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Black Lives Matter: l'intersectionnalité, une méthodologie analytique


par Judy Meri
Université Côte d'Azur - Mémoire M1 2021
  

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1.3.3 Le Racisme Systémique Et Le Regard Blanc « White Gaze »

Les sociétés white washed et les privilèges blancs ont créé des sociétés où les individus blancs voient les personnes de couleur d'une certaine manière. Cette manière est surtout considérée comme « hors normes » ou d'une manière qui altère où faire l'othering » des personnes de couleur en indiquant les différences raciales. Ces différences viennent généralement du fait que les Blancs sont supérieurs aux personnes de couleur qui viennent de sociétés considérées comme « non civilisées » ou« incultes » et que ne sont pas aussi développées que le monde industriel et technologique blanc. Ce regard pousse les gens de couleur à agir plus « blancs » pour s'intégrer dans les sociétés white washed dans lesquelles ils vivent, ils commencent à changer leur façon de parler, leurs vêtements, les aliments qu'ils mangent, et parfois, ils évitent même les gens de la même race pour paraître plus « blanc ». Dans l'ouvrage de Pailey » Décentrage du « regard blanc « du développement », l'auteur parle de ce qu'est le regard blanc selon différents chercheurs et de la manière dont il affecte notre société, l'auteur écrit : « Le « regard blanc »est une expression qui a gagné une importance dans les oeuvres d'intellectuels publics noirs américains et de légendes littéraires - dont Toni Morrison, Ralph Ellison et James Baldwin - qui ont farouchement résisté aux tropes racistes sur les Noirs en Amérique. Auteur de 11 romans lauréat du prix Pulitzer et Nobel, Morrison a plaisanté une fois dans Playing in the Dark : Whiteness and the Literary Imagination, » Je suis un écrivain noir aux prises avec et à travers une langue [anglais] qui peut puissamment évoquer et imposer des signes cachés de supériorité raciale, hégémonie culturelle et « altération » méprisante des gens « (1992 : x - xi). Alors que le savant palestinien Edward Said (1978) évoquait le « regard blanc « du développement comme » l'oeil voyant « de l'orientalisme, le philosophe existentiel français Jean-Paul Sartre (1964) l'a décrit comme « le privilège de voir sans être vu ». Alors que Glen Coulthard (2004 : 14-15), spécialiste des études sur les Premières Nations et les Autochtones, l'a qualifié de « cadre colonial », le sociologue américain Joe R. Feagin (2013 : ix, 3) l'a qualifié de « Vision du Monde globale » et de « cadre racial blanc ». Qui rationalise et justifie le privilège et la domination des blancs. Poursuivant sur cette trajectoire, Mbembe (2017 : 28) a qualifié le « regard blanc » du développement de « conscience occidentale de la noirceur » qui fait de la blancheur la quintessence de la normalité. Faisant écho à Stuart Hall (1992), l'historien Malawien Paul Tiyambe Zeleza (2009 : 131, 133) l'a réduit à un « ordre épistémologique de colonisation » qui cherche à « universaliser l'Occident et provincialiser le reste ». Enfin, la chercheuse littéraire kényane GraceA. Musila (2017 : 703-04) a récemment résumé le « regard blanc » comme un « registre de connaissances à une seule lentille », un « angle mort » et un « fantasme du monopole ». Du regard « qui suppose que » l'Autre est à la fois soumis à ce regard et incapable de lui rendre le regard ».41(*) Le regard blanc est donc un terme très problématique car il crée deux catégories l'une qui est« nous les blancs « et l'autre est les« eux, les non-blancs «.Ces deux catégories, supérieures et inférieures, ont tendance à avoir des différences distinctes, car l'une d'elles a tendance à être intelligente, sophistiquée, bien éduquée et mérite donc d'être privilégiée tandis que l'autre est pauvre, inculte, n'a pas la capacité du cerveau à devenir intelligent, violent, impulsif et ne communique pas bien. Le regard blanc est basé sur des stéréotypes systémiques qui sont ancrés dans la société avec une race supérieure et une ou plusieurs races inférieures. La race supérieure dont il est question dans le premier chapitre est le résultat de la sélection naturelle, de la survie des Vikings européens les plus aptes, indestructibles avec des traits blancs distinctifs. 

Dans l'article de Yancy « Walking While Black in The white Gaze' », Yancy parle des effets du regard blanc aux États-Unis en écrivant : « les corps noirs en Amérique continuent d'être réduits à leur surface et à des stéréotypes qui sont contraignants et faux, qui obligent souvent ces corps noirs à se déplacer dans les espaces sociaux de manière à mettre les Blancs à l'aise. Nous craignons que nos corps noirs ne suscitent une accusation. Nous nous déplaçons de manière à nous aider pour survivre aux regards Procruste des Blancs. Nous craignons que ceux qui nous voient puissent ressentir la peur irrationnelle de défendre leurs positions plutôt que de « trouver un terrain d'entente », une référence qui a été faite par Bernice King alors qu'elle parlait de l'héritage de son père sur les marches du Lincoln Mémorial. » Le regard blanc est également hégémonique, historiquement ancré dans les relations matérielles du pouvoir blanc : il a été jugé irrespectueux pour une personne noire de violer le regard blanc en regardant directement dans les yeux de quelqu'un de blanc. Le regard blanc est aussi éthiquement solipsiste : en son sein, seuls les blancs ont la capacité de porter des jugements moraux valables. » 42(*)

Le regard blanc affecte même le comportement au travail, car il oblige les personnes de couleur à se comporter différemment pour être perçues comme une personne blanche pour éviter ce regard discriminatoire. Dans un article de Julie Greco, l'auteur, parle de « L'impact du regard blanc au travail », elle explique : « Ce que notre recherche a révélé, c'est que le regard blanc oblige les femmes noires à surveiller leur apparence, leur émotion, leur conversation et leur comportement si elles veulent s'intégrer et diriger au travail », a déclaré Mccluney. « Les femmes noires doivent dépenser des ressources considérables - temps, argent et énergie - pour s'adapter à la blancheur. » Greco parle de l'impact du regard blanc sur les femmes noires au travail et de son lien avec les stéréotypes sociaux, courants des femmes noires, dit-elle : « La recherche indique que la blancheur est imposée au travail, principalement à travers l'adoption de normes euro-centrique comme base de l'organisation, normes et attentes à l'échelle mondiale. Il y a deux clés pour cette imposition : les règles d'affichage du blanc et les normes de beauté blanche. L'examen minutieux des expressions faciales des femmes noires est une mise en vigueur courante des règles d'affichage des blancs trouvées dans les tweets. Les règles d'affichage en blanc ont également affecté la manière dont les femmes noires négocient le trope de la femme noire en colère, qui est imposée pour contrôler le corps des femmes noir en contrôlant le ton et en qualifiant leur comportement général d'en colère ». La blancheur est également imposée par l'exploitation des femmes noires et de leur travail. L'exploitation se manifeste par une invisibilité ou des situations où leur présence et/ou leurs idées sont ignorées et négligées. D'autres pratiques d'exploitation ont confirmé le stéréotype de la femme noire forte, selon laquelle les gens considéraient les femmes noires comme fortes et invincibles, et comme ayant une capacité illimitée de soutenir ou de sauver les autres.43(*) »

Ce regard blanc déconstruit les sociétés avec un racisme caché qui est profondément ancré et enseigné aux Blancs systématiquement. J'en profiterai pour partager une histoire qui m'est arrivé lorsque je suis tombée sur une famille interraciale. La mère qui est noire à demander à l'enfant de 5 ans pourquoi elle ne parlait plus à l'un de ses amis et l'enfant a répondu en disant « parce qu'elle est trop noire ». Ces mots ont choqué à la fois la mère et moi, mais m'ont fait comprendre à quel point les enfants sont affectés par le racisme interne de leurs parents blancs à la maison qui provoquent un racisme continu qui se perpétue d'une génération à l'autre ce qui confirme les mots de Barbara Jeanne Fields sur l'idéologie de la race en tant qu'hégémonie qui n'arrête pas de continuer d'une génération à l'autre. Ce regard blanc conduit à une double personnalité plus profonde chez les personnes de couleur qui leur fait abandonner leur identité raciale pour adopter une identité « plus blanche » et plus proche de la norme. Le regard blanc crée le daltonisme/color blindness alors que les personnes de couleur cessent de s'identifier comme des personnes de couleur et cela crée plus d'ignorance et de cécité raciale dans une société qui conduit les Blancs à ignorer les aspects historiques de l'esclavage et du racisme. Le regard blanc a en outre des dommages psychologiques sur les corps en créant un trouble de dysmorphie corporelle de ce à quoi une personne noire devrait ressembler. Surtout chez les femmes noires, les femmes noires donc face à ce regard blanc doivent adopter un look « plus blanc » et plus socialement acceptable en lissant leurs cheveux naturellement bouclés, en améliorant la couleur de leur peau pour qu'elle paraisse plus claire (surtout avec l'utilisation des filtres sur les réseaux sociaux). Bien qu'avec le mouvement Black Lives Matter, les corps noirs ont été célébrés sur les réseaux sociaux, en particulier avec les grandes marques qui ont commencé à présenter des modèles noirs en faisant du « blackwashing » sur leur marque pour montrer leurs sensibilités sociales non-existantes. 

Pourtant, ces normes de beauté qui préfèrent maintenant les individus métisses qui incarnent des corps bronzés avec des traits du visage noirs tels que les lèvres sont toujours très orientées vers la peau plus claire et discriminent toujours la peau foncée au quotidien en les « altérant » et en les considérant comme une inférieure dans la société blanche bronzée.

* 41PAILEY, RobtelNeajai. « De-centring the `White Gaze' of Development « . Development and Change 51 (1 mai 2020): 729?45. https://doi.org/10.1111/dech.12550.

* 42YANCY, George. « Walking While Black in the « White Gaze»« . The New York Times, Opinionator (blog), 1 septembre 2013. https://opinionator.blogs.nytimes.com/2013/09/01/walking-while-black-in-the-white-gaze/.

* 43GRECO, Julie. «  The Impact of the White Gaze at Work | Cornell Chronicle » . Cornell University, 2021. https://news.cornell.edu/stories/2021/02/impact-white-gaze-work.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote