Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes. Cas du rapport avec la République Dominicaine, les Etats-Unis et le Chili.par Roodly RICHARD Ecole de Droit et des Sciences Economies des Gonaives (UEH) - Licence 2015 |
1.2 Objectifs spécifiques
Page 16 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » 1.3 Justification du choix du thèmeL'émergence d'une concertation internationale autour du besoin de protéger les travailleurs migrants vient du fait que les États ont rapidement réalisé qu'ils ne pouvaient traiter unilatéralement de la question migratoire. Ils ont par ailleurs pris conscience de la vulnérabilité dans laquelle se trouvent certains travailleurs migrants. Les États tentent alors de concilier leurs intérêts qui sont souvent contradictoires. La vulnérabilité des travailleurs migrants peut s'apprécier au cours du voyage ainsi que dans le cadre du séjour dans le pays d'accueil. Malgré un discours récent sur les contributions de la migration au développement des pays d'origine et de destination13. Haïti depuis 1915,14 est un pays d'émigrés ou plus de trois millions15 d'haïtiens dans des pays d'accueil où le racisme et la xénophobie sont très marqués et se traduisent par des actes d'abus de violences ; des stéréotypes de tout genre, de cruautés et de discrimination. Donc, face à ce vide juridique ou les travailleurs migrants haïtiens ne bénéficient pas d'une loi de protection et d'une politique migratoire établie par l`Etat en vue de protéger le citoyen haïtien partout au regard de cette convention signée par l'Etat haïtien qui n'a jamais été ratifiée par le pouvoir le législatif. Les haïtiens et haïtiennes migrent pour différentes raisons. Leur déplacement peut être forcé, pour cause de conflit16, de politique migratoire17, 13 Dans ce sens voir le rapport du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Rapport mondial sur le développement humain. Lever les barrières : mobilité et développement humain, 2009, 237p. ; Organisation de Coopération et de développement économique (OCDE), Perspectives des Migrations Internationales, 2010, 381p. ; ou encore Organisation internationale pour les Migrations (OIM), Etat de la Migration dans le monde - Bien communiquer sur la migration, Genève, 2011, 161p. Ces deux rapports mettent en évidence les contributions positives des migrations sur le développement des pays d'origine et de destination, à moyen et long terme. Tout d'abord, les migrations s'inscrivent dans le cadre d'un déséquilibre démographique à l'échelle du globe. Pour les pays d'origine, les migrants constituent une ressource économique grâce aux transferts de fonds et allègent la pression sur l'emploi. Pour les pays de destination, les migrants occupent les emplois « boudés » par les nationaux, comme le service à la personne, notamment auprès des personnes âgées, la population des pays développés étant vieillissante. On peut aussi mentionner le fait que la migration attire les investissements directs étrangers (IDE) qui conduisent à la création d'emplois dans les entreprises bénéficiaires. 14 http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/26973/img-1.jpg 15 http://www.collectif-haiti.fr/migration-haitienne.php 16 Ruth Haug, « Forced Migration, Processes of Return and Livelihood Construction among Pastoralists in Northern Sudan », Disasters, vol. 26, n° 1, 2002, pp. 70-84. 17 Jorgen Carling, « Migration Control and Migrant Fatalities at the Spanish-African Border », International Migration Review, vol. 41, n° 2, 2007, pp. 316-343. Page 17 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » de dangers environnementaux ou technologiques18, de maladie19 ou de déportation politique20. Mais l'émigration est dans la majorité des cas une décision personnelle ou familiale prise pour un motif économique. Si l'on prend comme point de départ le modèle d'Arthur Lewis, les marchés de l'emploi intérieurs et transnationaux fonctionnent de manière imparfaite21. La migration résulte ainsi de l'espoir de gagner davantage ailleurs, grâce à de meilleurs salaires ou à une rémunération plus appropriée ; l'individu cherche un marché où il pourra travailler dans son domaine de compétences ou de préférence22. Les décisions d'émigrer se prennent dans le cadre de la famille, en tant que moyen de faire face à des aléas financiers et de diversifier les sources de revenu23 ; elles se multiplient peu à peu avec l'établissement de réseaux sociaux24. Selon les estimations du BIT de la fin des années 9025, « plus de 90 millions de travailleurs migrants, y compris les membres de leur famille résident actuellement, légalement ou non, dans un pays autre que le leur. Alors qu'au moment de l'adoption des instruments de protection de l'OIT de 1949 les migrations internationales étaient soit des migrations de peuplement, soit des migrations temporaires. Après la crise pétrolière de 1973 dont avaient souffert les pays d'accueil européens, les travailleurs migrants temporaires ont mué en travailleurs migrants permanents avec la pratique parfois abusive des regroupements 18 Lori Hunter, « Migration and Environmental Hazards », Population and Environment, vol. 26, n° 4, 2005, pp. 273-302. 19 Samuel Clark et al., « Returning Home to Die: Circular Labour Migration and Mortality in South Africa », Scandinavian Journal of Public Health, vol. 35, n° 3, 2007, pp. 35-44. 20 John Salt and J. Stein, « Migration as a Business: The Case of Trafficking », International Migration, vol. 35, n° 4, 1997, pp. 467-494. Ruth Haug, op. cit. 21 Arthur Lewis, « Economic Development with Unlimited Supplies of Labour », Manchester School of Economic and Social Sciences, vol. 22, n° 2, 1954, pp. 139-191. 22 Larry A. Sjaastad, « The Costs and Returns of Human Migration », The Journal of Political Economy, vol. 70, 1962, pp. 80-93. John Harris and M. Todaro, « Migration, Unemployment and Development: A Two-Sector Analysis », American Economic Review, vol. 5, n° 1, 1970, pp. 23-42. 23 Jacob Mincer, « Family Migration Decisions », Journal of Political Economy, vol. 86, n° 5, 1978, pp. 749773. Oded Stark, The Migration of Labor, Oxford, Basil Blackwell, 1991, 406 p. 24 Paul Winters et al., « Family and Community Networks in Mexico-US Migration », Journal of Human Resources, vol. 36, n° 1, 2001, pp. 159-184. Kaivan Munshi, « Networks in the Modern Economy: Mexican Migrants in the US Labor Market », Quarterly Journal of Economics, vol. 118, n° 2, 2003, pp. 549-597. 25 ILO WORLD EMPLOYMENT 1995 An ILO report Genève 1995. 2o pages. Page 18 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » familiaux. Sur ce chapitre aussi, les migrations de familles entières ont tout au long de l'histoire occasionnées la migration simultanée de nombreuses femmes et enfants26. Ce dernier phénomène désigné par l'expression « féminisation de la migration » et «'mineurs non accompagnés» ou `'mineurs séparés", où s'ajoutent, le trafic et la traite27 surtout de ces dernières, tend à prendre de l'ampleur depuis quelques années. En outre, le profil des travailleurs migrants engagés a changé. Alors qu'auparavant les travailleurs migrants temporaires étaient essentiellement des travailleurs semi-qualifiés qui occupaient des emplois dont les nationaux ne voulaient pas, aujourd'hui les travailleurs migrants hautement qualifiés28 sont préférés par les pays d'accueil. Ce qui ne change pas véritablement la donne, puisque dans la pratique, la majorité des travailleurs migrants occupent des emplois non qualifiés ou semi-qualifiés, souvent dans des conditions irrégulières. Mais ces migrations n'ont pas seulement gagné en intensité. Elles ont également connu une évolution qualitative29. Ainsi, certains pays qui étaient jadis considérés comme des pays d'émigration sont aujourd'hui devenus des pays dits d'immigration. On assiste à un bouleversement rapide des motifs traditionnels de migration ; celle-ci évolue globalement en fonction de facteurs tels que les contraintes, la démographie, la politique, les structures économiques et les conditions familiales. Le phénomène migratoire restera sans doute une caractéristique fondamentale de notre époque, due notamment à des facteurs démographiques : la population des pays développés tend à baisser tandis que celle des pays en développement augmente, ce qui se traduit par un afflux de main-d'oeuvre qui accroît la pression migratoire. Les contraintes évoluent avec les progrès technologiques et la circulation des informations tandis que certains pays éprouvent des difficultés à légitimer 26 LANSDOWN (Gerison) « COMBATTRE LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES ENFANTS AU SEIN DE L'UE » Proposition de politique d'Evronet, rapport du réseau européen des enfants Novembre 2000 68 pages 27 317 millions d'enfants travaillent dans le monde, 218 millions dans les pires formes de travail, selon un rapport de l'OIT en 2008. Et 8,4 millions d'enfants impliques dans les pires formes de travail et soit 2,1 victimes de traite en Afrique .Rapport de l'OIT en 2005. 28 LE MONDE SYNDICAL ; Confédération internationale des syndicats libres, DOSSIER « Migrations: «fuite des cerveaux» et inégalités de développement, N°3 CISL | mai 2004, p.10-40. http://www.icftu.org 29 DOCUMENT ; « l'OIM et la Migration de main d'oeuvre », www.iom.int p.1-.11 Page 19 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » leurs flux migratoires. Ils se sont mis à multiplier les formalités administratives, ce qui a contribué à compliquer les itinéraires des migrants et à intensifier la migration interne30. On observe en outre bien d'autres changements, et en premier lieu une féminisation très marquée de la migration librement choisie : les femmes représentent aujourd'hui 49,6 % des migrants internationaux31. Nous savons par ailleurs peut-être en raison d'une meilleure collecte de données que la migration Sud-Sud (surtout entre pays voisins) présente un volume presque égal à celui de la migration Sud-Nord32. La réglementation accrue aux frontières a également entraîné des changements : les migrants donnent souvent la préférence à des schémas circulaires, comprenant des déplacements réguliers entre leur patrie et la région d'accueil. Mais une politique plus restrictive peut inciter certains à rester dans la région où ils ont trouvé du travail, dans la crainte de ne plus pouvoir y revenir s'ils rentrent chez eux. Une politique draconienne tend aussi à provoquer des flux migratoires illicites et, par conséquent, à favoriser le secteur informel33. Tous ces éléments d'appréciation contribuent à indiquer que la migration restera une caractéristique de la mondialisation et qu'elle aura des effets puissants sur les pays en développement. Pour en exploiter au mieux le potentiel, il est donc essentiel de comprendre comment la migration peut contribuer au développement et de saisir les enjeux économiques liés aux flux migratoires34. D'où le choix du terme : « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » 30 John Salt and J. Stein, « Migration as a Business: The Case of Trafficking », International Migration, vol. 35, n° 4, 1997, pp. 467-494. Ruth Haug, op. cit. 31 Dilip Ratha and Zhimei Xu, op. cit. 32 Arthur Lewis, « Economic Development with Unlimited Supplies of Labour », Manchester School of Economic and Social Sciences, vol. 22, n° 2, 1954, pp. 139-191. 33 Larry A. Sjaastad, « The Costs and Returns of Human Migration », The Journal of Political Economy, vol. 70, 1962, pp. 80-93. John Harris and M. Todaro, « Migration, Unemployment and Development: A Two-Sector Analysis », American Economic Review, vol. 5, n° 1, 1970, pp. 23-42. 34 Jacob Mincer, « Family Migration Decisions », Journal of Political Economy, vol. 86, n° 5, 1978, pp. 749773. Oded Stark, The Migration of Labor, Oxford, Basil Blackwell, 1991, 406 p. Page 20 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » Page 21 of 127 ROODLY RICHARD 8/2/19 « Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: cas du rapport avec la République Dominicaine, les États-Unis et le Chili » |
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