Chapitre 2 : Dynamiques endogènes,
stratégies et contraintes de gestion
La mise en place de l'AMP de Bamboung s'est traduite, au
niveau local, par la mobilisation des populations périphériques
et l'adoption de stratégies de gestion du domaine marin de l'estuaire du
Saloum. Il faut noter qu'il existe, néanmoins, de nombreuses
difficultés inhérentes à la gestion.
I- Analyse du contexte local de gestion des ressources
marines et côtières
Le contexte de gestion des ressources marines et
côtières de la zone d'étude est analysé en deux
points essentiels : le contexte socio-économique et environnemental de
la gestion avant la protection de ce site marin, puis le contexte actuel de
gestion à la suite de la mise en défense, contexte en rapport
avec les dispositions réglementaires appliquées ou
imposées dans le cadre de cette aire.
1- Le contexte de gestion et d'utilisation des ressources
naturelles avant la création de l'AMP
Le contexte de gestion et d'utilisation des ressources
halieutiques locales avant l'implantation de l'AMP a été
étudié pour se faire une idée sur les modes traditionnels
d'usage de l'espace marin et de ses ressources. Cela permet de comprendre ce
que la nouvelle donne a suscité chez les populations locales, du point
de vue des changements de façons d'utilisation des ressources naturelles
marines. L'objectif est de faire savoir comment les dynamiques locales,
orientées vers l'adoption de nouvelles stratégies de gestion des
ressources marines, ont surgi dans le contexte actuel. Les relations des
communautés humaines vis-à-vis de leurs ressources, sont
essentiellement d'ordre d'usage (l'usus) ; cependant avec des formes
d'utilisation qui diffèrent d'une communauté à une autre
et d'une zone à une autre.
Dans le delta du Saloum, en particulier dans la
communauté rurale de Toubacouta, la gestion des ressources était
auparavant abusive, et cela, malgré le rôle de protection et de
contrôle qu'ont joué les services déconcentrés de
l'Etat installés dans la zone depuis les années 7025.
Sur le terrain, les enquêtes menées auprès des populations
cibles ont révélé qu'avant la mise en défens du
site, l'accès à la ressource halieutique était libre quels
que soient les moyens logistiques et humains dont on disposait. En effet, la
pêche et l'exploitation des mollusques et crustacés dans les
bolongs n'étaient pas du tout réglementées et se
pratiquaient partout sur le domaine maritime de l'estuaire en majorité
constitué de bras de mer. Ces unités hydrographiques marines ont
la réputation d'être poissonneuses, renfermant d'autres
espèces démersales.
Ainsi, c'est dans ces bolongs que les pêcheurs
(résidents ou migrants) effectuent leurs activités.
L'exploitation des ressources halieutiques dans ces bolongs était
anarchique, abusive et était caractérisée par l'absence de
repos biologique, avec l'utilisation des engins et des techniques destructrices
et l'augmentation de l'effort de pêche. Par conséquent, cet
état a conduit à l'épuisement du potentiel halieutique de
ces bolongs qui, auparavant, étaient jugé inépuisables. Et
ce qui fait suite à la disparition de beaucoup d'espèces de
poissons qui y vivaient et de la dégradation de la mangrove par la coupe
de leurs racines dans le cadre de
25 A titre d'exemple, nous citons la DPN (Direction
des Parcs Nationaux) présente dans le delta du Saloum depuis 1976
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l'exploitation des huîtres et murex. Par
conséquent, les poissons de certains bolongs sont épuisés.
Le cas de Bamboung en est un exemple étant donné qu'il
était, de l'avis des enquêtes, le lieu de convergence de tous les
pêcheurs attirés par l'importance du stock halieutique qu'il
regorgeait26.
Cette situation a fait que ce bolong était alors
menacé tant du point de vue de son existence physique que biologique
(à cause de la sur-pêche). Ce dépassement de la
capacité de charge est désigné par certains
spécialistes, par le terme de surcapacité atteint par le
bolong de Bamboung. En effet, " il y'a surcapacité quand les moyens
de production matérielle mise en oeuvre et les forces productives en
activité surpassent le potentiel halieutique sur lequel ils s'exercent,
au point de compromettre sérieusement sa durabilité "
(DIAGNE, 2006)
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