Les émoticônes : une nouvelle forme
de
ponctuation numérique
Mémoire
Master de Sciences du langage FLDL - Parcours
Ecrifore (ECRIture, FOrmation,
REmédiation)
Rédigé sous la direction de Mme le
professeur Julie LEFEBVRE
Année 2016/2017
Par Chloé LEONARDON
REMERCIEMENTS
J'aimerais adresser mes remerciements aux personnes qui m'ont
aidé dans la réflexion, la conception et la réalisation de
ce mémoire.
Je remercie en premier lieu ma directrice de mémoire
Julie Lefebvre pour ses réponses aux multiples questions que je me suis
posée, pour son soutien face à mes idées, ainsi que pour
le précieux temps qu'elle m'a accordé tout au long de
l'année.
Merci à ma famille et à tous mes amis proches de
m'avoir soutenu dans les moments de doutes, de complications et de remise en
question de ce travail. Merci à Eli, Olivier, Christine,
Séléna, Marine et à Benjamin pour le partage consenti de
leurs messages numériques.
Je remercie également le groupe des
Thébaïdes qui m'a parfois permis de discuter,
réfléchir et d'améliorer ce mémoire grâce
à leur suivi et à leur participation active jour après
jour. Merci particulier à Casey, Pierre, Nathan et à Matthieu
pour leur bienveillance.
Enfin, j'aimerais remercier mes collègues du Master
ECRIFORE Mélissa, Alexandra, Meriem, Mamadou, Margaux, Farida et en
particulier Sophie pour cette dernière année universitaire en
leur compagnie ainsi que pour les discussions linguistiques qui en ont
découlé.
SOMMAIRE
Introduction page 1
I - CADRE THEORIQUE
1) La communication numérique écrite :
l'émergence de codes complexes page 5
2) Un nouvel objet d'étude dans la communication
numérique
écrite : l'émoticône page 8
3) Les émoticônes et leur rôle
sémiotique : des indices, des symboles
ou des icônes ? page 10
4) Les rôles linguistiques de la ponctuation et son
lien
avec les émoticônes page 13
II - LE CORPUS
1) La constitution du corpus
a) Travailler sur des objets iconiques page 16
b) Quels scripteurs ? Quelles plateformes numériques ?
page 16
c) Quelles émoticônes comme objet d'étude ?
page 18
2) Les trois catégories d'étude du corpus page
19
III - L'ANALYSE DU CORPUS
1) Analyse du placement des émoticônes page 21
2) Analyse de la répétition et de l'accumulation
des émoticônes page 28
3) Analyse de la substitution de l'émoticône
à la ponctuation traditionnelle page 30
4) Bilan des analyses page 34
Conclusion page 36
Bibliographie page 38
Webographie page 40
Table des annexes : le corpus
1) Le placement des émoticônes dans la phrase
a) Emoticônes placées en début de phrase
page 41
b) Emoticônes placées en milieu de phrase page
43
c) Emoticônes placées en fin de phrase page
44
2) Répétition et accumulation des
émoticônes
a) Répétition des émoticônes dans
la phrase page 52
b) Accumulation des émoticônes dans la phrase
page 53
3) Substitution de la ponctuation par les
émoticônes
a) Substitution de la ponctuation page 54
b) Addition à la ponctuation page 59
1
INTRODUCTION
Facebook, Twitter, Instagram, MSN, Skype, Discord, Google
Plus, Skyblog, Tumblr, LinkedIn, Viadeo, Pinterest... Ces sites et
réseaux sociaux ont beau être récents (ils n'ont, pour les
plus vieux d'entre eux, pas plus de 20 ans), ils forgent et façonnent la
façon de communiquer en ligne, et par conséquent les codes
linguistiques, qui évoluent et s'adaptent à ces nouvelles formes
de littératie1 et de partage. C'est ainsi qu'il est possible
de retrouver parfois, dans les conversations en ligne, des utilisations
d'éléments linguistiques totalement nouvelles, notamment de la
ponctuation, comme l'utilisation des astérisques pour encadrer les
onomatopées (exemple : *Slurp*) ou encore pour signifier une action
produite par le locuteur.
Exemple d'utilisation des astérisques dans
une conversation en ligne pour signifier une action
Aujourd'hui, ces écrits numériques occupent une
place importante dans les activités des scripteurs et des lecteurs
actuels. Selon l'étude d'une équipe de chercheurs belges de
l'Université de Louvain :
Contrairement aux idées reçues et
véhiculées dans la presse et dans les milieux de
l'éducation, nous partons de l'hypothèse que l'utilisation des
nouveaux médias chez les classes d'âge de plus en plus jeunes ne
mène pas à une incompétence linguistique (baisse du niveau
de l'orthographe, méconnaissance des règles grammaticales...),
mais plutôt à une "pluricompétence" qui amènerait
chaque locuteur à jongler avec son code à chaque
1 La littératie est l'aptitude à comprendre et
à utiliser l'information écrite dans la vie courante, à la
maison, au travail et dans la collectivité en vue d'atteindre des buts
personnels et d'étendre ses connaissances et ses capacités.
(source : rapport de l'OCDE
http://www.oecd.org/fr/edu/innovation-education/39438013.pdf
)
2
changement de situation, d'interlocuteur et de médium de
communication. (source : site
vospouces.org)
Ces chercheurs, qui sont sociolinguistes, psychologues et
experts en traitement automatique des langues, ont créé un site
participatif,
vospouces.org, sur lequel
n'importe quel internaute peut apporter ses données, déposer ses
messages numériques, et ainsi attester de sa façon de communiquer
sur le web. Ils ont en effet décidé de prouver au grand public
grâce à cette collecte et à cette étude que
l'écriture numérique, que l'on retrouve par exemple sur les
réseaux sociaux, n'est pas une perte de repères syntaxiques,
lexicaux ou encore linguistiques, mais bien le développement d'un
nouveau code langagier, adapté à cette nouvelle forme
d'écriture.
Nous n'avons jamais autant eu besoin d'écrire, et ce de
façon quotidienne. La société, par le biais d'internet et
de la présence de plus en plus obligatoire des individus et des
entreprises sur les multiples réseaux sociaux, connaît une
expansion de sa littératie. Une littératie numérique,
toute particulière, qui implique de savoir lire et écrire sur de
nouveaux supports. Aujourd'hui, les scripteurs doivent être
compétents pour lire, écrire et participer au web. Ainsi, selon
Marie-José BERGER et Alain DESROCHERS (2011 : 250) : « il est
capital que les littératies numériques se développent chez
tout citoyen parce qu'elles sont intimement liées à
l'écrit et qu'elles incarnent l'écrit de demain ». De plus,
les conversations synchrones comme les chats et même les
conversations moins instantanées sur les réseaux sociaux
brouillent de plus en plus la frontière entre l'écrit et l'oral,
ce que FERRARA, BRUNNER et WHITTEMORE (1990) définissent comme «
l'écrit interactif ».
Certains linguistes, comme HALTE (2016), COLAS-BLAISE (2011),
MARCOCCIA (2004 et 2016) ou encore MARTIN (2007) se sont attelés
à la lourde tâche de se pencher sur ces nouveaux écrits
numériques et donc « interactifs », de plus en plus
présents dans nos vies. Les experts se penchent sur les nouvelles
règles linguistiques qui se démarquent et s'imposent dans ces
chats, ces messages et ces tweets. Parmi elles, des syntaxes
particulières, de nouveaux éléments lexicaux, des
nouvelles ponctuations (les termes de « tweets », les emprunts «
like » ou « DM » pour « Direct Message », ou encore
l'utilisation du retour à la ligne pour marquer l'hésitation) et
la présence d'éléments nouveaux, apparus avec
l'émergence de cette nouvelle littératie et surtout celle de
cette écriture interactive, aux besoins oscillants entre les codes de
l'oralité et ceux de l'écrit : les « émoticônes
».
3
Ces émoticônes, mot-valise
constitué par « émotion » et « icône »,
sont de plus en plus incontournables dans les conversations numériques.
Selon HALTE (2016 : 235) elles permettent de combler le besoin d'information
non-verbale manquant aux textes écrits et l'absence d'indices
paralinguistiques que nous avons à l'oral à travers les gestes,
les expressions faciales, les réactions corporelles ou encore la
prosodie ; en quelque sorte, les émoticônes servent à
reproduire un « face à face à l'écrit »
(MARCOCCIA, 2004). On les retrouve partout : dans les SMS, dans les messages
privés, sur les réseaux sociaux, dans les mails personnels et
parfois même professionnels. Maintenant, ces émoticônes, qui
sont également appelées smileys ou émojis
par leurs utilisateurs (les trois termes portent très souvent
à confusion pour les internautes), illustrent même les
écrits professionnels des community managers qui,
embauchés par des sociétés, des marques ou encore des
institutions, sont chargés d'animer et de fédérer la
communauté de ces entreprises sur internet en utilisant notamment leurs
réseaux sociaux.
Il n'est pas étonnant de retrouver ces « petites
images » dans les textes numériques. Ces émoticônes
nous semblent un phénomène linguistique nouveau, cependant le
modèle pictographique d'écriture est utilisé depuis sa
naissance. En effet, selon la conférence de J.-J. GLASSNER (2006), la
pictographie fut l'une des premières formes d'écriture,
utilisée en Mésopotamie pour désigner de nombreux concepts
et de nombreuses pensées à l'aide de signes concrets
représentant les objets de leur quotidien. Une sorte d'écriture
en « rébus » que l'on peut retrouver également en
Egypte ancienne. On peut donc se poser la question du rôle de
l'émoticône dans le discours : serait-elle un retour aux sources ?
Serait-elle à la base d'un nouvel alphabet, comme celui des
premières civilisations, ou a-t-elle un tout nouveau rôle
lié au développement de la littératie digitale ?
On peut observer une utilisation des émoticônes
qui semble réglementée, et qui semble surtout respecter la
linéarité des phrases et la composition des propositions
phrastiques. Malgré l'existence marquée d'ouvrages d'analyse
communicationnelle et/ou pragmatique des émoticônes, il reste rare
de trouver des textes qui expliciteraient leur rôle syntaxique. Nous
pouvons donc poser la problématique suivante : et si les
émoticônes étaient une nouvelle forme de ponctuation ? Si
nous arrivons à prouver que ces éléments, aux rôles
« expressif, d'ironie, d'humour, relationnels ou encore de politesse
» comme les définit MARCOCCIA (2016 : 96), sont
véritablement de nouveaux signes de ponctuation, ils ne seront pas sans
rappeler la proposition de Hervé BAZIN : six nouveaux « points
d'intonation » (Plumons l'oiseau, Grasset, 1966 : 142)
4
Les six points d'intonation proposés par
Hervé BAZIN
Avant de commencer l'étude qui nous permettra de
répondre à notre question, nous nous intéresserons au
préalable aux écrits linguistiques traitant de l'émergence
de la communication numérique écrite (appelée
également « écriture numérique »), notamment
ceux de MARCOCCIA (2016) et ceux de MARTIN (2007). Nous nous pencherons ensuite
sur le cas des émoticônes, éléments nouveaux issus
de cette même communication numérique avec les textes de
GAUDUCHEAU et MARCOCCIA (2007) et de HALTE (2016). Pour débuter une
analyse du rôle et du sens des émoticônes dans les
écrits numériques, nous nous attarderons sur leur
définition sémantique selon les théories de PEIRCE
expliquées par DELEDALLE (1979) et reprise par HALTE (2016). Enfin, nous
terminerons notre présentation théorique en présentant les
différents rôles de la ponctuation dans nos écrits avec les
oeuvres de CATACH (1994) et de DÜRRENMATT (2015). Après ces
approches, nous passerons à la présentation et à l'analyse
de notre corpus. Ce mémoire s'appuiera sur un corpus de 120 captures
d'écran de messages datant de moins d'un an et venant des deux
réseaux sociaux les plus utilisés en France selon l'institut
d'études Harris Interactive : Facebook et Twitter. Ces captures
d'écran, sur lesquelles seront visibles diverses utilisations des
émoticônes, cibleront à la fois l'usage privé et
personnel des réseaux sociaux et l'usage professionnel qu'en font
les community managers de grandes entreprises comme Leclerc, Carrefour
ou encore Castorama. Avec ce corpus, nous analyserons les
émoticônes selon leur placement dans la phrase (qu'elles soient
à son début, son milieu ou sa fin), selon qu'elles sont en
répétition (plusieurs fois la même émoticône)
ou en accumulation (plusieurs émoticônes différentes
à la suite), et selon qu'elles remplacent ou se cumulent à la
ponctuation générique (présence ou non de points,
virgules, points d'exclamation ou encore de points d'interrogation). Cette
analyse permettra une vision globale de l'utilisation et du rôle des
émoticônes dans les phrases des scripteurs, et surtout mettra en
relief leurs liens, existants ou non, avec la ponctuation telle que nous la
définissons et la connaissons.
5
I - CADRE THEORIQUE
Avant de passer à la présentation et à
l'analyse de notre corpus, il est nécessaire d'exposer les bases
théoriques de la pensée linguistique autour des domaines utiles
à notre étude. Nous nous attarderons en premier lieu sur
l'émergence de la communication numérique écrite afin de
situer le contexte du type de littératie de notre corpus. Nous nous
intéresserons ensuite à la naissance et aux
spécificités des nouveaux signes que représentent les
émoticônes, qui font l'objet de notre étude. Après
cela, nous tenterons d'établir une définition sémiotique
de ces émoticônes et de leur attribuer un sens linguistique en
tant que signes composant notre écriture. Enfin, nous nous concentrerons
sur les divers rôles de la ponctuation et leurs liens avec ceux des
émoticônes, qui nous ont amené à penser ce
mémoire.
1) La communication numérique écrite :
l'émergence de codes complexes
L'utilisation d'internet et des nouvelles technologies
numériques se répand dans les foyers, les métiers et dans
la vie de nombreuses personnes à travers le monde. Ce
développement et cette diffusion à très large
échelle d'un nouveau mode de communication entre les individus a
créé, de façon naturelle et attendue, une nouvelle
façon de communiquer : nous appelons cela la communication
numérique écrite.
Sa définition selon MARCOCCIA (2016 : 7) est la
suivante :
Cette dénomination [la communication numérique
écrite] renvoie aux nombreuses productions écrites
réalisées par le moyen de l'internet ou de la
téléphonie mobile. Les dispositifs de communication
numérique écrite les plus connus sont le courrier
électronique, le forum de discussion, la liste de diffusion, le tchat,
la messagerie instantanée, le SMS (ou texto), le blog, les plateformes
de réseaux sociaux. Le plus souvent, l'expression « communication
numérique écriture » (ou « communication écrite
en ligne ») réfère à des situations de communication
interpersonnelle et n'intègrent pas les médias numériques
de masse, comme le Web (dans sa version 1.0), qui relève plus d'une
problématique de publication que de communication.
Cette communication numérique écrite
dépend donc de plusieurs plateformes, toutes plus différentes les
unes que les autres, et toutes très utilisées par les usagers.
Cependant, cette nouvelle forme de communication est exposée, elle
aussi, à des habitudes et à des codes sociaux. Les SMS
sont souvent plus représentatifs du « jeune »
usager, le mail est attribué à un usage plus adulte, voire
professionnel, et les réseaux sociaux sont considérés
comme des usages « populaires ». Cependant, tous ces modes de
communication font écho à ce que représente internet
aujourd'hui pour dialoguer et partager sa parole : une méthode rapide,
facile et de plus en plus accessible pour tous. Lorsqu'un mode de communication
se crée, des règles et des codes viennent le régir, afin
d'y apporter de la stabilité et afin de lui permettre de se
répandre plus rapidement. Selon MARTIN (2007 : 12) :
Le micro-ordinateur, en tant que support matériel, a
modifié notre rapport à l'écrit. E...] A cette
particularité s'ajoute la création de néologismes,
d'acronymes ainsi que la traduction écrite des émotions à
travers un système iconographique.
Ainsi, la communication numérique écrite (ou
écriture numérique) connaît ses propres codes lexicaux,
syntaxiques ou encore pragmatiques et proxémiques (l'utilisation du
tutoiement et du vouvoiement n'est pas régie par les mêmes codes
qu'à l'oral ou que dans des écrits non numériques). Par
exemple, dans l'analyse de son corpus, MARTIN (2007 : 71) relève 38,57 %
de termes d'origine anglo-américaine et 20 % de structures linguistiques
transcrites phonétiquement. Ces chiffres dénotent une nouvelle
façon de communiquer et un nouveau lexique propre à cette
communication numérique écrite.
La particularité de cette communication réside
dans son rapport complexe et partagé entre les codes du langage oral et
ceux du langage écrit. Toujours selon MARTIN (2007 : 76), le code
linguistique sur l'Internet est un « langage hybride », qui «
n'a pas de l'oral la redéfinition permanente du discours, mais n'a pas
non plus de l'écrit la précision, la construction par avance, de
l'objet scriptural ». Les discours et messages numériques
n'obéissent donc pas aux mêmes règles linguistiques que
nous connaissons et qui opposent l'oral et l'écrit : l'écriture
numérique est le résultat d'un mélange entre
l'immédiateté du discours oral et la construction du discours
écrit.
Tweet comportant une hésitation
représentée par un bégaiement et le retour à la
ligne
Tweet comportant les marqueurs d'hésitation tels que
"heu", "ben" et tels que les points de suspension
Cette absence de « face à face », de «
réel » et d'un contexte oral classique amène
l'écriture numérique à se créer de nouveaux codes
qui tentent de combler ce manque : ainsi nous pourrons retrouver des
énoncés comme ci-dessous.
Tweet comportant l'interjection de rire "hihi"
7
Tweet comportant l'interjection de soulagement "aaah"
Dans ces quatre tweets, nous pouvons soulever un grand nombre
de marqueurs d'oralité que nous n'avons pas l'habitude de retrouver dans
les écrits non numériques. Nous remarquons alors l'utilisation de
certaines interjections émotionnelles (le rire avec « hihi »,
le soulagement avec « aaah ») ainsi que l'utilisation de marques
d'hésitation transcrites directement de l'oralité, comme le
bégaiement (« je... je », « heu ben heu ») ou encore
l'utilisation des points de suspension (qui symbolisent ici un temps de
silence) et du retour à la ligne (qui semble symboliser le même
temps de silence). La transcription de cette hésitation peut
paraître paradoxale une fois écrite ; puisque les
différences entre l'oral et le scriptural sont, selon COÏANIZ (1981
: 522) :
Oral
|
Scriptural
|
Il n'est pas possible de construire à l'avance les
|
Avant d'écrire, il est possible de prévoir, de
|
énoncés : on précise sa pensée au fur
et à mesure
|
construire à l'avance les énoncés,
l'écrit n'est
|
que l'on parle. L'oral est linéaire, il est donc
|
pas linéaire, et fait un usage différent du
temps.
|
fréquent de trouver ici :
|
[...]
|
- des répétitions ;
|
Il faut être précis, concis.
|
- des approximations ;
|
L'écrit est une langue construite.
|
- des hésitations ;
|
[Le scripteur] doit construire un récepteur fictif
|
- des retours à ce qui a été dit. - [...]
|
[...].
|
L'oral est une langue en construction [...] [qui] met le plus
souvent en présence un émetteur et un récepteur.
L'émetteur organise son discours en tenant compte de ce fait.
|
|
C'est là toute la complexité de cette nouvelle
communication numérique écrite : bien qu'elle reste une
communication scripturale par définition (il est possible de la
prévoir et de la construire, puisqu'on n'y utilise pas le temps de
façon linéaire), elle est marquée par des dispositifs que
l'on croyait jusqu'alors réservés à l'oralité (cf
les marqueurs d'hésitations vus ci-dessus).
8
Tout cela nous prouve en effet, comme le dit MONDADA (1999),
que « les discours médiatisés par ordinateur [...] obligent
à repenser le continuum existant entre oral et écrit, au lieu
d'opposer ces deux pôles ». C'est cette émergence d'une
écriture numérique hybride, ainsi que l'émergence
inhérente de ses codes, qui contribue à celle de l'utilisation
des émoticônes.
2) Un nouvel objet d'étude dans la communication
numérique écrite : l'émoticône
Afin de brouiller cette frontière entre oralité
et écriture, il est donc possible de rencontrer dans un message
numérique un mélange de textuel et d'iconique : cette
iconicité est représentée en grande partie par la
présence des émoticônes.
ANIS (2001 : 40) revient sur les débuts de l'usage des
émoticônes dans la communication numérique écrite
:
Les fameux « smileys » [...] remontent aux
débuts des réseaux. Quand les débats ont commencé
dans les « newsgroups » (forums), une phrase mal comprise pouvait
provoquer des « flame wars », en bon français des engueulades,
alors on pouvait ajouter un commentaire [...] Alors on fera comme ça :-)
. Il suffit d'avoir le cou souple, de tourner la tête un quart à
gauche, et un peu d'imagination pour y voir .
L'apparition des émoticônes permet alors aux
usagers des forums, et plus généralement d'internet, de
préciser leur discours et permettre à leurs discussions
d'être plus complètes et permettre aux informations qu'ils y
donnent d'être plus explicites.
Leurs formes et leurs appellations sont diverses. En effet, si
HALTE (2016) parle « d'émoticônes », nous remarquons
dans la citation précédente d'ANIS (2001) que le terme
utilisé est celui du « smileys ». Nous choisirons dans ce
mémoire d'utiliser le terme d' « émoticônes »,
car il est selon nous le terme le plus « englobant » : il peut ainsi
désigner toutes les sortes d'émoticônes, celles expressives
comme celles non expressives, contrairement à l'appellation «
smileys » qui ne semble désigner que les émoticônes
expressives (de par sa traduction, smile voulant dire « sourire
» en anglais). Pour ce qui est de leurs formes, qui ont grandement
évolué jusqu'à aujourd'hui, HALTE (2016 : 232)
précise :
Notons enfin que si, à l'origine, les
émoticônes sont constituées des caractères ASCII,
aujourd'hui, dans les réseaux sociaux et même dans les traitements
de texte, taper la suite de
9
caractères « :) », par exemple, transforme
automatiquement cette suite en pictogramme, comme suit : « ». [...]
Dans l'univers de la téléphonie mobile et de la communication par
SMS, il n'existe aujourd'hui plus que des pictogrammes. Les
émoticônes faites de signes de ponctuation n'y ont quasiment plus
cours, même si, curieusement, certaines marques de
téléphones portables proposent encore des banques
d'émoticônes constituées de signes de ponctuation.
D'un assemblage de signes de ponctuation (dénués
par ailleurs de tout leur sens et but premiers) à une image à
part entière, les émoticônes ont donc connu
l'évolution logique vers ce qu'elles cherchaient à
représenter : souvent des visages, mais aussi des animaux, des objets ou
encore des symboles.
L'intérêt de l'utilisation des
émoticônes dans les conversations et messages en ligne
réside dans sa compensation de l'absence d'indices non-verbaux dans la
communication écrite. Selon GAUDUCHEAU et MARCOCCIA (2007 : 43),
l'émoticône peut avoir « une fonction expressive, [être
un] marqueur d'ironie et d'humour, [avoir une] fonction relationnelle et
[être un] procédé de politesse ».
Exemple d'ironie marquée par une
émoticône Exemple d'ironie marquée par une
émoticône "visage
"paire d'yeux" souriant"
Nous voyons dans les deux exemples ci-dessus que l'ironie est
bel et bien appuyée par l'utilisation des émoticônes, qui
donnent alors le ton au message et explicite l'intention du scripteur. Il est
effectivement toujours compliqué, dans une conversation écrite
n'impliquant pas le face à face et tous ses indices paralinguistiques
(comme le ton de la voix, la position du corps, les gestes du locuteur ou
encore ses expressions du visage) de faire passer de façon
entière le message (et donc ses intentions) juste par la mise en place
de ses propres mots.
Les émoticônes, selon HALTE (2016 : 229), «
rentrent donc dans le cadre de la modalisation et plus
généralement des marques de subjectivité dans le discours
». Il serait donc important d'en définir les
caractéristiques linguistiques et d'analyser leur rôle
sémiotique dans la communication numérique écrite, tout
comme l'a fait au préalable HALTE (2016).
10
3) Les émoticônes et leur rôle
sémiotique : des indices, des symboles ou des
icônes ?
Pour analyser le rôle sémiotique des
émoticônes, nous nous penchons sur l'oeuvre de PEIRCE (1931-1935),
et plus précisément sur l'explication des propos de PEIRCE par
DELEDALLE (1979). Cette sémiotique permet de déterminer le sens
des émoticônes dans le discours, puisqu'elle donne une
définition concrète de la catégorisation des
différents signes du langage selon qu'ils sont des icones, des indices
ou encore des symboles.
Selon DELEDALLE (1979 : 24), la production de sens dans le
discours est un « processus triadique de trois sous-signes appartenant
respectivement aux trois dimensions du representamen [qui est le signe], de
l'objet et de l'interprétant ».
Modèle sémiotique de PEIRCE
(DELEDALLE
1979 :24)
Le signe et sa signification sont donc entièrement
dépendants de leur interprétant (celui qui l'entend/le lit) et de
l'objet qu'ils représentent. On peut donc en conclure qu'un « signe
n'est signe que s'il comporte les trois éléments suivants : un
representamen premier, un objet second et un interprétant
troisième » (DELEDALLE 1979 : 65).
Ces trois composants connaissent des relations qui
s'effectuent de trois manières différentes. Ainsi, il y a en tout
neuf « sous-signes » (trois pour le representamen, trois pour l'objet
et trois pour l'interprétant)
|
Priméité
|
Secondéité
|
Tiercéité
|
Trichotomie du representamen
|
Qualisigne
|
Sinsigne
|
Légisigne
|
Trichotomie de l'objet
|
Icône
|
Indice
|
Symbole
|
Trichotomie de l'interprétant
|
Rhème
|
Dicisigne
|
Argument
|
Les trois trichotomies fondamentales et les neuf types de
sous-signes (DELEDALLE 1979 : 25)
11
Il existe donc trois types de signes : le qualisigne, le
sinsigne et le légisigne. En voici les définitions selon
DELEDALLE (1979) :
Qualisigne : sous-signe premier de la dimension du
representamen. Le qualisigne est une qualité qui est un signe. Il ne
peut agir que réalisé dans un sinsigne.
Sinsigne : sous-signe second de la dimension du representamen.
Le sinsigne est une occurrence individuelle, l' « incarnation » ou la
« réalisation » d'un qualisigne.
Légisigne : sous-signe troisième de la dimension
du representamen. Le légisigne est une loi, une règle qui est un
signe. Tout signe conventionnel est un légisigne.
Le qualisigne est donc la représentation directe et
immédiate d'une réalité, de la qualité d'un objet.
Le sinsigne, lui, est la représentation du qualisigne dans un
espace-temps donné, et qui n'est donc pas infini. Le légisigne
étant un signe conventionnel, il est judicieux de dire que tous les
signes appartenant à une langue sont des légisignes, puisqu'ils
suivent la conventionnalité et les règles de ladite langue.
Nous pouvons alors dire, comme le démontre HALTE (2016
: 237), que les émoticônes sont des légisignes (puisqu'ils
sont des signes conventionnels et suivant certains codes) « qui se
manifestent en sinsignes » (puisqu'ils sont représentatifs d'un
objet limité dans le temps).
Pour définir le sens des émoticônes en
tant qu'objet, penchons-nous à présent sur la relation
signe-objet établie par PEIRCE. Comme nous pouvons le voir dans le
tableau ci-dessus, cette relation s'articule autour de trois façon de
représenter l'objet : l'icône, l'indice et le symbolique.
Selon DELEDALLE (1979), en voici les définitions :
Icone : sous-signe premier de la dimension de l'objet.
Ressemble à l'objet qu'il représente. Un portrait est une
icône.
Indice : sous-signe second de la dimension de l'objet. Renvoie
à l'objet qu'il représente parce qu'il entretient une relation
directe avec lui. Le symptôme d'une maladie est l'indice de cette maladie
parce que c'est la maladie qui en est la cause.
Symbole : sous-signe troisième de la dimension de
l'objet. Renvoie à l'objet qu'il dénote en vertu d'une loi,
d'ordinaire une association d'idées générales. L'objet du
symbole est, comme ce dernier, général. Il doit donc y avoir des
cas « existants » de ce que le symbole dénote, fussent-ils
imaginaires. Le symbole implique donc un indice d'une certaine sorte.
Pour illustrer le principe de l'icône, nous pouvons
prendre pour exemple les pictogrammes. Un pictogramme représentant un
avion, un feu ou encore un chat représente directement l'objet du
12
monde qu'il imite. Les émoticônes, certaines
pouvant d'ailleurs être assimilées à des
pictogrammes, sont des icônes (les
émoticônes « animaux », « nourriture » ou
encore « moyens de transport » par exemple, mais aussi celles
représentant des imitations, des mimiques faciales du visage).
Pour illustrer le principe de l'indice, qui représente
un objet qui n'est pas directement saisissable ou perceptible, nous pouvons
prendre pour exemple les émoticônes représentant une
émotion (comme l'émoticône « qui sourit »,
l'émoticône « triste », l'émoticône «
qui tire la langue »). Cette émotion est contenue dans le sens de
l'émoticône (et donc de l'objet) mais n'est pas explicite pour
autant. Enfin, pour illustrer le principe du symbole, nous pouvons prendre
l'exemple de n'importe quel mot d'une langue puisque ce mot renvoie à un
référent connu et associé à ce même mot. Le
mot « avion » dans une phrase représente l'avion en tant
qu'objet du monde, et ce de façon arbitraire. Il en va cependant de
même pour les liens plus « imaginaires » des objets, comme la
colombe blanche qui est le symbole de la paix (selon une loi, une association
d'idées).
HALTE (2016 : 239) conclue donc :
« Les émoticônes sont donc [...] des
légisignes, qui sont des icônes de mimiques faciales ou d'autres
éléments, et qui, de par ce statut d'icône, peuvent
facilement devenir des indices d'émotions. Le nom est donc bien trompeur
: l'émoticône n'est pas l'icône d'une émotion, elle
en est l'indice. ».
Si l'on s'en tient à toutes ces définitions,
l'émoticône pourrait à la fois être une icône
(ce qu'il est de façon générale), un indice (lorsqu'il
implique, par exemple, la compréhension d'une émotion), mais
pourrait également être lié à un symbole (lorsqu'un
scripteur utilise par exemple l'émoticône coeur « <3
», puisque, toujours selon HALTE (2016 : 239), cette
émoticône est l'icône d'un coeur et, le coeur étant
lui-même le symbole de l'amour, <3 devient alors indice du concept
d'amour).
Il est fréquent de lire, dans la littérature
linguistique, des auteurs comme HALTE (2013 et 2016), MARCOCCIA (2004 et 2016),
MARCOCCIA et GAUDUCHEAU (2007) ou encore MARTIN (2007) discuter du sens, de
l'intentionnalité des émoticônes et de leurs rôles
sémantiques, sémiotiques ou encore pragmatiques. Cependant, il
semble plus rare de trouver des études sur leur utilisation et leur
rôle dans la phrase, en tant qu'objet linguistique syntaxique. C'est
pourquoi notre étude s'intéressera ici à cette utilisation
syntaxique, plus particulièrement à son lien avec la
ponctuation.
13
4) Les rôles linguistiques de la ponctuation et son
lien avec les émoticônes
Avant de commencer notre analyse du corpus et notre
étude sur le lien entre émoticône et ponctuation
traditionnelle, il est nécessaire de revenir sur la définition et
le rôle de cette ponctuation. Ils sont notamment décrits dans les
textes linguistiques de CATACH (1994) et de DÜRRENMATT (2015).
La ponctuation est un fait linguistique qui, selon CATACH
(1994 : 48), est « essentiellement syntaxique », puisqu'elle est
intrinsèquement liée à la phrase et à ses
différents composants (et surtout, ses différentes parties
syntaxiques), mais également au texte en général
(où les phrases « s'imbriquent les unes aux autres par une
série d'enchâssements et de présupposés »
(CATACH 1994 : 49)). Il existe selon elle trois « ordres de signe » :
ceux qui sont utilisés pour ponctuer le texte (appelés « de
premier ordre »), ceux qui sont utilisés pour ponctuer la phrase
(appelés « de second ordre ») et enfin ceux qui sont
utilisés pour ponctuer les parties du discours et les mots
(appelés « de troisième ordre ») (CATACH 1994: 50).
Nous ne ponctuons donc pas nos textes au hasard : la position des signes de
ponctuation dépend du contenu informationnel du texte et de ses parties
syntaxiques, que nous devons toujours respecter. Par exemple, il serait
difficilement acceptable d'écrire une phrase du type : « *Ma,
mère a les plus beaux cheveux du monde » ou encore « *Ce
cadeau est ! Génial ». Dans les deux cas, un segment syntaxique a
été découpé en deux par un signe de ponctuation, ce
qui rend son apport sémantique à la phrase très
compliqué à analyser ou comprendre. Séparer le
déterminant du nom ou encore le verbe de son attribut constitue une
erreur linguistique qui nous semble, à tous, impensable et
dérangeante.
Outre le fait que la ponctuation se positionne souvent sur des
informations données par l'oralité (comme par exemple les pauses
de la voix dans la phrase et la prosodie), elle est également
régie par des règles graphiques entièrement liées
aux codes du langage écrit. CATACH (1994 : 53) écrit d'ailleurs
à ce sujet que « [la ponctuation] est à la fois la plus
orale et la plus visuelle des parties de l'écrit ». DÜRRENMATT
(2015 : 12) ajoute :
De fait, il est évident aujourd'hui que, s'il est vrai
que certains usages des signes de ponctuation correspondent bien à des
faits intonatifs spécifiques en cas d'oralisation du texte, les usages
non intonatifs sont si nombreux qu'il vaut mieux renoncer à envisager,
comme certains, que ponctuer a toujours à voir avec une sorte
d'oralité interne permanente et considérer que la ponctuation est
un système propre au langage écrit et qu'il s'agit donc de le
comprendre et de le décrire dans ce cadre seul ».
14
Ce point de vue linguistique est d'ailleurs appuyé par
l'utilisation des émoticônes qui font l'objet de notre
étude : outre le fait qu'elles soient des indices des émotions
des scripteurs, elles sont surtout un véritable produit de la
communication numérique écrite et, s'il s'avère qu'elles
peuvent être comparés à des signes de ponctuation, alors
elles se distinguent d'une utilisation et d'une production aux origines
exclusivement orales.
La ponctuation, bien qu'ayant des fonctions précises
telles qu' « agencer » le texte, « distinguer » les
éléments du texte ou encore « hiérarchiser » les
informations (DÜRRENMATT 2015 : 24), est avant tout également le
marqueur d'une certaine intensité dans le texte et permet d'en modaliser
son contenu informationnel. Cette modalisation permet d'illustrer le
degré d'adhésion et d'intensité du locuteur (et donc ici,
du scripteur) par rapport à son énoncé.
Fonction :
obliger à/aider à
|
Agencer
|
Distinguer
|
Hiérarchiser
|
Modaliser
|
Virgule
|
++
|
++
|
++
|
|
Point-virgule
|
++
|
|
|
|
Deux-points
|
++
|
+
|
|
|
Point
|
++
|
+
|
+
|
|
Point d'interrogation
|
+
|
|
|
++
|
Point d'exclamation
|
+
|
|
|
++
|
Point de suspension
|
+
|
+
|
|
+
|
Blanc
|
|
++
|
|
|
Tiret
|
+
|
+
|
++
|
+
|
Parenthèses
|
|
|
++
|
|
Guillemets
|
|
++
|
|
+
|
Certains signes de ponctuation et leurs rôles. Source
: DÜRRENMATT (2015 : 25)
Cette notion de modalisation par les signes de ponctuation est
importante à retenir puisqu'elle nous permet de commencer à faire
le lien avec notre objet d'étude. Les émoticônes, dont on
connaît déjà la grande valeur émotionnelle,
pourraient alors se rapprocher syntaxiquement des signes de ponctuation dits
« modaux » (comme le point d'exclamation, le point d'interrogation ou
encore les points de suspensions). DÜRRENMATT (2015 : 100) propose
même de voir les signes de ponctuation modaux comme des icônes :
« [ils sont] autant linguistiques qu'extralinguistiques ».
15
Notre hypothèse de travail sera donc la suivante : les
émoticônes sont une nouvelle forme de ponctuation
numérique, essentiellement modale et suivant des règles qui se
rapportent à celles de la ponctuation traditionnelle telle que la
décrivent CATACH et DÜRRENMATT.
16
II - LE CORPUS
Afin de répondre à la question que nous avons
soulevée sur le possible lien entre l'utilisation des
émoticônes et une hypothétique nouvelle marque de
ponctuation actuellement à l'oeuvre dans le domaine des écrits
numériques, nous proposons un corpus composé d'une
sélection de messages d'internautes contenant une ou plusieurs
émoticônes. Dans cette partie, il sera question d'exposer et
d'expliciter les choix qui ont été fait pour la constitution du
corpus : nous présenterons notre volonté de travailler avec des
captures d'écran, nous parlerons du choix des plateformes
numériques (Twitter et Facebook) et de la sélection des
scripteurs (60 tweets professionnels et 60 tweets personnels
rédigés par un large panel de personnes), puis nous verrons quels
types de signes, et donc d'émoticônes, ont été
choisi pour composer le corpus d'étude. A la suite de cette
présentation détaillée, nous introduirons notre travail en
présentant les trois catégories d'études que nous avons
mises en place pour vérifier notre hypothèse.
1) La constitution du corpus
a) Travailler sur des données
iconiques
Afin de restituer au mieux les émoticônes dans
leur support d'origine (à savoir les pages numériques), et
surtout de retranscrire les émoticônes dans leur forme de base
(à savoir souvent celle de petites images insérées dans
les phrases des internautes), notre corpus sera constitué de captures
d'écran faites par ordinateur. Ce choix d'un corpus uniquement
composé d'images numériques me semble le plus adapté
à mon étude ainsi que le plus représentatif de
l'utilisation des émoticônes sur internet, puisqu'il est crucial
que l'objet de mon étude engage la dimension iconique qui lui
correspond.
b) Quels scripteurs ? Quelles
plateformes numériques ?
Au début de notre travail, il était question de
rechercher un grand nombre de messages numériques de nature
professionnelle mais également de nature personnelle, afin de les
comparer tout au long de l'analyse du corpus. Il s'est avéré
illogique, en relisant notre problématique, de vouloir à tout
17
prix présenter une comparaison pour répondre
à notre question principale : celle du rapport qu'entretient
l'utilisation des émoticônes avec la ponctuation traditionnelle.
Afin de répondre à cette question d'ordre général
sur l'un des rôles de ces émoticônes, il nous fallait, avant
même de penser à débuter des comparaisons, analyser notre
corpus et en tirer les conclusions nécessaires à une possible et
future comparaison de quelque nature qu'elle soit.
Ce corpus sera donc composé de tweets trouvés
sur le réseau social Twitter et de posts trouvés sur le
réseaux social Facebook. Les tweets sont des messages
très courts limités à 140 caractères que l'on peut
poster sur le réseau Twitter, tandis que les posts sont les messages
(eux non limités en caractères) que l'on peut poster sur le
réseau Facebook. Nous avons décidé de cibler notre
étude sur des éléments postés sur des
réseaux sociaux, puisqu'ils sont d'une grande accessibilité et
que, selon les chiffres Médiamétrie de 2017, il y aurait
plus de deux milliards de personnes qui utilisent les réseaux sociaux
dans le monde. Cela représente 31 % de la population mondiale, sur un
ensemble de près de 3,5 milliards de personnes qui utilisent internet
(soit 46 % de la population mondiale). Les réseaux sociaux sont donc un
lieu de prédilection pour l'écriture numérique, surtout en
France, où plus d'un français sur deux est membre d'au moins un
réseau social. Ensuite, le choix des deux plateformes n'est pas
aléatoire : ce sont, en France, les deux réseaux sociaux les plus
utilisés par les internautes (en excluant ceux qui ciblent les
vidéos et les photos comme Youtube et Pinterest), avec
8,4 millions de visiteurs par jour sur Facebook et 600 000 visiteurs
par jour sur Twitter. Ces réseaux sont donc les plus propices
à nous donner une idée très générale de
l'utilisation des émoticônes ; ils sont les plus
représentatifs des messages numériques que peut rédiger
n'importe quel internaute.
Notre corpus est donc constitué de 120 captures
d'écran. Sur ces 120 captures, 60 sont d'origine professionnelle et 60
sont d'origine personnelle. Nous appellerons « message professionnel
» tout message numérique rédigé au nom d'une
entreprise (souvent par son community manager). Quant aux messages
dits « personnels », nous nous intéresserons aux messages
Facebook et Twitter rédigés par six internautes
bien définis, qui ont entre 19 et 45 ans et dont font partie trois
hommes et trois femmes. Cette sélection variée en terme
d'âge et de sexe nous permettra une étude et une analyse la plus
étendue possible du corpus, en lien avec notre problématique qui
cherche à identifier les grandes régularités d'utilisation
des émoticônes dans l'écrit numérique
d'aujourd'hui.
Tous les messages personnels resteront anonymes pour
préserver l'identité des personnes ayant accepté de
collaborer à ce mémoire.
18
c) Quelles émoticônes comme objet
d'étude ?
Pour élaborer ce corpus, il m'a fallu me poser un grand
nombre de questions au sujet de ces émoticônes, qui sont
présentes dans les écrits numériques sous plusieurs
formes. Ainsi ai-je décidé de ne pas faire de différence
entre les émoticônes représentées par une suite de
signes de ponctuation (les :-), ;-) et autre <3) et les
émoticônes représentées par les images
communément appelées « émojis », puisque les
deux jouent, selon nous, le même rôle et ont la même
utilisation, l'un étant l'ancêtre de l'autre (comme vu
précédemment dans notre cadre théorique). Afin d'avoir
conscience de l'entièreté des émoticônes existantes,
j'ai également consulté un grand nombre de « dictionnaires
» et claviers d'émoticônes en ligne. En
général, ces sites classent les émoticônes par
« thème », comme « personnes/visages », «
nature/animaux », « nourriture », « loisirs », «
paysages », « objets », « symboles »... En voici donc
des exemples :
Exemples de claviers d'émoticônes
rangées par thèmes (source :
http://www.iemoji.com/)
19
Il existe également une liste de «
définitions » des émoticônes sous forme de signes de
ponctuation, sur laquelle nous nous sommes basés pour pouvoir les
repérer et les identifier en tant que telles. Cette page internet liste
les différentes émoticônes rédigées «
manuellement » et les significations sémantiques et
émotionnelles auxquelles elles correspondent (selon l'auteur de la page
http://chezbluejo.chez.com/trucs/smiley.html).
Liste des émoticônes et leurs
définitions (source :
http://chezbluejo.chez.com/trucs/smiley.html)
Tous ces éléments seront donc
considérés comme des « émoticônes » et les
messages dans lesquels ils apparaîtront seront ainsi relevés comme
éléments du corpus.
Nous ferons également parfois la distinction entre les
émoticônes à indices émotionnels (notamment les
émoticônes représentant un visage) et les
émoticônes uniquement iconiques (n'impliquant pas d'indice)
pouvant être comparées aux pictogrammes.
2) Les trois catégories d'étude du
corpus
Pour débuter notre analyse et amorcer une
réflexion sur le lien hypothétique entre la ponctuation et
l'utilisation des émoticônes dans les écrits
numériques, nous classerons les données du corpus selon trois
catégories d'études, catégories qui peuvent être
dites « classiques » quant à l'étude des signes de
ponctuation (voir CATACH, 1994). Nous analyserons donc les
émoticônes selon leur position dans la phrase, puisque
l'utilisation de la ponctuation traditionnelle implique de connaître
les
20
différents placements (et donc les différents
rôles syntaxiques) des signes de ponctuation dans la phrase. Nous
étudierons ensuite les accumulations et les répétitions
d'émoticônes dans les phrases, puisque ce sont deux utilisations
que l'on peut retrouver dans le cas de la ponctuation traditionnelle, notamment
avec les signes de ponctuation à modalité importante. Enfin, nous
nous intéresserons à la substitution des émoticônes
à la ponctuation « classique » : il sera alors
déterminant de déceler une volonté du scripteur de
remplacer la ponctuation traditionnelle par l'usage même d'une
émoticône. Ces catégories d'étude sont
traditionnellement étudiées pour les signes de ponctuation
traditionnels ; si les émoticônes rassemblent ces
propriétés considérées comme celles
intrinsèques aux signes de ponctuation dits « traditionnels »,
alors elles peuvent être considérées comme des signes de
ponctuation de façon linguistique.
· Le placement des émoticônes dans les
phrases
En premier lieu, les émoticônes seront
classées et analysées selon leur position dans la phrase. En
effet, si l'on rapproche ces nouveaux éléments linguistiques de
notre ponctuation traditionnelle, ils devraient alors respecter des
règles de positionnement et de respect de l'unité syntaxique.
Comme le dit CATACH (1994 : 54) :
« De même que les blancs sont les porteurs
(portées) du texte, les signes de ponctuation doivent être
regardés comme les porteurs (portées) des segments syntaxiques.
Ils les précèdent, les suivent ou les entourent, mais ce sont
aussi et toujours des signes de segments (ils sont suprasegmentaux, bornes
comprises). »
Les émoticônes devraient donc, selon notre
hypothèse, être situées soit en début de phrase,
soit en milieu de phrase, soit en fin de phrase. Dans tous les cas, elles sont
censées respecter la linéarité de la phrase et ne surtout
pas créer une séparation entre deux termes liés ou encore
entre deux éléments au sein même d'une proposition.
· La répétition et l'accumulation des
émoticônes
En second lieu, nous nous pencherons sur la question de la
présence d'une répétition ou d'une accumulation des
émoticônes dans les phrases, autrement dit nous essaierons de voir
s'il est possible de rencontrer une même émoticône
utilisée plusieurs fois à la suite, ou encore s'il est possible
de trouver des messages numériques au sein desquels plusieurs
émoticônes différentes se
21
suivent. Cela se rattache, encore une fois, à ce que
propose CATACH (1994 ; 63) au sujet des signes de ponctuation à valeur
modale :
Il [le point d'exclamation] peut, comme le point
d'interrogation, s'employer seul, double ou triple, pour accentuer la
modalité affective. Utilisés ensemble, sans aucun texte, ils
ajoutent leurs motivations souvent très proches (théâtre,
bandes dessinées).
L'existence de la répétition et de
l'accumulation des émoticônes dans les écrits
numériques prouveraient alors leur appartenance à une
ponctuation, s'il en est, de valeur modale et affective.
· La substitution à la ponctuation
traditionnelle
Enfin, l'ensemble des données du corpus fera l'objet
de l'étude de la substitution des émoticônes à la
ponctuation : nous analyserons les données dans lesquelles
l'émoticône remplace la ponctuation traditionnelle ainsi que
celles dans lesquelles l'émoticône se cumule à cette
ponctuation. Autrement dit, nous ferons la distinction entre l'utilisation de
l'émoticône qui « remplace » la ponctuation
traditionnelle (pas de présence de point, de point d'exclamation ou
encore de virgule mais ponctuation à leur place et aux mêmes
positions) et l'utilisation de l'émoticône qui se rajoute à
notre ponctuation traditionnelle (présence combinatoire d'une
émoticône auprès d'un signe de ponctuation).
S'il s'avère que les émoticônes
remplacent bel et bien la ponctuation traditionnelle dans la plupart des
phrases, alors nous pourrons dire que ces émoticônes ont une
fonction similaire à celle de la ponctuation qu'elles remplacent
syntaxiquement.
22
III - L'ANALYSE DU CORPUS
Nous allons donc analyser notre corpus au prisme de trois
angles d'analyse ciblant l'utilisation des émoticônes : leur
placement dans la phrase, leur utilisation en accumulation et en
répétition, et enfin le pourcentage de données du corpus
qui présentent une substitution des émoticônes à la
ponctuation classique. Nous commenterons au fur et à mesure leur lien,
pour le moment hypothétique, avec la ponctuation traditionnelle
décrite par les linguistes.
1) Analyse du placement des émoticônes dans
la phrase
Lors de l'analyse du placement des émoticônes
dans la phrases, nous nous attarderons sur la répartition du corpus en
trois catégories : les émoticônes en début de
phrase, les émoticônes en milieu de phrase et les
émoticônes en fin de phrase. Nous considérerons la phrase
selon la définition de CATACH (1994:124), c'est-à-dire comme un
« ensemble syntaxique comportant une ou plusieurs propositions ».
Nous nous pencherons également sur le degré et le type de
modalité donnés à ces émoticônes, et leurs
liens avec les positions qui leur sont attribuées.
En classant nos 120 données de corpus2
selon le placement des émoticônes dans la phrase, nous obtenons ce
tableau de répartition, que nous allons commenter :
Tableau représentatif du placement des
émoticônes dans la phrase
· Les émoticônes placées en
début de phrase
Sur les 120 éléments du corpus, et surtout sur
les 131 éléments classés selon le placement des
émoticônes dans les phrases (certaines données apparaissant
dans plusieurs catégories puisque utilisant plusieurs
émoticônes), nous en trouvons 18 qui contiennent une
émoticône placée en début de phrase. Cela
représente environ 14 % du corpus. Nous retrouvons plusieurs
utilisations et cas de figures de l'émoticône lors de
l'étude de ces 18 données.
2 Toutes les données du corpus peuvent être
retrouvées dans les annexes.
Nous pouvons remarquer sur les exemples (1), (3), (4), (5) et
(6) que l'émoticône placée en début de phrase se
reflète à la fin de celle-ci, dans un encadrement en miroir de la
phrase.
Exemple (6)
Cette utilisation des émoticônes n'est pas
à relier à notre ponctuation traditionnelle, qui ne fonctionne
pas sur un modèle d'encadrement en miroir de la phrase. Bien qu'une
phrase à la suite d'une autre pourrait sembler être «
encadrée » par deux points, elle ne l'est cependant pas lorsqu'elle
est l'unique phrase d'un message. Il existe des signes de ponctuation qui
encadre des propositions (comme les parenthèses ou encore le tiret),
mais il est rare de les trouver dans un usage d'encadrement d'une phrase
entière comme ici, puisque selon CATACH (1994 : 73) « les
parenthèses servent à intercaler, à n'importe quel endroit
de la phrase, [...] un segment ». Ces signes n'ont pas, de plus, une
fonction modale aussi forte que les émoticônes que nous pouvons
observer ici (comme nous avons pu le voir précédemment dans le
tableau des rôles des signes de ponctuation de DÜRRENMATT). Nous
pouvons néanmoins souligner que les phrases modales espagnoles
(exclamatives et interrogatives) sont, elles, encadrées par deux signes
similaires de ponctuation (le premier étant cependant
présenté à l'envers). Puisque nous étudions
uniquement le lien des émoticônes avec la ponctuation
traditionnelle française, nous nous le prendrons pas en compte.
Sur les exemples (16), (17) ou encore (18), qui proviennent
tous de messages numériques écrits à titre professionnel
par trois entreprises différentes, nous pouvons noter une utilisation
codifiée de l'émoticône représentant une main avec
un doigt pointé afin de renvoyer la phrase à un lien URL.
Exemple (18) Exemple (17)
Exemple (16)
23
Cette utilisation n'est pas non plus celle que l'on fait de
notre ponctuation traditionnelle, ces exemples témoignent donc eux aussi
d'une utilisation des émoticônes propres à d'autres codes
d'écriture.
Les exemples (2), (7), (12), (17), (44), (46), (91) et (57)
témoignent d'une volonté du scripteur à préciser le
thème/sujet de sa phrase avant même de l'écrire.
On voit dans l'exemple (2) que l'émoticône
placée en début de phrase représente un écouteur,
duquel sortent des notes de musique. Le scripteur veut ainsi préciser
que le message qui suit cette émoticône sera des paroles de
chanson. De même, dans l'exemple (17), l'émoticône en forme
de coeur précise bien au lecteur du message que ce qui suit concernera
un « coup de coeur » ; ces émoticônes servent donc une
« information doublée » : l'information est présente
sous la forme iconique mais également sous la forme écrite.
Cependant, ce genre d'iconicité sémiotique ne se retrouve pas, en
français tout du moins, dans l'utilisation traditionnelle de la
ponctuation.
Enfin, certaines phrases débutent par un
émoticône qui a le rôle d'indice émotionnel
vis-à-vis du message auquel le scripteur répond, ou à sa
propre phrase précédant celle-ci. Les exemples (89), (95) et
(105) nous montrent une utilisation des émoticônes sous forme
d'indices iconique représentant des réactions.
24
Exemple (89)
Exemple (105)
25
Cela n'est pas sans rappeler certaines tentatives de
transcriptions des émotions au XVIIIe siècle, comme en donne
l'exemple DÜRRENMATT :
.... ??!!!?::? Qu'ai.-.je... vu ???........ Ciel !!!!!
où.. sont :::: ces... échaffff..ffauds ???..... !!!! Cet...
app..pareil... de.. mort. ::., ce.. glai..ve.. ?!!!:. ces.. bourr..reaux...
:;.
DÜRRENMATT (2015 : 101) explique que ces signes de
ponctuation, notamment les points d'exclamation, ont une valeur autant
expressive qu'iconique.
· Les émoticônes placées en
milieu de phrase
Sur les 131 données classées selon la position
de l'émoticône dans la phrase, seulement 6 contiennent des
émoticônes placées au milieu de la phrase. Cela
représente moins de 5 % de cette catégorie du corpus. Nous avons
dans cette catégorie les exemples (13), (78), (79), (81), (84) et
(103).
Nous pouvons très nettement voir deux utilisations
différentes de l'émoticône en milieu de phrase.
Dans l'exemple (13), l'émoticône est
placée derrière le nom « RedCup » et l'illustre. Nous
avons donc aussi l'icône représentant le gobelet dans lequel on
boit le café, mais elle est également rouge ; au-delà
d'une icône, nous pouvons même penser à une image, une
description imagée, fidèle et concrète du mot qui la
précède : nous pouvons alors dire qu'il s'agit d'un pictogramme.
L'émoticône sert alors une double dénomination de l'objet
de la phrase, pour le mettre en relief et insister dessus. Cette utilisation
est donc bien loin de celle de la ponctuation française traditionnelle,
qui n'est pas utilisée à ces fins.
26
Dans l'exemple (84), cependant, il est flagrant que les
émoticônes sont utilisées d'une toute autre façon.
En effet, elles découpent très nettement les parties de la phrase
: « Luna » (le sujet, mis ici en apposition à la phrase), puis
la proposition « elle est de plus en plus douce », enfin la
proposition « elle s'apprivoise doucement ». Nous pouvons constater
que l'émoticône « ;) » permet ici de séparer des
parties de phrases sans pour autant briser la chaîne sémantique
des parties en question. C'est d'ailleurs la définition que donne CATACH
(1980 : 21) des signes de ponctuation : selon elle, ce sont des
séparateurs sémantiques qui permettent de créer des pauses
dans la lecture des phrases, simples ou complexes. Cet exemple (84) utilise
donc bien les émoticônes de la même façon que nous le
ferions avec la ponctuation traditionnelle.
· Les émoticônes placées en fin
de phrase
Comme nous pouvons le constater sur notre tableau
récapitulatif des données classées selon le placement des
émoticônes dans la phrase, les émoticônes
placées en fin de phrase représentent plus de 80 % de notre
corpus, ce qui en fait la position la plus générale et commune de
l'émoticône dans notre corpus.
Outre l'utilisation du smiley en encadrement comme nous
l'avons vu précédemment dans les exemples (1), (3), (4), (5) et
(6), nous pouvons constater que l'utilisation des émoticônes en
fin de phrase implique très souvent une émotion, soit une
émoticône représentant un visage et donc un ressenti. C'est
le cas de beaucoup d'exemples ; nous pouvons prendre les numéros (48),
(33), (92) et (117) pour l'illustrer.
Exemple (33)
Exemple (48)
Exemple (117)
Exemple (92)
27
Nous pouvons d'ailleurs constater également que cet
ajout de l'information émotionnelle en fin de phrase par ces
émoticônes est autant présent dans l'utilisation
professionnelle de l'émoticône (exemples (48) et (33)) que dans
son utilisation personnelle (exemples (92) et (117)).
Il est intéressant de rapprocher cette utilisation des
émoticônes en fin de phrase qui semble lié à une
certaine « réaction » du scripteur au caractère modal
de certains signes de ponctuation. En effet, selon DÜRRENMATT (2015 : 87),
« l'omniprésence des phénomènes modalisateurs dans
les discours se retrouve dans un certain nombre de spécificités
du système ponctuant ». Il dit également que, par exemple,
le point d'exclamation a des fonctions de marqueur d'intensité et
d'expression (comme la joie, la surprise ou encore la colère); c'est
également le cas des points de suspension et de ses fonctions affectives
et conatives (2015 : 94).
L'utilisation des émoticônes en fin de phrase
peut alors être reliée à l'utilisation des signes de
ponctuation qui font l'objet d'une certaine modalisation.
Exemple (18)
Exemple (1)
Pour les autres exemples (ceux qui n'utilisent pas cette
fonction expressive), nous pouvons discerner une volonté du scripteur de
préciser le thème/sujet de la phrase ou du message, tout comme
nous en avons parlé pour les émoticônes placés en
début de phrase. Dans l'exemple (1), la phrase fait la promotion d'un
téléphone portable et est donc terminée par une
émoticône représentant un téléphone portable,
tandis que l'exemple (18) propose un programme de documentaires à voir
au cinéma et se termine donc par une émoticône
représentant un écran. Notons d'ailleurs que cette utilisation
des émoticônes est principalement présente dans les
messages à but professionnel, afin de simplifier la cible de vente aux
potentiels acheteurs/clients.
Ces émoticônes placées en fin de phrase
(ainsi que, moins souvent, celles placées au début ou au milieu
de la phrase) connaissent également d'autres usages que nous allons
commenter : la répétition, l'accumulation, ou encore la
substitution des émoticônes à la ponctuation
traditionnelle.
2) Analyse de la répétition et de
l'accumulation des émoticônes dans la phrase
Lors de cette analyse de la répétition et de
l'accumulation des émoticônes dans la phrase, nous nous
intéresserons aux pourcentages que ces utilisations représentent
dans notre corpus d'étude et nous les commenterons. Nous nous pencherons
également sur les types d'émoticônes qui sont mises en
répétition et en accumulation, et nous étudierons la
répartition des émoticônes expressives et non expressives
dans ces utilisations.
En classant nos 120 données de corpus en deux
catégories (celle des émoticônes en
répétition et celle des émoticônes en accumulation
dans la phrase), nous obtenons ce tableau de répartition, que nous
allons commenter :
· La répétition des
émoticônes dans la phrase
Sur nos 120 données de corpus, nous retrouvons 4
données qui contiennent une répétition des
émoticônes présentes dans une des phrases du message. Ces 4
données représentent un peu moins de 5 % du corpus entier, ce qui
est très peu.
Encore une fois, cette utilisation de
l'émoticône semble être réservée à une
certaine catégorie : celle des émoticônes expressives (qui
sont des indices émotionnels).
Exemple (12)
Exemple (90)
28
Exemple (9)
Exemple (87)
Nous pouvons alors rapprocher cette analyse de la
répétition des émoticônes dans les phrases à
celles faites précédemment : ces émoticônes à
valeurs expressives font écho à la modélisation
présente dans nos signes de ponctuation (comme le point d'exclamation ou
encore les points de suspension). Cette répétition permet «
d'accentuer la modalité affective » selon CATACH (1994 : 63).
Ainsi, les émoticônes sourires multipliées à la fin
de l'exemple (9) témoignent d'une modalité ironique plus intense
et les émoticônes « choquées », les
émoticônes coeurs, les émoticônes « diables
souriants » et les émoticônes qui pleurent de rire des
exemples (12), (87) et (90) augmentent leur intensité
émotionnelle en se répétant.
Nous pouvons également constater que cette
répétition est présente autant dans les messages
professionnels (exemples (9) et (12)) que dans les messages personnels
(exemples (87) et (90)).
· L'accumulation des émoticônes dans
la phrase
Sur nos 120 données de corpus, 11 données
seulement comportent une accumulation d'émoticônes
différents dans leurs phrases. Cette accumulation représente un
peu moins de 10 % de l'ensemble de notre corpus.
Contrairement au phénomène de
répétition précédemment analysé,
l'accumulation des émoticônes n'utilise pas uniquement des
émoticônes à indice expressif ou émotionnel mais
également celles qui sont uniquement iconiques, comme nous l'avons vu
lors de notre analyse du placement des émoticônes dans la phrase
et leur rôle de précision du sujet de la phrase.
29
Exemple (7)
Exemple (8)
Exemple (93) Exemple (81)
30
Ces quatre exemples démontrent la diversité de
l'utilisation de cette accumulation d'émoticônes dans les phrases
des messages numériques sélectionnés. Dans l'exemple (7),
les deux émoticônes sont des icônes qui ne sont pas des
indices émotionnels puisqu'elles représentent un morceau de
chocolat et un paquet cadeau. Dans l'exemple (93) cependant, nous pouvons voir
une accumulation de trois émoticônes différentes à
valeur expressive et émotionnelle (un visage « blasé »,
un visage qui blêmit et un visage qui pleure). Enfin, dans les exemples
(8) et (81), les émoticônes à valeur expressive et les
émoticônes à valeur simplement iconique sont
mélangées (un visage qui tire la langue, un chocolat et un sapin
pour le (8) et une licorne, un visage avec des coeurs et un coeur dans le
(81)). Les différentes catégories d'émoticônes sont
donc ici utilisées les unes avec les autres, côte à
côte.
Tout comme dans notre analyse de la répétition
des émoticônes dans la phrase, nous pouvons constater que cette
accumulation d'émoticônes différentes dans les messages
numériques se retrouve à la fois dans l'écrit
professionnel (exemples (7) et (8)) et dans l'écrit personnel (exemple
(93) et (81)).
L'accumulation et la répétition des
émoticônes, malgré le fait qu'elles présentent peu
de données, attestent d'une utilisation des émoticônes
similaire à celle de la ponctuation dite « traditionnelle » et
décrite, comme vu précédemment, par CATACH (1994) ou
encore DÜRRENMATT (2015).
3) Analyse de la substitution de
l'émoticône à la ponctuation traditionnelle
Lors de cette analyse de la substitution de
l'émoticône à la ponctuation traditionnelle, nous
commenterons le pourcentage de données qui présentent un
remplacement d'un signe de ponctuation par une émoticône. Nous
nous attarderons également sur le type d'émoticône
utilisée lors de ce remplacement, ainsi que sur les types de signes de
la ponctuation traditionnelle qui semblent être remplacés ou
non.
En classant nos 120 données de corpus selon si les
émoticônes se substituaient ou s'ajoutaient à la
ponctuation traditionnelle dans la phrase, nous obtenons ce tableau de
répartition, que nous allons commenter :
· Substitution de l'émoticône à
la ponctuation traditionnelle
Exemple (14)
Exemple (19)
Exemple (97)
Exemple (100)
31
Pour analyser nos éléments de corpus sur le
critère de la substitution des émoticônes à la
ponctuation traditionnelle dans la phrase, nous avons fait le choix de ne pas
prendre en compte les données contenant uniquement des
émoticônes placées en début de phrase puisqu'elles
sont, comme nous avons pu le déterminer plus tôt dans notre
analyse, très peu rattachées à l'utilisation des
émoticônes comme un signe de ponctuation traditionnel tel que
décrit par les linguistes. Il est de plus très rare, en langue
française, de rencontrer un signe de ponctuation en début de
phrase : nous les plaçons la plupart du temps en fin de phrase ou encore
après des propositions, pour agencer, distinguer, hiérarchiser ou
encore modaliser les parties du discours (DÜRRENMATT 2015 : 22-25).
Néanmoins, les majuscules de phrase sont considérées comme
un signe de ponctuation par CATACH (1994 : 85), signe qui se place au
débat du premier mot de la phrase et « présente des usages
bien codés, délimités et clairs, en général
bien respecté ». Cependant, les majuscules sont placées sur
les mots, et ne peuvent pas selon nous être comparées à
l'utilisation des émoticônes ici. Nous avons donc réduit
notre corpus à 114 données pour cette partie de l'analyse afin de
rendre notre recherche et notre analyse les plus justes possibles.
Sur ces 114 données, 67 comportent des messages
où les émoticônes remplacent les signes de ponctuation
traditionnels (comme par exemple le point ou tout simplement le signe
utilisé pour marquer la fin de phrase). Ces 67 données
représentent près de 60 % du corpus sélectionné et
illustrent donc un peu plus de la moitié des éléments qui
le constituent.
32
Ces trois exemples de messages personnels (exemples (97) et
(100)) et professionnels (exemples (14) et (19)) sont des exemples concrets de
cette substitution à la ponctuation traditionnelle. Nous pouvons
constater que les émoticônes remplacent le signe de ponctuation
final de ces trois phrases et que ces signes sont entièrement absents de
leur syntaxe. Les émoticônes endossent ici pleinement le
rôle de ces signes, soit celui de marquer la fin de la proposition. Elles
sont autant uniquement iconiques (représentation d'un poing dans
l'exemple (14) et représentation d'un feu dans l'exemple (19) qui nous
font penser à des pictogrammes) qu'expressives (visage qui sourit dans
l'exemple (97) et visage qui sourit « en trois » dans l'exemple
(100)).
Nous remarquons également dans les exemples
professionnels et personnels (21), (36), (94) et (112) que certaines
propositions sont terminées par une émoticône tandis que
d'autres, pourtant dans le même message, ne le sont pas.
Exemple (36)
Exemple (21)
Dans l'exemple (21), le scripteur a fait le choix de
remplacer trois signes de ponctuation de fin de phrase par des
émoticônes (un visage clin d'oeil, une paire d'yeux et un visage
avec des coeurs) tandis que sa dernière proposition est ponctuée
du signe de ponctuation traditionnelle que sont les points de suspension. De
même, dans l'exemple (36), les deux premières phrases ainsi que la
dernière sont ponctuées de façon traditionnelle, avec des
points et un point d'exclamation, contrairement à la proposition «
Le jeu est à présent terminé » qui elle est
terminée par une émoticône expressive (un visage triste).
Dans l'exemple (94), la proposition « Hihihi » est terminée
d'une émoticône expressive (un visage avec un grand sourire) et
donc séparée d'une seconde phrase qui, elle, est terminée
par une proposition entre parenthèses qui se finit avec un signe de
ponctuation
traditionnel (un point d'exclamation). Enfin, dans l'exemple
(112), la première phrase est terminée par une
émoticône « sourire » tandis que la seconde phrase se
termine par un point d'interrogation.
Nous constatons alors que cette substitution à la
ponctuation traditionnelle des émoticônes se fait de façon
pour le moins aléatoire : certaines phrases sont ponctuées
traditionnellement, d'autres sont ponctuées par des
émoticônes, parfois même dans les mêmes messages
numériques.
Cependant, une certaine linéarité peut
être remarquée : les émoticônes semblent toujours,
presque sans exception, remplacer un signe de ponctuation qui s'utilise en
position finale dans la phrase. Nous n'avons pas de données dans ce
corpus qui attesterait d'un remplacement d'une virgule par exemple (en milieu
de phrase et fin de proposition). Ainsi, nous pouvons établir que ces
émoticônes ayant le rôle de la ponctuation remplacent la
plupart du temps des signes comme le point, le point d'exclamation, les points
de suspension ou encore le point d'interrogation. Ces signes « finaux
» font également partie de ceux, comme vu
précédemment, ayant la plus grande part de modalisation
(notamment les points de suspension, le point d'exclamation et le point
d'interrogation). Cela rejoint donc notre observation sur le lien entre
ponctuation modale et émoticône.
· Addition de l'émoticône à la
ponctuation traditionnelle
Sur nos 114 données d'analyse, 47
éléments comportent des phrases où
l'émoticône figure aux côtés d'un signe de
ponctuation traditionnel. Cela représente au total un peu plus de 40 %
du corpus, soit presque sa moitié. Ce chiffre appuie notre remarque sur
le caractère très aléatoire de l'utilisation des
émoticônes en remplacement où en addition à la
ponctuation traditionnelle, puisque nous avons ici presque autant de
données comportant une substitution à cette ponctuation que de
données comportant un ajout de l'émoticône à la
ponctuation.
33
|
Exemple (39)
|
|
Exemple (35)
|
|
|
Exemple (73)
|
|
|
34
Comme nous pouvons le voir dans les quatre exemples ci-dessus,
cet ajout des émoticônes aux côtés de signes de
ponctuation plus traditionnels semble se faire aux côtés de
n'importe quel signe de ponctuation. Dans l'exemple (39),
l'émoticône est placée après les points
d'exclamation. Dans l'exemple (35), l'émoticône est placée
derrière le point d'interrogation. De même, dans l'exemple (73),
l'émoticône est placée derrière le point. Enfin,
dans l'exemple (81), les émoticônes sont placées devant la
virgule.
Le placement de l'émoticône par rapport au signe
de ponctuation semble donc aléatoire (même si
l'émoticône respecte toujours l'unité de la proposition
comme vu précédemment), tout comme les signes auxquels les
émoticônes s'ajoutent (on a le cas d'une virgule, d'un point, de
points d'exclamation et d'interrogation). L'émoticône serait alors
une valeur « ajoutée » à la phrase ici. Elle peut
être une ponctuation supplémentaire tout comme elle peut servir au
scripteur à ajouter ces informations non-verbales que l'on retrouve
d'ordinaire dans les conversations orales, en face à face.
4) Bilan des analyses
Pour récapituler, voici un tableau regroupant
l'entièreté des résultats et pourcentages des analyses du
corpus :
Toutes ces analyses nous confortent dans notre
hypothèse initiale : les émoticônes respectent bien
plusieurs règles d'utilisation, qu'elles partagent avec les signes de la
ponctuation traditionnelle comme elle peut être décrite par CATACH
(1994) ou encore par DÜRRENMATT (2015). Elles ne sont pas placées
par hasard dans les phrases ; elles permettent de distinguer et d'agencer les
segments syntaxiques tout en leur apportant des informations
émotionnelles ou intentionnelles. Les émoticônes peuvent
également être doublées, triplées et
multipliées pour développer leur intensité modale. Elles
peuvent être placées, même si elles sont différentes
et si elles comportent différentes sortes d'informations, les unes
à côté des autres pour préciser leurs motivations.
Enfin, il est
35
important de relever que le remplacement de la ponctuation par
les émoticônes dans les phrases n'est pas automatique : la
moitié de notre corpus présentait des exemples de signes de
ponctuation absents et remplacés par des émoticônes, tandis
que l'autre moitié présentait des exemples de phrases où
l'émoticône était ajoutée auprès du signe de
ponctuation déjà présent.
Ce corpus permet aussi de rappeler que l'utilisation de
l'émoticône reste pour le moment propre à chacun ; selon
que le message était écrit dans un but professionnel ou dans un
but personnel, le choix du type d'émoticône, de son placement ou
encore de son possible ajout auprès d'un signe de ponctuation ne semble
dépendre que d'une chose : les habitudes du scripteur et son usage
personnel de l'écriture numérique. Il nous faudrait cependant un
corpus bien plus large et bien plus fourni pour tirer des conclusions
concrètes à ce sujet.
Même s'ils représentaient parfois un faible
pourcentage des données du corpus (comme nous avons pu le constater lors
de notre analyse de l'accumulation et de la répétition des
émoticônes dans les phrases), les critères proposés
pour analyser l'utilisation des émoticônes et leur lien avec la
ponctuation traditionnelle ont tous présentés des
cohérences et des rapprochements avec cette ponctuation. Il paraît
donc pertinent de souligner la ressemblance démontrée de cette
utilisation des émoticônes avec celle de la ponctuation. Les
émoticônes sont bien, selon l'étude que nous avons
menée et ce procédé de reconnaissance des règles
qu'elles suivent et qu'elles représentent, des unités se
rapprochant de la ponctuation. Nous pouvons affirmer que les
émoticônes sont une nouvelle forme de ponctuation propre à
l'émergence d'un langage numérique.
36
CONCLUSION
Au terme de cette analyse sur l'utilisation des
émoticônes, nouveaux signes linguistiques apparus grâce
à l'émergence de la communication numérique écrite
et l'apparition des codes qui lui sont spécifiques, force est de
constater qu'elles jouent un nouveau rôle important dans la façon
de communiquer en ligne.
Selon nos diverses analyses de ce corpus de captures
d'écran comprenant des émoticônes, nous avons pu constater
que ces émoticônes pouvaient effectivement être liées
et comparées à une nouvelle ponctuation consacrée aux
écrits numériques. C'est ce qu'a également proposé
DÜRRENMATT (2015 : 105) à la fin de son ouvrage en déclarant
que les émoticônes « ont le plus souvent [...] un rôle
de démarcation des tours de parole mais peuvent intervenir à tout
moment à la manière des points d'exclamation ». GAUDUCHEAU
et MARCOCCIA (2007 : 43) ajoutent même que l'on peut « être
tenté de traiter les smileys comme des signes de ponctuation expressive
».
Cependant, cette utilisation de plus en plus large et
fréquente des émoticônes engendre des évolutions
inattendues : nous pouvons par exemple les retrouver sur les devoirs des
élèves en primaire (certains professeurs choisissant de noter
avec un « visage souriant » ou encore un « visage triste »
sur les copies papier de leurs élèves) ou encore à
l'affiche d'un film, « Le Monde secret des émojis », qui
sortira en été 2017 (avec, pour personnages principaux... des
émoticônes !). Le rôle linguistique des
émoticônes, qu'il soit sémiotique, pragmatique ou
syntaxique, connaît une évolution tellement importante qu'il a
été entièrement transformé pour faire place
à une personnification de ces émoticônes, et que nous
sommes de plus dans la mesure d'en trouver hors de la communication
numérique écrite de plus en plus fréquemment.
Lors de cette étude, nous avons été
limité dans le temps et les possibilités de recherche. Pour
compléter notre réflexion, il serait possible par la suite de
nous attarder sur les différences d'utilisation des
émoticônes selon l'âge des scripteurs, ou encore selon les
plateformes (faire des comparaisons entre les messages numériques sur
Twitter et sur Facebook, mais également faire des comparaisons avec
d'autres plateformes numériques comme les SMS, les mails ou encore les
forums en ligne). Il serait également intéressant de s'attarder
sur l'évolution de l'utilisation des émoticônes, en en
faisant une étude diachronique de leur apparition à aujourd'hui.
Nous pourrions de plus nous pencher sur une comparaison entre les messages des
professionnels et des particuliers, pour distinguer une possible
différence d'utilisation et des codes qui leur seraient alors bien
37
spécifiques. Enfin, une analyse comparative des
émoticônes que nous avons décrites comme « expressives
» avec celles se rapprochant plus de « simples pictogrammes »
(comme les émoticônes représentant des objets ou encore des
animaux) serait sans doute nécessaire afin de faire le tour de leurs
thématiques et de leurs différents usages. Pour toutes ces
possibles analyses futures et complémentaires, un corpus bien plus
complet et fourni serait indispensable pour une étude plus
étendue, et ainsi plus générale, de ces
émoticônes. Avec un tel corpus, nous pourrions également
nous attarder sur une question de taille : quel impact ont ces nouvelles
marques sur les définitions linguistiques de la ponctuation ?
Les pistes de réflexion autour de ce nouveau signe
numérique sont donc multiples et pour le moment très peu
explorées, ce qui confirme sa richesse linguistique et la
diversité de ses rôles et de ses utilisations.
38
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40
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[consulté le 18/05/2017]
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l'information, Rapport final de l'enquête internationale sur la
littératie des adultes, sur le site de l'Organisation de
Coopération et de Développement Economiques (OCDE), URL :
http://www.oecd.org/fr/edu/innovation-education/39438013.pdf
[consulté le 22/06/2017]
ANNEXES
1) Le placement des émoticônes
a) Emoticônes placées en début de
phrase
(2)
(1)
(4)
(6)
(8)
(6)
(16)
(7)
41
(12)
42
(44)
(89)
(46)
(17) (18)
(57)
(95)
(105)
(91)
b) Emoticônes placées en milieu de
phrase
(78)
(79)
(13)
43
(84) (103)
(81)
c) Emoticônes placées en fin de
phrase
(1)
(4)
(8)
(9)
(6)
(10)
(5)
(7)
44
(12)
45
(15)
(21)
(23)
(18)
(14)
(19) (20)
(24)
(22)
(18)
(25)
(26)
46
(28)
(36)
(35)
(40)
(27)
(38)
(40)
(37)
(29) (30)
(32)
(31)
(33)
(34)
(42)
(45)
(41)
(43)
(48)
(47)
(50)
(49)
(54)
(53)
(55)
(51)
47
(52)
48
(66)
(60)
(67)
(56)
(62)
(64)
(58)
(63)
(59)
(65)
(68)
(69)
(61)
(73)
(76)
(72)
(74) (75)
(77)
(79) (80)
(82)
(83)
(86)
(85)
(87) (88)
49
(81)
(70) (71)
50
(90)
(92)
(93) (94)
(97)
(96)
(99) (100)
(98)
(101)
(104)
(107)
(102)
(106)
51
(115)
(116)
(117)
(118)
(119)
(120)
(114)
(113)
(108) (109)
(110) (111)
(112)
2) Répétition et accumulation des
émoticônes
a) Répétition des émoticônes
dans la phrase
(12)
(9)
(87)
(90)
b) Accumulation des émoticônes dans la
phrase
(7)
(10)
(14)
(49)
(8)
(15)
3) Substitution de la ponctuation par les
émoticônes
a) Substitution de la ponctuation
(2)
(8)
(3)
(5)
(7)
(9)
(12)
54
(14) (18)
(19)
(21)
(20)
(24)
(25) (26)
(27)
(28)
(29)
(30)
(31)
(36)
(32)
(76)
(37)
(42)
(48)
(53)
(62)
(60)
(71)
(75)
(40)
(62)
(72)
(52)
(54)
(83)
(82)
(79)
(77)
(80) (81)
(84)
(86)
(85)
(87)
(88) (94)
(100)
(97)
(102)
(103)
(104)
(106)
(117)
(120)
(118)
(115)
(116)
(113)
(107) (108)
(109) (111)
(112)
b) Addition à la ponctuation
(6)
(1)
(10)
(15)
(22)
(11)
(38)
(33)
(34)
(23)
(35)
(43)
(45)
(55)
(63)
60
(47)
(49)
(50)
(51)
(56)
(58)
(59)
(41)
(68)
(69)
(70)
(73)
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