UNIVERSITÉ DE ROUEN
U.F.R. Sciences de l'Homme et de la
Société
Département Sciences de
l'Éducation
Laboratoire CIVIIC
Année universitaire
2012-2013
Les représentations sociales des enseignants
à l'égard de l'orientation de leurs
élèves
Cas des enseignants exerçant au collège dans la
région de Marrakech au Maroc
|
En vue de l'obtention du
Master 2 de recherche à distance
Francophone
Sous la direction de :
- Louise Bélair, professeur à
l'Université du Québec à Trois-Rivières -
Valérie Cohen-Scali, professeur à l'Université de
Caen
Saïd MAGOURI
N° d'étudiant : 20913117
Résumé :
Notre recherche s'inscrit dans le cadre des
inégalités sociales face à l'orientation scolaire. Ces
inégalités sont dues, pour partie, aux décisions
d'orientation généralement affectées par un ensemble de
biais sociaux (Duru-Bellat, 2002). Ceux-ci, sont largement structurés
par des représentations sociales qui prennent forme différemment
selon la personne qui décide (l'enseignant) et/ou qui demande
(l'élève) une orientation scolaire et le contexte social dont
cette personne évolue. Nous avons donc tenté d'aborder la
problématique de l'orientation sous l'angle des représentations
sociales des enseignants en nous appuyant, principalement, sur les travaux
d'Abric (2011) et de Moliner et al. (2002). Notre question
problématique est la suivante : «dans un contexte
différent que celui de l'Europe en l'occurrence le contexte marocain,
quelles seraient les caractéristiques des représentations
sociales, que se font les enseignants à l'égard de l'orientation
de leurs élèves? ». Pour répondre à
cette question, nous avons mené une enquête auprès de 12
enseignants de disciplines différentes exerçant dans un
collège à la ville de Marrakech. Cette enquête nous a
permis de mettre en exergue les éléments partagés par les
enseignants et qui ont trait à certains aspects de leur pratique
enseignante en matière d'orientation :
· L'orientation scolaire consiste soit à faire un
choix, soit à orienter l'élève (et non pas l'aider
à s'orienter), soit les deux. De plus, les filières scolaires
sont réduites aux deux filières dichotomiques (sciences et
lettres).
· Tout comme les prérequis d'une orientation
scientifique, ceux d'une orientation littéraire sont souvent
ramenés aux bonnes notes dans les disciplines de qualification.
· Le profil scientifique est qualifié plus
souvent par le raisonnement logico-déductif. Le profil littéraire
par le fait d'utiliser beaucoup de détails et d'informations dans
l'explication des choses.
· Les positions des enquêtés
vis-à-vis de leur rôle en orientation varient d'un rejet
catégorique à une reconnaissance délibérée
voire même une responsabilité affirmée. Leur
démarche d'aide à l'orientation consiste essentiellement à
conseiller l'élève (généralement sur la
façon d'envisager son choix d'orientation) et à la
vérification de ses capacités (à travers l'observation du
comportement de l'élève en classe et la passation d'un test
d'évaluation).
· Au regard de la note scolaire, les enseignants ont
deux attitudes opposées. D'une part, ils nient sa validité
prédictive et, d'autre part, ils considèrent qu'elle constitue le
seul critère plus ou moins objectif sur lequel ils peuvent se baser pour
prendre des décisions d'orientation.
· Les trois premiers critères retenus par les
enseignants pour prendre des décisions d'orientation sont les notes
chiffrées obtenues dans les disciplines qualifiantes (à l'une ou
l'autre orientation). Ils constituent les éléments centraux dans
les représentations sociales des enseignants quant aux critères
retenus en général.
L'hétérogénéité observée dès
le quatrième critère à retenir témoigne de la
diversité des approches personnelles que peuvent faire les enseignants
en l'absence des critères objectifs ou des critères reconnus et
désirés socialement. Ces autres critères (voeux
d'orientation, statut socioéconomique...) peuvent constituer les
éléments périphériques de ces
représentations sociales.
· Dans le contexte marocain, les représentations
stéréotypées relatives au genre et aux statuts
socioéconomiques (Channouf et al., 2005) ne se manifestent pas,
nous semble-t-il, de la même manière que dans le contexte
européen. Résultats qui doivent être analysés en
profondeur dans d'autres études à portée plus
généralisatrice avec des outils d'investigations plus
précis.
Mots-clés : orientation scolaire,
représentations sociales, pratique enseignante, profil
littéraire, profil scientifique.
Remerciements
C'est en pensant aux mots de remerciements que je me suis
rendu compte que ce travail de longue haleine n'aurait pas pu se
réaliser sans la contribution, l'aide et la patience d'un certain nombre
de personnes qui m'entourent. Qu'ils trouvent ici l'expression de ma profonde
gratitude.
Je pense en premier lieu, à mes deux directrices
de mémoire Mme Louise Bélair et Mme
Valérie Cohen-Scali qui ont su me guider dans la voie de la
recherche scientifique avec rigueur, méthodologie et subtilité.
Je leur remercie donc pour tout ce qu'elles ont apporté à mon
travail de mémoire, pour leur grande patience, leur confiance en moi,
leur encouragement et particulièrement leur
disponibilité.
Mes sincères remerciements s'adressent aussi aux
répondants à cette recherche (les enseignants au secondaire
collégial) et Mme la directrice du collège pour sa collaboration
dans l'organisation des entrevues.
Je tiens à remercier également mon
collègue Said Ouaboudou, cadre en orientation de l'éducation,
pour sa relecture de ce mémoire.
Enfin, mes plus sincères remerciements aux membres
de ma petite et grande famille qui ont su accepter que l'ordre des
priorités soit si injustement bouleversé pendant des mois. Merci
pour tout.
Table des matières
Résumé : i
Remerciements ii
Table des matières : iii
Liste des tableaux v
Liste des figures vi
Introduction générale 1
PARTIE I : CADRE PROBLEMATIQUE GENERAL
Chapitre I. Émergence de l'objet de recherche :
5
1.1. Rôle des représentations sociales dans les
processus d'orientation des jeunes : 5
1.2.Entrée épistémologique : l'orientation
en tant qu'objet social 7
Chapitre II. Problématique de la recherche :
11
PARTIE II : CONTEXTE DE LA RECHERCHE
Chapitre I. Aperçu sur le système
d'éducation au Maroc 17
1.1. Evolution historique du système éducatif :
17
1.2. Structure du système éducatif marocain :
19
1.3. Architecture du système scolaire au Maroc : 20
Chapitre II. Le système d'orientation scolaire et
professionnelle au Maroc: 21
2.1. Le processus d'orientation scolaire et professionnelle:
21
2.2. Organisation des services d'orientation : 21
2.2.1. Au niveau des districts scolaires de l'orientation :
22
2.2.2. Au niveau provincial : 22
2.2.3. Au niveau régional : 23
2.3. Procédure administrative d'orientation: 24
2.4. Les acteurs de l'orientation scolaire: 27
PARTIE III : APPORT THÉORIQUE
Chapitre I. Quelques déterminants de
l'orientation scolaire : 30
1.1. Définition : 30
1.2. Rôle des enseignants en orientation : 31
1.3. Inégalités sociales face à
l'orientation : 34
1.3.1. La sélectivité en orientation scolaire :
35
1.4. Les facteurs influençant les décisions de
l'orientation : 36
1.4.1. Influence de l'évaluation sur l'orientation des
élèves: 37
1.4.2. Les facteurs relatifs aux caractéristiques
personnelles : 38
1.4.3. Les facteurs relatifs au contexte : 40
Chapitre II. Perception sociale et
représentations sociales: 43
2.1. La perception sociale : 43
2.1.1. La formation d'impressions sur autrui : 44
2.1.2. Les théories implicites de la personnalité
: 44
iv
2.1.3. Le jugement des enseignants :
|
45
|
2.1.4. L'imaginaire collectif :
|
|
47
|
2.2. Les représentations sociales :
|
|
49
|
2.2.1. Définition du concept de représentations
sociales :
|
|
49
|
2.2.3. Les caractéristiques d'une représentation
sociale :
|
|
50
|
2.2.4. Fonctions des représentations sociales :
|
|
51
|
2.2.5. Le processus de formation des représentations
sociales
|
:
|
51
|
2.2.6. Processus de structuration des représentations
sociales
|
:
|
54
|
|
PARTIE IV : CADRE PRATIQUE
Chapitre I. Approche méthodologique :
|
|
59
|
Introduction :
|
|
59
|
1.1. Choix de la population :
|
|
59
|
1.2. Les outils utilisés :
|
|
60
|
1.2.1. L'entretien semi-directif :
|
|
62
|
1.3. Traitement et analyse des données obtenues :
|
|
64
|
1.3.1. Technique utilisée :
|
|
64
|
1.3.2. La démarche d'analyse de contenu:
|
|
64
|
1.3.3. Validité et fidélité de la
méthode utilisée :
|
|
67
|
1.4. Contraintes méthodologiques et limites de la
recherche :
|
|
68
|
Chapitre II. Présentation et analyse des
résultats :
|
|
70
|
2.1. Résultats de l'enquête par entretien
semi-directif:
|
|
71
|
2.1.2. La notion d'orientation scolaire vue par les enseignants
:
|
|
72
|
2.1.3. Facteurs influençant le choix d'orientation des
élèves:
|
|
75
|
2.1.4. Représentations des différentes
filières scolaires après la troisième
|
:
|
79
|
2.1.5. Pratiques enseignantes en matière d'orientation :
|
|
89
|
2.2. Résultats de l'activité (le cas
présenté aux enquêtés) :
|
|
101
|
2.2.1. Présentation des données :
|
|
101
|
2.2.2. Analyse des données recueillies de
l'activité :
|
|
106
|
2.2.3. Exploitation des données recueillies de
l'activité:
|
|
111
|
Chapitre III. Synthèse globale des
résultats de la recherche
|
|
118
|
Conclusion et perspectives
|
|
129
|
Bibliographie :
|
|
134
|
Sitographie :
|
|
138
|
Annexe n°1: Guide d'entretien
|
|
141
|
Annexe n°2 : Cas présenté aux
enquêtés
|
|
142
|
Annexe n°3 : Grille d'analyse thématique
|
|
143
|
|
Liste des tableaux
Tableaux
|
Intitulé du tableau
|
Pages
|
Tableau n°1
|
Les filières scolaires après la troisième
collégiale
|
24
|
Tableau n°2
|
Disciplines qualifiantes et caractéristiques
personnelles pour intégrer les troncs communs
|
25
|
Tableau n°3
|
Informations générales sur l'échantillon de
l'enquête
|
71
|
Tableau n°4
|
Notion d'orientation scolaire vue par les enseignants
|
72
|
Tableau n°5
|
Facteurs influençant le choix d'orientation des
élèves:
|
76
|
Tableau n°6
|
Pré-requis d'une orientation scientifique
|
81
|
Tableau n° 7
|
Profil d'un élève scientifique
|
28
|
Tableau n° 8
|
Prérequis pour une orientation littéraire
|
86
|
Tableau n° 9
|
Profil d'un élève littéraire
|
88
|
Tableau n°10
|
Rôle des enseignants dans l'orientation des
élèves
|
90
|
Tableau n°11
|
Influence des enseignants sur les choix d'orientation des
élèves
|
92
|
Tableau n°12
|
Démarches d'aide à l'orientation pratiquées
par les enseignants
|
93
|
Tableau n°13
|
Critères retenus pour se prononcer sur l'orientation d'un
élève
|
95
|
Tableau n°14
|
Évaluation de la procédure administrative
d'orientation par les enseignants:
|
97
|
Tableau n°15
|
Améliorations des pratiques enseignantes en orientation
selon les enseignants
|
99
|
Tableau n°16
|
Critères utilisés dans le cas
présenté aux enseignants
|
102
|
Tableau n°17
|
Répartition des critères proposés aux
enseignants selon leurs catégories
|
103
|
Tableau n° 18
|
Répartition des critères choisis par les
enseignants selon les scénarios proposés et la discipline
enseignée
|
104
|
Tableau n° 19
|
Répartition des critères choisis par les
enseignants selon les scénarii proposés, la discipline
enseignée et leurs catégories (genre, voeux d'orientation, statut
socioéconomique et notes chiffrées)
|
105
|
Tableau n° 20
|
Répartition des critères choisis par les
enseignants selon le type de scénario établi
|
106
|
Tableau n° 21
|
Classement décroissant des critères retenus en
fonction de leurs nombres d'apparition
|
112
|
Tableau n° 22
|
Classement décroissant des critères
utilisés par les enseignants en fonction de leurs indices d'importance
dans les scénarios scientifiques
|
114
|
Tableau n° 23
|
Classement décroissant des critères
utilisés par les enseignants en fonction de leurs indices d'importance
dans les scénarios littéraires :
|
116
|
|
vi
Liste des figures
Figures
|
Intitulé de la figure
|
Pages
|
Figure n°1
|
Architecture du système scolaire au Maroc
|
20
|
Figure n°2
|
Répartition des critères proposés aux
enseignants selon leurs catégories
|
103
|
Figure n°3
|
Répartition des critères choisis par les
enseignants selon le type de scénario établi
|
106
|
Figure n°4
|
v Répartition des critères choisis par
les enseignants dans les scénarios scientifiques
|
107
|
Figure n°5
|
Répartition des critères choisis par les
enseignants dans les scénarios littéraires
|
107
|
Figure n°6
|
Indice d'importance et type de critère utilisés
dans les scénarios scientifiques
|
115
|
Figure n°7
|
Indice d'importance et type de critère utilisés
dans les scénarios littéraires
|
117
|
|
N.B. : dans la présente recherche, le recours au masculin
pour désigner les personnes enquêtées a comme seul objectif
d'alléger le texte.
1
Introduction générale
On ne fait jamais une recherche sans qu'il y ait
écho en soi de l'objet, avec une survalorisation affective de certains
éléments en relation avec son histoire personnelle.
Jean-Michel Berthelot
En tant que professionnel de l'orientation, il nous arrive
souvent de rencontrer des personnes qui semblent avoir vécu, à un
moment donné de leur scolarité, une orientation perturbée.
Plusieurs sources peuvent en être la cause (le manque d'informations,
l'indécision, vouloir plaire au parent, le manque de maturité,
influence d'autrui, pairs, parents, professeurs...). Mais ce qui retient plus
notre attention c'est le rôle que jouent les enseignants dans
l'orientation de leurs élèves. En effet, suivant les entretiens
d'orientation que nous menons dans les établissements scolaires, il
s'avère que certains enseignants étaient en grande partie
responsables des choix d'orientation de leurs élèves ; soit en
les encourageant, soit en les démotivant. En tant qu'éducateurs
très proches des élèves, possédant un pouvoir de
jugement, et en fonction de la réussite ou de l'échec de
l'élève dans la matière qu'ils enseignent, les enseignants
peuvent renvoyer à l'élève (de manière souvent
inconsciente) un reflet de lui-même plus ou moins valorisant. Ceci peut
influencer l''image que l'élève se fait de lui-même et par
conséquent contribuer à la construction de son identité.
Ainsi certains parcours d'orientation peuvent se voir bouleversés par un
professeur non avisé des conséquences de sa pratique sur le
devenir scolaire et professionnel de ses élèves.
Comme le rappelle le rapport du Haut Conseil de l'Education
en France sur l'orientation scolaire de 2008, l'orientation est
étroitement liée à la pédagogie et à la
démarche d'évaluation. De ce fait, les enseignants ont donc
« un rôle naturel et essentiel » dans le processus
d'orientation des élèves. D'autant plus que leurs attentes
construites en fonction de certaines informations, représentations et
stéréotypes relatifs aux résultats scolaires, au sexe de
l'élève, à la catégorie sociale associée
à la réussite ou à l'échec... sont aussi
déterminantes (Mangard et Channouf, 2007, Pelletier, 2004).
Par ailleurs, et en tant que conseiller en orientation,
exerçant dans un district scolaire se composant de deux collèges
et un lycée, nous avons souvent l'occasion de rencontrer des
professeurs, de discuter avec eux des problématiques de l'orientation,
des choix des élèves. Mais c'est surtout lors des conseils de
classe réservés à l'orientation qu'on peut voir
émerger des positions, des opinions, des croyances et des
représentations à l'égard de l'orientation des
élèves. Ce que nous avons pu constater lors de ces conseils,
c'est que généralement les
2
enseignants se prononcent sur l'orientation des
élèves en se basant principalement sur les notes scolaires de
leurs élèves. Quand celles-ci sont en adéquation avec le
choix d'orientation de l'élève (selon nos constats,
l'adéquation pour les professeurs revient, à ce que les meilleurs
élèves doivent suivre une filière scientifique et les
faibles une filière littéraire), on lui accorde automatiquement
son choix sans tenir compte d'autres informations susceptibles
d'infléchir les décisions d'orientation. Quand c'est l'inverse ou
quand il s'agit des élèves moyens faibles, une brève
discussion peut alors avoir lieu. Quelques professeurs se trouvent
obligés d'aller voir la photo de l'élève, et on peut se
demander ici : comment peut-on délibérer sur le choix
d'orientation d'un élève qu'on ne connaît pas ? D'autres,
font ressortir des critères, des positions, des attitudes pour
décider de l'orientation de l'élève, tels que : la
conduite disciplinaire (on a tendance à juger défavorablement les
choix de certains élèves vu leurs cas disciplinaires),
l'état de santé... Mais surtout quand il s'agit d'un
élève dont on connaît les parents (professeur au
collège, ami d'un des professeurs présents dans le conseil), on
s'attarde, souvent, sur le choix exprimé par cet élève
pour veiller à ce que la décision d'orientation n'aille pas
à l'encontre des attentes des parents. Nous nous retrouvons donc devant
des situations où, à dossier scolaire identique des
élèves peuvent être orientés différemment.
N'est-il pas là un traitement inégalitaire des voeux
d'orientation des élèves ? N'interviennent-ils pas là
d'autres facteurs personnels, subjectifs outre que la valeur scolaire de
l'élève dans les décisions d'orientation ?
Dans le même ordre d'idées, nous avons eu
l'occasion, dans le cadre d'un projet ministériel visant l'instauration
d'un système efficient d'information et d'orientation au Maroc
(Programme d'Urgence 2009-2012), d'assurer une formation continue sur
l'orientation scolaire au profit d'une soixantaine de professeurs de
collège et lycée. Lors de ces sessions de formation, nous nous
sommes confronté à une résistance, un refus de la part
d'un certain nombre d'enseignants. Ceux-ci, lorsqu'on leur avait demandé
d'exprimer leurs attentes à l'égard de la formation, nous ont
répondu qu'ils assistaient à la formation par obligation
administrative et que ce domaine n'est pas le leur ; « c'est l'affaire des
conseillers en orientation ! ». Nous avons été surpris
d'entendre de telle déclaration. Suite aux ateliers de formation, il
nous est apparu que ces enseignants ont une représentation très
réductrice de la notion d'orientation et de leur rôle dans
l'orientation des élèves. Nous avons eu l'occasion aussi de
travailler avec une équipe ministérielle à la conception,
l'élaboration et l'expérimentation d'un guide des
activités d'information et de l'aide à l'orientation. Lors de
l'expérimentation du dit guide dans les établissements scolaires,
nous avons aussi constaté qu'un nombre important des enseignants ignore
leur rôle dans le processus d'orientation des
3
élèves. Pourtant ils y sont partie prenante
puisqu'ils doivent décider du devenir scolaire de l'élève
lors des conseils d'orientation.
Suite à tous ces constats, il nous a paru
intéressant de mener une recherche auprès de ces enseignants pour
identifier et analyser la façon dont ils se représentent, en
général, le domaine de l'orientation et en particulier
l'orientation de leurs élèves. Il serait question d'investiguer
les représentations qui influencent les positions des enseignants quand
ils apportent une aide à l'orientation ou quand ils sont amenés
à se prononcer sur les choix d'orientation des élèves. Tel
est l'objet de cette recherche qui se veut une recherche exploratoire sur la
pratique enseignante en matière d'orientation scolaire sous l'angle des
représentations sociales.
Notre recherche se structure da la façon suivante :
d'abord nous allons aborder le cadre problématique en explicitant, en
premier lieu, l'émergence de l'objet de recherche et, en deuxième
lieu, nous allons définir la problématique de la recherche.
Ensuite, et pour situer le contexte de notre recherche, un aperçu sur le
système d'éducation et d'orientation au Maroc sera
présenté. Une troisième partie constituera notre apport
théorique dont il sera question d'avancer les notions utilisées
pour orienter notre démarche de recherche. Nous développerons,
particulièrement, un ensemble d'aspects relatifs aux deux notions
fondamentales de cette recherche en l'occurrence l'orientation scolaire et les
représentations sociales. Et enfin, en dernière partie, nous
exposerons l'approche méthodologique et les résultats de
l'enquête du terrain.
4
PARTIE I : CADRE
PROBLEMATIQUE GENERAL
5
Chapitre I. Émergence de l'objet de recherche
:
1.1. Rôle des représentations sociales
dans les processus d'orientation des jeunes :
D'après les conseils d'orientation auxquels nous avons
assisté, nous avons constaté que les décisions
d'orientation se basent principalement sur l'évaluation scolaire des
élèves, en l'occurrence la note scolaire. Ceci nous a
interpelé pour mener une recherche en Master 1 sur l'influence de
l'évaluation, telle quelle est pratiquée à l'école,
sur l'orientation des élèves. Les résultats de cette
recherche nous ont permis de relever un constat premier : cette
évaluation ne permet pas à tous les élèves de faire
des choix d'orientation pertinents. En tenant compte de cet état de
fait, nous avons envisagé de poursuivre notre recherche en Master 2 sur
la même thématique mais en explorant davantage les
différentes possibilités permettant l'amélioration de
l'évaluation scolaire pour qu'elle soit beaucoup plus au service de
l'orientation des élèves. Cependant, et après une longue
réflexion, il est apparu qu'il serait judicieux de travailler sur les
représentations sociales et leur influence sur les décisions
d'orientation. En effet, les propositions d'orientation données par les
enseignants se basent effectivement sur la note scolaire, mais elles la
dépassent à un niveau beaucoup plus subjectif, notamment celui
des représentations que ces enseignants ont sur le devenir de
l'élève. Bien que l'intérêt porté aux
représentations sociales dans le champ éducatif a commencé
depuis les années soixante-dix, nous avons estimé que traiter la
problématique de l'orientation sous l'angle des représentations
sociales des enseignants constitue un objet de recherche à portée
heuristique. Ajoutons aussi que la question de l'orientation se joue, en
partie, au niveau de la relation maître-élève. Plusieurs
recherches ont confirmé que les élèves, surtout au
collège, considèrent le professeur comme étant l'acteur
privilégié en matière d'orientation (Conseil
supérieur de l'éducation, 1995). En effet, l'enseignant a un
rôle central dans le développement de certaines compétences
psychosociales chez les élèves, notamment les compétences
à s'orienter. Dans bien des cas, il est le modèle à
suivre. L'enseignant, conscient ou pas de ce rôle, pratique de
l'orientation et influence, de ce fait, le choix de l'élève. Du
point de vue institutionnel, l'enseignant est membre du conseil d'orientation
(seule instance responsable des décisions d'orientation) où il
est amené à se prononcer sur les choix d'orientation de ses
élèves. En amont, l'enseignant est appelé à
évaluer les performances de l'élève, et nous savons
à quel point cette évaluation est décisive dans le choix
de l'orientation. En effet, selon les résultats
6
de notre recherche en Master 1), la majorité des
enseignants enquêtés1 croit que les résultats
scolaires permettent de juger les capacités et les aptitudes des
élèves. 63,4% parmi eux estiment que l'orientation vers le tronc
commun scientifique doit se baser uniquement sur les résultats
scolaires. Ils déclarent même qu'ils sont incapables de se
prononcer sur les capacités de l'élève hors ses
résultats scolaires. Ils signalent aussi, qu'ils se sentent
influencés à des degrés différents par la
perception globale qu'ils ont de l'élève lors des conseils
d'orientation. Nous constatons donc, le poids des résultats scolaires
sur les décisions d'orientation.
Pour ces raisons nous avons envisagé d'explorer
davantage la pratique enseignante en matière d'orientation nous
intéressant à l'influence des représentations sur ces
pratiques. Faudrait-il signaler aussi que très peu d'études ont
pu explorer certaines facettes des représentations que les enseignants
se construisent autour de la problématique de l'orientation. En effet,
des chercheurs, tels Duru-Bellat (1986, 2002) Channouf (2004), Mangard et
Channouf (2007), Dumora et Lannegrand (1996), Bourdieu et Passeron (1964),
Baudelot et Establet (1971), Boudon (1973) ...), se sont penchés
principalement sur le rôle des déterminants socioculturels, les
résultats scolaires, l'appartenance socioprofessionnelle, le sexe, les
stéréotypes... dans les choix d'orientation. Par ailleurs, et
sans vouloir remettre en cause le rôle des enseignants dans l'orientation
des élèves, il nous semble légitime de nous demander si
les enseignants eux-mêmes sont en mesure d'identifier le profil de
l'élève susceptible de suivre avec succès sa scolarisation
dans une filière donnée. D'autant plus que les enseignants au
collège, au Maroc, n'ont jamais enseigné en secondaire qualifiant
et n'ont pas suivi au préalable des formations dans le domaine de
l'orientation. Comment peuvent-ils se prononcer sur l'orientation d'un
élève en ignorant, ou du moins avec des informations
éparses, les exigences de la poursuite des études dans une
filière ou dans une autre ? Il nous semble, que dans de telle situation,
l'enseignant mobilise des connaissances, des idées autour d'une
filière donnée et qu'il s'est construit au travers de son
histoire personnelle, des personnes rencontrées et de son contexte
d'exercice. Ce processus de construction fait appel aux représentations
sociales, à des théories subjectives élaborées par
les enseignants pour appréhender l'objet complexe qui est dans notre cas
l'orientation (Dann, Schlee et Wahl, 1982,1984 cités dans Anadon et
Minier, 1996). On pourrait se demander aussi si les professeurs qui ont suivi
une formation continue de deux jours dans le domaine de l'orientation ou ceux
qui se sont engagés dans l'expérimentation du guide des
activités de l'aide à l'orientation ont pu développer
certaine position à l'égard de l'orientation. Leurs
1 47 enseignants des matières dites de
qualification pour le tronc commun scientifique (matières scientifiques
et le français)
7
représentations dans ce domaine, sont-elles
restées inchangées ? Ou bien ont-elles connu une évolution
? Sur ce point, Vergès (1997) affirme que les représentations ne
se modifient que lentement, et lorsque des adultes suivent une formation de
quelques jours, voire de quelques semaines, ces représentations se
complexifient et peuvent ne pas changer.
Certes, les enseignants peuvent avoir des attentes
différenciées envers leurs élèves selon leur sexe,
leur environnement socioculturel, l'appartenance socioprofessionnelle de leurs
parents, leurs résultats scolaires... Ceci peut engendrer une pratique
professionnelle différenciée touchant, au sein des
établissements scolaires, les différents aspects de l'action
éducative y compris les décisions d'orientation :
[...les enseignants ayant tendance à soutenir
davantage les demandes plus ambitieuses des jeunes de milieu favorisé,
même avec un niveau de réussite moyen, alors que la prudence
domine face aux choix des jeunes de milieu plus populaire [...] les attentes
sont fondées sur les représentations, nécessairement
stéréotypées comme toute représentation, de
l'élève idéal, des élèves censés
réussir ou échouer et donc, sur toute une théorie
explicative implicite de l'échec scolaire, probablement
étayée par la vulgarisation des travaux sociologiques
eux-mêmes.] (Duru-Bellat, 2003, p. 57).
1.2. Entrée épistémologique :
l'orientation en tant qu'objet social
La problématique de l'orientation se situe, en
général, à l'intersection de trois dynamiques : la
dynamique du monde socio-économique, la dynamique du
développement personnel de l'individu et la dynamique des parcours de
formation (Pelletier et Dumora, 1984). Il est donc impératif, pour qu'un
individu, en situation d'orientation/transition, fasse un choix pertinent,
d'avoir la capacité de se positionner par rapport à ces trois
dynamiques. Cette capacité nécessite, d'une part, que l'individu
développe des stratégies de collecte d'informations, de prise de
décision et d'élaboration d'un plan d'action, et d'autre part,
qu'il lui soit possible d'accéder à des services/prestations de
conseil, d'aide à l'orientation et d'accompagnement tout au long de sa
vie. La complexité dans cette démarche réside dans
l'articulation entre ses aspirations/aptitudes et les possibilités
existantes de l'insertion sociale et professionnelle (Guichard, 2008).
L'orientation relève donc d'enjeux divers, d'autant plus que les
attentes vis-à-vis de l'orientation sont nombreuses et variées en
fonction des centres d'intérêt des acteurs en question
(politiques, économiques, enseignants, élèves, parents
d'élèves...). Le marché du travail, avec son
évolution qui fait la règle et sa stabilité qui fait
l'exception, constitue aussi
8
un énorme défi devant l'orientation des
élèves. Aujourd'hui, il n'est pas aussi simple pour un jeune de
se projeter dans l'avenir pour en démêler la carrière
professionnelle qui lui soit destinée.
Au niveau plus proche de l'élève à
savoir celui du contexte scolaire, les choix d'orientation relèvent de
quatre acteurs principaux : l'institution scolaire, les professeurs, les
parents et l'élève. Ces acteurs interagissent entre eux dans une
sorte de négociation qui se termine par une décision
d'orientation. Celle-ci peut satisfaire ou non la demande de
l'élève. Ces interactions font surgir des représentations
sociales que chaque acteur élabore sur soi, sur l'autre et sur la
situation (Abric, 1987 cité par Anadon et Minier, 1996). Ainsi les
parents ont des représentations du devenir scolaire de leur enfant qui
peuvent différer de celles de l'enfant lui-même et de celles de
ses enseignants. Ces derniers ont tendance à élaborer des
représentations sociales qui légitiment leurs pratiques
professionnelles (Gilly, 1988), voire anticipent leurs conduites (Abric, 1987,
Ibidem). La part des représentations sociales est donc grande
dans les choix d'orientation.
Etant donné que « l'orientation est
déclarée partie intégrante du processus d'éducation
et de formation... » (Levier 6, article 99, Charte nationale de
l'éducation et de formation, 1999), y a-t-il donc des recherches qui se
sont intéressées aux représentations sociales dans les
systèmes éducatifs ? Car comme l'ont souligné Roussiau et
Bonardi (2001) c'est en « regardant la forêt que l'on pourra se
faire une meilleure idée de l'arbre, en conservant visibles toutes les
alternatives, que l'on pourra former le projet d'en apprendre davantage sur la
pensée sociale telle qu'elle se formalise à travers les
représentations sociales. » (P. 226). En réponse à
cette question, Gilly (1989) nous rapporte qu'avant les années quatre
vingt-dix peu de travaux comme ceux de Mollo (1970, 1986) ou Siano (1985) qui
se sont intéressés à l'étude des
représentations sociales au sein de l'école. Pour lui, les
auteurs abordaient les représentations sociales
généralement sous certaines manifestations (attitudes,
stéréotypes...) ou bien elles sont évoquées en tant
que facteurs expliquant des résultats portant sur des faits qui n'ont
pas en eux-mêmes, statut de représentation sociale. Mais depuis,
il est devenu courant de s'intéresser aux représentations
sociales dans l'éducation (Baillauques, 1996). L'école, en tant
qu'espace d'interactions sociales entre différents acteurs
(élèves, enseignants, parents, agents éducatifs...),
« est un objet de prédilection pour les représentations
sociales» (Garnier et Rouquette, 2000, p.VII cités par Fontaine,
2007). Des auteurs ont étudié par exemple les
représentations sociales dans le champ de la didactique des disciplines
(Triby, 1992; Beitone et Legardez, 1997; Legardez, 2001, 2002 ; Simonneaux,
2004 cités dans
9
Legardez, 2004), des décisions de planification de
cours (Charleir, 1989; Roy, 1991 cités dans Bousquet, 2003), de la
formation (Baillauques, 1996), de l'échec scolaire (Emprin et Jourdain,
2010; Gosling, 1990 cités par Bousquet, 2003)... D'autres se sont
intéressés à l'étude d'une classe
particulière des représentations sociales en l'occurrence les
représentations professionnelles des enseignants (Blin, 1997).
Par ailleurs, Gilly (1989) insiste sur l'intérêt
de la notion des représentations sociales pour comprendre les faits de
l'éducation et ce, parce qu'elle « oriente l'attention sur le
rôle d'ensembles organisés de significations sociales dans le
processus éducatif. » (p. 382). De leur part Deschamps et al.,
(1982) cités par Gilly (1989), soulignent que les
représentations sociales permettent, d'une part, l'explication de
mécanismes par lesquels des facteurs proprement sociaux agissent sur le
processus éducatif et en influencent les résultats, et d'autre
part, elles favorisent les articulations entre psychosociologie et sociologie
de l'éducation. Le contexte scolaire est investi par différents
acteurs de différents niveaux (les politiciens, les gestionnaires, les
agents, les usagers) que chacun apporte un discours, une vision sur le
quotidien de l'école. De ce fait, il est un champ d'interaction sociale
par excellence favorisant la construction des représentations sociales.
Il est aussi « un champ privilégié pour voir comment se
construisent ; évoluent et se transforment des représentations
sociales au sein des groupes sociaux, et nous éclairera sur le
rôle de ces constructions dans les rapports de ces groupes à
l'objet de leur représentation ». (Ibid. p.348). Dans un
entretien mené par Bataille (2000), Moscovici caractérise la
question des représentations sociales dans l'éducation de «
tautologique ». Pour lui, l'éducation est diffusion de
connaissances qui sont en général des représentations
sociales ou du moins des connaissances saisies à travers des
représentations sociales.
Etant donné que l'orientation est une composante du
système éducatif, elle est donc sujette à des
représentations sociales. D'autant plus que son caractère
problématique (décrit ci-dessus) où se mêle ce qui
est psychologique, sociologique, culturel, économique et politique, lui
confère le statut d'un objet social complexe. Un objet qui se
prête bien au cadre des représentations sociales car celles-ci
constituent des formes «de connaissance, socialement
élaborée et partagée, ayant une visée pratique et
concourant à la construction d'une réalité commune
à un ensemble social » (Jodelet, 1989, p. 36). Selon Jodelet (1984)
cité par Nehme (2009), la théorie des représentations
sociales «devrait permettre d'unifier l'approche de toute une série
de problèmes situés à la croisée de la psychologie
et des autres sciences sociales » (p. 378). Cette théorie, que nous
allons présenter dans le cadre théorique de ce mémoire,
nous
10
permettra donc de mieux appréhender les enjeux de
l'orientation, de mieux cerner les différents discours, les
différents points de vue entourant cette notion et les pratiques
professionnelles qu'elle suscite. De plus, les pratiques professionnelles sont
liées aux représentations sociales de par la capacité de
celles-ci d'engendrer (Rocher, 2000), de guider (Rouquette, 2000) et de
prédire des conduites individuelles et collectives. Bref, les
représentations sociales «offrent des repères pour l'action
» (Rouquette, 2000, p. 18). En revanche, cette relation doit être
nuancée, car il peut y exister des différences entre les
représentations et les pratiques sociales (Moliner, Rateau, Cohen-Scali,
2002). Généralement, les résultats des recherches
menées sur cette thématique sont inférés à
partir des pratiques rapportées et non pas des pratiques effectives
(Abric, 1994).
Nous avons passé en revue un certain nombre de
recherches réalisées en contexte éducatif y compris notre
recherche exploratoire de Master 1 en sciences de l'éducation et ce,
dans l'entreprise de poser un ensemble de bases nous permettant
d'apprécier la pertinence de notre objet de recherche. Un objet qui se
prête, nous semble-t-il, parfaitement à la théorie des
représentations sociales. Cela étant, notre problématique
de recherche, que nous allons exposer par la suite, s'inscrit dans un cadre
plus global à savoir celui des inégalités sociales face
aux systèmes scolaires.
11
Chapitre II. Problématique de la recherche :
Depuis plus de trois décennies, les chercheurs n'ont
cessé d'interroger le fonctionnement inégalitaire des
systèmes éducatifs. Pour ce faire, « ouvrir la boîte
noire » (Haech, 1990) constitue la solution sine qua non
permettant de saisir, d'appréhender le système
éducatif par rapport à ses différents enjeux sociaux,
culturels, politiques et économiques. La boîte noire n'est autre
que l'école ou la classe. Cette boîte noire constitue un champ de
recherche intéressant bon nombre de chercheurs soucieux de la
problématique d'inégalités de chance face à
l'école. Une problématique qui reste inscrite à l'ordre du
jour dans les politiques éducatives. Les chercheurs ont souvent une
tendance d'aborder cette problématique « in vivo au coeur
même de l'enceinte scolaire » (Ibid., p. 151). Bien que les
systèmes scolaires soient démocratisés en grande partie,
dans les pays industrialisés et dans une moindre mesure dans les pays en
voie de développement (notamment le Maroc), ce qui a
atténué considérablement les inégalités
sociales en matière d'accès à l'éducation
(inégalité d'ordre quantitatif), nous assistons toujours à
une certaine inégalité de nature différente ;
inégalité des parcours (inégalité d'ordre
qualitatif) car « Il ne suffit donc pas de fréquenter
l'école pour éliminer les inégalités scolaires : il
faut aussi s'assurer que les chances de réussite ne sont pas
biaisées par l'origine sociale ». (Orivel en
préfaçant le document produit par Duru-Bellat, 2003, p.12). Pour
Duru-Bellat (2002), deux mécanismes expliquent ces
inégalités sociales de parcours scolaires. Le premier concerne
l'inégalité de réussite qui débute dès le
primaire et continue, en s'accumulant, tout au long de la scolarité.
Quant au deuxième qui vient accentuer les effets du premier, il
correspond aux inégalités de choix scolaires qui surgissent
à chaque palier d'orientation (à possibilités
équivalentes des élèves peuvent s'orienter
différemment).
Dans un article publié dans l'« Observatoire des
inégalités » 2 en novembre 2008, Duru-Bellat
réaffirme que dans les inégalités sociales de
carrières scolaires3, les inégalités de choix
et d'orientation pèsent autant que les inégalités de
réussite. Elle observe que des élèves, à
réussite scolaire identique, connaissent des destinées scolaires
très divergentes. Plus récemment encore, Caille (2005) a mis en
évidence qu'avec une moyenne comprise entre 10 et 12 sur 20 en
contrôle continu du brevet, presque tous les enfants des cadres demandent
une orientation vers la seconde générale et technologique. Par
contre, ce choix d'orientation ne
2
http://www.inegalites.fr/spip.php?article955&id_mot=31
consulté le 30/07/2012
3 A ce sujet Duru-Bellat, Jarrousse et Mingat (1993)
ont observé « un continuum entre les enfants d'ouvriers (qui
accèdent à un second cycle long à hauteur de 31,9%) et de
cadres supérieurs (pour lesquels le chiffre correspondant est de 86,8%)
» (p. 48)
12
concerne que les trois quarts des enfants des employés
et les deux tiers des enfants d'ouvriers. Il s'agit là d'une orientation
nettement différenciées socialement. Pour Duru-Bellat (2008), si
la méritocratie est respectée, seule la valeur scolaire
(réussite académique) décidera de l'avenir scolaire des
élèves. En d'autres termes, si deux élèves ont le
même niveau scolaire ils devront avoir la même destinée
scolaire. Mais la réalité semble différente. On voit bien
ici l'enjeu de l'orientation dans les inégalités sociales face
à l'école.
Sur cette thématique, les travaux de Duru-Bellat se
rapportent principalement au contexte européen. Dans le document produit
pour l'UNESCO en 2003, elle affirme que les conclusions auxquelles elle a
abouti ne peuvent pas être transférables dans d'autres contextes
très différents du point de vue culturel et économique.
Pour soutenir ses affirmations, elle s'appuie, entre autres, sur les travaux de
Heyneman et Loxley (1983). Ces deux chercheurs ont montré que certaines
variables, telle que l'origine sociale, expliquant l'inégalité
sociale face à l'école dans les pays industrialisés, n'ont
pas le même pouvoir explicatif dans les pays en voie de
développement. D'autres variables doivent être mises en avant pour
expliquer ces inégalités, notamment les ressources
matérielles destinées à l'enseignement. Néanmoins,
Duru-bellat, souligne que les constats et les analyses réalisés
dans le contexte européen ne sont pas sans valeur au-delà de leur
contexte, notamment en ce qui concerne les choix de filière. A cet
endroit, Duru-Bellat observe que dans de nombreux pays « chaque fois que
des choix de filières ou d'orientation se présentent, qu'à
niveau scolaire comparable, les enfants de milieu populaire visent moins haut
(notamment quand ils sont de niveau scolaire médiocre), ou se rallient
plus volontiers aux conseils, par ailleurs plus prudents, de leurs enseignants.
» (Idem, p. 27). Dans le même document, elle estime qu'il
est impératif pour saisir les inégalités sociales face
à l'école de commencer par la détermination des
différents milieux sociaux qui l'entourent puis d'aller fouiller en
profondeur le fonctionnement de la famille, de l'école et de ses
classes. Pour Heyneman et Loxley (1983) cités par Duru-Bellat (2003),
les inégalités de la réussite scolaire, dans les pays en
voie de développement, s'expliquent beaucoup plus par les facteurs
scolaires que les facteurs familiaux.
C'est dans ce sens, et étant donné que le Maroc
est un pays en voie de développement, que nous envisageons, dans le
cadre de ce mémoire, d'aborder les inégalités face
à l'école et plus particulièrement les
inégalités face à l'orientation ayant un lien avec les
facteurs scolaires. Notre propos est que ces inégalités,
au-delà de leur genèse en contexte familial et social, se
présente avec acuité dans le fonctionnement même du
système éducatif et de ses différentes composantes.
L'orientation en est une de ces composantes qui semble incarner une part
13
importante des inégalités face à
l'école. Des inégalités irréparables puisqu'elles
touchent d'une manière irréversible l'avenir scolaire et
professionnel des élèves.
A ce sujet, Duru-Bellat (1986) constate que l'orientation
telle qu'elle fonctionne est sujette à beaucoup d'interrogations «
sur le bien fondé de décisions, aussi lourdes de
conséquences pour les élèves, porteuses
d'inégalités sociales spécifiques, assises sur des
critères aussi incertains » (p. 24). Pour en être convaincu,
il suffit de remarquer, comme on l'avait constaté au départ, que
l'orientation se base principalement sur des évaluations le moins que
l'on puisse dire est qu'elles sont faites à des fins autres que celles
d'orientation.
Par ailleurs, plusieurs travaux, notamment (Dumora et
Lannegrand, 1996, Channouf, Mangard, Baudry et Perney, 2005, Mangard et
Channouf, 2007), ont souligné l'existence des biais sociaux
(généralement des stéréotypes) affectant le
jugement professoral lors de décisions d'orientation des
élèves. D'autres expériences4, telles que
celles de Bodenhausen et Lichtenstein datant de 1987, appuient ce constat en
démontrant que lorsque le juge (le professeur) est amené à
effectuer une tâche complexe (par exemple la prédiction de la
réussite scolaire de l'élève) des
stéréotypes affectent son jugement même en présence
d'informations individuelles (dossier scolaire de l'élève), ce
qui n'est pas le cas quand il s'agit d'évaluer les acquis disciplinaires
de ses élèves (tâche simple). Les
stéréotypes, ici, permettent au professeur de simplifier la
tâche relative à l'inférence du devenir scolaire et
professionnel de l'élève. Ils jouent ainsi le rôle de
principes centraux d'organisation conduisant le professeur à retenir les
informations conformes aux stéréotypes en jeu et négliger
les informations non conformes. Ceci constitue un biais affectant ses
jugements. Merle (1998) cité par Annette Jarlégan et Youssef
Tazouti (2007) confirme lui aussi l'effet produit par les
stéréotypes sur le jugement des professeurs. Il avance que
lorsque les professeurs sont amenés à juger leurs
élèves, ils retiennent inconsciemment des informations
caractérisant leurs élèves telles que le sexe, l'origine
sociale ou le retard scolaire. En effet, plusieurs recherches ont
vérifié que la classe sociale influence le jugement des
professeurs ; plus elle est favorisée plus les jugements sont
favorables, à performance scolaire comparable des élèves.
Le genre aussi influence le jugement des professeurs ; Duru-Bellat et
Jarlégan, (2001) cités dans Jarlégan et Tazouti
(2007) affirment que les professeurs ont des différenciations
sexuées concernant les performances des filles et des garçons
dans certaines disciplines : les mathématiques pour les garçons
(et c'est dû à leur talent et quand des filles excellent dans
cette matière c'est plutôt dû à leur travail) et le
français pour les filles.
4
http://www.psychologie-sociale.com/index.php?option=com_content&task=view&id=127&Itemid=83
consulté le 01/08/2012
14
Globalement, les stéréotypes relatifs aux
classes sociales, au genre, au retard scolaire, à l'espace
géographique... affectent d'une manière ou d'une autre le
jugement professoral émis à l'égard des
élèves et surtout lors des décisions d'orientation. C'est
ce qui ressort d'un ensemble de recherches, y compris celles citées
ci-dessus, menées dans les pays industrialisés et qui
n'étudient les biais sociaux liés aux décisions
d'orientation qu'à travers les effets présumés des
stéréotypes. Or ces mêmes stéréotypes sont
des éléments parmi d'autres constituant les
représentations sociales (pour Moscovici (1976), le contenu d'une
représentation sociale est constitué de trois types
d'éléments ; les opinions, les attitudes et les
stéréotypes) qui, « en tant que systèmes
d'interprétation régissant notre relation au monde et aux autres,
orientent et organisent les conduites et les communications sociales»
(Jodelet, 1989, p.53). Suite à cela, il nous paraît judicieux
d'appréhender la pratique enseignante en matière d'orientation
sous l'angle des représentations sociales.
Nous nous demandons donc, dans un contexte
différent que celui de l'Europe en l'occurrence le contexte marocain,
quelles seraient les caractéristiques des représentations
sociales, que se font les enseignants à l'égard de l'orientation
de leurs élèves ?
Pour répondre à cette question centrale de
notre recherche, d'autres questions secondaires doivent aussi faire l'objet
d'une investigation particulière :
> Comment les enseignants se représentent-ils la
notion de l'orientation scolaire ?
> Pensent-ils qu'ils ont un rôle à jouer dans
l'orientation scolaire de leurs élèves ? Et comment ce rôle
se décline au niveau de leur pratique professionnelle?
> Comment se représentent-ils les
différentes filières scolaires après la troisième
collégiale ?
> Quelles sont les critères/indices que les
enseignants ont tendance à utiliser pour se prononcer sur l'orientation
de tel ou tel élève ?
Notre objectif opérationnel est donc de
déterminer les éléments constitutifs de ces
représentations et leurs structures. En d'autres termes, ce qui y fait
consensus, ce qui y est stable, collectif, individuel, ce qui y est le noyau
central, et ce qui y est périphérique.
15
Intérêts de la recherche :
Etudier les notions de représentations sociales et
d'orientation nous place de facto dans le cadre des études
interdisciplinaires. Des études qui se rapportent à la
psychologie, à la sociologie et à la psychologie sociale. Ceci
constituera, pour nous, une occasion d'élargir notre champ de
connaissances en sciences sociales.
Par ailleurs, notre recherche s'insère dans le cadre
de l'exploration des pistes permettant de réduire les
inégalités sociales face à l'orientation et ce, à
travers la mise en exergue et en suite la réduction des biais sociaux
lors des décisions d'orientation en conseil de classe. De ce fait, nous
estimons que notre recherche apportera sa petite pierre à
l'édifice concernant les problématiques théoriques autour
de ce sujet.
Plus pratiquement encore, notre étude permettra
d'éclairer les processus mis en oeuvre par les enseignants dans leurs
pratiques d'orientation. Ce qui constituera une première étape
pour l'amélioration et l'optimisation des décisions d'orientation
et par la suite veiller à une meilleurs justice scolaire et sociale.
Nous aurons aussi l'occasion, en tant que professionnel de
l'orientation, de saisir les résultats de cette recherche et de les
partager avec les enseignants pour les sensibiliser sur leur rôle
prépondérant dans l'orientation de leurs élèves.
Leur faire prendre conscience des facteurs qui agissent à leur insu lors
des décisions d'orientation.
16
PARTIE II : CONTEXTE DE LA
RECHERCHE
17
Chapitre I. Aperçu sur le système
d'éducation au Maroc
1.1. Evolution historique du système
éducatif :
Partant d'un rapport analysant l'éducation au Maroc,
publié par l'UNESCO en 2010, nous pouvons relever que le système
éducatif marocain a connu une évolution qui s'est
influencée, à des périodes différentes, par la
situation politique et économique qui régnait dans le pays :
La période coloniale (1912-1956) et son faible
héritage de l'éducation :
Outre son caractère ségrégatif, le
système éducatif hérité de la période
coloniale française et espagnole avait marginalisé l'enseignement
musulman traditionnel et avait laissé, en 1956, un taux
d'analphabétisme des adultes estimé à 82% avec un faible
accès à l'éducation de base (environ 187 000
élèves étaient inscrits dans les écoles coloniales,
23 000 dans les écoles « libres » nationalistes, et 2 500 dans
les institutions traditionnelles d'éducation).
Elargissement de l'accès (1960/1970)
:
Après l'indépendance (1956), la politique
éducative du pays avait accordé une importance première
à la généralisation de l'enseignement primaire. Ainsi, sur
une période de dix années, le taux d'accès à
l'enseignement primaire est passé de 18% à 53%. C'est
après cette décennie qu'on a commencé à
s'intéresser à l'enseignement secondaire. De même,
l'enseignement privé a été encouragé dans un but
d'alléger les dépenses publiques. On signale aussi qu'à
cette époque l'enseignement marocain était un tremplin pour tout
un chacun souhaitant une ascension sociale. On peut dire qu'à cette
période, le Maroc s'est frayé son chemin vers la modernité
et la cohésion nationale.
La déscolarisation des années 1980
:
La crise de 1980 associée aux changements
économiques à l'échelle mondiale avait contraint les
autorités marocaines d'adopter des politiques d'ajustement structurel.
Ces politiques se sont répercutées sur les performances du
système éducatif marocain réalisées jusqu'à
l'heure. Bien que le taux d'accès continu d'augmenter dans
l'enseignement secondaire, l'enseignement primaire, quant à lui, a connu
une régression importante surtout au niveau de la scolarisation en monde
rurale.
18
La quasi généralisation du primaire depuis
1997 :
Cette situation de régression n'a duré qu'une
seule décennie. Et c'est grâce à la relance
économique des années 90 que le taux de scolarisation au primaire
a commencé de grimper à nouveau, d'autant plus qu'un gouvernement
socialiste vient d'être établit en 1997. Ce dernier avait
fixé l'objectif, qualifié d'historique, de la
généralisation de l'enseignement primaire et la réduction
des disparités entre les régions et les sexes. Cet objectif est
actuellement totalement atteint.
La crise de la qualité de l'éducation
:
Après avoir réalisé des progrès
importants en matière de généralisation de la
scolarité, les autorités marocaines ont changé de
perspective passant d'une préoccupation d'ordre quantitative à
une autre d'ordre qualitative. En effet, des taux élevés
d'abandons et de redoublements, touchant presque tous les niveaux de
scolarisation, continuent d'être enregistrés. De surcroît,
le système scolaire actuel souffre d'une faiblesse en matière des
acquis scolaires et une inadéquation entre les outputs du système
et les besoins du marché du travail. Il s'agit, en fait, d'une crise de
la qualité de l'éducation qui continue de peser sur les
politiques éducatives dans le pays.
La Charte Nationale de l'Education et de la Formation
(2000) :
C'est en 1999 que la Commission Spéciale d'Education
et de Formation (COSEF) a pu établir un diagnostic alarmant de la crise
de l'éducation au Maroc. Suite à cela, le Maroc avait
lancé une profonde réforme de son système éducatif.
Une réforme qui a trouvé appui sur une Charte Nationale de
l'Education et de la Formation (CNEF) articulant une nouvelle vision à
l'horizon 2020. On commençait alors à sentir des
améliorations sur plusieurs niveaux : la disparité relative au
genre et au milieu de résidence, des curricula, gestion du
système...
La réforme de l'enseignement supérieur
:
La réforme lancée en 2000 ne se limitait pas
l'enseignement scolaire, l'enseignement supérieur a connu lui aussi une
réforme. On assistait alors à la mise en place du système
Licence-Master-Doctorat (LMD).
Le Plan d'Urgence (2009-2012) :
Après une décennie de réforme
lancée à la suite de la CNEF, le système éducatif
marocain continue d'afficher de faibles indices de scolarité sur tous
les niveaux. Ceci avait
19
alerté les responsables et les avait poussé vers
le lancement d'un Plan d'Urgence (P.U) pour la période 2009-2012. Ce
plan avait pour objectif de donner un nouveau souffle à la
réforme entamée. Sous le gouvernement actuellement en place, on
affiche une fois de plus l'échec de la majorité des projets
lancés dans le cadre du P.U. Un autre plan d'action étalé
sur la période 2012-2015 est lancé dans une tentative
d'opérer les réajustements nécessaires afin
d'améliorer le rendement du système éducatif (c'est en
quelque sorte, un second souffle de la réforme éducative).
Retenons donc, comme nous l'avons signalé au
départ, que les politiques éducatives, à chaque moment de
l'histoire du Maroc, ne semblent pas avoir été fondées sur
une réflexion scientifique et méthodologique permettant d'assoir
un système éducatif sur des bases solides. Ces politiques,
sembleraient, plutôt tributaires des conjonctures économiques et
sociales traversant le pays.
1.2. Structure du système éducatif
marocain :
Le système éducatif marocain se répartie
en cinq sous-systèmes qui peuvent relever, selon les décisions
politiques, d'un ou de plusieurs ministères :
- le sous-système scolaire comportant le
préscolaire, le primaire, le secondaire et le post-secondaire relevant
du Ministère de l'Education Nationale ;
- le sous-système d'enseignement supérieur de
la formation des cadres et de la recherche scientifique relevant du
Ministère de l'Enseignement Supérieur ;
- le sous-système de l'alphabétisation et
d'éducation non formelle relevant du Ministère de l'Education
Nationale ;
-Le sous-système de la formation professionnelle
relevant du Ministère de l'Emploi et de la Formation Professionnelle;
-le sous système d'enseignement originel relevant du
Ministère des Habous et des Affaires Islamiques.
Suite à la réforme engagée en 2000,
résultat de la Charte Nationale d'Education et de Formation, le
système éducatif s'est vu doté des structures
éducatives décentralisées et déconcentrées
dont en particulier les Académies Régionales d'Education et de
Formation et les conseils des universités qui disposent d'une certaine
autonomie administrative et financière.
20
Le système éducatif marocain est en grande
partie public. Selon un rapport du Conseil Supérieur de l'Enseignement
(CSE) publié en 2008, seulement 7% de l'offre éducatif
relève du secteur privé.
1.3. Architecture du système scolaire au Maroc
:
Figure n° :1
Source : Conseil Supérieur de l'Enseignement. Rapport
Annuel
21
Chapitre II. Le système d'orientation scolaire
et
professionnelle au Maroc:
2.1. Le processus d'orientation scolaire et
professionnelle:
Pour expliquer brièvement le processus d'orientation
scolaire et professionnelle dans le contexte marocain, nous allons nous
référer à la Charte Nationale d'Education et de
Formation.
La Charte a consacré le levier 6 à la question
de l'orientation. Ce levier est intitulé « Orientation
éducative et professionnelle » (de l'article 99 à l'article
103). L'article 99 dispose que « l'orientation est déclarée
partie intégrante du processus d'éducation et de formation »
; c'est-à-dire que l'orientation n'est plus considérée
comme une entité isolée, mais plutôt comme une
entité faisant partie d'un processus qui est celui d'éducation et
de formation. Selon cet article, le Maroc adopte une approche éducative
de l'orientation scolaire et professionnelle des élèves.
L'orientation est conçue donc, dans le dessein d'accompagner et de
faciliter la maturation vocationnelle des individus ; c'est-à-dire la
maturation des choix éducatifs en premier lieu, mais surtout celle des
choix professionnels des apprenants. Quant à l'article 100, il asserte
que la progression des apprenants dans les divers cycles éducatifs ne
dépend plus des quotas, ni des seuils moyens de passage, mais uniquement
de leur mérite, de leurs choix éducatifs et professionnels. Ces
derniers sont évalués et arrêtés non seulement par
le conseiller en orientation mais par celui-ci en concertation avec les
professeurs et les parents (ou tuteurs) de ces apprenants, si ces derniers sont
des mineurs. De même, la porte de la réorientation est ouverte
à tout apprenant éprouvant le besoin de changer de filière
ou de section.
2.2. Organisation des services d'orientation :
Pour accompagner les réformes lancées dans le
système éducatif en général et le système
d'orientation en particulier, le ministère de l'éducation
nationale avait lancé, dans le cadre du Plan d'Urgence (2009-2012), un
projet (E3P7) visant la mise en place d'un système d'information et
d'orientation efficient. Quatre mesures ont été alors prises :
- Mise à disposition de l'information au profit des
bénéficiaires ; - Développement de l'orientation active
;
- Mobilisation des parties prenantes auteur de l'orientation
;
22
- Renforcement des ressources humaines quantitativement et
qualitativement.
En 2010, une note ministérielle5 avait
organisé les structures de service de l'orientation éducative
selon trois niveaux :
2.2.1. Au niveau des districts scolaires de l'orientation
:
Un district scolaire est composé
généralement d'au moins deux établissements de
l'enseignement secondaire (lycée ou collège). Les conseillers
d'orientation affectés dans les districts sont censés aider les
élèves et les conseils de classes à prendre des
décisions objectives en matière d'orientation éducative et
professionnelle. Ainsi, ladite note a chargé les conseillers
d'orientation d'un certain nombre de tâches. Citons entre autres :
· Aider l'apprenant à mieux se connaître;
· Assurer l'information complète et pertinente des
apprenants et de leurs parents sur les possibilités d'études et
de travail ;
· Mener des activités permettant aux apprenants
la formulation de leurs choix d'orientation et l'élaboration de leurs
projets professionnels ;
· Participer à l'évaluation des aptitudes
et des difficultés d'apprentissage des apprenants ;
· Conseiller les actions d'appui pédagogique
nécessaires;
· Etudier et exploiter le dossier scolaire de
l'apprenant ;
· Participer aux différents conseils de
l'établissement à l'exception des conseils d'enseignement ;
· Participer à la coordination des interventions,
en matière d'aide à l'orientation, menées par les
différents acteurs éducatifs.
2.2.2. Au niveau provincial :
Pour permettre à toute la population de
bénéficier des services d'orientation, le département de
l'enseignement scolaire a crée des centres provinciaux d'information et
d'aide à l'orientation (CPIAO) auprès des
délégations du ministère de l'éducation nationale.
Ces centres ont pour mission de :
· Diffuser l'information sur l'enseignement
préscolaire, primaire et secondaire ainsi ses débouchées
professionnelles et universitaires au Maroc et à l'étranger.
5 Note cadre numéro 17 organisant le domaine
de l'orientation éducative, ministère de l'éducation
nationale, 2010.
·
23
Fournir le conseil et l'information aux visiteurs de ces
centres et mener des entretiens individuels avec les jeunes porteurs de projets
personnels ;
· Contribuer à l'orientation et à
l'évaluation pédagogiques ;
· Coordonner avec les départements de
l'enseignement supérieur et de la formation professionnelle pour
réaliser des actions communes en matière d'orientation ;
· Organiser et animer des forums des métiers et
des rencontres d'information et d'aide à l'orientation ;
· Réaliser des études et enquêtes en la
matière ;
2.2.3. Au niveau régional :
En plus des missions assignées au CPIAO, les centres
régionaux d'information et d'aide à l'orientation(CRIAO)
implantés au niveau régional, s'occupent de :
- la coordination entre les CPIAO relevant de la région
;
- l'investigation relative aux études, formations et
métiers ;
- production des documents de référence et des
supports d'information sur les études,
les formations et les métiers ;
- distribution de ces documents et supports sur l'ensemble des
CPIAO et des districts
scolaires d'orientation de la région ;
Pour assurer la coordination, la planification, l'encadrement,
le suivi et l'évaluation des structures de service, le système
d'orientation marocain est doté de deux autres structures. Une pour
l'encadrement et l'autre administrative. Ces deux structures oeuvrent à
différents niveaux (provincial, régional, central).
24
2.3. Procédure administrative d'orientation:
Au Maroc l'orientation scolaire des élèves
intervient dans trois paliers différents ; à la fin de la
troisième année du secondaire collégial, en tronc commun
et en première année du Baccalauréat. Le palier de la
troisième année constitue l'étape la plus importante dans
le cheminement scolaire des élèves. Les filières scolaires
après la troisième collégiale ainsi que leurs exigences en
matière des acquis disciplinaires et caractéristiques
personnelles se présentent comme suit :
Tableau n° 1 : Les filières scolaires
après la troisième collégiale
Les filières de l'enseignement secondaire
qualifiant
|
La 1ère année
Le cycle des troncs communs
|
Enseignement Originel
|
|
|
|
2ème et 3ème
années
Le cycle de Baccalauréat Les filières
|
Enseignement Originel
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Source : Secrétariat d'Etat à l'Enseignement
Scolaire (SEES), 2007.
Tableau n° 2 : Disciplines qualifiantes et
caractéristiques personnelles pour intégrer les troncs communs
Tronc commun
|
Disciplines qualifiantes
|
Caractéristiques personnelles
|
Lettres et Sciences Humaines
|
Langue arabe Langue française Education islamique
HistoireetGéographie
|
Intérêt pour la littérature et les sciences
humaines, capacité d'expression écrite et orale, capacité
d'analyse, esprit critique, intérêt pour la lecture,
intérêt pour l'art, la poésie, les romans, le
théâtre, le cinéma,
|
Tronc commun Scientifique
|
Mathématiques Sciences physiques Sciences naturelles
Langue française
|
Intérêt pour l'exploration et la recherche
scientifique, capacité d'observation, capacité de
réalisation des diagrammes et des courbes, esprit d'analyse et de
raisonnement scientifique, intérêt pour
l'expérimentation,
|
Tronc commun Technologique
|
Mathématiques Sciences physiques Langue
française
|
Intérêt pour le travail manuel, bonnes conditions
physiques, esprit d'organisation, de gestion, capacité d'observation,
d'analyse, de raisonnement scientifique, esprit entrepreneurial,
caractère social, compréhension et analyse des données
économiques,
|
Enseignement Originel
|
Langue arabe
Education islamique HistoireetGéographie
|
Prédisposition à étudier les disciplines
islamiques, capacité d'apprendre le coran, le hadith...
|
|
25
Source : Guide d'orientation, centre régional
d'information et d'aide à l'orientation, Rabat, 2013.
26
À l'issue du cursus collégial, l'orientation
consiste à répartir les élèves, en
référence à des taux et des procédures
d'orientation fixés par l'État et fondés
généralement sur la seule performance scolaire traduite par la
notation. La note ministérielle 90/2007, distingue en plus de
l'orientation vers les troncs communs présentés ci-dessus, deux
autres opérations de l'orientation. Il s'agit de :
- la réorientation dans l'enseignement secondaire
qualifiant.
- l'orientation et la réorientation vers la formation
professionnelle.
Pour accomplir ces différentes opérations
d'orientation la note (Ibid) prévoit deux phases
d'orientation :
- la préparation à l'orientation avec son volet
information, éducation à l'orientation : les élèves
bénéficient des séances d'informations collectives et/ou
individuelles dispensées par un conseiller en orientation et ce,
dès la première année collégiale. En début
du mois de Mars, les élèves de la troisième année
collégiale doivent remplir leurs fiches de voeux en choisissant entre le
tronc commun scientifique, littéraire, technologique, enseignement
originel ou bien en optant pour une formation professionnelle.
- l'affectation proprement dite dans un établissement
et à une spécialité selon les voeux des
élèves et de leurs familles et les capacités d'accueil du
système. La tâche d'affectation est conférée au
conseil d'orientation de chaque établissement qui se réunit
à la fin de l'année scolaire pour l'orientation et au
début de l'année pour la réorientation. Il se constitue
des membres suivants :
· le chef de l'établissement comme chef du
conseil
· les surveillants généraux.
· le conseiller en orientation
· les professeurs de la classe en question.
· un représentant de l'association des parents
d'élèves de l'établissement.
Pour prendre des décisions d'orientation à
l'égard des élèves, le conseil d'orientation retient les
critères suivants :
· le choix de l'élève exprimé sur la
fiche des voeux.
· les capacités de l'élève, ses
qualifications et ses résultats scolaires.
· les résultats des commissions de
présélection pour les choix d'orientation à places
limitées (orientation vers le tronc commun technologique et
originel).
· L'avis du conseiller en orientation.
· L'avis des autres membres du conseil.
· 27
La capacité d'accueil des établissements
scolaires.
Normalement ce conseil doit jouer le rôle le plus
important dans l'orientation de l'élève, étant
donné qu'il regroupe des personnes qui connaissent mieux
l'élève, ses aptitudes, ses aspirations, bref plus ou moins son
profil.
2.4. Les acteurs de l'orientation scolaire:
La note ministérielle n°17 de 2010 du
Ministère de l'Education Nationale au Maroc, stipule que l'orientation
des élèves est une affaire de tous. Des acteurs internes et
externes à l'établissement scolaire, du monde scolaire, social et
économique sont concernés par l'orientation des
élèves. Ainsi ladite note désigne les acteurs suivants
:
En plus du conseiller en orientation, trois acteurs sont
prioritairement impliqués dans le processus d'orientation scolaire :
l'élève lui-même, le corps enseignant et l'administration.
A ces trois acteurs, s'ajoutent ou se substituent parfois d'autres acteurs, les
parents d'élèves, le corps d'inspection, les assistants sociaux
et médicaux, les professionnels. L'implication de ces acteurs est soit
liée à leur spécificité professionnelle, soit
à leur intérêt dans la question de l'orientation.
· Le conseiller en orientation est
considéré, dans l'approche éducative adoptée par la
Charte Nationale de l'Education et de Formation, comme le garant d'un
cheminement pertinent du processus d'orientation des élèves.
· L'élève lui-même principal acteur
de son orientation. Désormais, il doit construire son orientation au
lieu de la subir. A travers la prise de conscience de l'enjeu, du risque, du
pari et de l'incertitude de ses choix, il devient le maître de sa
décision.
· Le corps enseignant et particulièrement
l'enseignant-tuteur ou encore appelé le professeur principal dans le
système éducatif français. Celui-ci est le correspondant
privilégié pour permettre un suivi continu de
l'élève ainsi que sa préparation à un processus
d'orientation. Il joue le rôle de coordinateur de toutes les
interventions visant l'aide et le conseil des élèves qui lui sont
confiés. Pour le reste des enseignants, c'est à travers leur
contact quotidien avec les élèves et leur rôle dans le
développement des compétences et des capacités leur
permettant d'élaborer et de réaliser des projets personnels tout
en donnant du sens à leur apprentissage. Ils ont aussi un rôle
dans le suivi individuel des élèves sur le plan scolaire,
psychologique et social. Nous y reviendrons plus en détail dans la
partie suivante.
·
28
L'administration et les conseils des établissements :
à travers leur rôle principal dans la mise en oeuvre des
activités de la vie scolaire et de leur diversification dans le cadre
des activités de l'information et de l'aide à l'orientation.
· Le corps d'inspection ; à travers son
rôle dans la mise en place des actions pédagogiques communes entre
les différents domaines d'inspection pour une meilleur pertinence des
activités de l'information et de l'aide à l'orientation
· Les parents d'élèves : leur rôle
est incontestable dans le développement des compétences et
l'épanouissement de la personnalité des élèves
ainsi que dans la formulation de leur choix d'orientions. Les
établissements scolaires peuvent profiter de leurs expériences
professionnelles dans des activités d'orientation visant la
découverte du monde professionnel.
· Les assistants sociaux et médicaux ont aussi un
rôle à jouer dans l'orientation des élèves. C'est
à travers leur accompagnement personnalisé des
élèves en difficultés qu'ils participent à leur
réintégration dans la vie en général et dans la vie
scolaire en particulier.
· Les professionnels : ils peuvent être
sollicités à titre de personnes ressources permettant aux
élèves de découvrir le monde professionnel.
· Certes, ces types d'acteurs cités en haut ne
sont pas exclusifs, d'autres acteurs peuvent intervenir dans l'orientation des
élèves, mais ils en constituent souvent la colonne
vertébrale.
29
PARTIE III : APPORT THÉORIQUE
30
Chapitre I. Quelques déterminants de
l'orientation scolaire :
Dans ce chapitre, nous allons développer un ensemble de
déterminants qu'ont trait à notre problématique de
recherche. Ces déterminants peuvent constituer un arrière-fond
susceptible de nous guider dans notre démarche d'exploratoire du
terrain. Il est question, tout d'abord, de définir l'orientation
scolaire ainsi que le rôle que l'enseignant peut y jouer. Ensuite, nous
allons approcher les inégalités sociales face à
l'orientation pour terminer avec les facteurs influençant les
décisions d'orientation.
1.1. Définition :
Suite aux évolutions économiques et sociales
qu'a connu le monde ces dernières décennies, l'orientation
scolaire et professionnelle est devenue un des leviers principaux des
économies et des sociétés développées. Elle
constitue le point de jonction entre les systèmes d'enseignement et de
formation et le monde de l'entreprise. Cette position de l'orientation scolaire
a suscité l'intérêt de nombreux chercheurs en psychologie,
en éducation, en économie... que chacun tente de définir
ce concept selon des références théoriques et des
fondements méthodologiques qui lui sont propres. Nous nous retrouvons
donc devant un large éventail de définitions, nous allons nous
limiter à quelques unes.
Selon le Petit Robert (1987), l'orientation est, dans son sens
figuré, «l'action de donner une direction déterminée.
L'orientation de ses études. L'orientation professionnelle a pour objet
d'aider la famille à diriger l'enfant vers la profession qui lui
convient le mieux... » (p. 1323).
Le professeur LEMHOUER (1994) définit l'orientation
scolaire comme étant « le processus continu d'aider et d'inciter
l'élève à s'informer sur soi-même et sur ses
capacités, de l'informer sur les diverses possibilités scolaires
et professionnelles existantes, de l'informer sur les perspectives d'emploi, et
de l'assister de prendre des décisions appropriées concernant son
avenir scolaire et professionnel et à franchir les premiers pas vers
l'insertion dans le monde du travail » (p. 20).
Quant à l'UNESCO*, elle définit
l'orientation comme suit :
« L'orientation consiste à permettre à
l'individu de se mettre en capacité de prendre conscience de ses
caractéristiques personnelles et de les développer en vue du
choix de ses
* UNESCO : Organisation des Nations Unies pour l'Education, la
Science et la Culture.
31
études, de ses formations et de ses activités
professionnelles, dans toutes les conjonctures de son existence, avec le souci
conjoint du devenir collectif solidaire et de l'épanouissement de sa
personnalité et de sa responsabilité ».
Etant donné que notre recherche s'inscrit dans le
contexte marocain, nous adopterons la définition de l'orientation
présentée par la Charte Nationale d'Education et de Formation
(2000): « L'orientation est déclarée partie
intégrante du processus d'éducation et de formation. Elle
accompagnera et facilitera la maturation vocationnelle, les choix
éducatifs et professionnels des apprenants, ainsi que leur
réorientation, chaque fois que de besoin, dès la seconde
année du collège et jusqu'au sein de l'enseignement
supérieur ».
Après cet essai de définition, nous allons voir
comment s'accomplit le processus de l'orientation scolaire et professionnelle
des élèves.
1.2. Rôle des enseignants en orientation :
Partant des approches éducatives en orientation, nous
constatons qu'elles attribuent un rôle important aux enseignants dans le
processus d'orientation des élèves. Selon Guichard (1997), les
professeurs ont deux missions fondamentales : l'éducation des jeunes et
leur orientation-répartition. C'est à travers l'enseignement d'un
certain nombre de connaissances jugées utiles aux futurs citoyens de la
société qu'ils participent au développement et à la
formation de la personnalité des élèves dont ils ont la
charge. Leur participation aux conseils de classe pour décider de
l'orientation de chaque élève montre leur position
décisive dans le processus d'orientation-répartition des
élèves. Cette position, selon Guichard (1997), met l'enseignant
dans une posture difficilement tenable surtout devant un élève
à qui on demande de réfléchir, d'une manière
critique, à propos d'une proposition d'orientation qu'il refuse. Cela
dit, et comme l'a remarqué Hoyt (1978 cité par Guichard, 1997),
les professeurs participent en amont, par des activités ordinaires
d'apprentissage, à la préparation des choix des
élèves. Ils les conduisent à se former des
habiletés, des connaissances et des attitudes requises leur facilitant
la formulation de leurs projets d'avenir. Ces activités d'apprentissage
peuvent être liées à la lecture, les mathématiques,
la communication orale et écrite, l'acquisition d'habitudes de
travail... La plupart de ces mêmes activités d'enseignement, nous
renseigne Guichard (1997), peuvent être utilisées de
manière explicite dans différentes discipline selon la
démarche d'éducation à la carrière :
En histoire, par exemple, le professeur peut
s'intéresser à l'histoire des professions, à celle de
l'organisation du travail, à son évolution.
32
En cours de sciences économiques et sociales ou de
philosophie, les élèves peuvent soumettre à la critique
certains concepts largement utilisés mais qui n'ont pas acquis une
certaine légitimité scientifique tels que les compétences,
employabilité (Dubar, 1996, 1997, cité par Guichard 1997).
En s'inspirant des pédagogies actives, les enseignants
pourraient engager les élèves dans un processus de
découverte scolaire et professionnelle. Sur ce point, Guichard (1997)
souligne que les enseignants pourraient inciter les élèves
à découvrir les filières scolaires à travers des
enquêtes sur le devenir des "anciens" sortis de la classe au cours des
années précédentes et/ou à travers des
enquêtes d'insertion professionnelle. Les enseignants pourraient aussi
suggérer aux élèves d'organiser des forums des
métiers où ils pourront enrichir leurs connaissances du monde
professionnel. Ces activités « pourraient donner lieu à des
articles dans le journal de l'établissement, au calcul de diverses
statistiques, à la confection de tableaux, à la
réalisation de films vidéo, à des échanges sur les
observations recueillies, au montage d'un forum sur un site "Internet", etc.
». (p. 19)
Dans le même sens d'idée, Dupont (1984) affirme
que l'approche de l'éducation à la carrière met en
évidence l'importance du rôle de l'enseignant dans les programmes
scolaires travaillant sur l'éducation à la carrière. Elle
considère que l'un des aspects du développement personnel est le
développement vocationnel sur lequel se fonde l'éducation
à la carrière. Tennyson (1971 cité par Dupon, 1984)
affirme que le développement vocationnel des élèves est
une tache partagée par le personnel de l'école, bien que la
position du conseiller en orientation y soit importante, vu ses connaissances
et ses habilités en la matière, Tennyson considère
l'enseignant comme le plus important acteur contribuant au développement
de l'élève. Il argumente ses propos en s'appuyant sur les travaux
de Super relatifs au développement vocationnel. Pour lui, la
définition donnée par Super à l'orientation en tant que
processus permettant à l'individu de développer et accepter une
image intégrée et adéquate de lui-même avec
satisfaction personnelle et bénéfice pour la
société engendre toutes les raisons pour rendre l'enseignant
responsable de divers façon du développement vocationnel de
l'élève. Ce développement est mieux réalisé
quand l'enseignant multiplie les occasions permettant aux élèves
de découvrir le monde du travail et de s'explorer eux-mêmes en
relation avec ce monde.
Enfin, Dupont (1984) nous présente un ensemble
d'objectifs que l'enseignant doit réaliser pour opérationnaliser
le concept d'éducation à la carrière :
- veiller à ce que les élèves se rend
compte de l'utilité des disciplines enseignées ;
33
- développer chez les élèves de bonnes
habitudes de travail nécessaires à l'acquisition d'une formation
de base solide et à la réussite dans la carrière future
;
- combiner une approche expérientielle et cognitive
dans son enseignement et aider les élèves à
acquérir des habilités de prise de décision en utilisant
des méthodes axées sur des projets ou des activités qui
les amènes à apprendre à pouvoir prendre des
décisions ;
- tenter de faire disparaître les
stéréotypes qui enlèvent toute liberté dans les
choix professionnels ;
- aider les élèves à devenir conscients
et à connaitre la nature d'une variété de professions de
même que les exigences scolaires requises pour y réussir ;
- amener les élèves à une meilleure
connaissance du système économique et de l'organisation du
travail ;
- aider les élèves à
réfléchir et à considérer l'importance des choix
professionnels. Par ailleurs, outre ces rôles clairement définis
dans les approches éducatives en orientation, la note d'information
04-14 juin 2004 du Ministère de l'Education Nationale en France, insiste
sur le rôle déterminant des enseignants dans le choix
d'orientation des élèves. Il ressort de cette note que le fait
d'avoir bénéficié ou non des conseils des enseignants
exerce, toutes choses égales par ailleurs, une influence sur les
élèves presque aussi forte que les variables scolaires. Ils
peuvent par exemple être pris pour des modèles à qui
l'élève s'identifie dans une sorte de projection de soi dans le
statut adulte. Les enseignants peuvent aussi véhiculer une certaine
conception stéréotypée des choix d'orientation et des
professions ne serait-ce que celle relative au sexe (féminin, masculin)
; les filières scientifiques et technologiques pour les garçons
et les filières littéraires pour les filles. Pour Mosconi (1989
cité par Meunier, 2008), c'est « à travers de multiples
mécanismes implicites, les relations entre enseignants et
élèves concourent à faire vivre des expériences
différentes selon les genres où les identités
sexuées vont se construire, se transformer et favoriser avec d'autres
influences des trajectoires scolaires, universitaires et professionnelles
différentes» (p. 21). Le rôle de l'enseignant ici est de
déjouer les stéréotypes qui peuvent être
véhiculés par les manuels scolaires ou le matériel
pédagogique. Dans ce cadre, l'enseignant, conscient de son influence sur
les élèves, doit éclairer les choix de ses
élèves à travers des éléments qui leur
permettent une réflexion sur leur situation de garçons ou de
filles (Ministère de l'Education Nationale en France, 2008).
34
1.3. Inégalités sociales face à
l'orientation :
Nous l'avons vu plus haut, notre recherche s'inscrit dans un
cadre global, celui de l'inégalité sociale face à
l'école. En effet, par un jeu de compensation ou non des origines
sociales, l'école, véritable « fabrique intensive de
jugements sociaux et instance d'évaluation et d'orientation permanentes
» (Duru-Bellat, 2002, p. 215), intervient directement dans la boucle des
trajectoires sociales plus particulièrement dans les carrières
scolaires des élèves. « Elle les affecte à tel ou tel
milieu scolaire (filière, établissement, classe), à tel ou
tel dispositif, dans le cadre d'une offre donnée, relativement inerte et
dont nous avons vu le caractère contraignant. » (Ibidem).
L'école se présente donc comme un lieu de sélection par
excellence et dont « l'orientation fonctionne comme un processus essentiel
de différenciation des individus » (Lannegrand-Willems, 2004, p.
3)
En termes de comparaison internationale, il paraît que
les inégalités sociales face à l'orientation se
manifestent beaucoup plus dans les systèmes scolaires là
où les choix de familles sont pris en considération, avec un
poids important, lors des conseils de classe (Duru-Bellat, 2002). On pourrait
donc se demander si le système éducatif britannique, par exemple,
est moins inégalitaire de fait que les décisions d'orientation y
sont prises sur la base des notes scolaires (Duru-Bellat, 2002). D'autant plus
que « même si ces notes scolaires restent marquées par des
inégalités sociales, les performances des élèves
prennent ainsi un poids relatif plus fort par rapport aux choix des familles,
ce qui atténue l'autosélection sensible qui caractérise
les milieux populaires » (Gamoran, 1996, cité par Duru-Bellat,
2002, p. 167). Selon les dispositifs d'orientation dans le système
scolaire marocain, bien que les textes officiels régissant la
procédure d'orientation encouragent les conseils de classe à
respecter autant que faire se peut le choix de l'élève et de sa
famille, il semble que ces conseils s'attachent beaucoup plus aux notes
scolaires pour décider de l'orientation des élèves. On
pourrait se demander, ici, si le système d'orientation au Maroc est
moins inégalitaire comparé à la Grande-Bretagne.
Pour Duru-Bellat (2002), les différences en
matière des inégalités d'orientation entre pays,
résultent en fait de la façon dont on anticipe l'avenir. C'est
à ce niveau là que se situe la différence : anticiper
l'avenir relève d'un certain nombre de facteurs (en particulier les
ressources de la famille, la structure institutionnelle du système
éducatif, les incitations à la poursuite des études...)
eux-mêmes variables d'un contexte à un autre. Ces
inégalités s'accentueraient davantage dans les pays où
d'autres inégalités d'ordre socio-économique se
présentent avec acuité. On s'attend donc « à ce que
les inégalités sociales de carrière se réduisent
quand les inégalités économiques s'atténuent, ce
qui a été effectivement observé en
35
Suède et en Pays-Bas » (Sahvit et Blossfeld, 1993,
cités dans Duru-Bellat, 2002, p. 167). Or le Maroc est doublement
concerné par ces inégalités. D'une part, il est un pays en
voie de développement et dont les inégalités
économiques sont fortement présentes (le rapport du Programme des
Nations Unies pour le Développement publié en novembre 2010), et
d'autre part, le système éducatif présente des voies
scolaires (filière de sciences mathématiques, filière de
sciences technologiques...) auxquelles peu d'élèves
accèdent (problème de sélectivité) et des voies
accueillant la grande partie des élèves au sortir du
collège (empruntons le terme utilisé par Duru-Bellat ; les
voies de garage comme les filières littéraires ou
professionnelles). Nous pouvons donc avancer, sans trop de risque, que les
inégalités de carrière scolaire sont bel et bien
présentes dans le système éducatif marocain.
1.3.1. La sélectivité en orientation scolaire
:
Maintenant, regardons de plus près le problème
de sélectivité. Pour Duru-Bellat (2002), dans les systèmes
éducatifs où les filières scolaires sont
hiérarchisées (comme au Maroc par exemple), il est souvent
question de méritocratie pour accéder à telle ou telle
filière. Cette hiérarchie des filières correspond «
d'une part, au mérite tel que l'école le définit (la
réussite dans les disciplines abstraites) et, d'autre part, à
l'horizon des positions sociales qu'elles prédisposent à occuper
» (Guichard et Huteau, 2001, p. 16). D'un autre côté, le
mérite est basé sur les aptitudes et la motivation,
elles-mêmes conditionnées par la socialisation familiale. Or cette
socialisation, selon le niveau économique et culturel de la famille,
varie d'un élève à un autre et la
sélectivité aura donc comme conséquence
d'entériner, pour partie, les inégalités sociales face
à l'orientation des élèves (Duru-Bellat (2002).Un autre
comportement est observé quand on examine les demandes d'orientation des
familles. Il s'agit de l'autosélection (Bressoux, 2006 ; Meunier, 2008)
qui est d'abord scolaire (la demande d'orientation de l'élève
très bon ou l'élève très faible est respectivement
soit ambitieuse soit modeste) ; mais au niveau des élèves
moyennement faibles l'autosélection (en présence des demandes
d'orientation fortement diversifiées) est structurée selon
l'âge et le milieu social d'origine (Duru-Bellat, 2002). De plus, les
conseils de classe, dans la majorité des cas, entérinent et
même parfois proposent directement ces demandes socialement typées
ou orientées (Bressoux, 2006 ; Roux et Davaillon, 2001
cités dans Meunier, 2008 ; Landrier et Nakhili, 2010 ), « et figent
de ce fait les inégalités sociales incorporées dans ces
demandes » (Duru-Bellat, 2002, p. 79).
De même, Langouet (1990) dans son analyse de l'ouvrage
publié par Duru-Bellat en 1988, conclut que « l'orientation ne
s'effectue pas de manière mécaniste, ni sur des
critères
36
exclusivement scolaires ni sur des critères
exclusivement sociaux, qu'elle contribue à la genèse de la
diversité des carrières scolaires et, par conséquent, des
inégalités sociales » (p. 121). D'autres auteurs (Bourdieu
et Passeron, 1970 ; Beaudelot et Establet, 1971 ; Berthelot, 1989 ; Charlot,
1994 ; Dubet et Duru-Bellat, 2000 ; Van-Zanten, 2000 ; Dubet, 2004 cités
par Meunier, 2008) poussent leurs analyses plus loin en affirmant qu'en amont
des inégalités des parcours scolaires et professionnels existent
des inégalités socioculturelles. Celles-ci font qu'à
l'opposé des élèves de milieu défavorisé,
ceux de milieu favorisé disposent d'un capital social et culturel leur
permettant de mieux saisir les opportunités du système
éducatif en effectuant les parcours scolaires les plus prometteurs
(Lannegrand-Willems, 2004 ; Bressoux, 2006 ; Bourdieu et Passeron, 1970
Duru-Bellat, 1988, Duru-Bellat et Mingat, 1988 cités par Meunier, 2008),
et donc l'égalité méritocratique face à
l'orientation des élèves n'est en fait qu'un mythe (Dubet, 2004,
cité par Meunier, 2008).
Suite à ces développements théoriques
autour des inégalités sociales face à l'orientation nous
allons, dans la partie suivante, exposer un ensemble de facteurs qui viennent
accentuer ces inégalités.
1.4. Les facteurs influençant les
décisions de l'orientation :
Reprenons-nous, ici, quelques facteurs influençant la
décision d'orientation, déjà cités plus haut, mais
cette fois-ci nous les mettons un peu plus en exergue. On l'a vu, en plus de la
valeur scolaire de l'élève, généralement
appréciée à travers l'évaluations de ses acquis
d'apprentissage et ramenée à ses notes scolaires, les
décisions d'orientation dépendent à la fois des demandes
de familles (socialement typées) et des instances responsables de
l'orientation au sein de l'établissement scolaire (les enseignants, le
conseil de classe et le directeur) (Duru-Bella, 2002 ; Lannegrand, 2004 ;
Dumora et Lannegrand, 1996 ; Mangard et Channouf, 2007). Ces décisions
sont affectées par un ensemble de biais sociaux. Ce qui fait qu'à
dossier scolaire égal, des élèves peuvent s'orienter
différemment. Pour Nathalie Droyer (2004), ces biais peuvent être
considérés comme étant le résultat des
caractéristiques personnelles - l'élève stratège et
maître de son choix suivant la conception individualiste (Boudon, 1973 ;
Padioleau, 1986 cités dans Droyer, 2004) - ou bien ils peuvent relever
des caractéristiques contextuelles - facteurs objectifs
indépendants de l'élève selon la conception
déterministe (Bourdieu et Passeron, 1964 et 1970 ; Girard et Bastide,
1966 ; Baudelot et Establet, 1971 cités dans Droyer, 2004 ) - ou encore
relever d'une action sociale qui fait que l'élève et sa famille
font des choix d'orientation tout en s'identifiant à un groupe
d'appartenance sociale qu'on cherche souvent à maintenir ou à
consolider (Dubet, 1994 ;
37
Dubet et Martuccelli,1996 cités dans Droyer, 2004).
Cette dernière source de biais ne fera pas l'objet de notre
développement.
1.4.1. Influence de l'évaluation sur l'orientation
des élèves:
Parmi les fonctions de l'évaluation, la fonction
d'amener l'élève à cibler davantage son orientation. Par
l'influence de ses notes, l'évaluation l'éclaire sur
lui-même, sur ses capacités, sur ses motivations, ses
intérêts, ses goûts. Elle éclaire le professeur sur
l'élève, affine un profil tout au long de l'année,
dévoile des aptitudes, des compétences comme des lacunes, des
difficultés scolaires. Elle a comme fonction de guider
l'élève et le professeur au travers d'un travail demandé
et exécuté. A ce titre nous pouvons avancer avec Perrenoud (1998)
« qu'il n'y pas d'orientation scolaire sans évaluation » (p.
56). Dans le même registre Cardinet précise que « les
décisions d'orientation devraient se fonder sur une évaluation
essentiellement prédictive, puisque il s'agit de déterminer
quelle filière conviendra le mieux à chaque apprenant, contenu
d'une part de ses goût, de ses intérêts, de ses projets,
d'autres part des ses acquis scolaires, de son âge, de son
développement, de ses aptitudes à apprendre » (cité
dans Perrenoud, 1998). Cependant, la façon avec laquelle sont
organisés les examens scolaires, dans la majorité des
systèmes scolaires, engendre une valeur prédictive contestable
Cardinet (1988). «Tout se passe en effet comme si la performance future
était assimilée à la performance passée. L'examen
porte sur les branches qui étaient au programme avant l'examen, sans que
personne ne semble se demander si ces branches ont une valeur pronostique
quelconque » (ibid., p.156). Cardinet ajoute aussi que la
progression scolaire ne doit pas être assujettie à la
maîtrise des programmes des années précédentes ; il
est connu qu'à chaque cycle d'enseignement on recommence dès le
début surtout à l'université, les programmes
d'enseignement se spécialisent davantage et on ne demande aux
étudiants qu'un tout petit de leur connaissances au Baccalauréat
: « le jeu des compensations permet à des élèves,
même très peu préparés pour une branche d'y
entreprendre des études supérieures. On doit donc admettre que
les examens ne contrôlent pas sérieusement non plus les
prérequis des études ultérieures » (Ibid,
p.158). L'objectif des examens se trouve donc tourné vers le
contrôle des apprentissages passés et non vers la sélection
des élèves les plus capables à apprendre. L'utilité
de ces examens est approuvée, l'erreur comme le souligne Cardinet c'est
: « d'utiliser les mêmes épreuves pour mesurer des aptitudes,
ou contrôler des prérequis. Du fait de leur nature même, ces
examens ne peuvent fonder un pronostic valable » (Ibidem).
38
1.4.2. Les facteurs relatifs aux caractéristiques
personnelles :
a. Effet de l'origine sociale :
L'influence de l'origine sociale (encore appelée
socioculturelle ou socioprofessionnelle) sur les décisions d'orientation
a été vérifiée par plusieurs sociologues ou
psychosociologues (Mangard et Channouf, 2007, Droyer, 2004, Meunier, 2008 ;
Landrier et Nakhili, 2010). Pour les uns, l'origine sociale détermine le
degré d'accès aux informations et à la
compréhension des mêmes renseignements diffusés au
près des élèves ; plus on monte dans la hiérarchie
sociale plus on est en mesure de comprendre les rouages du système
sélectif de l'école et par là de saisir au mieux ses
opportunités (Ballion et Oeuvrard, 1991 ; Rufino, 1997 cités dan
Droyer, 2004). D'autres, se sont intéressés aux effets des
stéréotypes implicites dans les inférences inconscientes
établies par les enseignants à partir des informations relatives
aux origines socioculturelles (Channouf, 2004, cité par Mangard et
Channouf, 2007 ; Channouf, Mangard, Baudry, et Perney, (2005) ; Dumora,
Lannegrand,(1996) ; Mangard et Channouf, 2007). Sur ce point, Girard et Clerc
avaient déjà constaté en 1964 qu'à dossier scolaire
équivalent, les enseignants ont une tendance à orienter plus
souvent les élèves du milieu favorisé vers des
études longues que les élèves des autres milieux. D'autres
ont pu vérifier que l'origine sociale des élèves exerce un
impact sur les demandes d'orientation des familles. Cet impact se traduit par
une autosélection de telle sorte à ce que les résultats
scolaires conditionnent généralement les voeux des familles ; les
demandes d'orientation sont ambitieuses ou modeste respectivement quand les
résultats scolaires sont bons ou mauvais (Duru-Bellat, 2002 ; Mangard et
Channouf, 2007). Cependant, une différence s'observe au niveau des
demandes d'orientation pour l'élève moyen ; soit il s'autocensure
s'il est d'un milieu socioculturel défavorisé soit il
privilégie des filières scolaires prometteuses (filières
pour des cycles longs) s'il est d'un milieu socioculturel favorisé
(Duru-Bellat et Mingat, 1985 cités dans Mangard et Channouf, 2007 ;
Duru-Bellat, 2002).
b. Effet de l'âge et du retard scolaire
:
Nombreuses sont les études qui ont conclu que
l'âge (ou le retard scolaire) est un critère d'orientation parmi
d'autres influençant le cheminement scolaire de l'élève
(Girard et Clerc, 1964 ; Duru-Bellat, 2002 ; Droyer, 2004 ; Bressoux, 2006 ;
Meunier, 2008). En effet, l'âge joue un rôle informatif : il
présente un résumé de la scolarité passée de
l'élève et fixe le temps disponible dont dispose la famille et le
conseil de classe pour mener à bien sa scolarité (Girard et
Clerc, 1964). C'est ainsi que l'âge affecte, d'une part,
l'élève âgé en le poussant à
s'autosélectionner davantage que l'élève moins
âgé (Cardi, 1989 ; Duthoit, 1987, cités dan Droyer, 2004 ;
Duru-Bellat, 2002), et d'autre part, le jugement professoral car, toutes
choses
39
égales par ailleurs, l'élève en retard
scolaire est moins bien jugé que les autres et par conséquent il
est moins bien satisfait quand il choisi une filière prestigieuse que
les autres. Plus nuisible encore, cet élève en retard scolaire
est souvent orienté vers des filières de formation
professionnelle à courte durée (Girard et Clerc, 1964 ; Bressoux
et Pansu, 2003 cités dans Bressoux, 2006). Généralement,
la variable âge nous informe partiellement sur le passé scolaire
de l'élève et ses difficultés d'apprentissage et «
peut intervenir dans le processus d'orientation soit comme inhibiteur, soit
comme facilitateur » (Droyer, 2004, p. 4).
c. Effet d'éducation et stratégies
familiales :
Les familles ont un rôle essentiel à jouer dans
le processus d'orientation de leurs enfants. En effet, au-delà des
inégalités socioéconomiques affectant différemment
l'implication des familles dans le choix scolaire de leurs enfants (plus les
familles sont aisées moins leurs demandes d'orientation sont
autosélectionnées (Duru-Bellat et Van Zanten, 1992, cités
dans Droyer, 2004)), ce rôle varie d'une famille à une autre
selon, d'une part, leur degré d'accès aux informations relatives
au fonctionnement du système scolaire (ses enjeux, ses
opportunités...)et, d'autre part, leurs pratiques éducatives,
particulièrement leur éducation implicite (expression introduite
par Pourtois et Desmet, 2007 cités dans Liechti, 2012) se rapportant
à un ensemble d'éléments constitutifs de l'identité
de l'enfant et de son devenir scolaire et professionnel (valeurs,
personnalité, intérêts, autonomie, capacités,
exploration ...) (ibid.). Cette éducation est elle-même
conditionnée par la structure et les caractéristiques de la
famille (type de famille et styles éducatifs, parcours scolaire et
professionnel des parents, représentations socioprofessionnelles des
parents, aspiration et attitude des parents quant à l'avenir de leur
enfant, rôles et positions des membres de la famille, l'environnement
familial...) ( Liechti, 2012 ; Reuchlin, 1978 cités par Liechti, 2012).
Par ailleurs, il a été démontré que les familles
interviennent inégalement pour garder voire créer un contexte
favorable au cheminement scolaire de leurs enfants (Duru-Bellat, 2002). Cela
s'observe quand les familles développent des comportements
stratégiques différenciées quant aux choix d'options et
des demandes d'orientation : plus le statut socioprofessionnel des parents est
élevé, plus ils sont exigeants et optent souvent pour les voies
de scolarité susceptibles de positionner leurs enfants dans les
filières les plus élitistes et dans les meilleurs classes (les
filières scientifiques, le «choix» de langues et d'options...)
(Duru-Bellat et Mingat, 1997 cités dans Landrier et Nakhili, 2010 ;
Duru-Bellat, 2002). Ajoutons enfin que plus les résultats scolaires de
l'élève sont médiocres moins ses parents seront influents
au niveau de l'établissement scolaire (Laforgue, 2005, cité par
Meunier, 2008).
40
d. Effet de genre :
Tout comme l'origine sociale, le sexe des
élèves, selon des études expérimentales, structure
lui aussi les décisions d'orientation prises par les enseignants
(Duru-Bellat, 2002 ; Mangard et Channouf, 2007 ; Baudelot et Establet, 1992 ;
Duru-Bellat 1995 ; Duru-Bellat et Jarousse 1993, 1996 cités par Droyer,
2004). En effet, à dossier scolaire équivalent, les
garçons sont orientés deux à trois fois plus que les
filles vers les filières scientifiques (Meng, 2002 ; Rossenwald, 2006
cités dans Meunier, 2008 ; Mangard et Channouf, 2007). D'autant plus
que, par le mécanisme d'autosélection, les filles optent
davantage que les garçons pour les filières littéraires
(Caille et Lemaire, 2002 ; Le Bastard-Landrier, 2005 cités par Landrier
et Nakhili, 2010 ; Mangard et Channouf, 2007 ; Meunier, 2008) ou
généralement pour des filières qui « permettent de
s'insérer dans des métiers reflétant les valeurs
spécifiques inculquées par la socialisation, ou alors
présentant une certaine flexibilité pour concilier vie
professionnelle et vie familiale » (Duru-Bellat, 1990 cité par
Droyer, 2004, p. 4).
Certes, ces caractéristiques personnelles ont une
influence considérable sur le devenir scolaire et professionnel, mais il
reste aussi que les facteurs contextuels ont leur part de cette influence. Pour
Perrenoud (1984, 1995 cité par Droyer, 2004), les pratiques
pédagogiques et l'excellence scolaire incorporent la majorité des
biais sociaux qui influencent, entre autres, les décisions
d'orientation.
1.4.3. Les facteurs relatifs au contexte :
Généralement, quand on aborde les effets du
contexte, il est question des effets qui se présentent selon trois
niveaux; « l'effet établissement », « l'effet classe
» et « l'effet maître ». Ces trois niveaux, dont les
frontières ne sont pas aussi délimitées, peuvent se
déployer de telle sorte à ce que l'un constitue l'autre. «
L'effet maître » renvoie à « l'effet classe » et
l'agrégation de ce dernier constitue « l'effet établissement
» (Bressoux, 1995). Dans ce qui suit, nous allons développer
particulièrement « l'effet établissement » étant
donné que « l'effet classe » y est inclus et « l'effet
maître » a été déjà traité, pour
partie, en exposant le rôle de l'enseignant dans l'orientation et sera
encore approché un peu plus loin dans le jugement professoral.
De prime à bord, précisons que le concept
contexte scolaire est pris, ici, pour un lieu social fabriqué par ces
acteurs y compris les élèves et ce, parce qu'il constitue un
espace d' « interactions sociales et pédagogiques »
(Duru-Bellat, 2002, p. 96). Un tel lieu produira donc des pratiques
éducatives différenciées en son sein et par rapport
à d'autres contextes (Ibid.). Cette diversité de
pratique concernera tout aussi le processus d'orientation
41
des élèves et par conséquent le contexte
scolaire sera en mesure de générer un ensemble de
disparités sociales (Landrier et Nakhili, 2010). Un exemple illustrant
cette disparité nous est fourni par Le Bastard-Landrier (2004
cité par Landrier et Nakhili, 2010). Cet auteur a remarqué que
sur trente-deux lycées constituant son échantillon
d'enquête, environ un quart parmi eux « ont tendance soit à
accroître les différenciations sociales apparues au moment des
voeux d'orientation, soit à en générer de nouvelles »
(p. 30). Dans le même sens d'idées, Duru-Bellat (2002), affirme
que « les différences entre établissements en matière
d'orientation sont très nettes » (p.102). Ces différences
ont été soulevées, entre autres, par Cousin (1998
cité par Duru-Bellat, 2002) lorsqu'il a vérifié
qu'à milieu social identique, les élèves ont une chance ou
non d'accéder à une seconde selon l'établissement
fréquenté. Ce fonctionnement inégalitaire du
système d'orientation est dû, pour partie, à la logique de
contraintes de flux des élèves à gérer et à
répartir entre les différentes filières de scolarisation
et de formation existantes (Berthet et al., 2007 cité par
Landrier et Nakhili, 2010 ; Solaux, 2005). D'une manière
générale, il semble que les pratiques d'orientation dans les
établissements sont conditionnées par leur public majoritaire :
soit on assiste à un certain laxisme dans les décisions
d'orientation et/ou les demandes des élèves sont ambitieuses soit
on se trouve devant des demandes d'orientation qui varient, toutes choses
égales par ailleurs, en fonction, d'une part, du niveau moyen des
demandes enregistrées dans l'établissement (plus il est
élevé plus les demandes sont ambitieuses) (Duru-Bellat, 2002 ;
Meunier, 2008) et, d'autre part, « de la composition sociale et scolaire
du public d'élèves » (Landrier et Nakhili, 2010, p. 30). En
rapport avec les filières de formation ou encore appelées l'offre
de formation; plus celle-ci est abondante et les places sont disponibles dans
un lycée ou dans un environnement proche, plus les élèves
ont tendance à opter pour l'une de ces formations (une
particularité à signaler ici, concerne les élèves
moyens du milieu défavorisé qui choisissent beaucoup plus des
filières professionnelles que des filières
générales), d'autant plus que l'administration du lycée
encourage davantage les élèves à s'inscrire dans ces
filières (Masson, 1997 cité par Duru-Bellat, 2002 ; Duru-Bellat,
2002 ; Landrier et Nakhili, 2010 ; Davaillon, 1998 ; Duru-Bellat et Van Zanten,
1992 ; Langouët et Léger, 1997 cités par Droyer, 2004).
Étant donné que l'offre de formation varie d'un contexte à
l'autre, ceci peut générer des disparités en
matière d'information et delà apparaissent des
inégalités face à l'orientation selon le contexte
fréquenté (Droyer, 2004 ; Landrier et Nakhili, 2010).
Retenons, enfin, que « l'effet établissement
» sur l'orientation se traduit par le fait que des élèves
socialement et scolairement comparables peuvent s'orienter différemment
selon le contexte scolaire fréquenté. Celui-ci est
nécessairement variable vu ses composantes (public
42
d'élèves, offre de formation, information,
équipe pédagogique...) elles-mêmes variables d'un
établissement à un autre. Tous ces facteurs, personnels ou
contextuels, concourent à amplifier davantage les
inégalités sociales face à l'orientation.
43
Chapitre II. Perception sociale et
représentations sociales:
Etant donné que « la représentation sociale
est à la foi un au-delà de la perception, une structure
d'opinions, un imaginaire collectif balbutié individuellement, un
schéma de pensée, la raison d'une théorie implicite et le
reflet d'une idéologie. » (Leyens, 1982, p. 19), il nous est apparu
opportun, avant de traiter en détail le concept de
représentations sociales, de commencer par quelques notions qui peuvent
en être des parties intégrantes ou des substituts notionnels. De
plus ces notions contribuent, à différents degrés,
à la construction d'un mode de connaissance de l'environnement social
dont l'individu évolue. Nous envisageons de définir
particulièrement les notions de la perception sociale (dont il sera
inclus la formation d'impressions sur autrui, les théories implicites de
personnalité et le jugement des enseignants et d'imaginaire collectif)
car elle semble très proche de l'objet central de cette recherche.
2.1. La perception sociale :
La perception sociale encore appelée, dans le cas de la
perception des personnes, « perception mutuelle » (Fiske , 2008),
« perception interpersonnelle » ou « perception de personnes
» (Tagiuri, 1958 cité par Jodelet et al., 1970),
désigne « une connaissance relative aux intentions, attitudes,
émotions, idées, aptitudes, buts et traits que l'on infère
en observant les actions d'autrui. Ce mode de compréhension de l'action
humaine, base de l'interaction entre les personnes, a pour
caractéristique majeure la similitude entre observateur et
observé. » (Ibid., p. 424). C'est dire que l'individu
percevant « son environnement social, il va s'efforcer de donner un sens
à la diversité des stimuli immédiats » (Abric, 2011,
p. 26). Bressoux (2006) ajoute que la perception sociale n'est pas un simple
enregistrement ou reflet de la réalité sociale. Bien plus encore,
elle est à la fois une connaissance pratique de par les
principes mobilisés dans l'interaction sociale et une
méconnaissance car la personne n'est pas en mesure de
contrôler ces principes de telle sorte à agir en harmonie avec
l'ordre social établi. C'est pour cela que Bressoux (2006) la
considère comme étant une connaissance pratique qui agit
sans être représentée. Bref, il s'agit
d'« une connaissance sans concept » (Bourdieu, 1979 cité par
Bressoux, 2006, p. 17).
Il ressort de ces deux définitions que la perception
sociale correspond à notre faculté d'appréhender notre
environnement social, de communiquer avec autrui au travers d'un
mécanisme d'inférence des informations reçues ou
interceptées de l'extérieur. Cette perception peut nous induire
en erreur car notre réaction aux stimuli est à la fois
basée sur notre perception du réel et modelée selon nos
expériences passées et donc notre processus de socialisation, et
non pas le réel lui-même.
44
2.1.1. La formation d'impressions sur autrui :
Nous avons vu que la perception sociale n'est pas un simple
enregistrement de la réalité. Elle est, en effet, une
connaissance pratique qui permet à l'individu de se construire
une image globale cohérente de l'objet ou de la personne perçu.
Cette connaissance pratique est le résultat d'un processus qui permet
à la fois d'agencer les éléments directement perçus
de telle sorte à ce qu'ils occupent une position dans la
hiérarchie de l'ensemble (Yzerbyt et Schadron, 1996 cités dans
Bressoux, 2006) et d'inférer les autres éléments
indirectement perçus pour compléter l'image globale
intériorisée au final (Bressoux, 2006). Ce qui pour nous est
particulièrement intéressant ici, c'est le rôle joué
à la fois par les premiers éléments perçus (effet
de primauté) et par les éléments importants (effet de
centralité) dans la constitution de cette image ou impression globale.
Tout d'abord, signalons que plus les éléments directement
perçus sont rares plus l'activité d'inférence est
importante (Bressoux, 2006). Ensuite, les éléments perçus
en premiers ou ceux perçus comme plus centraux par la personne
évaluatrice conditionnent, suivant une « direction
évaluative », son interprétation des autres
éléments perçus par la suite (Yzerbyt et Schadron, 1996
cités par Bressoux, 2006 ; Asch, 1946 cité par Schiffler, 2012).
Le tout est mis en cohérence pour permettre à l'individu
d'appréhender les éléments de ses perceptions quotidiennes
et ce, grâce à un ensemble de mécanismes, notamment celui
mis en oeuvre par les théories implicites de la personnalité
(Bressoux, 2006).
2.1.2. Les théories implicites de la
personnalité :
Nous présenteront, ici, brièvement la notion des
théories implicites de la personnalité vu qu'elles entretiennent
un rapport étroit d'une part avec le jugement professoral et d'autre
part avec la perception sociale et la représentation sociale. En effet,
plusieurs auteurs ont pu constater que, le plus souvent, les jugements
quotidiens portent particulièrement sur la personnalité des
autres ou de soi-même (Beauvois, 1984, 2011 ; Leyens, 1997 ; Skowronski,
Carlston et Hartnett, 2008 cités par Schiffler, 2012). En d'autres
termes, il est rare de porter un jugement sur une personne rien qu'en se basant
sur les seules informations observables (Ibid.) et ce, car les gens
peuvent se faire une idée également sur des « manifestations
bien plus impalpables tels que des désirs, des besoins, des
émotions, le tout d'une façon plus ou moins directe » (Fritz
Heider, 1958 cité par Fiske, Susan T, 2008, p. 107). L'homme de la rue,
par exemple, a tendance à opérer des inférences à
partir d'une information qui lui est donnée pour en produire d'autres
(Beauvois, 1982 ; Leyens, 1983 ; Monteil, 1985 ; Bruner, 1957 cité par
Schiffler, 2012). On entendra par exemple des adjectifs (ou traits de
personnalités pour les chercheurs) tels que : « timide »,
« dépressif », « scrupuleux », « intelligent
», « épanoui », « têtu », «
paresseux »... pour décrire la personnalité des autres ou de
soi-même. Dès qu'on
45
formule un premier trait, on fait appel à un autre, les
deux premiers font appel un troisième et ainsi de suite comme une sorte
de « matrice de corrélation de traits»; parle-t-on, par
exemple, de la qualité d'un artiste, d'autres traits lui seront
attribués tels que générosité, excentrisme...
(Leyens, 1983). « Nous regardons une personne et, immédiatement,
une impression à propos de sa personnalité se forme en nous
» (Asch, 1946, cité par Schiffler, 2012). Peut-être «
sommes-nous tous des psychologues ? » s'interroge Leyens (1983) en titrant
son ouvrage. Sans y faire attention, nos jugements relèvent en principe
de notre perception sociale elle-même dépendante « du
rôle des protagonistes et de la situation observée »
(Ibid., p. 8). Il est donc nécessaire, pour interagir
aisément avec autrui, d'opérer une simplification qui rend la
situation d'interaction moins complexe et ce, à travers une
représentation générale de cet autrui et de son mode de
pensé (Ibid.). Cette représentation constitue «
notre connaissance d'autrui et la façon dont nous l'utilisons pour faire
des inférences- souvent fausses- à propos de la
personnalité de quelqu'un. » (Monteil, 1985, p. 52). Ces
inférences sont souvent fausses car quand on décrit la
personnalité d'autrui, on se réfère plus à nos
« propres théories implicites qu'à la traduction d'une
consistance du comportement de la personne ainsi décrite »
(Idem, p. 54)
Précisant enfin que l'expression des implicites de la
personnalité (TIP) a été formulée par Bruner,
Shapiro et Tagiuri ? (1958, cités dans Monteil, 1985) et correspond
« à des croyances générales que nous entretenons
à propos de l'espèce humaine, notamment en ce qui concerne la
fréquence et la variabilité d'un trait de caractère dans
la population » (Leyens, 1982, p. 38). Qu'en est-il du jugement des
enseignants sur les élèves ?
2.1.3. Le jugement des enseignants :
Si on considère le jugement des enseignants comme un
jugement émanant des professionnels de l'enseignement, nous pouvons le
qualifier d'un jugement professionnel. Celui-ci est défini par Lafortune
(2006 cité par Lafortune et Allal, 2008) comme
«un processus qui mène à une prise de
décision, laquelle prend en compte différentes
considérations issues de son expertise (expérience et formation)
professionnelle. Ce processus exige rigueur, cohérence et transparence.
En ce sens, il suppose la collecte d'informations à l'aide de
différents moyens, la justification du choix des moyens en lien avec les
visées ou intentions et le partage des résultats de la
démarche dans une perspective de régulation...Il est à la
fois un processus cognitif individuel et une pratique sociale située,
construite au sein d'une communauté professionnelle donnée »
(p. 4).
46
Le jugement des enseignants apparaît donc comme un
construit complexe intégrant de nombreux éléments qui
permettent non seulement la connaissance objective et descriptive
(activité intellectuelle) mais aussi la détermination de la
valeur des personnes évaluées (leurs places) dans un
environnement social donné (activité pratique qui sert l'action)
(Bressoux, 2006). En ce sens, le jugement guide l'enseignant dans sa pratique
professionnelle en particulier celle relative à ses interactions avec
autrui et à la prise de décision (régulation des
apprentissages, comportement avec ses élèves, répartition
des élèves, orientation ...) (Ibid.). Le jugement des
enseignants est entaché d'une composante sociale ; Bressoux (2006) a pu
vérifier qu'il n'est pas un simple enregistrement des performances des
élèves (fonction scolaire) mais il est aussi un jugement social
tout comme les autres jugements qui subissent l'influence des normes sociales
générales. Notre tentative ici, est de montrer que le jugement
des enseignants est influencé, pour partie, par leurs
représentations sociales puisqu' on est dans l'univers social de la
pratique professionnelle. Les normes sociales font que les individus, devant
une information quelconque, ne cherchent et n'intègrent que ce qui
« est compatible avec le schème central» Gilly (1989, p. 391).
Cela rejoint les propos de Mollo (1986 cité par Gilly, 1989) lorsqu'il
considère que les enseignants se réfèrent,
généralement, au modèle hiérarchique pour organiser
l'essentiel de leur pratique. En matière d'orientation, les enseignants
ont « donc toujours des « forts » et des « faibles »
voués à des parcours scolaires inégaux. »
(Idem, p. 392).
Duru-Bellat (2002), quant à elle, insiste sur
l'influence des jugements des enseignants sur l'orientation des jeunes. Elle
remarque qu'au niveau du secondaire, les écarts entre enfants de cadres
et enfants d'ouvriers en matière d'orientation reviennent, avec des
parts presque égales, aux inégalités de réussite
scolaire, aux différenciations sociales inscrites dans les voeux
d'orientation, aux inégalités sociales dans les décisions
d'orientation et aux écarts d'orientation. Ces écarts peuvent
être imputés partiellement aux jugements portés sur les
élèves et « dont la fabrication obéit elle-même
à des processus complexes qui mêlent effets de contexte, attentes
normatives générales, influence de stéréotypes,
observations de comportements et de performances, etc. » (Bressoux, 2006,
p. 6). Il s'agit en effet, d'une activité d'inférence qui
à partir d'un ensemble d'informations surajoute d'autres
éléments en leur donnant une signification particulière
dans le processus de formation de jugement scolaire (Ibid.). Cette
activité d'inférence, nous l'avons vu, est souvent
affectée par différentes sources de biais potentiels
(Dépret et Filisetti, 2001 cités dans Bressoux, 2006), nous en
citons ceux relatifs aux théories implicites des individus car ils
piloteraient fortement l'inférence sociale (Ibid.), les normes
sociales générales et les normes institutionnelles (Gilly, 1992,
cités dans Bressoux,
47
2006). C'est au niveau de l'articulation de ces deux
dernières normes que se situeraient les représentations des
enseignants (Ibid.). En d'autres termes, quand l'enseignant est
amené à formuler un jugement scolaire, il est,
généralement, guidé par ses représentations
à la fois de son rôle dans la société (ses valeurs
morales) et du fonctionnement de l'établissement (les manières de
faire commues aux enseignants) (Bressoux, 2006 ; Gilly, 1989). Ceci
expliquerait, pour une bonne part, certains jugements des enseignants où
se mêlent des informations objectives (qualités, performances
scolaires...) et d'autres subjectives (sexe, apparence physique...) (Bressoux,
2006). La situation devient plus compliquée lorsqu'on demande aux
enseignants de formuler des jugements en cas d'incertitude (par exemple le cas
d'orientation des élèves). Dans de telle situation, les
enseignants ont tendance à utiliser des sortes de raccourcis de
pensée encore appelés des heuristiques (Tversky et
Kahneman, 1974, 1981 cités par Bressoux, 2006). Il nous semble que
c'est, en quelque sorte, le même effet produit par les
représentations sociales lorsque le sujet est confronté à
un objet complexe et socialement investi. Ces heuristiques, pris pour
des biais cognitifs, permettent aux enseignants de formuler des jugements
simples (qui peuvent être aussi erronés), notamment la prise de
décision en orientation, même en présence des
données complexes (Bressoux, 2006).
Par ailleurs, les jugements des enseignants sont, d'une
manière générale, relativement valides par rapport aux
performances actuelles des élèves mais ils le sont moins quand il
s'agit des performances lointaines, d'autant plus qu'ils n'utilisent pas les
mêmes informations pour formuler leurs jugements (Hallinger et Murphy,
1986 ; Teddlie et al., 1989 cités par Bressoux, 2006). Bressoux
(2006) rajoute que pour prédire les performances futures (orientations
au lycée ou à l'université par exemple) les enseignants
fondent leurs jugements sur des critères sociaux. Il nous semble que
dans ce cas les jugements des enseignants seraient influencés par leurs
représentations sociales de devenir scolaire de leurs
élèves et par conséquent ces derniers ne subiraient
probablement pas le même traitement lors des conseils d'orientation. Les
membres de ces conseils peuvent développer des manières de faire
communes rendues possibles grâce à un imaginaire collectif et qui
guidera leur pratique professionnelle dans ce genre de conseil.
2.1.4. L'imaginaire collectif :
Pour appréhender le concept d'imaginaire collectif
nous nous sommes basé sur l'expérience
réalisée par Florence (2002) dans un contexte scolaire.
Pour cette auteure, l'imaginaire collectif prend
forme dans un groupe de personnes constitué en tant que collectif de
travail (soit dans une institution, une organisation, une association...).
48
Les membres de ce collectif oeuvrent dans un contexte
particulier tout en étant contraints, par une prescription externe,
à adapter constamment leurs pratiques professionnelles et ce, afin
d'aboutir aux résultats escomptés. Ceci contribue à la
création d'une certaine dynamique intersubjective entre les
membres du groupe. Et c'est de cette rencontre entre les significations
sociales de cette prescription et les pratiques effectives de chaque
membre du groupe que se construire un contenu imaginaire spécifique.
Un tel contenu assimilé par chacun des membres de groupe est une
condition préalable à la construction d'un imaginaire
collectif. Celui-ci désigne donc :
«l'ensemble des éléments qui, dans un
groupe donné, s'organisent en une unité significative pour le
groupe, à son insu. Signification imaginaire centrale qui
n'épuise pas les significations imaginaires du groupe, encore moins
celles des individus, mais qui se présente comme un principe
d'ordonnancement, une force liante déterminante pour le fonctionnement
groupal. » (p. 247)
Selon l'auteure, cet imaginaire collectif remplit un certain
nombre de fonctions qui permettent aux membres du groupe d'agir et d'interagir
dans un climat harmonieux à travers la réduction de
l'écart entre désirs individuels et réalisations
collectives. Il s'agit des fonctions suivantes :
· L'organisation des perceptions et les affects ;
· L'affirmation et la créativité ;
· La défense du groupe contre toute menace
interne et externe à travers la réduction des désaccords
et des conflits ;
· La détermination des conduites du groupe et
l'orientation de sa praxis ;
· Le conditionnement des représentations
secondaires de telle sorte à ce que les membres s'y reconnaissent ;
· La production du sens de la réalité
à travers l'interprétation de celle-ci ;
· Le garant d'une certaine stabilité de l'objet
collectif d'investissement groupal car il incarne le statut
d'objectivité. Ceci le positionne en tant que référent
incontournable pour interpréter la réalité.
Cet ensemble de fonctions semble attribuer à
l'imaginaire collectif un rôle qui s'approche à celui des
représentations sociales que nous allons aborder par la suite.
49
2.2. Les représentations sociales :
Moscovici, fondateur en 1961 d'un nouveau champ
d'étude en psychologie sociale en l'occurrence la théorie des
représentations sociales (Abric, 2011), avait confirmé que «
si la réalité des représentations sociales est facile
à saisir, le concept ne l'est pas » (1976, p. 39) et ce, parce
qu'«il pâtit d'un contenu trop large et mal défini...et ne
prend sens que grâce à l'usage concret » (1984, cité
par Semin, 1989, p. 262). Bien que cette théorie ait été
négligée pendant un certain temps après son apparition,
les travaux qui lui sont rapportés, depuis plus trois décennies,
vont en expansion. En France par exemple, on a vu « tout les trois ans en
moyenne, un ouvrage exclusivement consacré à ce thème
» (Moliner et al., 2002, 12). Ceci témoigne, en effet, de
la vitalité du champ de recherche consacré aux
représentations sociales. Celles-ci, sont prises désormais pour
« une référence incontournable non seulement en psychologie
sociale mais également dans bon nombre d'autres sciences sociales »
(Abric, 2011, p. 15). Plus particulièrement encore, elles constituent
une théorie qui a vocation d'étudier la pensée «
naïve » et le « sens commun » (Idem.) afin de nous
éclairer sur ce qui nous relie au monde et aux autres et nous renseigner
sur la façon dont se construit ce lien (Moliner et al, 2002). En ce
sens, cette théorie est une « théorie du lien social »
(Ibid., p. 11). Ajoutons aussi que les représentations
sociales, en tant que modalité de connaissance, constituent
« des entités presque tangibles. Elles circulent, se croisent et se
cristallisent sans cesse à travers une parole, un geste, une rencontre,
dans notre univers quotidien.» (Moscovici, 1976, p. 39). Au-delà de
leur « préparation à l'action » et leur orientation du
comportement, elles agissent sur l'environnement social où le
comportement doit avoir lieu en remodelant et reconstituant ses
éléments (Ibid.).
2.2.1. Définition du concept de
représentations sociales :
Moscovici considère les représentations
sociales comme « des systèmes de valeurs, des idées, et des
pratiques dont la fonction est double : en premier lieu, établir un
ordre qui permettra aux individus de s'orienter et de maitriser leur
environnement matériel, ensuite faciliter la communication entre les
membres d'une communauté en leur procurant un code pour désigner
et classifier les différents aspects de leur monde et de leur histoire
individuelle et de groupe » (Moscovici, 1961 cité par Semin, 1989,
p. 263).
En rapport avec le questionnement problématique de
cette recherche, on peut se demander si les représentations pourraient
entretenir des relations avec les attentes. Sur ce point, Moscovici (1981
cité par Hewstone, 1989) souligne que: « nous nous sentons
interpelés pour trouver une explication quand quelque chose ou quelqu'un
ne se conforme plus à nos représentations...» (p. 278). Il
nous semble ici, que les représentations conditionnent, en
50
quelque sorte, notre perception sociale. Dès
qu'apparaisse un élément peu familier, étrange ou
inattendu, les représentations se mettent en oeuvre pour tenter de
l'appréhender (nous en parlerons plus loin).
Sachant bien que nous aurons, par la suite, l'occasion de
revenir sur un ensemble d'aspects de la représentation, nous
présenterons une autre définition d'Abric (2011). Pour cet
auteur, le fait de restructurer la réalité de telle sorte
à faciliter l'appréhension à la fois du côté
objectif des choses, des expériences passées du sujet et du
système de valeur (attitudes, normes...) « permet de définir
la représentation comme une vision fonctionnelle du monde, qui permet
à l'individu ou au groupe de donner un sens à ses conduites, et
de comprendre la réalité, à travers son propre
système de références, et donc de s'y adapter, de s'y
définir une place » (Idem., p. 17). Autrement dit, c'est
grâce au système représentationnel que l'individu arrive
à saisir la réalité qui s'offre à lui et par
là, communiquer avec soi-même et le monde extérieur suivant
un ensemble d'anticipations et d'attentes
(Idem.).
2.2.3. Les caractéristiques d'une
représentation sociale :
Suite à ces différentes acceptions des
représentations sociales, et en présence d'un objet socialement
investi, Moliner et al., (2002) considèrent que les
distinctions entre les contenus d'une représentation (opinions,
informations, croyances, et attitude (Abric, 2011)) est inutile. En revanche,
ces auteurs décrivent ces contenus comme un ensemble
d'éléments cognitifs relatifs à un objet social. Cet
ensemble présente quatre caractéristiques :
-il est organisé ; les éléments
constituants de la représentation entretiennent entre eux des relations
de telle sorte à former une structure.
-il est partagé par les individus d'un
même groupe social ; mais pas totalement et ce, vu la
nécessité d'une certaine homogénéité du
groupe et vu aussi la position des individus par rapport à l'objet de
représentation.
-il est collectivement produit à l'occasion
d'un processus global de communication ; c'est à travers les moyens de
communication interindividuelle ou de masse que les individus arrivent à
mettre en commun les éléments de la représentation qui
constituent un consensus. « Rien n'apparaît plus vrai et
légitime que ce qui est partagé par le plus grand nombre »
(Moliner et al., 2002, p. 13).
- il est socialement utile ; ceci renvoie à
la finalité de la représentation sociale ; outre ses
fonctions/rôles citées dans les définitions ci-dessus
(appréhender l'objet auquel elle se rapporte, comprendre et
interpréter l'environnement social) ; elle participe à la
légitimité ou la
51
justification de certaines conduites et ce, à travers
les critères d'évaluation de l'environnement qu'elle fournit.
Une définition qui paraît résumer ces
quatre caractéristiques, nous est fournie par Roussiau et Bonardi
(2001a, cités dans Moliner et al., 2002, p. 13) :
« [...] une représentation sociale est une
organisation d'opinions socialement construites, relativement à un objet
donné, résultant d'un ensemble de communications sociales,
permettant de maîtriser l'environnement et de se l'approprier en fonction
d'éléments symboliques propre à son ou à ses
groupes d'appartenance ».
2.2.4. Fonctions des représentations sociales :
Les représentations sociales remplissent un ensemble
de fonctions qui permettent « le maintien de l'identité sociale et
de l'équilibre sociocognitif qui s'y trouve lié » (Jodelet,
1989, p. 68). Ainsi elles assurent « un rôle fondamental dans la
dynamique des relations sociales et dans les pratiques » (Abric, 2011, p.
21). La première fonction est cognitive (Jodelet, 1989) ou
encore appelée de savoir (Abric, 2011) car elles facilitent la
compréhension et l'intégration, suivant un processus cognitif, de
nouveaux éléments qui apparaissent dans l'environnement social
des individus. La deuxième fonction est celle qui permet la
protection et la légitimation du groupe (Jodelet, 1989) en lui
attribuant une identité spécifique « compatible avec des
systèmes de normes et de valeurs socialement et historiquement
déterminés » (Mugny et Carugati, 1985 cités dans
Abric, 2011, p. 21). Vient ensuite une troisième fonction celle
d'orientation qui guide les comportements et les pratiques (Abric,
2011), les conduites et les communications (Jodelet, 1989). La dernière
fonction consiste pour (Abric, 2011) à justifier à posteriori
l'action car il considère que la fonction d'orientation comprend en
elle-même la justification qui préside les actions. Pour Jodelet
citant (Doise, 1973) considère que cette dernière fonction permet
la justification, d'une manière anticipée ou
rétrospective, des actions en interactions sociales ou intergroupe.
2.2.5. Le processus de formation des
représentations sociales :
Avant de développer ce processus, signalons que
Jodelet (1989) avait soulevé que l'appréhension des
représentations sociales peut se faire suivant l'une des deux
orientations suivantes :
> la première orientation consiste à
considérer ces représentations comme étant un champ
structuré et il sera question, en premier lieu, de relever ses
éléments constitutifs (informations, images, opinions,
valeurs...). Ensuite, déterminer le principe de
52
cohérence structurant les champs de la
représentation « organisateurs socioculturels, attitudes,
modèles normatifs ou encore schémas cognitifs » (p. 72).
> La seconde orientation traite ces représentations
en tant que noyau structurant (champ sémantique) dont on doit «
dégager les structures élémentaires autour desquelles se
cristallisent les systèmes de représentation » (p. 72).
C'est selon cette seconde orientation que nous allons appréhender les
représentations sociales des enseignants à l'égard de
l'orientation de leurs élèves.
Ces deux orientations concernent des représentations
déjà constituées, mais en amont il existe des processus
qui président à leur formation. Abric (2011) citant le travail de
Moscovici (1961) sur la représentation de la psychanalyse avait
repéré deux processus :
· Le premier processus est celui de l'objectivation
qui conduit l'individu « à retenir de manière
sélective une partie de l'information circulant dans la
société à propos de la psychanalyse, pour aboutir à
un agencement particulier des connaissances concernant cet objet. » (p.
27). Ce processus permet à l'individu, devant un objet complexe comme
celui de la théorie de la psychanalyse, d'opérer une
schématisation de cette théorie de telle sorte à
ce qu'elle lui soit facilement assimilable. Cette schématisation
passe par la sélection de quelques éléments concrets
afin de créer, sans avoir besoin de tenir compte des règles
logico-déductives de type scientifique, un savoir naïf
caractérisé « par sa non-distanciation vis-à-vis
de l'objet auquel il se rapporte » (Moliner et al., 2002, p. 25).
Ceci contribue, au final, à la formation de ce que Moscovici (1976)
appelle un modèle figuratif ou noyau figuratif. Les
éléments de ce noyau subissent une
décontextualisation et acquièrent une
certaine autonomie qui les rend réutilisables dans d'autres contextes
qui ne ressemblent pas forcement au contexte initial.
Généralement, le processus d'objectivation consiste
à « résorber un excès de significations en les
matérialisant » (Ibid., p. 52). Ainsi, tout
phénomène ou savoirs complexes sera approprié et
intégré facilement par les individus qui, au moment de
communiquer à propos de ce phénomène ou savoirs, auront le
sentiment de le décrire « tel qu'il est réellement et tel
qu'il est perçu par les autres » (Moliner et al., 2002, p.
26). Baggio (2006) avait rapporté que ce processus comporte trois phases
: * la première phase : trier les informations perçues ou
reçues, à travers un filtre culturel et surtout normatif, pour ne
retenir que les éléments importants. C'est unephase de « la
construction sélective » (Jodelet, 1989, p. 73)
* la deuxième phase : les éléments
retenus seront organisés en un noyau figuratif
53
« concret, simple, et cohérent avec les normes et
la culture dans lesquelles il s'insère. C'est lui qui détermine
la signification de la représentation » (p. 102). Plus encore, il
« prend pour le sujet un statut d'évidence, il est pour lui la
réalité même, il constitue le fondement stable autour
duquel va se construire l'ensemble de la représentation. » (Abric,
2011, p. 27). Bref, c'est la phase de la formation d'un modèle ou
noyau figuratif encore appelée « schématisation
structurante » (Jodelet,
1989, p. 73). Nous y reviendrons plus bas.
* la troisième phase : après avoir
attribué aux éléments qui composent la
représentation (notamment le noyau figuratif) des
propriétés ou des caractéristiques, il peut y avoir des
éléments qui restent insaisissables. C'est pourquoi en
dernière phase d'objectivation, l'individu est amené à
apprivoiser ces éléments restants. Cette action est
appelée naturalisation. Pour saisir celle-ci, prenons pour
exemple, dans le travail de Moscovici sur la psychanalyse, quelques termes
comme inconscient, refoulement, complexe... « revêtent une
réalité tangible qui les rend accessibles » (p. 102).
L'objectivation apparaît donc comme un processus mental
qui concrétise ce qui est abstrait et rend pratique ce qui est
théorique.
Remarquons enfin avec Jodelet (1989) que c'est au niveau des
deux premières phases que se manifeste « l'effet de la
communication et des contraintes liées à l'appartenance sociale
des sujets sur le choix et l'agencement des éléments constitutifs
de la représentation. » (p.73).
~ Le second processus est L'ancrage : il «
permet d'enraciner la représentation dans le social. » (p. 103). On
l'a vu, les représentations dépendent largement d'un ensemble de
filtres renvoyant aux croyances, appartenances socioculturelles et
expériences des personnes qui les élaborent. Cet ancrage
est qualifié de psychologique par Doise (1992 cité par
Moliner et al., 2002) car il intervient dès la présence
des éléments peu familiers et tente par la suite de les
appréhender. Ainsi, tout en ayant une portée utilitaire, il
opère les inférences nécessaires pour appréhender
l'objet de la représentation (Moliner et al., 2002 citant
Moscovici, 1961). Pour Jodelet (1989), ce processus infléchit et le
contenu et la structure de la représentation en amont et en aval de sa
formation. En amont, le rôle de l'ancrage est capital ; il
permet d'enraciner la représentation et son objet dans un système
de significations et de valeurs préexistant tout en veillant à
l'harmonisation de l'ensemble des éléments. En d'autres termes,
l'ancrage invite la mémoire structurée
54
suivant un système de pensée socialement
établi d'accueillir et d'intégrer, en toute harmonie, de nouveaux
éléments reçus ou perçus par l'individu. En aval,
l'ancrage s'inscrit sur la même lignée de
l'objectivation et contribue, à son tour, à
l'instrumentalisation du savoir en le dotant des
caractéristiques facilitant l'appréhension de l'environnement de
l'individu. Autrement dit, « la structure imageante de la
représentation devient guide de la lecture, et, par
généralisation fonctionnelle, théorie de
référence pour comprendre la réalité » (p.
73). Cela étant, cette relation dialectique entre l'objectivation
et l'ancrage fait que ce dernier articule les fonctions de
représentation citées ci-dessus. Signalons enfin, que le
processus d'ancrage est plus présent dans la phase
d'élaboration de la représentation vu qu'à ce stade le
discours des individus à propos de l'objet n'est pas encore autonome
(Moliner et al., 2002 citant Flament, 1989).
Le processus de formation étant décrit,
présentons à présent l'organisation et la structure des
représentations sociales.
2.2.6. Processus de structuration des
représentations sociales :
Pour étudier les représentations sociales, il
faut tout d'abord déterminer le niveau d'observation. S'agit-il du
niveau d'une société globale ou du niveau d'un groupe particulier
ou du niveau individuel. Chaque niveau d'observation sous-tend un
intérêt particulier dans l'étude des représentations
sociales. Dans le cadre de notre recherche, nous nous focaliserons sur
l'exploration des représentations au niveau d'un groupe particulier en
l'occurrence un groupe des enseignants exerçant dans un collège.
L'intérêt porté pour l'étude des
représentations de ce groupe sera précisément de
comprendre la structuration de la représentation (Moliner et al.,
2002).
Le groupe que nous allons étudier est pris pour un
groupe social car il s'agit « d'un ensemble d'individus interagissant les
uns avec les autres et placés dans une position commune vis-à-vis
d'un objet social. » (Idem., p. 21). Celui-ci se rapporte, dans
le cadre de notre recherche, à l'orientation des élèves.
De plus, les enseignants au collège, au travers leurs interactions
régulières, semblent occuper une position commune à
l'égard de l'orientation de par leurs pratiques comparables ainsi que
leurs niveaux d'intérêt et d'implications semblables
(Idem.). Dans le groupe social, les représentations sociales se
présentent, nous l'avons vu, sous forme « de connaissance,
socialement élaborée et partagée» (jodelet,
1989, p. 36). Ces connaissances ou savoirs, dans un groupe social
homogène, apparaissent beaucoup moins diversifiés (Moliner et
al., 2002) mais pas tout à fait semblables. Sur ce point, Moliner
(1993a
55
cité par Moliner et al., 2002) affirme que les
objets sociaux sont « par nature polymorphes, composites ou complexes
» (p. 22). Ceci rend leur appréhension différenciée
et génère de ce fait une multitude d'expérience. Il
paraît donc qu'en matière de représentation sociale, un
objet social est appréhendé par les membres d'un groupe social
suivant quelques éléments (informatifs, cognitifs,
idéologiques, normatifs, valeurs, attitudes, images, opinions,
croyances... (Jodelet, 1989)) saillants qui sont unanimes pour eux et d'autres
mais moins importants relevant de l'expérience de chacun. En d'autres
termes, il est question d'une part, d'un ensemble réduit
d'éléments (qui font consensus dans le groupe et qui forme «
sa vision commune » (Moliner et al., 2002) encore appelé
noyau central chez Abric (1976, 1987 cité par Abric, 2011),
noyau figuratif chez Moscovici (1976) et, d'autre part, un ensemble
plus large d'éléments sur lesquels les membres du groupe se
départagent (Moliner et al., 2002), et qui correspond aux
éléments périphériques de la
représentation chez Abric (1976, 1987 cité par Abric, 2011). Mais
on se demande avec Moliner et al., (2002), comment les membres du
groupe social gardent cette vision commune rien qu'avec un petit nombre
d'éléments alors que le grand nombre d'éléments,
produit des expériences individuelles variées, est censé
départager les membres du groupe. Il nous semble que le petit nombre
d'éléments est doté d'un certain pouvoir unificateur, sans
pour autant contrarier le grand nombre, et des qualités
particulières permettant la définition de l'objet de la
représentation (Moliner et al., 2002). En d'autres termes, le
petit nombre d'éléments agit sur le grand nombre de telle sorte
à rendre la représentation sociale du groupe beaucoup plus
stable. Pour Abric (2011), dans sa théorie du noyau central, le petit
nombre d'éléments appelé noyau central est le
composant fondamental de la représentation, car « c'est lui qui
détermine à la fois la signification et l'organisation de la
représentation » (Idem., p. 28). Il a deux fonctions :
- Une fonction génératrice ou
signifiante (Moliner et al., 2002) : il crée ou
transforme la signification des autres éléments pour donner un
sens global de l'objet et le partager par les membres du groupe.
- Une fonction organisatrice : en déterminant
la nature de la relation logique entre chacun des éléments de la
représentation, il est l'élément unificateur et
stabilisateur de la représentation.
La variabilité des objets et des situations
d'interaction sociale fait que le noyau central se présente
selon deux dimensions :
- Une dimension fonctionnelle : là ou les
situations ont une finalité opératoire et dont le noyau
central de la représentation est constitué des
éléments (par exemple des images opératives) sans lesquels
on ne peut réaliser la tâche.
56
- Une dimension normative : prenne forme dans les
situations où intervient directement le socio-affectif,
l'idéologique ou le sociale.
Quant au grand nombre d'éléments, il constitue
les éléments périphériques
(l'essentiel de la représentation) qui gravitent autour du
noyau central. Celui-ci détermine leurs valeurs, leurs
pondérations et leurs présences. Ces éléments se
positionnent à l'interface entre le noyau central et le monde
extérieur dont lequel fonctionne ou s'élabore la
représentation. De ce fait, ils sont les plus accessibles, les plus
concrets et les plus vivants. C'est à leur niveau que les informations
sont « retenues, sélectionnées et
interprétées, des jugements formulés à propos de
l'objet, et de son environnement, des stéréotypes et des
croyances. » (Abric, 2011, p. 33). Ces éléments
périphériques répondent à trois fonctions
essentielles :
- La fonction concrétisation : ils
matérialisent l'ancrage de la représentation à
travers l'intégration des éléments de la situation dans
laquelle se forme cette représentation. « ils disent le
présents et le vécu des sujets » (p. 33)
- La fonction régulation : les
éléments périphériques, de par leur
caractère souple, arrivent à adapter la représentation aux
évolutions de l'environnement. Ainsi, ils peuvent intégrer de
nouvelles informations même celles qui risquent de déstabiliser le
fondement de la représentation et ce, en minimisant leurs statuts ou en
rapprochant leurs sens à la signification centrale ou en leur traitant
en tant qu'exceptionnelles.
- La fonction défense : comme un «
pare-chocs » (Flament, 1987 cité par Abric, 2011), ils arrivent
à sauvegarder l'intégrité de la représentation.
Etant donné que le noyau central est généralement
stable, c'est à leur niveau que s'opèrent les éventuels
changements de la représentation.
Au-delà de ces fonctions, Flament (1987, 1988, 2011
cité par Abric, 2011) indique que ces éléments
périphériques, en tant que schèmes
organisés par le noyau central, ont un rôle
important dans le fonctionnement de la représentation. Pour lui, ces
schèmes constituent « une grille de décryptage
d'une situation » (Flament, 1989 cité par Abric, 2011, p. 34-35) et
leur importance résulte de trois fonctions :
- Ils sont prescripteurs des comportements (des
prises de position pour Abric (2011) du sujet. ils lui permettent de
réagir instantanément aux stimuli, sans avoir recours aux
significations centrales, suivant deux formes de comportement dichotomiques
(normal ou pas normal).
- Modulation personnalisée des
représentations et des conduites qui leur sont associées. C'est
dire qu'une représentation, bien qu'elle possède un noyau
central
57
unique, peut se manifester différemment à
travers l'appropriation du système périphérique qui
diffère d'un individu à un autre. Toutefois, ces
différences deviennent possibles à condition qu'elles «
soient compatibles avec un même noyau central » (p. 35)
- Ils protègent, si besoin est, le noyau
central. C'est la fonction de défense relative aux
éléments périphériques. Cependant, Flament
(1987 cité par Abric, 2011) rajoute une particularité à
cette fonction. Pour lui, lorsqu'une représentation est
sévèrement atteinte et donc la stabilité de son noyau dur
est menacée, les schèmes prescrivant le normal de ce qui
ne l'est pas se transforment en schèmes étranges.
Ceux-ci sont définis par quatre composantes : « le rappel du
normal, la désignation de l'élément étranger,
l'affirmation d'une contradiction entre ces deux termes, l'appropriation d'une
certaine rationalisation permettant de supporter (pour un temps) la
contradiction » (Flament, 1987 cité par Abric, 2011, p. 35).
Au terme de cet exposé sur la théorie des
représentations sociales, nous pouvons retenir d'abord, que c'est une
théorie qui a vocation de comprendre et d'expliquer, d'une part, la
façon avec laquelle un groupe de personnes arrive à se construire
une vision commune de son environnement social et, d'autre part, comment cette
vision même constitue, pour partie, l'arrière plan du
système d'interprétation que chaque individu de ce groupe s'y
réfère pour saisir la réalité dont il évolue
et interagir avec son monde social.
A la lumière de ce cadrage théorique, nous
allons, dans la partie suivante, présenter l'approche
méthodologique adoptée afin d'apporter des éléments
de réponse à nos questions de recherche:
> Comment les enseignants se représentent-ils la
notion de l'orientation scolaire ?
> Pensent-ils qu'ils ont un rôle à jouer dans
l'orientation scolaire de leurs élèves ? Et comment ce rôle
se décline au niveau de leur pratique professionnelle?
> Comment se représentent-ils les différentes
filières scolaires après la troisième collégiale
?
> Quelles sont les critères/indices que les
enseignants ont tendance à utiliser pour se prononcer sur l'orientation
de tel ou tel élève ?
58
PARTIE IV : CADRE PRATIQUE
59
Chapitre I. Approche méthodologique : Introduction
:
D'emblée, il faut souligner que notre démarche
compréhensive est fondée sur un paradigme descriptif qui «
vise à décrire des phénomènes ou une situation
» (Pourtois, Desmet et Lahaye, 2001). Il s'agit donc d'une approche
descriptive répondant à la question : « Quelles sont les
caractéristiques des représentations sociales, que se font les
enseignants à l'égard de l'orientation de leurs
élèves ?». L'option choisie nous place ainsi dans une
perspective exploratoire des pratiques enseignantes en matière
d'orientation. Cette recherche exploratoire est essentiellement qualitative car
elle examine les dires des enseignants et elle est centrée davantage sur
leurs productions discursives. Celles-ci représentent, en effet, une des
sources majeures susceptibles de nous informer sur les représentations
sociales d'un groupe d'individus (Moliner et al., 2002).
1.1. Choix de la population :
Nous avons choisi d'enquêter dans un seul
établissement scolaire (un collège situé dans une zone
défavorisée de la ville de Marrakech) et ce, pour pouvoir
identifier une pratique commune des enseignants. D'ailleurs, plusieurs
enquêtes ethnographiques (Vanzatan, 2000a cité dans Duru-Bellat,
2002) montrent que « les manières de faire des enseignants, leurs
normes professionnelles s'élaborent au sein de leur contexte d'exercice
; elles intègrent les représentations qu'ils se font de leur
public, de ses acquis ou de ses carences, et de ses intérêts»
(p. 127). D'autres travaux, notamment ceux de Brookover et al., (1979
cités par Bressoux, 2006) ont pu vérifier que chaque
établissement scolaire développe sa propre culture (valeurs,
attentes, normes...) de telle sorte à se constituer en tant que
véritable organisation sociale.
Nous avons donc enquêté auprès de douze
professeurs au collège de disciplines différentes. Ce choix a
été dicté par la volonté de recueillir des
informations qui peuvent être différentes selon, d'une part, le
poids de la discipline dans le programme scolaire et, d'autre part, la nature
même du contenu enseigné. Notre échantillon se compose
comme suit :
> Quatre professeurs des disciplines qualifiées de
littéraires :
Arabe, français, histoire, géographie et
éducation islamique. > Quatre professeurs des disciplines
qualifiées de scientifiques :
Mathématiques, sciences physique et sciences
naturelles.
60
> Quatre professeurs des disciplines qualifiées de
disciplines de découverte : Technologie, éducation physique,
anglais et éducation musicale.
1.2. Les outils utilisés :
Vouloir examiner les dires des enseignants sous-entend
l'utilisation des enquêtes par entretien semi-directif. Celui-ci est
souvent utilisé « pour collecter les discours exprimant opinions,
idées, croyances et attitudes concernant divers objets sociaux. »
(Moliner et al., 2002, p. 52). Nous avons conduit, donc, une dizaine
d'entretiens auprès des enseignants au collège.
Selon Abric (2011), une représentation sociale se
définit par deux composantes : son contenu (informations et attitudes)
et son organisation (sa structure interne). Ceci implique que l'étude
des représentations sociales nécessite une approche
multiméthodologique. D'abord, il faut repérer le contenu de la
représentation. Ensuite étudier les relations entres les
éléments constitutifs de la représentation pour en
déterminer finalement le noyau central. Or, l'entretien, bien qu'il
permette l'accès au contenu des représentations sociales, ne
permet que rarement d'accéder directement à son organisation et
sa structure interne (Abric, 2011, p. 76). Nous avons utilisé donc, pour
chaque enquêté, en première phase l'entretien
semi-directif, et en deuxième phase la démarche associative et
réflexive à partir d'un ensemble d'informations (Moliner et
al., 2002). Cette démarche est appelée aussi
méthode de cas. Pour Mucchielli (1996 cité dans Moliner
et al., 2002), cette méthode consiste « à rapporter
une situation réelle précise dans son contexte et à
l'analyser pour voir comment se manifestent et évoluent les
phénomènes auxquels le chercheur s'intéresse » (p.
77). Stake (1994, cité dans Moliner et al., 2002) souligne un
type de cas qualifié d'instrumental et considéré par
Mucchielli (1996) comme étant le plus approprié pour identifier
les contenus des représentations sociales car il comporte un ensemble de
traits typiques par rapport à un objet donné. C'est en quelque
sorte une démarche inspirée à la fois de la technique des
choix successifs par blocs (Guimelli, 1988 cité dans Abric, 2011) et de
la technique utilisée pour l'analyse des représentations des
professionnels intervenant dans le placement d'enfants et d'adolescents (Bonte
et Cohen-Scali, 2000 cité dans Moliner et al., 2002).
Plus concrètement encore et afin de répondre
aux différentes questions de la recherche, nous avons
enquêté auprès de douze professeurs (quatre enseignants des
matières scientifiques, quatre enseignants des matières
littéraires, quatre enseignants des matières artistiques). Notre
objectif, rappelons-le, est de déterminer les caractéristiques
des représentations sociales que se
61
font les enseignants à l'égard de l'orientation
de leurs élèves. Nous nous sommes focalisé sur
l'orientation des élèves de niveau scolaire moyen vers la
filière scientifique et littéraire car ces deux filières
forment généralement les deux options dichotomiques.
Notre entrevue avec chaque enquêté s'est
déroulée en deux phases :
> La première phase consistait à
réaliser des entretiens semi directifs (voir annexe n°1) avec les
enseignants (ces entretiens étaient d'une durée de 25 à 50
mn). Ils étaient conduits à partir de quatre thèmes
structurant le guide d'entretien. Ces thèmes sont conçus de telle
sorte à répondre principalement aux questions de recherche (nous
y reviendrons un peu plus bas) :
Thème n°1 : la notion d'orientation scolaire ;
Thème n°2 : les facteurs influençant le
choix d'orientation ;
Thème n°3 : les représentations des
différentes filières après la troisième ;
Thème n°4 : les pratiques enseignantes en
matière d'orientation.
Ces entretiens semi-directifs nous ont permis aussi de
recueillir des informations personnelles sur les professeurs
enquêtés.
> Dans la deuxième phase, nous leur avons
présenté une activité (la méthode de cas) sous
forme d'une liste de critères (voir annexe n°2) concernant les
élèves et que l'enseignant devait y opérer une certaine
sélection. Cette liste de critères de natures différentes
(critères relatifs à la note chiffrée, au statut
socio-économique, au genre et aux voeux d'orientation) a
été conçue en combinant deux types d'informations :
- Des informations sur un élève qui a des
performances scolaires moyennes car, comme l'a signalé Jean-Pierre
Zirotti (1980), quand les performances sont moyennes, c'est en fonction des
variables autres que la valeur scolaire tels que l'âge, le
comportement...que se joue la décision d'orientation, elles-mêmes
largement structurées par l'origine sociale et le sexe (Duru-Bella,
2002). Ceci rend les jugements des enseignants portés sur les
élèves un peu en dessous de la moyenne largement discutables (Van
Zanten, 2001 ; Berthelot, 1993 cités dans Olivier Meunier, 2008).
- De quelques informations susceptibles de déclencher
les représentations stéréotypées comme celles
utilisées par Channouf et al., (2005).
Ainsi, l'enseignant enquêté a été
amené à choisir parmi ces critères, quatre sur lesquels il
peut se baser pour se prononcer sur l'orientation de l'élève dans
la filière scientifique ou littéraire. Nous avons
considéré le choix effectué par l'enquêté
comme étant le scénario pertinent pour orienter
l'élève. Trois autres scénarios
62
devaient être établis par le professeur et
classés du plus prédictif au moins prédictif. Il est
à signaler, ici, que nous avons opté pour une activité qui
demande aux enquêtés non seulement de se prononcer sur
l'orientation d'un élève à partir d'un ensemble
d'informations connues, mais aussi de choisir et d'ordonner, eux-mêmes,
les critères qu'ils jugent déterminants dans la prise de
décisions d'orientation. Nous avons, en quelque sorte, inversé la
situation ; au lieu de présenter un cas d'élève avec
certaines informations et demander à l'enseignant de proposer
l'orientation qui lui paraît la mieux adaptée à cet
élève, nous l'avons incité à déterminer les
informations pertinentes pour se prononcer sur l'orientation d'un
élève. Suivant ce procédé, il nous est possible,
nous semble-t-il, de contourner les difficultés rencontrées pour
cerner, au mieux, les critères sur lesquelles se basent les enseignants
ou ceux qu'ils retiennent en premier lieu pour prendre les décisions
d'orientation.
Cette démarche d'enquête, nous a permis, via une
analyse de contenu et certaines statistiques descriptives, d'identifier les
caractéristiques des éléments qui structurent la
représentation de l'orientation des élèves chez les
enseignants et les éléments les plus retenus par ces derniers et
qui influencent leurs décisions d'orientation.
1.2.1. L'entretien semi-directif : 1.2.1.1.
Elaboration :
Vu le caractère complexe de notre objet de recherche
qui consiste, rappelons-le, à explorer les représentations
sociales que se font les enseignants à l'égard de l'orientation
de leurs élèves, nous aurons donc une multitude d'aspects sur
lesquels il faut s'interroger pour rendre compte de ces représentations
« les représentations sociales d'un groupe d'individus ou une
société à une époque donnée n'apparaissent
pas de manière explicite dans les différentes sources
d'informations étudiées. Même lorsqu'il est centré
sur un objet unique, un corpus discursif ou textuel est forcément
traversé de thématiques connexes » ( Moliner et al., p. 79).
Nous avons donc essayé de multiplier les entrées de recueil des
données afin de tracer un tableau suffisamment complet de l'objet de
notre recherche. Toutefois, les questions de notre recherche ont
constitué l'arrière-fond du processus qui nous a conduit à
l'élaboration des thèmes de l'entretien semi-directif. Pour
Paillé et Mucchielli (2003), il est possible de « partir de ces
questions de recherche pour ensuite les formaliser, développer,
subdiviser, compléter, pour les utiliser comme canevas
d'analyse...» (p. 110).
> Comment les enseignants se représentent-ils la
notion de l'orientation scolaire ?
63
> Pensent-ils qu'ils ont un rôle à jouer dans
l'orientation scolaire de leurs élèves ? Et comment ce rôle
se décline au niveau de leur pratique professionnelle ?
> Comment se représentent-ils les
différentes filières scolaires après la troisième
collégiale ?
> Quelles sont les critères/indices que les
enseignants ont-ils tendance à utiliser pour se prononcer sur
l'orientation de tel ou tel élève ?
Nous avons donc identifié quatre thèmes
principaux autour desquels s'est déroulé l'entretien avec les
enquêtés :
· La notion de l'orientation ;
· Les facteurs influençant l'orientation ;
· Les représentations des différentes
filières scolaires après la troisième ;
· La pratique enseignante en matière d'orientation
scolaire.
Nous avons introduit dans le guide d'entretien des questions
formulées différemment mais qui se rapportent à l'un ou/et
à l'autre thème cités avant. La première version du
guide ayant été élaborée, nous l'avons par la suite
finalisée après l'avoir testée avec un enseignant au
collège.
1.2.1.2. Déroulement :
Pour s'assurer du bon déroulement des entretiens
susceptibles de nous éclairer sur les différents aspects relatifs
à notre objet de recherche, nous avons veillé à ce que
:
- Les entretiens se déroulent dans un même lieu
;
- Les enseignants enquêtés adoptent une posture
réflexive par rapport à leur pratique enseignante en
matière d'orientation. Pour se faire, nous leur avons donné, au
début de l'entretien, une même consigne générale
leur présentant l'objectif et le déroulement de l'entretien.
Et pour limiter, autant que faire se peut, les effets de la
désirabilité sociale (Crahay, 2007), étant nous-même
conseiller en orientation, et de peur que les enseignants enquêtés
n'essayent d'adopter une posture qui sera plus compatible, dans ce genre de
situation, aux normes professionnelles et sociales en vigueur, nous avons
invité les enseignants à se comporter le plus librement possible
et de communiquer leurs pensées sans censure. Ainsi, nous leur avons dit
de nous prendre pour un apprenti-chercheur qui vient, en « non-savant
» attentif, chercher quelques réponses sur le sujet de
l'orientation des élèves.
64
Enfin, nous avons informé les enquêtés du
caractère anonyme de l'enquête et nous leur avons promis, en les
remerciant pour leur collaboration, de leur restituer un dossier contenant les
résultats de cette recherche.
1.3. Traitement et analyse des données obtenues :
1.3.1. Technique utilisée :
Pour traiter les informations recueillies auprès des
enseignants, nous avons mobilisé la technique d'analyse de contenu et
ce, car cette technique est « l'une des plus anciennes et des plus
utilisées pour étudier les représentations sociales »
(Moliner et al., 2002, p. 79). Elle « est la technique la plus
appropriée pour identifier les opinions, les croyances, les prise de
position et les points de vues véhiculés par les discours. »
(Ibid., p. 80). Cette technique doit nous aider, en analysant le
réel comme réalité, à mettre en évidence,
les éléments dicibles et remarquables de notre corpus. Enfin elle
devra surtout être en mesure de répondre à notre question
centrale : « quelles sont les caractéristiques des
représentations sociales que se font les enseignants à
l'égard de l'orientation de leurs élèves ? ».
1.3.2. La démarche d'analyse de contenu:
1.3.2.1. L'analyse inductive générale :
a. Définition :
Précisons, ici, que notre objectif n'est pas
d'esquisser une interprétation ou une théorisation pour
elle-même, mais de répondre aux questions de notre recherche
à travers l'exploration et la description d'un ensemble d'aspects
entourant la pratique enseignante en matière d'orientation et
rapportés par douze enseignants au collège. Pour se faire, nous
nous sommes basé, pour traiter les données recueillies, sur la
démarche d'analyse inductive générale. Celle-ci « se
prête particulièrement bien à l'analyse de données
portant sur des objets de recherche à caractère exploratoire,
pour lesquels le chercheur n'a pas accès à des catégories
déjà existantes dans la littérature » (Blais,
Martineau, 2006, p. 4). Ces deux auteurs définissent donc cette
démarche d'analyse comme étant :
« Un ensemble de procédures systématiques
permettant de traiter des données qualitatives, ces procédures
étant essentiellement guidées par les objectifs de recherche.
Elle s'appuie sur différentes stratégies utilisant
prioritairement la lecture détaillée des données brutes
pour faire émerger des catégories à partir des
interprétations du chercheur qui s'appuie sur ces données brutes
» (p. 3)
Selon Thomas (2006 cité dans Blais et Martineau,
2006), cette démarche nous permettra, d'une part, de reproduire les
données brutes, variées et nombreuses, sous un format
condensé
65
et résumé que nous appelons catégories
et, d'autre part, d'établir des liens entre ces catégories et les
réponses attendues aux questions de notre recherche.
b. Etapes d'analyse :
Nous avons utilisé la technique d'analyse inductive
générale pour analyser le contenu des discours produits par les
enquêtés. Nous avons commencé par la retranscription
intégrale des entretiens sur un fichier Word. Ensuite, bien qu'il existe
des logiciels spécialisés dans l'analyse de contenu, nous avons
préféré nous servir du Tableur Excel (vu qu'il offre de
nombreux avantages : disponibilité, facilité d'utilisation, libre
configuration, mettre le texte transcrit dans une colonne et d'ajouter les
remarques et les annotations là où on veut, la possibilité
d'avoir une vue d'ensemble de l'analyse effectuée, le passage rapide
d'un entretien à un autre suivant les feuilles du classeur, utilisation
des couleurs pour coder les catégories et sous-catégories, faire
la consolidation des résultats, les statistiques nécessaires...).
Cette analyse a consisté, en premier lieu, à une lecture
attentive de tous les entretiens transcrits. Ensuite, nous avons établi
une grille d'analyse préliminaire en se basant sur les thèmes de
l'entretien semi-directif (conçus à partir des questions de notre
recherche). Les thèmes sont pris, dans notre analyse, pour le premier
niveau de catégorie qui, d'habitude, « devrait être
directement lié aux objectifs ou aux questions de recherche. Les autres
niveaux proviennent des lectures » (Kaufmann, 2007, p. 7). Nous avons
mentionné, au départ, quelques catégories qui nous ont
apparu particulièrement saillantes lors de nos premières lectures
des entretiens. Ainsi nous avons procédé par une
déconstruction-reconstruction de chaque entretien suivant les
unités de sens qui y figurent et ce, parce que « chaque entretien
compose un univers singulier, de points de vue et d'émotions propres
à un individu interrogé. C'est grâce à
l'opération secondaire de regroupement des discours au sein d'une
analyse globale que sera recomposé le monde social brossé par les
différents sujets. » (Moliner et al., 2002, p.52).
Pour établir une grille d'analyse finale (voir annexe
n°3), nous avons procédé par une thématisation
continue. Celle-ci « consiste en une démarche ininterrompue
d'attribution de thèmes et, simultanément, de construction de
l'arbre thématique. Ainsi les thèmes sont identifiés et
notés au fur et à mesure de la lecture du texte, puis
regroupés et fusionnés au besoin, et finalement
hiérarchisés sous la forme de thèmes centraux regroupant
des thèmes associés » (Paille, Mucchielli, 2003, p. 124).
Nous avons donc revu toutes les unités de sens extraites et
procédé par regroupement, en sous-catégories selon la
technique de l'entonnoir, de celles qui ont la même portée
significative. Pour rendre compte, avec plus de détail, des
éléments qui composent l'univers représentationnel des
enquêtés autour des thèmes abordés
66
dans l'entretien semi-directif, nous avons veillé
à ce que toutes les unités significatives susceptibles de nous
informer sur le thème en question soient représentées dans
la grille d'analyse thématique; des plus significatives (là
où se présente un certain consensus entre les
enquêtés) au moins significatives (là où une
personne enquêtée, au moins, les avait introduites dans son
discours). Ce choix a été dicté par la nature même
de notre objet de recherche. Rappelons-le, notre recherche tente de
déterminer les éléments constitutifs des
représentations sociales des enseignants à l'égard de
l'orientation de leurs élèves. Or ces représentations se
composent de deux groupes d'éléments : un groupe constituant les
éléments centraux (les plus significatifs et largement repris par
les enquêtés lors des entretiens) et un groupe
d'éléments périphériques (qui ne semblent pas
occuper une place centrale dans les discours des enseignants mais qui viennent
créer une certaine harmonisation de l'ensemble des discours produit
autour d'une thématique donnée). La tâche semble donc
proche d'un travail de documentation mettant en exergue « l'importance de
certains thèmes au sein de l'ensemble thématique, donc de relever
des récurrences, des regroupements, etc. » (Paille, Mucchielli,
2003, p. 124). A la fin, nous avons soumis tous les entretiens à cette
grille finalisée pour entamer, par la suite, un dépouillement
systématique permettant de quantifier ce qui est qualitatif. Cette
quantification consiste, en plus des calculs relatifs au nombre des occurrences
des catégories, en un calcul permettant de juger de la
représentativité d'une catégorie et l'espace qu'elle
occupe par rapport aux autres catégories. Ce deuxième calcul
(voir son explication au niveau la sous-section 1.3 présentant les
facteurs influençant le choix d'orientation des élèves)
n'est effectué que lorsque nous estimons nécessaire de mettre au
clair la place occupée par chaque catégorie dans l'analyse du
thème en question. Nous présenterons dans ce qui suit la grille
d'analyse thématique suivant les thèmes et les questions
abordés dans l'entretien et qui sont sensés apporter des
réponses aux questions de la recherche.
1.3.2.2. Présentation de la grille d'analyse de
contenu (annexe n° 3):
Etant donné que nous avons utilisé l'entretien
d'enquête pour collecter les informations auprès des enseignants
enquêtés, notre grille d'analyse de contenu a été
conçue à partir du guide d'entretien semi-directif
utilisé. Cette grille, en tant qu'outil déterminant dans le
traitement et l'analyse des données, a été dressée
puis complétée au fur et à mesure de l'analyse des
entretiens. L'analyse de contenu obtenu consistait « à la
réorganisation de chacun des entretiens de façon à ce
qu'ils soient tous présentés exactement de la même
façon » (Moliner et al., 2002, p. 92). Cette
réorganisation résultait, on l'a vu, « d'un travail de
67
codage et de catégorisation des unités de
discours » (p. 92). Dans notre conception des
catégories et sous-catégories regroupant
à leur tour des indices (unités de sens : mots ou
expressions), nous avons veillé à ce qu'elles
respectent les règles de l'exclusion mutuelle, de
l'homogénéité, de la pertinence et de
l'objectivité (Bardin, 2001 cité par Moliner et al.,
2002,
p.91).
Ajoutons aussi que nous avons appliqué une
procédure ouverte (Moliner et al., 2002), sans
hypothèse de départ servant de guide, mieux
adaptée aux phases exploratoires de recherche,
comme c'est le cas dans notre étude. Nous
présentons, ci-dessous, les thèmes et les catégories
principales de notre grille d'analyse (la grille en
intégralité figure en annexe n°3) :
Thème n°1 : la notion de l'orientation
1.1. Action propre à l'élève
1.2. Action partagée pour orienter
l'élève
Thème n°2 : les facteurs influençant le choix
d'orientation
2.1. Contexte familial
2.2. Contexte scolaire et professionnel
2.3. Caractéristiques personnelles
Thème n°3 : les représentations des
différentes filières scolaires après la
troisième
3.1. Orientation scientifique
3.2. Orientation littéraire
Thème n°4 : la pratique enseignante en
matière d'orientation scolaire
4.1. Rôle dans l'orientation des élèves
4.2. Influence sur le choix d'orientation
4.3. Démarches d'aide à l'orientation
4.4. Critères retenus pour se prononcer sur l'orientation
d'un élève
4.5. Évaluation de la procédure administrative
d'orientation
4.6. Amélioration des pratiques en orientation
1.3.3. Validité et fidélité de la
méthode utilisée :
Etant conscient que « quels que soient
l'intérêt et la puissance d'une méthode d'analyse, il est
bien évident que le type d'informations recueillies, leur qualité
et leur pertinence déterminent directement la validité des
résultats obtenus et des analyses réalisées. »
(Abric, 2011, p. 73), nous avons essayé de respecter, autant que
possible, les trois règles d'une recherche rigoureuse (Paille,
Mucchielli, 2003). D'abord, la triangulation en utilisant plusieurs sources
d'informations (l'entretien semi-directif et l'activité proposée
aux enquêtés). Ensuite, nous avons constitué une banque
d'informations (enregistrements audio des entretiens, leur
68
transcription intégrale sur un fichier Word, leur
analyse et traitement sur un fichier Excel, un ensemble d'annotations de
corpus, d'essais de sens et de textes répertoriés...) à
laquelle nous nous sommes retourné chaque fois que besoin. Enfin, nous
avons soumis la transcription des entretiens à certains
enquêtés afin d'y opérer des modifications ou des rajouts
susceptibles d'enrichir davantage ce qui leur paraissaient incomplet).
1.4. Contraintes méthodologiques et limites de
la recherche :
Pour rendre compte des contraintes méthodologiques et
limites de notre recherche, nous pensons, particulièrement, à la
contrainte souvent soulevé par Bourdieu (1994, cité dans Denave,
2006) dans ce type de recherche. Pour lui, dans une enquête par
entretien, il faut se méfier des discours des enquêtés.
Ceux-ci peuvent, par un désir de donner sens à leurs histoires,
se voir tentés une sélection, « en fonction d'une intention
globale », de « certains événements significatifs
» et d'établir « entre eux des connexions propres à les
justifier d'avoir existé et à leur donner cohérence »
(p. 95). Ceci rejoint les propos d'Abric (1994) lorsqu'il considère que
les résultats d'enquête par entretien sur les pratiques sont,
généralement, inférés à partir des pratiques
rapportées et non pas des pratiques effectives. Nous aimerions ensuite,
émettre certaines réserves quant aux dires des enseignants, car
il se peut que d'autres facteurs entrent en jeu dans l'entretien et biaisent de
ce fait les résultats de l'enquête, notamment l'effet de la
désirabilité sociale (Crahay, 2007).
Par rapport aux limites de notre recherche, nous estimons que
celle-ci présente les limites suivantes :
D'abord, les résultats de cette recherche ont une
portée limitée au contexte dans lequel s'est
déroulée l'enquête du terrain. En effet, vu que cette
recherche est essentiellement qualitative, nous n'avons pu explorer les
représentations que d'un panel réduit des enseignants au
collège. Il nous est donc difficile de prétendre la
généralisation des conclusions de cette recherche sur la pratique
enseignante en matière d'orientation au Maroc.
Ensuite, cette recherche ne vise pas la proposition des
solutions à la problématique de l'orientation, mais plutôt
de susciter une réflexion à propos des représentations
sociales traitées dans ce mémoire. Cette réflexion
permettra, peut être, au lecteur d'avoir un certain recul quant à
l'influence de ses propres représentations dans sa pratique
professionnelle et/ou sociale.
69
Enfin, pour faire preuve de plus de précision, cette
recherche a besoin d'être prolongée mais, cette fois-ci, en se
focalisant sur un ou deux aspects issus des représentations sociales de
l'objet de notre recherche tels que la notion d'orientation scolaire, les
facteurs influençant le choix d'orientation, le rôle de
l'enseignant dans l'orientation, sa démarche d'aide à
l'orientation, les critères qu'il retient pour prendre des
décision d'orientation, etc.
70
Chapitre II. Présentation et analyse des
résultats :
Dans ce chapitre, les résultats sont
présentés en incluant leur analyse car « décrire
c'est choisir; donc, déjà, c'est analyser : classer le
matériel, c'est l'analyser. » (Deslauriers, 1991 cité par
Fortin, 1992, p. 216). Nous commençons, dans une première partie
par la présentation des résultats issus de l'analyse qualitative
du corpus recueilli. Dans cette partie, nous présentons les
caractéristiques de l'échantillon enquêté suivies de
l'analyse des données qualitatives qui sera conduite selon les
thèmes structurant le guide d'entretien et qui sont, rappelons-le,
conçus à partir des questions de notre recherche exploratoire
:
Thème n°1 : la notion d'orientation scolaire ;
Thème n°2 : les facteurs influençant le choix
d'orientation ;
Thème n°3 : les représentations des
différentes filières après la troisième ;
Thème n°4 : les pratiques enseignantes en matière
d'orientation.
Toutefois, ces thèmes sont repris, tour à tour,
en faisant ressortir l'analyse sur ce qui fait consensus et ce qui ne le fait
pas entre les enseignants enquêtés à travers des appuis
relatifs au cadre théorique. Dans la deuxième partie de ce
chapitre nous présentons les résultats de l'activité
proposée aux enquêtés (la méthode de cas). Cette
approche qualitative et exploratoire des représentations de
l'orientation des élèves chez leurs enseignants dans un
établissement solaire au Maroc, nous permettra donc d'identifier des
indicateurs sur les attentes, les opinions, les croyances et les pratiques
enseignantes en matière d'orientation.
71
2.1. Résultats de l'enquête par entretien
semi-directif:
Tableau n°3 : Informations générales
sur l'échantillon de l'enquête
|
Informations générales
|
|
Age (en années)
|
Ancienneté dans
l'enseignement (en années)
|
Nombre d'années d'enseignement en 3ème
collégiale
|
Niveau d'étude
|
Suivi d'un cours de base en
évaluation des apprentissages
|
Suivi des formations continues en
orientation scolaire
|
Participations à
quelques activités
d'aide à l'orientation
|
Enseignant de
|
Mathématiques
|
F
|
54
|
30
|
30
|
Bac
|
Non
|
Non
|
Non
|
|
F
|
55
|
32
|
32
|
Bac
|
Non
|
Oui
|
Non
|
|
M
|
57
|
27
|
27
|
Bac+2
|
Non
|
Non
|
Non
|
|
M
|
53
|
35
|
35
|
Bac+2
|
Oui
|
Oui
|
Non
|
|
F
|
52
|
35
|
22
|
Licence
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
F
|
50
|
26
|
26
|
Maîtrise
|
Oui
|
Oui
|
Non
|
|
F
|
42
|
25
|
25
|
Licence
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
|
F
|
50
|
25
|
25
|
Bac+2
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
M
|
53
|
25
|
25
|
Bac
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
M
|
52
|
28
|
26
|
Bac
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
M
|
42
|
14
|
0
|
Licence
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
F
|
31
|
8
|
8
|
Licence
|
Oui
|
Non
|
Non
|
|
*F= Féminin M= Masculin
2.1.1. Caractéristiques de l'échantillon
:
Notre échantillon se compose de 12 enseignants de
disciplines différentes. Sept femmes et 5 hommes. Ces enseignants sont
relativement âgés. Leur âge varie de 31 ans à 57 ans,
soit une moyenne de 49,5 ans. Ceci peut être expliqué par le fait
que l'établissement dont ils exercent se situe en zone urbaine dans une
grande ville au Maroc. Les enseignants exerçant en milieu urbain sont
généralement plus âgés que ceux exerçant en
milieu rural. Leur expérience dans l'enseignement est aussi relativement
longue. A l'exception des enseignants de l'éducation musicale et de
l'anglais qui ont respectivement 14 ans et 8 ans d'expérience, les
autres enseignants ont une expérience d'au moins 25 ans dans
l'enseignement. Au cours de l'exercice de leur fonction d'enseignant, la
majorité des enquêtés ont eu, le plus souvent, des classes
de troisième collégiale. Cette position les confronte souvent aux
problèmes d'orientation scolaire vu que la troisième
collégiale constitue le premier palier d'orientation des
élèves. Concernant leur niveau d'étude, quatre enseignants
ont un niveau bac, trois ont un bac+2, quatre ont une licence et une personne a
une maîtrise. Par rapport au suivi d'un cours de base en
évaluation, à l'exception de trois personnes, les autres
enquêtés ont affirmé l'avoir suivi. Par contre, seulement
quatre parmi douze enseignants ont déclaré avoir suivi une
72
formation en orientation et une seule personne a
déclaré avoir participé à des activités
d'aide à l'orientation. Nous nous attendons donc à ce que cette
dernière donnée constituera une des sources d'influence sur leur
appréhension du domaine de l'orientation et par conséquent sur
leur pratique enseignante en matière d'orientation.
2.1.2. La notion d'orientation scolaire vue par les
enseignants :
Nous présentons dans cette première section de
l'analyse, la notion d'orientation scolaire telle que la conçoivent les
enseignants enquêtés. Le tableau n° 4 reprend les
différentes acceptions de la notion d'orientation scolaire. Son analyse
nous permettra de répondre à la première question de notre
recherche : comment les enseignants se représentent-ils la notion de
l'orientation scolaire ?
Avant d'analyser les données de ce tableau, soulignons
que lors des entretiens, nous avons constaté que, globalement, chaque
enquêté avait construit une part importante de son discours autour
d'un mot/expression/idée structurant l'essentiel de sa pensée
relative à l'objet de notre recherche. C'est dire que ce
mot/expression/idée, en tant que fil conducteur ou une chaine
d'idées centrales, reprend la surface plusieurs fois au cours de
l'entretien comme par exemple « l'implication dans l'orientation des
élèves », « l'acquisition des langues
», « le scientifique est celui qui a de bons
résultats », « la note », « le
modèle », « la mode » « le test
», « la compétence », « faire
aimer sa discipline » « l'autorité
épistémique »... Ceci semble permettre à
l'enquêté de maintenir une position relativement stable par
rapport aux thèmes abordés dans l'entretien et d'éviter,
autant que possible, la production d'un discours contradictoire.
Tableau n° 4 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
1.1.1. un choix à faire
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
8
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
1.2. Action partagée pour orienter
l'élève
|
1.2.1. ensemble d'opérations pour optimiser le parcours
scolaire de l'élève
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
7
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
Oui=1 Non=0
73
Par rapport à la notion d'orientation scolaire, nous
avons relevé, lors des entretiens, que presque les deux tiers des
enquêtés ne semblent pas avoir une idée
préconçue et assez claire de ce qui est l'orientation. Ils ont
éprouvé, en effet, une certaine difficulté à
trouver les mots convenables pour définir un objet aussi complexe
soit-il. Ceci confirme notre position théorique de départ qui
consistait à considérer l'orientation scolaire en tant que notion
assez complexe se prêtant bien au cadre des représentations
sociales. Devant un objet complexe et socialement investi,
généralement, c'est grâce aux représentations
sociales que l'on se fait de cet objet qu'on en peut se construire une
idée, une image facilement assimilable pour soi et transférable
pour en communiquer avec autrui. Deux enquêtés ont essayé
de répondre à la première question concernant la
définition de l'orientation comme suit :
« Comment je défini l'orientation scolaire ?
C'est... euh...la détermination...la détermination de
l'orientation des élèves...n'est-ce pas ? Par exemple à
partir de...de leurs niveaux...n'est-ce pas ? Par exemple
l'élève...je sais ... » (enseignant de
l'éducation islamique). « L'orientation scolaire pour
l'élève... ça veut dire après... cette étape
du collégial... qu'est-ce qu'il doit faire ?... où va-t-il
s'orienter ?... c'est ça l'orientation pour moi ... »
(enseignant des mathématiques).
Il y a même un enseignant qui a affiché
clairement, au début de l'entretien, bien qu'il ait accepté de le
faire, sa méconnaissance de ce domaine en se justifiant par le fait
qu'il n'a pas eu la classe de la troisième pendant une longue
période. « Euh...je veux attirer votre attention... que je n'ai
pas beaucoup de choses à dire dans ce domaine...car je n'ai pas eu de
classe de troisième cela fait plus de dix années ... »
(enseignant d'arabe).
Cela étant dit, d'autres enseignants, en particulier
ceux des disciplines scientifiques et du français, ont montré un
flot de paroles immédiatement disponibles à l'inverse de ceux des
disciplines de découverte. Ces derniers, leurs phrases recueillies
étaient pauvres, rares et brèves. Cette pauvreté de la
parole n'est pas un problème en soi. En y travaillant, elle a
constitué pour nous, un exercice particulièrement formateur. Nous
avons pu en retirer certaines informations pertinentes rien qu'à partir
d'un mot ou deux. D'ailleurs, « les mots les plus simples sont rarement
lancés au hasard (Kaufmann, 2007, p.97). L'objectif dans ce cas, sera de
tirer de larges conclusions à partir de petits faits » (Geertz,
2002, cité dans Kaufmann, 2007, p.89).
En analysant les différentes acceptions données
pour la notion d'orientation scolaire, nous avons relevé qu'elles se
rapportent, en général, à deux actions différentes,
mais complémentaires, partageant les enseignants en trois
catégories :
74
La première catégorie (5 enquêtés
sur 12) rapporte la notion d'orientation à une action propre à
l'élève. C'est-à-dire que c'est à lui de faire un
choix. « L'orientation c'est...euh quand l'élève est
amené à choisir son parcours scolaire ... » (enseignant
de l'arabe). « ...c'est un euh une occasion pour l'élève
pour voir son choix et les disciplines dont il est à l'aise ...
» (enseignant de l'éducation physique).
Pour l'enseignant de l'éducation musicale,
l'orientation est particulièrement un choix à faire mais ce choix
prend toute son importance à l'entrée de l'université.
« L'orientation est une euh étape importante dans la vie de
l'élève...dont il lui faut choisir entre tout ce qui est offert
dans notre système éducatif euh...même si...moi
personnellement je tends vers d'autres écoles qui considèrent que
l'orientation ne doit avoir lieu qu'à l'entrée de
l'université.»
La deuxième catégorie est constituée de
deux enseignants (ceux de la physique). Pour eux, l'orientation est une action
partagée pour orienter l'élève. Cette action consiste, en
impliquant un ensemble d'acteurs principalement l'enseignant, à
mobiliser tous les moyens nécessaires pour optimiser le choix
d'orientation de l'élève.
«... A partir de l'étude de ses notes
scolaires de ses... lors des conseils de classe en présence du
conseiller en orientation et... nous vérifions ces
intérêts, s'il est par exemple... si ses notes son bonnes en
matières scientifiques ou en matières littéraires et on
vérifie avant tout ses voeux d'orientation... mais quand on trouve qu'il
y a contradiction entre ses notes scolaires et ses voeux on revient sur son
travail en classe, je prends une filière... s'il peut y suivre son
parcours scolaire, c'est dans cette filière qu'on va l'orienter
...» (enseignant de physique 1).
La troisième catégorie regroupe le reste des
enseignants (soit 5 enquêtés parmi 12). Ceux-ci rapportent la
notion d'orientation en même temps à l'action propre à
l'élève et l'action partagée pour l'orienter. Pour
l'enseignant d'histoire-géo :
« L'orientation scolaire représente tous les
moyens qu'on peut présenter à un élève pour qu'il
face un bon choix à la fin de l'année et dont il y a les trois
parties : l'enseignant, l'établissement qui est l'administration ainsi
que l'élève et l'orienteur, c'est-à-dire... c'est
ça l'orientation scolaire...c'est lorsqu'on détermine un parcours
correct qui rend l'élève capable de, avec notre aide, de faire un
choix...un bon choix ... ».
L'enseignant du français développe clairement
l'idée du projet professionnel que doit construire
l'élève, avec l'encadrement des spécialistes, pour une
meilleure orientation :
« L'orientation euh...est une opération
euh...menée par des spécialistes pour orienter le parcours
de...de l'élève...où il va continuer ses études
...est-ce qu'il a des intérêts littéraires, des
intérêts scientifiques, des intérêts artistiques ou
mathématiques...donc tu orientes ses études et par là tu
détermines euh...son projet professionnel qui vient après...
».
75
Globalement, la majorité des enseignants
enquêtés s'accordent, en premier lieu, à définir
l'orientation en se rapportant à l'action propre à
l'élève ; c'est un choix à faire et/ou une direction
à suivre dans le cheminement de sa scolarité. En second lieu,
c'est au niveau de l'action partagée pour orienter l'élève
que se situent les acceptions de l'orientation pour les enseignants
enquêtés. Signalons à la fin, qu'à l'exception de
l'enseignant de l'histoire-géo, les enquêtés n'ont
parlé, à aucun moment des entretiens, de l'aide à
l'orientation des élèves. Pour eux l'orientation consiste soit
à faire un choix, soit à orienter l'élève (et non
pas l'aider à s'orienter), soit les deux. Ceci peut être
expliqué par le fait que l'enseignant en question, en plus de la
formation qu'il a suivi dans le domaine de l'orientation, est le seul parmi
tous les enquêtés qui a déclaré avoir
participé à des activités d'aide à l'orientation
des élèves. Ceci nous fait penser à la relation
dialectique entre les représentations sociales et les pratiques sociales
(Abric, 2011).
2.1.3. Facteurs influençant le choix d'orientation
des élèves:
Dans le prolongement de la première question qui
consiste à mettre en exergue certains éléments
constitutifs de l'environnement représentationnel des enseignants quant
à la notion d'orientation scolaire, nous leur avons posé une
question sur les facteurs influençant le choix d'orientation des
élèves. L'analyse des données du tableau n° 5 nous
permettra, en plus de l'identification de ces facteurs, de déterminer
ceux mis en avant par les enseignants enquêtés. Nous allons
appuyer nos résultats d'analyse par un calcul de la
représentativité de chaque catégorie figurant dans le
tableau.
La représentativité d'une catégorie
:
Suite à l'analyse thématique des discours des
enseignants, nous avons pu regrouper (cf. tableau n° 5) l'ensemble des
facteurs cités en dix sous-catégories, elles-mêmes
regroupées en trois catégories. Et pour juger de la
représentativité d'une catégorie par rapport aux autres
catégories suivant un thème donné, nous avons
calculé la fréquence rendant compte de l'espace occupé par
cette catégorie.
Dans un premier temps, nous avons calculé l'espace
occupé par chaque catégorie. Cet espace est égal au nombre
de sous-catégories appartenant à chaque catégorie
multiplié par le nombre des enquêtés l'ayant abordée
divisé par le nombre total des sous-catégories relatives au
thème
contenant l'ensemble des catégories. Soit E (cat 2.1) =
(2x8)/10 =1.6
On fait le même calcul pour (cat 2.2) et (cat 2.3) : Soit
E (cat 2.2) = (5x9)/10= 4.5
E (cat 2.3) = (3x7)/10= 2.1
76
Dans un deuxième temps nous avons calculé la
fréquence d'apparition qui est égale à l'espace
occupé par la catégorie (cat 2.1) divisé par la somme des
espaces occupés par chaque catégorie multipliée par 100
pour obtenir un pourcentage.
Soit : La fréquence d'apparition de (cat 2.2)
1.6/(1.6+4.5+2.1)*100 = 25.60% La fréquence d'apparition de (cat 2.2) =
4.5/(1.6+4.5+2.1)*100 = 54.88% La fréquence d'apparition de (cat 2.3) =
2.1/(1.6+4.5+2.1)*100 =19.52%
Nous pouvons refaire le même calcul, si besoin est,
pour les catégories composant les autres thèmes de notre analyse
qualitative.
Par rapport au thème en question, les
catégories (2.1), (2.2) et (2.3) ont occupé respectivement des
espaces de 25.60%, 54.88% et 19.51%. Nous pouvons donc constater que la
catégorie (2.2) contenant les facteurs relatifs au contexte scolaire et
professionnel est la plus représentative des catégories. Vient
ensuite la catégorie (2.1) relative au contexte familial et en
dernière position la catégorie (2.3) regroupant des facteurs
liés aux caractéristiques personnelles de
l'élève.
Tableau n° 5 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
Espace occupé par la catégorie en
(%)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
0
0
1
0
1
0
0
0
0
1
|
sc. ueesralltn
1
0
1
0
0
1
1
1
0
0
|
çsanfair
0
0
1
0
1
0
0
0
1
0
|
beaar
1
1
0
1
0
0
0
0
1
0
|
histoire-géo
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
|
éducation islamique
|
technologie
1
0
1
0
0
0
1
0
0
0
|
éducation physique
|
anglais
1
0
1
1
0
1
0
0
0
0
|
éducation musicale
|
|
2.1.1. les parents
|
|
|
|
|
8
|
25.60
|
|
|
|
|
3
|
|
2.2.1. influence des camardes de classes
|
|
|
|
|
6
|
54.88
|
|
|
|
|
|
4
|
|
|
|
|
3
|
|
|
|
|
|
3
|
|
|
|
|
|
3
|
|
2.3.1. peur des mathématiques
|
|
|
|
|
3
|
19.52
|
|
|
|
|
|
3
|
|
|
|
|
2
|
|
Oui=1 Non=0
77
Nous avons voulu savoir quels sont les facteurs
influençant l'orientation des élèves et que les
enseignants mettent en avant. Il ressort du tableau n° 5 que les facteurs
relatifs au contexte scolaire et professionnel occupent une position centrale
(54.88%) dans la représentation des enseignants des facteurs
influençant le choix d'orientation d'élèves. Ce
résultats rejoignent ce que Heyneman et loxley (1983) cité par
Duru-Bellat (2003) avaient vérifié par rapport aux
inégalités de la réussite scolaire (et donc de la
carrière scolaire) dans les pays en voie de développement. Pour
ces deux auteurs, ces inégalités s'expliquent beaucoup plus par
les facteurs scolaires que par les facteurs familiaux. Il s'agit des facteurs
relatifs à l'influence des camarades de classe (avec six voix), «
généralement euh...je trouve que chez nous ...euh ce sont les
camardes de classe qui influencent le choix d'orientation »
(enseignant de la technologie). Vient ensuite ceux de l'effet maître
(avec quatre voix). Sur ce point un enquêté affirme que «
si le professeur se comporte bien en classe, l'élève peut
poursuivre ses études dans n'importe quelle filière ...
» (enseignant de physique 1). Nous allons revenir sur cet effet
maître un peu plus loin dans le thème relatif aux pratiques
enseignantes en matière d'orientation. Les trois autres facteurs de
cette catégorie (les possibilités d'insertion professionnelle, l'
« effet de mode » de s'orienter en scientifique et le manque
d'encadrement) ont eu trois voix pour chacun. Un enseignant avait
insisté sur l'impact exercé par la situation économique du
pays sur la promotion de l'emploi des diplômés. Pour lui, cet
impact aurait des retombées sur la façon d'anticiper le parcours
scolaire et l'avenir professionnel de l'élève.
« ...le plus influençant c'est la
réalité économique du pays... c'est-à-dire...
l'après euh orientation... car l'apprenant se demande souvent : «
qu'est-ce que je vais faire dans l'avenir ?...vais-je faire ingénieur ?
Vais-je faire médecin ? » ... il n'y a pas beaucoup de solutions
que cet élève peut choisir pour s'orienter et assurer une
insertion professionnelle ... » (enseignant de physique 2).
Un enseignant avait mis l'accent sur l'influence du manque
d'encadrement, particulièrement celui du conseiller en orientation, sur
le choix d'orientation « ...l'orienteur qui vient deux ou trois fois
toute l'année parce qu'il a plusieurs écoles et
lycées...il vient de temps à autre...donc l'élève
ne pourra pas savoir les débouchés de celle-ci ou de
celle-là...donc le manque de l'information » (enseignant des
sciences naturelles). La mode de s'orienter vers le scientifique peut aussi
exercer une influence sur les choix des élèves « ...l'
« effet de mode » aujourd'hui c'est de faire scientifique...oui on ne
fait pas scientifique parce que on y travaille mais c'est parce que c'est un
« effet de mode ... » (enseignant de l'anglais). C'est dire que
le contexte scolaire en tant qu'espace d'« interactions sociales et
pédagogiques » (Duru-Bellat,
78
2002, p. 96) crée une diversité de pratique
susceptible de générer un ensemble de disparités sociales
(Landrier et Nakhili, 2010).
Bien que la catégorie des facteurs relatifs au
contexte familial vienne en deuxième position en matière de
représentativité, elle contient, néanmoins, un
élément relativement central dans la représentation des
facteurs influençant le choix d'orientation chez les enseignants. Il
s'agit de l'influence des parents. En effet, huit enquêtés sur
douze insistent sur l'influence que peuvent avoir les parents sur le choix
d'orientation des élèves. La fratrie influence aussi le choix
d'orientation puis qu'elle est reprise par trois enquêtés parmi
douze. « Euh... tout d'abord il y a le milieu familial...le milieu
familial, ses frères... comment ils ont vécu leur
scolarité, car si vous voulez, à 80%, si ses frères
étaient scientifiques, il choisira lui aussi le scientifique ...
» (enseignant des mathématiques). Donc la structure et les
caractéristiques de la famille ; les rôles et les positions des
membres de la famille influencent sur le choix d'orientation des
élèves (Liechti, 2012 ; M. Reuchlin, 1978 cités dans
Liechti, 2012).
La catégorie des caractéristiques personnelles
contient trois facteurs influençant le choix d'orientation : le premier
est engendré par la peur des mathématiques (3 voix) qui fait
qu'une partie des élèves « ...fuient vers le
littéraire... même s'ils sont bons ...» (enseignant des
mathématiques). L'enseignant de l'éducation islamique trouve,
quant à lui, que « l'élève qui...qui te dit :
« moi, je veux faire seulement les lettres... » ...comme s'il se
protège derrière cette branche littéraire ». Le
deuxième correspond à l'influence du modèle (3 voix).
Celui-ci peut être l'enseignant lui-même, un ami, une personne dans
la famille, une personnalité...et qui représente pour certains
élèves un exemple à suivre ou à imiter.
L'élève donc
« regarde le modèle...il regarde une personne
qui a réussi sa vie, surtout s'il a une belle voiture ...il rêve
lui aussi de devenir comme lui...donc il a ce modèle...et la
représentation mentale de cette personne...il a réussi sa vie
donc il se dit : « moi aussi...je veux »...il fait...il en fait une
auto-projection » (enseignant du français)
Le troisième facteur, cité par deux
enseignants, est relatif à un comportement scolaire des
élèves caractérisé par le délaissement de
certaines disciplines aussi bien littéraires que scientifiques et ce,
selon l'intérêt que leur donne l'élève.
Enfin, il est à souligner ici, qu'en rapport avec
notre cadrage théorique des facteurs influençant le choix
d'orientation des élèves, il paraît qu'un certain nombre de
ces facteurs ne sont pas pris en considération par les
enquêtés. En effet, l'influence de l'origine sociale, l'âge,
le redoublement et le genre sur le choix d'orientation n'ont été
cités par aucun enquêté. Ceci peut être
expliqué par le contexte différent de la production des
recherches scientifiques sur
79
l'orientation des élèves. D'ailleurs, Heyneman
et Loxley (1983 cité dans Duru-Bellat, 2003) ont montré que
certaines variables, telle que l'origine sociale, expliquant
l'inégalité sociale face à l'école dans les pays
industrialisés, n'ont pas le même pouvoir explicatif dans les pays
en voie de développement. Ils avancent que d'autres variables doivent
être mises en avant pour expliquer ces inégalités,
notamment les ressources matérielles destinées à
l'enseignement. Celles-ci n'apparaissent pas, non plus, dans le discours des
enseignants sur les facteurs influençant le choix d'orientation des
élèves. Il semble que les enseignants enquêtés n'ont
pas assez de recul pour pouvoir développer une vision plus globale de
tous ces facteurs.
2.1.4. Représentations des différentes
filières scolaires après la troisième :
Par rapport aux connaissances qu'ont les enseignants des
filières scolaires après la troisième collégiale,
nous avons constaté qu'ils en ont peu. En effet, la majorité des
enquêtés, nous semble-t-il, n'a pas le recul nécessaire
pour répondre à la question portant sur les filières
après la troisième. Certains d'entre eux n'hésitent pas
à afficher clairement leur ignorance et leur méconnaissance des
différentes filières scolaires.
« Euh pour les filières, je ne peux pas vous
dire quelque chose...mais pour la branche de l'éducation physique, j'ai
quelques informations ...» (enseignant d'éducation physique).
« Moi...je ne suis pas tout à fait au courant des
filières après la troisième ... » (enseignant
d'anglais). « A ma connaissance, il y a les lettres et les
sciences...je pense qu'il y a d'autres branches mais euh elles ne me viennent
pas là ... » (enseignant d'arabe).
Pour les uns, cette situation est due à plusieurs
raisons. Ils se justifient, par exemple, en évoquant l'existence d'une
personne responsable de l'orientation des élèves « Je ne
sais pas...euh...je crois qu'il y a une personne qui est responsable de
l'orientation des élèves... l'orienteur...moi je pense que mon
rôle est très limité ... » (enseignant
d'anglais). Pour d'autres, c'est le fait de ne pas enseigner les classes de la
troisième (premier panel d'orientation) qui justifie leur
méconnaissance des filières scolaires « ...je veux
attirer votre attention que je n'ai pas beaucoup de choses à dire dans
ce domaine...car je n'ai pas eu de classe de troisième cela fait plus de
dix années ... » (enseignant d'arabe). Ainsi, ces enseignants
peuvent se sentir exempts de connaître le système d'orientation
scolaire. En revanche, d'autres enseignants, en particulier ceux des
disciplines qualifiantes pour l'orientation littéraire ou scientifique
(cf. tableau n° 2), ont montré un assez bon niveau de connaissance
des filières scolaires. Outre les filières classiques (lettres ou
sciences), ils ont
80
cité les filières techniques (ou
technologiques), certaines filières de la 2ème et la
3ème année du cycle de Baccalauréat et la
formation professionnelle.
Nous avons relevé aussi que la majorité des
enquêtés ne semble pas maîtriser les appellations des
filières et branches scolaires, pourtant adoptées depuis l'an
2006. Cinq enquêtés parmi 12 ont cité l'appellation du
tronc commun quoiqu'avec une précision moins grande «
Après la troisième... il y a le tronc commun ?...
». Aucun enquêté n'a pu citer l'ensemble des quatre
troncs communs qui viennent juste après la troisième
collégiale (scientifique, littéraire, technologie, enseignement
originel) et encore moins les filières du cycle de baccalauréat
ou celles de l'après-bac. La formation professionnelle en tant que
filière de formation parmi d'autres, a été citée
par deux enseignants enquêtés. Il est probable, ici, que la
poursuite des études dans cette formation est considérée
par les autres enquêtés non pas comme une orientation scolaire
mais plutôt comme un échec scolaire.
Globalement, ce sont les enseignants des disciplines dites de
découvertes et ceux qui n'ont pas la classe de troisième qui ont
affiché clairement leur méconnaissance du domaine d'orientation.
Ceci peut être expliqué par leur implication plus au moins forte
dans les décisions d'orientation de fin d'année. Cette
implication est elle-même conditionnée par la position qu'occupent
leurs disciplines consécutives dans la hiérarchie des disciplines
qualifiantes à l'une ou l'autre filière scolaire. Nous avons
relevé aussi que la majorité des enseignants
enquêtés n'ont qu'une connaissance rudimentaire et non
actualisée des filières après la troisième. Ses
filières scolaires sont généralement réduites aux
deux filières dichotomiques ; les lettres et les sciences. Cela
étant, nous pouvons avancer, sans trop de risque, que les enseignants
enquêtés, ne seront pas en mesure d'apporter une aide efficace aux
élèves en matière d'orientation, encore moins prendre des
décisions d'orientation bien fondées. Il est probable donc que
ces décisions seront entachées d'une certaine subjectivité
résultat, pour partie, des représentations sociales que ces
enseignants mettent en oeuvre pour appréhender un objet peu connu (les
filières et branches scolaires après la troisième). Nous
allons explorer dans la section suivante ces représentations en
identifiant principalement les pré-requis retenus et le profil
dressé pour chaque type d'orientation (scientifique et
littéraire).
81
2.1.4.1. Représentations de l'orientation
scientifique :
a. Pré-requis d'une orientation scientifique : Tableau
n° 6 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
11
|
3.1.1.2. intérêts et penchants scientifiques
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
3.1.1.3. compréhension des textes et lois
scientifiques
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
3
|
3.1.1.4. capacité de résolution de
problème
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
3.1.1.5. maîtrise du français
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
3.1.1.6. maîtrise de la langue
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
L'analyse des données du tableau n° 6 nous permet
de relever certains prérequis mis en avant par les enseignants pour
qu'un élève accède à une filière
scientifique. Ces prérequis sont au nombre de six. Le prérequis
relatif aux bonnes notes en matières scientifiques constitue un
élément central sur lequel s'accorde la majorité des
enquêtés. En effet, cet élément détient
à lui seul l'essentiel des voix (11 voix parmi 12). Remarquons aussi
qu'il s'agit bien de « bonnes notes » et non pas assez bonnes ou
moyennes. Un enseignant avait précisé ce qu'il entend par les
bonnes notes « l'élève ...par exemple qui est meilleur,
qui a des notes élevées par exemple 17, 18 c'est-à-dire au
dessus de 16, je considère que cet élève est scientifique
euh...dans les sciences naturelles, la physique et les mathématiques ...
un scientifique avec 12 de moyenne n'est pas scientifique»
(enseignant de l'histoire-géo). Pour entreprendre des études en
branches scientifiques, il faut donc avoir absolument et en premier lieu de
bonnes notes dans les disciplines scientifiques. Viennent ensuite les
prérequis concernant les intérêts et penchants
scientifiques et la compréhension des textes et lois scientifiques avec
3 voix chacun. Enfin, nous avons relevé trois prérequis,
quoiqu'avec une seule voix pour chacun, qui peuvent appartenir aux
éléments périphériques qui composent les
représentations sociales des enseignants quant aux prérequis pour
une orientation scientifique. Il s'agit de la capacité à
résoudre des problèmes, la maîtrise du français et
la maîtrise de la langue. Par rapport à ces
82
derniers prérequis, un enseignant avait insisté
sur le rôle prépondérant de la langue française dans
la poursuite des études en sciences particulièrement
au-delà du baccalauréat.
« ...s'il ne maitrise pas la langue, il rencontrera
de grands problèmes dans l'enseignement supérieur...car les
sciences et les disciplines scientifiques s'enseignent en
français...même s'il excelle en mathématiques dans les
...euh les classes préparatoires...bien évidemment il
rencontrera...il rencontrera...ce qu'on appelle... un blocage qui va limiter
son... il ne communiquera pas avec les enseignants...il ne communiquera pas
avec les autres élèves...même dans les écoles
privées ... » (enseignant du français).
L'enseignant de la physique 2, quant à lui, affirme
que la compréhension du texte scientifique est liée, pour partie,
à la maîtrise de la langue et qualifie le délaissement des
disciplines littéraires « d'erreur fondamentale » que
commettent beaucoup d'élèves voulant entreprendre des
études scientifiques.
« ...le cas où l'élève opte
pour le scientifique et délaisse les disciplines littéraires...
et ça c'est une erreur fondamentale... cet élève doit
acquérir les langues pour qu'il puisse comprendre les sciences... s'il
n'a pas les langues... il n'arrive pas à comprendre le texte
scientifique pour l'exploiter... il n'a pas les outils, il lui manque la
maîtrise de la langue pour exploiter cet exercice scientifique et donner
une réponse complète... ».
Retenons enfin que la majorité des enseignants
enquêtés s'accorde à considérer les bonnes notes en
disciplines scientifiques (mathématiques, physique et sciences
naturelles) comme étant le prérequis sine qua non pour
une orientation scientifique. Un préreuis, outre qu'il est
disciplinaire, semble revêtir, pour eux, un caractère plus ou
moins objectif.
83
b. Profil d'un élève scientifique :
Tableau n° 7 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
3.1.1.1.1. raisonnement logico- déductif
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
6
|
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
4
|
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
1 0 0 0 0 0 0
0 0 0 0 0 0 0
|
0
|
0
0
|
0
|
0
0
|
0
|
1
|
|
|
|
|
1
|
3.1.1.2. qualifications disciplinaires
|
3.1.1.2.1. s'intéresse à l'objectif et l'essentiel
des choses
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
5
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
Dans l'objectif de restituer, le plus fidèlement
possible, l'ensemble des caractéristiques d'un élève
à profil scientifique citées par les enseignants, nous avons
essayé de les grouper suivant huit sous-catégories nettement
différentes l'une de l'autre. Ensuite, et pour y voir plus clair, nous
avons réparti ces sous-catégories suivant deux catégories.
La première concerne les qualifications personnelles et la
deuxième concerne les qualifications disciplinaires. Le tableau n°
7 affiche cette répartition et organisation des catégories.
Avant d'analyser les données de ce tableau, signalons,
que lors des entretiens, nous avons remarqué que les enseignants de
chaque catégorie de disciplines (scientifiques ou littéraires)
ont eu, la plupart du temps, une position valorisant le profil qui a trait
à leurs disciplines de spécialité. Nous avons
remarqué par exemple que les enseignants des disciplines
littéraires, particulièrement celui du français,
décrivent le profil littéraire avec plus de détail et plus
de caractéristiques positives propres à lui.
84
« ...nous avions une idée fausse qui fait que
l'élève en échec fait la spécialité des
lettres...c'est erroné...pourquoi ? Car si je n'étais pas...si je
n'avais pas des intérêts littéraires...et j'ai des
intérêts...j'ai un style...j'écris bien en arabe et en
français...j'analyse bien en...ce qu'on appelle ...
l'histoire-géo... je ne peux pas réussir ... »
(enseignant du français).
Par contre trois enseignants parmi quatre des disciplines
scientifiques, en plus de valoriser eux aussi le profil scientifique, essaient
de relever ses caractéristiques qui généralement
s'opposent à celles du profil littéraire. C'est comme si, pour
ces enquêtés, le profil scientifique est pris pour l'opposé
du profil littéraire.
« ...la logique d'un scientifique n'est pas celle
d'un littéraire... le littéraire essaie de t'expliquer avec trop
de détails et... par contre le scientifique résume l'explication
...» (enseignant de physique 1). « On peut leur poser une
question dans les connaissances scientifiques... celui qui va répondre
c'est celui qui a le profil scientifique et on va voir que le littéraire
ne pourra pas répondre... donc à travers cette évaluation
on peut identifier le littéraire et le scientifique ...»
(enseignant de physique 2).
Seul l'enseignant des sciences naturelles avait
affiché une position assez différente de celle exprimée
par les enseignants des autres disciplines scientifiques. Cette position
consiste à considérer chaque profil selon ses propres
caractéristiques. Celles-ci ne sont quasiment pas différentes
mais au contraire, elles peuvent avoir certaines ressemblances «
...à ce niveau nous avons un problème souvent
rencontré à la fin d'année...s'il n'est pas scientifique
donc il est littéraire automatiquement ...» (enseignant des
sciences naturelles). L'enseignant du français avait exprimé, lui
aussi, son désaccord avec l'idée d'opposer souvent le
scientifique au littéraire dans le déroulement des conseils de
classe « le fait que l'élève n'a pas pu poursuivre en
scientifique donc « envoyez-le !...envoyez-le ! » euh au
dépotoir entre... entre parenthèses le dépôt des
lettres... ». Il rajoute qu'un ensemble des caractéristiques
de l'élève scientifique figure en même titre chez
l'élève littéraire « il y a un télescopage
entre les deux ». Tous les deux sont caractérisés par
un ensemble de prédispositions et d'aptitudes. L'enseignant de
l'histoire-géo trouve que les élèves excellents le sont
aussi bien dans les disciplines scientifiques que dans les disciplines
littéraires « l'élève qui est meilleur...on ne
peut pas le caractériser scientifique ou littéraire...parfois
l'élève est meilleur dans toutes les
disciplines...».
Revenons à présent sur notre tableau. Nous
relevons que les deux tiers des caractéristiques du profil scientifique
sont regroupées dans la catégorie des qualifications
personnelles. Le tiers restant est regroupé dans la catégorie des
qualifications disciplinaires. Par rapport à la première
catégorie, nous avons relevé que le raisonnement
logico-déductif est la qualification la plus mise en avant pour
caractériser un profil scientifique (citée par la moitié
des enquêtés). Vient en deuxième position la
caractéristique de la rapidité. Pour quatre enseignants
enquêtés
85
sur douze (trois enseignants des disciplines scientifiques
plus celui de l'anglais), un élève scientifique c'est une
personne rapide dans la réalisation des tâches, dans les
réponses « ...le scientifique quand je lui donne un exercice je
m'attends à ce qu'il répond rapidement ... »
(enseignant des mathématiques). « ...c'est quelqu'un qui est
euh rapide...rapide dans l'observation...je veux dire c'est quelqu'un qui a un
réflexe rapide » (enseignant de l'anglais). En
troisième position, nous avons les qualifications suivantes : l'esprit
et réflexe scientifique, le sens d'analyse, d'observation et de
détection avec deux voix pour chacune. Et en dernière position,
se situent les qualifications relatives au sens critique, à la
persévérance et à l'intelligence avec une voix pour
chacune.
Concernant la deuxième catégorie, les
enseignants sont beaucoup moins nombreux (six enquêtés parmi 12)
à citer les qualifications disciplinaires pour caractériser le
profil scientifique. Cinq parmi eux considèrent que le fait de
s'intéresser souvent à l'objectif et l'essentiel des choses
caractérise l'élève à profil scientifique. «
...le scientifique résume l'explication » (enseignant de
physique). « Une fois tu lui donnes un document, il l'analyse ...et
suivant une analyse scientifique... il regarde ce que toi... ce que tu veux de
ce document...te dis par exemple : « cette chose mène vers
ceci...ce problème nécessite ceci... ». Il te déduit
un problème scientifique ... » (enseignant des sciences
naturelles). Trois autres qualifications disciplinaires (une voix pour chacune)
ont été cités par les enquêtés : le fait
d'avoir de bonnes notes, d'être capable de réaliser un graphe et
de se désintéresser des matières littéraires.
Relevons enfin, que deux enseignants (de technologie et de
l'histoire) ont montré des positions relativement distinctes par rapport
à celles des autres enquêtés. En effet, au moment où
tous les enseignants ont cité ne serait-ce qu'un seul
élément caractérisant l'un ou l'autre profil, l'enseignant
de la technologie avait pris une position différente quant à la
description des deux profils. Pour lui, il est difficile d'identifier le profil
d'un élève en l'absence d'un test élaboré
spécialement à cette fin. « Je peux caractériser
les profils...euh...en utilisant un test...oui, ce sont les tests qui peuvent
nous donner une idée sur le profil d'un élève...
». Mais en l'absence des tests, il a affirmé que c'est sur les
notes scolaires qu'il se base pour identifier le profil de
l'élève. Cette position se rapporte, en effet, aux
premières pratiques de l'orientation scolaire encadrées par le
courant psychométrique initié par Parsons en 1944. Ces pratiques
consistaient à aider le candidat, via une évaluation objective de
ses aptitudes et de ses goûts, à faire le choix d'une profession
et des études qui y préparent (Guichard et Huteau, 2001). Quant
à l'engeignant de l'histoire-géo, il a conclu son discours sur
les qualifications d'un élève à profil scientifique en
déclarant que les élèves dans son collège
86
« ...ne sont ni littéraires ni scientifiques
car...si tu prends les littéraires...ils sont tous faibles en
français...et n'ont ni soutien ni quoi que ce soit...et si tu prends les
scientifiques...pour la majorité...la majorité de nos
élèves ne dépasse pas 12 ou 10 en
mathématiques...on n'a pas de scientifiques dans cette
établissement... ».
Cet enseignant semble se référer à ce
que Mollo (1986 cité dans Gilly, 1989) appelle le modèle
hiérarchique. Ce modèle permet à un certain nombre
d'enseignants d'organiser l'essentiel de leur pratique. En matière
d'orientation, ils ont « donc toujours des « forts » et des
« faibles » voués à des parcours scolaires
inégaux. » (Idem, p. 392). Il est possible aussi de
ramener ces propos à la représentation qui a de l'orientation des
élèves défavorisés socialement. «...on
sait que ces pauvres élèves n'ont pas les
moyens...l'élève compte sur soi-même...et la manière
avec laquelle fonctionne l'enseignement...avec les heures
supplémentaires qui ne laissent pas beaucoup d'espoir pour ces
élèves». En effet, Channouf et al., (2005)
avaient relevé que les stéréotypes liés à
l'appartenance sociale peuvent influencer les décisions d'orientation.
Ce qui fait qu'à dossier scolaire équivalent, les enseignants ont
une tendance à orienter plus souvent les élèves du milieu
favorisé vers des études longues que les élèves des
autres milieux (Girard et Clerc, 1964)
2.1.4.2. Représentations de l'orientation
littéraire :
a. Prérequis pour une orientation littéraire :
Tableau n° 8 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
7
|
3.2.1.2. maîtrise des langues
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
6
|
3.2.1.3. intérêts littéraires
(poésie, théâtre...)
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
4
|
3.2.1.4. lecture des livres
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
3.2.1.5. capacité de rédaction
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
3.2.1.6. capacité d'analyse en histoire-géo
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
3.2.1.7. culture générale
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
La lecture des données du tableau n° 8 fait
ressortir que les enseignants s'accordent en général à
considérer que l'élève souhaitant s'orienter en lettres,
doit avoir de bonnes notes dans les
87
disciplines littéraires (7 voix) et maîtrise les
langues (6 voix). « ...pour le littéraire il faut qu'il
maîtrise les langues, ceci est essentiel... en tout cas,
l'élève doit maîtriser les trois disciplines qui sont
l'arabe, l'histoire-géo et l'éducation islamique ... »
(enseignant d'histoire). Nous retrouvons ici le critère relatif à
la note dans les disciplines qualifiantes tout comme dans l'orientation
scientifique. Letiers des enquêtés ont évoqué aussi
le rôle des intérêts littéraires (poésie,
théâtre...) dans la poursuite des études de
l'élève en branche littéraire. D'autres prérequis
ont été cités par les enquêtés : être
habitué à lire des livres (4 voix), avoir une capacité de
rédaction (2 voix) et d'analyse en histoire-géo (une voix) et
enfin avoir une culture générale (une voix).
Nous avons également pu constater que les enseignants
ont tendance à opérer une sorte d'hiérarchisation des
filières scolaires après la troisième. Ils mettent, de ce
fait, la filière scientifique en première place et la
filière littéraire en seconde place. Certains d'entre eux
rapportent ou laissent entendre que la filière littéraire est
prise pour « une filière de garage » ou «
dépôt des lettres » (prof du français) non
seulement chez les enseignants mais aussi chez les élèves, les
parents et les administrateurs.
Globalement, tout comme les prérequis d'une
orientation scientifique, ceux d'une orientation littéraire sont souvent
ramenés aux bonnes notes dans les disciplines de qualification. Il
semble donc que les enseignants, en l'absence d'une alternative susceptible de
juger objectivement les aptitudes des élèves, se voient
contraints de regarder du côté des notes disciplinaires, seules
informations qui leur paraissent plus ou moins objectives et socialement
désirées.
88
b. Profil d'un élève littéraire :
Tableau n° 9 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
3.2.2.1.1. capacités discursives
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
qualifications
|
3.2.2.2.1. utilise beaucoup de détails et
d'informations
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
4
|
|
0
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
3
Oui=1 Non=0
Le tableau ci-dessus montre, à première vue,
qu'à l'opposé de la description faite par les enseignants du
profil scientifique, celle faite pour le profil littéraire est moins
abondante en matière d'informations, indices ou critères (9
caractéristiques du profil littéraire reprises
différemment 16 fois contre 12 caractéristiques du profil
scientifique reprises différemment 27 fois). De plus, cette description
s'organise beaucoup plus autour des qualifications disciplinaires. Celles-ci
sont citées par six enseignants enquêtés parmi 12 tandis
que les qualifications personnelles sont utilisées par 4
enquêtés parmi 12. Il semble donc que les enseignants
enquêtés éprouvent une certaine difficulté à
dresser un profil littéraire en dehors des qualifications
disciplinaires. Celles-ci peuvent être, par exemple, le fait d'utiliser
beaucoup de détails et d'informations dans l'explication de choses (4
voix parmi 12). Pour l'enseignant des sciences naturelles, un
littéraire
« ...te dis quelque chose qui n'a rien avoir avec ce
qu'on fait mais il te donne par exemple sa propre analyse littéraire
.
· « l'essentiel c'est d'avoir ceci et cela... » et continu
à parler ... je lui dis .
· « moi... je ne veux pas une
expression écrite...moi je veux une analyse
89
scientifique...donnes-moi une seule phrase qui
résume ce que je veux mais les autres choses je n'ai rien à faire
avec... ».
On trouve aussi dans ce passage la capacité d'analyse
littéraire (cités par deux autres enquêtés) comme
caractéristique disciplinaire du profil littéraire. L'enseignant
d'éducation islamique avait insisté, quant à lui, sur la
capacité d'apprendre par coeur (expression reprise 5 fois dans son
discours) qui caractérise en premier lieu le profil
littéraire.
Concernant les qualifications personnelles figurant dans le
tableau ci-dessus, nous constatons qu'elles sont plus au moins
hétérogènes à tel point que deux
enquêtés au plus s'accordent sur une même qualification. En
effet, nous avons relevé les qualifications relatives à la
capacité discursive et la communication avec deux voix chacune. Vient
après, avec une seul voix chacune, les qualifications suivantes :
l'amour pour la lecture qui est indispensable pour un littéraire «
...un littéraire qui ne lit pas n'est pas un littéraire ...
» (enseignant du français), le sens critique, le fait de
s'exprimer souvent par ses émotions et d'avoir ses propres productions
littéraires.
2.1.5. Pratiques enseignantes en matière
d'orientation :
Nous tenons à préciser, ici, que les pratiques
des enseignants en matière d'orientation, décrites ci-dessous,
sont exclusivement des pratiques rapportées par eux-mêmes et donc
ne sont pas, nécessairement, des pratiques effectivement
réalisées. D'ailleurs Abric (1994), affirme que les pratiques
rapportée par les enquêtés peuvent être
différentes des pratiques effectives. Les pratiques que nous allons
décrire dans cette section sont regroupées suivant six
catégories. Celles-ci sont conçues à partir des questions
du guide d'entretien. Il s'agit donc du rôle des enseignants dans
l'orientation scolaire, leur influence sur les choix des élèves,
leurs démarches d'aide à l'orientation, les critères
qu'ils retiennent pour se prononcer sur l'orientation des élèves,
leur évaluation de la procédure d'orientation et leurs
propositions quant à l'amélioration des pratiques enseignantes en
matière d'orientation.
90
2.1.5.1. Rôle des enseignants dans l'orientation
des élèves :
Tableau n° 10 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
4.1.1.1. acteur important dans l'orientation
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
4.1.2.
secondaire
|
4.1.2.1 à titre de consultation
|
1
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
1
|
1
|
7
|
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
Oui=1 Non=0
Les positions des enseignants vis-à-vis de leur
rôle dans l'orientation des élèves sont très
différentes. Elles varient d'un rejet catégorique de ce
rôle à une reconnaissance délibérée voire
même une responsabilité affirmée de l'enseignant dans
l'orientation de ses élèves. Cette variation semble être
conditionnée à la fois par la place qu'occupe chaque discipline
dans la hiérarchie des disciplines qualifiantes (à l'une ou
l'autre orientation) et par le fait d'enseigner ou non en classe de
troisième (premier palier d'orientation). Certains enseignants affirment
donc qu'ils n'ont aucun rôle à jouer dans l'orientation ou du
moins leur rôle serait limité ou secondaire. Ils justifient cette
position en évoquant soit le manque d'informations et/ou de formations
dans ce domaine soit l'existence d'une personne responsable de l'orientation
scolaire (le conseiller en orientation) « personnellement je dis que
ceci est la tâche du professeur qui s'occupe de cette opération
... » (enseignant de l'éducation musicale). D'autres
enseignants, qui se sentent impliqués dans l'orientation de leurs
élèves, considèrent l'enseignant comme étant le
premier responsable de l'échec scolaire dans le cas d'une orientation
inadaptée de l'élève.
« ...quand on l'oriente dans une filière qui
lui est difficile... tu l'as exposé à un risque éminent
s'il ne trouve pas une aide quelque part...c'est moi donc qui est responsable
de son échec ... donc toi tu représentes un acteur important dans
l'orientation de l'élève dans son futur parcours scolaire
» (enseignant de physique 1).
Pour l'enseignant de la technologie, ce rôle existe bel
et bien ne serait-ce qu'en tant que personne ressource par rapport à sa
discipline de spécialité « Ah oui...j'ai un rôle
à jouer dans
91
l'orientation de mes élèves surtout ceux qui
veulent faire le tronc commun technologique... chaque professeur, selon sa
discipline...peut être une personne ressource pour aider les
élèves dans leur choix d'orientation... ». D'autres
poussent plus loin leur réflexion en considérant que l'aide
à l'orientation des élèves est tout simplement un «
devoir professionnel» (enseignant de l'éducation
islamique). Cette position s'apparente parfaitement avec notre cadrage
théorique du rôle de l'enseignant dans l'orientation des
élèves. En effet, Guichard (1997) affirme que l'enseignant est
l'acteur incontournable du processus de l'orientation parce que, d'une part, il
est un acteur très proche de l'élève et, d'autre part, il
enseigne une discipline qui peut constituer un tremplin pour la
découverte des intérêts scolaires et professionnels de
l'élève.
Le tableau n° 10 nous renseigne sur ces
différentes positions en fonction de la discipline
spécialité. En effet, nous pouvons relever que les enseignants
des disciplines scientifiques se sentent beaucoup plus concernés par
l'orientation de leurs élèves. Viennent après, les
enseignants des disciplines littéraires et en dernier lieu les
enseignants des disciplines dites de découverte. Ceux-ci se sont
montrés relativement désintéressés par rapport
à la question d'orientation des élèves... leurs
productions discursives lors des entretiens témoignent de cet
état de fait ; ils parlaient peu et affichaient clairement leur
méconnaissance du domaine de l'orientation exception faite du professeur
de la technologie. Celui-ci, au contraire, a montré un
intérêt particulier à l'orientation des
élèves...D'ailleurs, il est le seul parmi tous les
enquêtés à pouvoir donner plus d'informations sur les
filières d'orientation après la troisième
collégiale. Cet enseignant a reconnu son rôle déterminant
dans l'orientation de ses élèves...il a même la conviction
qu'il peut aider les élèves dans leur orientation surtout celle
technologique. « ... ils se disent que je suis le mieux placé
pour les aider dans... pour le choix de ce parcours...donc à travers la
matière que j'enseigne euh si je vois qu'un élève a un
intérêt pour les sciences ou la technologie je peux lui apporter
des informations...je peux l'aider à s'orienter vers la filière
technologique... ».
Quoique certains enseignants confirment leur rôle
important dans l'orientation des élèves, il reste qu'une bonne
partie parmi eux considère ce rôle plutôt secondaire. En
d'autres termes, ils n'interviennent dans l'orientation de
l'élève que sous la demande de celui-ci et
généralement à titre consultatif.
92
2.1.5.2. Influence des enseignants sur les choix
d'orientation des élèves :
Tableau n° 11 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
4.2.1.1. personne-ressource pour l'élève
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
5
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
3
|
4.2.2. indirecte
|
4.2.2.1. la notation ne reflète pas le niveau de
l'élève
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
7
|
|
0
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
Oui=1 Non=0
En réponse à la question concernant l'influence
des enseignants sur le choix d'orientation des élèves, nous avons
pu identifier deux types d'influence ; directe et indirecte (cf. tableau
n° 11). L'influence est indirecte quand les enseignants affirment par
exemple que la notation ne reflète pas le niveau de
l'élève (7 vois parmi 12) ou quand ils mènent une
pédagogie d'enseignement/apprentissage susceptible de rendre leurs
disciplines appréciables (3 voix) « par exemple un
élève qui s'entend avec toi...qui pose des questions...qui
répond à d'autres et qui se reconnaît dans cette
discipline... donc tu l'influences, et il se dit je vais poursuivre dans cette
discipline... quand il trouve des encouragements... aime cette discipline...
ça influence son orientation ... » (enseignant de la physique
1). Concernant l'influence directe, cinq enseignant parmi douze reconnaissent
leur statut de personnes ressources à qui les élèves se
tournent pour demander de l'aide à l'orientation. D'autant plus que
« les enfants du milieu populaire visent moins haut (notamment quand ils
ont un niveau scolaire médiocre), ou se rallient plus volontiers aux
conseils, par ailleurs plus prudents, de leurs enseignants. »
(Duru-Bellat, 2003, p. 27).
Généralement, les enseignants
enquêtés s'accordent à considérer leur influence sur
l'orientation des élèves beaucoup plus indirecte (12 voix) que
directe (8 voix).
93
2.1.5.3. Démarches d'aide à l'orientation
pratiquées par les enseignants :
Tableau n° 12 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
Espace occupé par la catégorie en
(%)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
Arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
4.3.1.1. son niveau dans les autres disciplines
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
5
|
16.5
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
4
|
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
3
|
|
4.3.2.1. par observation du comportement
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
8
|
23.08
|
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
5
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
4.3.3.1. sur les exigences et débouchés de
certaines filières de formation
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
1
|
7
|
12.31
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
4.3.4.1. à propos de son choix d'orientation
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
4
|
48.46
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
4
|
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
94
Vis-à-vis des actions à entreprendre lorsqu'un
élève a besoin d'une aide à l'orientation, nous avons
relevé (cf. tableau n° 12) que les enseignants en ont cité
quatre types : donner des conseils aux élèves (constitue 48.46%
de leur démarche d'aide à l'orientation), la vérification
des capacités des élèves (23.8%), s'informer sur
l'élève (16.5%) et informer l'élève (12.31%). Les
conseils que donnent les enseignants aux élèves se rapportent,
pour la grande partie, à la façon d'envisager leur choix
d'orientation (4 voix). Ces conseils peuvent être donnés à
partir de l'expérience de l'enseignant et celle de son entourage (4
voix). D'autres conseils sont cités par un ou deux enseignants tels que
l'encouragement à solliciter l'aide de tous ses professeurs dans son
choix d'orientation, l'incitation à travailler dans toutes les
disciplines et à faire plus d'exercices.
Par rapport à la vérification des
capacités des élèves à suivre telle ou telle
filière scolaire, nous avons relevé que les enquêtés
s'accordent en premier lieu sur la démarche d'observation du
comportement de l'élève en classe (8 voix). En second lieu, cette
vérification s'accomplit à travers la passation d'un test
d'évaluation (5 voix). « ...dans ce genre de cas je me
réfère souvent aux compétences...j'essaye de poser une
situation problème dans la classe » (enseignant de physique
2).
Retenons, enfin, que la démarche d'aide à
l'orientation entreprise par les enseignants enquêtés consiste
essentiellement à conseiller l'élève. Ceci confirme, en
grande partie, les déclarations de ces enseignants concernant leur
rôle dans l'orientation des élèves. Nous avons
constaté, rappelons-le, qu'une bonne partie des enquêtés
estiment que leur rôle dans l'orientation des élèves est
plutôt secondaire. Ils interviennent généralement à
titre consultatif et sous la demande de l'élève lui-même.
Ceci est d'autant plus vrai qu'une partie des enquêtés a
déclaré ne pas avoir assez de recul pour appréhender les
différentes possibilités et exigences des études
après la troisième. De plus, certains enquêtés, ont
éprouvé un énorme besoin en matière d'information
et de formation en orientation scolaire (nous y reviendrons un peu plus
bas).
95
2.1.5.4. Critères retenus pour se prononcer sur
l'orientation d'un élève :
Tableau n° 13 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
4.4.1.1. notes scolaires
|
0
|
1
|
0
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
1
|
10
|
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
6
|
|
1
|
1
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
6
|
|
1
|
1
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
4
|
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
4.4.2. relatifs au choix
|
4.4.2.1. voeux exprimés d'orientation
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
4
|
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
0
|
1
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
2
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
Nous avons pu relever, jusqu'à présent, un
ensemble d'aspects et d'éléments qui brossent, pour partie, les
contours du champ représentationnel de l'orientation chez les
enseignants. Toutefois, et pour éclairer davantage ces
éléments et ces aspects, nous nous sommes conduit à
explorer, particulièrement, les éléments qui nous semblent
centraux dans la pratique enseignante en matière d'orientation. Il
s'agit, précisément, des critères que retiennent les
enseignants pour se prononcer sur l'orientation des élèves. Pour
se faire, nous leur avons, d'une part, posé une question directe lors
des entretiens « Quelles sont les critères/indices sur
lesquelles vous vous basez pour se prononcer sur l'orientation de tel ou tel
élève ? » et, d'autre part, proposé une
activité dont ils étaient amenés à choisir les
critères qui leur
96
paraissent plus pertinents pour prendre des décisions
d'orientation (les résultats de cette activité seront
présentés dans la deuxième section de cette analyse).
Suite à l'analyse du contenu des discours produits par
les enquêtés en réponse à la question ci-haut, nous
avons identifié deux catégories de critères : la
catégorie des critères disciplinaires (huit critères) et
celle des critères relatifs au choix d'orientation de
l'élève (4 critères). Le tableau n°13 nous fait
ressortir qu'à l'exception des critères relatifs aux notes
scolaires (cités par 10 enquêtés parmi 12), au niveau dans
les disciplines de qualification (6 enquêtés) et à
l'aisance dans l'apprentissage de la discipline (6 enquêtés), les
autres critères sont généralement
hétérogènes. Remarquons aussi que les enseignants ont
cité deux fois plus des critères relevant de la première
catégorie que ceux relevant de la deuxième. Les critères
disciplinaires semblent donc plus retenus par les enseignants pour
décider de l'orientation de leurs élèves. Nous retrouvons,
ici, l'exemple de certains enseignants (ceux de l'arabe et de
l'éducation musicale), affirmant clairement que c'est principalement sur
la note scolaire qu'ils se basent pour prendre des décisions
d'orientation « pour moi ...euh seules les notes scolaires peuvent
nous informer sur le niveau d'élève et se prononcer ensuite sur
son orientation ... » (enseignant d'arabe). Bien que la
majorité des enquêtés reconnaissent l'influence de la note
scolaire sur le choix d'orientation (selon eux cette note ne reflète pas
le niveau réel de l'élève) « un
élève même avec une note de 10, s'il a l'esprit
scientifique il passe scientifique... donc pour moi ...la note ne montre pas
tout» (enseignant des sciences naturelles), ils n'hésitent
pas, en revanche, à la prendre pour le critère le plus retenu
dans les décisions d'orientation. « Les notes
scolaires...oui...je trouve que c'est le seul critère un
peu...euh...comment dirais-je ?...objectif ... » (enseignant de la
technologie). « ...souvent, les notes sont les critères
essentiels ...» (enseignant de l'éducation musicale). Il nous
emble, dans ce cas, qu'au regard de la note scolaire, les enseignants ont deux
attitudes opposées. D'une part ils nient sa validité
prédictive et, d'autre part, ils considèrent qu'elle est le seul
critère plus au moins objectif sur lequel ils peuvent se baser pour
prendre des décisions d'orientation.
97
2.1.5.5. Évaluation de la procédure
administrative d'orientation par les enseignants:
Tableau n° 14 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
|
|
sc. physique 1
|
sc. physique 2
|
sc. naturelles
|
français
|
arabe
|
histoire-géo
|
éducation islamique
|
technologie
|
éducation physique
|
anglais
|
éducation musicale
|
|
4.5.1.1. procédure inappropriée
|
1 0 0 0 1 0 1
0 0 0 1 1 0 1
|
0
|
1
0
|
1
|
0
1
|
0
|
5
|
|
|
|
|
4
|
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
3
|
|
0 0 0 0 1 0 1
0 0 0 0 0 1 0
0 0 0 0 1 0 0
0 0 0 0 0 0 1
|
0
|
0 0 0 0
|
0
|
0 0 0 0
|
0
|
2
|
|
|
|
|
2
|
|
|
|
|
1
|
|
|
|
|
1
|
4.5.2. inconvénients relevés
|
4.5.2.1. voeu de l'élève prévaut dans les
conseils
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
4
|
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
0
|
1
|
1
|
0
|
0
|
3
|
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
2
|
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
2
|
|
1
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
0
|
0
|
2
|
|
0 0 0 0 1 0 0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
0
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
Le tableau ci-dessus présente une vue globale des
réponses qui ont été apportées par les enseignants
quand on leur avait demandé d'évaluer la procédure
d'orientation au Maroc. Ces réponses ont été
réparties suivant deux catégories. La première
catégorie regroupe des réponses sous forme d'appréciations
générales et la deuxième catégorie concerne les
inconvénients de cette procédure. Pour ce qui est de la
première catégorie, nous relevons que, majoritairement, les
appréciations quant à la procédure d'orientation sont
défavorables. Elle est jugée inappropriée par cinq
enquêtés. L'enseignant de l'histoire-géo l'avait même
jugée « déshonorante » pour le système
éducatif en décriant la relation superficielle entre
l'orienteur et les élèves.
98
Quand les enseignants émettent des jugements
défavorables à l'encontre de la procédure d'orientation,
ils pensent, particulièrement, au fonctionnement du conseil
d'orientation « la procédure aussi n'est pas bien...quand tu
précises à l'avance le seuil de réussite...donc je
préfère ne pas participer aux conseils de classe ... »
(enseignant de l'éducation sportive). En effet, quatre enseignants parmi
douze avaient soulevé un ensemble d'inconvénients entravant le
bon fonctionnement de ce conseil (le voeu de l'élève qui
prévaut, un conseil juste pour la forme, les notes comptent plus, faible
prise en compte de l'avis de l'enseignant et les risques d'erreurs qui peuvent
« jalonner le parcours scolaire de l'élève »
(enseignant du français)). Ceci semble accentuer les
inégalités sociales face à l'orientation des
élèves. Par rapport à ce dernier point, des
enquêtés ont attiré l'attention sur le contexte
inégalitaire dans lequel se déroule la procédure
d'orientation. Ils observent, par exemple, qu'une partie importante des
élèves de leur établissement (contexte socialement
défavorisé) remplissent les fiches de voeux sans avoir recours
à leurs parents ou à une personne susceptible de les aider. Ils
les remplissent généralement en classe avec leur camarade
(problème d'influence des camarades sur les demandes d'orientation qui
peut conduire soit à une auto-sélection soit à ou une
demande plus ambitieuse). Cette auto-sélection fait partie d'un ensemble
de biais sociaux entourant les demandes d'orientation (Duru-Bellat, 2002). De
plus les conseils d'orientation ont tendance à entériner ces
demandes au lieu de chercher à tirer vers le haut les ambitions
scolaires et professionnelles des élèves. Les propos de
l'enseignant de l'histoire-géo révèlent un mode de
pensée de certains enseignants vis-à-vis de l'orientation des
élèves socialement défavorisés.
« ... car avec 12 qu'est-ce qu'il va faire en
sixième année et le bac ?...quoi ? ...s'il ne fait pas des cours
de soutien...et on sait que ces pauvres élèves n'ont pas les
moyens...l'élève compte sur soi-même...et la manière
avec laquelle fonctionne l'enseignement...avec les heures
supplémentaires qui ne laissent pas beaucoup d'espoir pour ces
élèves, il me paraît que les élèves dans
notre collège ne sont ni littéraires ni scientifiques
».
Ainsi, l'identité et l'estime de soi de certains
élèves peuvent être affectées et par
conséquent n'auront probablement pas l'ambition de faire des
études très prometteuses.
99
2.1.5.6. Améliorations des pratiques
enseignantes en orientation selon les enseignants :
Tableau n° 15 :
Catégories
|
Entretien avec l'enseignant de
|
total des (Oui)
anglais
|
Espace occupé par la catégorie en
(%)
|
|
sc. physique 1 0 0
0 1 0 0 0 0
|
sc. physique 2 0 0
0 0 0 0 0 0
|
sc. naturelles 0 0
0 1 1 0 1 0
|
çsanfair 0 0
1 0 1 1 1 0
|
beaar
|
gsoeéorthii-
0 0 0 1 1 0 1 0
|
éducation islamique
|
technologie
1
0
0
0
0
0
1
0
|
éducation physique
|
0
0
0
1
0
0
1
0
|
éducation musicale
|
|
4.6.1.1. travailler suivant l'ancienne procédure
(l'enseignant décide de l'orientation de l'élève)
|
0
|
|
|
|
|
3
|
32.6
1
|
|
1
|
|
|
|
|
1
|
|
0
|
|
|
|
|
1
|
|
4.6.2.1. accompagnement des élèves dans leur
orientation
|
0
|
|
|
|
|
4
|
32.6
1
|
|
0
|
|
|
|
|
3
|
|
0
|
|
|
|
|
1
|
|
4.6.3.1. formation et
information sur le domaine et les filières
d'orientation
|
1
|
|
|
|
|
7
|
34.7 8
|
|
0
|
|
|
|
|
1
|
|
Oui=1 Non=0
A la fin de l'entretien semi directif, nous avons
demandé aux interviewés de nous faire part de leurs propositions
d'amélioration de la pratique enseignante en matière
d'orientation. Le tableau ci-dessus présente l'ensemble des propositions
réparties (à part presque égale) selon trois niveaux. Le
premier niveau contient des propositions relatives à
l'amélioration de la procédure d'orientation. Le deuxième
niveau regroupe les propositions qui ont trait à
100
l'encadrement des élèves dans leur processus
d'orientation. Le troisième et dernier niveau concerne les besoins des
enquêtés en matière de formation/information en
orientation.
Par rapport au premier niveau, nous avons relevé que
trois enquêtés parmi cinq qui en ont parlé, veulent
travailler suivant l'ancienne procédure d'orientation. Une
procédure qui, selon eux, confère à l'enseignant un
rôle déterminant dans la prise de décisions d'orientation
« c'est le professeur qui voit si cet élève
mérite ou pas » (enseignant de l'éducation islamique).
D'autres enquêtés (au nombre de cinq) ont soulevé le manque
d'encadrement des élèves dans leurs choix d'orientation. Pour
remédier à cette situation, l'enseignant de l'histoire-géo
« parle de ce qui doit se faire avant cette fiche de voeux...il doit y
avoir une préparation en amont avant de la donner à
l'élève...une relation...un contact qui doit être direct et
permanent ... ». Pour l'enseignant du français « s'il
y a un orienteur dans un seul établissement il va pouvoir
connaître et suivre tous les élèves de
l'établissement et ...ce serait bénéfique pour les
élèves... ». Et par rapport au besoin de
formation/information en orientation, huit enquêtés l'avait
exprimé contre quatre qui ne l'ont pas fait.
Globalement, les propositions d'amélioration de la
pratique enseignante en matière d'orientation sont relativement
différentes d'un enseignant à un autre. Ceci témoigne du
caractère complexe du domaine de l'orientation nécessitant une
multitude d'entrées éducatives susceptibles de développer
une action pertinente de l'aide à l'orientation des
élèves.
101
2.2. Résultats de l'activité (le cas
présenté aux enquêtés) :
Cette deuxième section de l'analyse des données
pratiques met en évidence ce que les enseignants ont tendance à
retenir, en premier lieu, comme critères pour se prononcer sur
l'orientation de leurs élèves. Elle permettra donc de
répondre, avec plus de nuance, à la dernière question
spécifique de notre recherche : Quelles sont les
critères/indices que les enseignants ont-ils tendance à utiliser
pour se prononcer sur l'orientation de tel ou tel élève ?
Pour répondre donc à cette question, nous nous
sommes intéressé particulièrement aux critères
retenus pour une orientation scientifique et ceux retenus pour une orientation
littéraire. Quatre scénarios pour chacune des deux orientations
sont établis par chaque enquêté selon ce qu'il lui
paraît plus prédicteur. Un tableau récapitulatif de
l'activité est présenté. Il permet d'observer plus
facilement les critères saillants retenus par les enseignants pour
concevoir les deux types de scénarios demandés. D'autres calculs
sont effectués permettant d'apprécier l'importance
accordée à chaque critère par rapport à l'ensemble
des critères proposés dans l'activité.
2.2.1. Présentation des données :
L'objectif de notre recherche, rappelons-le, consiste
à déterminer les caractéristiques des
représentations sociales que se font les enseignants à
l'égard de l'orientation de leurs élèves. Nous allons
présenter dans ce qui suit, les résultats d'une activité
proposée aux enquêtés (étude de cas). Cette
activité nous a permis, d'une part, de mettre en exergue les
éléments les plus retenus pour caractériser un profil
littéraire et un autre scientifique et, d'autre part, d'opposer, s'il y
a lieu, les dires des enseignants avec les résultats de cette
activité (validité instrumentale).
L'analyse des résultats de cette activité est
effectuée en faisant ressortir :
- Le nombre de critères retenus par les enseignants
toutes disciplines confondues ; - Les critères retenus suivant la
filière d'orientation (scientifique ou littéraire) ;
- Les critères retenus et qui servent à
décrire autant les scénarios littéraires que ceux
scientifiques ;
- Les critères qui vont généralement
ensemble dans les scénarios ;
- Les critères retenus en présence des notes
disciplinaires très faibles ;
- Les critères retenus selon la nature de la
discipline enseignée (scientifique, littéraire, ou de
découverte).
Code
|
Critère
|
Type de critère
|
A1
|
Math : 11/20
|
note chiffrée
|
A2
|
Math : 6/20
|
|
Math : 9/20
|
|
Math : 5/20
|
|
Français : 14/20
|
|
Français : 8/20
|
|
Français : 9/20
|
|
Français : 7/20
|
|
Physique : 13/20
|
|
Physique : 9/20
|
|
Physique : 11/20
|
|
Physique : 3/20
|
|
Sc naturelles : 12/20
|
|
Sc naturelles : 5/20
|
|
Sc naturelles : 9/20
|
|
Sc naturelles : 7/20
|
|
Arabe : 5/20
|
|
Arabe : 11/20
|
|
Arabe : 9/20
|
|
Arabe : 12/20
|
|
His-Géo : 3/20
|
|
His-Géo : 13/20
|
|
His-Géo : 11/20
|
|
His-Géo : 8/20
|
|
Moyenne : 11.5/20
|
|
Moyenne : 11/20
|
|
Moyenne : 9.5/20
|
|
Moyenne : 9/20
|
|
Code
|
Critère
|
Type de critère
|
H1
|
Inscrit au conservatoire
|
socioéconomique
|
H2
|
Aime la natation
|
|
Fait du théâtre
|
|
Participe à l'aide aux devoirs du
collège
|
|
Joue au foot
|
|
Joue à la Boxe
|
|
Regarde des séries
télévisées
|
|
Fait du shopping
|
|
Il a une bourse
|
|
Passionné de littérature
|
|
Se balade en ville avec ses amis
|
|
Aime les jeux vidéo
|
|
Fille
|
genre
|
K2
|
Garçon
|
|
Voeux d'orientation
|
Scientifique
|
voeux d'orientation
|
|
|
Voeux d'orientation
|
Littéraire
|
|
|
Voeux d'orientation
|
Scientifique
|
|
|
Voeux d'orientation
|
Littéraire
|
|
|
102
Tableau n°16 : Critères utilisés dans
le cas présenté aux enseignants
103
Tableau n° 17 : Répartition des
critères proposés aux enseignants selon leurs
catégories
|
|
Critères relatifs aux
|
|
|
|
statuts socioéconomiques
|
voeux d'orientation
|
genre
|
total
|
nombre
|
28
|
12
|
4
|
2
|
46
|
pourcentage
|
60,87%
|
26,09%
|
8,70%
|
4,35%
|
100,00%
|
|
Figure n° : 2
Le tableau n°16 présente l'ensemble des
critères proposés aux enquêtés pour établir
les scénarios demandés. Ces critères sont de quatre types.
Le tableau n° 17 présente une répartition des
critères selon leur type. Le premier type concerne les notes
chiffrées (regroupe 60.87 % des critères proposés). Le
deuxième type est relatif aux statuts socioéconomiques (26.09%).
Le troisième type présente des voeux d'orientation (8.70%) et le
quatrième type est relatif au genre (4.35%). Rappelons, ici, que
l'ensemble de ces critères se rapporte généralement
à un élève de niveau moyen ou à un
élève de niveau moyennement faible.
enseignant de
technologie
éducation physique
mathématiques
français
histoire-géographie
éducation islamique
éducation musicale
Sc. physiques 1
Sc. physiques 2
Sc. naturelles
arabe
anglais
A1 L1 C1 H4
A1 C1 D1 B2
A1 C1 D1 L1
A1 C1 D1 L1
A1 J4 C1 G1
A1 C1 D1 B1
A1 C1 D1 B1
A1 C1 D1 B1
A1 C1 D1 G1
A1 C1 D1 H1
A1 C1 D1 G1
A1 C1 D1 G1
scénario 1
A3 C3 D1 L3
A3 C3 G1 L1
A3 C3 D3 L3
A3 C3 B1 H4
A3 C3 D3 B2
A3 C3 D3 G2
A3 C3 D3 G2
A3 C3 D3 L1
C3 B1 L1 G2
C3 A3 B3 D3
C3 D3 F2 E4
C3 G1 J4 K2
pour une orientation scientifique pour une orientation
littéraire
scénario 2
A2 B3 D3
A2 D4 G1
D1 A3 D3 L3
H4 A2 D4
J1 G4 H4 L3
D3 G1 A2
D3 G1 H1
G1 H4 L1 F2
D4 B2 H4
G1 J4 K1 L1
G2 A3 J1
D4 G3 H4
scénario 3
scénarii proposés par les
enseignants
A4 D4 B4 L3
A4 C4 D2 G2
F2 G2 L3 I2
A2 D4 H4
A2 D4 G2
A3 F3 G2
A4 D4 J4 I4
D3 G3 H2 H4
A2 F2 G4 L1
G2 A4 D4 J4
G1 J1 L1 J4
D4 G3 L4
scénario 4
L2 B1 E4 G1
B1 E4 F2 H3
E4 B1 F2 H3
B1 E4 H3 L2
E4 B1 J2 H3
B1 E4 F2 G1
B1 J2 E4 K2
B1 E4 F2 G1
B1 E4 F2 G1
E4 B1 F2 H3
B1 E4 F2 G1
B1 E2 F2 L2
scénario 1
L4 E2 F2 G2
B3 E2 G2 F3
E2 B3 F3 J2
B3 E2 G1 J2
E2 B3 F2 L2
E2 B3 F3 G2
E2 F2 H3 H4
E2 F3 B3 G2
B3 E2 F3 G2
E2 F3 J2 J3
B3 E2 F3 H4
B3 E4 G1 H4
scénario 2
E3 B3 F3 H4
B2 E3 F4 H4
E3 B2 G2 L2
F2 G2 B2 H4
F3 B2 G1 E3
B2 E3 F4 G3
F3 B3 E3 H1
D1 E3 G3 J2
B2 E3 F4 G3
A1 G1 I3 F4
B2 E3 G2 J2
F3 E3 G2 J2
scénario 3
J2 F4 B2 H3
B4 G3 I3 L2
F4 B4 H4 G1
E3 F3 H1 L4
B4 E1 F4 G2
B4 E1 F1 G4
L2 J1 B2 G1
L2 H1 A2 K2
B4 G4 H3 J2
L2 G2 H1 H2
B4 E1 F4 L2
H1 I3 G3 L4
scénario 4
104
Tableau n° 18 : Répartition des
critères choisis par les enseignants selon les scénarios
proposés et la discipline enseignée
Tableau n° 19 : a
scénarii proposés par les
enseignants
pour une orientation scientifique
pour une orientation littéraire
scénario 4
A1 L1 C1
114
A3 C3 D1
L3
J4
L2
B1 E4 G1
L4
113
L1
L3
B1 E4 F2
113
I3
L2
A1 C1 D1
L1
A3 C3 D3
L3
113
E2 B3 F3
J2
E3 B2 G2
L2
F4 B4
114
G1
A1 C1 D1
L1
A3 C3 B1
114
D3 G1
111
F2 G2
L3
I2
B1 E4 113
L2
B3 E2 G1
J2
F2 G2 B2
114
E3 F3
111
L4
L1
G2 D1 A3 D3
L3
A2 D4
114
L2
114
L1
F2
114
G1
J1
L1
J4
B1 J2 E4
K2
E2 F2
113 114
F3 B3 E3
111
L2
J1 B2 G1
J4
K1
L1
J2
L2
111 A2
K2
114
J4 I4
A1 C1 D1
111
C3 G1
J4
K2
G2 A3
J1
D3 G3
112 114
E4 B1 F2
113
I3
F4
L2
G2 111 112
114
A2 F2 G4
L1
L2
L1
J1
G4
114
L3
D4 G3
L4
B1 E4 F2
L2
L4
A1 C1 D1 B2 A3 C3 G1
A1 J4 C1 G1 C3 B1
A1 C1 D1 B1 C3 A3 B3 D3 G1
A1 C1 D1 B1 A3 C3 D3 B2 D4 B2
A1 C1 D1 B1 C3 D3 F2 E4 G1
A1 C1 D1 G1 A3 C3 D3 G2
A1 C1 D1 G1 A3 C3 D3 G2 D4 G3
A1 C1 D1 G1 A3 C3 D3
scénario 1 scénario 2 scénario
3
A2 B3 D3 A4 D4 B4
A2 D4 G1 A4 C4 D2 G2 E4 B1 F2
D3 G1 A2 G2 A4 D4
A2 D4 A4 D4
A2 D4 G2 B1 E4 F2 G1 E2 B3 F3 G2 B2 E3 F4 G3 B4 E1 F1
G4
A3 F3 G2 B1 E4 F2 G1 E2 F3 B3 G2 D1 E3 G3
E4 B1 J2 113 E2 B3 F2
B1 E4 F2 G1 B3 E2 F3 G2 B2 E3 F4 G3 B4 G4 113
J2
B1 E4 F2 G1 B3 E2 F3 114 B2 E3 G2 J2 B4 E1
F4
scénario 1 scénario 2 scénario 3
scénario 4
B3 E2 G2 F3 B2 E3 F4 114 B4 G3
E2 F3 J2 J3 A1 G1
B3 E2 G1 114 F3 E3 G2 J2 111 I3 G3
E2 F2 G2 E3 B3 F3 114 J2 F4 B2
F3 B2 G1 E3 B4 E1 F4 G2
Sc. naturelles
français
arabe
anglais
enseignant de
technologie
éducation physique
mathématiques
histoire-géo
éducation islamique
éducation musicale
Sc. physiques 1
Sc. physiques 2
critères relatifs au genre
critères relatifs aux voeux d'orientation critères
relatifs aux statuts socioéconomiques critères relatifs aux notes
chiffrées
105
106
2.2.2. Analyse des données recueillies de
l'activité :
Avant d'analyser les données des tableaux n°18 et
n°19, nous allons présenter la répartition des
critères qui y figurent :
Tableau n° 20 : Répartition des
critères choisis par les enseignants selon le type de scénario
établi
|
scénarios scientifiques
|
scénarios littéraires
|
tous scénarios confondus
|
|
pourcentage
|
nombre
|
pourcentage
|
Nombre
|
pourcentage
|
Critères relatifs aux
|
notes chiffrées
|
150
|
78,13%
|
141
|
73,44%
|
291
|
75,78%
|
|
23
|
11,98%
|
36
|
18,75%
|
59
|
15,36%
|
|
17
|
8,85%
|
13
|
6,77%
|
30
|
7,81%
|
|
2
|
1,04%
|
2
|
1,04%
|
4
|
1,04%
|
|
total
|
192
|
100,00%
|
192
|
100,00%
|
384
|
100,00%
|
|
Sachant bien qu'environ 40% des critères
proposés aux enseignants sont de nature différente de la note
chiffrée, nous avons relevé que presque les trois-quarts des
critères retenus par les enquêtés, pour établir les
scénarios d'orientation, sont sous forme d'une note chiffrée. Le
quart restant est partagé entre les critères relatifs aux statuts
socioéconomiques avec 15.36%, aux voeux d'orientation avec 7.81% et au
genre avec 1.04%. Cette répartition est observée, avec une
légère différence, aussi bien pour les scénarios
scientifiques que pour les scénarios littéraires.
Figure n° : 3
107
Figure n° : 4
Figure n° : 5
Analyse des tableaux n°18 et n°19
:
Au vu du déroulement de la deuxième
étape de notre enquête du terrain, nous aimerions souligner, que
la majorité des enseignants avaient éprouvé une certaine
difficulté quant à la réalisation de l'activité
proposée. Celle-ci leur paraissait relativement contraignante vu la
nature des critères à choisir qui y figurent. Ceci a
été volontairement prévu car l'activité
présente une situation de choix peu confortable pour les enseignants
enquêtés. En effet, plus l'enseignant avance dans la proposition
des scénarios plus il se rend compte qu'il lui est difficile
d'opérer encore des choix pertinents parmi les critères restants.
Cette difficulté a été constatée par Bressoux
(2006). Pour cet auteur, les enseignants arrivent, facilement, à
émettre
108
des jugements relativement valides par rapport aux
performances actuelles de leurs élèves. En revanche, ces
jugements sont moins valides quand ils sont amenés à
prédire les performances futures d'un élève. Cela
étant, les décisions d'orientation seraient donc moins
fondées vu qu'elles constituent une forme de prédiction de la
réussite future de l'élève dans telle ou telle
filière.
Par rapport aux données du tableau n° 17, nous
pouvons relever que :
Dans la plupart des premiers scénarios aussi bien
scientifiques que littéraires, les enseignants ont retenu exclusivement
des critères relatifs à la note chiffrée. Ceci semble
être parfaitement en harmonie avec leurs dires lors des entretiens. En
effet, ils se sont généralement accordés à retenir,
en premier lieu, les notes scolaires pour se prononcer sur l'orientation des
élèves (cf. tableaux n°6, n°8 et n°13).
Tous les enseignants enquêtés ont mis le
critère 11/20 en mathématiques en première position dans
leurs meilleurs scénarios relatifs à l'orientation scientifique
alors que même en présence des notes 14/20 en français,
11/20 en arabe et 13/20 en histoire-géo, les enseignants sont
relativement départagés sur le premier critère à
mettre dans les scénarios littéraires : huit ont choisi la note
du français, trois celle de l'arabe et une personne a choisi le voeu
d'orientation.
Généralement, en matière de disciplines
qualifiantes à l'une ou l'autre orientation, les enseignants choisissent
pour les scientifiques d'abord les mathématiques puis la physique et
ensuite les sciences naturelles. Pour les littéraires, ils choisissent
l'arabe ou le français puis l'histoire-géo. Par rapport à
la discipline du français, il apparaît que les enseignants des
disciplines scientifiques ne l'ont pas introduit comme discipline importante
pour l'orientation scientifique (ne figure pas dans leurs premiers
scénarios établis) contrairement aux enseignants des disciplines
littéraires. Exception faite pour l'enseignant du français qui,
en plus des mathématiques et de la physique, a
préféré mettre un critère relatif aux jeux
vidéo et un autre relatif à la moyenne générale.
Pour les trois premiers critères retenus pour
établir les meilleurs scénarii scientifiques, la majorité
des enseignants ont utilisé les critères relatifs aux notes dans
les disciplines scientifiques ; les mathématiques, la physique et les
sciences naturelles. Mention faite à deux enseignants : l'enseignant du
français qui a préféré mettre à la place des
sciences naturelles, le critère relatif aux jeux vidéo. Pour lui,
le fait qu'un élève aime les jeux vidéo
révèle son
109
potentiel scientifique. L'enseignant des mathématiques,
quant à lui, a jugé le voeu d'orientation de
l'élève plus prédictif de sa réussite future que sa
note en sciences naturelles.
Au-delà des trois premiers critères sur
lesquels les enseignants s'accordent généralement dans les
scénarios scientifiques, les différences commencent à
s'observer d'un enseignant à l'autre au niveau du quatrième
critère retenu. Certains enseignants ont mis la note en français
(trois enseignants des disciplines littéraires). D'autres ont mis la
moyenne générale (quatre enseignants, celui du français et
les autres des disciplines de découverte). L'enseignant des
mathématiques a mis le soutien scolaire et les deux enseignants de
physique ont mis le choix d'orientation et la note en français. Les
enseignants des sciences naturelles, du français et d'éducation
musicale ont mis respectivement le choix d'orientation, la moyenne
générale et l'inscription aux conservatoires.
Pour les scénarios littéraires, les deux
critères relatifs à la note en arabe et la note en
français sont souvent alternés entre la première et la
deuxième position dans le classement des critères retenus par les
enseignants. La note en histoire-géo occupe généralement
la troisième position. Comme dans les scénarios scientifiques, le
quatrième critère semble varier d'un enseignant à un autre
(cinq ont mis « la moyenne = 11.5/20 », trois ont mis « faire du
théâtre deux ont mis « le voeu d'orientation
littéraire » et un seul enquêté a introduit le
critère relatif au genre).
Le tableau n°19 fait apparaître que les
enseignants ont introduit dans leurs premiers scénarii des
critères autres que les notes chiffrées (au nombre de 8 pour les
scénarios scientifiques et de 11 pour les scénarios
littéraires). Mais, de manière générale, c'est
lorsque l'on a épuisé les critères relatifs aux notes
moyennes et moyennement faibles pour établir les premiers
scénarios que les enseignants ont commencé à
intégrer et en nombre croissant d'autres critères de nature
différente dans le reste des scénarios.
Les critères relatifs aux voeux d'orientation
représentent 15.36% du total des critères retenus par les
enseignants pour établir les scénarios demandés. Ces
critères sont retenus aussi bien dans les scénarios
littéraires que scientifiques avec une légère augmentation
au niveau de ces derniers. Encore mieux, trois enseignants (de disciplines
scientifiques) les avaient retenus pour les premiers scénarios
scientifiques et littéraires. Il paraît donc que le voeu
d'orientation constitue chez certains enseignants un critère essentiel
pour prédire la réussite scolaire des élèves alors
que pour d'autres, il est moins important voire sans intérêt
(enseignant de la technologie). Cela rejoint les propos de certains enseignants
désirant travailler selon
110
l'ancienne procédure d'orientation qui confie à
l'enseignant la prise des décisions d'orientation de
l'élève et que le voeu de celui-ci n'y est que facultatif.
A part les critères « participe à l'aide
aux devoirs du collège », « passionné de
littérature », « fait du théâtre », «
inscrit au conservatoire » et « il a une bourse » qui ont
été retenus différemment par au moins quatre
enquêtés, les autres critères socio-économiques
(aime la natation, fait du théâtre, pratique la boxe, regarde des
séries télévisées, fait du shopping, se balade en
ville avec ses amis, aime les jeux vidéo) n'ont été
retenus que par un ou deux enquêtés (cf. tableau n°21). Le
critère « joue au foot », quant à lui, n'a
été retenu par aucun enseignant. Ceci peut avoir plusieurs
explications. Nous en proposant deux :
D'abord, il nous semble qu'aux yeux des enseignants
enquêtés, les critères socio-économiques qui ont
trait aux intérêts et aux capacités disciplinaires
(largement évoqués par les enseignants lors des entretiens) sont
plus informatifs sur le profil scolaire de l'élève que les autres
critères.
Ensuite, il est possible que cette différence
observée soit imputée, pour partie, au contexte social de
l'établissement scolaire. En effet, celui-ci est fréquenté
généralement par un public défavorisé et ce genre
d'informations (les autres critères socio-économiques) ne semble
pas éclairer les enseignants sur ce qui peut aider l'élève
à poursuivre ses études aussi bien en lettres qu'en sciences. Par
contre, le fait d'avoir une bourse ou faire des cours de soutien ou être
passionné de littérature peut représenter dans le contexte
marocain une aide considérable pour qu'un élève de ce
milieu scolaire poursuive ses études dans de meilleures conditions.
De même, les critères relatifs au genre
paraissent eux aussi moins informatifs et ne suscitent chez les
enquêtés qu'un intérêt très minime (retenus
par 4 enquêtés parmi douze et généralement à
partir du troisième scénario). Pour eux, être fille ou
garçon ne semble pas conditionner la nature des études à
entreprendre après la troisième collégiale.
Tous ces résultats ne nous permettent d'avancer que
dans le contexte marocain, les représentations
stéréotypées relatives au genre et aux statuts
socio-économiques (Channouf et al., 2005) ne se manifestent pas
, nous semble-t-il, de la même manière que dans le contexte
européen. Résultats qui doivent être analysés en
profondeur dans d'autres études à portée plus
généralisatrice.
Globalement, les trois premiers critères retenus aussi
bien dans les scénarios scientifiques que littéraires marquent
une certaine stabilité. Nous pouvons avancer que ces trois
critères
111
constituent les éléments centraux autour
desquels se forgent les représentations sociales des enseignants quant
aux critères retenus pour prendre des décisions d'orientation.
L'hétérogénéité observée dès
le quatrième critère à mettre (alors qu'il reste douze
autres critères à sélectionner) témoigne de la
diversité des approches personnelles que peuvent faire les enseignants
en l'absence des critères objectifs ou des critères reconnus et
désirés socialement. Ces critères peuvent constituer les
éléments périphériques de ces
représentations sociales. Le voeu d'orientation constitue lui aussi,
chez certains enseignants, un critère essentiel pour prédire la
réussite scolaire des élèves alors que pour d'autres, il
est moins important voire sans intérêt. Par rapport aux
critères socio-économiques, nous avons remarqué que ceux
qui ont trait aux intérêts et capacités disciplinaires
(largement évoqués par les enseignants lors des entretiens)
semblent, aux yeux des enquêtés, plus informatifs sur le profil
scolaire de l'élève que les autres critères. Enfin, les
critères relatifs au genre paraissent eux aussi moins informatifs et ne
suscitent chez les enquêtés qu'un intérêt très
minime.
Nous présenterons par la suite une exploitation des
données des tableaux n°18 et n°19 susceptible de nous
éclairer davantage sur la nature des critères les plus retenus
par les enseignants pour réaliser cette activité.
2.2.3. Exploitation des données recueillies de
l'activité:
Pour rendre compte de l'importance accordée à
un critère par rapport aux autres critères, il faut
déterminer à la fois son nombre d'apparition et le rang qui lui
est consigné par chaque enquêté. Un critère sera
d'autant plus important qu'il est choisi par le plus grand nombre
d'enquêtés et classé par ceux-ci dans les premiers
scénarios établis. Nous avons donc calculé un indice,
qu'on appellera indice d'importance (II) du critère. Cet indice
égal au nombre d'apparition d'un critère, dans chaque type de
scénario, multiplié par la somme des poids qui lui sont
affectés suivant son rang dans les scenarios. Ceux-ci sont au nombre de
quatre pour chaque type d'orientation (scientifique et littéraire) et
comprenant quatre critères pour chacun. Ce qui donne au total, seize
critères à choisir parmi quarante-six. On affectera, par exemple,
le poids « 16 » au premier critère choisi, « 15 »
pour le deuxième, « 14 » pour le troisième et ainsi de
suite jusqu'au 16ème critère choisi auquel on
affectera le poids « 1 ». Soit donc la formule suivante :
Indice d'importance (II) du critère= nombre
d'apparition du critère*somme des poids affectés au
critère selon son rang dans les scénarios.
La formule abrégée peut être écrite
ainsi : II= nombre d'apparition* somme des poids
112
Pour afficher cet indice en pourcentage, nous allons le
diviser sur la somme des indices des critères et multiplier le tout par
le chiffre 100.
Tableau n° 21 : Classement décroissant des
critères retenus en fonction de leurs nombres d'apparition :
|
Nombre d'apparition des critères
|
|
|
|
dans les scénarios littéraires
|
au total
|
critères utilisées
|
G1
G2
B1
F2
H4
A1
B3
D1
E4
F3
A3
B2
C1
C3
D3
E2
E3
D4
J2
L1
L2
A2
F4
G3
H3
B4
H1
J4
L3
A4
G4 J1
L4 E1
I3 K2
H2
C4
D2 F1 I2
I4
J3 K1 I1
|
12
|
11
|
23
|
|
11
|
20
|
|
12
|
17
|
|
12
|
16
|
|
7
|
16
|
|
1
|
13
|
|
11
|
13
|
|
1
|
13
|
|
12
|
13
|
|
12
|
13
|
|
0
|
12
|
|
9
|
12
|
|
0
|
12
|
|
0
|
12
|
|
0
|
12
|
|
0
|
12
|
|
12
|
12
|
|
11
|
11
|
|
0
|
10
|
|
10
|
10
|
|
0
|
10
|
|
10
|
10
|
|
1
|
8
|
|
8
|
8
|
|
5
|
8
|
|
8
|
8
|
|
6
|
7
|
|
5
|
7
|
|
0
|
6
|
|
0
|
6
|
|
0
|
4
|
|
2
|
4
|
|
1
|
4
|
|
3
|
4
|
|
3
|
3
|
|
3
|
3
|
|
2
|
3
|
|
1
|
2
|
|
0
|
1
|
|
0
|
1
|
|
1
|
1
|
|
0
|
1
|
|
0
|
1
|
|
1
|
1
|
|
0
|
1
|
|
0
|
0
|
|
113
Le tableau n° 21 présente le classement
décroissant des critères retenus en fonction de leurs nombres
d'apparition. Nous pouvons en relever que la moyenne générale est
le critère le plus retenu tous scénarios confondus (avec 43
apparitions). La moyenne générale, dans ce cas, semble informer
l'enseignant, pour partie, sur la scolarité future de
l'élève abstraction faite de ses acquisitions disciplinaires. Sur
ce point, nous avons pu vérifier dans notre recherche en Master 1 que la
moyenne générale en tronc commun scientifique est fortement
corrélée à celle de la troisième collégiale
(corrélation de 0.81 et dépendance très significative).
Cette réalité est largement évoquée par plusieurs
chercheurs ; Malone et Fleming (1983, cités par Chbani, 2002) Op.cit,
p.130) ont démontré que le niveau général de
capacité des élèves influence leur réussite
ultérieure en sciences. Ils ont trouvé une corrélation de
0.43 à partir de 42 enquêtes. Vient après le critère
relatif à la langue française (avec 17 apparitions). La
maîtrise de celle-ci est effectivement considérée comme
indispensable pour la poursuite des études littéraires et, dans
une moindre mesure, pour la poursuite des études scientifiques.
L'histoire-géo et la participation à l'aide aux devoirs du
collège ont été reprises 16 fois chacune. Pour certains
enseignants, une bonne note en histoire-géo peut aussi les informer sur
les capacités d'analyse et d'observation de l'élève et
donc elle est prise, quoique dans les derniers scénarios, comme un
critère pour décider d'une orientation scientifique. La
participation à l'aide aux devoirs du collège peut constituer,
nous l'avons vu, une forme d'aide utile pour développer les
capacités littéraires et scientifiques de l'élève.
Les autres critères sont soit déterminants dans un type
d'orientation et non pas dans l'autre soit ils sont généralement
mois retenus par les enquêtés.
A1 16 16 16 16 16 16 16 16 16 16 16 16 192 12 14,11
C1 14 15 15 15 14 15 15 15 15 15 15 15 178 12 13,09
D1 10 14 14 14 8 14 14 14 14 14 14 14 158 12
A3 12 12 12 12 7 11 12 4 12 7 12 12 125 12 9,19
G1 6 10 5 6 13 8 4 8 13 11 13 13 110 12 8,09
D3 7 5 10 7 6 9 10 11 10 4 10 10 99 12 7,28
L1 15 9 13 13 10 6 2 5 0 0 1 9 83 10
8 7 7 8 1 3 8 3 6 6 8 4 69 12 5,07
114 13 0 0 9 2 7 5 0 8 1 5 6 56 9
critères utilisés
G2 4 0 1 3 9 1 0 1 9 8 9 0 45 9 2,48
D4 2 3 6 0 3 2 7 0 5 0 7 3 38 10 2,33
B1 0 0 0 10 11 13 13 13 0 0 0 0 60 5 1,84
A2 5 8 8 0 4 4 0 0 7 0 4 0 40 7 1,72
J4 1 0 0 0 15 0 1 7 2 10 0 0 36 6 1,32
L3 9 1 9 2 5 0 0 0 0 0 0 5 31 6 1,14
F2 0 0 0 4 0 5 0 10 0 0 3 0 22 4 0,54
B2 0 13 0 0 0 0 9 0 0 0 0 0 22 3 0,40
A4 3 4 4 0 0 0 0 0 4 0 0 0 15 4 0,37
J1 0 0 0 0 0 0 3 0 0 5 0 8 16 3 0,29
111 0 0 0 5 0 0 0 0 0 13 0 0 18 2 0,22
G3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 3 6 2 11 3 0,20
B3 0 6 0 0 0 10 0 0 0 0 0 0 16 2 0,20
G4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 7 9 2 0,11
E4 0 0 0 0 0 0 0 9 0 0 0 0 9 1 0,06
K2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 9 0 0 9 1 0,06
K1 0 0 0 0 0 0 0 6 0 0 0 0 6 1 0,04
C4 0 0 3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 3 1 0,02
B4 0 2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 1 0,01
D2 0 0 2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 1 0,01
F3 0 0 0 0 0 0 0 2 0 0 0 0 2 1 0,01
112 0 0 0 0 0 0 0 0 0 2 0 0 2 1 0,01
I2 0 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 0,01
I4 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 0 1 1 0,01
L4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 1 1 0,01
E1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
E2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
E3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
F1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
F4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
113 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
I1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
I3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
J2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
J3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
L2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
C3 11 11 11 11 12 12 11 12 11 12 11 11 136 12
mathématiques
sc. physiques 1
sc. physique 2
sc. naturelles
français
Enseignant de
arabe
histoire-géo
éducation islamique
technologie
éducation musicale
éducation physique
anglais
Somme des poids
nombre
d'apparition
Indice
d'importance (II) en %
11,61
10,00
5,08
3,09
114
Tableau n° 22 : Classement décroissant des
critères utilisés par les enseignants en fonction de leurs
indices d'importance dans les scénarios scientifiques :
115
Figure n° : 6
Le tableau n° 22 et le graphe ci-dessus nous montrent
clairement que pour se prononcer sur l'orientation des élèves,
les enseignants enquêtés se basent principalement sur des
critères relatifs à la note chiffrée (soit plus de 75%
d'importance par rapport à l'ensemble des critères retenus par
les enquêtés). Ces critères semblent constituer les
éléments centraux des représentations sociales que se font
les enseignants des critères à mettre en avant pour fonder leurs
décisions d'orientation. Autour de ces éléments centraux,
gravitent un ensemble d'éléments périphériques
constitués par d'autres critères (relatifs aux voeux
d'orientation, aux statuts socio-économiques et au genre) qui peuvent
jaillir différemment selon la personne et le contexte dans lequel se met
en oeuvre la représentation sociale. Pour l'orientation scientifique,
comme nous l'avons déjà identifié, ce sont les notes dans
les disciplines scientifiques (dans l'ordre : les mathématiques, la
physique et les sciences) qui constituent les critères les plus retenus
par les enseignants. Les critères relatifs aux voeux d'orientation,
quant à eux, viennent en 8ème position derrière
sept critères relatifs à la note chiffrée. En
9ème position se situent les critères relatifs aux
statuts socio-économiques. Et enfin, les critères relatifs au
genre n'apparaissent qu'à la 26ème position. Ceci
témoigne de leur portée insignifiante au regard des autres types
de critères. La position qu'occupe la note chiffrée par rapport
aux autres types de critères peut être expliquée, nous
l'avons vu, par l'absence d'une alternative permettant aux enseignants de juger
objectivement les aptitudes des élèves. Ils se voient donc
contraints de regarder du côté des notes disciplinaires, seules
informations qui leur paraissent plus ou moins objectives et socialement
désirées.
B1 15 16 15 16 15 16 16 16 16 15 16 16 188 12
E4 14 15 16 15 16 15 14 15 15 16 15 15 181 12
F2 10 14 14 8 10 14 11 14 14 14 14 14 151 12
E2 11 11 12 11 12 12 12 12 11 12 11 11 138 12
B3 7 12 11 12 11 11 7 10 12 0 12 12 117 11 7,64
F3 6 9 10 3 8 10 8 11 10 11 10 8 104 12 7,41
G1 13 0 1 10 6 13 1 13 13 7 13 10 100 11 6,53
G2 9 10 6 7 1 9 0 9 9 3 6 6 75 11 4,90
E3 8 7 8 4 5 7 6 7 7 0 7 7 73 11 4,77
J2 4 0 9 9 14 0 15 5 1 10 5 5 77 10
L2 16 1 5 13 9 0 4 4 0 4 1 13 70 10
113 1 13 13 14 13 0 10 0 2 13 0 0 79 8
critères choisis
B2 2 8 7 6 7 8 2 0 8 0 8 0 56 9 2,99
114 5 5 2 5 0 0 9 0 0 0 9 9 44 7 1,83
F4 3 6 4 0 2 6 0 0 6 5 2 0 34 8 1,62
B4 0 4 3 0 4 4 0 0 4 0 4 0 23 6 0,82
G3 0 3 0 0 0 5 0 6 5 0 0 2 21 5 0,62
111 0 0 0 2 0 0 5 3 0 2 0 4 16 5 0,48
L4 12 0 0 1 0 0 0 0 0 0 0 1 14 3 0,25
I3 0 2 0 0 0 0 0 0 0 6 0 3 11 3 0,20
K2 0 0 0 0 0 0 13 1 0 0 0 0 14 2 0,17
E1 0 0 0 0 3 3 0 0 0 0 3 0 9 3 0,16
J3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 9 0 0 9 1 0,05
A1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 8 0 0 8 1 0,05
D1 0 0 0 0 0 0 0 8 0 0 0 0 8 1 0,05
G4 0 0 0 0 0 1 0 0 3 0 0 0 4 2 0,05
J1 0 0 0 0 0 0 3 0 0 0 0 0 3 1 0,02
A2 0 0 0 0 0 0 0 2 0 0 0 0 2 1 0,01
F1 0 0 0 0 0 2 0 0 0 0 0 0 2 1 0,01
112 0 0 0 0 0 0 0 0 0 1 0 0 1 1 0,01
A3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
A4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
C1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
C3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
C4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
D2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
D3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
D4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
I1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
I2 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
I4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
J4 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
K1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
L1 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
L3 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0,00
mathématiques
sc. physiques 1
sc. physique 2
sc. naturelles
français
Enseignant de
arabe
histoire-géo
éducation islamique
technologie
éducation musicale
éducation physique
anglais
Somme des poids
Nombre
d'apparition
Indice
d'importance (II) en %
13,40
12,90
10,76
4,57
4,16
9,83
3,75
116
Tableau n° 23 : Classement décroissant des
critères utilisés par les enseignants en fonction de leurs
indices d'importance dans les scénarios littéraires :
117
Figure n° : 7
A partir du graphe ci-dessus, nous pouvons remarquer,
à première vue, que l'analyse des données du tableau
n°23 peut se faire de la même manière que celle
effectuée pour le tableau n°22 à quelques nuances
près. En effet, il n'est pas difficile de constater le caractère
central des critères relatifs à la note chiffrée par
rapport aux autres types de critères. Les disciplines jugées plus
qualifiantes au tronc commun littéraire sont dans l'ordre, le
français, l'arabe et l'histoire-géo. Quant les critères
relatifs à la note chiffrées dans ces disciplines commencent
à descendre au dessus de la valeur 10/20, les enquêtés
préfèrent mettre la moyenne générale pour
compléter leurs scénarii littéraires. Nous relevons aussi,
à la différence des scénarios établis pour une
orientation scientifique, que dans les scénarii littéraire, les
critères relatifs aux statuts socio-économiques (apparaissent sur
le graphe à partir de la 10ème position) prennent le
dessus sur ceux relatifs aux voeux d'orientation (apparaissent sur le graphe
à partir de la 11ème position). Nous avons
expliqué cela, lors de l'analyse de contenu, par le fait que les
enseignants semblent éprouver une certaine difficulté à
dresser un profil littéraire en dehors des acquisitions disciplinaires.
Néanmoins, nous remarquons que dans les scénarii
littéraires, les enseignants n'hésitent pas à mettre
beaucoup plus de critères relatifs aux statuts socio-économiques
ou aux voeux d'orientation que dans les scénarii scientifiques.
Généralement, tout comme dans les
scénarii scientifiques, les critères relatifs à la note
chiffrée constituent l'élément central qui structure les
représentations sociales des enseignants à l'égard des
qualifications nécessaires pour s'orienter vers le tronc commun
littéraire.
118
Chapitre III. Synthèse globale des
résultats de la recherche
Nous avons voulu explorer les représentations sociales
que se font les enseignants à l'égard de l'orientation de leurs
élèves. Pour se faire, nous nous sommes posé quatre
questions de recherche qui nous ont guidées dans notre démarche
d'enquête par entretien semi-directif:
> Comment les enseignants se représentent-ils la
notion de l'orientation scolaire ?
> Pensent-ils qu'ils ont un rôle à jouer dans
l'orientation scolaire de leurs élèves ? Et comment ce rôle
se décline au niveau de leur pratique professionnelle?
> Comment se représentent-ils les
différentes filières scolaires après la troisième
collégiale ?
> Quelles sont les critères/indices que les
enseignants ont-ils tendance à utiliser pour se prononcer sur
l'orientation de tel ou tel élève ?
« Lorsqu'on étudie des représentations,
les catégories peuvent être des composantes voire des
sous-composantes de ces représentations. Ainsi elle exprime des
attitudes à l'égard d'un objet, des descriptions de l'objet des
relations avec d'autres objets ». (Moliner et al., 2002, p. 91).
Les réponses donc aux questions de recherches seront
synthétisées suivant les thèmes et les catégories
de notre grille d'analyse thématique ainsi que les résultats de
l'activité proposée aux enquêtés. Rappelons que les
pratiques enseignantes en matière d'orientation décrites dans
cette recherche sont exclusivement rapportées par les
enquêtés.
Thème n°1 : la notion de
l'orientation
Globalement, la majorité des enseignants
enquêtés s'accordent, en premier lieu, à définir
l'orientation en se rapportant à l'action propre à
l'élève ; c'est un choix à faire et/ou une direction
à suivre dans le cheminement de sa scolarité. En second lieu,
c'est au niveau de l'action partagée pour orienter l'élève
que se situent les acceptions de l'orientation pour les enseignants
enquêtés. Signalons, ici, qu'à l'exception de l'enseignant
de l'histoire-géo, les enquêtés n'ont parlé,
à aucun moment des entretiens, de l'aide à l'orientation des
élèves. Pour eux l'orientation consiste soit à faire un
choix, soit à orienter l'élève (et non pas l'aider
à s'orienter), soit les deux. Ceci peut être expliqué par
le fait que l'enseignant en question, en plus de la formation qu'il a suivi
dans le domaine de l'orientation, est le seul parmi tous les
enquêtés qui a déclaré avoir participé
à des activités d'aide à l'orientation des
élèves. Ceci nous fait penser à la relation dialectique
entre les représentations sociales et les pratiques sociales (Abric,
2011).
119
Thème n°2 : les facteurs influençant
l'orientation
Par rapport aux facteurs influençant le choix
d'orientation de l'élève, nous avons constaté que la
catégorie contenant les facteurs relatifs au contexte scolaire et
professionnel est la plus représentative des catégories
(influence des camardes de classes, possibilités d'insertion
professionnelle, l' « effet de mode » de s'orienter en scientifique,
effet maître, manque d'encadrement en orientation). Vient ensuite la
catégorie relative au contexte familial les (parents,
l'expérience de la fratrie) et en dernière position la
catégorie regroupant des facteurs liés aux
caractéristiques personnelles de l'élève (peur des
mathématiques, le modèle, délaissement de certaines
disciplines). Partant de notre cadrage théorique des facteurs
influençant le choix d'orientation des élèves, il
paraît qu'un certain nombre de ces facteurs ne sont pas pris en
considération par les enquêtés. En effet, l'influence de
l'origine sociale, l'âge, le redoublement et le genre sur le choix
d'orientation n'ont été cités par aucun
enquêté. Ceci peut être expliqué par le contexte
différent de la production des recherches scientifiques sur
l'orientation des élèves. D'ailleurs, Heyneman et Loxley (1983
cité dans Duru-Bellat, 2003) ont montré que certaines variables,
telle que l'origine sociale, expliquant l'inégalité sociale face
à l'école dans les pays industrialisés, n'ont pas le
même pouvoir explicatif dans les pays en voie de développement.
Ils avancent que d'autres variables doivent être mises en avant pour
expliquer ces inégalités, notamment les ressources
matérielles destinées à l'enseignement. Celles-ci
n'apparaissent pas, non plus, dans le discours des enseignants sur les facteurs
influençant le choix d'orientation des élèves. Il semble
que les enseignants enquêtés n'ont pas assez de recul pour pouvoir
développer une vision plus globale de tous ces facteurs.
Thème n°3 : les représentations des
différentes filières scolaires après la
troisième
Concernant les connaissances qui ont les
enquêtés du système d'orientation, nous avons
constaté que la majorité n'a pas le recul nécessaire pour
répondre à la question portant sur les filières
après la troisième. Leur connaissance des filières
scolaires après la troisième paraît rudimentaire et non
actualisée. Ses filières scolaires sont
généralement réduites aux deux filières
dichotomiques ; les lettres et les sciences. Globalement, ce sont les
enseignants des disciplines dites de découvertes et ceux qui n'ont pas
la classe de troisième qui ont affiché clairement leur
méconnaissance du domaine d'orientation. Ceci peut être
expliqué par leur implication plus au moins forte dans les
décisions d'orientation de fin d'année. Cette implication est
elle-même conditionnée par la position qu'occupent leurs
disciplines
120
consécutives dans la hiérarchie des disciplines
qualifiantes à l'une ou l'autre filière scolaire. Cela
étant, nous pouvons avancer, sans trop de risque, que les enseignants
enquêtés, ne seront pas en mesure d'apporter une aide efficace aux
élèves en matière d'orientation, encore moins prendre des
décisions d'orientation bien fondées. Il est probable donc que
ces décisions soient entachées d'une certaine subjectivité
résultat, pour partie, des représentations sociales que ces
enseignants mettent en oeuvre pour appréhender un objet peu connu (les
filières et branches scolaires après la troisième). Par
rapport à ces représentations sociales, nous avons
identifié principalement celles en rapport avec les prérequis
retenus et le profil dressé pour les deux types d'orientation
dichotomiques ; l'orientation scientifique et l'orientation
littéraire.
Représentations de l'orientation scientifique :
Prérequis pour une orientation scientifique:
Les prérequis mis en avant par les enseignants pour
qu'un élève accède à une filière
scientifique sont au nombre de six. Ceux relatifs aux bonnes notes en
matières scientifiques (mathématiques, physique et sciences
naturelles) constituent un élément central sur lequel s'accorde
la majorité des enquêtés. Viennent ensuite les
prérequis relatifs aux intérêts et penchants scientifiques
et la compréhension des textes et lois scientifiques. Nous avons
relevé trois autres prérequis, quoiqu'avec une seule voix pour
chacun, qui peuvent appartenir aux éléments
périphériques composant les représentations sociales des
enseignants quant aux prérequis pour une orientation scientifique. Il
s'agit de la capacité à résoudre des problèmes, la
maîtrise du français et la maîtrise de la langue d'une
manière générale.
Profil d'un élève scientifique
:
L'ensemble des caractéristiques d'un
élève à profil scientifique citées par les
enseignants relèvent de deux catégories. La première
concerne les qualifications personnelles et la deuxième concerne les
qualifications disciplinaires. Nous avons relevé que les deux tiers des
caractéristiques du profil scientifique sont regroupées dans la
catégorie des qualifications personnelles. Le tiers restant est
regroupé dans la catégorie des qualifications disciplinaires.
Dans la première catégorie, le raisonnement
logico-déductif est la qualification la plus mise en avant pour
caractériser un profil scientifique (cité par la moitié
des enquêtés). Vient en deuxième position la qualification
de la rapidité. En troisième position, nous avons les
qualifications suivantes : l'esprit et le réflexe scientifique, le sens
d l'analyse, de l'observation et de détection avec deux voix pour
chacune. Et en dernière position, se situent les qualifications
relatives au sens critique, à la persévérance et à
l'intelligence.
121
Concernant la deuxième catégorie, le fait de
s'intéresser souvent à l'objectif et l'essentiel des choses
caractérise, pour presque la moitié des enquêtés,
l'élève à profil scientifique. Trois autres qualifications
disciplinaires viennent compléter ce profil: le fait d'avoir de bonnes
notes, d'être capable de réaliser un graphe et de se
désintéressé des matières littéraires.
Cependant, nous avons relevé chez deux enseignants (technologie et
histoire-géo) des positions nettement distinctes de celles des autres
enseignants. Pour l'enseignant de la technologie, il est difficile d'identifier
le profil d'un élève en l'absence d'un test élaboré
spécialement à cette fin. Quant à l'engeignant de
l'histoire-géo, les élèves fréquentant son
établissement scolaire ne sont ni littéraires ni scientifiques et
ce, parce que, selon lui, ils sont socialement défavorisés.
Représentations de l'orientation
littéraire :
Prérequis pour une orientation littéraire
:
Pour les prérequis d'une orientation
littéraire, nous avons relevé que les enseignants s'accordent, en
général, à considérer que l'élève
souhaitant s'orienter en lettres, doit avoir de bonnes notes dans les
disciplines littéraires et maîtrise les langues. Le tiers des
enquêtés ont évoqué aussi le rôle des
intérêts littéraires (poésie,
théâtre...) dans la poursuite des études de
l'élève en branche littéraire. D'autres prérequis
ont été cités par les enquêtés : être
habitué à lire des livres, avoir une capacité de
rédaction et d'analyse en histoire-géo et enfin avoir une culture
générale.
Globalement, tout comme les prérequis d'une
orientation scientifique, ceux d'une orientation littéraire sont souvent
ramenés aux bonnes notes dans les disciplines de qualification. Il
semble donc que les enseignants, en l'absence d'une alternative susceptible de
juger objectivement les aptitudes des élèves, se voient
contraints de regarder du côté des notes disciplinaires, seules
informations qui leur paraissent plus ou moins objectives et socialement
désirées. Nous avons pu constater aussi que les enseignants ont
tendance à opérer une sorte de hiérarchisation des
filières scolaires après la troisième. Ils mettent, de ce
fait, la filière scientifique en première place et la
filière littéraire en seconde.
122
Profil d'un élève littéraire
:
A l'opposé de la description faite par les enseignants
du profil scientifique, celle faite pour le profil littéraire est moins
abondante en matière d'informations, indices ou critères. De
plus, cette description s'organise beaucoup plus autour des qualifications
disciplinaires. Il semble donc que les enseignants enquêtés
éprouvent une certaine difficulté à dresser un profil
littéraire en dehors des qualifications disciplinaires (le fait
d'utiliser beaucoup de détails et d'informations dans l'explication des
choses, la capacité d'analyse littéraire, la capacité
d'apprendre par coeur).
Concernant les qualifications personnelles de
l'élève littéraire, nous avons constaté qu'elles
sont plus au moins hétérogènes à tel point que deux
enquêtés au plus s'accordent sur une même qualification. En
effet, nous avons relevé les qualifications relatives à la
capacité discursive et la communication avec deux voix chacune. Vient
après, avec une seul voix chacune, les qualifications suivantes :
l'amour de la lecture qui est indispensable pour un littéraire, le sens
critique, le fait de s'exprimer souvent par ses émotions et d'avoir ses
propres productions littéraires.
Thème n°4 : la pratique enseignante en
matière d'orientation scolaire
Les catégories relevant de ce thème sont
conçues à partir des questions du guide d'entretien. Il s'agit du
rôle des enseignants dans l'orientation scolaire, leur influence sur les
choix des élèves, leurs démarches d'aide à
l'orientation, les critères qu'ils retiennent pour se prononcer sur
l'orientation des élèves, leur évaluation de la
procédure d'orientation et leurs propositions quant à
l'amélioration des pratiques enseignantes en matière
d'orientation.
Rôle dans l'orientation des élèves
:
Les positions des enseignants vis-à-vis de leur
rôle dans l'orientation des élèves sont très
différentes. Elles varient d'un rejet catégorique de ce
rôle à une reconnaissance délibérée voire
même une responsabilité affirmée de l'enseignant dans
l'orientation de ses élèves. Cette variation semble être
conditionnée à la fois par la place qu'occupe chaque discipline
dans la hiérarchie des disciplines qualifiantes (à l'une ou
l'autre orientation) et par le fait d'enseigner ou non en classe de
troisième (premier palier d'orientation). Certains enseignants (ceux des
disciplines de découverte) affirment donc qu'ils n'ont aucun rôle
à jouer dans l'orientation ou du moins leur rôle serait
limité ou secondaire. Ils justifient cette position en évoquant
soit le manque d'informations et/ou de formations dans ce domaine soit
l'existence d'une personne
123
responsable de l'orientation scolaire (le conseiller en
orientation). D'autres enseignants (ceux des disciplines scientifiques et
littéraires), qui se sentent impliqués dans l'orientation de
leurs élèves, considèrent l'enseignant comme étant
le premier responsable de l'échec scolaire dans le cas d'une orientation
inadaptée de l'élève. D'autres poussent plus loin leur
réflexion en considérant que l'aide à l'orientation des
élèves est tout simplement un « devoir
professionnel» (enseignant de l'éducation islamique).
Quoique certains enseignants confirment leur rôle
important dans l'orientation des élèves, il reste qu'une bonne
partie considère ce rôle plutôt secondaire. En d'autres
termes, ils n'interviennent dans l'orientation de l'élève que
sous la demande de celui-ci et généralement à titre
consultatif.
Influence sur le choix d'orientation :
En réponse à la question concernant l'influence
des enseignants sur le choix d'orientation des élèves, nous avons
pu identifier deux types d'influence ; directe et indirecte. L'influence est
indirecte quand les enseignants affirment par exemple que la notation ne
reflète pas le niveau de l'élève ou quand ils
mènent une pédagogie d'enseignement/apprentissage susceptible de
rendre leurs disciplines appréciables. Concernant l'influence directe,
cinq enseignants parmi douze reconnaissent leur statut de personnes ressources
vers lesquelles les élèves se tournent pour demander de l'aide
à l'orientation. D'autant plus que « les enfants de milieu
populaire visent moins haut (notamment quand ils sont de niveau scolaire
médiocre), ou se rallient plus volontiers aux conseils, par ailleurs
plus prudents, de leurs enseignants. » (Duru-Bellat, 2003, p. 27).
Généralement, les enseignants enquêtés s'accordent
à considérer leur influence sur l'orientation des
élèves beaucoup plus indirecte.
Démarches d'aide à l'orientation
:
Selon les enseignants, les actions entreprises lorsqu'un
élève a besoin d'une aide à l'orientation sont de quatre
types : donner des conseils aux élèves (constitue 48.46% de leur
démarche d'aide à l'orientation), la vérification des
capacités des élèves (23.8%), s'informer sur
l'élève (16.5%) et informer l'élève (12.31%). Les
conseils que donnent les enseignants aux élèves se rapportent,
pour la grande partie, à la façon d'envisager leur choix
d'orientation. Ces conseils peuvent être donnés à partir de
l'expérience de l'enseignant et celle de son entourage. D'autres
conseils sont cités par un ou deux enseignants tels que l'encouragement
à solliciter
124
l'aide de tous ses professeurs dans son choix d'orientation,
l'incitation à travailler dans toutes les disciplines et à faire
plus d'exercices.
Par rapport à la vérification des
capacités des élèves à suivre telle ou telle
filière scolaire, nous avons relevé que les enquêtés
s'accordent en premier lieu sur la démarche d'observation du
comportement de l'élève en classe. En second lieu, cette
vérification s'accomplit à travers la passation d'un test
d'évaluation. Retenons, ici, que la démarche d'aide à
l'orientation entreprise par les enseignants enquêtés consiste
essentiellement à conseiller l'élève. Ceci confirme, en
grande partie, les déclarations de ces enseignants concernant leur
rôle dans l'orientation des élèves. Ceci est d'autant plus
vrai qu'une partie des enquêtes a déclaré ne pas avoir
assez de recul pour appréhender les différentes
possibilités et exigences des études après la
troisième. De plus, certains enquêtés, ont
éprouvé un énorme besoin en matière d'information
et de formation en orientation scolaire.
Critères retenus pour se prononcer sur
l'orientation d'un élève :
Pour éclairer davantage ces éléments et
ces aspects déjà identifiés dans les thèmes
précédents nous avons exploré, en profondeur, les
éléments qui nous semblent centraux dans la pratique enseignante
en matière d'orientation. Il s'agit, précisément, des
critères que retiennent ces enseignants pour se prononcer sur
l'orientation des élèves. Pour se faire, nous leur avons, d'une
part, posé une question directe lors des entretiens « Quelles
sont les critères/indices sur lesquelles vous vous basez pour se
prononcer sur l'orientation de tel ou tel élève ? » et,
d'autre part, proposé une activité dont ils étaient
amenés à choisir les critères qui leur paraissent plus
pertinents pour prendre des décisions d'orientation.
Suite à l'analyse de contenu des discours produits par
les enquêtés en réponse à la question ci-haut, nous
avons identifié deux catégories de critères : la
catégorie des critères disciplinaires (huit critères) et
celle des critères relatifs au choix d'orientation de
l'élève (4 critères). Outre les critères relatifs
aux notes scolaires (largement retenus par les enquêtés), nous
avons relevé les critères suivants (retenus par au moins six
enquêtés) : le niveau dans les disciplines de qualification,
l'aisance dans l'apprentissage de la discipline, les autres critères
sont généralement hétérogènes. Nous avons
remarqué aussi que les enseignants ont cité deux fois plus des
critères relevant de la première catégorie que ceux
relevant de la deuxième. Les critères disciplinaires semblent
donc beaucoup plus retenus par les enseignants pour décider de
l'orientation de leurs élèves.
125
Bien que la majorité des enquêtés
reconnaissent l'influence de la note scolaire sur le choix d'orientation (selon
eux cette note ne reflète pas le niveau réel de
l'élève), ils n'hésitent pas, en revanche, à la
prendre pour le critère le plus retenu dans les décisions
d'orientation. Il nous semble, dans ce cas, qu'au regard de la note scolaire,
les enseignants ont deux attitudes opposées. D'une part ils nient sa
validité prédictive et, d'autre part, ils considèrent
qu'elle constitue le seul critère plus au moins objectif sur lequel ils
peuvent se baser pour prendre des décisions d'orientation. Ce
résultat a été confirmé une fois de plus suite
à l'analyse des données recueillies de l'activité. En
effet, en présence d'environ 40% des critères de nature
différente de la note chiffrée, nous avons relevé que
presque trois-quarts des critères retenus par les enquêtés,
pour établir les scénarios d'orientation, sont sous forme d'une
note chiffrée. Le quart restant est partagé entre les
critères relatifs aux statuts socio-économiques avec 15.36%, aux
voeux d'orientation avec 7.81% et au genre avec 1.04%. Cette répartition
est observée, avec une légère différence, aussi
bien pour les scénarios scientifiques que pour les scénarios
littéraires. La position qu'occupe la note chiffrée par rapport
aux autres types de critères peut être expliquée, nous
l'avons vu, par l'absence d'une alternative permettant aux enseignants de juger
objectivement les aptitudes des élèves. Ils se voient donc
contraints de regarder du côté des notes disciplinaires, seules
informations qui leur paraissent plus ou moins objectives et socialement
désirées.
Généralement, en matière de disciplines
qualifiantes à l'une ou l'autre orientation, les enseignants choisissent
pour les scientifiques d'abord les mathématiques puis la physique et
ensuite les sciences naturelles et pour les littéraires l'arabe ou le
français puis l'histoire-géo. Par rapport à la discipline
du français, il apparaît que les enseignants des disciplines
scientifiques ne l'ont pas introduite comme discipline importante pour
l'orientation scientifique (ne figure pas dans leurs premiers scénarios
établis) contrairement aux enseignants des disciplines
littéraires. Exception faite pour l'enseignant du français qui,
en plus des mathématiques et de la physique, a
préféré mettre un critère relatif aux jeux
vidéo et un autre relatif à la moyenne générale.
Au-delà des trois premiers critères sur
lesquels les enseignants s'accordent généralement dans les
scénarios scientifiques, les différences commencent à
s'observer d'un enseignant à l'autre au niveau du quatrième
critère retenu. Certains enseignants ont mis la note en français.
D'autres ont mis la moyenne générale. L'enseignant des
mathématiques a mis le soutien scolaire et les deux enseignants de
physique ont mis le choix d'orientation et la note en
126
français. Les enseignants des sciences naturelles, du
français et de l'éducation musicale ont mis respectivement le
choix d'orientation, la moyenne générale et l'inscription aux
conservatoires.
Pour les scénarios littéraires, les deux
critères relatifs à la note en arabe et à la note en
français sont souvent alternés entre la première et la
deuxième position dans le classement des critères retenus par les
enseignants. La note en histoire-géo occupe généralement
la troisième position. Comme dans les scénarios scientifiques, le
quatrième critère semble varier d'un enseignant à un
autre. De manière générale, c'est lorsque l'on a
épuisé les critères relatifs aux notes moyennes et
moyennement faibles pour établir les premiers scénarios que les
enseignants ont commencé à intégrer en nombre croissant
d'autres critères de nature différente dans le reste des
scénarios.
Par rapport aux critères relatifs aux voeux
d'orientation, nous avons relevé qu'ils représentent 15.36% du
total des critères retenus par les enseignants pour établir les
scénarios demandés. Ces critères sont retenus aussi bien
dans les scénarios littéraires que scientifiques avec une
légère augmentation au niveau de ces derniers. Encore mieux,
trois enseignants (de disciplines scientifiques) les avaient retenus pour les
premiers scénarios scientifiques et littéraires. Il paraît
donc que le voeu d'orientation constitue chez certains enseignants un
critère essentiel pour prédire la réussite scolaire des
élèves alors que pour d'autres, il est moins important voire sans
intérêt (enseignant de la technologie). Cela rejoint les propos de
certains enseignants désirant travailler selon l'ancienne
procédure d'orientation qui confie à l'enseignant la prise des
décisions d'orientation de l'élève et que le voeu de
celui-ci n'y est que facultatif.
A part les critères « participe à l'aide
aux devoirs du collège », « passionné de
littérature », « fait du théâtre », «
inscrit au conservatoire » et « il a une bourse » qui ont
été retenus différemment par au moins quatre
enquêtés, les autres critères socio-économiques
(aime la natation, fait du théâtre, fait de la boxe, regarde des
séries télévisées, fait du shopping, se balade en
ville avec ses amis, aime les jeux vidéo) n'ont été
retenus que par un ou deux enquêtés. Le critère « joue
au foot », quant à lui, n'a été retenu par aucun
enseignant. Ceci peut voir plusieurs explications. Nous en proposant deux.
D'abord, il nous semble qu'aux yeux des enseignants enquêtés, les
critères socio-économiques qui ont trait aux
intérêts et capacités disciplinaires (largement
évoqués par les enseignants lors des entretiens) sont plus
informatifs sur le profil scolaire de l'élève que les autres
critères. Ensuite, il est possible que
127
cette différence observée soit imputée,
pour partie, au contexte social de l'établissement scolaire. En effet,
celui-ci est fréquenté généralement par un public
défavorisé et ce genre d'informations (les autres critères
socio-économiques) ne semble pas éclairer les enseignants sur ce
qui peut aider l'élève à poursuivre ses études
aussi bien en lettres qu'en sciences. Par contre le fait d'avoir une bourse ou
faire des cours de soutien ou être passionné de la
littérature peut représenter dans le contexte marocain une aide
considérable pour qu'un élève de ce milieu scolaire
poursuive ses études dans de meilleures conditions. De même, les
critères relatifs au genre paraissent eux aussi moins informatifs et ne
suscitent chez les enquêtés qu'un intérêt très
minime. Pour eux, être fille ou garçon ne semble pas conditionner
la nature des études à entreprendre après la
troisième collégiale.
Tous ces résultats nous permettent d'avancer que dans
le contexte marocain, les représentations
stéréotypées relatives au genre et aux statuts
socio-économiques (Channouf et al., 2005) ne se manifestent pas
, nous semble-t-il, de la même manière que dans le contexte
européen. Résultats qui doivent être analysés en
profondeur dans d'autres études à portée plus
généralisatrice.
Globalement, les trois premiers critères retenus aussi
bien dans les scénarios scientifiques que littéraires marquent
une certaine stabilité. Nous ne pouvons avancer que ces trois
critères (notes dans les disciplines qualifiantes à l'une ou
l'autre orientation) constituent les éléments centraux autour
desquels se forgent les représentations sociales des enseignants quant
aux critères retenus pour prendre des décisions d'orientation.
L'hétérogénéité observée dès
le quatrième critère à mettre (alors qu'il reste douze
autres critères à sélectionner) témoigne de la
diversité des approches personnelles que peuvent faire les enseignants
en l'absence des critères objectifs ou des critères reconnus et
désirés socialement. Ces critères peuvent constituer les
éléments périphériques de ces
représentations sociales.
Évaluation de la procédure administrative
d'orientation :
Les appréciations des enseignants quant à la
procédure d'orientation sont, généralement,
défavorables (elle est jugée inappropriée, insuffisante,
injuste, sans utilité...).
Quand les enseignants émettent ces jugements
défavorables à l'encontre de la procédure d'orientation,
ils pensent, particulièrement, au fonctionnement du conseil
d'orientation. En effet, certains enquêtés ont mentionné
plusieurs inconvénients qui entravent son bon fonctionnement (le voeu de
l'élève qui prévaut, un conseil juste pour la forme, les
notes
128
comptent plus, faible prise en compte de l'avis de
l'enseignant et les risques d'erreurs qui peuvent « jalonner le
parcours scolaire de l'élève »). Ceci semble accentuer
les inégalités sociales face à l'orientation des
élèves. Par rapport à ce dernier point, des
enquêtés ont attiré l'attention sur le contexte
inégalitaire dans lequel se déroule la procédure
d'orientation. Ils observent, par exemple, qu'une partie importante des
élèves de leur établissement (contexte socialement
défavorisé) remplissent les fiches de voeux sans avoir recours
à leurs parents ou à une personne susceptible de les aider. Ils
les remplissent généralement en classe avec leur camarade
(problème d'influence des camarades sur les demandes d'orientation qui
peut conduire soit à une auto-sélection soit à ou une
demande plus ambitieuse). Cette auto-sélection fait partie d'un ensemble
de biais sociaux entourant les demandes d'orientation (Duru-Bellat, 2002). De
plus les conseils d'orientation ont tendance à entériner ces
demandes au lieu de chercher à tirer vers le haut les ambitions
scolaires et professionnelles des élèves.
Amélioration des pratiques enseignantes en
orientation :
Les propositions d'amélioration de la pratique
enseignante en matière d'orientation se déploient sur trois
niveaux : le premier niveau contient des propositions relatives à
l'amélioration de la procédure d'orientation. Cette
amélioration passe, pour certains enseignants enquêtés par
le recours à l'ancienne procédure d'orientation. Une
procédure qui, selon eux, confère à l'enseignant un
rôle déterminant dans la prise des décisions d'orientation.
Le deuxième niveau regroupe les propositions qui ont trait à
l'encadrement des élèves dans leur processus d'orientation
(accompagnement, aide, présence permanente d'un orienteur dans
l'établissement scolaire). Le troisième et dernier niveau
concerne la satisfaction des besoins des enquêtés en
matière de formation/information en orientation.
Globalement, les propositions d'amélioration de la
pratique enseignante en matière d'orientation sont relativement
différentes d'un enseignant à un autre. Ceci témoigne du
caractère complexe du domaine de l'orientation nécessitant une
multitude d'entrées éducatives susceptibles de mettre en place
une pratique pertinente de l'aide à l'orientation des
élèves.
129
Conclusion et perspectives
Arrivé au terme de ce travail, nous allons, tout
d'abord, rappelé les principaux éléments de notre
démarche de recherche. Ensuite, nous reprenons, succinctement, les
résultats les plus significatifs par rapport à notre
problématique de recherche. Enfin, tout en rappelant les limites de
notre démarche d'enquête, nous indiquerons quelques perspectives
de recherche.
Rappelons-nous que la question problématique de cette
recherche est la suivante : « dans un contexte différent que celui
de l'Europe en l'occurrence le contexte marocain, quelles seraient les
caractéristiques des représentations sociales, que se font les
enseignants à l'égard de l'orientation de leurs
élèves ? ». Ainsi, notre objectif de recherche consiste
à explorer les caractéristiques des représentations
sociales que se font les enseignants à l'égard de l'orientation
de leurs élèves. Nous avons donc mené une enquête
auprès d'un échantillon constitué de douze enseignants, de
disciplines différentes, exerçant dans un collège à
la ville de Marrakech. Notre démarche d'enquête a
été menée en deux phases. La première phase
consiste à réaliser un entretien semi-directif avec les
enseignants enquêtés. Quant à la deuxième phase,
elle porte sur une activité (méthode de cas) à
réaliser par les enquêtés.
Tout au long de notre recherche nous avons cherché donc
à repérer les éléments composants l'environnement
représentationnel des enseignants quant à l'orientation de leurs
élèves. Après repérage de ces
éléments, nous avons analysé leurs caractéristiques
en matière de centralité et de périphérie dans la
représentation sociale des enseignants. En effet, il s'agissait de
mettre en exergue les éléments partagés par les
enseignants et qui ont trait à certains aspects de leur pratique
enseignante en matière d'orientation. Nous nous somme donc
intéressé particulièrement aux aspects suivants :
· La notion de l'orientation scolaire vue par les
enseignants (y compris leur connaissance du système d'orientation) ;
· Les facteurs qui influencent le choix d'orientation
des élèves ;
· Les représentations des différentes
filières après la troisième collégiale
(prérequis et profil des deux types d'orientation dichotomique,
scientifique et littéraire) ;
· Les pratiques enseignantes en matière
d'orientation (rôle en orientation des élèves,
influences sur leur orientation, critères retenus pour
prendre des décisions
d'orientation, démarches d'aide à
l'orientation, évaluation de la procédure de l'orientation et
l'amélioration des pratiques enseignantes en orientation).
Après avoir analysé les données
recueillies, nous avons relevé que les enquêtés
appréhendent l'orientation généralement suivant deux
systèmes de représentation distincts mais
130
complémentaires : soit elle est définie en se
rapportant à l'action propre à l'élève (c'est un
choix à faire et/ou une direction à suivre dans le cheminement de
sa scolarité), soit c'est au niveau de l'action partagée pour
orienter l'élève que se situent les acceptions de l'orientation.
Signalons que la démarche d'aide à l'orientation des
élèves n'est soulevée que par un seul
enquêté. Pour eux, l'orientation consiste soit à faire un
choix, soit à orienter l'élève (et non pas l'aider
à s'orienter), soit les deux.
Par rapport aux facteurs influençant le choix
d'orientation de l'élève, nous avons constaté qu'ils sont
généralement relatifs au contexte scolaire et professionnel
(influence des camardes de classes, possibilités d'insertion
professionnelle, « l'effet de mode » de s'orienter en scientifique,
effet maître, manque d'encadrement en orientation).
Concernant les connaissances qu'ont les enquêtés
sur le système d'orientation, nous avons relevé qu'elles sont
rudimentaires et non actualisées. En effet, les filières
scolaires citées sont généralement réduites aux
deux filières dichotomiques ; les lettres et les sciences. Globalement,
les enseignants des disciplines dites de découvertes et ceux qui
n'enseignent pas en classe de troisième ont affiché clairement
leur méconnaissance du domaine d'orientation.
Tout comme les prérequis d'une orientation
scientifique, ceux d'une orientation littéraire sont souvent
ramenés aux bonnes notes dans les disciplines de qualification et, dans
une moindre mesure, aux intérêts de l'élève. Il
semble donc que les enseignants, en l'absence d'une alternative susceptible de
juger objectivement les aptitudes des élèves, se voient
contraints de regarder du côté des notes disciplinaires. Celles-ci
leur paraissent plus ou moins objectives et socialement
désirées.
Pour le profil scientifique, l'essentiel de ses
caractéristiques sont des qualifications personnelles : le raisonnement
logico-déductif est la qualification la plus mise en avant puis la
rapidité et d'autres qualifications (l'esprit et réflexe
scientifique, le sens d'analyse, d'observation et de détection, le sens
critique, la persévérance et l'intelligence). Les autres
qualifications sont disciplinaires (s'intéresser souvent à
l'objectif et l'essentiel des choses, avoir de bonnes notes, être capable
de réaliser un graphe, se désintéresser des
matières littéraires). Concernant le profil littéraire,
les enseignants s'accordent généralement à lui attribuer
plus de qualifications disciplinaires (le fait d'utiliser beaucoup de
détails et d'informations dans l'explication des choses, la
capacité d'analyse littéraire, la capacité d'apprendre par
coeur) que de qualifications personnelles.
131
Nous avons appréhendé la pratique enseignante en
matière d'orientation à partir des aspects suivants : d'abord, au
niveau du rôle que ces enquêtés s'attribuent dans
l'orientation des élèves. Il s'est avéré qu'ils en
ont des positions très variées. Ces positions varient d'un rejet
catégorique de ce rôle à une reconnaissance
délibérée voire même une responsabilité
affirmée de l'enseignant dans l'orientation de ses élèves.
Cette variation est conditionnée à la fois par la place qu'occupe
chaque discipline dans la hiérarchie des disciplines qualifiantes
(à l'une ou l'autre orientation) et par le fait d'enseigner ou non en
classe de troisième (premier palier d'orientation). Ensuite, au niveau
de leur influence sur le choix d'orientation de l'élève, les
enseignants se sont départagés. En effet, nous avons
relevé deux types d'influence ; directe et indirecte. Elle est directe
quand l'enseignant reconnaît son statut de personne ressource à
qui les élèves se tournent pour demander de l'aide à
l'orientation et indirecte quand il affirme par exemple que la notation ne
reflète pas le niveau de l'élève ou quand il mène
une pédagogie d'enseignement/apprentissage susceptible de rendre leurs
disciplines appréciables. Généralement, les enseignants
enquêtés s'accordent à considérer que leur influence
sur l'orientation des élèves est beaucoup plus indirecte.
Par rapport à la démarche d'aide à
l'orientation entreprise par les enseignants enquêtés, nous avons
relevé qu'elle consiste essentiellement à conseiller
l'élève (généralement sur la façon
d'envisager son choix d'orientation). Elle peut consister aussi à
vérifier les capacités des élèves à suivre
telle ou telle filière (à travers l'observation du comportement
de l'élève en classe et la passation d'un test
d'évaluation), à s'informer sur l'élève et à
l'informer.
En matière de critères retenus par les
enseignants pour se prononcer sur l'orientation de leurs élèves,
il nous est apparu qu'ils sont de deux types : les critères
disciplinaires qui semblent donc beaucoup plus retenus par les enseignants (les
notes scolaires, le niveau scolaire dans les disciplines de qualification,
l'aisance dans l'apprentissage de la discipline, les autres critères
sont généralement hétérogènes) et les
critères relatifs au choix d'orientation (voeux exprimés
d'orientation, projet scolaire et professionnel, les intérêts
dominants...). Bien que la majorité des enquêtés
reconnaît l'influence de la note scolaire sur le choix d'orientation
(selon eux, cette note ne reflète pas le niveau scolaire réel de
l'élève), elle n'hésite pas, à la prendre pour le
critère le plus retenu dans les décisions d'orientation. Il nous
semble, dans ce cas, qu'au regard de la note scolaire, les enseignants ont deux
attitudes opposées. D'une part ils nient sa validité
prédictive et, d'autre part, ils considèrent qu'elle constitue le
seul critère plus au moins objectif sur lequel ils peuvent se baser pour
prendre des décisions d'orientation. Ce résultat a
été confirmé une fois de plus suite à l'analyse des
données recueillies de l'activité.
132
En effet, les trois premiers critères retenus aussi
bien dans les scénarios scientifiques que littéraires marquent
une certaine stabilité. Nous pouvons avancer que ces trois
critères (notes dans les disciplines qualifiantes à l'une ou
l'autre orientation) constituent les éléments centraux autour
desquels se forgent les représentations sociales des enseignants quant
aux critères retenus pour prendre des décisions d'orientation.
L'hétérogénéité observée dès
le quatrième critère à retenir (alors qu'il reste douze
autres critères à sélectionner) témoigne de la
diversité des approches personnelles que peuvent faire les enseignants
en l'absence des critères objectifs ou des critères reconnus et
désirés socialement. Ces critères peuvent constituer les
éléments périphériques de ces
représentations sociales.
De manière générale, c'est lorsqu'on a
épuisé les critères relatifs aux notes moyennes et
moyennement faibles, pour établir les premiers scénarios, que les
enseignants ont commencé à intégrer et en nombre croissant
d'autres critères de nature différente dans le reste des
scénarios. Tous ces résultats nous permettent d'avancer que dans
le contexte marocain, les représentations
stéréotypées relatives au genre et aux statuts
socioéconomiques (Channouf et al., 2005) ne se manifestent pas
, nous semble-t-il, de la même manière que dans le contexte
européen. Résultats qui doivent être analysés en
profondeur dans d'autres études à portée plus
généralisatrices et avec des outils plus précis.
Les appréciations des enseignants quant à la
procédure d'orientation sont, généralement,
défavorables (elle est jugée inappropriée, insuffisante,
injuste, sans utilité...) et leurs critiques s'adressent,
particulièrement, au fonctionnement du conseil d'orientation. En effet,
certains enquêtés ont mentionné plusieurs
inconvénients qui entravent son bon fonctionnement (le voeu de
l'élève prévaut plus, « un conseil juste pour la
forme », « les notes comptent plus », prise en
compte marginale de l'avis de l'enseignant et les risques d'erreurs qui peuvent
« jalonner le parcours scolaire de l'élève »).
Ceci semble accentuer les inégalités sociales face à
l'orientation des élèves. Par rapport à ce dernier point,
des enquêtés ont attiré l'attention sur le contexte
inégalitaire dans lequel se déroule la procédure
d'orientation. Ils observent, par exemple, qu'une partie importante des
élèves de leur établissement (contexte socialement
défavorisé) remplissent les fiches de voeux sans avoir recours
à leurs parents ou à une personne susceptible de les aider. Ils
les remplissent généralement en classe avec leurs camarades
(problème d'influence des camarades sur les demandes d'orientation qui
peut conduire soit à une autosélection soit à une demande
plus ambitieuse). Cette autosélection fait partie d'un ensemble de biais
sociaux entourant les demandes d'orientation (Duru-Bellat,
133
2002). De plus, les conseils d'orientation ont tendance
à entériner ces demandes au lieu de chercher à tirer vers
le haut les ambitions scolaires et professionnelles des
élèves.
Globalement, les propositions d'amélioration de la
pratique enseignante en matière d'orientation sont relativement
différentes d'un enseignant à un autre (travailler suivant
l'ancienne procédure qui donne à l'enseignant le pouvoir de
décider de l'orientation de l'élève, accompagner les
élèves dans leur orientation, présence permanente d'un
orienteur dans l'établissement scolaire, formation et
information sur le domaine et les filières d'orientation). Ceci
témoigne du caractère complexe du domaine de l'orientation
nécessitant une multitude d'entrées éducatives
susceptibles de mettre en place une pratique pertinente d'aide à
l'orientation des élèves.
Bien que notre recherche ait permis de repérer le
contenu du système représentationnel des enseignants quant
à l'orientation de leurs élèves, elle doit être
prolongée par des investigations plus systématiques concernant
son contenu et sa structure interne. Ce prolongement nous permettra d'affiner
le repérage du noyau central et des éléments
périphériques et d'appréhender la nature des
éléments du noyau (normatifs et fonctionnels). En effet, cette
recherche ne constitue qu'une exploration de certains aspects du système
représentationnel de l'orientation des enseignants. L'exploitation et
l'analyse des données recueillies par entretien semi-directif et par
l'activité (la méthode de cas) ont montré la
nécessité de s'appuyer sur d'autres outils de recueil de
données permettant notamment l'appréciation de la
centralité de certains éléments composant la
représentation. Concernant nos données recueillies, nous estimons
qu'il serait judicieux de les exploiter davantage afin de mieux connaître
les éléments périphériques, qui par leur fonction
d'adaptation à la réalité permettent de concrétiser
les représentations et les dires (Abric, 2011) des enseignants. Ce
prolongement doit aussi recadrer le champ d'investigation et le centrer sur un
thème tel que : la notion d'orientation scolaire, les facteurs
influençant le choix d'orientation, le rôle de l'enseignant dans
l'orientation, sa démarche d'aide à l'orientation, les
critères qu'il retient pour prendre des décisions d'orientation,
etc. Enfin, il serait judicieux de déterminer la façon avec
laquelle ces représentations agissent sur les pratiques sociales et
professionnelles.
134
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contentettask=viewetid=127etItemid=83
consulté le 01/08/2012.
141
Annexe n°1: Guide d'entretien
1. Comment définiriez-vous ce qui est l'orientation
scolaire ? Et pour vous personnellement, comment voyez-vous l'orientation
scolaire?
2. Pour vous à quoi préparent les
différentes filières scolaires après la troisième
collégiale ? Quelles en sont les prérequis pour y
accéder?
3. Comment caractérisez-vous un élève
à profil scientifique et un élève à profil
littéraire ?
4. Quel rôle pensez-vous devoir jouer dans
l'orientation scolaire de vos élèves ? Et comment ce rôle
se décline-t-il au niveau de vos pratiques professionnelles?
5. Dans quelle mesure les enseignants peuvent-ils influencer
le choix de l'orientation de leurs élèves ?
6. Dans quels cas êtes-vous intervenu directement pour
aider vos élèves dans leur choix d'orientation ?
7. Comment procédez- vous pour les aider ?
8. Quelles sont les critères/indices sur lesquelles
vous vous basez pour se prononcer sur l'orientation de tel ou tel
élève ?
9. Quels sont selon vous les facteurs qui agissent sur le
choix d'orientation des élèves ?
10. Comment jugez-vous la procédure administrative de
l'orientation ?
11. Que proposeriez-vous pour l'améliorer ?
12. Actuellement, quels seraient vos besoins les plus
importants en matière d'orientation scolaire?
13. Informations générales
Matière enseignée Nombre d'années
d'enseignement
Nombre d'années d'enseignement en 3ème
année secondaire collégial .
Niveau d'étude : ~ Baccalauréat ~ Bac +2 ~ Licence
~ Maîtrise ~ Doctorat
Age Sexe : ~ Masculin ~ Féminin
V' Avez-vous suivi un cours de base en évaluation des
apprentissages ?
V' Avez-vous suivi des formations continues en orientation
scolaire ?
V' Avez-vous participez à quelques activités d'aide
à l'orientation dans votre établissements scolaires ?
Si oui, cette formation et/ou ces activités ont-elles
influencé votre conception de l'orientation de vos élèves
?
142
Annexe n°2 : Cas présenté aux
enquêtés
À partir de la liste des critères ci-dessous,
essayer d'établir quatre scénarios pour une orientation
scientifique et quatre autres pour une orientation littéraire qui, selon
vous, mènent à une orientation réussie. Puis classer les
des plus prédictifs au mois prédictifs. Chaque scenario doit
contenir au plus quatre critères (pour chaque type d'orientation, les
critères sont à utiliser une seule fois dans chaque type des
scénarii)
Vous pouvez désigner les critères par la lettre et
le chiffre qui les renseignent. Exemple :
Scénario 1 : A1+F4+K1+G4
|
1
|
2
|
3
|
4
|
A
|
Math : 11/20
|
Math : 6/20
|
Math : 9/20
|
Math : 5/20
|
B
|
Français : 14/20
|
Français : 8/20
|
Français : 9/20
|
Français : 7/20
|
C
|
Physique : 13/20
|
Physique : 9/20
|
Physique : 11/20
|
Physique : 3/20
|
D
|
Sc. naturelles : 12/20
|
Sc. naturelles : 5/20
|
Sc. naturelles : 9/20
|
Sc. naturelles : 7/20
|
E
|
Arabe : 5/20
|
Arabe : 11/20
|
Arabe : 9/20
|
Arabe : 12/20
|
F
|
Histoire-Géo : 3/20
|
Histoire-Géo : 13/20
|
Histoire-Géo 11/20
|
Histoire Géo : 8/20
|
G
|
Moyenne : 11.5/20
|
Moyenne : 11/20
|
Moyenne : 9.5/20
|
Moyenne : 9/20
|
H
|
Inscrit au conservatoire
|
Aime la natation
|
Fait du théâtre
|
Participe à l'aide aux devoirs du collège
|
I
|
Joue au foot
|
Joue à la Boxe
|
Regarde des séries télévisées
|
Fait du shopping
|
J
|
Il a une bourse
|
Passionné de littérature
|
Se balade en ville avec ses amis
|
Aime les jeux vidéo
|
K
|
Fille
|
Garçon
|
|
|
L
|
Voeux d'orientation
|
Scientifique
|
Voeux d'orientation
|
Littéraire
|
Voeux d'orientation
|
Scientifique
|
Voeux d'orientation
|
Littéraire
|
Scientifique
|
Littéraire
|
Littéraire
|
Scientifique
|
143
Annexe n°3 : Grille d'analyse
thématique
|
Catégories
|
Thème n°1 : la notion d'orientation scolaire
|
1.1. action propre à l'élève
|
1.1.1. un choix à faire
|
|
|
1.1.2. une direction à suivre
|
|
|
1.2. action partagée pour orienter
l'élève
|
1.2.1. une opération pour optimiser le parcours scolaire
de l'élève
|
|
|
1.2.2. déterminer le projet professionnel de
l'élève
|
|
|
Thème n°2 : fauteurs influençant le choix
d'orientation
|
2.1. contexte familial
|
2.1.1. les parents
|
|
|
2.1.2. l'expérience de la fratrie
|
|
|
2.2. contexte scolaire et professionnel
|
2.2.1. influence des camardes de classes
|
|
|
2.2.2. effet maître
|
|
|
2.2.3. possibilités d'insertion professionnelle
|
|
|
2.2.4. l' « effet de mode » de s'orienter en
scientifique
|
|
|
2.2.5. manque d'encadrement en orientation
|
|
|
2.3. caractéristiques personnelles
|
2.3.1. peur des mathématiques
|
|
|
2.3.2. le modèle
|
|
|
2.3.3. délaissement de certaines disciplines
|
|
|
Thème n°3 : représentations des
différentes filières après la
troisième
|
3.1. orientation scientifique
|
3.1.1. prérequis
|
3.1.1.1. bonnes notes en matières scientifiques
|
|
3.1.1.2. intérêts et penchants scientifiques
|
|
3.1.1.3. compréhension des textes et lois scientifiques
|
|
3.1.1.4. capacité de résolution de
problème
|
|
3.1.1.5. maîtrise du français
|
|
3.1.1.6. maîtrise de la langue
|
|
144
|
|
3.1.1. Profil scientifique
|
3.1.1.1. qualifications personnelles
|
3.1.1.1.1. raisonnement logico-déductif
|
3.1.1.1.2. rapidité
|
3.1.1.1.3. esprit et réflexe scientifique
|
3.1.1.1.4. sens d'analyse
|
3.1.1.1.5. sens d'observation et de détection
|
3.1.1.1.6. sens critique
|
3.1.1.1.7. persévérance
|
3.1.1.1.8. intelligent
|
3.1.1.2. qualifications disciplinaires
|
3.1.1.2.1. s'intéresse à l'objectif et l'essentiel
des choses
|
3.1.1.2.2. a de bonnes notes
|
3.1.1.2.3. capable de réaliser un graphe
|
3.1.1.2.4. désintéressé par les
matières littéraires
|
3.2. Orientation littéraire
|
3.2.1. prérequis
|
3.2.1.1. bonnes notes dans les disciplines littéraires
|
|
3.2.1.2. maîtrise des langues
|
|
3.2.1.3. intérêts littéraires
(poésie, théâtre...)
|
|
3.2.1.4. lecture des livres
|
|
3.2.1.5. capacité de rédaction
|
|
3.2.1.6. capacité d'analyse en histoire-géo
|
|
3.2.1.7. culture générale
|
|
3.2.2. Profil littéraire
|
3.2.2.1. qualifications personnelles
|
3.2.2.1.1. capacités discursives
|
3.2.2.1.2. la communication
|
3.2.2.1.3. amour pour la lecture
|
3.2.2.1.4. le sens critique
|
3.2.2.1.5. s'exprime souvent par ses émotions
|
3.2.2.1.6. il a ses propres productions littéraires
|
3.2.2.2. qualifications disciplinaires
|
3.2.2.2.1. utilise beaucoup de détails et
d'informations
|
3.2.2.2.2. discours et analyse littéraire
|
3.2.2.2.3. apprentissage par coeur
|
145
Thème n°4 : pratiques enseignantes en matière
d'orientation
|
4.1. rôle dans l'orientation des élèves
|
4.1.1. essentiel
|
4.1.1.1. acteur important dans l'orientation
|
|
4.1.1.2. c'est un devoir
|
|
4.1.2. secondaire
|
4.1.2.1 à titre de consultation
|
|
4.1.2.2. en tant que professeur
|
|
4.2. influence sur le choix d'orientation
|
4.2.1. directe
|
4.2.1.1. personne-ressource pour l'élève
|
|
4.2.1.2. dans la demande d'aide à l'orientation
|
|
4.2.2. indirecte
|
4.2.2.1. la notation ne reflète pas le niveau de
l'élève
|
|
4.2.2.2. faire aimer sa discipline
|
|
4.2.2.3. conscience professionnelle de l'enseignant
|
|
4.3. démarches d'aide à l'orientation
|
4.3.1. s'informer
sur l'élève
|
4.3.1.1. son niveau dans les autres disciplines
|
|
4.3.1.2. ses notes dans les disciplines scolaires
|
|
4.3.1.3. ses intérêts
|
|
4.3.2. vérification des capacités des
élèves
|
4.3.2.1. observation du comportement
|
|
4.3.2.2. par évaluation
|
|
4.3.2.3. à travers les jeux de rôle
|
|
4.3.3. informer l'élève
|
4.3.3.1. sur les exigences et débouchés de
certaines filières de formation
|
|
4.3.3.2. sur la façon de remplir sa fiche des voeux
|
|
4.3.4. conseiller l'élève
|
4.3.4.1. à propos de son choix d'orientation
|
|
4.3.4.2. à partir de l'expérience de l'enseignant
et celle de son entourage
|
|
4.3.4.3. à travers des encouragements
|
|
4.3.4.4. à solliciter l'aide de tous ces professeurs dans
son choix d'orientation
|
|
4.3.4.5. à travailler dans toutes les disciplines
|
|
4.3.4.6. à faire des exercices
|
|
4.3.4.7. dissiper sa peur des mathématiques
|
|
4.4. critères retenus pour se prononcer sur l'orientation
d'un élève
|
4.4.1. disciplinaires
|
4.4.1.1. notes scolaires
|
|
4.4.1.2. niveau dans les disciplines de qualification
|
|
4.4.1.3. aisance dans
l'apprentissage de la discipline
|
|
4.4.1.4. participation en classe
|
|
4.4.1.5. capacité d'analyse scientifique
|
|
4.4.1.6. compétences
|
|
4.4.1.7. pratique du sport pour l'orientation sportive
|
|
4.4.1.8. esprit scientifique
|
|
146
|
|
4.4.2. relatifs au choix
|
4.4.2.1. voeux exprimés d'orientation
|
|
4.4.2.2. projet scolaire et professionnel
|
|
4.4.2.3. les intérêts dominants
|
|
4.4.2.4. l'objectivité du choix d'orientation
|
|
4.5. évaluation de la procédure administrative
d'orientation
|
4.5.1. appréciations générales
|
4.5.1.1. procédure inappropriée
|
|
4.5.1.2. insuffisante
|
|
4.5.1.3. pas de problème, bonne, importante
|
|
4.5.1.4. injuste
|
|
4.5.1.5. pas de commentaires
|
|
4.5.1.6. sans utilité
|
|
4.5.1.7. déshonorante
|
|
4.5.2. inconvénients relevés
|
4.5.2.1. voeu de l'élève prévaut dans les
conseils
|
|
4.5.2.2. conseil d'orientation juste pour la forme
|
|
4.5.2.3. les notes comptent plus dans les conseils
|
|
4.5.2.4. faible prise en compte de l'avis de l'enseignant dans
les conseils
|
|
4.5.2.5. seuil de passage détermine la réussite
de l'élève
|
|
4.5.2.6. risque d'erreur
|
|
4.6. amélioration des pratiques enseignantes en
orientation
|
4.6.1. au niveau de la procédure d'orientation
|
4.6.1.1. travailler suivant
l'ancienne procédure (l'enseignant décide de
l'orientation de l'élève)
|
|
4.6.1.2. prise en compte de l'avis de l'enseignant en premier
lieu
|
|
4.6.1.3. le conseil doit être à titre indicatif
|
|
4.6.2. au niveau de l'encadrement des élèves
|
4.6.2.1. accompagnement des élèves dans leur
orientation
|
|
4.6.2.2. présence permanente d'un orienteur dans
l'établissement scolaire
|
|
4.6.2.3. l'orienteur doit aider les élèves à
remplir la fiche des voeux
|
|
4.6.3. au niveau de la formation des enseignants
|
4.6.3.1. formation et information sur le domaine et les
filières d'orientation
|
|
4.6.3.2. données statistiques sur la scolarité
des élèves
|
|