UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES
ÉCONOMIQUES DE LIMOGES AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE
(AUF)
Master 2 en Droit International et Comparé de
l'Environnement Formation à distance, Campus Numérique «
ENVIDROIT »
THEME : LA JUSTICE REPRESSIVE ET LA PROTECTION DE
LA
FAUNE SAUVAGE AU CONGO ET AU CAMEROUN
Mémoire Présenté par : Edson
Wencelah TONI KOUMBA Magistrat (Juge au Tribunal de Grande Instance de
Brazzaville-Congo) Sous la direction de : Monsieur Antoine
GATET
Juriste-expert en Droit de l'Environnement, Enseignant chercheur
à la Faculté de Droit de Limoges
Août / 2017
UNIVERSITE DE LIMOGES
FACULTÉ DE DROIT ET DES SCIENCES
ÉCONOMIQUES DE LIMOGES AGENCE UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE
(AUF)
Master 2 en Droit International et Comparé de
l'Environnement Formation à distance, Campus Numérique «
ENVIDROIT »
THEME : LA JUSTICE REPRESSIVE ET LA PROTECTION DE
LA
FAUNE SAUVAGE AU CONGO ET AU CAMEROUN
Mémoire Présenté par : Edson
Wencelah TONI KOUMBA Magistrat (Juge au Tribunal de Grande Instance de
Brazzaville-Congo) Sous la direction de : Monsieur Antoine
GATET
Juriste-expert en Droit de l'Environnement, Enseignant chercheur
à la Faculté de Droit de Limoges
Août / 2017
DEDICACES
Je dédie ce travail aux êtres les plus cher de ma
vie notamment à :
V' Mes parents : Joseph et
Marie KINGA, pour m'avoir donné la vie et montré
le chemin du mérite par l'effort dans la dignité,
l'honnêteté et l'honneur.
V' Mon épouse : Fanny Belgonde
TONI, pour le soutien, l'amour et la confiance accordée
à chaque pas de notre vie.
V' Mes enfants : Sammuela Eiseur
Maïténa TONI et Mischaël Ephraïm
TONI. « La contribution, même la plus insignifiante,
à la protection de l'environnement pour rendre ce monde plus
sécurisant, est sans doute l'un des meilleurs part d'héritage
qu'un père peut laisser à sa descendance ».
REMERCIEMENTS
Je remercie de tout coeur, mon Dieu qui est le Tout Puissant,
pour m'avoir donné la force, la bonne santé, la volonté et
la patience d'arriver à terme de ce travail. Gloire lui soit rendue !
Mes remerciements vont à l'endroit de Monsieur
Antoine GATE, mon Directeur de mémoire pour ses
orientations, son attention et sa disponibilité.
J'exprime également mes remerciements à Monsieur
Severin PONGUI, pour ses encouragements et son assistance au
quotidien.
J'adresse aussi ces remerciements à Mon frère
TONI William Frèd et à sa famille pour leur
assistance.
Liste des abréviations et acronymes.
ACAT Action des Chrétiens pour l'Abolition de la
Torture.
A.E.F . Afrique Equatoriale Française.
AHJUCAF . Association des Hautes Juridictions De
Cassation des Pays ayant en partage l'usage du Français.
A.J.D.A . Actualité Juridique du Droit
Administratif.
APJ . Agent de Police Judiciaire.
Ass. . Assemblée.
C.A . Cour d'Appel.
Cass.Crim . Cassation Chambre Criminelle.
CEEAC . Communauté Economique des Etats
d'Afrique.
CEMAC . Communauté Economique et Monétaire
d'Afrique Centrale.
CITES . Convention sur le Commerce International des
Espèces de
Faune et de Flore Sauvage menacées d'extinction.
CIJ . Cour Internationale de Justice.
COMIFAC . Commission des Forêts d'Afrique
Centrale.
C.P . Code Pénal.
C.P.P . Code de Procédure Pénale.
C.S . Cour Suprême.
E.N.A.M . Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature.
FAO . Organisation des Nations Unies pour l'Alimentation
et l'Agriculture.
IFAW . Fonds International pour la protection des
animaux.
INTERPOL . Organisation Internationale de Police
Criminelle.
MEFDD . ...Ministère de l'Economie
Forestière et du Développement Durable.
MINFOF . Ministère des Forêts et de la
Faune.
OFAC . Observatoire des Forêts d'Afrique
Centrale.
Page | 7
ONG . Organisation Non Gouvernementale.
ONU . Organisation des Nations Unies.
OPJ . Officier de Police Judiciaire.
O.U.A . Organisation de l'Unité Africaine.
PALF . Projet d'Appui à l'Application de la Loi
sur la Faune Sauvage.
PNUD . Programme des Nations Unies pour le
Développement.
PNUE . Programme des Nations pour l'Environnement.
R.C.A . République Centre Africaine.
R.D.P . Revue de Droit Public.
SFDI . Société Française pour le
Droit International.
TAF . The Aspinall Fondation.
UICN . Union Internationale pour la Conservation de la
Nature.
WCS . Wildlife Conservation Society.
WWF . Fondation pour le Monde de la vie sauvage.
SOMMAIRE
INTRODUCTION 11-21
Première Partie : LE CADRE JURIDIQUE
CONSACRE A LA PROTECTION PENALE DE LA FAUNE SAUVAGE ET LES OBSTACLES A SA MISE
EN OEUVRE
EFFECTIVE 23
Chapitre I : Existence d'un corpus juridique
adapté à la répression des atteintes contre
la faune sauvage .24
Section1 : Des normes répressives de droit
interne comme source cardinale pour la
protection des espèces fauniques par le juge
pénal .25
Paragraphe1 : Le régime de protection
pénale de la faune sauvage en droit interne
congolais ..25
Paragraphe2 : Le régime de protection
pénale de la faune sauvage en droit interne
camerounais .38
Section2 : Des normes de droit international de
l'environnement comme source de
référence pour la protection de la faune
sauvage ..45-46
Paragraphe1 : La référence aux
instruments de droit international de l'environnement pour la protection
pénale de la faune sauvage ..46
Paragraphe2 : L'exemple d'intégration d'une
norme de droit international de l'environnement
dans l'office du juge pénal en matière faunique
: La convention CITES 50
Chapitre II : Les obstacles à une application
effective du corpus juridique consacré à la
protection de la faune sauvage par la justice
répressive 54
Section1 : Les obstacles à la mise en oeuvre du
régime de protection pénale en droit
interne 54-55
Paragraphe1 : La transaction en matière faunique
: un obstacle majeur à la mise en oeuvre de
la répression pénale .56
Paragraphe 2 : Les faiblesses et insuffisances du
corpus juridique consacré à la protection de
la faune sauvage 59
Section2 : Les obstacles découlant de
l'application des normes internationales ..65
Paragraphe1 :
L'hétérogénéité et le caractère
évasif des normes de droit international de
l'environnement en matière de la protection de la faune
sauvage 66
Paragraphe2 : Le principe de la souveraineté
permanente sur les ressources naturelles comme
obstacle à une application efficace des normes de droit
international de l'environnement 69
Deuxième Partie : LA MISE EN PLACE D'UNE
CHAINE PENALE EN VU D'UNE
REPONSE EFFICACE CONTRE LA CRIMINALITE FAUNIQUE
.75
Chapitre I : Une chaîne pénale
constituée des différents acteurs concourant à la
répression des infractions fauniques
76
Section1 : Les différents acteurs placés
en amont de la chaîne pénale dans la répression
contre la délinquance faunique .76
Paragraphe1 : La prépondérance du
rôle de l'Administration dans la lutte contre la
délinquance faunique ..76-77
Paragraphe2 : Les acteurs secondaires dans la lutte
contre la criminalité faunique ...83
Section2 : Les acteurs judiciaires placés en aval
de la chaîne pénale pour assurer la
répression des atteintes contre la faune
sauvage ...90-91
Paragraphe1 : Le Ministère Public : Un acteur au
centre de l'exercice de l'action publique en
matière des infractions contre la faune sauvage
.91-92
Paragraphe2 : Le juge pénal comme dernier
rempart contre la criminalité faunique .97-98
Chapitre II : Les causes de l'inefficacité de la
réponse pénale face à la criminalité
faunique .103-104
Section1 : Les causes endogènes à
la justice répressive 104
Paragraphe1 : L'absence d'une spécialisation
environnementale des acteurs de la justice
répressive 104
Paragraphe2 : Le manque d'une véritable prise de
conscience sur les enjeux de la criminalité
transnationale en matière faunique au sein des
juridictions des deux pays 109
Section2 : Les causes exogènes de
l'inefficacité d'une réponse pénale à la
criminalité
faunique .114
Paragraphe1 : Le manque de coopération entre les
différents acteurs concourants à la lutte
contre la criminalité faunique 114
Paragraphe2 : Les problèmes liés au
manque de moyens affectés aux acteurs pour assurer une
répression efficace
|
..118
|
Conclusion
|
.123-125
|
Bibliographie
|
.126-130
|
Table de matière
|
131-138
|
INTRODUCTION
Selon Mireille DELMAS-MARTY : « S'il est aujourd'hui
urgent que le droit pénal se porte au secours de l'environnement, c'est
que l'échelle des dégradations a changé au cours des
dernières décennies (...). Désormais, le péril
s'étend dans l'espace et dans le temps, comme en témoignent le
réchauffement du climat et l'épuisement des ressources naturelles
»1. Cette assertion aux apparences d'un cri d'alarme prend
tout son sens lorsqu'on entreprend d'examiner les rapports existant entre la
justice pénale et l'environnement. Mais aussi, lorsqu'on pointe,
particulièrement, du doigt l'effectivité des mesures de
répression mises à la disposition de cette justice pour
protéger la faune sauvage. Depuis plusieurs années, la plupart
des Etats africains, prenant conscience de la menace d'extinction qui
pèse sur les espèces animales sauvages du fait de la
criminalité faunique, ont confiés à leur justice
pénale un rôle essentiel dans l'éradication de ce
phénomène. Ils partent de l'idée suivant laquelle,
grâce à la radicalité de ses sanctions, cette justice est
censée intimider, sinon dissuader la délinquance faunique et
constituée ainsi, un véritable rempart contre ce fléau.
La République du Congo et celle du Cameroun sont deux
pays frontaliers d'Afrique Centrale qui ne sont pas restés en marge de
cette lutte pour la préservation des écosystèmes. En
effet, du fait de leur situation géographique, ils disposent d'immenses
étendues forestières riches en biodiversité et regorgent
ainsi des milliers d'espèces végétales et d'oiseau sans
compter des centaines d'espèces de mammifères2.
Faisant partie des Bassins du Congo qui est le deuxième massif forestier
tropical après l'Amazonie et qui représente plus de 6% de la
surface forestière mondiale. Ces pays ont donc mis en place un cadre
juridique sectoriel très étoffé constitué
essentiellement, aussi bien, des textes internationaux de portée
universelle, régionale et même sous régionale que des
textes nationaux. A coté de cet arsenal juridique qui n'a pas
cessé de connaitre des améliorations au fil des années, il
a été crée un cadre institutionnel fait des organes
publics et privés gravitant autour des Ministères en charge des
questions de la faune. De même qu'ils participent au sein des
institutions à caractère international au niveau mondial,
régional et sous-régional3. C'est l'ensemble de ces
institutions qui collaborent étroitement avec les appareils judiciaires
dans l'organisation de la répression en vu d'apporter, tant soit peu,
une solution à la délinquance faunique. Cependant, après
plusieurs années le constat est alarmant et le bilan de ces institutions
est mitigé4. En effet, on constate dans ces deux pays que le
phénomène de braconnage à grande échelle, le
commerce illicite des espèces en voie d'extinction et la surexploitation
des produits issues de la faune sauvage ne cessent de prendre des proportions
inquiétantes. Il laisse présager une catastrophe dans le Bassin
du Congo avec, à court terme, des conséquences
désastreuses pour l'ensemble des écosystèmes que regorge
cette sous région5.
1DELMAS-MARTY (M), Des écocrimes
à l'écocide : Le droit pénal au secours de
l'environnement, préface, 1ère édition, Bruxelles,
Bruylant 2015. (465 pages).
2 Rapport de l'OFAC, Aires Protégées
d'Afrique Centrale Etat 2015, pages 41-66, 89-110
3 Le Congo et le Cameroun sont membres de plusieurs
organisations internationales spécialisées dans la protection, la
conservation de la faune sauvage telles que : Le Programme des Nations Unies
pour l'Environnement (PNUE), L'Union Internationale pour la Conservation de la
Nature (UICN), La Commission des Forêts d'Afrique Centrale (COMIFAC),
l'Observatoire des Forêts d'Afrique Centrale (OFAC). Des Associations
à caractère internationales comme : Le Fond Mondial pour la
Nature (WWF) et bien d'autres...
4 Voir en ce sens le rapport de TRAFFIC, La mise
en application de la loi faunique, novembre 2016.
5 Idem.
Page | 12
Mais, il serait mal aisé d'entreprendre une
étude sur : « la justice répressive et la
protection de la faune sauvage au Congo et au Cameroun »,
sans pour autant saisir le sens des différents termes qui constituent
cette thématique. C'est ainsi qu'aux termes de cette étude :
? L'expression Justice
répressive peut être entendue comme une notion
polysémique.
Son analyse définitionnelle appelle à une
approche binaire qui concilie à la fois l'organique et la
matière. Elle se conçoit d'abord comme un ensemble d'organes
juridictionnels (Cours et Tribunaux) ayant en charge le contentieux
pénal. Elle s'analyse ensuite, comme un contenu fait de règles et
principes juridiques servant de base à l'exercice d'une
répression contre les atteintes perpétrées contre les
biens, les personnes et, le cas échéant, contre les animaux
sauvages. En somme, il s'agit donc des juridictions spécialisées
dans la poursuite et la sanction des différentes formes d'infractions
suivant les règles répressives bien établit.
? Le terme :
protection, suppose la mise en oeuvre des moyens
juridiques dans le but de
préserver les espèces fauniques contre toutes
formes de menaces susceptibles de porter atteinte à leur existence.
? Le terme faune sauvage
appelle à une diversité d'approches
définitionnelles.
Au plan doctrinal, certains auteurs comme Michel REDON
estiment que celle-ci est constituée par : « tous les animaux
qui vivent, se reproduisent et se nourrissent en dehors de toute intervention
humaine ; qui n'ont subit aucune sélection de la main de l'homme et sont
destinés à vivre dans leur milieu naturel
»6. Au plan légal, cette approche varie selon la
conception du législateur de chaque pays. Ainsi, aux termes de l'article
5 alinéas 2 de la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et
les aires protégées au Congo, l'expression faune est
définie comme un : « patrimoine biologique commun de la nation,
dont l'Etat garantit la gestion durable. Elle est constituée par
l'ensemble des animaux sauvages vivant en liberté dans leur milieu
naturel ou maintenus en captivité ». Pour le
législateur Camerounais (article 3 de la loi n°94/01 du 20 janvier
1994 portant régime des Forêts, de la Faune et de la Pêche)
: « La faune désigne au sens de la présente loi,
l'ensemble des espèces faisant partie de tout écosystème
naturel ainsi que toutes les espèces animales ayant été
prélevées du milieu naturel à des fins de domestication
». Il en résulte donc de cette analyse qu'il n'existe pas de
définition unanimement acceptable. Il faut simplement se baser sur une
identité des critères que sont : l'absence totale d'un lien de
propriété avec l'homme et le rattachement à un milieu
naturel ou sauvage. Il s'ensuit que le régime de protection de la faune
sauvage se démarque de celui des animaux domestiques que
prévoyait déjà le Code Pénal de 1810, encore
applicable au Congo7, celui-ci étant influencé par une
conception civiliste réduisant l'animal, selon les cas, à un bien
meuble8 ou immeuble9.
6 REDON (M), Droit de la chasse et de la
protection de la faune sauvage, 2ème édition,
Paris l'Harmattan 2014, p.15 et 16.
7 Voir en ce sens l'article 454 du Code Pénal
de 1810 encore applicable au Congo
8 Voir en ce sens l'article 522 ancien du Code
Civil
Page | 13
Or il faut repréciser que, dans notre étude,
cette protection par la justice pénale ne portera que sur deux pays
dont-il convient aussi de préciser les contours géographiques
pour mieux les situés. En ce qui concerne la République du Congo,
disons que c'est un pays d'Afrique Centrale à cheval sur
l'équateur, avec une superficie de 342.000 km2. Il est
limité au nord par La République Centre Africaine (RCA) et le
Cameroun, à l'Ouest par le Gabon et l'Océan Atlantique, au Sud
par l'enclave Angolaise du Cabinda et la République Démocratique
du Congo (RDC), à l'Est par le fleuve Congo et la rivière
Oubangui. Le pays dispose d'un relief qui s'articule autour deux bassins :
celui du Congo (essentiellement composé de la grande forêt du
nord) et celui du Kouilou-Niari composé de la Vallée du Niari, le
Massif du Chaillu et la forêt du Mayombe. Le Congo renferme divers
écosystème à la fois forestiers, savanicoles et
côtiers. Cette richesse de la faune et de la flore est liée
à sa position de carrefour entre les domaines Bas-Guinéens au sud
et Congolaise au nord10. Au nombre des espèces fauniques que
regorge le pays, on répertorie plus de 200 espèces de
mammifères dont 14 espèces sont menacées, 676
espèces d'oiseau dont 5 sont menacées, 151 reptiles dont 4
espèces menacées. Les espèces emblématiques sont
entre autre : l'éléphant d'Afrique, le Gorille de plaine, le
Chimpanzé, le Bongo, le Colobe rouge de Bouvier etc.11.
S'agissant du Cameroun, il est également un pays
d'Afrique Centrale, situé sur le golf de guinée avec une
superficie de 475.000km2. Il est limité à l'ouest par
le Nigéria et l'Océan Atlantique, au nord par le Tchad, la
République Centrafricaine (RCA) à l'est par le Gabon, la
Guinée Equatoriale et la République du Congo au Sud par le golf
de Guinée au sud-est. Le pays s'étend depuis les bordures
méridionales du Sahara, la grande forêt équatoriale des
Bassins du Congo au sud et à l'est, jusqu'aux hauts-plateaux et les
massifs qui culminent au mont Cameroun. Souvent qualifié d' «
Afrique en miniature »12, le Cameroun est doté
d'une grande diversité d'habitats naturels ce qui justifie une
biodiversité riche et abondante avec une variété
d'espèces animales et végétale. Selon un inventaire de
l'Union Internationale de la Conservation de la Nature (UICN) fait en 2014, on
compte plus de 303 mammifères dont 41 espèces menacées,
968 espèces d'oiseaux dont 25 menacées et 274 reptiles dont 6
sont menacées13.
En ce qui concerne la législation faunique, on ne
saurait affirmer que dans le cadre de la protection, la conservation de la
faune sauvage et de la répression contre le braconnage, le commerce
illicite des espèces fauniques et les infractions qui y sont
affiliées, le Congo et le Cameroun accusent un déficit de
production normative. En effet, l'histoire de la réglementation de cette
matière dans ces deux pays remonte depuis l'époque coloniale. Il
faut certainement partir du décret de 1916 qui réglementait la
chasse dans les colonies.
9 Voir en ce sens l'article 524 du même Code.
10 MALONGA (A), Bref aperçu sur la
géographie du Congo, Brazzaville, Sciences de la vie et de la
terre, 2009,
page.21
11 BONGUI (S.L) et MOKOKO IKONGA (J), Rapport COMIFAC,
Aires protégées d'Afrique Centrale état 2015
(République du Congo), page 91
12 HIOL HIOL (F), LARZILLIERE (A), PALLA (F) et
SCHOLTE (P), Rapport COMIFAC, Aires protégées
d'Afrique
Centrale état 2015 (République du
Cameroun), page 42
13 Idem
Page | 14
Ensuite celui du 18 novembre 1947 qui réglementait la
chasse dans les territoires africains relevant du Ministère de la France
d'outre-mer. Ces législations étaient inspirées de la
Convention de Londres du 19 mai 1900 sur la protection des animaux en Afrique
et de la Convention relative à la conservation de la faune et de la
flore à l'état naturel du 8 novembre 1933. Plus tard, au sortir
des indépendances, chaque pays a pris à bras le corps la
problématique de protection de la faune. Ainsi donc, tant au niveau
interne qu'international, le Congo et le Cameroun ont mis en place un cadre
normatif assez étoffé pour faire face au phénomène
de la criminalité faunique. Bien qu'au départ, ces Etats
n'étaient pas préoccupés par un souci de protéger
l'environnement, mais par celui de règlementer simplement les domaines
de la chasse et des forêts dont les textes hérités de la
colonisation avaient déjà posé les jalons.
C'est ainsi qu'au Congo, outre les textes constitutionnels du
15 mars 1992, du 20 janvier 2002 et du 25 octobre 2015, qui ont
consacrés des dispositions sur la protection de l'environnement et la
gestion des ressources naturelles. On notera qu'un cadre juridique fait de
nombreux textes sectoriels a évolué au fil des années.
D'abord avec la loi n°7-62 du 20 janvier 1962 portant
règlementation en matière d'exploitation de la faune. Cette loi
sera remplacée par celle du 21 avril 1983 définissant les
conditions de la conservation et de l'exploitation de la faune sauvage. Plus
récemment, le pays s'est doté d'une nouvelle loi portant sur la
faune, loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires
protégées. Elle apparaît comme la formule la plus aboutie
de cette évolution, malgré qu'on peut toujours relever de
multiples incomplétudes. Ensuite, il y a des textes légaux
multisectoriels comme la loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection
de l'environnement qui consacre son titre 3 à la protection de la faune
et de la flore. A coté, nous avons une palette de textes
règlementaires visant des aspects spécifiques de la protection. A
ce titre, on pourrait citer : l'Acte n°114/91 de la Conférence
Nationale Souveraine portant interdiction de l'abattage des
éléphants en République du Congo ; les
Arrêtés n°6075 du 18 mai 1984 déterminant les animaux
intégralement et partiellement protégés, celui portant
protection absolue de l'éléphant (Arrêté
n°32/82 du 18 novembre 1991). Ces textes spéciaux se greffent
à la législation pénale générale
constituée essentiellement par la Code Pénal, la loi n°1-63
du 13 janvier 1963 portant Code de Procédure Pénale, la loi
n°19/99 du 15 août 1999 modifiant et complétant certaines
dispositions de la loi n°022.92 du 20 août 1992 portant organisation
judiciaire et bien d'autres.
Au Cameroun, l'arsenal juridique encadrant la faune sauvage
est aussi suffisamment fourni. Au plan interne il est essentiellement
basé sur la loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant régime
des forêts, de la faune et de la pêche. Celle-ci, bien
qu'étant une loi multisectorielle consacre son titre IV sur la faune.
Elle définit une procédure répressive en son titre VI
portant sur la répression des infractions. Ce titre apparaît comme
un « fourre tout » puisqu'il cumule des infractions portant
sur plusieurs aspects de la nature (forêts, faune et pêche).
Page | 15
Cette loi est appuyé par des actes
réglementaires plus spécifiques tels que : le Décret
n°95/466/PM du 20 juillet 1995 fixant les modalités d'application
du régime de la faune ; le Décret n°2005/495 du 31
décembre 2005 modifiant et complétant certaines dispositions du
décret n°2005/099 du 06 avril 2005 portant organisation du
Ministère des Forêts et de la Faune. Il y a également
l'Arrêté n°0648/MINFOF du 18 décembre 2006 fixant la
liste des animaux des classes de protection A, B et C ; l'Arrêté
n°0649/MINFOF du 18 décembre 2006 portant répartition des
espèces animales de faune en groupe de protection et fixant les
latitudes d'abattage par type de permis sportif de chasse. A ces textes
s'ajoutent les lois de portée générale telles que : la loi
n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant Code de Procédure
Pénale ou la loi n°2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code
Pénal, la liste n'étant pas exhaustive.
Sur le plan international, le Congo et le Cameroun
étant deux pays de la sous-région Afrique Centrale ils ont ainsi,
dans le cadre de la mise en oeuvre des politiques de répression contre
la criminalité faunique transfrontalière, adoptés des
instruments internationaux sectoriels d'abord de portée universelle. A
ce titre, on peut citer : la Convention de Washington relative au commerce
international des espèces de faune et de flore sauvages menacées
d'extinction (CITES) du 3 mars 1973, la Convention sur la Biodiversité
de 1992, la Convention relative aux zones humides d'importances internationales
(Ramsar) du 21 décembre 1973, la Convention sur la conservation des
espèces migratrices appartenant à la faune sauvage adoptée
à Bonn en 1979. Mais à côté de ces textes
internationaux de portée mondiale qui sont contraignants et non
contraignants pour certains, il y a aussi d'autres textes de portée
régional et sous-régional, on peut citer : l'Accord de
coopération de Lusaka, sur les opérations concertées de
coercition visant le commerce illicite de la faune et de flore sauvages du 8
septembre, la Convention africaine sur la conservation de la nature et des
ressources naturelles adoptée à Alger le 15 septembre 1968,
révisée à Maputo en 2003. L'Accord de coopération
et de concertation entre les Etats de l'Afrique Centrale sur la conservation de
la faune sauvage adoptée à Libreville le 16 avril 1983, le
Traité relatif à la conservation et à la gestion durable
des écosystèmes forestiers d'Afrique Centrale et instituant la
Commission des Forêts d'Afrique Centrale (COMIFAC).
Ainsi, comme on peut le constater à l'instar du reste
des pays d'Afrique centrale, le Congo et le Cameroun ont, au cours de ces
dernières années, intensifiés la production normative dans
le domaine de la protection et la conservation des espèces fauniques.
Leur cadre juridique interne a été renforcé par
l'internalisation des normes sectorielles de droit international de
l'environnement. Aussi, la justice répressive dans ces pays devrait
exercer une action efficace dans l'éradication des crimes contre la
faune sauvage. Or, plusieurs études14 ont
déploré les résultats enregistrés dans la lutte
contre le braconnage, le commerce illicite des espèces animales
protégées et l'ensemble des infractions qui y sont
affiliées.
14 On peut citer en ce sens, le rapport de TRAFFIC
de novembre 2016, sur la mise en application de la loi faunique au Cameroun ;
GAÏKO (V.C), La protection juridique de la faune sauvage en
République du Congo, Mémoire pour l'obtention du Diplôme de
l'E.N.A.M, Brazzaville 2011 ; ONONINO (A.B), Lois et procédures en
matière faunique au Cameroun, 1ère édition
2012.
Page | 16
Le Professeur Alexandre KISS affirmait en ce sens que : «
les efforts faits au niveau mondial dans la protection des ressources
forestiers n'ont abouti qu'aux résultats modestes
»15. D'ailleurs, ce constat est partagé par
l'ensemble des pays d'Afrique Centrale dans leur Déclaration sur la
lutte anti-braconnage en ces termes : « (les) initiatives nationales
de lutte contre le braconnage et le trafic illicite de la faune sauvage, en
dépit d'importants moyens déployés, n'ont pas abouti aux
résultats escomptés »16.
La responsabilité d'une telle défaillance ne
peut être entièrement mise sur le compte de la justice
pénale (qui est constituée en amont et en aval par plusieurs
acteurs concourant à l'oeuvre de répression des atteintes contre
la faune sauvage). Celle-ci entraine à des conséquences
désastreuses sur l'ensemble des écosystèmes dans la
sous-région. Selon le rapport « La nature du crime »
de l'ONG IFAW publié en septembre 2013 : « Depuis, le commerce
international d'espèces en danger n'a fait qu'augmenter, rendant la
menace toujours plus réelle et pesante. Un nombre record
d'éléphants tués pour leur ivoire a été
atteint en 2011 et 2012, et certaines sous-espèces de rhinocéros
se sont éteintes ou sont sur le point de disparaitre (...) Divers
organismes et rapports estiment que ce commerce pèse au moins 19
milliards de dollars US par an et classent le commerce illicite
d'espèces sauvages, bois et poissons inclus, au 4ème
rang des activités illicites mondiales après les
stupéfiants, les contrefaçons et la traite d'êtres humains,
devant le pétrole, les oeuvres d'art, l'or, les organes humains, les
armes de poing et les diamants »17. De nos jours, le
phénomène de criminalité faunique a pris des proportions
inquiétantes si bien qu'en mai 2013, la Commission des Nations Unies
pour la prévention du crime et la justice pénale a adopté
une résolution appelant les nations du monde entier à
considérer la criminalité contre la faune sauvage et les
forêts comme une forme sérieuse de crime
organisé18 et Ban Ki-Moon, alors Secrétaire
général de l'ONU a établit un lien entre le braconnage et
d'autres activités criminelles organisées au plan international,
y compris le terrorisme19.
On relève donc qu'une catastrophe s'abat sur
l'humanité en générale et sur les pays des Bassins du
Congo en particulier, avec la menace imminente de disparition d'une
biodiversité riche et exceptionnelle. Face à cela, une seule
question taraude les esprits : Où est donc la justice répressive
au Congo et au Cameroun ? Que fait-elle ? En effet, celle-ci doit jouer le
rôle de « gendarme de la loi ». Cette justice est
constituée des acteurs qui participent, à divers niveaux et de
façon multiforme, à l'application des normes répressives
qui sont conçues par les législateurs nationaux et au niveau
international. Ils concourent aussi à la protection de l'environnement
et donc de la faune sauvage en luttant contre les différentes atteintes
dont-elle peut être victime.
15 CORNU (M) et FROMAGEAU, Le Droit de la
forêt au XXIème siècle, Aspects Internationaux, collection
Droit du patrimoine culturel et naturel, l'Harmattan novembre 2007, Page
272.
16 Réunion d'Urgence des Ministres de la
CEEAC en charge des Relations Extérieures, des questions de
Défense et de Sécurité, de l'Intégration
Régionale et de la Protection de la Faune sur la mise en oeuvre d'un
Plan d'Extrême Urgence sur la Lutte Anti Braconnage dans zone
septentrionale de l'Afrique centrale, Yaoundé (Cameroun), palais des
congrès, 21-23 mars 2013, p. 2.
17 Fonds International pour la Protection des Animaux
(IFAW), La nature du crime, septembre 2013, pages 3-4
18 Idem
19 Idem
Page | 17
Ainsi donc, et comme nous le verrons, le juge pénal, le
ministère public et tous les agents exerçant les missions
relevant de l'ordre public écologique, sont considérés
comme des protecteurs de la faune sauvage. Ils constituent ainsi le
dernier rempart contre l'anarchie dont sont victimes les
espèces en voie d'extinction. Leur rôle est donc central dans la
chaîne de protection et de conservation des écosystèmes.
Mettant en relief l'action des juges, Christopher WEERAMANTRY
estime qu' : « En tant que gardien de l'autorité de la loi, les
juges sont dans une position unique pour donner force et effet au droit de
l'environnement. Ils peuvent apporter de l'intégrité et de la
conviction au processus de protection de l'environnement (...). Ils contribuent
également au développement du droit de l'environnement
grâce à leur tâche traditionnelle d'interpréter et de
combler les vides des textes de loi »20. Et M. Abauzit
ajoute qu'il (le juge répressif) a un « rôle de bon
berger pour l'application des lois de protection de l'environnement (...). Si
l'administration a parfois la tentation de négliger l'environnement, le
juge, lui, se trouve en dernière ligne et ne peut se dérober face
à la règle environnementale »21. Or, au
Congo et au Cameroun, la justice répressive est quasi-impuissante,
désarmée et totalement passive dans la lutte contre cette forme
particulière de criminalité. Pourtant, sa réponse face aux
infractions de droit commun est sans appel, qu'il s'agisse des atteintes contre
les personnes ou les biens, sa production jurisprudentielle est abondante.
Cependant, la matière environnementale est particulière, elle a
ses réalités et comme l'affirmait BADO : « Nul n'est bon
juge que de ce qu'il connait »22. Aussi, pour juger les
crimes relevant de la matière environnementale, il faut connaître
l'environnement et ses contours.
Outre ces difficultés de connaissance de la
matière environnementale, il faut aussi relever qu'en matière de
protection de la faune sauvage, le juge pénal de ces pays reste
confronter à plusieurs types de problèmes. D'abord, le principe
de la légalité23 qui a pour corolaire, l'obligation
d'interprétation stricte de la loi pénale, fut-elle une loi
spéciale, constitue un obstacle infranchissable au pouvoir normatif du
juge. Considéré comme un fidèle serviteur et parfois
même un esclave de la loi pénale, il se doit de l'appliquer de
manière uniforme, peut importe l'espèce ou le fait de la cause
soumis à sa connaissance. Seulement, les incriminations en
matière faunique ne sont prévues et réprimées que
par les lois spéciales dites « sectorielles ». Ces
lois comportent, du fait du caractère évolutif et
expérimental de la matière environnementale, des lacunes, des
incomplétudes et des insuffisances. On relève même parfois
des énormes contrariétés avec les lois répressives
de portée générale (code pénal et de
procédure pénale). C'est ainsi que ces juges se trouvent-ils
coincés entre une obligation d'application stricte des textes sectoriels
souvent mal adaptés aux réalités du procès
pénal, d'une part, et la nécessité de donner une
réponse à toutes atteintes contre la faune sauvage portée
à leur connaissance, d'autre part.
20 CANIVET (G), LAVRYSEN (L) et GUIHAL (D),
Manuel judiciaire de Droit de l'environnement, Nairobi, PNUE 2006,
page 17
21 LECUCQ (O), Le rôle du juge dans le
développement du droit de l'environnement, 1ère
édition, Bruxelles, BRUYLANT 2008, page 19.
22 BADO (J.E), Un juge pour l'environnement,
in Journal africaine pour l'environnement. Yaoundé 2015, page.11
23 Le principe de la légalité est
souvent attribué à Montesquieu qui estime dans l'esprit des
lois (Livre XI, Chap. VI) que « Les juges de la nation ne sont
que la bouche qui prononce les paroles de la loi ».
Page | 18
En suite, ce principe de la légalité qui
découle aussi de la souveraineté étatique se heurte
à la prégnance des normes internationales du droit de
l'environnement sur le droit interne. En effet, qu'il s'agisse de la protection
des espèces ou de tout autre domaine, le droit de l'environnement est
par essence un droit cosmopolite et passeur de
frontières24. De plus, certaines infractions telles que
le braconnage ou le commerce illicite des espèces menacées ont
une nature transnationale et pour y faire face, le juge doit
s'émanciper. Il doit fournir l'effort de s'approprier de ces instruments
internationaux. En ce sens, M. DELMAS-MARTY écrit que ces juges «
sont comme libérés du droit interne au profit d'un droit
international dont l'imprécision a pour effet de renforcer leur marge
d'interprétation »25.
Ainsi donc, il faut retenir qu'en dépit de l'effort de
normalisation au plan interne par chaque pays et celui d'intégration ou
d'adhésion au processus d'internationalisation de la répression
de la criminalité faunique, « le constat fait aujourd'hui
(au Congo et au Cameroun) est que le braconnage et son corollaire le
commerce illégal de la faune demeurent sans cesse croissants et les
espèces protégées continuent d'être
décimées de façon alarmante au mépris des lois. Les
raisons de ce qu'on peut considérer comme un échec abondent et
elles sont en grande partie le fait de l'inefficacité et
l'ineffectivité de l'application de la loi »26.
Outre l'effectivité dans l'application de la norme répressive. On
relève également des problèmes d'efficacité dans le
fonctionnement et l'organisation du système chargé de mettre en
oeuvre cette répression. Ainsi, si des auteurs comme Nathalie ROBET et
Mathilde PORRET-BLANC ont soulevé l'effectivité de la norme
pénale en la matière comme problématique27.
D'autres à l'instar de David CHILSTEIN et Oliveira BOSKOVIC ont, par
contre, évoqué l'inefficacité et même une «
inefficacité chronique »28 ou encore «
une efficacité douteuse »29 des acteurs concourant
à la répression des atteintes à la faune
sauvage30.
Abondant dans le même sens, nous nous sommes
intéressés au rôle et à la place de la justice
répressive en tant que maillon essentielle dans le processus de
protection de la faune sauvage. Dans la présente étude, nous
avons tenté d'identifier les moyens juridiques et les acteurs
judiciaires qui concourent à la répression de ces infractions.
Ensuite, nous avons examiné les obstacles qui découlent tant de
l'application des normes répressives en la matière qu'aux
problèmes qui minent le système répressif lui-même.
Une telle étude, basée sur la réalité des deux
pays, ne saurait être entreprise sans une approche comparative entre le
Congo et le Cameroun, ni même sans faire l'exégèse de leurs
instruments juridiques (internes et internationaux en la matière).
24 LECUCQ (O), op.cit.
25 DELMAS-MARTY (M), La refondation des pouvoirs :
Les forces imaginantes du droit, Paris, SEUIL 2007, page 65.
26 ONONINO (A.B), Lois et procédures en
matière faunique au Cameroun, publié avec le concours de
LAGA et de WWF Programme Eléphant d'Afrique 1ère
édition. Yaoundé 2012, page 21.
27 ROBET (N) et PORRET-BLANC (M),
L'effectivité du droit pénal de l'environnement, in
Revues Lexisnexis n°7, juillet 2016, page 13 à 19.
28 BOSKOVIC (O), CHILSTEIN (D) et autres,
L'efficacité du droit de l'environnement, mise en oeuvre et
sanctions, édition, Paris, Dalloz 2010, page 72.
29LASSERE CAPDEVILLE (J), Le Droit pénal
de l'environnement : Un droit encore à l'apparence redoutable et
à l'efficacité douteuse, in Sauvegarde de l'environnement
par le Droit pénal, 1èreédition, Paris,
l'Harmattan 2005, page 12.
30 ONONINO (A.B) op.cit
Page | 19
Ainsi donc, comme l'évoquait Monsieur Laurent FABIUS,
ancien Ministre français des affaires étrangères : «
Le trafic illégal de la faune sauvage a pris une ampleur nouvelle,
Par sa faute, des espèces millénaires menacent de
s'éteindre. Dans certaines régions du monde, notamment en
Afrique, une criminalité organisée se nourrit de ce commerce
lucratif. Au-delà même de la tragédie environnementale, ces
bandes appauvrissent des peuples, fragilisent des Etats souverains et
alimentent des conflits armées »31. Il s'ensuit
qu'en partant d'un constat majeur qui est la persistance et l'intensification
de cette forme particulière de la criminalité qui met à
mal les écosystèmes dans la sous-région Afrique centrale.
Notre objectif est de faire un inventaire du cadre juridique qui constitue la
base du système répressif en matière de protection des
espèces fauniques dans ces deux pays. Ceci, pour en identifier les
insuffisances et incohérences. Examiner de manière plus
approfondie le rôle assigné aux différents acteurs qui
concourent à l'exercice de cette justice. Ainsi que les
différents aspects qui relèvent de la procédure y
afférente. Pour déduire les obstacles et faire des propositions
concrètes en vu d'une amélioration et une évolution du
système répressif dans ces pays.
On comprend donc aisément que cette étude, qui
vaut son pesant d'or, revêt des intérêts multiples
qui sont à la fois écologiques, juridiques, historiques et
pratiques.
? Au plan écologique, cet
intérêt se justifie par le fait que :
La protection de la faune sauvage par les juridictions
répressives, traduit une volonté des pouvoirs publics
d'éradiquer la criminalité faunique. Celle-ci se manifeste
à travers la mise en place des codes sectoriels. La prise en compte des
conventions internationales dans ce domaine et l'application des sanctions
pénales. Dans la mesure où, cette criminalité a des
conséquences directes sur l'équilibre des
écosystèmes. Le but étant donc, de préserver le
patrimoine biologique de ces pays. Puisqu'il est clairement
démontré, que les espèces animales sauvages jouent un
rôle considérable dans l'équilibre et la
régénération des forêts qui sont des vastes
étendues séquestrations du dioxyde de carbone. En effet, il est
établit que des grands mammifères comme les
éléphants et hippopotames favorisent le pouvoir germinatif de
certaines graines32. De même qu'ils nettoient le lit de
certains cours d'eau tout en procurant des aliments à des petites
espèces33.
? Au plan juridique, le sujet nous
permet de faire une exégèse de l'ensemble des textes de
portée sectorielle et générale sur la faune sauvage.
Aussi bien au niveau interne qu'international et sur lesquels
se fondent les juridictions répressives dans la répression des
atteintes contre les espèces fauniques. Il permet de comprendre les
raisons qui justifient les inefficacités constatées dans leur
application. Comprendre : le quand, le pourquoi, et le comment ? À
travers une étude comparative entre les lois congolaises et
camerounaises.
31 Rapport IFAW op.cit.
32 Voir en ce sens, IFAW, Programme
Eléphant, la pertinence et la stabilité des
éléphants pour le développement humain,
33 GAÏKO (V.C), La protection juridique de la
faune sauvage en République du Congo, Mémoire pour
l'obtention du Diplôme de l'Ecole de la Magistrature (DENAM),
Brazzaville, Université Marien N'GOUABI décembre 2011, Page 6.
Page | 20
Entre les normes internes et internationales, sectorielles et
générales. Il permet aussi de faire un examen approfondie sur les
règles procédurales (les enquêtes, la constatation des
infractions, la saisine, la compétence, la constitution de partie, les
recours...). Ainsi que les rôles et les compétences de chacun des
acteurs qui concourent à cette répression. Et enfin, il
transcende le cadre sectoriel pour examiner les questions de criminalité
internationale, l'entraide judiciaire dans la mise en oeuvre des poursuites
transfrontalières, les procédures d'exéquatur.
? Au plan historique, cet
intérêt il tient du fait que :
L'étude permet de procéder à un
inventaire des textes. Elle porte un regard critique sur l'évolution des
textes régissant le domaine de la faune en partant depuis
l'époque coloniale, les indépendances, les années 1970
à nos jours. Ainsi que l'évolution de la justice pénale en
tant qu'organe hérité de la colonisation pour assurer la
répression des différentes entorses aux lois répressives
de la République.
? Au plan pratique le sujet trouve
aussi sa place puisque :
L'étude permet de mettre en exergue une certaine
impunité dans laquelle baignent les contrevenants aux lois fauniques.
C'est la conséquence d'une politique de conservation permissive et
inadaptée. En effet, très peu de délinquants sont
déférés devant les autorités judiciaires.
L'insuffisance d'infrastructures et le manque de formations adéquates
des agents de la police et de la gendarmerie, et la non spécialisation
des acteurs judiciaires rendent inefficace cette répression. Les
interpellations ou arrestations de braconniers se soldent parfois par un
élargissement lorsque ce n'est pas par le fait d'une transaction qu'ils
doivent leur liberté. La persistance de ces agissements imputables au
laxisme et à la tolérance des auxiliaires de justice
s'avère compromettante pour la survie des espèces fauniques.
C'est au regard de tout ce qui vient d'être énuméré
que le contentieux faunique est fort insignifiant, alors que paradoxalement le
nombre de braconniers augmente effroyablement.
Ainsi donc, au regard de tout ce qui précède, il
paraît clairement que la problématique de notre étude porte
sur l'effectivité et l'efficacité des moyens mis à la
disposition de la justice répressive pour assurer la protection de la
faune sauvage. Celle-ci peut être fragmentée en plusieurs
questions à savoir :
y' Quel est l'effectivité des instruments juridiques
que le Congo et le Cameroun ont mis à la disposition de leur justice
pénale pour assurer une répression en matière de la faune
sauvage ?
y' Quel est l'efficacité de l'action exercée par
les différents acteurs judiciaires constituant la chaîne
répressive et qui concourent à l'exercice de cette protection
?
y' Quels sont les obstacles qui empêchent cette justice
à exercer une action répressive plus effective et efficace ?
Page | 21
De ces interrogations, il nous a paru nécessaire
d'envisager des tentatives de réponses à travers une
hypothèse qui constituera la trame de notre travail. Ainsi, nous
estimons que : Dans le cadre de la répression des infractions fauniques,
la justice pénale au Congo et au Cameroun est toujours balbutiante.
Cela, après plusieurs décennies et malgré un arsenal
juridique (interne et international) suffisamment fourni. La chaîne
répressive constituée des différents acteurs concourant
à la mise en oeuvre de cette mission de protection de la faune sauvage
par le droit pénal connait plusieurs difficultés. Aussi cet
échec est lié à des raisons d'ineffectivité et
d'inefficacité aussi bien dans l'application des normes que dans
l'action des acteurs qui animent cette justice. Il s'ensuit que pour lutter
plus efficacement contre la criminalité faunique dans ces pays, cette
justice répressive a besoin d'amélioration à travers des
mesures tendant à la faire évoluer pour mieux l'adapter aux
enjeux actuels du droit de l'environnement.
Aussi dans le cadre de ce travail, nous nous sommes
focalisé sur des techniques d'investigations comme : la recherche
documentaire à travers la doctrine, la jurisprudence et les textes de
lois. Nous avons procédé à des entretiens avec des
personnes ressources. Ceci, en faisant recours à des méthodes
comparatives, analytiques et critiques.
C'est pourquoi, pour aboutir à un travail rigoureux et
cohérent, nos analyses consisteront essentiellement à examiner :
Le cadre juridique consacré à la protection pénale
de la faune sauvage et les obstacles à sa mise en oeuvre (Dans
une première partie). Ensuite : La mise en place d'une
chaîne pénale en vu d'une réponse efficace contre la
criminalité faunique (Dans une deuxième partie).
Page | 22
Première Partie :
LE CADRE JURIDIQUE CONSACRE A LA
PROTECTION PENALE DE LA FAUNE SAUVAGE
ET LES OBSTACLES A SA MISE EN OEUVRE.
Page | 23
En matière criminelle, il faut des
lois34, disait PORTALIS. La justesse de cette affirmation ne
s'applique pas seulement en ce qui concerne les infractions classiques de droit
commun, mais aussi dans un domaine spécial comme celui de la
criminalité faunique. Dans ce sens, dès le début des
années 199235, la notion d'environnement étant devenue
une « valeur sociale protégée »36,
la plupart des Etats d'Afrique Centrale se sont dotés progressivement
d'un cadre juridique composé de nombreuses règles
spéciales destinées à protéger les
différents secteurs dont celui de la faune sauvage. Pour assurer
l'effectivité de la règlementation protectrice des espèces
fauniques et veiller à son respect, les législateurs congolais et
camerounais ont fait, de plus en plus, appel au droit répressif et
à son juge en accompagnant ces textes par des incriminations et des
sanctions spéciales. Or, souvent, cette protection est aussi
conditionnée par la cohérence entre les normes de droit interne
et celles du droit international de l'environnement, les premières
étant tributaires des secondes. Ainsi, en l'état actuel du droit
positif congolais et camerounais, on peut affirmer qu'il existe un corpus
juridique consacré à la protection de la faune sauvage
(Chapitre I).
Cependant, nonobstant cette intense production normative on
constate, après plusieurs décennies, la persistance du braconnage
à grande échelle, du commerce illicite des espèces
menacées d'extinction et des autres types d'infraction à la loi
faunique. Ainsi, en s'interrogeant sur l'application effective de la
réglementation faunique au Congo et au Cameroun, on se conviendrait
presque avec le Professeur Maurice KAMTO pour qui : « le sommeil
(ou l'ineffectivité) n'est pas une particularité des
normes juridiques de l'environnement, c'est une caractéristique du droit
africain dans son ensemble : c'est tout le droit qui paraît en
hibernation »37. Il ne fait donc aucun doute que
l'application effective du cadre juridique consacré à la
répression des atteintes contre les espèces fauniques est
confrontée à de nombreux obstacles (Chapitre
II).
34 PRADEL (J) et DANTI-JUAN (M), Droit
pénal spécial, 5ème édition, Paris,
CUJAS, 10 juillet 2010, page 15.
35 Certains auteurs comme Stéphane
DOUMBE-BILLE ou Maurice KAMTO, affirment que c'est à partir de la
Conférence de Rio en 1992 qu'il y a eu dans les pays Africains une
véritable prise de conscience s'agissant des questions portant sur la
protection de l'environnement.
36 DAOUD (E) et LE CORRE (C), La
responsabilité pénale des personnes morales en droit de
l'environnement, in Perspectives étude n°44, mars 2013, page
53.
37 KAMTO (M), Le Droit de l'environnement en
Afrique, 1ère édition, Paris, EDICEF 1996, page
18.
Page | 24
Chapitre I : L'existence d'un corpus juridique
adapté à la répression des atteintes
contre la faune
sauvage.
Le droit de l'environnement est « par essence
cosmopolite »38, aussi dans le domaine de la protection de
la faune sauvage, chaque Etat en mettant en place un cadre juridique
destiné à la répression des atteintes contre les
espèces fauniques fait appel à une internormativité. On
constate à cet effet, que le droit interne congolais et camerounais
puisent leur source, en partie, dans le droit international de l'environnement
qui lui-même est composé à la fois des normes de
portée sous-régionale, régionale et mondiale. Or, cette
porosité législative qu'impose le droit de l'environnement aux
Etats s'adapte mal avec le principe de souveraineté pénale. En
effet, depuis la naissance des Etats modernes, il existe toujours un lien
intime qui unit la souveraineté et le « ius puniendi
». Autrement dit : « Le droit de punir est l'expression du
souverain (de l'Etat) à l'égard de sa population et de
son territoire »39. Aussi, le juge pénal qui est
lui-même soumis au principe de la légalité des
délits et des peines, laquelle a pour corolaire celui de
l'interprétation stricte de la loi pénale, doit d'abord
et avant tout recourir aux normes répressives de droit interne comme
source cardinale dans la répression des infractions fauniques
(Section 1).
Mais ensuite, il doit tenir compte du fait que le droit
pénal protégeant la faune sauvage, en tant qu'un aspect du droit
de l'environnement, ne saurait être considéré comme une
bulle isolée dans un monde juridique composé de source
diversifiée. La nécessité de réprimer une
criminalité dont les enjeux dépassent parfois les sphères
nationales conduit le juge à « une certaine émancipation
(...) il se libère du droit interne au profit d'un droit international
». C'est pourquoi, en matière de protection de la faune
sauvage, la norme de droit international de l'environnement peut constituer
pour le juge répressif une source de référence
(Section2).
Section1 : Des normes répressives de droit
interne comme source cardinale pour la protection des espèces fauniques
par le juge pénal.
Les préoccupations environnementales axées sur
une nécessité de préserver la biodiversité à
travers la conservation des écosystèmes dans le Bassin du Congo
à conduit le Congo et le Cameroun, au cours de ces dernières
décennies, à mettre en place respectivement un arsenal juridique
relatif à la protection des ressources fauniques suffisamment fourni.
38 LECUCQ (O) et MALJEAN-DUBOIS (S), Le
rôle du juge dans le développement du droit de
l'environnement, 1ère édition, Bruxelles, BRUYLANT 2008,
page 24.
39SFDI, « La souveraineté
pénale de l'Etat au XXI ème siècle »,
in colloque annuel de la Société Française pour le
Droit International (SFDI), Lille les 18, 19 et 20 mai 2017.
Page | 25
Ce dispositif comportant à la fois des textes
d'incriminations et des aspects procéduraux suis generis a
facilité l'apparition d'un droit pénal spécifique à
la protection de la faune sauge. Aussi, on peut parler de l'existence d'un
régime de protection pénale de la faune sauvage en droit interne
congolais (§1) qui est distincte de celui mis en place en
droit interne camerounais (§2).
Paragraphe1 : Le régime de la protection
pénale de la faune sauvage en droit interne congolais.
Préfaçant l'ouvrage intitulé : Code
de l'environnement de Delphine EMMANUEL ADOUKI, le Professeur Michel
PRIEUR écrivait qu' « Une société responsable
doit prendre en considération non seulement les risques présents
de destruction de l'environnement mais aussi les risques futurs qui priveront
nos descendants des richesses de la terre ». C'est donc le sens de la
responsabilité qui a conduit l'Etat congolais, depuis plusieurs
décennies, à mettre en oeuvre une politique de protection de ses
ressources fauniques. Depuis 1962 jusqu'à nos jours, on a assisté
à une prolifération des textes sectoriels comportant des
dispositions portant sur des incriminations, des sanctions et des aspects
procéduraux sur lesquels se fonde le juge répressif pour assurer
une protection de la faune sauvage. Il en résulte donc que la protection
pénale de la faune sauvage au Congo est un régime basé sur
une diversité de textes en continuelle évolution
(A). Mais cette protection est aussi
caractérisée par des aspects procéduraux
hétéroclites (B).
A)-Une protection pénale basée sur
un foisonnement de texte en constante évolution.
L'analyse du régime répressif mis à la
disposition de la justice pénale pour assurer la protection des
ressources fauniques au Congo passe nécessairement par une
rétrospection de l'ensemble des textes sectoriels sur la faune sauvage.
Ils mettent en relief les aspects répressifs (1). De
cet inventaire, il résultera que la profusion normative dans ce domaine
a eu pour conséquence : une
hétérogénéité des incriminations et des
sanctions rendant parfois difficile la tâche du juge pénal
(2).
1-L'évolution des normes répressives
protégeant la faune sauvage en droit interne congolais.
C'est dès le lendemain de son indépendance, le
15 août 1960, que la République du Congo a adopté une loi
relative à l'exploitation de la faune sauvage. Bien que celle-ci ne
rentrait pas encore dans le cadre d'une politique globale de protection de
l'environnement, elle comportait déjà une classification des
infractions repartie en deux catégories. En effet, son article 70 sur
le classement des infractions établit une nomenclature des
atteintes qui sont, pour la plupart de nature administrative fondées sur
l'existence d'une inobservation de la réglementation en matière
de chasse.
Page | 26
C'est ainsi qu'on peut constater dans les premiers
alinéas de l'article 70 : « Sont classées en
première catégorie : les infractions suivantes :
-Non présentation du permis ou de toute autre
pièce nécessaire au contrôle de la chasse ainsi qu'à
celui de la détention, de la cession, du commerce, du transport et de
l'exploitation des divers produits de la chasse , ·
-Non inscription sur le permis ou inscription non conforme
aux règlements, des animaux protégés abattus
, ·
-Chasse sans autorisation dans les
propriétés ou sur le territoire des communes rurales où la
chasse est réservée... ».
Aussi pour le juge répressif congolais, encore sous
l'influence du droit pénal de l'ancien colonisateur, la recherche de
l'imputabilité de l'acte infractionnel au délinquant consistait
essentiellement en la recherche d'un élément matériel.
Celui-ci se résumait soit à des actes de chasse,
à détenir, commercer ou transporter des produits de chasse en
tout illégalité. L'élément intentionnel consistait,
pour le juge, en la recherche d'une volonté manifeste chez le
délinquant d'agir en ayant pleine connaissance d'une violation des
prescriptions légales en matière de chasses.
Au début des années 1980, le changement de
régime politique a influencé la volonté du gouvernement
à réguler le secteur de la chasse. C'est dans cet ordre que
s'inscrit la loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant les
conditions de la conservation et de l'exploitation de la faune
sauvage40. Celle-ci définissant d'entré de jeu, le
domaine de protection à travers une classification tripartite des
animaux sauvages objets de la protection légale. L'article 2 est ainsi
stipulé : « Les animaux sauvages sont classés en trois
catégories :
-Animaux intégralement protégés
(Classe A) -Animaux partiellement protégés (Classe B) -Animaux
non protégés (Classe C) »
Cette loi apparaît comme une version plus
améliorée, puisqu'elle donne une définition légale
d'un « acte de chasse », qui constitue pour le juge
pénal un élément essentiel dans la caractérisation
des différentes infractions. Ainsi, aux termes de l'article 5 de cette
nouvelle loi : « Est qualifié acte de chasse tout acte/ de
toute nature tendant à capturer ou tuer pour s'approprier ou non tout ou
partie de son trophée ou de sa dépouille, un animal sauvage
vivant en liberté appartenant à l'une des catégories
désignées à l'article 2 ». Bien que pouvant
être considérée comme novatrice à cette
époque, cette définition donnait déjà lieu à
diverses interprétations du juge pénal congolais.
40 EMMANUEL-ADOUKI (D.E), Code de l'Environnement,
tome 1, édition Saint-Paul Congo-Brazzaville, page 49.
Page | 27
Ce dernier, en s'inspirant de la jurisprudence
française d'avant les indépendances, pouvait selon le cas
désigner comme : « acte de chasse de toute nature »
la recherche41, la poursuite42, la capture ou la mise
à mort43 d'un animal catégorisé à
l'article 2. La loi de 1983 va plus loin que celle de 1962, en ce qu'elle
classe les atteintes à la faune sauvage en deux catégories, les
délits et les contraventions (article 48). Mais l'analyse des
différentes infractions qualifiées de délits prévus
à l'article 49 montre aussi que jusque là, le but de cette
règlementation n'était pas encore la protection des ressources
naturelles dans un souci de préserver les écosystèmes. En
effet, il ressort de cet article : « Sont considérées
comme délits au sens de la présente loi, les infractions
ci-après :
-Toute chasse illicite d'animaux intégralement ou
partiellement protégés , · -L'utilisation d'un permis
scientifique à des fins commerciales , ·
-L'exercice du métier de guide de chasse sans licence
, ·
-La capture d'animaux sauvages et la détention de
leurs produits sans permis scientifiques ou licence , ·
-La chasse des crocodiles et varans sans licence de chasse
aux crocodiles et varans , · -Le commerce des pointes d'ivoire et peaux
de crocodiles et varans sans patente , · ».
Ainsi, comme on peut le constater, sur cette liste
d'incriminations, qui n'est pas exhaustive, les infractions sont fondées
non pas sur l'atteinte à l'intégrité d'un animal
protégé. Elles sont au contraire fondées sur le
défaut d'un titre administratif autorisant le délinquant à
chasser, détenir ou commercer l'animal protégé. Cette
remarque s'applique aussi sur l'ensemble des contraventions prévues
à l'article 50 de la loi sus indiquée. Il paraît donc
claire, que jusqu'à la fin des années 1980, la
réglementation portant sur la faune sauvage était mise en oeuvre
pour réguler le secteur de la chasse et non pas par
nécessité de protéger l'environnement.
L'arrivée du multipartisme au Congo a
coïncidé avec la prise de conscience, par les Etats africains, de
la place de l'environnement et la nécessité de mettre en oeuvre
des politiques visant à sa protection. En effet, si la Conférence
de Rio marque un tournant important pour l'avenir du droit international de
l'environnement, son Agenda 21 constituera une référence
importante pour le droit de la faune et des aires
protégées44.
41 En ce sens, les juridictions répressives
congolaises s'inspiraient de la jurisprudence de l'ancienne métropole.
Ainsi, pour le Tribunal correctionnel de Toulon dans une décision du 8
décembre 1952 « La recherche du gibier constitue
incontestablement un acte de chasse. La réalité de cette acte
découle de l'attitude du chasseur aux aguets, de l'existence d'une
battue ou d'une traque de gibier, de l'action des chiens ».
42 Un arrêt de la Cour de Cassation a
établit que : « Est coupable d'acte de chasse dans une
réserve, celui qui après avoir lâché la meute de
chiens sur un territoire de chasse, les laisse
délibérément poursuivre un sanglier à travers le
territoire de la réserve » (Cass. Crim., 25 janvier 2011)
43 Selon une jurisprudence rendue par le Tribunal
correctionnel d'Avesnes-sur-Helpe : « Constitue un acte de chasse, le
fait intentionnel de capturer ou de tuer un gibier, sans qu'il y ait lieu
à prendre en considération le mobile réel de l'auteur
» (Trb. Corr. Avesnes-sur-Helpe, 18 février 1959, Rec. Dalloz
1960, sommaires p.7)
44 Voir le chapitre 15 de l'Agenda 21 relatif à
la préservation de la diversité biologique.
Page | 28
La République du Congo qui ouvrait, au plan national,
une nouvelle page de son histoire politique et institutionnelle ne devait pas
manquer ce tournant. Ainsi, il a été mise en oeuvre une politique
de préservation du cadre environnemental, laquelle était
basée sur une production normative sectorielle intense. D'abord la loi
n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de l'Environnement dont le
titre 3 sera consacré à la protection de la faune et de la
flore. L'article 19 de cette loi vise l'interdiction de toutes formes
d'atteintes contre l'intégrité physique des espèces
protégées ou contre leur habitat. La protection de la faune
était si
préoccupante que la Conférence Nationale
Souveraine (CNS) avait par Acte n°114/91/CNS/P/S du 24 juin 1991
instituée une interdiction d'abattage des éléphants en
République du Congo.
Au plan constitutionnel, il faut souligner que la Constitution
du 15 mars 1992 est la première à énoncer, dans son
préambule, la promotion d'une exploitation rationnelle des richesses et
des ressources naturelles45. De même que, son article 46
dispose que : « Chaque citoyen a droit à un environnement sain,
satisfaisant et durable et a le devoir de le défendre. L'Etat veille
à la protection et à la conservation de l'Environnement
». L'article 104 classe l'environnement et la conservation des
ressources naturelles comme relevant du domaine de la loi. De son
côté, le préambule de la Constitution du 20 janvier 2002
réaffirmait le principe de la souveraineté permanente sur les
ressources naturelles. Tandis que le droit à un environnement sain et
durable, ainsi que le devoir incombant à l'Etat de veiller à la
protection et à la conservation de l'environnement est prévu
à son article 35. Plus loin, son article 111 dispose que : «
Sont du domaine de la loi (...) - l'environnement et la conservation des
ressources naturelles ». Ces principes ont été repris
par la Constitution du 25 octobre 2015 aussi bien dans son préambule que
dans ses articles 41 et 125. Mais cette nouvelle Constitution se
démarque des deux autres, en ce qu'elle institut un Conseil Economique,
Sociale et Environnemental en ses articles 196 à 199. Cette institution
constitutionnelle, bien qu'ayant un caractère consultatif, a
été dotée d'un pouvoir d'auto-saisine sur tout
problème environnemental. Dans ce sens elle peut, en cas de menace grave
contre la faune sauvage, se saisir de l'affaire et y apportée des
approches de solution pouvant être soumises au gouvernement. Ainsi, en
matière de protection, elle constitue un organe qui peut appuyer le
travail de la justice répressive.
Enfin, la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000 portant Code
forestier au Congo prévoit des incriminations protégeant
l'habitat de la faune sauvage. Dans ses articles 43, 44, 137 et 138, elle
prévoit le délit d'incendie volontaire ou involontaire
et les peines encourues. La loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la
faune et les aires protégées a améliorée l'aspect
répressif des atteintes contre la faune sauvage. Elle renforce le
quantum des peines d'amendes et d'emprisonnement à travers une
classification tripartite des sanctions et des infractions. On relève
pour la première fois dans la législation congolaise une atteinte
à la faune ou à son habitat qui est érigée en crime
punie des peines d'emprisonnement entre 10 ans et 20 ans et à celle
d'une amende de 10.000.000 à 50.000.000 de francs CFA.
45 Préambule de la Constitution du 15 mars
1992
Page | 29
En effet, l'article 114 est ainsi stipulé : «
Est punie d'une amende de 10.000.000 fcfa à 50.000.000 fcfa et/ou
d'une peine de 10 ans à 20 ans de réclusion, toute personne qui
aura rejeté ou déversé des substances ou des
déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu
».
Après plus de cinquante années, on peut affirmer
que l'évolution des législations portant sur la protection de la
faune sauvage a été marquée par une amélioration
considérable des incriminations et des sanctions. Au départ,
l'objectif était simplement de réguler la chasse à travers
des incriminations basées sur l'inobservation des prescriptions
administratives. Aujourd'hui, ce cadre répressif a intégré
les objectifs de préserver l'environnement avec des infractions
fondées sur la protection de l'intégrité des
espèces et leur milieu. On parlera ainsi de
l'hétérogénéité de ces textes
d'incriminations.
2-L'hétérogénéité
des textes d'incriminations en matière faunique.
Après avoir examiné l'évolution et la
diversité des textes portant sur la protection de la faune sauvage, il
convient pour nous de mettre l'accent sur les incriminations prévues
dans ces textes. C'est sur leur base que le juge répressif se fonde,
à travers une interprétation stricte, pour établir la
culpabilité du délinquant déféré devant lui.
Or, lorsqu'on passe en revue l'ensemble de ces infractions telles que
proposées par la classification des lois de 1962, 1983 et 2008, il saute
aux yeux un sérieux problème de manque de lisibilité et de
cohérence.
En effet, l'environnement et partant la faune sauvage
étant par essence des domaines très techniques, il ne suffisait
pas pour le législateur « de fulminer des incriminations et des
peines ». Surtout, il devait les ordonner en suivant une certaine
logique de sorte à permettre au juge de les appliquer aisément.
Mais, tel n'est pas le cas. Les classifications des incriminations
proposées au fil des années par le législateur congolais
se présentent, dans chaque loi, comme une sorte de capharnaüm
infractionnel ou une mosaïque d'incriminations. Pour s'en
convaincre : l'article 112 de la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 dispose
que : « Sans préjudice des confiscations, restitutions,
retraits de permis et licence de chasse ou dommages-intérêts, sera
puni d'une amende de 10.000frcfa à 500.000frcfa et d'un emprisonnement
de 1à 18 mois ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura :
- Chassé sans être détenteur du permis ou de licence de
chasse requis ; -Chassé pendant une période interdite ou dans une
zone non ouverte à la chasse ; -abattu ou capturé des animaux en
excédant les limites autorisées ; -Chassé avec des moyens
prohibés : la chasse en véhicule à moteur, à partir
d'un aéronef ou d'une embarcation constitue une circonstance aggravante
; -Chassé entre le coucher et le lever du soleil ; -volontairement fait
obstacle à l'accomplissement des devoirs des agents de l'administration
des eaux et forêts ; -pénétré dans une aire
protégée sans permis de visite ; -ramasser ou détruire des
oeufs ou des nids sans être autorisé ; -commercialiser de la
viande d'animaux sauvages sans être autorisé ; - faire circuler
des trophées sans être détenteur du certificat d'origine
correspondant ; -détenir illégalement un animal sauvage non
intégralement protégé ».
Page | 30
De même, l'article 113 de la même loi dispose que
: « Sans préjudice des confiscations, restitutions, retraits de
permis et licence de chasse ou dommages-intérêts, sera puni d'une
amende de 100.000frcfa à 5.000.000frcfa et d'un emprisonnement de 2 ans
à 5ans ou de l'une de ces deux peines seulement, quiconque aura : -fait
des aménagements non autorisés ou chassé sans autorisation
à l'intérieur d'une aire protégée ; -abattu une
femelle suitée, un oiseau ou un reptile en nidation ; -abattu un animal
intégralement protégé ; -rejeté ou
déversé des substances ou des déchets
préjudiciables à la faune ou à son milieu ;
-exploité, à l'intérieur des parcs
nationaux, le sol, le sous-sol et les ressources naturelles, en violation des
dispositions de la présente loi ; -importé, exporté,
commercialisé ou fait transiter sur le territoire national des animaux
sauvages ou leurs trophées en violation de la présente loi ou des
conventions internationales en vigueur au Congo ; -chassé avec un
véhicule à moteur appartenant à l'Etat ; -chassé
avec les armes de guerre ; -chassé à l'aide d'engins
éclairants ; -utilisé un permis scientifique à des fins
commerciales ; -exercé le métier de guide de chasse sans y
être autorisé (...) ».
Lorsqu'on examine de près ces infractions elles
peuvent, en réalité, être reparties en deux grandes
catégories avec des sous catégories :
V' D'une part : On peut regrouper certains
types d'atteintes au titre des infractions à la police de la
chasse.
Cette classification principale peut être
subdivisée en cinq (5) sous-classifications à savoir : les
infractions relatives au permis de chasser (tel est le cas des infractions
visées à l'article 112 alinéas 1er, 8 et 11 ;
113 alinéa 1er, 10 et 11 de la loi congolaise de 2008). Les
infractions relatives aux temps de chasse (tel est le cas des infractions
visées aux articles 112 al. 2, 5 et 16 de la même loi). Les
infractions relatives aux lieux de chasse (tel est le cas des infractions
visées aux articles 112 al. 2 et 7 ; 113 al. 1er, 4 et 5).
Les infractions relatives aux modes et moyens de chasse (articles 112 al. 4 ;
113 al. 7 et 9). Enfin, les infractions relatives à la régulation
du gibier et au contrôle de chasse (articles 112 al. 2, 3 et 6 ; 113 al.
6, 12 et 13).
V' D'autre part : On peut regrouper certaines
atteintes au titre des infractions à la police de la préservation
de la faune sauvage.
Ce sont des infractions qui sont relatives à la
préservation du patrimoine biologique. Il s'agit entre autre : Des
atteintes à l'intégrité des espèces fauniques telle
que visée à l'article 19 alinéa 1er de la loi
n°003/91 du 23 avril 1991 qui dispose que : « Il est interdit en
vertu de l'article 18 : -l'abattage, la chasse et la capture de la faune
sauvage protégée ainsi que la destruction de son habitat
». A ces atteintes, on peut également associer les infractions
de nature transnationale et celles portant sur l'utilisation de produits
dangereux (importation, exportation, le transite sur le territoire national des
animaux sauvages et même le rejet ou le déversement des substances
ou des déchets préjudiciables à la faune ou à son
milieu). La particularité de ces infractions relève du fait
qu'elles sont conditionnées par la mise en place d'un domaine de
protection des espèces fauniques. Il s'agit d'un texte
réglementaire qui établit une classification ainsi que des listes
d'espèces protégées selon les catégories ou le
degré de protection.
C'est ainsi que l'Arrêté
n°3863/MEF/SGEF/DCPP déterminant les animaux intégralement
et partiellement protégés prévus par la loi n°48/83
du 21 avril 198346, détermine sous forme d'annexe les animaux
intégralement et partiellement protégées. La
caractérisation de ces infractions peut aussi dépendre de la
détermination de la période de chasse. En ce sens, le Ministre en
charge de la faune fixe par un arrêté les périodes
d'ouverture et de fermeture de la chasse. Tel est le cas de
l'Arrêté n°3772/MAEF/DEFRN/BC-1701 fixant les périodes
de chasse et de fermeture de la chasse en République Populaire du
Congo47.
En examinant l'ensemble des infractions prévues aux
articles 112 à 114 de la loi sur la faune, certaines de ces atteintes
peuvent être considérées comme des infractions relatives
règles de préservation du patrimoine biologique. D'autres
apparaissent comme des infractions comportant des circonstances aggravantes.
Pour mieux comprendre le caractère hétérogène des
textes d'incriminations en matière de la faune sauvage au Congo, nous
nous sommes référés à un tableau de classification
de ces incriminations qui prévoit deux (2) catégories principales
et plusieurs sous-catégories.
TABLEAU DE CLASSIFICATION DES INCRIMINATIONS VISEES PAR LA
LOI CONGOLAISE DU 28 NOVEMBRE 2008 SUR LA FAUNE ET LES AIRES PROTEGEES
Classification d'infractions
|
Sous classification
d'infractions
|
Différentes incriminations prévues par
la loi du 28 novembre 2008 sur la faune
|
Les infractions à la police de la
chasse
|
Les infractions relatives au permis de chasse et
au droit de chasse
|
-Chasser sans être détenteur du permis ou de
licence de chasse requis (art.112 al.1) ;
-Pénétrer dans une aire protégée
sans permis de visite (art.112 al.7) ;
-Commercialiser de la viande d'animaux sauvage sans être
autorisé (art.112 al.9) ;
-Faire circuler des trophées sans être
détenteur du certificat d'origine (art.112 al.10) ;
-Utiliser un permis scientifique à des
fins commerciales (art.113al.11)
|
Les infractions relatives aux temps de
chasse
|
-Chasser pendant une période interdite (art.112 al.2)
;
-Chasser entre le coucher et le lever du soleil (art.112 al.5)
;
|
Les infractions relatives aux lieux de
chasse
|
-Chasser dans une zone non couverte à la chasse
(art.112 al.2) ;
-Pénétrer dans une zone protégée
sans permis de visite (art.112 al.7) ;
-Faire des aménagements non autorisés ou chasser
sans autorisation à l'intérieur d'une aire protégée
(art.113 al.1er) ;
-Exploiter à l'intérieur des parcs nationaux, le
sol,
le sous-sol et les ressources naturelles, en
violation des dispositions de la présente
loi (art.113 al.4) ;
|
46 EMMANUEL-ADOUKI (D.E) op.cit. Page 97
47 EMMANUEL-ADOUKI (D.E) op.cit. Page101
Page | 31
|
Les infractions relatives aux
modes et moyens de chasse
|
-Chasser avec des moyens prohibés : la chasse en
véhicule à moteur, à partir d'un aéronef ou d'une
embarcation (art.112 al.4) ;
-Chasser avec un véhicule à moteur appartenant
à l'Etat (art.113 al.7) ;
-Chasser avec les armes de guerre (art.113 al.9) ;
-Chasser à l'aide d'engins éclairants
(art.113 al.10) ;
|
Les infractions relatives à
la
régulation du gibier et au contrôle
de la chasse
|
-Abattre ou capturer des animaux en excédant les
limites autorisées (art.112 al.3) ;
-Volontairement faire obstacle à l'accomplissement des
devoirs des agents de l'administration des Eaux et Forêts (art.112 al.6)
; -Faire circuler des trophées sans être détenteur du
certificat d'origine (art.112 al.10) ;
-Exercer le métier de guide de chasse sans y être
autorisé (art.113 al.12)
|
Les infractions à la police de la
préservation de la faune sauvage
|
Les infractions aux règles de
préservation du
patrimoine biologique
|
-Ramasser ou détruire des oeufs ou des nids sans
être autorisé (art.112 al.8) ;
-Détenir illégalement un animal sauvage non
intégralement protégé (art.112 al.11) ;
|
Les atteintes à la faune sauvage ou
à son milieu naturel
|
-Abattre une femelle suitée, un oiseau ou un reptile en
nidation (art.113 al.2) ;
-Abattre un animal intégralement protégé
(art.113 al.3) ;
-Détenir légalement un animal
protégé (art.113 al.8) ;
|
Les infractions aggravées et à
caractère transnationales
|
-Abattre un animal intégralement protégé
(art. 113 al.14) ;
-Lorsque l'auteur de l'infraction est un agent de l'Etat ou
d'une Collectivité territoriale (art.113 al.13) ;
-Lorsque l'infraction est commise pendant la période de
fermeture de la chasse (art.113 al.14) ; -Lorsque le délinquant est
récidiviste (art.113 al.15)
-Rejeter ou déverser des substances ou
des déchets préjudiciables à la faune ou à son
milieu (art.114)
|
Source : Il s'agit d'un résultat
des recherches dans le cadre de ce mémoire en se fondant sur la
classification établit par Michel REDON.
En définitive, il convient de relever qu'après
près de cinq décennies depuis l'adoption de la première
loi sur la faune sauvage en 1962, le cadre juridique mis en place par la
République de Congo pour assurer la protection des espèces
fauniques a connu une évolution considérable.
Page | 32
Page | 33
De cette évolution, on retiendra une diversité
de textes sectoriels comportant plusieurs incriminations et sanctions. Leur
caractère épars et lapidaire ne facilite pas l'action du juge
pénal qui est appelé à une interprétation stricte
de la loi, soit t'elle sectorielle. A ces textes, il faut ajouter les codes
classiques qui régissent le procès pénal à savoir
le Code pénal et celui de procédure pénale.
Mais, cette protection pénale de la faune sauvage est
aussi fondée sur des règles procédurales parfois
spécifiques contenues dans la loi faunique
B)-Une protection pénale basée sur des
règles procédurales hétéroclites.
Philippe GROS qualifie d' « écheveau
procédural »48, les règles de forme qui
président à la répression des atteintes contre les
espèces fauniques. Au Congo, déjà, la loi n°48/83 du
21 avril 1983 définissant les conditions de la conservation et
l'exploitation de la faune sauvage prévoyait des aspects
procéduraux spécifiquement adaptés à la recherche,
la constatation et à la poursuite des infractions fauniques. La nouvelle
loi de 2008 renvoie certains aspects procéduraux aux dispositions du
Code de procédure pénale49. Elle accorde aussi
à l'Etat congolais une exclusivité dans le déclenchement
des poursuites et la constitution de partie civile (1). Mais
il serait mal aisé, d'aborder le cadre procédural prévu
par les textes relatifs à la protection de la faune sauvage sans
examiner l'épineuse question de l'absence d'une responsabilité
pénale des personnes morales (2). De nos jours, cet
aspect est devenu l'une des pierres angulaires en matière de protection
environnementale.
1-L'exclusivité accordée à
l'Etat dans le déclenchement des poursuites et la constitution de partie
civile au détriment des citoyens et des associations de protection de la
faune sauvage.
L'exclusivité accordée à l'Etat congolais
dans le déclenchement des poursuites et dans la constitution de partie
civile en cas d'atteinte contre la faune sauvage par les lois en la
matière pose, en toile de fond, la problématique du statut
réel de l'animal sauvage. En effet, au Congo, les animaux sauvages
sont-ils considérés comme une « res nulluis
»50 ou une « res communis
»51 ? A ce titre, l'évolution des textes de lois en
matière faunique a conféré à l'Etat un statut
mitigé sur la faune sauvage. Ces ambigüités sont même
entretenues par les Constitutions congolaises. Cet état de chose ne
facilite pas la tâche du juge pénal. Il peut s'agir de la
recevabilité des actions intentées contre les délinquants
fauniques par les Associations spécialisées dans la protection de
la faune. Ou encore de la constitution de partie civile des personnes morales
de droit public autres que l'Etat.
48 GROS (P), Protection pénale de la
faune et la flore, in Sauvegarde de l'environnement et droit pénal,
édition l'Harmattan Sciences Criminelles, page 270.
49 Voir article 105 de la loi sur la faune et les
aires protégées
50 Expression latine utilisée en Droit
Civil, qui désigne une « chose sans maître »
c'est-à-dire qui n'a pas de propriétaire mais qui est
néanmoins appropriable (Wikipédia, l'Encyclopédie libre.
Site :
www. Wikipédia.org)
51 Expression latine utilisée en Droit
Public qui signifie « chose commune » c'est-à-dire une chose
ou un bien qui ne peut pas être approprié, de par sa nature, elle
appartient à tout le monde, à tous les citoyens et, elle est de
ce fait accessible et utilisable par tous. (Wikipédia,
l'Encyclopédie libre. Site :
www. Wikipédia.org)
Page | 34
D'abord l'article 1er de la loi de 1983 dispose que
: « L'ensemble des animaux sauvages susceptibles de provoquer un
intérêt touristique ou susceptibles d'être exploités
pour leur viande, leur peau, leurs plumes ou leurs trophées,
appartiennent à l'Etat et sont régis par les dispositions de la
présente loi ». Cette disposition tirée d'une loi
adoptée sous un régime communiste et populaire traduisait en
réalité le mode de gestion de l'Etat sous l'emprise de la
Constitution du 24 juin 1973 dont l'article 31 était ainsi
libellé : « Sur toute l'étendue du territoire de la
République Populaire du Congo, la terre est propriété du
peuple ». Ainsi donc, sous le régime de la constitution de
1973 dont la loi de 1983 est adoptée, les espèces fauniques
étaient la propriété de l'Etat. Celui-ci n'était,
nul autre, qu'une représentation institutionnelle de tout le peuple. A
ce titre, il était normal et justifié qu'en cas d'atteinte
à la faune sauvage, seul l'Etat pouvait se constituer partie civile et
enclencher une action en répression contre l'auteur des faits. En ce
sens, les articles 1er al. 2 et 2 de la loi n°1-63 du 13
juillet 1963 portant Code de procédure pénale disposent
respectivement : « Cette action (publique) peut aussi être mise
en mouvement par la partie lésée dans les conditions
déterminées par la présente loi » et «
L'action civile en réparation du dommage causée par un crime,
un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont
personnellement souffert du dommage directement causé par les faits
objet de la prévention ». Ainsi donc, au regard de cette loi,
seul l'Etat pouvait se prétendre victime d'une éventuelle
atteinte à la faune sauvage et de ce fait, mettre en mouvement l'action
publique tout en se constituant partie civile.
Or, depuis la Constitution du 15 mars 199252 en
passant par celles du 20 janvier 2002 et même du 25 octobre 2015, la
prise en compte du droit des citoyens à un environnement sain,
satisfaisant et durable ainsi que leur devoir à défendre
l'environnement soulève plusieurs questions : En effet, que faut-il
entendre par : « devoirs constitutionnels de défendre
l'environnement ou encore droit à un environnement durable » ?
Un citoyen qui a l'obligation juridique de défendre l'environnement
peut-il, en cas d'atteinte à la faune sauvage, saisir le juge
pénal au nom de cette obligation constitutionnelle qui pèse sur
lui ? L'atteinte à la faune sauvage et donc au patrimoine biologique
d'un Etat constitue telle une violation au droit à un environnement
durable reconnu à chaque citoyen, de sorte celui-ci à la
possibilité de se constituer partie civile ? Autant d'interrogations qui
appellent à une réflexion profonde avant de reconnaitre à
l'Etat seul, l'exclusivité de se constituer partie civile en cas
d'infraction contre la faune sauvage.
De plus, la loi du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires
protégées a enfoncé le cloue puisque, contrairement
à celle de 1983, elle élude la question du statut de la faune
sauvage. Mais, la définition qu'elle donne de l'expression «
faune » peut susciter des controverses. En effet, il
apparaît aux termes de son article 5 alinéas 1er que
l'expression faune se définit comme : « patrimoine
biologique commun de la nation, dont l'Etat garantit la gestion durable. Elle
est constituée par l'ensemble des animaux sauvages vivant en
liberté dans leur milieu naturel ou maintenus en captivité
».
52 Voir l'article 46 de la Constitution du 15 mars
1992, reprise par l'article 35 de celle du 20 janvier 2002 et 41 de celle du 25
octobre 2015 dont la formule est ainsi libellée : « Tout
citoyen a droit à un environnement sain, satisfaisant et durable et a le
devoir de le défendre, l'Etat veille à la protection et à
la conservation de l'environnement »
Page | 35
Cette définition fait donc de la faune sauvage
une « res commis » dont l'Etat n'est pas
propriétaire, mais simple garant pour le compte de chaque citoyen.
Aujourd'hui, dans d'autres pays, l'accès au juge
pénal en matière de protection de la faune sauvage n'est plus
l'apanage de l'Etat. En effet, en tenant compte du Principe 10 de la
Déclaration de Rio, au niveau national, les Etats ont l'obligation de
faciliter un accès effectif (des citoyens) à des actions
judiciaires et administratives. Plus précisément des
réparations et des recours. C'est dans ce sens que la jurisprudence
française, notamment, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation
s'est éloignée d'une interprétation restrictive de
l'article 2 du Code de Procédure Pénale sur les conditions de
recevabilité de la constitution de partie civile. Elle a
décidée par exemple que : « devait être
considérée comme une victime personnelle et directe au sens dudit
article, le Parc national des Cévennes, personne morale de droit public,
qui se prétend victime d'acte de chasse à l'aide d'engins
prohibés »53.
Dans ce sens, la France va plus loin, puisqu'avec la loi
Barnier du 2 février 1995 et une évolution jurisprudentielle, les
Associations et autres personnes morales sont déclarées
recevables à agir en leurs actions. Tel est le cas, chaque fois qu'une
infraction serait susceptible de porter un préjudice direct ou indirect
aux intérêts collectifs qu'elles représentent de par leur
mission légale et leur objet statutaire54. Cette
évolution jurisprudentielle a été porté dans le
Code de l'environnement français en son article L. 142-2 qui dispose que
: « Les Associations agréées mentionnées à
l'article L.141-2, peuvent exercer les droits reconnus à la partie
civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou
indirect aux intérêts collectifs qu'elles ont pour objet de
défendre et constituant une infraction aux dispositions
législatives relatives à la protection de la nature (...)
».
Il convient donc de retenir qu'en droit répressif
congolais, en matière des atteintes contre la faune sauvage, les
règles procédurales quant à la constitution de partie
civile et l'accès au juge pénal sont restés ambigües.
Ce privilège reste réservé à l'Etat par le
truchement du Ministère en charge de la faune. Les Associations de
défense de la faune, même lorsque leurs statuts sont clairement
définis ne sont réduites qu'à une simple action passive.
Celle-ci consiste entre autre : dans la collaboration55 à la
recherche des auteurs d'infractions à la loi faunique et ce même
quand il est établit que ces derniers sont des agents de l'Etat relevant
du Ministère en charge de la faune.
Mais, il faut relever qu'il ne s'agit pas là, du seul
retard ou manquement que présente la législation congolaise en
matière des règles procédurales concourant à la
répression de la faune sauvage. On note aussi, l'absence d'une
responsabilité pénale des personnes morales qui constitue un
véritable frein à l'action répressive du juge pénal
congolais.
53 Cass. Crim., 08 février 1995, Dalloz 1996,
page 96, note Dominique Guihal.
54 Voir Cass.crim., 15 juin 1999, 98-86.459 (in
Legisfrance.gouv.fr)
55 Voir en ce sens, l'article 3 de la loi du 28
novembre 2008 portant sur la faune sauvage et les aires
protégées.
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2-L'absence de responsabilité pénale
des personnes morales.
Pour E. DAOUD et C. LE CORRE : « La mise en oeuvre de
la responsabilité pénale des personnes morales en droit de
l'environnement constitue une question fondamentale (...) qui prend tout son
sens s'agissant des groupes de sociétés dont la nature
transnationale fait écho à celle inhérente aux enjeux
environnementaux »56. Au Congo, la nécessité
de mettre en oeuvre une responsabilité des personnes morales s'impose.
Le droit pénal de l'environnement doit être, à travers les
lois sectorielles et les possibilités d'insérer des
procédures sui généris qu'elles offrent, la porte
par laquelle peut entrer cette responsabilité. En effet, depuis les
années 1972, l'économie congolaise est essentiellement
basée, outre l'exploitation pétrolière qui est la source
principale du budget de l'Etat, sur l'exploitation forestière. Il s'agit
donc d'une économie basée sur la destruction de l'habitat de la
faune sauvage par des sociétés nationales et multinationales qui
mettent ainsi à mal les écosystèmes forestiers du pays.
D'autre part la construction des routes, des barrages hydroélectriques,
la montée de l'économie liée au tourisme en milieu naturel
sont autant d'activités exercées par l'Etat et ses actionnaires
et qui portent ainsi atteintes à la faune sauvage et à son
milieu.
Or, le droit pénal congolais en général
consacre une totale impunité aux personnes morales de droit public et de
droit privé. Ce principe de l'irresponsabilité des personnes
morales en droit pénal de l'environnement congolais constitue une
épine au pied de la justice répressive. Il trouve ses
racines dans l'origine même du Code pénal de 1810 encore
applicable en République du Congo. En effet, pendant longtemps, en
France l'idée d'une responsabilité pénale des
regroupements avait toujours été rejetée57.
C'est cette idée qui découle de la maxime latine : «
Societas delinquere non potest » autrement dit : « les
sociétés n'ont pas le pouvoir de commettre un délit
». C'est dire que pour les auteurs du Code pénal à
l'époque, plusieurs arguments militaient en faveur d'une
irresponsabilité des personnes morales. D'abord, ils estimaient qu'un
groupement, une société ou une entreprise n'était qu'une
fiction car dénuée de toute volonté personnelle ni de
conscience (susceptible donc de permettre à un juge d'établir
l'élément intentionnel dans la caractérisation d'une
infraction). Ensuite, en vertu du principe de spécialité, le
groupement n'accède à la vie juridique qu'en vu d'un objet social
qui ne saurait être la commission d'une infraction. Enfin, il existe une
incompatibilité entre peine et entreprise, l'idée d'une
responsabilité des personnes morales étant, par essence, une
dérogation aux principes cardinaux de droit pénal classique
à savoir : le principe de la culpabilité individuelle, de
l'imputabilité de l'acte infractionnel et celui de
l'égalité des personnes devant la loi58.
C'est ainsi que, quelque soit l'atteinte commis contre
l'environnement, en général, ou contre les espèces
fauniques en particulier, le juge pénal congolais est impuissant face
aux personnes morales.
56 DAOUD (E) et LE CORRE (C), La
responsabilité pénale des personnes morales en droit de
l'environnement, in Perspectives Etudes, n°44, mars 2003 ; p 53.
57 PRADEL (J), Manuel de Droit Pénal
Général, 16ème édition Dalloz,
Paris 2006, p.492
58 TCHOCA FANIKOUA (F), Contribution du Droit
pénal de l'environnement à la répression des atteintes
à l'environnement au Benin, Thèse pour l'obtention du grade de
Doctorat en Droit, Maastricht, Université de Maastricht, soutenue le 15
novembre 2012. Page 328.
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Les règles de procédure pénale
générale ne reconnaissent pas la responsabilité de ces
personnes. En effet, comment concevoir qu'une personne morale commette un acte
de chasse ou porte matériellement atteinte aux espèces fauniques
? Mais il faut souligner que des infractions contre la faune sauvage peuvent
être commises pour le compte d'une entreprise par une personne physique
exerçant un pouvoir de direction en son sein qui agit en vertu d'un
mandat de représentation de ladite entreprise. De même plusieurs
agents relevant d'une société d'exploitation forestière ou
touristique peuvent poser des actes constitutifs d'infractions à la
faune sauvage, alors qu'ils agissaient sous les ordres de ladite
société. Dans tous ces cas, la responsabilité
pénale de la personne morale pourrait être envisagée, par
le juge pénal, soit dans le cadre d'une coaction ou même d'une
complicité au sens des articles 59 et 60 du Code pénal
général.
Pourtant, il suffirait d'un simple déclique, d'une
simple disposition dans la loi sur la faune, pour changer toute la donne. C'est
ce qu'a connu le Cameroun depuis la loi de 1994. En effet, l'article 150 de la
loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant régime des forêts, de
la faune et de la pêche dispose en son alinéa 1er :
« Est pénalement responsable et passible des peines
prévues à cet effet toute personne physique ou morale qui
contrevient aux dispositions de la présente loi et des textes
réglementaires pris pour son application ». Bien qu'il soit
évident qu'une simple mention dans un texte ne suffit pas, à elle
seule, pour garantir une protection efficace et une application effective de
cette responsabilité par le juge répressif. Puisque le droit de
la responsabilité pénale des personnes morales en droit de
l'environnement « renvoie à un régime répressif
protéiforme, complexe et évolutif »59 .
C'est donc, dans une volonté d'aller encore plus loin
dans la protection de l'environnement contre les sociétés
multinationales, que la justice pénale française a dans l'affaire
Erika60 condamnée la multinationale Total sur le
fondement d'une responsabilité sociétale des entreprises. En
effet, aujourd'hui, il est établit que la responsabilité
pénale des entreprises en droit de l'environnement peut en outre
être engagée sur le fondement de leurs engagements volontaires.
Cette responsabilité dénommée «
Responsabilité sociétale des entreprises » est une
émanation du droit mou ou soft law fondée sur l'ensemble
des engagements unilatéraux pris par une entreprise en matière de
l'environnement et de développement durable. C'est un moyen pour les
Etats de contraindre les multinationales à mieux se conformer aux
différentes politiques de préservation des
écosystèmes en adoptant un comportement écologiquement
responsable. La justice répressive en France est encore allée
plus loin en retenant la responsabilité pénale d'une personne
morale du fait des atteintes à l'environnement de sa
filiale.61
59 DAOUD (E) et LE CORRE (C)
op.cit, page. 54
60 Voir Cass. Crim 25
septembre 2012 n°10.82-938) ; DAOUD (E) et LE CORRE (C),
Arrêt Erika, marrée verte sur le droit de la
responsabilité civile et pénale des compagnies
pétrolières, Chroniques, in Lamy Droit Pénal
des Affaires n°122 novembre 2012 ;
61 Idem.
Page | 38
En somme, le régime de protection pénale de la
faune sauvage est caractérisé par une multiplicité des
textes qui pendant plusieurs décennies à connus de
considérables évolutions. Au fil des années, le droit
interne congolais en matière faunique a été
renforcé, par des incriminations et des aspects procéduraux
conçus pour permettre à la justice pénale de mieux assurer
la protection des espèces fauniques. Mais, on relève encore de
nombreuses insuffisances et des incomplétudes aussi dans la conception
de ces normes que dans leur application. Notre analyse étant binaire et
comparative entre le Congo et le Cameroun, il conviendra pour nous d'examiner,
les normes de droit interne camerounais mis à la disposition du juge
répressif pour assurer une protection des espèces fauniques.
Paragraphe2 : Le régime de protection
pénale de la faune sauvage en droit interne camerounais.
Rogatien TEJIOZEM, magistrat camerounais, pense qu' «
il serait hasardeux pour toute personne qui s'intéresse à la
matière d'affirmer que le Cameroun y accuse un déficit de
production normative. L'arsenal juridique relatif à la protection et la
conservation des ressources fauniques est suffisamment fourni
»62. En effet, depuis plusieurs décennies, on
assiste à une prolifération normative, portant sur le domaine
faunique, en droit interne camerounais. Dans cette profusion de texte, la loi
n°94/01 du 20 janvier 1994 sur le régime des forêts, de la
faune et la pêche constitue la pierre angulaire sur laquelle se fonde le
juge répressif camerounais pour sanctionner les différentes
atteintes aux ressources fauniques. Le régime pénal camerounais
en matière faunique se caractérise par une
complémentarité entre cette loi et d'autres textes qui concourent
à cette répression. On note cependant une diversité des
incriminations et des sanctions d'une part (A). D'autre part,
la loi de 1994 présente certains aspects procéduraux dont
l'examen minutieux s'avère nécessaire (B).
A)-Une protection pénale
caractérisée une multiplicité des incriminations et des
pénalités.
Dans cette rubrique, il conviendra pour nous, d'examiner en
premier lieu la palette d'incriminations mis à la disposition du juge
répressif camerounais (1). En second lieu, celle des
pénalités attachées à ces infractions
(2).
1-La complémentarité des textes et la
diversité des incriminations en matière
faunique.
a- La complémentarité des textes
instituant le régime de protection pénale de la faune
sauvage.
Pendant plus de vingt (20) ans le législateur
camerounais, contrairement au model congolais, a opté pour une constance
dans la législation faunique. En effet, depuis 1994 la loi portant
régime des forêts, de la faune et de la pêche est le seul
texte légal qui fixe un régime de protection en matière
faunique bien qu'il s'agisse d'une loi multisectorielle. Mais à
coté de cette loi, le législateur a prévu des principes de
complémentarité et de subsidiarité.
62 ONONINO (A.B), Lois et procédures en
matière faunique au Cameroun, Publié avec le concours de
LAGA et de WWF Programme Eléphant d'Afrique, 1ère
édition 2012, page.13
Page | 39
C'est ainsi que la loi n°96/12 du 05 août 1996
portant loi-cadre relative à la gestion de l'environnement, dispose
à l'article 9 au dernier alinéa : « le principe de
subsidiarité selon lequel, en l'absence d'une règle de droit
écrit, générale ou spéciale en matière de
protection de l'environnement, la norme coutumière identifiée
d'un terroir donné et avérée plus efficace pour la
protection de l'environnement s'applique ». De même l'article
85 de la même loi dispose que : « Les sanctions prévues
par la présente loi sont complétées par celles contenues
dans le Code pénal ainsi que dans différentes législations
particulières applicables à la protection de l'environnement
». Ce sont ces deux principes qui donnent lieu à une profusion
normative en matière de protection de la faune sauvage.
Ainsi, à coté de cette loi, on peut citer la loi
n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant Code de Procédure
Pénale, la loi n°2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code
Pénal. Ce cadre légal a été renforcé par la
réglementation en matière faunique. En ce sens, on peut compter :
le Décret n°95/466/PM du 20 juillet 1995 fixant les
modalités d'application du régime de la faune, le Décret
n°2005/099 du 06 avril 2005 portant organisation du Ministère des
Forêts et de la Faune, l'Arrêté n°0648/MINFOF du 18
décembre 2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A, B
et C, l'Arrêté n°0649/MINFOF du 18 décembre 2006
portant répartition des espèces animales de faune en groupe de
protection et fixant les latitudes d'abattage par type de permis sportif de
chasse, l'Arrêté n°0083/MINFOF du 6 février 2008
modifiant et complétant certaines dispositions de l'Arrêté
n°0648/MINFOF du 18 décembre 2006 fixant la liste des animaux des
classes de protection A, B et C et la Décision n°000857/D/MINFOF du
10 novembre 2009 portant organisation du commerce de la viande de brousse. Tous
ces textes concourent à la répression des atteintes contre les
espèces animales et le juge pénal, pour la caractérisation
de l'incrimination et la détermination de la peine se livre à une
interprétation combinée de ces textes de manière stricte.
Mais, son fondement principal reste la loi de 1994 qui lui offre un
éventail d'incriminations.
b- La diversité des incriminations en
matière faunique.
La loi de 1994, pierre angulaire du régime de
protection pénale en matière faunique a mis à la
disposition du juge pénal, une diversité d'incriminations qui lui
donne ainsi un large éventail dans la caractérisation des actes
ou des faits portés à sa connaissance. C'est ainsi que
malgré le caractère de fourre-tout de son chapitre III
sur les infractions et les pénalités, on peut relever
une sorte de catégorisation des infractions fauniques en cinq (5)
rubriques à savoir : les infractions à la chasse proprement dite,
la détention illégale d'espèces animales, l'exportation,
l'importation ou le transit sur le territoire camerounais, la commercialisation
et enfin la falsification de tout document émis par l'Administration
faunique.
S'agissant de la chasse, on peut relever les infractions qui
ont trait au lieu, au mode, au temps et moyens utilisés pour chasser.
Dans ce sens, l'article 80 de cette lois dispose que : « Sauf
autorisation spéciale délivrée par l'administration
chargée de la faune, sont interdit : - la poursuite, l'approche et le
tir de gibier en véhicule à moteur ; -la chasse nocturne,
notamment la chasse au phare, à la lampe frontale et, en
général, au moyen de tous les engins éclairants
conçus ou non à des fins cynégétiques ; -la chasse
à l'aide des drogues, d'appâts empoisonnés, de fusils
anesthésiques et d'explosifs ;
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-la chasse à l'aide d'engin non traditionnel ; -la
chasse à feu ; -l'importation, la vente et la circulation des lampes de
chasse ; -la chasse au fusil fixe et au fusil de traite ; -la chasse au filet
moderne ». De même l'article 104 dispose que : « Des
zones tampons sont créées autour des aires de protection dans des
conditions fixées par décret. La chasse est interdite dans ces
zones au même titre qu'à l'intérieur des aires de
protection ».
L'article 154 qui combine une multitude d'infractions sur
plusieurs secteurs et les sanctions y relative, prévoit au titre des
infractions sur la faune : « la détention d'un outil de chasse
à l'intérieur d'une aire interdite de la chasse ; la provocation
des animaux lors d'une visite dans une réserve de faune ou un jardin
zoologique ». L'article 155 opère plusieurs renvois aux
articles 87, 90, 91, 93, 98, 99, 100, 101 et 103. Ces articles portent
essentiellement sur l'exercice du droit de chasse. Il en est de même de
l'article 156 qui opère renvois aux articles 106, 107 et 108 portant sur
les armes de chasse. L'article 158 prévois en ses derniers
alinéas des infractions ayant trait à l'abattage ou la capture
d'animaux protégés, soit pendant les périodes de fermeture
de la chasse, soit dans les zones interdites ou fermées à la
chasse.
Ainsi donc, à cette mosaïque d'incriminations, il
faut ajouter la multiplicité des pénalités prévues
par la loi de 1994.
2-La multiplicité des pénalités
en matière faunique.
Certains auteurs63 ont estimé qu'une peine
devait correspondre à la trilogie des trois principes qui la
caractérise à savoir : D'abord le principe de la
légalité des incriminations et des peines suivant la maxime
latine : « Nullum crimen, nulla poena sine lege » autrement
dit : « ni infraction, ni peine, sans texte légal ».
Ce premier a pour conséquence, la soumission du juge pénal
à une interprétation stricte ou rigoureuse de la loi. Celui-ci ne
pouvant se livrer au prononcer d'une peine non prévue par la loi.
Ensuite, celui de l'égalité des peines dans leur
application. Ce principe oblige le juge à ne pas tenir compte du
rang social d'un délinquant dans l'application de la peine. Il n'est que
le prolongement du principe de l'égalité des citoyens devant la
loi et le service public. Cependant, il ne conduit pas, non plus, à une
identité des peines, la personnalisation de la peine conduisant
le juge selon son pouvoir d'appréciation et son intime conviction
à évaluer le taux de la peine et le quantum de l'amende. Enfin,
le principe de l'individualisation de la peine, oblige le juge
à ne sanctionner que l'auteur de l'infraction. Il empêche ainsi le
juge à se livrer à la dérive autoritaire. Ces trois
principes canalisent ainsi l'action du juge dans la détermination des
peines.
Lorsqu'on examine les peines prévues par la loi de
1994, le constat est d'abord que toutes ces peines sont alternatives et offrent
ainsi au juge pénal camerounais le choix. Il peut soit cumuler les
peines d'amendes à celles d'emprisonnement, soit se focaliser que sur
l'une ou l'autre.
63 LARGUIER (J), Droit pénal
général (Mémentos), 19ème
édition, Paris, Dalloz, page.15, 102
Page | 41
Ensuite, il y a un manque de fixité, l'ensemble de ces
peines comportant des intervalles. De plus, la loi de 1994 adopte le mode
classification tiré du Code Pénal, celui qui consiste à
classer les infractions par rapport à la
hiérarchie des peines64. En tenant compte, de
cette classification, on se rend à l'évidence qu'il n'existe
pas au Cameroun de crime en matière faunique. Pour la simple raison
qu'il n'existe pas d'infraction faunique punie d'une peine de mort ou d'une
peine privative de liberté dont le maximum est supérieur à
dix (10) ans. A ce titre, la loi sur la faune au Congo est beaucoup plus
avancée et plus dissuasive puisqu'elle prévoit à son
article 114 une de réclusion de 10 à 20 ans65.
Ainsi, des peines de simple police ou contraventionnelle aux
peines délictuelles ou correctionnelles, le juge pénal dispose
d'un large éventail des sanctions pénales. Celles-ci partent de
l'article 154 qui prévoit une amende de 5.000 à 50.000 francs CFA
et un emprisonnement de dix (10) jours, lesdites peines étant
alternatives. Ensuite commence les peines correctionnelles avec les
prévisions de l'article 155 qui dispose : « Est puni d'une
amende de 50.000 à 200.000 francs CFA et d'un emprisonnement de vingt
(20) jours à deux (2) mois ou de l'une seulement de ces peines
», l'article 156 punie d'une amende de 200.000 à 1.000.000 de
francs CFA et un emprisonnement d'un (1) mois à six (6) mois, ces peines
étant alternatives. Enfin, l'article 158 prévoit une amende
3.000.000 à 10.000.000 francs CFA et une peine d'emprisonnement entre un
(1) an et trois (3) ans. Dans les cas de circonstances aggravantes ou de
récidive, l'article 162 prévoit le double des peines s'agissant
des infractions prévues aux articles 154 à 160. Ainsi le maximum
des peines en cas d'atteintes à la faune sauvage au Cameroun, la peine
d'emprisonnement n'excède pas six (6) ans et celle d'amende 20.000.000
de francs CFA. Aussi, si le quantum de l'amende peut sembler dissuasif, le
maximum de la peine, par contre l'est moins car en matière d'atteinte
aux espèces fauniques, les actes posés par les délinquants
varient et certains peuvent aller au-delà des extrémités
de la cruauté et dans ce cas, si les peines ne sont pas exemplaires, les
menaces qui pèsent sur les écosystèmes ne seront pas
éradiquées.
Il convient de retenir que c'est dans le souci de faire
respecter la réglementation protectrice de la faune sauvage que le
législateur camerounais, comme celui du Congo a fait appel au droit
répressif. Rappelons toutefois que si la force dissuasive de ses
sanctions n'est pas aussi efficace, l'action du juge pénal deviendra
comme des coups d'épée dans l'eau et le risque d'extinction
encouru par les espèces fauniques ne cessera pas de prendre des
proportions inquiétantes.
Mais, la force de la loi de 1994 réside aussi dans le
fait qu'elle à mise en place certains aspects procéduraux
spécifiques à la matière faunique. Au nombre de ceux-ci,
il y a la particularité des procès-verbaux et des causes
exonératoires dont-il conviendra d'examiner.
64 Voir en ce sens, l'article 21 du Code Pénal
Camerounais
65 Voir en ce sens, l'article 114 de la loi congolaise
du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées
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B)-Les aspects procéduraux prévus par
la loi du 20 janvier 1994.
Le chapitre 1 du titre 6 de cette loi porte sur la
procédure répressive. Au nombre de ces aspects
procéduraux, nous évoquerons les règles concourant
à l'établissement du procès-verbal de constatation des
infractions fauniques (1). Ainsi que, les causes
exonératoires de la responsabilité (2).
1-Les règles concourant à
l'établissement d'un procès-verbal de constatation des
infractions en matière faunique.
Il s'agit d'examiner à la fois les règles de
forme et de fond qui concourent à l'établissement d'un
procès-verbal de constatation des infractions fauniques
(a). Mais aussi et surtout la valeur ou la force probante de
ce procès-verbal devant le juge pénal (b).
a- Les règles de forme et de fond
concourant à l'établissement d'un procès-verbal en
matière faunique.
Aux termes des dispositions combinées des articles 141
et 142 de la loi de 1994, les agents assermentés de l'administration
chargée de la faune sont chargés de la recherche, de la
constatation et des poursuites en répression des infractions commises en
matière de la faune. Ils prêtent serment devant le tribunal
compétent à la requête de l'administration
intéressée. Ils procèdent à la constatation des
faits, à la saisie des produits indûment récoltés et
des objets ayant servi à la commission de l'infraction et dressent
procès-verbal.
Le procès-verbal est la pièce fondamentale dans
la mise en mouvement de l'action publique contre les infractions fauniques. En
effet, dans la plupart des cas, les faits objet de l'infraction faunique se
déroulent en pleine forêt en l'absence de témoins. Aussi,
seul un procès-verbal rédigé suivant des règles de
fond et de forme requises peut servir de base référentielle tant
pour le Ministère Public que pour les juges au cours du procès.
Au titre des règles de fond, la loi met l'accent sur deux (2) aspects
essentiels à savoir : la qualité de l'agent habilité
à rédiger le procès-verbal. Celui-ci doit être un
agent assermenté relevant du Ministère en charge de la faune.
Ensuite, le lieu où ledit procès-verbal est rédigé.
Celui-ci devant être établit, en principe, dans les services de
l'Administration compétente du lieu de la commission de l'infraction ou
encore dans les services de la police ou de la gendarmerie.
S'agissant des règles de forme, la loi ne donne aucune
précision sur la forme du procès-verbal. Elle fait simplement
état d'un « procès-verbal rédigé et
signé par l'agent assermenté ». Mais c'est le
Décret du 20 juillet 1995 fixant les modalités d'application du
régime de la faune en son article 70 alinéa 1er qui
précise les mentions que doit contenir le procès-verbal de
constatation d'infraction faunique. Au nombre de ces mentions, on cite entre
autre : la date, l'heure et le lieu de la commission de l'infraction ; les
identités complètes de l'agent verbalisateur, du contrevenant,
des témoins, des complices ou des coauteurs, la nature de l'infraction
et les dispositions qui la prévoie et réprime, les mentions des
objets saisis et le lieu de garde. Mais le texte n'établit pas une
distinction entre les mentions substantielles et non substantielles, ni ne
précise quelles sont celles dont l'absence ou l'omission peuvent
entrainer la nullité ou l'irrecevabilité du PV.
Page | 43
Notons aussi que les règles relatives au processus
d'interrogatoire ne sont pas spécifiées et dans ce cas, ce sont
les dispositions générales du Code de procédure
pénale qui s'appliquent66.
Mais outre ces règles de fond et de forme, quelle est
la valeur probante du procès-verbal de constatation devant le juge
répressif ?
b- La valeur probante du
procès-verbal
En règle générale, les
procès-verbaux dressés par les officiers de polices judiciaires
à compétence générale ne servent qu'à titre
de renseignements. Autrement dit, le juge répressif n'est pas lié
par les faits tel que rapporté par l'agent verbalisateur (article 91 du
CPP). Mais la loi faunique pose une exception à cette règle, en
accordant une force probante aux procès-verbaux dressés par les
agents assermentés relevant du Ministère en charge de la faune.
En effet, l'article 142 alinéa 2 dispose que : « Le
procès-verbal rédigé et signé par l'agent
assermenté fait foi des constatations matérielles qu'il relate
jusqu'à inscription de faux ». Il en résulte donc que
le juge est lié aux faits matériels tel que décrit par
l'agent verbalisateur sur la foi de son serment. Cependant, comment le
délinquant visé dans le procès-verbal dressé par un
agent assermenté peut-il engager une procédure en inscription de
faux contre ledit procès-verbal et devant quelle juridiction peut-il le
faire ?
2-Les causes exonératoires de
responsabilité et d'extinction de l'action publique en matière
faunique.
Il faut entendre par causes exonératoires de
responsabilité, comme toutes situations invoquées par le
délinquant de sorte que sa responsabilité ne soit pas
engagée. En droit pénal général, ces raisons sont
nombreuses. Il peut s'agir d'un cas de force majeur ou un état de
nécessité. Mais la loi de 1994 prévoit, en matière
faunique, deux causes essentielles d'exonération de
responsabilité à savoir : la légitime défense
(a) et les cas de battues administratives
(b).
A coté de ces causes d'exonération de la
responsabilité, la loi prévoit aussi de manière
spéciale des causes d'extinction de l'action publique
(c).
a- La légitime défense en
matière des infractions fauniques.
L'article 83 de la loi de 1994 qui est l'assise légale
de la légitime défense en matière faunique dispose que :
« (1) Nul ne peut être sanctionné pour fait d'acte de
chasse d'un animal protégé, commis dans la
nécessité immédiate de sa défense, de celle de son
cheptel domestique et/ou de celle de ses cultures. (2) La preuve de la
légitime défense doit être fournie dans un délai de
soixante douze (72) heures au responsable de l'administration chargé de
la faune le plus proche. ». A la lecture de cette disposition, il
apparaît que la légitime défense telle qu'envisagée
par la loi faunique diffère sur quelques aspects de la légitime
défense en matière des infractions de droit commun.
66 Voir en ce sens, l'article 90 du CPP
Page | 44
En effet, en droit commun, pour que la légitime
défense soit établit, il faut la réunion de deux
conditions cumulatives à savoir : l'existence d'un acte d'agression
qui soit actuel et injuste, d'une part. Celle d'un acte de
défense qui soit nécessaire et mesuré.
L'actualité consiste dans la menace d'un mal imminent qui ne peut
être écarté que dans la commission de l'acte
délictueux accompli en défense. Ainsi n'est pas en état de
légitime défense l'individu qui tire sur son agresseur alors que
celui-ci est entrain de s'enfuir67. Le caractère injuste de
l'agression suppose que celle-ci n'est ni commandée par la loi, ni
fondée en droit. D'autre part, un acte de défense est
réputé nécessaire même si celui qui a commis l'acte
délictueux avait d'autres moyens que la commission de ce délit
pour résister à l'attaque. Il est réputé comme
mesuré lorsqu'il est proportionné à l'attaque.
Or, transposée dans le domaine de la criminalité
faunique, la notion de légitime défense a été
étendue non pas seulement pour la défense personnelle de
l'individu qui répond à l'acte d'agression, mais aussi lorsque le
danger porte sur son cheptel domestique ou même sur ses culture. A ce
titre, cette transposition large pose un problème. En effet, si l'acte
d'agression peut être considéré comme imminent lorsqu'il
s'agit des bêtes féroces ou nuisibles, la question peut se poser
lorsqu'il s'agit d'un animal sauvage herbivore qui vient consommer à
grande quantité les cultures et qu'il est abattu par un individu en
invoquant la légitime défense du fait d'une
nécessité immédiate de défendre ses cultures. De
même, quelle proportionnalité existe-t-il entre un chasseur qui
pour se défendre de la menace imminente d'un reptile nuisible utilise
une arme de guerre prohibé par la loi ?
Enfin, l'exigence d'une preuve de la légitime
défense est quelque peut irréaliste en matière faunique.
Dans la mesure où généralement l'acte de défense
à l'encontre d'un animal prétendument auteur d'une agression
contre un individu, est toujours soldé par la mort de l'animal. De plus,
les circonstances donnant lieu à légitime défense sont
imprévisibles. De sorte qu'il peut ou ne pas y avoir de témoins
alors comment établir, avec certitude, que l'individu a agit dans le
cadre de la légitime défense ? Puisque dans ce cas, il n'y a pas
le principe du contradictoire et seule la parole et les preuves produites par
l'individu sont examinées.
Hors mis la légitime défense, la loi faunique
prévoit aussi les cas de battues administratives qu'il convient
d'examiner.
b- Les cas de battues
administratives.
Les cas de battues administratives sont prévus par
l'article 82 de la loi de 1994 qui dispose que : « Lorsque certains
animaux constituent un danger pour les personnes et/ou les biens ou sont de
nature à leur causer des dommages, l'administration chargée de la
faune peut faire procéder à des battues suivant des
modalités fixées par arrêté du Ministre
chargé de la faune ». Ces battues peuvent être
organisées en cas de menace ou à titre préventif ou
même à la demande des populations concernées. La demande de
battue est adressée aux autorités locales en charge de la faune,
lesquelles procèdent d'abord à une enquête
préalable.
67 BALOKI (H), Extrait sur la légitime
défense en droit pénal, in Cours de Droit Pénal,
Cotonou 2008. Page 23.
Page | 45
Ensuite, lorsque l'enquête aboutie à des constats
avérés, l'administration autorise alors, soit le refoulement ou
l'abattage des animaux ayant été à l'origine des dommages
causés à la population et à leurs biens ou ceux
représentant une menace imminente à l'encontre des personnes et
des biens.
c- Les causes d'extinction de l'action
publique.
D'une manière générale, les causes
d'extinction de l'action de publique sont prévues par l'article 62 du
Code de procédure pénale camerounais et sont très
diversifiées. En effet, il peut s'agir de la mort du suspect ou du
délinquant, l'autorité de la chose jugée, la prescription
des faits objet de l'infraction, le retrait de la plainte, l'abrogation de la
loi ou l'amnistie. Mais, il faut préciser que d'une manière
spéciale, la loi faunique de 1994 met l'accent sur la transaction comme
mode par excellence d'extinction de l'action publique en la matière. En
effet, l'article 146 alinéa 2 dispose que : « La transaction
sollicitée par le contrevenant éteint l'action publique, sous
réserve de son exécution effective dans les délais
impartis »
Au terme de cet examen du corpus juridique au niveau interne,
il apparaît que le Congo et le Cameroun ont fournis de grands efforts
pour mettre en place des normes répressives sur lesquelles se base le
juge pénal pour assurer une protection de la faune sauvage. Il existe
ainsi, entre les deux pays, des aspects identiques tant au niveau des
incriminations que sur la procédure. Mais, il résulte aussi de
cette analyse, que ces régimes de protection pénale restent
très tributaires de législation internationale en la
matière. Le droit de l'environnement étant par essence «
un droit cosmopolite et passeur de frontière ».
D'où, il convient d'examiner en second lieu, le cadre normatif
international en matière de protection de la faune sauvage qui constitue
pour le juge pénal, une source de référence non
négligeable.
Section2 : Des normes de droit international de
l'environnement comme source de référence pour la protection de
la faune sauvage.
Il est évident que la protection des espèces
fauniques ne peut pas être assurée au même degré par
les différents ordres juridiques68. De nombreux auteurs se
conviennent à dire que l'une des caractéristiques du droit de
l'environnement reste sa perméabilité marquée par une
internormativité qui combine droits nationaux, droit international
sous-régional ou régional et droit international
général69. On assiste ainsi, en matière de
protection de la faune sauvage, à une acculturation du régime
répressif. Chaque pays dans sa politique de protection pénale des
espèces fauniques se réfère, en plus de ses normes de
droit interne, à des instruments de droit international de
l'environnement (§1).
68 CORNU (M) et FROMAGEAU (J), Le droit de la
forêt au XXIe siècle, Aspects internationaux,
1ère édition, Paris, l'Harmattan 2004, page.272
69 Voir en ce sens, DOUMBE-BILLE (S), Droit
International de la faune et des aires protégées : importance et
implications pour l'Afrique, Etude juridique de la FAO en ligne, septembre
2001. Dans le même sens, MALJEAN-DUBOIS (S), Juge(s) et
développement du droit de l'environnement. Des juges passeurs de
frontière pour un droit cosmopolite ? In : Le rôle du
juge dans le développement du droit de l'environnement,
page.24-25.
Page | 46
A ce titre, la Convention sur le Commerce International des
Espèces de Faune et de Flore sauvages menacées d'extinction
(CITES) reste, depuis plusieurs décennies, un exemple de protection
juridique internationale. Elle s'invite souvent dans l'office du juge
pénal en matière des infractions fauniques
(§2).
Paragraphe1 : La référence aux
instruments de droit international de l'environnement pour la protection
pénale de la faune sauvage.
Contrairement au domaine de la flore, le droit international
applicable à la faune sauvage est, assurément, l'un des aspects
les plus anciens, diversifiés et aboutis du droit international de
l'environnement. Sa richesse et sa diversification tient de la quantité
des instruments internationaux portant sur sa protection. Aussi bien sur le
plan mondial que régional et sous-régional (B).
Mais, pour le juge pénal national, ces instruments internationaux ne
sont pertinents que lorsqu'ils sont nationalisés ou lorsqu'ils
sont ajoutés au corpus juridique national au moyen des différents
modes d'internalisation (A).
A)-Les processus d'internalisation des instruments
de droit international sur la faune sauvage dans le droit positif congolais et
camerounais.
Il existe plusieurs modes d'internalisation des normes de
droit internationale de l'environnement. On peut citer, la ratification,
l'incorporation, la transposition. De tout temps, les pays d'Afrique ont
toujours été considérés comme le berceau des
conventions internationales portant sur la protection de la nature. La
Convention de Londres de 1933 faisant figure de « grand ancêtre
»70 des traités en la matière. Mais
l'application de ces instruments au plan interne dans les pays africains, ne
pouvait passer que par la mise en oeuvre des mécanismes de leur
insertion dans leur ordonnancement juridique respectif. Abordant dans ce sens,
Delphine E. EMMANUEL ADOUKI affirme qu'au cours des années 1980, le
Congo a élaboré une politique nationale de protection de
l'environnement, ce qui a permis d'observer l'insertion dans l'ordonnancement
juridique interne des normes du droit international de
l'environnement71. En réalité pour les Etats
africains, les efforts d'uniformisation du droit de l'environnement, en
général, et des normes internationales portant sur la protection
des espèces fauniques, en particulier, sont marqués de nos jours
par un double phénomène d'internationalisation et de
constitutionnalisation. Ces phénomènes traduisent
l'évolution de la mise en oeuvre des normes du droit international de
l'environnement par les Etats.
70 DOUMBE-BILLE (S), op.cit
71 EMMANUEL ADOUKI (D.E), Le Congo et les
traités multilatéraux, Paris, l'Harmattan (Logiques
Juridiques) 2007.page.205
Page | 47
Cette évolution a été soulignée
par le Professeur Michel PRIEUR, pour qui, aujourd'hui : « Il ne
s'agit plus tant d'une construction du droit -de l'environnement- par
mimétisme, mais d'une construction d'un droit dans lequel tous les pays
(...) adoptent en même temps des règles quasi identiques qui leur
sont dictées par les conventions
internationales»72.
Parlant des mécanismes d'internalisation des normes
internationales sur la protection de la faune sauvage, disons que
l'incorporation permet aux conventions internationales sur le droit de
l'environnement, lorsqu'elles sont dûment ratifiées, de trouver
une traduction juridique en droit interne. Cette traduction peut se faire
directement. Dans ce cas, la norme internationale se mute en règle de
droit interne. Soit particulièrement par son insertion dans les lois et
règlements. L'incorporation entraine ainsi des innovations et des
modifications des règles de droit interne. La ratification est l'acte
qui par une déclaration authentique et solennelle permet de confirmer ce
qui a préalablement été accepté ou promis. C'est le
document par lequel, le Chef de l'Etat ou une autre autorité
compétente confirme la validité de la signature que son
plénipotentiaire a apposé au bas d'un traité
international. Une fois ratifiée, les normes de droit international de
l'environnement intègre le corpus juridique interne, elle aura ainsi une
valeur infra-constitutionnelle et supra-législative.
B)-Les différents instruments
internationaux sur la protection de la faune sauvage en vigueur au Congo et au
Cameroun.
Parlant de l'importance des instruments de Droit international
de l'environnement consacrés à la protection du milieu naturel,
le Professeur S. DOUMBE-BILLE explique qu'en Afrique : « c'est dans ce
domaine que les évolutions les plus significatives ont eu lieu
»73. En effet, du fait de leurs importances et de leurs
implications, ces instruments ont véritablement doté le continent
africain d'un régime international de protection de son milieu naturel
et partant des espèces fauniques. En effet, depuis la Convention de
Londres en 1900, l'évolution de ces instruments résulte d'une
combinaison entre les normes internationales de portée universelle
(1) et celles dont la portée ne se limite qu'au plan
régional ou même sous-régional (2). Cette
évolution résulte également de leur interaction dans
l'objectif d'assurer la conservation des écosystèmes pour le bien
des générations présentes et futures.
1-Les instruments internationaux de portée
universelle
Ce sont des instruments de portée mondiale qui
définissent un cadre général de protection des
espèces fauniques. Ils peuvent porter soit sur la protection des
habitats ou sur les espèces proprement dites et peuvent avoir soit un
caractère contraignant ou non contraignant.
Ainsi de façon non exhaustive, on citera entre autre :
72 PRIEUR (M), L'influence des conventions
internationales sur le droit interne de l'environnement, in Actes de la
réunion constitutive du Comité sur l'Environnement de l'AHJUCAF.
Porto-Novo, juin 2008
73 DOUMBE-BILLE (S), Droit international de la
faune et des aires protégées : importance et implications pour
l'Afrique, Etude Juridique de la FAO en ligne, septembre 2001, page.5
Page | 48
? La Convention sur la diversité biologique
(CDB)
C'est un traité international adopté à
Nairobi (Kenya) en mai 1992, il soumit à la signature lors du sommet de
la terre à Rio de Janeiro le 05 juin 1992 et entre en vigueur le 29
décembre 1993. Son objectif étant de développer des
stratégies nationales pour la conservation et l'utilisation durable de
la diversité biologique. Cette convention est considérée
comme « l'instrument global qui manquait encore au droit de
l'environnement naturel pour parachever (...) la construction juridique
permettant de régir, à la fois, les gènes, les
espèces et les écosystèmes. C'est pourquoi on a pas
hésité parfois à parler de « convention-chapeau
» pour caractériser la place qu'elle doit occuper et le rôle
qu'elle doit jouer dans l'encadrement juridique et l'utilisation durable des
ressources de la diversité biologique »74.
? La convention sur la conservation des
espèces migratrices appartenant à la faune
sauvage.
Elle est adoptée à Bonn en 1979, elle est
entrée en vigueur le 1er novembre 1983. Cette convention
porte sur la protection d'un groupe d'espèces terrestres, marines ou de
l'avifaune dont la caractéristique principale est qu'elles se
déplacent de manière cyclique à plus ou moins longue
distance, d'un point géographique à un autre. Cette convention
met en place un système de protection fondé sur une
répartition des espèces protégées en annexe.
? Le Protocole sur la
biodiversité
Il a été adopté à Montréal
en janvier 2000 et constitue un accord additionnel à la convention sur
la biodiversité. Ce protocole a pour but d'assurer la gestion de la
faune et des aires protégées en raison des effets
préjudiciables que risqueraient d'avoir la manipulation et l'utilisation
des organismes vivants modifiés sur la conservation et l'utilisation
durable de la biodiversité.
D'autres instruments internationaux de portée mondiale,
visent la protection des milieux et des sites et à ce titre, on peut
retenir deux grandes conventions d'importance majeure pour la conservation des
habitats de la faune en Afrique.
? La convention relative aux zones humides
d'importance internationale
Entrée en vigueur le 21 décembre 1973, cette
convention, encore appelée convention Ramsar, a été
adoptée le 02 février 1971 à Ramsar en Iran. Elle a pour
but d'assurer la conservation et la gestion naturelle des zones humides dans
leur fonction d'habitat des oiseaux d'eau. La convention a mise en place un
système de liste sur laquelle est inscrit les différents sites.
Ainsi en 2009, le Congo a inscrit deux (2) nouveaux sites sur la liste Ramsar
à savoir : les rapides du Congo-Djoué (2500 hectares 04°19'S
01°511'E) qui comportent les grands affluents du fleuve Congo, le
Djoué, la Loua et tout un ensemble de zones humides. Le très
vaste site de la Sangha-Nouabalé-Ndoki (1.525.000 hectares 0141'N
01626'E) qui comprend un parc national, le fleuve sangha et ses environs. A ces
deux sites, il faut ajouter celui de la reserve communautaire du Lac
Télé (438960 hectares).
74 DOUMBE-BILLE (S), op.cit.
Page | 49
Le Cameroun quant à lui comporte sept (7) sites inscrit
sur la liste Ramsar à savoir : Le lac de cratère Mbarombi Mbo
(415 hectares 04°40'N 09°23'E).
2-Les instruments internationaux de portée
régionale et sous-régionale. Sans être
exhaustive, on pourra citer parmi plusieurs de ces instruments :
? La convention d'Alger de 1968 sur la
conservation de la nature et des ressources naturelles.
Elaborée à l'initiative et conclue sous
l'égide de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), elle est
considérée comme l'une des premières grandes conventions
portant sur la conservation de la nature et des ressources naturelles. Elle a
proclamée comme « capital vital et irremplaçable pour
l'homme », les ressources naturelles dans leur ensemble et celles de
la faune en particulier. Ainsi, elles doivent être utilisées
rationnellement « pour le bien-être présent et futur de
l'humanité ». La convention institut un système de
protection des espèces fauniques suivant un classement en deux (2)
annexes A et B. Aux termes de son article VIII, lorsqu'une espèce
protégée n'est présente que sur le seul territoire d'un
Etat partie, la responsabilité de celui-ci est «
particulière » et son article XI propose une régulation du
trafic des spécimens et de trophées.
? La convention de Maputo de 2003 sur la
conservation de la nature et des ressources naturelles.
C'est la version révisée de la convention d'Alger
de 1968
? Le traité relatif à la
conservation et à la gestion durable des écosystèmes
forestiers d'Afrique Centrale et instituant la Commission des Forêts
d'Afrique Centrale (COMIFAC).
Il est signé à Brazzaville en février 2005
entre les pays de l'Afrique Centrale.
? L'accord de coopération et de
concertation entre les Etats de l'Afrique Centrale sur la conservation de la
faune sauvage.
Au -delà de tous ces instruments, celui qui suscite une
adhésion unanime des Etats, reste celle de Washington dite convention
CITES dont une mise en relief paraît nécessaire.
Paragraphe2 : L'exemple d'intégration d'une
norme de droit international de l'environnement dans l'office du juge
pénal en
matière faunique : La convention
CITES
.
Page | 50
Il est aujourd'hui établit que le commerce des
espèces fauniques est devenu l'une des causes majeurs de disparition ou
d'extinction des ressources fauniques, après celles liées
à la perte de leurs habitats naturels. C'est donc en ce sens que la
Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et Flore
menacées d'extinction, plus connue sous le sigle de CITES, a
été mise en place pour réguler et assurer une conciliation
entre les nécessités du commerce international et la protection
des espèces fauniques. Adoptée depuis 1973, la CITES est
considérée comme le premier instrument juridique de portée
international qui offre un cadre fixant les règles en matière
d'importation, d'exportation, de réexportation et de transit des
espèces fauniques. De ce fait, elle joue un rôle essentiel dans la
répression des infractions fauniques par le juge pénal. Bien que
sa mise en oeuvre au niveau des ordres juridiques internes soulève
plusieurs problèmes. En ce sens, il nous ait paru intéressant de
mettre en relief cette convention, en examinant successivement, sa place dans
le régime de protection de la faune sauvage tel que conçu par les
deux Etats (A). Ensuite, les différentes atteintes
à cette réglementation et les sanctions y relatives
(B).
A)-La place de la convention CITES dans le
régime de protection de la faune sauvage au Congo et au
Cameroun.
La réglementation CITES occupe une place
considérable dans le dispositif répressif de chaque pays. En
effet, l'inscription des espèces fauniques sur les différentes
annexes de la Convention définit le niveau de protection de chaque
espèce. Ce qui n'est pas sans conséquence (1).
De même que la fixation des quotas d'exportation pour chaque
espèce menacée d'extinction est une procédure essentielle
dans la conservation du patrimoine faunique des Etats membres
(2).
1-L'inscription des espèces fauniques sur les
annexes CITES et ses effets.
Aux termes des dispositions de la convention CITES, des
milliers d'espèces d'animaux qui bénéficient d'une
protection spécifique sont inscrites sur les trois annexes (I, II et
III). Chaque annexe détermine un niveau de protection nécessaire
à leur conservation. Ainsi, l'article II qui fixe les principes
fondamentaux, consacre son alinéa 1er à l'annexe I et
dispose que : « L'Annexe I comprend toutes les espèces
menacées d'extinction qui sont ou pourraient être affectées
par le commerce. Le commerce des spécimens de ces espèces doit
être soumis à une règlementation particulièrement
stricte afin de ne pas mettre d'avantage leur survis en danger, et ne doit
être autorisé que dans des conditions exceptionnelles ».
De même que l'Annexe II est déterminée par l'alinéa
2. Il comprend les espèces qui bien que n'étant pas
nécessairement menacées actuellement d'extinction pourraient le
devenir si le commerce des spécimens de ces espèces
n'était pas soumis à une règlementation stricte. Son but
est d'éviter une exploitation incompatible avec leur survie.
Enfin l'Annexe III comprend toutes les espèces qu'une
partie déclare soumises, dans les limites de sa compétence,
à une règlementation ayant pour but d'empêcher ou de
restreindre leur exploitation, et nécessitant la coopération des
autres parties. Le dernier alinéa précise que les Etats membres
ne permettent le commerce des spécimens des espèces inscrites aux
Annexes I, II et III qu'en conformité avec les dispositions de la CITES.
Il résulte donc de ce qui précède, que cette convention en
instituant une protection des espèces par annexes, définit un
régime global visant la survis des espèces fauniques qui s'impose
à tous les Etats membres.
L'inscription des espèces aux différentes
annexes donne lieu à une règlementation spécifique.
Celle-ci consiste à soumettre les exportations et importations des
spécimens d'espèces reparties dans les différentes annexes
à la délivrance d'un permis d'exportation ou d'importation. Dans
ce sens, l'article 3 dispose en ses alinéas 2 et 3 : «
L'exportation d'un spécimen d'une espèce inscrite à
l'Annexe I nécessite la délivrance et la présentation
préalable d'un permis d'exportation (...) l'importation d'un
spécimen d'une espèce inscrite à l'Annexe I
nécessite la délivrance et la présentation
préalable d'un permis d'importation (...) ». Cette
délivrance est soumise à diverses conditions
déterminées par la convention. Il en est de même pour les
espèces inscrites aux Annexes II et III dont les règlementations
sont prévues aux articles 4 et 5 de la convention.
Tableau du nombre d'espèces animales du
Congo et du Cameroun inscrites aux Annexes CITES.
Annexes CITES (I, II et III)
|
Pays et Nombres d'espèces animales
|
Type d'espèces
(animalia)
|
Congo
|
Cameroun
|
Mammifères (mammalia)
|
52
|
66
|
Oiseaux (Aves)
|
66
|
115
|
Reptiles (Reptilia)
|
22
|
35
|
Autres types
d'espèces(Others)
|
10
|
12
|
Total
|
150
|
228
|
Source : Rapport
TRAFFIC, Mise en oeuvre de la CITES par les Pays de l'espace COMIFAC :
Evaluation préliminaire, CITES Secrétariat 2013.p.19
(extrait des donnés sur le Cameroun et le Congo).
Page | 51
Page | 52
2-La fixation des quotas sur l'exportation des
espèces menacées d'extinction et la délivrance des permis
CITES.
Dans le cadre de la CITES, un quota peut être entendu
comme la quantité ou le nombre maximal des spécimens pouvant
faire l'objet d'une exportation annuelle par chaque Etat partie. Il sert donc
à limiter le nombre de spécimens d'espèces entrant dans le
commerce international ou à déterminer le maximum des
spécimens pouvant être exporté en une année sans que
cela ait des effets négatifs sur la survie des espèces. Il est
vrai que le texte de la convention ne comporte aucune disposition requerront
spécifiquement les parties qu'elles établissent des quotas pour
limiter le commerce des espèces inscrites aux annexes CITES. Cependant,
avec la Résolution Conf.14.7 (Rev.Cop.15)75, la
conférence des parties a mis en place des lignes directrices pour la
gestion des quotas d'exportation établis au plan national et recommande
aux parties de suivre ces lignes. Ainsi, on peut lire sur le premier point (1.)
de l'annexe portant sur les lignes directrices pour la gestion des quotas
d'exportation établis au plan national : « Le présent
document spécifie un certain nombre de principes généraux
à suivre dans l'établissement et la gestion des quotas
d'exportation annuel au niveau national dans le contexte de la CITES (...)
». Il s'agit donc d'instituer un système uniforme
d'établissement des quotas dans le but de renforcer les
mécanismes de protection des espèces fauniques.
De même, il a été institué dans le
cadre de la CITES, un système d'information sur le commerce des
éléphants dénommé ETIS, avec la Résolution
Conf 10.10 (Rev.Cop.16). Il ressort donc, de ce qui précède,
qu'après plus de quatre (4) décennies d'existence, la CITES est
devenue un instrument majeur de droit international de l'environnement. Elle
s'intègre avec succès dans les politiques de protection des
espèces fauniques de chaque pays. Aussi, la violation à la
règlementation CITES constitue à plusieurs égards des
infractions dont le juge répressif national (congolais ou camerounais)
peut sanctionner.
B)-Les atteintes et sanctions à la
réglementation CITES
En adhérant à la convention CITES, le
Congo76 et le Cameroun77 ont de ce fait
intégré cet instrument dans leur règlementation interne en
matière de protection de la faune sauvage. C'est ainsi que le Cameroun a
mis en place le Décret 2005/2869/PM du 29 juillet 2005 fixant les
modalités d'application de certaines dispositions de la Convention sur
le commerce international des espèces de faune et de flore sauvage
menacées d'extinction. Il faut retenir que les modalités
d'applications de la CITES dont ce Décret portent, entre autre, sur la
détention, le transport, le commerce domestique et international de
toutes les espèces de faune inscrites aux Annexes de ladite convention.
A ce titre, son article 22 dispose clairement que : « Les infractions
dûment constatées sont punies conformément à la
législation en vigueur ».
75 Voir en ce sens le site internet :
http:// cites.org
76 Le Congo a adhéré à la
CITES, le 31 janvier 1983, il est le 79 ème pays au rang
mondial et la convention est entrée en vigueur le 1 mai 1983. (conf.
Liste des parties in
www.cites.org)
77 Le Cameroun a adhéré à la
CITES, le 05 juin 1981, il est le 68 ème pays au rang mondial
et la convention est entrée en vigueur le 03 septembre 1981. (conf.
Liste des parties in
www.cites.org)
Page | 53
Il en résulte que le juge répressif camerounais
peut recourir à la réglementation CITES, lorsque les
prescriptions mises en place pour la gestion durable des ressources fauniques
ont été violées par un délinquant. Il s'agira par
exemple des importations, exportations, transit et commerce des
spécimens d'espèces inscrites dans les annexes de la convention
sans être en possession des autorisations nécessaires tels que les
permis CITES. Il en sera de même en cas de falsification des documents
prévus par la convention. C'est ce que prévoient les termes de
l'article 158 de la loi de 1994.
Au Congo, l'Arrêté n°0103/MEF/SGEF/DCPP du
30 janvier 1984 fixant les dispositions relatives à l'exportation des
produits de la faune et de la flore sauvage, fixe les conditions d'exportation
des produits de la faune. Mais plus mieux, l'article 113 puni d'une amende de
100.000 francs CFA à 5.000.000 de francs CFA et à celle d'un
emprisonnement de deux (2) à cinq (5) ans, le fait d'importer,
d'exporter, de commercialiser ou de faire transiter sur le territoire national,
des animaux sauvages ou leurs trophées en violation des conventions
internationales. Par « conventions internationales », le
législateur congolais fait référence en premier lieu
à la CITES étant donné que c'est l'une des rares
conventions qui fixe les règles en matière d'importation,
d'exportation et commercialisation des espèces fauniques. Il ressort
donc que les infractions et les sanctions prévues par les textes de
droit interne en application de la convention CITES portent soit sur les
différentes atteintes portées contre la survie des espèces
faisant l'objet d'une protection au titre des annexes de la CITES. Mais aussi
sur la violation des obligations mis en place par ladite convention.
Mais, ce buissonnement normatif qui démontre à
l'évidence combien l'alerte de la conscience de ces Etats a
été vive78, met aussi en exergue un constat majeur :
Celui d'une augmentation à des proportions inquiétantes du
phénomène de la délinquance faunique. Il est donc claire,
que la réponse pénale apportée jusque là par les
institutions étatiques, au premier rang desquelles figure la justice
répressive, a été insuffisante. De plus, cette
réponse ne cadre pas certainement avec les enjeux d'une
criminalité qui, depuis lors, a dépassée les
sphères nationales pour revêtir des formes transnationales
échappant ainsi aux compétences du juge pénal. C'est donc
à juste titre qu'une deuxième sous-partie doit être
consacrée aux différentes interrogations sur l'effectivité
des normes répressives contenues dans le corpus juridique
consacré à la préservation de la faune sauvage. Ces
questions ne peuvent, cependant, trouver des réponses qu'à
travers un examen des obstacles à l'application du cadre juridique
sus-évoqué.
78 MALJEAN-DUBOIS (S), La mise en oeuvre du droit
international de l'environnement, Paris, Iddri 2003, page.10
Page | 54
Chapitre II : Les obstacles à une application
effective
du corpus juridique consacré à la
protection de la
faune sauvage par la justice
répressive.
Nous avons mentionné supra, que la délinquance
faunique est aujourd'hui considérée comme une composante
importante de la criminalité environnementale. Le caractère
tentaculaire des infractions dans ce domaine dépasse largement les
sphères nationales et échappent à la connaissance du juge
répressive. Celui-ci étant un juge infra-légal,
il est soumis au principe de l'interprétation stricte de la loi
pénale. Au cours de ces dernières décennies, la
criminalité environnementale, dans laquelle il faut inclure la
délinquance faunique, s'est hissée au quatrième
(4ème) rang des activités illicites
internationales79. Aussi, la recrudescence des
phénomènes tels que : le braconnage ou le commerce illégal
des espèces menacées d'extinction dans la plupart des pays
d'Afrique, met en péril les écosystèmes et la survie des
espèces pour le bien des générations présentes et
futures. Cette situation préoccupante a fait l'objet de plusieurs
rapports et études d'experts faisant office d'alerte. Dans bon nombre de
cas, un accent a été mis sur l'ineffectivité du dispositif
répressif élaboré par les Etats dans le cadre de leurs
législations fauniques internes. Mais, il a été aussi
pointé du doigt la profusion ainsi que le caractère évasif
et aléatoire des normes internationales en la matière, celles-ci
étant souvent confrontées aux intérêts divergents
des Etats souverains.
C'est à ce titre qu'il nous ait paru évident
d'affirmer avec Nathalie RORET et Mathilde PORRET-BLANC que : « la
mise en oeuvre d'un système effectif de répression des atteintes
à l'environnement -et partant contre la faune sauvage- se
heurte aujourd'hui à des nombreuses difficultés
»80. Certains de ces obstacles relèvent du droit
interne (Section1) tel qu'institué par chaque Etat.
Mais d'autres par contre découlent de l'application des normes
internationales consacrée à la protection des espèces
fauniques (Section2).
Section1 : Les obstacles à la mise en oeuvre du
régime de protection pénale en droit interne.
Il est évident qu'aujourd'hui, au Congo et au Cameroun,
la lutte pour la préservation des écosystèmes riches en
biodiversité que regorgent ces pays ne passe que par la mise en place
d'un régime de répression effectif dont le juge pénal
serait le maître d'orchestre. Pour ce faire, au cours de ces
dernières décennies, on a relevé dans ces deux (2) pays
une intensification dans la production normative consacrée à la
protection des ressources fauniques.
79 RORET (N) et PORRET-BLANC (M),
L'effectivité du droit pénal de l'environnement : Etat
des lieux et perspectives, Les Revues Lexisnexis n°7, juillet 2016,
page.13.
80 RORET (N) et PORRET-BLANC (M), op.cit, page.14
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Cependant, la persistance du braconnage à grande
échelle, du commerce illicite des espèces menacées
d'extinction ainsi que des autres types d'infractions y relatives, nous
renvoient à cette évidence : qu'en matière
d'environnement, les règles répressives sont en apparence
redoutable, mais leur efficacité est plus que douteuse81.
En effet, qu'il s'agisse de la transaction instituée
par les lois fauniques congolaise et camerounaise (§1)
que des faiblesses et insuffisances de ces textes (§2).
Le régime de protection pénale des ressources fauniques mis en
place par ces deux Etats porte en son sein, des germes d'une
ineffectivité dans sa mise en oeuvre.
Paragraphe1 : La transaction en matière
faunique : un obstacle majeur à la mise en oeuvre de la
répression pénale.
Qu'il s'agisse de la loi camerounaise n°94/01 du 20
janvier 1994 portant régime des forêts, de la faune et de la
pêche ou de celle n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les
aires protégées en République du Congo. Une
possibilité est accordée aux délinquants fauniques,
auteurs d'infractions, de procéder à une transaction qui
constitue dans les deux systèmes répressifs, une cause
d'extinction de l'action publique. La grande question est celle de savoir : En
quoi, une transaction en matière faunique peut-elle être
considérée comme l'un des obstacles majeurs à la mise en
oeuvre du régime répressif consacré à la protection
des espèces ? On peut trouver un début de réponse à
cette question, en rappelant que le régime répressif mis en place
par ces Etats est constitué par un ensemble des dispositions qui jouent
un rôle dans la prévention et la sanction des différentes
atteintes exercées par l'homme contre le milieu naturel. Certes,
réprimer n'est pas le remède miracle qui sauvera l'environnement
des maux qui l'accablent. Mais c'est affirmer qu'un intérêt social
a été lésé et que, par conséquent, les
éléments de l'environnement sont des valeurs à respecter.
L'action du juge pénal est donc irremplaçable et
déterminante en la matière82.
Or, la transaction a pour but, de soustraire le
délinquant de sa responsabilité pénal. Elle permet
à ce dernier d'échapper à la sanction du juge pénal
en substituant l'acte incriminé au paiement d'une amende devant
l'autorité administrative. Mais, par définition, la
transaction83 est d'abord et avant tout un acte qui répond
à une procédure spéciale définit par les lois
fauniques en vigueur et dont certains aspects méritent un examen
minutieux (A). Ensuite, comme tout acte juridique, elle
produit nécessairement des effets sur le contentieux faunique
(B).
81 Cette affirmation nous renvoie à
l'article de M-J. LITTMANN-MARTIN, Droit pénal de l'environnement.
Apparence redoutable et efficacité douteuse, Justice, Syndicat de la
magistrature, 1988, n°122, pages.15-29. Elle a aussi été
reprise par Jérôme LASSERRE CAPDEVILLE, Le Droit pénal de
l'environnement : un droit encore à l'apparence redoutable et à
l'efficacité douteuse, in Sauvegarde de l'environnement et droit
pénal, edition l'Harmattan Sciences criminelles 2005, page.13.
82 LASSERRE-CAPDEVILLE (J), op.cit, page.17
83 Sur la définition juridique de la
transaction voir le Lexique des termes juridiques, 13ème
édition Dalloz 2001, page.548.
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A)-La procédure de transaction mise en
place par les lois fauniques au Congo et Cameroun.
Deux aspects essentiels de la procédure de transaction
telle qu'instituée par les lois fauniques au Congo et au Cameroun
méritent d'être examinées à savoir : L'institution
d'un régime différencié entre le délinquant
primaire et le délinquant récidiviste en matière de
transaction (1) d'une part. L'examen des régimes
d'habilitation à transiger reconnus aux différentes
autorités administratives (2) d'autre part.
1-Un régime différencié entre
délinquant primaire et récidiviste.
Au Congo, c'est le chapitre II du titre VI, de la loi de 2008
sur la faune et les aires protégées qui détermine le
régime de la transaction en matière faunique. Ainsi, l'article
106 dispose en son dernier alinéa que : « Les
récidivistes ne peuvent prétendre à aucune transaction
». Cette mention pose tout de même un sérieux
problème de logique procédurale. En effet, la récidive est
définit en droit pénal comme : une « cause d'aggravation
de la peine résultant pour un délinquant de la commission d'une
seconde infraction dans les conditions précisées par la loi,
après avoir été condamné définitivement pour
une première infraction (...) »84. A ce titre deux
questions méritent d'être posées. D'abord comment parler de
récidive en matière faunique s'il est donné une
possibilité aux délinquants primaires de transiger et donc
d'échapper à une première condamnation sans laquelle on
saurait parler de la récidive ? Ensuite, en l'état actuel du
système pénal congolais, il n'existe pas un fichier pénal
national dans lequel se trouverait répertorié toutes les
condamnations. De sorte qu'une même personne peut faire l'objet de
plusieurs condamnations. Soit dans les juridictions répressives de la
même localité ou dans des localités différentes,
sans que cela ne puisse avoir un impact sur son statut pénal. Alors,
dans ces conditions, comment parler de seconde condamnation et mieux de
récidive ?
Tout au moins, en théorie, cette loi établit
donc un régime différencié entre le délinquant
primaire. Lequel peut prétendre à une possibilité de
transaction et le délinquant récidiviste qui n'a pas droit
à cette possibilité. Il ne s'agit nullement d'une entorse au
principe d'égalité des citoyens devant les services judiciaires.
Mais plutôt, d'une volonté de rendre plus stricte le traitement
réservé aux citoyens qui persistent dans la commission des actes
attentatoires à la faune. Ceux-ci, constituant un véritable
danger pour la survie des espèces, il faut les soumettre à des
peines d'emprisonnement. C'est le seul moyen de les dissuader.
Ce régime qui apparaît comme un traitement de
faveur fait au délinquant primaire, est aussi prévu par la
loi camerounaise du 20 janvier 1994 dont l'article 146 al.4.c dispose que :
« En cas de transaction : c)-Les matériels saisis, s'ils sont
impliqués pour la première fois dans une infraction et si le
contrevenant est délinquant primaire, sont restitués au
contrevenant après règlement définitif de la transaction
». Il s'agit là, d'une grande faiblesse de cette loi et un
obstacle sérieux quant à la répression et donc à la
dissuasion de la délinquance faunique.
84 Sur la définition juridique de la
récidive, voir le Lexique des termes juridiques, op.cit, page.462.
Page | 57
En effet, si à un délinquant qui a
été pris en flagrant délit d'abattage d'un animal
intégralement protégé, non seulement on lui donne la
possibilité de se soustraire à la justice et donc à des
sanctions pénales moyennant le paiement d'une somme d'argent, on doit
aussi lui restituer le matériel qui lui aurait servir dans la commission
de son forfait, comme pour l'inciter à continuer dans son entreprise
infractionnelle. Il y a donc de quoi se demander, si entre la protection des
espèces fauniques à travers la mise en oeuvre des sanctions
pénales et la dissuasion de la délinquance faunique grâce
à l'application des mesures administratives souples, le
législateur a opté pour la seconde option.
Mais la solution camerounaise, semble aller plus loin dans
cette option de souplesse. Elle accorde cette possibilité de transiger
même aux délinquants récidivistes avec une petite
différence. Pour s'en convaincre, l'article 146 al.4.d poursuit en ces
termes : « En cas de transaction : d)- Les matériels saisis,
s'ils sont impliqués pour plus d'une fois dans une infraction et si le
contrevenant a récidivé, ne sont pas restitués et sont
vendus aux enchères publiques ou de gré à gré en
l'absence d'adjudicataire, à l'exception des armes à feu et
munitions qui sont transmises aux autorités compétentes de
l'administration territoriale ». Au regard de cette disposition, on
peut s'interroger sur ce qu'il en est des armes à feu et munitions du
délinquant primaire qui a bénéficié d'une
transaction ? Outre cette aspect de traitement entre délinquant primaire
et récidiviste, la transaction telle qu'instituée par les textes
congolais et camerounais pose, un autre problème, celui de savoir
quelles sont les autorités habilitées à transiger ?
2-Les niveaux habilitations reconnus aux
autorités administratives pour transiger.
Aux termes de la loi congolaise sur la faune et les aires
protégées, les niveaux d'habilitation pour transiger sont
repartis entre différentes autorités du Ministère en
charge de la faune. En ce sens, l'article 106 al. 1-3 dispose que : «
Le ministre chargé des eaux et forêts, le directeur
général et les directeurs départementaux chargés
des eaux et forêts sont autorisés à transiger au nom de
l'Etat pour les infractions en matière de faune et de chasse. Les
niveaux de transaction sont fixés conformément à la
législation en vigueur. Les conservateurs sont autorisés à
transiger pour les infractions de nature à entraîner une amende de
5.000.000 de francs CFA maximum conformément au règlement
intérieur de l'aire protégée ». Ainsi, sont
autorisés à transiger au nom de l'Etat : le Ministre en charge de
la faune, le Directeur Général et les Directeurs
Départementaux. Il s'agit donc d'une répartition
hiérarchique des compétences dans l'habilitation à
transiger. Par contre, la loi camerounaise de 1994 ne fournie aucun
renseignement sur les autorités habilitées à transiger.
Mais il est évident que cette compétence relève du
ministère en charge de la faune.
Comme tout acte juridique, la transaction en matière
faunique entraine des effets dans le cas où, elle est passée avec
l'administration, mais aussi au cas où elle n'aboutie pas.
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B)-Les effets de la transaction en matière
faunique.
Rappelons d'abord que l'article 6 al.1 du Code de
Procédure Pénale congolais dispose que : « L'action
publique pour l'application de la peine s'éteint par la mort du
prévenu, la prescription, l'amnistie, l'abrogation de la loi
pénale, la transaction lorsque la loi en dispose spécialement
(...) ». Il en est de même de l'article 62 du Code de
Procédure Pénale camerounais qui parle de la transaction comme
cause d'extinction de l'action publique : « lorsque la loi le
prévoit expressément ». Il résulte donc de ces
prévisions légales qu'une loi spéciale peut ériger
la transaction comme un moyen pour le délinquant d'arrêter le
déclenchement de l'action publique. Ainsi, en cas d'exécution
(1) ou même de non exécution
(2), la transaction produit forcément des effets
juridiques à l'égard du délinquant faunique.
1-Les effets en cas d'exécution de la
transaction.
L'effet immédiat de la transaction en matière
faunique est l'extinction de l'action publique. En ce sens, l'article 109 de la
loi congolaise sur la faune dispose que : « Avant le jugement, la
transaction éteint l'action publique. Elle ne porte que sur les amendes
». De même que l'article 146 al.2 de la loi de 1994 au Cameroun
dispose que : « La transaction sollicitée par le contrevenant
éteint l'action publique, sous réserve de son exécution
effective dans les délais impartis ». Elle permet aussi, dans
le modèle camerounais, la restitution des matériels
confisqués lors de l'arrestation du délinquant, à
condition que celui-ci soit un délinquant primaire. Elle peut
également, si le délinquant est un récidiviste, donner
lieu à une vente aux enchères publiques ou de gré à
gré des matériels confisqués.
Mais qu'en est-il en cas de non transaction ?
2-Les effets en cas de non exécution de la
transaction.
Les lois congolaise et camerounaise déterminent un
délai pour l'exécution de la transaction. Dans le cas du Congo,
le délai est de deux (2) mois. Dépassé celui-ci, il est
procédé aux poursuites pénales contre le
contrevenant85. Or l'article 107 n'assortie pas ce délai
d'une mise en demeure du délinquant et une autre défaillance de
la loi congolaise réside en ce qu'il convient de se demander : Pendant
les deux (2) mois qu'advient-il du contrevenant qui a manifester la
volonté de transiger ? Est-il mis en liberté, le temps qu'il ne
s'acquitte du montant fixé à titre de transaction ? Ou,
placé en détention préventive ? Dans le premier cas, n'y
a-t-il pas dans ce cas, un risque que celui-ci ne prenne la fuite sans avoir
honoré à sa promesse de transiger ? Le model camerounais, semble
donc offrir une meilleure rédaction puisqu'il résulte de
l'article 147 de la loi de 1994 que : « En l'absence de transaction ou
en cas de non exécution de celle-ci, et après mise en demeure
préalablement notifiée au contrevenant, l'action publique est
mise en mouvement dans un délai de soixante douze (72) heures sur la
demande des administrations chargées selon le cas (...) de la faune,
partie procès. A cet effet, elles ont compétence pour :
85 Voir en ce sens, l'article 107 de la loi sur la
faune et les aires protégées qui dispose que : « Le
montant de la transaction doit être acquitté dans le délai
fixé par l'acte de transaction, qui ne peut dépasser deux mois,
faute de quoi il est procédé aux poursuites du contrevenant
».
Page | 59
-faire citer aux frais du Trésor Public tout
contrevenant devant la juridiction compétente ;
-déposer leurs mémoires et conclusions et
faire toutes observations qu'elles estiment utiles à la sauvegarde de
leurs intérêts (...) ».
Il ressort donc de ce qui précède que la
transaction en matière faunique, constitue un véritable obstacle
au régime de répression. En effet, à travers elle
l'administration vol la vedette au juge répressif. Elle accorde ainsi au
délinquant un moyen de se soustraire à un jugement pénal.
La mise en oeuvre de la transaction dans le régime de protection de la
faune sauvage rejoint une approche sociologique qui veut que : « la
répression pénale, en tant que manifestation par excellence de la
réprobation sociale, se révèle parfois peu adaptée
à la protection d'une valeur encore émergente, comme la
protection de l'environnement, dans la conscience collective. Ainsi, pour
certains, le délinquant écologique ne mériterait pas
l'opprobre »86. Or cette approche ne concoure pas à
la préservation des écosystèmes et à leur gestion
durable pour le bien des générations présentes et
futures.
Mais outre la transaction, le régime répressif
mis en place grâce aux lois fauniques, comporte bien plus de germes
d'ineffectivité caractérisés par des faiblesses et des
insuffisances qu'il convient d'examiner.
Paragraphe 2 : Les faiblesses et insuffisances du
corpus juridique consacré à la protection de la faune
sauvage.
Depuis plusieurs années, le corpus juridique au plan
interne mis en place au Congo et au Cameroun pour assurer une protection
efficace de la faune sauvage, apparaît comme un « maquis
juridique dont seuls quelques spécialistes savent débrouiller les
pistes »87. En effet, l'ensemble des textes en
matière faunique comportent une multiplicité d'incriminations
extérieures au Code pénal. Elles sont souvent imprécises,
illisibles et lapidaires. Du fait de leurs insuffisances, ces textes donnent
lieu à une technique d'incrimination par renvoi et à des concours
de qualification. Mais outre ces griefs qui peuvent être faites à
l'égard des textes d'incriminations (A). Il faut aussi
relever que ces faiblesses tiennent du fait des contrariétés
entre les règles procédurales spéciales, instituées
par les lois fauniques, et les règles relevant de la procédure
pénale générale (B).
A)-Un corpus juridique constitué des textes
d'incriminations épars et lapidaires.
Il conviendra d'examiner successivement la multiplicité
des incriminations prévues dans divers textes consacrés à
la protection de la faune sauvage (1). Ainsi que le
caractère lapidaire de ces incriminations (2). A
travers cet examen, nous montrerons que ces griefs faites au régime
répressif institué par le législateur congolais et
camerounais, constituent un obstacle à la mise en oeuvre du dispositif
répressif en matière de la faune sauvage.
86 LASSERRE CAPDEVILLE (J), op.cit, page.65.
87 ROBERT (J.H), Droit pénal et
environnement, Paris, A.J.D.A, 1994, page.583
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1-Des textes d'incriminations
épars.
Dans la plupart des cas, les incriminations portant sur la
faune sauvage sont extérieures au Code Pénal, qu'il s'agisse du
Congo ou du Cameroun. Elles sont dispersées à travers plusieurs
textes légaux ou réglementaires. Au Congo, par exemple, cette
hétérogénéité des incriminations en
matière fauniques, relève d'une combinaison entre la loi
n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires
protégées, la loi n°16-2000 du 20 novembre 2000 portant code
forestier et la loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de
l'environnement. Au Cameroun, la loi de 1994 combine trois secteurs la
forêt, la faune et la pêche. De ce fait les incriminations qui y
sont prévues sont protéiformes. Certains revêtant parfois
la nature de prescriptions administratives.
Au nombre des incriminations prévues par l'ensemble de
ces textes, on relève deux grandes catégories en tenant compte du
comportement du délinquant faunique. Ainsi, on distinguera les
incriminations basées sur la faute d'inobservation des
règlements, ce sont des infractions d'omission et celles basées
sur des actes d'exécution. Ce sont des infractions de commission. A ce
titre, dans la loi congolaise de 2008 seront considérées comme
des infractions d'omission : le fait de chasser sans être
détenteur du permis ou de la licence de chasse requis ou de chasser
pendant une période interdite ou dans une zone non ouverte à la
chasse. De même que chasser sans autorisation à l'intérieur
d'une aire protégée. Par contre, seront considérées
comme des infractions de commission, le fait de d'abattre une femelle
suitée ou un animal intégralement protégés. Or, ces
incriminations sont combinées dans les mêmes dispositions des
articles 112 et 113 de ladite loi. Aussi cette
hétérogénéité ne facilite pas le travail du
juge qui doit recourir à plusieurs textes à la fois pour trouver
une meilleure qualification à l'acte infractionnel
déféré devant sa barre. De plus, cette dispersion entraine
à de nombreuses confusions dans la caractérisation et même
dans l'adoption des sanctions, puisqu'il existe des exemples dans ces textes de
lois ou la même incrimination apparait deux fois, entrainant cependant
deux infractions distinctes. Il en est ainsi s'agissant de l'infraction
consistant à rejeter ou déverser des substances ou des
déchets préjudiciables à la faune ou à son milieu,
cette infraction est punie à l'article 113 d'une peine d'amende de
100.000 francs CFA à 5.000.000 de francs CFA et à celle d'un
emprisonnement de deux (2) à cinq (5) ans. Alors que la même
infraction est reprise par l'article 114 avec des peines d'amende de 10.000.000
de francs CFA à 50.000.000 de francs CFA et celle d'emprisonnement de
dix (10) ans à vingt (20) ans de réclusion.
Ces incomplétudes liées au caractère
« fourre-tout » des textes d'incriminations en
matière faunique apparaissent également dans la loi camerounaise
de 1994. Pour s'en convaincre on pourrait citer le cas des articles 155 et 158
qui répriment différemment les mêmes infractions. Il
résulte donc de cette analyse des textes d'incriminations en
matière faunique, que les méthodes d'élaboration de ces
textes par les législateurs marquées par un confinement de ces
incriminations et leur dispersion à travers divers instruments
juridiques de droit interne entraine une autre conséquence à
savoir, le caractère lapidaire de ces incriminations qui est une forme
d'obstacle à son effectivité.
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2-Des textes d'incriminations
lapidaires.
Les textes d'incriminations tels qu'envisagés dans les
lois fauniques au Congo et au Cameroun, manquent de précision, de
clarté. Ils donnent lieu à une opacité de sorte que les
auteurs comme : J-H Robert et M. REMOND-GOUILLOUD parlent d' « un
sentiment de suffocation » lorsque le juge pénal ou même
le juriste est confronté face à de telles dispositions. L'une des
conséquences immédiates qui résulte de cette situation,
est le recours fréquent à un système d'incrimination par
renvoi. Il s'agit d'un style adopté par le législateur dans la
rédaction suivant lequel : Un texte ne précise que la sanction
encourue, alors que la description de l'acte incriminé se trouve
ailleurs, soit dans le même texte. On parle alors, d'un renvoi interne.
Soit dans un autre texte de loi, il s'agit dans ce cas d'un renvoi externe.
Le législateur camerounais de 1994, à fait
recours plusieurs fois à des renvois internes s'agissant des
incriminations en matière faunique. Tel est le cas par exemple pour
l'article 155 dont l'alinéa 1er prévoit la sanction en
ces termes : « Est puni d'une amende de 50.000 francs CFA à
200.000 francs CFA et d'un emprisonnement de vingt (20) jours à deux (2)
mois ou de l'une seulement de ces peines, l'auteur de l'une des infractions
suivantes » et son alinéa 9 opère un renvoi interne en
ces termes : « la violation des dispositions en matière de
chasse prévue aux articles 87, 90, 91, 93, 98, 99, 100, 101 et 103
ci-dessus ; ». Il en est de même pour l'article 156 dont
l'alinéa 1er prévoit la peine et l'avant dernier
opère un renvoi aux articles 106, 107 et 108 en matière d'armes
de chasse.
Ces renvois peuvent aussi porter sur des instruments
internationaux relatifs à la protection de la faune sauvage. Ainsi
l'article 113 de la loi congolaise de 2008 tout en prévoyant des
sanctions à son alinéa 1er soumet les conditions
d'importation, exportation, commercialisation ou de transit sur le territoire
national des animaux sauvages ou leurs trophées par rapport aux
conventions internationales sans autres précisions sur les
prévisions ou même la dénomination de cette convention.
Dans ces cas, le juge pénal appelé à connaitre une telle
infraction peut se tromper en faisant appel à une convention de
portée régionale, alors qu'il s'agit d'une convention
sous-régionale ou même mondiale. Le caractère lapidaire des
textes d'incriminations constitue également pour le juge pénal un
véritable dédale dans la mesure où, leur confinement en
deux ou trois articles rédigés de façon très
laconique entraine une superposition d'infractions. Cette situation conduit
souvent à des concours de qualification, le même fait pouvant
donner lieu à plusieurs incriminations et suscitant donc plusieurs
qualifications pénales parfois erronées. A titre d'exemple, on
peut citer les articles 112 et 113 de la loi faunique au Congo.
Il résulte de tout ce qui précède, qu'au
Congo comme au Cameroun, les faiblesses et les insuffisances constituent un
obstacle à l'application effective des lois fauniques. Elles tiennent du
fait de l'éparpillement des incriminations à travers plusieurs
textes. Mais aussi du fait du caractère laconique de celles-ci. Mais,
ces faiblesses résultent aussi du fait de l'illisibilité des
incriminations. Ainsi que de certains aspects procéduraux
consacrés par ces lois. Ces difficultés d'appréhension
relevant de la nature technique et scientifique du domaine de la faune,
obligent souvent le juge répressif à procéder à une
interprétation qui peut être soit authentique ou
législative, soit judiciaire ou doctrinale.
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Lorsque cette interprétation est dite authentique ou
législative, elle peut être incorporée dans le même
texte spécial ou dans un autre texte de renvoi. Tel est le cas de
l'article 5 de la loi de 2008 sur la faune et les aires protégées
qui fournie les définitions d'une multitude d'expressions techniques
relevant du domaine de la faune. A défaut d'une interprétation
authentique, les juges répressifs font parfois appel à la
doctrine ou même à la jurisprudence pour les éclairer dans
l'interprétation de la loi dans un sens comme dans l'autre.
Il est donc nécessaire d'examiner dans une seconde
rubrique, le caractère illisible des incriminations et de certains
aspects procéduraux tels qu'envisagé par les législateurs
de ces deux pays. Dans un souci d'analyse approfondie, nous aborderons aussi
les contrariétés entre les dispositifs répressifs
spécifiquement consacrés au domaine faunique et les règles
générales prévues dans les textes répressifs
classiques (Code pénal et de procédure pénale).
B)-Un corpus juridique comportant des
règles procédurales et des incriminations illisibles entrainant
des graves contrariétés avec les textes répressifs
généraux.
Les critiques formulées à l'encontre des textes
répressifs consacrés dans les lois en matière faunique au
Congo et au Cameroun tiennent également du caractère illisible
des incriminations et de certains aspects procéduraux contenus dans ces
textes de lois (1). Ce qui ne facilite pas la tâche du
juge dans la caractérisation des infractions. Mais, on relève
aussi des graves contrariétés entre les règles
répressives spéciales et celles qui relèvent du droit
pénal classique (2).
1-L'illisibilité des règles
procédurales et des incriminations fauniques.
Devant les juridictions répressives, le contentieux
faunique est appréhendé comme un contentieux spécial
nécessitant, pour le juge pénal, le recours à un droit
pénal spécial avec des règles, des infractions et parfois
même une procédure spécifique. Or, le droit pénal
protégeant la faune sauvage est une partie du droit de l'environnement
dont la conception des règles et des principes font appel à des
spécialistes du domaine de la faune (ingénieurs des eaux et
forêts, biologistes, naturalistes...). C'est donc un droit pénal
« profondément marqué par sa dépendance
étroite avec les sciences et la technologie. Sa compréhension
exige un minimum de connaissance scientifiques et toute réflexion
critique à son propos impose une approche pluridisciplinaire
»88. Ainsi donc, la plupart des infractions fauniques sont
difficiles dans la caractérisation. En effet, comment un juge
pénal peut-il dégager l'élément intentionnel ou
même matériel dans une infraction comme le fait d'abattre une
femelle suitée, un oiseau ou un reptile en nidation89 ?
Olivier LECUCQ a estimé que : « Les ambiguïtés, les
incertitudes, l'élasticité du droit de l'environnement augmente
le pouvoir d'appréciation du juge »90.
88 LASSERRE CAPDEVILLE (J), op.cit, page.38
89 Voir article 113 alinéas 2 de la loi
n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires
protégées.
90 LECUCQ (O), Le rôle du juge dans le
développement du droit de l'environnement, 1ère
édition, Bruxelles, BRUYLANT 2008, page.18.
Page | 63
Ainsi donc, l'illisibilité des incriminations en
matière faunique, tient du fait que les textes sectoriels sont souvent
rédigés par des techniciens relevant des eaux et forêts. Le
plus souvent les infractions qui y sont prévues, ne sont pas
rédigées en des termes clairs, encore moins selon le style
classique du code pénal. Or, le juge pénal qui applique ces
infractions est soumis au principe de l'interprétation stricte de la loi
pénale, même si celle-ci est portée sur un domaine
spécial. Aussi, lorsque les infractions prévues dans une loi, qui
lui sert de base légale ne sont pas claires, le juge pénal court
le risque de réprimer des faits qui ne relèvent pas formellement
de la loi faunique. Mais de sanctionner sur la base d'une interprétation
erronée qu'il ferait du texte, au motif que celui-ci est difficilement
compréhensible. La conséquence immédiate de la
complexité des incriminations prévues par les lois fauniques au
Congo et au Cameroun est la mise en place des procédures
dérogeant, parfois, à la procédure classique
adaptée aux infractions de droit commun.
Il en sera ainsi, pour la constatation de ces infractions et
pour la recherche des preuves concourant à faire assoir l'accusation ou
l'imputabilité des faits au prévenu. C'est dans ce sens que le
législateur a institué des Agents relevant du Ministère en
charge de la faune dotés des compétences spéciales pour
procéder à tous les actes d'enquêtes en cas d'infractions
fauniques. Pour s'en convaincre, l'article 141 alinéa1 de la loi
n°94/01 du 20 janvier 1994 sur le régime des forêts, de la
faune et de la pêche dispose que : « Sans préjudice des
prérogatives reconnues au Ministère public et aux officiers de
police judiciaire à compétence générale, les agents
assermentés des administrations chargées (...) de la faune, dans
l'intérêt de l'Etat, des communes, des communautés ou des
particuliers sont chargés de la recherche, de la constatation et des
poursuites en répression des infractions commises en matière
(...) de la faune » et l'article 142 alinéa 3 confère
à ses agents des prérogatives très larges dans la
poursuite des enquêtes en matière faunique.
A coté du caractère illisible des aspects
procéduraux et des incriminations prévus par les lois fauniques.
On peut aussi citer comme obstacles à leur application effective, les
contrariétés qui existent entre ces textes sectoriels et les
codes classiques.
2-Les exemples de contrariétés entre
les règles répressives sectorielles et les codes
répressifs généraux.
Le procès pénal est régi par un ensemble
de principes qui garantissent sa bonne tenue. Au nombre de ces principes : il y
a l'égalité de tous les citoyens devant la justice d'où
est tiré la maxime « nul n'est au dessus de la loi ».
De même, les magistrats du siège et du parquet son régis
par un principe d'impartialité. Or, aux termes de l'article 147
alinéa 3 : l'administration en charge de la faune a compétence
pour : « déposer leurs mémoires et conclusions et faire
toutes observations qu'elles estiment utiles à la sauvegarde de leurs
intérêts ; leurs représentants siègent à la
suite du Procureur de la république, en uniforme et découverts,
la parole ne peut leur être refusée ». Cette
prérogative reconnue aux agents de l'administration de la faune
était également prévue dans la loi congolaise du 21 avril
1983. Cette prérogative pose cependant des contrariétés
avec les règles du procès pénal classique.
Page | 64
En effet, la partie civile a les mêmes droits que le
prévenu, elle ne peut en aucun cas être juge et partie.
En siégeant aux cotés du Ministère Publique, alors qu'elle
est partie civile, l'administration apparaît à la fois comme
l'organe accusateur et partie civile. Un autre aspect de la procédure
suscite des contrariétés avec les règles classiques, en ce
sens, l'article 103 de la loi sur la faune et les aires protégées
au Congo dispose que : « Si dans une instance pénale
consécutive à une infraction en matière de faune ou de
chasse, le prévenu excipe d'un droit réel, le tribunal sursoit
à statuer sur cette affaire jusqu'à ce que le juge
compétent se prononce sur l'exception préjudicielle. Celle-ci ne
peut être admise que si elle est fondée sur des moyens de droit et
de fait de nature à ôter au fait incriminé son
caractère délictueux ». Cette disposition pose un
bémol à la prévision de l'article 322 du Code de
procédure pénale : « Le tribunal saisi de l'action
publique est compétent pour statuer sur toutes exceptions
proposées par le prévenu pour sa défense, à moins
que la loi n'en dispose autrement, ou que le prévenu n'excipe d'un droit
réel immobilier ».
Cependant, l'article 103 de la loi faunique doit être
confronté aux conditions prévues à l'article 324 du Code
de procédure pénale sur la recevabilité de l'exception
préjudicielle.
1ère condition : l'exception
préjudicielle n'est recevable que si elle est de nature à retirer
au fait qui sert de base à la poursuite le caractère d'une
infraction. Or l'article 103 sus évoqué, parle des moyens de
droit et de fait de nature à ôter au fait incriminé son
caractère délictueux. Il convient donc de se poser la question
suivante : Quels sont les moyens de droit et de fait qui peuvent constituer une
exception préjudicielle et par conséquent susceptibles
d'ôter au fait incriminé (commission d'une atteinte à la
faune ou omission à une règlementation faunique) son
caractère délictueux ?
2ème condition : l'exception
préjudicielle n'est recevable que si elle s'appuie sur des faits ou sur
des titres donnant un fondement à la prétention du
prévenu.
Quels sont les faits ou titres que peut invoquer le
prévenu au fondement de sa prétention pour le caractère
délictueux attaché au fait à lui reproché soit
ôté ?
3ème condition : Si l'exception
est admissible, le tribunal impartit un délai dans lequel le
prévenu doit saisir la juridiction compétente. Quelle est la
juridiction compétente devant laquelle doit se tourner le prévenu
?
Mais lorsqu'il s'agit d'un acte administratif, le juge
pénal ne peut sursoir à statuer car en vertu de l'article 64 de
la loi n°19-99 du 15 août 1999 modifiant et complétant
certaines dispositions de la loi n°022-92 du 20 août 1992 portant
organisation du pouvoir judiciaire, pose le principe d'une plénitude de
juridiction du juge répressif en vertu duquel, celui-ci a
compétence pour interpréter et apprécier la
régularité d'un acte administratif91.
91 L'article 64 de la loi n° n°19-99 du
15 août 1999 modifiant et complétant certaines dispositions de la
loi n°022-92 du 20 août 1992 portant organisation du pouvoir
judiciaire au Congo dispose
que : « En matière pénale, le Tribunal
de Grande Instance connait des infractions punies des peines correctionnelles
et des contraventions qui leur sont connexes. Il a, au cours des instances
dont-il est saisi plénitude de juridiction et peut interpréter
les décisions des diverses autorités administratives et en
apprécier la régularité juridique, à la demande de
l'une des parties »
Page | 65
Aussi, si l'exception préjudicielle est fondée
sur la régularité d'un permis de chasse, qui par essence est un
acte administratif, l'exception n'est pas fondée dans la mesure
où, le juge répressif à compétence pour
apprécier la régularité d'un permis ou d'une licence de
chasse ayant servi dans l'abattage d'une espèce sauvage.
Au regard de tout ce qui précède, il convient de
retenir que plusieurs obstacles concourent à l'ineffectivité dans
l'application des régimes répressifs mis en place au plan interne
par les Etats. Mais notre étude n'étant pas exhaustive sur ce
point, il est paru nécessaire de n'examiner que la transaction et
certaines insuffisances et faiblesses. Il résulte de cette examen que
si, au cours de ces dernières le Congo et le Cameroun ont fourni des
efforts considérables dans la protection pénale des
espèces fauniques, la persistance de la criminalité faunique
démontre que le chemin est encore très long, ces textes doivent
être amélioré et surtout leur contenu en terme de
dispositions répressives et procédurales mieux adaptées
aux enjeux de la lutte contre cette forme de délinquance.
A coté des obstacles découlant des textes de
droit interne, il reste à examiner ceux qui découlent des normes
de droit international de l'environnement applicable en matière de la
faune sauvage.
Section2 : Les obstacles découlant de
l'application des normes internationales.
De nombreux auteurs se conviennent pour dire que : «
le développement du droit international de l'environnement -et
en particulier des normes internationales consacrées à la faune
sauvage- s'est effectué d'une manière non coordonné,
se traduisant par des doubles emplois, des incohérences et des lacunes
»92. En effet, la profusion des normes internationales,
surtout en matière de protection de la nature et donc de la faune
sauvage, résulte de la prise de conscience d'une menace imminente de la
disparition des écosystèmes et de l'extinction de certaines
espèces. C'est le souci de préserver « ce bien commun
» qui a conduit les Etats, depuis la fin des années 1970
à intensifier la production des instruments internationaux. On compte
plus de cinq cents traités multilatéraux93qui ont
été adoptés dans divers domaines de l'environnement. Mais,
ce foisonnement conventionnel n'est pas sans conséquence. En effet on
note, surtout dans les pays en développement comme le Congo et le
Cameroun, de nombreuses difficultés quant à la mise en oeuvre de
ces instruments. Les intérêts de préservation de la faune
et de son habitat vont parfois à l'encontre des besoins de
développement socio-économique. A ce titre, les Etats invoquent
souvent le principe de souveraineté permanente sur leurs ressources.
Celui-ci étant reconnu comme valeur coutumière du droit
international général, il peut se révéler comme un
véritable obstacle à l'application des instruments internationaux
en matière environnementale (§2). On note
également des sérieux problèmes de cohérence.
L'hétérogénéité et le caractère
évasif des instruments internationaux peuvent avoir aussi des
conséquences sur leur mise en oeuvre effective
(§1).
92 MALJEAN-DUBOIS (S), La mise en oeuvre de droit
international de l'environnement, Paris, iddri 2003, page.11
93 MALJEAN-DUBOIS (S), idem.
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Paragraphe1 :
L'hétérogénéité et le caractère
évasif des normes de droit international de l'environnement en
matière de la protection de la faune sauvage.
Un « atelier d'expérimentation juridique
»94, c'est l'expression empruntée à L.
CONDORELLI par Alain PELLET, Patrick DAILLIER et Mathias FORTEAU, pour
qualifier le droit international de l'environnement. Ces auteurs ajoutent aussi
que c'est un droit où la soft law ou droit mou foisonne. Mais
ce foisonnement ne résume pas seulement en termes de droit mou
ou de règles non contraignantes. Les textes en eux même sont
protéiformes et cette surabondance entraine une juxtaposition entre les
normes internationales de portée mondiale et celles de portée
régionale ou sous régionale. Ce phénomène n'est pas
sans conséquence sur leur effectivité (A). Il en
est de même pour son manque total de précision s'agissant des
normes répressives en matière faunique (B).
A)-Les conséquences de la profusion des
normes internationales de l'environnement en matière de la protection de
la faune sauvage.
Le buissonnement normatif qui caractérise, la
réglementation internationale en matière de protection de la
faune sauvage n'est pas sans conséquence. En effet, il entraine une
juxtaposition entre les différentes normes de portée mondiale et
celles qui sont conclues dans un cadre régional ou sous-régional
(1). Il s'ensuit que pour le juge répressif national
qui se réfère à ces instruments, il peut exister des
risques de redondance ou même de confusion (2). Ces
conséquences empiètent parfois sur l'effectivité de leurs
applications.
1-La juxtaposition entre les normes de
portée mondiale et celles de portée régionale ou sous
régionale.
Depuis plusieurs décennies, l'outil juridique est plus
sollicité pour la protection des écosystèmes. Face au
caractère transnational des préoccupations portant sur la
préservation et la protection des espèces faunique, le droit
international a été le canal par excellence de l'expression de la
volonté commune des Etats pour endiguer la criminalité faunique.
Or cette vitalité dans la production de la norme internationale se fait
à différent niveau tant sur le plan universel que régional
et sous régional. Il en résulte donc que les instruments peuvent
porter sur les mêmes objectifs, avec les mêmes prescriptions et
parfois la même approche de protection. C'est ainsi que plusieurs
conventions sur la protection des espèces fauniques offrent un model de
classification des espèces par liste ou par annexe. Tel est le cas pour
la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant
à la faune sauvage ou convention de Bonn. Adoptée en 1979, elle
prévoit une protection sous forme d'annexes (Annexe. I (article 3)
sur les espèces migratrices en danger. Annexe 2 (article 4) sur les
espèces migratrices devant faire l'objet d'accord).
94DAILLIER (P), FORTEAU (M) et PELLET (A), Droit
International Public, 8ème édition, Paris,
L.G.D.J 2009, page.1417
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On citera aussi la Convention de Washington de 1973, sur le
commerce international des espèces de faune et de flore sauvage
menacées d'extinction (CITES), qui, elle aussi prévoit une
protection en trois annexes. S'agissant de la protection de l'habitat des
espèces fauniques, plusieurs conventions ont également
institué une protection par inscription sur des listes. Ainsi donc aux
termes de l'article 2 de la Convention concernant la protection du patrimoine
mondial, culturel et naturel du 16 novembre 1972 : « Aux fins de la
présente convention, sont considéré comme : «
Patrimoine naturel » : Les monuments naturels constitués par des
formations physiques et biologiques (...) des zones strictement
délimitées constituant l'habitat d'espèces animales et
végétales menacées, qui ont une valeur universelle
exceptionnelle du point de vu de la science ou de la conservation
».
Il en est de même de la convention relative aux zones
humides d'importance ou convention de Ramsar, qui institut également une
protection des espaces par inscription sur des listes. Il est vrai que
certaines conventions portent sur des aspects bien spécifiés. Il
n'en demeure pas moins vrai qu'il existe une superposition et une juxtaposition
entre elles. Cela rend parfois flou les objectifs de chacun en engendrant une
grande confusion, car un site peut être inscrit sur une liste sans en
être dans une autre. Il arrive aussi qu'une espèce fasse l'objet
d'une protection dans une convention et non dans une autre. Tout dépend
donc des critères de sélection aux fins d'inscription sur une
liste ou une annexe. S'agissant du régime de protection des
espèces sauvages, on note une juxtaposition entre la convention CITES et
la Convention Africaine de Maputo en 2003. En effet, l'article 3 de cette
dernière vise également le commerce des spécimens et de
leurs produits. L'annexe 1 de la Convention de Maputo vise les espèces
menacées et l'annexe 2 les aires de conservation.
Mais cette juxtaposition des instruments internationaux peut
aussi avoir pour conséquence, la redondance et parfois même, la
confusion dans l'application en tant que texte de référence par
le juge.
2-Les risques de redondance et de confusion dans
la référence au droit international par le juge
pénal.
Il faut remarquer que la profusion normative en droit
international de l'environnement et partant dans le domaine de la protection de
la faune sauvage, pose des problèmes de cohérence. On note donc
une relative fragmentation et une sorte de compartimentation entre des normes
visant pourtant le même objectif. Ainsi, on pourrait remarquer qu'il
existe des instruments à chaque niveau notamment sur le plan mondial,
régional et sous-régional. Cette division dans l'espace
relève parfois des conflits d'intérêts et du niveau de
coopération entre les Etats. Il s'ensuit que ces textes
n'échappent pas aux redondances et aux répétitions
multiples. Ces inconvénients se répercutent ainsi, sur
l'effectivité de leur application. Le plus souvent, les Etats parties
à plusieurs conventions ayant la même vocation, mais intervenant
sur diverses sphères géographiques ont tendance à ne tenir
compte que de celles qui coïncident le plus de leurs
intérêts. Surtout lorsque, ces normes n'ont pas un
caractère contraignant et qu'elles disent quasiment la même
chose.
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Ces inconvénients posent également un
problème pour le juge pénal, chargé d'appliquer les lois
internes et qui peut recourir, parfois, à la norme internationale.
Ainsi, lorsqu'il y a concours des normes internationales sur le même
domaine, le juge peut être dubitatif en raison de la confusion. Cet
état peut affecter gravement son interprétation et même
parfois son analyse ou son jugement. Il est donc clair que la profusion des
normes internationales en matière de protection de la faune sauvage n'a
pas pour effet, seulement, l'avantage de pluralité. Mais elle entraine
aussi une confusion, un manque de clarté et même parfois une
réelle difficulté de l'appréciation ou dans
l'application.
En outre, le caractère évasif des normes non
contraignantes peut aussi être constitutif d'ineffectivité dans la
répression des atteintes contre la faune sauvage.
B)-Le caractère évasif des normes
internationales relevant du soft law
Selon le Doyen CARBONNIER et son hypothèse du non-droit
: « L'environnement appartient ainsi encore aux domaines pour lesquels
le non-droit est quantitativement plus important que le droit ». En
effet, le droit international de l'environnement en général et
celui portant sur la protection de la faune sauvage en particulier, est un
domaine où on a noté un foisonnement du droit mou.
Autrement dit, c'est un domaine où les normes internationales ne se
limitent qu'à édicter de simples recommandations, des incitations
et non des obligations encore moins des sanctions. C'est cette abondance de
la soft law qui est considérée comme le symptôme
d'une pathologie qui affecte l'efficacité du régime international
en matière de protection de la faune sauvage. La prolifération du
droit mou ou droit vert place les Etats parties aux accords
multilatéraux dans des sphères de non-droit. Ils sont dans une
situation où le manquement à un engagement n'entraine pas
forcément une sanction. Comment cela, en sera autrement, dans la mesure
où, le texte à la base de cet engagement n'est ni contraignant ni
obligatoire ou assortie de sanctions. Il faut relever que la protection de
l'environnement et plus précisément, celle des espèces,
est souvent tributaire des intérêts multiples des Etats. Dans ce
cadre, l'instrument juridique au niveau international le plus typique ne peut
pas être le droit dur ou hard law. Il ne faut pas
oublié que celui-ci a pour but de restreindre le comportement des
acteurs internationaux ainsi que leurs actions souveraines.
Or, le droit mou ou soft law paraît
plus adapté, il propose des instruments plus adaptables et modulables
selon les intérêts des parties. Cette ascension des normes
internationales à la juridicité plus atténuée
n'est pas sans conséquence sur l'effectivité de leur
application. En effet, la norme à la juridicité
atténuée peut constituer une source d'insécurité
juridique. De par son caractère évasif, elle manque de
précision, de fermeté, de contrainte ou de sanction. Ainsi, on
pourrait affirmer qu' « En droit de l'environnement, le
développement de l'usage du soft law conduit à ce que les
concepts traditionnels du droit en tant que contrainte ou limite, cèdent
la place à une gamme juridique à graduation diversifiée
»95.
95 CHATZISTAVROU (F), L'usage du soft law dans le
système juridique international et ses implications sémantiques
et pratiques sur la notion de la règle de droit, in Portique (Revue
de philosophie et sciences humaines) 2005, page.2
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En doctrine, il y a eu de nombreux débats entre des
auteurs tels que M. VIRALLY, F. ROESSIER et M. BOTHE sur le seuil de
juridicité nécessaire à atteindre pour qu'un
instrument de droit international de l'environnement soit reconnu comme
produisant des effets juridiques. Certains ont estimé qu'il n'existait
pas de catégorie intermédiaire entre les textes ayant une
portée juridique et ceux qui en sont dépourvus. D'autres par
contre affirment qu'il est assez difficile de parvenir à une distinction
nette et rigoureuse entre obligations juridiques et absence d'obligations
juridiques, formuler dans des termes qui permettraient de faire
disparaître toutes les incertitudes le plus souvent
volontaires96.
Paragraphe2 : Le principe de la souveraineté
permanente sur les ressources naturelles comme obstacle à une
application efficace des normes de droit international de
l'environnement.
Le principe de la souveraineté permanente sur les
ressources naturelles peut constituer un véritable obstacle à une
application effective des normes de droit international de l'environnement
consacrées à la protection des espèces fauniques. Il est
définit comme une notion selon laquelle : « L'Etat
décide en dernier instance et en toute indépendance du sort des
ressources naturelles qui se trouvent sur son territoire et des
activités économiques qui s'y exercent »97.
En d'autres termes, le Congo et le Cameroun disposent respectivement des
pouvoirs souverains permanents, exclusifs et inaliénables sur leurs
ressources naturelles et sur les activités économiques qui y sont
attachées. Ce principe est considéré comme un prolongement
de la souveraineté nationale reconnue à chaque Etat. Il trouve
son fondement en droit international à travers la non-ingérence
dans les affaires intérieures d'un Etat et le droit des peuples à
disposer d'eux même (A). De ce principe découle,
pour l'Etat, des pouvoirs de dominium et d'imperium sur les
ressources fauniques (B).
A)-La libre exploitation par les Etats de leurs
ressources naturelles : une extension du principe de souveraineté
consacré par le droit international.
Il a été établit supra que le Congo et le
Cameroun disposent chacun sur leur territoire, des écosystèmes
riches en biodiversité. C'est la menace de leur extinction qui a conduit
ces pays à mettre en oeuvre un régime répressif pour
dissuader les délinquants fauniques. Il est aussi constant que selon
leurs lois fauniques, la gestion des ressources naturelles relève du
domaine des pouvoirs publics. Ainsi, depuis la fin des années 1990,
l'avènement de la démocratie et du multipartisme a
entrainé l'élaboration de nouvelles constitutions qui prenaient
en compte les aspects environnementaux. Aussi, elles consacrent le droit
à un environnement sain, satisfaisant et durable98.
96 Idem
97 SALOMON (J), Dictionnaire de Droit International
Public, Bruxelles, Bruylant 2001, page.1046
98 Voir en ce sens les articles 46 de la
Constitution Congolaise du 15 mars 1992 et Préambule de la Constitution
Camerounaise.
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Bien plus, ces constitutions consacrent également le
principe de la souveraineté permanente de l'Etat sur ses ressources
naturelles et la libre exploitation de celles-ci99. Il s'agit donc
d'un prolongement du principe de la souveraineté nationale qui est
consacré dans les constitutions congolaises et camerounaise
(1). Mais, il trouve aussi un écho favorable en droit
international (2).
1-Une extension du principe de la souveraineté
étatique.
D'abord au Congo, ce principe est apparu pour la
première fois dans la constitution du 15 mars 1992. Sont article 9
disposant que : « L'Etat exerce sa souveraineté entière
et permanente sur toutes ses richesses et ses ressources naturelles, y compris
la possession et le droit de les utilisées et d'en disposer (...)
». La constitution du 20 janvier 2002 a repris cette disposition dans
son préambule en ces termes : « Réaffirmons
solennellement, notre droit permanent de souveraineté inaliénable
sur toutes nos richesses et nos ressources naturelles comme
élément fondamental de notre développement ». De
même, son l'article 38 va plus loin en affirmant que : « Tout
acte, tout accord, toutes conventions, tout arrangement administratif ou tout
autre fait qui a pour conséquence directe de priver la Nation de tout ou
partie de ses propres moyens d'existence tiré de ses ressources ou de
ses richesses naturelles, est considéré comme crime de pillage
imprescriptible et punis par la loi ». Plus récemment ces
dispositions ont été reprises tant par le préambule de la
nouvelle constitution congolaise du 25 octobre 2015 que par son article 44.
Ensuite, au Cameroun, ce principe est consacré par le préambule
de la constitution en ces termes : « Le peuple camerounais (...)
Résolu à exploiter ses richesses naturelles afin d'assurer le
bien être de tous, en relevant le niveau de vie des populations sans
aucune discrimination ».
Il résulte clairement de l'ensemble de ces dispositions
que le Congo et le Cameroun rattachent l'exploitation de leurs ressources
naturelles, dont la faune sauvage, à deux concepts à savoir :
? La souveraineté nationale qui s'assimile
systématiquement à la notion d'indépendance de l'Etat. En
ce sens, Max HUBER affirme dans l'affaire de l'île des Palmes
que : « La souveraineté dans les relations entre Etats
signifie l'indépendance »100.
Ainsi, l'indépendance de l'Etat ne peut être
affectée par les limitations que lui imposent ses engagements dans le
cadre du droit international de l'environnement. Cette opinion a
été évoquée par le juge ANZILOTTI, au titre des
opinions dissidentes dans l'affaire du Régime douanier
Austro-allemand101. La souveraineté est
l'élément essentiel par lequel l'Etat affirme son existence dans
le concert des nations. Et la libre exploitation des ressources naturelles est
une des manifestations de l'affirmation de cette souveraineté
étatique et partant, de son indépendance.
99 Voir l'article 9 de la Constitution Congolaise
du 15 mars 1992, le Préambule de la Constitution du 20 janvier 2002 et
Préambule de la Constitution congolaise du 25 octobre 2015 et
Préambule de la Constitution camerounaise.
100 CPA, 4 avril 1928, RSA, II, p.838
101 Voir opinion dissidente d'Anzilotti dans l'affaire du
Régime douanier Austro-allemand, CPJI, série A/B, n°41,
page.57
Page | 71
Ainsi, l'Etat qui a une emprise sur les ressources fauniques
comprises sur son territoire doit avoir la latitude de les gérer en
toute indépendance sans aucune influence extérieur.
? Ensuite, aux termes de ces dispositions constitutionnelles,
il apparaît que la libre exploitation des ressources naturelles par
l'Etat sur son territoire est rattachée à la
nécessité d'un développement socio-économique. En
effet, au début des années 1990, l'avènement des
régimes multipartistes et des démocraties capitalistes
étaient accompagnés d'une volonté des pouvoirs publics de
sortir du sous développement. Aussi, les nouvelles constitutions
à l'image de la constitution congolaise du 15 mars 1992, devaient
réaffirmer la libre exploitation, par les Etats, de leurs richesses en
toute indépendance. Il ne pouvait en être autrement puisque
l'essentielle de leurs activités économiques étaient
basée sur l'exploitation forestière. Elle portait donc, par
nature, sur la destruction de l'habitat des espèces fauniques, ce qui
allait à l'encontre des impératives de protection de
l'environnement.
En réalité, la souveraineté permanente
sur les ressources naturelles est un principe classique de droit international
consacré par les Nations Unies. Pour George FISHER : « La
souveraineté permanente des peuples sur leurs richesses et ressources
naturelles est considérée comme un corolaire du droit des peuples
à disposer d'eux-mêmes »102. Il convient donc
d'examiner les fondements juridiques de ce principe en droit international.
2-Un principe fondé sur la
non-ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat et sur le
droit des peuples à disposer d'eux même.
L'article premier des deux projets relatifs aux Droits de
l'Homme est ainsi libellé : « Le droit des peuples à
disposer d'eux-mêmes comprend en outre un droit de souveraineté
permanente sur leurs richesses et leurs ressources naturelles. Les droits que
les autres Etats peuvent revendiquer ne pourront en aucun cas justifier qu'un
peuple soit privé de ses propres moyens de substance ». Ainsi
aux termes de la résolution 523 (VI) du 12 février 1952 : «
Les pays insuffisamment développés ont le droit de disposer
librement de leurs richesses naturelles (...) qu'ils doivent utiliser de
manière à se mettre dans une position plus favorable pour faire
progresser d'avantage l'exécution de leurs plans de développement
économique conformément à leurs intérêts
nationaux ». Il en est de même pour la résolution 626
(VII) du 21 décembre 1952 qui prévoit que : «
L'Assemblée Générale, considérant qu'il importe
d'encourager les pays insuffisamment développés à mettre
à profit et à exploiter comme il convient leurs richesses et
leurs ressources naturelles ». Pour l'Assemblée
Générale des Nations Unies aucun pouvoir direct ou indirect ne
doit porter atteinte à l'exercice par l'Etat de sa souveraineté
sur ses ressources naturelles. Or cette approche peut constituer un
sérieux obstacle quant à l'application effective des normes de
droit international de l'environnement. Dans la mesure où, et le plus
souvent, les intérêts économiques des Etats sont aux
antipodes des impératives de protection de l'environnement.
102 FISHER (G), La souveraineté sur les ressources
naturelles, Persée Annuaire français de Droit International,
page.516
Page | 72
Ce principe trouve ses fondements d'abord dans le droit
des peuples à disposer d'eux-mêmes qui découle de la
Charte des Nations Unies. L'article premier paragraphe 2 dispose que : «
développer entre les Nations des relations amicales fondées
sur le principe du respect de l'égalité des droits des peuples et
leurs droit à disposer d'eux-mêmes ». Dans la
jurisprudence internationale, la Cour Internationale de Justice (CIJ) a
consacré ce principe dans ses avis respectifs de 1971 et 1975 sur la
Namibie et le Sahara Occidental. En réalité, le
principe des droits des peuples à disposer d'eux-mêmes peut
être subdivisé en deux (2) aspects : politique et
économique. L'aspect politique de ce principe se traduit à
travers le principe de l'autodétermination qui s'analyse par
l'indépendance d'un peuple à choisir librement son système
politique, social et culturel. C'est dans son aspect économique que le
droit des peuples à disposer d'eux-mêmes se traduit par la
souveraineté permanente sur les ressources naturelles et donc à
l'indépendance économique des peuples. Ce principe qui a
longtemps été considéré comme un lex imperfecta
a cependant joué un rôle sans précédent dans le
processus de la décolonisation des pays africains. Certains auteurs ont
estimé que ce principe constituait une norme impérative de droit
international public et d'autres comme une norme anticolonialiste. Il
constituera un fer de lance pour les pays du tiers monde dans la lutte des
indépendances au début des années 1960.
Ensuite, la libre exploitation des ressources naturelles est
fondée sur le principe de non ingérence dans les affaires
intérieures d'un Etat qui est également un principe de droit
international public. Ce dernier se traduit par le fait qu'un Etat ne peut
intervenir dans les compétences qui sont exclusivement reconnues
à un autre Etat, telle que la compétence territoriale. En effet,
l'Etat est la seule entité juridique à exercer son pouvoir
souverain sur l'étendue de son territoire. C'est de là que
découle les droits de possession de l'Etat sur ses ressources
naturelles. Il résulte donc qu'au-delà de la consécration
de ce principe dans les constitutions congolaise et camerounaise, la
souveraineté permanente de l'Etat sur ses ressources naturelles est
intégrée dans le droit international. Dans la pratique, ce
principe confère à tout Etat des pouvoirs de dominium et
d'imperium sur ses ressources naturelles et donc sur la faune sauvage
se trouvant sur son territoire.
B)-Les droits de l'Etat issus du principe de la
souveraineté sur les ressources naturelles : Les pouvoirs de dominium et
d'imperium.
La souveraineté permanente de l'Etat sur ses ressources
naturelles lui confère les pouvoirs de dominium (1)
et d'imprium (2) sur ses ressources
fauniques.
1-Un pouvoir de dominium sur la faune sauvage
existant sur son territoire.
La souveraineté permanente sur les ressources
naturelles est un principe qui confère à l'Etat des pouvoirs de
dominium sur les richesses et les ressources se trouvant sur son
territoire, notamment sur la faune sauvage. Autrement dit, l'Etat dispose sur
ses ressources naturelles un droit réel similaire à celui que
possède un propriétaire sur ses biens avec les mêmes
attributs. Tel est le cas du droit de disposer de ses ressources, de les
contrôler et de règlementer leur exploitation. Ainsi, l'Etat
dispose d'un droit domanial sur le sol, sous-sol ou sur ses ressources
renouvelables et non renouvelables.
Page | 73
L'Etat aura donc en vertu de son dominium, le droit
d'utiliser, d'exploiter, de nationaliser et même d'exproprier, autant de
droits que lui confèrent l'usus et le fructus.
A coté du dominium, l'Etat dispose aussi
l'imperium sur ses ressources naturelles. 2-Un pouvoir d'imperium
sur la faune sauvage existant sur son territoire.
L'impurium est le corollaire du dominium, il
constitue le pouvoir de commandement. C'est le pouvoir exercé par l'Etat
sur les personnes et les choses se trouvant sur son territoire. Ce pouvoir lui
permet donc de concevoir les règles qui régissent la faune
sauvage se trouvant sur son territoire. Il peut ainsi définir les
règles concourant à la répression des ressources
naturelles se trouvant sur son territoire. Les lois fauniques entrent donc dans
ce cadre.
Au terme de cette première partie, il convient de
retenir que le commerce illicite d'espèces sauvages, le braconnage et
partant les autres infractions y afférentes, se sont transformés
en une véritable industrie criminelle. Ces infractions mettent à
mal l'ensemble des écosystèmes dans les pays des Bassins du
Congo. De nombreux rapports ont révélé que le commerce
illicite pèse aujourd'hui près de dix neuf (19) milliards de
dollars US par an. La délinquance faunique apporte de l'eau au moulin de
la criminalité internationale. Mais pourtant, au cours de ces
dernières décennies, les pays d'Afrique dont le Congo et le
Cameroun n'ont pas cessez de mettre en place un cadre légal
consacré à la répression de cette forme de crime. Cette
volonté a été plus manifeste à travers
l'internalisation des instruments juridiques du droit international de
l'environnement. Or, nous avons démontré que ce dispositif
répressif conçu pour apporter une réponse pénale
plus adaptée aux enjeux de la criminalité faunique porte les
gènes de son ineffectivité car de nombreux obstacles concourent
à sa mise en oeuvre.
Page | 74
Deuxième Partie :
LA MISE EN PLACE D'UNE CHAÎNE PENALE
EN
VU D'UNE REPONSE EFFICACE CONTRE LA
CRIMINALITE FAUNIQUE.
Page | 75
L'augmentation de la criminalité dans le domaine de la
faune sauvage, la persistance de la destruction des importants
réservoirs de biodiversité que regorge le Bassin du Congo. De
même que l'imminence de la menace d'extinction des centaines
d'espèces de faune aboutissent à une même conclusion :
Après plusieurs décennies, le bilan du processus de mise en
oeuvre des mécanismes de protection pénale de la faune sauvage au
Congo et au Cameroun est mitigé. Il est donc plus qu'évident que
la prolifération et la vitalité dans la production des normes
internes et internationales, n'est pas la condition suffisante pour assurer une
réponse pénale effective et efficace dans la lutte contre la
délinquance faunique et la préservation des
écosystèmes. Il ne s'agit donc pas seulement de s'interroger sur
l'existence d'un cadre normatif consacré à la répression
de la délinquance faunique ou même sur l'effectivité de son
application. A ce niveau, les réponses apportées à travers
nos développements sus évoqués sont claires. En effet, il
existe au Congo et au Cameroun un cadre juridique constitué de
règles de droit interne et de droit international. Il a
été mis en place pour garantir une protection pénale de la
faune sauvage. Par ailleurs, il ne fait l'ombre d'aucun doute que ce cadre
juridique, du moins dans son aspect pénal, est constitué de
normes ineffectives et en proie à de nombreux obstacles qui ne
facilitent guère leur application.
Mais notre approche binaire ne pourra avoir tout son sens qui
si, on s'interroge aussi sur l'action de l'ensemble des acteurs chargés
de veiller à l'application des normes consacrées à la
protection pénale des espèces fauniques. A ce titre, Sandrine
MALJEAN-DUBOIS, en rappelant les mots du doyen VEDEL : « le droit
vécu est le fait du juge » a affirmé que : «
le champ de la protection de l'environnement illustre remarquablement la
montée en puissance des juges » et, poursuivant sa
pensée, elle se pose plusieurs questions entre autre : « Quelle
est la contribution du juge à l'universalisation de la
préoccupation environnementale ? Le juge participe-t-il à la
gouvernance des questions environnementales ? »103. Or la
justice pénale ne saurait se limiter au seul juge pénal. Il faut
donc examiner l'ensemble des acteurs qui concourent à la
répression des atteintes à la faune sauvage et qui forment ainsi,
une chaîne pénale (Chapitre I). Ensuite, les
causes de l'inefficacité de la réponse qu'ils apportent au
phénomène de la délinquance faunique (Chapitre
II).
103 MALJEAN-DUBOIS (S), Juge(s) et développement du
droit de l'environnement, des juges passeurs de frontière pour un droit
cosmopolite ? In : Le rôle du juge dans le développement
du droit de l'environnement, 1ère édition,
Bruxelles, BRUYLANT 2008, page.17
Page | 76
Chapitre I : Une chaîne pénale
constituée des
différents acteurs concourant à la
répression des
infractions fauniques.
La lutte contre la criminalité faunique implique une
collaboration multi-acteurs. Par acteurs de la lutte contre cette
criminalité, il faut entendre les différentes entités qui
oeuvrent au quotidien dans la lutte contre les activités d'exploitation
illégale de la faune sauvage et dans la mise en application de la
législation en vigueur à la matière104. Il
résulte donc que l'oeuvre de répression contre les
différentes atteintes aux espèces fauniques nécessite la
contribution de plusieurs maillons qui constitue une chaîne
pénale. Ainsi donc, certains acteurs sont placés en amont de
cette chaîne de répression. Ils s'occupent essentiellement, chacun
selon leur compétence, de la constatation, la dénonciation, la
recherche des preuves ainsi qu'à tous actes préalables à
la mise en oeuvre de l'action publique (Section1). D'autre par
contre sont placés en aval de cette chaîne. Il s'agit entre autre
du ministère public et du juge répressif
(Section2).
Section1 : Les différents acteurs placés
en amont de la chaîne pénale dans la répression contre la
délinquance faunique.
En amont de la chaîne répressive, se trouve
d'abord le Ministère en charge de la faune, qui joue un rôle
prépondérant. A coté se trouve d'autres secteurs de
l'administration qui sont considérés comme des acteurs principaux
dans la lutte contre la délinquance faunique (§1).
Ensuite, il y a des acteurs secondaires qui sont, soit institutionnels ou non
institutionnels (§2).
Paragraphe1 : La prépondérance du
rôle de l'Administration dans la lutte contre la délinquance
faunique.
Comme nous l'avons évoqué, dans nos
développements précédents, les ressources naturelles et
partant les espèces fauniques constituent : « un patrimoine
biologique commun de la nation, dont l'Etat garantie la gestion durable
»105. Cette conception de l'Etat gestionnaire des
ressources naturelles est prônée aussi bien par le
législateur congolais que camerounais. Il s'ensuit donc que l'Etat a
l'obligation de veiller à la protection et à la conservation de
la faune sauvage. C'est pourquoi, lorsqu'une atteinte est portée contre
celle-ci, il appartient à l'Etat grâce à ses
démembrements d'engager des poursuites, en qualité de victime
principale.
104 ONONINO (A.B), Lois et procédures en matière
faunique au Cameroun, 1ère édition 2012, publié
avec le concours de LAGA et de WWF programme Eléphant d'Afrique,
page.43
105 Voir l'article 5 al.1 de la loi n°37-2008 du 28 novembre
2008 sur la faune et les aires protégées.
Page | 77
Mais, la règlementation en matière faunique dans
les deux pays attribut aussi une compétence spéciale au
Ministère en charge de la faune. Il procède, par le truchement de
ses agents, à tous les actes d'enquête nécessaire aux fins
de mettre à la disposition de la justice répressive les
contrevenants à la loi faunique. Dans ce sens, Maryse GRANDBOIS
évoquant la prépondérance de l'administration dans la
lutte contre la criminalité environnementale, affirme que : «
C'est l'administration qui fait, applique et interprète le droit de
l'environnement. C'est également l'administration qui commande la
procédure, mène la recherche, la constatation et la poursuite des
infractions environnementales »106. C'est en cela que le
Ministère en charge de la faune est considéré comme le
moteur jouant un rôle principal et essentiel dans la lutte contre la
criminalité faunique (A). Cependant, la
complémentarité entre les entités étatiques permet
aux autres administrations d'accompagner le Ministère en charge de la
faune dans sa mission, bien que leur rôle ne soit que secondaire
(B).
A)-L'Administration de la faune : un acteur
principal dans la lutte contre la délinquance faunique.
Le rôle principal reconnu à l'administration de
la faune puise ses fondements dans des textes règlementaires et
légaux. Au Cameroun, il s'agit des Décrets n°2011/408 du 09
décembre 2011 portant organisation du gouvernement et celui
n°2005/099 du 06 avril 2005 portant organisation du Ministère des
forêts et de la faune, modifié et complété par le
décret n°2005/495 du 31 décembre 2005. Ces textes viennent
compléter la loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant régime
des forêts, de la faune et de la pêche. Au Congo, on peut citer
entre autre le Décret n°2013-219 du 30 mai 2013 portant
organisation du Ministère de l'économie forestière et du
développement durable. Ainsi que la loi 37-2008 du 28 novembre 2008 sur
la faune et les aires protégées. A ces textes s'ajoutent les
textes répressifs classiques que sont les codes de procédure
pénale des deux pays qui déterminent les conditions
exceptionnelles d'attribution de la qualité d'officier de police
judiciaire (OPJ) à des fonctionnaires et agents relevant des
administrations.
La lecture combinée des textes spéciaux et des
dispositions du code de procédure pénale, sur l'attribution
exceptionnelle de la qualité d'officier de police judiciaire à
certains fonctionnaires permet de comprendre que : « la fonction de
constatation des infractions environnementales ne peut être
confiée aux non-initiés. Elle incombe naturellement aux
spécialistes de la protection de la nature ou aux environnementalistes
». Il s'ensuit qu'il convient pour nous, d'examiner en premier lieu,
les règles présidant à l'attribution de la qualité
d'OPJ aux fonctionnaires des Ministères en charge de la faune
(1). En second lieu, nous aborderons les prérogatives
qui sont reconnues à ces fonctionnaires appelés OPJ à
compétence spéciale (2).
106GRANDBOIS (M), Le Droit Pénal de
l'Environnement : Une garantie d'impunité ? Extrait de
criminologie. Vol.21, Canada, Ottawa 1986, page.77
Page | 78
1-Les règles d'attribution de la
qualité d'OPJ avec des compétences spéciales aux agents de
l'Administration de la faune.
Au-delà d'une approche analytique, notre approche est
aussi comparative. Dans cette perspective, il convient d'examiner
successivement le model d'officier de police judiciaire à
compétence spéciale tel qu'envisager par le législateur
congolais (a) et camerounais (b).
a) Le model congolais : la Police de la faune et de
la chasse
Il faut certainement partir des dispositions des articles 12,
14 et 15 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale issu de la
loi n°1-63 du 13 janvier 1963. L'article 12 dispose que : « La
police judiciaire est exercée sous la direction du procureur de la
République, par les officiers, fonctionnaires et agents
désignés au présent titre » et l'alinéa 2
de l'article 15 poursuit en ces termes : « La police judiciaire
comprend : (...) 2° les fonctionnaires et agents auxquels sont
attribuées par la loi certaines fonctions de police judiciaire
». En réalité, la fonction de police judiciaire suppose
une reconnaissance officielle de l'aptitude à constater les
infractions107. C'est sur cette base que la loi de 2008 sur la faune
et les aires protégées à prévus une grande
innovation en instituant « la police de la faune et de la chasse
». Ainsi, l'article 95 de la loi faunique dispose que : «
Sans préjudice des pouvoirs de la police judiciaire, la police de la
faune et de la chasse est assurée par les services compétents du
Ministère chargé des eaux et forêts, qui peuvent en cas de
besoin, se faire assister par les chefs de villages et les associations locales
oeuvrant dans ce domaine ». S'agissant de leurs compétences,
l'article 14 alinéa 1 du Code de procédure pénale dispose
que : « Elle est chargée, suivant les distinctions
établies au présent titre de constater les infractions à
la loi pénale, d'en rassembler les preuves et d'en chercher les auteurs
tant qu'une information n'est pas ouverte ». Cet article apporte des
éclaircissements par rapport au renvoi indiqué à l'article
94 de la loi faunique aux termes duquel : « La recherche et la
constatation des infractions se font conformément à la
législation en vigueur ».
Mais qu'est ce que la police de la faune et de la chasse ? De
qui est-elle composée ? Au plan organique, il s'agit d'un corps
spécial des agents relevant du Ministère de l'économie
forestière et du développement durable (MEFDD), il est
constitué par des éco-gardes (article 96 de la loi
sus-évoquée). Au plan fonctionnel, il s'agit d'un ensemble des
missions qui consiste essentiellement en la surveillance ponctuelle des zones
d'intérêts cynégétiques sur l'ensemble du
territoire, prévention, recherche et constatation des infractions.
Ce model congolais qui s'apparente approximativement de
l'Office national de la chasse et de la faune sauvage en France, n'est pas
aussi loin du model camerounais.
107 TCHOCA FANIKOUA (F), La contribution du Droit
Pénal de l'Environnement à la répression des atteintes
à l'environnement au Benin. Thèse pour obtenir le grade de
Doctorat en Droit. Université de Maastricht, soutenue le 15 novembre
2012.
Page | 79
b- Le model camerounais : les agents
assermentés de l'administration en charge de la faune.
Au Cameroun, le texte de base portant attribution de la
qualité d'officier de police judiciaire est l'article 78 alinéa 1
de la loi n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant Code de Procédure
Pénale. Cet article dispose que : « La police judiciaire est
exercée, sous la direction du Procureur de la République, par les
officiers de police judiciaire, les agents de police judiciaire et tous autres
fonctionnaires ou personnes auxquels des lois spéciales confèrent
des pouvoirs de police judiciaire ». Ensuite, les articles 79 et 80
de cette même loi disposent qu'ont la qualité de police judiciaire
: « Les fonctionnaires et agents des administrations et des services
publics auxquels des textes spéciaux attribuent les compétences
de police judiciaire, les exercent dans les conditions et les limites
fixées par ces textes ». La loi n°94/01 du 20 janvier
1994 portant régime des forêts, de la faune et de la pêche
est considérée comme une loi spéciale qui confère
des pouvoirs de police judiciaire aux agents du Ministère en charge de
la faune.
En ce sens, l'article 141 de ladite loi, dispose que : «
(1) Sans préjudice des prérogatives reconnues au
Ministère public et aux officiers de police judiciaire à
compétence générale, les agents assermentés des
administrations chargées (...) de la faune, dans l'intérêt
de l'Etat, des communes, des communautés ou des particuliers sont
chargés de la recherche, de la constatation et des poursuites en
répression des infractions commises en matière (...) de la faune,
selon le cas. (2) Les agents visés à l'alinéa (1)
ci-dessus prêtent serment devant le tribunal compétent à la
requête de l'administration intéressée, suivant des
modalités fixées par décret ». L'article 142
poursuit en affirmant que ces agents assermentés de l'administration de
la faune « sont des officiers de police judiciaire à
compétence spéciale en matière de la faune » et
ils procèdent à la constatation des faits, à la saisie des
produits indûment récoltés.
Ainsi donc, les missions de police judiciaire relevant du
domaine de la faune sauvage, notamment la constatation des atteintes à
la faune sont spécialement confiées à des agents du
Ministère des forêts et de la faune (MINFOF). Cette qualité
d'officier de police judiciaire est cependant conditionnée à la
prestation d'un serment devant le tribunal compétent. Il ne reste plus
que d'examiner les prérogatives qui sont reconnues aux agents du
Ministère en charge de la faune. A ce titre, l'approche comparative
entre le model congolais et camerounais est la mieux appropriée.
2-Les prérogatives reconnus aux OPJ
à compétence spéciale dans la constatation des infractions
à la loi faunique.
Aux termes des dispositions de la loi de 2008 sur la faune et
des aires protégées au Congo et celle de 1994 sur le
régime des forêts, de la faune et de la pêche au Cameroun,
les prérogatives reconnues aux agents des Ministères en charge de
la faune sont pratiquement similaires. Il conviendra néanmoins de les
examiner distinctement à travers les pouvoirs reconnus aux agents de la
police de la chasse et de la faune au Congo (a) et ceux
reconnues aux agents assermentés au Cameroun (b).
a) Page | 80
Les pouvoirs reconnus aux agents de la police de la
chasse et de la faune.
D'abord l'article 14 alinéa 1 du Code de
procédure pénale congolais pose des compétences
générales qui sont attachées à toute personne
dotée des prérogatives de police judiciaire. En effet, il ressort
de cette disposition que la qualité d'officier de police judiciaire
donne compétence, aux fonctionnaires et agents désignés
par des textes spéciaux : de constater les infractions à la loi
pénale, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs.
Mais, la loi faunique élargie les prérogatives des agents
relevant du Ministère en charge de la faune. En effet, contrairement aux
officiers de police judiciaire classique dont les procès-verbaux ne
servent qu'à titre de simple renseignement108, l'article 98
de la faunique dispose que : « Le procès-verbal dressé
par un fonctionnaire assermenté appartenant à un cadre
hiérarchique équivalent ou inférieur à celui
d'agents techniques des eaux et forêts fait foi jusqu'à preuve du
contraire ». Les articles 99 à 101 de cette loi
énumèrent les pouvoirs reconnus aux agents assermentés du
Ministère de l'économie forestière. On peut citer entre
autre : dresser des barrages pour renforcer la lutte contre la chasse
illégale, procéder à des perquisitions pour rechercher des
animaux ou des trophées irrégulièrement chassés ou
détenus, requérir la force publique en cas de besoin.
Ces prérogatives sont, cependant, conditionnées
par la prestation du serment devant le tribunal. Le Décret
n°2002-433 du 31 décembre 2002 portant organisation et
fonctionnement du corps des agents des eaux et forêts dispose en ses
articles 20 et suivants : les agents du corps des eaux et forêts sont
amenés à faire usage des armes de guerre, des armes de chasse et
des explosifs. C'est le cas, lors des opérations de lutte anti
braconnage. Ils ont la qualité d'agents de police judiciaire. Ils
prêtent serment devant le tribunal de grande instance de leur lieu
d'affectation. Ainsi, ces agents ont qualité pour arrêter tout
individu qui commet une infraction à la loi. Ces prérogatives
sont quasiment similaires à celles reconnues aux agents
assermentés relevant du Ministère des forêts et de la faune
au Cameroun.
b) Les prérogatives reconnues aux agents
assermentés du Ministère en charge de la faune.
Les articles 82 et suivants du Code de procédure
pénale camerounais fixent les attributions et devoirs de la police
judiciaire. L'article 142 de la loi de 1994 énumère les
prérogatives des agents assermentés relevant du Ministère
en charge de la faune. Ainsi, ils procèdent à la constatation des
faits, à la saisie des produits indûment récoltés et
des objets ayant servi à la commission de l'infraction. Ils dressent
également des procès-verbaux qui font foi des constatations
matérielles qu'ils relatent jusqu'à inscription de faux.
L'alinéa 3 poursuit en stipulant que ces agents peuvent visiter tous les
moyens susceptibles de transporter les produits résultant de la
commission des infractions fauniques. Ils peuvent aussi s'introduire de jour
dans des maisons et les enclos, en cas de flagrant délit et exercer un
droit de poursuite à l'encontre des contrevenants.
108 En ce sens l'article 365 du Code de Procédure
Pénale congolaise dispose que : « Sauf dans le cas où la
loi en dispose autrement, les procès-verbaux et les rapports constatant
les délits ne valent qu'à titre de simples renseignements
».
Page | 81
Les similarités entre les agents des deux pays tiennent
de l'astreinte à la prestation de serment devant un tribunal
compétent du lieu de leur affectation. Malgré le silence des deux
lois, il faut relever que ce serment, comme celui de tout autre corps de
l'administration astreint à cette obligation n'est prêter qu'une
seule fois, quelque soit le nombre d'affection qui peuvent intervenir par la
suite. Il ne saurait en être autrement puisque les médecins ou les
magistrats ne prêtent pas serment chaque fois qu'ils sont affectés
d'un lieu à un autre. C'est ainsi qu'une interprétation tendant
à lier la compétence territoriale du serment à celle de la
juridiction devant laquelle l'agent du MINFOF l'a effectué et par
conséquent faire de celui-ci « un serment mobile
»109, ne pourrait tenir la route. Cependant, il est claire
que l'article 88 alinéa 1 définit les limites territoriales dans
lesquelles les agents doivent exercer leurs compétences. Au-delà
des dispositions de la loi faunique de 1994, le décret de 1995 dispose
en son article 68 alinéas 1 stipule que le contrôle et le suivi
des activités fauniques sont assurés par le personnel de
l'administration chargée de la faune. Ils procèdent à
l'interpellation et à l'identification immédiate de tout
contrevenant pris en flagrant délit.
A coté du rôle prépondérant
joué par l'administration de la faune, les autres entités
étatiques centrales, déconcentrées ou même
décentralisées accompagnent le ministère en charge de la
faune dans cette lutte.
B)-Le rôle assigné aux autres
administrations dans la constatation des infractions à la loi
faunique.
Mis à part le Ministère en charge de la faune,
la compétence spéciale dans la recherche et la constatation des
infractions à la faune sauvage est également confiée aux
autres agents des administrations étatiques dont la loi reconnaît
la qualité de police judiciaire. On citera les agents des services de
douane (1) et certaines autorités de l'administration
décentralisée ou déconcentrée
(2).
1-Les agents relevant des services de douanes aux
frontières.
Il faut relever de prime à bord que la douane
Camerounaise et Congolaise est soumise à une réglementation
communautaire notamment l'Acte n°5/001-UEAC-097-CM-06 du 03 août
2001 portant Code des Douanes de la CEMAC. Son article 1er dispose
que : « Le présent code s'applique au territoire douanier de la
Communauté Economique et Monétaire des Etats de l'Afrique
Centrale ». Ce Code offre donc un régime identique applicable
en matière de taxations douanières. Il résulte donc des
dispositions de ce Code que les brigades de douane sont créées et
supprimées par décision du Gouvernement intéressé.
Il en informe le Secrétariat Exécutif (article 61) et l'article
63 soumet les agents des douanes à la prestation d'un serment devant le
tribunal compétent. Les agents de douanes font partis des fonctionnaires
auxquels les articles 80 et 15 des codes de procédure pénale
congolais et camerounais attribuent la qualité d'officier de police
judiciaire.
109 ONONINO (A.B), NYA (F.A) et NKOKE (C.S), Guide : la mise
en application de la loi faunique, Cameroun, les compétences,
attributions, mission et responsabilités des différents
corps. Rapport TRAFFIC, novembre 2016.page.40
Page | 82
Ainsi donc, en cette qualité, l'article 70 du Code de
douane dispose que : « Pour l'application des dispositions du
présent code et en vue de la recherche de la fraude, les agents peuvent
procéder à la visite des marchandises et des moyens de transport
et à celle des personnes ». Ces compétences sont
élargies aux termes des articles 72, 73 et 74 du même code.
Au nombre de ses missions, les services de douanes
camerounaise et congolaise appuient les autres administrations dont le
Ministère en charge de la faune dans la lutte contre la
criminalité faunique transnationale. En effet, ces agents sont
implantés aux frontières et déployés de
façon stratégique sur toute l'étendue des territoires des
deux pays. A ce titre, ils sont habiletés à interdire
l'entrée dans le territoire national de certains produits tels que : des
espèces fauniques ou des trophées en violation avec les lois
fauniques en vigueur. Ils contrôlent également le respect à
la réglementation internationale en matière de protection des la
faune sauvage. On peut citer entre autre : les quotas aux importations ou aux
exportations prévus dans les conventions internationales dûment
ratifier par le Congo et le Cameroun. Pour s'en convaincre on peut se
référer à la Convention CITES ou à celle de Bonn
sur les espèces migratrices appartenant à la faune sauvage.
A coté des agents relevant des administrations
centrales de l'Etat, les législations congolaises et camerounaises ont
connue une grande évolution dans le cadre des politiques de
déconcentration et de décentralisation. A ce titre, des pouvoirs
sont reconnus aux autorités déconcentrées et
décentralisées dans la protection de l'environnement et partant
de la faune sauvage.
2-Les agents des administrations
déconcentrées et décentralisées : le Préfet
et le Maire ayant qualité d'OPJ par attribution
légale.
Notons d'abord que le code de procédure pénale
congolais reconnait aux Préfets et aux Sous-préfets la
qualité d'officier de police judiciaire (article 16 al.3). A ce titre,
ils exercent toutes les compétences reconnues aux OPJ, dans les
départements et les sous-préfectures où, ils
représentent le pouvoir central et donc le Ministère en charge de
la faune. Au Cameroun, l'article 71 alinéa 1 de la loi n°2004/018
du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes dispose
que le Maire exerce la police municipale et à ce titre, il veille
à la protection de l'environnement. Au Congo, avec la constitution du 20
janvier 2002, il a été consacré le principe de la libre
administration des collectivités territoriales. Ainsi en 2003, le
législateur a mis en place plusieurs textes de lois pour donner un
contenu au principe constitutionnel ainsi établit. Ces lois
opèrent transfert de certains aspects de la nation au contrôle des
collectivités locales. C'est ainsi que la loi n°10-2003 du 6
février 2003 portant transfère de compétences aux
collectivités locales dispose en son article 16 que : « Les
compétences dans les matières sont transférées aux
collectivités locales dans leur ressort territorial respectif et selon
des conditions définies aux articles 17 à 40 ci-dessus de la
présente loi (...) -L'environnement ; les eaux, les forêts et la
chasse (...) ». Ensuite, les articles 21 et 23 disposent que les
départements ont compétence pour : Protéger les
écosystèmes. Les Préfets et Sous-préfets assurent
la politique de reboisement de proximité et d'exploitation artisanale de
la flore ainsi que la faune.
Page | 83
Ils protègent les espèces fauniques. Aux termes
de l'article 33 de la même loi, les communes ont également une
compétence dans la protection des écosystèmes.
Or, aux termes de l'article 27 du Décret n°2003-20
du 6 février 2003 portant fonctionnement des circonscriptions
administratives territoriales : « Le Préfet est garant de
l'ordre public (...). Il exerce dans le département des attributions de
police judiciaire, donne des ordres directs aux services de police et adresse
des demandes de concours à la gendarmerie. Il peut personnellement
requérir les Officiers de police judiciaire de faire tous actes
nécessaires à l'effet de constater les crimes et délit
contre la sûreté intérieur et extérieur de l'Etat et
d'en livrer les auteurs aux tribunaux. Ce pouvoir comporte le droit
d'opérer des perquisitions ou des arrestations ». L'article 28
de ce Décret parle des compétences de police spéciale, en
particulier celle de chasse, reconnue au Préfet. S'agissant des
Sous-préfets, les articles 67 et 68 du Décret susvisé
reconnaissent à celui-ci la qualité d'Officier de police
judiciaire. A ce titre, ils sont compétents pour constater les crimes et
délits et pour prendre toutes mesures utiles afin que les auteurs soient
déférés devant les juridictions compétentes. Ils
sont aussi chargés de l'application de la règlementation sur la
protection de l'environnement, des aires protégées. L'article 81
de ce Décret est en contradiction avec les dispositions de l'article 16
alinéas 3 du Code de procédure pénale qui ne cite pas les
Maires comme des agents ayant qualité d'officier de police judiciaire.
Or cette disposition décrétale stipule que : « Le maire
assure l'exécution des mesures de sûreté
général et dispose des pouvoirs de police générale
(...) Il est officier de police judiciaire (...) il est compétent pour
constater les crimes et délits et pour prendre toutes mesures utiles
afin que les auteurs soient déférés devant les
juridictions compétentes ».
Il résulte de tout ce qui précède que
l'administration, au premier plan le Ministère en charge de faune, aussi
bien au niveau central que local, participe activement dans la lutte contre la
criminalité faunique. Le droit interne congolais et camerounais a pour
ce faire attribuer, de façon exceptionnelle, des prérogatives de
police judiciaire dans un domaine spéciale qui est celui des infractions
fauniques. Mais à coté de ce rôle principal assuré
par les Ministères en charge de la faune et certaines administrations,
il existe des acteurs dits « secondaires » qui peuvent
être institutionnels ou non institutionnels.
Paragraphe2 : Les acteurs secondaires dans la lutte
contre la criminalité faunique.
La lutte contre la délinquance faunique
nécessite la mise en place d'un mécanisme permettant d'organiser
des poursuites contre les contrevenants aux lois fauniques. A ce titre,
l'action menée par l'administration en charge de la faune est certes
essentielle et principale, mais elle n'est cependant pas suffisante. Elle ne
peut être efficace que si, elle est accompagnée par d'autres
acteurs institutionnels comme les services de Police nationale, de Gendarmerie.
De même que par des Organismes internationaux comme Interpol
(A). Il faut rappeler aussi, avec force, l'action menée
par des Organisations privées, telles que les associations de lutte pour
la protection de la faune et d'autres Organismes non gouvernementaux qui
oeuvrent dans la protection de l'environnement (B).
Page | 84
A)-Les acteurs institutionnels secondaires de
lutte contre la criminalité faunique.
Il conviendra pour nous d'examiner successivement le
rôle joué par la Police et la Gendarmerie nationale à
travers leurs agents auxquels la loi reconnait la qualité d'officier de
police judiciaire. Grâce à leurs compétences très
larges en matière de la constatation, la recherche des infractions, ils
peuvent ainsi intervenir en cas d'atteinte contre les espèces fauniques
et d'inobservation des lois spéciales en la matière (1).
Mais, le braconnage et le commerce illégal des espèces
et de leurs produits ayant pris des formes transnationales, la contribution des
services de la Police interétatique (INTERPOL) est parfois
nécessaire pour endiguer ce phénomène
(2).
1-Les OPJ à compétence
générale : La Police nationale et la Gendarmerie
nationale.
Il est à bon droit d'examiner distinctement des
compétences et de l'action des Polices nationales (a)
congolaise et camerounaise dans le domaine de la criminalité
faunique et celles de la gendarmerie des deux pays (b).
a) Les officiers de la police nationale comme
acteurs à compétence générale dans la lutte contre
la criminalité faunique.
Au Congo, il faut tout d'abord retenir que les missions
générales de la Police nationale sont prévues dans la loi
n°6-2011 du 2 mars 2011 fixant les missions, l'organisation et le
fonctionnement de la Police nationale en République du Congo. L'article
2 de cette loi dispose que la police nationale a pour mission de garantir la
sécurité intérieure et extérieure de l'Etat. A ce
titre, elle est chargée de entre autre : Assurer le respect des lois et
règlements ; exécuter les missions de police judiciaire. C'est
dans ce sens que l'article 16 alinéa 1er du Code de
procédure pénale congolais reconnait comme ayant qualité
d'officier de police judiciaire : « les commissaires de police, les
officiers de police et les inspecteurs principaux titulaires de l'examen
technique d'officier de police judiciaire ». Ainsi donc, en cette
qualité, ces officiers de la Police nationale sont chargés de
constater les infractions à la loi pénale (en l'espèce
à la loi spéciale sur la faune) ; d'en rassembler les preuves et
les auteurs110. Cette compétence étant
générale, en matière des infractions contre la faune qui
est un domaine spécial avec des spécificités techniques
que seuls les agents des ministères en charge de la faune peuvent
métriser. Les officiers de la police, sont donc appeler à les
assister dans tous les actes nécessaires à la manifestation de la
vérité. Mais, ils peuvent aussi procéder à tout
acte de constatation, d'interpellation en l'absence des agents
assermentés du MEFDD.
Dans le même ordre d'idée, la police camerounaise
dispose des compétences générale qui sont définit
par le Décret n°2012/540 du 19 novembre 2012 portant organisation
de la Délégation Générale à la
Sûreté Nationale. Celui-ci stipule à son article 4 que la
Police est chargée entre autre : De la recherche, de la constatation des
infractions aux lois pénales et de la conduite de leurs auteurs devant
les juridictions répressives. Elle lutte contre la criminalité
nationale, internationale et transnationale.
110 Voir en ce sens, l'article 14 al. 1er du Code de
Procédure Pénale Congolais.
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C'est à ce titre que l'article 79 du Code de
procédure pénale camerounais dispose que : « Ont la
qualité d'officier de police judiciaire : c)-Les Commissaires de police
; d)-Les officiers de police (...) ». De même, l'article 82 de
ce code parlant des attributions et devoirs de la Police judiciaire
précise que : « La Police judiciaire est chargée : a)-de
constater les infractions, d'en rassembler les preuves, d'en rechercher les
auteurs et les complices et, le cas échéant de les
déférer au Parquet (...) ». La loi de 1994 sur le
régime des forêts, de la faune et de la pêche, les qualifie
en son article 141 al. 1er des : « officiers de police
judiciaire à compétence générale ».
Certains auteurs dans la doctrine les ont aussi qualifiés comme des
acteurs classiques dans la constatation des infractions ayant des
compétences traditionnelles dans la recherche et la constatation des
infractions de droit commun111. Ainsi donc au Cameroun les officiers
de la Police nationale, ayant des compétences générales,
peuvent intervenir même dans le cadre la commission des infractions
fauniques. Pourtant, celles-ci peuvent s'avérées trop techniques
et complexes en raison de la particularité du domaine faunique.
Mais à coté de la Police nationale, le code de
procédure pénale attribut aussi la qualité d'officier de
police judiciaire aux officiers de la Gendarmerie nationale, qui peuvent
à ce titre intervenir également dans la lutte contre la
criminalité faunique.
b- Les officiers de la gendarmerie nationale comme
acteurs à compétence générale dans la lutte contre
la criminalité faunique.
Au Congo, la Gendarmerie nationale est régie par
l'ordonnance n°4-2001 du 5 février 2001 portant statut
général des militaires et des gendarmes. Elle a entre autre
mission, celle d'exercer la police judiciaire. C'est pourquoi l'alinéa 2
de l'article 16 du Code de procédure pénale dispose qu'ont la
qualité d'officier de police judiciaire : « 2°-Les
officiers de gendarmerie, les sous-officiers de gendarmerie exerçant les
fonctions du commandant de section, de brigade et de peloton ».
S'agissant de la Gendarmerie camerounaise, ses missions sont définis par
le Décret n°2001/181 du 25 juillet 2001 portant organisation de la
Gendarmerie nationale. Son article 2 précise entre autres fonctions,
l'exécution des missions de police administrative et de police
judiciaire, dans les conditions fixées par les textes en vigueur.
Considérés comme des officiers de police judiciaire à
compétences générales, les officiers de la gendarmerie
peuvent donc valablement intervenir dans la constatation des infractions
à la loi faunique. Ils constituent ainsi, aux cotés de la police
nationale, des acteurs dont le rôle reste secondaire dans la lutte contre
la criminalité faunique.
Cependant la délinquance faunique est un
phénomène tentaculaire, dont les ramifications peuvent parfois
dépasser le cadre national et s'étendre sur le territoire
d'autres Etats. Ainsi, au cours de ces années, le braconnage et le
commerce des espèces menacées d'extinction a pris des proportions
internationales. C'est pourquoi, l'action d'INTERPOL est devenue plus que
nécessaire.
111 TCHOCA FANIKOUA op.cit, page.80
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2-Les services d'INTERPOL : Une police au service
de la lutte contre la criminalité faunique
transnationale.
Reprenant ces mots de Alain Bernard ONONINO, qui en sa
qualité de spécialiste des questions relevant de la
criminalité faunique, affirmait que : « La menace devient
cependant plus sérieuse et redoutable lorsque les animaux sauvages sont
abattus et capturés à des fins commerciales, pour satisfaire la
demande sans cesse croissante en espèces et produits de la faune des
marchés locaux et internationaux (...) Il s'organise la plupart du temps
en réseaux criminels bien huilé dont les membres se recrutent
dans diverses couches de la société et parfois même dans
plusieurs pays (...) du simple chasseur pygmée Baka (...) au
commerçant chinois multimillionnaire possédant de nombreuses
boutiques de luxe sur le marché asiatique »112.
Cette pensée, illustre bien l'ampleur de la menace d'extinction que
cours les espèces fauniques en Afrique Centrale. La raison principale de
ce phénomène reste, la montée d'une criminalité qui
ne cesse de prendre des proportions considérables à cause de la
demande sans cesse croissante. Selon le rapport IFWA : la nature du crime
concernant les répercussions du commerce illicite d'espèces
sauvages sur la sécurité mondiale, publié en septembre
2013 : le commerce illégal des espèces fauniques et des
produits qui en découlent est classé au 4ème
rang des activités illicites mondiales113. Il est
considéré par la Commission des Nations Unies pour la
prévention du crime et la justice pénale comme : « une
forme sérieuse de crime organisé ». De plus, il a
été établit que ce commerce a des ramifications avec le
terrorisme, le radicalisme et la fraude.
Ainsi donc face à une criminalité qui, au cours
des décennies, a pris des proportions considérables, les agents
des Etats agissant dans les limites des frontières de manière
cloisonnée voient de plus en plus leur action s'anéantir face
à un phénomène transnational. En effet, comment engager
des poursuites contre des contrevenants agissant en bande organisée. Ils
abattent plusieurs éléphants et s'emparent des ivoires, dans un
pays (A) avec des complices dans un (B), et
qui vendent les produits de leur contrebande sur un marché illicite dans
un autre pays (C) à des acheteurs originaires d'un pays
(D) et vont revendre un sur autre marché clandestin
dans un pays (E) et que ces pays se trouvent sur trois
continents différents? C'est face à ces difficultés que
les Etats du monde ont crées L'Organisation de Police Criminelle
(OIP-INTERPOL). C'est une Organisation Internationale de Police la plus
importante au monde avec 190 pays membres dont le Congo et le Cameroun. Le
rôle de cette institution internationale est de permettre aux polices du
monde de travailler ensemble pour rendre le monde plus sûr114.
Le statut de cette organisation multinationale a été
adopté à Vienne en 1956 lors la 25ème session
de son Assemblée Générale. Mais, il faut préciser
que son but tel que visé à l'article 2 de son statut sur la
répression des infractions de droit commun, a été revu au
regard des enjeux de la criminalité environnementale.
112 ONONINO (A.B), idem.
113 Rapport IFAW, La nature du crime, op cit p.3 et 4
114 Voir en ce sens : Présentation INTERPOL sur le site
internet : www. Interpol.int
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Ainsi peut-on lire sur la rubrique : criminalité
(Atteintes à l'environnement) de leur site web : « A
l'heure de la mondialisation, il est nécessaire de mettre en place une
stratégie internationale, pour combattre cette forme de
criminalité. Etant la seule organisation dont la mission consiste
à centraliser et à traiter les informations criminelles au niveau
mondial, INTERPOL est idéalement placé pour mener ce combat
». Il ressort de cela, que l'Organisation a mis en place une
équipe chargée du Programme INTERPOL sur les atteintes à
l'environnement dont l'essentielle des missions consiste entre autre à
:
-Mener des opérations au niveau mondial et
régional en vu de démanteler les réseaux criminels
à l'origine des atteintes à l'environnement grâce à
un travail de police fondé sur le renseignement.
-Donner aux organismes chargés de lutte contre les
atteintes à l'environnement accès aux services de l'Organisation
en renforçant leurs liens avec les Bureaux Centraux nationaux
INTERPOL.
-Collaborer avec le Comité sur la
criminalité de l'environnement afin de définir la
stratégie et les orientations du Programme.
Ainsi, INTERPOL a mis en place plusieurs mécanismes de
lutte contre la criminalité environnementale. Au nombre de ces
infractions on cite, le braconnage et le commerce illicite des espèces.
C'est pourquoi, le système des ECOMESSAGES est l'une des innovations les
plus efficaces dans la lutte contre la criminalité faunique
transnationale. Il fournit en temps réel des informations uniformes sur
les atteintes à l'environnement et permet surtout de concevoir une base
de donné fiable sur l'ensemble des pays membres.
Mais, la lutte contre la délinquance faunique, concerne
aussi de nombreux organismes privés qui oeuvrent dans la lutte pour la
protection de la faune sauvage. Au Congo et au Cameroun, leur rôle dans
la répression des infractions fauniques est essentiel, ils travaillent
en étroite collaboration avec les Ministère en charge de la
faune. Ce sont des acteurs non institutionnels dont l'action, bien que souvent
reléguée au second plan, est néanmoins essentielle dans la
chaîne pénale.
B)-Les acteurs non institutionnels
relégués à un rôle passif dans la répression
des atteintes à la faune sauvage.
Aux termes des lois et règlements du Congo et du
Cameroun, les organisations de la société civile contribuent
à divers point dans la mise en oeuvre des politiques de protection des
espèces fauniques. Dans ce sens, elles collaborent tant avec les
Ministères en charge de la faune et avec les services judiciaires dans
la poursuite des délinquants fauniques. Pourtant leur rôle dans le
cadre répressif est souvent relégué au second plan. Il
conviendra donc pour nous d'examiner, d'abord d'examiner le rôle des
associations agréées pour la protection de la faune sauvage dans
la répression des infractions fauniques (1). Ensuite,
notre examen s'étendra sur les organisations dont l'objet est plus
général à savoir la protection de l'environnement
(2).
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1-Les Associations agréées de
protection de la faune sauvage : un rôle dans la détection et la
dénonciation des atteintes à la faune sauvage.
Par définition, une association est une convention par
laquelle deux ou plusieurs personnes mettent en commun leurs connaissances ou
leur activité dans un but autre que de partager des
bénéfices115. Au Congo, la loi n°37-2008 du 28
novembre 2008 sur la faune et les aires protégées attribue un
statut particulier aux associations spécialisées dans le domaine
de la faune sauvage. Elles sont considérées comme : «
des organes consultatifs pour l'élaboration des politiques de
gestion de la faune ». Ainsi donc, plusieurs missions leurs sont
reconnues par cette loi à son article 3. On compte entre autre celle de
: « collaborer à la recherche des auteurs d'infraction à
la présente loi et à ses textes d'application ». C'est
le seul attribut répressif qui leurs soit reconnu par la loi. Au
Cameroun, l'article 3 de la loi n°96/12 du 5 août 1996 portant
loi-cadre relative à la gestion de l'environnement dispose que : «
Le Président de la République définit la politique
nationale de l'environnement. Sa mise en oeuvre incombe au Gouvernement qui
l'applique, de concert avec les Collectivités territoriales
décentralisées, les Communautés de base et les
associations de défense de l'environnement (...) ».
Devant la justice répressive, la disposition de
l'article 3 peut faire l'objet d'une grande controverse dans son
interprétation. En effet, lorsqu'il s'agit de savoir : Que faut-il
entendre par une collaboration dans la recherche des auteurs d'infractions ?
Et, quelles sont les limites de ce rôle dans la pratique ?
En vertu de cette collaboration, ces associations peuvent-elles se
constituer parties civiles au cours d'une instance ? Quelle est la position ou
la place réelle de ces associations dans la mise en mouvement des
poursuites pénale contre les délinquants fauniques ? Le code
de procédure pénale constitue un obstacle quant à la
possibilité pour les associations spécialisées dans la
protection de la faune de se constituer partie civile devant la justice
répressive. En effet, l'article 2 dispose que : « L'action
civile en réparation du dommage causé par un crime, un
délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont
personnellement souffert du dommage directement causé par les faits
objets de la prévention ». De même l'article 353
alinéa 1 surenchérie en ces termes : « Toute personne
qui, conformément à l'article 2, prétend avoir
été lésée par un délit, peut, si elle ne l'a
déjà fait, se constituer partie civile à l'audience
même ». Il résulte de ces dispositions que l'action
civile, pour sa recevabilité devant le juge pénal, est soumise
à deux conditions générales à savoir : un dommage
qui soit direct et personnel. S'agissant des associations,
elles n'ont pas d'action en principe, sauf si la loi le prévoit.
Sur ce point, Jean LARGUIER et Philippe CONTE estiment que :
« Les associations représentent des intérêts trop
généraux, proches de ceux que défend le Ministère
public. Dans l'exercice de leur action, elles ne recherchent pas toujours
à obtenir réparation. Elles souhaitent seulement
déclencher le procès pénal ; cette action est donc
très proche de l'action publique (...) C'est pourquoi, en dehors des cas
où un texte admet l'action, la chambre criminelle exige qu'un
préjudice personnel et direct ait été causé
à l'association qui ne peut agir au pénal que si elle subit
elle-même un tel dommage »116.
115 Sur la définition de l'Association voir, le Lexique
des termes juridiques, 13ème édition Dalloz 2001. p.
49
116 LARGUIER (J) et CONTE (P), Procédure pénale,
Mémentos 21ème édition, Dalloz 2006, p.119 et
120
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Mais dans d'autres pays, comme en France, l'évolution
législative et jurisprudentielle à conduit la justice
répressive à déclarer recevable, à certaines
conditions, la constitution de partie civile117.
On compte au Congo et au Cameroun plusieurs associations
spécialisées dans la protection de la faune sauvage. Il ne
s'agira donc pas ici d'en donner une liste puisqu'elle ne serait pas
exhaustive. Cependant, un certain nombre de ces associations s'impliquent
activement, dans les deux pays, à la répression des atteintes
contre la faune sauvage. On citera donc de manière exceptionnelle le
réseau des Associations nées d'un consortium constitué par
The Aspinall Fondation (TAF) et Wildlife Conservation Society
(WCS). C'est de celui-ci qu'est né The Last Great Ape
Organization (LAGA) au Cameroun et le Projet d'Appui à
l'Application de la Loi sur la Faune sauvage (PALF) au Congo. Au niveau de
ces deux pays, ces associations interviennent dans le cadre de l'appui à
l'application des lois fauniques. Elles contribuent à la mise en oeuvre
de l'action répressive des atteintes contre la faune sauvage à
travers la dénonciation des infractions fauniques. La suivie des
procédures devant les juridictions répressives en partant depuis
les enquêtes, les procès, les condamnations et l'application des
peines.
Mais, comme il ressort de ces mots tirés du rapport du
Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) : «
Faire honte est souvent la seule arme dont dispose un grand nombre
d'organisations de la société civile. Mais cette arme peut
être redoutable ». Le rôle de ces associations, pourtant
spécialisées dans la protection de la faune sauvage, est souvent
relégué aux simples dénonciations. Elles sont
réduites à une action de collaboration en incitant les
administrations à mettre en oeuvre les poursuites contre les
délinquants fauniques. Leur but étant de dissuader ces derniers
à grâce l'effet produit par les sanctions pénales. Cette
action trouve plus d'écho avec la participation de certaines
organisations non gouvernementale qui oeuvre de manière
générale dans la lutte contre l'environnement.
2-Les ONG de protection de
l'environnement.
Les organisations non gouvernementales sont
considérées comme des acteurs jouant un rôle essentiel dans
la protection de l'environnement. En réalité, une ONG est
définit comme : « une association internationale
créée par une initiative privée -ou mixte-, à
l'exclusion de tout accord intergouvernemental, regroupant des personnes
privées ou publiques, physiques ou morales, de nationalité
diverses »118. C'est au cours des 1992, avec la
conférence de Rio, qu'une reconnaissance juridique des ONG a
été de plus en plus visible dans les textes internationaux de
droit de l'environnement. A ce titre, certains auteurs estiment que : «
La conférence de Rio constitue le point centrale d'analyse de la
reconnaissance internationale de l'importance des ONG
»119.
117 Sur la recevabilité de l'action civile d'une
Association spécialisée devant les juridictions pénales,
voir l'ouvrage de NERAC-CROISIER (R), Sauvegarde de l'environnement et
droit pénal, 1ère édition, Paris,
l'Harmattan Sciences criminelles, 2005, pages.315, 316 et 317
118 DAILLIER (P), FORTEAU (M) et PELLET (A), op.cit, page.711
119 LOWE GNINTEDEM (P.J), Les ONG et la protection de
l'Environnement en Afrique Centrale, Mémoire pour l'obtention de la
Maîtrise en Droit et Carrières Judiciaires, Limoges.
Université de Limoges. 2003
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En effet, le chapitre 27 de l'Agenda 21 est consacré au
renforcement du rôle des ONG, qui sont considérées comme
des partenaires pour un développement durable. De même que
l'article 4-i de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements
climatiques de 1992, encourage la participation des ONG.
Cette prolifération des textes internationaux
consacrant le rôle des ONG dans la protection de l'environnement a
été également constaté dans le cadre
sous-régional. C'est ainsi qu'en Afrique Centrale, de nombreux
instruments adoptés par les Etats ont reconnu une place essentielle dans
la protection de l'environnement. Tel est le cas de la Déclaration de
Brazzaville issue de la Conférence sur les écosystèmes des
forêts denses humides d'Afrique Centrale tenue du 28 au 30 mai 1996 qui
contient une mention portant sur : « la nécessité
d'impliquer d'avantage (...) les organisations non gouvernementales dans la
conservation et la gestion des écosystèmes ». Les ONG
participent à la protection de l'environnement dans son ensemble y
compris la préservation des espèces fauniques. Elles exercent des
actions de sensibilisation, d'alerte, de gestion et participation dans les
politiques de conservations des écosystèmes. Au nombre de ces
ONG, on pourra citer l'Union Mondiale pour la Nature (UICN), ainsi que d'autres
ONG dont la liste ne peut être citée de manière
exhaustive.
En sommes, on pourra retenir que plusieurs acteurs avec des
rôles différents concourent à l'oeuvre de répression
en accomplissant, chacun selon la tâche qui lui attribuée par les
textes légaux. Si l'Administration en charge de la faune est
considérée comme le maillon principal dans la constatation, la
recherche des infractions et la saisine des instances judiciaires, d'autres
acteurs secondaires complètent cette oeuvre. Mais la chaîne ne
peut être complète que si les auteurs des infractions fauniques
sont traduits devant une instance judiciaire compétente. Aussi, la
justice pénale est considérée comme l'autre partie de la
chaîne qui agit en aval pour sanctionner les délinquants qui sont
déférés devant-elle après qu'une enquête en
bonne due forme ait été menée par les acteurs
placés en amont.
Section2 : Les acteurs judiciaires placés en
aval de la chaîne pénale pour assurer la répression des
atteintes contre la faune sauvage.
Placée en aval de la chaîne pénale la
justice répressive, en tant qu'organe relevant du pouvoir judiciaire,
est considérée comme le dernier rempart dans la lutte contre la
criminalité faunique au sein de l'Etat congolais et camerounais. Dans
leur organisation judiciaire, outre le principe de double degré de
juridiction, les cours et tribunaux de ces deux pays sont régies par un
principe d'unité de la justice civile et pénale, tout en
maintenant une séparation des deux contentieux. Ce qui a pour
conséquence immédiate, l'existence d'une polyvalence des
magistrats du siège, qui ont une double casquette (juge pénal et
civil).
L'analyse exégétique de la règlementation
faunique dans ces deux pays, montre que ces textes spéciaux ne font pas
directement mention d'une répartition des compétences entre les
différentes juridictions pénales. Ce sont donc des textes
généraux qui définissent une organisation de cette justice
ainsi que l'attribution des prérogatives et le rôle des magistrats
qui les animent.
Page | 91
Ainsi, au Congo, c'est la loi n°19-99 du 15 août
1999 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi
n°022-92 du 20 août 1992 portant organisation du pouvoir judiciaire
qui prévoit une organisation des juridictions répressives. Elles
se composent des tribunaux de simple police, des tribunaux correctionnels, des
cours criminelle et des chambres pénales de la cours suprême. De
même que le code pénal et celui de procédure pénale
définissent les compétences et les prérogatives des
magistrats du siège et du parquet. Au Cameroun, c'est l'ordonnance
n°72/04 du 26 août 1972 qui a été, pendant plus de
trente (30) ans, le texte de base en matière d'organisation judiciaire.
Elle a été, cependant, abrogée par la loi n°2006/015
du 29 décembre 2006, portant organisation judiciaire qui, il faut le
noter, n'est pas le seul texte organisant la justice répressive au
Cameroun.
Ainsi, malgré son caractère spécial, le
contentieux pénal en matière faunique ne déroge en rien
aux règles classiques de l'organisation de la justice répressive
dans ces deux (2) pays. On distingue d'un coté la magistrature debout,
qui constitue le ministère public. Il est considéré comme
un acteur judiciaire placé au coeur de l'exercice de l'action publique
en matière des infractions fauniques (§1).
Ensuite, la magistrature assise, autrement dit, les formations de jugement qui
sont considérées, selon leur degré de compétence,
comme le dernier rempart contre la délinquance faunique
(§2).
Paragraphe1 : Le Ministère Public : Un acteur
au centre de l'exercice de l'action publique en matière des infractions
contre la faune sauvage.
Le ministère public est considéré comme :
« l'ensemble des magistrats de carrière qui sont
chargés, devant certaines juridictions, de requérir l'application
de la loi et de veiller aux intérêts généraux de la
société, ses magistrats sont hiérarchisés et ne
bénéficie pas de l'inamovibilité. En matière
pénale, il est toujours partie principale »120. De
même, l'action publique dont-il a la charge d'exercer peut être
définit comme une : « action portée devant une
juridiction répressive pour l'application des peines à l'auteur
d'une infraction »121. Le rôle du ministère
public dans la répression des infractions environnementales ou fauniques
a été mis en relief par le Professeur M. FAURE qui affirme que :
« Seul le Procureur du Roi peut (...) donner suffisamment de garanties
d'impartialité et d'indépendance nécessaire à une
répression optimale du droit de l'environnement ». Or,
aujourd'hui qu'il s'agisse du model congolais ou camerounais, on déplore
la rareté du contentieux faunique devant les juridictions
répressives. C'est la résultante directe d'un manque de
lisibilité du régime répressif prévu par les lois
spéciales dans ce domaine. Les magistrats du parquet dans les deux pays
ne bénéficiant pas souvent des connaissances
spécialisées pour mieux assurer les poursuites contre les
contrevenants dans ce domaine.
120 Lexique des termes juridiques, 13ème
édition, Paris, Dalloz, 2001, p.363
121 Idem p.18-19
Page | 92
Face à ces difficultés, il nous ait paru
nécessaire, d'examiner les compétences du Ministère public
et l'organisation des poursuites en matière des infractions fauniques
(A). Ensuite, après avoir fait un bref rappel des
pouvoirs reconnus au Procureur de la République par les textes
classiques, nous scruterons ceux que lui accordent les lois fauniques des deux
pays (B).
A)-Les compétences du Ministère
Public et l'organisation des poursuites en matière des infractions
fauniques.
Nous examinerons successivement les compétences du
Procureur de la République en matière des infractions à la
loi faunique (1). Ensuite l'organisation des poursuites contre
les délinquants fauniques (2).
1-Les compétences du Procureur de la
République en matière des infractions à la loi
faunique.
Au Congo, c'est l'article 102 de la loi du 28 novembre 2008
sur la faune et les aires protégées qui constitue l'assise de la
compétence du Procureur de la République dans la mise en oeuvre
des poursuites contre les infractions fauniques. Il dispose que : «
L'action publique contre les auteurs d'infractions en matière de
faune et de chasse est exercée par le Procureur de la République
devant les juridictions compétentes ». Il épouse donc
les prévisions de l'article 19 du code de procédure pénale
aux termes duquel : « Le ministère public exerce l'action
publique et requiert l'application de la loi ». Par cet article, la
nouvelle loi faunique consacre une prépondérance au Procureur de
la République dans la mise en oeuvre des poursuites pénales
contre les contrevenants en matière faunique. Elle tranche de ce fait,
avec l'ancienne loi du 21 avril 1983 sur les conditions de la conservation et
de l'exploitation de la faune sauvage. En effet, l'article 71 de l'ancienne loi
disposait que : « Les actions et poursuites sont exercées par
l'Administration des Eaux et Forêts sans préjudice du droit qui
appartient au Ministère Public (...) », de même que
l'article 74 stipule que : « Les agents des Eaux et Forêts
peuvent faire concernant toutes les affaires relatives à la Police de
chasse, tous les exploits ou actes de justice que les Huissiers ont coutume de
faire. Ils peuvent néanmoins se servir du Ministère des Huissiers
». Il résulte donc d'une lecture combinée de ces deux
dispositions, que contrairement à la loi de 2008, celle de 1983
consacrait une concurrence entre l'administration en charge de la faune et le
Ministère public dans l'exercice de l'action publique en matière
des infractions fauniques. Aux termes de cette dernière,
l'administration faunique pouvait opter pour l'une des modes de saisines autres
que celles qui passe par le Ministère public à savoir : La
plainte avec constitution de partie civile devant un juge d'instruction ou par
une citation directe par exploit d'huissier122.
122 Voir en ce sens, l'article 326 du Code de Procédure
Pénale qui dispose que : « Le tribunal correctionnel est saisi
des infractions de sa compétence, soit par le renvoi qui lui en est fait
par la juridiction d'instruction, soit par la comparution volontaire des
parties, soit par la citation délivrée directement au
prévenu et aux personnes civilement responsables de l'infraction, soit
enfin par application de la procédure de flagrant délit
»
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Outre ses compétences dans la mise en oeuvre des
poursuites pénales, l'article 104 de la loi de 2008 qui opère un
renvoi « aux règles prescrites par le code de procédure
pénale ». S'agissant de l'exercice des voies de recours,
l'exécution des décisions de justice et les délais de
prescription des infractions. Lorsqu'on se réfère au chapitre II
: « Du ministère public » à partir des
articles 20 et suivants du code de procédure pénale. On se rend
bien compte que la loi faunique reconnait simplement les compétences du
Procureur de la République. L'article 31 du même code, fixe les
règles de sa compétence territoriale qui peut se déduire
à travers le triptyque : du lieu de l'infraction, de celui de la
résidence de l'une des personnes soupçonnée d'avoir
participé à l'infraction ou du lieu de l'arrestation. Encore
faut-il préciser qu'en matière des infractions fauniques, cette
trilogie peut recevoir diverses interprétations. Dans la mesure
où, il est parfois difficile de déterminer le lieu exact de
l'abattage d'un animal sauvage par un chasseur dans la forêt. De
même qu'il sera difficile de déterminer le lieu de la commission
de l'infraction pour un contrevenant qui est appréhendé avec des
trophées de chasse lors d'un contrôle avant embarquement dans un
aéroport.
Par contre, au Cameroun, le rôle du ministère
public est moins prépondérant puisqu'il est en concours avec
l'Administration en charge de la faune pour les infractions qui portent sur ce
domaine. En effet, l'article 147 de la loi de 1994, énumérant les
compétences de cette administration dispose ce qui suit : «
(...) A cet effet, elles ont compétence pour :
-Faire citer aux frais du Trésor Public tout
contrevenant devant la juridiction compétente , ·
-Déposer leurs mémoires et conclusions et
faire toutes observations qu'elles estiment utiles à la sauvegarde de
leurs intérêts , · leurs représentants
siègent à la suite du Procureur de la République, en
uniforme et découvert, la parole ne peut leur être refusée
, ·
-Exercer les voies de recours ouvertes par la loi
conformément aux règles de droit commun avec les mêmes
effets que les recours exercés par le ministère public
». Il s'ensuit que cette concurrence peut être
appréhendée comme une violation au principe de la
séparation des pouvoirs. Celui-ci ayant pour conséquence, la
séparation des autorités administratives et judiciaires qui en
est qu'un prolongement. Mais elle peut aussi être perçue comme une
confusion dans la répartition des tâches au sein de l'appareil
étatique.
Mais de quelle manière, le Ministère Public
organise t-il les poursuites en matière des infractions fauniques ? Les
lois fauniques établissent-elles à ce titre une distinction avec
les règles procédurales classiques ?
2-L'organisation des poursuites contre les
délinquants fauniques.
Il faut retenir de prime à bord que dans les deux pays,
le Procureur de la République assure la direction de la police
judiciaire123. Qu'il s'agisse d'un système comme de l'autre,
l'organisation des poursuites contre les délinquants fauniques par le
Ministère Public varie selon qu'il s'agit d'une procédure de
crime ou délit flagrant et d'une enquête préliminaire.
123 Voir à ce titre l'article 12 du Code de
Procédure Pénale Congolais et 78 al. 1 du C.P.P Camerounais
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D'abord, l'article 37 alinéa 1 du code de
procédure pénale congolais définit le crime ou le
délit flagrant en ces termes : « Est qualifié crime ou
délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet actuellement,
ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant
lorsque, dans un temps voisin de l'action, la personne soupçonnée
est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvé en possession
d'objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu'elle a
participé au crime ou au délit ». Cette
définition est la même que celle prévue à l'article
103 du code de procédure pénale camerounais. Quant à
l'enquête préliminaire124 : C'est une enquête de
police qui est entreprise par les officiers de police judiciaire soit d'office
ou sur instruction du Procureur de la République. Elle a pour but
d'éclairer le Ministère Public sur le bien fondé d'une
poursuite pénale. Retenons qu'à son terme le Procureur, qui a
l'opportunité des poursuites, peut décider de poursuivre ou de
classer sans suite.
Ainsi donc en matière faunique, le plus souvent, les
infractions sont prises en flagrance et sont traitées suivant les
règles y afférentes. A ce titre deux hypothèses peuvent
être retenues :
? Celle de l'article 38 du code de procédure
pénale congolais qui dispose à son alinéa 1 que : «
En cas de crime flagrant, l'officier de police judiciaire qui en est
avisé, informe immédiatement le procureur de la République
et, en tant que de besoin, le juge de section ou d'instance, se transporte sans
délai sur les lieux du crime et procède à toutes
constatations utiles ». Les articles 39 et suivants
définissent les pouvoirs et les actes accomplis par l'officier de police
judiciaire aux fins de la manifestation de la vérité.
Dans cette première hypothèse, des pouvoirs sont
reconnus aux OPJ pour mener l'enquête de flagrance. C'est ce que
prévoit également, le C.P.P camerounais aux articles 104 à
110.
? La deuxième hypothèse (en cas de crime ou de
délit flagrant) est que : le Procureur de la République,
lui-même, peut accomplir l'ensemble des actes de police judiciaire. En
effet, son arrivée sur les lieux dessaisit l'OPJ. Cette deuxième
hypothèse est prévue aux articles 53 du C.P.P congolais et 111 du
C.P.P camerounais.
S'agissant de l'enquête préliminaire, l'article
61 du même code dispose qu'elle est diligentée à la demande
du Procureur ou d'office à l'initiative de l'OPJ. A ce titre, l'article
116 al. 1 du C.P.P camerounais dispose que : « Les officiers de police
judiciaire et agents de police judiciaire procèdent aux enquêtes
préliminaires soit sur leur initiative, soit sur instruction du
procureur de la République dans les meilleurs délais ».
Ainsi donc, qu'il s'agisse des délits et crimes flagrants ou
d'infractions nécessitant le déclenchement d'une enquête
préliminaire. L'organisation des poursuites en matière faunique,
par le ministère public, ne déroge pas aux règles
procédurales classiques.
124 Sur l'enquête préliminaire, voir l'article 61 du
C.P.P congolais.
Page | 95
A la suite des enquêtes, le Procureur de la
République qui a l'opportunité des poursuites décidera
s'il opte comme mode de saisine de la formation de jugement, par citation
directe125, soit par flagrant délit en prenant un mandat de
dépôt contre le prévenu. Mais, il peut aussi ouvrir une
information judiciaire devant le juge d'instruction à travers un
réquisitoire introductif126.
Mais, si ces règles classiques reconnaissent au
Procureur de la République des prérogatives dans l'exercice de
ses fonctions, les lois fauniques lui reconnaissent également certains
pouvoirs spécifiques qu'il convient d'examiner.
B)-Les prérogatives reconnues au Procureur
de la République en matière faunique.
Rappelons d'abord que par prérogatives, on entend un
ensemble de droits ou des pouvoirs reconnus ou attribués à une
personne ou à un organe en raison de sa fonction et impliquant, pour
lui, une certaine supériorité, puissance ou
immunité127. Ainsi donc, s'agissant du Procureur de la
République, en sa qualité d'acteur important dans la
répression des infractions, les textes répressifs classiques lui
attribut plusieurs prérogatives qui sont attaché à sa
fonction (1). Mais, la loi faunique qui définit un
cadre particulier de répression, lui reconnait aussi certaines
prérogatives liées spécifiquement au contentieux
pénal en matière de la faune sauvage (2).
1-Des prérogatives qui puisent leur source
dans des textes répressifs classiques (Code de procédure
pénale).
Le 19 janvier 2006, lors de l'ouverture des cycles de
conférence de procédure pénale, Monsieur Jean-Louis NADAL,
Procureur Général près la Cour de cassation en France
affirmait : « La spécificité du Ministère public,
à la fois organe de poursuite et gardien des libertés
individuelles remonte à ma connaissance à la grande ordonnance de
Philippe Le Bel du 23 mars 1303 énonçant la formule du serment
des gens du roi et montrant que l'accusateur doit également avoir en
charge la recherche de la vérité et la bonne application de la
loi ». Ces mots sont révélateurs de la
particularité de la fonction de Procureur de la République. C'est
pourquoi, les lois répressives congolaise et camerounaise lui
reconnaissent des prérogatives très élargies et
diversifiées dans la mise en oeuvre de la répression des
infractions de droit commun et même des infractions spéciales,
comme celles qui portent sur les espèces fauniques.
125 Sur la citation directe par voie administrative,
c'est-à-dire délivrée à la requête du
Ministère public, voir les articles 40 al.3 du C.P.P camerounais et 491
du C.P.P congolais
126 Voir en ce sens les dispositions de l'article 114 du C.P.P
camerounais qui stipule que : «1)- Le suspect arrêté en
flagrant délit est déféré par l'OPJ devant le
Procureur de la République qui procède à son
identification , l'interroge sommairement et, s'il engage des poursuites, le
place en détention provisoire ou le laisse en liberté avec ou
sans caution (...) 3)-Les dispositions du présent article ne font pas
obstacle à ce que le Procureur de la République engage des
poursuites par voie de citation directe ou requiert l'ouverture d'une
information judiciaire ».
127 BEDARIDE (B), Lexique juridique et fiscal en ligne.
Page | 96
Ainsi donc, aux termes des codes de procédure
pénale des deux pays, le Procureur de la République qui est sous
le contrôle hiérarchique du Procureur Général et du
Ministre de la justice, fait partie de la magistrature dite debout. Il est
l'autorité prépondérante dans la mise en mouvement de
l'action publique. Il assure la direction de la police judiciaire, alors que le
Procureur Général assure la surveillance de celle-ci. Dans la
juridiction où, il représente le ministère public, il
exerce l'action publique et requiert l'application de la loi. Il assiste aux
débats des formations de jugement et leurs décisions sont rendues
en sa présence et il veille à leur exécution. Il
reçoit les plaintes et les dénonciations et décide de la
suite à donner (opportunité des poursuites). La loi pénale
fait obligations à tout officier ou fonctionnaire de son ressort de
compétence, de lui tenir informer de l'existence des faits
infractionnels portés à leur connaissance.
L'article 29 du C.P.P congolais dispose que : « Le
Procureur de la République procède ou fait procéder
à tous actes nécessaires à la recherche et à la
poursuite des infractions à la loi pénale. A cette fin, il dirige
l'activité des officiers de police judiciaire. En cas d'infractions
flagrantes, il exerce les pouvoirs qui lui sont attribués par l'article
53 ». De même, en cas procédure de flagrance, l'article
111 du C.P.P camerounais qui est similaire à l'article 53 du C.P.P
congolais dispose que : « L'arrivée du Procureur de la
République sur les lieux dessaisie l'officier de police judiciaire. Le
Procureur de la République accomplit alors tous les actes de police
judiciaire prévus au présent chapitre. Il peut aussi prescrire
à tous officiers de police judiciaire de poursuivre les
opérations ». Il résulte donc de l'analyse des
dispositions des codes de procédure pénale des deux pays, que le
Procureur de la République dispose d'un éventail des
prérogatives en matière des infractions de droit commun qui lui
permettent de mettre en mouvement l'action publique et de veiller à
l'application de la loi.
Le contentieux pénal en matière faunique ayant
quelques spécificités, des prérogatives spéciales
lui ont été reconnus par les lois fauniques.
2-Des prérogatives spécialement
prévues par les lois sectorielles en matière
faunique.
L'alinéa 1er de l'article 141 de la loi de
1994 sur le régime des forêts, de la faune et de la pêche
comme par : « Sans préjudice des prérogatives reconnues
au Ministère public et aux officiers de police judiciaire à
compétence générale, les agents assermentés des
administrations chargées des forêts, de la faune et de la
pèche, dans l'intérêt de l'Etat, des constatation et des
poursuites en répression des infractions commises en matières de
forêts, de la faune et de la pêche, selon le cas ». Il
résulte de cette disposition, que les prérogatives qui sont
reconnues au Procureur de la République et aux officiers de police
judiciaire, en matière des infractions fauniques, sont d'abord et avant
tout celle de police judiciaire, c'est-à-dire procéder à
la recherche, la constatation des infractions fauniques.
Cependant, si au Congo, la loi du 28 novembre 2008 sur la
faune et les aires protégées attribut un certain privilège
au Ministère public dans la mise en mouvement de l'action publique. Les
dispositions de la loi faunique au Cameroun entrainent une confusion quant
à l'exercice de l'action publique.
Page | 97
D'abord l'article 147 de ladite loi précise à
son alinéas 2, dispose que : « A cet effet, elles (les
administrations en charge des forêts, de la faune et la pêche)
ont compétence pour :
-faire citer aux frais du Trésor Public tout
contrevenant devant la juridiction compétente , ·
-déposer leurs mémoires et conclusions et
faire toutes observations qu'elles estiment utiles à la sauvegarde de
leurs intérêts , · leurs représentants
siègent à la suite du Procureur de la République, en
uniforme et découverts, la parole ne peut leur être refusée
, ·
-exercer les voies de recours ouvertes par la loi
conformément aux règles de droit commun avec les mêmes
effets que les recours exercés par le ministère public.
». Il résulte de cette disposition que la loi faunique
camerounaise, établit une concurrence entre l'administration faunique
qui peut user d'autres modes de saisine du juge, sans passé par le
parquet. Ces prérogatives concurrentes apparaissent aussi dans l'article
90 alinéas 2 de la loi n°96/12 du 5 août 1996 portant
loi-cadre relative à la gestion de l'environnement. Il relève
qu'en cas de non transaction et si la contestation portée par le
contrevenant contre le procès-verbal est infondée,
l'Administration faunique procède à des poursuites judiciaires.
Il s'ensuit qu'au Congo tout comme au Cameroun, les lois fauniques
reconnaissent au Procureur de la République, des pouvoirs de coordonner
l'action des agents de l'administration en charge de la faune lorsque ces
derniers agissent en qualité d'officier de police judiciaire. Dans la
pratique, ils peuvent même solliciter l'expertise de ces agents, pour
mieux faire assoir la caractérisation des infractions fauniques
déférées devant son parquet.
Bien que situé en aval, l'action du ministère
public consiste à monter une procédure contre le contrevenant
à la loi faunique pour le mettre à la disposition du juge
pénal. Dans le procès pénal, le Procureur de la
République, est avant tout une partie dont la position peut ou ne pas
emporter l'intime conviction du juge.
Paragraphe2 : Le juge pénal comme dernier
rempart contre la criminalité faunique.
Comme nous l'avons relevé en empruntant les mots de
Sandrine MALJEAN-DUBOIS : « le champ de la protection de
l'environnement illustre remarquablement la montée en puissance du juge
»128. En effet, le juge pénal est
considéré comme le gardien de l'autorité de la loi,
dont-il est le fidèle serviteur. Ayant une obligation
d'interpréter strictement la loi, le juge est dans une position unique
pour donner force et effet au droit de l'environnement. Appelé à
accomplir une entreprise délicate, celle d'adapter parfois au cas par
cas, des textes d'incriminations spéciaux dont la technicité et
la complexité ne saurait laisser la place à l'amateurisme. Dans
le contentieux pénal de la faune sauvage ou dans n'importe quel domaine
d'ailleurs, le juge est appelé à fournir une réponse
correcte et acceptable pour les parties. Ce contentieux est lié à
la survie des écosystèmes et contribue à la garantie des
générations présente et futures. Il apparaît donc
clairement que le juge pénal, en tant qu'acteur dans la
répression des atteintes contre la faune sauvage est
considéré comme le dernier rempart face à cette
criminalité.
128 MALJEAN-DUBOIS (S), op.cit page.17
Page | 98
Or, si les lois sur la faune au Congo et au Cameroun donnent
certaines précisions sur l'office de ce juge (B), les
règles de compétences restent classiques et figurent dans le code
pénal et de procédure pénale de chaque pays
(A).
A)-La répartition des compétences
entre les juridictions répressives en matière
faunique.
D'une manière générale, la
compétence peut être définit comme une aptitude
légale à accomplir un acte ou à instruire et juger un
procès129. Les règles de compétence sont
d'ordre public et le juge pénal peut les invoquer d'office. Aussi, face
à une infraction à la loi faunique déférée
à sa connaissance, le juge cherchera d'abord à savoir, si la
nature de l'infraction soumise à sa connaissance entre dans la
sphère de sa compétence matérielle. C'est la
compétence ratione materiae (1). Ensuite, il
regardera si ladite infraction a été commise dans le ressort de
sa compétence : c'est la compétence ratione loci
(2). Sans ces deux règles qui sont
imbriquées et cumulatives, le juge ne saurait se déclarer
compétent à connaitre l'infraction.
1-La compétence ratione materiae ou en raison
de la nature de l'infraction.
La compétence en raison de la matière ou
ratione materiae est l'aptitude d'une juridiction pénale
à connaitre des infractions en fonction de leur nature130. Au
Congo et même au Cameroun, ce ne sont pas les lois fauniques qui
définissent les règles de compétence des juridictions
répressives. Dans le premier, il s'agit d'une approche combinée
entre la loi n°1999 du 15 août 1999 modifiant et complétant
certaines dispositions de la loi n°022-92 du 20 août 1992 portant
organisation du pouvoir judiciaire, la loi n°1-63 du 13 janvier 1963
portant code de procédure pénale et le code pénal. A ce
titre, l'article 1er du Code pénale établit une
classification tripartite des infractions en se fondant sur la nature des
peines en ces termes : « L'infraction que les lois punissent de peines
de police est une contravention. L'infraction que les lois punissent de peines
correctionnelles est un délit. L'infraction que les lois punissent d'une
peine afflictive ou infamante est un crime ». Les articles 6 à
10 du même code donnent des précisions sur ces peines. Cependant,
la loi du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées ne
donne pas une classification claire de la nature des infractions fauniques.
Elle ne se borne qu'à les énumérées après
avoir précisée le quantum des peines. En effet, les articles 112,
113 et 114 donne trois types d'infractions fauniques, celles punies des peines
d'amende entre 10.000 et 500.000 francs CFA ainsi que d'une peine
d'emprisonnement entre 1 et 18 mois ; celles punis d'une amende 100.000
à 5.000.000 de francs CFA et d'un emprisonnement de 2 à 5 ans.
Enfin, celles punies d'une amende de 10.000.000 à 50.000.000 de francs
CFA et d'un emprisonnement de 10 à 20 ans. En faisant intervenir les
dispositions de l'article 319 du C.P.P qui stipule que : « Le tribunal
correctionnel connait des délits. Sont des délits les infractions
que la loi punit d'une peine de plus de 10 jours d'emprisonnement ou 36.000
francs d'amende ».
129 Lexique des termes juridiques,
13ème édition, Paris, Dalloz 2001, page.122
130 Idem
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On comprend que la loi faunique au Congo ne prévoit pas
de contraventions et confère la connaissance des délits à
la compétence des tribunaux correctionnels. Cette attribution est
précisée par l'article 64 de la loi portant organisation
judiciaire qui dispose que : « En matière pénale, le
Tribunal de Grande Instance connaît des infractions punies de peines
correctionnelles et des contraventions qui leur sont connexes (...)
». Ainsi, les jugements rendus par les tribunaux de grande instance
en matière correctionnelle peuvent faire l'objet d'appel devant les
chambres correctionnelles de la Cour d'Appel131. S'agissant des
crimes, elles sont portées à la connaissance de la Cour
criminelle, qui est une formation de la Cour d'Appel132. Il faut
noter que les arrêts de la Cour d'Appel, tant ceux qui sont rendus par
ses chambres correctionnelles que par la cour criminelle, peuvent faire l'objet
d'un recours en cassation devant les chambres pénales de la Cour
Suprême.
Au Cameroun, c'est l'article 21 de la loi n°2016/007 du
12 juillet 2016 portant code pénal qui établit une classification
des infractions en ces termes : « Les infractions sont classées
en crimes, délits et contraventions selon les peines principales qui les
sanctionnent :
-Sont qualifiées crimes, les infractions punies de
la peine de mort ou d'une peine privatives de liberté dont le maximum
est supérieur à dix (10) ans et d'une amende lorsque la loi en
dispose ainsi , ·
-Sont qualifiées de délits, les infractions
punies d'une peine privative de liberté ou d'une amende lorsque la peine
privative de liberté encourue est supérieure à dix (10)
jours et n'excède pas dix (10) ans ou que le maximum de l'amende est
supérieure à vingt cinq mille (25.000) francs , ·
-Sont qualifiées de contravention, les infractions
punies d'un emprisonnement qui n'excède pas dix (10) jours ou d'une
amende qui ne peut excéder vingt cinq mille (25.000) francs (...)
».
Il résulte de cette disposition que les infractions
prévues aux articles 154, 155, 156 et 158 de la loi faunique, sont des
délits et qu'il n'existe pas dans cette loi spéciale des crimes
en matière d'infractions fauniques. Ainsi donc toutes les infractions
fauniques prévues par la loi de 1994 relèvent de la
compétence matérielle du tribunal de première instance.
C'est ce qui résulte de l'article 289 alinéas 1er de
la loi n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant code de procédure
pénale qui dispose que : « Le Tribunal de Première
Instance est compétent pour connaitre des délits et des
contraventions tels que définit à l'article 21. (1) b) et c) du
code pénal ». Mais lorsque ces délits sont connexes
à un crime, dans ce cas, ils peuvent relever dans la compétence
des tribunaux de grande instance133. La compétence
matérielle du tribunal de première instance est
précisée par l'article 15 alinéa 1-a de la loi
n°2006-015 du 29 décembre 2006 portant organisation judiciaire.
131 Voir en ce sens, l'article 56 de la loi de 1999 portant
organisation judiciaire.
132 Idem
133 Voir en cas délit connexe avec un crime qui justifie
la compétence du TGI à l'article 407 du C.P.P camerounais.
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Les décisions rendues par les tribunaux de
première instance peuvent faire l'objet d'un appel devant la Cour
d'Appel (article 22 de la loi portant organisation judiciaire). Et
éventuellement les arrêts de la Cour d'Appel sont susceptibles de
recours en cassation devant la Cour Suprême.
En somme, il convient de retenir qu'il existe une distinction
quant à la connaissance des infractions fauniques par les juridictions
répressives congolaise et camerounaise. D'abord, la législation
faunique congolaise a prévus des crimes dans sa classification. Cela
montre que selon la conception de son législateur, il existe dans ce
domaine des actes dont la gravité ne peut cadrée avec de simples
délits. Or, son homologue camerounais, classe au titre des délits
toutes les infractions fauniques. De plus, l'organisation des juridictions
répressives diffère d'un pays à un autre, puisqu'au Congo,
les délits sont de la compétence matérielle des Tribunaux
de Grande instance comportant des chambres correctionnelles. Au Cameroun par
contre, ce sont les tribunaux de première instance qui connaissent des
délits.
Mais qu'en est-il des compétences par rapport au lieu ?
2-La compétence ratione loci ou en raison du
lieu.
Par définition, la compétence territoriale ou
ratione loci se définit comme : « l'aptitude d'une
juridiction pénale à connaître d'une infraction en fonction
d'une circonstance de lieu »134. Il peut donc s'agir du
lieu de la commission de l'infraction, de la résidence ou de
l'arrestation du prévenu. A ce titre, l'article 320 alinéa
1er du code de procédure pénale congolais dispose que
: « Est compétent le tribunal correctionnel du lieu de
l'infraction, celui de la résidence du prévenu, celui du lieu de
détention ou d'arrestation, même lorsque cette détention ou
arrestation a été opérée pour autre cause
». De même que l'article 294 du code de procédure
pénale dispose que : « Est compétent le Tribunal :
a-Soit du lieu de la commission de l'infraction ; b-Soit du lieu du domicile du
prévenu ; c-Soit du lieu de l'arrestation du prévenu ».
Il existe donc, une similarité sur les critères qui
déterminent la compétence territoriale.
Mais dans la pratique, il existe parfois des
difficultés engendrant des conflits de compétences entre les
tribunaux chargés du contentieux faunique. Au Congo, il existe en tout,
près de 17 tribunaux de grande instance. Un ou deux dans chaque
département (TGI d'Impfondo dans la Likouala, TGI de Ouesso dans la
Sangha, TGI d'Ewo dans la Cuvette ouest, TGI d'Owando et TGI d'Oyo dans la
Cuvette centrale, TGI de Djambala et TGI de Gamboma dans les Plateaux, TGI de
Brazzaville à Brazzaville, TGI de Madingou et TGI de Moyondzi dans la
Bouenza, TGI de Dolise et TGI de Monsedjo dans le Niari et TGI de Ponte-noire
). Au Cameroun, l'article 13 de la loi portant organisation judiciaire
dispose que : « Il est crée un tribunal de première
instance dans chaque arrondissement. Toute fois, suivant les
nécessités de service, le ressort dudit tribunal peut être
étendu à plusieurs arrondissements, par décret du
Président de la République ».
134 Voir le lexique des termes juridiques op.cit p.123.
Page | 101
Après avoir examiné les compétences de la
juridiction répressive, il convient d'examiner les
spécificités du déroulement du procès pénal
en matière faunique et des pouvoirs que les lois fauniques
confèrent au juge pénal à travers l'office de celui-ci.
B)-L'office du juge pénal en matière
des infractions à la loi faunique.
L'office du juge définit quel est son rôle dans
la direction du procès et quels sont ses pouvoirs et leurs limites.
Parlons du rôle du juge dans le contentieux pénal en
matière faunique, comme nous l'avons constaté dans nos
précédents développements, le droit de l'environnement est
une matière en perpétuelle mutation. A cet égard,
pourrait-on se convenir avec MONTESQUIEU et dire du juge pénal qu'il
n'est que : « la bouche qui prononce les paroles de la loi
». Le Professeur Jean-Louis BERGEL n'est pas de cet avis car pour lui
: « la fonction du juge ne peut se réduire à un organe
interne du système juridique, a une simple courroie de transmission des
règles abstraites, préétablies et statiques à des
cas particuliers. Il faut lui reconnaitre un rôle de véritable
acteur du système juridique qui dispose d'un certain pouvoir
créateur de droit, doté d'une véritable
responsabilité dans l'évolution du droit positif
»135. C'est en cela que le juge pénal mettra son
office au service de l'amélioration des règles de protection de
l'environnement et partant de la faune sauvage.
La particularité de l'office du juge pénal tient
à la fois des pouvoirs qui lui sont reconnus aussi bien par les textes
répressifs classiques (2) mais, surtout des
spécificités qui caractérise le déroulement du
procès pénal en matière des infractions fauniques
(1).
1-Les spécificités du
déroulement du procès pénal en matière
faunique.
En examinant la les lois fauniques, on peut relever certaines
spécificités au cours du procès pénal qui
distinguent la connaissance d'une infraction faunique à celle de droit
commun. D'abord l'article 147 alinéas 3 de la loi de 1994 introduit un
aspect particulier dans le procès pénal. En effet, les
représentants de l'administration en charge de la faune siègent
à la suite du procureur de la République, en uniforme et
découverts, la parole ne peut leur être refusée. Dans le
même sens, l'article 71 de la loi congolaise du 21 avril 1983 sur les
conditions de la conservation et l'exploitation de la faune sauvage disposait
que : « Les actions et poursuites sont exercée par
l'Administration des Eaux et Forêts sans préjudice du droit qui
appartient au Ministère Public. Le Secrétaire
Général, les Directeurs Centraux et les Directeurs
Régionaux ont le droit d'exposer l'affaire devant le Tribunal et sont
entendus à l'appui de leurs conclusions. Ils siègent à
découvert à la suite du Procureur de la République et de
ses substituts ». Cet aspect spécifique qui déroge aux
règles de déroulement d'un procès pénal classique
suscite deux remarques essentielles. D'une part, il révèle que la
protection des espèces fauniques est un domaine dont la
technicité et la subtilité nécessite l'intervention d'un
spécialiste des eaux et forêts pour conforter la
caractérisation de l'infraction faunique faite par la Ministère
Public dans le but d'éclairer les juges de sorte à emporter leur
intime conviction.
135 BERGEL (J-L), L'office du juge, in Les Colloques du
Sénat, Luxembourg du 29 au 30 septembre 2006, p.13
Page | 102
Une autre spécificité du procès
pénal en matière des infractions fauniques, c'est la
substitution, par le juge pénal, des sanctions prononcées
à l'encontre du prévenu par des travaux d'intérêt
général pour des délinquants ayant fait l'objet d'une
première condamnation. Les alinéas 2 et 3 de l'article 115 de la
loi du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées
dispose que : « Ces peines de substitution consistent à
exécuter des travaux présentant un intérêt direct ou
indirect pour la conservation et la mise en valeur de la faune et de ses
habitats ainsi que pour l'aménagement des aires protégées
et des milieux naturels de reproduction et de migration des animaux sauvages.
Pour l'exécution desdites peines, le juge compétent et l'agent
habilité du service local chargé de la faune déterminent
de manière précise la tâche à exécuter, le
lieu où elle doit être effectuée et le délai dans
lequel elle doit être achevée ».
Outre ces spécificités dans le
déroulement du procès pénal, l'office du juge
répressif se caractérise aussi par les différents pouvoirs
qui sont reconnus à celui-ci dans la conduite de ce procès. Ces
prérogatives sont prévues d'abord par les textes
répressifs classiques (code de procédure pénale), ensuite
certaines d'entre elles lui sont attribuées par les lois fauniques.
2-Les pouvoirs du juge pénal en matière
des infractions fauniques.
L'office du juge est lié aux fonctions que lui
reconnait le système juridique et aux missions qui lui sont
dévolues. Cela suppose que le juge soit encadré par des normes
qu'il doit mettre en oeuvre. Il interprète et applique ces normes. De
même, il est encadré par un système processuel exigeant
auquel, il doit impérativement se soumettre136. Il s'ensuit
que le juge pénal, dispose d'un éventail des pouvoirs qui sont
prévus à la fois par les textes classiques en matière
répressive et par les lois fauniques spéciales.
Ainsi donc, les pouvoirs du juge pénal sont avant tout
définit et encadrés par les dispositions de la loi n°1-63 du
13 janvier 1963 portant code de procédure pénale, au Congo. Au
Cameroun, par la loi n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant code de
procédure pénale. Ces pouvoirs portent à la fois, sur
l'organisation de l'audience et sur des actes concourant aux jugements de fond.
On citera entre autre :
-Les pouvoirs reconnus au juge pénal quant à la
police de l'audience et l'organisation des débats (art.303 du C.P.P
camerounais et art.336 du C.P.P congolais) ;
-Les pouvoirs de mise en liberté provisoire (art.301 du
C.P.P camerounais et art.123 ; 332 du C.P.P congolais) ;
-Les pouvoirs de décerner les mandats (art.299 du C.P.P
camerounais et art.400 ; 404 C.P.P congolais) ;
-Les pouvoirs d'ordonner un transport sur les lieux et de
commettre un expert (art.319 du C.P.P camerounais et art.391 al.1 du C.P.P
congolais)
-Les pouvoirs d'ordonner le versement provisoire (art.399 al.1 du
C.P.P congolais).
136 BERGEL (J-L), op.cit, p.13
Page | 103
Il faut noter que cette énumération n'est pas
exhaustive. Relevons aussi, qu'outre ces pouvoirs reconnus par les textes
classiques, les lois fauniques spéciales attribuent également
certaines prérogatives au juge répressif. Elles s'appliquent
exclusivement au procès pénal en matière faunique. Ainsi,
la loi du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires protégées
confère au juge le pouvoir de substitution de la sanction pénale
prononcée à l'encontre du contrevenant ayant fait l'objet d'une
première condamnation et de fixer les modalités
d'exécution (art.115 al.2-3). Le pouvoir de confiscation et d'ordonner
la vente aux enchères (art.148 de la loi 1994 au Cameroun).
Il convient de retenir au terme de cette analyse de l'office
du juge, qu'à coté des pouvoirs qui sont reconnus au juge, la loi
a aussi prévu des limites à ces pouvoirs. Elles empêchent
celui-ci de tomber dans l'arbitraire. Au nombre de ces limites, il y a le
principe d'interprétation stricte de la loi pénale. Celui de la
légalité des infractions et des peines, de
l'égalité des citoyens devant la justice. Ainsi que
l'impartialité, l'indépendance et l'inamovibilité des
magistrats du siège. A cela, il faudra ajouter la foi du serment des
magistrats. Comme l'affirmait le Premier Président DRAY à
l'audience solennelle du 8 janvier 1990 : « à la tentation du
juge-dieu, seul apte à tout savoir et tout faire, il faut savoir
résister (...) dans l'acte de juger, il ne faut jamais mépriser
le droit, la règle de droit préexistante et objective
». Le juge pénal est le fidèle serviteur de la loi,
doté d'une moralité irréprochable
caractérisée par une modération, discrétion,
d'humilité et une loyauté indéfectible.
Chapitre II : Les causes de l'inefficacité de
la
réponse pénale face à la
criminalité faunique.
Comme nous l'avons examiné dans nos
précédents développements, la règle pénale
même spéciale, qu'il s'agisse des normes de droit interne ou
international, apparaît aujourd'hui comme : «
l'arme-remède » contre la criminalité faunique.
C'est ce qui justifie, certainement, que la plupart des Etats d'Afrique
Centrale, dans le souci d'assurer une protection plus efficace de leurs
écosystèmes, ont optés pour une production intensive des
normes répressives dans le domaine de la faune sauvage. Ils ont aussi
attribués à l'ensemble des acteurs qui concourent à la
justice pénale un rôle essentiel dans la répression des
infractions fauniques. Mais malgré ces efforts on a enregistré,
après plusieurs décennies, des résultats mitigés et
parfois même des échecs dans la mise en oeuvre des politiques de
protection pénale de la faune sauvage. Cela se traduit par une
persistance et même une augmentation du braconnage, du commerce illicites
des espèces fauniques menacées d'extinction. On a donc
noté la montée d'une criminalité dont les tentacules et
les ramifications épousent des formes transnationales échappant
ainsi à l'action des juridictions nationales.
Au regard de tout ce qui précède, on arrive
à la conclusion suivant laquelle, le problème n'est pas seulement
lié à la matière. C'est-à-dire à
l'ineffectivité du dispositif répressive contenu dans les textes
mis en place par les législateurs. Il est aussi lié aux organes,
c'est-à-dire à l'inefficacité de l'action des acteurs
pénaux qui interviennent dans la répression des infractions
fauniques.
Page | 104
En effet, la réponse pénale qu'ils apportent aux
atteintes commises contre les espèces fauniques, à divers
niveaux, se heurte à de nombreuses difficultés dont les causes
sont tantôt endogènes à la justice répressive
(Section1) tantôt extérieurs ou exogènes
à cette justice (Section2).
Section1 : Les causes endogènes à la
justice répressive.
L'émergence d'un droit pénal de l'environnement
est un moyen, pour les Etats comme le Congo et le Cameroun pour endiguer le
péril encouru par les écosystèmes et partant les
espèces fauniques. A ce titre, l'action du juge pénal ainsi que
celle de l'ensemble des acteurs qui contribuent à l'exercice de la
justice répressive est irremplaçable et déterminante. Elle
apparaît comme le dernier rempart contre la criminalité faunique.
Or, cette justice comporte en son sein des germes qui entraine à une
inefficacité de la réponse qu'elle apporte à la
délinquance faunique. On parlera de l'absence d'une
spécialisation environnementale des acteurs de cette justice
(§1) et le manque d'une prise de conscience sur les
enjeux de la criminalité internationale en matière faunique
(§2).
Paragraphe1 : L'absence d'une spécialisation
environnementale des acteurs de la justice répressive.
Qu'il s'agisse du juge pénal, du Procureur de la
République ou même de l'officier chargé de constater les
infractions fauniques, leur rôle est fortement sollicité comme
gardien des normes environnementales sur la faune sauvage. M. ABAUZIT disait du
juge pénal que celui-ci joue le « rôle de bon berger pour
l'application des lois de protection de l'environnement et si l'administration
a parfois la tentation de négliger l'environnement, le juge, lui, se
trouve en dernière ligne et ne peut se dérober face à la
règle environnementale »137. Or l'efficacité
de l'action des acteurs de la justice répressive en matière du
contentieux faunique est tributaire de la connaissance qu'ils peuvent avoir de
ce domaine. Celui-ci est qualifié par certains auteurs d'un «
maquis juridique dont seuls quelques spécialistes savent
débrouiller les pistes »138. Aussi, on est juge que
de ce qu'on connait et pour mieux statuer sur le contentieux faunique et
même pour mieux organiser les poursuites en la matière, il faut
des magistrats formés. Or, au Congo et au Cameroun, on note le manque
d'une spécialisation des magistrats sur les questions environnementales
(A). Ceci est la conséquence directe d'un manque de
formation depuis les Ecoles de magistrature ou même de recyclages pour
les magistrats en fonction (B).
137 LECUCQ (O) et MALJEAN-DUBOIS (S), op. cit page.19
138 ROBERT (J.H), Droit pénal et
environnement, A.J.D.A, 1994. p 583, repris par NERAC-CROISIER (R),
Sauvegarde de l'environnement et droit pénal, l'Harmattan 2005,
page.35-36.
Page | 105
A)-Le manque de magistrats
spécialisés sur des questions environnementales pouvant
être désignés comme
référents.
On relèvera successivement l'absence de magistrats
spécialisés au niveau des Parquets de la République pour
organiser des poursuites contre les infractions fauniques en connaissance de
cause (1). Mais surtout au niveau des magistrats du
siège qui statut sur la base des textes spéciaux souvent trop
techniques et difficile à interpréter, alors qu'ils sont
assujettis au principe d'interprétation stricte de la loi pénale,
même lorsqu'elle est spéciale (2).
1-Absence de magistrats spécialisés
au niveau des Parquets de la République et des Parquet
généraux.
Dans une circulaire du 21 avril 2015 relative aux orientations
de politique pénale en matière d'atteintes à
l'environnement, Madame Christiane TAUBIRA alors, Garde des Sceaux, Ministre de
la Justice en France relevait ce qui suit : « L'efficacité du
rôle du parquet passe d'abord par une bonne lisibilité de son
organisation et par l'identification des magistrats qui sont en charge des
contentieux de l'environnement. Il convient à ce titre qu'un magistrat
référent, plus particulièrement chargé du
traitement de ce contentieux, soit désigné au sein de chaque
parquet et de chaque parquet général, et que son identité
soit portée à la connaissance des services concernés
dont-il doit être l'interlocuteur privilégié ».
En effet, l'efficacité des magistrats dans le rendement du contentieux
faunique est assujettie à une spécialisation d'abord et avant
tout des magistrats du parquet.
Ceux-ci étant chargés de porter et soutenir
l'accusation lors d'un procès. Ils doivent caractériser
l'infraction faunique objet de l'accusation, faire la démonstration de
la réunion des différents éléments qui le
constituent et établir un lien de causalité entre l'acte
incriminé et les divers textes légaux qui servent de base
juridique. Un tel exercice nécessite une connaissance approfondie des
textes spéciaux en matière de l'environnement et de la faune
sauvage. Mais aussi une large connaissance du droit de l'environnement. La
solution à cette nécessité de spécialisation des
magistrats du parquet passe soit la désignation des magistrats
référents au sein des parquets de la République et
généraux. Cela permet à ces magistrats de s'occuper
uniquement du contentieux environnemental en étant en relation
étroite avec les administrations en charge des problèmes
environnementaux. Ils peuvent ainsi s'occuper aisément des questions
relevant de la conservation et la protection de la faune. Ceci à
l'avantage de créer plus de fluidité dans les rapports entre
administrations et les juridictions répressives. Il peut s'agir aussi de
la mise en place au sein des parquets des pôles, constitués de
deux ou plusieurs magistrats, substituts du procureur ou avocat
généraux. Ces pôles sont chargés des affaires
portant sur des infractions environnementales et particulièrement sur
des infractions fauniques.
La formule la plus révolutionnaire étant celle
adoptée par l'Espagne, en effet en 2006, le législateur espagnol
a crée un parquet national spécialisé dans les affaires
d'environnement et d'urbanisme.
Page | 106
Il est composé d'un Procureur général, de
trois adjoints, 52 délégués et 97 procureurs
spécialisés repartis dans le pays et qui s'appuie sur une
unité de police de 18.000 agents. Cette spécialisation du parquet
a permis de tripler le nombre des poursuites et de condamnations en
matière de criminalité environnementale entre 2006 et
2014139.
Or au Congo et au Cameroun, il manque cette
spécialisation des magistrats du parquet sur les questions
environnementales. L'option choisie par les lois fauniques consistant en la
présence d'un représentant de l'administration en charge de la
faune siégeant à la suite du procureur de la
république140 entraine à la fois une confusion de
rôle. L'administration elle-même est victime dans les procès
portant sur les atteintes à la faune. Ensuite, cela peut constituer une
violation grave du principe de la séparation des autorités
administratives et judiciaires qui est un corollaire du principe
constitutionnel de la séparation des pouvoirs. En plus, dans la pratique
surtout au Congo, la fracture entre les agents de l'administration faunique et
la justice est telle qu'il est difficile voir impossible qu'un procureur ou que
les avocats du prévenu acceptent une telle entorse aux règles
classiques qui régissent le déroulement d'un procès
pénal.
Mais à ce manque de spécialisation des
magistrats du parquet, il y a une autre cause d'inefficacité de l'action
des acteurs judiciaires dans la répression des atteintes à la
faune sauvage, c'est le manque de spécialisation des juges du
siège.
2-Des juges non spécialisés dans le
domaine environnemental confrontés au principe de
l'interprétation stricte de la loi pénale
spéciale.
Selon PORTALIS : « En matière criminelle, il
faut des lois et point de jurisprudence »141. Ces mots
coïncidents avec l'obligation légale qui pèse sur le juge
répressif d'interpréter strictement la loi pénale
même s'il s'agit d'une loi spéciale. Il ne doit pas se livrer
l'exercice excessif du pouvoir prétorien. Mais comment
interpréter fidèlement un texte lorsqu'on n'a pas la connaissance
du domaine sur lequel porte ce texte ? La complexité des textes
répressifs relatifs à la faune sauvage a pour conséquence
immédiate, une difficulté dans leur compréhension et leur
interprétation par le juge pénal. En effet, une fois qu'il sera
parvenu à déterminer le texte applicable, il s'efforcera avec
délicatesse à l'interpréter, le plus strictement possible,
ce qui nécessitera de lui des efforts dans la compréhension. Le
manque de spécialisation du juge pénal, l'amènera à
demander l'avis d'un expert.
Pour Jérôme LASSERRE CAPDEVILLE : « le
juge est réduit au rôle peu séduisant de chambre
d'enregistrement des conclusions d'expertises scientifiques. Il ne sera ainsi,
au mieux, qu'un coordinateur d'opinions d'experts ».
139 Voir en ce sens, l'article : Créons un Parquet
national environnement, sur le site internet : le
monde.fr
140 Voir en ce sens les articles 147 al.3 de la loi de 1994
sur le régime des forêts, de la faune et de la pêche au
Cameroun et 71 al.2 de la loi n°48/83 du 21 avril 1983 définissant
les conditions de la conservation et de l'exploitation de la faune sauvage.
141 PRADEL (J) et DANTI-JUAN (M), Droit pénal
spécial, 5ème édition, Paris, CUJAS, p.15
Il conclut en affirmant que : « peu de juriste, et
donc de magistrats, étant, à l'heure actuelle, compétents
en matière de droit pénal de l'environnement, on peut penser que
cela en affaiblit la répression, tout en la rendant arbitraire
»142. La difficulté dans l'application et
l'interprétation des textes répressifs en matière
d'infractions fauniques est telle que le juge devra faire preuve
d'ingéniosité pour aller d'un texte à un autre afin de
faire assoir le motif de sa condamnation. Ainsi, par exemple pour un
délinquant ayant fournis l'arme et les minutions à un chasseur
accusé d'abattage d'un éléphant. Le juge répressif
congolais partira d'abord : des dispositions des articles 59 et 60 du Code
Pénal, pour fixer les éléments caractérisant la
complicité. Ensuite cette complicité devant être rattacher
à un acte infractionnel principal, il fera recours à l'article
113 al.3 de la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008 pour définir
l'abattage d'un animal protégé. Encore faut-il qu'il arrive
à interpréter ce qu'il faut entendre par « abattre
». Il fera ensuite intervenir l'arrêté n°6075 du 18
mai 1984 déterminant les animaux intégralement et partiellement
protégés. Il s'appuiera sans oublié sur
l'arrêté n°32/82 du 18 novembre 1991, portant protection
absolue de l'éléphant et l'acte 114/91 de la Conférence
Nationale Souveraine, portant interdiction de l'abattage des
éléphants en République du Congo et ce, sans compter les
textes internationaux. Il ressort de cet exemple qu'il faut recourir à
plus de cinq (5) textes pour faire assoir les liens de la prévention
à l'encontre d'un délinquant poursuivit pour atteinte à la
faune.
On comprend donc aisément que l'absence de
spécialisation des juges du siège constitue une cause non
négligeable de l'inefficacité de la réponse
apportée par la justice répressive. Il ne pourrait en être
autrement car pour rendre des décisions justes, le juge répressif
doit dominer la matière environnementale et le domaine de la faune en
particulier. Il en résulte que la spécialisation du juge
répressif est le seul gage d'une bonne justice, efficace et rapide.
Cependant, cette spécialisation ne doit pas être le fait
d'initiative individuelle de chaque magistrat. Elle serait plus efficace, si le
droit de l'environnement ainsi que les règles répressives qui
concourent à sa protection sont incorporées dans la formation des
magistrats depuis les Ecoles de la magistrature. C'est ce qui manque dans le
système actuel de formation des magistrats congolais et camerounais.
B)-Le manque de formation au sein des corps de la
magistrature sur le droit de l'environnement.
La protection de l'environnement en générale et
celle de la faune sauvage en particulier est un domaine
spécialisé qui exige une formation spécifique et des
habitudes intellectuelles particulières. De même, le droit de
l'environnement présente des spécificités et des
caractéristiques qui justifient un juge particulier. Or au Congo et au
Cameroun, les Ecoles de magistrature n'offrent pas des modules de droit de
l'environnement ou de droit pénal de l'environnement dans la formation
des auditeurs de justice (1). Il en est de même pour les
Ministères de la justice qui offrent rarement des formations aux
magistrats en fonction dans le domaine de l'environnement et de la faune
sauvage (2).
Page | 107
142 NERAC-CROISIER (R), op.cit p.40
Page | 108
1-Manque de module portant sur le droit de
l'environnement au sein des Ecoles de Magistrature.
Au Cameroun, c'est le Décret n°2005/154 du 6 mai
2005 portant organisation de l'Ecole Nationale d'Administration et de
Magistrature. L'article 4 alinéas 1 de ce décret, fixe au nombre
des missions de l'Ecole en disposant : « L'E.N.A.M a pour missions :
d'assurer la formation initiale des fonctionnaires des services civiles de
l'Etat dans les secteurs déterminés par le gouvernement,
notamment celle des fonctionnaires des corps de l'Administration
générale, des régies financières, des magistrats et
des greffiers (...) ». Au Congo, l'Ecole Nationale d'Administration
et de Magistrature est créée en 1981. Si la formation des
auditeurs de justice au Cameroun comporte des sections de spécialisation
(judiciaire, administrative et comptes)143 au Congo, cette formation
ne comporte qu'une seule filière (judiciaire). Il faut cependant
préciser que les juges qui animent les juridictions répressives
sont formés dans les filières ou les sections judiciaires et dans
leur formation, on note l'absence des modules consacrés au droit de
l'environnement ou même au droit pénal de l'environnement.
Outre l'absence de modules consacrés au droit de
l'environnement ou au droit pénal de l'environnement dans les Ecoles de
formation des magistrats, on note également une rareté des
séminaires et de formation des magistrats en fonction.
2-Rareté des séminaires de formation ou
de recyclage pour les magistrats en fonction.
Aux termes de l'article 17 du Décret n°95/048 du 8
mars 1995 portant statut de la Magistrature au Cameroun, les magistrats et
attachés de justice peuvent être désignés pour
suivre un ou plusieurs cycles d'étude au Cameroun ou pour suivre un
stage de perfectionnement ou des cycles d'études à
l'étranger. La loi n°15-99 du 15 avril 1999 modifiant et
complétant certaines dispositions de la loi n°023-92 du 20
août 1992 portant statut de la magistrature au Congo, ne prévoit
aucune disposition relative à la formation et au recyclage des
magistrats en fonctions. Or le droit de l'environnement étant
considéré comme un domaine récent et dont le volume du
contentieux au pénal ne cesse de prendre des proportions
considérables. Il serait donc plus qu'important que les magistrats qui
animent les formations juridictionnelles pénales, suivent des formations
pour se former et s'informer sur les avancés dans ce domaine. Ces
formations conduisent à un perfectionnement et même à la
spécialisation des magistrats dans le domaine environnemental. Ces
formations qui peuvent être organisées sur place ou même
à l'étranger traduisent aussi une volonté pour les Etats
de rendre plus efficace la réponse pénale contre la
criminalité faunique. Elles traduisent également une
coopération et un transfert de connaissance entre les systèmes
judiciaires des différents pays qui contribuent à la protection
des écosystèmes.
143 Sur la spécialisation s'agissant de la formation
dans la division magistrature : l'Arrêté n°0004832 du 10
octobre 2012 portant régime des études et de la scolarité
dans la division de la magistrature et des greffes de l'Ecole Nationale
d'Administration et de Magistrature.
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Mais les autres causes de l'inefficacité de la
réponse pénale contre les atteintes à la faune sauvage se
traduisent aussi par le manque d'une prise de conscience des enjeux de la
criminalité transnationale en matière faunique au sein des
juridictions répressives.
Paragraphe2 : Le manque d'une véritable prise
de conscience sur les enjeux de la criminalité transnationale en
matière faunique au sein des juridictions des deux pays.
Une recherche de modernisation de la réponse
pénale par les Etats d'Afrique Centrale à travers les reformes
législatives et institutionnelles a été constatée
au cours de ces dernières années. Elle ne doit cependant pas se
cantonner à la sphère nationale en raison du caractère
majoritairement transnationale de la criminalité faunique. Elle doit
être aussi marquée par une volonté, pour ces Etats,
d'internationaliser cette réponse pénale. D'ailleurs à ce
titre, la Déclaration sur la lutte Anti-braconnage en Afrique Centrale
reconnaissait que : « le braconnage et le commerce international
illégal de l'ivoire et de la faune sauvage portent atteinte à
l'environnement, à la paix et à la sécurité des
Etats, menacent la vie d'innocents et compromettent la croissance
économique des pays »144. Or, après
plusieurs décennies, on constate que le processus d'internalisation du
système répressif contre la criminalité faunique
transnationale reste encore embryonnaire et très lacunaire. On note
ainsi, le manque d'effectivité des instruments portant sur l'entraide
judiciaire et des difficultés pour les juridictions pénales
nationales d'exercer la compétence universelle (A).
Mais aussi, une absence d'harmonisation des incriminations et des sanctions
relevant de cette criminalité transnationale (B).
A)-Le manque d'effectivité des instruments
portant sur l'entraide judiciaire et les difficultés d'exercer la
compétence universelle.
En matière pénale, la coopération
judiciaire entre les Etats membres d'une organisation sous régionale
peut être entendue comme : « l'exécution par l'Etat
requis, éventuellement par la coercition, des mesures visant à
faciliter la poursuite et la répression des infractions pénales
dans l'Etat requérant, à la demande de ce dernier
»145. Dans le cadre de la protection pénale des
espèces fauniques, cette coopération apparaît comme l'un
des moyens les plus efficaces pour la mise en oeuvre d'une réponse
pénale, par les juridictions répressives, contre les atteintes
à la faune sauvage. Elle ne peut s'exercer que grâce aux respects
des accords entre les Etats. Cependant, l'ineffectivité des accords de
coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC (1).
Ainsi que les difficultés pour les juridictions pénales
d'exercer leur compétence universelle pour réprimer les
délinquants fauniques internationaux peuvent constituer un obstacle
à un rendement efficient de l'action de la justice répressive en
matière faunique (2).
144 Réunion d'urgence des Ministres de la CEEAC en
charge des relations Extérieures, des questions de défenses et de
sécurité, de l'intégration régionale et de la
protection de la faune sur la mise en oeuvre d'un plan d'extrême urgence
sur la lutte anti braconnage dans la zone septentrionale de l'Afrique Centrale
du 21 au 23 mars 2013.
145 ZIMMERMANN (R), La coopération judiciaire en
matière pénale, 3ème édition LGDJ,
Paris 2009, page.5
Page | 110
1-L'ineffectivité de l'Accord de
coopération judiciaire entre les Etats membre de la CEMAC du 28 janvier
2004.
L'accord de coopération judiciaire entre les Etats de
la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale a
été signé entre ces différents Etats dont le Congo
et le Cameroun pour faciliter les relations inter juridictionnelles et garantir
l'efficacité dans l'action des juridictions répressives. Ainsi,
cet instrument sous régional constitue un moyen de lutte contre la
criminalité faunique transnationale. Ainsi, cet accord prévoit
des mécanismes qui concourent la répression des
délinquants auteurs des infractions transnationales ou ayant, dans sa
commission, un élément d'extranéité susceptible
d'échapper à la compétence du juge répressif
national. En matière de protection pénale des espèces
fauniques, ces infractions transnationales ou ayant un élément
d'extranéité sont légions. On pourrait citer au nombre de
ces infractions, le braconnage et le commerce illicite des espèces
sauvages. De nombreux auteurs estiment qu'il existe un lien potentiel entre le
braconnage et d'autres activités criminelles organisées au plan
international, y compris le terrorisme, la fraude, la corruption, le
radicalisme et le crime organisé146.
Ces mécanismes sont entre autre, l'extradition, la
commission rogatoire et l'exéquatur. Ainsi donc, l'article 1 de l'accord
de coopération judiciaire entre les Etats membres de la CEMAC donne
successivement la définition des termes suivants : L'extradition qui
s'entend comme : « acte par lequel un Etat requis remet à la
disposition d'un Etat requérant , une personne poursuivie,
recherchée ou condamnée pour une infraction de droit commun,
conformément au présent accord ». La commission
rogatoire s'entend : « acte par lequel les autorités
judiciaires de l'Etat requérant chargent celles de l'Etat requis
d'accomplir des actes de procédures déterminés ou de
communiquer des pièces à conviction des dossiers ou documents
». Enfin l'exéquatur s'entend comme : « un acte par
lequel, les autorités judiciaires d'un Etat partie, autorise sur leur
territoire, l'exécution d'une décision de justice rendue sur le
territoire d'un autre Etat partie ». Ainsi donc ces trois
mécanismes constituent les piliers d'une coopération judiciaire
entre les Etat en matière de répression des infractions fauniques
transnationales. Toujours dans le sens de la coopération judiciaire, le
28 janvier 2004, les Etats membres de la CEMAC ont signés un accord
d'extradition. Aux termes de l'article 3 de cet accord, les infractions donnant
lieu à extradition dispose en son alinéa 1 : « Donneront
lieu à extradition, les infractions punies par les lois de la partie
requérante et par celle de l'Etat partie où réside
l'individu dénommé « partie requise » d'une peine
privative de liberté ou d'une mesure de sûreté privative de
liberté d'au moins un an (...) ».
Or l'application effective de ces accords entre les Etats
membre, reste difficile car, le plus souvent, il n'existe pas une harmonisation
des infractions fauniques et des peines entre les Etats membres. De même
qu'il existe de nombreuses incompatibilités entre les textes
répressifs de droit interne et les accords de coopération
judiciaire.
146 Rapport IFAW : La nature du crime, septembre 2013, p.3
Page | 111
Pour s'ne convaincre, l'article 14 du Code Pénal
Camerounais dispose que : « Les sentences pénales
prononcées contre quiconque, par des juridictions
étrangères, ne produisent d'effet sur le territoire de la
République que si :
-Le fait est qualifié crime ou délit de droit
commun par la loi pénale de la République ;
-La régularité de la décision, son
caractère définitif et sa conformité à l'ordre
public de la République sont constatés par la juridiction saisie
d'une poursuite à l'encontre de la même personne ou par la Cour
d'Appel du lieu de résidence du condamné saisi par le
Ministère public »
2-Les difficultés d'exercice de la
compétence universelle par les juridictions pénales
nationales.
La compétence universelle reconnue à certaines
juridictions pénales, est encore qualifiée de principe
d'universalité du droit de punir. Elle peut être
considérée comme un système de compétence en vertu
duquel, un Etat se donne le pouvoir de protéger certaines valeurs
fondamentales de la communauté internationale en acceptant de
réprimer les agissements des personnes physiques
étrangères qui les offenses à l'étranger ou contre
des étrangers147. Cependant la grande question que l'on peut
se poser est-celle de savoir, si un Etat peut exercer sa compétence
universelle pour les infractions relevant de la faune sauvage ? Au Cameroun, le
Code Pénal fixe au titre des infractions internationales pouvant donner
lieu à la compétence des juridictions répressives
même lorsque celles-ci ont été commises à
l'étranger. A cet égard, l'article 11 dudit code dispose que :
« La loi pénale de la République s'applique au
mercenariat, à la discrimination raciale, à la piraterie, au
trafic des personnes, à la traite des personnes, à l'esclavage,
au trafic des stupéfiants, au trafic des déchets toxiques, au
blanchiment capitaux, à la cybercriminalité à la
corruption et aux atteintes à la fortune publique commis même en
dehors du territoire de la République. Toutefois, aucun étranger
ne peut être jugé sur le territoire de la République, pour
les faits visé au présent article commis à
l'étranger, que s'il a été arrêté sur le
territoire de la République et n'a pas été extradé
et à condition que la poursuite soit engagée par le
Ministère Public ». Bien que les atteintes à la faune
relève d'une loi spéciale, il n'en demeure pas moins vrai que ni
l'énumération exhaustive donnée par le code pénal,
ni les lois fauniques ne précisent clairement une compétence
universelle des juridictions pénales camerounaise pour les infractions
contre la faune commises à l'étranger.
B)-Absence d'une harmonisation des incriminations
et des sanctions relevant de la criminalité faunique
transnationale.
La réponse à la délinquance faunique qui
pèse sur les Etats d'Afrique Centrale et laisse planer une menace
imminente d'extinction des espèces sauvages, passe nécessairement
par la mise en place d'un droit commun de la protection pénale de la
faune sauvage.
147 DIMUENE PAKU DIASOLWA (S), L'exercice de la compétence
universelle en Droit pénal international, Québec Montréal,
octobre 2008, p.48
Page | 112
Or, jusque là, dans chacun de ces Etats, la
répression des infractions fauniques reste l'apanage d'une justice
répressive. Elle ne se limite qu'aux frontières nationales, sans
possibilités de réprimer les infractions transnationales. En ce
sens, Mireille DELMAS-MARTY soutient que : « l'absence de traitement
commun du phénomène de la criminalité environnementale
contribue à l'inefficacité d'un système répressif
qui reste identifié à l'Etat, le monopole du droit de punir
étant l'emblème de la souveraineté
»148. Ainsi donc, l'absence d'une harmonisation des
incriminations relevant du droit international de l'environnement (1)
et d'une uniformisation des peines (2) peut, aussi
constitué une cause d'inefficacité de la réponse
apportée par la justice répressive à la criminalité
faunique transnationale.
1-Absence d'harmonisation des incriminations
à caractère transnationale en matière
faunique.
Le phénomène de braconnage et le commerce
illicite des espèces sauvages ainsi que les produits qui
découlent du trafic d'animaux sauvages, constitue une menace d'ampleur
mondiale. Ses effets sont dévastateurs pour la stabilité des
écosystèmes et la préservation de biodiversité. Ces
infractions constituent également un véritable danger pour la
sécurité sous-régionale et mondiale. Cette forme de
criminalité alimentée par des réseaux
disséminés à travers le monde répond à des
demandes diversifiées : vêtements de marque, maroquinerie, bijoux,
ornements et parures, animaux de compagnie, médecine. Il en
résulte que ce phénomène a donné naissance,
à des infractions transnationales du fait de l'éclatement de
leurs éléments de rattachement relevant de plusieurs Etats. Ainsi
donc, pour une même infraction, on distinguera d'un pays à un
autre : le lieu de la commission, celui de la survenance du préjudice
environnemental, celui du lieu d'arrestation des auteurs, celui de
l'arrestation des complices et commanditaires. D'autres infractions fauniques,
relèveront du fait de leur ampleur et leur gravité d'une atteinte
à la sûreté de la planète.
Cependant, face à de telles réalités, les
Etats d'Afrique Centrale n'ont pas prévus ni dans leur
législations internes et dans les instruments sous-régionaux une
catégorisation d'incriminations comportant des éléments
d'extranéité. Ils n'ont pas aussi prévus des
procédures pour permettre aux juridictions pénales nationales de
connaitre de telles infractions. L'article 8 du Code Pénal Camerounais
est vague lorsqu'il évoque les infractions partiellement ou
totalement commise à l'étranger. Il affirme que : «
La loi pénale de la République s'applique a)- à toute
infraction dont l'un des éléments constitutifs s'est
trouvé réaliser en tout ou partie sur son territoire b)- aux
infractions d'atteintes à la sûreté de l'Etat, de
contrefaçon du sceau de l'Etat ou de monnaie nationale y ayant cours
commises même à l'étranger. Toutefois aucun étranger
ne peut être jugé par les juridictions de la République en
application du paragraphe b), à moins qu'il n'ait été
arrêté sur le territoire de la république ou qu'il n'ai
été extradé ». De même, son article qui
énumère les infractions internationales, outre le trafic des
déchets toxiques, ne mentionne aucune infraction contre la nature.
Autrement dit, les atteintes à la faune sauvage, même le plus
grave comme l'abattage de centaine d'éléphants, ne constituent
pas au sens du code pénal camerounais, une infraction internationale.
148 DELMAS-MARTY (M) op.cit, p.365
Page | 113
Aujourd'hui, certains pays développés
conçoivent une possibilité d'harmoniser les crimes
environnementaux les plus graves à travers le crime
d'écocide. Il s'agit de la même volonté que les
Etats ont manifestée au sortir de la seconde guerre mondiale, lorsqu'ils
ont institué le crime de génocide. L'écocide est
conçu comme des actes visant la destruction de ce qui est
nécessaire à l'humanité pour exister. Selon l'article 2 du
Projet de la Convention Ecocide, ce crime est entendue comme tout : «
acte intentionnel commis dans le cadre d'une action
généralisée ou systématique et qui porte atteinte
à la sûreté de la planète ». Cependant,
peut-on classer certaines atteintes à la faune sauvage comme
susceptibles de détruire ce qui est nécessaire à
l'humanité ? Selon un rapport IFAW, courant janvier 2012, plusieurs
éléphants (entre 300 et 400) ont été abattus dans
le Parc Boubanjida au Cameroun149. Au regard de la gravité
d'un tel acte et du rôle ou de l'importance des éléphants
dans la préservation des écosystèmes, cette infraction
pourrait être qualifié d'écocrime.
Mais l'harmonisation des incriminations va de paire avec
l'uniformisation des sanctions, ce sont les deux conditions pour arriver
à une efficacité de la réponse pénale contre la
criminalité internationale.
2 Uniformisation des sanctions
pénales.
Par définition, le droit pénal de
l'environnement est entendu comme : « l'ensemble des dispositions
répressives qui préviennent et sanctionnent la dégradation
par l'Homme du milieu physique ou biologique dans lequel il vit ». En
matière de protection internationale de la faune sauvage, la sanction
pénale a un effet dissuasif et joue donc un rôle essentiel. Elle
n'est certes pas le remède miracle qui sauvera les
écosystèmes de faune en Afrique Centrale de la menace
d'extinction du fait de la criminalité faunique. Mais par elle, les
Etats peuvent affirmer que les espèces fauniques sont des constitutions
essentielles pour la survie des écosystèmes qui doivent
être respectées. L'uniformisation des sanctions portant
répression de la faune sauvage traduit une universalisation de la
réprobation des atteintes contre la faune surtout celles ayant un
caractère transnational.
Or en ce qui concerne les pays d'Afrique Centrale dont le
Congo et le Cameroun, la répression des atteintes contre la faune est
compartimentée, chacun définit les incriminations et les
sanctions applicables. Cela résulte sans nul doute de la
compétence pénale territoriale reconnue à chaque Etat. Ce
principe exclusif reconnu par le droit international, a pour objet d'affirmer
la compétence de l'Etat, de ses juridictions pénales et de ses
lois propres à l'égard de tous les actes punissables (y compris
les atteintes à la faune sauvage) commis sur son territoire. Il faut
cependant préciser que les infractions en matière de la faune
sauvage peuvent être commises sur le territoire de plusieurs pays, un
acte d'abattage d'éléphant ou de rhinocéros pouvant
être étroitement lié au transport clandestin des
défenses ou des cornes de ces derniers ainsi qu'à leur
commerce.
149 IFAW : Braconnage
d'éléphants toujours hors de contrôle à Boubanjida
en dépit du déploiement militaire sur la
zone.
Page | 114
En dehors des causes qui sont endogènes acteurs
judiciaires (magistrats), on relève aussi des difficultés
résultant des rapports entre les tribunaux et les administrations en
charge de la constatation de ces infractions ainsi que ceux qui sont
liés du manque de moyens matériels pour un rendement efficient
dans la lutte contre la criminalité faunique.
Section2 : Les causes exogènes de
l'inefficacité d'une réponse pénale à la
criminalité faunique.
Au-delà des insuffisances substantielles
matérialisées par les difficultés dans l'application des
textes en matière faunique, l'inefficacité de l'action des
acteurs concourants à la réponse pénale contre la
criminalité faunique résulte aussi des causes qui sont indirectes
au fonctionnement interne des juridictions répressives congolaise et
camerounais. En effet, la prise de conscience par les pouvoirs publics de la
menace irréversible d'une détérioration des
écosystèmes à travers l'extinction des espèces
sauvages appel nécessairement à la modernisation de la
qualité d'une réponse pénale apportée au
phénomène de la délinquance faunique.
Or, actuellement on remarque qu'au Congo et au Cameroun, il
existe encore de nombreux problèmes liés au manque de
collaboration entre les acteurs oeuvrant à l'exercice d'une
répression contre les atteintes à la faune
(§1). Mais également, de graves carences en terme
de moyens mis à leur disposition pour aboutir à un rendement
efficient dans la lutte contre cette forme de délinquance
(§2).
Paragraphe1 : Le manque de collaboration entre les
différents acteurs concourants à l'exercice d'une
répression contre la criminalité faunique.
Evoquant la nécessité d'une collaboration entre
les différents acteurs qui constituent, chacun, un maillon de la
chaîne pénale dans l'exercice effective d'une répression
contre la criminalité faunique, N. RORET et M. PORRET-BLANC ont
estimés qu'il est « indispensable de clarifier et coordonner le
rôle de chaque acteur au sein des procédures afin d'en
améliorer la lisibilité et d'en garantir l'efficacité
»150. Au Congo et au Cameroun, la persistance et voir
même l'augmentation des phénomènes de braconnage et du
commerce illicite des espèces fauniques sont liés entre autre
à un échec dans la coordination entre les différents
maillons de la chaîne pénale. Parmi les maux qui minent cette
chaîne, on relève une confusion dans le rôle et les limites
des prérogatives reconnues à chaque acteur. A ce titre, on
parlera des problèmes de conflit de compétences
(A). Mais la réponse pénale est aussi inefficace
du fait de la relégation des Associations spécialisées
dans la protection des espèces fauniques à des rôles
passifs, alors qu'elles devaient être considérées comme le
fer de lance dans l'oeuvre de répression (B).
150 RORET (N) et PORRET-BLANC (M), op.cit, p.19
Page | 115
A)-Les problèmes liés à des
conflits de compétences entre les différents acteurs oeuvrant
pour l'exercice d'une réponse pénale contre les atteintes
à la faune sauvage.
L'étude exégétique des lois portant sur
la faune sauvage au Congo et au Cameroun, laisse apparaître que les
problèmes de conflit de compétence entre les différents
acteurs qui concourent à l'action répressive contre les atteintes
à la faune, sont liés à une cacophonie rôle que leur
reconnait pèle mêle par les textes en matière de faune qui
sont illisibles et parfois ambigüe (1). Ils tiennent
aussi, à l'absence de coordination et de coopération entre ces
différents acteurs dans l'exécution des taches concourant
à la répression (2).
1)-Des conflits de compétence liés
à une sorte de cacophonie dans la répartition des rôles
organisée par les lois fauniques illisibles et
ambigües.
Qu'il s'agisse de la loi n°37-2008 du 28 novembre 2008
sur la faune et les aires protégées au Congo ou celle portant sur
le régime des forêts, de la faune et de la pêche au
Cameroun. Ces textes se caractérisent par une distribution quelque peu
confuse des prérogatives et rôles entre les différents
acteurs concourants à l'exercice d'une répression efficace contre
les atteintes à la faune sauvage. Cette répartition a pour
conséquence de créer un effet inverse, car au lieu d'être
un apport efficient, elle entraine au contraire une confusion dans
l'accomplissement des tâches. D'abord l'article 95 de la loi de 2008 sus
évoquée dispose que : « Sans préjudice des
pouvoirs de la police judiciaire, la police de la faune et de la chasse est
assurée par les services compétents du ministère
chargé des eaux et forêts, qui peuvent, en cas de besoin, se faire
assister par les chefs du village et les associations locales ouvrant dans ce
domaine ». Il crée une concurrence de compétence entre
la police judiciaire classique et la police spéciale en charge de la
faune et de la chasse. Cette concurrence dans l'exercice des missions de police
judiciaire contre les atteintes à la faune sauvage est aussi
prévue par l'article 141 alinéa 1 de la loi camerounaise de 1994
en ces termes : « Sans préjudice des prérogatives
reconnues au Ministère public et aux officiers de police judiciaire
à compétence générale, les agents
assermentés des administrations chargées des forêts, de la
faune et de la pêche (...) sont chargés de la recherche, de la
constatation et des poursuites en répression des infractions commises en
matière de forêt, de la faune et de la pêche, selon le cas
». Mais, ces lois ne précisent pas, lesquels des deux polices
est privilégiées dans le cas où il y aurait une collusion
sur le terrain. Les articles 99 et 100 de la loi faunique congolaise,
reconnaissent aux agents du Ministère en charge de la faune des
prérogatives très large de la police judiciaire.
Au Cameroun, l'article 147 de la loi faunique, donne
compétence aux agents assermentés du Ministère de la
faune, concurremment avec la police judiciaire et le ministère public
dans la mise en mouvement de l'action public. Ils sont habilités de
faire des observations à la suite du ministère publique au cours
du procès pénal. Ils peuvent également au même titre
que le ministère public ou les huissiers de justice faire citer les
délinquants fauniques devant les formations de jugement.
Page | 116
Cette cacophonie est aussi exprimée à travers
l'article 88 de la loi n°96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre
relative à la gestion de l'environnement, qui dispose que : «
Sans préjudice des prérogatives reconnues au ministère
public, aux officiers de police judiciaire à compétence
générale, les agents assermentés de l'Administration
chargée de l'environnement ou des autres Administrations
concernées, notamment ceux des domaines, du cadastre, de l'urbanisme,
des travaux publics, des forêts, de la marine marchande, des mines, de
l'industrie, du travail et du tourisme sont chargés de la recherche, de
la constatation et des poursuites en répression des infractions aux
dispositions de la présente loi et de ses textes d'application
». Au regard de ce qui précède, on peut se demander
dans toute cette répartition, qui fait quoi et devant quel type
d'infraction ?
Il résulte de tout ce qui précède, que
les lois fauniques prévoient un panel très varié des
taches qui concourent à la répression des infractions fauniques.
En partant des constatations, de la recherche des indices et preuves, du
déclenchement de l'action public jusqu'à l'aboutissement de la
procédure devant le juge pénal et la condamnation.
L'efficacité de la réponse pénale dépend
également de la coordination et la coopération entre les
différents acteurs qui doivent former un système fluide et
synchronisé.
2)-Des conflits de compétence liés
à l'absence de coordination et de coopération entre les
différents acteurs dans l'exécution des tâches relatives
à la répression des atteintes fauniques.
Selon un responsable du Projet d'Appui à l'Application
de la Loi sur la Faune Sauvage au Congo (PALF) : « La collaboration
entre les institutions en charge d'application et d'exécution de la loi
faunique (au Congo) est un engrenage mal articulé et rouillé
(...) avec un tel engrenage, la loi s'applique certes mais pas de façon
effective, efficace dans toute sa teneure »151. Il
résulte de cette réflexion que le manque de coordination et de
coopération entre acteurs habilités par les lois fauniques pour
exécuter une tâche quelconque qui contribue à la
répression des infractions peut entamer sérieusement à
l'efficacité de la réponse pénale. Par définition,
la coordination est l'action d'agencer diverses activités dans le but
d'atteindre un résultat escompté. C'est la mise en place par les
acteurs institutionnels et non institutionnels d'un ensemble des actes, de
manière cohérente, dans le but de traduire les délinquants
criminels devant le juge pénal. Quant à la coopération,
elle s'entend comme une méthode d'action dans laquelle des acteurs ayant
un objectif commun agissent conjointement et collaborent ensemble pour
atteindre cet objectif. Le manque de coordination et de coopération
entraine donc des conflits de compétence, soit entre les officiers de
police judiciaire et les agents du ministère en charge de la faune, ou
entre ces derniers et ceux de la douane. Il peut parfois exister des conflits
de compétence entre le ministère public et l'administration
faunique. Ces conflits alourdissent les procédures, les ralentissent et
parfois même les rendent bancales.
151 BENISSON (J), Les difficultés liées à
l'application de la loi sur la faune au Congo, Document PALF, 2017, p.22
Page | 117
Par ailleurs, on peut aussi noter le cloisonnement des
services en charge de la répression et ces conflits aboutissent parfois
jusqu'à la rétention des informations. Mais ce manque de
collaboration se traduit aussi la relégation des associations en charge
de la lutte pour la protection de la faune sauvage dans un rôle
passif.
B)-La relégation des associations
spécialisées dans le domaine de protection de la faune à
un rôle passif.
En parlant des évolutions du droit pénal
français en matière environnementale, plus
précisément de l'action devant le juge pénal des
associations de protection de l'environnement, Guillaume ANGELI affirme que :
« La où, le droit commun exige un préjudice direct,
l'article L.142-2 du Code de l'environnement se satisfera d'un préjudice
indirect afin de permettre l'accès à la justice pour les
associations de protection de l'environnement palliant ainsi à l'inertie
du parquet fréquente en matière de l'environnement
»152. Ces avancés notables en droit pénal de
l'environnement français ne se répercutent pas en droit interne
congolais et camerounais qui, pourtant est souvent la résultante d'un
mimétisme juridictionnel.
En effet, au Congo, les associations
spécialisées dans la lutte pour la protection de la faune sauvage
ont un rôle passif dans la poursuite des infractions fauniques. Elles
sont réduites à la simple dénonciation et à la
collaboration dans la recherche des auteurs d'infraction à la loi
faunique. Dans ce sens, l'article 3 alinéas 2 et 4 dispose que : «
Ces associations sont des organes consultatif pour l'élaboration des
politiques de gestion de la faune. A ce titre, elles sont chargées,
notamment, de :
-collaborer avec les services compétents à la
surveillance des animaux sauvages , ·
-collaborer à la recherche des acteurs d'infraction
à la présente loi et à ses textes d'application
, ·
-donner leurs avis sur toute question intéressant la
gestion de la faune ».
Alors que l'article 95 de la faunique congolaise parle d'un
rôle d'assistance aux cotés de l'administration de la faune dans
les missions de la police de la faune et chasse. L'article 3 les relègue
aux rôles de consultation et de collaboration. Il s'agit là que
des rôles passifs. Ainsi donc elles ne peuvent pas se constituer partie
civile. Cette limitation constitue donc une cause d'inefficacité dans
l'exercice d'une réponse pénale. En réalité, pour
les associations spécialisées dans la protection de la faune
sauvage, le but n'est pas tant de recevoir un montant quelconque au titre des
dommages et intérêts, mais en ayant accès au juge
pénal, elles recherchent l'effet dissuasif de la sanction pénale
pour endiguer le phénomène de criminalité faunique. Outre
le manque de collaboration entre les différents acteurs qui concourent
à l'exercice de la répression des atteintes contre la faune
sauvage, au Congo et au Cameroun, on peut aussi relever comme causes
exogènes à l'ineffectivité de la réponse
pénale, le manque de moyens mis à leur disposition pour un
rendement plus efficient.
152ANGELI (G), L'action devant le juge
pénal des associations de protection de l'environnement, in Revue
Juridique de l'Environnement, le Code français de
l'environnement. Numéro spécial 2002. P.7
Page | 118
Paragraphe2 : Les problèmes liés au
manque de moyens affectés aux acteurs pour assurer une répression
efficace.
L'exercice de la justice pénale est un système
lourd et complexe qui exige des moyens à la fois en termes de ressources
humaines, matérielles et financières. En effet, dans un domaine
spécifique comme celui de la répression des infractions
fauniques, les acteurs judiciaires concourant à cette action doivent
bénéficier de diverses ressources pour rendre une justice assez
juste et équitable. Or, au Congo et Cameroun tel n'est pas le cas. On
relève un manque de moyens tant au niveau des juridictions en charge du
contentieux faunique qu'en milieu carcéral (A). Mais,
il faut aussi souligner que l'augmentation de la délinquance faunique
dans ces pays reste aussi liée au manque de politique de
réinsertion des délinquants ayant purgés leur peine, ce
qui rend encore plus inefficace la réponse pénale
(B).
A)-Le manque de ressources à la disposition
de la justice répressive et les difficultés d'organisation du
milieu carcéral : autres causes d'inefficacité de la
réponse pénale.
La justice répressive, même en matière du
contentieux faunique est avant tout une institution publique au service de la
société. A cet effet, son rendement efficient peut être
entravé par la mauvaise qualité de son service, le manque de
ressources et les dysfonctionnements de tout genre (1). Au
Congo et au Cameroun le contentieux pénal de la faune, repose sur
l'effet de la sanction qui joue un rôle stratégique, surtout
lorsqu'elle est privative de liberté. A ce titre, il est donc plus que
nécessaire qu'on jette un coup d'oeil à l'univers
carcérale qui reçoit le délinquant condamné
à payer sa dette à la société pour ses actes
réprobatoires (2).
1)-Le manque de ressources à la disposition
de la justice répressive : cause majeur de l'inefficacité de la
réponse pénale en matière du contentieux
faunique.
Dans son ouvrage intitulé : Les Africains et
l'institution de la justice. Entre mimétisme et métissage,
Etienne LE ROY dépeint un état déplorable des juridictions
dans les pays africains. Les juridictions pénales en charge du
contentieux faunique au Congo et au Cameroun ne constituent pas une exception
à la règle. En effet, il affirme que : « La justice en
Afrique est d'un côté une institution héritée de la
colonisation, mais sinistrée (corruption, prétoires
délabrés, conditions de détention misérable)
inadaptés aux réalités des sociétés
africaines actuelles »153. Il résulte de cette
affirmation, qu'un procès est fait à la justice répressive
en charge du contentieux faunique et même aux acteurs qui l'animent. De
cet inventaire, on pointe du doigt d'une part : son manque
d'indépendance vis-à-vis du pouvoir politique, l'absence
d'impartialité souvent liée à un niveau
élevé de corruption qui la gangrène, son
éloignement et son inaccessibilité à la population. Mais
ces facteurs sont substantiels et insaisissables à l'oeil nu.
153 LE ROY (E), Les Africains et l'institution de la justice.
Entre mimétisme et métissage, Paris, Dalloz, 2004, p.
184.
Page | 119
Ce qui paraît plus criard c'est : sa misère
financière, documentaire et matérielle. En effet, dans la plupart
des pays d'Afrique noire francophone, le pouvoir exécutif tient du bout
de la laisse l'hypothétique pouvoir judiciaire. Aussi, et surtout, la
justice répressive est sous un régime de sevrage
financière continuel pour atténuer ses ardeurs
d'indépendance et d'impartialité.
Selon une formule souvent reprise par les auteurs, la justice
en Afrique serait à la fois : « un service public sans service
» compte tenu de l'indigence de ses moyens ; « une justice
sans juges » en tenant compte du traitement réservé aux
magistrats qui les animent ; de « tribunaux sans justiciables
» puisqu'ils sont rarement saisis par les justiciables surtout pour
des matières aussi complexe que le contentieux faunique154.
Il ressort de ces remarques fondées que la justice pénale dans
ses pays est dépourvue des moyens matériels pouvant lui permettre
d'exécuter à bien sa mission de répression. On peut citer
au nombre de ces manquements : l'absence des bibliothèques au sein
tribunaux, manque d'infrastructures adéquates, de mobilier de travail
descend, de véhicule, de l'outil informatique...
Dans ces conditions, pour les magistrats et autres auxiliaires
de justice appelés à oeuvrer pour une justice répressive,
travaillent avec des moyens qui remontent des temps de la colonisation. Au
Congo, par exemple, on retrouve encore au sein des juridictions
répressives des machines à dactylographier servant dans la
matérialisation des casiers judiciaires et d'autres actes judiciaires,
le pays ne disposant toujours pas d'un fichet pénal numérique.
Seuls les magistrats de la Cour Suprême bénéficient des
dotations de voiture. Cette absence de moyens mis à la disposition de la
justice pénale est, sans nul doute, une cause d'inefficacité dans
la réponse apportée à la délinquance faunique. A
ces difficultés, il faut ajouter l'état déplorable du
système carcéral qui ne favorise pas une répression
efficace.
2)-Les difficultés d'organisation du milieu
carcéral : une autre cause d'inefficacité de la réponse
pénale à la criminalité faunique.
Poursuivant son analyse critique sur l'institution de la
justice en Afrique, Etienne LE ROY, considérait l'univers
carcéral ou la prison en Afrique comme : « la face maudite de
la justice »155. Cette vision est partagée par,
Régine NGONO BOUNOUNGOU, lorsqu'elle parle du fonctionnement du milieu
carcéral au Cameroun. En effet, pour elle : « Il est difficile
de croire au bon fonctionnement des établissements pénitentiaires
avec une telle surpopulation écrasante »156. Dans
un pays comme dans l'autre, les réalités sans quasi-semblables,
l'Administration pénitentiaire reste confrontée à de
nombreux problèmes liés entre autre à un déficit
chronique en personnel qualifié. Le manque d'agents
spécialisés dans le domaine pénitentiaire ou
sous-qualification du personnel. Il y a également un manque criard
d'infrastructures adaptées aux réalités actuelles.
154 Voir en ce sens, l'extrait de Jean du Bois DE GAUDUSSON et
Gérard CONAC, La Justice en Afrique : nouveaux défis, nouveaux
acteurs, in La Revue Africaine contemporaine. Edition spéciale 1990,
p.14
155 LE ROY (E), op.cit p.206
156 NGONO BOUNOUNGOU (R), La réforme du
système pénitentiaire camerounaise : entre héritage
colonial et traditions culturelles. Thèse pour obtenir le grade de
Doctorat de l'Université de Grenoble, spécialité
Administration Publique. Université de Grenoble le 26 juin 2012, p19
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Ce qui a pour conséquence immédiate, la
surpopulation de l'univers carcéral avec tous les maux que cela peut
entrainer à savoir : les maladies liées à aux conditions
d'hygiène et de nutritions, beaucoup de cas de décès, de
nombre record d'évasion et plus de radicalisation dans la
criminalité.
Or, pour les délinquants fauniques, la tendance est de
récidiver, les anciens détenus évadés ou ayant
purgé leur peine dans des conditions dégradantes deviennent
encore plus actif et plus dangereux. Il faut aussi relever que dans ces pays,
peut de subvention et moins de budget sont consacrés à
l'amélioration des conditions en milieu carcéral. Ces pays n'ont
parfois aucune politique pénitentiaire. Au Cameroun, c'est le
Décret n°92-052 du 27 mars 1992 portant régime
pénitentiaire qui organise le milieu carcéral. Selon un rapport
sur la situation des prisons au Cameroun publié en décembre 2011
: « En effet, le vieillissement des infrastructures, fait de la prison
aujourd'hui un monde entièrement à part où les conditions
minimales de vie sont difficilement trouvables. De ce point de vue, il est de
notoriété que l'infrastructure pénitentiaire camerounaise
est fortement dégradée pour la plupart, car constituée de
vieux bâtiments datant pour certains de la période coloniale et
n'ont pas visiblement de maintenance, encore moins de rénovation depuis
de lustres à l'instar des prisons de Bafoussam et de Yoko,
créées en 1952 et celle de Douala en 1930
»157. La situation pénitentiaire au Congo n'est
différente de celle du Cameroun. Ce qui est essentiel à retenir
dans notre étude, c'est que ces problèmes constituent un
véritable frein à la lutte contre la délinquance
faunique.
A cela, on ajoutera le manque de politique de
réinsertion des délinquants qui tombent assez vite dans la
récidive, rendant ainsi le cycle de la criminalité plus infernal
et plus dangereux pour la survie des espèces.
B)-Le manque d'une politique de réinsertion
pour les délinquants fauniques.
Pour le délinquant la réinsertion est souvent
considérée comme une seconde chance que lui accorde la
société et un moyen d'empêcher celui-ci de retomber dans
les mêmes errements. Ainsi, dans le cadre de la protection des
espèces fauniques et la lutte contre le braconnage, la
réinsertion est l'un des moyens pour éloigner les anciens
délinquants de ces pratiques. Il ne peut en être autrement,
puisque dans son approche sociologique la répression des contrevenants
aux lois fauniques est certes une manifestation, par excellence, de la
réprobation sociale. Mais dans la conscience collective, la place
accordée à la faune sauvage n'a pas encore atteint une importance
telle que ces délinquants mériteraient l'opprobre sans aucune
chance d'être réinséré.
Cependant, la réinsertion même pour les
délinquants fauniques nécessite la mise en place d'une politique
et des moyens financiers affectés. Elle peut consister à des
formations professionnelles, l'apprentissage d'un métier, l'incitation
à la pratique de l'agriculture ou de l'élevage et pour cela, il
faut souvent des fonds de roulement.
157 ACAT-LITORAL : Rapport sur la situation des prisons au
Cameroun : « Humanisation des conditions de détentions au Cameroun
», Yaoundé décembre 2011, page.7
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Il a été révélé que dans la
plupart des cas, en Afrique Centrale, les braconniers et autres auteurs de
commerce illicite d'espèces fauniques sont souvent d'ancien membre
appartenant à des milices ou même des jeunes
désoeuvrés. Leur réinsertion dans la vie professionnelle
est donc un moyen efficace d'endiguer les risques de récidive et
d'augmentation de cette criminalité. Il résulte de tout ce qui
précède que l'efficacité de la réponse
pénale contre la criminalité faunique ne se résume pas
seulement à la mise en place des incriminations et des sanctions ou
même à des textes de lois spéciales. Elle dépend
aussi de qualité des acteurs qui animent cette institution. En effet
qu'il s'agisse des officiers de police judiciaire à compétence
générale ou des agents relevant du ministère en charge de
la faune ; des magistrats du parquet ou du siège ainsi que du personnel
de l'administration pénitentiaire, tous ces acteurs concourent chacun
selon son rôle et ses fonctions à la lutte contre cette forme de
criminalité. A cet effet, lois ne doivent pas se limitées
à définir les incriminations et sanctions, elles doivent aller
plus loin pour déterminer de manière précise les
compétences, prérogatives et champ d'intervention de chacun. En
tenant compte de la spécificité de la matière, les
gouvernements congolais et camerounais devaient promouvoir plus la
spécialisation de la justice répressive.
CONCLUSION
Page | 123
Au terme de nos analyses sur : « La justice
répressive et la protection de la faune sauvage au Congo et au Cameroun
», il nous revient à l'esprit cette phrase, quelque
peu, prémonitoire de Léonard DE VINCI : « Le jour
viendra où, le fait de tuer un animal sera condamné au même
titre que celui de tuer un homme »158. Il est vrai, au
regard de ce qui précède, que pour la plupart des pays africains
en général et pour le Congo et le Cameroun, en particulier, ce
jour est encore bien loin. Cependant, il faut néanmoins reconnaitre
qu'en peu d'années, de nombreux efforts ont été consentis
pour aboutir à des résultats, quand bien même
mitigés, mais quelque peu encourageants. En effet, au cours de la
période 1970-1992 (avec la Conférence de Stockholm et celle de
Rio de Janeiro) on a assisté à l'émergence d'un cadre
juridique et institutionnel orienté vers une volonté de
conservation des écosystèmes. Cette ère
écologique a été le point de départ dans mis
en place d'un régime pénal, bien qu'embryonnaire, portant sur la
protection de la faune sauvage en tant que valeur essentielle de la
biodiversité.
Aujourd'hui, ces deux Etats poursuivant une politique de
protection et de conservation des espèces et des espaces ont mis en
oeuvre une législation abondante qui est sans cesse en évolution.
Elle a été renforcée par l'internalisation des normes
internationales sectorielles et une grande coopération à travers
l'institution des organisations sous régionales, régionale et
même mondiale spécialisées dans la protection de la faune
sauvage.
Mais, dans cette prise de conscience des Etats sur la
nécessité de protéger les espèces et d'endiguer la
criminalité faunique qui ne cesse de prendre des proportions
considérables, le rôle de la justice répressive, pourtant
considérée comme un acteur irremplaçable et
déterminant en raison de l'effet dissuasif de ses sanctions, reste peu
visible et souvent décrié. En effet, pour bon nombre de ses
détracteurs, la justice répressive (prise dans tous ses maillons
et à tous ses niveaux) reste impuissante et désarmée face
à la montée du phénomène de la délinquance
faunique. En effet, le dispositif répressif contenu dans les textes de
droit interne et international, ainsi que la réponse pénale
apportée par ses acteurs restent embryonnaire, balbutiante et
très lacunaire. Aussi après toutes ces années, les
rapports sur l'état de la protection de la faune sauvage par la justice
pénale se concluent toujours par une ineffectivité des normes
pénales en la matière et une inefficacité de l'action des
acteurs concourants à la mise en oeuvre de cette réponse
pénale.
Pourtant, au regard des efforts mis en oeuvre par ces Etats,
il ne fait l'ombre d'aucun doute que l'un de leur objectif reste l'institution
d'un véritable « ordre public écologique » ou
d'une « justice pénale environnementale »
conçue comme un dernier rempart face la montée de la
criminalité faunique. C'est l'idéal d'un système
répressif, avec des règles d'application effective et des acteurs
mieux qualifiés et outillés, où les contrevenants dans le
domaine de la faune sauvage seront appréhendés et
sanctionnés. C'est là, à notre entendement, le sens de la
prophétie de Léonard DE VINCI.
158 DE VINCI (L), Prophéties-Précédé
de Philosophie et Aphorisme
Page | 124
Or, un tel objectif ne peut être envisagé et
atteint que si les Etats africains arrivent à conjuguer trois (3)
fondamentaux essentiels pour l'effectivité d'une réponse
pénale à savoir :
? Une population conscientisée sur les enjeux de la
protection et la conservation des
espèces fauniques dans le but de la faire participer
à l'oeuvre de répression de sorte qu'elle devienne un protecteur
primaire de la faune sauvage.
A ce titre, cette réflexion du très
estimé Nicolas HULOT, actuel Ministre français de la
transition écologique, peut se faire retentir comme une trompette :
« Nous sommes la partie consciente de la nature, et cette conscience
nous rappelle en permanence notre communauté d'origine avec tout ce qui
vit et plus encore notre communauté de destin. Le sauvage n'est pas une
marchandise, les qualités que nous devons mettre en place pour le
préserver sont les mêmes qualités dont nous devrons user
pour nous sauver nous-mêmes (...) Combattre le trafic des espèces
sauvages, c'est aussi assurer la sécurité de l'homo sapiens et de
sa descendance ! »159. Il en résulte donc que, pour
les populations même les plus riveraines des zones d'intérêt
cynégétique, les traditions coutumières et les besoins en
terme d'alimentation, de médecine traditionnelle et de troc, doivent
cadrer avec les impératifs de conservation, de protection et de gestion
durable de la faune sauvage et de leurs écosystèmes. Elles
doivent jouées aux cotés des pouvoirs publics, un rôle dans
la protection de la nature. Pour ce faire, un travail d'information, de
conscientisation doit se faire et surtout un large accès à la
justice pénale. Cette symbiose entre : la population, l'administration
et la justice pénale est le premier fondement pour une réponse
pénale efficace à la délinquance faunique.
? Ensuite, l'amélioration du cadre juridique
répressif qui ne doit pas être synonyme
de prolifération et suffocation des normes dont
l'efficacité reste douteuse du fait de leur illisibilité et
éparpillement dans plusieurs texte juxtaposés les uns sur les
autres. Il faut au contraire, une véritable mutation du droit
répressif congolais et camerounais. Un droit pénal
spécifique avec des incriminations, des sanctions et des règles
procédurales autonomes, mieux adaptées aux enjeux de la
criminalité environnementale à l'intérieur des
frontières et à l'extérieur. Pour ce faire, il est
nécessaire d'instituer un code de l'environnement qui sera la pierre
angulaire d'un nouveau régime de répression contre les atteintes
à l'environnement et partant à la faune sauvage. C'est le
deuxième fondement pour une réponse pénale efficace.
? Enfin, le renforcement des capacités de tous les acteurs
publics et privés oeuvrant
dans la mise en application des normes répressives
contre les atteintes à la faune sauvage.
A ce titre, il faut garantir une spécialisation de la
justice pénale en matière environnementale, en
générale, et dans le domaine de la conservation de la faune
sauvage en particulier. Cela passe nécessairement par l'institution au
sein des juridictions des parquets spécialisés ou des magistrats
référents. Mais aussi par un apport en termes de connaissance
approfondis du domaine à travers des séminaires, des formations.
On ajoutera aussi, la mise en place des unités de police
spécialisées.
159 HULOT (N), extrait de la nature du crime, Rapport
IFAW, septembre 2013, page.2
L'aspect le plus important est l'accessibilité devant
le juge répressif des Association de lutte pour la protection de la
faune sauvage, avec la possibilité de saisir le juge et de se constituer
partie civile chaque fois qu'une atteinte sera commise contre les
espèces fauniques. Mais aussi, une étroite collaboration entre
les différents acteurs dans la mise en oeuvre de la justice
répressive en reconnaissant et en respectant le rôle de chacun,
selon qu'il est définit par les textes. C'est le fondement pour garantir
une réponse pénale efficace à la criminalité
faunique.
Concluant le Que sais-je sur le Droit de
l'environnement, Jacqueline MORAND-DEVILLER reprenait ces mots de Goethe :
« Les deux grands ennemis de l'homme, sont la crainte et l'espoir
»160. Cette assertion transposée à l'action
de la justice répressive dans le cadre de la protection de la faune
sauvage, ne doit pas susciter un sentiment de crainte. Le Congo et le Cameroun
ont déjà réussie à poser des jalons textuels et
institutionnels pour une protection efficace des écosystèmes. Ce
qui reste à faire c'est plus d'effort, d'investissement et de prise de
conscience. C'est cet optimisme qu'expriment plusieurs spécialistes
africains en droit de l'environnement. Dans ce sens, le Professeur Maurice
KAMTO estimait que : « Mieux valent des normes inappliquées
qu'un univers a-juridique. L'expression du processus démocratique en
cours sur le continent africain a montré comment un droit dormant finit
par se réveiller lorsque la nécessité d'une
régulation normée des rapports sociaux vient à se saisir
de la conscience d'une communauté »161. C'est pour
dire que l'espoir d'une véritable protection effective et efficace des
espèces faunique par la justice pénale au Congo et Cameroun est
possible. Il ne s'agit pas d'un simple idéal, mais d'un objectif qu'il
faut atteindre le plus vite possible car, il en va de notre survie et celle de
nos descendants.
Page | 125
160 MORAND-DEVILLER (J), Le Droit de l'environnement
(Que sais-je ?), 8ème édition. Paris, Puf 2007,
page.123
161 KAMTO (M), Droit de l'environnement en Afrique,
Paris, EDICEF/AUPELF 1996, page.18
Page | 126
BIBLIOGRAPHIE I)-Ouvrages généraux
DAILLER (P), FORTEAU (M) et PELLET (A), Droit
international public. 8ème édition,
Paris, L.G.D.J. 1709 pages.
EMMANUEL ADOUKI (D.E), Le Congo et les traités
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l'environnement. Tome I, Paris, Saint Paul 2004, 392 pages.
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Afrique. Paris, Edicef, 1996. 415 pages. KISS (A),
Droit de l'environnement. Paris, Pedone 1989. 349
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Général (Mémentos). 19ème
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LARGUIER (J) et CONTE (P), Procédure
Pénale (Mémentos). 21ème
édition, Paris, Dalloz 2006. 327 pages.
MORAND-DEVILLER (J), Le droit de l'environnement (Que
sais-je ?). 8ème édition, Paris, PUF
2007. 127 pages.
PRIEUR (M), Droit de l'environnement.
5ème édition, Paris, Dalloz 2004. 1001 pages.
II)-Ouvrages spécifiques
CORNU (M) et FORMAGEAU (J), Le droit de la
forêt au XXIè siècle, aspects
internationaux. Paris, l'Harmattan 2004. 303 pages.
DELMAS-MARTY (M), Des écocrimes à
l'écocide : le droit pénal au secours de
l'environnement. Bruxelles, Bruylant 2015. 465 pages.
LECUCQ (O) et MALJEAN-DUBOIS (S), Le rôle du
juge dans le développement du droit
de l'environnement. Bruxelles, Bruylant
2008. 384 pages.
NERAC-CROISIER (R), Sauvegarde de l'environnement et
droit pénal. Paris, l'Harmattan 2005. 368 pages.
ONONINO (A.B), Lois et procédures en
matière faunique au Cameroun. 1ère
édition, Yaoundé, publié avec le concours de Laga et WWF,
2012. 201 pages.
PERRIN (M), Le statut pénal de
l'animal. Paris, l'Harmattan 2016. 110 pages.
REDON (M), Droit de la chasse et de la protection de
la faune sauvage : guide des infractions. 2ème
édition, Paris, l'Harmattan 2014. 154 pages.
Page | 127
III)-Thèses et mémoires
GAÏKO (V.C), La protection juridique de la
faune sauvage en République du Congo. Mémoire pour
l'obtention du Diplôme de l'Ecole Nationale d'Administration et de
Magistrature (D.E.N.A.M), option carrières judiciaires, filière :
Magistrature. Brazzaville Université Marien N'GOUABI 2011. 120 pages.
MIKALA (V.M.D), La protection de l'environnement
en droit répressif congolais. Mémoire pour
l'obtention du Diplôme de l'Ecole Nationale d'Administration et de
Magistrature (D.E.N.A.M), option carrières judiciaires, filière :
Magistrature. Brazzaville, Université Marien N'GOUABI 2012. 135
pages.
NANFAH DONFACK (A.S), Analyse des instruments
internationaux de lutte contre le trafic et le braconnage des espèces
menacées en Afrique Centrale : Le cas de l'éléphant et du
gorille. Mémoire pour l'obtention du Diplôme de
Master 2 en Droit international et comparé de l'environnement. Limoges,
Université de Limoges 2013. 90 pages.
NGONO BOUNOUNGOU (R), La réforme du
système pénitentiaire camerounaise : entre héritage
colonial et traditions culturelles. Thèse pour obtenir le
grade de Docteur de l'Université de Grenoble. Spécialité :
Administration Publique, Grenoble. Université de Grenoble le 26 juin
2012, 660 pages.
TCHOCA FANIKOUA (F), La contribution du droit
pénal de l'environnement à la répression des atteintes
à l'environnement au Benin. Thèse de Doctorat en
Droit Public, Maastricht. Université de Maastricht, soutenue le 15
novembre 2012. 445 pages.
SAKAÏ (L), La souveraineté permanente
sur les ressources naturelles et la protection internationale des Droits de
l'Homme. Thèse préparée dans le cadre d'une
cotutelle pour l'obtention du grade de Doctorat en Droit. Discipline : Droit
public, spécialité : Droit international public. Paris,
Universités de Paris 1 Panthéon-Sorbonne et Sao Paulo, soutenue
le 4 décembre 2014. 687 pages.
IV)- ARTICLES-RAPPORTS-COURS.
BONGUI (A.S.L) et MOKOKO IKONGA (J), Aires
protégées d'Afrique Centrale (République du Congo) Etat
2015. Rapport OFPAC. 149 pages.
CANIVET (G), LAVRYSEN (L) et GUIHAL (D), Manuel
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pénale des compagnies pétrolières. Chronique
in Lamy Droit pénal des affaires n°122, novembre 2012. Pages
1à 7.
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juge, in Colloques du Sénat, Luxembourg du 29 au 30
septembre 2006. 544 pages.
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des aires protégées : importance et implication pour
l'Afrique. Etudes juridiques de la FAO en ligne, septembre 2001.
32 pages.
HIOL HIOL (F), LARZILLIERE (A) et PALLA (F), Aires
protégées d'Afrique Centrale (République du Cameroun) Etat
2015. Rapport OFPAC. 149 pages.
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commerce illicite d'espèces sauvages sur la sécurité
mondiale, Rapport septembre 2013. 32 pages.
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SAND (P.H), Le rôle des organisations
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Cours UNITAR, Genève 1999. 113 pages.
V)-LES TEXTES DE DROIT INTERNE ET INTERNATIONAL.
A-TEXTES DE DROIT INTERNE
1-En droit interne congolais.
-Constitution du 24 juillet 1973 ;
-Constitution du 15 mars 1992 ;
-Constitution du 20 janvier 2002 ;
-Constitution du 25 octobre 2015 ;
-Loi n°7-62 du 20 janvier 1962 portant règlement en
matière d'exploitation de la faune ;
-Loi n°1-63 du 13 janvier 1963 portant code de
procédure pénale ;
-Loi n°48/83 du 21 avril 1983, définissant les
conditions de la conservation et de l'exploitation de la faune sauvage ;
Page | 129
-Loi n°003/91 du 23 avril 1991 sur la protection de
l'environnement ;
-Loi n°19-99 du 15 août 1999 modifiant et
complétant certaines dispositions de la loi n°02292 du 20
août 1992 portant organisation du pouvoir judiciaire ;
-Loi n°16-2000 du 20 novembre 2000, portant code
forestier ;
-Loi n°10-2003 du 6 février 2003 portant
transfère de compétences aux collectivités locales ; -Loi
n°37-2008 du 28 novembre 2008 sur la faune et les aires
protégées ;
-Loi n°06-2011 du 2 mars 2011 fixant les missions,
l'organisation et le fonctionnement de la Police nationale en République
du Congo ;
2-En droit interne camerounais.
-Loi n°96/06 du 18 janvier 1996 portant révision
de la constitution du 2 juin 1972 ;
-Loi n°94/01 du 20 janvier 1994 portant Régime des
Forêts, de la Faune et de la Pêche ;
-Loi n°2005/007 du 27 juillet 2005 portant Code de
Procédure Pénale ; -Loi n°2016/007 du 12 juillet 2016
portant Code Pénal ;
-Loi n°2006/015 du 29 décembre 2006 portant
Organisation judiciaire ; -Décret n°95/048 du 8 mars 1995 portant
Statut de la Magistrature ;
-Décret n°95/466/PM du 20 juillet 1995 fixant les
modalités d'application du Régime de la Faune ;
-Décret n°2005/099 du 6 avril 2005 portant
organisation du Ministère des Forêts et de la Faune ;
-Décret n°2005/495 du 31 décembre 2005
modifiant et complétant certaines dispositions du Décret
n°2005/099 du 6 avril 2005 portant organisation du Ministère des
Forêts et de la Faune ;
-Arrêté n°0648/MINFOF du 18 décembre
2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A, B et C ;
-Arrêté n°0649/MINFOF du 18 décembre
2006 portant répartition des espèces animales de faune en groupe
de protection et fixant les latitudes d'abattage par type de permis sportif de
chasse ;
-Arrêté n°0083/MINFOF du 6 février
2008 modifiant et complétant certaines dispositions de
l'Arrêté n°0648/MINFOF du 18 décembre 2006 fixant la
liste des animaux des classes de protection A, B et C.
Page | 130
B)-TEXTES DE DROIT INTERNATIONAL. 1-Textes
internationaux de portée mondiale
-La Convention relative aux zones humides d'importance
internationale, Ramsar 1971 ; -Déclaration de Stockholm de 1972 ;
-La Convention sur le commerce international des espèces
de faune et de flore menacées d'extinction (CITES), Washington 1973 ;
-La Convention sur la conservation des espèces migratrices
appartenant à la faune sauvage, Bonn 1979 ;
-Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement, Rio de Janeiro 1992 ; -La Convention sur la
Biodiversité (CDB), Rio de Janeiro 1992 ;
2-Textes internationaux de portée régionale ou
sous-régionale.
-La Convention Africaine pour la conservation de la nature et des
ressources naturelles, Alger 1968 et Maputo 2003 ;
-Traité relatif à la conservation et à la
gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique Centrale et
instituant la Commission des Forêts d'Afrique Centrale (COMIFAC),
Brazzaville 2005 ;
Page | 131
TABLE DE MATIERE
INTRODUCTION 11-21
Première Partie : LE CADRE JURIDIQUE
CONSACRE A LA PROTECTION PENALE DE LA FAUNE SAUVAGE ET LES OBSTACLES A SA MISE
EN OEUVRE
EFFECTIVE 23
Chapitre I : Existence d'un corpus juridique
adapté à la répression des atteintes contre
la faune sauvage .24
Section1 : Des normes répressives de droit
interne comme source cardinale pour la
protection des espèces fauniques par le juge
pénal 24-25
Paragraphe1 : Le régime de la protection
pénale de la faune sauvage en droit interne
congolais ..25
A)-Une protection pénale basée sur un
foisonnement de texte en constante évolution 25
1-L'évolution des normes répressives
protégeant la faune sauvage en droit interne
congolais..........................................................................................................25-29
2-L'hétérogénéité des
textes d'incriminations en matière
faunique..............................29-33
B)-Une protection pénale basée sur des
règles procédurales hétéroclites
.33
1-L'exclusivité accordée à l'Etat dans
le déclenchement des poursuites et la constitution de
partiecivile.......................................................................................................33-35
2-L'absence de responsabilité pénale des
personnes morales.....................................36-38
Paragraphe2 : Le régime de protection pénale
de la faune sauvage en droit interne
camerounais .38
A)-Une protection pénale
caractérisée une multiplicité des incriminations et
des
pénalités 38
1-La diversité des incriminations en matière
faunique............................................. 38
a- La complémentarité des textes instituant le
régime de protection pénale de la faune
sauvage..................................................................................................38-39
b-La diversité des incriminations en matière
faunique..........................................39-40
2-La multiplicité des pénalités en
matière faunique.............................................
40-41
B)-Les aspects procéduraux prévus par
la loi du 20 janvier 1994 .42
1-Les règles concourant à
l'établissement d'un procès-verbal de constatation des
infractions enmatière
faunique.................................................................................................42
Page | 132
a- Les règles de forme et de fond concourant à
l'établissement d'un procès-verbal en
matièrefaunique.................................................................................
42-43
b-La valeur probante du
procès-verbal..................................................................43
2-Les causes exonératoires de responsabilité et
d'extinction de l'action publique en matière
faunique......................................................................................................
43
a- La légitime défense en matière des
infractions fauniques 43-44
b- Les cas de battues administratives 44-45
c- Les causes d'extinction de l'action
publique......................................................45
Section2 : Des normes de droit international de
l'environnement comme source de
référence pour la protection de la faune
sauvage ..45-46
Paragraphe1 : La référence aux instruments
de droit international de l'environnement pour la
protection pénale de la faune sauvage ..46
A)-Les processus d'internalisation des instruments de
droit international sur la faune
sauvage dans le droit positif congolais et
camerounais 46-47
B)-Les différents instruments internationaux
sur la protection de la faune sauvage en
vigueur au Congo et au Cameroun .47
1-Les instruments internationaux de portée
universelle.............................................47-49 2-Les instruments
internationaux de portée régionale et
sous-régionale............................49
Paragraphe2 : L'exemple d'intégration d'une norme
de droit international de l'environnement
dans l'office du juge pénal en matière faunique :
La convention
CITES ...50
A)-La place de la convention CITES dans le
régime de protection de la faune sauvage au
Congo et au Cameroun 50
1-L'inscription des espèces fauniques sur les annexes
CITES et ses effets.....................50-51
2-La fixation des quotas sur l'exportation des espèces
menacées d'extinction et la délivrance
despermis
CITES..........................................................................................
52
B)-Les atteintes et sanctions à la
réglementation CITES 52-53
Chapitre II : Les obstacles à une application
effective du corpus juridique consacré à la
protection de la faune sauvage par la justice
répressive 54
Section1 : Les obstacles à la mise en oeuvre du
régime de protection pénale en droit
interne 54-55
Page | 133
Paragraphe1 : La transaction en matière faunique
: un obstacle majeur à la mise en oeuvre de
la répression pénale ..56
A)-La procédure de transaction mise en
place par les lois fauniques au Congo et
Cameroun .56
1-Un régime différencié entre
délinquant primaire et
récidiviste.................................56-57 2-Les niveaux
d'habilitation reconnus aux autorités administratives pour
transiger............57
B)-Les effets de la transaction en matière
faunique ...58
1-Les effets en cas d'exécution de la
transaction...........................................................58
2-Les effets en cas de non exécution de la
transaction.......................................... 58-59
Paragraphe 2 : Les faiblesses et insuffisances du
corpus juridique consacré à la protection de
la faune sauvage
|
59
|
A)-Un corpus juridique constitué des textes
d'incrimination épars et lapidaires
|
.59
|
1-Des textes d'incriminations
épars..................................................................
|
60
|
2-Des textes d'incriminations
lapidaires............................................................
|
61-62
|
B)-Un corpus juridique comportant des
règles procédurales et des incriminations
illisibles
entrainant des graves contrariétés
avec les textes répressifs généraux .62
1-L'illisibilité des règles
procédurales et des incriminations
fauniques........................62-63
2-Les exemples de contrariétés entre les
règles répressives sectorielles et les codes
répressifs
généraux......................................................................................................
63-65
Section2 : Les obstacles découlant de
l'application des normes internationales ..65
Paragraphe1 :
L'hétérogénéité et le caractère
évasif des normes de droit international de
l'environnement en matière de la protection de la faune
sauvage ...66
A)-Les conséquences de la profusion des
normes internationales de l'environnement en
matière de la protection de la faune
sauvage ..66
1-La juxtaposition entre les normes de portée
mondiale et celles de portée régionale ou sous
régionale......................................................................................................
66-67
2-Les risques de redondance et de confusion dans la
référence au droit international par le
jugepénal.........................................................................................................67-68
B)-Le caractère évasif des normes
internationales relevant du solf law ..68-69
Page | 134
Paragraphe2 : Le principe de la souveraineté
permanente sur les ressources naturelles comme obstacle à une
application efficace des normes de droit international de
l'environnement 69
A)-La libre exploitation par les Etats de leur
richesse et ressources naturelles : un principe
consacré par l'Assemblée
générale des Nations Unies .69-70
1-Un principe fondé sur la non-ingérence dans
les affaires intérieures d'un Etat...........70-71 2-Une composante du
droit des peuples à disposer d'eux
même..................................71-72
B)-Les droits de l'Etat issus du principe de la
souveraineté sur les ressources naturelles :
Les pouvoirs de dominium et d'imperium sur ses
ressources naturelles ...72
1-Un pouvoir de dominium sur la faune sauvage existant sur
son territoire...................72-73 2-Un pouvoir d'imperium sur la faune
sauvage existant sur son territoire.........................73
Deuxième Partie : LA MISE EN PLACE D'UNE
CHAINE PENALE EN VU D'UNE
REPONSE EFFICACE CONTRE LA CRIMINALITE FAUNIQUE
.75
Chapitre I : Une chaîne pénale
constituée des différents acteurs concourant à la
répression des infractions fauniques
76
Section1 : Les différents acteurs placés
en amont de la chaîne pénale dans la répression
contre la délinquance faunique .76
Paragraphe1 : La prépondérance du rôle
de l'Administration dans la lutte contre la
délinquance faunique ..76-77
A)-L'Administration de la faune : acteur principal
dans la lutte contre la délinquance
faunique 77
1-Les règles d'attribution de la qualité d'OPJ
avec des compétences spéciales aux agents de l'Administration de
la
faune......................................................................................78
a- Le model congolais : La Police de la faune et de la
chasse.............................. 78
b- Le model camerounais : Les Agents assermentés de
l'Administration en charge de la
faune..........................................................................................................79
2-Les prérogatives reconnus aux OPJ à
compétence spéciale dans la constatation des infractions à
la loi
faunique......................................................................................79
a -Les pouvoirs reconnus aux agents de la police de la chasse
et de la faune..............80
b- Les prérogatives reconnues aux agents
assermentés du Ministère en charge de la
faune................................................................................................................80-81
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B)-Le rôle assigné aux autres
administrations dans la constatation des infractions à la
loi
faunique 81
1-Les agents relevant des services de douanes aux
frontières................................. 81-82
2-Les agents des administrations déconcentrés
et décentralisés : le Préfet et le Maire ayant
qualité d'OPJ par attribution
légale..................................................................
82-83
Paragraphe2 : Les acteurs secondaires dans la lutte contre
la criminalité
faunique 83
A)-Les acteurs secondaires institutionnels de lutte
contre la criminalité faunique ..84
1-Les OPJ à compétence générale :
La Police nationale et la Gendarmerie
nationale......................................................................................................
84-85
a- Les Officiers de la police nationale comme acteurs
à compétence générale dans la
lutte contre la criminalité
faunique......................................................... 84-85
b- Les Officiers de la gendarmerie nationale comme acteurs
à compétence générale dans
la lutte contre la criminalité
faunique...................................................... 85
2-Les services d'INTERPOL : Une police au service de la lutte
contre la criminalité faunique
transnationale....................................................................................................86-87
B)-Les acteurs non institutionnels
relégués à un rôle passif dans la répression
des atteintes
à la faune sauvage 87
1-Les Associations agréées de protection de la
faune sauvage : un rôle dans la détection et la
dénonciation des atteintes à la faune
sauvage..........................................................88-89
2-Les ONG de protection de
l'environnement..........................................................89-90
Section2 : Les acteurs judiciaires placés en
aval de la chaîne pénale pour assurer la
répression des atteintes contre la faune sauvage
90-91
Paragraphe1 : Le Ministère Public : Un acteur au
centre de l'exercice de l'action publique en
matière des infractions contre la faune sauvage .91-92
A)-Les compétences du Ministère Public
et l'organisation des poursuites en matière des
infractions fauniques ...92
1-Les compétences du Procureur de la République
en matière des infractions à la loi
faunique......................................................................................................
92-93
2-L'organisation des poursuites contre les délinquants
fauniques........................... 93-95
B)-Les prérogatives reconnues au Procureur de
la République en matière
faunique 95
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1-Des prérogatives qui puisent leurs sources des
textes répressifs classiques (Code de
procédurepénale)..........................................................................................
95-96
2-Des prérogatives spécialement
prévues par les lois sectorielles en matière
faunique 96-97
Paragraphe2 : Le juge pénal comme dernier
rempart contre la criminalité
faunique ..97-98
A)-La répartition des compétences
entre les juridictions répressives en matière
faunique 98
1-La compétence ratione materiae ou en raison de la
nature de l'infraction......... 98-100
2-La compétence ratione loci ou en raison du lieu
de la commission de
l'infraction................................................................................................
100-101
B)-L'office du juge pénal en matière
des infractions à la loi faunique ...101
1-Les spécificités du déroulement du
procès pénal en matière
faunique.....................101-102
2-Les pouvoirs du juge pénal en matière des
infractions fauniques..................... 102-103
Chapitre II : Les causes de l'inefficacité de la
réponse pénale face à la criminalité
faunique 103-104
Section1 : Les causes endogènes à
la justice répressive 104
Paragraphe1 : L'absence d'une spécialisation
environnementale des acteurs de la justice
répressive ...104
A)-Le manque de magistrats
spécialisés sur des questions environnementales pouvant
être
désignés comme
référents ..105
1-Absence de magistrat spécialisés au niveau
des Parquets de la République et des Parquet
généraux...................................................................................................
105-106
2-Des juges non spécialisés dans le domaine
environnemental confrontés au principe de l'interprétation
stricte de la loi pénale
spéciale....................................................106-107
B)-Le manque de formation au sein des corps de la
magistrature sur le droit de
l'environnement .107
1-Manque de module portant sur le droit de l'environnement
au sein des Ecoles de
Magistrature........................................................................................................108
2-Rareté des séminaires de formation ou de
recyclage pour les magistrats en
fonction.........................................................................................................108-109
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Paragraphe2 : Le manque d'une véritable prise de
conscience sur les enjeux de la criminalité transnationale en
matière faunique au sein des juridictions des deux
pays 109
A)-Le manque d'effectivité des instruments
portant sur l'entraide judiciaire et les difficultés
dans l'exercice de la compétence universelle
109
1-L'ineffectivité de l'Accord de coopération
judiciaire entre les Etats membre de la CEMAC
du 28 janvier
2004..........................................................................................110-111
2-Les difficultés d'exercice de la compétence
universelle par les juridictions pénales
nationales...................................................................................................
111
B)-Absence d'une harmonisation des incriminations et
des sanctions relevant de la
criminalité faunique transnationale
..111-112
1-Absence d'harmonisation des incriminations à
caractère transnational en matière
faunique........................................................................................................112-113
2 Absence d'uniformisation des
sanctions............................................................113-114
Section2 : Les causes exogènes de
l'inefficacité d'une réponse pénale à la
criminalité
faunique .114
Paragraphe1 : Le manque de collaboration entre les
différents acteurs concourants à l'exercice
d'une répression contre la criminalité faunique
114
A)-Les problèmes liés à des
conflits de compétences entre les différents acteurs
oeuvrant
pour l'exercice d'une réponse pénale
contre les atteintes à la faune sauvage 115
1-Des conflits de compétence liés à
une sorte de cacophonie dans la répartition des rôles
organisée par les lois fauniques illisibles et
ambigües............................................115-116
2-Des conflits de compétence liés à
l'absence de coordination et de coopération entre les différents
acteurs dans l'exécution des tâches relatives à la
répression des atteintes
fauniques......................................................................................................116-117
B)-La relégation des associations
spécialisées dans le domaine de protection de la faune
à
un rôle passif ..117
Paragraphe2 : Les problèmes liés au
manque de moyens affectés aux acteurs pour assurer une
répression efficace 118
A)-Le manque de ressources à la disposition
de la justice répressive et les difficultés d'organisation du
milieu carcéral : autres causes d'inefficacité de la
réponse
pénale ..118
1-Le manque de ressources à la disposition de la
justice répressive : cause majeur de l'inefficacité de la
réponse pénale en matière du contentieux
faunique......................118-119
2-Les difficultés d'organisation du milieu
carcéral : une autre cause d'inefficacité de la réponse
pénale à la criminalité
faunique.............................................................119-120
B)-Le manque d'une politique de réinsertion
pour les délinquants fauniques
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120-125
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Conclusion
|
.123-125
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Bibliographie
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.126-130
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Page | 138
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