3- Les élites traditionnelles et locales
L'ambiance générale dans laquelle évolue
le processus de développement en Afrique a fini par installer les
acteurs de développement en milieu rural dans une confusion et un jeu de
ruse où chacun cherche ses intérêts personnels, notamment
lorsqu'il s'agit de questions stratégiques comme la participation ou
l'accès équitable aux ressources naturelles. Dans cette partie,
il est question d'expliciter le concept d'élites pour mettre en
lumière leurs rôles joués autour du projet d'énergie
solaire dans le village de Ndjockloumbé.
3-1 La notion d'élite
Pour Max Weber (1920), les individus ont des ressources et des
chances différentes, c'est-à-dire que, le pouvoir des
élites repose sur trois facteurs : d'abord le facteur économique
par l'accès aux ressources et moyens de production; ensuite le facteur
social ou statutaire c'est-à-dire par le prestige au sein d'une
société et enfin le facteur politique par la compétition
pour le contrôle de l'Etat. Pour lui, l'élite renvoie à une
autorité charismatique. Par ailleurs, il explique l'importance de la
fonction charismatique dans l'évolution historique, le charisme
étant l'une des bases sur laquelle s'appuie l'action des élites
novatrices, surtout en période de changement rapide. V. Pareto (1916 :
61), va dans le même sens en disant que « ce sont les
minorités dirigeantes et donc les élites qui mènent
l'histoire. L'histoire ressemble ainsi à un cimetière
d'aristocraties et les élites sont les agents de la transformation des
sociétés », Il établit une sorte
d'échelle permettant de mesurer les différences sociales : les
élites correspondent aux classes qui obtiennent la note la plus
élevée. Pareto caractérise donc les élites par leur
« supériorité » : qualités
d'intelligence, de caractère, d'adresse... Il distingue les
élites gouvernementales des non-gouvernementales. Il souligne des
prédispositions à appartenir à l'élite, notamment
l'hérédité, mais admet une circulation des élites
au sein d'une même structure de pouvoir. Les élites se distingue
en effet par leur éminence sociale, c'est-à-dire leur
renommée, leur réussite sociale, leur proximité avec
d'autres élites ; leur compétence et donc leurs talents, leurs
connaissances, leurs aptitudes ; leur exemplarité et le respect qu'elles
ont des valeurs partagées ; leur fortune et leur
générosité, le partage et la redistribution qu'elles
effectuent ; un ensemble de signes extérieurs comme : leur habillement,
leur logement, leurs véhicules, leur apparence physique, la distinction
de leurs manières (langue, accent, gestuelle.), leur entourage, certains
rituels et protocoles...
83
3-2 Le rôle de l'élite
En Afrique subsaharienne, les élites locales sont les
acteurs décisifs pour le développement de leur communauté
; elles peuvent intervenir dans un projet de développement local en
identifiant, en valorisant les ressources territoriales, en mettant en place
des règles du jeu, en faisant émerger des entreprises locales et
en construisant l'économie de marché sans détruire les
communautés. En outre, les élites fournissent des contributions
majeures pour le développement économique local, ils oeuvrent
pour la création ou le maintien de dispositif institutionnel
préservant leurs intérêts malgré les critiques. Par
ailleurs, le développement économique local peut prendre la forme
d'un processus de négociation continu entre les acteurs locaux qui
identifient et exploitent les opportunités lorsqu'elles se
présentent.
Nous avons appris au cours de nos enquêtes que,
contrairement aux villages Seppe et Mbamblé où il s'agit d'une
initiative du gouvernement ; pour le village de Ndjockloumbé, il s'agit
de l'intervention de certaines élites à l'instar de monsieur M.
NGUE entrepreneur agronome et du chef de village de troisième
degré sa majesté André ISOLA.
D'après nos entretiens avec sa majesté ISOLA, ce
dernier affirme être l'initiateur du projet dans au sein du village
Ndjockloumbé ; en effet, il était question pour lui de mettre
à la disposition de l'entreprise Huawei en accord avec les populations,
le site d'implantation à Ndjockloumbé. C'est en ces mots qu'il
s'était Déclaré : « mes intentions étaient
claires, il fallait que tous les ménages puissent
bénéficier de l'énergie solaire ».
Dans un autre entretien avec une élite locale au nom de
monsieur M. NGUE, celui-ci nous déclarait être aussi l'initiateur
du projet au sein de son village dans la mesure où s'est lui qui avait
adressé une doléance auprès du MINEPAT pour que sa
localité bénéficie du projet d'énergie solaire.
D'après ce dernier, c'est grâce à sa demande auprès
du MINEPAT que le village Ndjockloumbé a pu bénéficier de
l'électrification solaire et cette demande s'est appuyée par le
projet agropole qui consistait à apporter un soutien aux entrepreneurs
agronomes.
|