INTRODUCTION
Ces dernières décennies, le monde fait face
à une course effrénée en technologies dans tous les
domaines. Les équipements électriques et électroniques
(EEE) deviennent plus sophistiqués avec une technologie en constante
amélioration. Les entreprises de fabrication de matériels
électriques et électroniques misent sur des techniques de
diffusion d'informations beaucoup plus rapides, sur des supports beaucoup plus
petits et moins encombrants. Ainsi, nous sommes passés du
téléphone manuel au téléphone intelligent, du
téléviseur à écran cathodique vers l'écran
numérique à haute définition, des gigantesques premiers
ordinateurs de recherche au MacBook Air, etc. La technologie évolue
rapidement et chaque marque lance méthodiquement et
régulièrement de nouvelles versions de ses produits ou plus
simplement de nouveaux produits. Ces technologies se succèdent inondant
ainsi les magasins, ce qui représente une tentation pour les
consommateurs qui sont en quête permanente de matériels de
dernière génération. Cette évolution les oblige
à acheter de nouveaux produits ou à mettre à jour leurs
anciens systèmes qui sont devenus inadaptés, incompatibles ou qui
ne peuvent simplement plus être réparés
(Lefèvre T., 2014). A cela s'ajoute la courte
durée de vie de la plupart des appareils électriques ou
électroniques. L'obsolescence programmée devient le meilleur
moyen pour les entreprises d'augmenter leur chiffre d'affaire en poussant le
consommateur à acheter de nouveaux matériels et mettre au rebut
les anciens. Ces derniers deviennent des déchets d'équipements
électriques et électroniques (DEEE) encore appelés
e-déchets ou e-waste. Les DEEE constituent une quantité
impressionnante de 44,7 millions de tonnes métriques (Mt) à
travers le monde, soit l'équivalent de 6,1 kilogrammes par habitant (kg
/ hab), de déchets électroniques par an en 2016, contre 5,8 kg /
hab en 2014. La quantité de déchets électroniques sera
estimée à 52,2 millions de tonnes métriques, ou 6,8 kg /
hab, d'ici 2021(BaldéC.P. et al, 2017).
La récupération et le recyclage des
métaux précieux et d'autres ressources contenues dans les
équipements électriques et électroniques, peuvent
réduire la demande en matière mais aussi créer des emplois
et générer des revenus. En effet, le marché des DEEE
mondiaux est estimé à410 milliards $ US par an, à
l'exclusion d'un très important secteur informel. Un trafic
international autour de l'exportation de ces déchets voit le jour.
Environ 15% d'entre eux ont été traités dans une
filière agréée. Entre 60 et 90% des
tonnages produits sont illégalement vendus ou enfouis, soit
l'équivalent de 62.000 à 95.000 Probo Koala en un an. Parfois
déguisés sous forme de dons « humanitaires », ces DEEE
proviennent principalement des pays de l'UE (Royaume-Uni, France et Allemagne
en tête) et inondent l'Afrique. Les DEEE européens envoyés
en Afrique occidentale en 2009 sont estimés à 220000 tonnes. Les
exportations de l'Allemagne vers les pays non européens en 2008 varient
entre 93 000 et 216 000 tonnes d'équipements électroniques
usagés (UNEP, 2015). Les experts sont
unanimes,
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l'Afrique est sur le point de devenir le continent-poubelle
des ordures toxiques des pays développés (Wane S.S et
Rochat D., 2009).
Pour la plupart des pays ouest africains comme le
Sénégal, il n'existe pas encore de réglementations
spécifiques aux DEEE ce qui augmente leur flux (Grippa C.,
2004). Certains équipements ont une durée de vie
très courte ou sont en fin de vie, pour d'autres il n'y a pas moyen de
les réutiliser ou réparer, ils se retrouvent à la
poubelle, destinés à être démantelés. La
composition des DEEE étant très variée, il est difficile
de définir une typologie exhaustive. Ils contiennent des substances
valorisables comme : les métaux précieux (or, argent,
platine...), les métaux ferreux (acier, fer, inox...), les métaux
non ferreux (aluminium, cuivre, bronze, plomb...), les plastiques et certains
composants dangereux nécessitant un traitement particulier
(Flipot F. et al, 2006). Ces derniers sont
toxiques ou connus pour être dangereux pour l'environnement et pour la
santé (cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques,
perturbateurs endocriniens...). Parmi eux, nous avons : le mercure, le plomb,
le cadmium, le chrome, l'amiante, les retardateurs de flammes bromés
(RFB), le polychlorure de vinyle (PVC), le baryum, le béryllium, le
phosphore... (Miserey Y., 2009).
Dans la plupart des pays en voie de développement, le
recyclage des DEEE est principalement assuré par le secteur informel
avec des méthodes rudimentaires dans des décharges sauvages qui
les exposent à des risques. Ce système d'exploitation
nécessite des mesures de protection individuelle mais aussi dans de
bonnes conditions pour éviter une pollution de l'environnement et une
exposition des travailleurs et de la population environnante aux substances
toxiques. Les professionnels sont les premiers exposés à la
poussière du matériel démantelé susceptible de
renfermer des particules de substances toxiques. Ces dernières
émises lors du stockage et du traitement des DEEE, pourraient être
à l'origine d'affections diverses chez des professionnels exposés
à des concentrations élevées sur une courte période
(intoxication aigue ou subaigüe) ou à des concentrations faibles
mais sur une longue période (intoxication chronique). Cette exposition
peut conduire à des maladies professionnelles telles que la dermatite,
l'asthme professionnel, la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO),
divers cancers... (SPLF, 2003)
Afin de prendre des mesures préventives contre les
maladies professionnelles qui sont très fréquentes dans la
filière de traitement des déchets, il est important
d'évaluer le niveau d'exposition des travailleurs aussi bien dans le
secteur informel que formel afin de réduire les risques de maladie
professionnelles.
C'est dans cette logique que nous nous sommes fixés
comme objectif principal d'évaluer le niveau d'exposition
professionnelle et la fonction ventilatoire des agents chargés du
recyclage des déchets
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d'équipements électriques et
électroniques (DEEE) dans le secteur formel. Il s'agissait plus
spécifiquement de procéder à :
· Analyser les conditions de travail des agents
chargés du recyclage des D3E et identifier les potentielles substances
libérées lors du recyclage de ces déchets
· Evaluer les différents niveaux d'exposition des
agents chargés du recyclage des DEEE.
· Explorer la fonction ventilatoire des agents par la
mesure des paramètres spirométriques.
Pour mener à bien cette étude, nous avons
commencé par une revue de la littérature portant sur les DEEE, le
cadre réglementaire et les risques liés à leur recyclage.
Pour terminer, nous avons fait une étude de cas qui portait sur
l'évaluation du niveau d'exposition professionnelle et de la fonction
ventilatoire des agents chargés du recyclage des déchets
d'équipements électriques et électroniques (DEEE) de
l'Agence de l'Informatique de l'Etat (ADIE)à travers un questionnaire et
une exploration des fonctions respiratoires par la spirométrie.
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