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La colonie saxonne du boulonnais


par Claude MASSET
Université Lyon 2 - Diplôme d'Etudes Sup&ecute;rieures 1946
  

Disponible en mode multipage

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    La colonie oaxonne du Boulonnais

    Mémoire pour l'obtention du Diplôme d'Etudes supérieures
    Claude Masset, Vaudringhem 1946

    Revu et augmenté en janvier-juin 2007

    Introduction

    Dans le bouleversement qui suivit la disparition de la puissance romaine, tandis que les peuples barbares s'établissaient partout sur le sol de l'Empire, le Nord de la France fut le siège d'un phénomène particulier, que l'on pourrait dasser à part dans l'histoire des grandes invasions : il fut la seule région du continent qui ait été colonisée de façon durable par les pirates saxons, en face de la grande île dont ils firent d'autre part leur fief.

    Il n'y a que peu de temps que l'on connaît cet établissement saxon sur notre sol. Il a été découvert à la fin du XIXème siède par le toponymiste français Longnont, et, depuis cette époque, notre connaissance à son sujet n'a guère progressé, bien que quelques historiens aient voulu l'interpréter pour éclairer le haut Moyen-âge anglais. C'est pourquoi je me propose d'étudier cette question aussi complètement que possible, et si je ne puis - loin de là - résoudre tous les problèmes qu'elle soulève, j'essaierai au moins d'en réunir des éléments de solution.

    Le maximum de densité des toponymes d'origine saxonne se trouvant dans la région boulonnaise, c'est elle surtout que j'étudierai ; je serai obligé toutefois de donner à cette expression un sens fort large, car les localités d'origine saxonne sont nombreuses, de Boulogne à Saint-Orner, comme de Calais à Fauquembergues ; quelques unes se trouvent même en dehors de ces limites.

    Je me propose donc d'étudier successivement qui étaient ces Saxons, et quels rapports antérieurs relatés par les historiens anciens ils ont eus avec notre pays ; ensuite, quelles traces ils ont laissées dans la région que j'ai définie, et quelles preuves nous avons de leur passage ; d'où est venue leur invasion, et à quelle date ; enfin, quel y fut leur comportement - et en particulier leurs rapports avec les envahisseurs francs - jusqu'à l'époque où l'on a cessé de parler anglo-saxon dans le Boulonnais.

    1 Les noms de lieux de la France, p.188 sq.

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    I. Les Saxons.

    Quels sont donc ces Saxons dont nous allons essayer de retrouver la trace ?

    1. Les premiers textes.

    Il est impossible de savoir à quel moment les peuples riverains de la Mer du Nord ont commencé à s'adonner à la piraterie. La chose paraît très ancienne, puisque les invasions gaëliques de l'an mille avant Jésus-Christ, de même que l'invasion belge du Illème siècle av. JC semblent être parties de l'Allemagne du Nord ou de la Hollande par la voie maritime, pour gagner la Grande-Bretagne. Mais c'est en 41 après J.C. que l'histoire nous offre pour la première fois le récit d'une de ces opérations de piraterie. Elle est le fait d'un peuple du nord de l'Allemagne, que les Romains appellent "Chauques (Chauci)". On voit à cette date une flotte chauque venir piller la région de l'embouchure du Rhin ; elle est alors détruite par le consul de Basse-Germanie, surnommé depuis Cauchiusz. Six ans plus tard ils viennent ravager les côtes de la Gaule, exactement comme, plus tard, les Saxons et les Normands ; il ne fallut pas moins que Cn. Domitius Corbulon pour les réduirez. Ils tiennent leur place dans l'Histoire pendant les reste du premier siècle et le début du second, jusqu'à l'année 170 où ils ont encore assez de vigueur pour aller attaquer les côtes de la Belgique4. On n'en entendra jamais plus parler.

    A ce moment même apparaissent les Saxons. Leur nom est pour la première fois évoqué par Ptolémée', qui les place à cheval sur la Chersonèse Cimbrique, à peu près à la place du Holstein actuel. Pendant tout le Thème siècle, et jusqu'à leur installation définitive en Angleterre, ils feront le même métier d'écumeurs de côtes que les Chauques, ou que plus tard les Normands. Il est impossible de savoir pourquoi les Chauques ont disparu si brusquement, au moment où se lève l'étoile des Saxons. Qu'ils aient été exterminés par une petite nation paraît peu probable, d'autant plus que Tacite les dit le peuple le plus noble des Ge.unains6. Il semble plutôt - c'est l'opinion de F. Loti, d'O. Bremerz, qu'il s'agit toujours du même peuple, parlant la même langue, qui aurait été soumis par un parti d'habitants du Holstein, lesquels pouvaient être une branche de leur nation. Cette hypothèse est d'autant plus vraisemblable que les Chauques faisaient partie de la confédération des Ingueones, à côté,

    2 Suétone : Claud. 24

    3 Tacite : Annales XI, 18-20.

    4 Spartien : Didus Julianus, I

    5 Ptolémée : II, II, « ...Er TOV o{u)(Evoc Trlcr Kllif3OLXIN XEPQovncrou Xa oveç»

    6 Tacite : Germanie 35 "populus inter Germanos nobilissimus"

    7 Les migrations saxonnes en Gaule et en Grande-Bretagne

    8 Ethnologie der germanischen Stamme

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    d'une part, des Cimbres et des Teutons, d'autre part des Angles et des Frisons9. Et l'on sait les rapports étroits, allant jusqu'à la communauté de langage, qui existaient entre ces deux derniers peuples et les Saxons.

    Quoiqu'il en soit, des bandes de pirates, appartenant peut-être à ces trois peuples, sinon à d'autres, mais tous confondus sous le nom générique de Saxons, vont continuer les vieilles traditions de course et de piraterie, le long des côtes de la Mer du Nord et de la Manche. Et précisément à la fin du IIIème siècle on les trouve mêlés à une histoire très curieuse, et d'autant plus intéressante pour nous qu'elle eut la ville de Boulogne pour centre, l'aventure de Carausius.

    2. Carausius.

    Cette aventure, que nous connaissons par un passage d'Eutrope, et par des panégyriques de Constance et de Constantin, débute comme une de ces usurpations si fréquentes aux époques troublées de l'Empire Romain. Marcus Aurelius Valerius Carausius, soldat sorti du rang, s'était vu confier la tâche de purger la mer des pirates francs et saxons qui l'infestaient ; il avait le commandement d'une flotte dont Boulogne était le port d'attache. Mais, accusé de malversations - de laisser passer les pirates à l'aller et de les arrêter au retour afin de saisir leurs dépouilles et s'en enrichir personnellement - il fut condamné à mort par Maximin en 287. A cette nouvelle il s'empressa de se déclarer empereur - de "prendre la pourpre", comme on disait - et de s'emparer de la Grande-Bretagne (la "Bretagne" des Romains)1o. Pendant six ans son usurpation fut tolérée, faute de troupes pour la réduire. Mais en 293 Constance Chlore passa à l'attaque, assiégea Boulogne par terre et par mer, bloquant le port par une digue construite au large (à la façon de Richelieu devant La Rochelle) afin d'éviter que la ville ne fût ravitaillée par la flotte de Bretagne (la "classis britannica"). Après avoir contraint la garnison à capituler, il se retourna vers "l'île des Bataves" (?) et tailla en pièces les alliés barbares de Carausiusn. Ceux-ci furent déportés en Gaule avec femmes et enfants12. Ces Barbares sont appelés par le panégyrique de Constantin "Chamaves" et "Frisons"13. Les Chamaves, qui habitaient dans les provinces néerlandaises actuelles de Gueldre et d'Overijssel ainsi qu'au Hanovre, faisaient partie de la confédération des Francs. Ces alliés barbares de Carausius paraissent être

    9 E Lot : Les invasions germaniques p.31.

    10 Eutrope, Breviarum Historiae Romanae IX, 21 "Per haec tempore, Carausius, qui vilissime natus, in strenuae militiae ordine famam egregiam consequutus, quum apud Bononiam per traction Belgicae et Armoricue pacandum mare accepisset, quod Franci et Saxons infestabant, multis barbatis saepe captis, nec praeda integra aut provincialibus reddita, ant imperatoribus missa, quum suspicio esse coepisset consulta ab eo admitti barba-ras, ut transeuntes cum praeda exciperet, atque hac se occasione ditaret; a Maximiano jussus occidi, purpuram sumpsit et Britannias occupavit."

    11 Panégyriques: (Incerti) Panegyricus Constantion Caesari dictus 7 (p. 135 et 136 de la Teubneria-na) et (Incerti) Panegyricus Constantino Augusto dictus 5 (p. 163).

    12 "In romanas nationes" (paneg. Constantin 5) "cum conjungibus ac liberis... ad loca olim deserta, quae fortasse ipsi quondam deprecando vastaverant" (Paneg. Constantin 8).

    13 Paneg. Constantin 9 "arat ergo nunc mihi Chamavus et Frisius et ille vagus"

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    précisément les pirates qu'il était chargé de combaltie !

    Quoiqu'il en soit, Constance n'osa pas traverser le détroit et fit la paix avec Carau-sius resté en Bretagne14. Celui-ci, la même année, fut assassiné par son préfet du prétoire, Allectus, qui régna encore trois ans. En 292, Constance revint à la charge, prépara sa flotte à Boulogne, tandis que son préfet du prétoire Asdépiodote, parti de l'embouchure de la Seine, débarquait à l'ouest de l'île de Wight, taillait en pièces l'armée britannique et tuait Allectus. Constance, cependant, remontant la Tamise avait pris Londinium (Londres)15.

    Je me suis étendu assez longuement sur cette anecdote, car elle est intéressante du point de vue du Boulonnais comme de celui des Saxons : il a existé brièvement au IlIème siècle un empire britto-morin, s'étendant d'un côté sur ce qui sera plus tard l'Angleterre, de l'autre sur le Boulonnais et peut-être un peu au delà16. La capitale de cet empire paraît avoir été Boulogne ; sa force, la flotte romaine de la Mer du Nord ; ses alliés, les pirates francs et saxons. Il y aura des érudits pour dire que c'est de cette époque que date l'installation saxonne dans le Boulonnais.

    Après cette crise, qui n'est en somme qu'une querelle intérieure romaine, et durant tout le IVème siècle, les Saxons font encore parler d'eux. On les voit en Bretagne, sous Théodose, pillant et ravageant'. Ce dernier réussit à les refouler ; mais quelques années plus tard, on les voit débarquer dans le nord de la Gaule78, dans une région inconnue qui semble, étant donnés le délais de communication entre les chefs romains, être voisine des bouches de l'Escaut, mais qui pourrait être notre Boulonnais. Une fois encore la force romaine réussit à les éloigner, par traîtrise d'ailleurs19. Mais le temps approchait où la force romaine ne serait plus qu'un souvenir.

    3. La Notitia Dignitatum.

    Dans les dernières années de l'empire, toutefois, nous avons un texte d'un haut intérêt car, à une époque relativement très reculée, il semble faire allusion à une instal-

    14 Eutrope XI, 22 : "Cum Carausius tamen, quum bella frustra tentata essent contra rerum rei militaris peritissimum, ad postremum pax convenit...".

    15 Eutrope IX, 22 ; Paneg. Constance 14 à 17 et Paneg. Constantin 5. Eutrope ne parle que du rôle d'Asclépiodote.

    16 A l'époque de la conquête de la Gaule, ce qui est aujourd'hui le Pas-de-Calais était habité par les Morins à l'ouest et par les Atrébates à l'est. Ces derniers ont donné leur nom à l'Artois ainsi qu'à sa capitale, Arras. En dépit de sa faible étendue, le pays des Morins se vit divisé par l'autorité romaine en deux "civitates", décision sans doute en rapport avec l'érection de Boulogne au rang de capitale maritime. Autour de cette ville se trouvaient les "Bononienses" (de Bononia : Boulogne) ; et, plus à l'est, les "Morini" qui avaient gardé le nom primitif de la région. Ces derniers avaient pour capitale Thérouanne, laquelle fut détruite en 1553 par Charles-Quint, et son siège épiscopal transféré à Saint-Orner.

    17 Ammien Marcelin, Rerum Gestarum XXVII, 8 : "Picti, Attacotti, Scotti... malta populabantur... Gallicanos vero tractus Franci et Saxones, iisdem confines, quo quisque erumpere potuit terra vel mari, praedis acerbis incendiisque, et captivorum fiineribus hominem violabant..."

    18 Ammien Marcelin XXVIII, 5 : "Erupit Augustus ter cos, Saxon= multitudo, et ocani difficultatibus permeatis, Romanum limiteur gradu petebat intento..."

    19 ibid, et Pacatus Drapanius, Panegyricus Theodosio Augisto dicatus V

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    lation de tribus saxonnes tout le long de nos côtes ; l'interprétation, hélas, n'en est pas très sûre.

    Il s'agit de la "Notitia Dignitatum utriusque imperii"20, texte dont la date, incertaine, doit avoisiner l'an 400 ; elle paraît avoir rédigée dans une chancellerie impériale, probablement celle de Byzance.

    On y trouve plusieurs fois l'expression ' littus saxonicum" (rivage saxon), appliquée tant aux côtes de la Gaule qu'à celles de Bretagne, aux chapitres suivants :

    $ XXV : Comte du Rivage Saxon en Bretagne :... sous les ordres du comte du rivage saxon en Bretagne... suit une liste de 9 préfets et tribuns, accompagnés des 9 villes de garnison de leurs troupes21. Ces villes, qu'on a assez bien pu identifier (J. Ramsey, the Foundations of England I, p. 91), sont toutes côtières ou proches de la mer ; elles représentent une bande de côtes allant du Norfolk au Sussex. A savoir : une dans le Norfolk, une dans l'Essex, quatre dans le Kent et deux dans le Sussex. L'importance de ce "rivage saxon" devait être assez grande, car le comte du rivage saxon n'était pas le subordonné, mais le collègue, du comte de Bretagne, l'un et l'autre ressortissant directement du Maître des Soldats du Palais22.

    En face de ce rivage saxon de Bretagne en existe un autre en Gaule ; il est cité en deux endroits :

    $ XXXVI : Duc du pays armoricain et nervien23 ; en haut de son cartouche apparaît la mention "littus saxonicum Blabia". Blabia, ou Blavia, est probablement Blaye, sur la Gironde. Le premier de ses subordonnés tient garnison à Grannona, localité dont il est précisée qu'elle est "sur le rivage saxon". Elle apparaît plus loin au neutre ("Gran-nono"). Il n'a malheureusement pas été possible de l'identifier. On a proposé Gué-

    20 "Notitia Dignitatum et administratum omnium tam civilium quam militarium in partibus Orientis et Occidentis"

    21 XXV Cornes littoris saxonici per Britanniam... sub dispositione viii spectabilis comitis littoris saxonici per Britanniam :

    Prepositus numeri Fortensiurn Othonae (Itanchester, Essex)

    Prepositus militum Tungrecanorum Dubris (Douvres, Kent)

    Prepositus numeri Turnacensiurn Lemannis (Lymne by Hythe, Kent)

    Prepositus equitunn Dalmatarznm Branodunensium Branoduno (Brancaster, Norfolk)

    Prepositus stablesianorum Grannonensium Gariannonorum (Garrianonum : Burgh Castle on the Yar,e, Norfolk)

    Tribunus cohortis primae Vetasiorum Regulbiae (Reculver, Kent)

    Praefectus legionis Secundae Augustae Rutupis (Rutupiae : Riclnborough by Sandwich, Kent) Prepositus numeri Abulcorum Anderidas (Anderida : Pevensey, Sussex)

    Prepositus numeri exploratorum Portum Adurni (Portus Adurni, lieu inconnu presque sûrement sur l'Adur, Sussex).

    22 Not. Dign. V : "sub dispositione viri spectabilis magistri militum presentalis... Cornes Britanniarum

    Cornes littoris saxonici per Britannias".

    23 Not. Dign. XXXVI : Dux tractus armoricani et nervicani... sub dispositione viii spectabilis ducis tractus armoricani et nervicani :

    Tribunus cohortis prirnae novae armoricae Grannona in littore saxonico Praefectus militum grannonensium Grannono.

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    rande (Loire Atlantique), Château Grannon (à 4 km de Guérande), Granville, etc. On l'a surtout cherchée dans le Calvados et le Cotentin.

    $ XXXVII : Duc de Belgique Seconde. En haut de son cartouche apparaît à nouveau la mention "littus saxonicum", sans nom de localité. Il a sous ses ordres des cavaliers dalmates (comme à Brannodunum), lesquels cantonnent à "Marcae" sur le rivage saxon24. Pour "Marcae" ont été proposées trois identifications possibles, toutes trois assez voisines, à l'ouest du Pas-de-Calais : Marquise, Marck, Mardyck. Marck, près de Calais, a eu la préférence des érudits : son nom est le même, elle a des restes de voie romaine, et au Xème siècle était un lieu de fisc25 et le chef-lieu d'un "pagellus"26. Personnellement, je pencherais pour Marquise. Cette dernière localité a commencé par s'appeler "Marchia" (Xlème siècle) pour ne prendre le nom de "Markisa" qu'en 120827 - alors que Marck s'appelait "Merkisa" en 877 dans un diplôme de Charles le Chauve.. Marquise a livré des bas-reliefs, et était un carrefour de voies romaines.. Il suffit d'un coup d'oeil sur la carte des voies romaines de la région (carte n°3) pour se rendre compte de la supériorité de Marquise du point de vue de la défense de la côte : de là il est facile de gagner rapidement n'importe quel point du rivage morin, notamment rejoindre la flotte de Bretagne à Boulogne, son port d'attache (cette flotte existait encore en 368.. Ajoutons que les prairies herbagères de la Slack sont propres à nourrir un corps de cavalerie. De nos jours, Marquise est un centre d'élevage de chevaux boulonnais.

    Que "Marcae" soit Marck ou Marquise, elle est proche de Boulogne et "sur le rivage saxon".

    Il y a donc eu un "rivage saxon" qui sétendait sur les côtes de Bretagne (dans sa partie la plus proche du continent), et sur les côtes de la Gaule. Cela signifie-t-il que, dès le IVème siècle, il y ait eu des colonies saxonnes installées dans ces deux pays ? L'expression "littus saxonicum" n'est pas univoque. Elle signifie "rivage qui a rapport avec les Saxons" ; mais cela peut être aussi bien "côtes occupées par les Saxons" que "rivage défendu contre les Saxons". Les érudits se sont partagés en deux camps sur cette question. Les partisans de l'interprétation la plus naturelle ont voulu en général s'en servir pour étayer des théories plus vastes, mais ont souvent été conduits à donner un sens différent au rivage saxo-breton et au rivage saxo-gaulois31. Les tenants

    24 Not. Dign. X)OCVII : Dux Belgicae Secundae... sub disposition viri spectabilis ducis Belgicae Secundae Equitus dalmatae Marcis in littore saxonico

    25 "Fiscus Mercki" (Cartulaire de Saint-Bertin p. 142, année 933)

    26 "Terra de Merck (1084) ; comitatus de Merck (1141) (A. de Loisne, Dictionnaire Topographique du Pas-de-Calais)

    27 Au Xlème siècle : Dict. Topogr. du Pas-de-Calais, article "Marquise" p. 247.

    28 ibid. Introduction p. VIII.

    29 Haigneré, Recueil Historique du Boulonnais II, p. 380.

    30 Ammien Marcelin, Rerum Gestarum XXCII, 8.

    31 Pour le point de vue du littus saxonicum per Britannias : Lappenberg, Geschichte von England I, p. 183 ; Schaumann, Zur Geschichte der Eroberung Englands durcit germanische Stiimme p. 5 à 15 ; Taylord, Words and Places p. 92. Pour le littus saxonicum gaulois, O. Bremer, Ethnographie der germanische Stamrne;

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    d'une notion "rivage défendu contre les Saxons font valoir les points suivants :

    1) L'interprétation directe, disent-ils, n'est pas défendable pour l'Angleterre car aucun autre texte ne permet de croire à une immigration saxonne avant le début du Vème siècle (il est vrai qu'il est difficile de conclure de l'absence de texte à l'inexistence d'un fait) ; ils ajoutent que plusieurs des villes citées sont en pays angle ou jute (mais les Anciens savaient-ils toujours faire la différence ? Zozime, par exemple, confond les Saxons et les Quades, lesquels habitaient... la Bohême) ; et l'on sait qu'avant Bède le Vénérable, tous les pirates de la Mer du Nord sont indistinctement confondus sous l'appellation commune de Saxons.

    2) Ils ajoutent qu'en ce qui concerne le littus saxonicum gaulois, il n'est pas concevable qu'il ait eu une autre signification que son vis-à-vis de Grande-Bretagne. Et si Marcae et Grannona paraissent être en territoire plus tard saxon, on imagine mal qu'il en ait été de même de tout un "littus" s'étendant de Calais à Bordeaux : les envahisseurs eussent dû être bien plus nombreux que ne le permettent de supposer l'archéologie et les textes anciens. Enfin, que signifie "Marcae" sinon "marche" : région frontière à protéger ?

    Comment choisir entre deux sens opposés ? Aucun des deux partis n'apporte d'argument péremptoire. On peut retenir néanmoins deux choses : s'il y a eu des Saxons dans la région, ils ne devaient pas être très nombreux ; d'autre part, le fait que Mamie soit un nom germanique tend à indiquer qu'il y avait des Germains dans la région, avant de préciser qu'il s'agissait d'une marche.

    Il me semble que, des deux côtés, on s'est trop aventuré, cherchant à traduire en langue moderne une expression latine d'un sens imprécis. Je crois que l'idée éveillée par ce mot dans l'esprit du lecteur latin devait ressembler à "rivage exposé aux incursions saxonnes" ; rivage donc fréquemment pillé et qu'il fallait défendre, ceci sans préjuger si les pillards quittaient toujours le pays ou s'ils parfois s'installaient dans quelque site qui leur paraissait convenable. Ce n'est pas forcément à une date déterminée que les susdits pillards se sont transformés soudain en envahisseurs. Il est donc fort possible que les Germains qui ont baptisé "Marcae" aient été précisément des Saxons.

    En conclusion, retenons que le pays qui devait devenir plus tard la petite Saxe boulonnaise était, dès le Bas-Empire, exposé aux incursions saxonnes -- voir aussi, plus loin : « Epilogue ».

    Nous avons suivi d'abord les Chauques puis les Saxons durant tout l'Empire Romain, et constaté leurs rapports étroits avec le pays morin. Comme le note l'auteur de

    J. Hoops, Waldbâume und Kultuipfldnzen im germanischen Altertum p. 580, 582 ; SchSnfeldt, Historische Grammatik van het Nederlands, introduction ; G. Kurth, La Frontière linguistique en Belgique et dans le Nord de la France p. 530-538.

    32 E Lot, Les migrations saxonnes en Gavle et en Grande Bretagne p. 37-39; H. Ehmer, Die sachsische Siedlungen auf dem franzbsischen "littus saxonicum" p. 2-5.

    33 Zozime, Histoires III, 5-8.

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    la Cambridge Medieval History, "Saxon attacks fell more heavily on the Gaulish than on the British coasts" (I, p. 380). Pourquoi ont-ils plus tard préféré la grande île à la Gaule ? Sans doute à cause de la concurrence de ces puissants voisins qu'étaient les Francs ? On est réduit aux conjectures.

    4. Les invasions saxonnes.

    Après la chute de l'Empire, on voit partout s'installer des peuples germaniques , lesquels ne cessent pas pour autant d'exécuter des raids, des "razzias", là où ils le peuvent. Les Saxons ne font pas exception. Aux Vème et Vlème siècle, des textes nous les montrent installés dans l'est de l'Angleterre, dans le Calvados et dans la région de Nantes, ce qui ne les empêche pas de continuer à piller les côtes et les estuaires, comme feront plus tard les Normands. Il en date des portraits effrayés, haineux, admiratifs aussi, telle cette célèbre page de Sidoine Apollinaire écrivant à un Goth chargé de la lutte contre les Saxons : "De tous les ennemis, c'est le plus terrible. Lorsqu'on ne l'attend pas, il attaque ; si l'on est sur ses gardes, il se dérobe ; il dédaigne qui le défie, et abat l'imprudent. S'il poursuit, il atteint ; s'il fuit, il échappe. Les naufrages les instruisent et ne les effraient pas. Non seulement ils connaissent les périls de l'océan, mais même ils les aiment. Aussi lorsqu'une tempête se lève, tandis qu'elle rassure les futures victimes, elle cache les assaillants qui dans l'espoir d'une surprise se lancent au milieu des flots et des âpres récifs". Voilà certes de hardis marins et une jolie page, plus propre à faire briller les style de l'auteur qu'à rassurer le destinataire. Il existe d'autres descriptions de pirates saxons de cette époque. Le nom de "Saxon" devient presque un substantif désignant un bandit cruel et invulnérable.

    Sans abandonner le métier de pirate, ils deviennent envahisseurs. Chacun sait qu'ils ont occupé l'Angleterre ; il est intéressant de savoir à quelle époque. Autour de 400 leurs pillages redoublent, les légions romaines, avec l'usurpateur Maxime ayant quitté la Bretagne en 38736. Le premier royaume saxon, celui du Sussex, est fondé en 477 par Aelle37. Les arrivées massives de Saxons se sont produites entre ces deux dates. Il existe un texte curieux, appelé "Chronica Gallica", qui date cette invasion saxonne : en 409 ils dévastent la Grande-Bretagne ; en 444, celle-ci tombe entre leurs

    34 Sid. Apoll. Epist. VIII, 6, sub finem (Monumenta Germaniae Auctores Antiquissimi VIII, p. 132) : "Hostes est omni hoste truculentior. Inprovisus aggreditur, praevisus elabitur; spernit objectos sternit incautos; si sequatur, intercipit, si ft giat, evadit. Ad hoc exercent illos naufragia, non terrent. Est eis quaedam cum discri-minibus pelagi non noticia solum, sed fatniliaritas. Nam quoniam ipsa si qua ternpestas est huc securos efficit oc-cupandos, ltuc prospici vetat occupaturos, in medio fluctuum scopulorttm que confragosorum spe superventus laeti periclitantur".

    35 Ammien Marcelin XXVIII, 2, 12 et XXX, 5, 8 ; Sidoine Apollinaire Panegyricus dictas Avito Au-gusto V, 369-371 ; Claudius Claudianus In Eutropium I, 5, v 391-393.

    36 Wroxeter brûlée en 400, Silchester abandonnée avant 420 (aucune monnaie n'y est postérieure) : Cambridge Medieval History I, p. 381, 382.

    37 Ibid.

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    mains38 - Remarquons par ailleurs que c'est en 441-442 que les Bretons commencent l'invasion de l'Armorique. Les Saxons mirent d'ailleurs très longtemps à conquérir la Grande-Bretagne : au milieu du Vlème siècle ils n'avaient pas encore dépassé une ligne allant de l'embouchure de la Tweed à Salisbury.

    Alors même qu'ils conquièrent l'Angleterre, les Saxons apparaissent sur les bords de la Loire, probablement dans les îles de son embouchure. Grégoire de Tours les cite plusieurs fois entre 463 et 471. Cn les voit attaquer Angers, mais se faire tailler en pièces par les Francs qui prirent même leurs îles et les anéantirent39. Cependant, un siècle plus tard, on en trouvait encore dans cette région : le poète latin Fortunat félicite en effet l'évêque de Nantes Félix d'avoir converti les Saxons. Ceci entre 556 et 57340.

    On les voit également s'attaquer à He de Jersey, au Vlème siècle, du moins s'il faut en croire une vie assez tardive de Saint Marcou, laquelle n'est pas antérieure à la seconde moitié du IXème siècle. Mais la contrée qu'ils semblent avoir habité le plus longtemps est la région de Bayeux. Cette colonie ne nous est connue que par Grégoire de Tours qui la cite deux fois, sous le nom de "Saxones Baiocassini" : en 578, alliés de Chilpéric, ils sont battus par le duc de Bretagne Waroch ; en 590, alliés de Waroch, ils sont battus par l'armée franque de Gontran42. Aucun autre texte n'en parle ; mais au IXème siècle on rencontre dans cette même région une division territoriale, un "pagellus" du nom de Otlinga saxonia. Malheureusement, cette appellation est inconnue avant 802 et après 860 ; aussi a-t-on soutenu43 que ce pagellus n'avait pas de rapport avec les Saxones Baiocassini, et qu'il ne représentait que des Saxons de Basse Allemagne qui auraient été déportés par Charlemagne. II n'est pas possible d'arriver à une certitude, malgré le caractère paradoxal de cette dernière thèse.

    Outre ces localités, on voit un chef saxon du nom de Childéric apparaître à Poitiers, vers 584-58944; on voit aussi une bande de Saxons entrée en Italie avec les Lombards, en 571, revenir en Saxe en passant par la Provence et l'Auvergne45 ; mais peut-

    38 Chronica Gallica (Monumenta Germaniae Auctores Antiquissimi IX, p. 654, n. 62) : "Britanniae Saxo-num incursione devastatae". C'est daté de l'olympiade 297, mais viennent ensuite des faits correspondants à 409, 410, 411 ; et Chr. Gall. p. 660, n.126 "Britanniae usque ad hoc tempus varus cladibus eventi-busque latae in dicionem Saxonum rediguntur" (olymp. 306) ; suit la pris de Carthage par les Vandales.

    39 Grégoire de Tours, Historia Francorum II, 19 (Mon. Germ. Scriptores rerum merovingicarum I, p. 83) : "Saxones, terga venantes, multos de suis, Romanis insequentibus, gladio reliquerunt ; insulae eorum cuum multo populo interempto a Francis captae atque subversae sunt". G. des Maretz (Le Problème de la Civilisation Franque et du Régime Agraire en Belgique) a soutenu que ces "insulae" n'étaient autre que les ancienne îles de la Flandre Maritime. Le texte suivant me paraît faire justice de cette hypothèse.

    40 Fortunat, Opera poetica III, pièce IX, à Félix évêque de Nantes, pour la fête de Pâques et la gloire du Christ Roi, vers 103 et 104 (Patrologie LXXXVIII, p. 133) : "Aspera gens Saxo, vivens quasi more ferino, Te medicante, sacer, bellua reddit ovem".

    41 Vita Sancti Marculfi, AA. SS. ord. S. Benedicti, saeculum I, p. 132, c. 15 et 16.

    42 Grégoire de Tours V, 26 et X, 9 (Mon. Germ. script. rerum merovingicarum. I, p. 221 et 416.

    43 H. Prentout 1911: Littus saxonicum, Saxones Baiocassini, Otlinga saxonia. Revue Historique CVII, p. 285-309

    44 Greg. de Tours VII, 3 et X, 22.

    45 Ibid. IV, 42.

    10

    être s'agit-il de Saxons continentaux bas-allemands : le nom de "Saxon", comme celui de "Franc", est une étiquette qui a servi à désigner des peuples de langues différentes.

    Remarquons qu'il peut y avoir eu bien d'autres colonies saxonnes. Supposons, par exemple, que les Saxons de Bayeux n'aient pas eu maille à partir avec Waroch, et qu'ils ne se soient pas réconciliés avec lui quelques années plus tard : jamais nous n'aurions connu leur existence. Quant à l'énorme colonie de Grande-Bretagne, on compterait sur ses doigts les textes de cette époque qui l'évoquent. Qui dira le nombre des colonies saxonnes dont aucun écrivain mérovingien n'a parlé et qui ont sombré dans l'oubli ?

    Or il se trouve qu'une de ces colonies dont personne n'a parlé fut suffisamment importante, pour laisser une empreinte durable dans la région où elle s'était installée : la colonie saxonne du Boulonnais.

    11

    II. Les Saxons dans le Boulonnais.

    Bien qu'aucun auteur, qu'il soit ancien ou médiéval, n'évoque cette colonie, son existence est aussi assurée que si nous possédions sur elle une abondante littérature : paradoxe de l'Histoire du Haut Moyen-Age ! Il s'agit essentiellement de noms de lieux, mais il y a également d'autres traces : nous les examinerons plus loin.

    1. Traces saxonnes dans la toponymie

    La plupart du temps, il est difficile d'utiliser cette science pour différencier des peuples germaniques, leurs langues - surtout aux époques anciennes - étant trop proches voisines. Par chance, les Francs de l'ouest et les Saxons maritimes parlaient des langues appartenant à deux groupes linguistiques assez sensiblement différents, bien qu'appartenant tous deux à la branche dite "germanique occidental"46. Les premiers parlaient un dialecte bas-allemand, ancêtre du néerlandais, et les seconds une variété d'anglo-frison", à l'origine de l'anglais. D'autres Francs parlaient haut-allemand, et d'autres Saxons bas-allemand. Il y a lieu de noter, en passant, que ces expressions, "Francs" et "Saxons" ont recouvert des réalités ethniques un peu différentes ; on peut le regretter, mais il faut en prendre acte.

    Notre chance est précisément d'avoir affaire à des langues plus distinctes qu'on aurait pu le craindre. Il y a entre elles des différences, notamment d'ordre phonétique ou sémantique. On appelle "inguéonismes" (du nom de l'antique confédération des "Ingueones") les particularités phonétiques propres aux langues anglo-frisonnes (frison, saxon maritime, angle, jute). Les principales sont les suivantes.

    - La palatisationrimaire, ou fermeture des voyelles "non protégées". Elle atteint son maximum sur le a qui devient ae ou e : au bas-allemand dag correspond le vieil-anglais daeg (de nos jours : day).

    - La fracture des voyelles (en allemand "i-umlaut"), qui diphtongue en certaines positions les voyelles a, e, i (a > ea, e > eo, i > io) ; elle est plus fréquente en anglo-saxon qu'en frison.

    - La "métaphonie en i", qui palatalise les voyelles précédant une syllabe contenant un

    i ou un "yod" ("yod" veut dire i consonne) : a > ae, ae > e, ea > le, o > oe et > e, u > il et i.

    - Propre à l'anglo-saxon est la palatalisation dite secondaire, qui affecte les consonnes dites gutturales : g, k, h, sk. Elle ne nous concernera pas.

    46 Classement des langues germaniques :

    1) Germanique oriental : gothique, burgonde, vandale, etc.

    2) Germanique septentrional : suédois ; dano-norvégien ; islandais

    3) Germanique occidental :

    Anglo-frison : anglais ; frison

    Proto-allemand (urdeutsch, ou germano-néerlandais) : Bas-allemand ("plattdeutsch") ; Néerlandais

    Haut-allemand

    12

    Nous saisirons sur le vif, parmi les noms de lieux boulonnais, quelques unes de ces transformations phonétiques. Mais la principale preuve de l'immigration saxonne est d'ordre sémantique : c'est le suffixe toponymique "-thun".

    A. Les noms de lieux en -thun.

    Un substantif "tûn" est commun à toutes les langues gettnaniques. Il signifie proprement "haie". C'est le sens qu'on lui voit en vieil-islandais ("tûn") et en vieil-haut-allemand ("zûn") - d'où l'allemand moderne zaun. En bas-allemand et en frison, il prend également le sens d'enclos. En vieil-anglais il perd le sens de "haie" pour ne garder que celui de "lieu enclos de haies ou de palissades", et en vient à traduite le latin villa. Ecrit tan, tùn ou tuun, il devient plus tard tounne, townne, et finalement town en anglais moderne. On sait qu'il est très usité dans la toponymie anglaise, jusqu'à affecter 1 / 10 du total des noms des lieux, alors qu'il est pratiquement inconnu dans celle des autres pays de langues germaniques : en les réunissant tous, pas plus d'une dizaine de cas, et toujours d'infimes lieux-dits. Plus intéressant encore, le suffise composé -ington (-ing marque une appartenance47), qui forme la majorité des noms anglais en -ton, se rencontre exclusivement, d'un côté en Angleterre, de l'autre dans le Pas-de-Calais, sous la forme "-incthun"

    On compte dans ce dernier département une cinquantaine de noms de lieux en "-thun" ou en "-incthun" ; plusieurs d'entre eux ont des correspondants de l'autre côté du détroit. Le radical en est le plus souvent un nom d'homme anglo-saxon. En voici la liste, avec leurs plus anciennes formes attestées98, leur correspondant anglais le cas échéant, et la traduction du radical quand elle paraît possible (carte n°4)

    Liste des toponymes en -thun ou -incthun

    1. Albinthun : écart disparu de Wierre-au-Bois (arrondissement de Boulogne, canton de Samer) - Albinthon ou Albincthon, 1769.

    2. Alenthun : hameau de Pihen (Calais, Guines) - Ellingatum 1084. De Ala, Alli, francique Alolf, latin Alulfus, français Mon. Cf. en Angleterre Alenton (comté de Winchester), et 1 article suivant.

    3. Alincthun : commune (Boulogne, Desvres) - Alinthun 1173, Alinghetun 1199, Alingetuna 1208. Même racine que le précédent. Cf. en Angleterre, de nombreux Allington (Dorset, Wales, Devon, Hants, Middlesex, Wilts) et quelques Ellington (Kent, Northumberland).

    4. Audenthun ou Audinthun : hameau de Zudausques (Saint-Orner, Lumbres) - Hodin-gentun en 1200. De Oddo, Auding. Cf. Oddington (Gloucester).

    5. Audincthun : commune (Saint-Omer, Fauquembergues) - Odingatun 1016. Cf. n° 4;

    6. Audincthun : hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Dodingthun XVIème siècle.

    47 On dispute sur le sens exact du suffixe -ing. On a voulu le rapprocher du mot "Jung" et le traduire par "fils de" : les Carolingiens ne sont-ils pas descendants de Charles, et Witta Wecting le fils de Wecta ? Mais Longnon (Les noms de lieux de la France, p. 175 et 176) a fait ressortir que les "Kerlingen" sont parfois les sujets des Carolingiens, la Lotharingen le fief de Lothaire, le Mscopfingen le diocèse ; il a donc voulu traduire -inga par "sujet de ", ce qui est peut-être trop précis. C'est un suffixe d'appartenance, signifiant peut-être "relevant du clan Untel", comme O' ou Mc' en gaélique, ius en latin, ibnS en grec. Quoiqu'il en soit, c'est un des suffixes toponymiques les plus répandus, tant aux Pays-Bas ("Flessingue") et en Allemagne ("Thuringe") qu'en Lorraine ("Hayange" en Moselle), en pays burgonde ("Fareins" dans l'Ain) ou wisigoth ("Conserans" dans l'Ariège)

    48 Données d'après de Loisne (Dictionnaire topographique de la France : Pas-de-Calais), et d'après Kurth (La Frontière Linguistique en Belgique et dans le Nord de la France).

    13

    Cf. n° 4.

    7. Audinthun : village disparu, cité par Gamillscheg49 (Saint-Orner, Lumbres). On pourrait supposer qu'il s'agit du n° 4, ci-dessus, mais celui-ci est loin d'avoir disparu : c'est un hameau important de la commune de Zudausques..

    8. Baincthun : commune (Boulogne, Boulogne Sud) - Bagingatun 811. De Baga (Baginus). Cf. en Angleterre Baginton (Warwick) ; Bainton (York).

    9. Baudrethun : hameau de Marquise (Boulogne, Marquise) - Boudertun 1286. De Baldo, Balder (?). Cf Beddington (?).

    10. Le Boutura : ancien hameau d'Outreau (Boulogne, Outreau) - Le Bouteuns, XVème siècle ; Le Boutun 1506.

    11. Caltun : lieu inconnu, près de Moyecques, hameau de Landrethun-le-Nord (Boulogne, Marquise) ; cité par Kurth50. Cf. Colton (Lancaster, Norfolk, Stafford, Worcester, York).

    12. Colincthun : hameau de Bazinghen (Boulogne, Marquise) - Collingetun XIVème siècle. De Cola, Colinc (?). Cf. Collington (Hereford) ; Collinstown (Westmeath) ?

    13. Connincthun : hameau de Beuvrequen (Boulogne, Marquise) - Coninghetun 1298. Cf. n° 11.

    14. Dirlinggthun : ancien village sur la commune de Harnes-Boucres (Calais, Guines) - Diorwaldingathun 865-86651, puis Dirlingatun 1107. De Diorwald (?), nom propre inconnu qui paraît signifier littéralement "celui qui commande aux bêtes sauvages" (!). Cf Dirleton (Had-dington) ; peut-être Darlington (Durham).

    15 Fauquetun : écart de Saint-Venant (Béthune, Lillers) - Foukeston 1296, Foukestun 1307. De Folko (?). Cf. Folkington (Sussex) ; voire Folkestone (Kent).

    16. Florincthun : hameau de Condette (Boulogne, Samer) - Florinthon 1165. Peut-être un combiné roman-saxon se rattachant à Florus.

    17. Fréthun : commune (Calais, Calais Nord-Ouest) - Fraitum 1084. On a soutenu que ce n'était pas un nom saxon (qui serait venu de Frith ou de Wulfer), mais un nom roman se rattachant à fretum (détroit). L'accentuation rend cette hypothèse peu vraisemblable (l'accent de fretum est sur la première syllabe, celui de Fréthun sur la seconde) ; ajoutons que Fréthun est dans l'intérieur des terres, à 18 kilomètres du cap Gris-Nez. De surcroît, Rodière52 cite une pièce des Archives d'Artois qui appelle une certaine dame tantôt dame de Fréthun, tantôt dame d'Offerthun. En Angleterre, Frieston. Cf. n° 27.

    18. Godincthun : écart de Pernes-en-Boulonnais (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Godin-getuna 1208. De God, Godinc. Cf. Goddington (Kent).

    19. Guiptun : ferme à Tardinghen (Boulogne, Marquise) - Guibbingatun 1130.

    20. Hardenthun : hameau de Marquise (Boulogne, Marquise) - Harden tuna 1208. De Heard, Heardinc. Cf. Hardington (Sommerset).

    21. Honnincthun : écart de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est). Honingetuna 1208. De Huna, Huninc.

    22. Huncthun : fief à Wavrans (Saint-Orner, Lumbres), cité par Gamillscheg53.

    23. Imbrethun : ancien hameau de Wierre-Effroy (Boulogne, Marquise) - Imbrethun 1525. De Imma, Imper.

    24. Landrethun-le-Nord : commune (Boulogne, Marquise) - Landringhetun 1179. De Lan-derich (?).

    25. Landrethun-les-Ardres : commune (Saint-Orner, Ardres) - Landregatun 1084. Cf. n° 23.

    26. Ledrethun : lieu-dit, commune de Beuvrequen (Boulogne, Marquise) - Ledrethun 1491. De Ledi, Leod. - pas de forme ancienne

    27. Offrethun : commune (Boulogne, Marquise) - Guelferton 1181 ; Wolfertun 1286. De Wulfere. Cf Offerton (Derby) ; Wolferton (Bucks, Hants, Norfolk, Warvick).

    28. Olincthun : hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Olinguetun 1367. De

    49 E. Gamillscheg, Germanische Siedlungen in Belglen und Nordfrankreich, p.160.

    50 G. Kurth, La Frontière Linguistique en Belgique et dans le Nord de la France. p 539.

    51 Ce nom présente une "fracture" phonétique propre à l'anglo-saxon, à l'intérieur du groupe an-glo-frison. Sa première syllabe représente le saxon deor (bête sauvage - fier, hardi ; anglais moderne deer). La "fracture" a brisé, devant le r final, le e du germanique commun (cf. allemand tier).

    52 Rodière, Les Noms de Lieux de l'Arrondissement de Boulogne. Etudes toponymiques.

    53 Gamillscheg, op. cit. p. 160.

    14

    011o. Cf. 011erton (Cheshire, Nottingham).

    29. Paincthun : hameau d'Echinghen (Boulogne, Boulogne Sud) - Panningatum 1118. De Panno. Cf. Paington (Devon).

    30. Pélincthun : hameau de Nesles (Boulogne, Samer) - Panningetun 1112. Cf. n° 29.

    31. Polincthun : ancien hameau de Verlincthun (Boulogne, Samer) ; cité par Kurth54, donc pas de forme ancienne.

    32. Raventhun : hameau d'Ambleteuse (Boulogne, Marquise) - Raventurn 1084. Pour racine on a proposé Ravo55 ; mais le spécialiste, Redin, ne connaît pas ce patronymes'. Pourquoi pas (sous toute réserve !) Hrae (anglais moderne raven : corbeau) : au lieu d'un hypothétique *Ravingtûn, , ce serait H aefnûn. Il a été proposé de l'assimiler à Ravenstone (Derby), lequel me paraîtrait plutôt "La Pierre aux Corbeaux".

    33. Rocthun : hameau de Leubringhen (Boulogne, Marquise) - Rokethun 1297, Rocquethun 1550. De rock (rocher) ? Pourquoi pas : le mot rocca, dans ce sens, est attesté en vieil-anglais. A. de Loisne rapproche bizarrement Rocthun de la localité irlandaise Rockstowns'. Cet auteur ne connaît pas cet hameau de Leubringhen, et place Rocthun sur la commune de Longueville (Boulogne, Desvres)S8. Y aurait-il eu deux Rocthun ?

    34. Samblethun : ancien village sur la commune de CoyeccAues (Saint-Omer, Fauquem-bergues) ; c'est aujourd'hui un lieu-dit "Le Grand Semblethun - Senpleton 1120, Sempletun 1124.

    35. Sodincthun : lieu inconnu cité par Bückmann59. De Sodda - Donc pas de forme ancienne

    36. Sombrethun : ancien hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est), plus connu sous le nom de Pichevert - Pissevelt et Zummertun (même date) 1305 ; Sombreton 1339 ; Zinbre-thun alias Pichevert 1603.

    37. Tardincthun : ancien hameau de Tardinghen (Boulogne, Marquise. Pas de forme ancienne. De Tardo ? cf. n° 38.

    38. Terlincthun : hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Telingetum 1208. De Tela, Tella. Cf. Terrington (York, Norfolk, Devon, Oxford).

    39. Todincthun : hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Totingetum in pago Bono-niensi 807: le plus anciennement cité de tous les noms en -thun ou -incthun. De Theod, ou de Tota, Totta. Cf Toddington (Bedford).

    40. Totingetum : ancien hameau de Guines (Calais, Guines). - pas de forme ancienne Cf. n° 39.

    41. Tourlincthun : hameau de Wirwignes (Boulogne, Desvres) - Tourlinctun 1699. De Tor-lo, Torro. Cf Torleton (Gloucester) ; Torrington (Devon).

    42. Verlincthun : commune (Boulogne, Samer) - Verlingtun 1173. De Walla ? Cf Warlin-gham (Sussex).

    43. Wadenthun : hameau de Saint-In Levert (Boulogne, Marquise) - Wadingatun 1084. De Wada, Waldo, Walding. Cf Waddington (York, Lincoln).

    44. Waincthun : ancien écart de Saint-Léonard (Boulogne, Samer) - Wainghetun 1340. De Waga. Cf Winkton (Hants).

    45. Warincthun : hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Wadingetuna 1208, Wan-dinghetun 1297, et encore Waudingthun 1491. De Wara, Warinc (?). Cf Warrington (Lancaster).

    46 (?). Warneton. Sous réserve, à cause de sa finale qui toutefois est récente ; ajoutons que sa situation est franchement excentrique, voisine toutefois d'un petit groupe de toponymes en -inghem dont l'ascendance saxonne est plausible (voir ci-dessous H. 1 D : "Les noms de lieux en -inghem"). Warneton es trouve à la fois en France dans le département. du Nord (Lille, Le Quesnoy-sur-Deule), et en Belgique (Province du Hainaut, arrondissement de Mouscron, commune "Comines-Warneton") ; en flamand : Waesten - Warnasthun 1007, Gar-nestun 1119.

    54 op. cit. p. 293.

    55 A. de Loisne, La colonisation saxonne dans le Boulonnais p. 9.

    56 M. Redin, Studies on uncompounded personal names in old English.

    57 op. cit. p. 10.

    58 Dictionnaire topographique du Pas-de-Calais, p. 326

    59. Bückmann, Die germanische Ortsnamen bis zum 50 Breitengrad ; cité par H. Ehmer, Die sachsische Siedlungen auf dein franztisischen "littus saxonicum" p. 16.

    47.

    15

    Wincthun : fief à Tardinghen (Boulogne, Marquise) - Waynghetun 1326. Cf n° 44.

    48. Witrethun : hameau de Leubringhen (Boulogne, Marquise) - Westretin Xfflème siècle, Westretun 1496. De Witta, Withere. Cf WiddringtonNorthumberland).

    49. Zeltun : hameau de Polincove (Saint-Omer, Audruicq) - Sceltun 1084. De Zello ? Cf. Scelton (York).

    A cette liste il faudrait peut-être ajouter Verton (commune : Montreuil, Montreuil - Vertunum 856, Vertum Xlème siède) et Béthune. Leur situation, à l'un et à l'autre est excentrique et leur finale peu satisfaisante, surtout celle de Béthune avec sa forme féminine - Bitunia VIIIème siècle. Il est vrai que certains des noms saxons cités plus haut ont parfois une finale en a (Alingetuna, Godingetuna, Hardengetuna, Honingetuna, Wadingetuna) ; mais c'est une seule fois dans leur histoire, et tous dans le même texte, une charte de Notre-Dame de Boulogne de 1208. En sens inverse, il y a lieu de noter, sur le territoire de Béthune, la présence d'un lieu-dit qui pourrait bien être d'origine saxonne60.

    Leur répartition est intéressante. Ils sont massés dans l'arrondissement de Bou-logne61 (38 sur 47 localisés), et surtout dans l'ouest de celui-ci, parallèlement à la côte quoique toujours à une certaine distance de celle-ci, avec une préférence pour le canton de Marquise, qui en possède la moitié. Ensuite vient l'arrondissement de Saint-Omer où ils sont assez dispersés ; ils s'y trouvent surtout dans sa partie occidentale, mais sa partie la plus à l'ouest en est presque dénuée : zone de plateaux secs tardivement peuplés ? Quelques enfants perdus semblent se manifester dans l'arrondissement de Béthune (Fauquetun ; Béthune ?), et peut-être dans celui de Montreuil (Ver-ton ?) et dans la Belgique voisine (Warneton ?).

    On ne connaît pas en France d'autre toponyme analogue en -tun. Le Calvados fait exception. On y trouve dans l'arrondissement de Bayeux - ancien territoire des Saxones Baiocassini - trois localités du nom de Cottun, dont l'une présente en 1036 la forme Coltun (cf. Caltun en Boulonnais, et de nombreux Colton en Angleterre). Il s'agit d'une commune du canton de Bayeux, un écart de Barbeville (même canton) et un écart de Tournières (canton de Balleroy).

    B, Les noms de lieux en -brique

    Le suffixe -thun n'est pas la seule trace saxonne dans la toponymie du Pas-de-Calais : il y en a d'autres, dont l'une au moins semble égaler -thun en certitude : le suffixe -brique. Ici, il ne s'agit plus de sémantique, mais de phonétique : la "métapho-nie en i". Le germanique commun, pour désigner un pont, avait un substantif féminin : *bruggjo62. Ce mot a subi des évolutions différentes dans chacune des langues germaniques. En francique, il a simplement perdu sa finale et assourdi sa dernière consonne : *bruggjo, passant par *brug est devenu bruk, noté brouck en flamand et en

    60 cf. plus bas, p.171 n° 3.

    61 Carte n° 4

    62 L'astérique indique qu'il s'agit d'un mot reconstruit d'après des langues postérieures ; le u se prononce comme le français ou, et le j représente un yod, c'est à dire un i consonne.

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    néerlandais (cf. en allemand le féminin "Brücke"63). En anglo-saxon l'évolution a été marquée par la "métaphonie en i", dont nous avons vu qu'elle palatalise les voyelles précédant une syllabe contenant un i ou un "yod" (i consonne) le u de *bruggjo, passant probablement par ii, est devenu i, et la finale s'est palatalisée : brycg, bricg en vieil-anglais (plus précisément en west-saxon), bridge en anglais moderne. En anglo-saxon du Vlème siècle, le mot pour désigner un pont devait se dire à peu près *brig. Le dialecte picard assourdit souvent les finales" : pour brig, une personne parlant picard devait entendre, ou au moins prononcer, brik, écrit brique. Nous sommes donc en possession d'un critère excellent pour distinguer, en Boulonnais, entre le francique et le saxon : selon qu'un pont s'appellera" brouck" ou "brique", il aura été baptisé dans une langue ou dans l'autre.

    Certains de ces noms sont composés, c'est à dire que le mot signifiant pont prend la place d'un suffixe, en tant que "déterminé" (ce système de composition est le même dans toutes les langues germaniques) ; rarement il est déterminant.

    Dans d'autres cas, l'on n'éprouvera pas le besoin de donner un qualificatif au pont : on l'appellera simplement "le pont", "la brique". Dans ce dernier cas, on s'interroger sur l'homonymie avec le mot français - ou picard - désignant un matériau de construction, mot qui est également du féminin. Est-elle gênante ? A vrai dire, non, car ce dernier vocable n'est pas utilisé en toponymie (sauf, le cas échéant, au pluriel "Les Briques"). Sur 31 départements français, les 31 volumes parus en 1946 du Dictionnaire Topographique de la France, je ne l'ai trouvé qu'une seule fois ("Le Bois de la Brique", dans la Meuse"). Je laisse de côté un autre cas dans le Gard, où "La Brique" représente un ancien "L'Albric", et deux cas dans le Calvados, pays saxonisé. Dans ce dernier département, ainsi que dans la Manche, on trouve volontiers "brique" en composition : Bricqueville, Briquessard (Calvados), et Bricquebec, Bricquebosc (Manche).

    Dépassant de très loin les autres départements, Pas-de-Calais fournit près de vingt exemples de toponymes en "brique" : soit 11 isolés, 7 en composition et 3 douteux. Dans plusieurs cas, il s'agissait effectivement de sites de ponts ; pour l'un d'eux, Vebrighe (ci-dessous) ce caractère est même précisé dans une charte : "ponton qui dici-tur Vebrighe". Dans d'autres cas, il s'agissait d'écarts ou de lieux-dits dont le nom pouvait évoquer un pont voisin, lequel n'avait pas besoin d'être bien important. En voici la liste ; comme il s'agit le plus souvent d'endroits peu habités, il n'y a guère d'anciennes attestations.

    1) Isolés :

    1. A Brique : écart de Marck (arrondissement de Calais, canton de Calais Est).

    2. La Brique : château et écart de Bellebrune (Boulogne, Desvres) ; dit aussi Cobrique -

    63 La métaphonie en i se rencontre à des degrés différents dans les différentes langues germaniques ; en anglo-frison, elle a été plus forte et plus rapide qu'ailleurs. On voit que le haut-allemand l'a également subie, mais sans dépasser le stade ü : *bruggjo > briicke.

    64 Exemples : "cafe" pour "cave", "cuite" pour "cidre", "rosse" pour "rose", "roite" pour "roide"...

    17

    Quodbrigge 1286, I<abrigue 1302, Quodbrige 1652, La Brique XiXème siècle - cf. en Angleterre Cobridge.

    3. La Brique : fief, à (Béthune, Béthune) - Le Bricqueb5 XVIllème siècle.

    4. La Brique : hameau et fief à Brunembert (Boulogne, Desvres) - La Bricque, 1553.

    5. La Brique : fief à Colembert (Boulogne, Desvres) - Le Bricque 1631

    6. La Brique : fief à Quercamp (Saint-Omer, Lumbres) - La Bricque 1631.

    7. La Brique d'Or : fief à Mentque-Nortbécourt (Saint-Omer, Lumbres) - Le Bricke 1359 ; La Bricque d'Or 1739.

    8. La Brique d'Or : ancien surnom de Galpanne, fief à Racquinghem (Saint-Orner, Aire-sir-la-Lys) : "Galpanne dite La Bricque d'Or" en 1759.

    9. Pont-de-Briques : quartier de Saint-Léonard (Boulogne, Samer) - Le Pont de le Brike 1203 ; Le Pont de le Bric ques 1506 ; Pont de le Bricque 1525 . La présence de l'article dans les formes anciennes suffit à démontrer qu'il ne s'agit en aucun cas d'évoquer un pont qui aurait été construit en briques. Il s'agit d'un pléonasme roman-saxon, datant probablement de l'époque où l'on a cessé de comprendre le saxon. Il est intéressant de remarquer que c'est précisément à Pont-de-Briques que la voie romaine de Lyon à Boulogne traversait la Liane.

    10. Pont-de-Briques : à Coulogne (Calais, Calais-Centre) - pas de forme ancienne

    11. Pont-de-Briques : à Isques (Boulogne, Samer)

    12. Pont-de-Briques : à Nortkerque (Saint-Omer, Audruicq). Pour ces trois derniers cas, le manque d'anciennes formes empêche d'être tout à fait sûr qu'il s'agit bien de pléonasmes roman-saxons, comme dans le cas du quartier de Saint-Léonard. Remarquons toutefois qu'il n'y a aucun "Pont-de-Briques" dans les 30 autres départements français possédant un dictionnaire topographique.

    En Composition.

    1. Briquecheul : écart d'Outreau (Boulogne, Outreau)66

    2. Cambrique : ancien écart de Saint-Léonard (Boulogne, Samer) - La Gambrique 149267. Cf. n° 17, et en Angleterre Cambridge.

    3. Dyébrighes : ancien écart de Marquise68 (Boulogne, Marquise) : Tiebrighe 1340, Dyebri-ghes 1388.

    4. L'Etiembrique ou l'Estiembrique : hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) -L'Estiebricq 1492. Probablement *stdn-brig, pont de pierres, devenu stênbrig par métaphonie en i. En Pays de Galles Stembridge (Glamorgan).

    ?. Le Gambrique : lieu-dit inconnu 149169; sans doute à assimiler à Cambrique (n° 13).

    5. Lansbrighe : fief à Sainte-Marie-Kerque (Saint-Omer, Audruicq) - pas de forme plus ancienne

    6. Vebrighe70 : ancien lieu-dit à Saint-Omer, connu par une charte de 1247 ; c'est elle qui contient le passage évoqué plus haut : "pontera qui dicitur Vebrighe".

    La répartition des noms de lieux en - brique est semblable à celle des noms en -thon, avec cette différence qu'on les voit déserter le canton de Marquise pour remplir ceux de Desvres et surtout de Samer : régions plus argileuses, plus riches en ruisselets. Dans l'ensemble, au moins dans la "fosse" boulonnaise, ils sont plus également répartis, avec une préférence pour l'est.

    65 La forme masculine de I'article n'est pas gênante, l'article picard étant neutre ; lorsque l'article a une forme féminine, il s'agit de l'article français.

    66 Kurth, La Frontière Linguistique en Belgique et dans le Nord de la France p. 360.

    67 A. de Loisne, La colonisation saxonne dans le Boulonnais. Toutefois, Cambrique et Cobrique ne sont pas dans le Dictionnaire Topographique de la France, Pas-de-Calais paru un an plus tard.

    68 Kurth, op. cit.

    69 De Loisne, op. cit.

    70 Kurth, op. cit. p. 227, d'après Giry, Histoire de la ville de Saint-Orner et de ses institutions.

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    C. Les noms de lieux en -ness.

    Aux suffixes -thun et -brique on peut ajouter, avec peu de chance d'erreur, un suffixe -ness, avec le sens de "pointe, cap". Le fait qu'il n'existe pas en flamand mo-derne71 n'oblige pas à préjuger du francique ; mais le fait est qu'il est absent de la toponymie flamande, alors qu'il est fréquent de l'autre côté de la Manche. On le trouve de ce côté-ci du détroit dans les noms de lieux suivants :

    Toponymes en -ness

    1. Cap Blanc-Nez : sur Escalles (Calais, Calais Nord-Ouest) - Hildernesse 1124.

    2. Cap Gris-Nez : sur Audinghen (Boulogne, Marquise)- Blacquenès 1546 Blacquenetz 1550. Cf. en Angleterre Blackness.

    3. Hernesse (La) : fief à Saint-Orner-Capelle et à Sainte-Marie-Kerque (Saint-Omer, Au-druicq) - pas de forme ancienne

    4. Lampernesse : lieu-dit de Tardinghen (Boulogne, Marquise) - pas de forme ancienne

    5. Longuenesse : commune, faubourg de Saint-Omer (Saint-Omer, Saint-Omer Sud) - Lo-conesse 877.

    6 Le Nez : hameau d'Audinghen (derrière le cap Gris-Nez ; Boulogne, Marquise) - Le Nesse 1312

    7. Péternesse : ancien nom de Saint-Pierre-les-Calais, à Calais - La forme hésite longtemps entre Petresse 962, Petressa 1026, Pieterse 1227, et Piternesse 1093, Pitarnesse 1093, Peternessa 1107 ; Seint-Pierre 1253-1270, Sanctus Petrus juxta Calesium 1307.

    8 Selnesse : ancien château à Ardres (Saint-Orner, Ardres) - Salunels 1148 ; Selnessa XIIIème siècle.

    9. Witternesse (Béthune, Norrent-Fontes) - Witernes 1119, Wautrenès 1365

    Quelques noms de lieux contiennent le radical "Ingl-", sans qu'on sache trop ce qu'on peut en tirer. Ce n'est pas le cas de Saint-Inglevert, personnage qui n'a pas existé et encore moins canonisé (Sontingeveld 1148)72. On peut citer :

    1. Inglebert : hameau de Quelmes (Saint-Omer, Lumbres) - Ingelberga 1149.

    2. In linghem : hameau de Norbécourt (Saint-Omer, Ardres). : Iglighem 1223, Inghelin-ghem 1338.

    Il doit exister beaucoup d'autres noms d'origine saxonne dans notre région ; au moins la majorité des noms germaniques du Bas-Boulonnais (eux-mêmes plus nombreux que les noms romans). L'absence de critères sûrs empêche d'y distinguer ce que nous devons aux Francs et aux Saxons.

    Il y a pourtant une classe de noms pour lesquels la philologie n'apporte rien, mais dont la répartition est des plus suggestives. Très nombreux, la plupart sinon tous sont, selon toute vraisemblance, d'origine saxonne :

    71 Le néerlandais emploie un mot "nes" dans ce sens, mais ce mot est moderne, dérivé du moyen-néerlandais "nasu" (nez). La même évolution sémantique s'est produite à mille ans de distance en anglo-saxon et en néerlandais.

    72 "Sontium campus vulgo Sontinghevelt" au XIIIème siècle (en néerlandais, champ se dit veld)... mais "Sanctus Ingelbertus" au XVlIème siècle ! - notre région connaît un autre cas de canonisation abusive : "Saint-Denoeux" (Montreuil, Campagne-lès-Hesdin), lequel était à l'origine Sendenodum (1170) ; il devint Saint-Denoes en 1431 en passant par Saindenoeuf en 1338... et même, sous la Révolution, "Denoeux-l'Inflexible" !

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    D. Les noms de lieux en -inghem.

    On reconnaît dans cette terminaison la combinaison de deux suffixes : -ing que nous avons déjà rencontré au chapitre des toponymes en -incthun (plus haut p. 12, note 47 ; et -hem, -ham qui désigne un lieu de résidence

    Ce dernier vocable existe dans toutes les langues germaniques, avec le sens d'habitation : anglais home, allemand heim. Il est partout utilisé en toponymie, quoique de façon variable selon les régions, le plus souvent en suffixe : le haut-allemand et le francique ripuaire l'emploient souvent (cf. Mannheim) ; le francique salien (celui qui intéresse notre région) en fait un moindre usage, et l'écrit sans h : par exemple, Eerne-gem, Zedelgem près de Bruges. On le rencontre assez fréquemment dans la région boulonnaise (exemples : Audrehem, Dohem, Ostrehem, Westrehem... etc), sans qu'il soit possible de l'attribuer à coup sûr au saxon plutôt qu'au francique).

    Si le suffixe -ing est employé un peu partout, il n'en est pas de même du suffixe composé -ingham lequel n'est utilisé strictement qu'en Angleterre (cf Birmingham, Buckingham, etc.) et, de ce côté-ci du détroit, dans la région qui fait face à la grande île. Il apparaît en France sous la forme -inghem, écrit aussi -inghen (carte n° 14 et 17) : à Buckingham correspond chez nous Bouquinghen et, à Birmingham, Barbinghem ("Birminghaem" au Xlème siècle).

    Les noms de lieux en -inghem, -inghen, sont presque au nombre de 150 pour le seul département du Pas-de-Calais (on en trouvera la liste en annexe). Ils fourmillent dans les arrondissements de Boulogne et de Saint-Omer ; on en trouve dans ceux de Montreuil et de Béthune, et sporadiquement dans ceux de Saint-Pol et d'Arras, ainsi que dans le département du Nord, avec quelques enfants perdus au delà de la frontière belge. On relève parmi eux plusieurs doublets ou triplets, et même deux quadruplets (Matringhem, ainsi que Vaudringhem auquel s'ajoute peut-être Waudrin-ghem).

    Leur ligne de force est dirigée d'ouest en est comme celle des noms en -thun, mais ils débordent assez largement ceux-ci, et sont plus éparpillés. Doit-on penser qu'ils sont tous de fondation anglo-saxonne, les gens qui parlaient cette langue ayant manifesté - à la différence des Francs Saliens - un goût prononcé pour les suffixes composés ? Plausible, voire probable cette hypothèse se heurte à une difficulté des plus sérieuses. Elle donnerait en effet à la colonie saxonne une étendue telle, qu'on comprendrait mal le silence des textes. La colonie saxonne aurait-elle été, à l'époque des toponymes en -inghem, plus étendue qu'à celle des noms en -thun ? Peut-être est-il permis d'envisager un effet de contamination, sociale ou linguistique, dans les régions franciques qui étaient les plus proches de celles occupées par les Saxons ? En effet, bien que séparés, les suffixes -ing et -ham y coexistaient déjà. Peut-être y eut-il jadis des implantations de villages saxons plus ou moins isolés, éparpillés en zone francique ? On ne le saura sans doute jamais. De toutes façons, les toponymes en -in-ghem sont tous évidemment, directement ou indirectement, d'influence anglo-

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    saxonne. Quand on les rencontre au voisinage de noms en -thun, on peut être sûr qu'ils sont eux-mêmes saxons. Et peut-être la colonisation saxonne fut-elle plus étendue que la répartition des noms en -thun le ferait supposer.

    Puisque ces deux sortes de toponymes pouvaient être voisins les uns des autres, il devait bien y avoir entre eux une distinction sémantique. A l'époque du Haut Moyen-Age anglais, Bède le Vénérable assimile ham au latin civitas, et tun à villa73. Ham paraît donc désigner quelque chose de plus important que thun ; il aurait été ce que nous concevons comme un assez gros village, et thun plutôt comme un assez grand domaine, moindre toutefois que le ham.

    De nos jours il en reste quelque chose. En effet, les noms en -inghem du Pas-de-Calais sont un peu plus souvent des communes (50 sur 148, soit un tiers - alors que les noms en -thun sont pour la plupart des écarts ou des hameaux (8 communes seulement sur 48 en tout, en excluant les deux Warneton comme douteux) : soit un sixième au lieu d'un tiers). De surcroît, on peut remarquer qu'après pourtant dix à quinze siècles, les toponymes en -thun et -incthun demeurent, statistiquement, subordonnés à ceux en -inghem. En face de deux hameaux de Baincthun pourvus de noms de la forme en -inghem (Macquinghen et Questinghen), auxquels s'ajoute un hameau de Verlincthun (Mazinghen) on observe en revanche dix hameaux en -thun situés dans l'orbite de communes en -inghem : Audincthun, Todincthun et Warincthun pour Audinghen, Colincthun pour Bazinghen, Pincthun pour Echinghen, Rocthun et Wi-trethun pour Leubringhen, Guiptun, Tardincthun et Wincthun pour Tardinghen.

    Ces recherches toponymiques donnent la certitude de l'existence d'anciens établissements anglo-saxons dans cette région assez vaste voisine du détroit, et centrée sur la ville de Boulogne-sur-Mer. En dehors des noms de lieux, y eut-il d'autres traces saxonnes dans la région ? Nous allons les rechercher en interrogeant successivement les textes des vies de saints, puis l'archéologie, l'anthropologie, l'onomastique, et les coutumes.

    2. Les Vies de Saints.

    Notre région a été christianisée assez tard, malgré les efforts de Saint Victrice de Rouen au IVème siècle.. Au VIIème siècle elle était encore complètement païenne. Il y a donc peu de Saints ayant vécu assez tôt pour avoir connu l'invasion saxonne, et même pour avoir parcouru un pays encore saxon, et leurs vies sont trop récentes. Il y a pourtant un petit groupe de Saints assez anciens : le petit noyau qui a fondé l'abbaye de Saint-Bertin et qui a repris le diocèse de Thérouanne. Des deux premiers évêques de Thérouanne, Saint Antimond (512-549) et Saint Athalbert (549-552) on ne connaît que le nom et la date, cela d'après les tableaux chronologiques de l'abbaye de

    73 Cité par Ehmer 1937 p. 15. Bède traduit "inter civitates sive villas" par "betwih his hammum o##e hulule .

    74 E. de Moreau 1926 - Saint Victrice de Rouen, apôtre de la Belgica Secunda. Revue Belge de Philologie et d'Histoire V, p. 71-79

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    Saint-Bertin. Nous sommes mieux lotis en ce qui concerne Saint Orner, 3ème évêque de Thérouanne (633-668, après une vacance de 80 ans), et Saint Bertin, premier abbé de Sithiu. On n'a pas les vies des compagnons de ce dernier, Saint Mommelin et de Saint Ebertran.

    Rien dans la vie de Saint Bertin ne fait penser aux Saxons. Le pays est païen, c'est tout ce qu'on apprend. A la lecture de la Vita Sancti Bertini on a l'impression d'une époque calme. A leur arrivée, dans la première moitié du VIIème siècle, on les voit fonder un monastère, le "vieux-monastère", aujourd'hui Saint-Mommelin près de Saint-Omer, ainsi qu'une église ornée de pierres rares et de plaques d'or,. On les conçoit mal bâtissant avec un tel luxe en période d'invasion (que l'on pense aux déprédations, plus tardives, des pirates normands !).

    Dans la Vie de Saint Orner, on a cru trouver une allusion à un territoire saxon sur la côté boulonnaise7b. Le texte est malheureusement moins affirmatif qu'il n'y paraît. C'est le récit d'un miracle. Saint Orner était allé à Boulogne, lorsqu'un enfant de la ville, qui était monté par jeu dans une petite barque utilisée pour la traversée de la Liane, se vit soudain emporté par le vent vers la pleine mer. Terrifié, il implora Dieu "par les mérites de Saint Orner" et fut déposé "sur la terre saxonne"? la situation, pour s'être améliorée, n'était toujours pas enviable, les habitants de la région pouvant être animés de mauvaises intentions ; aussi, dans une confiance parfaite en Dieu et en Saint Omer, il remonta dans son bateau et fut ramené par un vent favorable sur une mer calmée à sa cité natale.

    Selon de Loisne, jamais un frêle esquif n'eut traversé le détroit "en l'espace de temps assigné par le récit", dit-il. Donc, selon lui, la terre saxonne ne serait pas l'Angleterre, mais une autre portion de la côte française.

    Construire un raisonnement en graduant le vraisemblable et l'invraisemblable dans un miracle me paraît une entreprise bien scabreuse, spécialement quand le miracle est raconté dans une vie de Saint du début du Moyen-Age. Ajoutons qu'il est dit qu'à un certain moment l'enfant ne voyait plus aucune terre : i1 était donc déjà assez loin en mer, et si la violence du vent ne mollissait pas, il pouvait fort bien être entraîné jusqu'à l'Angleterre. Ajoutons que, pour l'avoir ramené en France, il aurait fallu que, par la suite, ce violent vent d'est se transforme en gentil vent d'ouest. Pourquoi

    75 Cartulaire de Saint Bertin t. I, chap II, p. 17-18 : "Anno incarnationis domini nostri Jhesu Christi DCXLV, qui est annus XI regis Ludovici, filii Dagoberti" ; un peu plus tôt (626) d'après les Acta Sanctorum, vita Sancti Bertini septembre II, p. 559.

    76 A. de Loisne, la colonisation sxonne dans le Boulonnais p. 3 et 4.

    77 Vita Sancti Audomari (AA. SS. ord. Sancti Bernardi II p. 561 A.). Quodam vero die Audomarus egre-gius Christi confessor, in Bononia orbe perseverans... Ast ilium (juvenem) in pelagus rapuit vis valida venti. Tunc subito surgens in fonte saeva tempestas, ipsa navicula undis tumescentibus quassata, nec gubernacula nec gubernatorem habens, huc et fluctibus errans natabat in mari, quod magno Britanniam gurgite secernit a Francis, quod saepe fortissimis mersis hic navibus nocet. Ast miser nec propriam cernens, nec alteram terram... tunc ilium per merita Deus Audomari precantem trepidum saxonicam ilico deduxit ad terrain. Turn iterum stupidus ignota cernens arva, raptores tremulus se denudare timebat, si solus diutius illic expectare tentasset... Audoma-rum tremula clamans tunc voce patronum, in Dominum fidens cito recurrit ad navem. Ilico Omnipotens yen-turn illi concedens aptum, mitescere pelago jubens...

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    pas ? Il est vrai qu'au cours d'une tempête, le vent peut tourner assez rapidement.

    Le raisonnement de de Loisne exige que Boulogne n'ait pas été peuplée de Saxons, alors que ses environs l'auraient été. Cela n'est pas impossibles. Mais alors, comment l'auteur du récit, le sachant, aurait-il dit du Pas-de-Calais qu'il "sépare la Bretagne des Francs" ? ("Britanniam secernit a Francis"). Enfin, n'oublions pas que, si Saint Orner a vécu au Vlème siècle, ce récit qui le concerne doit être daté du début du IXème siècle : pour être assuré d'être compris, il aurait fallu que la colonie saxonne existât encore à cette époque, et fût même relativement importante : nous la connaîtrions sans doute par d'autres textes. Aucun de ces arguments n'est décisif, mais il me paraît vraisemblable que l'auteur, en écrivant terram saxonicam, a voulu signifier tout bonnement l'Angleterre.

    Il n'y a rien à trouver dans les textes. C'est une chose fort curieuse que personne n'ait parlé, ni directement, ni par allusion, d'une colonie aussi importante. On doit en accuser le recul de civilisation qu'avait subi le Nord de la Gaule à cette époque. L'archéologie nous réserve une moisson plus intéressante..

    3. Autres traces saxonnes éventuelles.

    A. Archéologie funéraire.

    On a découvert un assez grand nombre de sépultures d'époque mérovingienne dans la région boulonnaise, groupées par cimetières d'une centaine de tombes. En 1946, ces cimetières étaient au nombre d'une quarantaine. Les plus célèbres, les plus importants par la qualité du matériel funéraire qu'on y a trouvé sont ceux d'Uzelot (hameau de Leulinghen : arrondissement de Boulogne, canton de Marquise), et de Nesle-lès-Verlincthun (Boulogne, Samer). On y a trouvé notamment des armes (épées, lances, "umbos" de boucliers, couteaux, pointes de flèches, framées, francisques ; des pièces d'orfèvrerie (colliers, pendants d'oreilles, broches, bagues) ; des poteries, des objets divers (peignes en os, sceaux, coquilles, dents de sanglier, pinces à épiler, clefs) ; et même des monnaies, assez rares d'ailleurs.

    Est-il possible de distinguer les cimetières saxons des cimetières francs ? On a essayé de la faire au moyen des "scramasaxes Ce sont de longs couteaux de combat, plats, munis d'une rainure longitudinale, d'environ 0,47 cm de longueur sans la soie ; on les trouve le plus souvent le long de la cuisse des morts, dans presque toutes les

    78 Nous verrons plus loin (p.46) qu'a existé une ancienne colonie franque au nord de Boulogne, à une date qui n'est pas fixée. Par ailleurs, la Vita SS. Luglii et Lugliani fratrum (AA. SS. octobre, t. 10 p. 71-121) nous montre deux Irlandais convertissant Boulogne au Vllème siècle, puis gagnant immédiatement Thérouanne, ville capitale d'un royaume franc aux Vème et VIème siècles. On sait que les Irlandais n'aimaient pas les Anglo-saxons (pas plus d'ailleurs qu'aujourd'hui...) : "Nous aimons mieux aller en enfer que les retrouver au paradis"...

    79 Certains indices tendent à faire croire qu'elle avait déjà disparu, ou qu'au moins sa disparition était bien avancée : voir p.49

    80 A. de Loisne, Colonisation saxonne dans le Boulonnais p. 13 et 14.

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    tombes masculines. Le scramasaxe était, semble-t-il, utilisé dans le combat corps à corps et dans la défensive ; on a dit qu'il a donné en vieux-français "estramaçon" (mais ce dernier est une longue et lourde épée, dont le nom peut venir de l'italien). L'étymologie du mot "scramasaxe" renverrait à scrama, qui exprime une idée de protection (suédois skirma, allemand schirmen) et du vieil-anglais seex : couteau (cf. latin seco).

    Dans quelques textes, le scramasaxe est donné comme spécifiquement saxon81 : il aurait même donné son nom à ce peuple. Cette étymologie n'est pas sûre ; et même si c'était le cas, on observe que le scramasaxe est tout aussi fréquent dans les cimetières francs, si fréquent qu'on pourrait y voir une arme typiquement franque".

    On ne peut guère utiliser les armes pour discriminer entre Francs et Saxons. En effet, l'industrie guerrière a toujours eu tendance à uniformiser ses types sur de vastes régions, cela à cause du grand intérêt des inventions, et aussi à cause de la disparition des peuples mal armés. Toutes les tribus germaniques ont à peu près le même armement, et celui des légions romaines n'en diffère guère. Il est heureusement une autre dasse de trouvailles utilisables, celle des objets de parure où s'impose l'influence de la mode. Chaque région, chaque époque a sa mode qui permet de la reconnaître, chaque orfèvre même a son style. L'inconvénient, pour nous, c'est leur petitesse : ce sont des objets qui voyagent. On rencontrerait donc sans difficulté des objets saxons chez les Francs, et réciproquement. Les objets de facture saxonne sont heureusement nombreux dans notre région.

    On a trouvé en particulier des colliers d'ambre, ou du moins composés par parties égales de grains d'ambre et de morceaux de verre multicolores, et même de pièces de monnaie. L'ambre est recueilli sur les rives de la mer Baltique, en particulier dans la péninsule de Samland. Les Romains le connaissaient et l'utilisaient, mais il restait pour eux une substance rare, d'un prix élevé, recherché à l'égal des pierres précieuses". Dans le Boulonnais, par contre, on en trouve dans plus du tiers des tombes féminines, ce qui paraît dénoter un commerce actif, probablement par voie maritime, avec son pays d'origine, sinon une importation directe par les immigrants saxons. Dans les tombes franques du Pas-de-Calais, en revanche - dans les vastes et nombreux cimetières mérovingiens de l'arrondissement d'Arras - l'ambre est très rare. Il y a bien sûr des colliers, mais ils sont composés de perles de verre de toutes formes et de toutes couleurs ainsi que de billes de terre émaillées. Pour avoir recours à cette dernière substance, il faut n'avoir pas d'ambre, ou avoir bien du mal à s'en

    81 Witikind, De gestis saxonis, I : "cultelli enim nostra lingua salis dicuntur, ideoque Saxones nuncupa-tos". Et Godefroy de Viterbe XV, p. 313 :

    "Ipse brevis gladius apud illos saxo vocatur "onde sibi saxo nomen perperisse notatur".

    Enfin, dans le Glossarium de Du Cange, V, art. "Saxo" : "Saxones longis cultellis pugnasse auctor est enim continuator Florentii Vigorniensis anno 1138". Indeque genti datum nomen".

    82 Ehmer, Siichsische Siedlungen p. 50.

    83 Daremberg et Saglio, Dictionnaire des Antiquités gréco-romaines II, p. 534.

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    procurer.

    A côté des colliers d'ambre on trouve également des bracelets de type anglais ; l'un de ces types est particulièrement frappant tant son aspect est inhabituel sur le continent. Il s'agit d'un bracelet trouvé à Nesle-lès-Verlincthun, formé d'un barreau d'argent cylindrique étiré et aminci, en respectant néanmoins les deux extrémités, recourbé ensuite de façon à fournir d'un côté deux faces circulaires affrontées, de l'autre un fil métallique, d'un diamètre égal au quart du barreau primitif.

    La trouvaille la plus intéressante est peut-être une broche découverte à Harden-thun. Elle est en argent, et présente la particularité de porter un grenat en son centre. Il se trouve que l'usage de placer un grenat au milieu d'une matière blanche quelconque est un usage anglais et plus particulièrement kentient. C'est une mode du Vlème siècle dans le Kent. Ou cette broche est venue du Kent, ou les rapports ente ces deux régions étaient si étroits au Vlème siècle que la technique d'orfèvrerie y était la même. En dehors du Boulonnais proprement dit, on a retrouvé des objets de facture saxonne dans les cimetières de Waben près de Verton (Montreuil, Montreuil) et de Mareuil (Arras, Dainville). Ce sont deux broches que Roeder dit venues d'Angleterre, car elles appartiennent à une espèce de "broches composées" d'origine saxonne.

    J'ai trié les objets dont l'exemple est le plus net. Ce qui ne paraît pas dans ces descriptions, c'est l'air de famille entre les sépultures boulonnaises et les sépultures anglaises. Cette similitude est si forte, qu'elle a fait dire à un observateur du XIXème siècle, lequel ignorait l'ancienne immigration saxonne et prenait les cimetières boulonnais pour des cimetières francs : "A défaut de toute autre preuve historique, l'identité de race entre les hommes dont les sépultures se découvrent ainsi, sur l'un comme sur l'autre bord du détroit, en ressortirait nette, vive, indiscutable"".

    A feuilleter à la fois les planches de l'Archaeologia cantiana, et celles des Mémoires de la Société Académique de Boulogne, on ne peut trouver de différence entre toutes ces reproductions, et l'on en arriverait à ne plus savoir ce qui provient du sol anglais ou du sol français. Quant à la disposition des sépultures, elle est partout la même : les tombes sont alignées par longues rangées, les corps sont inhumés (les incinérations sont exceptionnelles, on n'en a trouvé qu'à Olincthun (hameau de Wimille, Boulogne, Boulogne Nord-Est) ; les corps étaient sans suaire, dans un cercueil de bois (sans sarcophage de pierre), orientés la tête à l'ouest et les pieds à l'est.

    Je n'ai pas parlé des monnaies, qui s'échelonnent depuis Constance (337-361) jusqu'à un monétaire du VlIème siède, Charemundus : elles ne sont pas saxonnes. En revanche, elles peuvent aider à la datation de l'invasion. C'est sous cette rubrique

    84 Brown, The Arts en Early England IV, p. 544.

    85 Roeder, Die silchsische Siedlungen in der Vôlkerwanderungszeit p. 24.

    86 V. Vaillant- Le cimetière de Nesle-lès-Verlincthun. Bulletin de la Commission des Antiquités Départementales du Pas-de-Calais VI, p. 103.

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    que nous les aborderons (ci-dessous, chap. III).

    B. L'anthropologie de la région boulonnaise.

    (Cette discipline ayant beaucoup évolué, on trouvera ci-dessous un texte très différent de celui de 1946. A la fin du présent mémoire, j'ajoute de surcroît un complément sous la forme d'un « Epilogue »).

    Il n'est guère possible de comparer les populations actuelles, tant du Jutland que de Grande-Bretagne ou du Boulonnais. On observe en effet une évolution des caractères physiques au cours des siècles qui nous séparent des grandes invasions. La taille a varié, et il en est de même de l'indice céphalique horizontal, lequel sert à diviser les gens en "dolichocéphales" (à tête longue) et "brachycéphales" (à tête large). Assez bas à l'époque des invasions, l'indice céphalique s'est élevé progressivement au cours du Moyen-Age, au point qu'à l'heure actuelle les "dolichocéphales" ne sont plus qu'une minorité, alors qu'à l'origine ils étaient les plus nombreux.

    Tout au plus peut-on remarquer que les habitants actuels du Jutland sont un peu moins grands que leurs voisins d'Allemagne du Nord, et qu'en Grande Bretagne la stature est plus faible à l'est qu'à l'ouest de la grande île (c'est à l'ouest de l'Ecosse qu'on trouve les plus grands des Européens). Les Britanniques de l'est sont aussi plus souvent blonds que ceux de l'ouest. Tout cela donne, peut-être, une idée de l'allure éventuelle des pirates saxons (?). Ce qui pour nous est fâcheux, c'est qu'on n'observe guère de différence entre les Boulonnais et les autres habitants du Nord de la France.

    L'étude des squelettes qui proviennent des cimetières d'époque mérovingienne aurait pu être plus instructive. Ceux du Boulonnais ont été trouvés pour la plupart aux confins du XlXème et du XXème siècle, et l'on sait que les fouilleurs de cette époque ne prêtaient guère d'attention aux squelettes qu'ils exhumaient. L'un de ces cimetières fait exception, celui d'Hardenthun, qui a été publié par E.T. Hamy", accompagné d'une étude anthropologique ; celle-ci comporte des mensurations, des statistiques, et aussi des comparaisons avec des crânes provenant d'autres stations de la même époque dans le Boulonnais. Cet auteur a mesuré 9 crânes féminins et 13 crânes masculins, ce qui n'est pas une base statistique bien considérable. Il observe néanmoins d'importantes différences entre ces deux catégories. Les premiers présentent selon lui un aspect relativement moderne, avec des traits adoucis et, toujours selon lui, des signes de métissage. Les crânes masculins ont, dit-il, un aspect "barbare", avec des contours "brutaux", une bosse occipitale forte, des arcades sourcilières saillantes, une face volumineuse et très haute, un menton puissant. Femmes et hommes sont 'dolichocéphales" , avec un indice céphalique de 75,9 pour les premières, de 73,06 pour les seconds. L'un de ces derniers est hyperdolichocéphale, avec un indice crânien de 64,2, ce qui serait un record d'Europe. Cela pour le cimetière

    87 I (indice céphalique) = L*100/1, L étant la longueur de la tête, et 1 sa largeur.

    88 E. T. Hamy, 1893 - Crânes mérovingiens et carolingiens du Pas-de-Calais. L'Anthropologie IV, p. 513-538

    26

    d'Hardenthun. Dans l'ensemble du Boulonnais, l'indice céphalique masculin était, paraît-il, de 74,21 pour les femmes, et de 73,80 pour les hommes. Avons-nous affaire à un échantillon non trié de l'ancienne population d'Hardenthun ? Venus par mer, les hommes étaient-ils arrivés en célibataires, et auraient-ils pris femmes dans la population préexistante ? - le cimetière d'Hardenthun paraît pourtant relativement récent (ci-dessus, p27). Seraient-ils, plus que leurs compagnes, les représentants d'une classe supérieure conquérante, leurs épouses représentant mieux le fond de la population ? Peut-être...

    4. Divers...

    L'onomastique devrait nous apporter quelque chose. Grâce à l'abbaye de Saint-Bertin dont on a le cartulaire, on connaît un grand nombre de noms de personnes du Xème et du Xlème siècle, quelques-uns même du Vllème et du VIIIème siècle. La plupart sont germaniques ; mais, selon Mansion", on ne trouve que très peu d'in-guéonismes dans le cartulaire de Saint-Bertin : personnellement, je n'en ai pas rencontré. Par conséquent, tous ces noms peuvent parfaitement être franciques. Le suffixe -bert (latin bertus : Adalbertus, Rodbertus, etc.) est très fréquent. Le suffixe saxon correspondant est -beort, le e se brisant devant r appuyé. On rencontre d'autres suffixes analogues, comme -bern, non fracturés, et, dans l'intérieur des mots, de nombreux cas de fracture où celle-ci n'a pas eu lieu. Il semblerait donc que la colonie saxonne soit disparue au IXème siècle, du moins en grande partie.

    Cette preuve, à mon sens, n'est pas définitive. En effet, si un scribe flamand entend Adelbeort, ne comprendra-t-il pas, n'écrira-t-il pas Adelbert ? Etant donné la position de l'abbaye de Saint-Bertin, on peut présumer que ses moines se recrutaient surtout parmi des gens de langue franque. Il y eut pourtant un évêque de Thérouanne, ville franque, qui a porté un nom, paraît-il, purement saxon : Saint Bein ("Baginas")90 - dont on retrouve semble-t-il le nom dans celui du village de Baincthun.

    Plus féconde aurait pu être la linguistique. Le dialecte picard a en effet un vocabulaire assez germanisé. Malheureusement, les mots francs et les mots saxons se ressemblaient trop, pour qu'une fois passés dans le système phonétique picard ils puissent rester faciles à distinguer. On observe bien dans le patois boulonnais des mots d'allure anglaise ("neque" pour cou : "neck" en anglais... mais aussi "nek" en néerlandais) ; que tirer de ce genre de ressemblances ?

    Quant à trouver des usages saxons dans la région, la chose est difficile. Tel qu'il nous est parvenu, le droit saxon d'Angleterre est le résultat d'une évolution assez longue, il est à la fois germanique et insulaire. De son côté, le Boulonnais a été romanisé par des populations qui étaient passées par la langue et par les coutumes

    89 J. Mansion, 1926 - Le problème saxon, p. 12.

    90 Rodière, 1896 - Dans Les Noms de Lieux de l'Arrondissement de Boulogne. Etudes toponymiques. , articles "Bayenghem" et "Baincthun".

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    franques, cela avant que nous puissions étudier ses institutions. On ne constate pas de différence nette entre l'ancien droit coutumier de Boulogne et celui d'Arras. Il est impossible d'affirmer en Boulonnais l'existence d'usages spécifiquement saxons, tel que le folcland (une variété de tenure foncière), ou l'importance politique des communautés de villages. Il a pourtant été noté que le plan de la ville de Bergues (chef-lieu de canton, près de Dunkerque), assez singulier, affecterait la forme d'un "ring" saxon...

    Nous avons trouvé des traces saxonnes indiscutables dans la région boulonnaise, surtout dans la toponymie, mais aussi dans l'archéologie et peut-être l'anthropologie. D'autres sciences, dont on aurait pu attendre des informations, ne nous ont rien apporté. Il faut sans doute en accuser l'ancienneté des établissements anglo-saxons dans notre région. Peut-on préciser cette ancienneté ?

    28

    III. Date et origine de l'invasion saxonne

    Il est nécessaire de préciser d'emblée que nos envahisseurs ne sont ni des Saxons continentaux déportés par Charlemagne91, ni des Frisons arrivés en suivant la côte. Les noms de lieux en -incthun et en -inghem renvoient directement à l'Angleterre ; il en est de même des fractures syllabiques de type vieil-anglais, telle que celle du toponyme Diorwaldingatun, et des pièces d'orfèvrerie d'aspect kentien.

    Le problème de la date de l'invasion saxonne est inséparable de celui de l'origine des envahisseurs. Les auteurs qui ont écrit sur cette question se partagent en trois positions distinctes :

    Les uns croient notre région saxonisée dès le Vème siècle, voire dès le IIlème siècle, avant même la Grande-Bretagne. Elle aurait partiellement servi de tremplin aux Anglo-Saxons pour la conquête de celle-ci. D'autres envisagent au contraire une époque tardive, manifestant une invasion venue de l'autre côté du détroit (fin du Vlème siècle, éventuellement Vllème, voire début du VIIIème siècle). D'autres enfin ont apparemment dans l'esprit une seule invasion, qui serait venue du Jutland et de l'Allemagne du Nord et qui aurait déferlé simultanément des deux côtés du Pas-de-Calais. Ils ne l'ont pas exprimée explicitement et a fortiori ne l'ont pas systématisée.

    1. Arrivée ancienne.

    Au XIXème siècle, l'abbé Haigneré, ignorant la philologie saxonne, avait eu néanmoins le mérite de reconnaître l'originalité des noms de lieux boulonnais en -thun et leur ressemblance avec les noms anglais en -ton. Il se demandait s'ils n'étaient pas "antérieurs à la rupture de l'isthme par lequel l'Angleterre se trouvait autrefois réunie au continent européen"92. Sans remonter aussi loin, on peut citer F. Lot qui, se basant sur l'ancienneté de la romanisation du Boulonnais, en concluait que les Saxons y étaient établis "avant l'époque mérovingienne, et même antérieurement aux Francs"93. Citons aussi A. Longnon qui, avant sa découverte des noms de lieux saxons dans le Boulonnais, faisait remonter les Saxons de Bayeux à l'époque du littus saxoni-cum9-' ; ainsi que A. de Loisne, qui partage cette opinion en ce qui concerne les Saxons du Boulonnais95 ; enfin J. Mansion qui, contre Lot lui-même, faisait valoir que le littus saxonicurn ne devait pas être désert de colonies saxonnes puisque la Notitia Dignita-tum signale, dans la région boulonnaise un nom germanique, Marcae96.

    91 F. Lot (Les migrations saxonnes en Gaule et en Grande-Bretagne, p. 24) a pris la peine de réfuter cette opinion, en faisant valoir que Charlemagne aurait disséminé ses Saxons par petits paquets, et non en un bloc compact. Ajoutons que les Saxons continentaux sont à l'origine des actuelles populations bas-allemandes, et non anglo-frisonnes : ils n'auraient pas laissé les mêmes traces linguistiques

    92 Dictionnaire historique et archéologique du Pas-de-Calais t. II, p. 298.

    93 Op. cit. p. 24.

    94 A. Longnon 1878 - Géographie de la Gaule au VIème siècle

    95 A. de Loisne 1906 - La colonisation saxonne du Boulonnais, p. 3.

    96 J. Mansion, 1926 - Le problème saxon p. 12.

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    Les principaux défenseurs d'une arrivée ancienne des Saxons ont été G. Kurth et J. Hoops.

    A. Théorie de G. Kurth97.

    Cet auteur se base sur les faits suivants :

    a) Il est impossible qu'aux Vème et Vlème siècles les Saxons aient essayé d'arracher aux Francs "alors dans le premier feu de leur expansion" une partie du littoral boulonnais.

    b) Pourquoi les Saxons auraient-ils divisé leurs forces, la conquête de la grande île étant loin d'être une promenade militaire ?

    Ergo, les Saxons étaient déjà en place au Vème siècle. Or précisément, on assiste, durant tout le Bas-Empire, à des incursions incessantes de pirates saxons sur les côtes de la Gaule. La Notitia Dignitatum ne parle-t-elle pas d'un rivage saxon, sur lequel on trouve précisément trois colonies saxonnes attestées, celles de la Loire, de Bayeux et de Boulogne ? Selon notre auteur, il n'est pas difficile de savoir à quelle date ce peuple a occupé le Boulonnais : à l'époque de Carausius. Celui-ci ayant le plus grand intérêt à être maître du rivage continental, il y aurait installé ces barbares devenus ses alliés. N'était-il pas, dès avant sa révolte, accusé de pactiser avec l'ennemi ? Que l'on examine la situation topographique des villages saxons : on les voit, dit-il, disposés en deux rangées concentriques formant une véritable ceinture stratégique autour de Boulogne98 ; ils trahissent une "volonté intelligente".

    On voit que Kurth fait un peu flèche de tout bois, sans parvenir à se montrer tout à fait convaincant. Il a peut-être raison... d'autant plus que quelques menus faits, inconnus de lui, viennent à l'appui de sa thèse.

    Pour lui, une alliance entre Carausius et les pirates n'est qu'une conjecture, qu'il juge plausible à partir du texte d'Eutrope. Or les panégyriques la dénoncent nettement : Carausius avait des alliés barbares, en particulier des Frisons99. Cela dit, cette amitié ne devait pas aller très loin. Nous avons de lui des monnaies qui le glorifient comme vainqueur des Germains. Elles portent les légendes suivantes :

    VICTORIA GERM

    GERMANICVS MAX V

    VICTOR' CARAUSI

    accompagnées d'un trophée entre deux captifsl°°.

    On possède par ailleurs quelques textes qui montrent, aux alentours de l'an 400 -

    97 G. Kurth, 1895 - La Frontière Linguistique en Belgique et dans le Nord de la France p. 530-537. A cette se rattache celle de I. Taylor : voir plus bas, p. 33.

    98 C'est un peu vrai si l'on restreint l'examen aux villages en -thun. L'impression disparaît si on leur ajoute les toponymes en -brique et en -inghem.

    99 Panégyrique de Constantin V, ,p. 163 ; Panégyrique de Constance VII, p. 135 et 136. Voir plus haut, p.

    4.

    100 P. Webb, 1907 - The reign and coinage of Carausius.

    30

    époque de la Notitia Dignitatum - le pays morin occupé par des Barbares. Il s'agit de deux lettres. L'une est de Saint Paulin de Nole qui, écrivant en 399 à Saint Victrice de Rouen, le félicite d'avoir converti la terre des Morins, que seuls peuplaient "des étrangers barbares et des indigènes brigands"i01. L'autre est de Saint Jérôme à une jeune veuve ("de Monogamia", 409) : énumérant des peuples barbares qui occupent la Gaule, il cite les Saxons ; et, quelques lignes plus loin, évoque la Morinie parmi les ci-

    tés "devenues gel tuniques"102. On peut imaginer que la décision administrative
    ayant un jour démembré la civitas Morinorum, pour en détacher la civitas Bononien-sium (ex pagus bononiensis)103, n'a pas intéressé outre mesure Saint Paulin et Saint Jérôme : quand ils parlent de la Morinie, c'est probablement de la région toute entière. Plus précis, le texte de Saint Jérôme est pourtant le moins informatif. Il se place en effet après le passage du Rhin par la grande invasion du 31 décembre 406: dorénavant, il y avait des Barbares un peu partout en Gaule. Notons toutefois que les Francs n'avaient pas pris part à ladite grande invasion. Ils étaient, en effet, chargés de garder la frontière du Rhin, et c'est à leur corps défendant que les autres tribus germaniques avaient traversé le fleuve. Les Francs, qu'on croit partis des îles zélandaises, occupaient à la fin du IVème siècle la région de l'embouchure du Rhin et le nord-est du cours inférieur de l'Escaut : cela à la suite d'un accord conclu en 358 avec l'empereur Julien. C'est après la grande invasion de 406 qu'on les voit franchir l'Escaut et remonter la Lys jusqu'à Courtrai, pour atteindre Cambrai vers 430. Ils sont arrivés trop tard pour être les Barbares germains que Saint Paulin signale en Morinie. Cela dit, on ne voit pas pourquoi Saint Paulin aurait éprouvé le besoin de faire l'allusion précitée si elle avait été pure imagination. M. de Moreaul0} a développé l'idée que cet écrivain était très au courant des faits et gestes de Saint Victrice, et qu'il avait à ses côtés, lorsqu'il rédigea sa lettre, deux clercs venus de Rouen.

    Il y avait sûrement des Germains dans la région dès le IVème siècle : mais lesquels ? Sans parler du "Marcae" évoqué à la fin du siècle par la Notitia Dignitatum, on a signalé à Uzelot (hameau de Leulinghen ; Boulogne, Marquise) un collier d'aspect tout à fait germanique (cf. plus haut, p. 22 "Archéologie funéraire"). Il se compose de 42 perles de verre, 9 d'ambre et 10 pièces de monnaie. Ces dernières, en bronze, sont à l'effigie de Constantin (306 à 337), de Constance II (337 à 361) et de Crispus (César de 317 à 326).

    101 Sancti Paulini Nolani episcopi epistola XVIII, colonne 239, t. 61 de la Patrologie : Ita est nunc in terra Morinorum, situ orbis extrema, quam barbaris fluctibus fremens tondit Oceanus... ubi quondam deserta sil-varum ac littorum punter intuta advenue barbari aut latrones incolae frequentabant, nunc venerabiles et angelici sanctorum chori..."

    102 Sancti Eusebii Hieronymi epistola CXXIII; Patrologie t. 22, colonnes 1057 et 1058 : "innumerabiles et ferocissimae nationes universas Gallias occuparunt. Quidquid inter Alpes et Pyrenaeum est, quod Oceano et Rheno incl ulitur, Quadus, Vandalus, Sarmata, Halani, Saxones, Burgundiones, Alamani... Vangiones longa ob-sidione deleti.. Remum urbs praepotens, Ambiani, Atrebatae, extremi hominum Morini, Tornacus, Nemetae, Argentoratus, translatae in Germanium".

    103 Cf. plus haut, note 16.

    104 E. de Moreau, 1926 - Saint Victrice de Rouen, apôtre de la Belgica Secunda.

    31

    Je viens d'indiquer des faits qui viennent à l'appui de la thèse de G. Kurth. D'un autre côtés, on peut-être assuré que si Carausius avaient installé des Barbares saxons dans les environs de Boulogne, les panégyriques n'auraient sans doute pas manqué de les dénoncer, au lieu d'aller chercher ses alliés jusque en Frise. Quant à la répartition des villages en -thun en deux rangées concentriques autour de Boulogne, j'ai indiqué plus haut la raison pour laquelle je crois que c'est une illusion d'optique. Ajoutons que la transformation sémantique qui a affecté le mot thun en vieil-anglais paraît assez tardive, ne pouvant guère être antérieure au VIème siècle (plus bas, p. 33. Les Saxons auraient donc observé pendant près de trois sièdes les emplacements attribués par Carausius ?

    B. Théorie de l'étape, ou de T. Hoops.

    Défendu par plusieurs auteurslc , elle a été notamment défendue par J. Hoops'°, lequel a découvert les phénomènes philologiques sur lesquels elle repose. Il y a, dit-il, dans l'anglo-saxon d'Angleterre, un certain nombre de mots d'origine latine qui désignent des objets d'usage courant, et dont la phonétique dénonce un emprunt très ancien, antérieur à l'invasion de la grande île. Ce sont, par exemple, biscop, stroet, persoc (pêche), cealc (chaux). De tels mots paraissent nécessiter, pour passer d'une langue dans une autre, plus que de simples relations commerciales, mais une vie côte à côte pendant un certain temps. Ils se retrouvent dans d'autres langues germaniques, ce qui suppose, un temps d'emprunt commun. Pour J. Hoops, ce terrain d'emprunt ne pouvant avoir été le Slesvig, il faut chercher ailleurs. Sur la foi du témoignage de Zo-zime'°', il le place sur le Rhin inférieur. Les auteurs qui ont adopté son point de vue y verraient une bande côtière allant de l'embouchure du Rhin à celle de la Canche, avec un maximum de densité dans le Boulonnais.

    F. Lote et J. Mansions' ont montré que ces arguments sont bien moins solides qu'ils n'y paraissent. Les phénomènes phonétiques latins sur lesquels s'appuie Hoopsll° sont mal datés, et peuvent n'être pas antérieurs au Vlème siècle. Il n'y aurait que 4 termes qui aient résisté à cette contre-épreuve philologique. Ce sont walnut (noyer) qui pourrait s'expliquer par des relations commerciales ; soeterdaeg (latin : sabbati dies), assimilation qui peut avoir été faite par un missionnaire érudit aussi bien en Allemagne qu'en Grande-Bretagne ; enfin cleofa ( latin : cubile) et miltestre (mere-trix), qui ne sont d'ailleurs employés que pour rendre des passages de la Bible. Un long contact avec la culture latine ne serait attesté que par les mots signifiant

    105 0. Bremer - Ethnographie der germanischen Stiimme; M. Schônfeldt - Historische Grammatika van bet Nederlands

    106 J. Hoops - Waldbkume und Kulturpflanzen in germanischen Altertum.

    107 Zozime, Histoires III, 5 à 8. Il raconte que les Saxons chassèrent les Francs de l'île des Bataves et furent soumis par Julien. Mais on sait le peu de créance que mérite cet auteur : dans un passage voisin, il confoncd les Saxonx avec les Quades.

    108 J. Mansion - Le problème saxon.

    109 F. Lot - Les migrations saxonnes en Gaule et en Grande-Bretagne

    110 Maintien de la tenue latine intervocale, de l'i bref, du c dur devant voyelle

    32

    "chambre" et "prostituée" ?

    On aurait sans doute tort de voir les Saxons se transportant en bloc d'un endroit défini à un autre endroit défini. Il suffit qu'un petit groupe d'émigrants soit venu de régions romanisées ; ou que de jeunes Saxons aient servi dans l'armée romaine11. Parmi les pirates germains qui ont conquis l'Angleterre, il pouvait y avoir des gens venus de régions autres que celles où l'on parlait "englisc" (l'ancêtre du vieil-anglais). On n'a pas le droit, écrit J. Mansion, de conclure d'une unité politique ou ethnographique à une unité de langage'l2.

    Cette théorie de l'étape laisse donc à désirer. Rien n'oblige à croire que ceux que les Romains appelaient "Saxons" (l'ensemble de pirates germains, qu'ils soient Angles, Jutes ou " Saxons" sensu stricto) n'étaient pas venus directement en Angleterre en venant d'Allemagne du Nord et du Slesvig. Quant à ceux qui vinrent un jour s'établir en Boulonnais et y fonder des villages en -incthun, on est sûr que la plupart d'entre eux parlaient "l'englisc" : le vieil-anglais.

    2. Arrivée tardive.

    A la différence des partisans d'une arrivée ancienne, lesquels sont en désaccord sur le lieu d'origine de la migration, ceux qui croient à une arrivée tardive la voient tous venir d'Angleterre : il s'agirait donc d'une très ancienne invasion anglaise en France. Cette théorie a été soutenue principalement par deux auteurs, I. Taylor et H. Ehmer, qui s'appuient sur des arguments très différents.

    A. Théorie de Ta Ior113

    Sa thèse est assez étrange, car tandis qu'il retarde l'occupation saxonne du Boulonnais, il recule le plus possible celle de l'invasion de l'Angleterre, remontant presque jusque à César. Ses arguments auraient donc pu servir indirectement à des auteurs tels que G. Kurth. Nombreux, ces arguments ne sont pourtant guère probants. Il avait, par exemple, découvert des Parisoi ("Parisoi") au Ilème siècle dans le Yorkshire, dans le district de Holderness (au nord de la Humber) ; il veut y voir des "Frisii", p aspiré valant f La plupart des autres auteurs, y reconnaissent une fraction de la tribu celtique des Parish, installée par ailleurs en Ile-de-France (Parisii a donné Paris, étant accentué sur le premier i, de même que Parisoi). Une semblable division géographique pour un groupe celtique n'est pas un fait isolé : avant d'apparaître en Gaule Cisalpine, les "Boii" avaient donné leurs nom à la Bohême ; les Atrébates, qui ont donné le leur à l'Artois, occupaient aussi le nord-est du Wessex ; les Ménapiens

    111 Ehmer - Scichsische Siedlungen.

    112 J. Mansion, op. cit. p. 13. Il illustre cet axiome de l'exemple frappant des Francs, dont les uns utilisaient un ancêtre du bas-allemand et du néerlandais, tandis que d'autres parlaient vieux haut-allemand. Le cas des "Saxons" est aussi probant, quoique en sens inverse : ont été appelés de ce nom, aussi bien des populations bas-allemandes (les "Saxons" soumis par Charlemagne) que des tribus parlant vieil-anglais.

    113 I. Taylor, 1882 - Words and Places, or Etymological illustration of History.

    33

    sont connus en Flandre et en friande, et les Tectosages à la fois dans les Cévennes et dans la partie "galate" (= gauloise) de l'Asie Mineure.

    I. Taylor conjecture que les pirates saxons se seraient installés dans le Boulonnais parce que Carausius les auraient empêchés de continuer à envahir la Grande-Bretagne. Pi appuie son raisonnement sur l'absence, dans la région boulonnaise, de noms en -ing, logiquement plus anciens que les noms en -incthun, alors qu'ils sont assez fréquents en Angleterre (cf. Hastings, Dorking...). Cette assertion repose sur une erreur. Le suffixe -ing apparaît en effet dans plusieurs noms de notre région, tels que Affringues (Saint-Omer, Lumbres), Autingue - proche de Landrethun-lès-Ardres, etc. (on en trouvera la liste dans le chapitre qui suit). Par ailleurs, je ne vois pas pourquoi les noms en -ing doivent être forcément plus anciens que les noms en -ing-thun.

    Si j'ai évoqué cette théorie, ce n'est pas pour sa solidité, mais plutôt pour l'influence qu'elle a exercé sur d'autres auteurs. Autrement sérieuse me paraît celle de H. Ehmer.

    B. Théorie d'Ehmer114 ; la "métaphonie en i", et les toponymes en -ingue

    Comme la théorie de Hoops, celle d'Ehmer repose sur un phénomène philologique ; avec toutefois cette différence que la sienne parait solide. Les noms saxons en -ing-tùn ne peuvent être antérieurs au Vlème siècle, dit-il, tant en France qu'en Angleterre, pour la raison suivante.

    Ces toponymes sont formés par la juxtaposition de ce suffixe composé à un nom d'homme, avec un sens voisin de "le tan du clan N". Ces noms propres sont pour la plupart reconnaissables, car on connaît assez bien l'onomastique des Saxons. Ces derniers, en particulier ceux du Wessex, ont écrit en effet très tôt dans leur langue. Suivis du i du suffixe, ces noms d'homme doivent avoir subi la métaphonie en ins (voir plus haut p. 10), à moins qu'ils ne soient postérieurs à cette évolution phonétique. Or cette transformation cessa son action à une date que l'on peut fixer, avec une assez bonne approximation, au voisinage de la fin du Vlème siècle116. Ce fait est à rapprocher de l'époque de l'invasion de la Grande-Bretagne par les Angles, les Jutes et les Saxons., invasion dont Bède la Vénérable rapporte qu'elle prit place à partir de 449 sous la direction des frères Hengist et Horsam.

    114 H. Ehmer, 1937 - Die sachsische Siedlungen auf dem franziisischen "littus saxonicum"

    115 Transformation vocalique des syllabes suivies d'un i ou d'un yod. Voir plus haut, p. 12.

    116 Les philologues se divisent sur cette question, les uns optant pour le début du Vième siècle, d'autres pour le début du VIIème. Karl Luick, dans sa monumentale Historische Grammatik der en-glischen Sprache, la place "dans le courant du VIème siècle et plutôt dans sa première moitié" Il est certain qu'elle est postérieure à la conquête de la Grande-Bretagne par des populations qui parlaient "englisc". En effet, le fleuve Sabrina devint Saefern (aujourd'hui Severn), Cantiis devint Cent puis Kent; en sens inverse, on sait qu'un des chefs de la conquête s'appelait Hangist : plus récent, il se serait appelé Hengest.

    117 Bède le Vénérable. Historia ecclasiastica gentis anglorum. On trouve, paraît-il, la même information dans une "Chronique anglo-saxonne", rédigée par des mains anonymes au plus tôt au VIIIe siècle

    34

    Les noms en -ing-tùn ont-ils subi la métaphonie en i ? Ehmer examine successivement ceux de France et d'Angleterre. En France, sur 36 toponymes examinés, 10 ne sauraient l'avoir, n'ayant que le suffixe simple -thunu18. Mais 19 ne la montrent pas, et 7 l'ont peut-être mais peuvent s'expliquer sans elle. Ce sont, selon Ehmer :

    Sans métaphonie :

    1 et 2. Audrethun et Audincthun : de Alda

    3. Baincthun : de Baga

    4. et 5. Colincthun et Connincthun : de Cola

    6. Florincthun : de Florus

    7. Godincthun : de Goda

    8. Hardenthun : de Heard

    9. Honnincthun : de Huna

    10 et 11. Les deux Landrethun : de Landric

    12. Olincthun : de 011a

    13. Todincthun : de Tota

    14. Tourlincthun : d'un abrégé de Tourlahom ?

    15, 16 et 17. Wadenthun, Waincthun et Warincthun (de Wada - peut-être, selon moi, de Waga pour Waincthun et de Wara pour Warincthun)

    18. Auquel s'ajoute Tardincthun, de radical inconnu, mais qui ne semble pas avoir subi la métaphonie, sa voyelle étant gutturale. Pourrait venir de Tardo, d'après de Loisne119

    Douteux :

    1 et 2. Alenthun (Ellingatum, Allingatum 1084), et Alincthun : de Alla ou Aella 3. Guipthun : de Guba ; mais Cubbingetum 1103

    4 et 5. Paincthun et Pélincthun : de Panno ou Falla ; mais Panningatum 1118 et Panniga-turn 1112

    6. Terlincthun (Telingetum 1208) : de Talla.., ou de Tella

    7. Verlincthun (Verlingtun 1173) : origine inconnue, peut-être une abréviation "Wern" de Wernbeald ou Wernbeorht ; sinon Waer + suffixe.

    En Angleterre, sur 131 toponymes examinés, 110 ne montrent pas de métaphonie en i (dont 58 sûrement pas), et 19 seulement l'admettent, mais peuvent s'expliquer sans elle. Les proportions sont donc les mêmes qu'en France. En conséquence, tant en France qu'en Angleterre les noms en -ing-tun sont postérieurs à ce phénomène phonétique, quoiqu'on puisse admettre que les plus anciens en soient contemporains. Ils ne sont donc pas antérieurs au Vlème siècle, et l'on peut même admettre que la majorité en date du VIIème siècle, voire du VILIème.

    Ehmer a fait subir une contre-épreuve aux noms anglais en -ing, considérés comme étant plus anciens. Effectivement, sur 42 noms examinés de l'autre côté de la Manche, il n'y en a que 9 qui n'aient sûrement pas subi la métaphonie en i : 1/5 au lieu de 1/ 2 pour les noms en -ing-ticn - alors qu'une dizaine la présentent "avec une grande certitude". Il n'a pas fait la même recherche sur les noms en -ingue de ce côté-ci du Pas-de-Calais ; peut-être ignorait-il leur existence. Personnellement, sur 16 noms en -ingue dans la région du maximum de densité des noms en -thun, j'en ai

    118 Baudrethun, Fauquethun, Fréthun, Offrethun, Raventhun, Rocthun, Semblethun, Sombrethun, Witrethun, Zeltun.

    119 A. de Loisne - La colonisation saxonne du Boulonnais ,p. 10

    35

    trouvé 6 qui ne la présentent sûrement pas, 2 qui peuvent effectivement l'avoir subie, et 8 incertains. Il est vrai que les résultats peuvent -être tant soit peu faussés par la présence de noms flamands en -ingue (cf. Poperinge en Belgique, Flessingue aux Pays-Bas). Les voici ci-dessous :

    Liste des toponymes en -ingue Apparemment sans métaphonie :

    1. Affringues (Saint-Omer, Lumbres) - Hafferdinges 1182 et Arfrenges 1186 : de Arfra, Aerfre

    2. Aingues, lieudit du Portel (Boulogne, Le Portel) - Aingues 1389

    3. Autingues (Saint-Orner, Ardres) - Altenges 1084, Altinges 1122 : de Atta

    4. Bonningues-lès-Ardres (Saint-Orner, Ardres) - Bovengia 1069, Boninges 1084: de Beova ou Beonna

    5. Bonningues-lès-Calais (Calais, Calais Nord-Ouest) - Bonigues 1153, Boninghes 1084 : comme le précédent

    6. Haffreingue : écart de Saint-Etienne au Mont (Boulogne, Samer) - Hafrengues 1231 : cf. n° 1.

    6. Hazuingue : fief à Réty (Boulogne, Marquise) - Asewinche 1157, Hasewinkel 1286, Has-sengues XVème siècle

    7. Hollingues : fief à Nordausques (Saint-Orner, Ardres) - Hollinghes 1452

    8. Noir-Bonningue : fief à Bazinghen (Boulogne, Marquise) - Nort-bonningues XIIlème siècle

    9. Rabodinghes : fief, à Wisques (Saint-Omer, Lumbres) - Rabodenghes 1370... Raboudin-ghes 1456

    10. Rabondingue : fief, à Zudausques (Saint-Orner, Lumbres) - pas de forme ancienne 11 La Wambringue : hameau d'Audembert (Boulogne, Marquise) - La Wameringue 1709

    Pouvant avoir subi la métaphonie :

    1. Beussingue : écart de Peuplingues (Calais, Calais Nord-Ouest). De Bosa ? On pourrait considérer ce toponyme comme ayant sûrement subi la métaphonie, si son ancienne forme Bissingehem (1084) n'était explicable par Bisi. Cependant, il n'est pas facile d'expliquer la transformation de Bissingehem en Beussingue en picard.

    2. Leulingue : hameau de Saint-Tricat (Calais, Calais Nord-Ouest). Leulingue 1584. De Lul, Love!.

    ? Peuplingues : voir ci-dessous

    Incertains :

    1. Aubingue : fief à Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Hoilbinghes 1480

    2. Audingue : ferme à Bazinghen (Boulogne, Marquise) - pas de forme ancienne

    3. Gontardinghes : ancien nom de Pontardennes ou Gondardennes, hameau de Wizernes (Saint-Omer, Saint-Orner Sud) - Guntardinges 1227, Gontardinghes 1399

    4. Herquelingue : hameau d'Isques (Boulogne, Samer), distinct du précédent - Hel-keninges 1208 : de Hereca

    5. Peuplingues : fief à Outreau (Boulogne, Outreau) ; Le son ce peut venir de o par méta-phonie, mais je n'ai trouvé aucun nom saxon qui corresponde.

    6. Peuplingues (Calais, Calais Nord-Ouest). Ce Peuplingues-ci - le plus important des deux - a commencé par s'appeler Peuplinghem (6 textes entre 1069 et 1179). Il n'est "Peu-plingues" que depuis 1254, aussi vaut-il sans doute ne pas le retenir.

    7. Poulaingue : fief à Zutkerque (Saint-Omer, Audruicq)

    8. Questelingues : lieudit d'Outreau (Boulogne, Outreau)

    9. Rebertingue : hameau de Réty (Boulogne, Marquise) - Rumertenges 1286, Robertengue 1492

    10.

    36

    Relingues : fief à Delettes (Saint-Omer, Lumbres)

    11. Relingues : fief à Lillers (Béthune, Lillers) - Relengue 1298, Relenghe XIIIème siècle, et Relingue 1660

    12. Sevelingues : hameau d'Essart (Béthune, Béthune Est)) - Seveleng 1152, Sevelenges 1354

    13 Wilbedingue : hameau de Wavrans-sur-l'Aa (Saint-Orner, Lumbres) - Hilbudemghen 1119, Hebeldingehen 1157, Wilbodinges 1175

    14. Wulverdinghe (dépt. du Nord ; Dunkerque, Bourbourg : à une douzaine de kilomètres au nord de Saint-Omer)

    - j'exclue Hermeringues/Hermerangue (hameau d'Isques ; Boulogne ; Samer) à cause de l'hésitation sur sa finale - Hermerenges 1112, Hermarenghes 1199. A vrai dire, il pourrait éventuellement s'expliquer par Haram métaphonisé si ce prénom, dans les textes vieil-anglais, n'était toujours porté par des Scandinaves

    De ces considérations philologiques, Ehmer tire la conclusion suivante : puisque la colonie saxonne du Boulonnais nous est connue par les noms en -incthun, et comme ceux-ci sont postérieurs au début du Vlème siècle, l'invasion saxonne ne peut être antérieure à cette date.

    Pour bien saisir le sens de ce raisonnement, il faut bien voir qu'Ehmer n'envisage que deux théories ; celle de Hoops qu'il veut réfuter (invasion venue du Pas-de-Calais vers la Grande-Bretagne) et l'inverse, qui devient sa propre théorie : invasion venue de la Grande-Bretagne en direction du littoral boulonnais. A priori, écrit-il, avant toute recherche phonétique, trois cas étaient à envisager :

    1) Les noms des villages français en -incthun avaient subi la métaphonie en i. Alors la théorie de Hoops était admissible, ces villages ayant pu avoir été fondés avant l'invasion saxonne en Grande-Bretagne.

    2) Les noms français ne la montraient pas, mais les noms anglais la montraient. Il était possible alors que les localités françaises aient été fondées avant l'invasion et la métaphonie, leurs homologues anglaises après. Même conclusion que précédemment.

    3) Ni les unes ni les autres ne présentaient la métaphonie. La formation en -ing-tùn est donc spécifiquement anglo-saxonne et insulaire, puisque postérieure à l'invasion. Si donc on trouve en France des noms de lieux en -incthun, ils ne peuvent avoir été apportés que par une invasion anglaise, en provenance de la grande île, invasion très ancienne puisque antérieure à la métaphonie en i.

    Ehmer a cherché d'autres témoignages. Il pense en avoir trouvé un dans un texte de Procope, dont à vrai dire il ne conteste pas le peu de valeur dans l'absolu, mais qu'il juge intéressant de comparer à ses résultats philologiques. Dans ce texte, Procope fait mention de migrations d'Angles, de Frisons et de Bretons, en provenance de la grande Ile et venant s'installer chez les Francs, avec la permission de ceux-ci, dans les terres les plus désertes... Il ajoute que, chaque année, le roi franc, "par respect",

    120 Procope -"YITEp TWV TtOXE1.AWV, t. VIII, 20. " BpLTTLIXv 5E TnV vricrov EBvn TpLIX

    TTOXUO(VBpwTTOTOETIX, paCTIXEUÇ TE EIS IXUTWV EKO(OTW E(pEOTrjKE. KIXL OV0pOrra KELTIXI TOIS E8VE01 TOUTOLÇ AyytXOU TE I(IXL (bpLO'0'OVES KOU 01. Tri Vri6W OI.IWVUtAOL BpITTOVES. TOOEO(UTrj SE r) TWVSE TWV eerjwv TTOXuavepWTTLO( (P XLVETIXLODUIX WOEE 0(VIX TTIXV ETOS KIXTIX TTOXXOU[ EOî9EV8e I.IETIXNLOTO(IIEVOL C,UV

    37

    envoie quelques Angles à l'empereur Justinien, avec quelques uns de ses antrustions.

    Quant aux témoignages, il n'en voit pas un seul pour lesquels on puisse affirmer une antiquité très haute ; il est d'ailleurs facile, dit-il, de s'appuyer sur le type kantien de la broche d'Hardenthun pour étayer l'hypothèse d'une invasion venue d'Angleterre.

    Toutefois, si ses résultats philologiques paraissent très solides, ses condusions le sont moins. Il lui paraît aller de soi qu'une innovation linguistique survenue d'un des deux côtés du Pas-de-Calais ne puisse avoir eu lieu pareillement de l'autre côté du détroit : celui-ci serait un obstade, non un lien ; or on sait que la mer unit autant qu'elle sépare. Trente-et-un kilomètres de détroit auraient donc suffi, selon Ehmer, à assurer une coupure linguistique entre les Anglo-saxons d'Angleterre et ceux de France, alors qu'en Grande-Bretagne, entre le Kent et le Northumberland, six cent kilomètres n'y ont pas suffi ? Durant toute l'antiquité, les Saxons sont considérés comme un peuple qui vit sur l'eau (cf. plus haut, p. 8, le portrait qu'en trace Sidoine Apollinaire). C'est cette précondition, nécessaire à la théorie d'Ehmer, qui ne me paraît pas s'imposer de façon absolue. Pourquoi une innovation linguistique survenue d'un côté du détroit ne pourrait-elle, en aucun cas, être apparue en même temps de l'autre côté ?

    Nous avons vu plus haut (p18) qu'il existe dans les noms de lieux en -brique (qu'Ehmer n'avait d'ailleurs pas repérés) au moins un cas de métaphonie en i (Estiembrique ; et peut-être Dyébrighes) . Si je ne me suis pas trompé dans mon analyse desdits noms en -brique, elle vient contredire ce que notre auteur avait tiré des noms en -ing-tùn. Ce qui me paraît le plus probable, c'est que :

    1) Des deux côtés du détroit, les noms en -ing-tùn sont tardifs et, pour la plupart sinon tous, postérieurs à la métaphonie en i.

    2) Ladite métaphonie est intervenue, aux environs du Vlème siècle, des deux côtés du Pas-de-Calais. Le plus vraisemblable est qu'elle soit intervenue de façon simultanée en Boulonnais et dans le Kent ; mais un léger décalage ne me gênerait pas.

    Même si nous acceptions l'hypothèse de Kurth selon laquelle des Saxons se seraient installés dans notre région à la fin du Vème siècle, d'autres Saxons occupant plus tard l'Angleterre, on peut admettre que chez ces deux peuples de même langue et se faisant face, l'évolution linguistique ait été parallèle, et que la création de noms en -ing-tùn y soit apparue pareillement. Je ne crois pas que l'on puisse utiliser l'argument philologique pour établir l'origine de l'invasion saxonne.

    Quant au texte de Procope, il prête le flanc à bien des critiques. Cet auteur affectionne les jolies histoires, sans accorder grande importance à leur authenticité. Il a suffi qu'il ait eu vent de l'existence de colonies saxonnes en pays franc (Nantes,

    yUVIXI I KIXl TIIXIOIV ES OpayyOUÇ KWPOUOIV. OI SE 0(UTOUS EVOIKICO0O1V ES ynç Tns vc)ETEPIXÇ TfV EPf pOTEP0(V SOKOOTOEV EIVIXI, KIXl IXTt'IXUTOU T f V V fO'OV lTpOOTCOlElaeal (Da6IV"

    38

    Bayeux, Boulogne), pour qu'il ait pu l'expliquer de cette façon ; les migrations frisonnes qu'il évoque ne correspondent à rien qui soit connu par ailleurs ; quant à celles des Bretons, personne ne soutiendra qu'elles ont pris place avec la permission des Francs. Ajoutons que, ni le Bessin ni le Boulonnais ne sont des terres déshéritées : il aurait donc fallu que les habitants de ces deux régions aient été auparavant massacrés, ce qui commence à faire beaucoup de conjectures. A la "polyanthropie" manifestée en Grande-Bretagne (c'est le termes qu'utilise Procope) aurait donc fait pendant une oliganthropie sur le continent ? On ne voit pas trop pourquoi.

    L'argument archéologique concernant la broche d'Hardenthun n'est pas beaucoup plus solide. Ce bijou peut être un vestige d'une invasion kantienne en Boulonnais, comme il peut tout aussi bien refléter l'intensité d'anciennes communications de part et d'autre du détroit.

    Enfin, la théorie d'Ehmer présente le défaut sérieux de séparer la colonie saxonne du Boulonnais de celles de Nantes et de Normandie, connues l'une et l'autre dès le milieu du Vème siècle. Dans ceux de l'embouchure de la Loire Ehmer voit de simples bases de pirates, et non des établissements d'agriculteurs installés là avec femmes et enfants. Il a probablement tort, puisque on les y trouve encore à la fin du Vlème siècle, le poète Fortunat évoquant leur conversion au christianisme par l'évêque de Nantes (voir plus haut, p. 8-9). H. Ehmer ignorait ce texte.

    En ce qui concerne les Saxons de Bayeux, Ehmer ne sait s'il faut les assimiler à ceux de Boulogne ou à ceux de Nantes. Il y a pourtant près de Bayeux trois noms en -tun, mais tous trois ont la même forme, "Cottun" et l'on n'y rencontre pas -incthun. On y trouve aussi des noms en -brique, le plus souvent d'ailleurs en composition du type "Bricquebec" (voir plus haut, chap. II, 1, B, p.14), mais Ehmer ne les avait pas repérés. Le tout, joint au texte de Grégoire de Tours (cf. plus haut, p. 9) laisse supposer une assez forte densité. En dépit de l'absence de noms en -incthun, le plus vraisemblable me parait d'atLtibuer des dates comparables à l'arrivée des Saxons, tant en Bessin et dans les environs de Nantes ou de Boulogne ; la principale particularité de cette dernière région ayant été d'y voir la colonie saxonne persister plus longtemps qu'ailleurs, en union sans doute plus étroite avec l'Angleterre, et ayant perduré jusqu'à l'époque de la formation des noms en -incthun.

    De toutes les théories qui ont été proposées, celle d'Ehmer est la plus solidement étayée et la plus scientifiquement construite ; elle ne me satisfait pourtant pas.

    Mais alors, d'où sont venus les Saxons du Boulonnais, et à quelle époque ?

    2. Essai de solution.

    Malgré sa modestie, ce titre est encore trop hardi. Avec les sources dont nous disposons actuellement, cette question ne peut pas recevoir de réponse certaine, ni même très vraisemblable. Néanmoins, nous possédons quelques éléments qui

    39

    peimettent d'envisager un certain nombre de possibilités.

    A. Lieu d'origine.

    Sur le lieu d'origine, trois hypothèses sont en présence : invasion venue d'Angleterre, migration arrivée par terre d'Allemagne du Nord (théorie de l'étape), et enfin occupation du Boulonnais par des marins "saxons" en même temps qu'ils s'installaient en Grande-Bretagne (voire un peu avant). Aucune de ces trois conjectures ne peut être rejetée à coup sûr. Les deux premières, toutefois, manquent d'arguments vraiment solides. Ehmer, après Lot et Mansion, a fait justice de la théorie de l'étape, mais malgré ses efforts n'a pas pu établir sur des bases bien assurées celle de l'invasion anglaise.

    Reste la troisième hypothèse qui, à défaut d'argument dirimant, a l'avantage d'être la plus vraisemblable a priori. Qu'un peuple qu'on nous décrit comme essentiellement marin ait commencé par arriver par voie de terre des côtes du Jutland à celles du Boulonnais, cela paraît quand même bizarre. Occupés comme on sait, avec bien des difficultés, à vaincre la résistance des populations brittoniquesl2l, qu'ils aient dispersé leurs efforts en expédiant tardivement un rameau occuper le Boulonnais, n'est-ce pas curieux ? S'il est permis d'assimiler les Chauques au Saxons (voir plus haut chap. I, 1), on voit, depuis le premier siècle de notre ère, l'Allemagne du Nord et le Jutland nourrir des populations qui s'adonnent à la piraterie. Ces navigateurs ne se bornent pas à infester l'Océan, ils pillent les côtes, remontent les fleuves, cela, nous dit-on, plus encore en Gaule qu'en Grande-Bretagne. N'est-il pas vraisemblable qu'ils aient installé quand ils le pouvaient des bases, des relais - à l'image de ce que feront les Normands près de mille ans plus tard. A la faveur des circonstances, certains de ces relais ont pu se muer progressivement en colonies, plus ou moins éphémères, mais pouvant parfois devenir de vrais centres de peuplement. Ce que je viens d'exposer est un peu plus qu'une conjecture : nous assistons sur le vif à ce processus dans le cas de la colonie saxonne des Îles de la Loire : vers 465 ils attaquent Angers, un siècle plus tard ils se convertissent au christianisme.

    Si seule la Grande-Bretagne est devenue - en partie - l'Angleterre, c'est sans doute par suite de causes indépendantes, au premier rang desquelles l'absence d'autres envahisseurs germaniques. Les Anglo-Saxons n'ont pas conquis la Grande-Bretagne en une seule bataille, comme le fit plus tard Guillaume de Normandie. ils arrivèrent en petits groupes au cours d'un siècle, non pas "vers l'Angleterre", mais vers les terres bonnes à prendre plus loin en mer. Boulogne, Bayeux, Nantes répondaient à leurs desiderata aussi bien que l'archipel britannique. Reste à savoir à quelle époque.

    B. L'arrivée des Saxons

    Si l'on admet l'hypothèse formulée ci-dessus, on est amené à envisager que la ré-

    121 Rappelons qu'un siècle après le début de l'invasion, ils n'avaient pas encore dépassé une ligne allant de l'embouchure de la Tweed à Salisbury (plus haut, p.8-9)

    40

    gion boulonnaise a été conquise en même temps que l'Angleterre. Des difficultés pourtant se présentent. Bien qu'une tradition respectable propose une date précise, à savoir 449 (ci-dessus,pp. 8 et 33, ainsi que la note 116), il est fort possible que la conquête ait commencé petitement à une date plus ancienne ; d'autre part, on sait que les différentes régions de l'île n'ont pas été conquises en même temps. Par ailleurs, certains indices pourraient faire conclure à une antiquité plus grande pour le Boulonnais.

    Rappelons que Notifia Dignitatum, rédigée aux environs de l'an 400, parle d'un "rivage saxon" ("littus saxonicum ") - expression qui n'est pas univoque - et y place "Marris", qui a un nom germanique. Nous avons vu plus haut (chap. 29 III, 1, A, p. 29) qu'il semble bien y avoir eu des Geintains dans notre région dès le IVème siècle, et que ces derniers n'étaient pas des Francs (voir plus loin « Epilogue »). Le Boulonnais aurait-il été colonisé avant la grande île ? Pourquoi pas ?... mais, d'un autre côté, pourquoi n'y aurait-il pas eu quelques poignées de Germains en Angleterre bien avant Hengist et Horsa ? il y a eu des auteurs pour le soutenir (cf. plus haut, chap. III, 1, B p. 31).

    En sens inverse, associées à des bijoux d'allure germanique, le cimetière de Ver-lincthun et d'Hardenthun ont livré des monnaies assez tardives. Citons, à Verlinc-thun, un triens particulièrement bien daté. A l'effigie de Julien l'Ancien, (518 à 527), il porte au verso l'inscription :

    VICTORIEAUGG

    Plus d'un Auguste : cela suppose un Auguste associé ; la chose est arrivée du 1er avril 527 au 1er août de la même année, date de la mort de Justin. Ledit Auguste associé était son neveu, le grand Justinien.

    Encore plus récent, un triens du cimetière d'Hardenthun porte l'inscription : CHAR.IVIVNDV

    C'est le nom d'un monétaire de la seconde moitié du VIlème siècle.

    En résumé, mon hypothèse est que le Boulonnais et ses environs immédiats ont vu - comme peut-être la Grande-Bretagne - arriver quelques Anglo-Saxons dès l'époque du Bas-Empire romain ; l'essentiel de la colonisation s'étant faite, toutefois, au Vème siècle et peut-être encore au début du VIème.

    41

    IV. Histoire des Saxons du Boulonnais

    après l'invasion.

    En l'absence de textes, l'existence de notre micro Angle-Terre n'est avérée que de façon indirecte. Il est donc difficile de reconstituer son histoire. Aussi ne peut-on guère faire mieux que passer en revue les problèmes qui se posent, trop heureux de pouvoir hasarder des hypothèses dans les cas les plus favorables.

    1. Extension maximale.

    Il

    n'est pas certain que cette extension maximale coïncide exactement avec celle de la répartition des noms en -thun : nous avons vu que l'époque de la création de ces toponymes est relativement tardive : on pourrait même admettre que la majorité en date du VlIème siècle, voire du VIIIème siècle (plus haut, p. 31). On ne peut donc exclure l'idée qu'à cette date, la colonie saxonne ait déjà dépassé son apogée. C'est un peu l'impression que donnent les colonies de Nantes et de Bayeux ; il pourrait en être de même de la nôtre.

    Si l'on imagine que le suffixe -tun a précédé dans le temps le suffixe composé -ing-tun - ce qui n'est que plausible - il peut être intéressant d'en observer la répartition (cartes n° 6 à 9). Un problème se pose toutefois en ce qui concerne six noms terminés par "-inthun" ou "-enthun", sans la gutturale c ou g: à savoir

    Toponymes en -inthun ou -enthun '

    Albinthun - Albinthon ou Albincthon 1769"

    Alenthun - Elingatum 1084, Allingatum 1119, mais Allantun XVIIIème siècle)

    Audenthun - Hodingentun 1200 mais Odenten 1401 ; à nouveau Audincthun 1623-1634 puis Odinthun 1739

    Hardenthun - Hardentuna 1208, Harlentun 1305

    Raventhun - Raventum 1084, Raventun 1208, Ravetun 1340

    Wadenthun - Wadingatun 1084 Wadingetuna 1208

    Quatre d'entre eux présentent d'anciennes formes en ing, avec toutefois un certain flottement pour Albinthun et Audenthun. Doit-on les assimiler aux toponymes en -incthun ? Mais alors, comment ont-ils pu perdre leur gutturale ? Il n'est pas défendu d'imaginer aussi des particularités orthographiques, effets de scribes ayant subi la contamination des noms en -incthun...

    Un coup d'oeil sur les cartes n° 6 et 8 montre une petite différence de répartition entre les noms en -thun seul et ceux en -incthun seul : ces derniers sont plus occidentaux, ils tendent davantage à se regrouper derrière la côte. Quant aux noms en -in-thunl-enthun (cartes 7 et 9), ils tendraient, me semble-t-il, à accompagner ceux en -thun seul plutôt que ceux en -incthun. De toutes manières, ces différences sont trop faibles pour que l'on puisse en tirer grand chose en ce qui concerne l'histoire des

    42

    Saxons du Boulonnais.

    D'un autre côté, rappelons que les noms en -inghem peuvent être tous saxons. Très nombreux en Angleterre, ils ne sont représentés en France que dans une petite partie du territoire national, la plus voisine de la région boulonnaise, de surcroît centrée sur l'aire de répartition des noms en -thun. On observe une extension supérieure à celle de ces derniers. Paradoxalement, la difficulté vient ici du très grand nombre des noms en -inghem (cartes 14 et 16) : il vont si loin qu'il devient difficile de les attribuer tous à la présence sur place de colonies d'Anglo-Saxons. Celle-ci eût été si vaste, qu'on a du mal à imaginer qu'elle ait pu autant prospérer, sans qu'aucun texte n'en ait fait mention. Peut-être s'était-il agi d'une simple influence, presque d'un effet de mode, sur des populations franciques voisines ?

    Quoiqu'il en soit, là où se rencontrent des noms en -thun ou en -incthun, on trouve toujours dans leur voisinage des noms en -inghem : cartes 16 et 17.

    2. De quel groupe ethnique s'agit-il au juste Angles, Jutes ou Saxons sensu stricto ?

    Jusqu'à présent, nous n'avons pas essayé de les distinguer, vu qu'ils parlaient à peu de chose près une même langue : l'englisc, langue non écrite, ancêtre du vieil-anglais, lequel nous est connu par quelques textes, notamment l'épopée du Beowulf. Lors de la conquête de la Grande-Bretagne, les trois peuples nommés plus haut se sont partagé la grande île ; Bède le Vénérable nous en précise la répartition.

    Quid du Boulonnais ? Vu la proximité du Kent, et les rapports étroits évoqués plus haut entre les deux côtés du détroit (chap II, 3, A), on penserait naturellement aux Jutes, puisque c'est à eux que Bède attribuait le Kent.

    Par ailleurs, des Angles semblent intervenir dans la toponymie. Il existe en effet deux hameaux, dont l'un s'appelle "Inglebert" (Le mont de l'Angle ?), et l'autre In-glinghem (Habitation du clan de l'Angle)ln Cela dit, pour que l'on éprouve le besoin de remarquer la nationalité de ces hameaux, il faudrait évidemment que la population qui a procédé à ce baptême ait été d'une autre origine : Jutes ? Francs ? - dans ce dernier cas, ces hameaux auraient reçu leurs noms très tard, à une époque où l'en-glisc était en train de disparaître. On ne peut pas tirer grand chose de ces indices, sinon l'impression que les Jutes (si c'est bien d'eux qu'il s'agit) n'étaient pas les seuls Anglo-Saxons dans le Boulonnais.

    En dépit de la communauté de langage existaient cependant de menues différences dialectales. Par exemple, les Saxons, et sans doute aussi les Jutes, brisaient l'a du verbe waldan (commander ; allemand walten, anglais to wield), contrairement aux Angles : ils en faisaient wealdan. Or ce verbe semble bien apparaître en toponymie,

    122 Le pays de l'Angle, dans le canton d'Audruicq au nord de Saint-Omer, ne nous concerne pas. Il est appelé "Hooc" en flamand (cf. néerlandais hoek : angle, crochet ; allemand Haken : crochet) : "An-gulum quod dicitur Hoec" en 1242.

    43

    notamment dans "Dirlincthun" (Diorwaldingathun 865 ; Calais, Guines), et aussi dans Vaudringhem (Vualdringahem 867 ; Saint-Omer, Lumbres). On n'y constate pas de fracture : cela fait donc pencher en faveur des Angles. Remarquons toutefois que le scribe audomarois, écrivant en latin et pouvant très bien être de langue maternelle francique, peut parfaitement n'avoir pas noté la fracture du verbe wealdan, si même il l'avait entendue, ce qui n'est pas sûr.

    On voit que la question est difficile. On a un peu l'impression d'un mélange - c'est peut-être, aussi, d'ailleurs, ce qui se passait parfois en Angleterre. On ne connaît pas la valeur exacte de la distinction établie jadis par Bède le Vénérable.

    3. Comment les envahisseurs ont-ils pénétré la région?

    La majorité des toponymes en -thun et -incthun se regroupent dans la fosse boulonnaise, un petit nombre escaladant au nord la cuesta. Un autre groupe, beaucoup moins dense, se manifeste dans l'arrondissement de Saint-Omer, au voisinage de la Hem, de l'Aa et de la haute Lys. Entre ces deux groupes s'étend une région à peu près vide. Cela doit vouloir dire quelque chose, mais quoi ? On trouve, sur les plateaux crayeux, un certain nombre de lieux dits "Le Wast" ou "La Wastine" (mot qui s'applique à des terrains médiocres, voire incultes ou même inhabités). Est-ce à dire que la colonisation saxonne tendit à éviter les plateaux ? Peut-être, du moins en ce qui concerne les lieux d'habitation. Cette impression s'atténue beaucoup si, aux noms en -thun, on associe sur une même carte ceux en -brique et en -ness. Elle disparaît tout à fait si l'on considère la répartition de ceux en -inghem. Même si ces derniers ne sont pas tous saxons, ils remontent en tous cas au Haut Moyen-Age, à une époque où l'on parlait des langues germaniques dans la région qui nous occupe. Il serait intéressant d'examiner, toponyme par toponyme, comment se répartissent dans le relief les noms germaniques (plutôt dans les vallées ?) et les noms romans médiévaux (plutôt sur les plateaux ?). Ce serait un autre travail. Pour se borner à la vallée d'un affluent de l'Aa, le Bléquin, on trouve au voisinage de la rivière et de ses tributaires les villages et les hameaux de Bléquin, Ledinghem, Floyecques, Vaudringhem, Nielles, Laërt et Af-fringues : la plupart sont germaniques, Floyecques et Nielles faisant exception. Sur les plateaux : Watterdal, Le Mesnil, Drionville, Marie-Val, Cantemerle, Saint-Pierre : seul Wattterdal est gemanique. A quelques exceptions près dans chacune de ces deux listes, la première renvoie à la période des grandes invasion, la seconde aux défrichements du Moyen-Age.

    II n'apparaît d'association particulière, ni avec les principaux cours d'eau, ni avec les voies romaines. On aurait pu s'attendre à ce que ces hardis marins aient manifesté une préférence pour les rivages. C'est le contraire que l'on constate. Sur une douzaine de toponymes sûrement saxons le long de la côte, tous se tiennent à bonne distance de la mer. Le plus proche, Terlincthun (hameau de Wimille ; Boulogne, Bou-

    44

    logne Nord-Est) en est à un bon kilomètre, perdu derrière la falaise. D'autres noms de lieux germaniques (Sangatte, Wissant) peuvent aussi bien être d'origine fran-cique123 ; c'est sûrement le cas d'Audresselles (ci-dessous, chap. IV, 4, même page).

    On peut penser qu'A l'époque de la mise en place des établissements saxons, les questions de sécurité primaient-elles : par mer pouvaient arriver d'autres pirates. Ils étaient bien placés pour le savoir.

    4. Comment a disparu la colonie saxonne ? - toponymes en -zelle, en -brouck et en -bègue

    Plus précisément : comment s'est résorbé le rameau qui chez nous parlait "en-glisc" , cet ancêtre du vieil-anglais. Ce ne sont pas les gens qui ont disparu : pareille extermination aurait laissé des traces écrites. Les habitants de notre région ont simplement changé de langue.

    Sont-ils passé directement de l'englisc au roman ? Dans une partie au moins de l'aire qu'ils occupaient, ils sont sûrement passé par le francique, cette autre langue germanique qui est à l'origine du flamand. Ce fut le cas notamment de la région de Saint-Omer, qui n'a parlé picard - puis français -qu'à partir du XIlème siècle. On peut reconnaître plusieurs toponymes saxons, notamment en -ness et en -brique (cartes 10 et 12), au delà de ce qui fut, au Xlème siècle, la limite entre dialectes romans et germaniques (carte n° 2).

    Au sein même de l'aire d'expansion de notre anglo-saxon s'observent une commune et quelques hameaux, dont les noms, germaniques, sont d'apparence francique. Ils sont en effet composés du mot "Selle" (en suffixe : -selle ou -zelle), qui paraît désigner une habitation seigneuriale par opposition au bain, village de paysans121. Selle, en toponymie, est très commun en Flandre et dans le Brabant alors qu'il n'a jamais été rencontré avec certitude en Angleterre. Propre au francique salien, il est exceptionnel en territoire ripuaire. Parmi les toponymes évoqués ci-dessous, l'un d'eux, Audresselles, présente d'ailleurs une caractéristique morphologique du francique : l'r de flexion au nominatif singulier, r qui n'existe pas en vieil-anglais : Audresselles - Older seele - est le "vieux manoir", comme Audruicq, autre toponyme francique - 01-der wick - est le "vieux bourg" (Saint-Omer, Audruicq). On peut y adjoindre Audre-hem (Saint-Orner, Ardres : "le vieux village").

    Voici la liste des toponymes en selle-zelle, en se limitant bien entendu à l'aire qui fut par ailleurs plus ou moins saxonisée. Les toponymes de ce genre fourmillent au delà de l'Aa, dans la partie flamande du département du Nord. Dans notre région, on

    observe que ce suffixe prend la foi me -zelle après une voyelle ou une consonne so-

    123 Sangatte : La porte du sable "Arenae foramen, vulgo Sant-Gata" au XIIième siècle ; quant à Wis-sant : probablement "Le sable blanc" : "Whit-Sant".

    124 C'est le sens du mot sala en latin médiéval (dérivé de cella ?). Son dérivé saliens s'applique aux Francs "Saliens".

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    pore, -selle à l'initiale ou après une consonne sourde - Audresselles et Strasselles paraissant faire exceptions.

    Toponymes en -selle ou zelle

    1. Audresselles (Boulogne, Marquise) - Odersele 1150, Odressele 1208

    2. Fauquezelle : ancien hameau de Clerques (Saint-Orner, Ardres) - Fauquezelle 1467

    3 Floringzelle : hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Floringesele 1107

    4 Framezelle : également hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Flamersele 1198, Flamezelles 1248

    5. Framezelle : fief à Fruges (Montreuil, Fruges) - Framerselle 1759

    6. Haringzelle : encore hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Haringzelle 1480

    7 Hinguezele ou Linguezele : lieu-dit de Quelmes (Saint-Orner, Lumbres) - Henguezele 1411

    8 La Seille (sous réserve ; je la cite, sans plus, à cause de ses anciennes formes) : fief à Baincthun (Boulogne, Boulogne Sud) - Celles 1208 ; Celle 1285

    9. Selles (Boulogne, Desvres) - Selae 826

    10. Selles : hameau d'Audresselles (Boulogne, Marquise) - Selles 1208

    11. Strasselles : fief, à Rackinghem (Saint-Omer, Aire)

    12. Vincelles : écart de Bazinghen (Boulogne, Marquise) - Strasse11759

    13. Waringuezelle : encore hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Waringuezelle 1456

    14. Watrezelle : écart de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Westrezelle 1525

    A cette liste, il n'y a sans doute pas lieu d'ajouter les "La Salle", dont on sait qu'on en trouve dans toute la France ; dans le Pas-de-Calais on en rencontre un peu partout, aussi bien autour d'Arras qu'aux environs de Boulogne.

    Sur cette dizaine de toponymes en selle, -zelle, une demi-douzaine forme un groupe compact, en arrière du cap Gris-Nez : dont quatre hameaux de la seule commune d'Audinghen. S'agirait-il d'un hasard ? D'après G. des Maretzt26 il existe d'autres exemples de pareils groupements, toujours aux frontières du pays salien. Cet auteur propose d'y voir des sortes de postes frontières, affermissant des conquêtes et protégeant l'arrière-pays contre les contre-offensives de l'ennemi. Pourquoi pas ? notre petit groupe de villages pénètre comme un coin au coeur de la colonie saxonne...

    A ces noms francs on peut évidemment ajouter les sites de ponts en "brouck", puisque dans notre colonie saxonne les sites de ponts sont en -brick, -brique (plus haut, chap. II, 1, B) p.14. -Brouck est presque aussi fréquent que -brique, avec une répartition naturellement plus orientale (cartes 12 et 13) :

    Toponymes en -broucq

    1. Ambrouck fief à Audinghen (Boulogne, Marquise) - pas de forme ancienne

    125 Cette constation me permet d'exclure (à tort ou à raison) une dizaine de toponymes, d'ailleurs situés pour la plupart en dehors de notre région. A savoir : 4 "Courcelles" (respectivement" : fief à Béalencourt, à T"mques, Verquin et Noeud-les-Mines, et hameau de Rollencourt), 1 Courcelles-le-Comte", 2 "Estracelle" (ferme à Aire et écart de Beuvry). "Frammeselle", lieudit d'Amettes (Béthune, Auchel) pourrait être une variante orthographique ; mais elle est, elle aussi, assez éloignée de la zone qui nous occupe. Peut-être aurais-je dû garder deux "Maisoncelle" ; mais elles sont passablement excentrées : l'une est près d'Arras et l'autre de Hesdin (hameau de La Capelle)

    126 G. des Maretz - Le problème de la colonisation franque et du régime agraire en Belgique.

    2.

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    Aubrouck : hameau de VVisques (Saint-Omer, Lumbres) - pas de forme ancienne.

    3. Le Brouckwys, ou Brouchus : ancienne ferme à Arques (Saint-Omer, Arques) - Le Brou-chus 1334, Le Broucqhuys 1566

    4. Brouquestrate : hameau de Moulle (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) -pas de forme ancienne

    5. Brouxolles : lieu-dit de Landrethun-le-Nord (Boulogne, Marquise) - Brockeshole 1286

    6. Brouxolles : ancienne ferme à Moringhem (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Brouxole 1296

    7. Halimbroucq (identique à Hulimbroucq, même commune ?) : fief, à Saint-Martin-au-Laërt (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Le Halincbrouc 1427

    8. Hallinebroucq : également fief, à Saint-Martin-au-Laërt (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - pas de forme ancienne

    9. Le Hallevinbroucq : fief, à Polincove (Saint-Omer, Audruicq)- pas de forme ancienne

    10. Hazebrouck : fief, à Saint-Venant (Béthune, Liners) - pas de forme ancienne

    11. Hazebrouck : lieudit de Wacquinghen (Boulogne, Marquise) - Hazebreuc 1345, Asse-broec 1393

    12. Hellebroucq : hameau d'Eperlecques (Saint-Orner, Ardres) - Hairebreuc, Hairbrouck 1325

    13. Herbroucq : ancien écart de Houlle (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Herbrouc 1330, Harbreuc XIVème siècle

    14. Lyselbroucq : écart et marais, à Saint-Omer, au faubourg de Lysel - L'Iselebroucq 1428

    15. Le Middelbroucq : lieudit à Ruminghem (Saint-Omer, Audruicq) - pas de forme ancienne

    16. Le Schoubroucq : hameau de Clairmarais (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Scoude-brouc 1264

    17. Vincquebroucq : lieudit, à Saint-Omer - Vinkebrouc 1394

    18. Le Voorbroucq : lieudit à Ruminghern (Saint-Orner, Audruicq) - pas de forme ancienne

    19. Widdebroucq : hameau d'Aire-sur-la-Lys (Saint-Omer, Aire) - Widebroc 1100

    20. Zutbroucq : écart de Clairmarais (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Zutbrouc 1364

    Si "Brouck" est n'est pas très commun, -breucq en revanche est fréquent, mais sans intérêt pour nous : s'agit-il d'un ruisseau ( anglais brook, vieil-anglais broc), ou d'un marécage (néerlandais broek, allemand Bruch) ? - ce n'est peut-être pas par hasard, que sur une cinquantaine de lieux-dits "Le Marais", l'un des rares pour qui on dispose d'une forme ancienne soit précisément "Brocus" (marais en latin) , pour un hameau de Salperwicq (Saint-Omer, Saint-Orner Nord), ce qui renvoie au francique (lequel est attesté à Salperwick au Moyen-Age).

    Il en est sans doute de même pour les quelque vingt-cinq Becques appliqués à des ruisseaux : néerlandais beek plutôt que vieil-anglais broc. Nombreux dans la partie flamande du département du Nord, on en trouve aussi dans le Pas-de-Calais, surtout du côté de Saint-Orner et d'Aire-sur-la-Lys (ci-dessous, annexe 3). Il y en a pourtant trois ou quatre dans les environs de Boulogne-sur-Mer, notamment le minuscule fleuve côtier qui, naissant sur la commune de Condette, se jette dans la mer dans sa voisine d'Hardelot. Ils apportent ainsi la même information que les toponymes en -broucq : à savoir qu'on a parlé le francique, non seulement dans les environs de Saint-Omer mais aussi, sans doute plus brièvement, dans ceux de Boulogne-sur-Mer. Nous tenons là la trace d'une éphémère conquête linguistique de la part de ce qui de-

    47

    vait devenir le flamand. Éphémère, en effet, car bientôt le dialecte picard vint re-romaniser toute la région boulonnaise.

    Quoiqu'il en soit, il paraît certain qu'il y a eu des établissement francs au coeur de la colonie saxonne, et cela antérieurement à la romanisation de la région. Peut-on aller plus loin, et admettre que celle-ci a été entièrement franquisée avant de devenir picarde ? Il n'est pas possible de le savoir. Trop de toponymes germaniques peuvent relever tout aussi bien d'une des deux langues que de l'autre.

    La disparition de la langue saxonne se place nécessairement entre le VIème siècle (date de la formation du suffixe -ingatun) et le Xlème siècle (date de la romanisation de la région de Guines). Il n'est pas possible d'en dire plus.

    Au VilIème siècle, la région parlait encore une langue germanique, sans qu'on puisse savoir laquelle. C'est à cette époque, en effet, qu'on voit le suffixe latin -acum (resté -ac dans le midi : cf. Bergerac) devenir é, -ay, -y dans toute la France du Nord ; plus particulièrement - y en Picardie. Font exception deux régions où l'on ne parlait pas encore une langue romane au moment où prit place cette évolution phonétique : à savoir une partie de la région boulonnaise ainsi que les confins de la Bretagne. Là-bas, l'aire de répartition dudit suffixe (cf. Loudéac) matérialise une ancienne extension de la langue bretonne. Chez nous, ce suffixe, assez fréquent, apparaît sous la forme -èque, écrit le plus souvent -ecques(cf. Senlècques, Floyecques). On y parlait donc encore une langue germanique, francique ou saxon, ce qui excluait cette évolution phonétique propre au picard.

    Sur la carte de répartition du suffixe -acum au nord-ouest du Pas-de-Calais (carte n° 2), on se serait attendu à observer une limite nette entre les formes picardes en -y et les formes germaniques en -èque : cette limite aurait été un instantané d'une époque où deux langues s'y affrontaient. Il n'en est rien. On remarque, au contraire, sur une bande large d'une trentaine de kilomètres, une juxtaposition de ces deux types phonétiques : une sorte de patchwork, une espèce de peau de léopard linguistique. Pour quelques noms de lieux on a même la trace d'un flottement. Réty, par exemple, dans le canton de Marquise, a commencé par s'appeler "Reetseke". Plus au sud, Embry et Renty ont été jusqu'à présenter les trois formes, respectivement : Em-briacum, Embreka, Embri, et Rentiacum, Renteke, Renthi. On observe donc à cette époque une étape de transition, étape préliminaire à la victoire d'une des deux langues. Celle-ci s'est trouvé être le picard. Pourquoi ce dernier ? on n'en sait trop rien. Sans doute pour la même raison qui, plus au sud, assura dans quelques cantons le succès de "breton gallot" (roman) aux dépens du "bas-breton" (celtique).

    Afin de préciser ce point, j'ai cartographié, à la même échelle, la situation telle qu'elle se présente aujourd'hui en Bretagne orientale (carte n°2 bis). On y voit deux blocs s'affronter, quelques outsiders allant néanmoins se manifester au sein du groupe d'en face. Point de magma comme dans notre Pas-de-Calais. Je suppose donc que chez nous au VIIIème siècle, plusieurs petits sous-groupes linguistiques se côtoyaient dans

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    la région, la plupart des gens étant probablement bilingues. Cette situation bizarre pourrait-elle refléter la coexistence d'îlots saxons et franciques, encerclés les uns et les autres par le picard ? il n'est pas possible de le savoir.

    A la fin de ce VIIIème siècle, nous arrivons à l'époque de Charlemagne. Il me semble que si la langue anglo-saxonne perdurait alors dans notre région, au voisinage de l'importante abbaye de Saint-Bertin, quelque texte en ait fait mention. Ce n'est pas le cas, mais absence d'indice n'est pas forcément indice d'absence...

    Conclusion.

    Si nous essayons de faire l'inventaire de cette étude, nous compterons peu de certitudes historiques. Il n'y en a qu'une en réalité : on a parlé un proche ancêtre du vieil-anglais, 1' "englisc", dans la région de Boulogne au début du Moyen-Age.

    Allant plus loin, nous ne rencontrons plus que des hypothèses. Voici celles qui me paraissent les plus plausibles. Au cours du IVème siècle de notre ère, avec ou sans l'accord des autorités romaines, quelques pirates saxons ont commencé à installer sur les côtes de la Gaule des sortes de repaires, peut-être des bases pour une piraterie laquelle est bien attestée. Dès cette époque, sans doute, ils se sont fixés d'une manière plus ou moins définitive dans le pays morin. On sait qu'alors y vivaient déjà des gens parlant une langue germanique, dans laquelle on est tenté de voir l'englisc.

    Mais il fallut sans doute attendre le Vème siècle et le début du Vème, pour que l'immigration des Anglo-Saxons s'accélère. C'est à peu près à cette époque, ou peu après, qu'ils commencent à envahir sérieusement l'Angleterre. Dans le Boulonnais, leur maximum d'expansion pourrait se placer au Vlème siède ; elle fut bientôt contenue par l'arrivée des Francs Saliens, dont ils paraissent avoir subi de plein fouet l'expansion. Sur leurs compatriotes de Bayeux et de Nantes, ils avaient pourtant l'avantage de la proximité de la grande île, avec laquelle les rapports étaient restés, semble-t-il, assez serrés, si l'on en juge par l'orfèvrerie et plus encore par l'évolution phonétique. En effet, si je ne me trompe pas, la métaphonie en i s'est manifestée de part et d'autre du détroit, cela certainement à la même époque. Elle vient dater l'apparition des toponymes en -incthun : soit vers la fin du Vlème siècle. Plus réduite que l'aire couverte par les noms de lieux en -inghem, celle des noms en -thun pourrait signaler un début de repli de la colonie saxonne, devant une probable offensive des Francs. Ces derniers, si l'on en croit la répartition des toponymes en -zelle, auraient eu soin de couper les communications de nos Anglo-Saxons avec ceux de la grande île.

    Sur le plan linguistique, cette victoire fut éphémère : l'extinction de l'englisc fut suivie de près par celle du francique, l'un et l'autre remplacés par l'héritier local du latin : le picard. Il ne restait de leur règne que des noms de lieux.

    49

    Epilogue

    A la conclusion qui précède, écrite en 1946, je n'ai pas changé grand-chose. Il existe pourtant un important fait nouveau.

    Dans sa thèse soutenue en 1988, mon ami Joël Blondiaux présentait une demi-douzaine de cimetières fouillés dans ce qui fut le Nord de la Gaulel27. Ces séries anthropologiques sont, cela va sans dire, étudiées au moyen d'un appareil statistique bien plus élaboré qu'à l'époque du cimetière d'Hardenthun. L'auteur fait ainsi apparaître qu'une nécropole du Bas-Empire dans les environs d'Abbeville, celle de Vron, s'écarte des autres cimetière gallo-romains de la région, et se rapproche de séries de squelettes nettement plus septentrionaux, notamment de celle de Haithabu, site du Jutland (dans ce qui aujourd'hui le Danemark). Comme écrit J. Blondiaux "On peut donc, avec l'approximation grossière que permettent les écarts-réduits, rapprocher le site de Vron des Germains occidentaux, et plus particulièrement des Germains habitant un quadrilatère situé entre la côte de la Mer du Nord, les rives occidentales de la Baltique et le Rhin moyen". Nous avons donc là, selon toute apparence, un spécimen d'une population anglo-saxonne installée dès le IVème siècle sur le continent, dans ce que les Romains appelaient le "littus saxonicum".

    Vron (dépt. Somme, arrdt. d'Abbeville, canton de Rue), à quelque vingt kilomètres au nord d'Abbeville est aux confins de la Somme et du Pas-de-Calais. Elle est donc en dehors de la zone qui fournit des toponymes anglo-saxons, mais elle est proche de la côte, à une dizaine de kilomètres de celle-ci ; elle est donc bien dans un "littus" : le "littus saxonicum". Datant du Bas-Empire, le cimetière de Vron vient donc préciser la traduction de cette expression latine qui posait problème (ci-dessus, p. 4 et suivantes) : il s'agit donc bien d'une zone où existèrent dès le IVème siècle, des établissement saxons. J'écrivais plus haut, p. 9 : "Qui dira le nombre des colonies saxonnes dont aucun écrivain mérovingien n'a parlé et qui ont sombré dans l'oubli ?" Vron était sans doute l'une d'elles. Disparue trop tôt pour laisser une trace dans la toponymie de la région, elle illustre ce que dut être, à ses débuts, la colonie saxonne du Boulonnais. Elle montre que cette dernière a bien pu exister dès le IVème siècle, avant la Notitia Dignitatum, donc bien avant la fin de l'Empire Romain.

    127 BLONDIAUX, J., 1988 - Essai d'Anthropologie Physique et de Paléopathologie des Populations du Nord de la Gaule au Haut Moyen-Age. Thèse multigraphiée, Université de Lille III, 2 vol., ensemble 520

    pp.

    50

    Annexes

    Annexe 1 : toponymes en -y ou en -èque

    (Ces toponymes paraissent continuer une ancienne forme gallo-romaine en -acum, devenu -y en picard et -èque en francique ou en saxon).

    1) Ry

    Auchy-au-Bois (Béthune Norrent-Fontes) - Auciacus 877, Auchiacum 1058

    Blessy (Béthune, Norrent-Fontes) - Blessy 1119

    Bomy (Saint-Omer, Fauquembergues) - Bommi 1184

    Campigny : fief à Tatinghem (Saint-Omer, Saint-Omer Sud) - pas de forme ancienne

    Canchy : hameau de Licques (Calais, Guines) - Canci 1126

    Carly (Boulogne, Samer) - Quertliacus in pago Bononensi super fluvio Elna 867

    Cléty (Saint-Omer, Lumbres) - Kilciacum 857, Kiltiacum 867

    Crépy (Montreuil, Fruges) - Crispiacum 1214

    Crépy : fief à Calonne-sur-la-Lys (Béthune, Lillers) -pas de forme ancienne

    Créquy (Montreuil, Fruges) - Kreki 1058

    Cugny : hameau de Condette (Boulogne, Samer) - Le Cugnie XVIIIème siècle

    Cugny : lieudit de Saint-Etienne (Boulogne, Samer) - pas de forme ancienne

    Embry (Montreuil, Fruges) - Embriacum 826, Embreka 838, Embri 1311

    Embry : fief à Setques (Saint-Omer, Lumbres) - pas de forme ancienne

    Ergny (Montreuil, Hucqueliers) - Erni 1197

    Erigny : lieudit de Verlincthun (Boulogne, Samer) - pas de forme ancienne

    Erny-Saint-Julien (Saint-Orner, Fauquembergues) - Herny 1163

    Grigny : hameau de Bezinghem (Montreuil, Hucqueliers) - pas de forme ancienne

    Grigny : hameau de Wierre-Effroy (Boulogne, Marquise) - pas de forme ancienne

    Grigny : lieudit de Saint-Etienne (Boulogne, Samer) - pas de forme ancienne

    Guémy (Saint-Omer, Ardres) - Gimiacum IXème siècle

    Herly (Montreuil , Hucqueliers) - Asli 1122, Herli 1166, Herliacum 1171

    Journy (Saint-Omer, Ardres) - Jornacus VIIème siècle, Jornacum IXème siècle et 1173, mais Jorni 1084

    Ligny-lès-Aire (Béthune, Norrent-Fontes) - Lennacum 1119, Legniacum 1157 Lugy (Montreuil, Fruges) - Lodia 1042, Luyzi 1112

    Menty : hameau de Verlincthun (Boulogne, Samer) - Minthiacus... in pago Bononensi super fluvio Elna 867

    Montigny : fief à Questrecques (Boulogne, Samer) - pas de forme ancienne

    Parenty (Montreuil, Hucqueliers) - Parenti 1190

    Pétigny : hameau de Bomy (Saint-Orner, Fauquembergues) - pas de forme ancienne

    Je ne retiendrai ni Le Plouy (hameau de Nordausques) car Ploich 1255 et Le Ploichz 1544 - et pas davantage Le Plouy (écart de Seninghem), car Le Plouich 1739 - non plus que Le Plouy (hameau de Wavrans-sur-l'Aa) car Le Ploich 1326

    Pressy (Arras, Heuchin) - Percetum XIème siècle

    Rely (Béthune, Norrent-Fontes) - Relley 1119

    Rémilly-Wirquin (Saint-Omer, Lumbres) - Rumliacum in pago Taruannense 704

    Renty (Saint-Orner, Fauquembergues) - Praedium Rentica Xlème siècle, Rentiacum 1221,

    51

    Renteke 1361, Renthi 1155.

    Réty (Boulogne, Marquise) - Sanctus Martinus de Teutonicis dictus Reetseke 1130, Tethi et Resthi 1133, Reteke 1234

    Rumilly (Montreuil, Hucqueliers) - Rimelliacum 1134

    Sempy (Montreuil, Campagne-1èsHesdin) - Simpiacus 857

    Serny : hameau d'Enquin-les-Mines (Saint-Omer, Fauquembergues) - Serni 1199

    Tingry (Boulogne, Samer) - Tingriacum 857

    Torcy (Montreuil, Fruges) - Torchi 1276

    Vincly (Montreuil, Fruges) - Wencli 1192-1207

    2) -èque

    De la liste qui suit, ont été retirés systématiquement les toponymes terminés en -becque, à cause de la confusion possible avec des noms désignant un ruisseau ("-becque", on l'a vu plus haut, est aussi l'équivalent du néerlandais beek, même sens). J'ai ôté aussi ceux, peu nombreux, terminé en -ecq (exemple Bourecq (Béthune, Norrent-Fontes), car Botritium, Botricium au )(lIème siècle), ainsi que les cinq "Ba-

    zecque" (pour l'un d'eux "Basilica"" en 1098, pour un autre "Baziècle" en 1474). Blendecques (Saint-Omer, Arques) - Blandeca 1119

    Bléquenecque : hameau de Marquise (Boulogne, Marquise) - Blekenaker 1286, Blecque-necque 1501.

    Brécquerecque : ancien hameau de Saint-Martin-Boulogne - Bracquerecque 1415 Cambreseque : écart de Landrethun-le-Nord (Boulogne, Marquise) - Kimbreseca 1087 Coyecques (Saint-Omer, Fauquembergues) - Coiacus 844

    Coyecques : fief à Audruicq (Saint-Orner, Audruicq) - pas de forme ancienne

    Coyecques : fief à Nortkerque et Zudkerque( Saint-Orner, Audruicq) - pas de forme ancienne

    Crecques : hameau de Mametz (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - Kerske 1168, Cerseca 1174 Ecquedecques (Béthune, Norrent-Fontes) - Eskeldeca 1200

    Ecques (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - Eka Xlème siècle ; pour son hameau de West -Ecques, on a Escha 1139, Westech Xfflème siècle, Westresca 1304

    Eperlecque : fief à Audembert et Bazinghem (Boulogne, Marquise) - Esprelecque 1432

    Eperlecques (Saint-Omer, Ardres) - Spirliacum Xlème siècle, Sperleca 1129

    Espellecques : ancien faubourg de Guines (Calais, Guines) - Spetleca 1084

    Floyecques : hameau de Vaudringhem (Saint-Omer, Lumbres) - Flaiekes 1365

    Hézecques (Montreuil, Fruges) - Heseca 1122

    Longuerecques : hameau de Samer (Boulogne, Saurer) - Langrehega 1113, Langreheca 1113

    Melleke : ancien nom de Saint-Blaise, hameau de Guines (Calais, Guines) - Milleca 1116

    Métèque : fief à Aire-sur-la-Lys (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - Meteke 1253

    - je ne retiens pas Milletrèque, fief à Samer (Boulogne, Saurer), à cause de Milestirch 1153

    Mimoyecques : hameau de Landrethun-le-Nord (Boulogne, Marquise) - Midelmoieques XIIIème siècle

    Les Moyecques : hameau de Landrethun-le-Nord (Boulogne, Marquise) - Moykes 1203 Moyecques : fief à Ferques (Boulogne, Marquise) - Moiecque 1544

    Quesques (Boulogne, Desvres) - Kessiacum 830 Questrecques (Boulogne, Samer) - Kestreca 1129

    - Saurer (Boulogne, Samer) s'appelait au IXème siècle Silviacus, mais cette forme n'a dérivé ni en -y, ni en -ecue, car Silviacus a été remplacé par "Saint Ulmer", devenu Saurer : Sanctus Ulmarus 1112, Villa Sancti Vulmari qae ab antiquis Selviacus dicitur 1145,.

    Senlecques (Boulogne, Desvres) - Senlelces 1199

    52

    Senlecques : fief à Pernes (Arras, Heuchin) - w 1709

    Setques (Saint-Omer, Lumbres) - Sethiacus super fluvius Agniona 723

    Soyecques : hameau de Blendecques (Saint-Omer, Arques) - w 1207

    Wardrecque (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - Werdric 1096, w 1119

    Warnecque : hameau de Merck-Saint-Liévin (Saint-Omer, Fauquembergues) - 1139

    Annexe 2 : toponymes en -inghem

    A. Dans le Pas-de-Calais

    1. Assinghem : écart de Houlle (Saint-Omer, Saint-Orner Nord) et d'Eperlec9ues (Saint-Orner, Ardres) - Hessingehem juxta Sperlaca 1139. Cette dernière désignation evoque une confusion avec les n° 54 (Hassinghem) et 60. (Hessinghem). Pourtant A de Loisne les distingue dans son Dictionnaire topographique du Pas-de-Calais.

    2. Assinghem : hameau de Wavrans-sur-l'Aa (Saint-Orner, Lumbres) - Aissengehem Xlème siècle

    3. Attinghen : fief à Audinghen (Boulogne, Marquise) - Attingen 1553

    4. Attinghen ; fief à Tardinghen (Boulogne, Marquise) - Attinghem 1259

    5. Audinghen (Boulogne, Marquise) - Otidinghem Xème siècle

    6. Autinghen : ancien village, commune de Guines (Calais, Guines) - Hantengehem 1084

    7. Auvringhen : hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Overingahem 1084

    8. Azelinghen : fief à Leulinghen (Saint-Orner, Lumbres) - Hazelinghem 1336

    9. Bainghen (Boulogne, Desvres) - Baingehem 1121

    10. Bainghen : hameau de Leubringhen (Boulogne, Marquise) - Beingehem 1157

    11. Balinghem (Saint-Omer, Ardres) - Bavelengehem 1084

    12. Balinghem : fief à Nortkerque (Saint-Omer, Audruicq) - Ballinghem 1694

    13. Balinghem : fief à Nort-Leulinghem (Saint-Omer, Ardres) Balinghem-en-Nortleulinghem 1739

    14. Barbinghem : hameau de Moringhem (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Bermingahem 844-864

    15. Barlinghem (distinct du précédent) : hameau de Moringhem (Saint-Omer, Saint-Orner Nord) - Berningahem 850

    16. Batinghen : fief à Pernes (Arras, Heuchin) - pas de forme ancienne

    17. Battinghen : hameau d'Outreau (Boulogne, Outreau) - Bathinghen 1506

    18. Baudringhem : hameau de Campagne-Wardrecques (Saint-Omer, Arques) - Baldringe-hem 1093

    19. Bayenghem-lès-Eperlecques (Saint-Orner, Ardres) - Bainghehem 1084

    20. Bayenghem-lès-Seninghem (Saint-Orner, Lumbres) - Bainga villa 844-864, Beingahem 877

    21. Bazinghem : lieudit à Saint-Orner - pas de forme ancienne

    22. Bazinghen (Boulogne, Marquise) - Basingahem 877

    23. Bélinghen : village disparu près de Wissant (Boulogne, Marquise) - Belinghem juxta Witsandum XIIlème siècle

    24. Bertinghen : fief à Bazinghen (Boulogne, Marquise) - Bertinghen XlIlème siècle

    25. Bertinghen : hameau de Saint-Martin-Boulogne (Boulogne, Boulogne Sud) - Bertingue-hen 1389

    26. Bezinghem (Montreuil, Hucqueliers) - Bissingehem 1139

    27. Blaringhem : hameau de Pernes-en-Artois (Arras, Heuchin) - Bladeringhem 1250

    28. Blinghem : lieudit d'Echinghen (Boulogne, Boulogne Sud) - Blinghen 1401

    29. Boisdinghem (Saint-Omer, Lumbres) - Bodninaghem 844-864, Botnigahem 855

    30. Bonemghem : lieudit à Clairmarais (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Boningaham 844-

    53

    864

    31. Bouquinghen : hameau de Marquise (Boulogne, Marquise) - Bokingehem 4224

    32. Bouvelinghem (Saint-Omer, Lumbres) - Bovlingehem 1145

    33. Bringhen : ferme à Belle-Houllefort (Boulogne, Desvres) - pas de forme ancienne

    34. Cottenghem : fief à Rebecques (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - pas de forme ancienne 35 Cuinghem : lieudit de Wierre-Effroy (Boulogne, Marquise) ) Cuinghem 1488

    36. Dardingahem : ancien nom de Saint-Martin d'Hardinghem (Saint-Omer, Fauquem-bergues) - Dardingahem 1016, Dardingehem 1159

    37. Dinghem : hameau d'Amettes (Béthune, Auchel) - Dinguehen 1331-

    38. Dringhen : ancien hameau de Saint-Martin-Boulogne (Boulogne, Boulogne Sud)-Deningehem 1208

    39. Echinghen (Boulogne, Boulogne Sud) - Essingehem 1112

    40. Elinghen : hameau de Ferques (Boulogne, Marquise) - Elingahem 1084 41 Elvelinghem : hameau de Bayenghem-lès-Eperlecques - Helvinghehem 1157

    42. Enquinghen, aujourd'hui Equihen : hameau d'Outreau (Boulogne, Outreau), qui lui-même est en ancien Waubinghen : voir ci-dessous - Equinguehem, Enquinghen du XIIIème au XVIème siècle, Esquihen 1554. Voir aussi, ci-dessous, 88 Equihen.

    43. Ferlinghem : hameau de Brêmes (Saint-Omer, Ardres) - Frelinghem 1069

    44. Ferringhem : hameau d'Esquerdes (Saint-Omer, Lumbres) - Fersingahem super fluvium Agniona 788

    45. Floringhem (Arras, Heuchin) - Floringuehem 1145

    46. Fringhen : ferme à Saint-Etienne (Boulogne, Samer) - Faingehem, Froingehem 1208

    47. Garlinghem : hameau d'Aire-sur-la-Lys (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - Gerlingehem 1123

    48. Glominghem : hameau d'Aire-sur-la-Lys (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) : Gomelinghe-hem 1035

    49. Grand-Eblinghem (Le) : ancien manoir à Arques (Saint-Omer, Arques) - pas de forme ancienne

    50. Guslinghem, ou Guzelinghem : hameau de Moringhem (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Guslinghen 1387

    51. Hacquinghem : hameau de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Hachinghehem 1121

    52. Halinghen (Boulogne, Samer) - d'abord Vicus Dolucens Ier siècle, puis Havelingueham 1134

    53. Hardinghen (Calais, Guines) ; rien à voir avec Saint-Martin d'Hardinghem qui est en réalité "Dardinghem" : voir ce mot - Hervadingahem 1084

    54. Hassinghem : ancienne ferme à Houlle (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - pas de forme ancienne. Peut-être confondu avec les n° 1 et 60.

    55. Hebbinghem : fief à Saint-Orner - pas de forme ancienne

    56. Herbinghen (Calais, Guines) - Helbodingahem 1016

    57. Hermelinghen (Calais, Guines) - Hermelingehem 1138

    58. Herquelinghen : hameau de Crémarest (Boulogne, Desvres) - pas de forme ancienne

    59. Hervelinghen (Boulogne, Marquise) - Helvetingehem 1084

    60. Hessinghem : lieudit de Houlle (Saint-Orner, Saint-Orner Nord) - Hessinghem 1334. Peut-être confondu avec les n° 1 et 54.

    61. Heuringhem (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - Huringhem 1171

    62. Hézelinghen : ferme à Leulinghen (Saint-Omer, Lumbres) - Azelinghen 1586

    63. Hocquinghen (Calais, Guines) - Hoquingahem 857

    64. Hocquinghen : ancien nom de Saint-Léonard (Boulogne, Samer) - Hokinghem 1121

    65. Honninghem : hameau de Febvin-Palfart (Saint-Omer, Fauquembergues) - Honnen-ghen XVIIIème siècle

    66. Hottinghem : lieudit d'Ardres (Saint-Omer, Ardres) - Hostinghem 1084

    67. Houssinghen : lieudit de Boulogne-sur-Mer - pas de forme ancienne

    68.

    54

    Pour Hydrequent, hameau de Rinxent (Boulogne, Marquise), la forme a hésité longtemps : Heldrigeham 1119, Hildringehem 1179 et Hildrtnghem 1275... mais déjà Hildrikem en 1225

    69. Inghem (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - Aingehem 1119

    70. Inghen : écart de Tardinghen (Boulogne, Marquise) - Ingehem 1208

    71. Inglinghem : hameau de Mentque-Nortbécourt (Saint-Omer, Ardres) - Iglighern 1223

    72. Islinghen : hameau d'Ecques (Saint-Omer, Aire-ssur-la-Lys) - Yslinghem 1304

    73. Istringhem : fief à Hersin-Coupigny (Lens, Sains-en-Gohelle) - Istringuhen 1700. En dépit des apparences, ne paraît pas devoir être confondu avec le n°126, Tringhen, à cause des forlues anciennes.

    74. Ledinghem (Saint-Omer, Lumbres) - Lidighem 1161

    75. Letingehem : ancien nom de Tihen, hameau du Portel (Boulogne, Outreau) - 1208, et Tinghen 1525

    76. Leubringhen (Boulogne, Marquise) - Leubringuehem 1170

    77. Leulinghem (Saint-Orner, Lumbres) - Loeuelingehen 1157

    78. Leulinghen (Boulogne, Marquise) - Loningaheimum in pago Bonensi 776, Loningahem 846-864

    79. Linghem ( Béthune, Norent-Fontes) - Leingehem 1142

    80. Lisinghem : ancien lieudit de Wimille (Boulogne, Boulogne Nord-Est) - Lisingehem 1208

    81. Locquinghen : hameau d'Audinghen (Boulogne, Marquise) - Lokingehem 1208

    82. Locquinghen : hameau de Réty (Boulogne, Marquise) - Lokingahem 1084

    83. Lotinghem : fief à Fleurbaix (Béthune, Laventie) - pas de forme ancienne

    84. Lottinghen (Boulogne, Desvres) - Lonastingahem 828

    85. Lozinghem (Béthune, Norrent-Fontes) - Losengeham 1157

    86. Macquinghen : hameau de Baincthun (Boulogne, Boulogne Sud) - Makingehem 1208 87 Macquinghen : château à Tingry (Boulogne, Samer) - Maquinguen 1458

    88. Manihen, hameau d'Outreau (Boulogne, Outreau) s'est appelé jadis Maninghen : Maninghen-d'Outreauwe 1338, et Maninghen 1575. A noter qu'un autre hameau d'Outreau, Equihen (voir plus haut n° 44) présente la même évolution phonétique.

    89. Maninghem (Montreuil, Hucqueliers) - Menolvingahem in pago Ternensi 877

    90. Maninghen-au-Val : hameau de Bimont (Montreuil, Hucqueliers) - pas de forme ancienne

    91. Maninghen-Wimille (Boulogne, Marquise) - Manengehem 1208

    92. Matringhem (Montreuil, Fruges) - Matrinkehem 1120

    93. Matringhem : fief à Bomy (Saint-Omer, Fauquembergues) - pas de forme ancienne

    94 Matringhem : ancienne ferme à Bonningues-lès-Ardres (Saint-Orner, Ardres) - Matrin-ghehem 1287

    95. Matringhem : fief à Lestrem (Béthune, Laventie) - Matringuehem 1589-1590

    96. Mazinghem (Béthune, Norrent-Fontes) - Mazinghem 1119

    97. Mazinghem : hameau d'Anvin (Arras, Heuchlin) - Masinghem 1119

    98. Mazinghen : hameau de Verlincthun (Boulogne, Samer) - Mazinguehen 1458

    99. Minghem : lieudit d'Etaples (Montreuil, Etaples) - In pago Bonensi Mighem 853, Main-ghem 1340

    100. Molinghem (Béthune, Norrent-Fontes) - Mallingehem 1154

    101. Molinghem : fief à Vendin-lès-Béthune (Béthune, Béthune Nord) - Molingehem 1507 102 Moringhem (Saint-Omer, Saint-Omer Nord) - Morningehem 844-864

    103. Morlinghem : ferme à Balinghem (Saint-Omer, Ardres) - Morlemgehem 1084

    104. Morlinghen : hameau de Hesdin-l'Abbé (Boulogne, Boulogne Sud) Moringehem 1141 105.Nabringhen (Boulogne, Desvres) - Nameringehem 1208 106. Nort-Leulinghem (sic ; Saint-Omer, Ardres) - Lelengehem 1084 107.Oblinghem (Béthune, Béthune-Nord) - Ablingeham 1157

    108.

    55

    Papinghem : ancien nom de Saint-Venant (Béthune, Lillers) - Papinghem 1075

    109. Pélinghen : fief à Saint-Martin-Boulogne (Boulogne, Boulogne Sud) - Pelinghen 1505

    110. Peuplingues (Calais, Calais Nord-Ouest) qui jadis s'est appelé Peuplinghem : 6 exemples depuis Pepelinghem 1069 ; Pepelinghes en 1254

    111. Pinguehen : lieudit de Tingry (Boulogne, Saurer) en 1458 - pas de forme ancienne

    112. Questinghen : hameau de Baincthun (Boulogne, Boulogne Sud) - Gestingehem 1208

    113 Racquinghem (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - Rakingem 1207

    114 Radinghem (Montreuil, Fruges) - Rhadinghem 1139

    115. Raminghem : hameau d'Audrehem (Saint-Orner, Ardres) - Raminghem XVIIIème siècle

    116. Redinghem (Saint-Omer, Fauquembergues) - Ricolvingahem 857

    117. Redinghen : hameau de Crémarest (Boulogne, Desvres) - Reclingehem 1157

    118. Rézelinghen : hameau de Leulinghen (Boulogne, Marquise) - apparemment pas de forme ancienne

    119. Riquemaninghen, ou Ricques-Maninghen : hameau de Bazinghen (Boulogne, Mar-quise) - Ripmaninghem 1209

    120. Rodelinghem (Saint-Orner, Ardres) - Rolingehem 1157

    121. Ruminghem (Saint-Omer, Audruicq) - Rumingahem 850

    122. Sanghen (Calais, Guines) - Sanninghehem 1084

    (Pour mémoire : Saint-Martin d'Hardinghem : ci-dessus : Dardingahem) 123 Seninghem (Saint-Orner, Lumbres) - Siningahem 877, Siningehem 1091 124. Tardinghen (Boulogne, Marquise) - Terdingehem 1070

    125 Tatinghem (Saint-Orner, Saint-Omer Sud) - Tatinga villa 648, Tathingahem 826

    126 Tinghen : hameau de Hesdin-l'Abbé (Boulogne, Saurer) - Tetyngehem 1141 ; quasi ho-monyme : Letingehem (voir plus haut)

    127. Tringhen : fief à Hersin-Coupiny (Lens, Sains-en-Gohelle) - Teninghem 1407. En dépit des apparences, ne paraît pas devoir etre confondu avec le n°73, Istringhen, à cause des formes anciennes.

    128. Turbinghen : ferme au Portel (Boulogne, Le Portel) - Turbodingheim Xème siècle : Ac-taSanctorum

    129. Vaudringhem (Saint-Omer, Lumbres) - Vualdringahem in pago Tarwanensi 877, Wal-dringhem 1200

    130 Vaudringhem : fief à Mentque-Nortbécourt (Saint-Orner, Ardres) - Waudringhen 1542 131. Vaudringhem : fief à Quelmes (Saint-Omer, Lumbres) - pas de forme ancienne

    132 Vaudringhem : lieudit de Wardrecques (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - Waudringhuem 1659-1660

    133. Velinghem : hameau de Quelmes (Saint-Omer, Lumbres) - Denelingehem 1084

    134. Vendringhem ou Védringhem : hameau de Wavrans-sur-l'Aa (Saint-Omer, Lumbres) - Weringehem 1192

    135. Wacquinghen (Boulogne, Marquise) - Wakingehem 1208

    136. Waringhem : fief à Bourecq (Béthune, Norrent-Fontes) - Waringuehen XlVème siècle

    137. Waringhem : lieudit à Norrent-Fontes (Béthune, Norrent-Fontes) - Waringuehem 1518

    138. Warlinghem : lieudit d'Athies (Arras, Arras Nord) - pas de forme ancienne

    139. Waubinghen : ancien nom d'Outreau (Boulogne, Outreau) - Vualbodingheim Acta SS (VIIème siècle), Walbodegehem iXème siècle, Waubingehem 1121, Waubinghen 1121 ; puis Ultra aquam 1154 et Outre Lave XIIIème siècle

    140. Waudringhem : fief à Nortbécourt (Saint-Omer, Ardres) - pas de forme ancienne

    141. Wéringhem : fief (du côté de Saint-Pol) - Weringheuhen 1474

    142. Wicquinghem (Montreuil, Hucqueliers) - Wichingehem 1069

    143. Widehem (Montreuil, Etaples) s'est autrefois appelé Winningahem 838, Widingaham-mum 894, encore Vuidengaham au Xlème siècle, enfin Widehem en 1311

    144. Winguehen : hameau de Tingry (Boulogne, Samer) - pas de forme ancienne 145 Zéblinghem : ancien hameau d'Arques (Saint-Omer, Arques) - Zevelinghem 1269

    56

    B. Dans le département du Nord

    Comme il n'existe pas de dictionnaire topographique pour ce département, nous nous devons nous limiter aux localités de quelque importance, sans descendre au dessous du niveau de la commune. Pour la même raison, nous n'avons pas de forme ancienne.

    1. Blaringhem (Dunkerque, Hazebrouck Nord)

    2. Capinghem (Lille, Armentières)

    3. Ebblinghem (Dunkerque, Hazebrouck Nord) 4 Eringhem (Dunkerque, Bergues)

    5. Erquinghem-le-Sec (Lille, Lomme)

    6. Erquinghem-Lys (Lille, Armentières)

    7. Ledringhem (Dunkerque, Wormhout)

    8. Radinghem-en-Weppes (Lille, Lomme)

    9. Verlinghem (Lille, Le Quesnoy-sur-Deule) ; cf. Warlingham (Sussex)

    - auxquelles il faut peut-être ajouter Mazinghien (Cambrai, Le Cateau-Cambrésis), dont la finale est un peu différente, et qui par ailleurs se trouve très à l'écart des précédentes, à 70 kilomètres au sud-est de Lille : à 1 extrême sud du département, aux confins de l'Aisne.

    C. Dans la Flandre belge

    - Mêmes remarques que pour le département du Nord. Par ailleurs, je rappelle qu'en Flandre le suffixe -hem s'écrit sans h.

    1. Alveringem (Flandre Occidentale, arrondissement de Furnes)

    2. Wulveringem, limitrophe de la précédente.

    Annexe 3 ruisseaux et rivières en -bègue

    A) Affluents de la Lys

    1. La Becque-du-Biez à Fleurbaix (Béthune, Laventie)- pas de forme ancienne

    2. La Guarbecque, depuis Saint-Hilaire-Cottes (Béthune, Norrent-Fontes) - Marsbeke 887

    3. La Humsbecque, à Lestrem (Béthune, Laventie) - Hunesbeca 1154:

    4. La Bègue, à Roquetoire (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) : affluent de la "Vieille-Lys" - Beca 1304

    B) La Melde et ses affluents (la Melde se jette dans la Lys)

    5. La Becque est un nom que porte la Melde d'Helfaut (Saint-Orner, Arques) à Heurin-ghem (Saint-Omer, Aire-ssur-la-Lys), avant de s'appeler 'La Melde" - Le Beque 1388

    6. La Becque-de-Caucal à Quiestède (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - pas de forme ancienne

    7. La Becque-de-Cochendal, à Quiestède et Roquetoire (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - pas de forme ancienne

    8. La Becque de l'Ecouart, à Ecques (Saint-Orner, Aire-sur-la-Lys) - pas de forme ancienne

    9 La Becque-d'Héblin, à Racquinghem (Saint-Omer, Aire-sur-la-Lys) - pas de forme ancienne

    10. La Becque-Jedou, également à Racquinghem - pas de forme ancienne

    C. Affluents de rive droite de l'Aa, ou du canal de Neuf-Fossé

    11. La Becque à Esquerdes (Saint-Omer, Lumbres) - Le Beke 1292

    12. La Becque-à-Poissons à Blendecques (Saint-Omer, Arques) - pas de forme ancienne

    13. La Lennebecque, également à Blendecques - pas de forme ancienne

    14. La Blaubecque, encode à Blendecques - pas de forme ancienne

    15 .La Becque-de-la-Barne, à Campagne-Wardrecques (Saint-Omer, Arques) - pas de forme ancienne

    D. Affluents de rive gauche de l'Aa

    16 La Becque-des-Chartreux : de Wisques (Saint-Omer, Lumbres) à Saint-Omer - pas de forme ancienne

    17. Le Sartebecque à Eperlecques (Saint-Omer, Ardres), affluent de la Liette - pas de forme ancienne

    18. Le Quabec, également à Eperlecques, affluent de la Liette - pas de forme ancienne

    E. Affluents de la Hem ou du canal de Calais à Saint-Omer

    19. Le Robecq, encore appelé Heet ou Rivière-de-Ruminghem (Saint-Omer, Audruicq) - Le Roebecque 1742

    20. Bècque-Marie-Voort (La) : ruisseau à Polincove (Saint-Omer, Audruicq)- pas de forme ancienne

    21. Bècque-Véret (La) : ruisseau à Polincove - pas de forme ancienne

    22. Bècque-Rigoulet (La) : ruisseau à Nortkerque (Saint-Omer, Audruicq), affluent de la Rivière de Nielles - pas de forme ancienne

    23. Bècque-du-Wohaye (La) : ruisseau à Ardres (Saint-Omer, Ardres), affluent de la Ri-vière de'Ardres - pas de forme ancienne

    F. Dans les environs de Boulogne-sur-Mer

    24. La Becque à Condette (Boulogne, Samer). Authentique fleuve côtier d'une longueur de 4 kilomètres, soit de Condette à Hardelot - pas de forme ancienne

    25. La Bègue à Ferques (Boulogne, Marquise) - Aqua de Lebecca 1157

    26. L'Estebecque à Leubringhen et à Audembert (Boulogne, Marquise). A ne pas distin-guer, sans doute, de "l'Ertebecque" cité dans cette dernière commune par de Loisne à Au-dembert128 - Estrebèque vers 1400

    57

    128

    58

    Annexe 4 : cartes de répartition

    Sur les cartes qui suivent, tous les emplacements n'ont pas pu être déterminés avec une parfaite précision. Certains sites, disparus, ne sont connus que par des documents d'autrefois, tels que des chartes ; d'autres, trop petits, n'apparaissent que sur les cadastres de leurs communes respectives : ils sont absents de la carte au 1/ 25 000 de l'I.G.N. En ce qui concerne cette dernière, j'ai disposé des feuilles "Calais", "Boulogne-sur-Mer", "Lumbres", "Saint-Omer", "Aire-sur-la-Lys" et "Watten", cette dernière s'étendant surtout sur le département voisin. Seule m'a manqué la feuille "Gravelines", pour les environs d'Audruicq".

    Au 1/50 000, la feuille 'Desvres" s'est révélée inutile. En dehors de la partie couverte au 1/25 000 , j'ai dû me rabattre sur la carte de l'I.G.N. au 1/100 000.

    Chaque fois qu'un site n'est apparu sur aucune de mes cartes, je me suis borné à le placer sur le chef-lieu de la commune dont il dépend. C'est ainsi que sur "Wimille" on trouvera juxtaposés "Sombrethun, Terlincthun et Honnincthun" que je n'ai pas trouvés sur la carte au 1/25 000 ; en revanche, sur cette même commune, Olincthun, dont l'emplacement est connu, se trouve naturellement à sa place.

    Liste

    1. Etablissements "saxons" au milieu du Vlème siède

    2. Germanisation / Dégermanisation : le sort des toponymes gallo-romains en

    -acum

    2 Bis. Le suffixe -acum en Bretagne orientale

    3. Les voies romaines de la Morinie

    4. Toponymes en -thun et -incthun

    5 à 9. Toponymes en -thun et -incthun : comparaisons

    10. Toponymes en -ness

    11. Toponymes en -ingue

    12. Toponymes en -brique

    13. Toponymes en -brouck

    14. Les toponymes en -inghem dans le Pas-de-Calais

    15. L'étrange répartition des toponymes en -zelle

    16. Toponymes présentant le suffixe -thun

    17. Communes présentant le suffixe double -inghem

    59

    Bibliographie

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    1. Etablissements "saxons" au milieu du Vlème siècle

    Etablissements attestés par des textes (leurs limites sont imprécises.

    .

    Colonie reconnue en dépit de l'absence de texte

    en picard

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    · Créqui.

    · TolrJ
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    ·
    · -y et -?yue attestés

    Limites linguistiques

    -- approximatives (Xllème
    et XlXème siècles)

    Bchelle : 1/ 550 000


    ·

    · Conti yure a (!wr ier+


    ·

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    nruur attesté

    en francique

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    Liane

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    Flo rr yur.
    ·

    Senlrryuet
    · N'urnn yur

    · Grigny

    · Ibrenh

    ?. (krntanisalion / I )égermani;,tlion : le sort des toponymes gallo-romains en -acum

    3. Les voies romaines de la Morinie

    (Mardis )

    Sangatte)

    (Merck)

    Gaines)

    aryui.ve)

    Castellum Menapiora

    lli

    (Cassel)

    (Saint-Otner)

    Lonrbrev

    (Desvres

    (zoterrx) aruanna

    mirr

    (Frages)

    Gesoriacum Bononia

    issant)

    Etaplev)

    Voies principales :

    1. Boulogne - Cassel - "Ile des Bataves"

    2. Boulogne - Thérouanne - Arras - Bavai - Cologne

    3. Boulogne - Amiens - Lyon - Milan

    4.

    · -

    Audenrhune

    Varneton

    Huncthun

    Boulogne
    ·Alincthrm

    · P âr aiincthun

    eWainet~un Liane

    Lys

    Le Bot1trut

    q Lille

    Flo l
    ·inctlurerr
    ·Albinthun

    élincMuneaet P~~o~ tticZn

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    Armcntièrc

    O Calais

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    ·WeRorh~r~lerrthilli gerum
    o rnctiIz
    ·
    Warinct/rrur £ t
    cOlclredruu-le-Nord

    · Colirrcthunry4a

    eLandreth un-1 ds-Ardres

    Raveuf{lune UBaudrethun

    Lee/robant urr ~(g1M1

    Cmt/ rct Sunt e ard~nrhun éf uru

    tpn'bret/ur 1. rnbrel/tup

    er net pu ~i,'Ircthun
    et F'lomrm hut eiK;odtncthnn

    Fauquetur

    Béthune

    Toponymes en -thun et -incthun

    CJ Calais

    Blanc Nez

    ®tesse

    ®Witternesse

    Béthune O

    10. Toponymes en -ness

    11. Toponymes en -ingue

    ® Calais

    Peu. inguest.Beussingue Bonin; -lès-Calais® eLeulingue

    · La Wambringue Autingue
    · ®P ulaingue

    =eto~fngue Hollingues~

    · Wulverdinghe

     

    eHazuingueBonningue-lès-Ardres /G _ ---..4^`,., eRebertingue

    · Aubingue

    Boulogne

    uesteli gues Peuplingues

    · Herquelin

    Liane

    Rabodingue
    ·I
    S\aintpnnér

    l

    Rabodingues
    · i\

    Aingu HafJreingue

    T ~ eGontardingues

    .'

    Affringues
    ·

    · Wilbedinghe

     

    tngues

    Lys

    Relinguese

    Béthune

    'I--

    D Calais

    0A Brique

    · Pont-de-Briques

    Pont-de-Briques

    ® Lansbrighe

    ®Dyébrighes

    12. Toponymes en -brique

    Béthune

    mice LA-

    L'Etiembrique® ®Ln Brique

    ®La Brique

    Boulogne

    Briquecheul Canrbrique Pont-de-Br'ques. Pont-de-Briques

     

    ®Ln Brique d'Or ®La Brique etiriglte

     

    Saint-purer

    /l S

    Brique d'Or

    Brique

     
     
     
     

    Liane

    Ln Brique

    13. Toponymes en -brouck

    ®Saint-Pierre Brouck

    ®Hel ebroucq

    ,lerbro1.t(cq,

    Brouqu str 0111".~ Scheabroucq

    aint-Omer : jLyselbroucq ~
    · lVincquebroucq

    1.e B ouckwys


    ·

    Aa

    ~ Lys

    Hazebroacq

    Haliarbraucq et Hallinebr::'-') r

    Aubroucq C

    Widdebroucs-;

    · Hazebroucq

    Boulogne

    Hallevinbroucq

    Brouxollese

    Béthune

    14. Les toponymes en -inghem dans le Pas-de-Calais

    htg/terve elslinghem /
    ·Gur(irtghetn

    Cottenghente Gln ingla'm~

    Ledinghente eVaudringhcnr

    q Béthune

    6Honninghem

    DDinglrenl

    Lozinghema

    eFlaringghein

    BatinghcmôBlnr(ngn nt

    et Tringhent

    Istrinhhent

    q Calais

    e rgil en' r« l<nprmgnem)

    , cOc

    oAminghen Bov` t!\., ~irtoBnlin.ghem

    0

    ® eHottinghent

    oRodeliu hem OP'er~nR/lem

    mt

    pert` Fe oVi el ' I er

    rai rg rem I t rmg l

    Hearrngnetne eRnudrir cdtctn

    Suint-Manin

    d'llnrdinghem

    rp

    Ohlinghemo

    · Wéringhcnt

    Warinrrghen' a

    Arras

    //~~elill,glr~tt ?or mF tci

    Racqui' len o

    n '..

    al inghen

    Mnitrlinghen

    Malingheme

    Banglien

    oh, /*Hen
    ·eiinghen C le+
    i

    ® ~ea~~t~ién', Fivi nghen'

    sit Lhen

    Walquinghene eCuin,gherr StmgheueRami,ehrme t o cr++cr B4/.

    Nerhhin hen: ,~IrinR n' ®

    /e,6Qottnmgh~lt \

    tnin
    ·,r,PSaint-Omer, Qn;inghenl et Nehbirtghem

    n, onringhen eNabringhei ~C,rar~ll-Eb(ing.

    IOrirreien et

    Pélin,yhen Your,

    ehimrluinghen G
    ·

    Boulogne/

    et Housatr he.,

    chin hen et Blin he ~^-~.~re oR

    élQuesnnghen lirryuelrgghcn^'~» Srninghrmo e6t`>e

    oHecyninR len n oRecligKhen A singhem et

    eLottinglten Védnnghent

    n ighe!

    aMn:in 'hen

    1aequinihen, Pinguclrcn et Winguehen

    4 Halinghem

    ohln germ oM Qr

    eWaringhern oWaringheur

    Lin,ghente

    aReellIt/t latringhenl

    r d'hPq
    ·

    Andinshggn eleubringhen

    et Ans +jen ® BR tanciqu n R Bainghen
    [pow(Igltene oBertinRhen eu!Lclinghen

    Qai,, hese °Letdinghen

    R etlinghen

    Bouquinehene eLocquinghen o r

    Hardinghene eHermelinghen 140 BNrnr 9etYir

    oMntringltem '~a/inRt,

    Aur'lne Rep, ehlnnntghen lhn.ininghemo Y` Itinnhcn 3i^-hilirllri glirnr

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    ct üringntn onninghen n crimghane

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    Wlegtdnghem

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    Lvs .\

    ® 'nirt/ I-VB!!llÎ -- 0 Ma'ri,tg// m / ~ ~

    (ex-i'aping/tent) `,J

    Matringhenl

    Rnding/lento

    eMnni Igllem
    oAlmrlug~em-rru-Val

    Macinghem a

    q Calais

    (loringzelle

    War{ngze g®Frame-elle

    Harmgze~~e<e Ïüncelles

    Audresselles e Selles

    Hinguezellen

    Boulogne

    Qc,,ge 'Se/%s

    Béthune

    Framezelle o

    oWatrezelle

    15. L'étrange répartition des toponymes en -zele

    64

    La colonie saxonne du Boulonnais : table des matières

    Introduction

    1

    I. Les Saxons

    2

    1. Les premiers textes

    2

    2. Carausius

    3

     

    3. La Notifia Dignitatum

    4

    4. Les invasions saxonnes

    8

    IL Les Saxons dans le Boulonnais

    11

    1. Traces saxonnes dans la toponymie

    11

    A. Les noms de lieux en -thun

    12

    B. Les noms de lieux en -brique

    15

    C. Les noms de lieux en -ness

    18

    D. Les noms de lieux en -inghem

    19

     

    2. Les Vies de Saints

    20

    3. Autres traces saxonnes éventuelles

    22

    A. Archéologie funéraire

    22

    B. L'anthropologie de la région boulonnaise

    ..25

     

    4. Divers

    26

    III. Date et origine de l'invasion saxonne

    28

    1. Arrivée ancienne

    28

    A. Théorie de G. Kurth

    29

    B. Théorie de l'étape, ou de J. Hoops

    31

    2. Arrivée tardive

    32

    A. Théorie de Taylor

    32

     

    B. Théorie d'Ehmer ; la métaphonie en i et les topo-

    nymes en ingue 33

    2. Essai de solution 38

    A. Lieu d'origine 39

    B. L'arrivée des Saxons 39

    IV. Histoire des Saxons du Boulonnais après l'invasion 41

    1. Extension maximale 41

    2. De quel groupe ethnique s'agit-il au juste : Angles, Jutes

    ou Saxons sensu stricto ? 42

    3. Comment les envahisseurs ont-ils pénétré la région? 43

    4. Comment a disparu la colonie saxonne ? - toponymes en

    -zelle, en -brouck et en -bègue 44

    Conclusion 48

    Epilogue 49

    Annexes 50

    Annexe 1 : toponymes en -y ou en -èque 50

    Annexe 2 : toponymes en -inghem 52

    A. Dans le Pas-de-Calais 52

    B. Dans le département du Nord 56

    C. Dans la Flandre belge 56

    Annexe 3 : ruisseaux et rivières en -bèque 56

    Annexe 4 : cartes de répartition 58

    Bibliographie 59







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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry