Le cadre juridique de la CEDEAO face aux coups d'états militaires en Afrique de l'ouest. Problématique de l'opportunité de la norme juridique internationalepar Enoch MUPENDA KAWANGA Université de Likasi - Diplôme de licence en droit public 2021 |
II. L'hostilité du climat internationalElle est relative à la décentralisation de la société internationale qui complique, à court terme, le processus de systématisation des expériences antérieures en vue de poser les fondements d'une règle juridique uniforme67(*) . En effet, la société internationale est une société hétéroclite et divisée, en conséquence, le droit international est un droit perméable et non formaliste, un droit fragmentaire empirique et normativement incertain. Ce qui complique davantage la mise en place d'une norme juridique internationale, pouvant régir, organiser et encadrer les stratégies utilisées par les organisations internationales dans la prévention, la gestion et la résolution des conflits en Afrique de l'Ouest. Il est utile de souligner que l'urgence ou les nécessités de la paix, rendent très souvent délicate, l'inscription des interventions des organisations internationales dans des cadres juridiques bien déterminés. La recherche de l'efficacité dans l'urgence conduit à des montages compliqué , pour ne pas dire de bricolages improvisés , qui laissent aux acteurs sur le terrain le soin et la compétence,pour régler les conflits des normes et des compétences68(*). Mais, « (...) quelles que soient les conditions dans lesquelles s'est déroulé le conflit armé et la participation éventuelle d'une ou plusieurs organisations internationales [de maintien de la paix] [...], l'engagement d'une opération de rétablissement/consolidation de la paix exige une prise de position de la part d'une organisation habilitée à autoriser un empiétement sur la souveraineté de l'État en cause »69(*) . Toujours est-il que ces différents obstacles, compliquent le cadre de déploiement des opérations de maintien de la paix de la CEDEAO, à l'instar de la plupart des Organisations internationales oeuvrant en cette matière. IIILe trou dans la constitutionnalité des opérationsLes opérations de maintien de la paix, même si elles ne sont pas explicitement prévues par la Charte des Nations unies, mais sont bien réglementées en droit international positif. Elles constituent une institution de soldats de la paix dépêchés sur les lieux de conflits avec une mission très particulière70(*). À en croire Charles Zorgbibe, elles sont « une création pragmatique, une improvisation née (en dehors de la « Charte au sens strict ») de la guerre de Suez de 195671(*). Il est donc évident que, même si les opérations de paix sont une création ou une invention onusienne et s'extraient quelque peu de la Charte des Nations unies. Elles sont néanmoins bien encadrées et réglementées par le droit international positif. À juste titre, on se demande alors comment on pourrait appréhender la constitutionnalité des opérations de paix, conçues et conduites par la CEDEAO. Ces opérations souffrent manifestement d'un déficit de constitutionnalité et leur mise en oeuvre rencontre maints obstacles. [...] le cadre constitutif des opérations de maintien de la paix tel que prévu par les textes pertinents de [la CEDEAO] est fort imprécis. [Par conséquent], sa légalité par rapport au droit international est fort discutable. Une légalité qui s'essouffle davantage quand CEDEAO se trompe dans l'identification des textes sur lesquels doit reposer la mise en oeuvre des mécanismes de prévention, de gestion et de résolution des conflits en Afrique de l'Ouest. B. « L'erreur de droit » dans le choix de la norme de référenceL'imprécision du droit de la CEDEAO, en matière de maintien de la paix et de la sécurité, peut se révéler préjudiciable à plus d'un titre. En effet, l'identification difficile des textes de référence en cas de déploiements ou d'interventions militaires, favorise et multiplie les chances d'une « erreur de droit ». Seulement, la manifestation de l'erreur (A) trahit tout de même la volonté de la CEDEAO de légaliser et de légitimer ses opérations de maintien de la paix et de la sécurité, et de les encadrer dans une pratique juridique, une volonté dont la concrétisation est nécessaire (B). * 67 Patrick DAILLIER, « Les opérations multinationales consécutives à des conflits armés en vue du rétablissement de la paix », (2004) 314Collected Courses of the Hague Academy of International Law, 262, en ligne : <http://dx.doi.org/10.1163/1875-8096_pplrdc_A9789004145573_02> (consulté le 27 octobre 2022). * 68P. DAILLIER, préc.note 69, p.264. * 69 Idem. * 70Marie-Claude SMOUTS, Les organisations internationales, Paris, Armand Colin, 1995. * 71 Charles ZORGBIBE, La France, l'ONU et le maintien de la paix, Paris, PUF, 1996, p.32. |
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