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Effets de débordement des politiques budgétaires en union monétaire hétérogène. Cas de l’union économique et monétaire ouest africaine (UEMOA).


par Ismaila SANGHARE
Université Cheikh Anta Diop Dakar (UCAD) - Doctorat (THESE UNIQUE) en sciences économiques 0000
  

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III.2.2- Les Fonctions de Réponses Impulsionnelles

Elles permettent d'identifier la nature des impacts sur les différentes variables spécifiées dans le modèle. Les résultats de ces fonctions confirment ceux de la décomposition de la variance de l'erreur de prévision. Ils permettent de tirer les enseignements suivants :

o Les chocs de dépenses publiques

Pour le taux de croissance économique : un choc budgétaire de dépenses publiques s'est traduit par un effet positif et instantané sur le taux de croissance dans l'union de 1980 à 2014. Son effet apparaît positif et cumulatif sur trois ans. Ainsi, un choc budgétaire à travers les dépenses publiques aura pour effet une stimulation de la croissance économique. Sur le plan théorique un tel résultat concorde bien avec la pensée keynésienne. Sur le plan empirique, ce résultat confirme celui de Dufrénot et al., (2007) et celui de Ndiaye et Konte (2012). Ils soutiennent que la pro-cyclicité des dépenses est liée à leur ajustement aux fluctuations de l'activité économique. À cet égard, ces auteurs déduisent que « durant les phases de croissance économique les dépenses augmentent fortement et qu'elles diminuent pendant les phases de ralentissement économique. Ce résultat n'est pas surprenant, en raison de l'absence de stabilisateurs automatiques dans les économies en développement, contrairement à ce que l'on observe dans les pays industrialisés ». Il recoupe également les travaux de Lylia et Zakane (2008) en Algérie pour qui les dépenses publiques produisent un effet positif sur le produit intérieur brut. Ce résultat justifie la rapide transmission des chocs affectant l'activité économique ce qui montre le caractère pro-cyclique de la politique budgétaire sur le taux de croissance économique.Gupta et al. (2005) ont utilisé des données de panel avec la méthode GMM pour analyser la composition des dépenses publiques sur la croissance économique dans un échantillon de 39 pays en voie de développement dans les années 1990. Les auteurs ont montré que les pays où les dépenses publiques sont plus utilisées pour le paiement de salaires tendent le plus vers des croissances faibles. Par contre les Etats qui misent davantage sur les dépenses en capital réalisent de meilleures performances en matière de croissance. En effet, selon Gupta et al., (2005) une hausse de 1% des dépenses en capital augmente la production de

0,1% à long terme, alors qu'un accroissement des dépenses de fonctionnement de 1% fait baisser la production de 0,5%. N'Guessan (2007) a utilisé la même spécification pour étudier la composition des dépenses publiques dans l'UEMOA. Il a montré que ces dernières sont déterminantes dans la dynamique économique de l'union. En effet, l'augmentation des dépenses publiques d'investissement est bénéfique pour la croissance.

Graphique 6 : Réponse du taux croissance réel suite à un choc de dépenses publiques

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour la dette publique : l'effet d'un choc de dépenses publiques se manifeste en deux temps : d'abord un effet nul et instantané dès la première année donc entre (0 ; 1). De telles conclusions procèdent de la nouvelle « théorie anti-keynésienne des finances publiques » (TAK). Aujourd'hui, largement répandue et dominante en Europe, la TAK prétend que les politiques budgétaires de consolidation,autrement dit de réduction des déficits publics par la baisse des dépenses ont généralement des effets restrictifs. Pour cette phase, la politique budgétaire devient contra-cyclique. Contrairement à Guidice et al., (2003) qui estiment, qu'une politique budgétaire de consolidation produirait des effets expansionnistes du déficit public. Dans la deuxième phase entre (2 ; 10), un effet devient cumulatif sur le reste du temps. La politique de relance budgétaire devient pro-cyclique. Ces résultats sont bien conformes à la situation de la zone euro face à la crise de l'endettement en Grèce et au Portugal. Contrairement à la zone UEMOA, en zone CEMAC, la politique budgétaire a eu des effets anti- keynésiens sur la période de 1993 à 2002, Ondo Ossa (2008). En zone CEMAC, la politique budgétaire n'avait pas produit d'effet favorable sur l'activité économique et les déficits publics étaient nuisibles à la croissance à long terme. En zone franc africaine, les gouvernements utilisent généralement l'arme budgétaire à des fins électoralistes et non à des fins de régulation. De plus, ils ne font pas d'effort en période de bonne conjoncture, car le déficit public y est nécessairement trop élève pour conséquence une forte accumulation de la dette publique.

Graphique 7 : Réponse de la dette publique suite à un choc de dépense publique

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les dépenses publiques elles-mêmes : un choc budgétaire affectant les

dépenses publiques entraine leurs réactions automatiques. Lorsqu'il s'agit d'unebaisse, cela se traduit par une chute ; donc un effet négatif sur la période de (1 ;

10). De tels effets concordent aussi avec la théorie keynésienne sur le caractère cyclique de la politique budgétaire.

Graphique 8 : Réponse des dépenses publiques sur elles-mêmes

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les recettes publiques : un choc de dépenses publiques sur les recettes produits un effet à deux temps : d'abord, l'effet devient positif dès la première année de (0 ; 1). Le régime de l'effet croît de façon exponentielle avant de connaître une baisse avec un régime plus faible sur deux périodes (2 ; 4) et après devient stable sur le reste (5 ; 10). Dans l'équation d'équilibre fondamentale, les dépenses publiques constituent une composante de l'absorption. Par conséquent selon le multiplicateur keynésien, toute réaction de celle-ci impacte positivement ou négativement la production. Or, les recettes publiques notamment fiscales dépendent du niveau de production donnée. Par ailleurs, il est structurellement reconnu que les recettes publiques croissent moins vite que les dépenses publiques ; donc la corrélation entre les deux variables reste positive, mais moins importante par rapport aux dépenses publiques.

Graphique 9 : Réponse des recettes publiques suite à un choc de dépense publique

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les importations : la fonction de réponse impulsionnelle montre bien qu'un choc budgétaire de dépenses publiques est négatif sur les importations pendant la période. D'abord, cela entraine une baisse des importations qui va fluctuer pendant la période (1 ; 4) pour se maintenir sur la période, mais toujours avec un signe négatif. En effet, le taux d'importation influence les dépenses publiques à travers le solde budgétaire de base par le canal d'éventuelle flambée des prix extérieurs qui induisent par voie de conséquence l'accroissement des prix intérieurs. Cet état de fait peut avoir des répercussions très néfastes sur les performances du solde budgétaire de base du fait du poids des subventions aux nombreuses entreprises publiques en difficulté. Ainsi, la hausse des prix du pétrole qui aurait eu un impact favorable sur le solde budgétaire (grâce à une hausse des taxes pétrolières) ne se traduit pas par une hausse des recettes. L'Etat intervient pour limiter les effets négatifs de ces évolutions sur le niveau de vie des populations (Dufrénot et al., 2007). Les chocs sur les dépenses publiques impactent également la variable importation.

Graphique 10 : Réponse des importations suite à un choc de dépense publique

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Par contre d'autres travaux infirment de telles analyses ; notamment celle de Lylia et Zakane (2008) qui ont montré dans leurs recherches que les dépenses publiques impactent positivement à travers une augmentation des dépenses publiques, mais cet impact reste instable. Qu'une augmentation des importations des dépenses publiques entrainerait une augmentation des importations ; compte tenu des besoins accrus de l'économie. Le volume des investissements sera plus important, entrainant l'acquisition des biens d'investissement et de consommation en volume plus important.

o Chocs de recettes publiques

Un choc de recettes publiques sur la croissance économique se traduit par une augmentation de l'offre de production par conséquent de la production sur toute la période. Le résultat est bien conforme à la théorie économique d'origine keynésienne. Puisque, la fiscalité influe sur les décisions des individus concernant l'épargne, le travail et les décisions des entreprises en matière de production, de création d'emploi. Ces décisions sont affectées non seulement par le niveau des impôts, mais aussi par la manière dont les différents instruments fiscaux sont conçus et combinés.

Graphique 11 : Réponse du taux croissance réel suite à un choc de recettes publiques

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Un choc de recettes publiques sur la dette entraine un accroissement de celle-ci via le déficit budgétaire et l'accroissement plus rapide des dépenses gouvernementales. Un tel résultat est bien conforme à la théorie économique qui stipule que face à l'augmentation plus rapide des besoins des gouvernements, toute diminution des ressources fiscales génère un creusement du déficit budgétaire de base.

Graphique 12 : Réponse de la dette publique suite à un choc de recettes publiques

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les dépenses publiques : un choc positif sur les recettes publiques agit positivement sur les dépenses publiques par le biais des impôts et des taxes dans le PIB. Ce qui est conforme à la théorie keynésienne et à la pratique, en ce sens que la dépense est au centre de la politique budgétaire de l'Etat, et l'exécution des dépenses se fait toujours en fonction du niveau des recettes réalisées.

Graphique 13 : Réponse de la dette publique suite à un choc de recettes publiques

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les recettes publiques elles- mêmes naturellement, on pourrait admettre que tout choc positif ou négatif va agir sur les ressources publiques ; soit à la hausse ou à la baisse selon le cas. Dans le cas d'un choc positif, c'est-à-dire une baisse du taux de pression fiscale, les recettes vont connaître une hausse dès la première période, avant de chuter à la suite d'un choc négatif, du simple fait que les gouvernements ne pourront résister face aux dépenses publiques qui connaissent généralement un accroissement plus rapide. C'est la période (2 ; 10).

Graphique 14 : Réponse des recettes publiques suite à un choc sur elles-mêmes

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

Pour les importations : un choc positif sur un intervalle de 10 périodes sur les recettes publiques se traduit par une amélioration significative des importations entre (1 ; 3) périodes avant de connaitre un déclin à partir de la quatrième période. Un tel comportement des importations s'explique en fait par la libéralisation de plus en plus poussée des régimes commerciaux. Les droits de douane ont tendance à baisser dans les pays en union avec le développement de zones de libre-échanges, d'union douanière et des accords de partenariats économiques futur à signer comme ceux en cours de négociation entre les pays de l'ACP et ceux de l'Union européenne. Actuellement dans les pays à faible revenu, un tiers environ des recettes fiscales non liées aux ressources naturelles proviennent des taxes sur les échanges (Gupta et Tareq, 2008). Ce qui suggère qu'une libéralisation accrue du commerce entrainerait une baisse des recettes publiques. Ainsi, cette baisse cumulative des recettes publiques incite les gouvernements à partir de la quatrième période (4 ; 10) à augmenter encore la fiscalité pour décourager les importations.

Graphique 15 : Réponse des importations suite à un choc de recettes publiques

Source : Auteur, à partir du logiciel Stata

En résumé des chocs de politiques budgétaires, les résultats issus des fonctions de réponses impulsionnelles confirment les résultats du test de causalité au sens de Granger. En réalité, les fluctuations des variables annoncent déjà la présence d'effets de débordement ou effet de contagion sur l'économie des pays en union. Cependant, l'efficacité des politiques budgétaires nationales dans l'absorption des chocs défavorables est limitée du fait de l'adoption du pacte de convergence de stabilité et de croissance depuis 1999. Les répercussions négatives sur la conjoncture interpellent de plus en plus l'instrument budgétaire plutôt que monétaire. Par ailleurs, les soldes budgétaires de base déficitaires de grandes amplitudes résultent du poids grandissant des subventions aux entreprises publiques en difficulté, et du fléchissement des recettes fiscales. Cela atteste la vulnérabilité des politiques budgétaires nationales vis-à-vis des chocs émanant soit de l'intérieur soit de l'extérieur. Pour compléter l'analyse de ce travail de recherche, il est intéressant de quantifier l'ampleur des effets de contagion et connaitre les voies par lesquelles la transmission se fait entre pays.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand