour déterminer la valeur d'une construction expropriée pour cause d'utilité publique. Au demeurant, Samuel ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA décrient cela en précisant les lamentations de la population expropriée à Kribi quand ils établissent que « la commission utilisait 1500 FCFA et 2000 FCFA pour les indemnisations »162.

Il apparaît dès lors que l'anachronisme des textes relatifs aux expropriations pour cause d'utilité publique en vigueur au Cameroun, fragilise énormément les droits des victimes des ces procédures. Cela n'est cependant que la partie submergée de l'iceberg, vu les délais qui ne sont pas en la faveur des victimes en la matière.

B - Le caractère expéditif des délais en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun

Pour Maurice KAMTO, le délai est un élément sacro-saint en Droit administratif procédural163. Pour cette raison, peu importe leur quintessence, les parties concernées dans un contentieux administratif quelconque, sont dans l'obligation de les respecter sous peine d'être frappées par les conséquences prévues par la réglementation en vigueur.

En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, eu égard à son caractère administratif, les délais sont tout aussi importants. Toutefois, on constate que les délais consacrés ne sont pas en la faveur des victimes de telles expropriations et ce, à plusieurs reprises. Tout d'abord, le délai prévu pour le déguerpissement des victimes frappées d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun est relativement d'une très courte durée. La loi de 1985 prévoit que « un préavis de six mois à compter de la date de publication du décret d'expropriation, est donné aux victimes pour libérer les lieux. Ce délai est de trois mois en cas d'urgence »164. De nos jours, il n'est pas du tout évident de trouver un terrain en zone urbaine à un prix raisonnable pour le citoyen lambda. En plus de cela, si une victime n'a

161 Article 10 alinéa 2 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

162 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 129.

163 Maurice KAMTO, Droit administratif processuel du Cameroun, Yaoundé, Presses universitaires du Cameroun, 1990.

164 Article 4 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

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que les indemnisations qui lui sont reversées par la personne morale de Droit Public expropriatrice, cette tâche sera encore moins évidente. Alors, dire qu'une personne ne dispose que d'un délai de six (06) mois pour trouver un terrain approprié et en plus lancer des travaux de construction pour y vivre, est totalement injustifiable. Pire encore, si l'expropriation est marquée du sceau de l'urgence, alors, la victime ne disposera que de trois (03) mois pour effectuer toutes ces démarches. Ceci est logiquement impossible.

Si l'on appréhende cela d'une autre manière, en supposant que la victime pourra d'abord recourir à la location d'un espace d'habitation, ces délais demeurent tout aussi très brefs et insuffisants. Cela s'explique par le fait qu'avant d'entrer en location, la plupart, sinon, la totalité des bailleurs exigent le paiement d'un acompte sur loyer. Cet acompte oscille pour la plupart entre six (06) et douze (12) mois. On constate alors qu'il est impossible pour une victime de payer l'équivalent d'un loyer de six mois dans le délai prévu par la Loi de 1985 (en supposant qu'une bonne partie des délais se serait déjà écoulée pour trouver un espace correspondant au standing de l'exproprié) et en même temps payer pour l'achat d'un terrain et des constructions y afférentes avec le montant insignifiant des indemnisations qui lui serait remis. Cette disposition sur les délais de déguerpissement ne favorise alors en aucun cas les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Les délais sont aussi préjudiciables pour ces victimes quand il s'agit de contestation du montant des indemnités prévu par la réglementation en vigueur. La loi de 1985 précise à ce sujet que « 1- En cas de contestation sur le montant des indemnités, l'exproprié adresse sa réclamation à l'administration chargée des domaines. 2- S'il n'obtient pas satisfaction, il saisit un délai d'un mois, à compter de la date de notification de la décision contestée, le Tribunal judiciaire compétent du lieu de situation de l'immeuble. 3- Conformément à la procédure et sous réserve des voies de recours de droit communs, le tribunal confirme, réduit ou augmente le montant de l'indemnité suivant les modalités d'évaluation fixées dans la présente loi et ses textes d'application. »165 Deux principaux bémols peuvent être déduits de cette disposition. Tout d'abord, il ne précise pas en combien de temps l'administration en charge des domaines devrait vider sa saisine, afin de potentiellement déduire un silence rejet166. Ainsi, la victime ne saurait exactement à quel moment saisir le juge compétent pour contester le montant d'indemnisation, si l'administration chargée des Domaines retarde son

165 Article 12 Ibid.

166 Joseph OWONA, Le Contentieux Administratif de la République du Cameroun, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005, Paris, l'Harmattan, 2011.

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délibéré. Ensuite, le délai d'un mois prévu en cas de réaction de la part de l'administration concernée pour saisir le juge judiciaire est relativement court. Durant cette période, la victime devra rassembler le plus d'éléments possibles pour pouvoir saisir le juge, dans l'optique d'obtenir gain de cause. Malencontreusement, ce laps de temps est relativement court pour rassembler le plus d'éléments nécessaires en la matière.

Dans la même dynamique, les délais accordés à l'administration expropriatrice pour débuter les travaux de construction sur la zone expropriée agissent en la défaveur de la victime. Le Décret de 1987 prévoit que « L'Arrêté de déclaration d'utilité publique devient caduc si, dans un délai de 2 (deux) ans à compter de la date de sa notification au service ou organisme bénéficiaire, il n'est pas suivi d'expropriation effective. Toutefois, sa validité peut être prorogée une seule fois par arrêté du Ministre chargé des Domaines pour une durée n'excédant pas (1) an... »167. Il est insoutenable que pendant que les victimes expropriées ne disposent que de six mois pour déguerpir, la personne morale de Droit Public expropriatrice a jusqu'à deux (2) ans pour débuter les travaux de construction sur le domaine exproprié. Cela veut aussi dire que les victimes ne peuvent pas avant deux ans saisir les juridictions compétentes pour caducité du décret d'expropriation pour cause d'utilité publique. Cela démontre à suffisance le caractère puissant de l'administration face aux populations vulnérables.

Ces délais il faudrait le dire, affaiblissent énormément les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. C'est aussi de cette manière que les institutions juridictionnelles ne facilitent pas toujours les vies des populations victimes d'expropriations de cette nature.

PARAGRAPHE II : LES LIMITES JURIDICTIONNELLES RÉDUISANT L'EFFECTIVITÉ DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Les limites juridictionnelles dont il est question ici concernent les failles relatives au système juridictionnel au Cameroun, qui a pour compétence d'entendre les litiges liés aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Dans ce type de litige, on y retrouve des traces du contentieux administratif qui revêt de plusieurs complexités que les

167 Article 13 du Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

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requérants ont souvent de la peine à cerner (A). On constate aussi que l'accès à la justice au Cameroun ne facilite pas aussi la tâche au requérant en matière de contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun (B).

A - La complexité du contentieux administratif au Cameroun

Le contentieux administratif au Cameroun est une procédure nouvelle dans le système juridictionnel camerounais. Il a été observé plus haut que le juge administratif est compétent dans un certain nombre de domaine du Contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ainsi, la procédure complexe du Contentieux administratif impacte sérieusement celui des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Le préalable à la saisine du juge administratif est la saisine de l'autorité accusée d'avoir posé un acte illégal à travers le « recours gracieux préalable ». La loi de 2006 régissant les tribunaux administratifs dispose à ce sujet que « Le recours devant le tribunal administratif n'est recevable qu'après rejet d'un recours gracieux adressé à l'autorité auteur de l'acte attaqué ou à celle statutairement habilitée à représenter la collectivité publique ou l'établissement public en cause. »168. Le recours gracieux, communément appelé Recours Gracieux Préalable (RGP), apparaît comme une condition sine qua non pour pouvoir saisir la juridiction administrative compétente en la matière.

La contestation pour excès de pouvoir du Décret portant expropriation pour cause d'utilité publique d'un domaine ou encore de l'Arrêté déclarant d'utilité les travaux de construction doivent respecter la procédure prévue par la réglementation en vigueur. La plupart des requérants considèrent les procédures dans ce type de contentieux assez complexes, ce qui pourrait les décourager à engager des procédures contentieuses, afin que justice leur soit rendue. Le recours gracieux préalable est une reprise des dispositions française en matière de contentieux administratif169. Son application a toujours été critiquée par les acteurs de ce type de contentieux. Ils ne trouvent pas la nécessité de saisir l'administration qui a pris un acte potentiellement illégal, alors qu'ils peuvent directement

168 Article 17 alinéa 1 de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 portant organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs au Cameroun.

169 Article 12 de l'ordonnance n° 72/06 du 26 août 1972

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saisir la juridiction compétente. Pour Maurice KAMTO, le RGP est considéré comme un « véritable casse-tête »170.

Dès lors, le Contentieux administratif comprend des subtilités qui gangrènent à certains égards la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Dans une autre mesure, l'accès à la justice au Cameroun réduit aussi l'effectivité de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

B - Le difficile accès à la justice au Cameroun

L'accès à la Justice au Comprend quelques particularités qui ne permet pas toujours aux populations de l'atteindre. Cela réduit la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. L'accès à la justice administrative au Cameroun est difficile pour plusieurs raisons, dont les plus préoccupantes ont été retenues dans ce travail.

Tout d'abord, nous avons relevé l'insuffisance des tribunaux administratifs au Cameroun. La loi de 2006 régissant les tribunaux administratifs au Cameroun dispose que « i1 est créé un tribunal administratif par région. Son siège est fixé au chef-lieu de ladite région. »171. On constate qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, il existe tellement de contentieux. Les populations expropriées désirant saisir le juge administratif après le RGP ne peuvent que le faire dans l'unique tribunal administratif situé dans la région de l'emplacement géographique du domaine exproprié. Cela se présente comme un réel supplice pour les populations de se rendre à cette institution juridictionnelle pour que justice leur soit rendue. Dans la plupart des cas, les personnes expropriées sont des propriétaires terriens résidant dans des zones vraiment reculées et enclavées. Elles sont dans l'obligation de quitter ces zones pour le tribunal administratif compétent en bravant parfois des centaines de kilomètres, sur des routes qui ne sont pas généralement en très bonnes formes. Il se pose donc le problème de la distance entre le lieu de résidence du requérant et l'emplacement géographique du tribunal administratif compétent en matière de constatation d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun.

170 M.KAMTO, « Droit administratif processuel du Cameroun », Yaoundé, Presses universitaires du Cameroun, 1990, pp. 39.

171 Article 5 alinéa 1 de la Loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 portant organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs au Cameroun

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Ensuite nous avons aussi relevé le coût de la justice au Cameroun, qui n'est pas à la portée de tous. En règle générale, la justice au Cameroun est rendue en toute gratuité172. Toutefois, cela ne concerne que les frais qui pourraient être déboursés pour payer les juges. On constate dans la pratique qu'il existe énormément de frais accessoires aux procédures juridictionnelles qui sont à la charge du requérant. Delphine BARDOU distingue de divers frais en la matière. Il s'agit des frais d'huissier, les honoraires des avocats à payer, les timbres, l'indemnisation des témoins, les émoluments, les frais d'expertise et d'enquêtes. On peut même y ajouter, le cas échéant, les coûts de déplacement au procès et les frais d'hébergement, en cas de descente sur le terrain173. Tous ces frais sont à la charge du requérant, malgré que ces sommes lui seraient reversées en cas de gain de cause.

Selon la Stratégie Nationale de Développement 2030 (SND30), le taux de pauvreté au Cameroun est estimé à 37,5 % et le taux de sous-emploi est évalué à 77%174. Ces taux très élevés démontrent à suffisance le pouvoir pécuniaire de la population camerounaise. Il est donc difficile pour ces populations expropriées qui font déjà face à de nombreux coûts de la vie, d'envisager de quelconques actions en justice où ils devront payer tous ces frais accessoires aux procédures juridictionnelles. Cela a tendance à limiter en réalité les droits dont les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun auraient pu bénéficier.

Il est reconnaissable à ce stade que les efforts juridiques fournis par le gouvernement camerounais pour protéger les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun demeurent insuffisantes. Cette protection est aussi mitigée à cause de diverses entraves sociologiques qu'il est nécessaire d'évoquer ici.

SECTION II : LES LIMITES SOCIOLOGIQUES GANGRENANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Les limites sociologiques ici sont ceux qui ne sont pas directement liés à la réglementation concernant les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Le

172 La loi n° 2009/004 portant organisation de l'assistance judiciaire

173 Delphine BARDOU, quelle prise en charge des frais de justice par l'assurance protection justice ?21 avril 2022, www.reassurez-moi.fr .

174 Stratégie Nationale de Développement 2020-2030, p. 42

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constat est fait que les textes et les institutions juridiques à eux seuls ne sont pas les uniques responsables de la fébrilité de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Nous avons relevé de nombreuses pesanteurs extra juridiques qui peuvent être imputables à la fois à l'administration publique expropriatrice (Paragraphe I) et les victimes des expropriations elles-mêmes (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LES PESANTEURS SOCIOLOGIQUES IMPUTABLES A L'ADMINISTRATION PUBLIQUE EXPROPRIATRICE AU CAMEROUN

L'administration publique camerounaise, comme tout autre service public dans le monde, est régie par les lois Rolland175. Pour cette raison, elle doit faire preuve de beaucoup de tact quand elle mène ses activités au quotidien, surtout en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il est alors déplorable que de manière générale, on constate un niveau inquiétant de mauvaise gouvernance, dans la gérance de ses affaires courantes. Cette mauvaise gouvernance laisse malencontreusement aussi des traces dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun (A). Le système administratif camerounais qui est à l'image du système bureaucratique moderne176 comprend toutes ses caractéristiques néfastes qui se retrouvent dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique (B).

A - La mauvaise gouvernance par l'administration publique expropriatrice

La bonne gouvernance voudrait que l'administration publique régisse la population inféodée à sa personne de manière objective et désintéressée. Ceci est applicable aussi aux procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique. Toutefois, on retrouve parfois des différentes formes de mauvaise gouvernance dans les procédures relatives aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

175 Principes Traditionnels du Service Public établis par Louis ROLLAND. Il s'agit de l'égalité, l'adaptabilité et la continuité du service public.

176 Consacré par Max WEBER, il est considéré comme une organisation où les individus sont libres et soumis à une autorité dans le cadre de leur fonction. Ils sont organisés selon une hiérarchie définie et est considéré comme un système excessivement structuré, abusivement hiérarchique, rigide, autoritaire et inflexibles. www.cloudfront.net .

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Tout d'abord, c'est avec beaucoup d'amertume que nous avons constaté le niveau élevé de corruption qui sévit dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ceci se traduit à travers la corruption des autorités traditionnelles d'une zone par l'administration publique expropriatrice177. Les autorités traditionnelles sont les personnes habilitées à délimiter les domaines à exproprier et de signifier à la Commission d'évaluation et de constat à qui ils appartiennent. On observe parfois que pour des raisons non conventionnelles, l'administration expropriatrice concernée approche ces chefs traditionnels en leur proposant des dessous de table178 pour qu'ils puissent délimiter les terres en la faveur de l'administration 179 . Cette pratique indécente fragilise énormément la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, ce qui est en la défaveur des victimes concernées.

On constate aussi, une atteinte grave à la fortune publique avec des cas de détournement des fonds alloués d'une part aux projets de construction sur le domaine exproprié et d'autre part, aux indemnisations pour les expropriations occasionnées. Ceci est assimilé à une atteinte grave à la fortune publique, réprimée par le Code Pénal camerounais qui prévoit que « (1) Quiconque, par quelque moyen que ce soit, obtient ou retient frauduleusement quelque bien que ce soit, mobilier ou immobilier, appartenant, destiné ou confié à l'Etat unifié, à une coopérative, collectivité ou établissement, ou publics ou soumis à la tutelle administrative de l'Etat ou dont l'Etat détient directement ou indirectement la majorité du capital, est puni : a) au cas où la valeur de ces biens excède cinq cent mille (500 000) francs, d'un emprisonnement à vie ; b) au cas où cette valeur est supérieure à cent mille (100 000) francs et inférieure ou égale à cinq cent mille (500 000) francs d'un emprisonnement de quinze (15) à vingt (20) ans; c) au cas où cette valeur est égale ou inférieure à cent mille (100 000) francs, d'un emprisonnement de cinq (05) à dix (10) ans et d'une amende de cinquante mille (50 000) francs à cinq cent mille (500 000) francs. (2) Les peines édictées ci-dessus ne peuvent être réduites, par admission de circonstances atténuantes, respectivement au-dessous de dix (10), cinq (05) ou de deux (02) ans et le sursis ne peut en aucun cas être accordé. : (3). Dans les cas prévus à l'article 87 (2) du présent

177 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 136-137.

178 Euphémisme pour désigner la pratique de la corruption.

179 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 127.

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Code, le minimum de la peine est respectivement de cinq (05) ans, de deux (02) ans et d'un (01) an et le sursis ne peut être accordé, sauf excuse atténuante de minorité ; (4). La confiscation prévue à l'Article 35 du présent Code est obligatoirement prononcée, ainsi que les déchéances de l'Article 30 ci-dessus, pendant cinq (05) ans au moins et dix (10) ans au plus. (5). La publication de la décision doit être ordonnée. (6) Le présent article n'est pas applicable aux détournements ou recels d'effets militaires visés au Code de justice militaire. »180.

Ces différentes pratiques clientélistes ne font que réduire l'effectivité des droits dévolus aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique. Le caractère bureaucratique de l'administration publique camerounaise fragilise aussi à certains égards les droits des victimes en l'espèce.

B - Les caractéristiques néfastes du système bureaucratique dans l'administration camerounaise

Selon Max WEBER, Michel CROZIER ou encore Robert KING MERTON, la bureaucratique est l'idéal type pour toutes les administrations d'ordre légal, poursuivants des objectifs sur le long terme. Selon WEBER, le système bureaucratique moderne repose sur trois (03) caractéristiques principales : l'hypercentralisation, l'hyperformalisme et la hiérarchisation du personnel.

En matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, force est de constater que l'hypercentralisation est à l'ordre du jour. La principale administration concernée ici est le Ministère chargé des Domaines, qui reçoit les demandes de travaux d'utilité publique181, prend l'Arrêté déclarant d'utilité publique le projet des travaux sur le domaine à exproprier182 et est à l'origine des travaux d'enquêtes de la commission d'évaluation et de constat. On constate là une concentration de tâches sur une seule autorité, en la personne du Ministre en charge des Domaines. Pour cela, la marge d'erreur est assez dense, ce qui, à un moment donné pourrait jouer en la défaveur des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

180 Article 184 de la loi n° 2016/007 du 12 juillet 2016 portant code pénal

181 Article 2 du décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985. Op cit.

182 Article 3 Ibid.

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Dans la même veine, il est observé la hiérarchisation stricte comprise dans le système bureaucratique est aussi comprise dans l'administration en charge des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ce rapport hiérarchique est constaté entre le Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières et la Commission d'évaluation et de Constat, qui sont tous les deux assujettis au Premier Ministre. C'est ce dernier qui a pour rôle de prendre le Décret portant expropriation pour Cause d'utilité publique. Avant cela, les deux précédentes autorités subissent une pression indirecte en voulant satisfaire convenablement les attentes de leur supérieur hiérarchique. Il faudrait rappeler que le Premier Ministre qui prend le Décret est lui aussi sous la tutelle du Président de la République qui doit valider ledit Décret portant expropriation avant son entrée en vigueur183.

On observe que tous ces rapports hiérarchiques obligent les différents membres de l'administration à plus de prudence et de pragmatisme, ce qui n'est pas évident, avec la pression de vouloir impressionner son supérieur hiérarchique. Au demeurant, Merton disait jadis « Nous avons vu que la structure bureaucratique, exerçant une pression constante sur le fonctionnaire, l'oblige à être méthodique, prudent et discipliné. Dans une véritable bureaucratie, on est donc en présence d'une grande régularité de comportement et d'un haut degré de conformité aux types d'actions prescrits. Il s'ensuit qu'on donne une importance fondamentale à la discipline, aussi développée dans une bureaucratie religieuse ou économique que dans l'armée » 184. Sur cette base, la bureaucratie apparaît comme une sorte de main de fer dans un gant de velours185.

Dès lors, le système bureaucratique très souvent vanté par les bureaucraties modernes est cerné en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique comme un loup déguisé en agneau.

L'administration publique expropriatrice partage néanmoins sa faute avec les populations expropriées dans le cas d'espèce.

183 Article 2 alinéa 2 du Décret n° 92/089 du 04 mai 1992 portant attributions du Premier Ministre. Op cit.

184 Robert KING MERTON, Eléments de théorie et de méthode sociologique, 1965.

185 « Il faut pour gouverner les français une main de fer recouverte d'un gant de velours », Bernadotte

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PARAGRAPHE II : LES PESANTEURS SOCIOLOGIQUES IMPUTABLES AUX VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

A la lecture de ce paragraphe, cela pourrait sembler paradoxal que les personnes pour qui le présent travail de recherche a été consacré, sont à l'origine de leurs propres turpitudes. Cela est pourtant vrai dans la pratique, eu égard à la densité d'analphabétisme qui leur est propre (A) d'une part et d'autre part, leur réticence à se conformer à la réglementation foncière au Cameroun (B).

A - L'analphabétisme des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

Comme il a été évoqué plus tôt dans ce travail, une bonne partie des personnes expropriées au Cameroun sont des autochtones de leurs domaines respectifs. Alors, il n'a pas été évident pour ceux-ci de suivre une formation académique digne de ce nom, qui aurait pu les aider aujourd'hui, surtout en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Au demeurant, la SND30 dispose que l'indice de Capital humain186 s'élève à 0,39 187 . Alors, on comprend rapidement que plus de la moyenne de la population camerounaise n'est pas intellectuellement assise.

Avant de procéder aux différentes procédures liées aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, il serait d'abord question de les comprendre. Cela présente une difficulté déconcertante dans la mesure où les populations ne sont pas investies de l'intellect requis pour cerner comme il se doit les textes régissant les expropriations et les modalités d'indemnisation.

Les riverains qui sont expropriés ne sont généralement pas au parfum des différentes procédures existantes relatives à ce type de procédure. Parfois, même quand ils le sont, ils éprouvent une certaine difficulté à interpréter les dispositions y afférentes, ce qui les rend totalement vulnérables devant l'administration expropriatrice. Ainsi, ils ne sont parfois pas

186 Selon Gary BECKER et Theodore SCHULTZ le Capital humain est largement compris comme l'ensemble des capacités à produire d'un Homme.

187 Stratégie Nationale de Développement 2020-2030, p. 42

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indemnisés pour les expropriations engendrées. Dans l'hypothèse où ils le sont, il est difficile que ce soit en conformité avec ce que les textes prévoient.

Aussi les différentes étapes de la procédure sont parfois bafouées quand l'administration concernée constate que les victimes ne maîtrisent pas réellement la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique en Droit camerounais. La limitation intellectuelle une fois de plus, des populations les laisse à la merci de l'Etat. Aussi, les populations sont-elles ignorantes de certaines dispositions juridiques188.

Il faudrait aussi noter que c'est cet analphabétisme qui fait en sorte que les populations craignent autant l'Etat. Ainsi, plus les populations craignent l'Etat, moins elles auront la volonté de dénoncer ses actes illégaux.

Il sied de maintenant présenter le refus de la population de se conformer à la réglementation foncière au Cameroun.

B - La non-conformité des populations expropriées à la règlementation domaniale au Cameroun

Il existe de nombreux textes qui encadrent le domaine foncier et domanial au Cameroun. Ces textes ont été mis en place afin de garantir une sécurité juridique certaine à la population camerounaise. Cette dernière est donc tenue de se conformer à celle-ci dans l'exploitation des immeubles domaniaux au Cameroun.

Une des conditions sine qua non pour bénéficier des indemnisations suites aux expropriations est la possession d'un droit de propriété sur le terrain exproprié. À travers l'Ordonnance de 74 sur le régime foncier, l'unique document faisant foi de titre de propriété foncière à partir du 06 juillet 1974, est le titre foncier. L'Ordonnance n° 74-1 prévoit à ce titre que « Les titulaires de jugements définitifs constitutifs ou translatifs des droits sur terrains en milieu urbain doivent également sous peine de déchéance, en saisir le service des domaines compétent dans un délai de dix ans à compter du 15 août 1974, date de publication de l'Ordonnance n°1 du 6 juillet 1974, en vue d'obtenir leur transformation en titres fonciers ; ledit délai est porté à 15 ans pour les terrains en milieu rural. Toutefois, lorsque ces jugements portent sur des immeubles habités par des occupants de bonne foi, ceux-ci

188 Samuel-Béni ELLA ELLA, Fidélie MENDOUGA et Pierre NKOU ABINA, Sociologie critique des indemnisations au Cameroun, Cas de Lom Pangar, Mekin et Kribi, 5-7, rue de l'Ecole-Polytechnique, 75005 Paris, l'Harmattan, 2021. p. 140..

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jouissent en cas de vente desdits immeubles d'un droit de préférence qui n'exerce dans le cadre de l'aménagement de la zone concernée. Tous les litiges fonciers pendants devant les juridictions et introduits en dehors de la procédure de l'immatriculation sont de la compétence des commissions prévues à l'article 16 ci-dessous. Les dossiers y relatifs sont transférés à ces commissions dès l'entrée en vigueur de la présente ordonnance. »189. Avec cette disposition, tous les précédents titres relatifs aux terres (certificate of occupancy, jugements définitifs constitutifs ou translatifs) sont abrogés, pour l'entrée en vigueur du titre foncier.

Nous avons constaté qu'aujourd'hui certains autochtones prétendent toujours à une propriété coutumière sans titre foncier. Cela rendra leur indemnisation impossible en cas d'expropriation pour cause d'utilité. Ceci parce qu'il est impossible, au sens de la loi de déterminer la propriété d'un terrain, sans titre foncier.

Aussi, une autre condition aménagée pour pouvoir bénéficier aux indemnisations et le respect du plan d'urbanisme par la construction. A ce titre, la loi de 1985 dispose que « Il n'est dû aucune indemnité pour destruction des constructions vétustes ou menaçant ruines ou de celles réalisées en infraction aux règles d'urbanisme ou aux dispositions législatives ou règlementaires fixant le régime foncier. »190. L'on peut aussi relever de cette disposition que les constructions doivent être solides et ne pas être de caractère à menacer l'intégrité physique de son entourage.

Dans le régime Anglo-Saxon, il est dit « he who comes to equity must come with clean hands »191. Cela voudrait impliquer qu'en recherchant la justice, il faudrait être irréprochable. Les populations qui ne se conforment donc pas à la législation encadrant le régime foncier et domanial au Cameroun, fragilisent eux-mêmes les droits qui leur sont dévolus par les textes en vigueur, en la matière.

A ce stade, il est clair que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique connaît quelques défaillances. Cependant, il serait d'une aberration des plus fallacieuses de dire que ces défaillances sont irrémédiables. Il convient donc de présenter les réformes envisageables pour palier à ces limites.

189 Article 5 de l'Ordonnance n° 74-1 du 06 juillet 1974 fixant le régime foncier au Cameroun.

190 Article 10 alinéa 3 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation. Op cit.

191 Signifiant « Quiconque recherche l'équité, doit avoir les mains propres ».

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CHAPITRE II : LES MESURES PALLIATIVES POUR UNE PROTECTION OPTIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

L'expropriation pour cause d'utilité publique comme il a été vu, revêt d'une complexité sans pareille, qui a tendance à limiter les droits des victimes en la matière. Ce n'est pas pour autant que les acteurs concernés par cette procédure devraient rester sans agir. Il faudrait que des mesures fermes soient prises afin d'éliminer toutes les pesanteurs qui gravitent autour de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Pour ce faire, un effort considérable devra être fourni par tous les acteurs concernés de près ou de loin par cette procédure. C'est pour cette raison que dans ce travail, nous proposerons des mesures pouvant être prises à la fois par l'Etat (Section I) et la population camerounaise (Section II) afin d'éliminer tous ces vices, sinon, une bonne partie.

SECTION I : L'APPORT DE L'ETAT CAMEROUNAIS AU RENFORCEMENT DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ AU CAMEROUN

Afin de renforcer la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, l'Etat camerounais devrait prendre en comptes des mesures pour sensibiliser la population sur les implications du régime foncier au Cameroun (Paragraphe l). Dans ce même sillage, l'Etat devrait aussi réaménager les fondements et les institutions relatifs aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Paragraphe II).

PARAGRAPHE I : LA SENSIBILISATION DE LA POPULATION SUR LES IMPLICATIONS DU RÉGIME FONCIER AU CAMEROUN

Le constat a été fait qu'une bonne partie de la population n'est pas au parfum des enjeux du régime foncier au Cameroun. Les textes régissant les expropriations pour cause

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d'utilité publique 192 ne sont pas connus et les procédures sont difficiles à cerner par les populations en cas de contentieux. Pour cela, l'Etat devra organiser des séminaires sur l'importance de se conformer à la législation en vigueur d'une part (A) et d'autre part, des ateliers de formation sur les procédures à suivre en cas de contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique (B).

A - L'organisation de séminaires d'information sur l'importance de se conformer à la législation foncière au Cameroun

La législation foncière est tellement vaste au Cameroun qu'il est difficile de la cerner totalement dans les détails. Cela ne voudrait pas dire que les populations ne devraient pas être au parfum de cette législation. L'Etat devrait donc organiser ces séminaires avec les propriétaires terriens afin qu'ils soient en marge avec les dispositions législatives foncières.

Ces séminaires d'information auront premièrement pour objectif d'informer les populations sur le caractère indispensable du titre foncier. Il existe tout un texte qui fixe les conditions d'obtention d'un titre foncier au Cameroun193. Les populations doivent savoir que c'est uniquement sur ce texte qu'ils doivent se conformer pour avoir un titre foncier légitime au Cameroun. Il faudrait rappeler qu'une des conditions pour bénéficier des indemnisations suites aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun est d'exercer un droit de propriété sur le domaine exproprié à travers la présentation d'un titre foncier en son nom. Les populations seront donc au parfum de cette information, ce qui les poussera à engager des procédures d'obtention de titre foncier. Ceci leur sera extrêmement bénéfique en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique sur leurs domaines.

Aussi, ces séminaires auront pour vocation de sensibiliser la population sur la nécessité de respecter les plans d'urbanisme mis en place dans leur législation. Il a été vu dans ce travail qu'afin de ne pas être reconnu incompétent pour recevoir les indemnisations suites aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, les propriétaires terriens doivent faire en sortes de construire en conformité avec le plan d'urbanisme de leur localité. A ce titre, les séminaires soumettraient à la consultation de la population, la loi régissant

192 Loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation, son décret d'application n° 87/1872 du 16 décembre 1987 et les Ordonnances du 06 juillet 1974 sur le régime foncier et domanial.

193 Décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, complété par le Décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier.

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l'urbanisme au Cameroun194. Grâce à cela, les victimes d'expropriation dans l'avenir seront dans tous leurs droits de recevoir leurs indemnités dues.

Les populations pourront aussi être informées à travers ces séminaires sur les délais prévus en matière d'expropriation pour cause d'utilité. Après les 6 mois donnés aux populations expropriées pour déguerpir195, leur présence sur les domaines expropriés sera assimilée à une atteinte au propriété foncière de l'Etat. Cela est réprimé par la loi de 1980 en la matière qui dispose que « Les sanctions prévues aux articles 2 et 3 ci-dessus sont applicables aux personnes qui, en violation de la législation en vigueur exploitent ou se maintiennent sur une parcelle du domaine privé de l'Etat, ou sur une dépendance du domaine public ou du domaine national. »196. L'article 2 visé par cette disposition précise que « sont passibles d'une amende de 50 000 à 200 000 F et d'un emprisonnement de 2 mois à 3 ans ou d'une de ces peines seulement : a) ceux qui exploitent ou se maintiennent sur un terrain sans autorisation préalable du propriétaire ; b) les agents de l'Etat convaincus de complicité dans les transactions foncières de nature à favoriser l'occupation irrégulière de la propriété d'autrui. ». La lecture de ces dispositions durant ces séminaires dissuaderait les potentielles victimes de ces expropriations à rester sur les parcelles expropriées. Cela sera à leur avantage vu que cela les éviterait d'être frappés de sanctions et pourront pleinement jouir de leurs droits en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique.

A ces séminaires d'information, l'Etat devrait associer des ateliers de formation sur les procédures à suivre en cas de contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

B - L'organisation d'ateliers de formation sur les procédures à suivre en cas de contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun

Nous avons remarqué la complexité du contentieux en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun. Ces ateliers viendront donc former la population sur le comportement qu'elle devrait adopter si jamais elle est victime d'une telle procédure d'expropriation dans l'avenir.

194 Loi n° 2004-003 du 21 avril 2004 régissant l'urbanisme au Cameroun.

195 3 mois pour les cas d'urgence.

196 Article 4 de la loi n° 80-22 du 14 juillet 1980 portant répression des atteintes à la propriété foncière domaniale.

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Dans un premier temps, les ateliers sensibiliseront la population sur l'indispensable nature du recours gracieux préalable197. Il serait dit dans ces ateliers qu'avant de saisir le juge administratif pour constater une expropriation jugée illégale, un décret portant expropriation pour cause d'utilité publique ou encore, un arrêté déclarant d'utilité publique les travaux à entreprendre sur un domaine, le requérant devra saisir l'autorité ayant édicté l'acte jugé illégal.

Ainsi, les victimes des expropriations ne seront pas gênées de voir leurs requêtes devant le juge déclarées irrecevables pour vice de forme, in limine litis.

Dans un second temps, les délais compris dans le contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique seront portés à la connaissance des populations. Devant le juge administratif, les délais sont ceux du contentieux administratif en matière de recours pour excès de pouvoir198. Devant le juge judiciaire, il est prévu un délai d'un mois après le rejet de l'administration en charge des Domaines 199. Grâce à cette formation sur les délais, les demandes des victimes seraient soumises dans les délais, leur évitant tout risque d'irrecevabilité.

Dans un troisième temps, les populations seront entretenues sur les techniques de rédaction des requêtes de saisine du juge du contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Ici, il n'est pas du tout question d'analphabétisme de la population, mais plutôt du caractère spécifique de rédaction d'une requête. En règle générale les requêtes en la matière sont adressées au président du tribunal territorialement et matériellement compétent. La requête comprend au début le nom du tribunal saisi. Il est suivi du nom, prénom et de l'adresse du requérant. Cela est suivi par la précision de contestation de la décision rendue en RGP par l'autorité administrative ayant pris la décision jugée illégale. Dans le corps de la requête, un exposé des faits doit être rédigé, racontant explicitement tous les contours de l'affaire. Après le rappel succinct des faits, le requérant doit préciser le bien-fondé de sa demande en évoquant les textes qui font foi en la matière et les jurisprudences, le cas échéant. A la fin de la requête, la victime doit préciser quelle décision elle attend réellement que la Cour rende dans le cas d'espèce.

197 Article 17 de la loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006 portant organisation et fonctionnement des tribunaux administratifs au Cameroun, op cit.

198 60 jours à compter de la date de rejet explicite ou implicite du RGP, selon l'article 18 alinéa 1 Ibid.

199 Article 12 alinéa 2 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

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Cette requête est finalement visée au pied droit de la dernière page par la date et la signature du requérant. Elle est associée de tous les documents nécessaires à la procédure.

Le constat est rapidement fait que pour une personne n'ayant pas reçu une formation explicite sur les techniques de rédaction d'une telle requête, elle va paraître extrêmement complexe à rédiger. Cet atelier qui serait lancé par l'Etat facilitera donc la tâche aux victimes des expropriations dans leur saisine des tribunaux compétents en la matière.

Ainsi, la sensibilisation de la population sur les implications du régime foncier aiderait énormément les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique dans la préservation des droits dont ils sont dépositaires. Pour que ces victimes soient d'avantage aidées, l'Etat pourrait aussi décider d'actualiser les fondements et les institutions relatifs aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

PARAGRAPHE II : L'ACTUALISATION DES FONDEMENTS ET INSTITUTIONS RELATIFS AUX EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

L'anachronisme des textes en matière d'expropriation a été critiqué par de nombreux auteurs mentionnés dans ce travail. Il faudrait dès lors que ces textes soient révisés (A) afin qu'ils reflètent autant que faire se peut, les réalités contemporaines. L'organisation et le fonctionnement des institutions concernées par les expropriations pour cause d'utilité publique devront aussi être révisés (B) pour atteindre une protection irréprochable des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

A - La Mise à jour de la législation régissant les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

Dans un développement antérieur, il a été observé que les textes ne reflètent pas les réalités financières actuelles. La mercuriale des terres utilisées pour indemniser les victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun n'est pas en marge avec les coûts actuels sur le marché.

Le législateur camerounais pour cette raison, devra réviser la disposition qui stipule que « L'indemnisation des terrains nus et non viabilisés est faite selon les modalités ci- après : 1- Lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une détention coutumière ayant donné lieu à

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l'obtention d'un titre foncier, l'indemnité ne peut dépasser le taux minimum officiel des terrains domaniaux non viabilisée de la localité de situation du titre foncier. 2- Lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une transaction normale de droit commun ou d'une acquisition des terrains domaniaux, l'indemnité due égale au prix d'achat, majoré des divers d'acquisition. » 200 . Cette disposition est injuste pour les populations qui devront être indemnisées pas des sommes ne leur permettant pas de retrouver leur même standing de vie.

Le législateur camerounais devrait donc adopter une disposition qui voudrait que les victimes soient indemnisées à un montant reflétant la valeur actuelle du terrain dans la zone géographique concernée. Pour un début, il pourrait envisager la valeur vénale moyenne du terrain concerné sur les 5 années antérieures à la procédure d'expropriation.

Aussi, le législateur pourrait envisager une indemnité complémentaire au principal de l'indemnisation qui serrait assimilée pour des dommages et intérêts pour le préjudice occasionné aux victimes. Là, les victimes ne seront pas seulement indemnisées à la hauteur de leurs pertes mais aussi en fonction du préjudice qu'ils ont subi.

Dans ce sillage, l'équivoque sur les bases de calcul des constructions expropriées doit aussi être levée. Les textes prévoient que la Commission détermine le montant des constructions expropriées afin d'obtenir le montant d'indemnisation à verser aux victimes201. Le législateur devrait alors prévoir une disposition stipulant que le calcul doit être fait sur la base du devis de construction présenté par l'ingénieur qui a été en charge de construire ledit domaine. Le législateur devrait aussi par mesure de prudence, prévoir une disposition sur l'authentification de ce devis par d'autres ingénieurs, experts en la matière.

Avec l'adoption de ces dispositions, les indemnisations dues aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique reflèteraient d'avantage le coût actuel de la vie.

Les institutions juridictionnelles devraient aussi être réformées afin de mieux protéger les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

200 Article 9 de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative aux expropriations pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation

201 Article 10 alinéa 2 Ibid. op cit.

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B - La réforme des institutions juridictionnelles en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun

Les institutions juridictionnelles sont les modes répressifs de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Leur réforme renforcera cette protection octroyée aux victimes de plusieurs manières cumulatives.

Tout d'abord, il n'est pas du tout évident pour les citoyens résidant dans des zones très enclavées, de se déplacer pour le chef-lieu de leurs régions pour que le juge administratif entende leurs litiges202. Pour cette raison, L'Etat devrait instaurer des tribunaux administratifs dans chaque arrondissement, comme c'est le cas avec les Tribunaux de Première Instance (TPI).

Pour un début, ces tribunaux pourraient être instaurés dans le chef-lieu de chaque département.

Cela facilitera la saisine du juge administratif par les victimes des expropriations pour cause d'utilisation publique pour des motifs liés au contentieux de l'expropriation de cette nature.

Ensuite, la vitesse pour rendre des décisions doit être revue par l'Etat. Cela aura pour conséquence de servir et valoir les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique en toute célérité.

A ce stade, les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique seraient mieux protégés si l'Etat prend en compte les mesures prédisposées.

Quid à présent des réformes envisageables par la population camerounaise ?

SECTION II : LA CONTRIBUTION DE LA POPULATION A LA REDUCTION DES VIOLATIONS DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

La population a un rôle important dans la promotion d'une protection efficace des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Les populations sont alors tenues d'envisager des réformes sur le court terme qui oeuvreront dans la mesure d'une protection beaucoup plus accrue des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun (Paragraphe I). Des mesures sur le long terme devront aussi être envisagées par cette même population (Paragraphe II).

202 Article 10 alinéa 2 Ibid. op cit.

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PARAGRAPHE I : RÉFORMES CONJONCTURELLES POUR UNE PROTECTION MAXIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN

Sur le court terme, plusieurs mesures peuvent être retenues par les populations afin de protéger efficacement les droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Dans le cadre de ce travail, nous avons retenu celles objectivement jugées les plus pertinentes. Ainsi, la population devra augmenter son niveau intellectuel (A) afin de faciliter leur compréhension des textes en général et de ceux régissant les expropriations pour cause d'utilité publique de façon particulière. Aussi, les populations devront s'arranger à dénoncer les actes de corruption qui caractérisent les expropriations pour cause d'utilité publique dans leurs différentes localités (B).

A - L'amélioration du niveau intellectuel de la population

Pour comprendre les dispositions des textes qui encadrent les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, il faudrait être investi d'un certain potentiel intellectuel. Les populations autochtones pour la plupart, ne savent ni lire ni écrire, vu l'absence d'établissements scolaires à leur époque.

Pour cette raison, les populations sont dans l'obligation de profiter des facilités scolaires dont dispose le Cameroun aujourd'hui afin d'améliorer leur niveau intellectuel. Les populations peuvent de ce fait s'inscrire dans des institutions scolaires et assister à des cours du soir, suivre des cours en ligne, faire des recherches en consultant des bibliothèques et des plateformes numériques et participer à des séminaires quelconques sur la culture.

Aussi, les populations devraient aussi consulter des experts en affaires foncières afin d'avoir une idée beaucoup plus précise sur les expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun.

Avec cette croissance du niveau intellectuel de la population, une appréhension des droits dévolus aux victimes des expropriations pour cause d'utilité publique sera plus facile pour les populations concernées.

Ces populations devraient aussi dénoncer les actes de corruption en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun

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B - La dénonciation des actes de corruption dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun

Le Code pénal camerounais distingue deux (02) types de corruption : La corruption active et la corruption passive.

Le Code pénal réprime la corruption active de cette manière ; « Est puni d'un emprisonnement de cinq (05) à dix (10) ans et d'une amende de deux cent mille (200 000) à deux millions (2 000 000) de francs, tout fonctionnaire ou agent public national, étranger ou international qui, pour lui-même ou pour un tiers, sollicite, agrée ou reçoit des offres, promesses, dons ou présents pour faire, s'abstenir de faire ou ajourner un acte de sa fonction. (2) La peine prévue à l'alinéa 1 ci-dessus est un emprisonnement d'un (01) à cinq (05) ans et une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) de francs si l'acte n'entre pas dans les attributions de la personne corrompue, mais a été facilité par sa fonction. (3) Est puni des peines prévues à l'Alinéa 2 ci-dessus, tout agent public national ou international qui sollicite ou accepte une rétribution en espèces ou en nature pour lui-même ou pour un tiers, en rémunération d'un acte déjà accompli ou une abstention passée. (4) Les peines prévues aux alinéas 1, 2 et 3 ci-dessus sont doublées si le fonctionnaire ou l'agent public incriminé est un Magistrat, un Officier de Police Judiciaire, un agent d'une institution de lutte contre la corruption, un Chef d'Unité administrative ou tout autre fonctionnaire ou agent public assermentés. »203.

La corruption passive quant à elle est réprimée de cette manière ; « Quiconque, pour obtenir soit l'accomplissement, l'ajournement ou le refus d'accomplissement d'un acte, soit des faveurs ou des avantages tels que prévus à l'Article 134 ci-dessus, fait des promesses, offres, dons, présents ou cède à des sollicitations tendant à la corruption, est puni des peines prévues à l'Article 134 alinéa 1 ci-dessus, que la corruption ait ou non produit son effet. Est puni des peines prévues à l'alinéa 2 de l'Article 134 ci-dessus, celui qui fait des dons, présents ou cède aux sollicitations tendant à rémunérer un acte déjà accompli ou une abstention passée. »204

Alors, les autochtones qui constatent des activités qui correspondent à l'une ou l'autre de ces dispositions lors des procédures des expropriations pour cause d'utilité publique,

203 Article 134 du Code Pénal de 2016.

204 Article 134-1 Ibid.

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doivent impérativement dénoncer ces activités aux autorités compétentes. Il est inadmissible que l'Etat camerounais mette en place des institutions pour lutter contre cette néfaste activité clientéliste et ses citoyens ne les exploitent pas en dénonçant les actes de cette nature.

A titre d'illustration il est créé au Cameroun la Commission Nationale Anti-Corruption (CONAC), créée par décret présidentiel le 11 mars 2006. Elle a pour mission principale d'encadrer la lutte contre la Corruption. A ce titre, c'est à cette Commission que tous les actes de corruption doivent être dénoncés. Le numéro vert prévu à ce titre est le 1517. Pour cela, les riverains doivent impérativement composer ce numéro afin de dénoncer ces actes. Cela sera dans l'intérêt des populations et victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun qui ne seront expropriées qu'à la limite de ce que demande l'Etat et dûment indemnisées.

Avec ces dénonciations, les expropriations pour cause d'utilité publique seront menées en toute légitimité, ce qui préservera les droits des victimes en la matière.

Malgré la prise en compte de ces mesures, il existe une certaine crainte que l'objectif escompté ne dure que pour une période relativement courte. C'est pour cette raison que des mesures beaucoup plus durables doivent être prises par cette même population.

PARAGRAPHE II : RÉFORMES STRUCTURELLES POUR UNE PROTECTION OPTIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE AU CAMEROUN

Afin de pérenniser une protection optimale des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun, les populations devraient envisager des solutions aux problèmes sus évoqués sur le long terme. D'abord, elles devront supprimer les ventes anarchiques des biens immeubles (A). Ensuite, les populations pourraient collaborer davantage avec les autorités en charge des expropriations pour cause d'utilité publique (B)

A - La Suppression des transactions terriennes anarchiques

Il a été observé dans ce travail qu'afin de bénéficier des indemnisations pour cause d'utilité publique, les victimes doivent posséder des titres de propriété conformes. Cela est de plus en plus difficile aujourd'hui de retrouver des vendeurs de terrains honnêtes. On observe qu'un même terrain est vendu à plusieurs personnes qui se retrouvent tous avec des titres

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fonciers différents. Il est difficile dans ce cas de déterminer qui serait le réel propriétaire du terrain en cause.

Pour cela, les populations doivent impérativement cesser et ce, sur le long terme, les ventes anarchiques des terres. Si cela est fait, les réelles victimes des expropriations pour cause d'utilité publique pourront être cernées, ce qui facilitera la procédure d'expropriation et d'indemnisation.

Aussi, les transactions qui doivent être totalement abolies dans le cas d'espèce sont les transactions des titres coutumiers. Un titre coutumier n'est en aucun cas assimilable à un titre foncier. Pour cette raison, un propriétaire terrien qui juge posséder une terre à titre coutumier est tenu de faire immatriculer cette terre et de lancer une procédure d'obtention de titre foncier, en conformité avec la législation en vigueur205. Des lors, aucun désagrément ne sera occasionné lors des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique et les indemnisations qui sont dues à juste titre.

La suppression des ventes anarchiques agira dans une longue perspective de lutte pour la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Il en est de même pour la collaboration des populations avec l'administration en charge des expropriations de cette nature au Cameroun.

B - La collaboration des populations avec l'administration en charge des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun

La population a tendance à croire que le fait de se désolidariser de l'administration les protègera de potentiels préjudices. Toutefois, on observe en matière des expropriations pour cause d'utilité publique que c'est totalement dans leur intérêt qu'elle est tenue de collaborer avec l'administration lors de ces procédures.

Les textes prévoient à ce titre que « L'enquête est menée dans toutes ses phases en présence des propriétaires du fonds et des biens qu'il supporte, ainsi que les notabilités du lieu et des populations, par l'ensemble de la commission, sous réserve des règles et quorum fixés par l'article 7 ci-dessus. Toutefois la commission peut après avoir au préalable arrêté elle-même la liste exhaustive des propriétaires des biens à détruire, constituer une sous-

205 Décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier, complété par le Décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005 modifiant et complétant certaines dispositions du décret n° 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d'obtention du titre foncier.

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commission technique de 3 (trois) membres au moins à l'effet d'expertiser une catégorie de ces biens.

Le travail de la sous-commission est exécuté sous la responsabilité et le contrôle de la commission entière qui en contresigne les documents. »206 Par cette disposition, le législateur voudrait que les populations aident la commission d'évaluation et de constat à déterminer la portion exacte à exproprier et le montant dû aux victimes. L'on constate alors que si une victime est insensible à cette collaboration, des données erronées peuvent être récoltées. Pourtant, si la victime collabore efficacement avec la commission, elle pourra être indemnisée à juste titre et uniquement la portion de terrain nécessaire à l'administration pourra être objectivement délimitée.

De plus, il est aussi prévu que « Avant le recours à l'expropriation pour cause d'utilité publique en faveur des collectivités publiques locales, des établissements publics, des concessionnaires de service public ou des sociétés d'Etat en vue de la réalisation des travaux d'intérêt général, ces derniers doivent procéder aux négociations préalables avec des propriétaires ou ayants-droits concernés. En cas de désaccords, les résultats desdites négociations sont soumis à l'arbitrage du Ministre chargé des Domaines. »207. Ainsi les victimes des expropriations doivent obligatoirement participer à ces négociations préalables afin de fixer l'administration sur quelle base elle devra les indemniser.

Dès lors, la prise en compte de cette mesure et de toutes celles qui la précèdent agira dans la mesure de faire de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun un idéal perceptible.

206 Article 11 du Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

207 Article 15 Ibid. op cit.

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CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE

Dans cette partie, il était question de démontrer pourquoi la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique bat de l'aile au Cameroun et de proposer des mesures pour remédier à cela. Dans le troisième chapitre, il a été observé que cette protection est tributaire de plusieurs lacunes dans la pratique notamment sur le plan juridique et extra juridique. Dans le quatrième et dernier chapitre de cette partie, nous avons observé que ces difficultés ne sont pas incontournables, eu égard des mesures palliatives pouvant être prises à ce sujet. Ces mesures comme il a été établi doivent être envisagées à la fois par l'Etat du Cameroun et les populations qui le caractérisent.

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CONCLUSION GÉNÉRALE

In fine, dans ce travail, il était question de déterminer s'il pouvait être dit sans risque de se tromper que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique est effective au Cameroun.

Dans une première partie, nous avons observé que cette protection est effective de façon limitative à travers la consécration juridique dont elle bénéficie. Cette consécration comme il a été présenté passe par des textes supra législatifs comme la Constitution et les Conventions internationales et par des textes infra législatifs et législatifs comme les lois parlementaires et les textes émanant du pouvoir réglementaire originaire. Cette protection passe aussi par la mise en oeuvre de divers mécanismes en la matière. Ces mécanismes comme il a été vu sont d'ordre juridictionnel avec l'intervention des juges administratifs, judiciaires, constitutionnels et ceux des comptes, et d'ordre institutionnel avec le rôle joué par le Ministre des Domaines, du Cadastre et des Affaires Foncières, et la Commission d'Evaluation et de Constat.

Dans une deuxième partie, nous avons relevé la perfectibilité de ces mécanismes de protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. Tout d'abord, il était question dans cette partie de développer sur les limites juridiques et sociologiques dont fait preuve cette protection au Cameroun. Il nous a été donné de relever que sur le plan juridique, le coût d'indemnisation des terres ne reflète pas du tout leurs valeurs actuelles sur le marché foncier. Sur le plan sociologique, nous avons pu présenter la recrudescence des actes de corruption dans ces procédures d'expropriation ainsi que le taux inquiétant d'analphabétisme de la population. Malgré ces limites, nous avons développé qu'elles ne sont pas irrémédiables parce que des mesures peuvent être envisagées à la fois par l'Etat et les populations qui s'y retrouvent. L'Etat peut par exemple sensibiliser la population sur les implications du régime foncier et actualiser les fondements et institutions relatives aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun. La population pour sa part pourrait améliorer son niveau intellectuel et combattre les ventes anarchiques des biens immeubles.

A ce stade, nous pouvons dire avec conviction que la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique existe bel et bien au Cameroun mais peut être beaucoup plus effective si certaines mesures sont prises pour remédier aux pesanteurs dont elle fait face.

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BIBLIOGRAPHIE

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3- COURS

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E- DOCUMENTS

1- TEXTES OFFICIELS

a-Textes Internationaux

- Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, 1981.

- Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 1789.

- Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, 2007

- Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies, 1948.

b- Textes Nationaux

- Arrêté n° 416 du 25 octobre 1929 portant Rejet de la pétition des chefs et notables Douala contre leur expropriation du lotissement de Bali.

- Arrêté n° 0082/MINUH du 20 novembre 1987 fixant les bases de calcul de la valeur vénale des constructions frappées d'expropriation pour cause d'utilité publique.

- Arrêté n° 0245/MINEI du 5 mars 2008 fixant Les modalités d'application du décret n° 2006/3023 du 16 décembre 2006 Fixant les modalités d'évaluation Laministrative des immeubles en matière fiscale.

- Arrêté n° 00414 du 13 mars 2009 portant Déclaration utilité publique de la zone couvrant le projet de Lom Pangar.

- Code civil (camerounais), 1981.

- Décret français du 10 juillet 1922 portant Règlement de la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique.

- Décret n°76/165 du 27 avril 1976 fixant Les conditions d'obtention du titre foncier, modifié et complété par le décret n° 200/481 du 16 décembre 2005.

- Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant Les modalités d'application de la loi n° 85/009 du 4 juillet 1985 relative à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

- Décret n° 0001 du 22 mars 1994 portant Prix minima de vente des terrains domaniaux.

99

- Décret n°84/199 du 7 octobre 1994 portant Statut général de la fonction publique de l'État.

- Décret n° 2003/418 du 25 février 2003 fixant Les tarifs des indemnités à allouer aux

propriétaires des cultures et arbres cultivés victimes d'expropriation pour cause d'utilité

publique.

- Décret n° 2005/118 du 15 avril 2005 portant Organisation du Ministère de l'Agriculture et

du Développement rural (MINADER).

- Décret n°2006/3023 du 26 décembre 2006 fixant Les modalités d'évaluation administrative

des immeubles en matière fiscale.

- Décret n° 2012/0034 du 24 janvier 2012 portant Indemnisation des personnes victimes de

destruction des biens dans le cadre des travaux de construction du barrage hydroélectrique de

Lom Pangar dans la région de l'Est..

- Décret n° 2012/390 du 18 septembre 2012 portant Organisation du Ministère des Domaines,

du Cadastre et des Affaires foncières (MINDCAF).

- Décret n° 2016/1430 du 27 mai 2016 fixant Les modalités d'organisation et de

fonctionnement de la commission consultative en matière foncière et domaniale.

- Instruction n° 000005 du 29 décembre 2005 portant Rappel des règles de base sur la mise en

oeuvre du régime de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

-Loi n° 80/22 du 14 juillet 1980 portant Répression des atteintes à la propriété foncière et

domaniale.

- Loi n° 85/009 du 4 juillet 1985 relative à L'expropriation pour cause d'utilité publique et aux

modalités d'indemnisations.

- Loi n° 96/06 du 18 janvier 1996 portant Révision de la Constitution du 2 Juin 1972.

- Loi n° 2004/017 du 22 juillet 2004 portant Orientation de la décentralisation.

- Loi n° 2008/003 du 14 avril 2008 régissant Les dépôts et consignations.

- Loi n° 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal.

- Ordonnance n° 71-1 du 6 juillet 1974 fixant Le régime foncier.

- Ordonnance n° 74-2 du 6 juillet 1974 fixant Le régime domanial.

- Ordonnance n° 74-3 du 6 juillet 1974 relative à La procédure d'expropriation pour cause

d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

2- RAPPORTS

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- Global Forest Watch; SAILD, 2020, Barrage hydroélectrique de Lom Pangar, coût socio-environnemental de l'électricité, 2020.

- Plan d'action de réinstallation et d'indemnisation, Rapport définitif du 22 décembre 2010.

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3- AUTRES DOCUMENTS

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- MBAMI Charles-Olivier, « Port de Kribi - De nouvelles révélations sur les indemnisations », in La Nouvelle Expression, n° 4684 du 12 mars 2018, p.3, 2008.

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LISTE DES ANNEXES

- Loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

- Décret n° 87/1872 du 16 décembre 1987 portant application de la loi n° 85/009 du 04 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique.

- Arrêté n°00332/Y.15.1/MINUH/D C00 Fixant les bases de calcul de la valeur vénale des constructions frappées d'exploitation pour cause d'utilité publique.

- Jugement n° 108/FD/2023 du 25 Mai 2023 portant annulation du décret n° 2020/004/PM du 09 janvier 2020, portant expropriation pour cause d'utilité publique et incorporation au domaine privé de l'Etat.

- Décret N° 2003/418/PM du 25 février 2003 portant modification des tarifs des indemnités à verser au propriétaire pour toute destruction d'arbres cultivés et cultures vivrières.

ANNEXES

102

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ANNEXE 1 :

LOI N° 85/009 DU 04 JUILLET 1985 RELATIVE A L'EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE ET AUX MODALITES D'INDEMNISATION

L'Assemblée Nationale a délibéré et adopté ;

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit,

CHAPITRE PREMIER

DISPOSITIONS GENERALES

Article premier.

1- Pour la réalisation des objectifs d'intérêt général, l'Etat peut recourir à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique.

2- Cette procédure est engagée soit directement, lorsqu'elle vise à réaliser des opérations d'intérêt public, soit indirectement à la demande des collectivités locales, des établissements publics, des concessionnaires de service public ou des sociétés d'Etat.

Art. 2. L'expropriation pour cause d'utilité publique affecte uniquement la propriété privée telle qu'elle est reconnue par les lois et règlements.

Art. 3.

1- L'expropriation ouvre droit à l'indemnisation pécuniaire ou en nature selon les conditions définies par la présente loi.

2- L'indemnité due aux personnes évincées est fixée par le décret d'expropriation.

Art. 4.

1- Le décret d'expropriation entraîne transfert de propriété et permet de muter les titres existants au nom de l'Etat ou de toute autre personne de droit public bénéficiaire de cette mesure.

2- En principe, l'expropriation ouvre droit à une indemnisation préalable.

3- Toutefois, dans certains cas, le bénéficiaire de l'expropriation peut avant paiement effectif de l'indemnité, occuper les lieux dès la publication du décret d'expropriation.

4- Un préavis de six mois à compter de la date de publication du décret d'expropriation, est donné aux victimes pour libérer les lieux.

Ce délai est de trois mois en cas d'urgence

Art. 5. L'acte de déclaration d'utilité publique est suspensif de toute transaction et de toute mise en valeur sur les terrains concernés. Aucun permis de construire ne peut, sous peine de nullité d'ordre public, être délivré sur les lieux.

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CHAPITRE II

DE L'INDEMNISATION.

Art. 6. Les indemnités dues pour expropriation sont à la charge de la personne morale bénéficiaire de cette mesure.

Art. 7.

1- L'indemnité porte sur le dommage matériel direct immédiat et certain causé par l'éviction.

Elle couvre

- les terrains nus ; - les cultures ;

- les constructions ;

- toutes autres mises en valeurs, quelle qu'en soit la nature, dûment constatées par une

commission de constat et d'évaluation

2- La composition et les modalités de fonctionnement de la commission de constat et d'évaluation font objet d'un texte réglementaire.

Art. 8.

1- L'indemnité est pécuniaire ; toutefois, en ce qui concerne les terrains, la personne morale bénéficiaire de l'expropriation peut substituer compensation de même nature et de même valeur à l'indemnité pécuniaire.

2- En cas de compensation en nature, le terrain attribué doit, autant que faire se peut, être situé dans la même commune que le terrain frappé d'expropriation.

3- Si la valeur du terrain alloué en compensation est supérieure à celle du terrain frappé d'expropriation, la soulte est payée par le bénéficiaire de l'indemnité. Si elle est inférieure, le bénéficiaire de l'expropriation alloue une indemnité pécuniaire correspondant à la soulte.

Art. 9. L'indemnisation des terrains nus et non viabilisés est faite selon les modalités ci-après :

1- Lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une détention coutumière ayant donné lieu à l'obtention d'un titre foncier, l'indemnité ne peut dépasser le taux minimum officiel des terrains domaniaux non viabilisée de la localité de situation du titre foncier.

2- Lorsqu'il s'agit d'un terrain résultant d'une transaction normale de droit commun ou d'une acquisition des terrains domaniaux, l'indemnité due égale au prix d'achat, majoré des divers d'acquisition.

Art. 10.

1- Les modalités de détermination de la valeur des cultures détruites, sont fixées par décret.

2- La valeur des constructions et des autres mises en valeur, est déterminée par la commission de constat et d'évaluation.

3- Il n'est dû aucune indemnité pour destruction des constructions vétustes ou menaçant ruines ou de celles réalisées en infraction aux règles d'urbanisme ou aux dispositions législatives ou règlementaires fixant le régime foncier.

Art. 11. Les indemnités allouées antérieurement à la date d'entrée en vigueur de la présente loi ne peuvent donner lieu à aucune révision.

105

CHAPITRE III

DU CONTENTIEUX

Art. 12.

1- En cas de contestation sur le montant des indemnités, l'exproprié adresse sa réclamation à l'administration chargée des domaines.

2- S'il n'obtient pas satisfaction, il saisit un délai d'un mois, à compter de la date de notification de la décision contestée, le Tribunal judiciaire compétent du lieu de situation de l'immeuble.

3- Conformément à la procédure et sous réserve des voies de recours de droit communs, le tribunal confirme, réduit ou augmente le montant de l'indemnité suivant les modalités d'évaluation fixées dans la présente loi et ses textes d'application.

CHAPITRE IV

DISPOSITIONS DIVERSES

Art. 13. Les tuteurs et représentants légaux des incapables ou interdits expropriés, peuvent être habilités par ordonnance du Président du Tribunal, à accepter l'indemnité offerte par l'Administration. Art. 14. Les actions en résolution, en revendication et toutes actions réelles, ne peuvent arrêter l'expropriation ni en empêcher les effets. L'action en réclamation est sur l'indemnité et le droit en demeure affranchi.

Art. 15.

1- La procédure d'expropriation est fixée par voie réglementaire.

2- Les procédures d'indemnisation non définitivement réglées à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, seront poursuivies conformément à l'ancienne législation jusqu'à leur aboutissement.

Art. 16. La présente loi abroge toutes les dispositions antérieures contraires, notamment celles de l'ordonnance n°74-3 du 3 juillet 1974, relatives à l'expropriation pour cause d'utilité publique, sera enregistrée, promulguée puis publiée au Journal officiel en français et en anglais.

Yaoundé, le 28 juin 1985

Le Président de la République

Paul BIYA

106

ANNEXE 2 :

DECRET N° 87/1872 DU 16 DECEMBRE 1987 PORTANT APPLICATION DE LA LOI N° 85/009 DU 04 JUILLET 1985 RELATIVE A L'EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,

Vu la constitution ;

Vu l'ordonnance n°74/1 du 6 juillet 1974 fixant le régime foncier ;

Vu la loi n° 85/9 du 4 juillet 1985 relative à l'expropriation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation.

DECRETE :

Article 1er.- Le présent décret fixe les modalités d'application de la loi n°85/9 du 4 juillet 1985 susvisée, notamment en ce qui concerne la procédure d'expropriation et celle d'indemnisation.

TITRE I :

DE LA PROCEDURE D'EXPROPRIATION

CHAPITRE I : DE L'EXPROPRIATION ENGAGEE A LA DEMANDE DES SERVICE

PUBLICS :

SECTION I :

DU DECLENCHEMENT DE LA PROCEDURE :

Article 2.- Tout département ministériel désireux d'entreprendre une opération d'utilité publique saisit le Ministre chargé des Domaines d'un dossier préliminaire en deux exemplaires comprenant :

- une demande assortie d'une note explicative indiquant l'objet de l'opération.

- Une fiche dégageant les caractéristiques principales des équipements à réaliser et précisant notamment :

a) la superficie approximative du terrain sollicité dûment justifiée ;

b) l'appréciation sommaire du coût du projet y compris les frais d'indemnisation ;

c) la date approximative de démarrage des travaux ;

d) la disponibilité des crédits d'indemnisation avec indication de l'imputation budgétaire ou de tous autres moyens d'indemnisation.

Article 3.- (1) Dès réception du dossier, le Ministre chargé des Domaines apprécie le bien fondé des justifications du projet.

(2) Lorsqu'il juge le projet d'utilité publique, il prend un arrêté déclarant d'utilité publique les travaux projetés et définissant le niveau de compétence de la Commission chargée de l'enquête d'expropriation dite commission de constat et d'évaluation.

107

SECTION II :

DE LA COMMISSION DE CONSTAT ET D'EVALUATION

Article 4.- La Commission de constat et d'évaluation est chargée au niveau national, provincial ou départemental sur décision du Ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat :

- de choisir et de faire borner les terrains concernés, aux frais du bénéficiaire ;

- de constater les droits et d'évaluer les biens mis en cause ;

- d'identifier leurs titulaires et propriétaires ;

- de faire porter les panneaux indiquant le périmètre de l'opération, aux frais du bénéficiaire.

Article 5.- La Commission de constat et d'évaluation comprend :

(1) Au niveau départemental :

- le Préfet ou son représentant (Président)

- le responsable du Service Départemental des Domaines Secrétaire

- le responsable du Service Départemental du Cadastre Membre

-//--//--//--//-

- le responsable du Service Local de l'Urbanisme et de l'Habitat

- le responsable compétent des Mines et de l'Energie

- le responsable du Service Départemental de l'Agriculture

- le responsable du Service Départemental des Routes

- le représentant du Service ou de l'organisme demandeur -//-

- le ou les Député (s) concerné (s) -//-

- le ou les Magistrat (s) Municipal (aux) -//-

- la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s)

-//-

 

(2) Au niveau Provincial :

- le Gouverneur et son représentant

- le responsable du Service Provincial des Domaines

- le ou les Préfet (s) concerné (s) ou leurs représentants

- le responsable du Service Provincial du Cadastre

(Président) (Secrétaire) (Membres) -//-

- le responsable du Service Provincial de l'Urbanisme et de l'Habitat

-//-

 

- le responsable du Service Provincial chargé des Mines et de l'Energie

-//-

 

- le responsable du Service Provincial de l'Agriculture

 

-//-

- le responsable du Service Provincial des routes

 

-//-

- le représentant du Service ou de l'organisme demandeur

 

-//-

- le ou les Député (s) concerné (s)

 

-//-

- le ou le Magistrat (s) Municipal (aux) concerné (s)

 

-//-

- la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s)

 

-//-

 

(3) Au niveau National :

- le Ministre chargé des Domaines ou son représentant (Président)

- le Directeur des Domaines ou son représentant (Secrétaire)

- le ou les Préfet (s) concerné (s) (Membres)

-//-

- le Directeur du Cadastre ou son représentant

- un représentant du Ministre de l'Agriculture -//-

108

- un représentant du Ministre des Mines et de l'Energie -//-

- le Directeur de l'Habitat ou son représentant -//-

- le représentant du Service ou de l'organisme demandeur -//-

- le ou les Député (s) concerné (s) -//-

- la ou les Autorité (s) traditionnelle (s) concernée (s) -//-

Article 6.- Ces Commissions sont nommées :

- au niveau départemental, par arrêté préfectoral ;

- au niveau provincial, par arrêté du Gouverneur ;

- au niveau national, par arrêté du Ministre chargé des Domaines.

Article 7.- (1)- La Commission se réunit en tant que de besoin sur convocation de son Président.

(2) La convocation et l'ordre du jour doivent être adressés à chaque membre au moins 15 jours avant la date de la réunion.

(3) Le Quorum est de 2/3 des membres.

(4)- Les décisions sont à la majorité simple des membres présents ;

(5)- En cas de partage de voix, celle du Président est prépondérante.

Article 8.- Les fonctions de membre de la commission de constat, et d'évaluation sont gratuites. Toutefois, il peut en cas de disponibilités budgétaires être allouée aux intéressés une indemnité de session fixée par arrêté du Ministre chargé des Domaines.

Les frais de fonctionnement de cette commission sont inscrits dans le budget du Ministre chargé des Domaines.

La fourniture et la pose des bornes et des panneaux sont à la charge du service de l'organisme demandeur.

SECTION III :
DE L'ENQUETE

Article 9.- Dès réception de l'arrêté déclarant les travaux d'utilité publique, le Président de la Commission de constat et d'évaluation le notifie au (x) Préfet (s) et Magistrat (s) de la localité concernée.

Une fois saisi, le Préfet en assure la publicité par voie d'affichage à la Préfecture, au Service départemental des Domaines, à la Mairie, la Sous-Préfecture, au Chef-lieu du district et à la Chefferie du lieu de situation du terrain, ainsi que par tous les autres moyens jugés nécessaires en raison de l'importance de l'opération.

Article 10.- En vue de leur participation à toutes les phases de l'enquête, les populations concernées sont informées au moins 30 (trente) jours à l'avance du jour et de l'heure de l'enquête par convocations adressées aux Chefs et notables et par les moyens indiqués à l'article précédent.

Article 11.- L'enquête est menée dans toutes ses phases en présence des propriétaires du fonds et des biens qu'il supporte, ainsi que les notabilités du lieu et des populations, par l'ensemble de la

109

commission, sous réserve des règles et quorum fixés par l'article 7 ci-dessus. Toutefois la commission peut après avoir au préalable arrêté elle-même la liste exhaustive des propriétaires des biens à détruire, constituer une sous-commission technique de 3 (trois) membres au moins à l'effet d'expertiser une catégorie de ces biens.

Le travail de la sous-commission est exécuté sous la responsabilité et le contrôle de la commission entière qui en contresigne les documents.

Article 12.- A la fin de l'enquête, la commission de constat et d'évaluation produit :

- un procès-verbal d'enquête relatant tous les incidents éventuels ou observations des personnes évincées signé de tous ses membres présents.

- un procès-verbal de bornage et le plan parcellaire du terrain retenu, établis par le géomètre membre de la commission.

- un état d'expertise des cultures signé de tous les membres de la commission.

- un état d'expertise des constructions et de toute autre mise en valeur signé de tous les membres de la commission

Pour la préparation du décret d'expropriation, le Président de la commission de constat et d'évaluation transmet au Ministre chargé des Domaines dès la fin des travaux d'enquête le dossier comprend :

- l'arrête désignant nommément les membres de la commission - les différentes pièces ci-dessus énumérées

Article 13.- L'arrêté de déclaration d'utilité publique devient caduque, si dans un délai de deux (2) ans à compter de la date de sa notification au service ou organisme bénéficiaire il n'est pas suivi d'expropriation effective.

Toutefois, sa validité peut être prorogée une seule fois par arrêté du Ministre des Domaines pour une durée n'excédant pas un (1) an.

Les arrêtés de déclaration d'utilité publique en vigueur à la date de publication du présent décret resteront en vigueur pendant une période de deux ans non susceptible de prorogation.

Article 14.- Conformément aux dispositions de l'Article 5 de la Loi n°85/9 du 04 juillet 1985, l'arrêté de déclaration d'utilité publique est suspensif de toute transaction, de toute mise ne valeur, et toute délivrance de permis de construire.

Toutefois, il ne fait pas obstacle à la poursuite des procédures d'immatriculation du domaine national de première catégorie au profit de leurs occupants ou de leurs exploitants.

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CHAPITRE II :

DE L'EXPROPRIATION ENGAGEE A LA DEMANDE
D'AUTRES PERSONNES MORALES DE DROIT PUBLIC

Article 15.-Avant le recours à l'expropriation pour cause d'utilité publique en faveur des collectivités publiques locales, des établissements publics, des concessionnaires de service public ou des sociétés d'Etat en vue de la réalisation des travaux d'intérêts général, ces derniers doivent procéder aux négociations préalables avec des propriétaires ou ayants-droits concernés.

En cas de désaccords, les résultats desdites négociations sont soumis à l'arbitrage du Ministre chargé des Domaines.

En cas d'arbitrage infructueux, il est procédé à l'expropriation aux frais du bénéficiaire dans les conditions prévues ci-dessus.

Article 16.- Les personnes morales de droit public visées à l'Article précédent doivent, en cas d'aboutissement des négociations, se conformer aux règles d'acquisition de droit commun.

TITRE II :

DE LA PROCEDURE D'INDEMNISATION

Article 17.- Outre le montant des indemnités d'expropriation fixé conformément aux dispositions de l'Article 3 (2) de la loi n° 85/9 susvisée, le décret d'expropriation désigne l'autorité chargée de prendre la décision de mandatement des crédits correspondants.

Article 18.- Les indemnités d'expropriation sont supportées par le budget du département ministériel ayant sollicité l'expropriation.

En ce qui concerne l'Etat, elles sont supportées par le budget du département ministériel ayant sollicité l'expropriation.

Article 19.- En cas d'omission, les personnes intéressées saisissent le Préfet, le Gouverneur ou le Ministre chargé des Domaines, selon les règles de compétence fixées à l'Article 6 ci-dessus, lequel soumet la réclamation à l'examen de la commission de constat et d'évaluation.

Article 20.- Le présent décret sera enregistré, puis publié au Journal Officiel en français et en anglais.

YAOUNDE, le 16 Décembre 1987

LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

(é) Paul BIYA

111

ANNEXE 3 :

ARRÊTÉ N°00332/Y.15.1/MINUH/D C00 FIXANT LES BASES DE CALCUL DE LA VALEUR VÉNALE DES CONSTRUCTIONS FRAPPÉES D'EXPLOITATION POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE

Le Ministre de l'urbanisme et de l'habitat,

Vu la construction ;

Vu la loi n°85/09 du 04 juillet 1985 relative à la

procédure d'exploitation pour cause d'utilité publique et aux modalités d'indemnisation ;

Vu le décret n°86/1399 du 21 novembre 1986 portant réorganisation du gouvernement ;

Vu le décret n°86/1404 du 21 novembre 1986 portant modification de l'article 1er du

décret n°85/1173 du 24 août 1985 nommant les membres du gouvernement ;

Vu le décret n°85/187 du 13 février 1985 portant réorganisation du Ministère de l'urbanisme

et de l'habitat ;

Vu les nécessités de service.

ARRETE

Article 1 :

Conformément aux dispositions de l'article 10 de la loi n°85/09 du 04 juillet 1985 susvisée, la valeur des constructions en vue du calcul des indemnités d'exploitation pour cause d'utilité publique est déterminée par la commission de constat et d'évaluation. Dans l'exercice des prérogatives ainsi dévolues, les commissaires devront s'appuyer sur les règles définies par le présent arrêté.

Article 2 :

La valeur des constructions visées à l'article 1 er ci-dessus est calculée sur la base d'un taux forfaitaire au mètre carré variant suivant leur qualité.

A cet effet, les constructions sont classées en 06 catégories conformément à l'annexe I du présent arrêté.

Les taux de calcul sont fixés conformément à l'annexe II

Article 3 :

Les valeurs fixées ci-dessus sont des valeurs à neuf de constructions finies à la date connue ou présumée de leur réalisation. Elles seront corrigées d'un taux de vétusté calculé conformément aux règles de l'art.

Les valeurs des constructions non finies sont déterminées sur la base de celle des constructions finies de catégories correspondantes affectées d'un taux de finition calculé suivant les règles de l'art.

Article 4 :

Les états d'expertise dressés sur les bases susvisées doivent ressortir : Les dimensions et la superficie de la construction ;

Son âge et son taux de vétusté ;

Sa classification assortie d'une description sommaire de sa qualité.

Article 5 :

Les états d'expertise sont dressés par l'expert en construction, membre de la commission et signés de tous les membres de ladite commission.

Article 6 :

Le présent arrête sera enregistré puis publié au journal officiel en français et en anglais.

Yaoundé, le 20 novembre 1987 Ferdinand Léopold OYONO

112

113

ANNEXE 4 :

JUGEMENT N° 108/FD/2023 DU 25 MAI 2023 PORTANT ANNULATION DU DECRET N° 2020/004/PM DU 09 JANVIER 2020, PORTANT EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE ET INCORPORATION AU DOMAINE PRIVE DE L'ETAT.

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117

ANNEXE 5 :

DÉCRET N° 2003/418/PM DU 25 FÉVRIER 2003 PORTANT MODIFICATION DES TARIFS DES INDEMNITÉS À VERSER AU PROPRIÉTAIRE POUR TOUTE DESTRUCTION D'ARBRES CULTIVÉS ET CULTURES VIVRIÈRES

118

119

120

121

122

TABLE DES MATIERES

AVERTISSEMENT i

DEDICACE iii

REMERCIEMENTS iv

SIGLES ET ABBREVIATIONS v

RÉSUMÉ vi

ABSTRACT vii

SOMMAIRE viii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

I - CONTEXTE DE L'ETUDE 2

II - DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE 2

A - DÉLIMITATION SPATIALE 3

B - DÉLIMITATION TEMPORELLE 3

C - DÉLIMITATION MATÉRIELLE 3

III - DÉFINITION DES CONCEPTS 4

IV - INTÉRÊT DE L'ETUDE 8

A - INTÉRÊT SCIENTIFIQUE 8

V - REVUE DE LA LITTÉRATURE 9

VI - PROBLÉMATIQUE 12

VII - HYPOTHESE 13

VIII - CADRE MÉTHODOLOGIQUE DE L'ETUDE 13

A - LES MÉTHODES D'ANALYSE 13

B - LES TECHNIQUES DE RECHERCHES 14

IX - ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN 15

PREMIÈRE PARTIE : LA PROTECTION PERCEPTIBLE DES DROITS DES VICTIMES

DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 16

CHAPITRE I : LA CONSÉCRATION JURIDIQUE DE LA PROTECTION DES DROITS DES

VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 18

123

SECTION I : LA CONSÉCRATION NORMATIVE DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 18

PARAGRAPHE I : LES FONDEMENTS SUPRA-LEGISLATIFS DES DROITS DES VICTIMES

DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 18

A - Les fondements constitutionnels des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité

publique au Cameroun 19

B - Les fondements internationaux des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité

publique au Cameroun 23

PARAGRAPHE II : LES AMÉNAGEMENTS LÉGISLATIFS ET REGLEMENTAIRES DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 28

A - L'aménagement législatif des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique

au Cameroun 29

B - L'aménagement réglementaire des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité

publique au Cameroun 34

SECTION II : LA CONSÉCRATION INSTITUTIONNELLE DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 37

PARAGRAPHE I : LES INSTITUTIONS JURIDICTIONNELLES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 38

A - Les juges de droit commun 38

B - Les juges d'exception 41

PARAGRAPHE II : LES INSTITUTIONS NON-JURIDICTIONNELLES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 44

A - Les membres de l'administration active 44

B - Les acteurs indépendants 49

CHAPITRE II : L'OPÉRATIONNALISATION DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 52

SECTION I : LE DYNAMISME DES INSTANCES JURIDICTIONNELLES DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR

CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 53

124

PARAGRAPHE I : L'IMPLICATION DU JUGE ADMINISTRATIF DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE

D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 53

A - L'annulation des actes liés aux expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun par le

Juge Administratif 53

B - Le constat de l'illégalité des procédures d'expropriation pour cause d'utilité publique par le juge

administratif au Cameroun 55

PARAGRAPHE II : LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE PAR LE JUGE JUDICIAIRE AU

CAMEROUN 56

A - La réparation des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique par le juge judiciaire au

Cameroun 56

B - L'extinction du contentieux de l'expropriation pour cause d'utilité publique par le juge judiciaire

au Cameroun 57

SECTION II : L'IMPLICATION DES INSTANCES NON-JURIDICTIONNELLES DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS

POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 58

PARAGRAPHE I : LA VIVACITÉ DE L'ADMINISTRATION PUBLIQUE CAMEROUNAISE DANS LA MISE EN OEUVRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 58

A - L'opérationnalisation de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause

d'utilité publique par le Ministère du Développement Urbain et de l'Habitat au Cameroun 59

B - La Mise en oeuvre de la protection des droits des victimes des expropriations pour cause d'utilité

publique par le Ministère du Cadastre, des Domaines et des Affaires Foncières 60

PARAGRAPHE II : LES INITIATIVES DE LA COMMISSION D'ÉVALUATION ET DE CONSTAT DANS LE CADRE DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 60

A - La collaboration de la Commission d'Evaluation et de Constat avec les victimes des

expropriations pour cause d'utilité publique 61

B - La célérité de la Commission d'Evaluation et de Constat dans l'exercice de ses missions 62

CONCLUSION DE LA PREMIÈRE PARTIE 62

125

DEUXIÈME PARTIE : LA PROTECTION LACUNAIRE DES DROITS DES VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 64

CHAPITRE I : LES LACUNES GANGRÉNANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 66

SECTION I : LES LIMITES JURIDIQUES FRAGILISANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 66

PARAGRAPHE I : LES LIMITES TEXTUELLES RÉDUISANT L'EFFECTIVITÉ DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE

D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 66

A - L'obsolescence des mercuriales en matière d'indemnisation 67

B - Le caractère expéditif des délais en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique au

Cameroun 69

PARAGRAPHE II : LES LIMITES JURIDICTIONNELLES RÉDUISANT L'EFFECTIVITÉ DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE

D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 71

A - La complexité du contentieux administratif au Cameroun 72

B - Le difficile accès à la justice au Cameroun 73

SECTION II : LES LIMITES SOCIOLOGIQUES GANGRENANT LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 74

PARAGRAPHE I : LES PESANTEURS SOCIOLOGIQUES IMPUTABLES A

L'ADMINISTRATION PUBLIQUE EXPROPRIATRICE AU CAMEROUN 75

A - La mauvaise gouvernance par l'administration publique expropriatrice 75

B - Les caractéristiques néfastes du système bureaucratique dans l'administration camerounaise 77

PARAGRAPHE II : LES PESANTEURS SOCIOLOGIQUES IMPUTABLES AUX VICTIMES DES

EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 79

A - L'analphabétisme des victimes des expropriations pour cause d'utilité publique au Cameroun .... 79

B - La non-conformité des populations expropriées à la règlementation domaniale au Cameroun 80

CHAPITRE II : LES MESURES PALLIATIVES POUR UNE PROTECTION OPTIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU

CAMEROUN 82

126

SECTION I : L'APPORT DE L'ETAT CAMEROUNAIS AU RENFORCEMENT DE LA PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE

D'UTILITÉ AU CAMEROUN 82

PARAGRAPHE I : LA SENSIBILISATION DE LA POPULATION SUR LES IMPLICATIONS DU

RÉGIME FONCIER AU CAMEROUN 82

A - L'organisation de séminaires d'information sur l'importance de se conformer à la législation

foncière au Cameroun 83

B - L'organisation d'ateliers de formation sur les procédures à suivre en cas de contentieux de

l'expropriation pour cause d'utilité publique au Cameroun 84

PARAGRAPHE II : L'ACTUALISATION DES FONDEMENTS ET INSTITUTIONS RELATIFS

AUX EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 86

A - La Mise à jour de la législation régissant les expropriations pour cause d'utilité publique au

Cameroun 86

B - La réforme des institutions juridictionnelles en matière d'expropriation pour cause d'utilité

publique au Cameroun 88

SECTION II : LA CONTRIBUTION DE LA POPULATION A LA REDUCTION DES VIOLATIONS DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE

D'UTILITÉ PUBLIQUE AU CAMEROUN 88

PARAGRAPHE I : RÉFORMES CONJONCTURELLES POUR UNE PROTECTION MAXIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITÉ PUBLIQUE

AU CAMEROUN 89

A - L'amélioration du niveau intellectuel de la population 89

B - La dénonciation des actes de corruption dans les procédures d'expropriation pour cause d'utilité

publique au Cameroun 90

PARAGRAPHE II : RÉFORMES STRUCTURELLES POUR UNE PROTECTION OPTIMALE DES DROITS DES VICTIMES DES EXPROPRIATIONS POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE

AU CAMEROUN 91

A - La Suppression des transactions terriennes anarchiques 91

B - La collaboration des populations avec l'administration en charge des expropriations pour cause

d'utilité publique au Cameroun 92

CONCLUSION DE LA DEUXIÈME PARTIE 94

CONCLUSION GÉNÉRALE 95

127

BIBLIOGRAPHIE 96

LISTE DES ANNEXES 101

TABLE DES MATIERES 122






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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci