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RGPD contrainte légale ou opportunité pour les entreprises ?


par Mathieu DARMET
Ecole de Management de Grenoble - Responsable Opérationnel d'Unité 2018
  

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ANNEXE 6 - Entretien Stéphane Bergerat, Cinetic IT

GUIDE D'ENTRETIEN

- Quelles sont les démarches ou réflexions qui ont été entreprises au sein de votre structure ?

o Dans votre fonctionnement interne ? Vos outils de communication, démarches marketing ? Type de données collectées, usage, conservation ? Accompagnement, experts, conseils...

o DPO, groupe de travail

o Dans les services ou l'accompagnement de vos clients ?

Ont-ils pris la mesure de leurs responsabilités ? PME, peu responsabilisés

? Gros sont largement interpellés > Démarches

? PME certains en parlent diffus

? Aucune réflexion petits clients > Occupé par leur activité

Avez-vous eu des demandes particulière (cryptage, recensement, documentation...) : Procédure d'effacement des données pour vos clients ; demandes de certification ou label CNIL ; analyses de risques/impact PIA (Privacy Impact Assesment) ou audit...

o Avez-vous révisé vos contrats clients et sous-traitant ? Clause de garantie ?

o Avez-vous souscrit une cyber assurance ?

- Quelles adaptations techniques avez-vous réalisé pour garantir la sécurité de vos données ? Quels impacts économiques ? Investissements ?

- Pensez-vous que cette réforme constitue une contrainte ou une opportunité pour l'entreprise ?

- Pensez-vous que ces dispositions soient suffisantes ? Quelle est votre analyse ?

o Pensez-vous que cette réforme constitue une contrainte ou une opportunité pour l'entreprise ?

o Pensez-vous que c'est l'opportunité pour l'Europe de reprendre la main sur le numérique ?

Mathieu DARMET - Mémoire de fin d'étude - Business Manager 2018

 
 
 

Le RGPD - Contrainte légale ou opportunité pour les entreprises ?

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TRANSCRIPTION INTERVIEW Stéphane Bergerat

Le 07/05/2018 via Skype

Dirigeant de la société CINETIC IT à Limonest. Prestataire de services informatique

Stéphane Bergerat : Le RGPD pour nous c'est relativement simple car aujourd'hui on était déjà sensibilisé par les lois informatiques et liberté.

Mathieu Darmet : Est-ce que vous aviez déjà mis en place quelque chose ?

SB : Non parce qu'on ne collecte pas de données personnelles sur les clients.

MD : Si ce n'est leurs adresses ou leurs coordonnées...

SB : Les coordonnées c'est souvent une adresse professionnelle, un numéro de téléphone professionnel ou un 06 éventuellement et une adresse mail.

MD : Ce qui constitue une donnée personnelle puisque tu peux identifier les gens.

SB : C'est une donnée personnelle, mais pas une donnée sensible.

MD : Je vois bien la distinction. Tu es moins concerné que les personnes qui feraient du e-commerce avec le particulier directement.

SB : Ce qui semble être défini d'après ce que j'ai pu lire, c'est qu'il faut que la donnée puisse identifier une seule et unique personne. Donc aujourd'hui un numéro de sécurité sociale peut identifier une personne. Alors qu'un nom, prénom ça n'identifie pas forcément une personne. C'est à dire que Stéphane Bergerat potentiellement il y en a 50 ou 100 en France.

MD : C'est vrai. Rien que sur Skype j'en ai trouvé 3.

SB : Voilà ce que je veux dire. Comment on met en place des éléments qui protègent le fait qu'une donnée permet d'identifier une personne ? C'est un peu le débat. Si je me retrouve avec son 06, son nom, son prénom, sa date de naissance, son lieu de naissance. Tout ça cumulé me permet d'identifier cette personne.

MD : Et surtout de lui rattacher des informations plus spécifiques sur ses avis ou ses comportements.

Mathieu DARMET - Mémoire de fin d'étude - Business Manager 2018

 
 
 

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SB : Exactement ! Aujourd'hui une adresse mail et un 06 ça peut changer, l'adresse mail ne permet pas d'identifier une personne. Des s.bergerat ça peut être une Stéphanie, une Sylvie...

MD : Ce qui m'intéresse, c'est des retours d'expérience sur des problématiques que tu as pu croiser chez certains clients. Savoir s'ils sont prêts ou si ils n'ont rien fait ou même ne comptent rien faire. J'aimerais avoir un peu les tendances, savoir ce que vous avez fait en interne, pour CINETIC ou pour votre collectif TRANSITIF Groupe, où il y a peut-être une dimension marketing et de la prospection.

SB : Sur CINETIC je ne fais pas de prospection, donc en interne, nous avons simplement recensé les applications utilisées et fait l'inventaire des données personnelles susceptibles d'être utilisées dans ces applications. On utilise une douzaine d'applications dans lesquelles les seules données personnelles sont les logins des utilisateurs, voir leurs noms, prénoms. Rattaché à CINETIC, on peut identifier la personne, mais vu de l'extérieur ça peut être n'importe qui.

MD : Donc en cas d'intrusion chez vous, hors contexte ces données n'ont pas d'usage possible ?

SB : Aucun. Il y a des outils sur le net qui permettent d'obtenir les adresses mail des sociétés. Aujourd'hui si tu veux trouver toutes les adresses mail de CINETIC, il y a des outils qui scannent les flux de messagerie. Tout le monde s'en sert.

Par exemple tu cherches le nom de quelqu'un dans une entreprise, tu tapes le nom de domaine en extension, et tu peux trouver son adresse mail ou la reconstituer.

MD : D'ailleurs je ne sais pas où ils sont domiciliés les outils auxquels tu fais référence, mais de toutes manières, niveau conformité RGPD, ils posent problème.

SB : Bien sûr ! Je crois que c'est hébergé à Chypre

MD : Donc ils s'exposent en laissant à disposition ce type d'outil sur le net.

SB : Oui mais c'est comme un annuaire. C'est à dire que tu cherches un nom de personne on te donne son numéro. A ce moment-là, autant dire que les Pages Jaunes et les Pages Blanches posent aussi problème.

MD : C'est une question à se poser. En étant jusqu'au-boutiste sur le règlement, les contacts de messagerie, constituent potentiellement des données personnelles.

SB : Là on est déjà confronté à un premier problème, qui est la récupération des boîtes mails d'autres utilisateurs. Quand une personne quittait une société, son remplaçant prenait la

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même fonction et on lui réaffectait l'ancienne adresse. Et bien ça typiquement on le fait plus. Plutôt que de détruire l'ancienne boîte aux lettres ou de l'archiver, on le mettait en « alias ». C'était le même profil commercial, avec le même secteur, les mêmes clients, donc on laissait volontiers les adresses mails en « alias » pour que la personne durant au moins quelques semaines ou quelques mois reçoive les mails de son prédécesseur.

Aujourd'hui, on crée de nouvelles boîtes aux lettres et on bloque les anciennes avec un message indiquant que « cette personne ne fait plus partie de la société merci d'écrire à son remplaçant ...».

MD : Tu veux dire que cela créée des problématiques qui n'en étaient pas avant ?

SB : Oui et non ! Parce qu'aujourd'hui tu peux être inscrit sur des sites qui te balancent de la pub, des messages qui peuvent révéler tes opinions politiques ou autre et ton remplaçant récupère ces informations.

Imagines que mon prédécesseur soit inscrit dans un parti politique un peu extrémiste et que je continue à recevoir toutes les lettres d'information. Ça veut dire que je peux attribuer à cette personne une étiquette politique ou religieuse et potentiellement divulguer des informations à son entourage, ce qui ne manquera pas de faire le tour de la société.

MD : Je n'ai pas pensé à ce type de répercutions, mais c'est relativement évident.

SB : Au-delà de la messagerie, il y a aussi le compte utilisateur. Mais on avait plutôt tendance à le supprimer et en créer un nouveau, parce que les besoins sont un peu différents.

Chez nous on a peu de turn-over, mais c'est ce que je préconise chez mes clients maintenant pour être conforme. Pareil pour les droits, avant nous avions tendance à renommer les comptes d'accès au réseau, maintenant on en créé des nouveaux et les anciens sont désactivés. On conserve de toute façon les informations de l'ancien utilisateur, car il peut y avoir un problème de traçabilité. Par exemple si j'ai besoin d'accéder à un de ses fichiers et que j'ai plus ses comptes, tout est verrouillé. Je peux être amené à réactiver les comptes momentanément pour aller chercher des infos.

MD : Sachant qu'il y a potentiellement des informations qui relève de la vie privée.

Est-ce qu'on ne touche pas du doigt un problème de discipline de la personne, qui aurait dû tout effacer avant de partir ?

SB : Attention sur ce point, car aujourd'hui dans l'éducation des clients les données présentes sur les serveurs ne sont sensée être que les données de l'entreprise. Cela doit normalement être spécifié dans une charte informatique du client. Les seules informations sauvegardées sont celles qui sont dans les serveurs et ce qui est sur les serveurs ne doit être que professionnel.

MD : Si ce n'est qu'en pratique rien n'interdit de recevoir un mail personnel sur son adresse professionnelle.

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SB : Oui et non. C'est à dire que souvent dans les chartes informatiques, il est précisé que tout ce qui commence par l'intitulé « perso » par exemple, ne peut pas être ouvert par l'administrateur. Le reste appartient à la société. A partir du moment où l'on met des moyens à disposition pour ton travail, on a un droit de regard. Si dans ta boîte aux lettres, tu as un répertoire noté « perso », typiquement on ne va pas voir. Mais on le sauvegarde forcément, puisque ce répertoire fait partie intégrante de la boîte aux lettres.

Vis-à-vis de la loi, je dois surtout tracer qui a accédé à quoi. Aujourd'hui je dois pouvoir dire qui a ouvert la boîte aux lettres et qui a consulté ce répertoire « perso ».

MD : Cela nous amène aux actions que vous réalisez chez vos clients, quand vous prenez la main sur leur système. Vous avez des outils pour tracer qui fait quoi ?

SB : Alors on est en train de mettre en place des choses. Ça rentre plutôt dans un 2nd temps au niveau du RGPD. Tu vas mettre des outils informatiques pour répondre à ce que tu fais.

Là on est plutôt dans le choix d'outils qui sont assez multiples. Nous avons d'abord référencé les applications utilisées en interne, quelles données étaient potentiellement sensibles. Les seuls éléments critiques sont les fiches de paie que nous sommes obligés de conserver au format PDF et qui sont aujourd'hui stockées sur un disque crypté accessible uniquement par la direction. Cela veut dire que nous n'avons pas nommé de DPO. Il faut que je le vérifie, mais il me semble que sur les petites structures ça peut être le dirigeant.

MD : Il n'est pas obligatoire d'avoir un DPO en dessous d'une certaine taille et quand l'entreprise ne réalise pas de traitement impliquant des données personnelles sensibles.

SB : Je ne fais pas de statistiques, ni de ciblage commercial, donc en terme de traitement, je n'ai pas de données sensibles.

MD : Après si je reprends tes clients, tu réalises des traitements qui impliquent des gens nommés. Ils ne sont pas forcément identifiables hors contexte, mais ils le sont quand même chez toi.

SB : Tout à fait. C'est compliqué, mais surtout pour les clients qui connectent des données publiques, comme les sites de vente en ligne, les mairies ou établissements publiques. Par exemple, lorsqu'il y a une manifestation et que l'on demande aux d'être pris en photo, cela permet d'identifier une personne. Aujourd'hui on leur fait signer un droit à l'utilisation de l'image, mais pas un droit sur la partie traitement des données.

MD : Effectivement, cela localise telle personne à tel endroit avec telle autre personne.

SB : Exactement ! Lorsqu'on collecte la photo, on collecte aussi des informations, puis on leur envoie de la pub. Tu viens à une manifestation associative et tu signes un droit de

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diffusion à l'image et au final tes données sont quand même traitées par ailleurs pour être détournées du cadre initial.

MD : Est-ce qu'avec le RGPD, votre discours et les services ou les moyens que vous proposez sont mieux perçus par vos clients ou vos prospects ?

SB : Nous intervenons beaucoup pour homogénéiser les systèmes. Nous sommes directement sollicités pour avoir des conseils sur ce qu'il faut faire dans le cadre du RGPD. Souvent, on répond que la partie informatique arrive à peu près en avant dernière position et qu'avant de s'intéresser aux outils il y a un ensemble de processus à mettre en place. C'est le travail que nous avons entrepris en interne, c'est à dire identifier tout ce qu'on avait comme applicatif mais aussi les tableaux Excel qu'on consolide, car nous n'avons pas que des données structurées. Il peut y avoir des données brutes. Nous demandons donc aux clients de faire l'inventaire des traitements qu'ils réalisent avec ces données, si elles sont transmises ou pas à un sous-traitant et de savoir comment il les réutilise.

Maintenant chaque fois que des données personnelles sont collectées, il faut une charte de collecte. Donc il faut leur faire signer un papier qui indique que l'on va collecter telle information, pour telle finalité, qu'elles seront utilisées pendant 3 mois et puis archivées pendant 3 ans.

Il faut le faire chaque fois que l'on demande un nom, prénom, adresse ou quoi que ce soit à quelqu'un. Et en plus il faut pouvoir le prouver. C'est à dire que si tu as ces données, c'est qu'elles ont été communiquées de manière volontaire par la personne et qu'elle était au courant de tout ce qui allait être fait avec.

MD : Globalement est ce que tu as le sentiment que les gens sont bien informés ?

SB : Pas du tout ! Ils me disent qu'ils font signer un droit à l'image parce que les gens réclament les droits de diffusion à l'image et que ça coûte de l'argent. Mais sur les données personnelles, personne ne se pose encore la question.

Il n'y a aucune fiche de collecte qui est à jour pour toutes les données recueillies. On essaie de leur expliquer que l'utilisateur aura aussi le droit de les consulter, de les modifier ou de les supprimer s'il le souhaite, ce qui doit faire aussi l'objet d'un process.

Nous avons identifié 7 ou 8 tâches susceptibles d'être demandées par l'utilisateur ou la personne dont on a collecté les données. Et il y a donc autant de process à mettre en place pour répondre à ces demandes.

MD : Il faut pourvoir les automatiser parce cela aura un coût pour les entreprises ?

SB : On n'est pas encore aux outils informatiques. Là on est sur du process, comme dans l'industrie. J'ai une réclamation, qui concerne tel sujet, donc ça passe par tel service. Il faut recevoir une lettre recommandée et on répond que la demande a bien été prise en compte et sera traitée dans un délai raisonnable.

Dans la plupart des cas ce n'est encore pas fait. Il y en a 6 ou 7 droits il me semble : de modification, de consultation, de suppression de l'archivage, de portabilité... Donc ça va au-delà

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des outils informatiques. Quand les gens ont un contact, ils essaient d'avoir un maximum d'informations, en se disant qu'ils en auront peut-être besoin par la suite.

Ça n'a plus de raison d'être et devient complètement illégal.

MD : En tant que commercial, j'avais effectivement tendance à ratisser large, partant du principe, que plus je collecte des informations, plus j'ai de chance d'identifier un besoin immédiat ou à venir.

SB : Tu identifies le nombre de PC, le nombre de site, s'ils ont des projets de rachat... Cela te permets juste de savoir que peut-être il y a un dossier à suivre et de le rencontrer d'ici 4 ou 5 mois. Donc cela ne constitue pas des données personnelles.

MD : Est-ce que ça vous avez retravaillé vos contrats de prestations ?

Je pense à vos clauses, vos responsabilités, ou les notions d'assurance par exemple.

SB : Non pas encore, mais c'est la prochaine étape. Il faut que nous puissions bien cadrer les choses lorsqu'on sous-traite de la prestation ou lorsque l'on est sous-traitant. Nous aurons probablement des clauses à ajouter, mais elles ne nous concernent pas directement car il n'y a pas de flux de données. Aujourd'hui ce n'est pas comme si je confiais mon fichier clients à une société pour faire de la téléprospection.

MD : Par contre quand vous intervenez chez un client et vous manipulez son matériel et les données stockées. Rien ne vous empêche de les lire ou de les copier. Est-ce qu'aujourd'hui tes clients t'interpellent sur la question ? Te demandent-ils un engagement ou de réviser tes contrats ?

SB : Pour l'instant je n'ai pas eu cette demande, mais ça fait partie des points qui vont être à traités d'ici peu.

MD : Tu as prévu de te faire accompagner juridiquement sur la question ?

SB : Non pas encore, mais je pense que ce sera une obligation. Dans nos contrats on a une vingtaine d'articles sur le non-embauchage ou non-débauchage, d'autres liés à la sécurité du site chez les clients, etc... Donc nous mettrons juste un article que l'on fera valider, selon lequel on s'engage à ne pas collecter de données personnelles. Sachant que ces informations ne nous intéressent pas et que nous n'avons aucune raison d'aller consulter les mails du client ou de regarder ses données.

MD : A partir du moment où ton technicien prendrait ce type d'initiative, il en prendrait la responsabilité et deviendrait responsable du traitement.

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SB : Cela pause une autre question et sous-entend qu'il faudrait potentiellement que je fasse resigner tous mes contrats de travail ou des avenants à tous mes salariés.

MD : Je ne suis pas juriste mais ça m'interpelle.

Tu m'avais laissé entendre que l'un de tes salariés s'était plus particulièrement intéressé au RGPD. Il a suivi une formation, participé à des réunions ?

SB : Oui, mais il s'est surtout renseigné sur les outils que nous pourrions mettre en place pour contrôler et automatiser un certain nombre de processus en entrée : comment modifier les données d'une personne, qui a le droit de les modifier... Sachant que nous ne sommes pas censés pouvoir modifier les bases de données sans avoir les droits nécessaires.

La suppression d'un contact peut aussi poser des problèmes, car un certain nombre d'actions lui sont rattachées et on ne peut pas perdre ces historiques.

MD : D'autant que cela compromettrait ta base de données.

SB : Oui et il est préférable de procéder à une désactivation invisible.

MD : Tu penses à une anonymisation ou pseudonymisation ?

SB : Exactement. Ce qui veut dire que lors d'un départ d'une suppression est demandée, il est donc préférable d'anonymiser, car on peut conserver le contenu. Par exemple j'ai des techniciens qui font une base de connaissances des incidents. Si l'un d'eux nous quitte dans 3 ans, je ne peux pas supprimer tous les incidents qu'il a traités et surtout les résolutions qu'il a trouvées. Il y a quand même derrière un gros travail que l'entreprise a fiancé. Désormais une partie des suppressions sera plutôt de l'anonymisation. On conserve l'information, mais on n'identifie plus qui l'a renseignée. Face à quelqu'un qui pirate la donnée c'est anonyme.

Il y a aussi des outils de cryptage pour les données confidentielles. Aujourd'hui nous sommes plutôt à la recherche de ce type d'outils. Il y en a beaucoup sur le marché mais entre ceux qui cryptent les disques, ceux qui cryptent les bases de données, ceux qui cryptent les PC, ceux qui cryptent les flux, c'est quand même très compliqué et ne veut pas avoir 50 outils à gérer.

MD : En plus tout le monde surfe sur le « RGPD effect ». On le ressent aussi sur les réseaux sociaux, qui ont réagis et redemandent un consentement utilisateur. Mais on constate qu'ils en profitent pour en demander encore plus. N'y a-t-il pas là un effet pervers ?

SB : C'est un peu à double tranchant. A partir du moment où tu demandes un consentement plus formel, on peut te dire que les données collectées vont être conservées pendant 10 ans, alors qu'avant c'était 3 ans.

MD : Mais la plupart l'accepte quand même...

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SB : C'est un peu le risque. Après, il y a aussi un certain nombre de traitements qui sont identifiés. En cas de contrôle la CNIL pourra constater qu'un traitement contient plus données que ce qui est nécessaire au traitement. Par exemple, dans un export de données au comptable pour la paye, il n'est pas nécessaire d'avoir autre chose que le n° de sécu du salarié. La CNIL va dire attention vous collectez 50 données alors que pour ce traitement vous n'avez besoin que d'une ou deux. Dans ce cas, il y aura un abus sur la collecte et il faudra y remédier. Mais il faut encore que la CNIL dispose d'intervenants capables de reconnaitre les données strictement nécessaires pour le traitement.

MD : Il y a aussi les problématiques liées à la sécurité informatique.

SB : Il devient nécessaire de mettre en place des outils permettant de détecter les intrusions, qui nous permettent de croiser un certain nombre d'éléments du système d'information qui ressembleraient à un piratage. Parce que des personnes qui accèdent à une base de données, il y en a une dizaine identifiées dans le réseau et on les connait. Mais il faut aussi savoir si le poste utilisateur a été piraté et que quelqu'un ait accéder à cette base de données en son nom. Quelqu'un qui pirate une base de données on peut l'identifier facilement. L'accès n'étant pas autorisé, le système identifie un défaut de connexion à la base de données, on voit qu'il a des tentatives. La problématique est plus sur la corrélation d'évènements dans le système d'information. Lorsqu'il y a une tentative d'accès sur un poste que l'on ne surveille pas, parce qu'il ne contient pas de données sensibles, il permet potentiellement d'accéder au réseau et à la base de données. Là on a un vrai problème, à moins que nous ayons un outil capable de détecter cette tentative d'intrusion, au niveau du poste, puis de la connexion à la base de données.

MD : Ce qui normalement devrait déjà être mis en oeuvre.

SB : Ça coûte des sous ! C'est le problème que l'on a de partout. Par exemple, on beau avoir une porte blindée chez nous, nous avons aussi une entreprise de nettoyage qui sait accéder à nos locaux. Cette entreprise peut être cambriolée et nos codes d'accès peuvent être volés. Personne ne fera le lien entre le cambriolage de l'entreprise de nettoyage et des vols dans certaines autres sociétés.

MD : Cela veut dire que tu seras obligé d'avoir un niveau de sécurité plus important, parce que cette corrélation n'est pas toujours possible.

SB : Obligatoirement.

L'exemple est un peu extrême. Mais si tu prends quelqu'un qui se fait pirater son PC ou son téléphone mobile, permettant d'accéder au réseau, puis à la base de données. Même si nous surveillons l'accès à la base de données ou les tentatives d'accès au poste, on peut simplement se dire que c'est quelqu'un qui a voulu jouer avec le mot de passe et ne pas identifier qu'il s'agit d'une intrusion. D'où l'intérêt d'avoir des outils qui soient capables de corréler ces informations. Il faut aussi trouver des outils multi environnements et faire le tri, car comme tu le soulignais, beaucoup d'éditeurs de sécurité se sont jetés sur ce sujet pour faire du business.

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Que ce soit les éditeurs d'antivirus, de solutions de sécurité ou de sauvegarde, tous traitent un point de la RGPD, mais aucun ne traite la totalité des besoins.

MD : Donc il y a de vrais impacts économiques pour vous, mais cela devrait aussi vous apporter du business.

SB : Oui, mais pour l'instant les gens ne sont pas encore prêts.

Il y a beaucoup d'éléments organisationnels à mettre en place dans les structures. Je travaille par exemple avec une Mairie et le nombre de données publiques qui sont collectées est énorme. Le service passeport, l'état civil, le cimetière... Ils ont bien 200 applications qui collectent des données personnelles.

Il faut déjà qu'ils établissent des procédures, qu'ils demandent des consentements de saisie, qu'ils puissent gérer les demandes d'utilisateurs (modification, consultation...). Mais ils n'ont pas fait grand-chose pour l'instant...

Cela doit s'inscrire sur le long terme. On ne pourra pas changer les mentalités comme ça. J'espérais une espèce de guide d'outils validés et proposés par la CNIL.

MD : Il y en a un, mais s'est plus pour vulgariser le règlement et sur les bonnes pratiques.

SB : Mais un guide pratique ce n'est pas des outils. Lorsqu'on fait la comptabilité d'une entreprise, il y a des logiciels validés par la DGFIP. Il y a des agréments et l'éditeur, comme l'utilisateur peuvent décider du niveau d'engagement qu'il souhaite garantir à ses clients ou obtenir. Il n'y a pas l'équivalent pour le RGPD. Comment peut-on vendre des solutions à nos clients sans pouvoir leur dire qu'elles sont « RGPD compliant » ?

MD : Ce sera surement le client qui le demandera.

SB : Oui, mais entre un produit RGPD compliant qui vient des Etats Unis et un autre validé par la CNIL, je vois une grosse différence. Un peu comme un logiciel de compta américain et un français, qui ne sont pas assujettis à la même législation.

MD : Mais avec le RGPD, si une entreprise outre atlantique espère adresser un marché européen, elle n'aura pas le choix. En cas de non-conformité, elle s'expose des sanctions pouvant aller jusqu'à 4% de son chiffre d'affaire mondial. Alors qu'avant, elles pouvaient préférer payer des amendes de 150 000 €...

SB : Encore faut-il pouvoir les emmener devant un tribunal international, qu'ils soient sanctionnés et qu'ils payent.

Je pense qu'aujourd'hui c'est surtout de la « flûte ». Quand on voit que l'Etat n'arrive pas à récupérer des impôts qui auraient dû être payer en France, comment veux-tu que la CNIL inflige 20 millions d'euros d'amende à Apple ?

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MD : Après le scandale sur Facebook, en termes d'image les GAFAM semblent quand même pendre les devants.

SB : C'est exactement ça. C'est juste une question d'image.

Pour en revenir aux taxes comme la TVA, je pense que l'Etat était plus à même de récupérer l'argent que la CNIL.

Quoi qu'il en soit, il vaut mieux être en avance qu'en retard sur ce sujet. Mais je pense que la petite PME du coin, qui gère ses 30 ou 40 clients, cela lui passe largement au-dessus de la tête.

Mais ça va permettre aux gens de savoir ce qu'on fait exactement de leurs données. Aujourd'hui si tu leur fais signer un consentement à chaque fois, ils finiront par le lire, alors que jusqu'ici on s'attarde rarement sur les CGV.

MD : Parce qu'elles sont illisibles.

SB : Mais ce sera peut-être toujours le cas...

MD : Ils sont censés les rendre plus intelligibles et beaucoup plus explicites.

SB : Lorsqu'on demande un consentement, on ne le rédige pas obligatoirement en Arial 16 et en rouge... Rien ne me dit comment je dois rédiger les consentements.

En pratique la plupart des CGV restent écrites en police, 8 au dos du devis, avec une cinquantaine d'articles. Forcément personne ne les lit...

Je trouve que la RGPD reste globalement une démarche positive, mais cela se vérifiera sur le long terme.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle