Département de géographie DEA Chaire Unesco
"Gestion Intégrée et Développement
Durable des régions côtières et des petites îles
"
M. Alioune KANE M. Abdoulaye CAMARA M.
Dieudonné PANDARE
Professeur au Département Chercheur à l'IFAN
/ UCAD Maître Assistant à la
de Géographie UCAD Faculté des Sciences
et
Techniques/ UCAD
CONTRIBUTION A L'ETUDE DES AIRES MARINES PROTEGEES
AU SENEGAL : L'EXEMPLE DE BAMBOUNG DANS LA RESERVE DE BIOSPHERE DU DELTA
DU SALOUM. ELEMENTS D'APPROCHE BIOLOGIQUE ET SOCIO-ECONOMIQUE.
Année académique
2005-2006
Présenté par
Idrissa Oumar KANE
sous la direction de
Université Cheikh Anta Diop de Dakar
Organisation de Nations Unies pour
Faculté des Lettres et Sciences Humaines
l'Education, la Science et la culture
2
Sommaire
Sommaire 2
Sigles et abréviations 3
Avant propos 4
Introduction générale 5
PREMIRE PARTIE : LA PRESENTATION SYNOPTIQUE DE L'ETUDE
Erreur !
Signet non défini.
Chapitre 1 : Présentation du cadre
général 14
I- Etude physique de la zone prospectée 14
II- Etude humaine et socio-économique 17
Chapitre 2 : Présentation du cadre
spécifique : l'AMP de Bamboung 20
I- Cadre géographique, historique et statutaire de l'AMP
20
II- Les potentialités biologiques de l'AMP
24 DEUXIEME PARTIE : LA CREATION DE L'AIRE MARINE PROTEGEE DE
BAMBOUNG, UN ENJEU MULTIDIMENSIONNEL DANS LA RESERVE DE
BIOSPHERE DU DELTA DU SALOUM Erreur ! Signet non
défini.
Chapitre 1 : Etude stratégique des impacts
écologiques et socio-économiques 28
I- Evaluation et analyse des impacts positifs 28
II- Evaluation et analyse des impacts négatifs 35
Chapitre 2 : Dynamiques endogènes,
stratégies et contraintes de gestion 37
I- Analyse du contexte local de gestion des ressources marines
et côtières 37
II- Les acteurs et leurs stratégies de gestion: les
approches et les rôles. 39
III- Les limites dans la gestion et les démarches de
solution 43
Conclusion générale et perspectives
47
Bibliographie 49
Table des illustrations 52
Table des matières 53
Annexes 55
3
Sigles et abréviations
AMPB : Aire Marine Protégée de
Bamboung
CRODT : Centre de Recherche
Océanographique de Dakar-Thiaroye
CSE : Centre de Suivi Ecologique
DPM : Direction des Pêches Maritimes
DPN : Direction des Parcs Nationaux
GIRMAC : Gestion Intégrée des
Ressources Marines et Côtières
IFAN : Institut Fondamental d'Afrique Noir
IRD : Institut de Recherche pour le
Développement
IST : Institut des Sciences de la Terre
UICN : Union Internationale pour la
Conservation de la Nature
MEPN : Ministère de l'Environnement et
de la Protection de la Nature
MPEM : Ministère de la Pêche et
de l'économie Maritime
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PGIES : Projet de Gestion
Intégrée des Ecosystèmes du Sénégal
PIB : Produit Intérieur Brut
PLD : Plan Local de Développement
PNDS : Parc National du Delta du Saloum
PRCM : Programme Régional de
Conservation de la zone côtière et Marine
RBDS : Réserve de la Biosphère
du Delta du Saloum
RN : Ressources Naturelles
UCAD : Université Cheikh Anta Diop
UNESCO : Organisation des Nations Unis pour
l'Education, la Science et la Culture
ZEE : Zone Economique Exclusive
Avant propos
Ce travail s'intéresse globalement aux Aires Marines
Protégées au Sénégal, singulièrement dans
les îles du Saloum. Il répond à la thématique de
recherche portant sur les aspects de gestion intégrée et du
développement durable des régions côtières et des
petites îles. Le document comporte deux parties subdivisées
en deux chapitres chacune. La première traite principalement de la
présentation synoptique de l'étude en mettant en relief les
potentialités à la fois biophysiques, humaines, et
socio-économiques du cadre général et spécifique.
La seconde, en étroit rapport avec la première, analyse les
multiples enjeux et/ou impacts de la mise en place de l'AMP de Bamboung sur les
plans biologique et humain, c'est-à-dire les changements en
matière de gestion des ressources marines et les nouvelles dynamiques
opérées au plan local.
La présente étude a été
réalisée grâce au concours de certaines personnes et/ou
structures telles que :
- mes encadreurs M. Abdoulaye CAMARA1, M.
Dieudonné PANDARE2, M. Alioune KANE.3,
- et M. Tahirou DIAW4 qui a bien voulu être
membre du jury.
A ces personnes j'exprime sincèrement toute ma
considération et ma reconnaissance. Je remercie également :
- Jean GOEPP de l'Océanium, Youba
SONKO, conservateur de l'AMP de Bamboung représentant de l'Etat,
Ibrahima DIAME de Soukouta et conservateur de l'AMP représentant
l'ensemble des populations des 14 villages périphériques, Marie
FALL, étudiante à l'université Montréal au Canada
pour son appui documentaire.
Mes remerciements vont aussi à l'endroit de mes chers
professeurs de la section de géographie de l'université Gaston
Berger de Saint-Louis pour leur participation à ma formation.
Je remercie également tous les professeurs du
département de géographie de l'UCAD et mes amis étudiants
de la Chaire Unesco.
4
1 Chercheur à l'IFAN/UCAD.
2 Maître assistant à la Faculté
des Sciences et Techniques/ Département de Biologie Animale/UCAD.
3 Professeur et coordonnateur de la Chaire Unesco/
Département de Géographie- UCAD
4 Professeur titulaire au département de
géographie/ UCAD.
5
Introduction générale
? Contexte et justification
A travers le monde, la gestion intégrée et
équitable des ressources naturelles (RN) se pose avec acuité. Ces
ressources, du fait de leur importance comme base de production et de source de
revenus pour les hommes, font l'objet de multiples convoitises
généralement liées à leur valeur économique
mais aussi en raison de leur utilité dans les autres domaines de la vie.
Ce point de vue relève de deux visions antagonistes : d'une part pour
l'utilisateur, qui ne se préoccupe en général que de
l'exploitation de ces ressources pour satisfaire ses besoins et de l'autre,
pour l'environnementaliste ou l'écologiste, qui défend
l'idée de conservation/protection et de valorisation des milieux dans
lesquels elles se trouvent.
En Afrique, les régions côtières et des
petites îles, d'une manière générale, sont depuis
des décennies sujettes à une forme de dégradation
environnementale imputable, entre autres : aux phases successives de
sécheresse plus ou moins longues et répétées,
à l'exploitation abusive et continue des ressources naturelles par une
population en perpétuelle croissance, mais surtout à
l'insuffisance des moyens de leur conservation de ces ressources.
Au Sénégal, l'espace marin et côtier
constitue en grande partie le principal support de vie des populations et
contribue beaucoup dans le produit intérieur brut (PIB) du pays. En
d'autres termes, l'exploitation des potentialités littorales demeure une
base importante de développement économique à travers des
activités diverses comme la pêche, l'ostréiculture,
l'agriculture, l'exploitation forestière, pour ne citer que celles-ci.
Ainsi, cet atout que représente le littoral aura engendré
naturellement ce que constitue une « littoralisation du peuplement
sénégalais et des activités humaines ».
Autrement dit, la répartition géographique est
caractérisée par une forte concentration des hommes et des
activités sur les zones littorales particulièrement sur des aires
marines et côtières où vit une diversité
d'espèces biologiques. Ce faisant, ces aires ne peuvent échapper
à une dégradation progressive de ses écosystèmes
littoraux : salinisation, acidification des eaux et des sols, pression sur les
ressources naturelles sans oublier les effets néfastes de
sécheresses chroniques. Cet état de fait a poussé les
autorités étatiques à imposer des formes de gestion
rationnelle et durable afin de limiter et même
d'éradiquer ce phénomène de dégradation.
C'est dans cette perspective qu'un certain nombre d'aires ont
été classée et protégée avec un accès
limité (réglementé) selon les normes établies de
l'extérieur. Ainsi cette nouvelle forme de gestion des aires
protégées de la part des autorités gouvernementales, ne
laisse pas indifférent les populations et leurs systèmes de
production traditionnels locaux. Par ailleurs l'idée même de
valorisation de ces aires protégées par l'implantation de
certaines activités suscite malgré tout, une problématique
environnementale majeure. Cet axe de réflexion, de questionnement et
d'analyse sur la « contribution à l'étude des aires
marines protégées au Sénégal : l'exemple de
Bamboung dans la réserve de biosphère du Delta du Saloum
» constitue un apport modeste dans l'affinement et le renouvellement
de la lecture donnée des phénomènes au coeur des
recherches menées sur les sociétés et leur espace,
notamment dans l'avènement des aires marines protégées au
Sénégal.
L'idée de création de l'aire marine
protégée de Bamboung (AMPB) découle d'un fait
constaté et avéré réel : baisse drastique du
stock halieutique dans la réserve de biosphère du Delta du
Saloum, particulièrement dans le bolong de Bamboung ; ceci ayant pour
principales causes le pillage des eaux territoriales, la surexploitation des
ressources et les mauvaises techniques de
6
pêches utilisées (Jean GOEPP par
communication orale). Ce faisant, la préservation des ressources
notamment halieutiques et des caractéristiques biologiques pour un
développement humain durable de l'AMPB devient une préoccupation
absolue et un cheval de bataille des autorités administratives
concernées.
Cependant, cette étude s'intéresse aussi sur
l'implication effective des populations vivant à la
périphérie dans la gestion de cet espace littoral marin car non
seulement celle-ci doit être un modèle de développement
durable qui intègre toutes les activités socio-économiques
mais aussi un modèle qui se construit à partir d'initiatives
locales (buttom up). Celles-ci doivent être impliquées
davantage dans toutes les étapes du processus allant de l'identification
et du diagnostic des contraintes à la programmation et la
réalisation des actions définies dans l'étape de prise de
décisions relatives à la gestion de l'AMP. Et avant de comprendre
comment protéger et contrôler les systèmes
écologiques particuliers, une compréhension de son contexte
culturel est nécessaire5. A vrai dire ce modèle ne
peut s'appliquer que s'il prend en compte tous les besoins sociaux, culturels,
spirituels et économiques de la société, et qu'ils
s'appuient sur une bonne base scientifique.
Cette approche que sous-tend ce principe signifierait en
revanche que la création des AMP en général et de celle de
Bamboung en particulier ne devrait nullement faire appel à une
participation ni imposée, ni provoquée, encore moins formelle
mais à une participation collégiale afin d'atteindre les
objectifs fixés.
Les questions de sensibilisation, d'information ou de
formation des populations co-gestionnaires (les pêcheurs en
particulier), sont à aborder dans le cadre de cette gestion.
L'implantation de l'AMP de Bamboung est par ailleurs une nouvelle initiative
qui a intéressé également les chercheurs de tous les
horizons et de toutes les disciplines confondues dans l'optique de la
complémentarité, d'échange et de discussions sur des
problèmes de gestion intégrée et durable des ressources
naturelles. En effet, cette approche pluridisciplinaire dans la gestion
permettra des recherches convergentes de solutions adaptées et
adéquates mais en ayant une connaissance assez suffisante sur les
mentalités, les réalités socio-historiques et culturelles,
les conditions de vie et les difficultés des populations, mais
également l'écosystème dans tous ses aspects (physiques et
biologiques). Ceci reste fondamental pour mener des recherches fécondes,
bénéfiques et applicables.
Au niveau de la Chaire Unesco de l'UCAD, des études ont
été effectuées sur la réserve de biosphère
du Delta du Saloum. Mais, comme nous l'avons dit plus, ce travail
d'étude s'inscrit dans l'affinement et le renouvellement de la lecture
donnée des phénomènes au coeur des recherches
menées sur les sociétés et leur espace, notamment dans
l'avènement des aires marines protégées au
Sénégal, un concept assez nouveau dans les politiques
environnementales de notre pays.
Pourquoi cette étude à contribution ? C'est
parce qu'actuellement la perception des aires protégées a
changé. Et ce changement résulte de plusieurs facteurs complexes
liés à l'anthropisme, aux contextes, aux situations et à
l'évolution des besoins (variation entre l'offre et la demande). Donc,
ces écosystèmes deviennent logiquement sujets à diverses
formes de mises en valeur et de nuisances aussi bien dans le temps que dans
l'espace. Ainsi,
5 in Bridgewater P.B. (2002), «Biosphere
reserves: special places for people and nature» Division of
Ecological Sciences, UNESCO, Paris, p 9-12. Citation traduite
7
les AMP en tant que écosystèmes riches où
se jouent toutes les exubérances de la vie terrestre, ne peuvent
échapper à cette dégradation tendancielle. De ce fait,
l'AMP de Bamboung constitue un exemple pionnier, une première
expérience relative à la création d'aires marines
protégées au Sénégal. C'est pourquoi elle doit
susciter plus de considération pour une meilleure prise en compte de la
vulnérabilité des écosystèmes fragiles et de ses
populations dans les régions côtières et des petites
îles. Les AMP sont des expériences récentes, ce qui rend
difficile l'appréciation de l'importance des conséquences
qu'elles peuvent avoir sur les communautés de pêcheurs (GIRMAC,
2004)6
Même si le cas de Bamboung constitue, entre autres, un
exemple illustratif, nous admettons volontiers que l'idée de
création d'AMP au Sénégal n'est pas récente. En
effet, ce concept est ancien pour l'administration étatique
chargée de sa gestion mais il est nouveau aux yeux des populations. Le
problème était principalement lié soit à
l'incompréhension, la non adoption du concept par les populations, soit
à la non prise en compte de ces dernières dans la
problématique des AMP. L'implication des communautés locales dans
la gestion des aires marines a connu des étapes, un temps assez
suffisant pour passer d'une approche "top down" à une approche
participative. Ainsi donc, depuis des décennies, les AMP étaient
conçues comme des espaces de conservation hermétique des
écosystèmes marins. L'état de la faune et les
spécificités du milieu étaient essentiellement les
facteurs de cette protection. En plus la conservation de la diversité
biologique des espèces et la richesse du milieu marin à des fins
économiques et de la recherche scientifique, faisaient l'objet d'une
attention particulière.
Une telle entreprise était, dés lors,
considérée par les administrations chargées de leur
gestion, comme étant incompatible à toute activité
anthropique susceptible d'entraîner des pressions à
l'intérieur de ce domaine marin. Pour cette raison fondamentale, les
populations locales ont, dés le début, assimilé
exclusivement les AMP à des barrières dressées contre
elles. Elles n'ont cessé de manifester dans certaines circonstances et
selon les contextes, leur opposition ou leurs mécontentements car
situant ces aires aux antipodes de leurs intérêts. Et à cet
effet, malgré tout, elles s'attachent à élaborer des
mesures d'adaptation (ou de réadaptation) afin de réduire les
désagréments de cette approche étatique de gestion des
ressources naturelles, jugée trop parcellaire et rigide par les
populations elle mêmes.
Par la suite, devant cette situation génératrice
de conflits entre l'administration et les populations, l'idée de prendre
en compte ces communautés dans le processus est devenue une condition
sine qua non. En effet, les acteurs communautaires constituent le
socle de toute AMP véritablement fonctionnelle. Certes,
l'établissement des aires protégées est une pierre
angulaire des stratégies globales de conservation des
écosystèmes fragiles. Cependant, les aires
protégées ne contribuent seulement à la conservation que
si elles sont contrôlées efficacement avec l'appui des
communautés locales riveraines.7Cette dynamique a
commencé à émerger dés le début des
années 1980 époque qui a marqué le déclic. En
effet, décennie charnière dans les stratégies politiques
et de réajustements en matière de gestion des ressources
naturelles, les années 1980 ont été
caractérisées par de perpétuelles remises en cause des
postulats et présupposés qui ont servi de soubassement à
l'action collective. Ainsi, sans prétendre vouloir aborder la question
dans tous ses contours, nous essayons simplement de l'examiner dans ses aspects
les plus importants et pertinents qui aideront, tant soit peu, à une
meilleure prise en compte d'une part des intérêts des populations
dont la survie dépend de
6 GIRMAC, (2004), « Evaluation environnementale
du programme GIRMAC » volume 1, 53 pages.
7 DEARDEN. Philip. et BENNETT Michelle (2005)
«Trends in Global Protected Area Governance, 1992- 2002
» University of Victoria, Canada, p 90-100. Citation traduite.
8
ces ressources cependant dans une optique de conservation
durable, et d'autre part de la valorisation et de la
vulnérabilité des ressources dans le contexte des AMP.
? Problématique
Au Sénégal, le réseau des aires
protégées se situe en général dans les zones les
plus riches en potentialités naturelles8 et où souvent
les populations se sont établies depuis longtemps, et dans la plupart
des cas au niveau des régions littorales humides. C'est l'exemple des
îles du Saloum. Ainsi, cette zone, grâce à l'importance de
ses caractéristiques écologiques, économiques et humaines,
a été érigée, avec le soutien de l'UNESCO en 1981,
en réserve de biosphère puis classée « zone humide
d'importance internationale » ou « site Ramsar » en 1984 par le
programme Man and Biosphere (MaB). Par ailleurs, c'est dans cette
réserve où se trouve le Parc National de Delta du Saloum (PNDS)
couvrant 76.000 ha correspondant à 4,7 % de la superficie totale des
aires protégées du Sénégal (FALL, 2001).
La problématique des aires marines
protégées est l'un des thèmes d'actualité avec tout
ce qu'elle englobe : l'environnement, le social, le politique et
l'économique. C'est sur cette question principale qui sous-tend et
oriente toute la problématique et l'intérêt de cette
étude. Car, bien que la puissance et l'efficacité des AMP comme
outil de gestion des pêches soient prouvées dans de nombreuses
circonstances, elles restent généralement dans la
sous-région à l'état d'hypothèses partiellement
vérifiées. Ainsi, les méthodologies de
vérification de l'efficacité des AMP et l'évaluation de
leurs systèmes de gestion doivent être mis au point et les acteurs
renforcés dans leur capacité à les utiliser (PRCM,
2006)9.
L'AMP de Bamboung fait actuellement l'objet de
multiples convoitises. Cela constitue un enjeu majeur pour les autorités
étatiques, les organisations de défense de l'environnement et les
populations locales surtout. Quelle que soit l'échelle où on se
situe, leur implantation peut avoir des impacts sur l'environnement, sur les
activités humaines, sociales, économiques et culturelles des
habitants concernés. En effet, les communautés locales qui s'y
sont installées depuis des siècles, bien avant l'érection
en aire marine protégée, ont établi des modes
traditionnels de gestion des espaces naturels à des fins
socio-économiques qui reposent sur le droit coutumier, alors que la
conservation de ce milieu fondée sur le droit moderne, est en vigueur.
En d'autres termes, la création de l'AMP de Bamboung est
considérée comme une mesure restrictive de l'accès
à l'espace et aux ressources mais une mesure fondée sur
l'objectif de protection/conservation des écosystèmes
fragilisés d'une part par des causes naturelles telles la
sécheresse et les changements climatiques et d'autre part par des causes
anthropiques liées aux pressions multiformes notamment la
surpêche.
Partant de ce fait, les aires marines protégées
ont été conçues comme des écosystèmes qui
visent la protection d'habitats sensibles et d'espèces clés ou
remplissant des fonctions écologiques particulières par rapport
à la dynamique environnementale et socio-économique. Le Delta du
Saloum, dans lequel se situe l'AMP de Bamboung, répond effectivement
à cette règle.
En d'autres lieu, la création de l'aire marine
protégée de Bamboung s'est accompagnée d'un essor
écotouristique (à l'état balbutiant) que les
autorités ont jugé
8 Le réseau national des aires
protégées s'étend sur une superficie de 1.613.790 ha soit
8 % du territoire national et occupe une bonne partie des zones humides du
pays. (FALL, 2001).
9 in http://www.prcmarine.org/
document pdf titre: « Intégration des AMPs à la gestion
durable des pêcheries
côtières ».
9
nécessaire dans le cadre de la valorisation de la
qualité écologique que détient l'aire marine. Le
Sénégal présente un potentiel certain, qui explique que
2002, année internationale de l'écotourisme, symbolise un axe de
développement prometteur pour ce type d'activité. En effet,
l'aménagement de ce domaine marin comporte des enjeux
socio-économiques avec la mise en valeur du potentiel
écotouristique local et dans la réserve de biosphère de
Delta du Saloum en général. Ainsi, dans l'optique d'un
développement humain durable, nous avons estimé fort
intéressant de traiter la question de l'écotourisme et ses enjeux
dans la petite côte précisément dans le contexte des aires
marines protégées au Sénégal.
Ainsi, dans ce contexte actuel de création de cette
aire protégée, un certain nombre de questions surgit et
mérite d'être posé afin de mieux cadrer nos
hypothèses de recherche qui en découleront :
- Quels sont les impacts de l'implantation de l'AMP de
Bamboung sur les modes de vie traditionnelle locale et sur la diversité
biologique? Autrement dit, quels sont ses effets sur les activités
socio-économiques, notamment la pêche et l'exploitation des
mollusques et des amas coquillés ?
- En quoi consiste l'impasse du cadre réglementaire de
la gestion des ressources naturelles de cette aire marine sur les
intérêts des acteurs locaux étant donné que ces
derniers en dépendent pour satisfaire leurs besoins et en tirer des
revenus substantiels ?
- Comment se déroule le consensus entre populations
locales et autorités administratives concernées dans la gestion
de l'AMP de Bamboung ?
- Quel est l'état des lieux, les potentialités
et l'évolution de l'écotourisme depuis la création de
cette aire marine ?
- En quoi consistent les enjeux de l'écotourisme sur
l'environnement naturel et humain et les dynamismes socio-économiques
?
? Les objectifs de l'étude
Les objectifs spécifiques de cette étude se
déclinent en deux axes principaux suivants:
? Analyser les impacts de cette mise en
défense sur le milieu : étudier toutes les conséquences
sur les conditions de vie des résidents et leurs activités
socio-économiques (pêche, exploitation des huîtres, et des
amas coquillés, etc.) de l'espace marin et côtier
concerné.
? Analyser le degré d'implication des
différents acteurs concernés dans la gestion pour mieux
comprendre leur dynamique endogène et leurs difficultés ou
antagonismes dans la gestion communautaire de l'espace marin et
côtier.
Et pour saisir l'essentiel de cette étude, c'est
à partir de ces questionnements ci- dessus énumérés
que l'élaboration des hypothèses de recherche a été
formulée
10
> Hypothèses
? La création de l'aire marine protégée
de Bamboung a changé les modes de vie et de gestion des ressources
naturelles des populations riveraines.
? L'aire marine protégée de Bamboung constitue
un nouvel outil efficace de co-gestion et de conservation durable de la
biodiversité marine et côtière par les populations
elles-mêmes. Cependant cet outil de gestion est susceptible de nombreuses
controverses.
> Buts de l'étude
Le but de l'étude est axé sur le renforcement
dans la conservation/protection durable de la biodiversité d'une
manière générale et des ressources halieutiques en
particulier mais aussi sur les populations riveraines à faibles
capacités pour faire face et par ailleurs utilisatrices de ces
ressources dans le cadre de leurs différentes activités
socio-économiques.
Le but de cette étude vise à permettre,
grâce aux résultats escomptés, une implication efficace et
permanente des populations locales dans la conservation du potentiel biologique
de l'AMP.
C'est une modeste contribution susceptible de permettre une
revue des différentes politiques de type top down sur les
acteurs locaux, un préalable pour stimuler une prise d'actions
concrètes pour une gestion collégiale durable des ressources
marines et côtières.
> Approche méthodologique
La méthodologie de recherche, adoptée dans la
présente étude, se composera de deux points essentiels :
? La démarche
C'est la phase exploratoire consistant en une recherche
documentaire pour se familiariser davantage avec la zone d'investigation. Elle
porte sur la revue des données secondaires relatives au milieu
d'étude afin de procéder à leur analyse. Des centres de
recherche et/ou de documentation qui sont visités sont :
· La bibliothèque de l'université Cheikh Anta
Diop de Dakar ;
· L'UICN (Union Internationale pour la Conservation de la
Nature),
· IRD (Institut de Recherche pour le
Développement)
· Océanium
· L'institut des sciences de la terre de Dakar (IST) ;
· Direction des Eaux et forêts, Direction des Parcs
Nationaux ;
· Ministère de l'environnement et de la protection
de la nature du Sénégal.
· Direction de l'environnement et des établissements
classés ;
· Le Centre de Suivi Ecologique de Dakar (CSE).
En dehors de ces centres de documentation, nous avons
également consulté certains sites web dans le cadre de la revue
des données secondaires relative au thème choisi.
11
? La méthode et les outils de
recherche
Un chronogramme d'activités sur le terrain a
été élaboré avec l'aide de certains outils de
collecte d'informations. Ainsi trois visites ont été
effectués sur les lieux d'études sur une durée de vingt
deux jours : premièrement du 10 au 16 juillet 2006, deuxièmement
du 11 au 18 août 2006, et troisièmement du 1er au 10
septembre. Chaque visite est fonction des objectifs recherchés.
a- La méthode de recherche
préconisée s'est faite par des enquêtes
adressées aux principaux publics cibles : populations
concernées ou usagers (pêcheurs, entre autres) uniquement celles
résidents dans les quatorze villages périphériques de
l'AMP, puis les autres acteurs impliqués dans le comité de
gestion (Direction des Pêches Maritimes, Direction des Parcs Nationaux et
l'ONG Oceanium), et service régional de tourisme de Fatick. Ces
enquêtes se sont faites, pour plus de fiabilité, auprès des
personnes qualifiées mais également auprès des habitants
ordinaires.
Cependant, les investigations qui sont menées sur le
terrain s'effectueront à l'aide des outils de travail.
b- Les outils : Ce sont les guides
d'entretien sous forme de questionnaires directs ou indirects, les
échantillonnages (sondage au hasard des enquêtés),
et la MARP (Méthode
Accélérée de Recherche
Participative) exploratoire et thématique
(étude de l'évolution de la biodiversité de l'AMP
et étude des impacts socio-économiques, les enjeux, les
contraintes et les perspectives). Cette méthode nous a servi de fil
conducteur pour la collecte de données/informations sur le site cible.
En plus de cela, des observations in situ et des photos à
l'appui sont effectués. Une tentative de typologie des activités
effectuées par les communautés villageoises riveraines a
été réalisée.
Ainsi ces outils ont permis in fine d'obtenir les
résultats ci-dessous qui serviront de base de données pour
l'analyse.
? Principaux résultats attendus
Les principaux résultats attendus dans ce travail
d'étude et de recherche portent sur les atouts et les contraintes de la
gestion de l'aire protégée et de celles qui découlent de
cette gestion, mais également sur les perspectives de
développement durable sous tous ses aspects (humains, écologiques
et biologiques) sur un écosystème marin et côtier souvent
très disputé.
? les changements sur les modes de vie des populations vivant
à la périphérie de l'AMP. ? la qualité et la nature
des changements : amélioration, stagnation ou régression ;
? la ou les dynamique(s) sociale(s) des acteurs et
l'évolution de la vie des relations sur la co-gestion de l'AMP en
faisant un feedback sur le contexte antérieur à son
implantation dans la zone afin d'évaluer les écarts dans
l'exploitation des ressources notamment halieutiques ;
? les enjeux écotouristiques sur le plan
socio-économique : ses avantages pour les populations locales
périphériques ;
? forces et limites des acteurs : moyens humains, techniques,
financiers et organisationnels dans la gestion ;
? enfin les propositions de solutions formulées
relatives aux perspectives vers une nouvelle gestion intégrée,
durable et participative des ressources marines.
12
PREMIERE PARTIE : Présentation synoptique de
l'étude
L'étude synoptique de l'étude comprend deux
chapitres. L'un porte sur la présentation du cadre général
dans lequel se trouve l'aire marine protégée de Bamboung
c'est-à-dire la Réserve de biosphère du Delta du Saloum et
la communauté rurale de Toubacouta et cela sur le plan biophysique (en
relation avec le climat et les potentialités naturelles disponibles),
humain (en rapport avec les principales composantes ethniques de la population)
et socio-économique (relatif aux différentes activités
effectuées et à l'évolution des besoins).
L'autre est axé sur la présentation du cadre
spécifique, c'est-à-dire l'aire marine protégée de
Bamboung. Les éléments essentiels traités dans ce chapitre
(l'historique de sa création, ses ressources biologiques et son aspect
statutaire) permettent d'appréhender la problématique de la
gestion de cet espace protégé.
Les îles du Saloum
Légende de l'AMP
Zone tampon Zone centrale
Mangroves Limite de l'AMP
Figure 1 : Situation géographique du
cadre générale et spécifique de l'étude
14
Chapitre 1 : Présentation du cadre
général
Le cadre général d'étude porte sur les
caractéristiques biophysiques et socio-économiques et les liens
qui existent entre elles.
I- Etude physique de la zone prospectée
La Communauté Rurale de Toubacouta est l'une des
entités géographiques littorales appartenant à la
Réserve de Biosphère du Delta du Saloum. Elle couvre une
superficie d'environ 170 km2 et comporte les limites
géographiques suivantes :
- au nord par la commune de Sokone et l'arrondissement de Djilor
;
- au sud par la Communauté Rurale de Keur Samba
Guèye et la République de
Gambie ;
- à l'est par les collectivités locales de Nioro
Alassane Tall et de Keur Saloum Diané ;
- à l'ouest par l'Océan Atlantique et
l'arrondissement de Niodior.
Le relief est plat dans son ensemble avec cependant des
dépressions au niveau des vallées et des différents cours
d'eau dont le plus important est Néma, nom de l'un des 14 villages
périphériques de l'AMP.
Son appartenance au domaine maritime influence, de
manière directe, le milieu biophysique.
1- Caractéristiques climatiques
Le climat du delta du Saloum est une variante du climat
soudano-sahélien. Autrement dit, la zone est un lieu de transition entre
le domaine sahélien sec et le domaine guinéen humide
caractérisé par deux saisons : une saison pluvieuse de juin
à octobre et une saison sèche période durant laquelle
l'harmattan souffle généralement de février à
mai.
Par ailleurs, la présence des bolongs ou bras de mers
crée un micro-climat tout le long du littoral où habitent les
pêcheurs. Ainsi, le climat se caractérise par des régimes
thermiques et hydriques de type tropical subissant la double influence de la
pluviométrie et des effets océaniques en particulier dans les
marges maritimes de l'estuaire. Les températures varient dans
l'année avec un maximum de 37 °C en mai et un minimum de 20 °C
entre décembre et janvier. Les températures moyennes
annuelles se maintiennent autour de 26 et 31° C. Les normales
pluviométriques accusent une nette régression passant de 800-950
mm (entre 19311959) à 600-750 mm (entre 1960-1989), soit une baisse
comprise entre 18 et 24%. Cela représente l'un des principaux
facteurs de dégradation du paysage de la RBDS et de la réduction
de la biodiversité10.
Au demeurant, le climat qui prévaut dans la zone varie
en fonction des écosystèmes et/ou du domaine géographique
spécifique. L'AMP de Bamboung, grâce à sa
proximité avec la mer, a un micro-climat assez particulier
comparé aux autres domaines maritimes et/ou continentaux de la
réserve. La saison est plus fraîche de novembre à mai avec
des températures plus douces (15°C à
22°C).11
10 Unesco BREDA (Rapport 2002) : Programme
éco-touristique de la réserve de biosphère du Delta du
Saloum (RBDS)-Sénégal. Rapport des activités 2002.
11 in
http://www.ecotour-voyage-nature.com/FR/info_amp_bamboung.html
15
Ici, le climat joue un rôle prépondérant
sur l'équilibre du milieu mais surtout dans la reproduction des
espèces halieutiques notamment les poissons. En effet, d'après
les résultats de recherches scientifiques -sur la caractérisation
de l'état de référence des peuplements de poissons du
bolong de Bamboung- obtenus lors des campagnes d'échantillonnage
réalisées par IRD-CRODT (2003 à 2005), l'activité
de reproduction des poissons est réduite en saison des pluies avec
l'absence d'espèces continentales et l'entrée en repos sexuel
d'espèces marines. 12
Il a été constaté durant cette
dernière décennie que les pluies varient du nord au sud avec une
tendance à la diminution et des bilans pluviométriques
négatifs.
Tableau I : Evolution de la pluviométrie
de 1996 à 2000
Années
|
Cumuls
|
Nombre de jours
|
1996
|
597,6
|
38
|
1997
|
698,8
|
40
|
1998
|
664,6
|
39
|
1999
|
102,3
|
58
|
2000
|
862,8
|
48
|
Source : PLD (Plan Local de Développement) de la
communauté rurale de Toubacouta (2001)
2. Caractéristiques pédologiques
La pédogenèse est liée essentiellement
aux facteurs morpho-bio-climatiques. Autrement dit, les types de sols
dépendent des conditions climatiques et biologiques régnant. La
pédologie concerne les formations à dominante sableuses
constituées de cordons sableux composés de particules fines
d'apports divers (le fleuve et la mer). Ces cordons occupent les îles et
une bonne partie du continent mais également des terrasses marines
composées de sols halomorphes humides qui recouvrent les zones de
mangroves. Ainsi, il y'a dans la zone des sols diors (60 %), des sols deck
(10 %), des sols halomorphes ou tannes (5 %) localisés dans les bolongs,
vers l'embouchure et enfin des sols intermédiaires ou deck-diors (25
%) (FALL, 2000).
Certains problèmes peuvent être mentionnés
: salinisation et acidification des sols dues à l'incursion des eaux
marines (forte avancée de la mer), puis érosion
côtière. En conséquence, il y'a un manque de terres
fertiles, situation préjudiciable au développement des
activités agricoles à cause du processus de salinisation de
l'estuaire.
3. Caractéristiques hydrologiques et
hydrogéologiques
Du point de vue hydrologique, le delta du Saloum est
caractérisé par un estuaire avec des bras de mer donnant
naissance à des îles et un réseau dense de petits marigots
appelés bolong. Le
12 Les auteurs ont effectué
l'échantillonnage sur douze (12) sites en trois campagnes : fin saison
sèche fraîche, fin saison sèche chaude et fin saison
humide.
16
Saloum et le Diomboss sont les deux principaux bras de mer. Ce
réseau est alimenté par l'eau de mer qui peut remonter
jusqu'à 130 Km de l'embouchure. Du fait de l'aridification liée
à la baisse de pluviométrie, les apports d'eau douce ont
fortement diminué, réduisant de manière drastique les
débits des rivières qui se jettent dans le Sine-Saloum.
Les ressources en eaux (eaux de surface ou souterraines)
constituent, à l'image du Nil en Egypte, un don naturel qui doit toute
son importance au vaste réseau hydrographique du bassin du Saloum. Ces
eaux couvrent la quasi-totalité de la surface de l'AMP dont la partie
nord est limitée par le bras de mer le Diomboss. Celui-ci est l'un des
réseau hydrographique les plus fréquenté par les
pêcheurs. En effet, cette façon de repérage des
pêcheries permet d'apprécier le degré d'exploitation des
ressources halieutiques.
Du point de vue hydrogéologique, c'est une zone
où les eaux souterraines sont importantes. Dans la zone d'étude,
il y'a deux types de nappes :
- la nappe du continental terminal (CT) qui se situe dans les
sables entre 10 à 20 mètres de profondeur.
Généralement les débits obtenus (30 à70
km3/h) couvrent les besoins en eau potable des populations locales
;
- la nappe du mæstrichtien, située au-delà
de 300 mètres de profondeurs, est exploitée par le système
de forage.
Cependant depuis ces dernières décennies, du
fait du déficit pluviométrique chronique, les
aquifères n'alimentent presque plus les écoulements fluviatiles.
Les nappes phréatiques sont contaminées par les eaux hypersalines
de l'estuaire et des « bolongs ». Des salinités de 130 g/ml
ont été mesurées au niveau des nappes phréatiques
des « tannes (Diop, 1990).13
En définitive, le potentiel hydrique
considérable de la zone d'étude a été depuis
longtemps une des principales sources de revenus des populations riveraines
grâce aux activités telles que la pêche (industrielle ou
artisanale), l'agriculture, l'ostréiculture (huître), etc.
Aujourd'hui, le potentiel hydrique est caractérisé par une
tendance à la baisse du fait de la diminution de la pluviométrie
et de l'intensité de l'évaporation hydrique. A cela s'ajoute
l'action anthropique (surexploitation et croissance démographique).
4 - Caractéristiques de la
végétation
La végétation est composée
essentiellement par des espèces ligneuses et herbacées
estimées à 188 espèces soient 9 % de l'ensemble de la
flore du pays (Diop, 1990).
Au niveau de la communauté rurale de Toubacouta, la
végétation est caractérisée par sa diversité
dans sa structure. La forêt de Sangako, un des villages riverains de
l'AMP, est l'une des rares réserves, au Sénégal,
peuplée de Khaya senegalensis. L'île de Sipo est le seul
site identifié dans la zone avec un peuplement dense de Prosopis
africana et de Liphira lanceolata. Ce sont des espèces
fortement prisées par la pharmacopée traditionnelle. C'est une
des raisons de conservation de ce type de végétation.
Par ailleurs, la structure arborée composée de
baobab (Adansonia digitata) est importante et parfois assez
dispersée.
13 DIOP S. (1990) : La côte Ouest Africaine
du Saloum (Sénégal) à la Mellacorée
(République de Guinée). Collection études et
thèse, ORSTOM, Paris, 379 p.
17
Les mangroves, malgré leur dégradation,
demeurent dominantes et sont des espèces biologiquement productives avec
une présence des mollusques et de poissons. On y trouve aussi quelques
rôniers.
II- Etude humaine et socio-économique14
1- Les caractéristiques humaines
La Communauté Rurale (CR) de Toubacouta comporte vingt
six mille trois cent cinquante six (26356) habitants. Elle comprend cinquante
et un (51) villages, dont quatorze (14) appartiennent à l'AMP de
Bamboung. Il s'agit de Sandi Coly, Médina, Sangako, Soucouta,
Toubacouta, Bany, Sourou, Dassilamé, Néma Bah, Missirah, Betenti,
Bossinkang, Sipo et Diogaye.
Dans la CR de Toubacouta, la composition ethnique est
hétérogène avec une prédominance de l'ethnie
Socé (50 %) suivie des Sérères niominka (35 %) deux
ethnies majoritaires qui y habitent depuis des siècles en y implantant
des modes de vie et de gestion des ressources naturelles spécifiques. A
ceux-là, s'ajoutent les wolofs qui représentent 5 %, alors que
les peuls et les Bambara ensembles, constituent les 10 %. Ces ethnies ont
été attirées par les énormes potentialités
de la zone.
La croissance démographique est relativement importante
2,8 % avec une population totale estimée à 20546 habitants en
2001 avec un densité assez forte (74 hts/km2). Les plus gros
villages périphériques de l'AMP concentrant une forte
densité de populations sont Toubacouta et Missirah. La population est
jeune : plus de 65 % dont l'âge est compris entre 20 et 25 ans. La
population féminine domine légèrement celle des hommes.
Ceci permettra d'apprécier la population active en fonction des
activités socio-économiques. L'évolution
démographique de la population de 1984 à 2001 se présente
de manière suivante :
Tableau II : Evolution
démographique de la population de (1984 à 2001)
Années
|
Hommes
|
Femmes
|
Effectif
|
1984
|
4333
|
4058
|
8391
|
1985
|
3983
|
3905
|
7888
|
1986
|
4026
|
3944
|
7970
|
1987
|
4028
|
4055
|
8083
|
1988
|
4151
|
4086
|
8237
|
1998
|
4886
|
4890
|
9776
|
1999
|
5329
|
5330
|
10659
|
2001
|
5330
|
5669
|
10999
|
Total années
|
36066
|
35937
|
72003
|
Source : Plan Local de Développement, communauté
rurale de Toubacouta (2001)
14 Nous signalons que toutes les données
chiffrées sont tirées du document du PLD de la CR de Toubacouta
(2001).
18
2- Les caractéristiques socio-économiques
De manière générale, dans la zone
d'étude le contexte socio-économique a été
longtemps sujet à plusieurs contraintes dont les sécheresses
chroniques, la pression sur les ressources (dégradation de
l'environnement) du fait de l'action conjuguée de la croissance
démographique et de la pauvreté des populations. Par ailleurs,
l'essor des activités socio-économiques a été
largement favorisé par l'importance des potentialités naturelles
qui malheureusement ont tendance à la régression. Dans la CR de
Toubacouta et plus particulièrement dans les villages
périphériques de l'AMP de Bamboung, les modes de production
économiques sont de type traditionnel.
? La pêche (faite par les hommes) et la cueillette des
mollusques dont les arches et huîtres (faite par les femmes) sont les
modes d'utilisation les plus fréquemment pratiquées par les
populations locales surtout celles des villages insulaires tels que Sipo,
Diogaye, Betenti et Bossinkang. L'activité de la pêche est de type
artisanal et se pratique dans les bolongs sur la partie maritime.
? L'agriculture vient en deuxième position dans les
modes d'utilisation mais est peu pratiquée dans les villages insulaires
précités. Les principales cultures sont
représentées par l'arachide, le mil, le maïs, le
niébé, le bissap et les cultures maraîchères (fruits
et légumes).
En résumé, la pêche et l'agriculture
constituent les deux principales activités économiques dans les
systèmes de production.
? Le tourisme ou l'écotourisme constituent une
activité émergente dans la zone. Actuellement, ils occupent une
place très importante dans l'économie locale
générant des devises. Plusieurs facteurs expliquent son
développement au nombre desquels on peut citer la beauté et la
richesse du milieu en terme de biodiversité et le climat favorable. Les
deux plus grands hôtels de la communauté rurale sont Les
Palétuviers et Keur Saloum qui se trouvent à
Toubacouta. Il existe aussi de nombreux campements en plein essor dont les plus
réputés sont Keur Bamboung à Soukouta et
Africa Strike à Toubacouta.
? Enfin, les autres activités présentes sont le
commerce qui se pratique avec la Gambie et l'arrière pays mais aussi le
transport de personnes et de marchandises par le système de cabotage.
La répartition des activités dans les quatorze
(14) villages périphériques de l'AMP et les périodes
durant lesquelles elles sont effectuées, sont illustrées par les
tableau III et IV.15 A travers ces tableaux, il y'a une relative
prédominance de la pêche notamment artisanale et
l'ostréiculture (mais dans l'ensemble de la communauté rurale
elle n'occupe que les 15 % des actifs). Il s'agit des activités
traditionnelles, pratiquées par presque les 3/5 des actifs et cela dans
tous les villages périphériques de l'AMP de Bamboung. Ces
activités sont plus importantes dans les villages insulaires, zones
où elles constituent une source appréciable de revenus des
pêcheurs. Le tourisme ou l'écotourisme se développent en
raison des potentialités écologiques du site et viennent en
second rang.
15 Rappelons au passage qu'aucune de ces
activités, sauf l'écotourisme, n'est effectuée à
l'intérieur de l'AMP.
19
Enfin l'agriculture, pratiquée par la majorité de
la population, est peu développée dans les villages insulaires
(Bossinkang, Betenti, Diogaye, Sipo).
Tableau III : La répartition des
activités dans les 14 villages périphériques.
Villages voisins de l'AMP
|
Type d'activités pratiquées
|
Degré ou niveau d'utilisation
|
Toubacouta,
Soukouta, , Missirah
|
Pêche et ostréiculture
|
+ + +
|
Agriculture
|
+
|
Tourisme
|
+ +
|
Sandi Coly, Médina, Sangako,
|
Pêche et ostréiculture
|
+ + +
|
Agriculture
|
+ +
|
Tourisme
|
+
|
Bani, Sourou, Dassilamé, Néma
|
Pêche et ostréiculture
|
+ + +
|
Agriculture
|
+
|
Tourisme
|
-/+
|
Bossinkang, Betenti, Diogaye, Sipo
|
Pêche et ostréiculture
|
+ + +
|
Agriculture
|
-/+
|
Tourisme
|
+ +
|
Source : Enquêtes effectuées en 2006
Tableau IV : Calendrier saisonnier des
activités principales effectuées.
Activités
|
Périodes
|
saison hivernale
|
saison sèche
|
pêche et ostréiculture
|
+ + +
|
+ + +
|
agriculture
|
+ + +
|
-/+
|
tourisme
|
-/+
|
+ + +
|
Source : Enquêtes effectuées en 2006
NB : + + + = très
fréquente , · + + = moyennement fréquente , · + =
peu ou relativement fréquente , · -/+ = absente ou
quasi-inexistante
20
Chapitre 2 : Présentation du cadre
spécifique : l'AMP de Bamboung
Le cadre spécifique d'étude, l'AMP de Bamboung,
est analysé sous l'angle historique, biologique (les ressources animales
et végétales existantes) et du point de vue de son statut actuel
de gestion.
I- Cadre géographique, historique et statutaire
de l'AMP
Il s'agit de la situation géographique de l'AMP, du
processus de sa mise en place et de statut de gestion de cette aire
protégée.
1- Cadre géographique
L'Aire Marine Protégée de Bamboung (AMPB) se
trouve dans la partie sud du Delta du Saloum (cf. figure 1, p.13). Au plan
administratif, elle appartient à la région de Fatick, plus
précisément à la Communauté Rurale de Toubacouta,
département de Foundiougne. Elle est entourée de quatorze
villages dont : Sandi Coly, Sangako, Médina Sangako, Soucouta,
Toubacouta, Bany, Sourou, Dassilamé, Néma ba, Missirah, et
Betenti, Bossinkang, Sipo, Diogaye étant des villages insulaires.
C'est un sanctuaire de forme hexagonale s'étendant sur
environ 7000 ha et faisant partie intégrante de la Réserve de
Biosphère du Delta du Saloum (RBDS)16, limitée au Nord
par le bras de mer de Diomboss, au Sud par les forêts de Kabaye et de
Kolé, à l'Est par le bolong de Bandiala et enfin à l'Ouest
par la forêt de Diogaye. Le relief de la zone est
généralement plat.
Cette aire marine est subdivisée en deux zones
principales : d'une part l'aire centrale qui est une zone maritime
essentiellement constituée d'un bolong très ramifié et de
l'autre, une zone tampon située à la périphérie de
l'aire centrale et composée d'une partie maritime et continentale. Ce
bolong est un affluent du fleuve Diomboss et a une superficie de 8000
km2 il possède une longueur de 12 km à partir de
l'embouchure du Diomboss aux vasières de la forêt de Kolé,
une largeur variant entre 50 et 100 m et une profondeur fluctuant entre 0 et 7
m)17.
En raison de la présence d'une nappe phréatique
importante sur l'île de Coco (rive ouest), des sources souterraines se
jettent dans le bolong réduisant ainsi la salinité du fleuve. Ces
conditions spécifiques créent un climat favorable à
l'épanouissement de la flore et de la faune maritimes.
16 Située dans la partie estuarienne du
bassin hydrographique du Sine-Saloum du Diombos et du Bandiala, la RBDS est
comprise entre 13°35 et 14°15 de latitude Nord et 16°03 et
16°50 de longitude Ouest. Sur le plan administratif, la RBDS est à
cheval sur les régions de Kaolack et de Fatick.
17 Cf. site : http :/
www.oceanium.org/Bamboung
Figure 2 : vue de dessus du bolong
Source : Oceanium, 2005
Figure 3 : vue de près du bolong (zone de
reproduction et de refuge des poissons)
Source : Kane, 2006
21
22
2- Historique de la création de l'AMP de
Bamboung
C'est la première expérience de la mise en place
des aires marines protégées au
Sénégal.18 Cette création entre dans le
cadre du projet "Narou Heuleuk"(qui signifie la part de demain) initié
par l'Océanium pour lutter contre l'exploitation non durable des
ressources marines et côtières notamment halieutiques (par la
surpêche et par l'utilisation des techniques ou engins de pêche non
appropriés), et de la biodiversité végétale
(surexploitation des mangroves). 19
Ainsi, la protection du bolong de Bamboung a été
la principale solution aussi bien pour les autorités étatiques
que pour les populations périphériques, une solution qui
s'inscrit dans le plan de gestion de la réserve de biosphère du
delta du Saloum relatif à la conservation de la diversité
biologique.
Ainsi, la création de l'AMP de Bamboung a suivi plusieurs
étapes :
? En octobre 2002, le conseil rural de Toubacouta, à la
suite d'une réunion de sensibilisation et d'information sur les plans
locaux de développement, fait une délibération portant sur
la mise au point d'un instrument de protection de leur espace communautaire et
de sa biodiversité pour les générations actuelles et
futures. Cette délibération émanant de l'autorité
locale et jetant les bases d'une gestion rationnelle des ressources naturelles,
est acceptée à l'unanimité le 10 octobre 2002
(délibération n° 06/CRT).
? En avril 2003 les populations locales, avec l'appui de
l'Océanium, ONG sénégalaise de défense de
l'environnement, ont achevé le processus de création de cette
aire marine en procédant à l'inauguration présidée
par le Ministre de l'Environnement et de la Protection de la Nature.
? En novembre 2004, la signature du décret
présidentiel n°2004-1408 portant création de l'AMP de
Bamboung, parmi les cinq autres, finalise le processus. Désormais, le
projet de protection de cet espace marin est devenu une réalité
qui s'est concrétisé par l'intervention de plusieurs acteurs
(populations, la collectivité locale de Toubacouta, Etat par
l'intermédiaire de la Direction des Parcs Nationaux, Océanium, et
les institutions de recherche-développement comme l'UICN, IRD, etc.).
? En décembre 2004, l'épouse du Chef de l'Etat
inaugure un campement écotouristique à Keur Bamboung, le 11
Décembre 2004, un des volets s'insérant dans le cadre du plan de
gestion.
Cependant depuis sa création, l'AMP de Bamboung fait
l'objet de convoitises avec des enjeux de taille relatifs à
l'utilisation et à la conservation des espèces halieutiques de ce
bolong.
18 Au Sénégal, il a été
alors prévu la création de cinq autres AMP à savoir : AMP
de Saint-Louis, AMP de Kayar, AMP du Cap Vert, AMP de Joal-Fadiouth, et AMP de
Abene.
19 D'après les propos de Ibrahima DIAME,
conservateur de l'AMP résident à Soukouta.
23
3- Cadre statutaire de la gestion de l'AMP
« L'AMP se définit juridiquement comme un
dispositif de police administrative spéciale » (Feral et
al., 2004). D'une manière générale, la gestion du
domaine maritime et de ses ressources au niveau national relève des
prérogatives de l'Etat. Autrement dit, ce dernier détient les
pouvoirs de décision et de gestion. Ainsi, en vertu de l'article 2 du
décret n° 20041408 du 4 Novembre 2004 portant sue la
création des aires marines protégées au
Sénégal, « les objectifs de chaque aire marine
protégée, les principes d'accès, d'exploitation et de
gestion qui découlent des conventions internationales, des
législations et des politiques nationales d'environnement et de
pêche en vigueur, seront définies sous formes
d'arrêtés conjoints des ministères chargés de
l'environnement et de la pêche ».
Par ailleurs, dans le contexte actuel de gestion des
ressources naturelles, l'Etat insuffisamment pourvu de moyens pour lutter
contre le braconnage et les coupes sauvages, passe de la répression
à un jeu subtil de sensibilisation/négociation avec les notables
et les responsables locaux. C'est pourquoi dans le cas de Bamboung, partie
intégrante du domaine maritime de l'estuaire du Saloum, la gestion
s'effectue au niveau local par un système de co-administration
appelé aussi co-gestion. Dans ce cas, les acteurs locaux, en
collaboration avec les agents extérieurs assermentés, ont
réussi à légitimer leur intervention à travers des
comités locaux de gestion de l'AMP. Ceci lui confère à
celle-ci un statut de gestion à dimension communautaire.
Cette intervention des communautés villageoises
constitue bien un gage de gestion intégrée et durable de la
biodiversité car elle s'appuie sur une démarche
volontaire.
Cependant, le caractère hétérogène
de cette population ainsi que les multiples intérêts parfois
contradictoires des multiples acteurs impliqués peuvent être des
facteurs de blocage potentiels ou réels dans la gestion. Aussi,
l'intervention de l'Etat devient incontournable. Pour celui-ci, du point de
juridique et administratif, l'AMP est « la circonscription d'un espace
administré et réglementé sur lequel sont définies
des compétences juridiques attribuées aux différentes
autorités administratives impliquées dans le processus de
décision, de gestion et de sanction ». (Feral et al.,
2004).
Cette intervention de plusieurs acteurs dans la gestion de ce
domaine littoral marin peut provoquer un entassement de règles et de
normes de nature différentes dans la mesure où les unes
relèvent du droit traditionnel émanant des populations locales et
les autres du droit moderne de gestion d'obédience étatique. Par
conséquent, cette superposition des deux droits est susceptible de
rendre confuse le statut de l'AMP et de sa gestion.
24
II- Les potentialités biologiques de l'AMP
1. Potentialités phytologiques
Le site d'étude présente une
végétation et une flore relativement diversifiées. La
végétation est composée essentiellement de forêts de
mangroves. Du point de vue de la classification phytologique, la mangrove est
l'espèce à la fois abondante et dominante dans le milieu avec
trois familles d'espèces : les Rhizophoracées, les
Verbénacées et les Combrétacées.
Elle est localisée en bordure du bolong de Bamboung couvrant une
superficie d'environ 18 000 km2 soit 36 % de l'AMP. Ce type de
végétation est tout particulier sert de lieu de reproduction pour
de nombreuses espèces de poissons et pour les oiseaux. En plus, d'autres
espèces végétales sont recensées comme les
palétuviers, Pterocarpus erinaceus, Khaya senegalensis, Parkia
biglobosa (PGIES20, 2003). De nombreux problèmes
liés à la végétation ont été
répertoriés dans la zone. En effet, la mangrove a
été affectée à la fois par la surexploitation et
par l'augmentation de la salinité des eaux. Des recherches ont
montré que d'autres espèces végétales, notamment
Cocos nucifera et Elaeis guineensis ont complètement
disparu de certains endroits ou sont très dégradées.
2. Potentialités zoologiques
L'aire marine de Bamboung est aussi une zone de
prédilection de nombreuses espèces animales. On y rencontre des
espèces marines telles que les poissons représentés par 65
espèces recensées constituées par les carpes rouges et
grises, mulets, dorades, sardinelles, capitaines, baracoudas, lottes,
otolithes. Au demeurant, voici l'inventaire de quelques espèces de
poissons recensées.
Tableau V : Classification et inventaire
ichtyologique de l'AMP de Bamboung
Familles
|
Genres
|
Espèces
|
%
|
Carangidae
|
Chloroscombus
|
chrysurus
|
11
|
Mugilidae
|
Liza
|
dumerili
|
8
|
Clupidae
|
Ethmalosa
|
fimbriata
|
34
|
Sardinella
|
maderensis
|
27
|
Gobiidae
|
Periophtalmus
|
papilio
|
20
|
Source: IRD-CRODT, 2005 (voire encadré, page 25 et 26).
20 Projet de gestion intégrée des
écosystèmes du Sénégal
25
On y trouve aussi une population abondante d'oiseaux de toutes
sortes comme les hérons, les pélicans, les flamants, etc. Il
existe également une faune sauvage terrestre composée de singes,
d'hyènes, de phacochères, etc.
Quelques résultats de la recherche
scientifique
(Caractérisation de l'état de
référence des peuplements de poisson et suivi biologique de l'AMP
Bamboung).
De 2003 à 2005, trois campagnes pour
la caractérisation de l'état de référence et 5
campagnes pour le suivi biologique sur 12 sites
d'échantillonnage sélectionnés : au total huit campagnes
d'échantillonnage réalisées.
Protocole adopté : pêche
d'échantillonnage à la senne tournant coulissante (205 m de long,
20 m de hauteur, 14 mm de maille).
Période : fin de saison sèche
fraîche, fin de saison sèche chaude, fin de saison
humide
? 65 espèces recensées appartenant à trente
familles, ajouter Periophtalmus popilio non
pris par la senne tournante mais observé sur les racines
de mangrove
? Familles les plus représentées : Carangidae
avec 8 espèces, Mugilidae 6 espèces,
Haemulidae 5 espèces, Clupeidae 4
espèces,
? 12 familles sur 30 ne sont représentées que par 1
seule espèce,
? Les espèces estuariennes d'origine marine (se
reproduisant en estuaire) plus
importantes dans le bolong de Bamboung (19 espèces),
? 17 espèces marines estuariennes (se reproduisant
habituellement en mer),
? 04 espèces strictement estuariennes.
Le reste du peuplement est marin accessoire et marin
occasionnelle
? Abondance : Ethmalosa fimbriata 34 %, Sardinella
maderensis 27%, Chloroscombus chrysurus 11%, Lisa dumerili 8%
? 42 espèces sur 65 présentent une
activité sexuelle
? 35 espèces présentent des stades de
maturité sexuelle supérieur ou égale à 4
(individu mûr, pré ponte) qui permet de déduire
qu'elles s'y reproduisent régulièrement ou occasionnellement
? 7 espèces présentant un stade de
maturité sexuelle 3 (individu en cours de maturation
donc début de reproduction dans le bolong mais n'y
pondent pas forcément là)
26
(Suite 1)
Activité de reproduction réduite en
saison des pluies dans le bolong de Bamboung (absence
d'espèces continentales et entrée en repos sexuel
d'espèces marines)
? 14 espèces apparues après fermeture du bolong,
? 1 % d'espèces prédatrices avant fermeture du
bolong et 6% après,
? Campagne d'échantillonnage de la phase de
caractérisation de l'état de référence, 51
espèces recensées,
? Au terme de la phase e de suivi biologique, la richesse
spécifique globale du bolong de Bamboung est de 65 espèces soit
plus de la moitié des espèces signalées dans l'ensemble de
l'estuaire du Sine Saloum,
? Zone de nourricerie,
? Zone de reproduction de nombreuses espèces de poisson
d'intérêt commercial (Mugilidae, Clupeidae, Scianidae.
NB : Indicateur d'un retour à
un peuplement moins exploité : une activité de reproduction
apparemment plus forte et une élévation sensible du niveau
trophique.
Source: IRD-CRODT, 2005
27
DEUXIEME PARTIE : La création de l'AMP de
Bamboung, un enjeu multidimensionnel dans la Réserve de
Biosphère du Delta du Saloum (RBDS)
La création de l'aire marine protégée de
Bamboung a, comme cela est indiqué sur le titre, des enjeux qui touchent
plusieurs dimensions : l'environnement, le social, l'économique et
l'administration. Par ailleurs, le facteur clé de la mise en place de
cette aire protégée est la naissance d'une dynamique
endogène entreprise par les acteurs locaux et l'ensemble de la
population pour gérer les potentialités et les acquis de cette
création.
Cependant, à côté de cette dynamique
endogène, l'aire marine protégée de Bamboung fait l'objet
d'implication d'acteurs extérieurs comme l'Etat par
l'intermédiaire de ses services administratifs
déconcentrés et les ONG en l'occurrence Oceanium qui est une
association orientée vers la défense du milieu marin.
Cette présence de plusieurs acteurs est source de
conflits potentiels dans la mesure où les intérêts des uns
et des autres sont différents. Ce qui fait que la création de
cette aire marine protégée reste problématique.
28
Chapitre 1 : Etude stratégique des impacts
écologiques et socio-économiques
L'étude stratégique comporte les
éléments d'impacts (positifs et négatifs) engendrés
par la création de l'AMP sur les ressources, les populations et sur
leurs activités socio-économiques.
I- Evaluation et analyse des impacts positifs
1- L'impact sur l'environnement biophysique
Il s'agit d'évoquer le constat général
relatif à la restauration des caractéristiques biophysiques du
bolong de Bamboung qui, avant sa protection, avait largement
dépassé sa capacité de charge. D'après nos
enquêtes effectuées auprès des populations environnantes
Cette situation était à son degré critique
caractérisée par une dégradation notoire des ressources
halieutiques du fait de la surpêche et des techniques de captures
inadaptées, aussi de la végétation à cause des
coupes de mangrove pour la cueillette des huîtres).
Cependant, en évitant toute
généralisation hâtive, la mise en place de l `AMP de
Bamboung, dont les objectifs prioritairement fixés sont la conservation
des ressources halieutiques et de la biodiversité du bolong, en est
à cet effet une solution de restauration. Celle-ci consiste à
rendre un écosystème dégradé à son
état initial tout en renforçant sa capacité à
remplir ses fonctions écologiques qui lui sont dévolues. Les
résultats observés à l'issue des investigations sur le
terrain sont d'une part la reconstitution du stock halieutique et d'autre part
la restauration de la couverture végétale des mangroves.
1-1- Impact sur les ressources halieutiques
L'impact de la mise en place de cette aire marine dans le
delta du Saloum est perceptible comme par exemple le retour des poissons dans
le bolong de Bamboung, long d'environ 16 km. Ce dernier est en train de
connaître, en l'espace de trois ans, une
régénération importante de son stock. En effet, de
nombreuses espèces de poissons sont présentes aussi bien en
qualité qu'en quantité du fait de l'application d'un repos
biologique par la fermeture du bolong. Ce repos biologique, synonyme de
jachère chez l'agriculteur, a permis une reproduction d'espèces
appartenant aux familles des Mugilidae, Gobidae,
Haemulidae, Clupeidae, Carangida, etc. Aujourd'hui, de l'avis
des pêcheurs, certaines espèces de poissons qui étaient
rares ou en voie d'extinction telles que le mérou (thiof) ont
réapparu dans le bolong.
Et par ailleurs, le suivi-évaluation sur l'état
des ressources halieutiques du bolong effectués à partir de 2003
par l'IRD-CRODT, a donné des résultats encourageants. Ainsi, plus
de 65 espèces ont été recensées pour la
première campagne 2003-2005 ; récemment en mai 2006 environ 80
espèces de poissons ont été identifiées dans le
bolong. Une liste non exhaustive de ces espèces se reproduisant dans le
bolong a été obtenue après la mise en place de l'AMP : ce
sont les carpes rouges et grises, mulets, dorades, sardinelles, capitaines,
baracoudas, lottes, otolithes. Cette amélioration du stock
halieutique résulte aussi du fait que le bolong de Bamboung constitue
naturellement un écosystème marin où se reproduisent et
grandissent les poissons. Ceci a eu un effet positif indirect dans la mesure
où le bolong de Bamboung alimente en poissons les autres
bolongs21 interconnectés à lui. Dans le bolong de
Bamboung, il a été recensé 65 espèces appartenant
à 30 familles soit plus de la moitié des espèces
21 Ces bolongs se trouvent en dehors de l'AMP et sont
exploités librement par les 14 villages périphériques du
site protégé.
29
signalées dans la réserve de la biosphère
du delta du Saloum. Et d'après les mêmes auteurs (l'IRD et le
CRODT), 12 familles sur les 30 ne sont représentées que par
une (1) seule espèce. Les espèces estuariennes d'origine marine
sont plus importantes dans l'AMP avec 19 espèces recensées.
L'autre espèce exploitée sur le site est le mérou
bronzé (Epinephelus aeneus) appelé thiof (IRD-CRODT,
2004).
Figure 4 : Pourcentage
des espèces de poissons inventoriées dans l'AMP
de
Bamboung
Ethmalosa fimbriata Sardinella
maderensis Chloroscombus chrysurus Liza dumerili
Periophtalmus popilio
Source des données chiffrées: IDR-CRODT,
2005
20%
0%
8%
11%
27%
34%
1-2- Impact sur la mangrove et les amas coquilliers
1-2-1- Impact sur la mangrove
L'impact de la mise en défense est perceptible sur les
ressources végétales du site par une
réhabilitation/restauration de la mangrove, strate dominante et
caractéristique du bolong de Bamboung. Le rôle de cette
végétation est très important dans l'équilibre
écologique du milieu. En effet, elle sert d'écosystème de
reproduction, de nurserie et de refuges (habitats) de plusieurs espèces
notamment halieutiques (poissons, huîtres, etc) et également la
faune terrestre comme les singes et oiseaux.
Aujourd'hui, avec l'implantation de l'AMP, plusieurs mesures
de protections et/ou de conservation ont été mises en oeuvre. En
effet, l'accès limité à ce domaine marin de l'estuaire du
Saloum a favorisé la régénérescence de la mangrove
qui n'est plus sujette à des coupes sauvages et abusives par les
populations. Aujourd'hui, celles-ci ont compris l'importance que constitue
cette ressource végétale. Ainsi, grâce aux efforts de
sensibilisation et d'information qui ont été faits, les impacts
positifs constatés se traduisent par la forte reproduction et
l'amélioration quantitative de la biodiversité halieutique : de
nombreuses espèces de poissons et mollusques tels que les huîtres
(Crassostrea gasar) et le Murex. Mais ces ressources sont
interdites d'exploitation.
30
Figure 5 : Les efforts de conservation ont
permis la régénération de la mangrove
1-2-2- Impact sur les amas coquilliers
Même si les objectifs de l'AMP demeurent principalement
orientés vers la conservation des ressources halieutiques et
végétales, la valorisation d'autres ressources comme les amas
coquilliers doit également être inscrite dans ce cadre. Avant la
mise en place de l'AMP, l'exploitation des amas coquilliers était une
source appréciable de revenu pour les populations
périphériques. Ainsi, l'aspect monétaire de cette
ressource avait, de l'avis des populations, entraîné une
exploitation abusive et par conséquent cela a causé une
dégradation progressive.
La création de cette aire marine protégée
a réduit l'exploitation des amas coquilliers grâce aux mesures de
protection des ressources naturelles du site prises. La valeur nutritive des
amas coquilliers (riches en calcaire), pour certains végétaux
comme les baobabs, constitue une des principales raisons de sa protection. En
plus de cela, la présence de cette ressource archéologique est
importante dans la mesure où le site de construction du futur
écomusée est identifié dans un des endroits de l'AMP
possédant un potentiel considérable d'amas coquilliers.
Figure 6 : La mise en place de
l'AMP a contribué à la conservation des amas coquilliers.
31
2- L'impact sur l'environnement socio-économique
L'implantation de l'AMP a eu aussi un impact sur les
communautés humaines, et de leurs modes de vie socio-économique.
Désormais ces modes de production locale vont subir des changements
observables sur les pêcheries locales et sur l'écotourisme.
2-1- Impact sur les pêcheries locales
Dans la zone, les systèmes de productions halieutiques
des populations marquent une évolution se traduisant par une
réduction (certes timide) de l'effort de pêche. Ainsi, depuis la
fermeture du bolong de Bamboung, il n'y a plus d'exploitation des ressources
halieutiques, de même que le recours aux mauvaises techniques de
pêche. Les populations des villages périphériques ont
adopté des mesures de co-gestion des pêcheries locales dont les
principaux axes sont la mise en défense du bolong, l'observation du
repos biologique dont la période reste encore à définir.
La gestion communautaire des ressources halieutiques locales et de la
diversité biologique est assurée par un comité de gestion
et de surveillance. Elles visent principalement à réduire les
prélèvements abusifs des poissons et à effectuer une
protection de la biodiversité végétale menacée par
la surexploitation des huîtres. Les relations populations-ressources
marquent un début de changement. Il se développe par une prise de
conscience sur la dégradation de l'environnement et de la baisse du
stock halieutique. Dans le contexte actuel d'utilisation des ressources, le
meilleur pêcheur n'est plus celui qui ramasse le plus de poissons, mais
celui qui les protège le mieux possible.
Ce changement observé dans les pêcheries locales
se lit à travers une forte mobilisation des acteurs locaux
(pêcheurs surtout) pour gérer durablement la biodiversité
de cette aire marine. Cependant, des braconnages sont, quelques fois,
constatés. L'amélioration du potentiel halieutique dans les
bolongs constitue un atout pour les populations étant donné que
certaines espèces comme le mérou (thiof), et autres ayant une
haute valeur marchande, contribueront à l'optimisation des revenus
substantiels des riverains.
Figure 7 : Mise à terre des
captures de la pêche artisanale à Soucouta (l'enrichissement en
poissons des autres bolongs constitue un atout pour les
pêcheurs)
32
2-2- Reconversion comme stratégie de minimisation
des risques ? 2-2-1- Reconversion vers l'écotourisme
L'étude de l'écotourisme porte sur ses enjeux et
perspectives au niveau de la Petite Côte sénégalaise, dont
les îles du Saloum. C'est une activité émergente dans la
zone qui fait l'objet de multiples convoitises (administration publique, ONG et
les acteurs locaux). Cela est du au fait qu'il constitue un créneau
d'avenir qui sous-tend un développement socio-économique de la
localité avec comme principe, la préservation de
l'environnement.
? Enjeux par la création d'emploi
L'écotourisme, avec la mise en place de l'AMP de
Bamboung a largement contribué à l'adoption d'autres types
d'activités génératrices de revenus en dehors de la
pêche par les populations locales. En effet, les nouveaux modes de
production s'expliquent en terme d'emplois directs ou indirects pour les
communautés villageoises. La frange de la population la plus
ancrée dans cette nouvelle donne est constituée essentiellement
de jeunes pêcheurs menant une double activité pour diversifier
leurs sources de revenus.
Figure 8 : Vue du campement de Keur Bamboung
L'emploi généré par
l'écotourisme est un atout pour les pêcheurs reconvertis.
Au nombre des innovations, il y'a le transport par pirogues
des touristes ou autres personnes sur les sites. Ce type d'activité est
très développé au niveau des villages insulaires où
les populations font des échanges par le système de cabotage
(îles Betenti, Sipo, Bossinkang et Diogaye).
33
? Les enjeux par l'édification d'un
écomusée
L'édification d'un écomusée est une
conséquence directe de l'implantation des activités
écotouristiques au sein de l'AMP de Bamboung. C'est un ambitieux projet
qui implique tous les acteurs dans le cadre du plan de gestion de l'aire marine
et de ses ressources biologiques.
Situé dans la partie sud-est du bolong
précisément dans la zone Diorom bu mag, le site
d'implantation du futur écomusée est un écosystème
riche en potentialités naturelles et archéologiques. En effet, la
présence de mangroves et d'Adansonia digitata, et l'importance
des amas coquilliers lui confère des avantages considérables pour
la mise en place d'un espace à vocation culturelle.
L'idée de création de ce futur édifice
émane des différentes parties prenantes impliquées dans la
gestion, en particulier l'ONG Oceanium qui est le principal concepteur et
promoteur et les 14 villages appartenant à la gestion. Ceux-ci sont les
maîtres d'oeuvre représentés par leurs acteurs locaux dans
le processus de réalisation du projet.
Par ailleurs, les objectifs attendus dans ce cadre :
Objectif 1 : les retombées financières
et économiques que générera l'écomusée
seront au profit du comité local de gestion regroupant les villages
périphériques. Ceci entre en droite ligne au renforcement des
activités écotouristiques et des rentrées de devises (par
des visites touristiques).
Objectif 2 : valorisation et conservation durable du
potentiel biologique par la protection des amas coquilliers par exemple.
Objectif 3 : valorisation du potentiel culturel local par la
promotion des activités de loisirs et d'esthétiques :
conservation et exposition d'objets d'art locaux à haute valeur
historique.
Objectif 4 : contribution directe à
l'amélioration des revenus des populations par la vente des objets d'art
à haute valeur marchande, mais également la vente de produits de
consommation locale tels que le miel, les huîtres ou yokhoss et
murex ou toufa (séchées), noix d'acajou grillés,
etc.
En somme, ce projet constitue un enjeu considérable du
point de vue du développement local sur tous les plans (social,
économique, historique et culturel surtout).
2-2-2- Reconversion vers d'autres modes de
production
Les populations locales des villages
périphériques ont diversifié leurs activités
socio-économiques telles que le maraîchage, le transport de
marchandises, le commerce ou l'artisanat. Ces activités étaient,
jadis rarement convoitées et considérées comme secondaires
au regard de la pêche.
La mise en place de l'AMP, a propulsé ce type
d'activités considéré comme une stratégie
d'atténuation des effets néfastes de la réduction des
stocks halieutiques et des mesures draconiennes prises dans le cadre de la
protection de cet espace marin. Cette reconversion est synonyme de
diversification de la production et des investissements.
34
2-3- La contribution de l'AMP au développement
local autocentré
Au niveau de la Communauté Rurale de Toubacouta, la
mise en place de l'AMP de Bamboung est accompagnée d'un essor
écotouristique. Ainsi, un campement écotouristique y a
été installé pour assurer deux fonctions principales :
pérennisation du projet de conservation de la diversité
biologique et de développement socio-économique par des
rentrées de d'argent à partir des recettes. L'écotourisme,
joue un rôle d'intégration dans le développement local dans
la mesure où une partie des recettes22 revient à la
Communauté Rurale. En effet, cette contribution aux fonds
budgétaires permet de mesurer toute l'importance de l'écotourisme
en termes d'enjeux sur les finances locales et de perspectives pour les
objectifs de développement inscrit le Plan Local de
Développement.
En définitive, tous ces avantages peuvent être
considérés, d'une part, comme des mesures d'accompagnement et
d'autre part comme une stratégie de gestion -ou de minimisation- des
risques ou effets négatifs de cette mise en défense sur leur
survie. En d'autres termes, il est important de constater que malgré la
mise en place de l'AMP, les populations locales essayent, quel que soit leurs
moyens et leurs capacités, de s'adapter au nouveau contexte
socio-économique instauré par l'accès limité et
réglementé des ressources naturelles.
Figure 9 et 10 : Infrastructures du
campement écotouristique de Keur Bamboung
22 Les recettes tirées de l'écotourisme
servent l'une pour le fonctionnement du campement (entretien), l'autre pour la
surveillance de l'AMP.
35
II- Evaluation et analyse des impacts
négatifs
La mise en place de l'aire marine protégée de
Bamboung comporte, certes, des aspects essentiellement positifs sur le milieu
biophysique, mais aussi des aspects négatifs malgré
l'amélioration des conditions de vie des populations.
Le bilan des cinq dernières années de
création est mitigé. En effet, quel que soit le contexte
socio-économique, ces aires sont susceptibles d'avoir des
conséquences néfastes sur leur lieu d'implantation, et cela sur
tous les plans. « La mise en place des AMP répond à une
situation de surexploitation des pêcheries à la faiblesse de
l'aménagement et de la gestion des pêches
»23mais cette mise en défense a lésé
aussi bien les populations vivant à la périphérie que
l'écosystème lui-même.
1. Impact sur le tissu socio-économique
Les mesures de restriction à l'accès aux
ressources halieutiques instaurées dans le cadre de l'AMP ont
affecté les communautés villageoises des zones
périphériques et surtout celles se trouvant les plus près
du site. Les activités socioéconomiques étaient
exclusivement conditionnées par la présence de ce bolong
où elles pratiquaient. Il s'agit essentiellement des pêcheurs des
villages de Bossinkang, Sourou, Bani, Soucouta, Toubacouta, Dassilamé,
Néma Ba, et Bamboung.24
Les conséquences les plus néfastes aux
intérêts de ces populations s'expliquent par la baisse des
revenus. Cela a conduit certains pêcheurs à la reconversion
à d'autres filières pour « amortir durablement les
contrecoups de la restriction des prélèvements des espèces
démersales » (Diagne, 2005) ; ainsi sur le
renchérissement des coûts de production chez les pêcheurs en
raison de l'augmentation des dépenses en argent pour le carburant. Les
pêcheurs doivent fournir des efforts supplémentaires dans la
mesure où ils sont obligés d'aller au-delà de la zone
protégée pour opérer dans les autres bolongs beaucoup plus
éloignés de leurs domiciles. Ces frais additionnels
imposés à des personnes financièrement et
économiquement démunies, ont pour conséquence de
décourager. Il s'agit là d'un facteur préjudiciable au
soutien des populations à la gestion de l'AMP d'où une violation
des règlements.
La création de cette aire protégée pousse
les populations à accroître l'exploitation des autres bolongs
d'où une menace dont les conséquences seront ressentis à
long terme.
2. L'accroissement des activités de pêche aux
alentour de l'AMP et ses impacts sur les ressources halieutiques
La protection du bolong de Bamboung peut causer à long
terme l'épuisement des potentialités halieutiques des bolongs
situés à l'entrée ou à proximité de
Bamboung. Cette hypothèse plausible peut s'expliquer et se confirmer par
le constat suivant : un accroissement
23 GIRMAC (2004). Evaluation environnementale du
programme Girmac. Impact environnementaux et cadre de gestion .volume, page
80.
24 Dans ce village, les autorités ont
procédé au déguerpissement lors de la création de
l'AMP du même nom.
36
considérable des activités de capture aux
alentours de cette aire marine. Ce fait se traduit par un afflux massif des
pêcheurs résidents et aussi migrants attirés par l'AMP.
Cette attraction suscitée par l'AMP résulte,
selon les pêcheurs interrogés, de l'abondance de poissons qui en
sortent après grossissement et reproduction pour migrer vers les bolongs
voisins. La zone tampon de l'AMP (vers le bras de mer de Diomboss) est l'un des
endroits les plus fréquentés par les pêcheurs. Cette zone
constitue le lieu de transit des poissons.
37
Chapitre 2 : Dynamiques endogènes,
stratégies et contraintes de gestion
La mise en place de l'AMP de Bamboung s'est traduite, au
niveau local, par la mobilisation des populations périphériques
et l'adoption de stratégies de gestion du domaine marin de l'estuaire du
Saloum. Il faut noter qu'il existe, néanmoins, de nombreuses
difficultés inhérentes à la gestion.
I- Analyse du contexte local de gestion des ressources
marines et côtières
Le contexte de gestion des ressources marines et
côtières de la zone d'étude est analysé en deux
points essentiels : le contexte socio-économique et environnemental de
la gestion avant la protection de ce site marin, puis le contexte actuel de
gestion à la suite de la mise en défense, contexte en rapport
avec les dispositions réglementaires appliquées ou
imposées dans le cadre de cette aire.
1- Le contexte de gestion et d'utilisation des ressources
naturelles avant la création de l'AMP
Le contexte de gestion et d'utilisation des ressources
halieutiques locales avant l'implantation de l'AMP a été
étudié pour se faire une idée sur les modes traditionnels
d'usage de l'espace marin et de ses ressources. Cela permet de comprendre ce
que la nouvelle donne a suscité chez les populations locales, du point
de vue des changements de façons d'utilisation des ressources naturelles
marines. L'objectif est de faire savoir comment les dynamiques locales,
orientées vers l'adoption de nouvelles stratégies de gestion des
ressources marines, ont surgi dans le contexte actuel. Les relations des
communautés humaines vis-à-vis de leurs ressources, sont
essentiellement d'ordre d'usage (l'usus) ; cependant avec des formes
d'utilisation qui diffèrent d'une communauté à une autre
et d'une zone à une autre.
Dans le delta du Saloum, en particulier dans la
communauté rurale de Toubacouta, la gestion des ressources était
auparavant abusive, et cela, malgré le rôle de protection et de
contrôle qu'ont joué les services déconcentrés de
l'Etat installés dans la zone depuis les années 7025.
Sur le terrain, les enquêtes menées auprès des populations
cibles ont révélé qu'avant la mise en défens du
site, l'accès à la ressource halieutique était libre quels
que soient les moyens logistiques et humains dont on disposait. En effet, la
pêche et l'exploitation des mollusques et crustacés dans les
bolongs n'étaient pas du tout réglementées et se
pratiquaient partout sur le domaine maritime de l'estuaire en majorité
constitué de bras de mer. Ces unités hydrographiques marines ont
la réputation d'être poissonneuses, renfermant d'autres
espèces démersales.
Ainsi, c'est dans ces bolongs que les pêcheurs
(résidents ou migrants) effectuent leurs activités.
L'exploitation des ressources halieutiques dans ces bolongs était
anarchique, abusive et était caractérisée par l'absence de
repos biologique, avec l'utilisation des engins et des techniques destructrices
et l'augmentation de l'effort de pêche. Par conséquent, cet
état a conduit à l'épuisement du potentiel halieutique de
ces bolongs qui, auparavant, étaient jugé inépuisables. Et
ce qui fait suite à la disparition de beaucoup d'espèces de
poissons qui y vivaient et de la dégradation de la mangrove par la coupe
de leurs racines dans le cadre de
25 A titre d'exemple, nous citons la DPN (Direction
des Parcs Nationaux) présente dans le delta du Saloum depuis 1976
38
l'exploitation des huîtres et murex. Par
conséquent, les poissons de certains bolongs sont épuisés.
Le cas de Bamboung en est un exemple étant donné qu'il
était, de l'avis des enquêtes, le lieu de convergence de tous les
pêcheurs attirés par l'importance du stock halieutique qu'il
regorgeait26.
Cette situation a fait que ce bolong était alors
menacé tant du point de vue de son existence physique que biologique
(à cause de la sur-pêche). Ce dépassement de la
capacité de charge est désigné par certains
spécialistes, par le terme de surcapacité atteint par le
bolong de Bamboung. En effet, " il y'a surcapacité quand les moyens
de production matérielle mise en oeuvre et les forces productives en
activité surpassent le potentiel halieutique sur lequel ils s'exercent,
au point de compromettre sérieusement sa durabilité "
(DIAGNE, 2006)
2- Le contexte actuel et les dispositions de gestion des
ressources naturelles
La création de l'aire marine protégée de
Bamboung a été formalisée par le décret
présidentiel du 04 Novembre 2004 (décret n° 2004-1408) de
même que quatre autres AMP au niveau national (il s'agit des AMP de
Kayar, de Joal, de Saint-louis et d'Ebéné à
Ziguinchor)27.Au niveau de la collectivité locale de
Toubacouta, la gestion de cet espace marin reste communautaire
c'est-à-dire émanant directement des populations appuyées
par d'autres parties prenantes. Cependant, malgré cette implication des
communautés locales dans la gestion, les dispositions
réglementaires ne proviennent pas d'elles. Le cadre réglementaire
repose sur un système de normes étatiques imposées dans
toutes les aires protégées tant au domaine continental que
maritime). Les mesures d'interdiction ou non d'activité, de pratiques au
sein de l'AMP obéissent aux règles et normes de gestion
nationales et internationales signées et ratifiées par le
Sénégal pour les conventions mondiales sur la biodiversité
dont celle d'Abidjan sur la biodiversité.
Dans le cas de l'AMP de Bamboung, les activités et
pratiques interdites et autorisées sont : ? Activités et
pratiques formellement interdites (ou envisageables)
· Pêche (sauf à proximité de la zone
tampon de l'AMP vers Niodior et les îles de Bassoul) ;
· Exploitation des mollusques, mais envisageable dans le
long terme.
· Coupe de mangrove ;
· Chasse aux lamantins, dauphins et autres animaux
terrestres (singes, phacochères) ;
· Navigation des pirogues à moteur hors-bord
(sauf l'équipe de surveillance, l'équipe éco- touristique
et la recherche scientifique) ;
· En cas d'ouverture éventuelle, les techniques
de pêche prohibées sont l'utilisation des mailles mono filament,
des mailles de petites tailles qui captent les juvéniles, et de senne
tournante.
26 Le bolong de Bamboung était plus
poissonneux que les autres du fait de sa position géographique avec une
embouchure qui se jette à l'océan. Ceci favorise le transite de
poissons venus de l'océan vers le bolong.
27 L'idée de la création des AMP au
Sénégal, avait à l'époque, entraîné
une opposition entre le Ministère de l'Environnement et le
Ministère de la Pêche, en ce qui concerne leur gestion .Ce conflit
de compétence et de pouvoir dans la gestion des AMP au niveau national,
s'estompa avec un décret présidentiel qui ordonna aux deux
antagonistes de faire un arrêté interministériel qui est
resté longtemps sans application. Ce qui a entravé ou
retardé le processus de mise au point d'un plan de gestion pour les AMP
non encore achevé. Propos recueillis auprès du conservateur de
l'AMP Ibrahima. DIAME, un résident du village de Soukouta.
39
? Activités et pratiques
autorisées.
· Ecotourisme ;
· Visite d'agrément ou de villégiature mais
exclusivement sous contrôle ;
· Recherche scientifique.
Ces principes réglementaires peuvent servir d'esquisse
de complément d'éléments pour le plan de gestion de
l'AMP.
III- Les acteurs et
leurs stratégies de gestion de l'AMP : approches et rôles
1- L'approche communautaire de la gestion
L'approche communautaire de la gestion s'explique dans le
contexte actuel par l'implication /participation des communautés locales
concernées dans les différentes stratégies de conservation
des ressources naturelles.
Mais quels sont les déterminants ou les motifs d'une telle
approche ?
En faisant un feedback sur le contexte
socio-économique et environnemental antérieur à la
création de cette aire protégée, on est en mesure
d'apporter une esquisse de réponse à la question. En effet, la
baisse spectaculaire de la capacité productive, la raréfaction de
plusieurs espèces de poissons constituent les facteurs responsables avec
comme corollaire la précarisation des conditions de vie des
pêcheurs qui voient leurs revenus baisser d'une manière
exponentielle. Ainsi conscients de cette situation difficile, les habitants des
villages périphériques du bolong de Bamboung, ont
décidé enfin de sauver leur domaine marin dont les ressources
conditionnent leur survie. Cet engagement volontariste, physique et moral s'est
traduit par la mise en place de comités locaux chargés de la
gestion de la surveillance de l'AMP. Dans ces structures locales, les
populations deviennent des acteurs stratégiques de gestion.
1-1- La mise en place d'un comité de gestion
Il constitue, par sa vocation, le lieu de discussion et de
prise de décision sur les différentes actions à mener pour
le bon fonctionnement de la structure. Ce comité de gestion est
composé de vingt-huit membres dont deux représentants par
village. L'essentiel des membres du comité est constitué de
pêcheurs et d'ostréiculteurs, en particulier femmes. Ces personnes
sont les porte-parole de leurs villages respectifs et jouent le rôle
d'intermédiaires entre les populations et les autres parties prenantes.
L'autre tâche assignée au comité de gestion est
l'organisation de rencontres, par exemple des réunions trimestrielles
pour faire le bilan financier (recettes - dépenses) et élaborer
les actions à entreprendre. Bref, le rôle primordial de cette
structure s'articule autour des points suivants :
· identification et diagnostic des contraintes du
comité, des populations concernées et celles liées
à la gestion et au fonctionnement de l'aire protégée ;
· définition des objectifs d'orientations et
d'opérationnalité dans le cadre la conservation de la
biodiversité du site,
· planification des actions à réaliser
avec l'appui des partenaires extérieurs ou agissant au sein du
comité.
1-2- La mise en place d'un comité de
surveillance
Ce comité a pour rôle de surveiller (24 h/24 h)
en raison d'éventuels braconniers constitués essentiellement de
pêcheurs résidents, et parfois des migrants en provenance de Joal
et de Kayar. Par ailleurs, au début de sa mise en place, il se composait
de jeunes volontaires issus des différents villages impliqués
dans la gestion. Cette volonté manifeste des populations locales est
synonyme d'une synergie orientée vers la protection durable des
ressources halieutiques. Ainsi jusqu'en 2003, la surveillance était
volontaire et gratuite, puis rémunérée, 2000 f CFA par
personne et par jour. Ce comité collabore avec les autres parties
prenantes, en particulier l'ONG Oceanium dans le cadre de l'entretien du
matériel de surveillance (kayaks et bateaux de surveillance) et de
l'achat de carburants pour les navettes. Dans le cadre de ses activités,
le comité dispose d'un mirador de 10 m de haut (voire figure
ci-après) lui permettant d'avoir une vue d'ensemble de l'aire marine
pour détecter d'éventuels braconniers.
En définitive, cette « prise en compte des
communautés locales dans la problématique des aires
protégées est indispensable à l'atteinte des objectifs
escomptés, en égard d'abord à la position
névralgique que l'aire marine occupe dans la vie des populations
locales, avant et au moment précis de son érection en zone de
conservation'' (DIAGNE, 2005)28. L'aire marine
protégée de Bamboung doit être considérée
comme «le domaine de vie et de travail des communautés
humaines, qui y résident de façon permanente ou temporaires
''29.
Figure 11 : écogardes de l'AMP en
opération Figure 12 : le mirador de
surveillance, 10 m de haut).
40
28Malick DIAGNE (2005) : La prise en compte des
communautés dans la problématique des Aires marines
protégées (AMPs) .Bulletin d'information de GIRMAC, DIISO,
N° 5, Décembre 2005 p. 14-15. 29RAMAO (2004) :
Renforcement des aires marines protégées en Afrique de l'ouest
,2004-2005.
41
2- L'approche institutionnelle de la gestion
L'implication des agents extérieurs (administration et
ONG) dans la gestion est un gage d'une meilleure gestion des ressources marines
et côtières. Ils assistent et encadrent les populations locales
dans la réalisation des objectifs fixés et dans la
régularisation de la gestion, cela à travers l'approche de
co-gestion. Ainsi, dans le cas de Bamboung, il y'a un volet institutionnel
relativement important.
2-1- Rôle des services administratifs
déconcentrés de l'Etat dans la gestion
Il s'agit de la Direction des Parcs Nationaux (DPN) et de la
Direction des Pêches Maritimes (DPM) affiliées respectivement au
Ministère de l'Environnement et la Protection de la Nature et du
Ministère de la Pêche et de l'Economie Maritime qui sont des
parties prenantes du comité de gestion. Ils jouent les rôles
d'appui technique, de contrôle des activités, de l'accès et
des décisions prises par le comité local de gestion
conformément aux textes, normes et réglementations en vigueur au
Sénégal, et font office de police et soumettent des sanctions
contre les braconniers30. De ce fait, la création de cette
aire est considérée comme une intensification de
l'activité administrative de l'Etat. Les populations et les acteurs
qui vivent sur ces espaces sont donc confrontés à une
présence renforcée de l'Etat, tant sur le plan normatif
qu'administratif (Feral et al., 2004).31
2-2- Rôle du conseil rural de Toubacouta dans la
gestion
La collectivité locale de Toubacouta est l'organe
administratif décentralisé de L'Etat associé à la
gestion. Elle a aussi un rôle important dans la mise en place de cette
aire protégée. Par ailleurs, dans le cadre de la
décentralisation et du transfert des compétences de gestion des
zones terroirs du domaine de l'Etat, la communauté rurale détient
les prérogatives de gestion du foncier relatif au site d'implantation de
cette aire marine protégée mais n'intervient pas sur le volet de
la pêche car celle-ci en est exclue. Par contre, dans la gestion, elle
joue le rôle d'intermédiaire entre les populations locales et les
autres parties prenantes comme la DPN et l'ONG Océanium. C'est l'un des
principaux bénéficiaires des recettes issues de l'impôt sur
le foncier bâti du site. Ces revenus contribuent au renforcement
budgétaire et à la réalisation des objectifs inscrits dans
le Plan Local de Développement (PLD) au profit des populations.
2-3- Rôle de l'ONG Oceanium
Océanium est une organisation non gouvernementale (ONG)
régie par la législation sénégalaise. Il a pour
rôle principal de protéger l'environnement marin et côtier.
C'est l'un des acteurs clés dans la gestion qui a initié la
démarche pour le choix de cette aire protégée.
L'implication de cette structure porte sur :
? appui financier et technique dans le cadre du fonctionnement du
site,
? implantation et promotion des activités
écotouristiques par la construction d'un campement (Keur
Bamboung) ;
? appui en matériel logistique au comité de
surveillance ;
30 A titre d'illustration, en 2002 après la
mise en place de l'AMP, un cas de sanction (emprisonnement) de cinq
pêcheurs résidents du village de Sourou, un des villages
périphériques de l'AMP, a été noté. Ces
pêcheurs ont été saisis et poursuivis en justice par la
DPN, pour avoir braconné dans l'AMP.
31 M François FERAL et al. ; (2004) ; Analyse des
politiques Publiques dans les Aires marines protégées Ouest
africaines, PNBA, RBABB. Projet CONSDEV ICA n°4 2001-10043, 23 pages.
42
? communication sociale : information des populations
concernées sur les décisions prises lors des rencontres des
parties prenantes et promotion à l'échelle internationale, puis
la sensibilisation sur les modalités de gestion et de conservation
durable des ressources halieutiques par l'organisation de
cinémas-débats dans tous les villages périphériques
;
? formation des populations locales sur les modalités
de gestion.
Conclusion partielle
La gestion mobilise différents acteurs dont les
populations organisées en comités locaux, la Communauté
Rurale de Toubacouta servant de relais entre l'Etat et ces populations, les
services déconcentrés de l'Etat (DPN, DPM) puis l'ONG
Océanium.
L'identification de ces acteurs, de leur perception et de leur
représentation permet de mieux comprendre leur dynamique et leurs
stratégies de gestion puis contribue à la compréhension de
la multiplicité des enjeux et des intérêts ainsi que des
conflits potentiels et de la pression des uns sur les autres. "Cette
diversité des acteurs est synonyme d'une grande complexité dans
les rapports qu'ils entretiennent".32 Leur implication
s'inscrit largement dans l'objectif de "mettre au point des formes
d'organisation qui permettent à la population rurale de s'imposer comme
partenaire auprès des acteurs
socio-économiques.33
32 FALL .M. (2000). Les conflits liés
à la gestion des ressources naturelles dans la réserve de
Biosphère du Delta du Saloum. Mémoire de maîtrise de
Géographie, UCAD, 160 pages + annexes.
33 Bertomé .J. (1992). Planification du
développement locale. Guide méthodologique suivi de trois cas en
Afrique de l'ouest. CIE PAC, 344 pages.
43
III- Les limites dans la gestion et les
démarches de solution
Il a été constaté deux principales
contraintes liées à la gestion : manque de moyens dans le
fonctionnement de l'aire protégée et divergences entre les
acteurs sur la période de l'ouverture. Pour le maintien et
l'amélioration des acquis, la recherche de solutions doit être
engagée.
1- Les insuffisances dans les moyens de fonctionnement
Elles sont essentiellement d'ordre humain, technique et
financier. 1-1- Insuffisance des moyens humains
L'insuffisance des moyens humains que nous évoquons ici
est relative d'une part au niveau de formation ou d'instruction des acteurs
locaux (pêcheurs), et d'autre part à leur degré
d'implication /participation dans les comités mise en place. Ces deux
critères d'analyse de l'insuffisance des moyens humains relèvent
du nombre et de la qualification des acteurs locaux.
Du point de vue de la qualification, les membres du
comité de gestion ne savent ni lire ni écrire. En
conséquence, ce manque de formation peut être source de
défaillance dans le respect, la maîtrise et l'application des
textes et normes. Comme la gestion reste communautaire, le volet formation des
acteurs locaux est un préalable, indispensable à la
réussite du projet de pérennisation des résultats obtenus
et doit avoir comme but l'aide des populations analphabètes pour mieux
gérer et utiliser de façon durable et rationnelle les ressources
marines. Il faut que les acteurs locaux puissent s'imprégner du concept
et des objectifs de l'aire protégée, sans mettre en marge les
savoirs et les savoir-faire locaux.
Pour le degré d'implication des populations locales,
leur nombre est relativement faible, principalement la participation des
femmes. Dans les comités locaux, leur proportion est une femme pour cinq
hommes. Les femmes doivent s'impliquer d'avantage dans les problèmes de
gestion des ressources ostréicoles étant donné qu'elles
ont été parmi les responsables de la dégradation des
écosystèmes. Actuellement, elles sont devenues de
véritables actrices de développement dans certaines zones d'ou
l'approche genre.
En outre, il n'y a pas de dispositions incitatives pour
attirer les populations dans le dispositif de surveillance. Il convient alors
de revoir, par exemple, le montant de la rémunération.
1-2- Insuffisance des moyens techniques et
financiers
L'essentiel du financement va aux frais de fonctionnement de
l'AMP. Les ressources proviennent des recettes de l'écotourisme et
surtout de l'ONG Océanium. Cependant, le comité de gestion ne
dispose pas de fonds suffisants pour assurer efficacement sa gestion. Ainsi,
cette insuffisance financière constitue une des principales
préoccupations et contraintes des acteurs impliqués pouvant se
répercuter, par exemple, sur la surveillance (paiement des
écogardes, achats de carburant, etc). Pour faire face à ces
difficultés potentielles, les acteurs concernés doivent
encourager des ressources financières autonomes.
Au plan technique, le comité ne dispose seulement que
deux pirogues utilisées par les écogardes. Il faut noter la
présence du mirador qui contribue à l'amélioration de
la
44
surveillance. Par ailleurs, l'AMP ne dispose toujours pas de
matériel propre permettant de faire l'état de
référence et l'évaluation du potentiel biologique. En
collaboration avec des structures de recherche comme l'IRD et le CRODT, un
suivi biologique est réalisé trimestriellement.
Au total, les contraintes financières, techniques et
humaines sont actuellement pour les acteurs impliquées, des principaux
défis à relever.
2- Problématique des modalités d'ouverture de
l'AMP
2-1- Antagonismes, opinions et raisons des acteurs
concernés
La fermeture du bolong de Bamboung et les règles
restrictives d'accès des populations aux différentes ressources
naturelles du bolong, ont été, de facto, les solutions
préconisées pour la restauration de cet écosystème
dégradé. Mais après quelques années de mise en
défense, les communautés locales environnantes se posent
aujourd'hui la question de savoir pour combien de temps va durer la
fermeture. Ce point est devenu la préoccupation des populations qui
attendent la réponse du comité de gestion. Il n'y a pas eu
d'accord entre les différents acteurs stratégiques
impliqués.
L'AMP est devenue aujourd'hui un outil de gestion assez
controversé, suscitant des oppositions entre les différentes
parties prenantes. D'un côté, les populations souhaitent et
veulent l'ouverture du bolong de manière temporaire et
rotative34, puis de l'autre le duo DPN et Oceanium a en
décidé une fermeture permanente. Ce qui constitue un cercle
vicieux. Les raisons et les intérêts avancés par les
antagonistes sont différents.
2-1-1- Raison des acteurs locaux : les populations
périphériques
Pour les populations pêcheurs vivant à la
périphérie, la fermeture permanente sacrifie la plupart des
familles dont la survie reposait essentiellement sur l'exploitation des
ressources halieutiques. Certains disent, par leur expérience ou par
leur savoir-faire locaux, que cette situation a ou peut avoir des
conséquences néfastes sur la vie de certaines espèces
animales comme par exemple les mollusques (huîtres) dont la durée
de vie n'excède pas l'année. Il s'agit là de gachis.
L'arrête de l'exploitation des mollusques a
été dénoncé par les habitants, en particulier les
femmes. Il y'a un manque à gagner qui compromet leur contribution aux
charges familiales dans un contexte de déficit financier
résultant de la raréfaction du poisson. Cette inactivité
des femmes, une des franges les plus vulnérables de la population, est
presque généralisée. Cela s'observe principalement dans
les villages où les activités dépendaient directement,
voire exclusivement du bolong de Bamboung.
Les populations proposent l'idée d'une ouverture
rotative avec cependant une exploitation rationnelle et contrôlée
respectant les règles et normes de pêches recommandées.
Malheureusement, les agents assermentés à la protection et au
contrôle des activités, pratiqueraient " la politique de la sourde
oreille " en faisant fi de leurs suggestions.
34 Noue tenons à préciser que sur ce
pont de vue, la population locale elle-même reste divisée sur
l'ouverture de l'AMP. Les 3/4 souhaitent l'ouverture. Et de l'avis de ces
derniers, les populations partisanes de la fermeture ce sont celle
recrutées et payées dans les activités de l'AMP et leur
qualifient de corrompus.
45
2-1-2- Raisons des autorités supérieures : DPN
et Oceanium
Il n'est pas question de procéder à une
ouverture même temporaire à des fins d'exploitation. Ce refus se
fonde sur le fait que la zone est non seulement un site de croissance mais
aussi un lieu de reproduction d'espèces animales et
végétales.
L'ouverture et l'exploitation sont susceptibles de causer des
dommages irréparables. Il y'auraient une atteinte aux activités
éco-touristiques et aux efforts de restauration de la
biodiversité depuis la création de cette aire
protégée. Bamboung serait "un exemple à suivre"
dans la sous région ouest africaine pour une gestion durable des
ressources marines et côtières et pour rejeter l'idée
d'ouverture. En cas d'ouverture éventuelle, « il est
indispensable de procéder au préalable à
l'évaluation/estimation de la dynamique et de l'évolution du
potentiel biologique du bolong pour donner droit à l'accès. Cela
permettra ou aidera à évaluer la capacité de charge de
l'écosystème par rapport aux besoins et au nombre de demandeurs
».35
En résumé, il y'a un désaccord sur la
gestion du site. Cette situation a des incidences dans la gestion.
2-2- Répercussions de la controverse des acteurs
sur la fermeture
Les divergences (ou conflits) opposant les différents
acteurs sur les modalités d'accès aux ressources naturelles
persistent dans la réserve de biosphère du Delta du Saloum. Il en
est de même de Bamboung. En effet, les germes d'une telle situation de
désaccord ont conduit les autorités supérieures à
décider in extremis de prolonger la fermeture six mois
après la mise en défens. Les enjeux et/ou les
répercussions de cette fermeture permanente sont considérables.
Les populations se disent piégées en raison du non respect du
délai d'ouverture un an après. Ainsi, étant dans une
position de défaveur et en face d'une autorité
légitimement plus forte, elles adoptent une stratégie offensive.
En effet, certains résidants ont décidé de ne plus
participer aux réunions du comité de gestion.
La fermeture permanente et quasi imposée du bolong de
Bamboung est ressentie comme une injustice. Cette privation pose le
problème du droit d'usage et de jouissance des potentialités
naturelles du domaine public (maritime) de l'Etat. Certes au
Sénégal, "la zone économique exclusive (ZEE)
relève de la souveraineté de l'Etat et n'appartient par
conséquent à aucune communauté" 36, mais,
pour atteindre les objectifs d'un développement humain durable, l'AMP de
Bamboung doit aussi répondre "aux besoins d'ordre social, culturel,
spirituel et économique des populations et être fondée sur
des bases scientifiques solides" (Compagnon et Constantin, 2000). Etant
donné que "l'attitude des acteurs locaux à l'égard de
leur environnement et la vision qu'ils en ont, est conditionnée par la
culture, la tradition, les facteurs socio-économiques et
politiques". (Fall, 2004 : 82).
35 D'après les propos du conservateur de
l'AMP le Lieutenant Youba SONKHO (ingénieur technique de la PNDS) par
communication orale.
36 Code de la pêche du Sénégal.
Cité par DIAGNE Malick (2006) : Les dimensions sociologiques de la
crise de surcapacité de la pêche artisanale
Sénégalaise. DIISO (GIRMAC) n°6 juillet 2006. pp
11-13.
2-3- Quelle démarche pour la gestion des
antagonismes ?
Les controverses et oppositions observées entre les
différentes parties prenantes au point de compromettre la cogestion,
doivent amener les acteurs à se mettre sur la table de
négociation pour trouver un terrain d'entente et pérenniser les
acquis. Dans ce cas, la démarche demeure la concertation pour la prise
en compte des communautés locales dans les processus de prise de
décision et de planification des actions relatives à la
conservation de ce patrimoine écologique.
En d'autres lieux, à propos de ces divergences dans la
gestion des ressources naturelles, certains spécialistes choisissent le
concept de "négociation environnementale" qu'ils
considèrent comme étant "un outil de prévention et de
résolution des conflits opposant les différents acteurs à
intérêts contradictoires. Elle a pour vocation d'ouvrir les
perspectives de compromis entre intérêts opposés sans trop
déchirer le tissu social et politique. Elle permettra d'ajuster les
solutions aux problèmes de gestion des ressources naturelles".
(Fall, 2004). Ce faisant, la négociation ou la concertation constituent
l'approche indiquée pour atteindre les objectifs d'une gestion
intégrée, participative et durable
Par ailleurs, la décision de fermeture permanente
devrait même se faire après sensibilisation des populations
riveraines. Une telle attitude pourrait amener les communautés locales
à se sentir d'avantage concernées dans la gestion. Comme le
suggère Feral et al., 2004. "le processus de participation
se manifeste par la négociation du contenu des normes imposées
par l'Etat dans les aires marines
protégées"37.
46
37 FERAL F. op. cit. 2004, page 21.
47
Conclusion générale et perspectives
L'avènement des aires marines protégées
(AMP) au Sénégal est marqué au niveau local par une
gestion assez timide. Tel constat trouve son explication dans le faite que
depuis leur création, les autorités étatiques
assermentées à leur gestion n'ont pas suffisamment
déployé sur le terrain des moyens (ou mesures d'accompagnement)
efficaces pour assurer leur fonctionnement. Et qui plus est, ces
écosystèmes marins ont été mis en place dans des
sites où les populations n'ont pas "clé à la
main" les outils requis pour la gestion durable des ressources
naturelles.
Par ailleurs, la gestion des AMP est
caractérisée, au cours de leur évolution, par une
intervention multisectorielle cloisonnée (l'environnement, le politique,
l'économique et le social) où les acteurs ont des
intérêts souvent contradictoires. C'est pourquoi, dans le contexte
actuel, les conflits sans précédant s'interposent entre les
parties prenantes sur les modalités de gestion. En conséquence,
ces contradictions peuvent être considérées comme des
facteurs qui freinent ou ralentissent le processus d'élaboration et de
mise en oeuvre de plans de gestion (intégrée et
concertée). Les enjeux sont appréhendés sous deux angles,
d'ailleurs opposés : d'une part, l'approche environnementale portant sur
les éléments et objectifs de conservation durable (donc
n'obéissant à aucune logique d'exploitation) et de l'autre,
socio-économique relatif à l'utilisation des ressources
naturelles, par les populations qui placent les AMP dans l'optique de
rentabilité et d'amélioration de leurs conditions
socio-économiques.
La création de l'AMP de Bamboung résulte d'une
volonté des habitants d'une quinzaine de villages limitrophes du bolong.
Cette nouvelle initiative communautaire a été promulguée
à la suite d'une situation de dégradation inquiétante des
potentialités halieutiques qui procuraient une sécurité
alimentaire aux populations riveraines. Cette aire marine
protégée a induit deux types de constat : impacts positifs
(d'abord une bonne conservation de la biodiversité de ce domaine marin
aménagé, ensuite des changements sur la gestion des
pêcheries locales et enfin l'essor de l'écotourisme) et
négatifs (renchérissement des coûts pour certains
pêcheurs, mal préparés économiquement et
financièrement et la concentration des activités de pêche
dans les écosystèmes marins périphériques).
L'implantation comporte aussi des enjeux sur les acteurs
impliqués. On note la naissance et propulsion d'une dynamique
endogène qui se traduit par la mise en place de structures de gestion
regroupant un paysage institutionnel composé du triumvirat
population-administration-ONG à travers des comités devenus des
lieux de discussions pour prise de décisions. Des défailles ont
été observées dans la gestion, malgré les
dispositions prises. Cela résulte de l'insuffisance des moyens humains,
financiers et techniques et des divergences et oppositions entre les acteurs
impliqués dans l'usage/exploitation des ressources avec le mode de
gestion de la fermeture permanente du bolong.
Cependant, dans la perspective d'une gestion durable de l'AMP,
les différentes parties prenantes doivent oeuvrer pour :
? un aménagement concerté et
négocié en se basant sur les intérêts de chaque
acteur, et aller au-delà d'une participation simple et formelle des
acteurs locaux. Cette approche constituerait, dans le contexte actuel,
l'alternative crédible sous-tendant les intérêts des uns et
des autres pour une gestion équitable des ressources naturelles ;
48
? un renforcement des capacités financières,
humaines et techniques des comités locaux de gestion ;
? une adoption de mesures incitatives pour le renforcement du
volet écotouristique et la création d'un futur
éco-musée pour promouvoir et valoriser le potentiel culturel et
historique du site d'étude ;
? une adoption de politique applicable et adaptée aux
localités avec des solutions spécifiques et des mesures souples.
De telle dispositions sont susceptibles de:
? prévenir les conflits d'intérêts, de
compétences, et de pouvoir en matière de gestion des ressources
naturelles, cela, pour éviter la reproduction des mêmes erreurs
dans la mise en place de nouvelles AMP ;
? répondre aux objectifs d'éradication de la
pauvreté au niveau local ;
? ajuster la gestion en fonction de l'évolution des
problèmes et des connaissances scientifiques.
49
Bibliographie
Ouvrages et articles de
références
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locale. Guide méthodologique suivi de trois cas en Afrique de l'ouest.
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marine en Afrique de l'Ouest.: Intégration des AMPs à la gestion
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téléchargé le 7 Juillet, 2006.
5 b.
http://www.prcmarine.org .
Programme régional de conservation de la zone côtière et
marine en Afrique de l'ouest: Création, gestion et surveillance des
Aires Marines Protégées. Document téléchargé
le 7 Juillet, 2006.
5. http// :
www.prcmarine.org : Processus de
création de l'AMP de Tristao et Alcatraz en République de
Guinée, 2006.
52
Table des illustrations
Liste des tableaux :
Tableau I : Evolution de la pluviométrie de
1996 à 2000 .15
Tableau II : Evolution démographique de la
population de (1984 à 2001) ..17
Tableau III : La répartition des
activités dans les 14 villages périphériques de l'AMP.
.19
Tableau IV : Calendrier saisonnier
des activités effectuées par les populations locales
19
Tableau V : Classification et inventaire
ichtyologique de l'AMP de Bamboung ..24
Liste des figures :
Figure 1 : Situation géographique du cadre
général : l'AMP de Bamboung 13
Figure 2 : Vue de dessus du bolong
21
Figure 3 : Vue de près du bolong
..21
Figure 4 : Pourcentage des espèces de poissons
inventoriées dans l'AMP ..29
Figure 5 : Observation in situ des huîtres et
murex sur les racines de la mangrove .30
Figure 6 : Amas coquilliers
30
Figure 7 : pêcheurs débarquant sur le
bolong du village de Soukouta situé à quelques
kilomètres de l'AMP 31
Figure 8 : Cases de repos construites au sein de
l'AMP pour les employés 32
Figure 9 et 10 : Cases écotouristiques
équipées de latrines, toilettes et d'un solaire
.34
Figure 11 et 12 : Instruments de surveillance de
l'AMP ...40
Figure 13 : Diagramme de Venn des parties prenantes
dans la gestion de l'AMP 43
53
Table des matières
Sommaire 2
Sigles et abréviations 3
Avant propos 4
Introduction générale 5
PREMIRE PARTIE : LA PRESENTATION SYNOPTIQUE DE L'ETUDE
Erreur !
Signet non défini.
Chapitre 1 : Présentation du cadre
général 14
I- Etude physique de la zone prospectée
14
1- Caractéristiques climatiques 14
2- Caractéristiques pédologiques
15
3- Caractéristiques hydrologiques et
hydrogéologiques 15
4 - Caractéristiques de la végétation
16
II- Etude humaine et socio-économique
17
1- Les caractéristiques humaines 17
2- Les caractéristiques socio-économiques 18
Chapitre 2 : Présentation du cadre
spécifique : l'AMP de Bamboung 20
I- Cadre géographique, historique et statutaire de
l'AMP 20
1- Cadre géographique 20
2- Historique de la création l'AMP de Bamboung 22
3- Cadre statutaire de la gestion de l'AMP 23
II- Les potentialités biologiques de l'AMP
24
1- Potentialités phytologiques 24
2- Potentialités zoologiques 24 DEUXIEME
PARTIE : LA CREATION DE L'AIRE MARINE PROTEGEE DE BAMBOUNG, UN ENJEU
MULTIDIMENSIONNEL DANS LA RESERVE DE
BIOSPHERE DU DELTA DU SALOUM Erreur ! Signet non
défini.
Chapitre 1 : Etude stratégique des impacts
écologiques et socio-économiques 28
I- Evaluation et analyse des impacts positifs
28
1- L'impact sur l'environnement biophysique
28
1-1- Impact sur les ressources halieutiques 28
1-2- Impact sur la mangrove et les amas coquilliers 29
2- L'impact sur l'environnement socio-économique
30
2-1- Impact sur les pêcheries locales 31
2-2- Reconversion comme stratégie de minimisation des
risques ? 31
2-3- La contribution de l'AMP au développement locale
autocentré 34
II- Evaluation et analyse des impactes négatifs
35
1- Impact sur le tissu socio-économique 35
2- L'accroissement des activités de pêche aux
alentour de l'AMP et ses impacts sur les
ressources halieutiques 35
Chapitre 2 : Dynamiques endogènes,
stratégies et contraintes de gestion 37
I- Analyse du contexte local de gestion des ressources
marines et côtières 37
1- Le contexte de gestion et d'utilisation des ressources
naturelles avant la création de l'AMP
37
2- Le contexte actuel et les dispositions de gestion des
ressources naturelles 38
II- Les acteurs et leurs stratégies de gestion :
approches et rôles. 39
1- L'approche communautaire de la gestion 39
1-1- La mise en place d'un comité de gestion 39
1-2- La mise en place d'un comité de surveillance 40
54
2- L'approche institutionnelle de la gestion
41
2-1- Rôle des services administratifs
déconcentrés de l'Etat dans la gestion 41
2-2- Rôle du conseil rural de Toubacouta dans la gestion
41
2-3- Rôle de l'ONG Oceanium 41
III- Les limites dans la gestion et les
démarches de solution 43
1- Les insuffisances dans les moyens de
fonctionnement 43
1-1- L'insuffisance des moyens humains 43
1-2- L'insuffisance des moyens technico-financiers 43
2- Problématique Des modalités
d'ouverture de l'AMP 44
2-1- Antagonismes, opinions et raisons des acteurs
concernés 44
2-2- Répercutions de la controverse des acteurs sur la
fermeture 45
2-3- Quelle démarche pour la gestion des antagonismes ?
46
Conclusion générale et perspectives
47
Bibliographie 49
Table des illustrations 52
Table des matières 53
Annexes 55
55
Annexes
Annexe 1 : Fiche du guide d'entretien
Annexe 2 : Fiche du règlement intérieur de l'AMP de
Bamboung
56
Annexe 1 :
GUIDE D'ENTRETIEN
A-/ Questionnaires aux populations locales des 14 villages
périphériques de l'AMP
. Quelles sont les principales activités faîtes-vous
? . Où sont effectuées ces activités ?
· Dans ou à proximité de l'AMP ?
. Sur quels critères reposait l'accès aux
différentes ressources avant la protection du site ?
. Et maintenant vu la création de
l'AMP
. Quel type de relations existe-t-il entre les populations
locales et les ressources naturelles ?
. Quelles sont les modalités de gestion et de
conservation des ressources naturelles préconisiez-vous avant
l'implantation de l'AMP ?
. Comment le nouveau plan d'aménagement et de gestion de
cette aire aura-t-il la capacité de générer les impacts
sur les pratiques traditionnelles de gestion des ressources naturelles ?
. Aujourd'hui, quelle appréciation faîtes-vous de
cette création ?
· Positive et pourquoi ?
· Négative et pourquoi ?
. Quels sont les changements en terme d'amélioration ou
non sur : - Les systèmes de productions locales
· Sur la pêche
· Sur l'ostréiculture
· Sur l'agriculture
· Ou autres
- Le milieu physique
· Sur les ressources végétales (mangroves et
autres)
· Sur les ressources halieutiques (poissons, huîtres,
murex, etc.)
· Sur la faune terrestre
.Quelles sont les périodes, les techniques de
pêche, les espèces interdites d'exploitation ?
.Quelles sont les stratégies adaptées par les
populations dans la gestion des risques engendrés par ses changements
?
57
.Que pensez-vous des activités écotouristiques
favorisées par l'AMP ?
? Bénéfiques et pourquoi ?
? Non bénéfiques et pourquoi ?
. Quelle est l'évolution de l'écotourisme depi la
création de l'AMP ?
. Quelles sont les retombées économiques et
financières de l'écotourisme ?
. Comment sont gérés ces fonds et dans quels sens
? .Combien de touristes (par an) fréquentent le site ?
.Quels impacts peuvent avoir les activités
écotouristiques sur la qualité physique et biologique de l'AMP
?
.Qui gère l'AMP ?
.Quelle approche préconisez-vous dans la
gestion de cet espace marin? .Quels sont ses moyens de
fonctionnement ?
.Quels sont les droits d'entrée ou de
permis de pêche instaurés ? Autrement dit, quels sont les
règles et les codes de conduite qui sont établis ?
.Qui les établissent et comment?
.Quel est le rôle des autorités
locales dans la gestion ?
.Quels sont les différents acteurs
intervenant dans la gestion ?
.Quelles sont les interactions ou la vie des
relations entre ces acteurs ?
.Comment qualifiez-vous la nature de la gestion
?
.Les populations sont-elles impliquées
dans la gestion sur tous les plans ?
.Comment qualifiez-vous la nature de cette
participation, s'il y'a lieu ?
? Formelle ? Imposée
? Provoquée
.Quels sont les conflits réels ou
potentiels qui existent dans la gestion? .Quels sont les modes
de résolution en cas de conflits ?
.Quelles sont les sanctions à prendre
à l'encontre des contrevenants en cas de non respect des normes et
règles établies dans l'exploitation des ressources ?
58
B-/ Questionnaire au comité de gestion de l'AMP
.Quelle est le plan de gestion de l'AMP
avez-vous mis au point ?
.Comment l'avez-vous élaboré ?
.Y'a-t-il une implication des populations
locales dans l'élaboration de ce plan ? Et si oui
comment ?
.Quelles sont leurs appréciation et
propositions ?
.Quels sont les principes de base ou le
règlement intérieur de ce plan de gestion ?
* Principes relatifs :
· aux règles de conduites ;
· au droit de permis d'entrée ;
· aux quotas dans le prélèvement ou
l'exploitation des ressources halieutiques ;
· aux modalités d'ouverture et de fermeture de l'AMP
(périodes, durée) ;
· aux techniques de pêche prohibées et
exigées ;
· à la taille des filets et des pirogues de
pêche ;
· à l'exploitation des poissons, huîtres
(tailles, quantité) ;
· à l'exploitation des amas coquillés ;
· aux actions prévues dans le cadre du
développement durable ;
· à l'activité écotouristique.
.Quels sont les points de divergences qui
opposent les différentes parties prenantes dans
l'élaboration du plan de gestion ?
.Quels sont les acteurs concernés par le
plan de gestion ?
.Quel est le rôle de chaque partie
prenante dans la gestion ?
.Quelles sont les contraintes majeures
auxquelles êtes-vous confrontées dans la gestion et
dans le fonctionnement ?
· Humaines ;
· financières ;
· juridiques dans la réglementation des droits
d'accès ou d'usage des ressources halieutiques et autres par les
populations périphériques ;
· techniques.
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