UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR
(U.C.A.D)
***************
*****************
ECOLE DOCTORALE DES SCIENCES JURIDIQUES, POLITIQUES,
ECONOMIQUES ET
DE GESTION (E.D - J.P.E.G)
***************** FACULTE DES SCIENCES ECONOMIQUES
ET DE
GESTION (F.A.S.E.G) **************** LABORATOIRE
D'ANALYSE, DE RECHERCHE ET D'ETUDE DU DEVELOPPEMENT
ANNEE : 2018 N° d'ordre
:
THESE DE DOCTORAT ES SCIENCES ECONOMIQUES
EFFETS DE DEBORDEMENT DES POLITIQUES BUDGETAIRES EN
UNION MONETAIRE HETEROGENE : CAS DE L'UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE OUEST
AFRICAINE (UEMOA)
Présentée par Ismaïla
SANGHARE
Soutenue publiquement le 06 Janvier 2018 devant un jury
composé de :
Président : Adama DIAW, Professeur
Titulaire, Université Gaston-Berger de Saint-Louis Rapporteurs
:
Pr. Ndiack FALL, Maître de Conférences
Agrégé, FASEG - UCAD
Pr. Mahamadou Lamine DIAL, Maître de Conférences
Agrégé, FASEG - UCAD
Directeur de Thèse : Pr. Chérif
Sidy KANE, Maître de Conférences Agrégé, Directeur
du CREFDES (FASEG) - Université Cheikh Anta DIOP de Dakar
Co-Directeur de Thèse : Pr. Mathias
Marie Adrien NDINGA, Maître de Conférences Agrégé,
Université Marien NGOUABI de Brazzaville, Doyen de la Faculté des
Sciences Économiques.
L'université Cheikh Anta DIOP n'entend donner
aucune approbation, ni improbation, aux opinions émises dans cette
thèse. Ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur
AVERTISSEMENT
DEDICACES A
Mon père,
Ma mère,
Mes enfants,
La famille SANGHARE.
REMERCIEMENTS
Tout d'abord, je rends grâce à ALLAH, le
Tout-Puissant de m'avoir donné la santé et la volonté pour
faire ce travail de recherche.
Cette thèse n'aurait pu aboutir sans le soutien et
l'implication de nombreuses personnes. Je saisis ici l'occasion pour exprimer
ma profonde gratitude au :
- Professeur Chérif Sidy KANE, Maître de
Conférences Agrégé, Directeur du CREFDES et Directeur de
cette thèse, pour son soutien, sa disponibilité. Merci Professeur
pour avoir accepté de guider mes pas. Cela m'a permis de
découvrir votre double dimension intellectuelle et humaine. Je vous
remercie également de m'avoir fait confiance dès les premiers
jours.
- Professeur Mathias Marie Adrien NDINGA, Maître de
Conférences Agrégé, Co-Directeur de cette thèse
pour son engagement dans ce travail de recherche. Sa rigueur scientifique et sa
vigilance remarquable ont permis sans cesse d'améliorer la
qualité du document. Je vous en suis très reconnaissant.
- Membres du jury, à vos rangs et qualité de
Professeur. Vous avez bien voulu évaluer ce travail. Vos suggestions et
critiques serviront certainement à mieux améliorer le travail,
étant donné qu'une oeuvre humaine n'est jamais parfaite.
- Parents, pour l'amour dont ils m'ont toujours couvert, les
sacrifices consentis pour ma réussite. C'est grâce à vos
encouragements et soutiens que j'ai pu réaliser ce modeste travail.
- Professeur Moustapha Kasse, Titulaire des Sciences
Economiques, Doyen Honoraire de la Faculté des Sciences Economiques et
de Gestion (FASEG) et Président du Laboratoire d'Analyse de Recherche et
d'Etude du Développement (LARED). Vous nous avez guidé dans la
recherche et transmis les connaissances utiles à la science et à
la vie. Que le Bon DIEU vous garde encore pour longtemps.
- Les membres du comité scientifique du LARED : les
Docteurs Alé Nar DIOP, Idrissa Yaya Diandy, Thierno Thioune, Souleymane
Keita sans oublier l'ensemble des doctorants avec lesquels j'ai
cheminés. Je n'ai pas oublié aussi les docteurs Ludé
NDJAM'ANGAI (Tchad), Astrid Elomo ZONGO Thèrèse (Cameroun) et
Abraham AMOUSSOUGA GERO (Benin).
- Personnel du CREFDES qui m'a toujours accueilli à
bras ouvert à chaque fois que de besoin.
- Collègues Enseignants-Chercheurs du CREA et
l'ensemble du corps professoral et administratif de la FASEG.
- Amis et frères EL hadji Matabara DIEYE et Bounama
DIEYE ainsi que ma soeur Mberry NDIAYE qui m'ont toujours
témoigné de leur amitié et de leur
fidélité.
- Ami et frère Docteur Mor Gassama et sa femme Aby MBow
pour leur soutien indéfectible ainsi que toute personne, qui de
près ou de loin m'a soutenu dans ce travail.
- Personnes de bonne volonté qui m'ont aidé
à finaliser le document, je donne une mention spéciale à
un ami et frère Mr. Abibou DIOP pour tout le temps et les efforts
consentis pour ce travail. J'exprime aussi par la même occasion mes
sincères remerciements à l'endroit du Professeur Emmanuel KABOU
pour sa rigueur scientifique et sa générosité. Merci
infiniment.
SOMMAIRE
LISTE DES FIGURES I
LISTE DES GRAPHIQUES II
LISTE DES TABLEAUX III
LISTE DES ACRONYMES IV
RESUME VII
INTRODUCTION GENERALE 1
CHAPITRE I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET EXTERNALITES
BUDGETAIRES
DANS L'UEMOA 14
SECTION I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET CHOCS ECONOMIQUES
15
SECTION II : ANALYSE DES EXTERNALITES BUDGETAIRES DANS LA ZONE
44
SECTION III : CONVERGENCE BUDGETAIRE ET SURVEILLANCE
MULTILATERALE
DANS L'UEMOA 50
CHAPITRE II : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE LA
POLITIQUE
BUDGETAIRE EN UNION MONETAIRE 62
SECTION I : THEORIE DE L'UNION MONETAIRE OPTIMALE 63
SECTION II : POLITIQUE BUDGETAIRE EN UNION MONETAIRE 73
SECTION III : MECANISME DE TRANSMISSION DES EFFETS BUDGETAIRES
84
SECTION IV : COORDINATION BUDGETAIRE DANS UNE UNION
MONETAIRE
HETEROGENE 91
CHAPITRE III : EVALUATION DES EFFETS DE DEBORDEMENT
BUDGETAIRES DANS
L'UEMOA 110
SECTION I : PRESENTATION GENENRALE D'UN VAR EN PANEL 111
SECTION II : SPECIFICATION DU MODELE ET SOURCES DE DONNEES
117
SECTION III : PRESENTATION DES RESULTATS ET INTERPRETATIONS
123
CONCLUSION 166
BIBLIOGRAPHIE 173
ANNEXES j
TABLE DES MATIERES x
I
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Evolution du PIB de l'UEMOA de 1980 - 2014 17
Figure 2 : PIB réel par pays dans l'UEMOA de 1980
à 2014 18
Figure 3 : Taux d'inflation moyen dans l'UEMOA de 1980
à 2014 20
Figure 4 : Evolution du taux d'inflation par pays de 1980
à 2014 21
Figure 5: Evolution du solde de base des pays de l'UEMOA 24
Figure 6 : Effet d'un choc de politiques budgétaires au
Bénin sur la croissance
économique des pays de l'UEMOA vi
Figure 7 : Effet d'un choc de politiques budgétaires au
Burkina Faso sur la
croissance économique des pays de l'UEMOA vi
Figure 8 : Effet d'un choc de politiques budgétaires en
Côte d'Ivoire sur la
croissance économique des pays de l'UEMOA vii
Figure 9 : Effet d'un choc de politiques budgétaires au
Mali sur la croissance
économique des pays de l'UEMOA vii
Figure 10 : Effet d'un choc de politiques budgétaires
au Niger sur la croissance
économique des pays de l'UEMOA viii
Figure 11 : Effet d'un choc de politiques budgétaires
au Sénégal sur la
croissance économique des pays de l'UEMOA viii
Figure 12 : Effet d'un choc de politiques budgétaires
au Togo sur la croissance
économique des pays de l'UEMOA ix
II
LISTE DES GRAPHIQUES
Graphique 1 : Vulnérabilité des économies
de l'UEMOA 31
Graphique 2 : Chocs asymétriques 33
Graphique 3 : Intégration commerciale et cycle des
affaires 72
Graphique 4 : Carré magique de Nicola Kaldor 73
Graphique 5 : Les principaux effets du déficit
budgétaire 77
Graphique 6 : Réponse du taux croissance réel
suite à un choc de dépenses
publiques 148 Graphique 7 : Réponse de la dette
publique suite à un choc de dépense
publique 149
Graphique 8 : Réponse des dépenses publiques sur
elles-mêmes 150
Graphique 9 : Réponse des recettes publiques suite
à un choc de dépense
publique 151 Graphique 10 : Réponse des importations
suite à un choc de dépense publique
152 Graphique 11 : Réponse du taux croissance
réel suite à un choc de recettes
publiques 153 Graphique 12 : Réponse de la dette
publique suite à un choc de recettes
publiques 153 Graphique 13 : Réponse de la dette
publique suite à un choc de recettes
publiques 154 Graphique 14 : Réponse des recettes
publiques suite à un choc sur elles-
mêmes 155 Graphique 15 : Réponse des
importations suite à un choc de recettes publiques
156 Graphique 16: Diagramme des flux d'échanges
intrarégionaux (en pourcentage
du PIB, 2010) 164
III
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Principaux produits exportés dans le cadre
du commerce intra-
UEMOA 23
Tableau 2: Corrélation des cycles économiques
entre les divers pays et
l'ensemble de l'UEMOA de 1980 à 2012. 32
Tableau 3 : Critères de Convergence de la zone UEMOA
56
Tableau 4 : Nombre de critères respectés par
pays depuis 2000 59
Tableau 5 : Compte simplifié des APU 118
Tableau 6 : Test de stationnarité 124
Tableau 7 : Nombre de retard optimal 125
Tableau 8 : Résultats des estimations par la
méthode GMM 130
Tableau 9 : Test de corrélation des résidus
d'équations du modèle 143
Tableau 10 : Résultats de l'analyse de la
décomposition de la variance de
l'erreur de prévision 145
Tableau 11 : Corrélation spatiale de choc de
dépenses publiques 157
Tableau 12 : Corrélation spatiale de choc de recettes
publiques 158
Tableau 13 : Résultats du test de causalité au
sens de granger v
IV
LISTE DES ACRONYMES
ACP : Analyse en Composante Principale
AIC : Critère d'Information
d'Akaike
AMAO : Agence Monétaire de l'Afrique
de l'Ouest
APU : Administration Publique
BCE : Banque Centrale Européenne
BCEAO : Banque Centrale Etats de l'Afrique de
l'Ouest
BEAC : Banque des Etats de l'Afrique
Centrale
BIC : Critère d'Information
Bayésien
BM : Banque Mondiale
BRVM : Bourse Régionale des Valeurs
Mobilières
CE : Commission Européenne
CECA : Communauté Economique du
Charbon et de l'Acier
CEDEAO : Communauté Economique Des
Etats de l'Afrique de l'Ouest
CEMAC : Communauté Economique et
Monétaire d'Afrique Centrale
CFA : Communauté Financière
Africaine
CNUCED : Conférence des Nations Unies
sur le Commerce et le Développement
DSGE : Dynmic Stochastic General
Equilibrium
FASEG : Faculté des Sciences
Economiques et de Gestion
FMI : Fonds Monétaire International
V
GMM : Méthode de Moments
Généralisés
HQ : Hannan et Quinn
IDE : Investissements Directs Etrangers
LARED : Laboratoire d'Analyse de Recherche et
d'Etude du Développement
MCO : Moindres Carré Ordinaire
MSVAR : Markov Switching Vector
Autoregressif
NEC : Nouvelle Economie Classique
NEK : Nouvelle Economie Keynésienne
NIGEM : National Institue's Global
Economatric Model
NPMC : Nouvelle Politique Monétaire et
de Crédit
OCDE : Organisation de Coopération et
de Développement Economiques
OMC : Organisation Mondiale de la
Santé
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
PAS : Programme d'Ajustement Structurel
PCSCS : Pacte de Convergence de
Stabilité, de Croissance et de Solidarité
PIB : Produit Intérieur Brut
PPTE : Pays Pauvres Très
Endettés
PSC : Pacte de Stabilité et de
Croissance
PVAR : Panel Vectoriel
Autorégressif
RCA : République Centrafricaine
VI
TEC : Tarif Extérieur Commun
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée
UE : Union Européenne
UEM : Union Economique et Monétaire
UEMOA : Union Economique et Monétaire
Ouest Africaine
UMOA : Union Monétaire Ouest
Africaine
USA : United States of America
VAR : Vectoriel Autorégressif
VARS : Vectoriel Autorégressif
Structurel
VI : Variables Instrumentales
WDI : World Development Indicator
ZMO : Zone Monétaire Optimale
ZMOA : Zone Monétaire Ouest
Africaine
VII
RESUME
L'adoption du Pacte de Convergence et de Stabilité
(PCS) limite les marges de manoeuvres budgétaires dans l'absorption des
chocs défavorables. Pourtant, cette thèse s'intéresse
à la question relative aux externalités budgétaires
connues sous le nom « Effets de débordement » et leur
transmission. À ce titre, elle constitue un prolongement des
études antérieures réalisées sur la politique
budgétaire et sa fonction de stabilisation dans l'UEMOA.
L'intérêt de ce travail consiste à montrer dans quel
état les chocs de politiques budgétaires se propagent dans
l'activité économique des pays de l'union et tente à cet
effet de ressortir les canaux de transmission. La question de recherche est la
suivante : comment les chocs de politiques budgétaires d'un pays
spécifique peuvent-ils impacter l'économie des pays voisins dans
le cadre d'une union monétaire comme celle de l'UEMOA ? Le
modèle VAR en panel dynamique (PVAR) est privilégié et les
estimations sont effectuées en utilisant la méthode GMM. La
période couvre de 1980 à 2014. Les résultats ainsi obtenus
montrent clairement que les effets de débordement budgétaires
dans l'UEMOA sont ressentis de façon très
différenciée dans les pays, en raison des comportements
hétérogènes des économies. Les chocs de
dépenses publiques induisent un effet de débordement plus
important sur la croissance économique que les chocs de recettes
publiques. Les canaux de transmission des chocs budgétaires
diffèrent entre la zone euro et la zone UEMOA. Les trois (03) principaux
canaux de transmission sont : le canal du crédit en raison d'un
endettement assez important pour financer le déficit budgétaire ;
le canal de la fiscalité puisqu'au niveau national, on note une
concurrence fiscale qui souvent est source d'attraction ou de
désincitation pour les agents économiques (entreprises et
mobilité des facteurs) ; et enfin le canal du commerce, les politiques
budgétaires génèrent des externalités entre pays
partenaires. Pour rendre plus efficace l'action budgétaire sur
l'activité, il faut des politiques budgétaires prudentes à
travers une coordination plus poussée.
Mots clés : Politique
budgétaire - Effets de débordement - Canaux de transmission -
Chocs asymétriques - Hétérogénéité
structurelle - Stabilisation - UEMOA.
VIII
ABSTRACT
The adoption of the Convergence and Stability Pact (PCS)
limits the scope for fiscal maneuver in absorbing adverse shocks. Yet this
thesis addresses the issue of budget externalities known as "overflow effects"
and their transmission. As such, it is an extension of previous studies on
fiscal policy and its stabilization function in WAEMU. The interest of this
work is to show in what state fiscal policy shocks spread in the economic
activity of the countries of the union and attempts to highlight the channels
of transmission. The research question is: how can the fiscal policy shocks of
a specific country impact the economies of neighboring countries in the context
of a monetary union like that of WAEMU? The dynamic panel VAR model (PVAR) is
preferred and estimates are made using the GMM method. The period covers from
1980 to 2014. The results thus obtained clearly show that the effects of
budgetary outflows in the WAEMU are felt in a very different way in the
countries, because of the heterogeneous behavior of the economies. Public
expenditure shocks induce a greater spillover effect on economic growth than
public revenue shocks. The transmission channels of fiscal shocks differ
between the euro zone and the WAEMU zone. The three (03) main channels of
transmission are: the credit channel because of a debt large enough to finance
the budget deficit; the tax channel, since at national level there is tax
competition, which is often a source of attraction or disincentive for economic
agents (companies and factor mobility); and finally the trade channel, fiscal
policies generate externalities between partner countries. To make budget
action more effective, prudent fiscal policies.
Keywords: Budgetary policy - Overflow
effects - Transmission channels - Asymmetric shocks - Structural heterogeneity
- Stabilization - WAEMU.
1
2
La concrétisation d'un processus stable de
développement socio-économique est un objectif pour tous les
pays. Face à un tel défi, les pays d'Afrique de la zone franc ont
longtemps poursuivi le processus d'intégration régionale pour
compléter et renforcer les politiques mises en place au niveau national
et multilatéral pour un développement harmonieux. C'est dans ce
contexte que huit (08) pays de l'Afrique de l'Ouest ont exprimé leur
volonté de donner une impulsion nouvelle et décisive par une
harmonisation accrue des politiques et des législations, à
travers la création d'une Union Économique et Monétaire
Ouest Africaine (UEMOA). Cette forme d'intégration débouche sur
un arrangement des politiques macroéconomiques qui, au-delà de
ses avantages et coûts, soulève quelques préoccupations
majeures.
En effet, au sein d'un tel espace, la politique
budgétaire demeure spécifique à chaque Etat membre. Les
avantages de ce type d'arrangement sont multiples sur le plan théorique.
Ils ont trait à la facilitation du commerce intra-communautaire pour
Rose et Engel, (2002) à la réduction du taux d'inflation des pays
membres selon Alesina et Barro, (2002), à la baisse des taux
d'intérêt et à l'accroissement de l'investissement
débouchant sur une croissance économique plus rapide
d'après De Grauwe, (2000). Pourtant, ces avantages théoriques
s'accompagnent de coûts en termes de flexibilité de la politique
macroéconomique pour les pays. Ces derniers ne peuvent plus recourir
à la politique monétaire pour stabiliser les cycles
économiques. Une telle architecture soulève alors un certain
nombre de préoccupations, dont celle liée à la
stabilisation des chocs asymétriques pouvant toucher les Etats. Selon
Zumer (1998), « le choc défini comme toute perturbation
affectant une économie donnée, est dit asymétrique dans un
contexte d'union monétaire, s'il ne frappe qu'un seul pays, quelques
pays ou même l'ensemble des pays de l'union, mais dans des proportions
différentes ». Ces chocs sont le grand problème des
unions monétaires et ne peuvent faire l'objet d'une réponse
commune. Si la politique monétaire est efficace pour l'économie
en cas de chocs symétriques, elle devient inefficace cependant aux chocs
asymétriques. Alors, la stabilisation doit passer par d'autres
politiques économiques, Guillaumin (2007).
3
Dans un tel contexte, la politique budgétaire retrouve
un regain d'importance. Elle reste le seul moyen à la disposition des
pouvoirs publics pour faire face aux chocs asymétriques conjoncturels,
pouvant menacer la viabilité d'une union monétaire, Schalck
(2006). Au sein d'un espace intégré, l'instauration d'un mode
d'organisation institutionnelle des fonctions budgétaires pour
discipliner les politiques nationales et les rendre compatibles avec le
renforcement de la monnaie commune, trouve toute sa légitimité,
Oros et Turcu, (2008) ; Echinard et Laurent (2010). De facto, l'on a toujours
supposé que les pays en union monétaire présentent des
économies structurellement identiques. Pourtant, des théories de
Mundell et Fleming à ce jour, aucune union n'est fondée sur des
économies homogènes ; malgré la volonté manifeste
des gouvernements. Le vrai constat est que les économies sont
hétérogènes. En effet, il y a des différences entre
pays en ce qui concerne les comportements, les structures économiques et
les préférences des agents. Parfois même, les politiques
discrétionnaires nationales sont susceptibles de renforcer
l'hétérogénéité ; puisque les règles
budgétaires (Pacte de stabilité) sont peu respectées.
Face à la recrudescence des chocs asymétriques,
l'instrument budgétaire est souvent utilisé comme une
réponse. Cela a des conséquences positives ou négatives
sur le niveau de l'activité économique de l'union. Ces
conséquences connues sous le nom « effets de débordement ))
en français ou « spill-overs )) en anglais, continuent d'alimenter
les débats ; à la recherche de solutions optimales pour les
unions monétaires. Ce recours excessif à l'instrument
budgétaire amplifie le niveau de déficits et d'endettements
publics au sein des unions monétaires. Ce qui remet au goût du
jour la question de l'efficacité de la politique budgétaire,
Engone (2005).
La résurgence des réflexions sur la politique
budgétaire1 dans les unions monétaires fait l'objet de
vives discussions. Ces débats portent entre autres sur
1 Selon A. BENASSY (1990), la politique
budgétaire est un instrument de politique économique qui consiste
à utiliser le budget de l'Etat pour atteindre certains objectifs, tels
que : la croissance économique, le plein
4
les effets de débordement budgétaires et les
canaux de transmission. En effet, dans une union monétaire, une
politique budgétaire d'un pays donné transite par des canaux pour
affecter les comportements des agents économiques d'autres pays,
Bénassy-Quéré et Cimadomo, (2006). Par canaux de
transmission, on attend les voies par lesquelles une décision de
politique économique (budgétaire ou monétaire) dans un
pays affecte l'économie d'un autre pays (Wyplosz, 2002). Ces impacts
sont des externalités connues sous le nom d'effets de
débordement. Ils caractérisent les effets voulus et
attendus2, engendrés par une décision de politiques
budgétaires d'un pays membre, et qui peut avoir des répercussions
positives ou négatives sur l'activité économique du pays
en question et sur ces partenaires commerciaux. (Biales, 2010 ; Schalck et
Benassy, 2007). La connaissance des mécanismes de transmission d'une
politique budgétaire permet aux décideurs de surveiller
correctement l'état de l'économie et de prendre les
décisions appropriées. À contrario, la
méconnaissance des mécanismes de transmission peut avoir des
conséquences : réactions cycliques ou contra- cycliques dans les
économies, (Angeloni et al, 2003).
Toutefois, les économistes ne s'accordent pas trop sur
les effets des politiques budgétaires. La théorie
keynésienne stipule que la politique budgétaire peut stimuler la
demande globale et relancer une économie stagnante. Ainsi, les
politiques budgétaires produisent des effets positifs sur
l'économie d'un pays par le mécanisme du multiplicateur
keynésien puisque les dépenses publiques représentent une
composante de la demande globale au même titre que la consommation,
l'investissement et les exportations. Celles-ci produisent grâce au
emploi et la réduction de la pauvreté. Pour R.A
MUSGRAVE (1959), la politique budgétaire se définit aussi comme
l'ensemble des instruments dont dispose un gouvernement pour influer sur
l'activité économique, ce qui lui permet d'assurer les fonctions
de stabilisation, d'allocation et de redistribution.
2Augmentation du revenu ; accroissement des
exportations ; accroissement des importations ; hausse de la production des
entreprises ; hausse des taux d'intérêt ; hausse des prix ;
détérioration de la balance courante ; perte de
compétitivité de l'économie ; hausse de l'endettement
5
mécanisme du multiplicateur, un accroissement important
de la production nationale, Keynes (1936).
Dans la théorie néo-fonctionnaliste, Haas (1958)
a mis l'accent sur la notion d'engrenage ou « spillover » dans les
communautés européennes. Il trouve sans équivoque une
forme de déterminisme économique ; puisque la décision
prise par les gouvernements européens de placer un secteur
économique donné sous l'autorité d'institutions
supranationales, a créé inévitablement, une pression
favorable à l'extension de l'autorité de ces institutions
à d'autres secteurs voisins.
La théorie de la Nouvelle Économie Classique
(NEC) dont les auteurs (Lucas, Sargent, Wallace et al, 1970), montre que la
politique budgétaire de stabilisation n'a aucun effet favorable sur
l'activité économique ; puisque les gouvernements utiliseraient
la politique budgétaire à mauvais escient, à des fins
électoralistes et non à des fins de régulation ; les
déficits publics seraient généralement trop
élevés, conduisant à une forte accumulation de dette
publique. Par ailleurs, les déficits publics seraient nuisibles en
entrainant une hausse des taux d'intérêt, une baisse de la demande
privée (puisque les agents anticipent les impôts qu'ils devront
payer demain) et une baisse de l'offre (en raison de l'anticipation des effets
néfastes des impôts futurs). Barro (1974) aborde dans le
même sens à partir du principe « d'équivalence
ricardienne3» pour lequel, un déficit budgétaire
n'a pas l'effet attendu sur la demande car les individus anticipent une
augmentation future des impôts afin que l'État rembourse sa dette.
Ils réduisent donc leur consommation et augmentent leur épargne
pour payer les impôts futurs. Aussi, Kydland et Prescott (1977) ont
analysé le problème de l'incohérence dans le temps des
décisions des pouvoirs publics. Ils démontrent que les politiques
publiques mises en oeuvre par les pouvoirs publics sont incapables de
3 Selon ce théorème, il y aurait, sous certaines
conditions, équivalence entre l'augmentation de la dette publique
aujourd'hui et l'augmentation des impôts requise demain pour le
remboursement de cette dette et le paiement des intérêts.
6
réaliser les objectifs fixés dès que les
conséquences de leurs engagements sont parfaitement
intégrées dans les anticipations d'agent considéré
comme rationnel.
Aussi, la théorie néo-réaliste ou
inter-gouvernementaliste a mis en évidence la place de la politique
intérieure dans les espaces communautaires. Certains auteurs comme
Hoffmann. S et Moravcsik. A (1980) concluent que les priorités
essentielles des gouvernements nationaux restent les programmes qui leur sont
propres. Ainsi, la Commission Européenne devient l'institution
internationale destinée à faciliter les marchandages entre Etats
(interstate bargains) qui constituent en réalité le
véritable moteur de l'intégration européenne.
Krugman (1991) dans sa théorie des zones
d'intégration « naturelle 4» a mis en
évidence le résultat des « effets frontières ».
Dans ces conditions on peut admettre que lorsque les zones de
préférences institutionnelles ne recouvrent pas les zones
d'intégration « naturelle », les effets de débordement
sont importants ; ce qui peut réduire les échanges par les
accords commerciaux officiels. L'importance du rôle des effets de
proximité dans ces zones est liée notamment aux coûts de
distance ; c'est-à-dire « l'ensemble des coûts
supportés pour transférer un bien de son lieu de production
à son lieu de consommation » (Siroën, 2000). Il peut s'agir
des coûts de transport, des difficultés de consommation et autres
barrières non tarifaires. Ces facteurs jouent en faveur de la dispersion
des activités industrielles en créant une protection «
naturelle 5» qui conduit à localiser les activités à
proximité du lieu de consommation. À l'inverse lorsque les
externalités positives se généralisent, les avantages de
la concentration des activités se diffusent dans un espace plus large
par « effets de contagion » ; favorisant ainsi la réduction
des disparités de revenus. Entre ces deux situations, on peut observer
le cas intermédiaire où la concentration
4 Ce sont les zones où les pays qui sont proches
naturellement et dont les transactions sont facilitées par cette
proximité
5 Pour Krugman [1991], une zone naturelle se définit
comme une zone à l'intérieur de laquelle, en l'absence de
barrières aux échanges et d'accords de préférence,
les échanges seraient plus intenses qu'avec le reste du Monde.
7
d'activités dans une région donnée
implique des effets de débordement à la fois locaux et
globaux.
Solow (2002) dans sa théorie de réhabilitation
de la politique budgétaire montre qu'il est très difficile, voire
impossible d'imaginer une politique budgétaire pure qui n'ait aucun
effet sur la répartition des revenus ou sur l'affectation des
ressources. Cette affirmation remet en cause l'opinion dominante des
années 80 sur l'incapacité de la politique budgétaire
à stabiliser la conjoncture. Or, la mise en place de l'Union
Européenne redonne à cette question une nouvelle actualité
soutenue par le débat que soulève la nouvelle Théorie
anti-Keynésienne (TAK) des finances publiques (Giavazza et Pagano, 1990
et 1995 ; Besson et Echinard, 2000 ; Mathieu et Sterdyniak, 2005).
Depuis Mundell (1961) et Fleming (1962)6, la
controverse est vive sur le signe et l'ampleur des externalités
générées par une politique budgétaire expansive.
Malgré l'enrichissement du cadre d'analyse de Mundell-Fleming par une
meilleure spécification des fondements microéconomiques des
comportements des agents par la nouvelle macroéconomie internationale,
la littérature théorique ne fournit pas une réponse claire
quant aux signes des effets de débordement de la politique
budgétaire. Il ressort globalement des modèles théoriques
analysant la transmission internationale de la politique budgétaire que
le signe des externalités générées est fortement
dépendant de la spécification des fondements
microéconomiques des comportements des agents. Par ailleurs, la
robustesse des arguments relatifs aux externalités négatives de
demande dépend de l'importance du canal du commerce extérieur et
de la réaction du taux d'intérêt commun de l'union aux
changements de la politique budgétaire (Sarr, 2006).
Sur le plan empirique, Persson et Tebellini, (1995)
soutiennent que dans une union monétaire, les politiques
budgétaires peuvent dégager des externalités importantes
et des risques d'insoutenabilité des finances publiques. Les
6 Les premiers à avoir mis en évidence les canaux
de transmission de la politique budgétaire lorsque les pays
étaient interdépendants
8
économies sont interdépendantes au point que les
politiques budgétaires adoptées par un pays affectent la
performance économique des pays voisins. Des coûts peuvent
clairement apparaitre : par exemple un gouvernement choisissant des politiques
visant à maximiser les objectifs nationaux et ignorant les
externalités imposées aux autres pays peut générer
un équilibre sous-optimisé. Creel et al., (2004) ont
identifié trois canaux de transmission de la politique budgétaire
dans l'union européenne à savoir la consommation,
l'investissement et les taux d'intérêt. Pour la même zone,
Bénassy-Quéré et Cimadomo (2006) identifient quatre
principaux canaux de transmission par lesquels les politiques
budgétaires nationales affectent l'économie des autres pays. Il
s'agit : du commerce extérieur ; du taux d'inflation ; du taux
d'intérêt et de la fiscalité. Cependant, il est
envisagé de porter la réflexion sur les canaux les récents
pour les besoins de la recherche ; c'est-à-dire les quatre canaux
identifiés.
Pour celui du commerce extérieur, les changements de
politiques budgétaires nationales affectent les autres pays à
travers les termes de l'échange et les changements dans la demande
d'importations (Persson et Tabellini, 1995). Ainsi, un effet positif de hausse
de la demande est immédiatement perceptible dans le pays en
déficit et chez ses partenaires (Carton, 2005). On peut noter là
une manifestation des effets keynésiens qui se propagent via le commerce
extérieur.
Le deuxième est relatif à l'inflation. Sarr
(2006) montre qu'une hausse des dépenses publiques peut accroître
l'inflation nationale et l'inflation moyenne de l'union si la banque centrale
commune réagit par une politique monétaire restrictive. Cela peut
affecter négativement l'activité de tous les pays membres de
l'union. Alors, il convient de dire qu'un différentiel de taux peut
être à l'origine d'une transmission de choc budgétaire
entre pays. Par exemple un pays en déficit perd sa
compétitivité face à ses partenaires de l'union, lorsque
son taux d'inflation locale est plus élevé que ses pays voisins.
Ce qui se traduit à long terme par une activité moins dynamique
dans le pays comparé au reste de l'union.
9
Le troisième est celui du taux d'intérêt.
Les changements dans les rendements après imposition du capital dans
différentes localités affectent les autres pays en cas de
mobilité parfaite ou imparfaite du capital. Selon Carton (2005) la
variation de la demande (situation de déficit) provoque une hausse des
prix, surtout dans le pays en question et une réaction de la politique
monétaire. Ainsi, les taux d'intérêt de court terme
augmentent temporairement dans l'ensemble de la zone, avec une propagation
partielle de taux longs (il s'agit des taux ayant servi à financer
l'investissement).
Dans la zone euro, le canal fiscal a été mis en
évidence aussi. Des auteurs tels que Giavazzi, Pagano et Blanchard
(1990), ont mis en évidence les effets de la politique budgétaire
sur la fiscalité. Ils ont montré qu'une baisse permanente des
dépenses publiques annonce une baisse future des impôts. Une
relance budgétaire peut donc avoir des implications différentes
pour les pays partenaires selon qu'elle résulte d'une stimulation de la
demande ou d'une baisse de la fiscalité. Par ailleurs, une politique
fiscale agressive en faveur des entreprises (par exemple, une baisse rapide de
l'impôt sur le bénéfice des sociétés) peut
obliger les pays partenaires à réagir, soit en rationalisant ses
dépenses publiques, soit en participant à son tour à la
course.
Par contre dans la zone UEMOA, une étude
réalisée par Sarr (2006) explique que les effets d'un choc
budgétaire transitent par les canaux suivants : le commerce intra-zone,
le taux d'intérêt et le taux de change. Selon Honohan (1992) ;
Boccara et Devarajan (1993), la transmission de l'inflation entre les pays du
noyau dur (la Côte d'Ivoire et le Sénégal) de l'UEMOA et
les pays les plus pauvres a été étudiée mais
également entre la France et les pays membres de l'union. Cependant, ils
concluent l'existence d'un noyau commun du taux d'inflation qui tourne autour
de celui de la France, mais rejettent toute cointégration des
séries de taux d'inflation dans la zone. En dehors de cela, une
étude empirique analysant l'ampleur des effets de débordement des
chocs de politiques budgétaires sur l'activité économique
réelle dans cette zone est quasi-inexistante.
10
Dans le même ordre d'idée, sur la période
1993-2002, Ondo Ossa (2006) trouve que la zone CEMAC est indéniablement
un espace anti-keynésien, dans la mesure où la hausse des
dépenses publiques et du déficit budgétaire n'a aucun
effet sur la croissance. La demande publique a donc nécessairement un
effet plus faible que la demande privée et la politique
budgétaire ne peut nullement y être utilisée pour
stabiliser l'activité. De plus, les externalités
négatives engendrées par des déficits excessifs de
certains pays peuvent avoir des répercussions sur les autres et
provoquer dans le même temps des pressions sur la banque centrale par le
biais des dettes publiques. À cet égard, un pays membre qui
n'assure pas la solvabilité de ses finances publiques fait
automatiquement courir un risque à la stabilité financière
de la zone, à travers un relèvement des taux
d'intérêt de long terme. Cependant, les externalités
exercées par une politique budgétaire nationale dépendent
de la taille du pays. Si les actions budgétaires du Gabon ou du Tchad
affectent peu les autres pays de la zone comme que le montrent les
résultats de ses travaux, il en va autrement des actions initiées
par le Cameroun qui, en tant que grand pays, est tenu à plus de
discipline collective que les petits pays.
Les nombreux clivages notés dans les controverses
théoriques et empiriques font dire à Benassy et al (2004), que
les débats théoriques relatifs aux politiques budgétaires
sont perçues comme étant « un champ de bataille entre les
avocats de l'offre et ceux de la demande, entre tenants des politiques
structurelles et partisans des politiques contra-cycliques, entre chevaliers de
la libéralisation et défenseurs des services publics, entre ceux
qui évaluent une politique à l'aune de ses effets sur la
croissance à moyen terme et ceux qui mettent l'accent sur ses effets
immédiats pour la répartition du revenu, etc.».
Pourtant, peu de travaux empiriques ont évalué
les effets de débordement budgétaires et analysé leurs
canaux de transmission dans les unions monétaires. En union
européenne, les travaux empiriques tels que ceux de Gros et Hobza (2001)
ont montré en général que les externalités
budgétaires sont faibles, voire
non significatives dans une union monétaire. Beetsma et
al., (2001) mettent en évidence des externalités positives, mais
en se limitant au canal du commerce extérieur. Pour la zone franc,
l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) apparait comme
notre champ d'investigation pour les raisons ci-après :
? D'abord la présence de
l'hétérogénéité structurelle des
économies nécessite de consacrer un important pouvoir de
stabilisation aux politiques budgétaires propres à chaque pays
pour le besoin de relance économique (Coulibaly, 2013) ;
? Ensuite les économies sont à la fois pauvres
et fortement intégrées au processus de mondialisation
économique et financière ; à ce titre, elles restent
très vulnérables face aux chocs exogènes ;
? En fin, la présence des cycles asynchrones de
production nécessite une coordination des politiques budgétaires,
afin d'amortir les chocs sur les économies (Kane, 2013).
Ainsi, la question de recherche est la suivante : comment
les chocs de politiques budgétaires d'un pays spécifique
peuvent-ils impacter l'économie des pays voisins dans le cadre d'une
union monétaire comme celle de l'UEMOA ?
L'objectif principal de ce travail est d'analyser la
propagation et l'ampleur des chocs des chocs de politiques budgétaires
d'un pays sur l'économie des autres pays de l'union. L'atteinte de cet
objectif passe par les objectifs spécifiques suivants :
OS1 : Vérifier si un choc de
politiques budgétaires dans un pays donné produit des effets
identiques sur tous les pays de l'union.
OS2 : Mesurer l'ampleur des effets de
débordement des chocs de politiques budgétaires dans l'UEMOA sur
l'activité économique (ici la croissance) des pays.
11
OS3 : Identifier les canaux de transmission des
chocs budgétaires dans l'UEMOA.
12
L'approche méthodologique s'appuie sur un modèle
Vectoriel Auto-régressif (VAR) sur données de panel. Le
modèle VAR en panel dynamique a montré d'excellentes
capacités de représentation des fluctuations
macroéconomiques. Cette approche se caractérise par plusieurs
avantages spécifiques. Elle permet à la fois de contrôler
les effets spécifiques individuels et temporels et de pallier les biais
d'endogénéité des variables, surtout lorsqu'il existe un
ou plusieurs retards de la variable dépendante figurant comme variable
explicative (Sawsen, 2006). Du point de vue économétrique aussi,
les chocs exogènes peuvent être identifiés à partir
des résidus d'équation estimés. L'introduction de l'espace
amène à prendre en compte l'autocorrélation spatiale qui
se réfère à l'absence d'indépendance entre les
observations géographiques et
l'hétérogénéité spatiale.
Les données utilisées proviennent de plusieurs
sources. D'abord la base de données de la BCEAO publiée dans le
site de l'UEMOA, a permis d'obtenir les statistiques sur les dépenses
publiques, les recettes publiques, les importations, le crédit à
l'économie et la dette publique en vigueur dans la zone. Ensuite la base
de données du Word Development Indicator (WDI) publiée le 21
décembre 2016 dans le site de la Banque Mondiale, a permis d'obtenir les
données sur le taux de croissance réelle, l'investissement
privé et l'inflation. Et enfin la base de données émise
par le Fonds Monétaire International (FMI) qui a été
utilisée pour compléter les valeurs manquantes présentes
dans les précédentes bases de données. Cette recherche se
fonde sur les hypothèses suivantes :
H1 : La nature (signes) des effets de
débordement budgétaires dans les pays de l'UEMOA est tributaire
de leur structure économique pour la zone.
H2 : Les chocs de dépenses publiques
induisent un effet plus important sur la croissance économique que les
chocs de recettes fiscales, en raison d'une harmonisation de plus en plus
poussée des législations fiscales dans l'UEMOA.
H3 : Les canaux de transmission peuvent
différencier d'une union à l'autre en raison des
spécificités économiques au regard de la
littérature économique.
13
Cette thèse défend l'idée selon laquelle,
l'ampleur des effets de débordement budgétaires dans l'UEMOA est
tributaire du degré d'hétérogénéité
des économies qui la composent. L'intérêt d'un tel sujet
est de montrer comment les chocs de politiques budgétaires se propagent
dans l'activité économique des États de l'Union et tente
à cet effet de ressortir les canaux de transmission. L'innovation dans
ce travail aussi, est d'avoir été le premier à
évaluer l'ampleur des effets de débordement des chocs
budgétaires dans la zone UEMOA. Dans un contexte de Pacte de convergence
et de stabilité, ce travail de recherche apporte quelques contributions
à l'amélioration de la stabilité macroéconomique
dans la zone à travers la politique budgétaire.
Ce travail est structuré autour de trois (03)
chapitres. Le premier chapitre traite des comportements économiques et
des externalités budgétaires dans l'UEMOA. A cet effet, il met
l'accent sur les hétérogénéités
structurelles, l'analyse des contagions budgétaires puis les
critères de convergence et de surveillance multilatérale. Le
deuxième chapitre passe en revue les arguments théoriques et
empiriques dans la conduite de la politique budgétaire en union
monétaire de façon générale. Le troisième
chapitre expose la méthodologie d'évaluation des effets de
débordement budgétaires et les résultats de la recherche
à partir d'un modèle VAR en panel dynamique.
CHAPITRE I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET
EXTERNALITES BUDGETAIRES DANS L'UEMOA
14
15
L'apparition d'externalités budgétaires dans les
unions monétaires remet en cause l'efficacité de la politique
budgétaire comme instrument de régulation de l'activité
économique. Pourtant, plusieurs travaux de recherches ont
justifié la pertinence de la création d'une union
monétaire dans un espace géographique avec une monnaie unique
fondée sur une parité irrévocable. D'ailleurs, Agliette et
al., (1998) et Frankel (2001) montrent que la politique monétaire unique
(où le taux de change fixe) ne permet plus de corriger les effets d'un
choc de demande que sont le chômage et l'inflation. Sawall (2013) ajoute
que l'intégration économique et commerciale est un rempart contre
les chocs asymétriques.
Cependant, la crédibilité et la
pérennité d'une zone monétaire demeurent tributaires du
degré de convergence des économies appartenant à ladite
zone, ainsi que de la symétrie relative des chocs qui l'affectent. Ces
concepts de convergence et de symétrie renvoient à un certain
degré d'harmonisation des économies pendant une période
donnée. Dans le cas l'Union Économique Monétaire Ouest
Africaine, la question de l'hétérogénéité
structurelle des économies occupe une bonne place dans les débats
politiques et la recherche scientifique pour une résolution des
déséquilibres économiques.
L'objet de ce chapitre est d'analysé les profils
économiques des pays de l'union et les externalités
budgétaires. Il comprend trois grandes sections : la section (I) traite
de l'hétérogénéité des économies et
des chocs dans les pays, la section (II) met l'accent sur les
externalités budgétaires et la section (III) aborde la
convergence budgétaire et la surveillance multilatérale dans
l'union.
SECTION I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET CHOCS
ECONOMIQUES
La structure productive des économies et leur
capacité de réaction aux chocs demeurent les principaux
déterminants des divergences structurelles entre pays membres d'union
monétaire. La difficulté de trouver la formule optimale pour la
conduite de la politique monétaire dans la zone UEMOA vient à la
fois du caractère asymétrique des chocs et asynchrone des cycles,
puisque le taux
16
d'intérêt de l'union est un compromis entre les
taux d'intérêt souhaités par les gouvernements. La
délégation de la politique monétaire à une banque
centrale indépendante peut générer des conflits indirects
entre les gouvernements nationaux. Par exemple un pays en récession
aimerait que la banque centrale suive une politique monétaire
accommodante, alors qu'un pays en expansion préférerait une
hausse des taux d'intérêt. Ce conflit d'objectifs découle
de l'hétérogénéité des
préférences des autorités monétaires et
budgétaires. En effet, les écarts durables entre les performances
nationales peuvent être à l'origine des coûts non
négligeables du fait de la difficulté de mener une politique
monétaire profitant à tous, (Kaiser, 2005).
Dans cette section nous allons mettre l'accent sur les
comportements économiques des pays de l'union à travers d'abord
l'analyse de certains indicateurs macroéconomiques, ensuite les sources
d'hétérogénéités et enfin les chocs
économiques et leur absorption.
I.1- Descriptions des indicateurs macroéconomiques
dans la zone
L'analyse des comportements par pays est faite à
travers certains indicateurs qui sont mis en avant pour montrer la nature
divergente des économies de l'UEMOA. Il s'agit du taux de croissance
économique, du taux d'inflation, du solde budgétaire de base et
du secteur du commerce sur la période de 1980 à 2014. Elle est
découpée en quatre grandes phases marquées par les
évènements suivants : la première va de 1980 à
1994, elle est marquée surtout par les programmes d'ajustement
structurel sous l'impulsion des institutions de Betton Woods (Banque Mondiale
et le FMI) ; la deuxième s'étale de 1994 à 1999,
marquée par la dévaluation du franc CFA et les politiques de
promotion à l'exportation dans la zone UEMOA et un début de
l'assainissement des finances publiques; la troisième se situe entre
1999 et 2008, ponctuée par l'adoption des pactes de stabilité et
croissance et le début de la crise financière de 2008 ; et enfin
la quatrième va de 2008 à 2014, où on note encore les
effets de cette crise et la révision des réformes du pacte de
stabilité et croissance.
17
I.1.1- L'analyse en termes de performances
économiques
De 1980 à 2014, le taux de croissance économique
dans l'UEMOA a connu une hausse de 3,16% en moyenne par an. Ainsi, durant les
quatre périodes, ce taux est passé de 2% entre 1980 et 1994
à 4,56% entre 1995 et 1999. Mais de 2000 à 2008, on observe une
baisse de l'activité économique de 1,03 point, soit 3,53%. Cette
situation va s'améliorer après la crise financière de 2008
pour se situer à 4,40% entre 2009 et 2014. La figure n° 1 illustre
cette évolution du PIB réel.
Figure 1 : Évolution
du PIB de l'UEMOA de 1980 - 2014
5,00
4,50 4,00 3,50 3,00 2,50 2,00 1,50 1,00 0,50
|
|
-
|
1980-1994 1995-1999 2000-2008 2009-2014
|
Source : Auteur, à partir des données de la
BCEAO
Entre les pays, ils existent des disparités en termes
de croissance économique au cours de la période de 1980 à
2014. Ainsi, ils ont enregistré en moyenne des taux
différenciés avec (4,38%) pour le Bénin, le Burkina Faso
(5,54%), le Mali (4,20%), le Niger (3,39), le Sénégal (3,51%) et
le Togo (3,41%). Ces derniers ont réalisé des taux croissance
annuels généralement supérieur à la moyenne
régionale durant cette période. La Côte d'Ivoire et la
Guinée Bissau enregistrent respectivement (1,66%) et (1,96%) en raison
des nombreuses crises socio-politiques qu'elles ont connues. La figure n°
2 nous aide à montrer cette
hétérogénéité des performances
économiques pour les pays individuels de l'union.
18
Figure 2 : PIB réel par pays dans l'UEMOA de
1980 à 2014
-1,00
-2,00
4,00
8,00
7,00
6,00
5,00
3,00
0,00
2,00
1,00
UEMOA BENIN BURKINA FASO Côte d'Ivoire Gunee Bissau
Mali Niger Sénégal Togo
1980-1994 1995-1999 2000-2008 2009-2014
Source : Auteur, à partir des données
BCEAO
Une explication que l'on peut attribuer à cette
divergence des cycles économiques relève de l'action des
gouvernements nationaux et de la contribution du secteur privé dans
chaque pays membre. Ainsi de 1995 à 1999, la politique budgétaire
a contribué en moyenne à la croissance du PIB de 14,24% au
Bénin (dont 7,66% aux investissements publics et 6,57% aux
dépenses de consommation de l'Etat), de 38,69% au Burkina Faso (dont
20,86% aux investissements et 17,83% aux dépenses de consommation), de
16,69% en Côte d'Ivoire (dont 9,31% aux investissements et 7,38% aux
dépenses de consommation), de 29,36% au Mali (dont 2,38% aux
investissements et 28,84% aux dépenses de consommation), de 17,15% au
Niger (dont 7,51% aux investissements publics et 9,63% aux dépenses de
consommation), de 19,12% au Sénégal (dont 16,58% aux
investissements et 3,08% aux dépenses de consommation) et de 34,88% au
Togo (dont 17,05% aux investissements et 17,83% aux dépenses de
consommation).
Ces résultats s'expliquent par les mesures
adoptées dans l'ensemble des pays de l'union suite à la
dévaluation du franc CFA. Ces mesures portaient sur l'assainissement des
finances publiques, le développement des infrastructures
19
de qualité, la maitrise du taux d'inflation et la
baisse des taux d'intérêt par la banque centrale.
Sur la période de 2000 à 2008, l'introduction
des mesures budgétaires du Pacte et la contrainte faite aux États
membres de l'union de réaliser le critère sur le solde
budgétaire de base ont entrainé des changements dans
l'implication des gouvernements au processus de création de richesse. On
observe, en effet sur cette période, que les gouvernements des pays ont
pesé sur la croissance du PIB. Les contributions respectives sont de
(29,77%) au Bénin, (36,20%) au Burkina Faso, (10,37%) en Côte
d'Ivoire, (31,22%) au Mali, (59,87%) pour le Niger, (35,53%) au
Sénégal et (-0,73%) au Togo. Pour la Côte d'Ivoire,
l'instabilité politique a largement influencé la politique
budgétaire du gouvernement qui a gelé une bonne partie de ses
infrastructures durant cette période. Dans les autres pays, il convient
de constater que les tendances se sont inversées, car les gouvernements
ont mis davantage l'accent sur leurs dépenses de consommation et ont
réduit considérablement leurs investissements. Il s'en est suivi
toutefois une baisse de la croissance économique. Cette situation est
observée dans tous les pays de l'union contrairement à la
période 1995 -1999 où l'implication des gouvernements se
manifestait à travers leurs dépenses en capital public.
De 2009 à 2014, la croissance économique des
pays de l'union était portée par le secteur privé et le
secteur public dont les contributions demeuraient moindres à cause des
nouvelles règles de finances publiques imposées par le Pacte de
convergence. Le poids en moyenne de chaque gouvernement dans la croissance du
PIB sur la période se résume comme suit : 7,01% pour le
Bénin, dont 9,61% aux investissements et -2,59% aux dépenses de
consommation, 48,32% pour le Burkina Faso dont 17,81% sont liés aux
investissements publics ; 16,69% pour la Côte d'Ivoire, dont 9,31% aux
investissements de l'État ; 33,98% pour le Mali, dont 18,69% aux
dépenses en capital public ; 34,88% pour le Sénégal, dont
17,05% aux investissements publics et 11% pour le Togo, dont 6,83% aux
investissements publics. Cette phase est marquée par une participation
faible.
20
I.1.2- L'analyse en termes d'inflation
Pour l'analyse de l'inflation dans la zone, nous allons faire
abstraction de la Guinée Bissau pour ses données aberrantes.
Ainsi, sur trente-cinq années, l'UEMOA affiche un taux d'inflation
égale à 4,10%, ce qui est largement au-dessus des normes
fixées (=3%) par les États. Pendant les quatre grandes
périodes, ce taux a beaucoup évolué à la baisse ;
en passant respectivement de 5,41% entre 1980 et 1994 à 5,10% de 1995
à 1999 et à 3,17% entre 2000 et 2009 avant de se maintenir
à un niveau assez stable entre 2009 et 2014 soit 2,72%. Cette diminution
progressive du taux à partir de 1995 est imputable à une forte
baisse des prix des produits alimentaires consécutive à
l`amélioration de la production vivrière constatée dans la
plupart des pays. En plus cette période est marquée par une
tendance plus régulière des taux d'inflation et le resserrement
de leurs écarts, manifestant ainsi la convergence des niveaux
d'inflation autour de la référence (3%). La figure n°3
montre cette évolution.
Figure 3 : Taux d'inflation moyen dans l'UEMOA de
1980 à 2014
1980-1994 1995-1999 2000-2008 2009-2014
5,41
3,17
5,10
2,72
Source : Auteur, à partir des données de la
BCEAO
Cette tendance cache cependant une réalité
puisque la dévaluation en 1994 avait provoqué une poussée
inflationniste dans tous les pays. Mais à partir de 1995, le taux
d'inflation moyen de l'union a connu une baisse dans l'ensemble des pays.
Toutefois cette tendance à la baisse a
été rendu possible par un groupe de pays qui ont connu des taux
assez bas comme la Cote d'ivoire avec (5,33%) contre (6,93%), le Niger (3,65%)
contre (5,15%), le Sénégal (3,37%) contre (6,31%) et le Togo
(5,84%) contre (6,47%). À l'opposé, le Bénin, le Burkina
Faso et le Mali ont continué d'enregistrer encore des taux
élevés ; respectivement de (5,78%) contre (2,62%), (4,21%) contre
(3,89%) et (7,55%) contre (6,5%). De 2000 à 2014, les taux d'inflation
des pays pour l'ensemble de la zone semblent converger autour de la norme
fixée. Cela traduit la volonté des gouvernements à aller
vers une maîtrise de l'inflation à 3%. On peut dire que
globalement les taux ont fluctué entre un minima de (0,54%) noté
au Sénégal de 2009 et 2014 et un maxima de (7,55%) au Mali entre
1995 et 1999.
Pour la Guinée Bissau aussi, on note une baisse
drastique du taux sur toute la période passant respectivement de
(51,08%) entre 1980 et 1994 à (27,69%) entre 1995 et 1999 pour tomber
à (11,49%) entre 2000 et 2008 et enfin à (2, 98%) entre 2009 et
2014. De tels résultats traduisent une volonté pour ce pays de
rattraper ces voisins dans le cadre du pacte de stabilité. La figure
n°4 illustre cela ci-après.
Figure 4 : Évolution du taux d'inflation par
pays de 1980 à 2014
51,08699724
27,69656946
11,49366315
2,986536636
1980-1994 1995-1999 2000-2008 2009-2014
60
50
40
30
20
10
0
BENIN BURKINA FASO CI GB MA NI SEN TOGO
21
Source : Auteur, à partir des données de la
BCEAO
22
I.1.3- L'analyse des flux commerciaux
Une des raisons explicatives des comportements
hétérogènes des pays est aussi leurs parts relatives aux
flux d'échanges commerciaux. Les échanges commerciaux dans
l'UEMOA se sont déroulés dans un environnement économique
caractérisé par la mise en oeuvre de réformes et de
politiques de soutien de l'activité économique instaurées
par les pouvoirs publics et les banques centrales. Au cours de la
dernière décennie, le commerce intracommunautaire est
estimé à 12% alors que celui dans la zone euro est de 64% et pour
les pays de l'Amérique du Nord 40% (Rapport UEMOA, 2016). Les
échanges communautaires ont représenté 11,5% des
importations et 15% des exportations en 2010 (OMC, 2013). Cependant, il
convient de noter que de 1980 à 2014, les échanges intra-UEMOA
ont fortement progressé. Ainsi, les importations en valeur sont
passées de 15685,783 milliards de francs entre 1980 et 1994 à
187740,198 milliards de francs entre 2009 et 2014 soit une augmentation de plus
de 172054,415 milliards en valeur absolue. Cette performance pour la zone
s'explique par un renforcement du cadre de l'intégration
économique, la promotion des exportations et les effets positifs issus
des nombreuses réformes institutionnelles mises en oeuvre depuis la
dévaluation du franc CFA en 1994.
Figure n°5 : Évolution des échanges
intra-communautaires dans l'UEMOA de 1980 à 2014
200000
180000 160000 140000 120000 100000 80000 60000 40000
20000
|
|
0
1980-1994 1995-1999 2000-2008 2009-2014
Source : Auteur, à partir des données de la
BCEAO
23
En comparaison aux autres unions de la zone franc comme la
CEMAC et les Comores, le poids du commerce intra régional dans l'UEMOA
est encore supérieur. Malgré l'existence d'une monnaie commune et
surtout de la liberté de circulation des biens et des facteurs au sein
de l'UEMOA, les flux d'échanges restent faibles. Selon le FMI (2014)
cela est dû à l'instabilité socio-politique, à un
secteur financier peu développé, aux capacités
institutionnelles peu solides, au déficit d'infrastructures et aux chocs
asymétriques fréquents. Les principaux biens
échangés dans le cadre du commerce intra-UEMOA sont
présentés dans le tableau n°1 ci-après :
Tableau 1 : Principaux produits exportés dans
le cadre du commerce intra-UEMOA
Produits
|
Part %
|
Exportateurs
|
Importateurs
|
Produits pétroliers
|
24,5
|
Cote d'Ivoire
|
BF, TG, BEN
|
Engrais
|
18,0
|
SEN, CI
|
BF, BEN, CI
|
Ciments et sel
|
8,2
|
CI, SEN, TG
|
BF, CI, NI
|
Préparations alimentaires diverses : café et
potages, bouillons, préparations
pour assaisonnement
|
5,5
|
CI, SEN
|
SEN, BF, BEN
|
Matières plastiques et ouvrages en plastiques
|
4,8
|
CI (96,6%), SEN
|
BF ; BEN
|
Graisses et huiles animales ou végétales :
huiles de palm, margarine, etc.
|
4,6
|
CI, TG, BEN
|
NI, BF, BE
|
Produits divers des industries chimiques :
insecticides, antirongeurs, fongicides,
herbicides, désinfectants, acides
gras monocarboxyliques indistriels, huiles acides de raffinage, alcools gras
industriels
|
3,6
|
|
BF, BE, ML
|
Animaux vivants
|
3,0
|
BF NI ML
|
CI
|
Produits de beauté autres que pharmecitiques ; produits
de parfumeries ou de toilette
|
2,7
|
CI (99,2%), SEN
|
SEN BEN TG
|
Coton et produits à base de coton
|
2,7
|
ML CI BF
|
CI BEN
|
Source : Rapport sur le commerce intrazone, Commission
UEMOA (2013)
Les échanges de biens sont dominés
essentiellement par les produits pétroliers qui occupent (24,5%) et sont
fournis entièrement par la Côte d'Ivoire, ensuite les engrais pour
(18%) produit par le Sénégal et la Côte d'ivoire suivi du
ciment et du sel qui représentent (8,2%) et fournis par la Côte
d'Ivoire, le Sénégal et le Togo.
24
I.1.4- L'analyse du déficit primaire
De 1980 et 2014, le solde budgétaire a connu des
fluctuations assez importantes pour passer de -99,8 milliards à -1707,17
milliards de francs. Durant la période d'avant d'évaluation de
1980 à 1993, le déficit primaire de la zone était
excessif, atteignant une moyenne de 11% du PIB soit -6332,5 milliards de
francs. Par la suite, à la faveur de la dévaluation et de la mise
en oeuvre des politiques d'ajustement structurel dans les pays, le solde
primaire de l'union a amorcé une tendance baissière jusqu'au
milieu des années 2000, en se situant respectivement à -1916,2
milliards de francs soit 6,9% sur la période de 1994 à 1999 et de
-2771,6 milliards de francs, soit 5,3% de 2000 à 2005. Cette baisse est
due à l'introduction du pacte de convergence en 1999 dans l'union. En
effet, le pacte avait imposé des règles en termes de solde
budgétaire et de déficit commercial que les États devaient
respecter durant la phase de convergence en 2005. À partir de 2008, la
situation de déficit s'accentue davantage par rapport à la
première phase en de -531,35 milliards de francs à plus de
-1707,17 milliards de francs entre 2008 et 2014, soit un accroissement annuel
de -195, 97 milliards. La figure n°5 permet d'illustrer l'évolution
du solde de base primaire
Figure 5: Évolution du solde de base des pays
de l'UEMOA
2000
- 2500
- 1000
- 1500
- 2000
1500
1000
-500
500
0
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25
26 27 28 29 30 31 32 33 34 35
BENIN BURKINA FASO CI GB MA NI SEN TOGO UEMOA
Source : Auteur, à partir des données de la
BCEAO
25
Le déficit budgétaire dépend
naturellement de l'évolution des recettes et dépenses. Il est
donc intimement lié aux chocs exogènes, aux aléas qu'ont
subis les pays de l'UEMOA et aux orientations de politique économique
des gouvernements. Les États affichent une réelle volonté
d'harmonisation des politiques économiques au-delà même des
réformes institutionnelles. Ils mettent en oeuvre les mesures prises
dans le cadre de la surveillance multilatérale. Cependant,
Ouédraogo (2003) développe une analyse stimulante de la CEDEAO
comme zone monétaire potentiellement optimale ; en se fondant sur les
analyses du « second-Mundell », prend du recul par rapport à
son article de 1961, en optant pour une appréciation « relative
» de la notion d'optimalité, Mundell (1973 ; 2001).
I.2- Sources de disparités économiques
Pour Timbergen (1954), tous les processus d'intégration
économique prennent en compte deux aspects, à savoir :
l'intégration négative qui renvoie à l'élimination
de tous les obstacles qui limitent la mobilité des biens, des services
et des facteurs de production entre les pays et l'intégration positive
qui concerne l'harmonisation et la coordination des instruments
économiques existants. La littérature économique met en
avant trois facteurs explicatifs des sources
d'hétérogénéité des économies des
pays en l'union. Il s'agit du marché financier, du marché du
travail et du marché des biens et services. À ce jour,
l'intégration économique dans l'UEMOA ne déroge pas
à cette règle depuis 1994, d'où l'intérêt
d'analyser l'hétérogénéité des
économies à travers ces composantes de l'économie.
I.2.1-
L'hétérogénéité du marché
financier
Il faut rappeler que la théorie traditionnelle du
commerce international reposait sur des hypothèses d'immobilité
parfaite des facteurs de production, de concurrence pure et parfaite et de
rendement constants ou décroissants. Le cadre réel du
marché financier est à l'inverse. Sur le plan théorique,
les débats ont privilégié deux principales approches pour
expliquer les différentiels d'inflation
26
au sein d'une union monétaire : d'une part, l'effet
Balassa (1964) et d'autre part la théorie de la croissance sous l'angle
de la convergence (Kane, 2013). De manière générale,
l'analyse de Balassa explique les différences dans les taux d'inflation
au sein d'une union monétaire par la relation entre l'évolution
des prix des biens non échangeables et la croissance de la
productivité (Aubert, 2001).
Sur le plan empirique, Akpo (2017) a mis l'accent sur
l'hétérogénéité du marché financier
dans l'UEMOA via le marché du crédit bancaire. En effet, sur la
période de 1980 à 2014, le ratio crédit à
l'économie/PIB est en moyenne élevé en Côte d'Ivoire
avec 22% ; au Sénégal avec 20% et au Togo avec 18%. Par contre
dans les autres pays il est relativement plus faible : le Niger pour 9% ; le
Bénin 11% ; le Burkina Faso 11% et le Mali 11%. D'autres chercheurs ont
utilisé les VAR en panel pour analyser la transmission des chocs
asymétriques entre pays et dans le temps. Les travaux de Kane (2013)
confirment que les écarts d'inflation observés à travers
les régimes reflètent non seulement le degré
d'hétérogénéité des structures
économiques, mais aussi les capacités d'absorption des chocs
asymétriques. Dans la zone euro, Love et Zicchino (2006) mesurent
l'impact des chocs sur les secteurs financiers et sur la dimension transversale
des entreprises américaines. Des études récentes
suggèrent que les causes de
l'hétérogénéité du marché financier
sont multiples et leurs implications sont très différentes.
Ainsi, Ciccarelli et al. (2012a) mettent l'accent sur
l'hétérogénéité des liens macro-financiers
entre les économies développées et comparent la
transmission des chocs réels et financiers entre pays à partir
d'un modèle de VAR en panel. Les résultats concluent qu'un choc
sur une variable dans un pays donné affecte tous les autres et la
transmission semble plus rapide et plus profonde entre les variables
financières qu'entre les variables réelles. Néanmoins, les
facteurs spécifiques aux pays restent importants et expliquent le
comportement hétérogène pour les pays observés. Les
travaux effectués par la BCE (1999) et Alberola (2000) insistent sur
l'existence de deux grands facteurs explicatifs des écarts d'inflation
dans une union monétaire : la convergence des niveaux de
productivité et de prix (facteurs de convergence), et le maintien de
27
positionnement dans le cycle différencié selon
les pays (c'est-à-dire le décalage des conjonctures). Arnold et
Kool (2003) ont mis en évidence le rôle joué par d'autres
éléments dans la dispersion des taux d'inflation de la zone euro
: il s'agit des différences en termes d'exposition aux évolutions
du taux de change euro/dollar, des disparités dans la sensibilité
aux évolutions du prix du pétrole, des degrés de
rigidité plus ou moins grands des marchés ou encore des
évolutions différentes des prix administrés au niveau
national ou des taxes indirectes.
I.2.2-
L'hétérogénéité du marché du
travail
Force est de reconnaitre que dans la zone UEMOA, la
mobilité des facteurs de production reste encore imparfaite : la
non-reconnaissance mutuelle des diplômes,
l'hétérogénéité des systèmes de
protection sociale et la persistance des barrières culturelles et
linguistiques peuvent être des obstacles importants à la
mobilité des travailleurs au sein de la zone, et limiter les
déplacements de main-d'oeuvre en cas de crise. À cela s'ajoute un
certain nombre de rigidités institutionnelles qui réduisent la
flexibilité des salaires sur les différents marchés du
travail. Par exemple, une montée du chômage au Bénin ne
conduit pas forcément à des déplacements de main-d'oeuvre
vers les pays comme le Sénégal ou la Côte d'Ivoire.
Nonobstant les efforts réalisés en
matière de coordination budgétaire, des différences de
cadres juridiques et institutionnels persistent dans le marché du
travail entre pays. Les principes de négociations salariales sont
souvent inscrits dans le code du travail de chaque pays. De ce fait, le mode de
formation des salaires ne répond pas à une logique de
convergence, parce que les cadres réglementaires et législatifs
qui organisent ce marché peuvent induire des comportements
différents. Les disparités structurelles sur le marché du
travail expliquent en grande partie les écarts de réactions des
économies locales, qui souvent, entrent en contradiction avec la
politique monétaire commune (Pollin et al., 2000).
28
Sur le marché du travail,
l'hétérogénéité est mise en évidence
dans l'UEMOA par Matière (2015). Il met l'accent sur les niveaux de
qualification de la population active, mesurés en pourcentage de la
population ayant un niveau inférieur au second cycle. Les
résultats donnent en 2014 pour des proportions de non-qualifiées
au Bénin (54%) ; le Togo (54%) ; le Mali (43%) alors qu'elle est
relativement faible dans les pays comme le Niger (18%) ; le Burkina Faso (30%)
; le Sénégal (40%) et en Côte d'Ivoire (40%). Boubtbane et
al (2010) à partir d'un VAR en panel, montrent comment les chocs de
l'immigration sur l'emploi sont transmis différemment dans les pays. Si
ces derniers sont rigides et si la mobilité du travail est
limitée, les économies membres ont plus de difficultés
à s'ajouter par rapport aux fluctuations de la demande que les pays qui
ont leur propre monnaie et qui peuvent réévaluer plus facilement
cette monnaie. Ainsi, une des conditions nécessaires à la
réussite d'une union monétaire est que les pays affectés
par le choc asymétrique bénéficient d'une bonne
flexibilité du marché du travail. Une importante mobilité
du travail devrait servir de canal à travers lequel des ajustements par
rapport aux chocs peuvent s'effectuer.
I.2.3-
L'hétérogénéité du marché des biens
et services
Il est important de reconnaitre actuellement que dans la zone
UEMOA, même si les différents marchés nationaux sont mis en
relation directe, ils restent pour ainsi dire juxtaposés, et certaines
règles du jeu économique sont fixées par chaque
État. Ce qui constitue un puissant obstacle aux échanges à
l'intérieur du marché unique. Ainsi, malgré les
progrès de l'intégration économique, les échanges
commerciaux restent soumis aux barrières non tarifaires (comme des
réglementations différentes dans les différents
États) et les économies restent aussi très diverses en
matière d'institutions et de systèmes sociaux.
En outre, la concurrence sur le marché sous
régional de l'UEMOA a accentué
l'hétérogénéité en matière de
spécialisation productive : la libéralisation des échanges
pousse certains pays comme la Côte d'Ivoire et le Sénégal
(plus industrialisés) à polariser le marché sur certains
produits comme le ciment,
29
l'engrais et les produits pétroliers par rapport au
reste de l'union. En situation d'incertitude, les entreprises vont en effet
profiter de la faible distance qui les sépare les unes des autres pour
bénéficier des fournisseurs et des clients des autres, de la
diversité de l'offre de production, de l'importance du marché du
travail et du partage des infrastructures.
Dans l'UEMOA, Akpo (2017) a étudié
l'hétérogénéité du marché des biens
et services en utilisant le déflateur du PIB. Les résultats
concluent que les déflateurs via le taux d'inflation sont très
hétérogènes : les chiffres en moyennes pour la
période de 1980 à 2014 révèlent que cet indicateur
varie d'un pays à l'autre. Il est de (79%) pour le Mali ; (72 %) au
Niger ; (72%) pour le Sénégal ; (70%) au Burkina Faso alors que
pour d'autres il se situe à (65%) pour le Togo ; (66%) au Bénin
et (65%) pour la Côte d'Ivoire.
Ndiaye et Konte (2012) à partir d'un modèle VAR
Bayésien en panel, montrent que l'efficacité relative d'une
politique monétaire se manifeste à travers le degré de
réaction pour les chocs affectant l'inflation, le taux d'importation et
les termes de l'échange. Cette situation, combinée au
degré élevé d'ouverture des économies, accentue la
vulnérabilité en raison de la forte dépendance en biens
d'investissement, en produits pétroliers et en certaines denrées
alimentaires. Les travaux s'inspirant de la théorie de la croissance
mettent en évidence les processus de â convergence et de
convergence. Honohan et Lane (2003) analysent
l'hétérogénéité du marché des biens
et services en mettant en exergue les facteurs cycliques tels que les
différentiels de productivité, le degré d'ouverture des
économies, les effets du taux de change à partir de la â
convergence. Parallèlement, Angeloni et Ehrmann (2004) ont
utilisé les variations du prix du baril de pétrole, ou encore le
niveau de l'activité, mesuré par le gap de production pour
apprécier le degré de convergence des pays en union. Doré
et Masson (2002) affirment que les divergences portent sur les structures
économiques ; en particulier le marché des biens et services.
La question de
l'hétérogénéité structurelle au sein d'une
union monétaire compromet l'efficacité des mesures de politique
économique. L'une des solutions
30
que propose la littérature est de partir d'une
convergence nominale (via la convergence des variables budgétaires) pour
réduire les différents niveaux
d'hétérogénéités structurelles que l'on
pourrait observer au sein d'une union monétaire. Cette idée
défendue par les auteurs Asensio et al., (2003) pour qui, la convergence
budgétaire n'est pas seulement un phénomène
exogène, mais peut résulter d'une réduction de
l'hétérogénéité structurelle. Mieux, Villieu
(2001) postule qu'il existe une relation entre la convergence budgétaire
et l'hétérogénéité structurelle.
I.3- Chocs économiques et leurs absorptions
Trichet (2005) faisait remarquer à l'OCDE que
?l'économie ne dort jamais ; elle est affectée en permanence
par des perturbations de toute nature : chocs financiers, chocs de demande,
chocs d'offre, etc. Il n'est pas aisé d'identifier ces chocs en temps
réel, et encore moins de les prévoir. ?7 On peut
définir un choc économique comme une modification imprévue
de l'offre et/ou de la demande agrégées. Les chocs sont, dans une
large mesure, imprévus et non anticipés sur les marchés.
Il existe deux (02) types de chocs dans les unions monétaires : les
chocs symétriques et les chocs asymétriques. L'analyse
économique prédit qu'en cas de choc symétrique, il est
efficace d'appartenir à une union monétaire. Ce qui évite
des mouvements sur les taux de change (facteurs d'instabilité) et qui
évite d'augmenter les taux d'intérêt pour résister
à des attaques spéculatives sur les parités. Alors il
serait judicieux pour nous d'aborder la sensibilité des économies
aux chocs asymétriques, ensuite parler des politiques de stabilisations
des chocs asymétriques et enfin les mécanismes d'ajustement aux
chocs asymétriques.
I.3.1- La sensibilité des économies aux
chocs asymétriques
La sensibilité aux chocs asymétriques tient aux
caractéristiques structurelles et à un manque
d'intégration. Le degré de synchronisation des cycles
économiques
7 TRICHET J. C. (2005) : « La politique monétaire
européenne : du bon usage des statistiques », Observateur de l'OCDE
N° 246/247. Décembre 2004-Janvier 2005. P 25.
31
dépend des facteurs tels que la similarité de
structure économique, l'ouverture commerciale et financière, la
présence de type de chocs idiosyncratique et l'efficacité des
mécanismes d'ajustement face à ces chocs (De Grauwe, 2005).
Certains auteurs (Frankel et Rose, 1998) ont fait valoir que le
caractère synchrone des cycles économiques peut être
endogène et s'accroitre dans le temps avec le niveau
d'intégration économique au sein d'une union monétaire.
Les pays de l'UEMOA se caractérisent par des structures
économiques hétérogènes. En outre, une
diversification économique limitée et la diversité des
conditions géographiques les rendent sensibles à la
volatilité de la production. Bien qu'ils appartiennent à une
union monétaire depuis des décennies, l'intégration des
échanges et des marchés du travail et des capitaux n'a pas
sensiblement progressé. La volatilité de la production reste
forte. Le graphique n°1 suivant illustre la vulnérabilité
des économies de l'UEMOA.
Graphique 1 : Vulnérabilité des
économies de l'UEMOA
Source : Tiré du rapport du FMI (2013)
32
Au-delà de la dimension d'absorption des chocs, il se
pose la synchronisation des cycles économiques au sein de l'UEMOA. Au
cours de la période de 1980 à 2012, la synchronisation de cycles
économiques au sein de l'UEMOA a été faible (en moyenne
0,2 environ), variant d'à peu près (-0,2) pour le Togo
(économie dont le cycle est le moins synchronisé) à
environ (0,5) pour le Mali et (0,6) pour le Burkina Faso (cycle le plus
synchronisé). Le degré de synchronisation des cycles
économiques varie au cours des trois décennies passées,
passant par un creux durant les années 1990 avant d'augmenter dans les
années 2000. Il a diminué de nouveau dans les dernières
années ; la raison possible en étant l'instabilité
politique dans un certain nombre de pays (Cote d'Ivoire, Guinée Biseau,
Mali). La corrélation des cycles économiques a eu tendance
à être plus forte pour les pays enclavés (Burkina Faso,
Mali, Niger) qui dépendent plus du commerce intra-UEMOA et plus faible
pour les pays qui ont des liens commerciaux plus étroits hors de la zone
(Bénin, Sénégal et Togo) (FMI, 2013). L'utilisation du
tableau n°2 nous permet de représenter cette corrélation des
cycles économiques.
Tableau 2: Corrélation des cycles
économiques entre les divers pays et l'ensemble de l'UEMOA de 1980
à 2012.
|
Années 80
|
Années 90
|
Années 2000
|
Depuis 2007-2012
|
Bénin
|
0,37
|
0,12
|
0,47
|
-0,11
|
Burkina Faso
|
0,76
|
0,57
|
0,71
|
0,44
|
Côte d'Ivoire
|
0,35
|
-0,13
|
0,26
|
0,03
|
Guinée Biseau
|
0,63
|
0,03
|
0,30
|
0,15
|
Mali
|
0,36
|
0,63
|
0,90
|
0,43
|
Niger
|
0,34
|
0,11
|
0,56
|
0,41
|
Sénégal
|
0,12
|
0,14
|
0,39
|
0,05
|
Togo
|
0,22
|
-0,80
|
-0,03
|
0,17
|
UEMOA
|
0,39
|
0,08
|
0,45
|
0,20
|
Source : FMI (2013)
I.3.2- Les politiques de stabilisation des chocs
asymétriques
Le recours à la politique budgétaire pour
atténuer les effets des chocs asymétriques fait l'objet d'un
consensus chez les partisans l'économie keynésienne. Les travaux
de Ndiaye et Konté (2012) démontrent en effet que le taux
d'importation influence le solde budgétaire de base des pays de l'union
par
le canal d'éventuelles flambées des prix
extérieurs qui induisent par voie de conséquence l'accroissement
des prix intérieurs à partir d'un modèle VAR en panel. En
effet, dans l'UEMOA, l'efficacité des politiques budgétaires
nationales dans l'absorption des chocs défavorables est très
limitée du fait de l'étroitesse de leurs marges de manoeuvre.
En mettant en relation deux régions A et B qui
produisent chacune un bien, Mundell (1961) cherchait à voir comment un
déplacement de la demande d'un changement de préférence
des biens de A au profit des biens de B (à partir d'un choc
asymétrique) pourrait diminuer la demande dans la région A. Ce
déplacement provoque ainsi une hausse du chômage, un
déséquilibre de la balance commerciale et enfin accroît
l'inflation dans B (voir Graphique 2). Dans ce contexte, une politique
monétaire commune est incapable de résoudre à la fois les
problèmes des deux économies. Une politique monétaire
restrictive (offre S ascendante) peut réduire l'inflation dans B, mais
aggravera le problème du chômage dans A. Une politique
monétaire expansionniste (offre S descendante) peut réduire le
chômage dans A, mais aggravera l'inflation dans B.
Graphique 2 : Chocs
asymétriques
S
D
Pays A
Pays B
P
S
D
Q
33
Graphique n°2 : le
déplacement de la demande dû à un changement de
préférence des biens produits dans le pays A au profit des biens
produits dans le pays B (choc asymétrique). La baisse de la demande dans
A se traduit par une compression de la quantité (Q) et des prix (P) et
par une hausse du chômage. L'effet produit est inverse dans B.
34
Le déséquilibre provoqué par un choc
nécessitera par conséquent de modifier les prix relatifs pour
retrouver l'équilibre antérieur. Si les deux régions ont
des monnaies différentes, on peut modifier les taux de change, c'est-
à- dire, dévaluer la monnaie A par rapport à la monnaie B.
Le pays B retrouvera alors sa compétitivité en raison d'une
baisse des salaires et des prix réels (les salaires et les prix nominaux
restant constants). Cette mesure provoquera une hausse de la demande (D
ascendante) et une baisse du chômage.
Si, toutefois, ces deux régions ont une monnaie unique,
ou maintiennent un taux de change fixe, il faudra rétablir la production
et l'emploi par d'autres moyens, comme : une baisse des salaires et des prix
nominaux ; une progression ascendante de la courbe de l'offre (S) du bien
produit dans le pays par exemple, une émigration de la main-d'oeuvre
hors du pays ; une politique budgétaire expansionniste.
I.3.3- Les mécanismes d'ajustement aux chocs
économiques
De manière générale, la
littérature économique met l'accent sur l'ajustement à
travers les mécanismes du marché, le niveau d'endettement et les
échanges commerciaux. Ces derniers s'ils ne sont pas très
mobiles, risquent de rendre inefficace les actions des gouvernements dans la
lutte contre les chocs asymétriques à impact négatif. Il
est aussi admis que la rigidité sur ces marchés accentue le
déficit budgétaire ; puisque les gouvernements seront trop
endettés ; ce qui remettrait en question la discipline
monétaire.
I.3.3.1- Les mécanismes d'ajustement par les
marchés
Partant de la théorie traditionnelle des avantages
comparatifs mise en évidence par Ricardo (1803), Mundell va remettre en
cause l'une des hypothèses fortes de cette théorie, à
savoir l'immobilité internationale des facteurs de production.
L'extension de cette mobilité au plan international va être pour
Mundell l'occasion de démontrer que la mobilité constitue un
critère susceptible de définir une zone monétaire
optimale. À travers le marché, généralement
trois
35
mécanismes facilitent l'ajustement : la
flexibilité des salaires et des prix, la mobilité de la
main-d'oeuvre et la mobilité des capitaux.
? La flexibilité des salaires et des
prix
En zone monétaire, les régions soumises à
un choc asymétrique peuvent retrouver leur compétitivité
en diminuant les revenus et les prix nominaux. Ce qui leur permet d'obtenir des
effets équivalents à la dévaluation d'une monnaie locale.
Le principal obstacle qui semble s'opposer à cette solution de
flexibilité des prix est la rigidité du niveau
général des prix et notamment la « viscosité »
des salaires nominaux. Comparée à celle des États-Unis et
du Japon, par exemple, la flexibilité des salaires à court terme
de l'Union européenne, en réaction au changement des conditions
de l'emploi, est faible (Patterson et Amati, 2001). Par exemple la Commission
Européenne (1990) montre qu'une hausse des prix de 1 %, entrainerait une
augmentation du chômage pour l'union européenne. Alors qu'elle
serait dix fois moins importante aux États-Unis et au Japon. Même
lorsque les prix et les salaires atteignent un certain niveau de
flexibilité au niveau régional, ils s'ajustent
généralement plus lentement que les taux de change (Ochel 1997) ;
ce qui prouve que la possibilité d'une dévaluation est le
mécanisme le plus efficace. Les travaux de recherche (Vaubel 1976 et
1978 ; Eichengreen 1991 ; De Grauwe et Vanhavebeke 1993 ; Von Hagen et Neumann
1994) indiquent que la fluctuation des niveaux des salaires et des prix
réels a tendance à être moins importante entre les
régions d'une même zone monétaire qu'entre des
régions monétaires distinctes.
? La mobilité du facteur
travail
Les travailleurs incapables ou refusant le prix du
marché domestique ont comme solution palliative d'aller chercher un
emploi là où il se trouve. La théorie des Zones
Monétaires Optimales (ZMO) donne une importance particulière
à la mobilité de la main-d'oeuvre. La mobilité du travail
permet de limiter l'effet négatif du chômage dans un des pays de
la zone par la migration d'une partie de ces
36
chômeurs dans un autre pays en meilleure santé
économique, (Savall, 2013). Cette position a été
réconfortée par les critiques de l'union européenne sur le
manque d'enthousiasme apparent des européens à l'égard de
la mobilité, par rapport aux Américains8.
Malgré la liberté de circulation accordée aux citoyens
européens, la mobilité du travail reste très faible entre
les pays de la zone euro, très éloignée de celle entre les
Etats des Etats-Unis. Dans ce dernier un choc récessif d'un Etat a pour
conséquence une hausse de la migration et donc une baisse de l'emploi
tandis qu'en Europe ce choc se traduit par une hausse du chômage et un
maintien de l'emploi. Cette faiblesse de la mobilité du travail peut
s'expliquer par plusieurs facteurs : la barrière de la langue, de la
culture, des coûts de migration... Auxquels s'ajoute un dernier facteur
et non des moindres : la faible mobilité du travail même à
l'intérieur des Etats européens. La mobilité des capitaux
est, quant à elle, parfaite en zone euro, et ce, depuis l'Acte unique
européen (1986). Les économies de la zone euro sont peu
spécialisées (à l'exception notable de la Grèce),
ce qui les protège relativement des chocs asymétriques, d'autant
plus que le commerce intra-industriel constitue une part importante des
échanges entre pays de la zone euro.
De la même logique, Eichengreen (1993) constate que
l'élasticité des flux migratoires entre les régions par
rapport aux différentiels internes de salaires et d'emplois est plus
faible en Grande-Bretagne et en Italie qu'aux États-Unis. Les calculs
effectués par Pelagidis (1996) à partir des chiffres d'Eurostat
montrent que depuis 1992, la migration nette à l'intérieur de
l'union européenne est en phase descendante. Cette migration
rapportée à la population totale, était en
8 Diverses études ont montré en effet
que la mobilité inter-régionale était un facteur
important
aux États-Unis, contribuant davantage à
l'ajustement interne que les fluctuations des niveaux de salaire relatifs ou
des taux de participation de la main-d'oeuvre (Blanchard et Katz, 1992). Au
contraire, les chiffres de l'OCDE pour 1987 révèlent qu'un tiers
seulement des travailleurs français et allemands sont disposés
à changer de département et de Land comme le
font les citoyens américains d'un État à l'autre ; ils
montrent d'autant moins d'enthousiasme à changer de pays.
37
moyenne inférieure à 1% en 1995. En comparaison,
environ 3 % de la population américaine changent d'État de
résidence chaque année.
Ce contraste entre les économies américaines et
européennes à plusieurs explications. Obstfeld et Peri (1998) se
sont penchés sur une énigme méthodologique : les
différences de migration entre les États et entre les
régions ne reflètent-elles pas l'incidence comparative des chocs
asymétriques eux-mêmes plutôt que les rigidités
comparatives des marchés du travail ? Dans ce cas, la plus grande
mobilité interne des américains ne serait-elle pas une obligation
? À l'issue de l'examen des faits qui s'offraient à eux, Obstfeld
et Peri ont rejeté l'hypothèse selon laquelle, le faible niveau
constaté de la migration européenne reflète la
rareté des chocs asymétriques au niveau de la région. Ils
remarquent toutefois que l'harmonisation quantitative des chocs est encore
insuffisante pour pouvoir établir une comparaison internationale des
effets des chocs asymétriques.
? La mobilité des capitaux
La mobilité des capitaux joue un rôle à la
fois à court terme et à long terme. À court terme, les
flux de capitaux peuvent équilibrer les ajustements de paiement entre
les régions qu'il s'agisse d'une zone à monnaie unique ou
à monnaies distinctes. Ces flux peuvent également soulager le
poids de l'ajustement aux chocs en permettant d'étaler les changements
structurels dans le temps. La mobilité des capitaux d'investissement
à long terme pour financer ces changements structurels est
également considérée comme essentielle pour
réaliser une zone monétaire optimale. Si les travailleurs sont
incapables de se déplacer vers les emplois, alors les emplois doivent
être capables d'aller vers les travailleurs. Il est évident que
toute segmentation des marchés financiers constitue une entrave à
la mobilité des capitaux (Patterson et Amati, 2001).
Certains prétendent que la mobilité des capitaux
engendre un coût, et risque même d'exacerber les
déséquilibres régionaux au lieu de les réduire. Le
retour
38
aux échelles de production peut engendrer une
concentration des investissements dans les régions de grande
activité, au lieu de les répartir dans les régions pauvres
qui souffrent d'un taux élevé de chômage. C'est pourquoi
Krugman (1993) et autres estiment que l'union économique et
monétaire risque d'aggraver les crises régionales. Cette
conclusion renvoie à la prévision de Kenen (1969) selon laquelle
la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux à
l'intérieur d'une zone monétaire unique amplifient la
spécialisation des régions en les rendant plus vulnérables
aux chocs asymétriques.
I.3.3.2- le degré d'ouverture des
économies
Le degré d'ouverture d'un pays impacte sa croissance
économique via les échanges commerciaux. C'est pourquoi il est
intéressant de chercher à comprendre le lien pouvant exister
entre l'ouverture commerciale et les politiques de stabilisation ; en
l'occurrence la politique budgétaire. À cet effet, il est
question, dans un premier temps d'examiner les différentes approches
théoriques et dans un second, la relation de stabilisation qui en
découle.
? Approches théoriques de l'ouverture
commerciale
Depuis la théorie des avantages comparatifs, Ricardo a
démontré que plus un pays était ouvert, plus cela lui
permettait de réorienter ses ressources rares vers des secteurs plus
efficients et d'améliorer son bien-être. Les théories qui
suivirent ont confirmé ces gains, en plus de rajouter ceux liés
à la rémunération des facteurs de production. Les
modèles néo-classiques, issus du modèle de Solow (1957),
assument que le changement de technologie est exogène. Dans un tel
cadre, les politiques commerciales d'un pays ne peuvent donc pas être
considérées comme effectuant sa croissance.
Mundell (1961) et Fleming (1962), dans leurs articles
fondateurs sur les effets des politiques keynésiennes, affirment que
l'ouverture des économies augmente les contraintes de
l'efficacité de la politique budgétaire. Ils estiment que
l'ouverture rend les pays interdépendants et que les politiques
économiques
39
affectent différemment les pays qui sont liés.
La mobilité internationale des capitaux occupe une place primordiale
dans leur analyse. En effet, une politique de relance (soit par une hausse des
dépenses publiques ou une baisse des impôts) a tendance à
détériorer les comptes de l'État et à augmenter le
niveau des taux d'intérêt (effet d'éviction). La hausse des
taux d'intérêt attire les capitaux et stimule à terme la
consommation et la production. L'augmentation de l'offre et de la demande sera
bénéfique pour l'économie si elle n'est pas
dépendante de l'extérieure (c'est-à-dire qu'elle n'a pas
un niveau d'importations de biens de consommation intermédiaire et de
consommation finale importants). Dans ce contexte, l'efficacité de la
politique budgétaire dépend de la sensibilité des taux
d'intérêt et de la mobilité des capitaux. Néanmoins
l'efficacité de la politique de relance en économie ouverte peut
avoir des tendances inflationnistes et des externalités négatives
sur les pays partenaires, d'où l'intérêt selon certains
économistes de faire assister la politique budgétaire par
l'action monétaire.
? Lien entre ouverture commerciale et stabilisation
des chocs
Sur le plan empirique, Grossman et Helpman (1991)
démontrent que l'ouverture permet d'augmenter les importations
domestiques de biens et services qui incluent des nouvelles technologies.
Grâce à l'apprentissage par la politique et le transfert de
technologie, un pays connait un progrès technologique, sa production
devient plus efficiente et sa productivité augmente. On s'attend alors
à ce que les économies plus ouvertes croissent à un rythme
plus rapide que celles plus protectionnistes. Selon l'étude de Levine et
Renult (1992) la relation de causalité entre l'ouverture et la
croissance se fait à travers l'investissement. Si l'ouverture au
commerce international permet l'accès à des biens
d'investissement, cela mènera à une croissance de long terme. Un
pays libéralisant ses échanges s'attirera des flux
d'investissement étranger. Cependant, cela risque d'engendrer une baisse
de l'investissement domestique due à une plus forte concurrence
internationale et l'effet net reste alors ambigu.
40
Grossman et Helpman (1992) avancent également qu'un
pays protégeant son économie peut stimuler sa croissance. Cela
est possible dans le cas où l'intervention gouvernementale encourage
l'investissement domestique selon les avantages comparatifs du pays. Pour Batra
(1992) et Leamer (1995), la libéralisation des échanges
réduit les tarifs et par conséquent diminue le prix relatif des
biens domestiques manufacturés. Ces biens deviennent moins attirants que
les biens étrangers et l'économie domestique peut alors subir une
perte. Même si ces travaux encouragent des politiques protectionnistes
sous certaines conditions, aucun n'encourage la protection comme
stratégie de développement à long terme. La protection est
vue comme une stratégie de court terme afin de préparer
adéquatement l'économie à l'ouverture de ses
marchés.
D'autres travaux, comme ceux de Grossman et Helpman (1992),
Romer (1990) et Rivera-Romer (1991) portent leur attention sur les implications
à long terme de l'intervention gouvernementale dans le commerce. Ils
considèrent l'innovation comme source de croissance et encouragent donc
des politiques d'ouverture.
I.3.3.3- Le niveau d'endettement
Les dérives budgétaires des années
soixante-dix et quatre-vingt découlaient d'un endettement
extérieur important et des arriérés de paiement
significatifs. Devenus chroniques, les déficits publics ont
été préjudiciables à la croissance
économique qui a fortement ralenti pour devenir négative dans
certains pays. Ils sont par exemple de (-0,4%) pour le Togo entre 1986-1993 et
de (-0,8%) pour la Côte d'Ivoire entre 2000-2002, selon la Banque
Mondiale (2003). Les arguments théoriques mettant en relation l'impact
de la politique budgétaire sur les fluctuations de l'activité
économique considèrent que celui-ci serait conditionnel au niveau
de la dette.
Dans une perspective keynésienne, la régulation
de la croissance économique par l'État passe par des actions
budgétaires contra-cycliques. Cette orientation amène les
pouvoirs publics à soutenir l'activité dès lors que la
demande des
41
agents est déprimée et à la freiner
lorsque son emballement fait craindre des déséquilibres internes
et externes. On observera cependant qu'entre 1973 et 1982, les finances
publiques africaines ont été structurellement
déficitaires, en contradiction avec la logique contra-cyclique
d'intervention de l'État. Jusqu'ici, peu d'États africains ont
d'ailleurs été capables de lisser la dépense en
épargnant dans les moments de boom des matières premières
et en désépargnant dans une conjoncture défavorable. Sur
la période d'observation, c'est- à- dire en aval de
l'année 1986, on peut s'interroger sur la nature des effets
keynésiens en raison des déséquilibres constatés et
de l'importance de la dette contractée.
En s'appuyant sur les idées de Ricardo, Barro (1974) a
contribué à réfuter la thèse de l'efficacité
de l'action budgétaire sur les variations conjoncturelles. Par le
principe de l'équivalence ricardienne, le secteur privé
intègre dans son calcul économique la contrainte
budgétaire intertemporelle du secteur public. Si les agents s'attendent
à rembourser la dette consécutive aux déficits, l'action
de l'État produit un effet « non keynésien », dans la
mesure où il n'affecte pas le produit intérieur. En effet,
l'anticipation du remboursement de la dette suscite une diminution
instantanée de la dépense privée et fait du déficit
public un simple transfert intertemporel. Le principe de l'équivalence
ricardienne repose toutefois sur des hypothèses restrictives, en
particulier pour les pays en développement où les marchés
de l'assurance et du crédit sont imparfaits et les impôts
fortement distorsifs. Par ailleurs, en Afrique, les contraintes de
liquidité limitent la possibilité pour les agents de lisser leur
consommation dans le temps.
Dans des contextes de fort endettement, des auteurs ont
récemment renouvelé la réflexion en postulant qu'une
contraction budgétaire pouvait induire un effet positif « anti
keynésien » sur l'activité. Leur hypothèse
procède de l'observation des expériences contractionnistes
conduites, dans les années quatre-vingt, par certains pays de l'Europe
du Nord. Point commun à ces économies, la réduction de la
dépense publique a été à la fois forte, rapide et
durable, mais également conjuguée à un effet expansif sur
l'activité intérieure (Liau, 1999). La présence
42
d'effets de seuil suggère la coexistence de
différents régimes budgétaires conditionnels à
l'endettement public. Plusieurs explications, mutuellement non exclusives, ont
été apportées à ce phénomène. Les
premières reposent plus particulièrement sur des
mécanismes de demande, les secondes sur des mécanismes
d'offre.
En ce qui concerne les effets de demande, ils ont
été interprétés par Giavazzi et Pagano (1990), mais
aussi par Blanchard (1990), à travers un effet de signal dans des
situations d'endettement critique. Celui-ci repose sur la solvabilité
retrouvée des finances publiques qui modifieraient la formation des
anticipations des agents privés. Une baisse permanente des
dépenses publiques annonce une baisse future des impôts. Elle est
donc à l'origine d'un effet de richesse positif.
Que l'effet de signal se concrétise à travers la
dépense ou par le biais de l'impôt, il met la politique
budgétaire en relation avec des effets de seuil ; avec un impact sur
l'activité économique qui dépend du niveau d'endettement.
Dans une interprétation de cet effet de signal à partir d'un
modèle à générations imbriquées, Bertola et
Drazen (1993), Sutherland (1997) montrent qu'il pouvait exister un seuil
psychologique de dette publique rendant l'ajustement budgétaire
inévitable. Confrontés à un endettement public soutenable,
les agents supposent que le remboursement de la dette reposera sur les
générations futures. Dans ce cas, un déficit a des effets
keynésiens. En revanche, en présence d'une dette jugée non
soutenable, les agents s'attendent à supporter eux-mêmes le poids
des remboursements, de sorte que les effets du déficit deviennent
non-keynésiens ou anti-keynésiens.
L'importance du seuil de la dette se dessine dans ce courant
de littérature, mais également les hypothèses sur
lesquelles les agents fondent la formation de leurs anticipations, en
l'occurrence le caractère non monétisable et non
répudiable de la dette. Ces hypothèses sont sans doute
pertinentes pour les pays membres de la zone franc, encore que des
phénomènes de hasard moral puissent être présents
par des anticipations de moratoires ou de remises de dettes
extérieures
43
qui modifieraient les comportements privés. La
portée de ces phénomènes est toutefois à
relativiser. La plus importante remise de dettes, l'initiative envers les Pays
Pauvres et Très Endettés (PPTE), a été à la
fois récente et exogène, suffisamment générale dans
les pays en développement pour ne pas avoir été
liée à des situations financières et des comportements
stratégiques particuliers à l'Union. Les agents privés
n'ont donc pas internalisé le principe de cette initiative pour former
leurs anticipations.
Pour ce qui concerne les effets d'offre, ils reposent sur deux
hypothèses : d'une part, l'ajustement par la baisse des dépenses
publiques n'engendre pas les distorsions que peut générer un
accroissement des impôts, d'autre part, la composition de l'ajustement
budgétaire dépend du niveau du taux d'endettement (Alesina et
Perotti, 1995 ; Alesina et Ardagna, 1998). En situation budgétaire ((
critique », le gouvernement privilégie la baisse durable des
dépenses publiques ; en particulier par la masse salariale,
malgré le coût politique de court terme que revêt cette
mesure. Au contraire, en situation budgétaire (( normale », le
gouvernement est porté à promouvoir un ajustement
budgétaire politiquement moins coûteux qui repose sur une
augmentation des impôts.
Un autre effet d'offre a pu jouer en zone franc, en
particulier par la concomitance de la réduction des déficits
budgétaires et de l'engagement des gouvernements à liquider le
problème des arriérés de paiement ; c'est-à-dire le
non-paiement à l'échéance contractuelle des factures par
l'État. Dans le passé, les arriérés envers le
secteur privé ou parapublic ont constitué un moyen de
relâchement instantané de la contrainte budgétaire
publique. Si les arriérés sont ultérieurement
apurés, les créanciers subissent un impôt implicite, un
manque à gagner équivaut à celui d'une détention de
titres publics non porteurs d'intérêt. Lorsqu'en revanche les
arriérés publics ne sont qu'en partie liquidés à
terme, situation qui fut courante en zone franc, la captation de l'État
est plus importante. Elle est aussi plus distorsive envers le système
productif, car elle implique une discrimination arbitraire des entreprises et
le non-respect de la règle de droit.
44
Ces stratégies de financement public ont
été très perturbatrices pour l'activité des pays de
la zone franc. De Boissieu (1985) en a montré le caractère
pernicieux à travers les effets de « report )) et «
d'imitation )) qui ont eu de très mauvaises implications pour le
système financier local et la croissance économique, notamment
pour les petites et moyennes entreprises du secteur formel. Le Pacte a donc
privilégié la transparence budgétaire,
préférant susciter la baisse des dépenses et
parallèlement l'augmentation du taux de pression fiscale plutôt
que de maintenir la logique subjective et souvent spoliatrice des
arriérés publics. L'action simultanée sur les
dépenses et les recettes publiques apparaît nécessaire dans
un contexte de transition fiscale qui rend difficile l'ajustement par la seule
augmentation des taux de prélèvement public. Ce changement de
comportement en faveur d'une meilleure gouvernance publique a pu être une
source de stimulation de la croissance économique sur fond d'engagement
parallèle à réduire les déficits
budgétaires. En d'autres termes, la moindre stimulation
budgétaire de l'activité a pu être compensée par un
regain de confiance des agents privés.
Au total, la réponse aux chocs économiques par
les moyens possibles mis en avant dans la littérature économique,
montre que des conséquences peuvent en découlées.
Lorsqu'il s'agit d'un ajustement par le niveau d'endettement, le recours en
général à la politique conjoncturelle ; notamment la
politique budgétaire est souvent privilégiée. Celle-ci est
parfois à l'origine des externalités.
SECTION II : ANALYSE DES EXTERNALITES BUDGETAIRES DANS
LA ZONE
Selon la théorie keynésienne et ses
prolongements, les politiques budgétaires produisent bel et bien des
externalités positives sur les économies. A contrario, l'approche
libérale et ses prolongements soutiennent purement la thèse
d'externalités négatives comme l'effet d'éviction ayant
tendance à faire baisser l'investissement privé. En premier, nous
examinons les théories relatives aux externalités
budgétaires dans une union monétaire et en second, nous
étudions la nature des effets induits par cette politique
économique.
45
II.1- Approche de la Nouvelle Économie
Keynésienne (NEK)
La règle de Mundell (1961) prédit qu'en
régime de change fixe, la politique budgétaire est efficace. En
effet, la hausse des prix va baisser le solde courant à travers une
appréciation du taux de change réel ; ce qui va conduire à
un effet d'éviction. Si les prix sont rigides et s'il existe des
capacités de production excédentaires, la demande globale
détermine le revenu global. Pour pallier les déficiences du
marché, et favoriser la mise en place d'un cercle vertueux de croissance
économique, Keynes décrit et justifie l'intervention de l'Etat
dans l'économie.
Levin (1983), inspiré par le modèle
Mundell-Fleming (1962) a appliqué au cas d'une petite zone de taux de
change fixes entre deux pays en supposant une mobilité imparfaite des
capitaux entre cette zone et le reste du monde. Dans ce modèle de Levin,
l'hypothèse de mobilité parfaite des capitaux au plan
internationale implique qu'une relance budgétaire dans un pays est
inévitablement une « politique d'appauvrissement du voisin »
parce que le revenu national dans l'autre pays doit diminuer pour maintenir
l'équilibre du marché monétaire de la zone (pour un taux
d'intérêt donné et une offre de monnaie constante).
Lorsque l'activité économique ralentit, les
dépenses publiques ont tendance à s'accélérer
tandis que les rentrées de recettes ralentissent mécaniquement.
Cela qui entraine une détérioration du solde budgétaire.
De ce fait, le montant des recettes fiscales diminue et le volume des
dépenses augmente. Aussi, la détérioration de
l'activité économique provoque un transfert de revenu des
administrations publiques vers les ménages et les entreprises ; ce qui
atténue l'effet du ralentissement économique sur les revenus de
ces derniers. C'est le rôle de stabilisateur automatique de la politique
budgétaire. Cet effet est également relevé par Solow
(2002) dans la réhabilitation de la politique budgétaire. Il
soutient que l'effet stabilisateur est apparent du simple fait que la
variabilité du revenu agrégé sera plus faible en
réponse à une variabilité donnée de la
dépense
46
autonome. Dès lors, l'effet stabilisateur est d'autant
plus fort que le système d'imposition du revenu est plus progressif.
Cette progressivité est mesurée par l'élasticité du
taux marginal par rapport au revenu agrégé.
Même si la théorie montre l'efficacité de
la politique budgétaire (effets de débordement positifs) sur les
économies des pays à travers le multiplicateur Keynésien,
elle fait encore l'objet de vives critiques. Lorsque les prix sont rigides, et
l'investissement sensible au taux d'intérêt ; le financement des
dépenses publiques par l'impôt a un effet nul du fait de l'effet
d'éviction : en effet, la hausse des dépenses publiques va
augmenter le taux d'intérêt, par la suite il y aura une baisse de
l'investissement. Cette baisse peut être négligeable si
l'investissement est fortement sensible à la demande.
II.2- Approche de la Nouvelle Économie Classique
(NEC)
Friedman (1976) et Schwartz (1963) ont rappelé compte
tenu des hypothèses d'anticipations adaptatives et de taux de
chômage naturel, qu'une politique budgétaire expansionniste
entraîne un effet d'éviction total, et qu'une politique
monétaire se traduit inévitablement par une hausse du niveau
général des prix (courbe de Phillips verticale à long
terme, pas de relation inflation/chômage). De telles théories ont
trouvé un écho favorable chez les théoriciens de la
nouvelle économie classique ; notamment Lucas (1973) ; Barro, (1974) ;
Prescott (1977) qui ont souligné qu'à partir des
hypothèses d'ajustements continus des marchés et d'anticipations
rationnelles, que les politiques de relance n'avaient aucun effet sur
l'activité dans la mesure où les agents anticipent les effets.
Barro (1974), sur le plan théorique, met en
évidence le « théorème de l'équivalence
ricardienne » selon laquelle les dépenses gouvernementales nettes
pouvaient compenser les insuffisances de la demande dans le secteur
privé. On considérait désormais que les politiques
budgétaires étaient sans effet sur le monde réel, si ce
n'est qu'elles pouvaient avoir des conséquences inflationnistes sur le
long terme. Les effets de l'augmentation des dépenses publiques sont les
mêmes ;
47
qu'elles soient financées par la hausse des
impôts ou par l'emprunt. Seule une politique surprenant les agents aura
un effet par le biais des mécanismes d'offre. La discipline
budgétaire était considérée comme nécessaire
pour assurer la stabilité des prix, contrairement aux institutions qui
oeuvraient activement à la stabilité macroéconomique. Pour
Lucas (1973), seule une politique monétaire non anticipée
pourrait avoir des effets sur le niveau de production. Cette théorie
milite pour l'abandon des politiques discrétionnaires.
Sur le plan empirique, Alesina et Perotti (1995) montrent
qu'il peut exister un biais en faveur du déficit budgétaire. En
effet, les agents privés peuvent entre autres ne pas percevoir la
contrainte budgétaire de l'Etat stipulant qu'un déficit soit
comblé ultérieurement. Les électeurs peuvent
délibérément souhaiter transférer le poids de la
dette publique sur les futures générations, ou encore percevoir
que les gouvernements peuvent se livrer à une utilisation
stratégique des dépenses publiques en engageant les futurs
dirigeants sur des dépenses correspondant à leurs propres
préférences.
Au regard des approches théoriques, on peut
déduire une controverse sur la nature des effets de débordements
des politiques budgétaires. Certains trouvent les externalités
favorables à l'activité économique (soutien à la
croissance, situation de plein-emploi, etc.) d'autres par contre y voient un
dérapage (effet d'éviction, entrave à la liberté du
marché, etc.) et une gabégie dans la gestion des finances
publiques (déficit hors norme).
II.3- Nature des externalités budgétaires
Il est vraisemblable que la nature des effets de
débordement des politiques budgétaires nationales sera
différente dans une union monétaire et entre pays liés par
des taux de changes flexibles. Dans le modèle à deux pays de
Mundell-Fleming, avec la mobilité parfaite du capital et taux de change
flexible, une augmentation des dépenses publiques financée par
l'emprunt, par exemple, a des effets de transmission positifs sur la production
à l'étranger ; car la devise
48
nationale s'apprécie en raison de la hausse des taux
d'intérêt internes ; ce qui induit un surplus d'exportations pour
les pays étrangers. Au contraire, avec des taux de change fixes et en
l'absence d'autres changements structurels, les effets de transmission seront
vraisemblablement négatifs, car cette augmentation des dépenses
publiques élève les taux d'intérêt dans le monde et
freine l'investissement dans le pays comme à l'étranger ; les
autres pays bénéficiant beaucoup moins d'une hausse de leurs
exportations.
Des recherches plus poussées à partir du
modèle de Mundell-Flemming donnent des résultats moins nets, car
les canaux de transmission deviennent plus complexes (Frenkel et Razin, 1987).
Ainsi, Masson et Taylor (1994) montrent que la hausse des dépenses
publiques génère un effet de débordement positif et
négatif sur l'activité économique d'un pays et celle de
ses partenaires commerciaux. L'effet de débordement positif s'observe
à travers le canal du commerce extérieur. Par contre, l'effet de
débordement négatif se traduit par la hausse éventuelle
des taux longs. Cette hausse est partagée par l'ensemble des pays de
l'union (zone euro). Elle dégrade la compétitivité du pays
en déficit et celle de ses partenaires de l'union.
Levine et Brociner (1994) attestent que l'augmentation de la
fiscalité engendre aussi bien un effet de débordement positif que
négatif dans l'économie du pays et dans celle des pays voisins.
L'externalité positive se manifeste à travers le canal de l'offre
de biens et services et/ou de l'offre de travail au niveau des entreprises
nationales, grâce à une politique fiscale souple. Pour Benassy et
Schalck (2007), elle favorise la production et stimule la demande nationale et
étrangère. L'augmentation de la fiscalité peut
également favoriser les activités et les comportements qui
procurent les effets de débordement positifs. D'après Cottarelli
(2011), elle permet de financer les biens publics qui ne seraient pas
spontanément produits par le marché. Elle assure le
fonctionnement des services publics et d'autres missions d'intérêt
général.
49
Quant à l'effet de débordement négatif,
il s'effectue par le canal de la concurrence fiscale où une politique
fiscale agressive en faveur des entreprises nationales, diminue leur
compétitivité et handicape la croissance économique du
pays domestique, mais également celle des pays voisins (Laffer, 1998 ;
Sorenson, 2000). L'effet de débordement négatif se traduit aussi
par la baisse des taux d'imposition dans les pays voisins et des baisses des
revenus fiscaux dans le pays domestique. C'est ainsi que les pays membres
peuvent être affectés par les politiques fiscales de leurs voisins
; par le biais des canaux de transmission (Zodrov et Mieszkowski, 1986). Ces
effets de débordement sont généralement négatifs et
provoquent une réduction du bien-être du pays qui subit ce
débordement. D'après Benassy et Schalck (2007), l'effet de
débordement négatif s'apprécie aussi par un déficit
budgétaire détériorant les finances publiques dans le pays
qui est l'initiateur de la politique budgétaire. La nature des
externalités budgétaires reste mitigée selon les zones
d'études, les périodes choisies, la méthode
utilisée et les mécanismes de transmission des effets. Or,
l'intégration économique et monétaire devrait renforcer
les interdépendances entre les pays.
Sarr (2006) a mis en évidence les externalités
budgétaires dans l'UEMOA par le canal du commerce intrazone. Sur la base
d'un modèle VAR structurel, il conclut que la transmission des
externalités budgétaires dans la zone reste faible en raison du
faible taux d'échange des flux commerciaux soit environ 12%. Dans la
même zone, Ndiaye et Konté (2012) à l'aide d'un
modèle VAR en panel, démontrent que le taux d'importation
influence le solde budgétaire de base des pays de l'union par le canal
d'éventuelles flambées des prix extérieurs qui induisent
par voie de conséquence l'accroissement des prix intérieurs. Pour
Kane (2013), la crédibilité de la politique budgétaire
apparait ainsi fortement liée au degré de convergence des
économies des pays membres de l'UEMOA. Récemment, les recherches
menées par Sene (2014) sur la solvabilité de la dette publique
à partir d'un VAR en panel à effets fixes, montrent qu'une
détérioration de la situation budgétaire d'un pays envoi
un mauvais signal aux investisseurs qui modifient leur comportent de risque
à l'égard des titres publics. Mais, cette
50
situation particulière est observée lorsque le
gouvernement est en face d'une dette insoutenable. Ensuite Diop et Diaw (2015)
analysant la stabilité de la politique budgétaires dans l'UEMOA
par la technique du SVAR, montrent bien que les chocs sur les dépenses
en capital public ne conduisent pas à des tensions inflationnistes et
influencent positivement les investissements du secteur privé au Benin,
Mali et au Sénégal. La maîtrise de l'évolution des
dépenses de consommation publique apparait importante puisque ces
dépenses sont très sensibles à l'inflation dans les Etats
comme la Cote d'Ivoire et le Sénégal. Ils trouvent
également que les chocs sur le taux de pression fiscale ne comportent
que des effets négatifs sur l'activité économique des
Etats de l'union et aussi sur la consommation privée des ménages,
d'où un contrôle strict de son évolution afin de ne pas
créer des distorsions dans les économies de la zone.
En résumé, la présence des
externalités budgétaires dans les unions monétaires
résulte en dehors des comportements hétérogènes des
économies, du jeu non coopératif auquel les politiques
économiques sont soumises. Résultats, les dérives
budgétaires en termes de déficits sont excessives ; ce qui
à long terme, nuit aux conditions d'optimalité de l'union.
D'où un intérêt particulier pour les Etats membres de
l'UEMOA d'aller vers une convergence des politiques budgétaires.
SECTION III : CONVERGENCE BUDGETAIRE ET SURVEILLANCE
MULTILATERALE
DANS L'UEMOA
Le concept de convergence a été
développé dans la littérature depuis les travaux de Solow
(1956). Elle a connu une forte utilisation dans les études empiriques
avec l'avènement des processus d'intégration. Il est question
d'évaluer la vitesse de rapprochement des pays pauvres vers les pays
riches, membres d'une même union monétaire. Il convient de
rappeler que la théorie traditionnelle de la croissance prédit
que les économies semblables en termes de technologie et de
préférences, convergent vers un même niveau de PIB par
tête. En revanche la théorie de la croissance endogène
initiée par Romer (1986) énonce que les
51
différences entre les niveaux de PIB par tête
persisteront. Le débat actuel réside dans la notion de
convergence absolue ; étant donné que l'équilibre
économique de long terme dépend des caractéristiques
structurelles des pays (par exemple : la technologie, les
préférences, la croissance démographique, les politiques
publiques, les structures de marchés, etc. La convergence absolue
requiert, au préalable, la convergence des caractéristiques
structurelles entre les pays. Dès lors, il n'est pas étonnant que
l'hypothèse de la convergence absolue ait été
rejetée par les régressions économétriques
fondées sur les données transversales (Barro et al., 1991).
Cette section expose le fondement théorique de la
convergence budgétaire, les réformes institutionnelles en
matières budgétaires et les mécanismes de surveillance
multilatérale.
III.1- Fondements de la convergence budgétaire
À la question de savoir faut-il imposer des contraintes
aux politiques fiscales nationales des pays au sein d'une union
monétaire ? La théorie économique apporte comme argument
le comportement du passager clandestin des autorités
budgétaires. La littérature admet que l'imposition des
contraintes budgétaires dépend de l'engagement de
l'autorité monétaire par rapport à sa politique future.
Combey et Mally (2010) montrent que l'incohérence temporelle dans la
mise en oeuvre de la politique monétaire conduit au comportement de
passager clandestin dans l'administration des politiques fiscales. Sans
engagement, les autorités monétaires ont tendance à
accroître le niveau du taux d'inflation lorsque le niveau d'endettement
des Etats est en hausse, et à diminuer le niveau du taux d'inflation
dans le cas contraire.
Cependant, lorsque l'autorité budgétaire d'un
Etat membre veut prendre une décision sur son niveau d'endettement, elle
reconnaît qu'en augmentant son niveau d'endettement, l'autorité
monétaire augmentera le niveau du taux d'inflation. Ainsi, il introduit
le coût d'inflation induite par la dette dans son
52
programme, et ignore le coût que cette inflation induite
impose aux autres Etats membres. Ce comportement du « free-rider »
conduira à un niveau d'endettement insoutenable et à un niveau
d'inflation élevé. C'est le point de vue développé
par Chari et Kehoe (2007). Leur modèle conduit aux résultats
suivants : si l'autorité monétaire peut s'engager, alors les
règles fiscales imposées aux différents Etats membres ne
conduiront pas à une augmentation de bien-être ; cependant, si
elle ne peut pas s'engager, alors les contraintes augmentent le bien-être
des Etats membres. Bertola et Drazen (1991) analysent l'effet d'une
austérité budgétaire et suggèrent qu'un
déficit fiscal élevé peut être le signe d'une forte
pression fiscale à venir. Cette anticipation peut décourager
l'investissement privé, ce qui pourrait avoir des effets négatifs
sur la croissance.
L'analyse a été ensuite développée
sous un autre aspect par Giavazzi et Pagano (1995). À partir d'une
évidence internationale, les auteurs démontrent l'effet non
keynésien du déficit budgétaire. Dans une union
monétaire, la structure fiscale est beaucoup plus liée au niveau
général des prix et donc plus au taux d'inflation qu'à la
politique monétaire. Un niveau de déficit élevé
requiert un niveau général des prix élevés pour
réduire le niveau d'endettement réel et permettre à
l'autorité fiscale de respecter sa contrainte budgétaire à
l'horizon (Woodford, 2001). Un rééquilibrage budgétaire de
plus longue durée serait alors source de stabilité
macroéconomique en rassurant les investisseurs que les impôts et
les taux d'intérêt n'augmenteront pas pour financer de futurs
déséquilibres budgétaires. Comme ont su souligner Combey
et Mally (2010), le premier avantage d'une union monétaire est la
réduction du taux d'inflation avec pour avantage la promotion de
l'intégration économique et de la croissance économique ;
aussi les coûts résident dans l'effet des politiques fiscales
décentralisées sur la politique monétaire. Herzog (2005)
démontre à partir d'un modèle dynamique, le rôle du
pacte dans la discipline des politiques fiscales.
53
III.2- Réformes institutionnelles en matière
budgétaire
Pour l'union européenne, les déficits importants
des pays membres au début des années 1990 ont favorisé
l'adoption du Pacte de Stabilité et de Croissance (PSC) en 1997.
Concernant la coordination des politiques budgétaires des Etats de l'UE,
le PSC fixe le seuil des déficits publics à 3 % du PIB, plafonne
la dette à
60 % du PIB et fixe le taux d'inflation à moins de 1,5
% de points de la moyenne des trois pays membres ayant le plus faible taux
d'inflation.
Dans la même perspective, des mesures pour l'encadrement
des politiques budgétaires nationales ont été prises en
compte par le traité de l'UEMOA dès sa signature en 1994 à
travers le programme de surveillance multilatérale. Pour renforcer la
surveillance multilatérale, l'UEMOA a adopté en décembre
1999 un pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de
solidarité (PCSCS). Au plan opérationnel, le Pacte s'appuie sur
huit indices chiffrés permettant d'évaluer l'état du
secteur réel, des finances publiques et celui du secteur
extérieur. Ces indicateurs sont regroupés en quatre
critères de premier rang, et quatre autres de second rang.
Le ratio du solde budgétaire de base rapporté au
PIB nominal est le critère clé. Ce critère, permettant de
mesurer la capacité d'un pays d'assurer le financement sur ressources
internes de ses dépenses courantes et de ses investissements publics,
devrait être positif ou nul. À sa signature, la phase de
convergence du PCSCS était fixée sur la période allant du
premier janvier 2000 au 31 décembre 2002 et la phase de stabilité
devait démarrer à partir du premier janvier 2003 (acte
additionnel N° 04/99-UEMOA). Les limites1 du PCSCS ont conduit les
autorités de l'UEMOA à repousser les phases du pacte (l'Acte
additionnel N° 03/2003 du 29 janvier 2003, l'Acte additionnel N°
02/2006 du 27 mars 2006 et l'acte additionnel N° 05/2009/CCEG/UEMOA).
L'union économique et monétaire ouest-africaine
(UEMOA) est née en 1994 de la volonté de renforcer
l'harmonisation des politiques intracommunautaires. Cette
54
aspiration a trouvé son expression dans
l'élaboration d'un « pacte de convergence, de stabilité, de
croissance et de solidarité » (PCS). Dans ce cas, la surveillance
de la politique économique dépasse le domaine monétaire
pour mettre les variables budgétaires sous contrôle communautaire.
La littérature en souligne en effet la difficulté de promouvoir
l'efficacité économique sans une bonne combinaison des politiques
monétaires et budgétaires (Devarajan et Walton (1994) ; Semedo et
Vilieu (1997). En 1999, le Pacte de convergence, de stabilité, de
croissance et de solidarité entre les États membres de l'UEMOA
est entré en vigueur. Ce pacte distinguait deux phases :
? Une phase de convergence, allant du 1er janvier 2000 au 31
décembre 2002, durant laquelle les États membres devaient se
rapprocher progressivement des normes communautaires ;
? Une phase de stabilité, devant débuter
initialement au 1er janvier 2003, à partir de laquelle tous les
États membres devraient respecter l'ensemble des critères de
convergence.
Le Pacte introduisait également une
hiérarchisation des critères de convergence en identifiant des
critères de premier rang (celui relatif au solde budgétaire est
considéré comme un critère clé dont le non-respect
peut entraîner le déclenchement d'un mécanisme de sanction)
et des critères de second rang. L'État membre qui ne satisfait
pas à un des critères de premier rang doit élaborer, en
concertation avec la Commission de l'UEMOA, un programme de mesures
rectificatives dans un délai de trente jours.
Aucun État n'est parvenu à respecter les huit
critères de convergence en 2002 ; alors, la conférence des chefs
d'État et de gouvernements a décidé de reporter l'horizon
de la convergence en fin décembre 2005. En mars 2006, constatant qu'un
seul État respectait les critères de premier rang pour l'exercice
2005, elle a fixé un nouvel horizon de convergence pour l'UEMOA, en
décidant que « désormais, l'Union entrera en phase de
stabilité dès qu'une masse critique
55
d'États aura respecté les quatre critères
de premier rang et que ce respect aura été jugé durable
». L'objectif cible pour l'atteinte de la phase de stabilité avait
été fixé au 31 décembre 2008. Cet horizon a de
nouveau été repoussé au 31 décembre 2013 lors de la
Conférence des chefs d'État et de gouvernement.
En 2006, deux indicateurs complémentaires (inflation
sous-jacente et solde budgétaire corrigé) ont été
adoptés par le Conseil des ministres de l'UEMOA. Le solde de base
corrigé est calculé en ajoutant aux recettes totales (hors dons)
le montant des dons budgétaires étrangers et le montant de l'aide
PPTE ayant financé les dépenses courantes et les dépenses
d'investissement public. Depuis la Conférence des chefs d'État et
de gouvernement de mars 2009, c'est désormais ce critère du solde
budgétaire corrigé qui devient le critère de premier
rang.
Selon un rapport du Comité de Convergence établi
en avril 2014, la situation en matière de convergence s'est sensiblement
améliorée en 2013 par rapport à l'année
précédente, bien que ces performances soient encore jugées
insuffisantes en ce qui concerne le respect du critère relatif au solde
budgétaire de base. Cinq pays ont respecté un ou deux
critères de convergence supplémentaires par rapport à
l'année précédente. Seul le Niger a respecté un
critère de moins, alors que le Sénégal et le Togo ont
respecté les mêmes critères qu'en 2012. Tous les pays ont
rempli les critères relatifs à l'inflation, à la dette
publique et à la non-accumulation des arriérés. Cependant,
seuls le Bénin et le Burkina Faso respectent le critère du solde
budgétaire de base et, de ce fait, les quatre critères de
surveillance de premier rang.
56
Tableau 3 : Critères de Convergence de la zone
UEMOA
Critères de 1er rang
|
Normes
|
Critères de 2nd rang Normes
|
|
|
La masse salariale en % des
|
Le solde budgétaire de base
|
= 0
|
recettes fiscales. = 35%
|
|
|
Dépenses en capital sur
|
Le taux inflation
|
= 3
|
Financement interne en % = 20%
|
L'encours de la dette publique rapporté au PIB nominal
|
= 0
|
Recettes fiscales en % du PIB =17%
|
Les arriérés de paiement de la
|
|
Solde des paiements courants hors
|
période de la gestion courante
|
0
|
dons / PIB = -5%
|
Source : Commission de l'UEMOA (1999)
Le pacte de convergence, de stabilité, de croissance et
de solidarité entre Etats membres de l'UEMOA a pour objectifs de
renforcer la convergence des économies des Etats membres, de favoriser
la stabilité macroéconomique, d'accélérer la
croissance économique et d'approfondir la solidarité entre les
Etats membres (acte additionnel N° 04/99-UEMOA). Les cibles
économiques et sociales des Objectifs du Millénaire pour le
Développement (OMD) viennent s'ajouter aux recommandations du PCSCS.
III.3- Mécanismes de surveillance
multilatérale
L'UEMOA fait partie de la zone franc, ce qui signifie que la
banque centrale de l'union bénéficie d'un compte dit «
d'opérations » ouvert par le trésor public français
et qui peut est débiteur sans limites. Après la création
des unions monétaires, la France s'est préoccupée
d'éviter des déficits budgétaires trop importants des
gouvernements africains. Initialement les statuts de la Banque Centrale des
Etats de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) et ceux de la Banque des Etats de
l'Afrique Centrale (BECA) limitaient à 10% des recettes
budgétaires de l'année
57
écoulée. Cette limite a été
progressivement élargie à 15 puis à 20% des recettes
fiscales.
La limitation des avances était la contrepartie logique
des comptes d'opérations. L'objectif de ces comptes étant de
garantir la convertibilité des francs CFA en devises et non de financer
indirectement les Etats. En l'absence d'autres sources de financement que la
création monétaire, la limitation des avances auraient
empêché les déficits budgétaires.
En 1994, la dévaluation imposée par l'ampleur
des déficits budgétaires a créé un courant
d'opinion en faveur de l'équilibre budgétaire. Le traité
de l'UEMOA et le traité instituant la CEMAC prévoient une
surveillance multilatérale des politiques économiques et leur
mise en oeuvre en cohérence avec la politique monétaire commune.
En principe, les Etats devaient éviter tout déficit
excessif9.
Dès l'origine des unions économiques, les Etats
furent invités à respecter des critères quantitatifs, pour
l'essentiel relatifs aux finances publiques. La référence
principale était un solde budgétaire primaire
(c'est-à-dire hors service de la dette) qui devait être positif
dans la CEMAC et supérieur à 15% dans l'UEMOA10.
Quatre indicateurs ont été adoptés par le conseil des
ministres de l'UEMOA en 1999 avec le pacte de convergence, de
stabilité, de croissance et de solidarité (les
critères de premier rang). Le premier exige que le ratio solde
budgétaire de base sur PIB soit positif ou nul, le deuxième
concerne le taux d'endettement qui ne doit pas excéder 70% et le
troisième vise la non-accumulation d'arriérés de paiement,
intérieurs ou extérieurs. Le quatrième concerne le taux
d'inflation et fixe une limite supérieure de 3%. Ce dernier
critère n'est pas strictement budgétaire, mais doit contribuer,
avec les trois premiers, à contenir les déficits
budgétaires.
9 Traite de l'UEMOA (article 63 et 75) et commission
régissant l'Union Economique de l'Afrique Centrale annexée au
Traité instituant la CEMEAC (aticles 49 et 61).
10 Convention de l'Union Economique de la CEMAC article 55,
Directive 02/96/CM de l'UEMOA.
58
Le solde budgétaire de base est défini comme la
différence entre les recettes totales hors dons extérieurs et les
dépenses totales hors investissements publics financés sur
ressources extérieures. L'équilibre budgétaire à
respecter exclut les investissements publics financés sur ressources
extérieures, mais non les investissements financés sur ressources
internes ; ce qui en fait un concept hybride. Comme ce solde budgétaire
inclut en dépenses les paiements des intérêts de la dette
contrairement au solde primaire, son adoption comme critère quantitatif
traduit la volonté de réaliser un excédent primaire
couvrant intégralement les intérêts de la dette publique,
suggérant qu'il n'est pas normal qu'un Etat emprunte pour assurer le
paiement de la charge d'intérêt sur sa dette. Le non-respect des
critères peut en principe donner lieu à des sanctions graduelles
qui vont de la publication d'un communiqué à la suppression des
mesures de soutien dont bénéficierait le pays de la part de
l'union.
Toutefois, selon l'article 58 du traité de la CEMAC,
lorsqu'un Etat membre est touché par « évènements
exceptionnels », il peut être exempté, pour une durée
maximale de six mois, de l'obligation de respect de tout ou partie des
procédures de surveillances multilatérales. Dans le cas
contraire, l'Etat est exposé à des sanctions qui sont les
mêmes que celles appliquées dans l'UEMOA. Cependant, le nouveau
pacte de convergence adopté en Afrique de l'ouest a introduit une
hiérarchisation des critères de convergence en critère de
premier rang (dont le non-respect est susceptible de déclencher les
mécanismes de sanctions) en critères de second rang.
Il avait été prévu dès le
départ que l'application du Pacte de l'UEMOA serait
progressive. Etait alors définie une première phase de
convergence des politiques économiques allant de janvier 2000
à décembre 2002 durant laquelle les Etats membres devaient se
rapprocher des normes communautaires, puis une phase de stabilité
à partir de janvier 2003 tous les Etats membres auraient dû
satisfaire les critères de convergence. Le tableau n°4
résume l'état de respect des critères de convergence dans
la zone UEMAO.
59
Tableau 4 : Nombre de critères
respectés par pays depuis 2000
Etats membres
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
2008
|
2009
|
2010
|
BENIN
|
3
|
4
|
6
|
3
|
4
|
3
|
3
|
5
|
5
|
3
|
4
|
BUR. FASO
|
3
|
3
|
4
|
3
|
4
|
4
|
3
|
4
|
3
|
4
|
5
|
COTE D'IV
|
1
|
1
|
3
|
1
|
2
|
1
|
2
|
2
|
2
|
3
|
6
|
GUIN. BISE
|
1
|
0
|
0
|
1
|
1
|
1
|
0
|
2
|
0
|
0
|
3
|
MALI
|
4
|
4
|
3
|
5
|
5
|
5
|
6
|
6
|
5
|
6
|
6
|
NIGER
|
1
|
1
|
3
|
3
|
3
|
3
|
6
|
6
|
5
|
4
|
6
|
SENEGAL
|
5
|
5
|
6
|
7
|
7
|
7
|
6
|
5
|
5
|
6
|
6
|
TOGO
|
1
|
1
|
2
|
2
|
2
|
2
|
2
|
3
|
2
|
2
|
3
|
Source : Calcul de l'Auteur sur la base du rapport,
Commission UEMOA (2012)
Du tableau n°4, il ressort que dans l'UEMOA les
critères de convergence sont diversement respectés. A titre
illustratif, seul le Sénégal parvient jusque-là à
respecter le plus grand nombre de critères, suivi du Mali et du Niger.
On peut également dire que la Guinée Biseau et le Togo ont
été les moins performants dans le cadre du respect.
L'année 2010 a vu les meilleurs résultats pour l'ensemble des
pays allant de 3 à 6 critères respectés sur les huit (08)
globalement définis. Mais, des efforts supplémentaires aurait
permis de dépasser ce cap si des mesures contraignantes ont
été prises et appliquées. À noter cependant que les
sanctions prévues dans le cadre de la surveillance multilatérale
n'ont été appliquées à aucun Etat. D'où
l'intérêt, après plusieurs années de fonctionnement
des institutions communautaires, de procéder à une
évaluation de la mise en oeuvre de la coordination des politiques
budgétaires dans la zone UEMOA. Une telle démarche aurait permis
d'apporter les corrections nécessaires.
60
CONCLUSION
Dans un contexte de pacte de convergence et de
stabilité, les problèmes
d'hétérogénéité structurelle des
économies et l'effet de jeu non coopératif des politiques
budgétaires continuent d'accentuer la présence d'effets de
débordement budgétaires dans l'UEMOA. Les économies sont
interdépendantes de telle façon que les politiques
budgétaires adoptées par un pays affectent les performances
économiques des autres pays.
L'analyse des résultats de l'indicateur
économique tel que le taux de croissance économique, a
montré un retard d'envol des taux de croissance pro-pauvre dans l'UEMOA.
Nonobstant les progrès enregistrés dans les ambitieux programmes
des Etats, le taux d'évolution de l'activité économique
réelle dans la zone reste en deçà du niveau minimal de 7%
pour réduire la pauvreté (Diaw et Diop, 2015). Par ailleurs, les
indicateurs macroéconomiques montrent les divergences entre pays
à travers des taux de croissance très variables et des niveaux de
dispersion assez significatifs (voir les valeurs des écarts-types en
annexe). De tels résultats confirment également le
caractère structurellement hétérogène des
économies, induisant ainsi des réactions variées face aux
chocs. Les pays de l'union sont essentiellement exportateurs de produits de
base alors qu'ils importent des produits à haute valeur ajoutée.
Dès lors, leur vulnérabilité à la volatilité
des prix devient très fréquente en raison des fluctuations des
cours mondiaux.
L'analyse du tableau de corrélation des cycles
économiques (cf tableau n°2) montre qu'il n'y a pas eu
d'augmentation du caractère symétrique des chocs (en raison de
faible corrélation des chocs liés aux termes de
l'échange). Ceci s'explique notamment par la forte spécialisation
des pays dans la production et surtout l'exportation de matières
premières ; ce qui exclut une complémentarité entre eux.
En outre, il existe une forte hétérogénéité
des structures économiques dans la zone UEMOA où trois (03) types
d'économies cohabitent : des économies sahéliennes
fortement dépendantes des aléas climatiques (Burkina, Mali,
Niger), des économies relativement industrialisées et à
forte dominance des activités de
61
services (Côte d'Ivoire, Sénégal) et des
économies côtières dont la dynamique est clairement
tirée par le commerce d'import-export (Bénin, Togo).
Pour ce qui concerne la mobilité du facteur travail,
elle est restée très faible en dépit de l'existence du
traité de l'UEMOA qui prévoit dans son article 4, la libre
circulation et le droit d'établissement des personnes exerçant
une activité indépendante ou salariée. Les mouvements
migratoires semblent être plus liés aux déterminants
historiques et culturels qu'aux ajustements économiques. De plus, les
difficultés que connaît la Côte d'Ivoire, pays le plus
influent de l'Union sur le plan économique, n'ont pas facilité
les migrations de travailleurs en direction de ce pays, dans un contexte de
nationaliste illustré par la notion « d'ivoirité ».
Sur le marché des biens et services, la faible
flexibilité des prix relatifs dans des cas oligopolistiques,
combiné au bas niveau du taux d'épargne pour un marché
financier régional embryonnaire, réduisent les transferts
intra-communautaires au plan microéconomique. Au niveau
macroéconomique, la faiblesse des fonds structurels empêche la
mise en place de politiques d'envergure et de convergence des pôles
régionaux. Le commerce intra- régional est resté faible,
en raison de la structure extravertie des économies (priorité
à l'exportation vers les pays du Nord de matières
premières agricoles et non agricoles), de l'étroitesse des
marchés, de la qualité des infrastructures de transport et de
nombreuses entraves non tarifaires aux échanges.
In fine, c'est un goulot d'étranglement qui s'installe
dans l'union (situation sous-optimale). Pourtant, les questions touchant les
effets de débordement issus des politiques budgétaires nationales
continuent de diviser les économistes comme Marshall (1898) ; Pigou,
(1920) ; Benassy et Schalck (2007) ; Levine et Brociner, (1994). Tous ont
longtemps mis l'accent sur l'importance des répercussions
budgétaires en cas d'austérité et où de relance.
Cette situation nous oblige à aller vers une revue de littérature
économique pour mieux cerner les controverses théoriques et
empiriques portant sur les politiques budgétaires et leurs effets.
62
|
|
CHAPITRE II : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE LA POLITIQUE
BUDGETAIRE
EN UNION MONETAIRE
|
|
|
63
Le débat sur l'efficacité de la politique
budgétaire continue d'opposer les économistes de la nouvelle
économie classique (NEC), ceux de la nouvelle économie
keynésienne (NEK) et ceux de l'économie géographique. Un
des arguments les plus solides consiste à admettre que la politique
budgétaire n'a pas d'effet favorable sur l'activité
économique (Creel et al., 2004). De ce fait, les Etats membres peuvent
l'abandonner sans crainte surtout que les déficits publics semblent
nuisibles, à cause notamment de la hausse des taux
d'intérêt qu'ils provoquent, ainsi que de la baisse de la demande
privée (puisque les agents anticipent les impôts qu'ils devront
payer demain) et de l'offre (en raison de l'anticipation de hausse future des
impôts) qui en découlent.
L'objet de ce chapitre est de passer en revue les arguments
à la fois théoriques et empiriques relatifs à la zone
monétaire optimale, aux politiques budgétaires et ses effets de
transmission et la coordination des politiques budgétaires. Pour cela,
il est scindé en quatre grandes sections : la section (I) la
théorie de la zone monétaire optimale, section (II)
présente la politique budgétaire en union monétaire, la
section (III) met l'accent sur les mécanismes de transmission des effets
budgétaires et la section (IV) explique la coordination comme une
réponse à l'efficacité budgétaire dans l'union.
SECTION I : THEORIE DE L'UNION MONETAIRE OPTIMALE
On peut définir une union monétaire comme une
zone géographique dans laquelle circule une monnaie unique qui est
à la fois le moyen de paiement dominant et la principale unité de
compte. S'il est clair qu'une union monétaire interdit toute politique
monétaire indépendante aux pays membres, il n'est évident
qu'il aille de même pour la politique budgétaire, (Bovenbers et
al., 1991). S'il existe un marché financier développé sur
lequel les gouvernements peuvent emprunter, ils n'ont pas besoin de recourir au
financement monétaire. C'est pourquoi on soutient parfois que les
conditions monétaires ne seront pas perturbées par des politiques
budgétaires indépendantes et même divergentes. C'est
pourquoi, nous allons aborder d'abord les fondements d'une union
64
monétaire, ensuite la théorie de
l'optimalité pour une zone monétaire et enfin les critères
d'optimalité.
I.1- Fondements théoriques d'une union
monétaire
Mundell (1961) est le premier économiste qui a
jeté les fondements théoriques de l'union monétaire,
notamment celle européenne. Sa théorie des zones
monétaires optimales est l'une de ses plus importantes contributions
scientifiques qui a servi dès les années soixante de cadre
d'analyse aux nombreux débats sur le bien-fondé de la
création d'une monnaie européenne. Mundell va être un
ardent partisan de l'Euro dont il est considéré comme le parrain.
Paradoxalement, sa théorie va être utilisée par de nombreux
économistes pour s'opposer à l'Union monétaire
européenne et pour mettre en doute ses chances de succès. Dans sa
théorie des ZMO, il mène son analyse à partir d'une
interrogation fondamentale : quels sont les critères économiques
selon lesquels diverses régions du monde pourraient décider
d'adopter une monnaie commune ?
A partir du concept de région, Mundell envisage une
nouvelle carte monétaire du monde. Ainsi une région allemande
pourrait s'allier avec une région française pour créer
leur propre monnaie et abandonner le franc et le mark. Il prend l'exemple de
l'Amérique du Nord pour élucider son idée. Dans quelles
conditions pourrait-il être avantageux pour l'Ouest du Canada et l'Ouest
des États-Unis de s'allier pour créer une monnaie de l'Ouest,
ainsi que pour les parties Est des deux pays de créer une monnaie propre
à l'Est du continent ? Les relations entre ces deux nouvelles monnaies,
qui supplanteraient les dollars canadiens et américains, seraient
régies par un taux de change flottant. Pour répondre à
cette question, il développe une analyse dans laquelle il met en exergue
les coûts et bénéfices de l'union monétaire. Les
avantages de l'adoption d'une monnaie commune comprennent la réduction
des divers coûts de transaction qu'entraîne l'existence de monnaies
différentes, un gain en liquidité de la monnaie dû
notamment à l'extension de son aire de transactions, dont
bénéficiera également l'ensemble des marchés
financiers. Les désavantages potentiels proviennent de
65
la suppression du taux de change entre les composantes de
l'union : il n'est plus possible de laisser le taux de change absorber les
chocs qui viendraient frapper de façon asymétrique les diverses
régions d'une union monétaire.
Ainsi donc la constitution d'une union monétaire
implique l'abandon de la politique monétaire à une instance
supranationale (banque centrale). Cette disposition est susceptible d'engendrer
des coûts qui peuvent mettre à mal l'union. C'est pourquoi la
théorie de la zone monétaire définit au départ par
Mundell (1961) énumère les critères que doivent remplir
les pays candidats à une Union Monétaire pour minimiser les
coûts liés à l'abandon de l'instrument monétaire.
À la suite de Mundell, plusieurs autres critères ont
été définis, notamment par McKinnon (1963) ; Kenen (1969)
; Ingram (1969) ; Cooper (1977) et Kindleberger (1986).
I.2- Théorie de la zone monétaire
optimale
L'union monétaire a fait l'objet d'étude dans le
cadre du débat entre régimes de change fixe et flexible. Elle ne
constituait pas un objet d'étude spécifique, mais était
assimilée à un système de change fixe, à la fois
dans les discussions académiques et politiques (Fratianni et Von Hagen,
1992). C'est dans ce contexte que s'inscrit la théorie des zones
monétaires optimales, principale approche de l'intégration
monétaire. Elle définit une zone monétaire comme un
domaine au sein duquel les taux de change sont fixes et cherche à
déterminer ses conditions d'optimalité (Mundell, 1961). De
nombreux prolongements théoriques, mais surtout empiriques, ont
été développés dans ce cadre et les critères
des ZMO ont été appliqués à l'Europe entre autre
par Mongelli (2002) et à d'autres régions du monde comme
Eichengreen (1998). Mais cette littérature met plus l'accent sur les
coûts macroéconomiques engendrés par la perte de
l'instrument de taux de change et aborde à peine la question des
bénéfices de l'intégration monétaire.
L'intérêt porté aux unions monétaires,
déterminées plus spécifiquement par une monnaie commune,
s'est ravivé avec la concrétisation de l'intégration
monétaire en Europe, qui, avec la création de l'euro en 1999, a
montré que la constitution
66
d'une union monétaire était réalisable
alors que la théorie des ZMO favorisait le pessimiste sur ses chances de
succès (Brack, 2008).
La création de l'Union économique et
monétaire (UEM) en Europe représente un enjeu majeur, non
seulement pour les pays membres, mais aussi pour les autres pays qui pourraient
la rejoindre et pour les pays non-membres, principaux partenaires de l'Union.
D'un autre côté, les crises financières qui se sont
multipliées dans les années 1990 (notamment la crise du
système monétaire européen de 1992-1993 ; la crise
mexicaine de 1994-1995 et la crise brésilienne de 1999) ont conduit de
nombreux économistes à défendre les régimes de
change « extrêmes », tels que la caisse d'émission (en
Argentine, Bulgarie, Estonie et Lituanie) ou l'union monétaire
«dollarisation», considérés comme étant les
seuls viables avec le système de change flexible (Fischer, 2001). Ces
deux événements ont contribué à élargir les
débats dans le domaine de la recherche académique, à la
fois en limitant la portée de la théorie des ZMO et en ouvrant de
nouvelles pistes de recherche. L'expérience européenne procure de
nouvelles données permettant d'analyser empiriquement les effets de
l'union monétaire, et non plus seulement ses conditions
d'optimalité. Elle a montré que les critères mis en avant
par la théorie des ZMO sont endogènes ; l'union monétaire
serait viable ex-post même si elle ne l'est pas ex-ante.
On peut distinguer deux types d'unions monétaires :
l'union monétaire multilatérales et l'union monétaire
unilatérale. Dans les deux cas, il y a abandon de la monnaie nationale
au profit d'une monnaie commune ce qui constitue la définition
généralement admise de l'union monétaire. Dans le cas de
l'union monétaire multilatérale, la souveraineté
monétaire est partagée entre les membres de l'union, alors que
dans une union monétaire unilatérale («dollarisation»
ou «euroisation»), elle est abandonnée au profit du pays
ancre. L'union unilatérale connaît de nombreux
développements. Étudiant la politique de change effective de 66
pays, mesurée à partir de la volatilité relative des
monnaies par rapport à trois ancres potentielles (dollar, mark et yen),
Bénassy-
67
Quéré et Deusy-Fournier (1995) montrent que la
majorité des pays considérés tendent de fait à
stabiliser leur monnaie par rapport à une monnaie de
référence : 30 % le font par rapport au mark (essentiellement les
pays de l'Union européenne), et près de 30 % également le
font par rapport au dollar (le yen n'apparaissant pas comme une monnaie
d'ancrage). Ces proportions seraient sans doute plus importantes si l'on
pouvait étudier également des comportements d'ancrage par rapport
à des paniers, et non uniquement des monnaies de
référence. Il est probable que le mouvement d'ancrage sur des
grandes monnaies internationales se poursuivra, renforçant le rôle
régional, sinon international, de l'euro par exemple.
C'est ce que montrent (Bénassy-Quéré
et al., 2004) à propos des pays
sud-méditerranéens et des pays d'Europe centrale et orientale.
Pour ces auteurs, si les pays proches, en termes régionaux, de l'Union
européenne adoptent un raisonnement en termes de zone monétaire
optimale pour définir la monnaie de référence de leur
politique de change, ils auront sans doute intérêt à
retenir l'euro (plutôt que le dollar ou le yen), en raison de
l'importance de leurs liens commerciaux avec l'Union. Par ailleurs, si l'on
admet que ces pays ont également pour objectif la stabilisation de leur
solde extérieur, il apparaît également que l'euro devrait
être la monnaie d'ancrage réel à privilégier, et ce
dans des proportions qui sont importantes, puisque l'euro représenterait
dans la majorité des cas plus de 70 % du panier d'ancrage. L'union
multilatérale est généralement considérée
comme la résultante d'un long processus d'intégration, tandis que
l'union monétaire unilatérale apparaît davantage comme une
solution pour certains pays émergents ou en développement en
proie à une instabilité macroéconomique forte ou
caractérisés par une dollarisation de facto, cette
dernière étant généralement mesurée par la
part des dépôts en monnaie étrangère dans la masse
monétaire : de nombreux pays se caractérisent par une
dollarisation élevée, où les dépôts en
monnaie étrangère dépassent 30 % de la masse
monétaire.
68
I.3- Critères d'optimalité pour une union
monétaire
Ici nous allons exposer progressivement les différents
critères d'optimalité. Il s'agit de la forte mobilité du
facteur travail ; le taux d'ouverture ; la nature de la spécialisation ;
l'intégration financière et fiscale ;
l'homogénéité des préférences et
l'endogénéité des critères d'optimalité.
I.3.1- La forte mobilité du facteur travail
Pour Mundell (1961), une Zone Monétaire Optimale (ZMO)
est un espace économique où les facteurs de production sont
mobiles et où les régions sont touchées de façon
symétrique par des chocs. Les nations ont intérêt à
former une zone monétaire si et seulement si la mobilité des
facteurs à l'intérieur de la zone qu'elles constituent est plus
élevée qu'avec l'extérieur. Cette thèse s'explique
par le fait que la mobilité des facteurs est capable de corriger les
déséquilibres suite à un choc (interne ou externe) sans
recours au taux de change. Pour l'illustrer, considérons deux pays A et
B engagés dans un processus d'intégration. Soit alors un choc qui
déplace la demande du pays A vers celle du pays B.
En l'absence de mobilité des facteurs on assiste
à une surévaluation de la monnaie du pays A, un déficit de
la balance des paiements, une baisse de la production et du chômage
tandis que dans le pays B, c'est le phénomène inverse. La
mobilité de la main d'oeuvre permet de résorber le chômage,
de réduire la demande et le déficit commercial dans le pays A et
puis de provoquer la hausse des salaires dans le pays B. Pour que le
mécanisme d'ajustement soit efficace, il est nécessaire que les
prix et les salaires soient flexibles. Sinon, on peut s'attendre à une
dépréciation de la monnaie qui compromet l'union
monétaire. Pour McKinnon, cette explication n'est pas satisfaisante de
sorte qu'il en propose une autre.
69
I.3.2- Le taux d'ouverture : McKinnon
À la suite de Mundell (1961), McKinnon (1963) postule
que la constitution d'une zone monétaire tient plus à l'ouverture
des économies qu'à la mobilité des facteurs. Il
définit l'ouverture d'une économie comme étant le rapport
des biens échangeables sur les biens non échangeables, soit les
importations et exportations rapportées au PIB. Dès lors pour
McKinnon (1963), les risques liés à l'abandon du taux de change
diminuent avec le degré d'ouverture des économies et
l'intensité de leurs échanges réciproques. En effet les
économies très ouvertes, donc fortement interdépendantes,
sont sans cesse exposées aux chocs externes. Par conséquent, les
économies ouvertes ont intérêt à constituer une zone
monétaire pour éliminer les risques du taux de change qui sont
sources de fortes instabilités. Kenen (1969) montrera que cette
explication de McKinnon, elle aussi, n'est pas suffisante.
I.3.3- La nature de la spécialisation : Kenen
(1969)
Kenen met l'accent sur les structures des économies
candidates à l'union monétaire. Il montre alors que les
économies ayant une structure productive diversifiée
résistent facilement aux chocs à cause du décalage
conjoncturel. En effet, les chocs ne peuvent atteindre simultanément
tous les secteurs de l'économie. En conséquence, les pays qui ont
un haut degré de diversification peuvent fixer leur taux de change, donc
constituer une zone monétaire. Cette proposition, tout comme les deux
précédentes, néglige le jeu de la sphère
financière qui, on le sait, joue un rôle de plus en plus important
dans la détermination des taux de change. C'est pourquoi Ingram et
Johnson (1969) proposent d'en tenir compte, ce qui modifie le critère
d'optimalité de la zone monétaire.
I.3.4- L'intégration financière et
fiscale : Ingram et Johnson (1969)
Ces deux auteurs introduisent la sphère
financière dans l'analyse de la zone monétaire optimale. Selon
eux, la faible mobilité de la main d'oeuvre peut être
70
suppléée par la mobilité du capital. En
effet, la mobilité totale des capitaux et la libéralisation des
services financiers permettent de corriger les déséquilibres de
la balance des paiements sans pression sur le taux de change et sur les taux
d'intérêt. Cette approche se fonde sur le fait que les capitaux
ont tendance à se déplacer plus rapidement que la main d'oeuvre.
Aussi, pour qu'une zone monétaire soit optimale il faut qu'elle soit
totalement intégrée d'un point de vue financier. Par ailleurs, le
fédéralisme fiscal permet de compenser le manque d'ajustement du
taux de change, et d'atténuer l'effet des chocs asymétriques. Ce
mécanisme d'ajustement joue à travers les transferts des pays
excédentaires vers les pays déficitaires. Cooper (1977) d'une
part, et Kindleberger (1986) de l'autre, poussent alors l'analyse
au-delà de la nature d'actif financier de la monnaie en la
considérant comme un bien collectif. Dès lors le critère
d'optimalité de la zone monétaire trouve ses fondements dans la
structure des préférences des agents économiques.
I.3.5- L'homogénéité des
préférences : Cooper et Kindelberger
Pour Cooper (1977) et Kindleberger (1986), l'union
monétaire est avant tout un bien collectif, manifestation de la demande
commune des États membres. Les pays membres qui ont des relations
commerciales intenses et qui expriment des préférences
similaires, aussi bien pour les biens privés que pour les biens
collectifs, remplissent les conditions pour former une zone monétaire
optimale. Il est alors plus aisé de faire des compromis en
matière de politique économique dans la zone constituée
à cause de l'homogénéité des
préférences. Finalement, on peut admettre que tous les
critères énoncés ci-dessus, plus qu'ils ne s'excluent,
sont plutôt complémentaires pour définir la zone
monétaire optimale. Aussi, de récents travaux tentent-ils de
formaliser les grands principes de la ZMO ainsi définie pour
apprécier la pertinence de ces critères à la
lumière des faits, dans des modèles d'équilibre
général.
71
I.3.6- L'endogénéité des
critères d'optimalité
A la suite des travaux initiaux menés par Mundell
(1961) ; McKinnon (1963) et Kenen (1969) sur la théorie des ZMO,
d'autres critères ont permis aussi de tracer les contours de
l'optimalité. Ainsi, Frankel et Rose (1997) montrent après les
critères usuels dans l'analyse de l'optimalité des zones deux
autres critères : l'intégration commerciale et la
corrélation des cycles d'affaires. Cette thèse de
l'endogénéité des critères de ZMO
développée par est l'une des principales critiques à
l'égard de la théorie traditionnelle. Pour Frankel et Rose
(1997), le processus d'intégration monétaire est endogène
dans la mesure où l'union monétaire renforce la symétrie
des chocs et justifie ex post tout l'intérêt de créer une
monnaie unique. Ils privilégient deux critères importants pour
mesurer les gains résultants des unions monétaires :
Le degré d'intégration commercial
évalué par le niveau du commerce bilatéral et la
corrélation des cycles d'affaire sont les deux critères
utilisés pour mesurer les gains résultants des unions
monétaires. Les auteurs montrent que, deux pays auront
intérêt à mettre en place une union monétaire
lorsqu'ils ont un niveau d'échange bilatéral élevé
et/ou une corrélation forte de leur cycle économique.
L'idée sous-jacente est que, l'union monétaire renforce la
corrélation des variables économiques en renforçant les
liens commerciaux, réduisant par la même occasion les chocs
asymétriques. Il en résulte des gains à l'union même
si on prend en compte les coûts engendrés par la perte d'autonomie
de la politique monétaire au niveau domestique.
A partir d'un niveau d'intégrations commerciales, le
degré de symétrie des économies et une frontière
d'optimalité, les auteurs mettent en évidence le caractère
endogène des critères d'optimalité (graphique N°3).
Des pays caractérisés par un niveau faible d'échanges
bilatéraux, une faible synchronisation des cycles économiques
(partie hachurée) n'ont aucun intérêt d'abandonner
l'indépendance monétaire. Cela s'explique par l'absence de gains
en cas d'union (bénéfice < 0). Par contre, à droite de
la frontière d'optimalité
72
(exemple point C) : forte corrélation des cycles
d'affaire et la forte intégration commerciale, l'union monétaire
générerait des profits supérieurs aux pertes
découlant de l'autonomie monétaire.
Graphique 3 : Intégration commerciale et cycle
des affaires
Source : Manix W.
Hédreville
Ce graphique dénote le caractère endogène
des critères d'optimalité. Ainsi, les pays ne sont pas aptes
à créer une zone monétaire, ils se situeront au point a,
(à gauche de la frontière d'optimalité). La formation
d'une simple zone de libre-échange amènerait les pays au point b
grâce à la hausse du niveau des échanges bilatéraux.
Cependant, ils resteront toujours à gauche de la frontière
d'optimalité. Il s'ensuit qu'une zone de libre-échange ne
règle pas la situation. Il faut mettre de côté les
critères traditionnels et entrer en alliance monétaire afin
d'atteindre le point c caractéristique d'un niveau élevé
d'intégration commercial et d'une forte corrélation des
cycles.
Au total, Frankel et Rose (1997) montrent que, si ces
critères traditionnels ne sont pas respectés par un pays au
moment de la formation de l'union (ex ante), la hausse des échanges
commerciaux c'est-à-dire l'augmentation de la corrélation des
cycles d'affaire qui en découle le permettra après union (ex
post).
SECTION II : POLITIQUE BUDGETAIRE EN UNION
MONETAIRE
La politique économique est généralement
définie comme le domaine d'intervention des pouvoirs publics dans la
régulation de l'économie. Guerrien (2000) analyse celle-ci comme
« la branche des théories économiques qui traite des
diverses façons dont l'Etat peut intervenir pour infléchir la
conjoncture, notamment en ce qui concerne l'évolution de la production
et du niveau des prix ». Traditionnellement, la politique
économique retient quatre objectifs principaux (la croissance, le
plein emploi, la stabilité des prix et l'équilibre
extérieur) que les économistes appellent depuis les travaux
de Kaldor (1971) le carré magique. Le graphique n°3 permet
d'illustrer la représentation.
Graphique 4 : Carré magique de Nicola
Kaldor
CROISSANCE ECONOMIQUE
|
|
|
PLEIN EMPLOI
|
|
EQUILIBRE EXTERIEUER
|
|
|
73
INFLATION
Lorsque l'on aborde les moyens d'action de l'Etat sur
l'économie, on oppose généralement la politique
conjoncturelle dont l'horizon est le court terme à la politique
structurelle dont les effets se font sentir à moyen et long terme. Les
politiques conjoncturelles s'appuient sur la politique budgétaire
(dépenses et
74
recettes de l'Etat) dont les instruments utilisés sont
alors les investissements publics, les impôts, les subventions et aides
diverses et plus généralement le solde budgétaire (il
s'agit surtout d'un déficit) et la politique monétaire dans une
certaine mesure.
Dans cette section, il est question évidemment
d'examiner tour à tour les controverses théoriques sur la
politique budgétaire, ensuite les choix de politiques budgétaires
suivant la conjoncture en union monétaire et enfin d'étudier les
caractères cycliques des politiques nationales.
II.1- Généralités sur la politique
budgétaire
On distingue en général plusieurs types de
politiques conjoncturelles qui se réfèrent aux phases d'expansion
et de récession. On parle alors de politique de relance (expansion) ou
de politique de stabilisation (récession). La politique de relance
cherche à stimuler la demande afin que les entreprises produisent
davantage et embauchent plus. La politique de stabilisation est
généralement une politique de lutte contre l'inflation. Il s'agit
d'une politique d'austérité budgétaire. La fonction de
stabilisation des politiques budgétaires reste encore une
préoccupation des économistes et des décideurs politiques.
Beaucoup d'études montrent l'évidence que ces politiques
révèlent des caractères pro-cycliques11 dans
les pays en développement (Demirel, 2010) et parfois
contra-cycliques12 dans certains développés (Huart,
2011).
II.1.1- L'analyse keynésienne de la politique
budgétaire
Les analyses keynésiennes ont donné une
justification théorique à l'idée montrant que
l'utilisation du budget pouvait influencer la demande des agents
11 Une politique budgétaire est alors pro-cyclique
lorsqu'elle tend à accentuer les fluctuations de l'activité. Par
exemple, une politique de baisse d'impôt dans une phase de forte
croissance, ou une politique de consolidation budgétaire en bas de cycle
sont des politiques pro-cycliques.
12 Une politique budgétaire est contra-cyclique
lorsqu'elle permet d'amortir les fluctuations de l'activité à
l'origine d'inefficacité économique et de coûts sociaux.
75
économiques (consommation des ménages,
investissement des entreprises). Le budget des Etats peut donc être
utilisé dans le cadre d'une politique de régulation de la
conjoncture. Toutefois il ne faut pas perdre de vue que cette régulation
peut jouer dans deux sens. En cas de sous-emploi (situation où le
chômage est important), l'Etat se doit de mener une politique de relance
afin d'augmenter la demande effective. En situation inflationniste ou de
déficits extérieurs importants), il doit mener une politique
d'austérité budgétaire. Les déséquilibres
apparaissent aussi lorsque le marché est défaillant (optique de
rigidité ou de flexibilité des prix), les effets de demande sont
captés par le canal du multiplicateur keynésien contrairement
à la logique néoclassique pour les interventions de l'Etat.
Ainsi, la théorie keynésienne s'oppose à celle
néo-libérale, car les pouvoirs publics sont à même
de soutenir la demande des agents lorsqu'elle est déprimée par
une politique relance ; où de la freiner par une politique
d'austérité budgétaire.
Si l'objet de la politique économique est de faire
passer l'économie d'un équilibre de sous-emploi vers un
équilibre de plein-emploi par une meilleure utilisation des facteurs de
production, alors cette recommandation pourrait susciter deux interrogations
majeures : d'une part, l'Etat peut-il intervenir constamment et dans des
proportions croissantes pour que l'économie ne s'écarte pas du
plein emploi ? D'autre part, l'Etat peut-il relancer l'économie sans
causer une dégradation durable des finances publiques ? Ces questions
invitent alors à exposer l'approche néoclassique de la politique
budgétaire.
II.1.2- L'analyse néoclassique de la politique
budgétaire
La théorie néo-libérale admet que l'Etat
doit se comporter comme un ménage ; c'est-à-dire ne pas
dépenser plus que ses ressources. Le déficit du budget de l'Etat
était alors un signe de mauvaise gestion, voire de gabegie. Le principe
même de la politique budgétaire est contesté par les
économistes libéraux, qui pensent qu'elle ne peut qu'entrainer un
dérapage des dépenses publiques, et une augmentation à
terme de la pression fiscale, obstacle à toute création
d'emplois
76
nouveaux. Les néoclassiques affirment que
l'activité économique est entièrement
déterminée par l'offre ; de sorte que les déficits publics
n'ont aucun effet sur celle-ci. L'Etat est un facilitateur du marché qui
doit créer des conditions propices à la concurrence pure et
parfaite et veiller au respect de celle-ci.
Le problème posé ici est celui de
l'efficacité dans le temps de la politique budgétaire. Au
début de l'injection, celle-ci provoque un supplément de
production qui se dilue progressivement au cours du temps. Finalement,
l'économie perd toute trace de cette impulsion initiale.
II.1.3- L'analyse de la nouvelle géographie
économique (NEG)
Selon les théoriciens la nouvelle économique
géographique comme Capron (2000) ; Krugman (1991a) et Siroên
(2000), la trajectoire économique des pays est non seulement le
résultat d'une dynamique propre à chaque pays mais aussi
influencée par les politiques économiques nationales mises en
oeuvres et les chocs enregistrés du fait de leurs différents
niveaux spatiaux. Une telle hypothèse est renforcée par l'analyse
de l'indicateur de Moran, qui met en évidence l'autocorrélation
spatiale entre les revenus par tête dans les régions retenues.
L'existence d'effet de débordement (externalités
des activités ou des politiques nationales), les relations de «
vertical Linkage » entre certaines entreprises, le chevauchement des
accords régionaux et des espaces, la mobilité du travail sur
autant de facteurs régionaux pouvant influencer la trajectoire
économique des pays et donc leur degré et vitesse de convergence
ou de divergence. Dans le cas des effets de débordement, l'analyse
théorique en distingue deux types : les externalités
localisées (spillover locaux) et les externalités
généralisées où sont concentrées les
activités économiques ou les infrastructures
bénéficient des avantages de la concentration. Dans ce contexte
il y aura renforcement des phénomènes de polarisation de
croissance inégale. Cette localisation peut être le
résultat des « effets frontières » mis en
évidence par la théorie des « zones d'intégration
naturelles ».
Augmentation des
dépenses ou baisse des prélèvements
fiscaux
|
|
Effet d'éviction et hausse des taux
d'intérêt
Augmentation de la dette publique
Déficit
A l'inverse lorsque les externalités positives se
généralisent, les avantages de la concentration des
activités se diffusent dans un espace plus large par « effet de
contagion » favorisant ainsi la réduction des disparités de
revenus. Entre ces deux situations, on peut observer le cas
intermédiaire où la concentration d'activités dans une
région donnée implique des effets de débordement à
la fois locaux et globaux.
II.2- Choix de politiques budgétaires
Par nature, les économistes admettent fondamentalement
que l'économie est instable. Les pays enregistrent fréquemment
des chocs sur l'offre ou sur la demande qui impactent positivement ou
négativement leurs économies. La prise en compte de la nature des
chocs peut influer sur le choix de la politique budgétaire selon qu'ils
soient symétriques ou asymétriques. Ce qui nous amène
l'analyse des choix de politiques de stabilisation conjoncturelle.
Graphique 5 : Les principaux effets du déficit
budgétaire
Stimulation de la demande globale
(multiplicateurs)
|
Possibilité de
réduction de
l'investissement
Augmentation de la charge de la dette (intérêt pays
par l'Etat)
Croissance et création d'emploi
Frein à la croissance et à l'emploi
Augmentation du déficit
77
Source : Auteur, à partir de
l'analyse keynésienne
78
II.2.1- La politique d'austérité
budgétaire
En union monétaire, l'impact des politiques
d'austérité est amplifié en raison de
l'interdépendance des pays par des liens commerciaux. Lorsque tous les
pays consolident simultanément leurs finances publiques, la production
de chaque pays est non seulement réduite dans l'économie
domestique, mais elle sera également affectée par les
consolidations budgétaires réalisées dans les autres
pays-membres. Les politiques d'austérité menées de concert
en union européenne risquent de conduire à une contraction
cumulative de l'activité économique. Batini et al., (2012)
confirme les effets dépressifs des consolidations et constate que les
réductions de dépenses publiques sont bien plus dommageables
à l'activité que les hausses d'impôts.
Une étude du Fonds Monétaire International (FMI,
2010) a analysé les expériences de consolidation
budgétaire menée dans les économies avancées. Les
résultats concluent des effets non keynésiens (multiplicateur
négatif) pour les politiques de restrictions budgétaires en
prenant appui sur quelques pays comme le Canada, le Danemark, l'Irlande, la
Suède qui présentent en réalité une certaine
particularité. Elles portent sur de « petites économies
ouvertes » avec leur propre monnaie et qui ont mené des politiques
de rigueur budgétaire, en les combinant avec la
dépréciation monétaire. Contrairement à ces
derniers, le FMI montre que dans tous les pays, depuis 30 à 40 ans, les
effets des consolidations budgétaires sont restés
keynésiens, c'est-à-dire dépressifs.
Une autre étude du FMI (2012) réalisée
par dix-sept (17) économistes donne des résultats similaires.
Elle compare la valeur des multiplicateurs budgétaires dans les
modèles macroéconomiques DSGE pour les politiques
discrétionnaires et affirme que les multiplicateurs sont toujours
positifs dans ces modèles. Pour la zone euro, le multiplicateur est
même supérieur à un. En d'autres termes, si tous les pays
prennent des mesures de consolidation budgétaire en même temps, la
contraction de l'activité sera supérieure à l'impulsion
budgétaire. Par conséquent, la conduite de politiques de rigueur
budgétaire dans l'ensemble a
79
des effets récessifs forts et les déficits
publics ne pourront pas être compensés. Holland et Portes (2012)
ont observé les répercussions des divers plans
d'austérité adoptés en zone euro. Ils expliquent que les
politiques économiques poursuivies ces dernières années
par les pays européens se révèlent particulièrement
nocives pour l'activité. Aussi, la consolidation budgétaire a
entraîné une hausse du ratio dette publique/PIB dans chaque pays
membre, excepté l'Irlande. La consolidation coordonnée des
politiques budgétaires s'est traduite par une hausse du ratio de 5 %
environ pour la zone euro dans son ensemble. Il faut noter que les plans
d'austérité ont été mis en oeuvre pour
atténuer les tensions sur les marchés de la dette souveraine et
éviter la contagion. Cependant, les plans ont conduit à une
hausse des taux d'intérêt, la persistance des effets
négatifs sur la production et finalement un accroissement des ratios
dette/PIB. Les conclusions de leurs travaux montrent que le décalage
dans le temps des ajustements budgétaires permettrait de réduire
les coûts sur l'emploi et la croissance, sans pour autant que
l'endettement s'éloigne de sa trajectoire soutenable.
Dans la même lancée, Auerbach et Gorodnichenko
(2012) ont montré à partir d'une étude sur un panel de 30
pays de l'OCDE (en grande partie les pays de la zone euro) que les effets de
débordement des chocs budgétaires sont plus accentués
(forts) pendant les périodes de récession. Quant au régime
de change, les effets restent plus faibles dans les régimes à
taux de change fixe que dans les régimes à taux de change
flottants. Erceg et Lindé (2012) ont développé un
modèle DSGE13 à deux économies pour observer
comment l'appartenance à une
13 Le modèle DSGE a permis examiner les effets d'une
expansion des dépenses publiques dans une trappe à
liquidité. Si la trappe à liquidité est très
longue, le multiplicateur de dépense peut être beaucoup plus grand
que dans des circonstances normales, et les coûts budgétaires
minimes. Mais compte tenu de ce `fiscal déjeuner libre, `on ne sait pas
pourquoi les décideurs voudraient limiter la taille de l'expansion
budgétaire. Notre document traite de cette question dans un
environnement de modèle dans lequel la durée de la trappe
à liquidité est déterminée de manière
endogène, et dépend de la taille de la relance budgétaire.
Nous montrons que, même si le multiplicateur est élevé pour
de faibles augmentations dans les dépenses publiques, il peut diminuer
sensiblement à des niveaux de dépenses plus élevés
; ainsi, il est essentiel de faire la distinction entre la réponse
marginale et moyenne de la dette de sortie et le gouvernement.
80
union monétaire façonne les effets d'une
consolidation, qu'elle prenne la forme d'une hausse d'impôts ou d'une
réduction des dépenses publiques. Une consolidation
budgétaire entraîne une contraction de l'activité dans
l'union monétaire. Leurs travaux aboutissent aux résultats
suivants : d'abord à court et moyen termes, une contraction des
dépenses publiques déprimera davantage la production que si la
consolidation budgétaire avait pris la forme d'une hausse
d'impôts. Par contre, le modèle suggère que les
réductions des dépenses sont moins dommageables à
l'activité ; ensuite à long terme, ils préconisent une
combinaison de réductions de dépenses et de hausses
d'impôts si un pays membre d'une union monétaire est contraint de
consolider ses comptes publics.
Néanmoins, ils reconnaissent avoir sous-estimé
les répercussions qu'une baisse des dépenses publiques peut avoir
sur la croissance potentielle. Or, les dépenses d'infrastructures sont
susceptibles de stimuler la productivité du capital privé et que
les dépenses en éducation améliorent la
productivité de long terme par l'accumulation du capital humain.
Des études du (FMI) (2013) affirment que les
consolidations budgétaires ne stimulent jamais l'activité
économique. L'accélération de l'activité domestique
suite à l'adoption d'un plan d'austérité se traduit par un
accroissement de la demande extérieure, impulsée par une
dépréciation réelle du taux de change. En plus, les
politiques d'austérité augmentent le ratio de la dette
publique/(PIB) ; puisse que le resserrement budgétaire sur
l'activité économique réduit le PIB.
II.2.2- La politique de relance budgétaire
Selon la nouvelle macroéconomie keynésienne avec
Mankiw (2007) ; Akerlof (1970) ; Geenwald (1980) les gouvernements pourraient
efficacement relancer l'économie par des dépenses
supplémentaires. Elles permettraient de passer d'un équilibre
sous-optimal (demande et offre faible, chômage et sous-utilisation du
capital, des anticipations négatives) à un équilibre plus
satisfaisant (plein-emploi, demande et offre plus fortes, anticipations
positives). La relance budgétaire se traduit souvent par une
augmentation des taux d'intérêt. En
81
économie ouverte, la hausse des taux
d'intérêt attire les capitaux étrangers qui viennent
combler le déséquilibre national et réduire les taux
d'intérêt domestiques par le jeu de la concurrence. Ainsi, l'effet
d'éviction ne joue pas, mais c'est au prix d'un endettement de la
nation.
Sur le plan empirique Chatelais et al (2008) dans leurs
travaux, montrent qu'en union monétaire, une hausse du déficit
budgétaire dans le pays domestique stimule sa demande et donc ses
importations d'où l'augmentation des échanges commerciaux. Ainsi,
l'activité et les prix sont stimulés dans la zone tout
entière et surtout dans le pays lui-même durant la période
de relance budgétaire. Pour Garnier (2007) à court terme, en
plus, de cette l'inflation, la Banque Centrale augmente ses taux directeurs ;
ce qui entraine une hausse des taux obligataires et une appréciation du
taux de change de l'union (zone euro). À long terme, l'activité
et les prix de la zone euro entrainent une augmentation des entrées de
capitaux pour compenser la détérioration de la balance courante
et favorisent un accroissement du PIB par une production soutenue. Par
conséquent, ce pays va attirer les entreprises étrangères
et les travailleurs qualifiés des autres pays.
On peut retenir de ce qui précède que la
politique budgétaire demeure encore la solution face aux ajustements
nécessaires surtout dans les cas spécifiques. Toutefois, du fait
de l'hétérogénéité des économies dans
l'union, elles font encore l'objet de nombreuses contestations, puisque leur
mise oeuvre crée des effets négatifs. Selon Badarau et Ndiaye
(2010), les divergences entre pays membres apparaissent au niveau de leurs
structures économiques (spécificités des marchés
financiers, du travail ou des biens et services), à la nature des chocs
et dans la conduite de politiques nationales.
II.3- Caractère cyclique de la politique
budgétaire
Le caractère cyclique des politiques budgétaires
continue de diviser les économistes. Au plan empirique, Huart (2011)
montrent que dans un pays en union monétaire, une politique
budgétaire discrétionnaire contra-cyclique au niveau national est
nécessaire pour stabiliser les fluctuations économiques
82
conjoncturelles spécifiques, lorsqu'il y a des
rigidités nominales ou réelles dans l'économie ou
lorsqu'il manque des mécanismes d'ajustement14. Pommier
(2003) adapte la méthode d'estimation des règles
budgétaires de Ballabriga et de Mongay (2002) sur données de
panel des pays de l'union européenne et montre que la politique
budgétaire semble suivre un profil contra-cyclique sur la période
19871994. Toujours selon auteur, pendant les périodes
défavorables, une orientation budgétaire expansive et
contra-cyclique vise à soutenir la demande globale alors qu'en
périodes favorables, une politique budgétaire restrictive et
contra-cyclique permettrait de réduire les déficits publics
(éventuellement accumulés pendant les périodes
défavorables) et de dégager des excédents publics afin de
s'assurer des marges de manoeuvre pour les « jours pluvieux ». En
effet, il faudrait améliorer le solde budgétaire pendant les
périodes favorables en affectant le surplus de recettes au
désendettement pour pouvoir le laisser se détériorer
pendant les périodes défavorables. Ainsi, le jeu des
stabilisateurs automatiques budgétaires implique moins de
rentrées fiscales et davantage de dépenses publiques sociales.
D'autres travaux comme ceux de Barro (1979) ; Talvi et
Végh (2005) mettent en évidence le caractère pro-cyclique
de la politique budgétaire dans les pays en développement
excepté ceux du G715 où elle est neutre. Cette analyse
est motivée par le fait que des interventions budgétaires
discrétionnaires peuvent s'avérer pro-cycliques : c'est le cas
d'un resserrement budgétaire en période de récession.
Bénassy et Carton (2004) utilisant la méthode des Moindres
Carrés Ordinaires (MCO) examinent la corrélation entre le solde
budgétaire structurel et le niveau (signe) de l'écart de
production et concluent que la politique budgétaire a été
pro-cyclique dans la zone euro entre 1999 et 2006, alors qu'elle a
été contra-cyclique
14 Le débat sur l'efficacité de la politique
budgétaire dépasse l'objet de cet article. Voir, à ce
sujet, une autre contribution (celle de Jérôme Creel, Éric
Heyer et Mathieu Plane) dans cette revue
15 Le Groupe des sept (G7) : les États-Unis, le Japon,
l'Allemagne, le Royaume-Uni, la France, l'Italie, le Canada. Depuis 1998 le
groupe inclut la Russie. Ensemble, ces pays représentent environ les 3/5
de l'économie mondiale.
83
aux États-Unis. Dans cette même lancée,
Taylor (2000 ; 2009) et Auerbach (2002 ; 2008) appliquent la même
méthode à ces mêmes Etats. Le résultat conclue que
la politique budgétaire discrétionnaire a été de
plus en plus contra-cyclique, notamment depuis le début des
années 1990.
En Afrique, les travaux de Guillaumont et Tapsoba, (2009)
montrent que la politique budgétaire est pro cyclique dans l'ensemble
des pays lorsque l'on considère les dépenses publiques. Le taux
de dépenses (en % du PIB tendanciel) est positivement affecté par
la conjoncture. Ce qui est ainsi conforme à la prédiction du
modèle de Talvi et Végh (2005). En raison de l'existence des
stabilisateurs automatiques, l'évolution des recettes est contra
cyclique et le taux de recettes réagit positivement à la
conjoncture. Il en résulte ainsi un effet nul de la conjoncture sur le
solde.
Une étude de Carmignani (2010) portant sur les pays
d'Afrique corrobore les conclusions des études susmentionnées. Il
montre que la politique budgétaire est responsable de la persistance de
la volatilité puisqu'elle ne remplit pas la fonction de stabilisation.
Globalement, on peut dire que le caractère cyclique de la politique
budgétaire demeure intrigant16. Parmi ces sources de
disparité, l'hétérogénéité
structurelle pose des problèmes particuliers, puisqu'elle est à
l'origine de la transmission des chocs asymétriques entre les pays de
l'union. Il est intéressant de voir les divergences essentielles entre
les économies des pays en union.
Nous pouvons retenir qu'au-delà de l'ampleur des effets
que les politiques budgétaires génèrent en union
monétaire, il est aussi important de savoir comment ces effets se
transmettent d'une économie à l'autre. Dans la littérature
courante, les moyens qui facilitent les effets de contagions sont connus sous
le nom de canaux de transmission. À cet effet, il convient d'analyser
comment la contagion se fait suivant les canaux.
16 Intrigant : signifie ici matière ou sujet
à réflexion
84
SECTION III : MECANISME DE TRANSMISSION DES EFFETS
BUDGETAIRES
Il existe plusieurs canaux par lesquels les politiques
budgétaires nationales peuvent affecter les autres pays de l'union en
réponse à des chocs économiques. L'approche traditionnelle
de la théorie des canaux de transmission de la politique
budgétaire lorsqu'il y a l'interdépendance des économies
remonte des travaux de Mundell (1961) et de Fleming (1962). D'après
Carton (2005) le déficit public d'un pays en union monétaire peut
être préjudiciable à ses partenaires. Il produit des effets
immédiats et différés, à la fois pour ce pays et
pour l'ensemble de l'union en passant par différents canaux. La
littérature économique identifie les canaux suivants : le canal
du commerce, le canal de l'inflation, le canal du taux d'intérêt
et le canal de la fiscalité.
III.1- Canal du commerce
Pour Gauchard (2008) dans une union monétaire d'abord,
le commerce entre pays établit un lien entre les prix relatifs des biens
et rend la demande de l'économie locale largement tributaire des
variations relatives des prix (domestiques et étrangers) de même
que la conjoncture nationale et étrangère. Ensuite, la
mobilité des facteurs, influencée par les différentiels de
rémunération ou encore de fiscalité, affecte
inéluctablement l'effet des politiques économiques mises en
oeuvre dans les divers pays. Enfin, l'existence d'une monnaie commune
contrôlée par une banque centrale unique implique que toute
modification de la demande de monnaie domestique aura des répercussions
sur les variables monétaires communautaires. Carton (2005) un effet
positif de hausse de la demande est immédiatement perceptible dans le
pays en déficit et chez ses partenaires. Ce sont là les effets
keynésiens qui se propagent via le commerce extérieur. Dans ce
contexte, les externalités résultent de l'intégration
commerciale selon Trotignon (1997) ; Farvaque et Lagedec (2002) et
financière Laguierce (2008).
85
Dans la zone UEMOA Sarr (2006) à partir d'un
modèle VAR structurel (SVAR) a montré qu'une hausse des
dépenses publiques nationales peut s'adresser directement aux produits
étrangers et stimuler ainsi l'économie
étrangère17. Elle peut stimuler l'économie
domestique, ce qui entraîne une hausse des importations qui à son
tour stimule l'activité de l'économie étrangère.
Cependant, avec la faiblesse du commerce intra-zone dans l'UEMOA (12 % du
commerce extérieur global), les chocs budgétaires ne contribuent
que très faiblement aux fluctuations des importations. En effet,
l'augmentation des dépenses publiques induisant celle du PIB qui
à son tour implique celle des importations agrégées
provenant de l'union n'est pas évidente. On note pour la plupart des
pays que les importations ne répondent significativement qu'à un
choc les affectant. Le commerce extérieur comme canal de transmission
des externalités budgétaires est peu opérant, et ce
résultat est valable pour pratiquement tous les pays de la
zone18. Cela pourrait s'expliquer par plusieurs facteurs. Parmi
lesquels, la faiblesse du commerce intrazone (12 % du commerce extérieur
global) et par structure des importations des pays de la zone et leur
orientation géographique. Les importations sont principalement
composées de biens de consommation, d'équipement et de produits
manufacturés provenant des pays industrialisés (comme en Europe
occidentale, Amérique et en Asie). Par ailleurs, un faible degré
de substituabilité entre biens domestiques et étrangers (Corsetti
et Pesenti, 2001) combiné à un secteur important de biens non
échangeables, (Lane 2001) limitent l'importance du canal des
échanges internationaux dans la transmission des externalités
budgétaires.
17 Ce cas est rare, on le retrouve cependant lorsqu'un
état importe directement d'un état étranger de
l'énergie (pétrole ou gaz)
18 Par ailleurs, le PIB étranger a des
déterminants autres que la demande adressée à ses produits
(investissement, politiques macroéconomiques, etc.), de plus, il n'est
pas certain que cette dernière en constitue le principal
déterminant. La plupart des économies de la zone sont
exportatrices de matières premières et par conséquent
fortement sensibles aux chocs des termes de l'échange.
86
III.2- Canal fiscal
Beetsma et Giuliadori (2011) puis Lane et Benetrix (2011) ont
expliqué la transmission des chocs de dépenses publiques en
recourant au VAR en panel. La fiscalité reste un des canaux de
transmission des politiques budgétaires en union monétaire.
Laffer et Golder (1974) ont montré qu'en situation de crise
économique, il faut augmenter l'offre et stimuler la consommation par la
baisse des impôts. Ce qui sous-entend des politiques évitant de
décourager l'effort des entreprises par la réduction des
débouchés pour celles-ci en baissant le pouvoir d'achat des
consommateurs. Cette même baisse favorise un climat propice au travail.
Il faut donc libérer l'offre des contraintes qui pèsent sur elle,
notamment celle qui consiste à gonfler la demande et qui se traduit,
à long terme, par une augmentation des prélèvements
obligatoires19. Dans cette optique, les économistes de
l'offre s'opposent aux keynésiens qui accordent à la
dépense publique un rôle privilégié de politique
économique.
Pour Perotti (1999) comme pour Blanchard (1990b) les effets
désincitatifs de la fiscalité sur l'activité sont d'autant
plus forts que le taux d'imposition est élevé. Ainsi, de faibles
valeurs initiales du taux d'imposition, l'économie réagit de
façon keynésienne. En cas de fortes valeurs, l'économie
réagit de façon anti-keynésienne. Pour Drazen (1990), un
choc important sur les dépenses sera considéré comme
structurel et permanent, ce qui renforce la probabilité qu'il ait un
effet non keynésien. Au contraire, une mesure de faible ampleur sera
considérée comme temporaire et aura donc des effets
keynésiens. Un effet expansionniste peut être obtenu par une
hausse temporaire des dépenses publiques ou au contraire par une forte
baisse.
19 Certains auteurs estiment toutefois que
l'allègement d'impôts peut entrainer, de la part des agents
économiques, des
comportements autres tels l'importation de biens de luxe ou
des activités spéculatives en lieu et place de l'investissement
et la stimulation de la production escomptée.
87
Les travaux de Bénassy et Cimadomo (2006) identifient
deux canaux par la voie fiscale : la concurrence fiscale et les effets d'offre.
La concurrence fiscale entrainant une baisse des impôts dans un pays peut
avoir pour conséquence d'attirer des entreprises dans ce pays au
détriment des autres pays. Ce qui signifie qu'une relance
budgétaire peut donc avoir des implications différentes pour les
pays partenaires quand elle résulte d'une baisse de la fiscalité.
Dans ce cas, la demande et l'offre sont simultanément encouragées
; sans que cela n'entraine nécessairement un accroissement des
importations du pays concerné. Par ailleurs, une politique fiscale
agressive en faveur des entreprises (une baisse rapide de l'impôt sur le
bénéfice des sociétés) peut obliger les pays
partenaires à réagir, soit en rationalisant leurs dépenses
publiques, soit en participant à leur tour à la course au
moins-disant fiscal.
Pour les effets d'offre, en modifiant sa fiscalité, un
pays membre modifie les conditions de l'offre de biens et services et/ou de
l'offre de travail. Cela peut avoir une influence sur l'indice de prix
agrégé de la zone ; soit directement, soit indirectement.
L'importance de ces effets d'offre par rapport aux effets de demande
dépend de la position de l'économie dans le cycle. Par exemple,
une hausse de TVA mise en oeuvre en haut de cycle a davantage d'impact sur les
prix que la même mesure prise en bas de cycle. Monti. M (2010), les
incompatibilités entre dispositions fiscales nationales peuvent agir
comme barrières et empêcher les citoyens et les entreprises de
profiter pleinement des avantages du marché intégré.
Une étude de la Commission Européenne (2012)
souligne que l'amélioration des finances publiques par la
fiscalité, certains Etats membres pourraient augmenter les recettes
fiscales et assainir les finances publiques des Etats membres. Mais cela est
favorable seulement pour les pays en situation budgétaire non viable,
qui disposent d'une marge de manoeuvre pour augmenter leurs recettes fiscales
puisque « trop d'impôt tue l'impôt » selon Laffer (1974).
Toutefois, la CE précise que la nécessité
d'améliorer la qualité de la fiscalité a augmenté
concomitamment
88
avec la nécessité d'accorder la qualité
de l'assainissement budgétaire et son incidence sur la croissance des
économies.
Les travaux de Griffth. R, Redding. J ; Simpson. H (2003) et
SARR. F (2006) sur la relance par la fiscalité dans les pays en
développement de l'UEMOA, concluent que les effets de débordement
par la fiscalité sont d'une ampleur très limités et
parfois inexistants dans leurs économies et chez leurs partenaires
commerciaux. Toutefois, un consensus se dégage pour montrer que les
effets de débordement des politiques fiscales sont difficiles à
identifier dans les pays en développement.
III.3- Canal du taux d'intérêt
Pour Wyploz (1990a) un accroissement du déficit
budgétaire dans l'un des pays membres de l'union impose à ses
partenaires une externalité sous la forme d'une hausse des
taux20. Cette externalité implique que chaque pays aura
tendance à ignorer le coût imposé à ses partenaires.
Ce qui se traduira par la mise en oeuvre de politiques trop expansionnistes.
Carton (2005) à partir d'un VAR structurel montre que
les variations de la demande d'un pays en biens et services, provoquent une
hausse des prix dans le pays en déficit et une réaction de la
politique monétaire. Les taux d'intérêt de court terme
augmentent temporairement dans l'ensemble de la zone, avec une propagation
partielle des taux longs. Cependant, les taux réels diminuent dans le
pays en déficit ; ce qui accélère son activité,
mais augmente dans les autres pays ; ce qui pèse sur leurs
activités. Dans le cas où le déficit
détériore la soutenabilité des finances publiques dans le
pays concerné, les marchés financiers perçoivent une
augmentation du risque de monétisation de la dette (ou
20 Alors qu'en cas de flottement des monnaies ou de changes
ajustables, une partie au moins de cet effet peut être absorbé par
une appréciation du taux de change du pays dont le déficit
augmente
89
de défaillance). Cela conduit à une hausse des
primes de risques sur les taux longs dans le pays et dans l'ensemble de la zone
euro, ralentissant ainsi l'activité.
D'autres chercheurs comme Canova et al., (2012) ont recours au
modèle VAR en panel pour analyser la transmission des chocs
asymétriques entre pays et dans le temps. Ils ont étudié
comment les chocs de taux d'intérêt aux États-Unis se
propagent sur dix (10) économies européennes, dont sept (07) dans
la zone euro et trois (03) autres en dehors. Puis, comment les chocs sur
l'économie allemande augmentant à la fois la production
intérieure, l'emploi, la consommation et l'investissement sont transmis
à neuf (09) autres pays de la zone euro.
Les travaux de Ducoudré et al., (2005) portant sur les
finances publiques, montrent que la dégradation de celles-ci entraine
une hausse des taux d'intérêts réels, qui dissuade les
entreprises d'investir et les ménages de consommer. Le niveau
élevé de la dette et du déficit public crée des
pressions inflationnistes, qui conduisent les Banques Centrales à
augmenter le taux d'intérêt de court terme. Dans ce cas, les
marchés financiers anticipent la persistance de ces tensions ; ce qui
entraine immédiatement un niveau plus élevé des taux
longs. Le taux d'intérêt réel d'équilibre,
compatible à long terme avec la stabilité des prix, serait ainsi
une fonction croissante du niveau des déficits et de la dette.
Les auteurs Tanzi et Chalk (2000) de la « théorie
des fonds prêtables » pensent qu'une hausse du déficit ou de
la dette publique entraîne une hausse de la demande de fonds
prêtables à l'offre de fonds constante ; ce qui fait monter le
taux d'intérêt. Cette théorie suppose
généralement que l'économie est au plein emploi. Un
déficit public élevé peut apparaître en
période de récession. Il s'accompagne alors d'un faible taux
d'intérêt de court terme et d'un taux d'intérêt de
long terme relativement élevé par rapport au taux court. Dans un
autre cas, ce déficit peut caractériser une période de
politique budgétaire trop expansionniste et s'accompagner de taux
d'intérêt élevés.
90
III.4- Canal de l'inflation
Selon Carton (2005), le différentiel d'inflation entre
le pays en déficit et ses partenaires de la zone euro dégrade sa
compétitivité. À plus long terme, celle-ci doit se
rétablir, ce qui passe par une activité moins dynamique dans le
pays que dans le reste de la zone euro. Taylor (2007), dans sa théorie
explique que les autorités monétaires ne prennent pas
explicitement en compte le comportement des autorités budgétaires
ou même la situation des finances publiques. Il montre l'existence d'un
écart monétaire qui nait souvent entre la valeur observée
du taux de croissance tendanciel de la masse monétaire et sa valeur de
référence compatible avec le taux d'inflation. Le recours au
modèle NIGEM21 dans le cas de l'union monétaire
aboutit au résultat suivant : l'existence de la monnaie unique renforce
l'efficacité immédiate d'une politique budgétaire
expansionniste menée dans un pays, mais au prix d'un impact
négatif notable sur les partenaires de la zone euro à moyen
terme.
Dans la zone UEMOA, la transmission de l'inflation entre les
pays du noyau dur de l'UEMOA22 et les pays les plus pauvres d'une
part, et d'autre part entre les pays de la zone Franc et la France a
été étudiée par Honohan (1992) ; Boccara et
Devarajan (1993). Ils concluent à l'existence d'un noyau commun du taux
d'inflation qui tourne autour de celui de la France, mais rejettent la
cointégration des séries de taux d'inflation dans la zone UEMOA.
Une hausse des dépenses publiques peut accroître l'inflation
nationale et l'inflation moyenne de l'Union. Si la banque centrale commune de
l'Union réagit par une politique monétaire restrictive, cela peut
affecter négativement l'activité de tous les pays membres de
21 NIGEM est un modèle
macro-économétrique multinational permettant de stimuler les
effets sur les principales variables macroéconomiques (prix, production,
emploi, taux d'intérêt, taux de change, balance courante...) d'un
grand nombre de pays (OCDE, émergents, NEM...) des politiques
macroéconomiques (fiscales, budgétaires et monétaires) ou
d'événements économiques divers (changement de taux
d'épargne, prix immobilier, prix du pétrole...)
22 Le noyeau dur de l'UEMOA c'est la Côte d'Ivoire et le
Sénégal
91
l'Union. Une hausse de l'endettement consécutive
à une politique budgétaire expansionniste peut affecter les taux
longs à l'intérieur de l'union, Sarr (2006).
L'argument justifiant une discipline budgétaire au sein
d'une union monétaire est l'existence d'externalités induises par
les politiques budgétaires ; à cela s'ajoute
l'interdépendance croissante des économies. Pour remédier
à cette situation, une coordination des politiques économiques
est mieux pour stabiliser les chocs asymétriques et rendre plus efficace
l'action budgétaire dans l'union.
SECTION IV : COORDINATION BUDGETAIRE DANS UNE UNION
MONETAIRE
HETEROGENE
L'argument rationnel en faveur d'une coordination est que les
mesures nationales de politique budgétaires ont des effets de
transmission ou de débordement non négligeables sur les autres
pays. La coordination permet d'internaliser ces externalités,
(Bredenkamp et Deppler, 1990). Une meilleure coordination des politiques
économiques, plus particulièrement les politiques
budgétaires conduit à une amélioration de
l'efficacité de la stabilisation des chocs (Muscatelli et Tirelli,
2005). Cependant, la qualité de la stabilisation macroéconomique
s'obtient à condition que la Banque centrale stabilise les chocs
d'offres symétriques et que les gouvernements s'occupent des chocs de
demandes nationaux (Uhlig, 2002) par des actions contra-cycliques et à
travers les stabilisateurs automatiques (Buti et al., 1998 et 2001). Mais
Vilieu (2000) soutient l'idée contraire selon laquelle dans une union
monétaire qui s'élargie, la coordination budgétaire perd
en efficacité si le degré d'asymétrie des chocs
augmente.
La question de la mise en place des politiques
budgétaires en union monétaire a été largement
explorée dans la littérature, avec comme conclusion
générale, qu'un supplément de coordination serait
souhaitable, parce que l'unification monétaire fait apparaître de
nouvelles externalités et/ou parce que la politique monétaire
commune ne peut plus répondre aux chocs asymétriques. Les travaux
les plus récents s'intéressent notamment à l'interaction
entre la politique
92
monétaire commune et les politiques budgétaires
nationales, avec les problèmes de crédibilités et de
coordination que soulève le policy-mixt, (Bureau, 1998) ; Debrun et
Wyploz (1999). Si la crédibilité d'une union monétaire est
assurée par la crédibilité du policy-mix,
l'intérêt de la coordination internationale des politiques
budgétaires dépend de façon cruciale du type de
règles adoptées et de la capacité des autorités
monétaires et budgétaires à s'engager de manière
crédible, Buiter et Marston (1985).
Le développement de cette section passe par une
présentation du cadre conceptuel de la coordination budgétaire,
ensuite donner les approches théoriques sur l'orientation de la
coordination et enfin montrer quelques résultats empiriques de
coordination budgétaire dans les unions monétaires.
IV.1- Cadre conceptuel de la coordination
budgétaire
Il est question ici de définir de manière
conventionnelle la coordination, puis poser les fondements institutionnels et
enfin montrer les avantages et limites de la coordination.
IV.1.1- Les définitions et objectifs de la
politique de coordination
La coordination peut être définie comme
l'agencement des parties d'un tout selon un plan logique, pour une fin
déterminée. Lorsqu'il est question de coordination en
matière de politique économique, on pense
généralement à la compatibilité des orientations
données aux politiques monétaire et budgétaire avec la
poursuite d'objectifs économiques. Une bonne coordination est
sensée permettre d'atteindre les objectifs en utilisant les instruments
monétaires et budgétaires avec un maximum
d'efficacité23. La coordination24 en
matière de politique
23 C'est-à-dire en évitant de gaspiller
inutilement des ressources (ou des marges de manoeuvre) sur les plans
monétaires et budgétaires.
24 De même que la crédibilité et la
continuité de la politique économique (règle dite `des
trois c' : coordination, crédibilité, continuité).
93
macroéconomique a longtemps été
considérée comme souhaitable Ammann (2002).
IV.1.2- Les fondements institutionnels d'une
coordination budgétaire
La gestion des unions monétaires repose sur une
organisation institutionnelle structurée permettant de concilier la
centralisation des opérations monétaires et la prise en compte
des impératifs économiques et politiques propres à chacun
des pays membres. Les implications de l'équilibre budgétaire
intertemporel des gouvernements et les problèmes de faiblesse de
coordination constituent les principaux enjeux de l'interaction
stratégique entre la politique monétaire et budgétaire
(Desquilbert et Villieu, 1998).
D'un point de vue théorique, les politiques
budgétaires spécifiques peuvent dégager des
externalités importantes et des risques d'insoutenabilité des
finances publiques. Afin d'internaliser tous ces effets externes et d'assurer
leur stabilité, les unions monétaires en Afrique de l'Ouest et en
Afrique centrale ont adopté un mécanisme de surveillance
multilatérale des politiques budgétaires. Dans l'UEMOA, la
formalisation et l'adoption en 1999, du Pacte de Convergence, de
Stabilité, de Croissance et de Solidarité (PCSCS) a
constitué une avancée importante dans le processus
d'intégration.
Dans la zone euro, le Traité de Maastricht et le Pacte
de Stabilité et de Croissance reconnaissent que des finances publiques
saines sont la condition nécessaire et indispensable à la
stabilité des prix et à une croissance forte et durable, Guidice
et Montanimo (2002). Pour Pérès (2008) il apparaît
fondé d'imposer des règles concernant l'évolution des
finances publiques dans une union monétaire ; par contre d'autres comme
Guerrien et Vergara (1997) ; Baldacci et al., (2003) estimant que ces
règles peuvent empêcher la politique budgétaire de jouer
son rôle de stabilisateur et de soutien à l'activité.
Barbier et al., (2003) ajoutent même que cela peut amplifier les effets
d'un choc conjoncturel ; ce qui représente un véritable danger
pour la viabilité de l'union.
94
IV.1.3- Les avantages et limites d'une coordination
budgétaire
Le débat sur les effets de la coordination des
politiques budgétaires face aux chocs et cycles économiques est
d'actualité. En effet, même si la plupart des économistes
s'accordent sur le bien-fondé de la coordination pour amortir les chocs,
il n'en demeure pas moins que certains la considèrent inutile. Une
meilleure coordination des politiques économiques, plus
particulièrement les politiques budgétaires conduit à une
amélioration de l'efficacité de la stabilisation des chocs
(Muscatelli et Tirelli, 2005). Cependant, la qualité de la stabilisation
macroéconomique s'obtient à condition que la Banque centrale
stabilise les chocs d'offres symétriques et que les gouvernements
s'occupent des chocs de demandes nationaux (Uhlig, 2002) par des actions
contra-cycliques et à travers les stabilisateurs automatiques (Buti et
al., 1998 et 2001). Mais Vilieu (2000) soutient l'idée contraire selon
laquelle dans une union monétaire qui s'élargit, la coordination
budgétaire perd en efficacité si le degré
d'asymétrie des chocs augmente.
IV.1.3.1- Les avantages d'une coordination
budgétaire
Selon Buiter et Marston (1985) la stabilité d'une union
monétaire est assurée par la crédibilité du policy
mix. L'intérêt de la coordination internationale des politiques
budgétaires dépend de façon cruciale du type de
règles adoptées et de la capacité des autorités
monétaires et budgétaires à s'engager de manière
crédible. Ainsi, la suggestion d'une coordination des politiques
budgétaires nationales dans une union monétaire est souvent
soutenue dans la littérature économique par l'existence
d'externalités négatives. Il s'agit d'éviter les nuisances
qu'engendreraient les effets de débordement négatifs d'une
politique budgétaire d'un ou de plusieurs Etats sur les autres de
l'union.
Les travaux de Debrun et Wyplosz (1999) s'intéressent
notamment à l'interaction entre la politique monétaire et les
politiques budgétaires nationales en union monétaire, en raison
des problèmes de crédibilité et de coordination que
soulève
95
le policy mix. Selon Kassé (2003) la mise en place des
organisations a pour but d'éliminer les dissemblances, par une mise en
cohérence des politiques économiques entre les Etats membres. Les
organisations favorisent d'une part la promotion d'intégration
économique et la consolidation des acquis importants de l'union et
d'autre part, elles garantissent le respect d'un certain nombre de
critères de convergence économique d'ordre monétaire,
budgétaire et financier.
L'intérêt de la coordination est
indéniablement une meilleure transmission des mesures de politique
communautaire à l'ensemble des économies de l'union. Elle
constitue de ce point de vue la solution pour contourner les effets
négatifs des politiques de certains pays sur leurs voisins (Rosemberg,
1995). La mise en oeuvre d'une règle budgétaire souple
apparaît d'autant plus importante que le mécanisme de
stabilisation ne doit pas être discrétionnaire, car une
stabilisation efficace nécessite généralement une action
rapide des pouvoirs publics (Schalck, 2002). Cependant, le constat
général est qu'un supplément de coordination serait
souhaitable, parce que la politique monétaire commune de l'union ne peut
plus répondre aux chocs asymétriques (Villieu, 2003).
IV.1.3.2- Les Limites d'une coordination
budgétaire
La coordination des politiques budgétaires
n'apparaît pas comme une évidence dans la théorie
économique. Certains économistes comme Guerrien et Vergara (1997)
; Baldacci E. et al, (2003) ; Barbier-Gauchard et Villieu (2003) pensent que la
coordination est inutile, voire nuisible. En effet, le passage à la
monnaie unique a entraîné, pour chaque État membre de
l'union monétaire, la perte d'un instrument de politique
économique indépendant. Lorsqu'un État membre est
touché par un choc macroéconomique spécifique, seule la
politique budgétaire peut être utilisée pour tenter
d'amortir le choc. Il est donc important que chaque État membre conserve
la pleine liberté d'utiliser la politique budgétaire pour ses
besoins propres. Outre, la coordination des politiques budgétaires est
très coûteuse en énergie pour un résultat
nécessairement fragile. Par ailleurs il est
96
nécessaire de mettre les gouvernements devant leurs
responsabilités25 (Bénassy-Quéré,
2007).
Pour d'autres thèses hostiles à une coordination
budgétaire, des auteurs comme Alesina et al., (2001) montrent que la
nécessité d'une coordination ne se fait plus sentir quand les
responsables des politiques monétaire et budgétaire font
correctement leur travail, tiennent leurs ménages respectifs en ordre.
Si, par exemple, un déficit budgétaire est causé par une
récession, alors l'inflation prévue va diminuer et les
autorités monétaires peuvent mener une politique plus expansive.
La prévision d'inflation sera en revanche revue à la hausse si le
déficit budgétaire est causé par un excès
structurel de dépenses visant à stimuler l'économie
au-delà de son équilibre de plein emploi. La politique
monétaire sera automatiquement resserrée sans que dans ce cas
également il n'y ait nécessité de coordination entre les
autorités monétaires et budgétaires. De plus, s'il y a
coordination, le risque est que les responsables budgétaires fassent
pression pour retarder le resserrement de la politique
monétaire26. Bennett et Loayza (2000) à l'aide de la
théorie des jeux démontrent que ce soit en équilibre de
Nash ou en équilibre de Stackelberg, une faible coordination des
autorités budgétaires et monétaires a des effets sur le
déficit primaire ainsi que sur le taux d'intérêt
réel et donc sur l'inflation et la production.
La surveillance multilatérale n'est pas sans risque.
Ondo Ossa (2006) dans ses travaux portant sur la zone CEMAC, montre qu'elle est
un obstacle à l'usage des budgets nationaux comme outil stabilisateur
pendant les récessions. Les politiques budgétaires deviennent
pro-cycliques en cas de ralentissement de l'activité économique,
parce que les gouvernements sont contraints de réduire les
dépenses et/ou d'accroître les impôts pour satisfaire ces
restrictions. De plus, la
25 Laisser jouer une concurrence par comparaison entre les
gouvernements des différents Etats afin que les électeurs
sanctionnent les gouvernements inefficaces, ou bien ceux qui ne poursuivent pas
la maximisation du bien-être social.
26 À notre sens, en période de
stagflation notamment, une coordination portant sur une discussion du `mix' de
politique économique et aboutissant à un compromis sur le
dosage des instruments peut quand même être utile.
97
surveillance multilatérale ne permet d'améliorer
la crédibilité de la politique économique que s'il est
possible d'infliger des sanctions à l'Etat indiscipliné.
IV.2- Approches sur les orientations de la coordination
budgétaire
Pour Thygesen (1992) la coordination peut être
envisagée sous deux angles : l'un considérant que l'objectif de
la coordination est de fournir et préserver des biens publics
internationaux, on parle de « coordination- bien public », l'autre
appréciant la coordination comme une réponse aux
interdépendances économiques entre pays, on parle de «
coordination stratégique ». Des unions comme la zone euro et
l'UEMOA ont choisi la première optique, à travers une
surveillance multilatérale et les programmes triennaux, alors que c'est
la coordination stratégique qui permettrait la régulation dans la
zone euro (Jacquet, 1998). Ce type de coordination est basé sur
l'idée que les politiques nationales affectent la situation et la
politique des autres pays membres. La négligence de ces effets de
débordement conduit à un équilibre sous-optimal. Les
décideurs publics doivent donc mettre en commun leurs instruments de
manière à accroître le produit d'équilibre. Cette
idée est généralement démontrée à
l'aide de modèles type Mundell-Fleming dans lesquels les gains en
bien-être sont analysés par un passage d'un équilibre non
coopératif à un équilibre coopératif (Muet
1995).
Cependant, il existe différentes approches dans la
littérature économique notamment la coordination par le
modèle de théorie des jeux, l'adoption de règles ou
principes disciplinaires, la coordination par la synchronisation des cycles
économiques (nominal et réel) et le fédéralisme
budgétaire.
IV.2.1- Les apports de la théorie des jeux
La théorie des jeux suggère que la conduite des
politiques économiques reposant sur la rationalité individuelle
de chacun aboutit à une solution sous-optimale par rapport à une
situation où une coopération entre Etats interviendrait. Elle
consacre, sur une base théorique, l'utilité de la coordination
des politiques
98
économiques. Toutefois, ces résultats sont
tributaires de deux conditions de faisabilité :
(i) elle suppose que chacun participe au même jeu ;
(ii) qu'il y a homogénéité des acteurs ;
chacun est dans la même situation et se trouve exposé aux
mêmes conséquences d'un choix identique (symétrie vs
asymétrie des chocs).
Ces conditions ne sont pas validées empiriquement dans
la réalité. Néanmoins, elles ne viennent pas remettre en
cause le message crucial de la théorie des jeux de Bourdin et Collin
(2007) qui stipule que, « appliquée aux politiques
économiques, la théorie des jeux suggère que la conduite
des politiques économiques reposant sur la rationalité
individuelle de chacun aboutit à une solution sous-optimale par rapport
à une situation où une coopération entre Etats
interviendrait ». En revanche, avec la même technique d'analyse,
Lenoble-Liaud (2001) montre que le processus de coordination des politiques
économiques peut être bloqué par un pays si sa
participation éventuelle représente une perte par rapport
à la situation antérieure dès lors que la fonction de
réaction de la coalition est décroissante.
IV.2.2- Les règles ou principes de disciplines
budgétaires
Les critères de convergence ou règles trouvent
leur fondement théorique de l'incohérence dans le temps des
politiques discrétionnaires. Théoriquement, les règles
budgétaires peuvent être définies comme les dispositions
réglementaires et/ou institutionnelles qui encadrent les choix de
politiques budgétaires. Elles désignent une norme, une valeur ou
une fourchette prédéterminée que les Etats s'engagent
à respecter pour assurer la discipline budgétaire. De ce fait,
les règles budgétaires portent sur les dépenses publiques,
le taux d'imposition, les déficits publics ou la dette publique. Deux
(02) thèses s'opposent sur la pertinence d'adopter ces règles.
99
La « nouvelle théorie anti-keynésienne des
finances publiques » (TAK), aujourd'hui largement répandue et
dominante en Europe, montre que les politiques budgétaires de
consolidation, ont généralement des effets contraires à
ceux attendus. Non seulement elles n'ont pas d'effets restrictifs, mais elles
peuvent même avoir des effets expansionnistes (Guidice et al, 2003).
Ainsi, toujours selon la TAK, la politique budgétaire expansionniste
aurait des effets dépressifs, alors que la politique budgétaire
restrictive aurait des effets expansionnistes ; même à court
terme. Pour Creel et al., (2004) les autorités budgétaires se
trouvent face à un dilemme pour augmenter les dépenses publiques
pour des raisons microéconomiques (redistribution ou affectation) et
supporter un coût macroéconomique élevé. A cet
effet, deux versions existent :
? une version faible, selon laquelle la réduction
permanente des dépenses publiques provoque à terme un effet
favorable sur le niveau de production, en raison de la réduction des
impôts qu'elle permet ;
? une version forte, par laquelle cet effet favorable est
anticipé, de sorte qu'une réduction des dépenses publiques
a immédiatement un effet favorable sur l'activité.
Cependant, l'incohérence dans le temps des politiques
économiques milite en faveur de la règle, au détriment de
la discrétion. Il peut en effet arriver que les responsables politiques
souhaitent annoncer à l'avance la politique qu'ils ont l'intention de
mettre en oeuvre, en vue d'influer les anticipations des décideurs
privés. Une fois que ces derniers agissent en fonction de leurs
anticipations, les mêmes responsables politiques peuvent être
tentés de renier leur engagement. Comprenant alors que les
décideurs politiques les ont trompés, qu'en termes plus
diplomatiques ils sont « incohérents dans le temps », les
décideurs privés se méfient dorénavant de toute
annonce préalable d'une politique économique. Pour rendre leurs
annonces plus crédibles, les responsables politiques choisiraient de se
lier à une règle prédéterminée de politique
économique (notamment la
100
politique budgétaire et monétaire), Kydland
(1977) ; Precott (1982) ; Olivier et François (2005).
Pour Mankiw (2007) par nature, la politique
discrétionnaire est souple. Si les décideurs politiques font
preuve d'intelligence et privilégient l'intérêt
général en même temps, il y a peu de raison de leur refuser
cette souplesse d'adaptation à la modification des conditions
économiques. Plusieurs auteurs (Eichengeen et Wyploz, 1998 ; Carton,
2005) ont montré que les règles budgétaires permettent
d'internaliser les externalités négatives que le déficit
public excessif ferait subir aux pays partenaires. Elles visent
également à assurer la crédibilité et la
cohérence temporelle de la politique fiscale, conformément aux
enseignements tirés des travaux de Barro et Gordon (1983). Selon
Giavazzi et Pagano (1988) le gouvernement ne sera pas crédible ; tant
qu'il ne se liera pas les mains. L'encadrement des politiques
budgétaires doit leur permettre de jouer pleinement leur rôle
d'ajustement à des chocs nationaux, conformément aux
préoccupations de la théorie des zones monétaires
optimales (Mundell, 1961).
Empiriquement, ces critères ont fait l'objet de
plusieurs évaluations notamment, dans la zone Communauté
Economique Monétaire d'Afrique Centrale (CEMAC), les travaux de Ondo
Ossa (2006) montrent qu'au regard de son fonctionnement, la CEMAC est un espace
anti-keynésien ; dans la mesure où la hausse des dépenses
publiques et du déficit budgétaire n'y a aucun effet sur la
croissance. La demande publique a donc nécessairement un effet plus
faible que la demande privée et la politique budgétaire ne peut
nullement y être utilisée pour stabiliser l'activité. De
plus, les externalités négatives
engendrées par des déficits excessifs de certains pays peuvent
avoir des répercussions sur les autres et provoquer dans le même
temps des pressions sur la banque centrale par le biais des dettes publiques.
À cet égard, un pays membre qui n'assure pas la
solvabilité de ses finances publiques fait automatiquement courir un
risque à la stabilité financière de la zone, à
travers un relèvement des taux d'intérêt de long terme.
101
Par contre, Farima et alii (2006) évaluent deux
critères budgétaires : la règle de lissage du taux
d'imposition et celle du lissage des dépenses publiques. À cet
égard, les auteurs montrent, à l'aide d'un modèle de
régression linéaire, que la pertinence des règles du Pacte
de Stabilité et de Croissance (PSC) peut être mise en doute. C'est
le cas en période de ralentissement lorsque les autorités
mènent une politique budgétaire discrétionnaire, mais
également quand ils cherchent à assurer la stabilisation de la
croissance grâce aux stabilisateurs automatiques. En présence
d'une croissance inerte, les surplus requis par la contrainte budgétaire
inter temporelle devraient forcer la politique budgétaire à
redevenir pro-cyclique. Dès lors, suivre les prescriptions de la
règle de taux d'imposition pourrait induire un biais inflationniste dans
la politique budgétaire.
Dans le cadre de l'UEMOA, Tanimoune et Plane (2004) estiment
des règles budgétaires simples afin de déterminer les
mécanismes budgétaires de cette zone. Il s'agit des règles
de déficit public et de la dette publique. En effet, le Pacte de
Solidarité, de Croissance et de Stabilité de l'UEMOA
prévoit que le déficit public de chaque Etat membre doit
être supérieur ou égal à 0% du PIB et son ratio de
dette publique inférieur à 70%. Les auteurs procèdent
alors à des estimations sur données de panel à effets
fixes en s'inspirant de la méthode proposée par Clarida Gali et
Gertler (1999), reprise et adaptée par Ballabriga et Martinez-Mongay
(2002) et Pommier (2003). À cet égard, les résultats
montrent que le choix du solde budgétaire de base comme critère
d'appréciation de la convergence au sein de l'UEMOA semble la priver
d'éléments d'appréciation supplémentaires dans la
compréhension et donc la gestion de la politique budgétaire. Par
ailleurs, suivant les différentes estimations, les stabilisateurs
automatiques sont très faibles. Enfin, il apparait que l'ajustement
budgétaire semble se faire principalement à partir des
dépenses publiques plutôt que sur les recettes fiscales.
Selon Kane (2013), dans la zone UEMOA, en raison de la nature
asynchrone des cycles, les débats sur la manière de concilier
l'hétérogénéité et la coordination
102
optimale apparaissent judicieux pour adopter de nouvelles
règles budgétaires qui allient souplesse et
crédibilité, tout en favorisant le rattrapage économique
par le biais de la synchronisation des cycles. Ainsi, convient-il dans un
contexte d'hétérogénéité, d'améliorer
la coordination des politiques budgétaires en vue d'une meilleure
synchronisation des cycles réels et nominaux ?
IV.2.3- La synchronisation des cycles
économiques (nominal et réel)
Une union monétaire avec des économies
hétérogènes peut, dans une perspective dynamique,
réduire les coûts des chocs asymétriques si elle
accroît la synchronisation des cycles économiques et si elle
favorise le développement du partage des risques entre les États
de l'union. Ces effets de l'union monétaire sont probables parce que
l'adoption d'une monnaie commune implique des changements structurels dans la
conduite des politiques économiques et dans l'intégration des
économies (Tapsoba, 2009). Dans une union monétaire
hétérogène, l'asymétrie des chocs et la nature
asynchrone des cycles économiques ne permettent pas la mise en oeuvre
d'une politique monétaire optimale ; parce que les effets d'une telle
politique deviennent contra-cyclique dans certains pays et pro-cyclique dans
d'autres. Frankel et Rose (1996) montrent que deux pays se caractérisant
par une forte intensité d'échange bilatérale ont tendance
à avoir des cycles économiques plus corrélés. Un
choc affectant une économie influe directement sur ses investissements
et par la suite d'une manière indirecte il affecte les économies
étrangères qui sont en relation commerciale avec cette
économie et vice versa.
La crédibilité de la politique économique
notamment la politique budgétaire apparait ainsi fortement liée
au degré de convergence des économies des pays membres (Kane,
2013). En effet, la présence de cycles asynchrones génère
des mécanismes asymétriques de propagation des impulsions
monétaires et de ce fait, des coûts différenciés de
la politique monétaire unique (Pinot, Polin, Seltz, 2000). Etant
donné qu'une union monétaire est propice à
l'intensification des cycles économiques (Frankel et Rose, 1998) la
concordance des cycles
103
économiques est devenue un critère important de
convergence ex post, qui a fait l'objet de nombreuses analyses
théoriques et de multiples vérifications empiriques.
Sur le plan théorique tout d'abord, après la
remise en cause dans les années 1970 de l'hypothèse
keynésienne par la nouvelle macroéconomie classique, relatives
à la concurrence parfaite et aux anticipations rationnelles soutenues
par Lucas (1973), la théorie du cycle réel s'est servie du cadre
néoclassique pour mettre les fluctuations économiques au centre
du débat théorique (Kydland et Prescott, 1982 ; De Long et
Plosser, 1983). La théorie du cycle réel se démarque donc
des thèses néoclassiques en étudiant spécifiquement
les fluctuations économiques. Elle s'écarte aussi du
modèle de Lucas où la source des fluctuations réside dans
les variations aléatoires et non anticipées du stock de monnaie.
Ainsi, les cycles économiques sont engendrés par les
réponses (optimales) des agents à des chocs réels,
essentiellement technologiques. La théorie des cycles réels nie
l'existence des « trends » et soutient l'idée que des chocs
sur les économies ont des effets permanents et non temporaires ; de
sorte qu'on ne revient pas après cycle sur la trajectoire de long terme
qui le précédait (Kane, 2013).
Sur le plan empirique, en utilisant les modèles
univariés (MSAR) et multivariés (MSVAR) pour analyser les cycles
de l'indice de la production industrielle dans six pays de l'OCDE,
Cléments et Krolzig (2003) ont abouti à la détermination
de trois régimes de cycles et à l'identification du cycle commun.
L'avantage de cette étude est qu'elle montre la synchronisation des
cycles industriels avec le cycle communautaire. Elle met aussi en exergue le
comportement des pays face à l'expansion ou à la récession
de la zone européenne. Dans la même logique, Chauvet et Piger
(2003) ont identifié les phases (croissance et décroissance) et
les probabilités de transmission de la production industrielle
américaine. Quant à Ballone et al. (2006) ils ont construit un
indicateur stochastique des régimes de récession et
d'expansion.
104
IV.2.4- Le fédéralisme
budgétaire
Le fédéralisme budgétaire fait
référence au développement d'un système
budgétaire centralisé qui intègre tous les membres d'une
fédération ou d'un État fédéral, et à
la manière de répartir les différentes fonctions des
finances publiques entre les différents échelons (Whyman et
Bainbridge, 2004). La théorie classique du fédéralisme
budgétaire a identifié deux raisons pour lesquelles une union
monétaire devrait avoir une politique budgétaire
centralisée : la stabilisation des chocs asymétriques et la
redistribution du revenu.
En cas de chocs asymétriques, le recours à la
politique budgétaire est nécessaire lorsqu'une
fédération est touchée par ce choc. Dans ce cas, la
politique monétaire, désormais unifiée, ne peut être
utilisée pour stimuler la demande locale. Les budgets régionaux
peuvent générer une demande additionnelle et les politiques
budgétaires discriminatoires peuvent avoir des effets de distorsion sur
l'offre. Une certaine forme de coordination horizontale de la politique
économique est par conséquent souhaitable (Ackrill, 2004 ;
Collignon, 2001). Dans une zone monétaire
hétérogène selon les critères traditionnels, la
survenance des chocs asymétriques rend difficile la conduite des
politiques budgétaires nationales régies par des règles
supranationales. Il semble que pour juguler ces chocs, tout en évitant
les effets externes de la politique budgétaire, la meilleure solution
est de centraliser les fonctions de stabilisation et de redistribution de la
politique budgétaire dans la mesure où celles-ci seront plus
efficaces au niveau fédéral qu'à l`échelle
décentralisée ou nationale (Oates, 1972 ; Zumer 1998).
Par ailleurs, la théorie du fédéralisme
budgétaire depuis Musgrave (1959) a mis l'accent sur l'augmentation de
bien-être résultant de la centralisation des fonctions
stabilisatrice et redistributive des finances publiques, et de la
décentralisation de la fonction allocative. Selon lui, l'Etat
démocratique doit chercher à corriger la répartition
initiale des revenus dans un sens conforme à la vision que la
société se fait de la justice sociale. Pour ce faire, il dispose
évidemment au premier chef de la fiscalité. Mais pour
améliorer la situation des
105
catégories sociales jugées a priori comme
défavorisées, il peut également utiliser ses
dépenses et peut in fine combiner les deux. Par exemple, en France, la
politique d'aide aux handicapés passe par de multiples canaux qui
mobilisent les dépenses au travers du versement de l'allocation aux
adultes handicapés et la fiscalité ; puisque les entreprises qui
n'emploient pas un certain quota de handicapés doivent verser une somme
compensatoire à l'Etat.
Des documents européens plus anciens, comme les
rapports Mac Dougall (1977) et Delors (1989) ont attribué un rôle
de premier plan à la politique budgétaire à la fois pour
des raisons macroéconomiques intérieures et afin d'être en
mesure de participer au processus de coordination de la politique
internationale, la Communauté a besoin d'une structure pour
déterminer un dosage cohérent des politiques monétaires et
budgétaires (Delors, 1989). Par ailleurs, le rapport du Comité
Delors (1989) a souligné le risque de déficits budgétaires
excessifs en l'absence de contrôle supranational, déficits qui
mettraient en question la discipline monétaire. La formation d'une union
monétaire influe sur l'incitation à des déficits
excessifs, et on peut penser que le bon fonctionnement des marchés de
capitaux interdira un endettement continu. Sur un marché de capitaux
libre, des épargnants bien informés imposent une certaine
discipline en exigeant une rémunération plus élevée
pour les sommes qu'ils sont disposés à prêter, et
éventuellement en refusant de prêter à des gouvernements
trop endettés.
IV.3- Quelques résultats empiriques dans les unions
monétaires
Loewy (1988) ; Nordhaus (1994) à l'aide de la
théorie des jeux arrivent à la conclusion qu'en cas de choc
d'offres dans une économie, le niveau de déficits
budgétaires et de taux d'intérêt d'équilibre
augmente par rapport à leur niveau d'équilibre parétienne.
Mais ce résultat est soumis aux conditions telles que : les
réactions des autorités monétaires et budgétaires
ne sont pas coordonnées ; les agents sont rationnels par rapport au
niveau d'inflation et de variabilité de la production qui en
résulterait (équilibre de Nash). Par ailleurs, Carlino et Defina
(1998) signalent à partir d'un modèle VAR structurel aux
Etats-Unis que les
106
gouvernements des pays réagissent différemment
aux impulsions des chocs monétaires. Ils trouvent l'origine des
différences de réponses dans
l'hétérogénéité des pays en termes
d'industries.
Vickers (2000) a souligné que la croissance
économique dépend du fonctionnement de l'économie
réelle et qu'il n'existe pas de magie monétaire qui peut
provoquer la croissance économique et donc la coordination a peu
d'importance pour stimuler la croissance. Mais, il reconnait que la politique
monétaire peut contribuer à des conditions d'une croissance
durable par le maintien de la stabilité des prix. La récente
crise économique et financière de la zone euro semble remettre en
cause les solutions théoriques de coordination des politiques
économiques dans les unions monétaires.
Les travaux du (FMI, 2012) portant sur l'UEMOA, ces
dernières années, démontrent que la stabilité des
prix n'est pas suffisante pour une stabilité macroéconomique
globale qui impliquerait une croissance économique forte et durable. En
comparant les pays d'Afrique subsaharienne à ceux de la CEMAC, la
stabilité des prix obtenue par la zone UEMOA ne s'est pas
accompagnée de la croissance économique espérée sur
la période 2006 à 2011. Par ailleurs, le taux de change effectif
réel de la zone a progressé de 4,8%, entre 2002 et 2011, soit une
détérioration moyenne de la position concurrentielle de 0,5%
chaque année (BCEAO, 2012)27. Cette perte de
compétitivité serait non seulement due à
l'appréciation du franc CFA par rapport aux monnaies des partenaires
commerciaux de l'union, depuis 2002 avec l'appréciation de l'euro, mais
aussi à une faiblesse de coordination des politiques économiques.
Rodrik (2008) a fourni une preuve empirique que la sous-évaluation d'une
monnaie stimule la croissance économique surtout lorsqu'il s'agit d'un
pays en développement. De plus, l'auteur souligne l'importance de la
coordination des institutions.
27 Rapport sur la compétitivité
des économies de l'UEMOA sur la période 2002-2011
107
En définitive, la gestion des unions monétaires
repose sur une organisation institutionnelle structurée permettant de
concilier la centralisation des opérations monétaires et la prise
en compte des impératifs économiques et politiques
spécifiques à chacun des pays membres. Une meilleure coordination
des politiques économiques, plus particulièrement les politiques
budgétaires, conduit à une amélioration de
l'efficacité de la stabilisation des chocs, Muscatelli et Tirelli,
(2005).
Cependant, la meilleure qualité de la stabilisation
macroéconomique s'obtient à condition que la banque centrale
stabilise les chocs d'offre symétriques et que les gouvernements
s'occupent des chocs de demande nationaux, Uhlig (2002) par des actions
contra-cycliques et à travers les stabilisateurs automatiques, Buti et
al. 1998, 2001). Mais Vilieu (2000) soutient l'idée contraire selon
laquelle dans une union monétaire qui s'élargie, la coordination
budgétaire perd en efficacité si le degré
d'asymétrie des chocs augmente. Les implications de l'équilibre
budgétaire intertemporel des gouvernements et les problèmes de
faiblesse de la coordination constituent les principaux enjeux de l'interaction
stratégique entre la politique monétaire et budgétaire.
108
CONCLUSION
De nombreux critiques peuvent être formulés
à l'encontre des courants économiques jusque-là tenaces de
la pensée. La politique budgétaire, quel que l'effet produit sur
l'économie, reste toujours un important levier pour les pays en
développement où l'essentielle du secteur économique est
dominé par encore le public. Certes, la théorie des anticipations
rationnelles tient la logique des fondements microéconomiques, mais pour
des économies où la dimension sociale telle que les croyances
religieuses et l'altruisme figurent en bonne place dans les prises de
décision, cette rationalité est parfois limitée. De
même, le caractère pro-cyclique de la politique budgétaire
sur l'économie, soutenu par les néo-keynésiens n'est pas
toujours vérifié suivant les périodes. Dans ce sens,
l'effet de neutralité budgétaire remet en cause leur propre
approche dans la littérature économique. Néanmoins les
controverses théoriques et empiriques mises en avant dans la
littérature économique, les chercheurs s'accordent à
l'unanimité que la connaissance des mécanismes de transmission
budgétaire est importante pour les gouvernements et à contrario
leur méconnaissance peut être dommageable pour l'économie
des pays.
La présente revue de la littérature souligne la
difficulté des pays membres d'une union monétaire comme l'UEMOA
à mutualiser leurs politiques budgétaires. Parmi ces
difficultés on peut noter essentiellement les sources
d'hétérogénéité structurelle, car elle
implique des mécanismes de transmission asymétriques des chocs
entre les différents pays de l'union. L'état des lieux nous a
permis également de comprendre que les effets des politiques
budgétaires impliquent plusieurs aspects économiques et sociaux
(le plein-emploi, la croissance du revenu, l'inflation).
Deux (02) articles principaux fondent notre revue de la
littérature. Le premier est celui de R. Mundell en 1961, avec la
théorie de la zone monétaire optimale, une idée selon
laquelle l'incidence des perturbations sur les pays en union doit être un
guide fondamental pour choisir les contours optimaux des zones
monétaires.
109
Le coût provient principalement de la renonciation
à une politique monétaire spécifique et de la perte de
l'instrument du taux de change comme variable d'ajustement face aux chocs
extérieurs. Le second article est celui de P. Krugman. Il met en exergue
la structure des secteurs qui a fait l'objet de nombreuses études
économiques dans le sillage de l'économie géographique. Il
a popularisé les « effets-frontières » et les
externalités. Analysant la concentration du secteur automobile
américain, il montrait le risque que les forces d'agglomération
et de spécialisation renforcent le degré de dispersion
intra-zone. Cette thèse s'inscrit en interface entre l'économie
des finances publiques, l'économie géographique et
l'économie internationale.
Beaucoup d'approches méthodologiques ont
été utilisées pour traiter des questions relatives aux
politiques budgétaires et leurs impacts sur l'économie. Il s'agit
entre autres des modèles VAR, des modèles DSGE et des
modèles NIGEM. Cependant, les modèles d'équilibre
général intertemporels stochastiques (DSGE) connaissent des
limites. Par exemple, la première génération de
modèles DSGE imposait tant de contraintes sur les données qu'ils
s'ajustaient mal aux observations. Cela a longtemps entretenu l'idée
qu'ils constituaient essentiellement des curiosités théoriques de
peu d'utilité dans une démarche quantitative. Par contre, les
modèles VAR ont pris un ascendant considérable sur les
modèles DSGE, dans la mesure où ils ont été
perçus comme des guides extrêmement utiles pour la
modélisation théorique. En effet, les modèles VAR
permettent, moyennant l'introduction d'un nombre minimal de restrictions,
d'identifier certains chocs spécifiques et structurels (Sims 1980 ;
1992) ; Christiano 1989 ; Eichembaum et Evans 1999 ; Blanchard et Quah 1989 ;
Gali 1999) et d'en dériver les effets sur les variables
agrégées. Minea et Villieu (2011) soulignent que la
méthodologie VAR se révèle particulièrement
pertinente pour analyser des chocs budgétaires et monétaires.
Elle permet de distinguer les différents effets d'un choc
spécifique. Pour les raisons ci-après, nous prenons appui sur les
modèles Vectoriels Auto-Régressifs (dits modèles VAR) sur
données de panel. Ce dernier nous servira à faire
l'évaluation des effets de débordement.
CHAPITRE III : EVALUATION DES EFFETS DE DEBORDEMENT
BUDGETAIRES DANS L'UEMOA
110
111
La modélisation économétrique classique
à plusieurs équations structurelles a connu beaucoup de critiques
(Granger ; 1969) et Sims (1980) et des défaillances face à un
environnement économique très perturbé. Les
prévisions élaborées à l'aide de ces modèles
se sont révélées très médiocres. Les
critiques principales formulées à l'encontre de ces
modèles structurels concernent la simultanéité des
relations et la notion de variable exogène. La représentation VAR
(Vector-Autorégressive)-généralisation des modèles
AutoRegressifs (AR) au cas multivarié - apporte une réponse
statistique à l'ensemble de ces critiques.
Il est admis que beaucoup de modèles existent pour
évaluer l'ampleur des externalités budgétaires. Plusieurs
d'entre eux ont été expérimentés notamment, les
modèles à retard échelonné ou modèles
autorégressifs développés par Sims (1980). En
économie, il est fréquent que la valeur présente de la
variable expliquée dépende des valeurs passées des
variables explicatives. Par exemple Duesemberry (1949) expliquait la
consommation comme une variable qui dépend du revenu de la
période, mais aussi des revenus des périodes
précédentes. Ce phénomène peut être
modélisé en intégrant les effets de retard. Selon le
principe du multiplicateur keynésien, les effets budgétaires
agissent sur l'économie durant la période en cours (effet
à court terme), mais aussi sur les périodes à venir (effet
à long terme).
Ce chapitre cherche à évaluer l'ampleur des
débordements budgétaires dans le cadre de l'UEMOA. Il est
structuré autour de trois grandes sections. La section (I) fait la
présentation générale du modèle
autorégressif sur données de panel, avant de procéder dans
la section (II) à la spécification le modèle à
estimer à partir des variables ciblées pour enfin
présenter dans la section (III) les résultats et
interprétations économiques.
SECTION I : PRESENTATION GENENRALE D'UN VAR EN
PANEL
La méthodologie adoptée pour une
évaluation correcte des effets d'un choc budgétaire sur les
variables économiques des pays en union est la modélisation
à partir du vecteur Autorégressif sur données de panel.
Elle s'inspire d'un modèle
112
proposé par Leeper (1991) basé sur la
théorie budgétaire du niveau des prix. Le modèle est
augmenté à la suite par Leith et Wren-Lewis (2000), puis des
effets d'anticipations adaptatives introduites par Creel et Sterdyniak
(2002).
E :
Dans cette section, il est question d'abord de
présenter le modèle théorique, de justifier ensuite le
choix d'un modèle VAR et de faire enfin une description d'un VAR sur
données de panel, puisqu'il est de loin le plus utilisé dans des
cas similaires.
7c = E #177; 1
7c #177; v y _ y
( ) ( 2)
I.1- Présentation du modèle
théorique
Le modèle part d'une équation de la demande usuelle
qui inclut un effet de
richesse positif lié à la détention par les
ménages de titres de la dette publique.
Toutes les variables sont exprimées en termes
réels.
représente le PIB
représente le taux d'intérêt
représente la dette publique
représente les recettes fiscales
représente le solde primaire
représente les dépenses publiques telles que
L'indice « -1 » indique une variable retardée
d'une période. Les paramètres
sont positifs.
b = b
-- 1 ( 1
#177; r ) --
s (
3)
*
L'offre agrégée relie l'inflation à
l'écart entre le PIB et le PIB potentiel soit une courbe dite «
à la Lucas » :
est l'opérateur d'anticipation.
L'équation d'accumulation de la dette publique est :
Les deux équations suivantes précisent les
règles poursuivies respectivement par le gouvernement et la banque
centrale :
L'équation (4) établit que le gouvernement
réagit aux déviations de la dette publique par rapport à
son niveau d'équilibre stationnaire en modifiant les impôts,
tandis que l'équation (5) est de « règle de Taylor »
usuelle pour des valeurs de paramètres et positives.
Pour obtenir la sixième équation, on
procède à la log-linéarisation de la dette et de
l'inflation par rapport à l'état stationnaire (Creel et
Stendyniak, 2002). Le modèle peut être résolu de
façon standard :
? b
* ? ? h ? b *
? ?
*
r '
? ? ?
? ?? b ' ?
1 1 ? ?? ? b ?
? ? ? ? 6?
?
??
db
d?
'
'
?
? ?
?
? ? ? ??? 1?
' '
*
? ? ? ? ? ? ?
1 ? ?? 1 ? ??
? ?
??? ? A
h ? ?
? ? ? ? ? ?
?
Où l'apostrophe indique une déviation par
rapport à l'équilibre et dx est la dérivée
de la variable x par rapport au temps. En anticipations rationnelles,
le système
est stable si .
? 0 et h
?
? ? 1 #177; ? #177;
*
r b
* ?
On peut montrer qu'en anticipations rationnelles
(c'est-à-dire, si , de façon
à obtenir une courbe de Phillips augmentée des
anticipations), la résolution du
modèle diffère selon les valeurs respectives des
paramètres . En effet, le système est stable
si :
~ 0 et h ~
(
1 * ) -F r
?
?
#177;b
Où
?
?
b
*
?
113
-F
b
*
-F
?
114
Si sont tous deux élevés, la première
combinaison stable des politiques
budgétaire et monétaire s'applique et la
solvabilité de l'État est assurée par le gouvernement.
Si les deux paramètres sont faibles, la
solvabilité de l'État est assurée par la variation des
prix : une politique budgétaire perpétuellement expansionniste
accroîtra la demande via l'effet de richesse lié à
la dette, ce qui provoquera une hausse de l'inflation qui viendra
déflater la valeur de la dette publique.
En dehors de ces deux configurations, l'économie entre
dans une dynamique instable. Supposons, par exemple, que le gouvernement assure
sa solvabilité, mais que la banque centrale dispose d'une aversion
faible vis-à-vis de l'inflation
(c'est-à-dire ). Dans ce cas de figure,
l'économie subirait une boucle
inflationniste infinie : la hausse de l'inflation
réduirait la valeur réelle de la dette, ce qui induirait une
politique budgétaire expansionniste aux effets inflationnistes, via
la demande. Dans le cas symétrique, l'économie subirait une
dérive perpétuelle de la dette publique : sa hausse, par ses
effets inflationnistes via l'effet de richesse, engendrerait une
hausse du taux d'intérêt réel qui, à son tour,
augmenterait la dette publique.
Etant donnée la structure des relations des
équations, et, on voit
nettement que la valeur prise par les variables endogènes
( ) à l'instant
s'explique aussi par leurs valeurs retardées d'une ou
de plusieurs périodes. La mention « retards
échelonnés » est justifiée par le fait que des
variables explicatives usuelles sont intégrées au modèle
en utilisant leurs valeurs retardées et la mention «
autorégressif », à cause de la présence de la
variable expliquée retardée parmi les variables explicatives.
I.2- Choix d'un modèle VAR en panel
Le choix de la modélisation VAR est justifié par
le fait qu'il procure deux outils majeurs d'analyse s'appuyant sur la dynamique
du modèle : à savoir l'analyse
115
des fonctions de réponses impulsionnelles qui
permettront notamment de déceler l'impact sur les variables
macroéconomiques d'un choc budgétaire et la décomposition
de la variance, qui permettra de mesurer l'amplitude de l'effet de
débordement sur les économies des pays. Le caractère
dynamique du modèle à partir des données de panel fournit
un cadre d'analyse adapté pour mesurer les effets de débordement
budgétaires. Dans le cadre des unions monétaires, une approche
plus récente consiste à utiliser un VAR en panel. Canova et
Ciccarelli (2013) en font une description ou analyse assez exhaustive. Il
présente des avantages. La méthodologie VAR en panel permet de
simuler des chocs structurels (en l'occurrence des chocs issus de
décisions de politique budgétaire indépendantes entre
elles et de l'environnement macroéconomique) pour tenter de confirmer ou
d'infirmer une explication monétaire ou budgétaire des
fluctuations économiques (Bernanke, 1986 ; Blanchard et Watson, 1986 ;
Blanchard, 1989 ; Blanchard et Quah, 1989). Du point de vue
économétrique, les chocs exogènes peuvent être
identifiés à partir des résidus d'équations
estimées. À l'aide de quelques hypothèses fondées
sur la théorie économique, on peut transformer ces chocs en des
termes interprétables comme les chocs de politiques budgétaires.
C'est un modèle qui met en évidence les liens existants entre un
groupe de variables à un instant donné, leurs valeurs
retardées et d'autres variables jugées exogènes.
Y it = liit + r' it
(L)Y it + ? it (
7)
I.3- Présentation d'un modèle VAR
Le modèle VAR sur données de panel
présente deux avantages principaux, non seulement il permet de palier le
problème d'endogénéité des régresseurs, mais
aussi de contourner le problème de la faible taille des séries et
de rendre les résultats asymptotiques plus robustes par la combinaison
des dimensions spatiale (les pays) et temporelle. Le modèle
réduit prenant en compte toutes les spécificités
(individuelles et temporelles) prend la forme réduite suivante :
116
Où est un vecteur de variables stationnaires, est une
matrice
polynomiale définie sur l'opérateur retard et
ayant la forme fonctionnelle : Yjt =p +
r + p + + s
i i j, j d t (
8)
et ; sont des matrices de coefficients spécifiques
individuels et aux périodes et est le terme d'erreur idiosyncratique
(de moyenne nulle, à
variance constante, non auto-corrélée et non
corrélée d'un individu à un autre). Cette
spécification du modèle VAR sur données de panel est la
plus générale qui soit. Toutefois, l'adopter impliquerait estimer
un nombre très élevé à variables,
périodes et individus, il faudrait estimer coefficients,
ce qui est
généralement impossible au regard des tailles
d'échantillons plus faibles. Par ailleurs, à l'état
actuel, les logiciels d'économétrie ne permettent pas d'estimer
des modèles VAR prenant en compte toutes les spécificités
relatives aux données de panel. Au regard de ces deux
considérations, la procédure consiste à limiter les
hétérogénéités considérées
dans le modèle de manière à rendre son estimation
possible, sans toutefois aliéner la qualité des résultats
obtenus.
0 ( )
Dans le cadre de ce travail,
l'hétérogénéité des individus est prise en
compte à travers des effets individuels inobservables , qui affectent la
dynamique de croissance des pays de l'union, alors que les effets temporels,
sont destinés à
capter des chocs qui sont symétriques à tous des
pays de l'union. Ainsi, le modèle prend la forme suivante :
jt
Toutefois, tel que spécifié,
l'élasticité de ce modèle pose un problème
fondamental d'endogénéité ; car il existe une
corrélation entre l'un des régresseurs (la variable
endogène retardée) et la perturbation ; que le modèle soit
écrit en niveau, en différence première ou en écart
aux moyennes individuelles (Sevestre, 2002). En outre, Sevestre et Trognon
(1993) montrent que dans ce cas de figure, les
estimateurs usuels : MCO, de MCG, intra-individuel (Withim) et
inter-individuel (Between) ne sont pas convergent à distance finie. Une
estimation convergente de ce modèle est obtenue par la méthode
des variables instrumentales (VI) et la méthode des moments
généralisés (GMM). Dans le cadre de ce travail, cette
dernière est mise en pratique.
? ?
(L1) 1-12 (L2) 1-13(L)
?
Par exemple, supposons que : soient 3 variables endogènes
; soit 3 pays et
?
?
(L1) 1-32(E) 1-33(E) ?
soit 2 variables exogènes. Le VAR en panel s'écrit
comme suit :
(L1) 1-22(L2) 1-23(L3)
Fil d1
+ + +
U3 d3
1-11
?1
Y1
t
+
=
?
1-21
?2
Y it
Y2
t
? 3
Y3
t
?
1-31
117
Ainsi, les trois caractères du VAR en panel apparaissent :
l'interdépendance ; des interdépendances statiques et des
hétérogénéités transversales.
SECTION II : SPECIFICATION DU MODELE ET SOURCES DE
DONNEES
Etant donné que la modélisation VAR est quelque
peu athéorique, le choix des différentes variables est mû
par les objectifs visés dans ce travail. Pour estimer le modèle,
il convient, premièrement de spécifier les variables
supposées capter les chocs au regard de la littérature
économique, deuxièmement, présenter la méthode
d'estimation des coefficients du modèle et, troisièmement,
décrire les sources de données.
dette publique nette? dp?, du PIB réel
approximer ici par le taux de croissance II.1- Spécification
des variables du modèle
La modélisation proposée ici prend en compte
d'abord les quatre (04) variables traditionnelles du modèle de Leeper
(1991), à savoir le surplus primaire(sp), la
réel et le taux d'inflation qui cerne les aspects
relatifs à l'effet-prix suite à un choc budgétaire. Ces
variables trouvent déjà leurs fondements dans le modèle
118
théorique. Par ailleurs, on sait implicitement que le
solde primaire est obtenu à partir de la différence entre les
recettes totales et les dépenses totales. Du coup, les variables
dépenses publiques et recettes publiques apparaissent comme des
variables de politiques budgétaires.
- Les variables « dépenses publiques »
pour identifier le choc budgétaire : en effet, tous les pays de la
zone UEMOA se sont lancés dans des programmes de soutien à la
relance de la croissance économique. De ce fait, il y a eu un choc
budgétaire à travers un accroissement des dépenses
publiques. Nous rappelons qu'au regard de la définition du PIB
(production de biens et services), les dépenses en biens et services des
administrations publiques (APU) sont de nature sensiblement différente
des transferts en espèces vers les agents privés. En
considérant le compte des APU (cf au tableau n°5), les emplois
correspondent au total des transferts et des dépenses
publiques .
Tableau 5 : Compte simplifié des
APU
Emplois
|
Ressources
|
Transferts
|
Recettes fiscales et non fiscales
|
Dépenses publiques
|
- La variable « recettes publiques » : ici,
l'accent est mis sur la partie fiscale des recettes pour la bonne et
simple raison qu'elles dépendent du niveau de l'activité
économique du pays (ici le PIB) ;
- La variable « importations » : c'est dans
l'optique d'intégrer dans le modèle la dimension du commerce
extérieur. Elle a un impact sur l'investissement et l'approvisionnement
de l'économie nationale ;
- La variable « crédit intérieur »
: c'est pour mieux cerner l'effet d'un choc budgétaire sur
l'activité bancaire ;
- La variable « investissement privé »
mesure l'effet d'un choc budgétaire sur l'investissement du secteur
privé par le canal du taux d'intérêt ;
119
Après spécification, le modèle à
estimer d'ordre (p) est représenté par le système
linéaire suivant :
Où est le vecteur de variables endogènes ; est
un vecteur de variables
exogènes ; sont les effets aléatoires et sont
les termes d'erreurs. Les
paramètres à estimer sont les composantes des
matrices et.
Les hypothèses sous-jacentes au modèle sont les
suivantes :
; = =0 pour .
Nos hypothèses de recherche sont les suivantes :
H1 : L'ampleur des effets de
débordement budgétaires est tributaire du degré
d'hétérogénéité des structures
économiques dans la zone.
H2 : Les dépenses publiques induisent
un effet plus important sur la croissance économique que les recettes
publiques en raison d'une harmonisation de plus en plus poussée des
politiques fiscales dans l'UEMOA.
*H3 : Les canaux de transmission des chocs
budgétaires peuvent différer d'une union monétaire
à l'autre, compte tenu de leurs spécificités.
II.2- Méthode d'estimation
Il est important de rappeler que l'estimation d'un VAR sur
données de panel passe par plusieurs étapes parmi lesquelles on
pourrait noter : le test de stationnarité, la détermination du
nombre optimal de retards, le test de causalité au sens de granger,
l'estimation des coefficients par la méthode des moments
généralisés, le test de stabilité pour la
validation du modèle, la décomposition de la variance de
prévision par la méthode de Cholesky et les fonctions de
réponses impulsionnelles.
120
? Test de stationnarité
En ce qui concerne justement la stationnarité des
variables, celles-ci sont situées, pour une série donnée,
selon qu'il existe des dépendances interindividuelles ou qu'il n'en
existe pas. En effet, l'une des problématiques liées aux
données de panels est la prise en compte des éventuelles
dépendances interindividuelles. La question est tout simplement de
savoir si l'on autorise la présence d'éventuelle
corrélation entre les résidus des différents individus du
panel (Hurlin et Mignon, 2005). Selon la réponse, on peut opposer deux
générations de test à savoir : les tests de
première génération (Levin, Lin et Chu [2002] ; Im,
Pesaran et Shim 1997 ; 2002 ; 2003 ; Maddala et Wu 1999) dans les cas
d'indépendance entre les individus, et les tests de seconde
génération (Bai et Ng 2001 ; Moone et Perron, 2004 ; Pesaran 2003
; Choi, 2002), adaptés aux cas de dépendance entre les individus.
Dans le cas présent, pour chaque variable du module, le test de Pesaran
(2004) de corrélation inter-individuelle est effectué. En
fonction de ses résultats, est fait, soit le test de
stationnarité de Pesaran (2003) (dans le cas de dépendance
inter-individuelle), soit le test de première génération
de Levin, Lin et Chu (2002) (dans le cas d'indépendance
interindividuelle).
AIC ( p ) = ln
{ det c ] + 2 ( 1 1 )
? Détermination du nombre de retard
optimal
Pour déterminer le nombre de retard optimal d'un VAR
d'ordre (p), on peut utiliser plusieurs méthodes. Une procédure
type consiste à estimer tous les modèles VAR pour des ordres (p)
allant de 0 à h fixé de façon
arbitraire. Pour k
] ( ) ( 1 2)
k p T
2 ln
2
T
chacun de ces modèles, on calcule les fonctions (Akaike,
1979), et
(Schwarz, 1978) de la façon suivante :
ln[
det ? +
SC=
T
121
Où T est le nombre d'observations, le nombre de
variables du système, la
matrice de variance covariance des résidus estimés
du modèle.
? Test de causalité au sens de Granger
Une des questions que l'on peut se poser pour un VAR sur
données de panel est l'existence d'une relation de causalité
entre les variables du système. Ici, nous utilisons le test de
causalité au sens de Granger (1969)28 qui est le plus
fréquemment utilisé en économétrie. Elle met en
relation les différentes variables du modèle par calcul d'un
ratio de vraisemblance à partir de la relation suivante :
, qui suit un à degrés de liberté. Si
? Estimation des coefficients par la méthode
GMM
La méthode des moments généralisés
en panel dynamique était introduite par Holtz-Eakin, Newey et Rosen
(1988), Arrelando et Bonde (1991) et Arrlando et Bover (1995). Elle se
caractérise par plusieurs avantages spécifiques au niveau de la
nature du panel de données et au niveau des solutions qu'elle apporte.
En effet, la méthode GMM en panel dynamique permet d'apporter des
solutions aux problèmes de biais de simultanéité, de
causalité inverses et de variables omises. Cette méthode permet
à la fois de contrôler les effets spécifiques individuels
et temporels et les biais d'endogénéité des variables
surtout lorsqu'il existe un ou plusieurs retards de la variable
dépendante figurant comme variable explicative (Sawsen 2006). Cette
méthode permet de tenir compte d'une probable autocorrélation au
sein des erreurs (Hansen, 1982). Les biais d'endogénéité
sont corrigés par l'utilisation de variables instrumentales. Leur
utilisation peut réduire le degré de liberté au sein du
modèle. Pour y remédier, Holtz-Eakin,
28 On dit que la variable cause au sens de Granger la
variable si et seulement si la
connaissance du passé de améliore la
prévision de à tout horizon.
122
Newey et Rosen (1988) proposent d'utiliser comme instruments
les variables des observations retardées, supposées ainsi non
corrélées aux termes d'erreurs.
? Test de stabilité du modèle pour
validation
Pour valider la stabilité du PVAR, on passe par le test
de racine unitaire qui assure que les valeurs associées aux variables
sont toutes inférieures à l'unité.
? Décomposition de la variance par méthode
de Cholesky
Etant donné que la méthode de
variance-covariance des erreurs est rarement diagonale, il est
nécessaire de décomposer les résidus de sorte qu'ils
deviennent orthogonaux, de manière à isoler les chocs d'une
variable du système (Love et Zicchino, 2006). Ce calcul est fait
à travers la décomposition de Cholesky. L'hypothèse qui
sous-tend la décomposition de Cholesky est celle selon laquelle les
variables listées en premier dans le modèle VAR affectent celles
qui viennent par la suite aussi bien de manière contemporaine que de
manière différée, tandis que celles qui sont
listées en dernier affectent les précédentes seulement en
différée. En d'autres mots, les variables qui apparaissent en
premier dans le système sont plus exogènes, tandis que celles qui
apparaissent par la suite sont plus endogènes (Love et Zicchino,
2006).
? Fonctions de réponses
impulsionnelles
Une fois les coefficients du modèle estimés, les
fonctions de réponses impulsionnelles sont calculées. Elles
décrivent le comportement d'une variable à des chocs dans une
autre variable du système, les chocs sur les autres variables restant
nulles. Un choc sur une variable peut affecter directement celle-ci, mais il se
transmet également à l'ensemble des autres variables au travers
de la structure dynamique du VAR.
123
II.3- Présentation des sources de données
Les données utilisées proviennent de plusieurs
sources. D'abord la base de données de la BCEAO publiée dans le
site de l'UEMOA, a permis d'obtenir les statistiques sur les dépenses
publiques, les recettes publiques, les importations, le crédit à
l'économie et la dette publique en vigueur dans la zone. Ensuite la base
de données du Word Development Indicator (WDI) publiée le 21
décembre 2016 dans le site de la Banque Mondiale, a permis d'obtenir les
données sur le taux de croissance réelle, l'investissement
privé et l'inflation. Et enfin la base de données émise
par le Fonds Monétaire International (FMI) qui a été
utilisée pour compléter les valeurs manquantes présentes
dans les précédentes bases de données.
Plus précisément, la base de données qui
servira dans l'estimation est constituée de sept (07) pays sur les huit
pays de l'union, pour lesquels ont été établies des
observations sur la période de 1980 à 2014, soit 35 ans. En
somme, il s'agit de (8 variables pour le modèle) ; (7pays) et (35 ans)
soit au total 2205 observations. Nombre suffisamment grand pour la validation
des résultats asymptotiques des estimations. Il est à noter que
la Guinée Bissau est exclue de l'analyse économétrique
pour des raisons liées à ses données aberrantes.
SECTION III : PRESENTATION DES RESULTATS ET
INTERPRETATIONS
Après une analyse tendancielle des profils
économiques pour les pays de l'union dans le premier chapitre, nous
procédons à l'approche économétrique des
résultats. Cette section a pour objet la présentation des
résultats et leurs interprétations. Elle est composée de
trois sous-titres. Il s'agit d'abord de la présentation des
résultats de la modélisation, ensuite de l'analyse des chocs
budgétaires et enfin de la mesure de l'ampleur des effets de
débordement budgétaires et des canaux de transmission.
124
III. 1- Présentation des résultats de la
modélisation
Ici nous allons exposer les résultats issus des
différents tests selon la méthodologie dégagée plus
haut. Certains sont intégralement présentés dans le corps
du texte et d'autres renvoyés en annexe pour complément
d'informations.
o Test de stationnarité par la méthode de
Levin lin Chu
Parmi les tests de première génération,
celui de Levin Lin et Chu est adapté, non seulement pour sa puissance,
mais surtout parce qu'il prend en compte
l'hétérogénéité des différents
individus du panel. Pour tester la stationnarité des variables, la
méthode permet de vérifier deux hypothèses, en
l'occurrence l'hypothèse Ho : les séries ne sont pas
stationnaires contre l'hypothèse alternative ; H1 : les séries
sont stationnaires. Le tableau suivant résume la situation.
Tableau 6 : Test de
stationnarité
Variables
|
Constant ou Trend
|
Z- score
|
P-Value
|
Retards
|
Taux de croissance
|
Oui - constant
|
-1,668
|
0,047
|
1
|
Taux d'inflation
|
Oui-constant
|
-2,854
|
0,022
|
1
|
Dette publique/PIB
|
Oui-constant
|
-4,076
|
0,00
|
1
|
Crédit à l'Economie/PIB
|
Oui-constant
|
-5,602
|
0,00
|
2
|
Importations/PIB
|
Oui-constant
|
-17,257
|
0,00
|
2
|
Solde budgétaire/PIB
|
Oui-constant
|
-6,089
|
0,00
|
1
|
Investissement privé/PIB
|
Oui-Trend
|
-2,549
|
0,0054
|
1
|
Dépenses pub/PIB
|
Oui- constant
|
-8,381
|
0,00
|
1
|
Recettes pub/PIB
|
Oui- constant
|
-4,706
|
0,00
|
1
|
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Le tableau n°6 montre que toutes les variables sont
stationnaires en niveau (P-Value = 5%). Donc elles sont
co-intégrées d'ordre 0. C'est la raison pour laquelle on estime
un PVAR ou VAR en panel.
o 125
Test du nombre de retards optimal
Pour mieux capter les dynamiques de l'économie
représentée par le vecteur Yt (système composé de 5
équations) nous allons estimer le nombre de retard optimal à
intégrer dans le modèle, en utilisant les critères
d'information d'AIC, de BIC et d'HQU. Les résultats sont
consignés dans le tableau n°7 suivant :
Tableau 7 : Nombre de retard optimal
Retards
|
Log-vrais.
|
p(LR)
|
AIC
|
BIC
|
HQC
|
1
|
329,41
|
-
|
-15,37
|
-13,41
|
-14,68
|
2
|
385,27
|
0,00000
|
-17,04*
|
-13,99*
|
-15,96*
|
|
Les astérisques (*) indiquent les meilleures (donc
les plus faibles) valeurs des critères d'informations suivants : ATC=
critère d'information d'Akaike, BIC = critère d'information
bayesien de Schwartz et HQC= Critère d'Hannan-Quinn
L'analyse montre que tous les critères d'informations
Akaike (AIC) de Schwarz (SC) et d'Hannan-Quinn e acceptent un retard maximal de
2. Il convient de retenir donc un PVAR (2). Ce tableau affiche les valeurs
minimales respectives (17,04) ; (-13,99) et (-15,96). Un tel résultat
signifie que les variables explicatives ont un effet retardé sur les
variables endogènes de deux (02) périodes. Les équations
à estimer du modèle seront décalées de 2
périodes.
o Le test de causalité au sens de
granger
Dans le prolongement de la discussion, il semble important
d'effectuer des tests de causalité (voir tableau n°8 en annexe)
fondés sur le modèle de Granger. Au niveau théorique, la
mise en évidence de relations causales entre les variables
économiques fournit des éléments de réflexion
propices à une meilleure compréhension des
phénomènes économiques. De manière pratique il est
nécessaire à une formulation correcte de la politique
économique. Ainsi, connaître le sens de la causalité est
aussi important que mettre en évidence des relations entre les
variables. Etant donné que les variables sont stationnaires en
126
niveau, le test de causalité au sens de Granger est
applicable. Ici, l'accent est mis sur la causalité individuelle et la
causalité globale. Le test porte uniquement sur les variables
endogènes du modèle (au nombre de 5). Ce test a été
effectué au seuil de significativité de 1%, 5% et 10%. Les
résultats sont consignés dans le tableau suivant :
o Test de causalité sur le taux de
croissance
Il est testé l'hypothèse Ho : selon laquelle le
taux de croissance n'est pas causé par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : le taux de croissance est causé par
les autres variables. (Voir les résultats du tableau n°13 en
annexe).
Pour la causalité individuelle, les résultats
du tableau n°13 montrent l'existence de causalité entre le taux de
croissance réelle et les dépenses publiques, puisque la
probabilité associée est de (0.000). Elle est inférieure
au seuil statistique de 1%. Il s'agit donc d'une causalité
unidirectionnelle. Il existe également un lien de causalité entre
le taux de croissance réelle et les importations. La probabilité
ainsi associée est de (0.035) ; elle est inférieure au seuil
statistique de 5%. Donc, prises isolément des autres seules les
dépenses publiques et les importations causent le taux de croissance
économique au sens de Granger. Il s'agit d'une causalité
unidirectionnelle. Par contre les variables dette publique (detpupib) et
recettes publiques (recpupib) confirment l'hypothèse Ho puisque leurs
probabilités associées sont respectivement de (0.557) et (0.301)
largement supérieures aux différents seuils statistiques de
significativité 1% ; 5% et 10%. Cependant les prises dans leur ensemble
affichent une probabilité de (0.000) donc inférieure à 1%
; alors globalement les variables causent le taux de croissance réel.
o Test de causalité sur la dette
publique
Ici, on test l'hypothèse Ho : la dette publique n'est
pas causée par les autres variables contre l'hypothèse
alternative H1 : la dette publique est causée par les autres
variables.
127
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13
montre l'existence de causalité entre le taux de croissance
réelle, les importations et les dépenses publiques. Les
probabilités associées sont de l'ordre de (0.02) ; (0.019) et
(0.000), donc nettement inférieure au seuil statistique de 5% pour les
deux premières et de 1% pour le reste. Ce qui traduit ainsi que les
variables taux de croissance réelle (tcrel) ; dépenses publiques
(depupib) et importations (importpib) causent au sens de Granger la dette
publique. La causalité est ici unidirectionnelle. Par contre la variable
recettes publiques (recpubpib) vérifie l'hypothèse nul avec une
probabilité de (0.468) ; c'est-à-dire qu'elle ne cause pas la
dette publique ; d'où une certaine indépendance entre les deux
séries. Pour la causalité globale, les variables affichent une
probabilité de (0.000) donc inférieure à 1% d'où
l'hypothèse Ho.
o Test de causalité sur les dépenses
publiques
On teste l'hypothèse Ho : selon laquelle les
dépenses publiques ne sont pas causées par les autres variables,
contre l'hypothèse alternative H1 : les dépenses publiques sont
causées par les autres variables.
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13
(voir en annexe) affiche l'existence de causalité entre les
dépenses publiques, le taux de croissance réelle (tcrel) et la
dette publique (detpupib) avec des probabilités respectives de (0.02) et
de (0.049) qui sont inférieures au seuil statistique de 5%. Pour les
recettes publiques (recpupib), la probabilité est de (0.008) donc
inférieure à 10%. Ces résultats montrent que ces variables
causent au sens de Granger les dépenses publiques. Par contre les
importations (importpib) vérifient cependant l'hypothèse nulle
avec une probabilité de (0.203) ; ce qui dépasse les
différents seuils de significativité (1% ; 5% 10%). Alors il
existe une certaine indépendance entre les deux séries. Mais
prises dans leur ensemble, les variables causent bien les dépenses
publiques avec une probabilité de (0.000) donc inférieur à
1%.
o 128
Test de causalité sur les recettes
publiques
Nous testons l'hypothèse Ho : selon laquelle les
recettes publiques ne sont pas causées par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : les recettes publiques sont causées
par les autres variables.
Pour la causalité individuelle, le tableau n°13,
affiche une causalité entre les recettes publiques, le taux de
croissance réelle et les dépenses publiques. Les
probabilités correspondantes sont respectivement de (0.005) pour le
tcrel et de (0.000) pour la depubpib, elle est significative au seuil
statistique de 5% et 1%. On déduit que celles-ci causent bien les
recettes publiques. Par contre concernant les séries dette publique et
les importations, les probabilités sont supérieures aux seuils
significatifs (1%, 5% et 10%) pour les valeurs respectives de (0.173) et de
(0.303). Les deux séries vérifient alors l'hypothèse
nulle. Donc la dette publique et les importations ne causent pas les recettes
publiques. Cependant, les valeurs prises ensemble aussi montrent une
probabilité de (0.000) d'où l'existence d'une causalité
globale.
o Test de causalité sur les
importations
Il convient de tester l'hypothèse Ho : selon laquelle
les importations ne sont pas causées par les autres variables, contre
l'hypothèse alternative H1 : les importations sont causées par
les autres variables.
Pour la causalité individuelle, les résultats
du tableau n°13 montrent l'existence d'une causalité entre les
importations, les dépenses et la dette publiques. Les
probabilités sont de (0.001) pour depupib et (0.000) pour detpubpib.
Elle est significative au seuil de 1%. Donc les séries vérifient
bien l'hypothèse alternative ; c'est-à-dire que les importations
sont causées par les dépenses publiques et la dette publique. En
revanche, les séries recettes publiques et le taux de croissance
réelle ont des probabilités supérieures à 10% avec
les valeurs de (0.162) pour le tcrel et de (0.136) pour recpubpib. Ce qui
conduit à l'acceptation de l'hypothèse nulle. D'où une
relation d'indépendance entre les séries. D'un point de vue
global,
129
les valeurs donnent une probabilité de (0.000) ce qui
montre que les variables prises dans leur ensemble causent bien les
importations.
À l'issu du test de causalité, les
résultats confirment la nature des variables pour un modèle VAR.
C'est le vecteur où les variables sont mutuellement
dépendantes.
o Estimation du modèle par la méthode
GMM
Quelques précautions sont nécessaires pour
l'estimation par GMM. Comme le soulignent Feve et Langot (1995) des retards
trop importants dans les variables conduisent à une distribution des
paramètres de plus en plus concentrés autour de valeurs
biaisées. Le PVAR estimé ici prend en compte les équations
ayant fait l'objet de test de causalité au sens de Granger. Les
estimations issues de l'implémentation des cinq modèles sont
récapitulées dans le tableau n°8 qui suit :
130
Tableau 8 : Résultats des estimations par la
méthode GMM
VARIABLES
|
(equation 1) tcrel
|
(equation 2) detpubpib
|
(equation 3) deppubpib
|
(equation 4) Recpubpib
|
(equation 5) Importpib
|
L.tcrel
|
-0.00902
|
-0.00538***
|
0.00118***
|
0.00168**
|
-0.000344*
|
|
(0.0838)
|
(0.00165)
|
(0.000407)
|
(0.000675)
|
(0.000185)
|
L2.tcrel
|
-0.0233
|
-0.000252
|
0.000993***
|
-0.00123
|
-0.000126
|
|
(0.0712)
|
(0.00148)
|
(0.000351)
|
(0.000854)
|
(0.000169)
|
L.detpibpib
|
-2.717
|
0.692***
|
0.0210
|
0.0530*
|
-0.0398***
|
|
(2.574)
|
(0.0658)
|
(0.0171)
|
(0.0283)
|
(0.00938)
|
L2.detpibpib
|
1.936
|
0.222***
|
-0.0316**
|
-0.0458
|
0.0282***
|
|
(2.406)
|
(0.0621)
|
(0.0150)
|
(0.0293)
|
(0.00882)
|
L.deppubpib
|
46.39***
|
-0.510
|
0.463***
|
0.876***
|
-0.159***
|
|
(13.84)
|
(0.332)
|
(0.101)
|
(0.196)
|
(0.0467)
|
L2.deppubpib
|
1.567
|
0.967***
|
0.331***
|
-0.468***
|
0.0243
|
|
(10.01)
|
(0.264)
|
(0.0860)
|
(0.164)
|
(0.0384)
|
L.recpubpib
|
-19.44
|
-0.124
|
0.150***
|
0.286***
|
0.0495*
|
|
(12.69)
|
(0.111)
|
(0.0497)
|
(0.108)
|
(0.0289)
|
L2.recpubpib
|
3.050
|
0.0865
|
0.00477
|
0.101
|
0.0114
|
|
(9.056)
|
(0.156)
|
(0.0388)
|
(0.0879)
|
(0.0349)
|
L.importpib
|
-11.37
|
-1.201**
|
0.288*
|
0.717
|
0.216**
|
|
(27.22)
|
(0.535)
|
(0.163)
|
(0.470)
|
(0.110)
|
L2.importpib
|
-51.19**
|
-0.302
|
-0.113
|
-0.554
|
0.219*
|
|
(22.81)
|
(0.533)
|
(0.162)
|
(0.527)
|
(0.112)
|
Inf
|
-0.0965**
|
0.00768***
|
0.000107
|
-0.000833
|
-3.59e-05
|
|
(0.0446)
|
(0.000810)
|
(0.000208)
|
(0.000556)
|
(0.000136)
|
Invprive
|
0.509***
|
0.00234
|
-6.76e-05
|
0.00198
|
-0.000271
|
|
(0.122)
|
(0.00284)
|
(0.000730)
|
(0.00161)
|
(0.000509)
|
Credecopib
|
-15.79***
|
0.438***
|
0.0567*
|
-0.0850
|
0.0563***
|
|
(5.432)
|
(0.107)
|
(0.0293)
|
(0.0622)
|
(0.0153)
|
Observations
|
238
|
238
|
238
|
238
|
238
|
|
Source : Auteur, à partir du logiciel
stata
NB : *** ; ** ; * sont les seuils de significativité
respectivement à 1 %, 5 % et 10 %. Les chiffres entre parenthèses
représentent les statistiques t de student.
Le (tcrel) : représente le taux de croissance
réelle et correspond à l'équation1 : les résultats
montrent que les « dépenses publiques »
retardées d'une période
131
agissent positivement sur le taux de croissance réelle
avec une élasticité égale à (46,39) et est
significative au seuil de 1%. Si l'on augmente de 1% les dépenses
publiques, elles induisent un accroissement de 46,39% sur le taux de croissance
réelle. Ce signe positif est bien conforme à la théorie
keynésienne. En effet, les dépenses publiques sont
traditionnellement considérées comme un facteur de stimulation de
la croissance économique. Conformément à la logique
keynésienne, les dépenses publiques peuvent exercer une influence
contra-cyclique significative sur les variables fondamentales de
l'économie, notamment sur la consommation et l'investissement. Sur le
plan empirique, les travaux comme celui de Masson et Taylor (1994) confirment
qu'une hausse des dépenses publiques génère un effet
positif sur l'activité économique ; Benassy et Schalck (2007)
montrent aussi que la politique budgétaire favorise la production et
l'augmentation de la fiscalité peut également favoriser les
activités et les comportements qui procurent les effets de
débordement positifs. Enfin pour Cottarelli (2011) elle permet de
financer les biens publics qui ne seraient pas spontanément produits par
le marché. Les théories récentes de la croissance
endogène considèrent que la politique budgétaire
discrétionnaire est efficace à la production du fait qu'elle
permet de propulser la croissance. Celle-là induit à son tour un
accroissement des dépenses publiques, facteur de croissance. Ce
résultat corrobore avec celui de Solomane Koné (2000), qui montre
que la politique budgétaire a un impact positif sur le PIB réel
dans les pays de l'UEMOA. Toutefois, ce lien n'est pas toujours linéaire
puisqu'il existe un seuil de déficit de 1% du PIB où
l'élasticité économique réagit différemment
à la politique budgétaire. Ce résultat est confirmé
par de nombreuses études notamment celles de Tanimoune et al., (2005) et
Diane et Fall (2002).
Quant à la variable « importations »
décalée de deux périodes, elles impactent
négativement le taux de croissance avec un seuil de
significativité de 5%. C'est pourquoi une variation positive des
importations de 5% réduit à la baisse de 51,19% le taux de
croissance. L'étude de l'effet de production aurait également
montré que, toutes choses égales par ailleurs, un niveau faible
de réaffectation
132
intersectorielle des ressources conduit au faible degré
de production de biens de substitution aux importations, et donc réduit
les parts de marché aux produits locaux. Dans le cas de l'UEMOA, un tel
résultat s'explique à partir de plusieurs facteurs : d'abord la
faiblesse du tissu industriel qui n'est pas en mesure de fournir une large
gamme de produits manufacturés aux consommateurs. Ce qui pousse les
habitudes de consommation des ménages vers les produits importés
qui parfois de loin sont plus compétitifs en termes de prix
(c'est-à-dire coûtent moins cher). La réduction des filets
de protection matérialisée par la signature de nombreux accords
comme celui des APE encouragent fortement les importations de produits de
substitution par rapport à la production régionale. Ensuite, les
pays de l'UEMOA développent un faible niveau de commerce intrazonal
(environ 12%) contre 64% pour le seul continent européen et le reste
entre les États-Unis et l'Asie. Cette ouverture commerciale face
à la concurrence internationale et la détérioration des
termes de l'échange créent d'énormes difficultés
aux entreprises nationales, et les poussent parfois à revoir à la
baisse leur niveau de production pour éviter toute situation de
mévente. La tarification au coût marginal dans les pays
industrialisés est bien inférieure à celle des pays de la
zone. Enfin, les pays de l'union sont fortement importateurs de matières
premières telles que les hydrocarbures. Avec le renchérissement
des cours du pétrole dans les pays importateurs, les coûts des
facteurs deviennent plus chers et conduisent à une situation d'inflation
au cas où les entreprises ne bénéficient d'aucune
subvention.
Lorsque le « taux d'inflation » augmente
de 5%, cela entraine une baisse sur la croissance de 0,0965%. Ce
résultat est bien conforme à la théorie de la
parité du pouvoir d'achat (PPA) qui stipule que l'inflation agit
négativement sur la croissance via la consommation des agents
économiques ; en l'occurrence les consommateurs. Ce qui amène les
entreprises à revoir à la baisse leur offre de production.
Plusieurs études ont établi une relation négative entre
l'inflation et la croissance économique. Les résultats de Fischer
(1993) montrent que l'inflation réduit la croissance en baissant
l'investissement et l'augmentation de
133
la productivité. En outre, il précise qu'une
faible inflation et un faible déficit fiscal ne sont pas
nécessaires pour une croissance élevée même sur de
longues périodes. Par ailleurs et également un niveau
élevé d'inflation n'est pas compatible avec une croissance
économique soutenue.
Pour la variable « investissement privé
», elle agit positivement sur le taux de croissance réelle et
reste significative de 1% sur la période en cours. Ainsi, une
augmentation de l'investissement privé de 1% induit aussi un
accroissement de 0,509% du taux de croissance réelle. Ce qui est
très vrai dans la théorie économique. Toutes choses
égales par ailleurs, une variation de l'investissement impacte
l'activité réelle de l'économie. Une augmentation de
l'investissement entraine une hausse du revenu national (PIB) ; ce qui accroit
la consommation. Cette hausse de la consommation permet à son tour
d'augmenter la production, qui se manifeste par un accroissement du revenu
national donc de la croissance économique. Le relèvement des taux
d'investissement privé constitue donc un levier essentiel de relance
économique. En effet, Borenzstein (1990) montre que la politique
budgétaire reste un facteur important de soutien de la croissance et de
l'investissement privé. Ce résultat a été
corroboré par les travaux de Mansouri (2003) dans le cas du Maroc
où l'effet d'entraînement de l'investissement public sur
l'investissement privé et la croissance a été
également mis en exergue.
Pour la variable « crédit à
l'économie », le résultat montre un effet
négatif sur la croissance. L'impact est significatif au seuil de 1%.
Dès lors, une augmentation de 1% du volume de crédit produit une
baisse de 15,79% sur le taux de croissance. Un tel résultat a
été trouvé par d'autres chercheurs notamment Friedman et
Kuttner (1993) et Gerther et Gilchrist (1994). Ces derniers suggèrent
une certaine déconnexion entre l'évolution de la demande de
crédit et celle du PIB. Friedman et Kutter montrent en particulier qu'en
début de récession, les entreprises peuvent être
confrontées à des contraintes de liquidité qui les
poussent à recourir à des demandes de crédits de
trésorerie supplémentaire, en raison de l'augmentation des
besoins en fonds de roulement qui ne peuvent être
134
financés sur ressources propres. Gerther et Gilchrist
aboutissent également à un résultat similaire pour
l'économie américaine, en indiquant notamment qu'un
ralentissement de la croissance, voire une baisse de l'activité
économique peut s'accompagner d'une augmentation de la demande de
crédit bancaire. Toutefois, ce résultat n'est pas conforme
à la logique des partisans de l'offre de crédit, pour qui le
canal du crédit établit une corrélation étroite
entre les évolutions de l'offre de crédit et de l'activité
économique. La contraction de la première entraine celle de la
seconde. Selon Mishkin (1996), qui met l'accent sur l'asymétrie
d'information au niveau des marchés de capitaux, ce canal s'observe
particulièrement dans les économies où le marché
financier est embryonnaire.
Le « detpubpib » : représente le ratio de la
dette et correspond à l'équation 2. Les résultats
empiriques ont montré qu'il existe une relation significativement
négative entre la variable « taux de croissance »
retardée d'une période et le ratio de la dette publique au
seuil de 10%. Ici, les résultats montrent que l'élasticité
de la croissance par rapport au ratio de la dette est de (-0,0538). Autrement
dit, une hausse de 10% du taux de croissance réduit le ratio de la dette
publique de 0,0538%. Ce signe est connu puisque la plupart des travaux
théoriques ou empiriques perçoivent la dette publique comme un
frein à la croissance parce qu'elle réduit l'épargne
disponible, élève les taux d'intérêt ou
réclame une diminution des dépenses publiques productives et/ou
une augmentation des impôts. Kumar et Wood (2010) montrent que
l'élasticité de la croissance par rapport à la dette
publique n'est que de -0,02. De surcroît, même s'il existe une
corrélation négative entre les mouvements du ratio d'endettement
public et ceux de l'activité économique, cette corrélation
pourrait principalement provenir du fait qu'une expansion économique
réduit mécaniquement le rapport dette/PIB. Deux auteurs Reinhart
et Rogoff (2011) montrent qu'une augmentation de la dette publique cause un
ralentissement de la croissance. À l'aide d'histogrammes, ils mettent en
évidence une relation en U inversée entre le taux de croissance
et la dette des pays développés ; le rapport ne devenant
négatif qu'une fois franchit un niveau d'endettement de 90%. Checherita
et Rother
135
(2010) montrent qu'au-delà du seuil de 90% à
100% du PIB, la dette publique serait préjudiciable à la
croissance économique. Par contre Minea et Villieu (2009) sur un panel
de vingt-deux pays trouvent un changement de signe au voisinage d'un ratio de
dette publique de 120%, mais dont l'effet se fait graduellement sentir
dès que la dette publique atteint 70% du PIB. Dans l'UEMOA, Tanimoune,
Plane et Combes, en testant l'efficacité de la politique
budgétaire sur la période 1986-2002 par la méthode de
Hansen (1996, 1999), parviennent à déterminer un effet de seuil
de 83% pour un taux d'endettement public.
La variable « dette publique » agit
positivement sur elle-même avec une élasticité de (0,692)
lorsqu'elle est retardée d'une période puis de (0,222) pour un
décalage de deux périodes. L'effet est significatif au seuil de
1%. Le signe positif de la dette par rapport à la dette elle-même
s'explique par un effet de cumul. Lorsque la dette publique croît de 1%
par rapport à sa valeur retardée d'une période, cela
entraine une augmentation de 0,692% sur la dette en cours, mais lorsque le
décalage est de deux périodes, la variation est de 0,222%. Donc
les dettes antérieures vont entrainer un accroissement de celle encours,
ce qui augmente évidemment son poids.
La variable « dépenses publiques »
réagit positivement sur la dette publique avec un degré de
significativité de 1%. Lorsque les dépenses publiques
retardées de deux périodes croissent de 1%, elles induisent un
accroissement de 0,967% sur la dette publique. Le signe entre dépenses
publiques et la dette publique trouve son fondement dans le financement par
endettement des dépenses productives. Les travaux de Cacheux (2002) ;
Blanchard et Giavazzi (2003) et Fitoussi (2003) soutiennent l'idée que
financer les dépenses d'investissement publiques par emprunt peut
à première vue sembler attrayante dans la mesure où elles
influencent positivement la croissance potentielle de l'économie selon
la théorie de la croissance endogène. En réponse à
un ralentissement conjoncturel, les dépenses productives sont plus
faciles à comprimer que les dépenses non
136
productives, telles que les dépenses en salaire ou les
transferts ; au risque de peser sur la croissance. Dès lors, il semble
qu'un plafond imposé sur le déficit public courant aura
inévitablement un biais structurellement dépressif sur la
croissance (Creel et al. 2002). D'après ces promoteurs, la règle
d'or pourrait permettre aux gouvernements de mener des politiques plus
favorables à la croissance. L'endettement utilisé à des
fins d'investissement public pourrait alors paraitre « vertueux »
dans la mesure où il encourage la croissance future. Selon la
thèse libérale lorsque les dépenses publiques sont
financées par endettement, elles ne feront qu'alourdir le poids de la
dette.
Avec la variable « importations », les
résultats montrent l'existence d'une relation significativement
négative entre le ratio de la dette publique et le taux d'importation.
Son seuil est de 5%. La valeur de l'élasticité étant
égale à -1,201, considère qu'une augmentation de 5% du
taux d'importation retardé d'une période réduit le ratio
de la dette publique de 1,201%. Cette sensibilité se joue par le canal
du taux de change. Lorsqu'il se déprécie, la perte de valeur de
taux de change réduit considérablement les montants de la dette
d'une part. D'autre part, l'impact de la dégradation des termes de
l'échange sur la consommation, la production et les échanges,
dépend des caractéristiques de l'économie en
matière de production et de consommation. Toutes choses égales
par ailleurs, un degré plus élevé de substitution entre
production locale et bien importé tend à réduire davantage
les échanges. De ce fait, le solde de la balance commerciale va
s'améliorer au profit des exportations avec l'entrée de devises
pouvant servir au remboursement de la dette.
La variable « inflation » les
résultats de l'estimation ont montré qu'il existe une relation
significativement positive entre le ratio de la dette et le taux d'inflation au
seuil de 1%. Plus spécifiquement, une hausse de 10% du taux d'inflation
entraine l'augmentation du ratio de la dette de 0,0786%. Un tel résultat
est bien justifié dans la théorie économique lorsque les
pays sont engagés dans le commerce international. Souvent ils se
trouvent confrontés à des variations des
137
termes de l'échange. Les changements de prix
amènent les gouvernements à rembourser à terme un montant
plus important de leur dette intérieure, et pour la dette
extérieure par une appréciation du taux de change.
La variable « crédit à
l'économie » montre une significativité au seuil de 1%
alors que l'élasticité du ratio de la dette par rapport à
la variable est de 0,438%. Ces résultats ne sont pas surprenants au
regard de la théorie économique puisque la dette publique est
contractée via un taux d'intérêt qui, lorsqu'il est faible
incite les gouvernements à recourir au marché bancaire. Cela est
logique surtout lorsque les autres sources de financement sont soumises
à des conditionnalités plus sévères. Les pays de
l'UEMOA dans leur majorité se sont lancés dans des programmes
d'émergence économiques qui les poussent naturellement à
la recherche accrue de financement dont le secteur bancaire reste une des
principales sources.
Le « depubpib » : représente le ratio des
dépenses publiques/PIB et correspond à l'équation 3 :
Les résultats des tests montrent que la variable
« taux de croissance réelle » rétablit une
corrélation positive et significative au seuil de 10%. La
sensibilité entre les deux variables est de 0,0118 lorsque ce taux est
retardé d'une période. Ce qui veut dire tout simplement qu'une
augmentation de 1% de taux de croissance réelle induit un effet positif
pour 0,0118% sur les dépenses publiques. Retardé à deux
périodes, l'élasticité entre les deux variables passe
à 0,00993. Cela montre que l'effet se dissipe avec le temps. Pour le
même pourcentage, les dépenses publiques augmentent de 0,00993%.
Ce comportement sur les dépenses publiques résulte de
l'augmentation de la production grâce à un effet keynésien.
Les dépenses publiques étant une composante de l'absorption,
toute variation de l'offre peut avoir un impact positif sur les dépenses
publiques.
Pour la variable « dette publique », il
existe une relation à sens négatif entre l'évolution
des ratios de dépenses publiques et la dette publique. Le degré
de
138
significativité de la relation est de 5%. Par contre
l'élasticité qui mesure cette sensibilité égale
à (-0,0316). Autrement dit, une hausse de 5% de la dette publique
retardée de deux périodes entraine une baisse de 0,0316% du ratio
dépenses publiques/PIB. Ce sens de causalité est rendu possible
grâce le taux de croissance dont l'accroissement pourrait être
dû à l'augmentation des dépenses publiques à travers
le multiplicateur qui va agir positivement sur la croissance. Ainsi le ratio
dette/PIB va connaitre une baisse lorsque le PIB croît plus vite que la
dette publique. Si le supplément de dépenses publiques est
utilisé à des fins productives, alors la dette publique va
baisser dans la mesure où la richesse qui en résulterait peut
servir à rembourser le service de la dette.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les résultats montrent une relation positive des dépenses
publiques sur elles-mêmes avec un degré de significativité
de 1% lorsqu'elles sont retardées d'une et de deux périodes.
Leurs élasticités respectives sont de (0,463) et (0,331). Ainsi,
une hausse de 1% des dépenses publiques produit un effet positif de
0,463% à la première période et de 0,331% à la
deuxième période. Pour ses valeurs retardées, l'impact
positif s'explique par le fait que la politique budgétaire conserve dans
le temps les traces des actions passées. Elle est une politique dont on
peut affirmer qu'elle a une mémoire. Donc par un effet de cumul, elles
entrainent une augmentation d'elles-mêmes.
Pour la variable « recettes publiques »
les résultats montrent une relation positive des recettes sur les
dépenses publiques pour une significativité de 1%, lorsqu'elle
est retardée d'une période. La valeur de
l'élasticité est de 0,150, toute augmentation de 1% du ratio des
recettes publiques favorise aussi un accroissement de celui des dépenses
publiques à hauteur de 0,150%. Un tel résultat n'est pas
surprenant puisque les recettes publiques sont une variable dépendante
du PIB. Elles agissent dans le même ordre que le PIB sur les
dépenses publiques. Ce qui est bien conforme à la théorie
keynésienne.
Pour la variable « importations », on
retrouve l'existence d'une relation positive entre les importations et les
dépenses publiques pour un degré de significativité
139
à 10%. La valeur de l'élasticité entre
les variables « importations » et « dépenses publiques
» se chiffre à 0,288. Cela suppose que lorsque le taux
d'importation connaît une hausse de 10% pour un retard d'une
période, elle conduit également à une augmentation de
0,288% du ratio des dépenses publiques. Dans la théorie
économique, une politique de relance budgétaire peut stimuler la
demande étrangère à travers les subventions et les
transferts. Sur le plan empirique, plusieurs travaux comme celui de Sarr (2006)
sur la zone UEMOA ont montré qu'une hausse des dépenses publiques
nationales peut s'adresser directement aux produits étrangers et
stimuler ainsi les importations. Carton (2005) affirme qu'un effet positif de
hausse de la demande est immédiatement perceptible dans le pays en
déficit et chez ses partenaires.
Pour la variable « crédit à
l'économie », on retrouve également une relation
positive entre le crédit à l'économie et les
dépenses publiques pour un degré de significativité de
10%. La valeur de l'élasticité est de 0,0567. Lorsque le
crédit à l'économie croît de 10%, cela induit une
augmentation de 0,0567% sur le ratio des dépenses publiques. Lorsque
l'Etat fait recours au marché financier pour combler son déficit
budgétaire, son crédit envers le secteur bancaire et le
système financier en général augmente. Sa présence
sur le marché crée un effet d'éviction sur le taux
d'intérêt.
Le « recpubpib » : représente le ratio des
recettes publiques/PIB et correspond à l'équation 4 :
Pour la variable « dépenses publiques »,
il existe une relation positive entre le taux de croissance
économique et les recettes publiques avec un degré de
significativité à 5% avec un décalage d'une
période. Le degré de sensibilité est de (0,00168). Une
augmentation de 5% du taux de croissance réelle entraine 0,00168% sur le
ratio des recettes publiques/PIB. Cela est conforme à la théorie
économique ; puisque le PIB constitue la base de l'assiette fiscale,
donc les recettes fiscales en l'occurrence dépendent du niveau de
l'activité économique.
140
Pour la variable « dette publique », par
contre, on note une relation à sens positif avec un seuil de 10% entre
la dette publique retardée d'une période et les recettes
fiscales. Ici, l'élasticité donne 0,0530. Ce qui traduit la
variation de 0,0530% du ratio des recettes publiques suite à une hausse
de 10% du ratio de la dette publique. La réaction positive de la dette
sur des recettes publiques se justifie ; du simple fait de l'insuffisance ou du
rétrécissement de l'assiette fiscale pour un pays. Un faible taux
de couverture fiscale aura pour conséquence un recours massif à
la politique d'endettement. Un tel argument corrobore les résultats des
travaux du FMI (2012) à partir d'un modèle DSGE dans la zone
euro. Ces résultats montrent que la politique de restriction fiscale a
des effets récessifs forts et les déficits publics s'accentue.
Holland et Portes (2012) ont observé les répercussions des divers
plans d'austérité adoptés en zone euro. Ils expliquent que
les politiques économiques poursuivies ces dernières
années par les pays européens se révèlent
particulièrement nocives pour l'activité économique.
Aussi, la consolidation budgétaire a entraîné une hausse du
ratio dette publique/PIB dans chaque pays membre, excepté l'Irlande. La
consolidation coordonnée des politiques budgétaires s'est
traduite par une hausse du ratio de 5 % environ pour la zone euro dans son
ensemble. Il faut noter que les plans d'austérité ont
été mis en oeuvre pour atténuer les tensions sur les
marchés de la dette souveraine et éviter la contagion.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les résultats des estimations montrent un lien à la fois
positif et négatif avec un degré de significativité de 1%.
Les valeurs des élasticités sont respectivement de 0,876 pour un
retard d'une période et de - 0,468 pour un retard de deux
périodes. Lorsque les dépenses publiques augmentent de 1%, elles
produisent un effet positif de 0,876% sur les recettes mais, à l'ordre 2
induisent une baisse de 0,468%. Une interprétation ce résultat
peut se faire à partir de la conduite d'une politique
budgétaire.
Pour la variable « recettes publiques »,
les résultats affichent une corrélation positive au seuil de
significativité de 1%. L'élasticité de la variable par
rapport à
141
elle-même est de 0,286. Ainsi, une hausse des recettes
publiques retardées d'une période entraine l'augmentation sur
elles-mêmes de 0,286%. Ce résultat s'obtient par un effet de
cumul.
L'« importpib » : représente le taux
d'importation par rapport au PIB et correspond à l'équation 5
:
Pour la variable « taux de croissance réelle
», les estimations aboutissent à l'existence d'une relation
négative entre les importations et le taux de croissance réelle
pour un seuil significatif de 10%. L'élasticité correspondante
est -0,000344 lorsque la variable est retardée d'une période. Du
coup, une variation de 10% du taux d'importation produit une hausse de
0,000344%. Ce résultat s'explique dans la théorie libérale
par la concurrence et la compétitivité des prix des biens
importés qui impactent négativement la production locale.
D'autres facteurs comme le faible niveau d'industrialisation des pays n'offre
souvent pas une diversité de gamme aux consommateurs et les poussent
vers les produits de substitution.
Pour la variable « dette publique », les
résultats montrent une relation à la fois négative et
positive entre la dette publique et le taux d'importation pour un seuil
significatif de 1%. Les élasticités sont de l'ordre de -0,0398
pour un retard d'une période et 0,0282 pour un retard de deux
périodes. Ainsi, une hausse de 1% de la dette publique induit dans un
premier temps une baisse de 0,0398% du taux d'importation et dans un second
temps un accroissement de 0,0282%. Cette situation à effets
opposés pourrait se justifier par la réaction rapide les
gouvernements face à la conjoncture économique ; exemple la
réaction spontanée des gouvernements pour répondre
à la demande sociale où engager des dépenses à des
fins purement politiques.
Pour la variable « dépenses publiques »,
les estimations montrent que la relation entre les dépenses
publiques et les importations est négative dans le contexte des pays de
l'UEMOA pour un seuil significatif à 1%. Pour cela,
l'élasticité
142
correspondante est de -0,159. Ce qui revient à dire que
lorsqu'un pays croît ses dépenses publiques de 1% alors les
importations en provenance des autres pays baissent de 0,195%. De tels
résultats ne sont pas toujours confirmés partout et en tout
temps. Par ailleurs, l'impact de la dégradation des termes de
l'échange sur la consommation et les échanges dépend des
caractéristiques de l'économie en matière de production et
de consommation. Toutes choses égales par ailleurs, un degré plus
élevé de substitution entre production locale et bien
importé tend à réduire davantage les échanges.
Aussi, une capacité plus forte de réaffectation intersectorielle
des dépenses publiques permet de produire des biens substitution aux
importations, et donc de réduire l'impact négatif du changement
de prix sur le revenu réel en limitant davantage les importations.
Pour la variable « recettes publiques »,
on trouve une relation positive entre les recettes publiques et les
importations pour un seuil de significativité à 5% lorsque la
variable est retardée d'une période. L'élasticité
calculée est égale à 0,0495. Ainsi une hausse de 5% du
taux de fiscalité induit à court terme une augmentation des
importations à hauteur de 0,0495%. Ce résultat n'est conforme
à la théorie économique que dans un contexte particulier.
L'analyse de la courbe de Laffer (1958), montre que dans sa première
phase toute augmentation de la fiscalité peut engendrer un accroissement
des importations, mais moins que proportionnel. Mais au-delà d'un seuil
critique, toute modification à la hausse produit l'effet inverse. Par
contre, toute augmentation des importations va entrainer un accroissement des
recettes fiscales.
Pour la variable « importations », les
estimations laissent voir l'existence d'une relation positive de la variable
sur elle-même avec un degré de significativité de 5%
lorsqu'elle est retardée d'une période et de 10% pour deux
périodes. Les élasticités correspondantes sont
respectivement de 0,216 et 0,219. Autrement dit, une augmentation de 5% des
importations de la période antérieure provoque un accroissement
de 0,216% pour les importations de la période courante. Pour une hausse
de 10% des importations décalées de deux périodes, elle
provoque
143
une variation positive de 0,219%. Par un effet de cumul, les
importations pèsent sur la balance commerciale et expliquent la forte
vulnérabilité des économies à la volatilité
des prix étrangers.
Pour la variable « crédit à
l'économie », les résultats de l'estimation montrent un
lien positif entre le crédit à l'économie et les
importations avec un seuil de significativité de 1%. Par
conséquent, la sensibilité entre ces deux variables est de
0,0563. Cela montre que lorsque le crédit à l'économie
augmente de 1%, il produit à son tour un accroissement de 0,0563% sur
les importations. Ce comportement se justifie par le fait que l'effet de
l'inflation s'accompagne souvent de politique de subvention et de crédit
à la consommation pour soutenir la demande sociale. Ce qui entraine un
recours excessif à l'instrument budgétaire ou l'endettement.
Tableau 9 : Test de corrélation des
résidus d'équations du modèle
|
resirTCPIB
|
res_detpib
|
res_dep
|
res_recpub
|
res_imp
|
ResirTCPIB
|
1
|
|
|
|
|
res_detpib
|
-0,0557
|
1
|
|
|
|
res_dep
|
-0,0055
|
0,176
|
1
|
|
|
res_recpub
|
0,1001
|
0,0515
|
0,6568
|
1
|
|
res_imp
|
0,0306
|
-0,1216
|
0,0809
|
0,0974
|
1
|
|
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Les signes (-) traduisent une corrélation négative
entre les variables, alors les signes (+) traduisent une corrélation
positive.
144
o Validation du modèle : Test de
stabilité du PVAR
Le graphique suivant confirme la stabilité du
modèle. En effet, les valeurs propres associées aux variables
sont incluses dans l'espace donc inférieures à l'unité.
-1 -.5 0 .5 1
Real
Roots of the companion matrix
Source : Auteur, à partir du
logiciel stata III.2- Analyse des chocs budgétaires
5.
5
La décomposition de la variance de l'erreur de
prévision et les fonctions de réponses impulsionnelles sont les
deux outils qui permettent d'identifier l'impact des chocs budgétaires
sur les différentes variables spécifiées dans le
modèle.
III.2.1- La décomposition de la variance
d'erreur
5.
Les résultats de l'analyse de la variance de l'erreur de
prévision sur un horizon temporel de 10 ans sont consignés dans
le tableau suivant.
145
Tableau 10 : Résultats de l'analyse de la
décomposition de la variance de l'erreur de
prévision
|
Horizon de 10 ans
|
tcreel
|
detpibpib
|
deppubpib
|
recpubpib
|
importpib
|
Tcreel
|
10
|
79,75%
|
22,58%
|
15,52%
|
3,94%
|
11,35%
|
Detpibpib
|
10
|
0,28%
|
60,89%
|
10,46%
|
5,92%
|
4,74%
|
Deppubpib
|
10
|
13,75%
|
5,29%
|
52,24%
|
14,22%
|
11,92%
|
Recpubpib
|
10
|
2,94%
|
10,32%
|
9,18%
|
73,52%
|
6,01%
|
Importpib
|
10
|
3,28%
|
0,92%
|
12,60%
|
2,41%
|
65,99%
|
|
Source : Auteur, à partir du logiciel Sata :
Les données du tableau indiquent la part de la variance de la
variable en ligne expliquée par la variable en colonne.
Les résultats issus de la décomposition de la
variance donnent ce qui suit :
? le taux de croissance réel (Tcreel) : on retient que
sa variance est due aux innovations des dépenses publiques pour (13,75%)
contre (2,94%) seulement pour les recettes fiscales. Alors que ces propres
innovations contribuent à hauteur de (79,75%) et les importations
influencent sur le taux de croissance pour (3,28%) de même que la dette
publique (0,28%). Ces chiffrent montrent que la variable « taux de
croissance réel » est significativement expliquée plus par
ses propres chocs plutôt qu'à ceux de la politique
budgétaire (dépenses et recettes publiques). Ce résultat
obtenu de la décomposition de la variance montre comment l'effet produit
par un choc de politique budgétaire se dissipe dans le temps. Ce qui
affirme son effet conjoncturel et justifie sa non-viabilité à
prendre charge les problèmes de long terme, défendus par les
tenants de la nouvelle théorie anti-keynésienne.
146
? la dette publique (Detpib) : il convient de constater une
faible dominance des chocs de dépenses publiques avec seulement (5,29%)
contre (10,32%) pour les recettes publiques. Par ailleurs, le taux de
croissance réel influence la dette publique avec (22,58%) alors que ses
innovations assurent jusqu'à (60,89%). Donc les dépenses et les
recettes publiques ont un impact significatif, mais moins important sur la
dette publique. Nous déduisons que la dette publique reste plus sensible
du taux de croissance qu'aux dépenses et recettes publiques.
? les dépenses publiques (Deppupib) : on constate que
la variance de celle-là s'explique par les recettes publiques à
(14,22%) ensuite le taux de croissance réel avec (13,75%) et les
importations pour (11,92%). Ces chiffres traduisent la sensibilité des
dépenses publiques aux innovations de ces variables. Cela se comprend
aisément pour les pays de l'UEMOA, où l'économie est
principalement dirigée par les pouvoirs publics. Une analyse de l'offre
globale à deux composantes (PIB, importations) permet de mesurer
l'effort des gouvernements en matière de politique de relance
économique. La dette publique explique (5,29%) des variations des
dépenses publiques.
? les recettes publiques (Recpubpib) : il en ressort, une
bonne contribution des chocs imprimés par les politiques
budgétaires à travers les dépenses publiques à
l'horizon de 10 ans. La variance des recettes fiscales, en moyenne (14,22%) est
due aux innovations de dépenses publiques et (73,52%) à ses
propres innovations contre (2,41%) pour les importations ; (5,92%) revient
à la dette publique et (3,94%) au de taux de croissance réel. Ce
qui permet de dire que les dépenses publiques ont un impact significatif
sur les recettes fiscales.
? les importations (Importpib) : la variance est en moyenne
(11,92%) due aux innovations des dépenses publiques, contre (6,01%) pour
les recettes publiques. Alors que le taux de croissance réel impact pour
(11,35%), la
147
dette publique contribue à hauteur de (4,74%) et les
importations par leurs innovations assurent jusqu'à (65,99%). Cela
traduit, alors, que les dépenses publiques ont plus d'impact
significatif sur les importations que les recettes fiscales.
III.2.2- Les Fonctions de Réponses
Impulsionnelles
Elles permettent d'identifier la nature des impacts sur les
différentes variables spécifiées dans le modèle.
Les résultats de ces fonctions confirment ceux de la
décomposition de la variance de l'erreur de prévision. Ils
permettent de tirer les enseignements suivants :
o Les chocs de dépenses
publiques
Pour le taux de croissance économique : un choc
budgétaire de dépenses publiques s'est traduit par un effet
positif et instantané sur le taux de croissance dans l'union de 1980
à 2014. Son effet apparaît positif et cumulatif sur trois ans.
Ainsi, un choc budgétaire à travers les dépenses publiques
aura pour effet une stimulation de la croissance économique. Sur le plan
théorique un tel résultat concorde bien avec la pensée
keynésienne. Sur le plan empirique, ce résultat confirme celui de
Dufrénot et al., (2007) et celui de Ndiaye et Konte (2012). Ils
soutiennent que la pro-cyclicité des dépenses est liée
à leur ajustement aux fluctuations de l'activité
économique. À cet égard, ces auteurs déduisent que
« durant les phases de croissance économique les
dépenses augmentent fortement et qu'elles diminuent pendant les phases
de ralentissement économique. Ce résultat n'est pas surprenant,
en raison de l'absence de stabilisateurs automatiques dans les économies
en développement, contrairement à ce que l'on observe dans les
pays industrialisés ». Il recoupe également les travaux
de Lylia et Zakane (2008) en Algérie pour qui les dépenses
publiques produisent un effet positif sur le produit intérieur brut. Ce
résultat justifie la rapide transmission des chocs affectant
l'activité économique ce qui montre le caractère
pro-cyclique de la politique budgétaire sur le taux de croissance
économique.
148
Gupta et al. (2005) ont utilisé des données de
panel avec la méthode GMM pour analyser la composition des
dépenses publiques sur la croissance économique dans un
échantillon de 39 pays en voie de développement dans les
années 1990. Les auteurs ont montré que les pays où les
dépenses publiques sont plus utilisées pour le paiement de
salaires tendent le plus vers des croissances faibles. Par contre les Etats qui
misent davantage sur les dépenses en capital réalisent de
meilleures performances en matière de croissance. En effet, selon Gupta
et al., (2005) une hausse de 1% des dépenses en capital augmente la
production de 0,1% à long terme, alors qu'un accroissement des
dépenses de fonctionnement de 1% fait baisser la production de 0,5%.
N'Guessan (2007) a utilisé la même spécification pour
étudier la composition des dépenses publiques dans l'UEMOA. Il a
montré que ces dernières sont déterminantes dans la
dynamique économique de l'union. En effet, l'augmentation des
dépenses publiques d'investissement est bénéfique pour la
croissance.
Graphique 6 : Réponse du taux croissance
réel suite à un choc de dépenses
publiques
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour la dette publique : l'effet d'un choc de dépenses
publiques se manifeste en deux temps : d'abord un effet nul et
instantané dès la première année donc entre (0 ;
1). De telles conclusions procèdent de la nouvelle « théorie
anti-keynésienne des finances publiques » (TAK). Aujourd'hui,
largement répandue et dominante en Europe, la TAK prétend que les
politiques budgétaires de consolidation,
149
autrement dit de réduction des déficits publics
par la baisse des dépenses ont généralement des effets
restrictifs. Pour cette phase, la politique budgétaire devient
contra-cyclique. Contrairement à Guidice et al., (2003) qui estiment,
qu'une politique budgétaire de consolidation produirait des effets
expansionnistes du déficit public. Dans la deuxième phase entre
(2 ; 10), un effet devient cumulatif sur le reste du temps. La politique de
relance budgétaire devient pro-cyclique. Ces résultats sont bien
conformes à la situation de la zone euro face à la crise de
l'endettement en Grèce et au Portugal. Contrairement à la zone
UEMOA, en zone CEMAC, la politique budgétaire a eu des effets
anti-keynésiens sur la période de 1993 à 2002, Ondo Ossa
(2008). En zone CEMAC, la politique budgétaire n'avait pas produit
d'effet favorable sur l'activité économique et les
déficits publics étaient nuisibles à la croissance
à long terme. En zone franc africaine, les gouvernements utilisent
généralement l'arme budgétaire à des fins
électoralistes et non à des fins de régulation. De plus,
ils ne font pas d'effort en période de bonne conjoncture, car le
déficit public y est nécessairement trop élève pour
conséquence une forte accumulation de la dette publique.
Graphique 7 :
Réponse de la dette publique suite à un choc de
dépense publique
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour les dépenses publiques elles-mêmes : un
choc budgétaire affectant les dépenses publiques entraine leurs
réactions automatiques. Lorsqu'il s'agit d'une
150
baisse, cela se traduit par une chute ; donc un effet
négatif sur la période de (1 ; 10). De tels effets concordent
aussi avec la théorie keynésienne sur le caractère
cyclique de la politique budgétaire.
Graphique 8 : Réponse des dépenses
publiques sur elles-mêmes
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour les recettes publiques : un choc de dépenses
publiques sur les recettes produits un effet à deux temps : d'abord,
l'effet devient positif dès la première année de (0 ; 1).
Le régime de l'effet croît de façon exponentielle avant de
connaître une baisse avec un régime plus faible sur deux
périodes (2 ; 4) et après devient stable sur le reste (5 ; 10).
Dans l'équation d'équilibre fondamentale, les dépenses
publiques constituent une composante de l'absorption. Par conséquent
selon le multiplicateur keynésien, toute réaction de celle-ci
impacte positivement ou négativement la production. Or, les recettes
publiques notamment fiscales dépendent du niveau de production
donnée. Par ailleurs, il est structurellement reconnu que les recettes
publiques croissent moins vite que les dépenses publiques ; donc la
corrélation entre les deux variables reste positive, mais moins
importante par rapport aux dépenses publiques.
151
Graphique 9 : Réponse des recettes publiques
suite à un choc de dépense publique
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour les importations : la fonction de réponse
impulsionnelle montre bien qu'un choc budgétaire de dépenses
publiques est négatif sur les importations pendant la période.
D'abord, cela entraine une baisse des importations qui va fluctuer pendant la
période (1 ; 4) pour se maintenir sur la période, mais toujours
avec un signe négatif. En effet, le taux d'importation influence les
dépenses publiques à travers le solde budgétaire de base
par le canal d'éventuelle flambée des prix extérieurs qui
induisent par voie de conséquence l'accroissement des prix
intérieurs. Cet état de fait peut avoir des répercussions
très néfastes sur les performances du solde budgétaire de
base du fait du poids des subventions aux nombreuses entreprises publiques en
difficulté. Ainsi, la hausse des prix du pétrole qui aurait eu un
impact favorable sur le solde budgétaire (grâce à une
hausse des taxes pétrolières) ne se traduit pas par une hausse
des recettes. L'Etat intervient pour limiter les effets négatifs de ces
évolutions sur le niveau de vie des populations (Dufrénot et al.,
2007). Les chocs sur les dépenses publiques impactent également
la variable importation.
152
Graphique 10 : Réponse des importations
suite à un choc de dépense publique
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Par contre d'autres travaux infirment de telles analyses ;
notamment celle de Lylia et Zakane (2008) qui ont montré dans leurs
recherches que les dépenses publiques impactent positivement à
travers une augmentation des dépenses publiques, mais cet impact reste
instable. Qu'une augmentation des importations des dépenses publiques
entrainerait une augmentation des importations ; compte tenu des besoins accrus
de l'économie. Le volume des investissements sera plus important,
entrainant l'acquisition des biens d'investissement et de consommation en
volume plus important.
o Chocs de recettes publiques
Un choc de recettes publiques sur la croissance
économique se traduit par une augmentation de l'offre de production par
conséquent de la production sur toute la période. Le
résultat est bien conforme à la théorie économique
d'origine keynésienne. Puisque, la fiscalité influe sur les
décisions des individus concernant l'épargne, le travail et les
décisions des entreprises en matière de production, de
création d'emploi. Ces décisions sont affectées non
seulement par le niveau des impôts, mais aussi par la manière dont
les différents instruments fiscaux sont conçus et
combinés.
153
Graphique 11 : Réponse du taux croissance
réel suite à un choc de recettes publiques
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Un choc de recettes publiques sur la dette entraine un
accroissement de celle-ci via le déficit budgétaire et
l'accroissement plus rapide des dépenses gouvernementales. Un tel
résultat est bien conforme à la théorie économique
qui stipule que face à l'augmentation plus rapide des besoins des
gouvernements, toute diminution des ressources fiscales génère un
creusement du déficit budgétaire de base.
Graphique 12 : Réponse de la dette publique
suite à un choc de recettes publiques
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
154
Pour les dépenses publiques : un choc positif sur les
recettes publiques agit positivement sur les dépenses publiques par le
biais des impôts et des taxes dans le PIB. Ce qui est conforme à
la théorie keynésienne et à la pratique, en ce sens que la
dépense est au centre de la politique budgétaire de l'Etat, et
l'exécution des dépenses se fait toujours en fonction du niveau
des recettes réalisées.
Graphique 13 : Réponse de la dette publique
suite à un choc de recettes publiques
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour les recettes publiques elles- mêmes naturellement,
on pourrait admettre que tout choc positif ou négatif va agir sur les
ressources publiques ; soit à la hausse ou à la baisse selon le
cas. Dans le cas d'un choc positif, c'est-à-dire une baisse du taux de
pression fiscale, les recettes vont connaître une hausse dès la
première période, avant de chuter à la suite d'un choc
négatif, du simple fait que les gouvernements ne pourront
résister face aux dépenses publiques qui connaissent
généralement un accroissement plus rapide. C'est la
période (2 ; 10).
155
Graphique 14 : Réponse des recettes
publiques suite à un choc sur elles-mêmes
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
Pour les importations : un choc positif sur un intervalle de
10 périodes sur les recettes publiques se traduit par une
amélioration significative des importations entre (1 ; 3)
périodes avant de connaitre un déclin à partir de la
quatrième période. Un tel comportement des importations
s'explique en fait par la libéralisation de plus en plus poussée
des régimes commerciaux. Les droits de douane ont tendance à
baisser dans les pays en union avec le développement de zones de
libre-échanges, d'union douanière et des accords de partenariats
économiques futur à signer comme ceux en cours de
négociation entre les pays de l'ACP et ceux de l'Union
européenne. Actuellement dans les pays à faible revenu, un tiers
environ des recettes fiscales non liées aux ressources naturelles
proviennent des taxes sur les échanges (Gupta et Tareq, 2008). Ce qui
suggère qu'une libéralisation accrue du commerce entrainerait une
baisse des recettes publiques. Ainsi, cette baisse cumulative des recettes
publiques incite les gouvernements à partir de la quatrième
période (4 ; 10) à augmenter encore la fiscalité pour
décourager les importations.
156
Graphique 15 : Réponse des importations
suite à un choc de recettes publiques
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
En résumé des chocs de politiques
budgétaires, les résultats issus des fonctions de réponses
impulsionnelles confirment les résultats du test de causalité au
sens de Granger. En réalité, les fluctuations des variables
annoncent déjà la présence d'effets de débordement
ou effet de contagion sur l'économie des pays en union. Cependant,
l'efficacité des politiques budgétaires nationales dans
l'absorption des chocs défavorables est limitée du fait de
l'adoption du pacte de convergence de stabilité et de croissance depuis
1999. Les répercussions négatives sur la conjoncture interpellent
de plus en plus l'instrument budgétaire plutôt que
monétaire. Par ailleurs, les soldes budgétaires de base
déficitaires de grandes amplitudes résultent du poids grandissant
des subventions aux entreprises publiques en difficulté, et du
fléchissement des recettes fiscales. Cela atteste la
vulnérabilité des politiques budgétaires nationales
vis-à-vis des chocs émanant soit de l'intérieur soit de
l'extérieur. Pour compléter l'analyse de ce travail de recherche,
il est intéressant de quantifier l'ampleur des effets de contagion et
connaitre les voies par lesquelles la transmission se fait entre pays.
III.3- Effets de débordement et Canaux de
transmission budgétaire
Ils constituent des éléments importants
à prendre en compte dans la conduite des politiques budgétaires
en union monétaire. Leur connaissance permettrait aux décideurs
de mieux orienter leur choix de politique économique. Par contre leur
méconnaissance pourrait également être préjudiciable
à l'économie. Ainsi, nous allons d'abord analyser la matrice de
corrélation spatiale entre les pays, ensuite mesurer ampleurs des effets
de débordement et enfin d'identifier les canaux de transmission.
III.3.1- L'analyse de la matrice de corrélation
spatiale
Elle permet de faire une analyse qualitative des chocs
à l'origine des effets de débordement entre les pays de l'UEMOA.
Par exemple dans le tableau n°11 on peut interpréter qu'un choc de
dépenses publiques au Bénin est négativement
corrélé à un choc de dépenses publiques au Burkina
Faso. Mais, dans le tableau n°12 un choc de recettes publiques au
Bénin est positivement corrélé à un choc de
recettes publiques en Côte d'Ivoire, etc. Les résultats de nos
estimations sont consignés dans les tableaux ci-dessous :
|
Tableau 11 :
Corrélation spatiale de choc de dépenses
publiques
|
|
|
Correlation de choc de dépenses
publiques BEN BFA
|
CI
|
MLI
|
NIG
|
SEN
|
TOG
|
BEN
|
1,000
|
|
|
|
|
|
BFA
|
-0,372 1,000
|
|
|
|
|
|
CI
|
-0,084 0,353
|
1,000
|
|
|
|
|
MLI
|
-0,133 0,073
|
-0,034
|
1,000
|
|
|
|
NIG
|
-0,096 0,140
|
-0,030
|
0,077
|
1,000
|
|
|
SEN
|
0,272 0,077
|
-0,188
|
-0,081
|
-0,118
|
1,000
|
|
TOG
|
-0,136 0,075
|
0,141
|
-0,369
|
0,062
|
-0,140
|
1,000
|
|
Source : Auteur, à partir du
logiciel Stata
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
157
|
|
158
Tableau 12 : Corrélation spatiale de choc de
recettes publiques
Correlation de choc de recettes fiscales
|
BEN
|
BFA
|
CI
|
MLI
|
NIG
|
SEN
|
TOG
|
BEN
|
1,000
|
|
|
|
|
|
|
BFA
|
-0,065
|
1,000
|
|
|
|
|
|
CI
|
0,025
|
0,118
|
1,000
|
|
|
|
|
MLI
|
-0,113
|
-0,004
|
0,110
|
1,000
|
|
|
|
NIG
|
-0,017
|
0,085
|
-0,059
|
-0,018
|
1,000
|
|
|
SEN
|
0,183
|
0,107
|
-0,054
|
-0,162
|
-0,242
|
1,000
|
|
TOG
|
-0,022
|
-0,268
|
-0,259
|
0,036
|
0,153
|
0,052
|
1,000
|
|
Source : Auteur, à partir du logiciel
Stata
III.3.2- Les effets de débordements
budgétaires
Pour capter les effets de débordement issus de la
politique budgétaire sur les économies des pays de l'union,
plusieurs indicateurs sont possibles. Dans le cas présent, nous
privilégions seulement la croissance économique pour chaque pays
dans l'optique d'évaluer les effets de débordement sur la
performance économique en vue de voir les impacts externes des chocs
budgétaires.
o Une politique budgétaire au
Bénin
Il ressort de la figure n°6 (voir en annexe) qu'un choc
de dépenses publiques mené par le gouvernement béninois
produit un effet positif sur la croissance économique du Burkina Faso
pour (0,134) ; le Niger pour (0,040) ; le Sénégal pour (0,115) ;
le Togo pour (0,134) avec une ampleur assez faible alors que l'effet positif
est bien significatif pour le Mali avec (0,365). Par contre ce même choc
engendre un effet négatif et très significatif sur
l'économie ivoirienne avec une ampleur de (-0,360). Quant à un
choc de recettes fiscales, les effets de débordement sont positifs sur
la croissance économique en Côte d'Ivoire, mais l'ampleur (0,084)
est faible par rapport à l'effet des dépenses publiques.
Contrairement aux autres pays, l'effet de débordement reste
négatif. Mais cette ampleur relativement faible dans certains pays comme
le Burkina Faso avec
159
(-0,038) ; le Mali avec (-0,131) ; le Niger avec (-0,043) ; le
Sénégal avec (-0,074) et de façon très marginale,
le Mali avec (-0,007).
o Une politique budgétaire au Burkina
Faso
Les résultats issus de nos travaux (voir figure
n°7 en annexe) montrent qu'un choc de dépenses publiques au Burkina
Faso se traduit par des effets de débordement négatif sur les
autres économies de l'UEMOA. Mais, l'ampleur de ces effets varie selon
les pays. Ainsi, elle très significative au Sénégal pour
une valeur (-0,416) ; au Niger avec (-0,302) et au Mali avec (-0,258). Par
contre, cet effet négatif est marginal au Togo avec (-0,054) et en
Côte d'Ivoire avec (-0,050). Au Bénin, il est presque nul avec
(0,009). Pour les effets de débordement résultant d'un choc de
recettes fiscales, ils sont positifs dans certains pays comme la Côte
d'Ivoire avec une ampleur assez significative de (0,195), mais plus
significative au Niger avec (0,355) et moins au Mali avec (0,135). Pour les
pays autres que le Togo et le Sénégal l'ampleur de l'effet est
respectivement de (-0,158) et (-0, 096), donc moins importants. Pour le
Bénin l'effet négatif est assez proche de zéro, soit
(0,029).
o Une politique budgétaire en Côte-
d'Ivoire
Un choc de dépenses publiques (voir Figure n°8 en
annexe) en Côte d'Ivoire crée des effets positifs sur la
croissance économique des pays avec une amplitude faible comme au
Bénin avec (0,086), au Burkina Faso avec (0,019). Mais, elle reste
relativement plus élevée au Niger avec (0,118) et très
élevée au Togo avec (0,277). A l'inverse dans d'autres pays,
l'effet de débordement est négatif à l'instar du Mali avec
une amplitude assez faible de (-0,071) et au Sénégal avec
(-0,138). Pour un choc de recettes fiscales en Côte d'Ivoire toujours,
l'ampleur de l'effet est positive sur le Bénin et le Burkina Faso, et
faiblement significative. Les coefficients sont de l'ordre de (0,056) et de
(0,195). Au Sénégal, l'effet de débordement positif mais
très peu signifiant puisqu'il proche de zéro (0,001). Par
160
contre, il est négatif au Mali avec (-0,317) et au Togo
avec (-0,346), ce qui est assez significatif. Il en est de même pour le
Niger avec une ampleur de (-0,139).
o Une politique budgétaire au Mali
La figure n°9 en annexe met en exergue les effets de
débordement d'une politique budgétaire au Mali. Les
résultats donnent ce qui suit :
-Pour un choc de dépenses publiques, il se traduit par
un effet de débordement positif sur la croissance économique des
pays comme le Burkina Faso et le Sénégal avec des coefficients
dans l'ordre respectif de (0,318) et (0,491). On voit nettement que l'impact
est assez significatif dans ces pays. En revanche dans d'autres pays comme le
Bénin où l'effet de débordement est négatif avec
une amplitude de (-0,314), en Côte d'Ivoire, de façon très
marginale avec (-0,033), au Togo avec une ampleur très proche de
zéro (-0,021) et enfin au Niger pour (0,095).
-Simultanément, un choc de politique de recettes
fiscales engendre aussi des effets de débordement à la fois
positifs et négatifs. L'effet est positif sur l'économie du
Burkina Faso avec une amplitude assez faible au Togo (0,081), au Burkina Faso
(0,107) et en Côte d'Ivoire (0,113). Par contre au Sénégal
cette ampleur est plus significative (0,368). Quant à l'effet
négatif, il concerne l'économie du Bénin et du Niger dans
l'ordre respectif de (-0,044) et de (-0,087).
o Une politique budgétaire au Niger
La figure n°10 en annexe laisse entrevoir que la
réaction de la politique budgétaire à travers les
dépenses publiques produit des effets de débordement positifs sur
la croissance des pays comme le Bénin et le Burkina Faso dans l'ordre de
(0,025) et de (0,059). Cependant, son effet reste négatif sur les autres
pays à savoir la Cote d'Ivoire pour (-0,040), le Mali pour (-0,162)
où l'ampleur est plus significative de même que le
Sénégal avec (-0,102). Quant au Togo, l'effet négatif est
plus proche de zéro donc presque nul soit (-0,019). Lorsqu'il s'agit
d'une réaction de politique budgétaire portant sur les recettes
fiscales, l'effet de
161
débordement est différencié entre les
pays. Pour les effets de débordement positifs, ils affectent la
croissance économique du Mali dans une proportion de (0,289) et le
Sénégal à hauteur de (0,183), ici, l'effet est assez
significatif. La présence d'un effet négatif s'observe sur
l'économie béninoise avec une ampleur de (-0,269), ce qui est
assez significatif, alors qu'au Burkina Faso l'effet négatif est proche
de zéro (soit 0,015), en Côte d'Ivoire, il atteint (-0,034) de
même qu'au Togo (-0,061), ce qui est faible.
o Une politique budgétaire au
Sénégal
Il est admis d'après les résultats (voir
figuren°11 en annexe) qu'un choc de dépenses publiques au
Sénégal crée des externalités négatives sur
l'ensemble des pays de l'union excepté le Burkina Faso. Pour les pays
dont les effets de débordement sont négatifs, il y a le
Bénin avec une ampleur de (-0,036), la Côte d'Ivoire pour
(-0,101), le Mali avec (-0,130), le Niger pour (-0,018). Par contre au Burkina
Faso, l'effet de débordement est très positif et significatif
soit (0,275). Au regard des résultats sur un choc de recettes fiscales,
les effets de débordement sont variés d'un pays à l'autre.
Ils sont positifs dans certains pays tel que la Côte d'Ivoire avec
(0,075), le Mali (0,078) et le Niger (0,127). Les effets négatifs
portent sur le Burkina Faso dont l'ampleur est de (-0,221), mais assez
significatif, puis le Bénin avec (-0,046) et enfin le Togo avec
(-0,012), ce qui est presque nul puisque la valeur est proche de
zéro.
o Une politique budgétaire au Togo
Les résultats issus de la figure n°12 (voir en
annexe) montrent qu'un choc de politique budgétaire au Togo produit des
effets sur la croissance économique des pays de l'UEMOA. C'est ainsi
qu'une politique de dépenses publiques génère des effets
de débordement négatifs sur l'ensemble des pays de l'union
excepté le Bénin où l'effet s'avère positif.
L'ampleur de cet effet est plus accentuée au Sénégal et au
Mali il est de l'ordre de (-0,364) et (-0,148) ; ce qui est assez
représentatif par rapport au Niger, à la Côte d'Ivoire et
au Burkina Faso avec
162
respectivement (-0,052) ; (-0,017) et (-0,031). Pour un choc
de recettes fiscales sur la croissance économique, les effets de
débordement restent positifs sur l'économie du Mali et la
Côte d'Ivoire avec une ampleur de (0,261) et (0,091). Il est
également positif au Niger avec (0,024). Quant aux autres pays comme le
Bénin, l'effet de débordement est négatif (-0,067), au
Burkina Faso (-0,040), mais moins significatifs qu'au Sénégal
où l'ampleur de l'effet est de (-0,173).
Frankel et Rose (1998) soutiennent qu'une union
monétaire est propice à l'intensification des échanges et
à la synchronisation des cycles économiques. Pourtant, une
évaluation de l'ampleur des effets de débordement nous a permis
de voir le caractère asynchrone des cycles de croissance
économique. La fréquence des chocs asymétriques pousse les
pays au recours abusif à la politique budgétaire pour stabiliser
leur économie. Du coup, l'efficacité des politiques
budgétaires est remise fondamentalement en cause pour deux raisons
principales : (i) le risque de générer des effets
indésirables sur la croissance économique des pays ; (ii) et la
présence du comportement « de passager clandestin » lorsque
l'externalité est favorable aux pays voisins.
III.3.3- Les canaux de transmission
budgétaires
Après avoir évalué les effets de
débordement budgétaires, on s'intéresse aux canaux de
transmission. Nous tenons à préciser que l'identification des
canaux de transmission ne saurait se faire à partir d'un modèle
empirique. C'est plutôt la littérature économique qui nous
permet de tirer les conclusions nécessaires à cette
identification. La raison est bien connue. On sait que malgré les points
de convergence entre les unions monétaires, certaines
réalités restent encore spécifiques aux unes et autres.
Parmi celles-ci, figurent les canaux de transmission. Dans le cadre ce travail
de recherche, c'est l'approche théorique basée sur les
pensées keynésiennes et l'analyse de l'environnement
macroéconomique qui nous servent d'outil pour identifier les principaux
canaux de transmission des chocs budgétaires dans la zone UEMOA.
163
Dans un contexte de marché financier embryonnaire
(BRVM), le recourt des pays au financement direct s'avère peu
limité. En effet, compte tenu du faible niveau de la finance directe et
de l'adoption du taux de change fixe, le canal du prix des actifs (canal du
cours des actions et du taux change) peut s'avérer inopérant. De
plus, au regard de la situation de surliquidité des
établissements de crédit, qui ne se refinancent presque pas ou
très peu auprès de la BCEAO, il serait illusoire que le canal du
taux d'intérêt soit pleinement fonctionnel. Tout porte à
croire que le canal du crédit serait actuellement le plus avisé
dans la zone. Ce postulat est d'ailleurs justifié dans la
littérature économique, car les pays qui ont
généralement un secteur bancaire prépondérant sont
plus enclins à voir leur activité économique être
stimulée à travers le canal du crédit. A contrario, les
pays ayant un marché financier très développé, sont
les plus exposés aux canaux du taux d'intérêt et du prix
des actifs (Hamid Dawoodi et al., 2013). Cette conclusion est contraire
à celle de Sarr (2006) qui privilégie une transmission par le
canal du taux d'intérêt et de change.
Un autre canal susceptible de générer un effet
externe sur l'activité économique des pays voisins est celui de
la fiscalité. Certes, il est reconnu que dans le contexte de l'UEMOA,
que l'harmonisation des fiscalités est une conséquence directe du
marché commun et de la politique commerciale commune. Ainsi, cette
harmonisation a pour but d'éliminer la fiscalité
intérieure comme moyen de concurrence entre les Etats membres. Mais, il
va s'en dire que sur le plan national, il existe encore des
hétérogénéités en matière fiscale
(barrières tarifaires et non tarifaires) entre pays. De ce fait,
l'adoption d'une politique fiscale favorable (taux de pression faible) peut
être à l'origine d'attraction d'entreprises
étrangères et de la mobilité des facteurs de production
notamment le travail et le capital vers le pays qui a pris la mesure. Alors
l'effet contraire (défavorable) impacte négativement
l'activité économique des pays d'origine. Alors la
fiscalité constitue encore un levier permettant à un Etat
d'influencer la position du secteur privé par rapport aux autres Etats
de l'union. Cette situation est remarquable surtout dans les pays en conflit
comme la Côte d'Ivoire, le Mali et la Guinée Biseau au
profit des autres pays comme le Sénégal et
Burkina Faso. Fort de ce constat, il convient de retenir que le canal fiscal
semble être le plus opérant dans la transmission des effets de
débordement sur l'activité économique des pays de
l'UEMOA.
Partant d'une analyse minutieuse de l'environnement
commerciale, les pays de l'union échangent entre eux à hauteur de
12% selon un rapport de l'OMC (2013). Ce niveau est certes jugé faible
comparé à celui réalisé en vers l'union
européenne (64%). Mais, le canal du commerce contribue aussi à la
transmission des externalités budgétaires aussi bien pour les
dépenses publiques que pour les recettes fiscales. IL y a là une
manifestation des effets keynésiens standards qui se propagent via le
commerce extérieur. Les politiques de subventions nationales sur les
denrées alimentaires peuvent stimuler la demande
étrangère. Par exemple au Sénégal, les subventions
sur les énergies comme le carburant et le gaz butane ont permis aux pays
de la sous-région comme le Mali et la Gambie d'en
bénéficier. Il en est de même pour la fiscalité.
Graphique 16: Diagramme des flux d'échanges
intrarégionaux (en pourcentage du PIB, 2010)
164
Source : Rapport FMI 2014
165
Une relance budgétaire peut donc avoir des implications
différentes pour les pays partenaires selon qu'elle résulte d'une
stimulation de la demande ou d'une baisse de la fiscalité. Puisqu'une
politique fiscale agressive en faveur des entreprises locales peut obliger les
pays partenaires à réagir, soit en rationalisant leurs
dépenses publiques, soit en participant à leur tour à la
course ; c'est- à-dire faire autant, Giavazzi, Pagano et Blanchard
(1990). Au regard du contexte actuel de la zone et la volonté manifeste
des Etats membres d'aller vers une intégration plus poussée des
marchés, le canal du commerce extérieur est fonctionnel dans la
transmission des effets budgétaires sur la croissance économique
des pays.
En résumé, la contagion des effets de
débordement budgétaires entre pays membres s'effectue à
travers trois (03) principaux canaux de transmission à savoir : (i) le
canal du crédit en raison d'un endettement assez significatif pour
financer le déficit budgétaire ; (ii) le canal de la
fiscalité puisqu'au niveau national, on note une concurrence fiscale qui
souvent est source d'attraction ou de désincitation pour les agents
économiques (entreprises et mobilité des facteurs) ; (iii) et
enfin le canal du commerce, malgré le faible taux d'échanges, les
politiques budgétaires génèrent des externalités
entre pays partenaires même si les travaux de Sarr (2006) concluent que
cela est marginal. Ainsi, l'hypothèse 2 de notre travail de recherche
est bien vérifiée dans la mesure où les derniers travaux
portant sur la zone euro avaient bien identifié quatre canaux de
transmission budgétaires alors que nos résultats dans l'UEMOA ont
mis l'accent sur trois canaux.
166
CONCLUSION
Les résultats montrent que les effets de
débordement dans les différents pays sont très
variés. Un des facteurs explicatifs à cela reste le profil
économique de chaque pays. Nous concluons alors que l'hypothèse1
de la thèse est bien vérifiée dans la recherche ; c'est-
à-dire que l'ampleur des effets de débordement des chocs de
politiques budgétaires est tributaire du degré
d'hétérogénéité des structures
économiques. On voit également de façon très nette
que l'effet d'un choc de dépenses publiques est plus important que celui
d'un choc de recettes fiscales sur la croissance économique des pays.
Cela revient à affirmer l'hypothèse 2 de la recherche. Cette
différence d'amplitudes résulte d'une harmonisation de plus en
plus poussée en matière de politiques fiscales dans l'UEMOA.
Alors que les dépenses publiques jusque-là sont propres à
chaque Etat et définies de manière unilatérale. Nous avons
identifié aussi trois canaux de transmission dans l'UEMOA contrairement
aux quatre trouvés en zone euro. Aussi, l'hypothèse 3 de la
thèse est bien vérifiée dans le cadre de ce travail.
Ces résultats issus de nos travaux soulignent encore
quelques difficultés pour les politiques budgétaires à
assurer leur fonction de stabilisation. C'est pourquoi, nous formulons les
implications de politiques économiques suivantes à l'endroit des
autorités budgétaires :
- Accroître la capacité de
réaction des politiques budgétaires nationales face aux chocs
asymétriques (fonction de stabilisation)
Une diversification des ressources financières dans les
économies de l'UEMOA apparaît comme une condition sine qua non.
Cela suppose que les Etats doivent miser davantage sur la réforme du
secteur informel pour améliorer leurs assiettes fiscales. Ainsi, des
gains importants en bien-être des agents économiques peuvent en
découler et favoriser une mobilisation de l'épargne domestique.
Au plan macroéconomique, il faut également des réformes
structurelles relatives à l'amélioration de la flexibilité
des marchés et de certaines branches d'activité
167
comme l'agriculture et les industries agroalimentaires, pour
atténuer les répercussions négatives des chocs
budgétaires sur les indicateurs économiques et sociaux tels que
le taux de croissance ou de chômage. Cette flexibilité des
marchés demeure entre autres, un gage de protection contre les chocs ;
eu égard à la contrainte de fixité du taux de change.
Donc, il est impératif de diversifier les économies, de
constituer des stocks qui permettent d'absorber les chocs.
- Asseoir un processus de coordination plus
coopératif des politiques budgétaires nationales (comme le
fédéralisme budgétaire)
L'interdépendance croissante des économies dans
une union monétaire nécessite également un degré de
discipline de nature à protéger les Etats des conséquences
négatives de certains choix de politiques économiques. Cela
conduit à deux conceptions antinomiques de la coordination des
politiques budgétaires : (i) celle qui est envisagée comme un
ensemble de règles coercitives visant à limiter les biais des
dépenses publiques ; (ii) et celle qui est mise en place par des mesures
discrétionnaires et dont l'objectif est la stabilisation
macroéconomique.
- Aller vers une intégration économique
plus poussée des marchés
Parmi les sources
d'hétérogénéité dans l'UEMOA, figurent en
bonne place les marchés. Une analyse plus poussée des
comportements économiques des agents (approche microéconomique),
exige à ce que les Etats aillent vraiment vers une suppression des
barrières non tarifaire pour développer plus d'échanges
commerciaux. Les diversités linguistiques, les croyances traditionnelles
et les préférences individuelles demeurent encore une entrave
à la libre circulation des biens et des personnes. Une grande
connectivité entre les pays de l'UEMOA serait bénéfique.
Car le développement des infrastructures contribue par ailleurs au
renforcement et à l'approfondissement de l'intégration
régionale. Elle stimule l'intégration des secteurs productifs,
puisqu'elle rapproche des espaces économiques, réduit ou
élimine les barrières au commerce et les coûts de transport
donc facilement au commerce international.
168
169
Au sein d'un espace intégré, les questions
portant sur les effets de débordement budgétaires se posent avec
acuité. Depuis l'adoption du Pacte de Stabilité et de Croissance,
les marges de manoeuvres pour l'instrument budgétaire sont
sérieusement limitées par des critères déjà
prédéfinis. Cette thèse met en avant les
externalités budgétaires et leur transmission dans l'UEMOA
considère comme union hétérogène. A ce titre, elle
constitue un prolongement des études effectuées jusque-là
sur les politiques budgétaires et leur fonction de stabilisation. Etant
donné que les Etats jouent un rôle important dans la vie
économique et sociale, il serait intéressant d'apprécier
l'impact de leurs actions via les dépenses publiques et les recettes
fiscales sur les performances économiques ; en l'occurrence le taux
croissance réel.
L'objectif principal de ce travail est d'analyser la
propagation et l'ampleur des chocs de politiques budgétaires d'un pays
donné sur les économies des pays de l'union. Trois objectifs
spécifiques ont orienté ce travail de recherche, il s'agit
notamment de vérifier si un choc de politiques budgétaires dans
un pays donné produit des effets identiques sur les autres pays de
l'UEMOA ; Mesurer l'ampleur des effets de débordement des chocs de
politiques dans l'UEMOA (chocs de dépenses publiques et chocs de
recettes fiscales) ; Identifier les canaux de transmission des chocs
budgétaires dans l'UEMOA.
Pour faire ce travail, nous l'avons structuré en trois
(03) chapitres. Dans le premier chapitre, il était question d'expliquer
les comportements économiques des pays et les facteurs susceptibles
d'être à l'origine des effets de débordement. En union
monétaire, les économies sont interdépendantes ; de sorte
que les perturbations affectant un pays auront des répercussions sur ses
voisins. Le deuxième chapitre passe en revue les arguments
théoriques et empiriques portant sur les politiques budgétaires
et leurs effets sur l'économie. A ce niveau, les controverses
théoriques ont essentiellement porté sur la macroéconomie
traditionnelle, l'économie géographique, les finances publiques
et l'économie
170
internationale. Le troisième chapitre fait une
évaluation de l'ampleur des effets de débordement et une
identification des canaux de transmission.
Pour cela, il est utilisé un modèle VAR en Panel
dynamique et les estimations effectuées par la méthode GMM. Les
données utilisées couvent la période de 1980 à
2014. Les variables ayant permis d'analyser l'effet des chocs
budgétaires sont : le taux de croissance réel ; le taux
d'inflation ; la dette publique ; les crédits à l'économie
; les dépenses et recettes publiques ; l'investissement privé ;
et les importations. En dehors des taux d'inflation et de croissance
réel, toutes les autres variables sont rapportées au PIB, puis
loguées pour capter les élasticités.
Les premiers résultats issus de l'analyse descriptive
montrent une hétérogénéité des taux de
croissance réels entre les pays sur la période observée.
Ils sont ainsi, de (2,65%) pour le Togo ; (3,12%) au Sénégal ;
(2,58%) au Niger ; (3,86%) au Mali ; (1,57%) en Côte d'Ivoire ; (4,93%)
pour le Burkina et (4,19%) au Bénin. Les pays comme la Côte
d'Ivoire, le Niger et le Togo, de loin les plus endettés (en moyenne
1008,42 milliards, 560,29 milliards et 822,57 milliards) ont enregistré
pourtant les taux de croissance les plus faibles durant cette période.
De tels résultats justifient l'inefficacité de l'endettement
à partir d'un certain seuil. Par contre pour les autres pays, le niveau
d'endettement a permis de relancer les taux de croissance économique. Ce
caractère hétérogène des économies favorise
des réactions variées face aux chocs asymétriques. En
plus, les pays de l'union sont encore exportateurs de produits de base, alors
qu'ils importent des produits manufacturés. Ce phénomène
les rend très vulnérables avec la volatilité des prix
(inflation importée) malgré les politiques de stabilisation.
Les résultats économétriques nous ont
permis d'aller plus loin dans nos analyses. Les fonctions de réponses
impulsionnelles et de la décomposition de la variance, nous ont permis
de voir que les délais de transmission des chocs de politique
budgétaire sur les variables sont très courts et que
l'activité économique est très élastique aux
fluctuations des instruments budgétaires. Un choc positif de
dépenses publiques se traduit par une amélioration significative
de la
171
croissance économique durant toute la période.
Par contre pour les importations, il se traduit par une baisse significative de
celles-ci durant toute la période, en raison des subventions à la
consommation. Les tests de causalité à la manière de
Granger révèlent le caractère exogène des
politiques budgétaires. Ainsi, l'absence de relation de
co-intégration justifie que les effets réels des politiques
budgétaires sur l'activité économique demeurent soumis
à des sources d'incertitude liées aux chocs imprévisibles
émanant de l'extérieur, cela, du fait de la faiblesse des
stabilisateurs automatiques. Les résultats montrent que les effets de
débordement dans les différents pays sont très
variés. Un des facteurs explicatifs à cela reste le profil
économique de chaque pays. Nous concluons alors que l'hypothèse1
de la thèse est bien vérifiée dans la recherche ; c'est-
à-dire que les signes des effets de débordement des chocs de
politiques budgétaires sont tributaires de la structure
économique des pays de la zone. On voit également de façon
très nette que l'effet d'un choc de dépenses publiques est plus
important que celui d'un choc de recettes fiscales sur la croissance
économique des pays. Cela revient à affirmer l'hypothèse 2
de la recherche. Cette différence d'amplitudes résulte d'une
harmonisation de plus en plus poussée en matière de
législations fiscales dans l'UEMOA. Alors que les dépenses
publiques jusque-là sont propres à chaque Etat et définies
de manière unilatérale. Nous avons identifié aussi trois
canaux de transmission dans l'UEMOA contrairement aux quatre trouvés en
zone euro. Il s'agit : (i) le canal du crédit en raison d'un endettement
assez significatif pour financer le déficit budgétaire ; (ii) le
canal de la fiscalité puisqu'au niveau national, on note une concurrence
fiscale qui souvent est source d'attraction ou de désincitation pour les
agents économiques (entreprises et mobilité des facteurs) ; (iii)
et enfin le canal du commerce, malgré le faible taux d'échanges,
les politiques budgétaires génèrent des
externalités entre pays partenaires.
Les résultats principaux issus de nos travaux ont
permis de formuler deux (02) implications de politiques économiques
à l'endroit des autorités budgétaires :
- (i)
172
accroître l'efficacité des politiques
budgétaires nationales dans l'absorption des chocs asymétriques
(fonction de stabilisation) ;
- (ii) asseoir un processus de coordination plus
coopératif des politiques budgétaires nationales (comme le
fédéralisme budgétaire).
La réponse à notre question centrale de
recherche posée initialement, est que les pays entretiennent une
corrélation spatiale des chocs de dépenses publiques et de
recettes fiscales. Pour cette raison, les chocs budgétaires peuvent bel
et bien impacter l'économie des pays voisins dans l'UEMOA. Cette
thèse semble utile parce qu'elle évalue les effets de
débordement qui, jusque-là faisaient l'objet d'analyse
qualitative (signe positif ou négatif de l'effet). Les
résultats issus de ces travaux serviront à alimenter à
recherche pour des questions semblables à celle que nous venons de
traiter. Malgré ce travail effectué sur la question, cette
thèse n'est pas exhaustive. De futures recherches pourront
s'intéresser au changement de régime des effets de
débordement budgétaires.
Nonobstant les résultats obtenus, ce travail admet des
limites. Une critique qui peut être faite à l'encontre du
modèle est de n'avoir pas désagrégé les
dépenses publiques totales en dépenses de consommation
(réaction spontanée sur les autres variables
macroéconomique) et en dépenses d'investissement (réaction
long terme sur les variables) pour mieux capter l'impact des chocs
budgétaires sur l'activité économique réelle des
Etats. Autre limite de ce travail est que le modèle manque aussi de
dérivation explicite des comportements macroéconomiques à
partir de fondements microéconomiques. Mais, l'absence d'un bloc
décrivant les équations de comportements microéconomiques
n'implique pas que ces derniers soient ignorés : ils sont d'ailleurs
utiles en cas de choc (par exemple le comportement des consommateurs). Pour des
futures recherches, on pourrait intégrer ces variables en vue
d'atteindre d'autres résultats plus consistants dans le cadre des
articles et autres travaux de recherche.
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II
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de l'UEMOA
Périodes
|
BENIN
|
BFA
|
CI
|
GNB
|
MLI
|
NIG
|
SEN
|
Togo
|
UEMOA
|
1980-19994
|
TCREL
|
3,69
|
3,39
|
-0,20
|
3,11
|
2,58
|
0,04
|
1,89
|
1,41
|
1,99
|
DETTE PUB
|
0,65
|
0,30
|
1,40
|
195,93
|
0,90
|
0,67
|
0,70
|
1,03
|
25,20
|
SOLDE PIMAIRE
|
-0,05
|
-0,04
|
-0,09
|
-59,87
|
-0,03
|
-0,05
|
-0,03
|
-0,06
|
-7,53
|
INFLATION
|
2,62
|
3,89
|
6,93
|
51,09
|
6,50
|
5,15
|
6,31
|
6,47
|
11,12
|
CREDIT ECO
|
0,23
|
0,11
|
0,43
|
104,17
|
0,21
|
0,17
|
0,37
|
0,25
|
13,24
|
IMPORT
|
0,01
|
0,04
|
0,00
|
24,60
|
0,05
|
0,01
|
0,01
|
0,02
|
3,09
|
1995-1999
|
TCREL
|
5,08
|
7,54
|
5,03
|
-0,91
|
5,22
|
3,73
|
4,55
|
6,25
|
4,56
|
DETTE PUB
|
0,60
|
0,52
|
1,38
|
4,59
|
1,07
|
0,83
|
0,79
|
0,99
|
1,35
|
SOLDE PIMAIRE
|
0,00
|
-0,02
|
-0,02
|
0,01
|
-0,03
|
-0,03
|
0,01
|
-0,05
|
-0,02
|
INFLATION
|
5,78
|
4,21
|
5,33
|
27,70
|
7,55
|
3,65
|
3,37
|
5,84
|
7,93
|
CREDIT ECO
|
0,08
|
0,11
|
0,25
|
0,08
|
0,11
|
0,09
|
0,22
|
0,24
|
0,15
|
IMPORT
|
0,02
|
0,05
|
0,00
|
0,07
|
0,09
|
0,02
|
0,01
|
0,02
|
0,03
|
2000-2008
|
TCREL
|
4,47
|
5,55
|
0,42
|
2,55
|
5,40
|
4,13
|
4,19
|
1,50
|
3,53
|
DETTE PUB
|
0,33
|
0,36
|
0,59
|
1,77
|
0,50
|
0,49
|
0,44
|
0,79
|
0,66
|
SOLDE PIMAIRE
|
-0,01
|
-0,04
|
-0,01
|
-0,08
|
0,00
|
0,03
|
-0,02
|
-0,01
|
-0,02
|
INFLATION
|
3,49
|
2,47
|
3,63
|
11,49
|
3,00
|
3,50
|
3,06
|
3,01
|
4,21
|
CREDIT ECO
|
0,09
|
0,15
|
0,19
|
0,07
|
0,13
|
0,09
|
0,23
|
0,19
|
0,14
|
IMPORT
|
0,03
|
0,07
|
0,00
|
0,05
|
0,10
|
0,04
|
0,01
|
0,04
|
0,04
|
2009-2014
|
TCREL
|
4,29
|
5,70
|
4,83
|
3,11
|
3,64
|
5,68
|
3,43
|
4,51
|
4,40
|
DETTE PUB
|
0,16
|
0,23
|
0,35
|
0,47
|
0,21
|
0,17
|
0,28
|
0,22
|
0,26
|
SOLDE PIMAIRE
|
-0,02
|
-0,03
|
-0,02
|
-0,14
|
-0,03
|
-0,03
|
-0,05
|
-0,03
|
-0,04
|
INFLATION
|
2,30
|
2,60
|
2,84
|
2,99
|
4,31
|
3,31
|
0,54
|
3,15
|
2,75
|
CREDIT ECO
|
0,19
|
0,22
|
0,25
|
0,12
|
0,15
|
0,12
|
0,31
|
0,35
|
0,21
|
IMPORT
|
0,04
|
0,07
|
0,01
|
0,02
|
0,10
|
0,03
|
0,01
|
0,05
|
0,04
|
III
Tableau de bloc du taux de croissance réelle de
l'UEMOA
BENIN BFA CI GNB MLI NIG SEN Togo
Source : Auteur, à partir du Logiciel
Stata
Tableau d'évolution des cycles de croissance
réelle dans l'UEMOA
1980 1990 2000 2010 2020
années
BENIN BFA
CI GNB
MLI NIG
SEN Togo
Source : Auteur, à partir du Logiciel
Stata
iv
Tableau d'Evolution des cycles de la dette publique des
pays de l'UEMOA
1980 1990 2000 2010 2020
années
BENIN BFA
CI MLI
NIG SEN
Togo
Source : Auteur, à partir du Logiciel
Stata
Tableau des Fonctions de Réponses
Impulsionnelles
Source : Auteur, à partir du Logiciel
Stata
V
Tableau 13 : Résultats du test de
causalité au sens de granger
Equation/Excluded
|
Chi2
|
Df
|
Pro > chi2
|
Tcrel
detpubpib
|
1.169
|
2
|
0.557
|
depubpib
|
15.486
|
2
|
0.000
|
recpubpib
|
2.403
|
2
|
0.301
|
importpib
|
6.677
|
2
|
0.035
|
All
|
29.004
|
8
|
0.000
|
Equation/Excluded
|
Chi2
|
Df
|
Pro > chi2
|
Detpupib
tcrel
|
12.237
|
2
|
0.02
|
depubpib
|
16.632
|
2
|
0.000
|
recpubpib
|
1.521
|
2
|
0.468
|
importpib
|
7.936
|
2
|
0.019
|
All
|
52.467
|
8
|
0.000
|
Equation/Excluded
|
Chi2
|
Df
|
Pro > chi2
|
depupib
tcrel
|
12.324
|
2
|
0.02
|
detpubpib
|
6.044
|
2
|
0.049
|
recpubpib
|
9.674
|
2
|
0.008
|
importpib
|
3.185
|
2
|
0.203
|
All
|
34.123
|
8
|
0.000
|
Equation/Excluded
|
Chi2
|
Df
|
Pro > chi2
|
recpubpib
tcrel
|
10.418
|
2
|
0.005
|
detpubpib
|
3.514
|
2
|
0.173
|
depupib
|
22.156
|
2
|
0.000
|
importpib
|
2.391
|
2
|
0.303
|
All
|
32.694
|
8
|
0.000
|
Equation/Excluded
|
Chi2
|
Df
|
Pro > chi2
|
importpib
tcrel
|
3.646
|
2
|
0.162
|
detpubpib
|
18.748
|
2
|
0.000
|
depupib
|
13.598
|
2
|
0.001
|
recpubpib
|
3.985
|
2
|
0.136
|
All
|
45.893
|
8
|
0.000
|
Source : Auteur, à partir du logiciel
Sata
vi
Figure 6 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Bénin sur la croissance économique des pays
de l'UEMOA
0,500 0,400 0,300 0,200 0,100
|
0,134
0,084
|
0,365
|
|
0,040
|
0,115
|
0,134
|
|
0,000 -0,100 -0,200 -0,300 -0,400
|
BFA -0,038
|
|
-0,007
CI MLI
|
NIG
-0,131
|
SEN
-0,043
|
TGO
-0,074
|
-0,360
|
effet d'un choc de dépenses publiques effet d'un choc de
recettes fiscales
Figure 7 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Burkina Faso sur la croissance économique des pays
de l'UEMOA
0,400
0,300
0,200
|
|
|
0,195
|
|
0,355
|
|
|
|
|
|
|
|
0,135
|
|
|
|
0,100
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
0,000
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
-0,009 B EN
-0,029
|
CI
|
|
MLI
|
|
NIG
|
|
SEN
|
TGO
|
-0,100
|
|
-0,050
|
|
|
|
|
|
|
-0,054
|
|
|
|
|
|
|
|
|
-0,096
|
|
-0,200
|
|
|
|
|
|
|
|
|
-0,158
|
-0,300
|
|
-0,258
|
|
|
|
|
|
|
|
|
-0,302
|
|
|
|
-0,400
|
|
|
|
|
|
|
|
-0,416
|
|
-0,500
|
|
|
|
Effet d'un choc de dépenses publiques effet d'un choc de
recettes fiscales
vii
Figure 8 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires en Côte d'Ivoire sur la croissance économique
des pays de l'UEMOA
-0,138
-0,139
MLI
-0,075
BEN BFA
0,400
0,118
0,001
SEN TGO
-0,317
-0,346
Effet d'un choc de dépenses publiques Effet d'un choc de
recettes fiscales
0,300
0,159
0,086
0,056
0,019
0,277
NIG
-0,400
0,200
0,100
0,000
-0,100
-0,200
-0,300
Figure 9 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Mali sur la croissance économique des pays de
l'UEMOA
|
0,600
0,491
|
0,500
|
|
0,368
|
0,400
|
0,318
|
|
|
|
|
|
|
0,300
|
|
|
0,200
|
0,107
|
|
0,113
|
|
0,081
|
0,100
|
|
|
|
0,000 -0,100 -0,200 -0,300
|
B
|
EN BFA CI NIG SEN -0,021 TGO
-0 ,044 -0,033
|
-0,095 -0,087
|
|
-0,314
|
|
-0,400
|
Effet d'un choc de dépenses publiques effet d'un choc de
recettes publiques
viii
Figure 10 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Niger sur la croissance économique des pays de
l'UEMOA
0,300 0,200 0,100 0,000
- 0,100
0,400
0,289
-0,041
BFA-0,015 CI
-0,034
MLI
BEN
SEN -0,019TG
O
-0,061
-0,102
0,183
0,059
0,025
Effet d'un choc de dépenses publiques effet d'un choc de
recettes publiques
Figure 11 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Sénégal sur la croissance économique
des pays de l'UEMOA
-0,087
0,100
0,000
0,200
0,127
0,075 0,078
- 0,100
CI
BEN BFA
-0,036 -0,046
-0,130
-0,101
- 0,200
-0,221
- 0,300
effet d'un choc de dépenses publiques effet d'un choc de
recettes fiscales
ix
Figure 12 : Effet d'un choc de politiques
budgétaires au Togo sur la croissance économique des pays de
l'UEMOA
|
|
|
|
0,300
|
|
|
|
0,261
|
|
|
0,200
|
0,087
|
|
0,091
|
|
|
0,100
|
|
|
|
|
0,024
|
0,000
|
BEN
-0,067
|
BFA
-0,031 -0,040
|
-0,017CI
|
|
MLI
NIG
-0,052
|
SEN
|
|
-0,100
|
|
|
|
|
|
-0,148
|
|
-0,200
|
|
|
|
|
0,173
|
-0,300
|
|
|
|
|
|
-0,364
|
-0,400
|
|
|
|
effet d'un choc de dépenses publiques Effet d'un choc de
recettes fiscales
Source : Auteur, à partir du Logiciel
Stata
X
TABLE DES MATIERES
LISTE DES FIGURES I
LISTE DES GRAPHIQUES II
LISTE DES TABLEAUX III
LISTE DES ACRONYMES IV
RESUME VII
INTRODUCTION GENERALE 1
CHAPITRE I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET EXTERNALITES
BUDGETAIRES DANS L'UEMOA 14
SECTION I : HETEROGENEITE STRUCTURELLE ET CHOCS ECONOMIQUES15
I.1- Descriptions des indicateurs macroéconomiques dans
la zone 16
I.1.1- L'analyse en termes de performances économiques
17
I.1.2- L'analyse en termes d'inflation 20
I.1.3- L'analyse des flux commerciaux 22
I.1.4- L'analyse du déficit primaire 24
I.2- Sources de disparités économiques 25
I.2.1- L'hétérogénéité du
marché financier 25
I.2.2- L'hétérogénéité du
marché du travail 27
I.2.3- L'hétérogénéité du
marché des biens et services 28
I.3- Chocs économiques et leurs absorptions 30
I.3.1- La sensibilité des économies aux chocs
asymétriques 30
I.3.2- Les politiques de stabilisation des chocs
asymétriques 32
I.3.3- Les mécanismes d'ajustement aux chocs
économiques 34
SECTION II : ANALYSE DES EXTERNALITES BUDGETAIRES DANS
LA ZONE 44
II.1- Approche de la Nouvelle Économie Keynésienne
(NEK) 45
II.2- Approche de la Nouvelle Économie Classique (NEC)
46
II.3- Nature des externalités budgétaires
47 SECTION III : CONVERGENCE BUDGETAIRE ET SURVEILLANCE
MULTILATERALE DANS L'UEMOA 50
III.1- Fondements de la convergence budgétaire 51
xi
III.2- Réformes institutionnelles en matière
budgétaire 53
III.3- Mécanismes de surveillance multilatérale
56
CHAPITRE II : FONDEMENTS THEORIQUES ET EMPIRIQUES DE LA
POLITIQUE BUDGETAIRE EN UNION MONETAIRE 62
SECTION I : THEORIE DE L'UNION MONETAIRE OPTIMALE 63
I.1- Fondements théoriques d'une union monétaire
64
I.2- La théorie de la zone monétaire optimale
65
I.3- Critères d'optimalité pour une union
monétaire 68
I.3.1- La forte mobilité du facteur travail 68
I.3.2- Le taux d'ouverture : McKinnon 69
I.3.3- La nature de la spécialisation : Kenen (1969)
69
I.3.4- L'intégration financière et fiscale : Ingram
et Johnson (1969) 69
I.3.5- L'homogénéité des
préférences : Cooper et Kindelberger 70
I.3.6- L'endogénéité des critères
d'optimalité 71
SECTION II : POLITIQUE BUDGETAIRE EN UNION MONETAIRE 73
II.1- Généralités sur la politique
budgétaire 74
II.1.1- L'analyse keynésienne de la politique
budgétaire 74
II.1.2- L'analyse néoclassique de la politique
budgétaire 75
II.1.3- L'analyse de la nouvelle géographie
économique (NEG) 76
II.2- Choix de politiques budgétaires 77
II.2.1- La politique d'austérité budgétaire
78
II.2.2- La politique de relance budgétaire 80
II.3- Caractère cyclique de la politique
budgétaire 81 SECTION III : MECANISME DE TRANSMISSION DES EFFETS
BUDGETAIRES
84
III.1- Canal du commerce 84
III.2- Canal fiscal 86
III.3- Canal du taux d'intérêt 88
III.4- Canal de l'inflation 90
SECTION IV : COORDINATION BUDGETAIRE DANS UNE UNION MONETAIRE
HETEROGENE 91
IV.1- XII
Cadre conceptuel de la coordination budgétaire 92
IV.1.1- Les définitions et objectifs de la politique de
coordination 92
IV.1.2- Les fondements institutionnels d'une coordination
budgétaire 93
IV.1.3- Les avantages et limites d'une coordination
budgétaire 94
IV.2- Approches sur les orientations de la coordination
budgétaire 97
IV.2.1- Les apports de la théorie des jeux 97
IV.2.2- Les règles ou principes de disciplines
budgétaires 98
IV.2.3- La synchronisation des cycles économiques (nominal
et réel) 102
IV.2.4- Le fédéralisme budgétaire 104
IV.3- Quelques résultats empiriques dans les unions
monétaires 105 CHAPITRE III : EVALUATION DES EFFETS DE DEBORDEMENT
BUDGETAIRES DANS L'UEMOA 110
SECTION I : PRESENTATION GENENRALE D'UN VAR EN PANEL 111
I.1- Présentation du modèle théorique
112
I.2- Choix d'un modèle VAR en panel 114
I.3- Présentation d'un modèle VAR 115
SECTION II : SPECIFICATION DU MODELE ET SOURCES DE DONNEES
117
II.1- Spécification des variables du modèle 117
II.2- Méthode d'estimation 119
II.3- Présentation des sources de données 123
SECTION III : PRESENTATION DES RESULTATS ET INTERPRETATIONS
123
III. 1- Présentation des résultats de la
modélisation 124
III.2- Analyse des chocs budgétaires 144
III.2.1- La décomposition de la variance d'erreur 144
III.2.2- Les Fonctions de Réponses Impulsionnelles 147
III.3- Effets de débordement et Canaux de transmission
budgétaire 157
III.3.1- L'analyse de la matrice de corrélation spatiale
157
III.3.2- Les effets de débordements budgétaires
158
III.3.3- Les canaux de transmission budgétaires 162
CONCLUSION 166
BIBLIOGRAPHIE 173
XIII
ANNEXES i
TABLE DES MATIERES x
|