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Nouvelles politiques monétaires : quelle théorie monétaire?

( Télécharger le fichier original )
par Claudia HELLAL
Groupe de recherche en Droit, Economie et Gestion (GREDEG - CNRS), université de Nice Sophia Antipolis - Master Recherche en Economie et Finance Internationale, Spécialité Stratégies Internationales Economiques et Financières 2015
  

Disponible en mode multipage

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Nouvelles politiques monétaires :

Quelle théorie monétaire ?

HELLAL Claudia

Mémoire de Master Recherche en Economie et Finance

Internationale (SIEF),

Soutenu le 16 Juin 2015

Jury :

M. Alain Raybaut, Chargé de Recherches CNRS

M. Dominique Torre, Professeur à l'Université Nice Sophia Antipolis, directeur de mémoire.

Je dédie ce mémoire,

A mon père, Maroune, qui m'a tout donné, qui a fait de moi quelqu'un d'ambitieux et quelqu'un de juste,

Qui m'a soutenu jusqu'au bout et qui continue de répondre présent peu importe mes problèmes

Je ne te remercierai jamais assez.

A mes soeurs, Raïssa et Anaïs avec qui j'ai partagé les plus beaux moments de ma vie. Je vous remercie d'être toujours présentes et souhaite que l'amour que nous partageons ne s'éteigne jamais...

A mon ami, Thomas Turanskij, dont le coeur est juste et la parole

infaillible

A mon maître de mémoire M. Torre Dominique pour son soutien

pédagogue et pour sa patience

1

A M. Raybaut Alain qui a bien voulu être membre de ce jury

2

INTRODUCTION

Suite à l'incapacité probante des politiques discrétionnaires à relancer les économies depuis la fin des années 60, les débats autour des politiques économiques se sont beaucoup enrichis et ont vu naître des concepts novateurs tels que celui des anticipations rationnelles. Les politiques budgétaires ont étaient délaissées au profit des politiques monétaires dont le mandat à été complètement modifié et dont la gestion est depuis confiée à des autorités indépendantes. Les autorités chargées de la direction des politiques monétaires, riches de leurs expériences et averties par les travaux académiques considérables réalisés, ont finalement et de façon quasi-uniforme opté pour la mise en oeuvre d'une politique monétaire conforme aux principes fondateurs de la « nouvelle synthèse néoclassique ».

Cela à prévalu jusqu'à l'aube de la crise des subprimes, et c'est alors que cette nouvelle crise, la deuxième plus grande après celle de 1929, a joué son rôle moralisateur et a initié de nouvelles controverses et débats académiques sur ce sujet.

Nous nous intéresserons dans ce mémoire à comprendre les fondements des politiques monétaires (Partie 1 - TITRE 1), à décrire les décisions stratégiques prises par les banques centrales pendant la récente crise (Partie 1 - TITRE 2), et, dans une dernière grande partie, nous étudierons de manière approfondie les orientations à venir des règles de politiques monétaires et nous éclairerons le lecteur sur les principaux travaux académiques en cours sur ce sujet.

3

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

PARTIE 1 : Les fondements de la politique monétaire et la « grande dépression »

TITRE 1 : Les fondements théoriques de la politique monétaire d'avant crise dans les économies

développées 5

I. Les fondements économiques à la base de la politique monétaire 5

II. Les principes fondamentaux de la politique monétaire actuelle 12

III. La stratégie des banques centrales 14

1. Objectifs finaux et objectifs intermédiaires: 14

2. Méthodologie de la prise de décisions : analyse monétaire et analyse économique 15

IV. Les instruments de la politique monétaire 16

1. Les opérations d'open-market et de crédit 16

2. Les facilités permanentes et les réserves obligatoires 17

3. Opérations exceptionnelles : 18

V. Les canaux de transmission de la politique monétaire 19

1. Le canal du taux d'intérêt 19

2. Le canal du taux de change 20

3. Les canaux du prix des actifs autre que la monnaie 20

4. Le canal du bilan 21

5. Le canal du crédit 22

TITRE 2 : La politique monétaire depuis le début de la « grande dépression » : Le bilan 24

I. Les principaux défis de la politique monétaire et les limites des stratégies conventionnelles 24

II. Le recours aux politiques monétaires non conventionnelles 25

1. Les politiques de « quantitative easing » (assouplissement quantitatif) 25

2. Les politiques de « credit easing » (assouplissement des conditions d'accès au crédit) 26

3. L'utilisation des politiques monétaires non conventionnelles durant la crise 28

III. Bilan d'efficacité des politiques monétaires dans la gestion de la crise 33

IV. Le défi de l'EXIT pour les politiques monétaires : quelle stratégie adopter ? 36

PARTIE 2 : Résurgence des débats académiques : Quelles évolutions théoriques pour la politique monétaire ?

TITRE 1 : Politiques monétaires et stabilité sur les marchés financiers 40

I. Le rejet de l'hypothèse de stabilité financière : une relation à double sens entre dynamique financière

et politique monétaire 41

1. Le nouveau visage de la finance 42

2. Le retour de l' « hypothèse d'instabilité intrinsèque » de la finance 44

3. La responsabilité de politique monétaire dans les crises financières : Le canal de la prise de risque,

un canal jusqu'alors sous-estimé 46

3.1. Fonctionnement du canal de la prise de risque 46

3.2. Preuve de l'existence du canal de la prise de risque : approches empiriques 47

4. L'efficacité limitée des politiques monétaires pour empêcher la propagation des crises financières 47

4

II. La révision du mandat des banques centrales : rejet partiel du principe de séparation entre politique

monétaire et financière. 50

1. L'objectif de stabilité financière et ses instruments 50

1.1. Limites des politiques prudentielles 50

1.2. La politique monétaire et l'objectif de stabilité macro-prudentielle 51

2. Les arguments du débat entre « leaning against the wind » et « cleaning aftermath » 52

3. Quelle conjugaison entre politique monétaire et politique prudentielle ? 54

3.1. Avantages et inconvénients d'une collaboration plus avancée entre les deux politiques : 55

3.2. Quelle collaboration ? Quel partage des pouvoirs ? Quelle règle de décision ? 55

TITRE 2 : Politique monétaire et dette publique 57

I. Conséquences d'une crise des dettes souveraines : Pourquoi les autorités monétaires doivent-elles

réagir ? 57

1. La dette publique et l'objectif de stabilité des prix : quelle relation ? 58

1.1. Dominance budgétaire et risque pour la stabilité des prix 58

1.2. L'état des finances publiques comme principale source des anticipations et des ajustements des

prix 60

1.3. Implications 61

2. Dettes publiques, rationnement du crédit et taux d'intérêt 61

2.1. Dette publique, canal du taux d'intérêt et stabilité financière, un rappel. 61

2.2. Déficit publique et canal du crédit 62

3. Dette publique et risque de crise institutionnelle en Europe 63

II. Le rôle de la politique monétaire dans le désendettement publique 63

1. Le rôle de la politique monétaire dans l'assainissement budgétaire : de nouvelles perspectives 63

2. Démonstration de T. Hellebrandt, A. S. Posen et M. Tolle (2012) 65

3. Présentation du modèle proposé par O. Jeanne (2012) : Une approche intéressante des arbitrages

potentiels entre défaut et assistance 67

4. Mots de conclusion 69

TITRE 3 : Vers un modèle amélioré de politique monétaire : La sous - optimalité de la règle de

Taylor pour conduire une politique monétaire optimale 70

I. Les grands « oublis » de la politique monétaire 71

1. L'absence de la microéconomie bancaire dans l'analyse du canal du crédit 71

2. L'importance cruciale des frictions sur le marché du travail dans la transmission des politiques

économiques 74

3. L'existence de fortes non-linéarités dans les réactions des agents 78

II. Autres considérations sur la pertinence des fondamentaux de la politique monétaire 80

1. Discussions autour du ciblage de l'inflation : Quel taux ? Quelle cible ? 80

1.1. Le ciblage de l'inflation 80

1.2. Le ciblage du niveau des prix 81

2. Le retour de la théorie discrétionnaire de la politique monétaire 83

CONCLUSION 86

BIBLIOGRAPHIE 87

5

PARTIE 1

Les fondements de la politique monétaire et la « grande
dépression »

TITRE 1 : Les fondements théoriques de la politique monétaire d'avant crise dans les économies développées

Cette première partie du mémoire a pour objet de recadrer les évolutions théoriques qui ont conduit à la formulation de la politique monétaire telle qu'on la connait aujourd'hui et depuis les années 70.

Dans un premier temps, il s'agira de replacer historiquement la théorie de la monnaie.

Puis, dans un second temps, nous détaillerons les fondements théoriques de la politique monétaire actuelle, ses objectifs, ses instruments, sa mise en oeuvre.

I. Les fondements économiques à la base de la politique monétaire

De tout temps, les hommes se sont intéressés au pouvoir de la monnaie. Certains ne lui conférant que le rôle de moyen d'échange, d'autre la désirant ardemment pour le pouvoir qu'elle confère (Thésaurisation).

Dans tous les cas, la monnaie est d'une importance capitale dans le bon fonctionnement des échanges puisqu'elle permet d'éliminer les problèmes liés au troc. Aujourd'hui la monnaie qui circule dans l'économie est de forme fiduciaire (i.e. sans valeur intrinsèque), et est frappée par les banques centrales qui contrôlent son volume afin d'éviter entre autres les problèmes de dévaluation et d'inflation. Cette monnaie tient sa légitimité dans le fait qu'elle soit socialement acceptée par la population qui place leur confiance en sa valeur inter temporelle.

La monnaie assure trois fonctions principales :

- celle de moyen d'échange, elle permet l'extinction immédiate d'une dette ;

- celle d'unité de compte, c'est-à-dire d'échelle de mesure de la valeur des biens. A ce titre, elle est souvent résumée à un voile à l'échange. Les prix étant de ce fait des prix

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avant tout relatifs entre les biens (base de la théorie des préférences du consommateur).

- celle de réserve de valeur, c'est-à-dire de la capacité de la monnaie à maintenir son pouvoir d'achat dans le temps. Ce dernier point a une importance capitale dans les domaines de l'économie et de la finance avec des thèmes phares comme la spéculation (immobilière, boursière, sur les devises etc.), les mouvements internationaux de capitaux et la formation des décisions d'investissement ou de consommation des agents économiques etc. La majorité des agents économiques forment des anticipations sur les risques d'inflation à venir ou de dévaluation de la monnaie qu'ils détiennent.

Définition de l'Inflation : l'inflation consiste en une augmentation sur une période relativement longue du niveau général des prix (généralement calculé de façon annuelle). Cet indice est en fait évalué sur la base des prix des principaux postes de dépense des ménages (alimentation, logement, téléphonie, loisirs, habillement, éducation entre autres). A chaque poste est attaché un poids (pondération en fonction de l'importance de la dépense dans le revenu des ménages). La structure de cet indice est révisée ponctuellement afin de tenir compte des évolutions des modes de consommation dans le temps. Des efforts pour annuler les effets « inflation - qualité » ont été investis mais font encore l'objet de rectifications.

La déflation est le phénomène inverse.

À partir de cette définition de l'inflation, on peut facilement expliquer qu'à salaires nominaux inchangés, une hausse de l'inflation consiste en réalité à une baisse du pouvoir d'achat via une baisse du salaire réel (i.e. évaluation du salaire nominal en termes de biens).

Mais l'inflation va au-delà de la perte de pouvoir d'achat des ménages. Il conditionne aussi les décisions d'investissement des entreprises. Par exemple, en cas de déflation avérée ou d'anticipation de déflation, les entrepreneurs vont diminuer le volume de leur production et licencier des travailleurs ; tandis que ceux qui avaient des projets d'investissement préféreront attendre avant d'investir. Le raisonnement inverse devrait s'appliquer dans le cas d'une inflation non anticipée.

La déflation a aussi pour conséquence d'augmenter la charge de la dette réelle contractée par les agents privés ou publiques. Et de l'alléger dans le cas d'inflation.

Un autre exemple de l'importance de l'inflation est l'impact qu'elle aura sur le commerce extérieur en rendant les biens nationaux moins compétitifs et moins demandés.

La dévaluation a aussi une importance capitale à ce titre puisqu'elle consiste en une augmentation du taux de change au certain (baisse de la valeur relative de la monnaie nationale), ce qui induit le renchérissement des importations contre une augmentation des commandes à l'exportation.

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Aussi, une monnaie dont la valeur est instable fait fuir investisseurs et capitaux financiers qui recherchent des placements sûrs.

Enfin, notons que l'inflation revêt un rôle considérable sur les marché financiers, alimentant la spéculation sur les devises, le recours aux produits dérivés et de l'assurance (opérations de couverture contre le risque de change).

Pour résumer assez rapidement, la déflation et l'inflation sont néfastes pour les économies. Leurs coûts économiques et sociaux sont importants en termes de croissance, de chômage et de bien-être. D'où l'importance d'inclure dans les missions des autorités politiques celle de conduire une « politique monétaire » qui puisse contrôler la volatilité de la valeur de la monnaie.

Les objectifs que doit poursuivre la politique monétaire sont un sujet de discorde très vif qui oppose principalement keynésiens et monétaristes. Le point le plus important de leurs divergences est celui de la question du rôle de la politique monétaire.

Les monétaristes considèrent que la politique monétaire ne doit avoir pour objectif que celui de gérer la masse monétaire en circulation dans l'économie de telle sorte que celle-ci augmente de façon strictement parallèle aux besoins de monnaie découlant de l'augmentation des activités économiques dans le temps. Elle doit alors ancrer la croissance de la masse monétaire sur l'évolution du volume d'activités économiques, assurer la gestion des réserves de change et des opérations de change. Pour les monétaristes comme pour les classiques et les néoclassiques, la monnaie doit être neutre et « l'inflation est toujours et partout un phénomène monétaire » M. Friedman. Ainsi, l'objectif final de la politique monétaire est celui du maintien de la stabilité des prix. Selon cette approche, et conformément aux prévisions de la théorie quantitative de la monnaie, toute augmentation de la masse monétaire non justifiée par une augmentation du volume d'activité économique a pour conséquence de produire un ajustement par l'inflation de l'équation de Fisher.

Cette vision s'oppose à la vision Keynésienne de la monnaie qui confère à la politique monétaire la capacité de pouvoir influencer l'économie réelle en orientant les décisions des agents. La politique monétaire comme la politique budgétaire endosse selon cette école la mission d'intervenir ponctuellement dans l'activité économique en vue de palier aux blocages et aux déséquilibres qui peuvent se former et persister de manière durable (contrairement à la vision classique qui suggère que ces déséquilibres disparaissent d'eux-mêmes à court ou moyen terme). La politique économique endosse en ce sens le rôle de guide et les déséquilibres sont dus majoritairement à un défaut d'adaptation entre l'offre et la demande de biens. C'est ainsi que selon les keynésiens, des politiques dites de relance sont nécessaires afin de remettre les agents économiques sur les bonnes positions. Ce sont des politiques de relance tournées vers la demande, l'offre étant considérée comme suivant une marche d'adaptation automatique à la demande. Aussi, dans les modèles keynésiens, la monnaie n'est

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plus un simple voile aux échanges mais a en plus la capacité d'influencer les comportements d'investissement et de consommation et la caractéristique d'être demandée pour elle-même comme tout autre bien. En effet, elle peut être demandée à la fois pour des motifs de transaction mais aussi pour des motifs de précaution et de spéculation. Ainsi l'objectif de la politique monétaire n'est pas la lutte contre l'inflation mais la relance de l'économie. Nous ne rentrerons pas dans les détails du modèle d'équilibre général, ce n'est pas le sujet de notre mémoire, nous conclurons cependant que ce modèle représente en une grande avancée pour les sciences économiques puisqu'il a non seulement permis d'approfondir l'analyse microéconomique des choix des agents, a introduit le fonctionnement des marchés financiers, a alimenté le débat sur la politique économique, a réussi à mettre en relation les grandes variables économiques afin de justifier de la formation de la richesse nationale et a introduit ce que l'on nomme aujourd'hui les canaux de transmission à l'origine de l'efficacité de toute politique économique.

L'insuffisance du modèle keynésien à rendre compte du mécanisme de formation des prix, l'abstraction du mécanisme de prise de décision du producteur qui est considéré comme un robot, et son incapacité à rendre compte des frictions sur le marché du travail ont imposé l'élargissement du modèle afin que celui-ci soit conforme à la réalité économique.

Sur la base de la théorie classique du producteur et de l'enseignement du modèle WS-PS, le courant de la synthèse néoclassique dirigé par Hicks corrige le modèle d'équilibre général en y réintroduisant la théorie microéconomique classique du choix de l'entrepreneur, en modifiant ses hypothèses telle que soit prise en compte la variabilité des prix et des salaires réels ainsi que l'existence d'un marché du travail actif et déterminant dans la formation de l'équilibre macroéconomique. La logique du modèle ISLM n'est pas rejetée pour autant mais elle est résumée dans une fonction de demande globale qui est fonction du prix et réagit aux politiques économiques de la même façon que dans le modèle de base ISLM. Une fonction d'offre globale émanant des entreprises est formulée sur les principes de la théorie classique de l'optimisation du profit en fonction des coûts de production. Dans ce modèle, le progrès technique restant absent, seul le coût du salaire importe. La fonction d'offre globale est croissante avec le prix et n'est qu'indirectement influencée par les décisions des politiques économiques. L'équilibre général (Y, Prix) se fait à l'intersection de ces deux courbes.

Les conclusions du modèle AS-AD implique que les politiques économiques, qu'elles soient fiscales, budgétaires, monétaires ou concerne la réglementation sur les salaires ont un effet sur l'équilibre macroéconomique de court terme. Cependant, il pose que les effets de ces politiques sur l'équilibre de long terme sont neutres puisque le niveau de la production nationale retourne systématiquement à son niveau naturel Y* auquel correspond un niveau de chômage naturel (équilibre structurel optimal). Ainsi, la courbe d'offre de long terme est de forme verticale ce qui implique qu'à LT, une politique économique qui tend à pousser le niveau de la production au-dessus de son équilibre naturel crée de l'inflation sans pour autant engendrer des améliorations dans l'économie réelle.

Bref rappel des hypothèses du modèle AS-AD : - Les prix sont variables

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- Le marché du travail est actif

- Les salaires nominaux sont rigides à court terme

- Le niveau réglementaire des salaires, l'offre de monnaie, le niveau des dépenses

publiques et de l'impôt sont des variables exogènes

- Il n'y a pas de progrès technique et le stock de capital fixe est constant

- Les rendements d'échelle sont constants

Keynes et Hicks ont posé les bases des modèles d'équilibre général utilisés par les politiques aujourd'hui. Certes selon des hypothèses différentes et avec des cadres opérationnels qui ont été enrichis. Ces modèles sont des moyens de décision et de prévisions économiques et sont utilisés aujourd'hui sous la forme d'innombrables modèles dits DGSE (modèle d'équilibre général dynamique stochastique).

Les préconisations du courant keynésien en ce qui est des politiques budgétaires et monétaires sont en grande partie rejetées depuis la « grande inflation » des années 70 - 80, laquelle avait été précédée d'une instabilité notable du niveau d'inflation. Cette période difficile s'accompagne en plus d'une envolée des taux de chômage remettant en doute la logique de la courbe de Philips (c'est la stagflation). Les politiques keynésiennes s'acharnent dans des politiques de relance par la demande qui s'avèrent vaines et coûteuses en ce sens qu'elles engendrent une explosion du niveau des déficits publics. Le canal de l'offre est à l'origine de cet échec, révélant que le comportement d'investissement est plus complexe qu'il n'y paraissait. L'équilibre macroéconomique ne se fait plus par les quantités mais par les prix.

La théorie quantitative de la monnaie revient alors en force, accusant les méandres des politiques interventionnistes et replaçant la politique monétaire dans son seul rôle de contrôleur de l'inflation. Les échecs des politiques de relance par la demande ont par ailleurs impulsé la formulation d'une nouvelle école de pensée, celle de la nouvelle école classique (N.E.C.) avec des économistes comme Lucas, Friedman, Kydland, Prescott, Wallace entres autres. La N.E.C. réintroduit la vision quantitative de la politique monétaire et utilise le modèle standard AS-AD pour ses analyses qu'elle corrige de nouvelles considérations. La plus grande contribution de cette école à la théorie économique est celle de la formulation du concept d'anticipation rationnelle que l'on doit à l'économiste R. Lucas. Ce concept révolutionne les modalités d'intervention des politiques économiques et réussit à expliquer les échecs des précédentes politiques. Selon la N.E.C., les décisions économiques des agents (investissement, consommation, épargne, embauche etc.) sont dictées avant tout par les anticipations qu'ils forment quant au niveau à venir des prix.

Le concept d'anticipation rationnelle: Si on considère que les choix des agents économiques sont déterminés par leur ambition à venir, il semble clair que les décisions de cet agent, à un moment donnée, dépend principalement des projections qu'il établit concernant l'état de la conjoncture économique à venir. Or, l'hypothèse des anticipations rationnelles suppose que les agents apprennent du passé, comprennent le présent et anticipent l'avenir avec un faible risque d'erreur puisqu'ils utilisent pour formuler leur anticipations les mêmes

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modèles macroéconomiques que leur dirigeant. Ainsi, leur probabilité de se tromper est d'espérance nulle. Cela ne signifie cependant pas que l'inflation anticipée est toujours égale à l'inflation effective. La N.E.C. considère les anticipations rationnelles comme une variable économique déterminante à prendre en compte dans le modèle d'équilibre général. Les implications de ce concept sont entre autres que :

- Seules des variations non anticipées du niveau général des prix peuvent engendrer des changements dans l'économie réelle et un ajustement de court terme. A long terme, l'économie retourne à son niveau potentiel avec un niveau des variables réelles identiques à celui d'avant l'introduction de la politique. Cependant, la politique économique ne peut pas systématiquement tromper les agents économiques au risque de créer des phénomènes de forte inflation.

Pour être plus précis : Les salaires nominaux étant rigides à court terme, l'augmentation non anticipée des prix aura pour conséquence de diminuer les salaires réels effectifs et de placer le niveau optimal de production à un niveau supérieur ; ce qui implique alors une baisse du niveau de chômage et une augmentation de la demande de consommation. Cependant, à plus long terme, les salaires nominaux s'ajustent à l'inflation, l'offre et le chômage retrouvent leur niveau initial.

Mais aussi, l'augmentation non anticipée des prix a pour effet de diminuer le taux d'intérêt réel (taux d'intérêt nominaux - inflation) et ainsi de rendre plus intéressant la réalisation de projet d'investissement. Par ailleurs, la baisse de ce taux a pour effet d'alléger le poids de la dette des emprunteurs et prend la forme d'un effet richesse qui peut jouer positivement sur l'économie. À long terme, le taux d'intérêt nominal s'ajuste à la hausse.

- L'annonce d'une politique budgétaire de relance ou d'une politique monétaire expansionniste engendre des anticipations de hausse de l'inflation à venir qui induisent des pressions à la hausse sur les salaires nominaux (négociations syndicales) et une augmentation quasi - immédiate du niveau des prix. Le rapport entre les agrégats économique reste inchangé. Seul le niveau des prix d'équilibre se trouve augmenté. Ces politiques sont vaines et n'engendrent pas d'amélioration dans l'économie réelle. Elles sont également très dangereuses si elles sont réalisées de manière répétitive puisqu'elles engendrent des risques d'hyperinflation avec les multiples problèmes que cette situation engendre, tout en accroissant le niveau des déficits publics.

- Une politique salariale telle que les salaires nominaux légalement fixés sont revus à la baisse engendre une diminution du chômage et une augmentation du revenu national. Cependant, les effets sur la demande restent ambigus.

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- Les excès de demande peuvent être durablement taxés par l'inflation si les anticipations des entreprises sont mauvaises. Cela justifie l'intérêt d'élaborer des indicateurs statistiques comme celui du « sentiment de l'entrepreneur ».

- Seule des modifications dans la structure de l'offre peuvent faire varier l'équilibre réel de long terme. Ce changement peut être engendré par des innovations techniques, des modifications de la structure de la demande, aux phénomènes de délocalisations entre autres.

- À court terme, l'économie peut être sujette à des chocs d'offre ou de demande sans pour autant que la politique monétaire ne doive intervenir puisque l'équilibrage de long terme définit les niveaux naturels des variables économiques.

- Un taux d'inflation instable implique des niveaux d'équilibre économique sous optimaux et une perte du bien-être social

- Les autorités monétaires doivent être indépendantes, doivent avoir pour mission principale, voire pour seule mission, celle de la maîtrise de l'inflation. Cet engagement solide de la politique monétaire à assurer sa mission, rend sa politique crédible aux yeux des agents économiques et permet ainsi d'ancrer et de piloter les anticipations de ces derniers de manière à ce que son intervention ait des résultats optimaux.

Conclusion

Cette présentation chronologique des modèles macroéconomiques qui sont à la base des décisions des politiques monétaires était nécessaire et importante puisqu'elle nous permet dès lors de comprendre la portée des politiques économiques sur l'activité réelle. Mais surtout, elle nous permet de comprendre pourquoi, la maîtrise de l'inflation est la mission la plus importante assignée aux autorités monétaires. La maîtrise de l'inflation est aussi le gage de ne pas tomber dans une spirale déflationniste, mouton noir des économies.

Aussi, l'impact crucial qu'ont les anticipations des agents dans la formation des principaux agrégats économiques explique pourquoi, aujourd'hui, le pilotage des anticipations est un défi majeur pour les banques centrales et que les politiques discrétionnaires ont fait place à des politiques monétaires fortement engagées sur une règle compréhensive et explicite. Aussi, la transparence quasi-totale des banques centrales indique leur croyance en la nocivité des politiques discrétionnaires.

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II. Les principes fondamentaux de la politique monétaire actuelle

La doctrine monétaire qui a été retenue après la « grande inflation » des années 70 par les principales banques centrales des pays développés est basée sur les principes de la N.E.C. et utilise des modèles dits D.S.G.E.

Comme nous l'avons vu dans la partie précédente, les autorités monétaires ont complètement modifié leur manière de communiquer. Les politiques discrétionnaires sont délaissées au profit d'une politique solidement engagée sur une règle explicite.

La recherche de transparence des banques centrales en ce qui concerne leurs objectifs, leurs méthodes, leurs intentions et leurs prévisions est justifiée par le fait que la doctrine monétaire à complètement intégré la théorie des anticipations rationnelles et en a déduit que cette transparence est une des conditions nécessaires afin d'aligner les décisions des agents économiques sur ses objectifs.

En nous basant sur l'analyse très pertinente de F.MISHKIN sur les « neuf principes scientifiques de base » de la politique monétaire contemporaine, nous pouvons la définir selon les principes suivants :

? « L'inflation est partout et toujours un phénomène monétaire » (vision monétariste) ? La stabilité des prix est source de bénéfices importants

? Il n'existe pas de relation à long terme entre l'inflation et le chômage. La courbe de Philips de long terme est verticale (approche néoclassique de la courbe de Philips cf. partie précédente)

? Les anticipations jouent un rôle crucial dans la formation de l'inflation et dans la transmission de la politique monétaire à l'économie réelle : la politique monétaire intègre le management des anticipations supposées rationnelles à son activité

? Le respect du principe de Taylor conditionne la stabilité des prix : il s'agit là de la règle de Taylor qui établit de façon explicite la dynamique de fixation des taux directeurs par les autorités monétaires. La formulation de cette règle est le résultat de travaux empiriques et est construit comme suit :

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avec le taux directeur fixé par la banque centrale à l'instant , le taux d'inflation, la

cible d'inflation de la banque centrale, le taux d'intérêt réel à l'instant , et les

niveaux respectifs du PI3 et du PI3 potentiel et et des coefficients. (Source

Wikipédia)

Les niveaux des coefficients sont déterminés par les autorités monétaires en fonction des spécificités des économies.

Cette règle est l'illustration de l'arbitrage que fait la banque centrale entre les écarts d' inflation et les écarts de P113 sachant que l'éloignement du P113 de son niveau potentiel suggère un risque de récession et que la politique monétaire a les moyens d'intervenir indirectement sur cet agrégat en décidant de baisser son taux directeur. Elle le fera sous condition que cela ne nuise en rien à son ciblage de l'inflation, soit dans le cas où l'inflation reste contenue dans la bande de 0 - 2%.

Cependant, dans les cas où le niveau de l'inflation dépasse sa cible, la politique monétaire devra réagir par une augmentation de son taux directeur, la maîtrise de l'inflation étant sa mission principale, ce qui déprimerait encore plus la production. On voit bien ici les défis que représenterait un épisode de stagflation. Mais aussi les défis auxquels sont confrontées les banques centrales à l'heure actuelle avec des risques de tombée dans une spirale inflationniste et des taux d'intérêts directeurs déjà à leur niveau plancher.

Pour conclure, l'équation de Taylor reste l'assurance d'un bon cadrage de la politique monétaire et son application a pu assurer durant près de 30 ans la stabilité économique des pays qui l'ont adopté. Elle formalise le comportement des banques centrales ainsi que leurs principaux objectifs que sont la lutte contre l'inflation et le maintien de P113 proche de son niveau potentiel.

? Il existe un décalage temporel notable entre les impulsions de la politique monétaire et leur transmission à l'économie : on peut dire que la politique monétaire fonde ses décisions sur la formulation de projections économiques en se servant pour cela des modèles D.S.G.E. qu'elle retient pour ses analyses économiques.

Cela est encore plus vrai en période d'instabilité puisque les canaux de transmission de la politique monétaire se retrouvent « enroués » comme nous avons d'ailleurs pu le constater pendant la récente crise.

? L'indépendance des banques centrales est une des conditions d'efficacité de la politique monétaire : en effet, la crédibilité de la politique monétaire, et par conséquent sa capacité à orienter le comportement des agents économiques, est intimement liée à l'image d'impartialité qu'elle renvoie au public. Aussi, comme le soutiennent de multiples travaux, ce principe d'indépendance est aussi un moyen de limiter les comportements

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irresponsables des agents économiques qui ne peuvent plus s'assurer du secours de la banque centrale en cas de difficulté.

? L'engagement ferme à mener leurs actions dans le but de satisfaire des objectifs finaux fixés explicitement est déterminant dans la bonne conduite des politiques monétaires.

Les frictions sur les marchés financiers jouent un rôle important dans les cycles d'affaires : cette croyance n'est pas clairement mentionnée dans la dynamique de décision des politiques monétaires. Cependant, sa pertinence vérifiée en fait un thème important dans les orientations stratégiques des banques centrales.

III. La stratégie des banques centrales

1. Objectifs finaux et objectifs intermédiaires:

Les objectifs finaux officiels poursuivis par les autorités monétaires sont, comme nous l'avons mentionné et expliqué à plusieurs reprises dans les parties précédentes, en premier lieu la recherche de la stabilité des prix et, dans le cadre limitatif imposé par ses statuts, le maintien du niveau de production assez proche de son niveau potentiel.

La BCE a fait le choix de fixer une cible stricte d'inflation à 2%. Le taux d'inflation annuel harmonisé de la zone EURO doit alors être contenu entre 0 et 2 % mais proche de 2% afin d'éviter les risques de déflation.

La Fed et la banque d'Angleterre ont pour leur part fait le choix de ne pas fixer de cible d'inflation formelle.

Les banques centrales ne peuvent pas atteindre directement ces objectifs qui sont en réalité les résultats d'ajustements macroéconomiques complexes ayant lieu dans l'économie réelle.

Elles peuvent cependant influencer la marche des économies à travers des outils tels que les variations des taux d'intérêts directeurs et celui de la masse monétaire.

Elles vont alors fixer des « objectifs intermédiaires » concernant :

- Le taux de croissance de la masse monétaire évaluée généralement sur la base de l'agrégat M3 pour l'Europe M2 pour les États-Unis. La BCE a officiellement fixé cet objectif à 4 % par an mais le dépasse assez souvent.

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- Les taux d'intérêts directeurs : le niveau de ces taux est aujourd'hui le principal objectif intermédiaire retenu par les banques centrales.

- La maîtrise des taux de change : par l'achat et la vente à terme de devises sur la base de ses réserves ou en utilisant son taux directeur pour influencer de manière indirecte la demande pour la monnaie nationale. Cette dernière solution est en réalité difficilement applicable puisque le canal du taux de change est considéré comme secondaire dans la transmission de la politique monétaire.

La manière dont ces objectifs intermédiaires agissent sur les objectifs finaux dépend de leurs impacts sur la formation des agrégats économiques. Impacts que nous avons pu clairement préciser dans la première partie de ce mémoire lorsqu'on a expliqué le fonctionnement des modèles IS-LM, AS-AD et de la N.E.C. Comme nous l'avons aussi précisé, chaque banque centrale retient et élabore ses propres modèles de prévisions avec des dynamiques souvent plus complexes que ces premiers modèles.

La manière dont ces objectifs intermédiaires agissent sur l'économie réelle à court terme peut être résumée par l'identification des principaux canaux de transmission de la politique monétaire. Cette analyse via les canaux de transmission est primordiale puisque l'une des principales préoccupations des banques centrales mais aussi des économistes en général concerne l'efficacité effective de ces canaux de transmission et par extension celle du choix des objectifs intermédiaires. Nous détaillerons le fonctionnement de ces canaux de transmission dans la section suivante.

2. Méthodologie de la prise de décisions : analyse monétaire et analyse économique

Les banques centrales prennent leurs décisions après avoir clairement déterminé les influences de la conjoncture économique et des évolutions de la masse monétaire sur les mouvements futurs des prix et de l'activité économique. Elle procède alors à des analyses monétaires sur la base de l'équation de Fisher et à des analyses économiques sur la base des modèles D.G.S.E. à sa disposition. Dans le cas de l'analyse économique, les banques centrales vont observer des variables clés telle que le PIB, les taux de change, les prix à la production, la balance commerciale, le niveau des salaires, le niveau d'endettement des ménages, le niveau des primes de risque, le prix des actifs financiers etc. Son analyse lui permet de comprendre l'évolution de l'économie réelle, de formuler des projections économiques et d'établir l'évolution future des prix et même de mettre à jour les anticipations des agents économiques au moment de l'analyse. En ce qui concerne l'analyse monétaire, elle va s'intéresser à la demande de monnaie, aux différents agrégats monétaires ainsi qu'au degré de liquidité et de substituabilité des actifs monétaires entrant dans l'agrégat M3 afin d'identifier en définitive les pressions éventuelles sur les prix futurs

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IV. Les instruments de la politique monétaire

Afin de mettre en oeuvre sa politique monétaire, la banque centrale, après avoir fixé ses objectifs intermédiaires, endosse son rôle de fournisseur de monnaie banque centrale aux institutions financières qui lui empruntent de la monnaie pour couvrir principalement les opérations de compensation entre banques commerciales et de refinancement liés à leurs activités de prêteur. Il s'agit de la constitution de réserves en monnaie banque centrale parallèlement à l'octroi de prêt aux agents économiques et d'opération de refinancement lié à l'utilisation de ces lignes de crédit par les agents concernés. Les banques commerciales ne pouvant pas créer de monnaie, banques centrales doivent systématiquement compenser les opérations qu'elles réalisent.

La politique monétaire possède alors différents instruments d'intervention sur le marché monétaire. Ces instruments sont les suivants :

Définition du marché monétaire :

Le marché monétaire est un marché de la liquidité à court terme (de 24 heures à 1 an voire 2 ans dans certains cas) et sur lequel interviennent les institutions financières que sont entre autres les banques commerciales, les Trésors publics, les assurances, certains fonds financiers mais aussi certaines grandes entreprises. Ces dernières placent (offre) ou empruntent (demande) de la monnaie en échange de titres tels que les bons du trésor, les certificats de dépôt négociables (CDN) pour les banques, les billets de trésorerie (BT) pour les grandes entreprises etc. Ce marché se décompose en deux sous - marchés : le marché interbancaire composé uniquement d'établissements de crédit et qui possède un fonctionnement propre (durée, taux, conditions) et le marché des titres de créances négociables (TCN), BT, CDN, bons du trésor etc., lesquels ne sont pas côtés et sur lequel interviennent tous les acteurs du marché monétaire.

C'est sur ce marché monétaire qu'intervient la banque centrale. Celle-ci va influencer les conditions de taux d'intérêt du marché en fixant le volume de liquidité qu'elle offre, i.e. un grand volume de liquidité tire les taux du marché à la baisse, et en fixant son taux d'intérêt, i.e. un taux d'intérêt faible tire les taux du marché à la baisse.

1. Les opérations d'open-market et de crédit

Les opérations d'open-market ont pour principales caractéristiques, la fourniture temporaire de monnaie banque centrale en échange d'une rémunération au taux d'intérêt directeur et sous condition de fournir à la banque centrale des garanties éligibles mises en pension. Ces garanties sont principalement des TCN. Ces titres vont alors figurer à l'actif de la banque centrale jusqu'à échéance du prêt consenti.

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Les principales opérations d'open-market sont hebdomadaires et prennent la forme d'appels d'offre émis par la banque centrale sur le marché monétaire dont les conditions sont le volume de monnaie disponible aux prêts, la durée du prêt (généralement 1-3 semaines) et le niveau du taux d'intérêt applicable au prêt.

Tout besoin de refinancement non couvert par ces opérations oblige les banques concernées à se tourner vers le marché interbancaire, i.e. se financer à très court terme auprès des autres banques commerciales, à un taux d'intérêt calculé sur la base des taux d'intérêt directeurs de la banque centrale. Il s'agit des taux dits EONIA (au jour le jour) et EURIBOR (d'un mois à 3 ans).

Un autre type d'opération d'open-market existe, il s'agit d'appels d'offre dont la fréquence est mensuelle. Leur échéance est plus longue (généralement supérieure à 3 mois) et le taux d'intérêt directeur associé est plus élevé. Ces opérations sont destinées à des institutions financières moins bien intégrées sur le marché monétaire.

Enfin, des opérations dites de « réglages fins » auxquelles aucune échéance n'est associée et sont utilisées dans des situations exceptionnelles.

Ces 3 premiers instruments des banques centrales sont le point de départ de la transmission de la politique monétaire à l'économie réelle. Ils permettent la gestion de la masse monétaire en circulation (objectifs intermédiaires) et la poursuite de l'objectif intermédiaire de taux d'intérêt.

2. Les facilités permanentes et les réserves obligatoires

En parallèle des opérations d'open-market, d'autres instruments existent. Les facilités permanentes :

? Les facilités de prêt marginal : consiste en des prêts dont la durée n'excède pas une journée et dont le montant n'est pas limité. Il s'agit de répondre à des situations exceptionnelles et urgentes. Les taux d'intérêt associés à ces prêts sont élevés et servent de plafond dans le calcul des taux d'intérêt interbancaires.

? Les facilités de dépôt : il s'agit du taux de rémunération des dépôts des banques commerciales auprès des comptes de la banque centrale. Ce taux est bien sûr strictement inférieur au principal taux directeur.

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Les réserves obligatoires :

La banque centrale peut agir sur le niveau de levier des banques commerciales en leur imposant un taux de réserve obligatoire constitué de dépôt de leurs clients. Ces réserves doivent servir à couvrir les risques de liquidité associés à leurs positions et assurer une meilleure stabilité des taux d'intérêt du marché monétaire.

En résumé, les instruments que nous avons présentés permettent de transmettre de façon directe au marché monétaire les décisions stratégiques des banques centrales ; et vont, via les canaux de transmission que nous allons définir dans la partie suivante influencer l'économie réelle, de telle manière à permettre en définitive, la réalisation des objectifs finaux des banques centrales.

3. Opérations exceptionnelles :

D'opérations structurelles : consiste en l'achat/la vente définitive de titres financiers par la banque centrale en vue d'impacter de façon directe le volume de la masse monétaire ou accessoirement le prix des actifs et les taux d'intérêt sur les marchés obligataires entre autres. Ce type d'instrument a retrouvé une place de choix durant la récente crise.

Les reprises de liquidité en blanc : vise à diminuer la masse monétaire en proposant des rémunérations intéressantes sur les dépôts des banques auprès des BCN.

L'émission de certificats de dette : la banque centrale devient créancière des autres banques dans le but de retirer des liquidités de l'économie.

Les échanges de devises : influence les taux de change.

On peut souligner ici l'importance du marché interbancaire dans la transmission de la politique monétaire. Tout disfonctionnement de ce marché peut être la source de graves déséquilibres économiques et financiers. Le marché interbancaire est ainsi « une plateforme de jeu interactive » déterminante dans la quête de la croissance et de la stabilité macroéconomique. Les mouvements des taux interbancaires sont donc suivis de près par l'ensemble des acteurs financiers et économiques, par les banques centrales mais aussi par les États. Ce sont des indicateurs clés pour juger de l'état de la conjoncture économique, de la nature des anticipations, et pour élaborer des projections.

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V. Les canaux de transmission de la politique monétaire

Les principaux canaux de transmission considérés pour la politique monétaire sont ceux du crédit et du taux d'intérêt. Cependant, d'autres canaux de transmission existent et tiennent une grande importance dans la conduite d'une politique monétaire optimale. Nous allons à présent identifier la nature et le fonctionnement de ces canaux.

1. Le canal du taux d'intérêt

Notons que les décisions d'investissement se basent avant tout sur le taux d'intérêt réel à long terme plutôt qu'à court terme. Ce qui implique que le mécanisme de transmission d'une politique monétaire expansionniste sur l'investissement par le biais du taux d'intérêt n'est pas valable à court terme. Ainsi, pour agir sur l'économie réelle, la politique monétaire doit pouvoir induire des baisses des taux d'intérêt réels de long terme. Lorsqu'elle satisfait aux conditions de crédibilité définies dans notre développement, la banque centrale est capable d'agir sur ces taux de long terme grâce à la fixation de son taux directeur à court terme sur le marché monétaire. Ce résultat est possible car la construction de la courbe par terme des taux du marché ** est telle que les taux d'intérêt de long terme sont calculés sur la base d'une moyenne des taux d'intérêt anticipés à court et moyen terme. Ainsi, des mouvements de baisse du taux d'intérêt directeur de court terme induisent à la fois une baisse immédiate des taux d'intérêt réels, les prix étant rigides à court terme, mais aussi, suppose qu'une baisse des taux d'intérêt nominaux de long terme à laquelle s'ajoutent des anticipations de hausse de l'inflation liées à la politique moins rigide finissent par faire baisser les taux d'intérêt réels de long terme. Ainsi, ce mécanisme devrait au final inciter les entreprises à investir, le coût du capital étant non élevé et ainsi créer de la croissance et une baisse du niveau du chômage. Aussi, certains auteurs soulignent le fait que ces dépenses d'investissement ne concerneraient pas que les entreprises mais aussi la consommation via des achats de biens durables ou l'investissement immobilier.

** Cette courbe représente les taux d'intérêt moyens pratiqués sur les obligations et calculés en fonction du temps, du taux de refinancement, du taux sans risque et des primes de risque.

Dans une certaine mesure, ce canal du taux d'intérêt fait autant de partisans qu'il ne soulève de critiques quant à son efficacité. Notons que ce canal est plus efficace dans les économies orientées vers le marché comme aux USA et en UK tandis que le canal du crédit serait plus important dans les économies orientées vers le système bancaire comme en Europe.

Enfin, notons que ce canal peut être effectif même si les taux directeurs sont déjà au plancher et cela par le biais d'anticipations d'inflation liées à la variation du volume de liquidité offert par les banques centrales. C'est d'ailleurs la stratégie que ces dernières ont adopté face au problème du « zero lower bond » durant la récente crise.

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Le canal du taux de change

Il n'y a pas de surprise lorsqu'on rappelle que la perte de valeur d'une monnaie par rapport à une autre (dévaluation) peut être très profitable en ce sens qu'elle favorise les exportations et donc l'accroissement des activités nationales, l'emploi, la consommation et l'épargne. Cela, à condition bien sûr de la soutenabilité économique du renchérissement des importations. Cela dépendra alors de la catégorie du pays, majoritairement exportateur comme la Chine ou fortement importateur.

Mais les effets du taux de change sur l'économie réelle ne s'arrête pas à cette considération mais influence aussi les mouvements de capitaux et les risques liés à la fluctuation du change comme nous l'avons précisément décrit dans la section 1 de la première partie de ce mémoire.

Mais comment la politique monétaire agit-elle via ce canal du change ? La logique derrière cette question est la suivante :

Une baisse des taux d'intérêts directeurs implique une baisse de la rémunération des dépôts en monnaie nationale et donc une baisse du volume de ces dépôts contre une hausse du volume des dépôts libellés en monnaie étrangère qui sont mieux rémunérés. Par conséquent, l'application de la loi de l'offre et de la demande conduit à la baisse de la valeur de la monnaie nationale. Cette baisse de la valeur relative de la monnaie nationale correspond aussi à une hausse du pouvoir d'achat des pays étrangers sur les biens nationaux et donc à une augmentation de la demande étrangère et donc du niveau des exportations et du PIB national sous certaines conditions. La banque centrale peut aussi intervenir de façon directe sur le marché des devises mais ne le ferait que très rarement.

Les considérations de change ne sont pas explicitement prises en compte dans les décisions de la politique monétaire et certains auteurs critiquent ce fait. Ces derniers estimant que ce canal a été trop minimisé par les autorités monétaires depuis l'adoption du régime de change flottant.

3. Les canaux du prix des actifs autre que la monnaie

L'idée de base reste assez simple : lorsque le taux directeur de la banque centrale diminue, l'attractivité des titres obligataires baisse du fait de la baisse de leur taux de rendement. La hausse du prix des titres obligataires déjà détenus conduit à leur cession sur les marchés secondaires et donc, à une augmentation de la demande de monnaie. Ces liquidités récupérées, ainsi que les liquidités disponibles au placement à ce moment donné sont alors investies pour partie sur le marché des actions qui offre des potentialités de gains plus élevées.

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Le cours des actions augmentent alors créant un effet richesse pour les détenteurs de ces titres qui pourra se formaliser par une augmentation de la demande pour des biens de consommation.

Mais aussi, cette affluence de liquidité disponible pour le financement des entreprises leur offre l'opportunité et l'incitation à l'engagement de nouveaux projets d'investissement à long terme. Celles-ci profitent alors de la hausse des cours des valeurs actionnariales pour émettre de nouvelles actions à un prix de marché supérieur à leur valeur fondamentale. La finalité étant bien sur l'augmentation du PIB, de la consommation et la baisse du chômage.

Tobin, en 1969 approche ce mécanisme via le calcul d'un coefficient « q » qui met en rapport la valeur boursière des entreprises et le coût de renouvellement du capital productif.

Notons enfin que cette approche peut tout autant s'appliquer au marché immobilier par exemple lorsqu'on considère qu'il constitue une opportunité d'investissement alternatif et que la valeur des biens immobiliers est relativement plus importante lorsque celle des obligations et titres assimilables diminue.

Le revers de ce canal du prix des actifs serait les risques liés à la formation de bulles spéculatives sur ces marchés.

4. Le canal du bilan

Par ailleurs, et dans la logique du canal précédent du prix des actifs, une hausse de la consommation ou de l'investissement peut être induite par ce qu'on peut appeler le canal du bilan. En effet, l'impact positif qu'une politique monétaire peut avoir sur la valeur des titres détenus par des agents économiques, engendre une amélioration de leur situation patrimoniale, leurs permettant d'être éligible à de nouveaux emprunts pour la conduite de projets d'investissement ou pour la consommation. Ce canal a alors une influence sur le canal du crédit. Aussi, l'amélioration induite par ce financement supplémentaire sur la structure financière des entreprises, sur leur rentabilité financière, voire sur leur rentabilité économique, tend à permettre l'amélioration des conditions économiques et de financement de l'ensemble de la nation.

Une telle politique permet par ailleurs une baisse notable des problèmes de sélection adverse et d'aléa de moralité, lesquels contraignent le financement des projets d'investissement envisagés par les entreprises. Ce dernier point implique que dans une certaine mesure, une telle politique monétaire aurait pour conséquence d'assainir les conditions économiques en permettant que soit alloués des financements à des projets moins risqués et plus viables. Les études dans ce domaine ayant démontré que des taux d'intérêt élevés tendent à décourager les « good project » au profit de projets plus risqués « bad project ».

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Enfin, il est important de noter que les décisions des autorités monétaires auront un effet sur la valeur patrimoniale des agents dans une autre mesure. En effet, lorsque l'on s'intéresse aux engagements financiers des agents que sont les dettes et les créances, il faut noter qu'une politique monétaire très accommodante, qui va impulser une hausse du taux d'inflation, aura pour effet de diminuer l'endettement réel des emprunteurs, soit d'améliorer leur situation patrimoniale avec ce que cela implique en terme d'éligibilité aux financements. A l'inverse, une telle politique sera négative pour les prêteurs.

Attention, on notera que si, dans le cas contraire, on est face à une politique monétaire très restrictive, la dégradation du patrimoine des agents économiques peuvent avoir des effets très néfastes sur l'investissement et la consommation.

5. Le canal du crédit

Les marchés financiers ne suffisent pas à assurer le financement des besoins en liquidité de l'ensemble des agents économiques. Les conditions d'accès au marché et d'éligibilité au financement sont telles qu'une grande partie des entreprises en sont exclues. Les banques commerciales tiennent alors un rôle majeur pour contourner les limites des marchés financiers et assurer, en complément de ces derniers, une bonne allocation des ressources financières.

Elles occupent alors une place importante dans la transmission de la politique monétaire via le montant de crédit qu'elles accordent. Lorsque la banque centrale baisse ses taux, tout ou partie de cette baisse doit en temps normal se répercuter sur le volume de crédit que les banque de second rang vont octroyer (sauf en cas de « credit crunch » persistant). Les crédits sont utilisés par les agents économiques en consommation de biens ou investis dans des projets d'investissements. Cela aurait bien sûr pour effet d'améliorer la conjoncture économique.

L'efficacité de ce canal reste très discutée dans un contexte récent de vagues de libéralisation financière. Il semble pourtant qu'il ait toujours une importance considérable, notamment en ce qui est de la redistribution des richesses dans l'économie et dans le développement de l'entreprenariat et du crédit à la consommation. Ce canal reste cependant primordial en Europe où l'intermédiation financière occupe toujours une place prédominante.

On peut noter que, selon la théorie, la persistance de l'intermédiation financière tient du fait que l'importance des incertitudes liées au fonctionnement des marchés financiers en termes de transparence de l'information, de problèmes de sélection adverse, d'instabilité du prix des actifs et de risques de défaut ; font que certains agents préfèrent se tourner vers ces institutions qui possèdent les connaissances, l'expérience ainsi que la « retenue » qui leur est imposée par la réglementation prudentielle, pour sécuriser les dépôts et investissements.

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De nombreuses études continuent d'être menées sur l'efficacité des canaux de transmission de la politique monétaire, leur nature et leur fonctionnement. Par exemple celles de Mishkin ou d'Arkeloff qui tendent à expliquer les choix des ménages en situation d'incertitudes.

Dans tous les cas, l'importance de ces canaux et leur fonctionnement dépendront beaucoup de la conjoncture économique, des caractéristiques structurelles des économies et des types de politiques monétaires en vigueur.

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TITRE 2 : La politique monétaire depuis le début de la « grande dépression » : Le bilan

I. Les principaux défis de la politique monétaire et les limites des stratégies conventionnelles

Dans cette seconde partie, nous étudierons les réactions des autorités monétaires durant les moments forts de la « grande dépression » et nous jugerons de leur pertinence, de leur efficacité et de leurs implications.

Depuis la crise des subprimes, laquelle a été suivie par la crise des dettes souveraines à partir de 2010, les banques ont dû faire face à des défis considérables. Les rôles primordiaux qu'elles tiennent dans les mécanismes de stabilisation économique en font les principales responsables dans la lutte contre les situations de crises et du retour à des situations économiques et financières soutenables. Pour remplir ce rôle les banques centrales peuvent utiliser tous les outils qu'elles ont à leur disposition. Cependant, conformément aux principes qui conditionnent leur existence, elles peuvent agir librement dans ce sens mais sous contrainte de réaliser de façon conforme leur mission de lutte contre l'inflation.

La crise des subprimes a entraîné un fort recul des activités économiques dans les pays développés, une augmentation des taux de chômage, un recul notable de la demande globale à laquelle s'ajoute un problème de surendettement des ménages, une forte augmentation des niveaux des dettes publiques et des taux d'intérêt associés, une forte désinflation et de grands risques d'entrer dans un cycle déflationniste, des faillites en cascade entre autres.

Sans pour autant revenir sur les origines de cette crise et sur sa mise en oeuvre, nous devons souligner que toutes ces conséquences désastreuses viennent avant tout de la forte contraction des marchés monétaires et financiers qui ont cessé de jouer leur rôle dans le financement des activités économiques. Les taux d'intérêt à court et long terme du marché monétaire augmentent parallèlement à des comportements de « crédit crunch » de la part des établissements financiers qui cherchent à réduire la taille de leur bilan pour se protéger. La valeur des actifs sur les marchés financiers dégringolent. Cette contraction est la conséquence d'une crise de confiance généralisée sur ces marchés mais aussi au niveau des ménages avec des phénomènes de « bank-run ».

Le principal défi des autorités monétaires au lendemain de la crise est de se substituer aux marchés interbancaires et financiers devenus gravement défaillants. Le choix de ses objectifs intermédiaires répond donc, dans un premier temps, à cette nécessité.

Dans cette optique, les banques centrales décident dans un premier temps de baisser leur taux d'intérêt directeur jusqu'à ce que ceux-ci atteignent des niveaux plancher. Conformément à

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notre étude dans la partie précédente, ces mesures visaient à rétablir le fonctionnement normal des canaux du taux d'intérêt du crédit, mais aussi, de jouer positivement sur les canaux du prix des actifs et de la valeur du patrimoine. Cela en fournissant la liquidité nécessaire au bon fonctionnement du système bancaire et en dirigeant les anticipations d'inflation à la hausse afin de tirer à la baisse les taux d'intérêt réels de long terme. Aussi, la BCE a annulé, voire rendu négative, la rémunération des réserves des banques commerciales dans ses comptes afin de les inciter à prêter leurs excédents de liquidités. Cette mesure a cependant reçu plusieurs critiques que nous aborderons dans notre bilan d'efficacité.

Ces décisions politiques étaient nécessaires pour faire face au blocage de l'économie, mais très insuffisantes puisque les banques centrales ont rapidement été confrontées à ce que l'on appelle le problème du « zero lower bond », situation dans laquelle l'outil du taux d'intérêt devient inutilisable puisque, ayant atteint des valeurs très faibles et proches de zéro, il n'a plus aucun effet sur la courbe à terme des taux d'intérêt, ni sur les autres canaux de transmission d'ailleurs.

C'est alors que les banques centrales ont dû rapidement répondre à ce problème en mettant en oeuvre de nouvelles stratégies, i.e. en élaborant de nouveaux objectifs intermédiaires et de nouveaux instruments, afin de combattre les effets de la crise. Il s'agit de ce que l'on nomme couramment les politiques monétaires non conventionnelles.

La sévérité des défis que doivent surmonter les banques centrales les a, dans une certaine mesure, obligé à rompre avec leurs principes d'indépendance et d'impartialité. Leurs positions ont d'ailleurs soulevé des inquiétudes quant à la crédibilité de leur action.

Nous allons dès lors expliquer en quoi consistent ces politiques non conventionnelles, dans quelles mesures ont-elles été utilisées et quelles ont été leur efficacité et leurs implications pour l'avenir.

II. Le recours aux politiques monétaires non conventionnelles 1. Les politiques de « quantitative easing » (assouplissement quantitatif)

Ce type de politique consiste à rendre les conditions d'accès à de la monnaie banque centrale beaucoup plus souple, cela en combinant trois principales actions :

- En augmentant le volume de liquidité offerte par la banque centrale lors de ces appels

d'offre

- En multipliant le nombre d'appels d'offre

- En augmentant la durée de remboursement des prêts qu'elle consent

- En élargissant la palette de titres éligibles pour garantir les prêts consentis

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Ce type de politique vise principalement à saturer la demande sur le marché monétaire afin que les activités de financement puissent se remettre en place.

Cependant, elles ont aussi pour effet d'augmenter la taille du bilan de la banque centrale et de l'obliger à détenir ces titres pour des durées moyennes plus longues ce qui la soumet à des risques de défaut et de marché croissant en fonction son niveau de tolérance pour l'acceptation des titres en échange de prêt et du degré d'instabilité de l'économie.

Enfin, ces mesures ont pour effet d'augmenter la base monétaire disponible pour le financement de l'économie mais n'assure cependant pas l'utilisation effective de ces liquidités de telle façon à induire une augmentation proportionnelle de la masse monétaire en circulation. En effet, il semble que cela soit d'ailleurs le cas à l'heure actuelle et depuis le début de la crise, avec un canal du crédit qui semble complètement roué à la fois à cause du surendettement des agents privés et de la frilosité des banques à assumer les risques de défaut ou pire ceux liés à une nouvelle crise systémique.

Enfin, certains intellectuels alertent sur les risques d'hyperinflation qui peuvent découler de telles mesures.

2. Les politiques de « credit easing » (assouplissement des conditions d'accès au crédit)

Ce type de politique a été utilisé en complément des politiques d'assouplissement quantitatif dans le but d'agir plus directement sur le financement de l'activité économique et en palliation de la défaillance des canaux du crédit.

Ces politiques consistent en des achats directs et définitifs de titres auprès des institutions financières et des marchés financiers sur les marchés secondaires. Dans le cas des États-Unis, les achats concernent aussi des bons du trésor acquis sur le marché primaire très souvent.

Ces opérations ont pour but de retirer les actifs sensibles du marché, d'agir sur la valeur de marché de certains titres (ex : obligations), d'apporter de la liquidité directement sur les marchés et par extension, de rétablir un fonctionnement normal de ces marchés alors en partie assainis et rassurés de telle sorte à ce qu'ils assurent à nouveau leur rôle dans le financement de l'économie.

Les banques centrales se servent de leurs réserves pour mener ces opérations.

Ce type de politique présente un danger important pour les banques centrales qui voient leur bilan se détériorer avec chaque entrée à son actif de titres présentant le plus souvent des risques de marché élevés et pour certains des risques de défaut notables. La conséquence de ces dégradations font que des critiques se soulèvent quant à la légitimité des actions des banques centrales concernées, quant à leur crédibilité mais aussi quant à ce que cela implique

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en terme de risque d'hyperinflation et de dévaluation de la monnaie concernée. Cependant, ces inquiétudes sont contrebalancées par le caractère strictement exceptionnel, nécessaire et temporaire de ce type d'actions.

Les politiques de « credit easing » ont été utilisées de façon très différente en fonction des banques centrales et de leurs objectifs. En effet, la BCE s'attèle alors à débloquer le marché monétaire tandis que la Fed et la BoE font du retour à la stabilité sur les marchés financiers leur principale préoccupation. C'est par excès de prudence que la BCE s'est refusée à mettre en oeuvre ce type de politique à grande échelle mais aussi par son grand attachement à ses principes d'indépendance et d'impartialité. Tandis que la Fed a utilisé ces politiques dès le début de la crise de façon importante et répétée.

La BCE, au contraire de la Fed et de la BoE, s'engage à compenser ses actions par des opérations de stérilisation afin d'éviter de créer trop d'inflation. C'est-à-dire que la liquidité qu'elle injecte dans l'économie via les opérations de « credit easing » doit être compensée par le retrait de liquidités sur d'autres postes.

On peut par exemple noter que la Fed rachète dès le début de la crise un volume important de titres risqués adossés aux créances hypothécaires (MBS) dans le but de maîtriser la charge de la dette dans le budget des ménages puisque ces crédits avaient été accordés avec un taux d'intérêt variable ; mais aussi pour stopper la dégringolade des prix de l'immobilier et assainir les bilans des participants aux marchés financiers. Vient ensuite le tour des titres du secteur privé et des bons du trésor.

Aujourd'hui, bien que la BCE se soit toujours refusée à intervenir sur le marché de la dette publique, voici que, comme ses homologues américains et anglais, elle engage depuis plus d'un an des programmes de rachat massif d'obligations publiques, mais aussi dans une certaine mesure privée, sur les marché secondaire afin d'influencer de façon décisive les taux d'intérêt associés aux dettes publiques, les taux d'intérêt du marché obligataire, de faire baisser les primes de risque et de soutenir de façon directe les économies en voie à la déflation. Pourtant, la BCE s'était jusqu'à présent contentée de décision de « quantitative easing » assez timide en comparaison des mesures anglaises et américaines.

Dans le cas général, les banques centrales ont toutes exprimé leur ferme intention de maintenir leurs taux très bas et de procéder si besoin est à de nouvelles mesures exceptionnelles tant que la reprise économique n'aura pas été effectivement consommée.

Voici quelques exemples des programmes qui ont été mis en oeuvre par les banques centrales depuis le début de la crise :

- « Term Auction Credit Facility » (TAF) - 2007 - Fed : « quantitative easing » - « Term Securities Lending Facility » (TSLF) - 2007 - Fed : réservés aux

principaux acteurs du marché, ce programme permet d'échanger pendant 28 jours des

divers titres contre des bons du Trésor.

- « Securities Market Program » (SMP) - 2010 - BCE : achats d'obligations d'Etat

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3. L'utilisation des politiques monétaires non conventionnelles durant la crise

Voyons quelques illustrations graphiques qui vont nous permettre d'établir plus clairement dans quelles proportions les banques centrales des principaux pays engagés dans la crise que sont la BCE, la Fed et la BoE, ont eu recours à ces types de politiques.

On peut constater au regard de ces deux derniers graphiques que les taux d'intérêt directeurs présentés suivent les mêmes tendances, ce qui confirme bien le suivi d'une règle établie.

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On remarque que la BCE a été beaucoup plus timide que les autres B.C. dans la baisse de son taux depuis le début de la crise.

Les « repos » concernent les actifs mis en pension contre liquidité. Ce graphique nous donne une idée de l'impact des mesures de « quantitative easing » pour la BCE. On remarque que malgré des taux de « refi » largement diminués depuis fin 2008, le temps de réaction des banques a été tout de même très long. Une franche reprise des activités du marché monétaire se fait à partir de début 2012 avec le pic d'utilisation des politiques de « quantitave easing » et l'introduction de politiques de « credit easing » avant de ne ralentir à nouveau ces derniers temps. Cela étant sûrement du au problème du « zéro lower bond »

Bilan de la Fed, BoE, BoJ et BCE, base 100 en 2007

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On note grâce à ce dernier graphique l'importance de la réaction de la Fed et de la BoE dès les débuts de la crise avec une explosion de la taille de leur bilan du fait majoritairement des politiques de « credit easing ». Tandis que la BCE reste encore en large recul jusqu'en 2012 où elle agit de façon plus engagée.

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Ces deux derniers graphiques nous permettent de constater les proportions très importantes de titres détenus fermement par la Fed et donc sur l'ampleur de l'utilisation des politiques de « credit easing ». En 2012, près de 90% de son actif est composé uniquement de titres. Tandis que dans le cas de la BCE cette proportion reste relativement très faible jusqu'en 2012 où elle augmente rapidement et atteint un peu moins de 50% de la valeur de son actif. Cela étant assimilable au lancement des programmes de rachat de dettes publiques.

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Nous pouvons observer plus en détail dans ces deux derniers graphiques, la décomposition par nature de l'actif de la Fed. On remarque que dans le premier graphique qui concerne la proportion de MBS et de titres du trésor, qu'en début de crise et jusqu'en 2011, la majorité des titres détenus sont des titres MBS. Depuis 2011, les titres du trésor deviennent majoritaires. Ces observations sont en accord avec la stratégie américaine de stabilisation des marchés financiers.

De manière plus complète détaillée, le dernier graphique nous donne une décomposition plus fine de ces acquisitions ainsi que des indications sur les volumes et la nature des crédits accordés entre 2007 et 2009. On remarque alors qu'en début de crise, une très grande attention a été portée à la stabilisation des marchés par des crédits importants aux investisseurs et au secteur financier. Mais aussi, ces opérations ont consisté en des opérations de nettoyage avec les programmes TSLF qui visent à retirer du marché pendant un temps donné, les actifs les plus risqués et qui étaient responsables de l'entrée en crise. (cf définition partie précédente).

Conclusion

Ce qu'il est très important de souligner c'est le niveau de risque des engagements sur titres pris par les banques centrales ainsi que les atteintes en terme de crédibilité de la politique monétaire qui s'est de loin éloignée de ses missions restrictives d'avant crise. La taille du bilan des banques centrales a énormément augmenté, en même temps que le niveau du risque de défaut et de marché associé à ses actifs et enfin les risques liés à la stabilité de la monnaie. La gestion de crise par la BCE et par la Fed est cependant différenciable, la BCE s'est plus longtemps accrochée à son principe de neutralité que la Fed qui pour sa part à réagi de façon extrêmement forte dès de début de la crise en se portant acquéreuse de façon directe de titres du trésor et de titre privés, souvent de façon ferme, dans le but de stabiliser les marchés financiers et de contribuer de façon directe à la relance de l'économie.

Ce comportement peut aussi se justifier par le fait que l'économie américaine est une économie majoritairement financée par le marché financier contrairement à l'économie européenne qui est tournée vers le système bancaire. Cependant, la BCE, après une période de frilosité passe le cap, par obligation au vue de l'impact de la crise de la dette en plus de celle des subprimes, et s'engage dans des rachat fermes et massifs de titres de dettes souveraines à long terme mais aussi du secteur privé à la différence que la BCE contrairement à la Fed refuse catégoriquement d'intervenir directement sur le marché primaire de la dette. Les objectifs étant toujours de saturer l'économie en liquidité afin de relancer l'économie réelle via l'investissement et la consommation ainsi que de stabiliser le système financier. Opération de stérilisation.

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III. Bilan d'efficacité des politiques monétaires dans la gestion de la crise

Les politiques menées durant la crise ont eu nombre d'effets positifs puisqu'elles ont empêché cette crise de devenir catastrophique. Il serait difficile de faire un bilan précis de l'efficacité des politiques monétaires récentes puisque nous n'avons non seulement pas le recul nécessaire à ce travail, l'activité de crise étant toujours au goût du jour, mais en plus les effets de ces décisions peuvent être si divers et les interactions si complexes qu'il serait difficile d'en faire un résumé en quelques lignes.

Nous pouvons tirer quelques conclusions majeures.

? Les politiques menées par la BCE et par la Fed n'ont pas engendré une reprise du crédit aux agents privés : en effet, malgré le fort activisme sur le marché monétaire, les banques restent toujours très frileuses et méfiantes à l'idée d'accroître à nouveau la taille de leur bilan. Au contraire, depuis le début de la crise, elles tentent systématiquement de couvrir leurs positions à risque en limitant le volume de crédit accordé aux agents privés mais en plus, elles placent la majeur partie des liquidités mises à leur disposition par la banque centrale sous forme de réserves afin d'être entièrement protégées. D'où la décision de la BCE de fixer le niveau de rémunération des excès de réserve à des niveaux négatifs. Mais le problème du blocage du crédit ne vient pas que des banques mais aussi des agents privés dont la demande est très faible. Et ce serait là le principal problème. L'excès d'endettement des ménages associé à leur pessimisme concernant la conjoncture économique font que ceux-ci ne désirent pas s'endetter d'avantage. L'un des principaux canaux de transmission de la politique monétaire reste bloqué.

·

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La baisse des taux de rémunération de dépôts semble avoir contribué à la baisse des taux de court terme associés aux dettes souveraines : dans la mesure où les banques ont été incitées à utiliser cette liquidité dans le placement sur titre.

· Les politiques menées ont atténué la crise de liquidité mais n'ont cependant pas permis une reprise franche de l'activité économique.

· Elles ont permis la reprise de confiance sur les marchés boursiers en soutenant notamment les valeurs des actions.

· Les effets des politiques monétaires sur la courbe des taux ont été notables puisqu'elles ont permis une baisse des taux de long terme ainsi que des taux d'intérêt réels ex-ante.

· L'envolée des taux d'intérêt sur les dettes souveraines a été en partie limitée.

· Les taux des prêts hypothécaires ont beaucoup baissé aux USA depuis le début de la crise

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? Les anticipations d'inflation sont restées très stables malgré la crise et le caractère inflationniste des politiques monétaires utilisées : en effet, les banques centrales et surtout la BCE, ont réussi haut la main le pari de la crédibilité. L'ancrage des anticipations d'inflation a été solide et cela même face à la crise, les bons des taux d'inflation à la hausse comme à la baisse et à la tendance déflationniste observée. Cela a permis aux politiques monétaires de pouvoir avoir des effets réels sur l'économie en permettant notamment la baisse des taux d'intérêts réels ex-ante parallèlement à baisse des taux d'intérêt nominaux. Ces premiers ont même atteint des niveaux négatifs, excellente chose pour la relance de l'investissement. On se rend compte encore une fois de l'importance qu'a le maintien de la crédibilité des politiques monétaires car si celle-ci avait été fragile, les agents auraient anticipé de la déflation ce qui aurait pu précipiter les économies dans une spirale déflationniste.

Voici un graphique qui illustre ce constat.

? Les primes de terme sur les marchés obligataires aux États-Unis sont devenues négatives depuis mi-2011, ce qui est positif en un sens mais implique cependant des risques de formation de bulle spéculative, les placements étant abusivement perçus sans risque. Il semble d'ailleurs que cela soit déjà le cas lorsqu'on observe l'évolution des prix immobiliers et des titres cotés en bourse qui semble excessive au regard du rythme de l'activité.

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? L'orientation des politiques a cependant placé en situation très difficile les OPCVM monétaire

? La crédibilité des banques centrales semble être de plus en plus remise en question ce qui constitue un risque important pour la stabilité de l'économie et de la monnaie. Leur bilan s'est en effet augmenté d'actifs de plus en plus risqués et leurs positions concernent des volumes de liquidité bien plus grands qu'avant la crise et pour des échéances en moyenne beaucoup plus longues.

? L'utilisation à grande échelle des politiques non conventionnelles inquiète en ce qui est des risques d'hyperinflation soudaine une fois le retour du bon fonctionnement des canaux de transmission.

IV. Le défi de l'EXIT pour les politiques monétaires : quelle stratégie adopter ?

Une question qui inquiète au plus haut point est celle de savoir comment les banques centrales comptent rétablir une masse monétaire soutenable pour la stabilité des prix une fois que l'activité économique aura redémarré. En effet, un défi de taille les attend car une fois que les canaux de transmission auront recouvré leur vigueur d'avant crise, il est fort probable que les énormes volumes de liquidité injectés par les banques centrales dans le système bancaire et les marchés monétaires se retrouvent effectivement dans l'économie réelle et conduisent à une explosion de l'inflation et à une forte dévaluation. L'occurrence d'une telle situation est très probable c'est pourquoi les banques centrales vont devoir finement adapter leur action afin de retirer progressivement de l'économie les liquidités excédentaires. Elles disposent pour cela de différentes options que sont entre autres :

- la remontée de ses taux d'intérêt,

- la cession des titres qu'elle a acquis à son actif pendant la crise,

- l'émission de certificats de dettes non négociables

- l'augmentation de la rémunération des dépôts

- ou dans une moindre mesure l'échange de devises.

Cependant, la plus grande question n'est pas réellement de savoir quels outils elles utiliseront mais de savoir quelles stratégies de sortie de crise vont-elles adopter. En effet, si les autorités monétaires adoptent un comportement trop basique et grégaire, il y a de fortes chances qu'à peine sortie de la récession, elles précipitent à nouveau les économies dans une nouvelle crise semblable à la précédente, ou dans sa continuité.

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En effet, en tentant de retirer trop brutalement les surplus de liquidité en circulation, elles vont engendrer une nouvelle crise de panique et de confiance dans les systèmes bancaires et sur les marchés financiers. Pire encore, si cela se produit, alors il est probable que même des recours à l'utilisation massive de politiques monétaires non conventionnelles ne puissent plus rétablir cette confiance au moins à moyen terme, puisqu'elles auront perdu de leur crédibilité.

Comment un tel scénario pourrait se produire ?

? La remontée trop rapide des taux directeurs :

- Risque d'engendrer une remontée des taux de marché plus que proportionnelle, ces taux restant très sensibles aux variations des taux de « refi » en période de fragilité économique. Cela aura pour conséquence d'augmenter brutalement les taux d'intérêt réels qui sont restés très bas ces derniers temps.

- Les bénéfices des opérations de « quantitative easing » sur la baisse du taux d'intérêt sur les dettes souveraines risquent d'être en partie annulés.

- Mais encore, cela aura aussi pour effet d'augmenter la charge des remboursements des opérations ayant été conclues avec des conditions indexées sur la variabilité des taux du marché interbancaire, financiers, directeurs ou sur les obligations d'état.

En conclusion, il est fort probable que dans une telle situation, le canal du crédit se retrouve à nouveau bloqué engendrant à nouveau des risques de récession et de déflation. Notons que, notamment dans le cas de la BCE, les banques centrales qui ont utilisé à grande échelle des politiques de « quantitative easing » consistant en une augmentation des échéances de remboursement se trouveront bien embêtées puisqu'elles ne pourront récupérer les liquidités correspondantes qu'à moyen terme voire à long terme.

? Les cessions trop volumineuses de titres détenus par les banques centrales :

- Les cessions de ces titres, qui sont pour la plupart assez sensible (ex : MBS, obligations publiques) risque non seulement d'envoyer de très mauvais signaux au marché quant à la valeur à venir de ces titres mais aussi ;

- De telles opérations auront pour effet la baisse de la valeur de marché des titres concernés, mais aussi, par effet de contagion celle des autres actifs financiers

- Ainsi que l'envolée des taux d'intérêt exigés sur les titres obligataires, voire des primes de risque

- Cette situation aura alors un effet très négatif sur la situation patrimoniale des agents économiques avec ce que cela implique en termes d'accès au financement, de baisse de leur valeur actionnariale, de baisse de la demande à la consommation etc. (Cf. canaux de transmission de la politique monétaire, section III.)

- L'augmentation des taux d'intérêt sur les dettes souveraines

- Des ventes d'actifs en urgence et le risque de retour à la situation ayant déclenchée la crise de 2008.

Il va donc falloir que les banques soient extrêmement prudentes quant aux instruments qu'elles utiliseront et la fréquence avec laquelle elles les utiliseront. Il faut que la sortie de crise se fasse d'une manière planifiée, très progressive et très ingénieuse de telle façon à

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combattre les pressions inflationnistes avec la même mesure que les risques de rechute mis en avant plus haut. Il faudra aussi que les banques centrales soient très transparentes et pédagogiques dans la communication de leur stratégie globale de sortie de crise et au jour le jour afin de rassurer les agents économiques et les marchés. L'arbitrage se fait alors entre hyperinflation et déflation.

Cette question de l' « EXIT » continue d'être discutée et fait déjà l'objet de bien des travaux au sein des banques centrales. Les sujets associés concernent entre autres :

- Les volumes des opérations

- Le choix du moment des opérations

- La nature des opérations

- L'établissement de nouveaux objectifs intermédiaires de sortie de crise : par exemple

une bande de variabilité dans laquelle doit être compris les taux du marché

- Les conditions de cessions des titres : prix/taux déterminés

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PARTIE 2 :

Résurgence des débats académiques : Quelles évolutions
théoriques pour la politique monétaire ?

« Il y a donc eu un naufrage intellectuel de la doctrine monétaire en vigueur depuis les

années 1980 » M. Aglietta (2013)

Il paraît clair que les autorités monétaires ont eu beaucoup de mal à gérer la récente crise. Il faut dire que cette dernière a pris une telle ampleur que malgré toute la bonne volonté des politiciens, il en fallait payer le prix et ce prix s'est révélé bien élevé.

Selon les conclusions de Claudio BORIO, directeur du département économique et monétaire à la B.R.I., reprises par M. Aglietta, « la doctrine monétaire a été anéantie par les faits » et « les dogmes qui la supportent ont été réfutés par la crise ». Il énumère ces dogmes :

- « la stabilité des prix est une condition suffisante de la stabilité macroéconomique

- la stabilité des prix est séparable de la stabilité financière, donc la politique monétaire ne doit avoir aucune part dans cette dernière

- le taux court piloté par la Banque centrale est l'instrument pertinent unique de la politique monétaire ;

- les banques centrales n'ont à s'occuper que de l'économie domestique. Les taux de change flexibles guidés par les écarts de taux d'intérêt rendent le monde entier stable. »

Dans un cheminement fragile vers la sortie de crise, de nombreuses questions se posent encore. Notamment celles de savoir si cette crise aurait pu être évitée si la banque centrale avait adopté une meilleure stratégie, ou encore celle qui divise la pensée à propos de savoir comment la banque centrale doit gérer le problème des dettes souveraines et cela, plus particulièrement dans une Europe hétérogène.

De nombreux intellectuels se questionnent surtout sur l'optimalité de la règle de politique monétaire, et de nombreux travaux tendent à démontrer la sous-optimalité de la stratégie des banques centrales en ce sens qu'elles sous-estiment l'importance fondamentale de certaines variables dans la définition de leurs objectifs intermédiaires.

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TITRE 1 : Politiques monétaires et stabilité sur les marchés financiers

On le sait, les fluctuations sur les marchés financiers jouent un rôle majeur dans l'ajustement macroéconomique. Les travaux microéconomiques, pourtant très nombreux, ont encore du mal à se regrouper dans l'optique de permettre une fine compréhension de la façon dont les chocs sur ces marchés financiers se transmettent à l'économie réelle à travers l'enchainement des décisions des différents agents économiques.

Les marchés financiers complètent le marché monétaire dans l'allocation des financements dans les économies. Les crises durables qui atteignent la sphère financière impliquent forcément un déséquilibre plus ou moins important sur le marché monétaire ce qui peut générer dans des cas assez rares, des crises globales, durables et coûteuses comme celle que nous vivons actuellement.

Les banques centrales ont un rôle majeurs dans la lutte contre l'expansion des crises, principalement en assurant la fourniture des liquidités suffisantes pour enrayer les contractions sur ces marchés et diminuer les frictions ; cela, afin d'éviter que les crises financières ne se transforment en crises globales.

La stratégie que les autorités monétaires adoptent vis-à-vis de ces phénomènes est celle du « cleaning aftermath », laquelle consiste en une intervention dès l'occurrence d'une crise, mais à une neutralité vis-à-vis des fluctuations sur les marchés financiers avant la crise ; cela, conformément à l'hypothèse de stabilité des marchés en cas de la réalisation de la stabilité de la monnaie.

Un premier sujet phare revient donc au goût du jour et au vu des événements récents. Il s'agit du lien effectif entre la stabilité financière et la stabilité monétaire.

Le principe de séparation entre la politique monétaire et la politique prudentielle est soumis à une sévère réévaluation. Nous nous intéresserons dans cette première partie, à comprendre l'ampleur de ce débat et ses implications en termes d'évolution probable du mandat des banques centrales.

Afin de traiter ce sujet, nous décrirons dans un premier temps la relation entre la dynamique de la politique monétaire et celle des marchés financiers, en mettant l'accent sur les influences des marchés financiers sur l'efficacité de la politique monétaire.

Dans un second temps, nous nous demanderons dans quelles mesures le mandat des banques centrales devrait être étendu.

Enfin, dans un dernier temps, nous nous demanderons de quelle façon les objectifs de la politique monétaire et ceux de la politique prudentielle pourraient être alignés.

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I. Le rejet de l'hypothèse de stabilité financière : une relation à
double sens entre dynamique financière et politique monétaire

Il s'agit ici de décrire plus en détail la relation qu'il existe entre le choix des agents sur les marchés financiers et les décisions de politique monétaire. Cette relation est à double sens et comporte de multiples facettes.

Jusqu'à présent, les autorités chargées de la politique monétaire ne semblaient, pour juger du fonctionnement des marchés financiers, n'apporter de l'intérêt qu'à ce qui a été défini comme le canal du taux d'intérêt et à celui du prix des actifs. Ce dernier entrant dans le lot des nombreuses données retenues pour l'analyse économique qui supportent leurs décisions.

Comme nous l'avons dit précédemment, le choix de la banque centrale de ne pas considérer dans ses décisions la dimension complexe et la nature instable de la dynamique financière, est en réalité justifié par son attachement de ne cibler leur politique que sur l'objectif de stabilité des prix et ainsi, de ne retenir dans sa dynamique de décisions que les considérations qui impliquent un risque pour la stabilité des prix. Dans cette optique, les taux d'intérêt sur les marchés et le prix des actifs, de par leurs implications en termes d'accès à la liquidité pour le premier et d'effet richesse/pauvreté pour le second, constituent des paramètres importants pour la politique monétaire en ce sens qu'ils ont une influence indirecte sur les prix.

Mais la relation entre politique monétaire et stabilité financière est bien plus complexe que cela et le fonctionnement même de ces principaux canaux est en réalité plus ambigu, notamment en période d'instabilité.

Les travaux économiques récents ainsi que l'expérience de la récente crise mettent en avant quelques principaux résultats qui sont des résultats de base sur lesquels la doctrine monétaire doit en partie être repensée.

- L'importance du canal de la prise de risque dans l'occurrence de crises financières, lequel avait été jusqu'alors écarté

- La stabilité du système financier est une condition de stabilité de la monnaie et non pas son résultat. Et inversement.

- Il existe dans une certaine mesure une relation négative entre les objectifs de stabilité monétaire et de stabilité financière

- Il existe un lien étroit entre système bancaire et financier qui implique l'existence d'une chaine complexe de transmission des risques

- Les crises financières ne se résorbent pas toujours seules et les coûts économiques de ces crises peuvent être énormes

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1. Le nouveau visage de la finance

Le paysage financier n'est plus le même qu'il y a 50 ans, lorsque la politique monétaire avait alors décidé de ne se préoccuper que de l'inflation et de supposer l'efficience des marchés financiers.

Le fort développement des marchés, la levée des contraintes sur leur fonctionnement, leur globalisation et l'actualisation quasi immédiate des cours des actifs et des informations ont permis à un grand nombre d'investisseurs de rejoindre ce marché. Les perspectives de gains sont beaucoup plus grandes sur ces marchés ce qui fait qu'ils attirent une très grande partie des capitaux financiers notamment lorsque les rendements des placements bancaires deviennent relativement moins intéressants. Aux USA et en UK, les marchés représentent le principal moyen d'obtenir des fonds importants tandis qu'en Europe, les banques restent maîtres des ressources financières. Les marchés ont la caractéristique d'être beaucoup plus sensibles aux chocs, même de faible envergure entrainant des fluctuations continues et parfois importante. Cette volatilité des prix des actifs est en grande partie associable à des comportements spéculatifs et d'imitation. Certaines fois, la formation de bulles spéculatives ou l'augmentation inattendue du scepticisme (aversion au risque) peuvent paralyser ces marchés et porter un coup plus ou moins important à l'économie dans son ensemble.

Aujourd'hui, les marchés financiers se sont tellement développés que leur fonctionnement est devenu très complexe avec notamment les émissions de produits financiers structurés dont les risques réels sont très difficiles à identifier. Cependant, les taux élevés de rendement qu'ils proposent rend intéressant leur détention.

De nombreuses plateformes parallèles ainsi que de nouvelles formes d'intermédiation se sont aussi développées, dont certaines plus ou moins opaques comme les activités de « shadow banking » qui ne sont soumises à aucune réglementation et dont les opérations réalisées ne sont couvertes par aucune assurance des dépôts et sont de ce fait plus risquées.

La multiplication des activités de shadow banking est une innovation très inquiétante pour la stabilité du système financier et économique. En effet, ce marché de l'ombre est particulièrement sensible puisqu'il n'est couvert ni par des assurances dépôt, ni par la banque centrale, ni par l'Etat. L'activité sur ce marché consiste au financement non réglementé des agents économique. Mais le plus grand danger de ce marché réside dans l'identité de son participant, la nature des actifs qu'ils émettent et le volume de la liquidité qu'il gère. En effet, il s'agit souvent de société de holding bancaire dont l'actif est souvent composé sur la base de titrisation de créance par des banques souvent très importante dans le fonctionnement du marché bancaire et de l'investissement ; mais aussi des fonds de pensions, fonds monétaires ainsi que d'autres agents dont la pérennité est aussi importante pour le système. S'y échange des titres présentant de hauts risque comme par exemple les CDS (« credit default swaps ») qui ne bénéficient en réalité qu'une faible assurance ou des opérations a haut risque systémique comme des engament entre participant du dit marché.

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Enfin, de nombreuses sociétés financières, souvent dérivées de grandes sociétés à dimension internationale, ainsi que de nombreuses SICAV et fonds de pension voient le jour et attirent une grande partie de l'épargne publique avec de meilleurs rendements mais aussi de plus grands risques. Les investissements les plus rentables mais aussi les plus risqués sont ceux proposé par des fonds d'investissement alternatifs qui ne répondent à aucun benchmark, utilisent des leviers très importants et financent très souvent des actifs de long terme sur la base d'actifs de court terme.

Aujourd'hui, les principaux dealers sur les marchés financiers sont de grandes banques d'investissement ainsi que les principales banques commerciales de la planète. Ces institutions financières y sont très actives et prennent des positions pour des volumes de liquidité très importants.

Tous ces acteurs s'échangent des créances, des dettes, des devises, des engagements à termes, des produits d'assurance etc. qui sont soumis à cotation de telle sorte qu'un actif acheté aujourd'hui puisse ne plus rien valoir demain, ou qu'un grand volume d'obligations subissent un choc négatif et engage des pertes importantes chez son détenteur.

Enfin, les investisseurs sur les marchés cherchent généralement des placements à court terme pour leurs excès de liquidités puisqu'à long terme ils ne sont pas protégés d'un choc de liquidité.

Le but de ce rappel est de permettre au lecteur de se rendre compte de l'importance que représentent les marchés dans la stabilité économique puisque :

- Ils sont composés d'institutions dont la pérennité est indispensable pour le bon fonctionnement économique

- Comportent des risques de pertes sur investissement très importants

- Qu'une majeure partie de la liquidité disponible pour le financement de l'économie se retrouve sur ces marchés

- Qu'une partie croissante des opérations n'y est pas contrôlée

- Que l'imbrication des participants au marché implique des risques systémiques très importants en cas de crise

Aussi, le point important à souligné est que, comme les banques sont des participantes importante sur ces marchés, alors on peut en déduire que les canaux du taux d'intérêt et du crédit sont intimement liés et donc que le blocage de l'un engage celui de l'autre.

Cela implique que la politique monétaire fait face à un double défi lorsque seulement l'un ou l'autre de ces secteurs entre en crise.

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Cette présentation rapide rappelle pourquoi la stabilité financière est essentielle pour la stabilité économique.

2. Le retour de l' « hypothèse d'instabilité intrinsèque » de la finance

Si nous avons décidé de donné des détails sur cette approche formulée par Hyman Minsky en 1986, c'est bien par ce qu'il est clair que les marchés financiers n'ont pas été docilisé par la stabilité monétaire puisque la formation de la récente crise se faisait alors même que les pays connaissait une inflation très faible et maîtriser depuis déjà plusieurs années. On se questionne alors sur le fonctionnement effectif des marchés financiers et les origines de ses instabilités. Cela afin de réévaluer de façon plus juste l'importance des fluctuations sur ces marchés dans la direction de la politique monétaire actuelle.

2.1. Les causes de l'instabilité

La théorie d'Hyman Minsky est basée sur le fait que les participants aux marchés ont une aversion au risque très variable et qu'il est donc minimisateur de considérer que leur choix et leurs réactions puissent être modélisés de façon linéaire. Le risque a donc un prix variable qui est fonction du degré d'aversion au risque des agents de telle sorte que pour un actif risqué donnée, le prix que sera prêt à payer un agent amateur de risque sera supérieur à celui d'un agent averse au risque. Pour les actifs du marché obligataire, le prix du risque correspond au niveau du taux d'intérêt exigé par les agents. Dans tous les cas, les prix des actifs financiers sont décroissants du degré d'aversion au risque moyen des participants.

Cette hypothèse implique que l'augmentation soudaine de l'aversion au risque sur le marché engendre un éloignement des cours de leur valeur fondamentale et une augmentation des taux obligataires, dont l'ampleur peut être très importante en fonction de l'importance des asymétries d'information sur les marchés lesquelles engendrent des défauts de coordinations.

Selon cette théorie d'instabilité intrinsèque de la finance, dans ce contexte de forte sensibilité des prix du risque aux choc pouvant se produire sur le marché, il faut aussi considérer que le fonctionnement fondamental du marché produit des « vulnérabilités » qui vont être la cause même du déclenchement périodique des crises. Ces vulnérabilités sont les suivantes :

- Des déséquilibres de terme entre le passif et l'actif dans le patrimoine des agents

- L'augmentation de l'endettement des participants dans le but d'investir sur des actifs porteurs

- La difficulté à retracer les origines des actifs échangés et donc à estimer les risques réels associés à la détention ces actifs

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- Le développement des engagements croisés entre une multitude d'agents qui a pour conséquence d'augmenter les risques systémiques

2.2. Les crises comme conséquences de l'accumulation des vulnérabilités

L'analyse décrit les enchaînements du cycle financier de la façon suivante :

Au début du cycle financier, les valeurs des actifs sont stables et proches de leur valeur

fondamentale, le prix du risque est faible,

Le marché attire les investisseurs et la valeur des titres augmentent,

Les participants profitent d'un effet richesse qui se transmet à l'économie réelle.

Les banques et les autres intermédiaires, voyant les valeurs patrimoniales augmenter,

accroissent les volumes de prêts, Et placent leur excédent de capital sur le marché.

Il s'agit du début de la phase d'endettement des agents privés.

Une partie de ces emprunts se retrouve sur le marché et les investisseurs accroissent leurs

bénéfices en profitant des effets de leviers permis par la dette,

La confiance dans la croissance des valeurs mobilières incitent les agents à acquérir de plus en

plus d'actifs avec des ressources de moins en moins durables.

La demande de capitaux s'intensifie et les emprunteurs fournissent en garantie des emprunts

qu'ils contractent des titres qu'ils détiennent (prêts sur titres),

L'euphorie continue d'attirer des investisseurs, les prix des actifs continuent de grimper autant

que les risques de marchés,

De nouveaux actifs sont diffusés pour répondre à la demande des investisseurs, lesquels n'ont

souvent aucun support tangible,

La bulle spéculative est alors formée et les risques systémiques sont élevés.

De l'euphorie à la panique...

Un choc exogène sur le marché incite les investisseurs ayant les positions les plus lourdes à se débarrasser des actifs les plus risqués. Ils transmettent un signal négatif à l'ensemble du marché

Les autres agents cherchent à se débarrasser à leur tour des actifs risqués, la valeur de ces actifs s'effondre rapidement et le prix du risque augmente. La panique se transmet à l'ensemble des actifs.

Les agents s'étant fortement endettés et les institutions financières très engagées sur le marché et dont le patrimoine se trouve dévalué, ne trouvent plus suffisamment de financement pour maintenir leur solvabilité. Leur risque de défaut augmente.

Les risques de défaut engagent le bilan de l'ensemble des participants du marché du fait des multiples engagements croisés qui ont été engendré par l'euphorie.

Le marché financier ne fonctionnement plus, les liquidités sont gelées, les banques ayant subit des pertes en capital, essaient de rétablir leur équilibre financier en limitant les volumes de crédit, en augmentant les taux d'intérêt, en diminuant les échéances ou en rationnant le crédit.

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Nous connaissons bien les implications pour la croissance, l'emploi et la stabilité des prix. Ces enchainements très dommageables sont encore plus importants dans les pays ou les marchés sont très développés puisque les risques concernent directement les ménages moyens. La banque centrale doit alors se soustraire au marché de gros de la liquidité alors paralysé afin d'enrayer le développement des crises et d'éviter que celles-ci n'entrainent des phénomènes de déflation.

3. La responsabilité de politique monétaire dans les crises financières :

Le canal de la prise de risque, un canal jusqu'alors sous-estimé

3.1. Fonctionnement du canal de la prise de risque

Une politique monétaire qui a comme seul objectif le maintien d'une inflation basse et stable favorise une diminution forte du prix du risque et une accumulation de vulnérabilités.

Le « risk-taking channel » doit être considéré, à l'instar des canaux de taux d'intérêt et de crédit, comme un canal de transmission important de la politique monétaires au marché financier. Celui-ci agit négativement sur les marchés dans le sens où l'objectif de stabilité des prix et en contradiction avec celui d'accalmie sur les marchés. Comment fonctionnent ce canal ?

Politique monétaire bien maîtrisée, une stabilité illusoire...

Nous savons qu'un taux d'intérêt directeur plus bas impliquent une hausse de la valeur des actifs et des collatéraux (canal du prix des actifs) et donc une plus grande attractivité des marchés (formation de bulles spéculatives), une tendance à l'augmentation du niveau d'endettement des agents et à l'augmentation de la taille des bilans des banques et intermédiaires financiers comme nous avons pu le voir dans les sections précédentes.

Notons aussi que, en période d'expansion sur les marchés, les fluctuations des prix restent modérées puisque les prix du risque diminuent avec la hausse du prix des titres.

C'est l'illusion de stabilité qui va conduire à l'euphorie.

Faiblesse des taux d'intérêt et incitation à la prise de risque...

Aussi, des taux d'intérêt directeurs faibles, incitent les agents à rechercher plus de rentabilité en s'adressant au marché et en recherchant des actifs dont le couple rendement - risque est plus élevé. Ces agents se tournent principalement vers des fonds financiers comme les fonds de pension ou d'assurance vie, lesquels ont des activités très actives sur les marché et contribue de façon très importante à son fonctionnement.

Enfin, des taux faibles permettent à des emprunteurs risqués de pouvoir avoir accès au crédit ce qui augmente le risque de défaut global du système. On peut généraliser en disant que la

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stabilité va créer une augmentation du volume de crédit accordé à l'économie (phénomène de surendettement). L'épisode de la crise des subprimes en est un excellent exemple.

3.2. Preuve de l'existence du canal de la prise de risque : approches empiriques

Nous présentons les récentes études ayant été réalisées et qui mettent en avant l'existence d'un tel canal :

Paligorova et Santos (2012) tentent d'identifier les effets qu'a eu la politique monétaire américaine sur l'incitation à la prise de risque dans la période précédant la crise des subprimes. Ils trouvent que non seulement la prise de risque a énormément augmentée avec le maintien des taux directeurs à de faibles niveaux ; Mais aussi que le volume moyen des prêts accordés a subit une forte hausse et que les coûts moyens d'emprunt ont globalement beaucoup diminués. Leur résultat le plus surprenant est qu'il semblerait que les coûts d'emprunt des clients à risque aient été très proche et souvent plus faibles que des clients moins risqués. Cela pourrait s'expliquer par l'existence de conditions spécifiques pour ces premiers contrats (ex : prêt garanti, terme de remboursement, taux variable etc.)

Ioannidou, Ongena et Peydró (2009) observent les effets de la politique monétaire américaine sur le comportement de prêt des banques boliviennes sur la période de 1990 - 2010, ils trouvent qu'en période de taux bas, la différence entre les taux de prêt risqués et ceux des autres prêts diminue de façon notable.

Damar, Meh et Terajima (2010), sur la base de travaux empiriques, démontrent l'existence d'une corrélation positive forte entre la hausse des valeurs des actifs et la hausse des leviers financiers. (cf. conséquence du canal des actifs sur le risque)

Jiménez et autres (2008) cherchent à identifier les conséquences des décisions de la BCE sur le niveau de risque des prêts accordés par les banques espagnoles entre 1988 et 2008. Ils trouvent que les volumes de crédit augmentent avec la baisse des taux d'intérêt mais encore que la proportion la plus risquée des crédits accordés est majoritairement émise par les banques les moins capitalisées.

4. L'efficacité limitée des politiques monétaires pour empêcher la propagation des crises financières

Comme nous l'avons bien mis en avant dans les sections précédentes, l'économie réelle est très fortement dépendante de la stabilité sur les marchés financiers du fait du « nouveau visage de la finance » et du fonctionnement du canal de la prise de risque. Une fois qu'une bulle spéculative éclate, la propagation de la crise financière à la crise globale est très rapide et les politiques monétaires se trouvent souvent dépassées par la rapidité des enchaînements.

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Ce qu'il est important de mettre en avant ici, c'est que la politique monétaire n'a pas seulement une certaine responsabilité dans la formation des crises financières mais qu'aussi, les crises financières peuvent impacter fortement l'efficacité des politiques monétaires, notamment via les blocages des canaux de transmission. Les coûts économiques concernent alors à la fois le court terme, mais aussi, dans un pareil cas engendrent des risques graves pour la stabilité des prix, dont l'importance est capitale pour le bon fonctionnement de l'économie. Les banques centrales doivent faire face à la fois aux problèmes de pertes immédiates et aux risques pesant sur les prix avec des outils qui n'ont qu'une faible portée en période de crise généralisée.

La récente crise nous donne quelques leçons supplémentaires afin de comprendre l'impuissance partielle de la politique monétaire à engager la sortie de crise :

- En période de crise financière, le canal du taux d'intérêt est en partie bloqué. Même des taux d'intérêt très faibles peinent à orienter à la baisse les taux d'intérêt réels de long terme. De plus, ces crises s'accompagnent de hausse des primes de risques et cette augmentation peut être tenace malgré l'engagement des banques centrales.

- La crise de confiance généralisée et les incertitudes pesant sur l'avenir atteint le secteur bancaire selon les mécanismes cités plus haut. On connait les implications de tels phénomènes. On comprend pourquoi la situation européenne présente un grand défi pour la BCE.

- Une fois la crise installée, les recettes budgétaires diminuent et les déficits publics augmentent. Cela à deux effets qui contrarient l'efficacité des politiques monétaires que sont l'augmentation des taux sur dettes souveraines. Depuis la crise, les doutes formulés sur la solvabilité des Etats font pression sur les taux d'intérêt obligataire et sur les valeurs patrimoniales. Les Etats ne peuvent non seulement plus soutenir les économies en crise mais sont pris dans un cercle vicieux de surendettement (dans le cas de ceux qui ne bénéficie pas d'excédents assez élevés). Des plans d'assainissements budgétaires ont même été massivement entrepris en Europe. Ce qui jouera hélas dans le sens de la déflation et du chômage.

- Dans les cas où les anticipations d'inflation serait mal ancrée, la déflation induite par les crises, engagerait des anticipations de déflation, la hausse des intérêts réels, l'augmentation des charges de l'endettement et donc l'approfondissement de la récession (Cf. PARTIE 1 - TITRE 1 pour plus de détail sur la déflation et les anticipations)

Une déduction logique des quatre précédentes remarques est que l'ancrage des anticipations d'inflation ne suffit pas à rassurer une économie en proie à une forte crise de confiance

Ces faits nous rappellent avec force qu'une crise sur les marchés financiers peut engendrer des scénarios catastrophiques. Les politiques monétaire en sont même venu à renier en partie leur principes d'indépendance lorsqu'on constate qu'elles sont intervenus sur les marchés obligataire pour racheter de grands volumes de dettes souveraines et de titres privés jugés risqués tels que des ABS ou MBS (USA).

En plus des conséquences macroéconomiques des crises financières et du biais d'inefficacité des politiques monétaires qu'elles engendrent, les banques centrales peuvent elle-même se retrouve en danger puisque :

- Le recours aux politiques non conventionnelles dégrade leurs bilans et engage des doute quant à leur pérennité (Cf. PARTIE 1 - TITRE 2)

- La crédibilité des banques centrales est remise en doute (Cf. PARTIE 1 - TITRE 2)

- Les risques pesant sur la stabilité des prix sont énorme puisque de telles politiques impliquent des risques d'hyperinflation

- Les défis important qu'implique le désengagement des banques centrales en cas de sortie de crise

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La richesse du débat depuis l'occurrence de la dernière crise incite à se demander comment et dans quelle mesure les banques centrales doivent agir pour assurer les économies contre les effets de nouvelles crises naissants sur les marchés financiers.

Cela pourrait obliger les banques centrales à réviser en partie leur mandat ou du moins la structure de leur règle de décision de sorte à prendre en compte dans une proportion plus importante qu'avant, les risques menaçant la stabilité financière.

Nous discuterons alors ces propositions dans les parties suivantes

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II. La révision du mandat des banques centrales : rejet partiel du principe de séparation entre politique monétaire et financière.

1. L'objectif de stabilité financière et ses instruments

Les banque centrales doivent avant tout approfondir leur connaissance sur la structure des vulnérabilités induites par l'activité normale du marchés afin de pouvoir empêcher leur accumulation si elles devaient intervenir, ou du moins mieux les comprendre pour mieux agir face à une crise financière (selon le point de vu ou l'on se place). Cela leur permettrait de mieux considérer l'ampleur qu'auront leurs décisions sur les comportements de marché et les risques d'occurrence de crise systémique.

1.1. Limites des politiques prudentielles

La Fed s'est déjà bien engagée dans ce type de recherche avec les travaux d'économistes comme Adrian et Ashcraft.

La réglementation prudentielle actuelle ne permet de régler qu'une partie du problème dans le sens où même si elle diminue le risque systémique global du système, elle ne permet cependant pas de maitriser les comportements de prise de risque des agents et leurs effets sur les actifs financier. En effet, la réglementation prudentielle ne concerne que les institutions financières et non l'ensemble des participants du marché. Remarquons que même dans le cas de ces premières, en période d'euphorie, la valorisation de leur actif permettant l'augmentation de la taille de leur bilan, ne va pas dans le sens de l'objectif initial de la politique prudentielle. De plus, un arbitrage entre coûts des réserves obligatoires et gains espérés peut toujours être réalisé par les banques (cf. Rochet 2004).

Alors, malgré l'existence d'une politique prudentielle, une bulle spéculative peut quand même se former, vivre et s'effondrer avec l'ensemble des valeurs mobilières.

Il faut alors mettre en oeuvre des politiques qui permettent de lutter contre ce qu'on appelle « les vulnérabilités dynamiques » du marché qui, différemment des vulnérabilités structurelles sus décrite, sont les conséquences de l'incitation à la prise de risque. Ces travaux sont cependant aux stades primaires et demandent à être approfondis.

Dans cette optique, si les banques centrales devaient jouer un rôle dans l'empêchement de la formation de crises financières, elle devrait s'équiper de nouveaux instruments tels que : le droit de faire varier les ratios de levier et de liquidité bancaires ; afin d'agir de manière contra-cyclique contre la formation de bulles. Ces instruments auraient pour effet d'atteindre plus directement les leviers de crédits et les déséquilibre de terme que ne le peut la réglementation prudentielle sur les fonds propres. Cette dernière, si elle ne peut pas toujours

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éviter les crises, permet tout de même de limiter l'ampleur des crises systémiques grâce aux réserves constituées.

Dans la quête de la stabilité financière, il faudra tout de même sérieusement prendre en compte que des réglementations, qu'elles soient d'origine monétaire ou prudentielle, peuvent, si elles sont inadéquates, constituer un frein à la croissance, ou encore à la reprise économique, ou pire, elles peuvent précipiter l'explosion de bulles spéculatives. Par exemple, des politiques trop strictes pourraient contribuer négativement au retour de l'attractivité du marché financier ou au déblocage du crédit aux agents privés.

Il faudrait dès lors que les instruments de ces politiques puissent être flexibles et soient utilisé par une institution ayant un pouvoir réglementaire.

1.2. La politique monétaire et l'objectif de stabilité macro-prudentielle

Avant tout, un repérage et une surveillance des entités systémiques est à la base d'une intervention réussie pour lutter contre les effets de l'instabilité financière.

Selon les travaux de M. Aglietta en 2013, on peut déjà avancer que dans une telle perspective :

- Les montants de capital réglementaire devront être fonction de l'aversion au risque moyenne du marché.

- Dans la mesure où les bulles se forment souvent dans des compartiments spécifiques du marché, les exigences en capital pourraient être appliquées de façon discrétionnaire

- La supervision des marchés doit être effective, continue et des simulations de crise doivent être effectué ponctuellement (stress -test)

- La réglementation sur les collatéraux doit être envisagée Aussi, il propose par ailleurs que :

- La banque centrale surveillent directement les opérateurs du « shadow banking » tels que certains « hedge funds » et fonds monétaires (cf. I - 1. pour la définition et les acteurs du « shadow banking »).

- Mais aussi, qu'elle devra agir pour restreindre leur détention en collatéraux à des titres de qualités.

La règle de Tinbergen propose pour ce faire l'utilisation d'instruments tels que : - Les provisionnements dynamiques

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- Les exigences en capital pro-cycliques - Le refinancement sélectif

Jean-Paul Betbèze, Jézabel Couppey-Soubeyran et Dominique Plihon propose dans la même lignée l'établissement d'un système progressif de réserves obligatoires sur les crédits dont l'objectif serait de contrer les emballements du crédit.

Dans tous les cas, il faudra améliorer l'accès aux informations sensibles et détaillées sur les opérations à haute teneur en risque pour permettre une action optimale des autorités de régulation pour combattre les crises financières. Cependant, cela reste un sujet compliqué puisque dans l'état des choses, il est très difficile d'imposer une transparence totale des opérateurs financiers. Il est probable qu'en interdisant juridiquement certaines formes de structure, en réglementant l'existence de plateformes de type « black-pool » ou imposant une centralisation obligatoire des opérations de compensations, la situation puisse être améliorée.

Enfin, toujours dans la perspective d'une intervention des banques centrales sur les marchés financiers, des travaux en cours proposent une modification de la structure de la règle de Taylor afin de rendre le niveau du taux directeur sensible aux déséquilibres financiers, de prendre en compte le fonctionnement du canal de la prise de risque et donc de permettre à cette règle d'être éventuellement un outils d'action contra-cyclique.

La détermination de cette nouvelle règle devra se baser sur une mise en relief des variables telles que celles : du crédit et de l'endettement, des leviers financiers et de crédit, de l'évolution de la composition par nature des actifs échangés sur le marché, du prix des actifs, de la structure des bilans etc.

Des études planchent actuellement sur ce sujet mais devront être appronfondies. On pourra tout de même citer celles de Ravenna et Walsh (2009) de Walsh (2014) ou d'Emmanuel Carré, Jézabel Couppey-Soubeyran et Salim Dehmej (2013).

2. Les arguments du débat entre « leaning against the wind » et « cleaning aftermath »

Une politique de « cleaning aftermath » consacre le principe de neutralité ou de séparation de la politique monétaire par rapport au fonctionnement du marché financier. Elle consiste en l'intervention de la banque centrale qu'une fois la crise survenue. Cette dernière assure alors la fourniture de liquidité afin d'éviter des risques de contagion et donc de déflation et assure par ailleurs la fonction de préteur en dernier ressort.

Pourtant, comme nous l'avons montré dans les parties précédentes, les conséquences d'une crise ne se limitent pas au seul assèchement de la liquidité sur les marchés. Ses coûts économiques peuvent être très importants et la crise persistante de telle sorte à ce que celle-ci

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finisse par s'auto-entretenir. De plus, si la banque centrale fait face au problème du « zero lower bond », les conséquences d'une telle crise peuvent être très inquiétantes.

C'est pourquoi, les politiques dites de « leaning against the wind » font l'objet de multiples travaux. Il s'agit donc de conférer aux banques centrales un pouvoir d'intervention sur les marchés financiers de telle sorte à contrer les tendances excessives pouvant engendrer de grands déséquilibres et à lutter contre la formation de bulles spéculatives notamment. Il s'agit donc d'une politique d'action préventive. Des discussions sont en cours, néanmoins aucune règle de décision n'a clairement été formulée dans cette optique.

Afin de mieux réussir à se positionner dans ce débat vif entre partisans de l'intervention et partisans de la neutralité, nous allons énumérer les principaux arguments soulevés contre cette dernière approche qui se veut interventionniste :

L'intervention des banques centrales ont de grandes chances de créer bien plus d'instabilité et une perte en termes d'optimalité d'allocation des ressources financière que leur neutralité.

· Les banques centrales, autant que les grands dealers du marché, que les agences de notations ou encore les États, ont une capacité limitée en ce qui est de repérer les crises en formation

· Si par excès de prudence les banques centrales interviennent de façon trop fréquente pour stabiliser les cours, elles risquent d'empêcher le financement d'une bonne partie des projets de l'économie qui de plus, dans une autre mesure, ne pourront plus profiter des effets positifs des canaux de prix des actifs, du patrimoine, et du bilan.

· Si au contraire la politique est trop passive, la crise intervient quand même et la banque centrale perd en crédibilité.

· Un marché trop contrôlé limite les gains potentiel et fait fuir les capitaux au profit de marchés où les rendements sont plus intéressants

· La banque centrale ne dispose pas des données financières et d'entreprises suffisantes pour arbitrer ses décisions.

· Les crises financières n'ont dans la grande majorité des cas, pas besoin d'intervention quelconque des autorités politiques. Elles se résorbent souvent d'elles mêmes

· La crédibilité de la banque centrale et donc sa capacité à influencer les anticipations d'inflation risque d'être beaucoup dégradée.

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? En cas de formation déjà engagée d'une bulle spéculative, l'intervention de la banque centrale peut précipiter l'éclatement de cette bulle

? Les objectifs de stabilité monétaires vont quelque fois à l'encontre de celui de stabilisation financière. Par exemple : en cas de choc positif d'offre qui tend à faire baisser les prix tandis qu'il tend à augmenter les cours des actifs financiers. La banque centrale est face au dilemme de savoir si elle doit baisser ses taux ou les augmenter.

La récente crise nous a pourtant bien montré qu'une passivité de la politique monétaire peut entrainer des coûts très élevés qu'il faudrait mettre en rapport avec ceux que pourrait engendrer les erreurs de politique monétaire dans le cas d'une politique interventionniste.

Par ailleurs, les travaux récents ont permis d'identifier des « profils récurrents » dans la formation des crises, lesquels sont de très bons supports pour une intervention cohérente de la banque centrale.

Cependant, ces études méritent d'être approfondies. Dans le même axe de réflexion, nous discuterons dans la partie suivante d'autres possibilités d'élargissement du mandat des banques centrales.

3. Quelle conjugaison entre politique monétaire et politique prudentielle ?

Si une synthèse pouvait être faite à partir des différentes considérations précédentes et notamment celles du débat « leaning VS cleaning », la question principale qui en naîtrait serait celle de savoir comment concilier politique prudentielle et monétaire de telle sorte à ce qu'elles collaborent dans le but de réaliser un même objectif final , celui de stabilité conjointe des prix et des marchés financiers, sans pour cela qu'aucune d'elles ne perde en crédibilité ni ne s'éloigne de leur mission fondamentale.

Tout d'abord, les outils et les missions de la politique prudentielle doivent être renforcés. Notamment en ce qui concernent leur dimension macro-prudentielle*. Cependant il est clair que cette politique est incapable d'assurer à elle seule la stabilité sur les marchés financiers.

La politiques monétaire, conformément aux raisons décrites précédemment, a aussi un rôle à jouer, notamment sur le canal de la prise de risque, et doit donc à son tour, élargir le cadre de référence qu'elle retient pour sa prise de décision.

* politique macro prudentielle : la politique macro-prudentielle a deux principaux objectifs, celui de limiter les interconnexions entre institutions individuelles, et celui de lutter contre le caractère pro-cyclique des crises (phénomène d'amplification des déséquilibres engendrés par les réactions des agents face à un choc)

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3.1. Avantages et inconvénients d'une collaboration plus avancée entre les deux politiques :

Dans les cas où les deux politiques doivent agir dans le même sens afin de réaliser leur objectif, leur collaboration permettra une meilleure synergie qui renforcera l'action de chacune d'entre elle.

Cela pourrait être le cas si l'on considère par exemple que le taux d'intérêt directeur de la banque centrale doive être augmenté suite à une trop forte inflation et que parallèlement, une hausse trop rapide des cours des actifs financiers inquiète sur les marchés financiers.

On peut noter qu'en temps normal on se retrouvera souvent face à ce type de situation puisqu'une inflation modéré est généralement signe de bonne santé du secteur privé.

Par contre, cela n'est pas toujours le cas et il peut aussi arriver que les deux politiques se retrouvent è agir dans des sens opposés.

Par exemple si l'on considère la formation d'une bulle spéculative déconnectée de la sphère réelle tandis que l'inflation reste proche de 0%. Une politique de hausse des taux d'intérêt pour lutter contre la bulle en formation impliquerait alors des risques de déflation. Leur baisse serait plutôt préconisée.

Aussi, un avantage majeur d'une collaboration, en plus de celui d'assurer une meilleure efficacité de chaque politique, serait celle de permettre à chacune d'elle de converser toute leur crédibilité puisqu'elles resteront concentrées sur leur propre objectif.

3.2. Quelle collaboration ? Quel partage des pouvoirs ? Quelle règle de décision ?

Il faudra avant tout formuler un cadre d'analyse intégré qui permette de rendre compte à la fois des interactions entre :

- Économie réelle et dynamique financière

- Politique monétaire et politique macro-prudentielle

Une fois ce cadre précisément établi, les politiques monétaires et macro-prudentielles sauront comment intervenir chacune pour ne pas/voire peu nuire à l'objectif poursuivi par l'autre et chacune saura comment adapter leur stratégie au regard des décisions de l'autre afin que celle ne leur soit pas trop nuisible.

C'est aussi pourquoi, une communication directe et stable doit être établie entre les deux institutions afin de permettre un partage optimal des informations importantes et des orientations stratégiques de chacune d'elles. Des débats constructifs pourront aussi être ouverts par là même. Pour cela, des réseaux d'information intégrés pourraient être mis en place.

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En plus de conjuguer leur stratégie en établissant des fonctions prédéterminées de réaction, la connaissance fine des interactions qui se produisent entre sphère financière et économique, pourra permettre à l'une ou l'autre des politiques, lorsque cela n'est pas contraire à ses contraintes conjoncturelles, de porter assistance à l'autre dans les moments difficiles. Par exemple la banque centrale pourra augmenter ses taux pour contrer un mouvement de hausse des actifs, tandis que la politique prudentielle pourra sévir en cas de forte inflation afin d'influencer à la baisse les volumes de liquidité échangés sur les marchés.

Néanmoins, il semble important que, pour des raisons de crédibilité et d'efficacité, les mandats des politiques prudentielles et monétaires restent bien délimités.

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TITRE 2 : Politique monétaire et dette publique

« Et quand l'endettement public d'un pays atteint un tel niveau que sa soutenabilité budgétaire en est potentiellement menacée, la politique monétaire doit nécessairement être associée étroitement à la gestion de la dette publique et à la politique budgétaire » (C. Goodhart, 2012).

Ce qui nous intéresse dans cette partie est de comprendre en quoi le surendettement des États constitue un grand danger pour la stabilité économique et financière et pourquoi la politique monétaire ne peut rester neutre face à la crise des dettes souveraines. Après avoir replacé la dette publique en rapport avec les autres grands agrégats économiques dont les anticipations, l'inflation, le crédit et les taux d'intérêt, nous aborderons dans une deuxième partie la question phare à l'heure actuelle en Europe et dans le monde, qui est celle de savoir comment les banques centrales doivent gérer les problèmes de surendettement des États.

Ce qui rend cette question cruciale est que dans l'État des choses, la politique monétaire a usé de toutes ses armes pour enrayer la crise économique actuelle et que, si celle-ci vient à tout de même perdurer, la situation deviendrait extrêmement critique. Alors le recul des dettes publiques devient un élément déterminant du retour au calme.

I. Conséquences d'une crise des dettes souveraines : Pourquoi les autorités monétaires doivent-elles réagir ?

Nous ne reviendrons pas dans cette partie sur la gestion actuelle de la crise européenne des dettes souveraines par la BCE étant donné que nous l'avons déjà largement expliquée dans la partie 1. Nous ne nous bornerons pas non plus à détailler les situations particulières de chaque pays ni les origines de leur endettement, cela n'est pas le sujet de notre mémoire. Cependant, quelques précisions générales pourront être apportées à ces sujets par le graphique qui suit cette introduction ainsi que dans la première sous-section.

Nous nous concentrerons surtout sur les dimensions macro-économiques du surendettement des États et sur leur importance en fonction du type de politique monétaire.

Nous pourrons nous rendre compte, à la suite de cette étude, que la séparation des objectifs de stabilité budgétaire et de politique monétaire n'est plus aussi légitime qu'avant au regard de la situation actuelle.

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1. La dette publique et l'objectif de stabilité des prix : quelle relation ?

Le niveau de l'endettement des États peut avoir des effets considérables sur l'inflation et cela de différentes manières. Cette section présente une vue d'ensemble des mécanismes le plus fréquemment mentionnés par lesquels la dette publique et la politique budgétaire peuvent mettre en péril l'objectif de stabilité des prix de la politique monétaire.

Avant toute chose, rappelons au lecteur que le recul des dépenses publiques est toujours associé à une baisse de la demande globale, laquelle engendre un phénomène du recul de l'activité économique notable (production, chômage, consommation. Nous rappelons aussi qu'un déséquilibre budgétaire structurel qui ne peut être financé par les marchés sera avec de fortes chances financé par l'impôt, ce qui engendrerait le même phénomène de récession.

1.1. Dominance budgétaire et risque pour la stabilité des prix

Derrière ce thème, la conclusion importante soulevée est celle de l'importance de l'indépendance monétaire par rapport à la politique budgétaire pour la réalisation de l'objectif de stabilité des prix. Mais aussi, prise sous un autre angle, cette discussion permettra une meilleure mesure des dangers liés à l'excès d'assistance des autorités monétaires aux Etats en cette période d'incertitude.

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Définition de la dominance monétaire et budgétaire : Sargent et Wallace (1981).

« On parle de domination monétaire quand les autorités monétaires se consacrent entièrement au contrôle de l'inflation, alors que les autorités budgétaires ajustent la politique des finances publiques pour rester solvables sous condition d'un flux exogène de seigneuriage ».

« La domination budgétaire, à l'inverse, suppose que la politique monétaire soit soumise à la contrainte de fournir un revenu de seigneuriage suffisant à l'État pour assurer sa solvabilité. »

Si la politique monétaire est très engagée dans le soutien des États en situation de graves déséquilibres budgétaires, les conséquences peuvent être résumées comme suit :

Le jugement des agents sur la crédibilité de la politique monétaire tend à se dégrader et les anticipations d'inflation à se désancrer. Ainsi, le soutien appuyé de la politique monétaire aux États aurait pour conséquence d'engendrer des anticipations de hausses substantielles de l'inflation proportionnelle à l'ampleur des dettes publiques et du niveau de l'aide et donc des risques de phénomène de très forte inflation qui ne serait dès lors plus contrôlable par les autorités monétaires.

De plus, le fait que les agents assimilent la politique en place à de la dominance budgétaire aurait pour effet de rendre inefficace toutes politiques budgétaires et monétaires ce qui pourrait être extrêmement dommageable en période de crise économique profonde comme celle que nous avons connu.

Enfin, les agents auraient tendance à soupçonner les politiques de chercher justement à créer de l'inflation dans le but de diminuer la charge réelle des dettes souveraines. En effet, avec des taux d'imposition inchangés, l'inflation créée se traduirait par une taxation supplémentaire de tous les agents économiques de la zone concernée. D'ailleurs, l'histoire montre que les politiques ont déjà eu recours à de l'inflation volontaire dans le but de diminuer les coûts de leur dettes.

Même si la dominance monétaire prévaut, l'excès d'endettement peut rendre inefficace la politique monétaire :

Aujourd'hui, le suivi de la situation des dettes souveraines en Europe constitue la principale source de fluctuation sur les marchés financiers, tel que, malgré une politique monétaire qui s'active à la maîtrise des taux d'intérêt sur ces dettes, la moindre annonce à un effet amplificateur important sur la chaîne de réaction des agents.

Aussi, l'exemple de la Grèce reste ancré dans les mémoires et les agents contiennent leurs dépenses, anticipant des hausses probables du niveau des taxes et du niveau des prix. La

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consommation en est réduite, l'investissement aussi, alors même que la politique monétaire compte sur ces variables pour sortir de la crise.

1.2. L'état des finances publiques comme principale source des anticipations et des ajustements des prix

Une autre approche dite FTPL (Théorie budgétaire du niveau des prix) née dans les années 90 est très intéressante à souligner dans le cadre de notre étude. Elle permet de redonner son importance à la politique budgétaire dans la formation des anticipations et aussi dans une certaine mesure, de rendre compte des interactions pouvant exister entre la politique monétaire et la politique budgétaire.

Cette théorie avance que la politique budgétaire constitue, bien au-dessus de la politique monétaire, l'une des principales sources d'anticipations et d'inflation même dans les pays où les banques centrales sont indépendantes. Les mécanismes soulevés par cette approche sont les suivants :

- L'inflation anticipée se fonde sur la base des anticipations quant à la variation du solde

budgétaire. L'anticipation d'une baisse du solde implique des anticipations d'inflation. - Les entreprises déterminent leurs prix majoritairement sur la base d'anticipations des

déficits publics futurs.

- Les marchés financiers anticipent l'inflation sur la base de l'évolution des dépenses publiques et fixent les taux d'intérêt sur les obligations en conséquence.

- Les marchés financiers ont donc un rôle dans la maîtrise des niveaux d'endettement publics.

- Lorsque les agents économiques ont surestimé les niveaux des dépenses publiques futures, ils profitent d'un effet richesse

- La politique monétaire n'intervient pas dans ce mécanisme et l'État peut accumuler des déficits librement.

Cette approche de l'inflation met en évidence une conclusion importante : celle qu'il est nécessaire de contraindre les gouvernements dans la gestion de leurs finances afin d'éviter de se retrouver à nouveau face à des risques de défaut des États, sachant les graves conséquences que cela entraîne en ce qui concerne le fonctionnement des marchés financiers mais aussi de l'économie réelle.

En soutien de cette approche, une récente étude de la Banque de France montre que les différences de taux sur les bons du trésor entre les pays de la zone EURO sont fortement corrélées avec l'évolution anticipée des rapports endettement/PIB.

Par ailleurs, sur la base d'une étude empirique, des économistes de la Banque du Japon ont montré que le niveau de la dette publique d'un état par rapport à son PIB constitue, à partir d'un certain seuil, un frein à la croissance économique. Cette situation pousse les prix à la

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baisse avec ce que cela engendre comme effets néfastes. Les auteurs concluent donc à l'existence d'interactions négatives entre ces deux variables.

1.3. Implications

Dans tous les cas, les situations de surendettement des États sont très nocives pour les économies surtout lorsqu'elles sont intégrées. Les politiques budgétaires doivent être menées de manière prudente et responsable, ce qui aura pour avantage de protéger les pays contre des chocs pouvant se produire. Les États garderaient alors une marge de manoeuvre contra-cyclique. Si ces obligations sont vérifiées, la politique monétaire n'aura à aucun moment besoin d'intervenir pour soutenir les États.

Cependant, en cas de crise des dettes souveraines comme c'est le cas actuellement, les enjeux économiques et financiers, dont ceux du maintien de la stabilité des prix, sont si important que la politique monétaire ne peut pas rester neutre et doit agir activement pour empêcher le défaut d'un État, lequel précipiterait l'ensemble de la zone dans une crise sans précédent.

Enfin, un accompagnement des États dans leur rétablissement, peu importe dans quelles mesures, doit absolument s'accompagner d'un engagement effectif de ces derniers dans le réajustement de leur situation budgétaire. Car dans le cas inverse, le scénario sus décrit de dominance budgétaire (dont l'hyperinflation) voire de défauts en cascade se réaliseraient.

2. Dettes publiques, rationnement du crédit et taux d'intérêt

2.1. Dette publique, canal du taux d'intérêt et stabilité financière, un rappel.

Nous avons déjà précisément décrit dans la Partie 2 Titre 1 de ce mémoire l'importance que jouent les prix des obligations souveraines dans la formation des primes de risque et des taux d'intérêt pour l'ensemble des titres du marché obligataire.

Nous rappelons donc que le prix du financement sur ce marché (le taux d'intérêt) est calculé sur la base du taux dit « sans risque » qui est le taux associé aux obligations publiques. Alors, une augmentation soudaine de ces taux engendre à la fois une baisse des financements accordés à l'économie, une dégradation des bilans des agents ayant accumulé des titres obligataires, et par extension un recul global du volume d'activité. De plus, les phénomènes de contagion font que sur ces marchés, la cession urgente de ces titres engage une crise de confiance qui approfondit les instabilités (phénomène pro-cyclique) et mettent en grande difficulté les intermédiaires financiers qui ne peuvent plus assurer le respect de leurs contrats. Les fortes interconnexions entre les participants du marché font que l'ensemble de l'économie se retrouve touchée. En définitive, si on ne prend en compte que ces considérations,

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l'augmentation durable des charges d'intérêt sur les dettes souveraines va engendrer l'accentuation des risques de défaut souverain.

C'est ce scénario catastrophique qui justifie que depuis le début de la crise, les banques centrales utilisent des politiques non conventionnelles comme le « credit easing » contre la hausse des taux d'intérêt et rachètent des grands volumes d'obligations publiques.

2.2. Déficit publique et canal du crédit

Ce qui nous intéresse surtout dans cette section, c'est de mettre en avant l'impact négatif du surendettement des États sur le fonctionnement du système bancaire et vice versa.

Le premier constat est que le secteur bancaire en Europe semble avoir beaucoup souffert depuis le début de la crise des dettes souveraines puisqu'il n'assure plus son rôle principal. L'explication de ce phénomène est dû en grande partie à la forte interdépendance qu'il existe en Europe entre les États et le secteur bancaire d'une part et le secteur bancaire et le marché d'autre part. Nous pouvons résumer les choses comme suit :

- La banque centrale est le prêteur en dernier ressort, mais le sauvetage des banques ne peut se faire que par les États (par nationalisation généralement). Or, des Etats trop endettés ne peuvent pas assumer de telles opérations et, en situation de crise, les probabilités de faillite des banques touchées sont beaucoup plus grandes.

- Selon la même approche, si le secteur bancaire est frappé durement par une crise naissant sur les marchés, il ne pourra plus assurer le financement des gouvernements ni celui des agents privés ( Cf. PARTIE 2 - TITRE 1 - I. 1.). Les difficultés du secteur bancaire aggravent alors celles des finances publiques.

- Les banques détiennent à leur bilan de grandes quantités de dettes souveraines. L'occurrence d'une crise de la dette, qui fait chuter la valeur des obligations d'État en même temps que leur valeur de marché, déséquilibre le bilan des banques qui n'ont d'autre choix que de rationner le crédit pour essuyer les pertes sur ces titres.

Les propositions de création d'un système européen de gestion des crises bancaires pourraient permettre en partie d'éviter de tels événements de rationnement des crédits. Cependant, ces propositions ont jusqu'à aujourd'hui été rejetées.

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3. Dette publique et risque de crise institutionnelle en Europe Et si l'Europe se disloquait ?

Depuis 2010, des différences marquées se font entre les pays sur les marchés obligataires. Certains pays comme la Grèce, l'Espagne, le Portugal et l'Italie se voient imposer des taux très importants donc bien supérieurs à ceux de l'Allemagne ou de la France. Ces divergences, auxquelles s'ajoute le grand coût économique des politiques de rigueur budgétaire imposée à ces pays par la zone euro ont pour effets à la fois d'accentuer l'hétérogénéité entre ces pays mais aussi d'accentuer le mal-être des populations qui souffrent de la récession engendrée par de telles politiques et tendent à nourrir des rancunes contre l'administration européenne et à voter pour des partis nationalistes.

II. Le rôle de la politique monétaire dans le désendettement publique

Il est indéniable que la stabilité des prix doit rester la priorité des banques centrales. Cependant, il faut prendre en compte que la stabilité budgétaire joue un rôle capital dans la réussite de cette mission comme nous avons pu le montrer dans la section précédente.

Un arbitrage assez difficile doit alors être fait par la banque centrale entre l'ancrage de sa politique sur la stabilité de l'inflation qui devient de plus en plus incertaine à mesure que les dettes publiques prennent de l'ampleur, ou la prise en considération dans sa politique d'un objectif de stabilité budgétaire. Dans ce derniers cas, de nombreuses questions se pose sur les caractéristiques et les implications d'une telle collaboration.

Il faudrait dès lors déterminer une politique monétaire qui permette à la fois de maintenir la stabilité des prix et de réduire les coûts de refinancement des Etats surendetté. C'est l'objet de cette deuxième section.

1. Le rôle de la politique monétaire dans l'assainissement budgétaire : de nouvelles perspectives

Suite à nos précédentes remarques, on peut affirmer que la stabilité des finances publiques des États est un élément crucial pour la stabilité économique et financière. Mais aussi elle est une des principales sources d'inflation. De plus, aussi longtemps qu'une situation budgétaire intenable perdurera, les tentatives de retour à la stabilité en Europe seront illusionnées.

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La plus grande urgence à l'heure actuelle est que les États membres de la zone euro réduisent leur niveau d'endettement et engagent des mesures durables et économiquement soutenables dans cette voie. Cela passera par des politiques dites de rigueur. Notons qu'on ne discutera pas là la légitimité de telles politiques, nous nous tenons à exposer la marche qui est actuellement préconisée par les institutions européennes.

Mais encore, il semble bien évident que la politique monétaire ait aussi un rôle important à jouer dans cet assainissement budgétaire en permettant aux États de pouvoir continuer à se financer à des coûts modérés.

Ici, l'arbitrage entre assistance et neutralité est difficile pour la banque centrale puisque sa crédibilité est en jeu et il faut absolument éviter que la coordination entre les deux politiques ne soit assimilée à de la dominance budgétaire. (Cf. définition I.)

Mais aussi, l'engagement des États à lutter activement contre leur surendettement va être crucial et les agents économiques ajustent leurs décisions en fonction de la crédibilité qu'ils accordent à cet engagement. Les gouvernements devront alors déterminer un programme de désendettement précis et sur plusieurs années.

C'est cette question de la coordination que nous cherchons à traiter ici sur la base de récents travaux qui ont fait suite à la crise des dettes souveraines.

Nous pouvons résumer ce thème en deux différents débats :

? Comment approcher les conditions d'arbitrage par la banque centrale entre coûts du sauvetage et coûts du défaut souverain ? Cette question peut aussi s'interpréter en termes de choix entre l'adoption d'une dominance monétaire dite « douce » comme aux États-Unis ou au Japon et l'adoption d'une dominance monétaire « dure » comme en Europe (Cf. O. Jeanne)

? Face à la crise des dettes souveraines, la banque centrale doit-elle agir immédiatement pour assurer le maintien du financement des États ou au contraire doit - elle agir sous condition que les gouvernements aient sérieusement entrepris des politiques de réduction des déficits ?

Différents auteurs tels que N. Kocherlakota, T. Hellebrandt, A. Posen, M. Tolle, Leigh et O. Jeanne étudient ces questions et leurs travaux permettent déjà d'avoir quelques éléments de réponses à ces questions.

En ce qui concerne la deuxième question, les principaux arguments discutés sont les suivants :

? O. Jeanne soulève le fait que, malgré des niveaux de dettes plus importants au Japon et aux États-Unis qu'en Europe, ces premiers n'ont pas directement été frappés par une crise de confiance sur la valeur de leur dette souveraine tandis que, en Europe les turbulences sont encore fortes et persistantes. L'adoption d'une politique monétaire

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plus douce dans ces premiers pays pourrait alors en être la cause ou du moins une des causes.

? Selon T. Hellebrandt, A. Posen, et M. Tolle, entre autres, la probabilité de succès de l'assainissement budgétaire et sa crédibilité aux yeux des agents économiques (dont le marché) augmentent avec l'engagement ex-ante de la politique monétaire à accompagner la mise en oeuvre de la politique de rigueur. i.e. avec l'assouplissement ex-ante de la politique monétaire.

? Leigh et al. (2010) prouvent à partir d'une étude statistique que la probabilité de réussite de l'assainissement dépend du degré d'accompagnement des politiques en début du programme, soit une fois celui-ci établi et engagé.

? Certains auteurs pensent au contraire que la politique monétaire ne doit pas agir ex-ante mais ex-post car cela aurait pour effets :

- De réduire la pression sur les États afin qu'ils engagent sérieusement les politiques de rigueur nécessaires.

- Qu'une fois engagée dans l'accompagnement des États, la politique monétaire perde momentanément sa capacité à ancrer les anticipations et cela tant que les politiques d'assainissement n'auront pas fait leurs preuves aux yeux du public. Par extension, la perte de crédibilité aurait une influence directe sur la stabilité des prix et sur le niveau de marché des taux obligataires.

- Les conséquences d'un engagement fragile des gouvernements ex-post seraient désastreuses.

2. Démonstration de T. Hellebrandt, A. S. Posen et M. Tolle (2012)

L'objectif de l'étude :

Ces auteurs étudient plus en détail les résultats des interactions possibles entre la politique monétaire et la politique budgétaire en fonction du degré d'accompagnement des politiques d'assainissement par la banque centrale. Leurs analyses s'étendent sur deux périodes et concernent des pays où la banque centrale est indépendante et donc crédible.

La méthode retenue:

? Afin de juger de l'impact des politiques monétaires sur la probabilité de réussite des politiques de rigueur en fonction de la date de début de l'accompagnement, les auteurs calculent : les variations moyennes des taux d'intérêt directeurs des banques centrales sur l'année d'assainissement et sur l'année précédant l'assainissement. Puis ils

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comparent ces valeurs entre elles au regard des cas de réussite de l'assainissement et des cas d'échecs.

? Afin de juger de l'impact des politiques monétaires d'accompagnement sur le degré de crédibilité des politiques de rigueur, les auteurs observent les différences entre les taux de rendements sur les obligations des États concernés par l'assainissement et les taux de rendement d'actifs considérés comme exemptés de risque.

Les résultats :

? Concernant le lien entre l'assouplissement monétaire ex-ante et la probabilité des politiques de rigueur :

Lorsque le programme d'assainissement est d'une certaine ampleur, les résultats montrent que la réussite de ces programmes semble être en grande partie déterminée par le degré d'accompagnement ex - ante de l'Etat par la politique monétaire i.e. dès l'année précédente ou dès la mise en place du programme.

? Concernant le lien entre l'assouplissement monétaire et la crédibilité des politiques d'assainissement :

Les auteurs remarquent que les politiques budgétaires jugées comme étant les plus crédibles sont souvent accompagnées de politiques monétaires très engagées durant l'année d'assainissement. Il semblerait même que plus l'accompagnement est prononcé, plus l'implication des politiques budgétaires dans les programmes est forte voire plus ambitieuse.

Les conclusions des auteurs :

En plus de ces observations, il semble clair que l'heure est à la coordination entre politique monétaire et budgétaire en ces moments difficiles. Le soutien qu'apporteront les autorités monétaires aux gouvernements sera un élément déterminant pour la sortie de crise.

La BCE a d'ailleurs engagé une marche dans ce sens lorsqu'on considère ses récentes décisions.

Il faudra toutefois réaliser de plus amples études en ce qui est des avantages que l'on pourrait tirer du maintien d'une politique monétaire stricte en terme d'incitation à la mise en place de politiques de rigueur crédibles.

Enfin, cette étude ne fait pas état de l'impact que peut avoir l'ampleur des chocs sur cette dynamique de collaboration comme l'implication d'interactions négatives entre les deux politiques ou l'existence de non linéarité dans les réactions du marché.

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3. Présentation du modèle proposé par O. Jeanne (2012) : Une approche intéressante des arbitrages potentiels entre défaut et assistance

L'objectif de l'étude :

O. Jeanne cherche à simuler les conséquences de l'arbitrage par la politique monétaire entre laisser les États faire défaut et les assister (i.e. monétisation de la dette publique).

Cette question peut aussi s'interpréter en termes de choix entre l'adoption d'une dominance monétaire dite « douce » (ou préventive) comme aux États-Unis ou au Japon et l'adoption d'une dominance monétaire « dure » comme en Europe. L'auteur définit la première comme une politique visant à responsabiliser les gouvernements dans la gestion de leurs finances et la deuxième comme une politique monétaire qui dans les cas extrêmes autoriserait le défaut de l'État.

Observations historiques (recadrage de l'étude) et considérations théoriques :

? L'observation de données empiriques : L'auteur constate d'abord en comparant les ratios de dette des États par rapport à leur PIB, que la situation des finances publiques aux États-Unis, au Japon et au Royaume-Uni est à l'origine bien plus mauvaise que la moyenne des pays européens et est à peu près équivalente à celle de la Grèce, du Portugal ou de l'Irlande.

? Classement des pays par type de politique : en second lieu il met l'accent sur la différence de politiques monétaires entre ces premiers pays d'une part et celle retenue par la BCE en notant que cette dernière est caractérisée par un très fort engagement dans la recherche d'une dominance monétaire maximale. De ce point de vue, celle-ci aurait donc tendance à tolérer plus facilement le défaut que ses homologues Anglo-Saxons ou Nippons qui adoptent des politiques monétaires plus flexibles en fonction de l'ampleur des chocs frappant l'économie.

? A propos de l'effet des taux d'intérêt sur la dette publique :

- La thèse « nordiste » soutient que ces écarts de taux d'intérêt sur les dettes à risque sont positifs et même souhaitables dans la mesure où ils incitent les gouvernements à la prudence dans la gestion de leurs finances.

- La thèse « sudiste » soutient que ces « spreads » sont au contraire négatifs et conduisent à l'aggravation de la situation budgétaire des États déjà très endettés.

? Les décisions de monétiser la dette publique par le maintien de taux d'intérêt très faibles doit être une décision réfléchie et mesurée sur la base d'un arbitrage entre les avantages et les inconvénients de cette décision. Pour aider à réaliser cet arbitrage, les travaux de

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Davig, Leeper et Walker (2010) permettent de chiffrer les implications des niveaux d'endettement sur le niveau d'inflation et/ou de fiscalité.

Le modèle:

· Modèle à deux périodes représentant le court terme et le long terme.

· La banque centrale définit son taux d'inflation cible (0% dans le modèle).

· Les agents sont neutres au risque, ce qui implique que le taux d'intérêt du marché obligataire reste constant.

· L'État cherche à financer ses dépenses entre les deux périodes mais n'est cependant pas certain que ses recettes à venir permettront de couvrir sa dette.

· Si le gouvernement est insolvable à la période 2, la banque centrale a le choix entre le laisser faire défaut ou le secourir.

· Le public ne connait pas à l'avance le choix que fera la banque centrale.

· Le public évalue la probabilité que la banque centrale laisse l'État faire défaut et se sert de cette évaluation pour formuler leurs anticipations. Soit ì cette probabilité.

· Les variables expliquées sont l'ajustement budgétaire, le défaut, et l'inflation. En cas de crise de solvabilité en période 2, deux situations sont possibles :

· La banque centrale empêche l'État de faire défaut en monétisant sa dette ce qui crée de l'inflation

· La banque centrale laisse l'État faire défaut avec une probabilité calculée en fonction des niveaux de son solde budgétaire et l'inflation reste nulle

Les résultats du modèle concernant l'arbitrage entre défaut et inflation :

L'auteur fait varier l'équilibre de son modèle en réajustant la valeur du paramètre ì (probabilité d'abandon) et trouve des valeurs probables d'équilibre pour les variables ajustement budgétaire, défaut, et d'inflation.

L'auteur montre que la domination monétaire dure peut réduire la probabilité d'ajustement budgétaire en rendant sa réalisation moins probable. De plus, il semble d'après les estimations

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du modèle, qu'une telle politique serait associable, et contrairement à ce à quoi on pourrait s'attendre, à une plus forte probabilité d'inflation.

L'approche soutient par ailleurs que l'assistance des autorités monétaires permettrait dans une certaine mesure une meilleure soutenabilité de la politique de rigueur et donc influencerait sa réussite.

L'auteur conclue que ces travaux peuvent servir de base cognitive mais doivent être encore beaucoup approfondis dans les années à venir.

4. Mots de conclusion

Jusqu'à présent, et comme nous avons pu le montrer en PARTIE I- TITRE 2, les anticipations d'inflation en zone euro et aux Etats-Unis sont restées stables malgré l'activisme des banques centrales. Il semble que les agents économiques comprennent la nécessité d'adopter des politiques extraordinaires pour stabiliser l'économie et semblent aussi comprendre l'enjeu que représente le surendettement des Etats.

Cependant, les études et les discussions actuelles mettent en avant le danger que représenterait le financement de politiques budgétaires dont les entreprises d'assainissement sont fragiles et peu crédibles.

Les études ont aussi montré que cet accompagnement des politiques budgétaires par la politique monétaire était une condition très importante pour leur réussite.

Enfin, il faut conclure qu'il y a de grandes chances que la crise persistante que connait l'Europe depuis 2008 perdurera, voir s'aggravera, tant qu'une politique efficace de gestion des dettes publiques n'aura pas été trouvée.

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TITRE 3 : Vers un modèle amélioré de politique monétaire : La sous - optimalité de la règle de Taylor pour conduire une politique monétaire optimale

De nombreux économistes, notamment ceux issus du courant des nouveaux keynésiens soutiennent que le cadre de décisions retenu par les banques centrales est très incomplet ce qui explique leur incapacité à faire face aux déséquilibres graves qui affectent les marchés. Selon certains d'entre eux, la « grande modération » de ces dernières années est plus due à des facteurs réels qu'à l'optimalité des règles de politique monétaire. Au contraire, une règle jugée trop écartée des grandes variables de l'économie réelle a engagé dès les débuts de l'adoption du ciblage de l'inflation, des travaux théoriques critiques qui ont retrouvé aujourd'hui de leur intérêt.

Peu importe ce qui se dit, ces travaux s'entendent cependant tous à placer parmi les missions principales de la banque centrale celle de la recherche de la stabilité des prix, condition cruciale du bien-être économique. Les divergences se font dans le choix des autres objectifs à prendre en compte et notamment dans la reformulation de la règle de Taylor afin de l'augmenter de certaines variables explicatives et de la reconnecter ainsi avec la réalité des dynamiques macroéconomiques.

De nombreux modèles tentent d'analyser l'efficacité d'une telle modification de la règle de décision sur le choix des agents et l'équilibre macroéconomique et attirent tout au moins l'attention surtout dans ce contexte difficile avec les incertitudes qu'il soulève.

Nous allons présenter dans cette partie les différentes critiques adressées à la politique monétaire, leurs fondements et les propositions d'évolution du modèle de référence retenu jusqu'alors par les banques centrales.

Il s'agira dans une première partie de présenter les critiques sur la position qu'assignent les banques centrales aux variables économiques dans l'échelle d'importance à la base de leurs décisions.

Dans une deuxième partie, nous présenterons certaines analyses qui remettent en question certaines des hypothèses servant de base à l'orientation des politiques monétaires.

Enfin, dans une dernière partie nous présenterons brièvement les quelques modèles macroéconomiques récents qui permettent de donner des pistes pour l'élargissement du mandat des banques centrales

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I. Les grands « oublis » de la politique monétaire

1. L'absence de la microéconomie bancaire dans l'analyse du canal du crédit

Les banques sont le complément nécessaire des marchés de capitaux. Comme nous avons pu le voir précédemment, elles permettent le financement des agents ne pouvant pas avoir recours au marché, elles aident à minimiser les problèmes d'aléa moral, elles sécurisent l'épargne publique, elles financent les Etats entre autres. Cela fait d'elles un élément important dans le processus de transmission de la politique monétaire.

Pourtant, l'analyse microéconomique des banques a perdu beaucoup de sont intérêt dans les modèles macro économiques depuis une trentaine d'années. Les banques sont résumées à leur fonction de prêteur avec une activité suivant une marche linaire laquelle consiste à accorder des prêts sous contrainte de capital, de taux de refinancement et de volume des dépôts. La légitimité du canal du crédit a par ailleurs souvent faire l'objet de critique ces dernières décennie. Ces considérations limitatives du secteur bancaire s'expliquent par la prédominance des marchés financiers dans le financement de l'économie, lesquels ont connu un développement explosif depuis les années 30. Les volumes de capitaux qui s'y échangent sont énormes en comparaison des capitaux qu'engage l'activité bancaire. La pensée prévoit même la disparition progressive des banques avec l'augmentation de l'efficience à venir des marchés financiers.

Cependant, la récente crise relance les discussions sur à ce sujet. Et l'Europe réaffirme sa dépendance au secteur bancaire qui reste une des sources principales de financement des économies. Avec les deux crises quasi-simultanées qui ont frappé l'Europe, le canal du crédit a été et est encore très défaillant. La politique monétaire de la BCE, malgré son fort engagement, ne parvient pas à rouvrir les vannes du crédit.

Une des raisons de ce blocage est, comme non l'avons précisé dans notre développement (PARTIE 1 - II - 4.), dû en partie au surendettement des agents privés. Mais il n'y a pas que cela, de nombreux intellectuels s'accordent à dire que le comportement microéconomique des banque à été trop longtemps ignoré et que cela aura eu une part de responsabilité importante dans l'ampleur de la récente crise et dans sa persistance.

Afin de traiter le sujet du rôle de la microéconomie bancaire dans l'ajustement macroéconomique, il nous faut comprendre entre autres comment les décisions des banques ont évolué en considération de l'expansion des marchés financiers, mais aussi dans quelles mesures ces stratégies différent en fonction des caractéristiques de chaque banque et enfin quels sont aujourd'hui les liens entre la politique monétaire et les décisions bancaires.

Au final, la question sera de savoir comment réintroduire la dynamique décisionnelle des banques dans les modèles DGSE servant de base à la décision des autorités monétaires, mais aussi prudentielle.

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1.1. La structure du canal du crédit

Une première distinction importante à faire entre les activités d'intermédiation financière est de considérer qu'il existe en réalité deux types de canal crédit communément appelé « the narrow credit channel » (canal stricte du crédit) et « the broad credit channel » (canal large du crédit).

Les effets qu'aura la politique monétaire sur le volume des crédits octroyée vont dépendre de l'importance relative des canaux.

? Le « narrow credit channel » correspond aux activités traditionnelles des banques. L'influence que pourra avoir la politique monétaire sur l'offre de crédit dépendra surtout du niveau des taux d'intérêt directeurs, des réserves règlementaires exigées et du prix de ces réserves. En cas de durcicement de la politique monétaire, l'offre de crédit diminue ou les taux des crédits augmentent et influence la demande de crédit à la baisse. Les banques peuvent se refinancer sur les marchés obligataires mais à coût plus élevé.

Par extension, la contraction du crédit met à mal la consommation et l'équilibre financier des entreprises etc.

L'efficacité de ce canal de transmission est limitée et discutable pour trois principales raisons qui auront pour effet de limiter l'influence des politiques monétaires :

- La non-substituabilité des dépôts bancaires et des actifs obligataires (certificats de dépôt) n'est pas vérifiée. Kashyap et Stein (94) précise notamment que seules les

banques de petites tailles peuvent transmettre la politique monétaire via ce canal.

- La non-substituabilité des prêts bancaire et du marché n'est pas toujours vérifiée

- Ce canal néglige l'ampleur des interactions à l'heure actuelle entre les banques et les marchés

? Le « broad credit chanel » Le canal large du crédit n'engage pas que les banques mais aussi tout les activités visant à octroyer du crédit au secteur privé. Le fonctionnement de ce canal à été largement étudié dans la littérature avec les travaux d'auteurs comme Bernanke, Meyer, Gertler, ou Jensen et Meckling. L'idée est que les décisions de financement des entreprises ne se base pas majoritairement sur la qualité de l'emprunteur laquelle est juger en fonction de ses résultat économique, du niveau de leur fonds propres, de la cotations boursière de ces fonds et des primes de risque appliqué sur les obligations qu'il émet, de la valeurs des garanties qu'ils proposent. Ce financement est d'autre par soumis à des problèmes d'asymétrie d'information lesquels impliquent des coûts de contrôle plus ou moins importants. Alors, la manière dont fonctionnent ce canal est à peu prêt la même que celle du canal des bilans (cf. PARTIE, II). La politique monétaire va influencer le volume de crédit accorder en impactant la valeur des bilans des agents économique de telle sorte qu'une hausse des taux d'intérêt fera par exemple baisser la

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valeur de l'actifs des emprunteurs qui devront se financer à plus haut coût. C'est dernier feront alors un arbitrage dans le sens d'un financement interne plutôt qu'externe si cela est possible. Ainsi le volume de crédit diminue.

1.2. Le rôle du capital bancaire dans les décisions de financement

Le capital bancaire est une variable déterminante du comportement des banques, surtout en période d'instabilité durant lesquelles les exigences des régulateurs et des créanciers sont plus contraignante.

Le capital bancaire constitue un signal pour les investisseurs sur la santé de la banque et est donc un des déterminants du prix du risque conditionnant les échanges entre la banque et le marché (ex : augmentation en capital, emprunts, émission de produits financiers). Cela implique que pour les banques les plus petites ou les moins capitalisées, l'accès aux fonds financiers reste très limité. Et c'est ces contraintes qui incitent ces dernières à financer des projets plus risqués en échange d'un taux élevé de rémunération, à adopter des leviers de dépôt plus important que les autres banques ou à prendre des positions plus risquées sur les marchés financier. Mais le cas des banques contraintes peut être généralisé à l'ensemble des intermédiaires financiers soumis à régulation prudentielle. De nombreux travaux ont été réalisés en la matière et rejoignent le sujet de savoir dans quelles proportions les banques soumises à réglementation peuvent-elles participer à la formation de crises financière et à leur contagion. Ces travaux réintroduisent la microéconomie bancaire et replace les banques comme gestionnaire de portefeuille dont le but principal est de maximiser leur profit sous contrainte de coûts. Les récents modèles proposés permettent aussi d'intégrer les apports de la théorie sur les choix d'investissement. On peut citer parmi les travaux récents réalisé sur ce sujet, les modèles de Holmstrom B. et Tirole J. (97) et de Rochet (2004).

Cette approche de la microéconomie bancaire nous intéresse dans le cadre de ce mémoire car elle permet de rendre compte de la complexité de la dynamique de décisions des banques et replacent alors les décisions de la politique monétaire parmi d'autres variable explicatives du comportement de crédit des banques. Par ailleurs, ils ont l'avantage de prendre en compte les activités de placements financiers des banques.

Chocs exogènes sur les marchés, contraintes en capital des banques et activité de crédit :

- Le cout du capital est encore plus élevé en période d'incertitude. C'est en partie pourquoi l'effet des politiques de quantitative easing sur la relance du crédit reste limité. Le cout du capital réglementaire relatif aux nouveaux prêt est trop élevé comparé au bénéfice attendu de son utilisation, surtout en période de taux d'intérêt faible et de faible demande pour les crédits.

De nombreuses études théoriques et empiriques démontrent l'existence du lien entre la réglementation en capital et la sensibilité de l'offre de crédit aux chocs exogènes. Les études

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actuelles tendent à décrire et à modéliser le comportement de crédit des banques en période d'instabilité en retenant comme variable explicative la contrainte réglementaire, l'évolution du prix des actifs, la taille de la banque, et le degré de concurrence sur le secteurs bancaire.

1.3. Développement des marché financiers et nouveau modèle de gestion bancaire

Dans une autre mesure, la politique monétaire doit prendre en compte dans son analyse des canaux de transmission le fait que les banques soit aujourd'hui très intégrés et active sur les marchés financiers de telle sorte que leur activité primaire soit relativement moins importante qu'auparavant mais aussi que ces dernières présentent la même sensibilité aux chocs financiers que les autres participants au marché sinon une plus grande sensibilité du fait qu'elle soit en plus contrainte sur ses réserves. Dans la PARTIE II -I, nous avons pu donner plus de précision sur ce phénomène d'interdépendance entre le secteur bancaire et financier. Il faudrait alors préciser la politique monétaire en fonction de ces considérations.

1.3. Conclusion

La politique monétaire, autant que l'analyse strictement économique, doit revoir leur façon d'intégrer le secteur bancaire dans les modèles macro-économiques afin de rendre compte des grands changements stratégiques des banques depuis la « boom » des marchés financiers. Des travaux récents comme ceux de Hale et Santos ou de Marques Ibanez et Scheicher (2010) peuvent compléter ces observations.

Des propositions là encore se tourne vers la détermination d'une règle de Taylor « augmentée) qui prendrait en compte pour évaluer l'efficacité à un moment donné du canal du crédit sur la base du calcule des leviers d'endettement privé par rapport au PIB ou encore l'évolution des prix de l'immobilier entre autres.

Aussi, Goodhart (2007) pose l'intérêt de réaliser des études statistiques et empiriques sur visant à évaluer les effets des variations des taux d'intérêt directeur sur le comportement de prise de risque des banques.

2. L'importance cruciale des frictions sur le marché du travail dans la transmission des politiques économiques

On peut aisément citer comme une des causes du blocage économique depuis 2008, le fait que l'envolée du chômage induit par la crise des subprimes mais aussi des dettes souveraines en Europe a largement fait reculer le niveau de la demande dans tous les secteurs d'activité et a

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donc entrainé le cercle vicieux de la désinflation avec les risque de déflation au bout du tunnel.

On a souvent tendance à voir le chômage comme une conséquence de la récession plutôt que comme une cause. L'analyse des nouveaux keynésiens redonne au marché du travail une importance capitale dans la formation de l'équilibre économique et en font un outil majeur de sa performance.

Les études visent à intégrer dans la règle de politique monétaire, la pleine considération des conséquences économiques de l'occurrence de « frictions » sur le marché du travail, cela afin d'optimiser la règle de décision.

La Fed à d'ors et déjà, et cela depuis 2012 ajouté de façon explicite à ses objectifs celui de la lutte contre « l'écart de chômage » au lieu de l'output gap. En Septembre 2012, le FOMC déclare que les politiques de quantitative-easing ne s'arrêteront pas temps que les perspectives en ce qui concerne le marché du travail ne se seront pas améliorées.

La grande innovation que représenterait la prise en compte du fonctionnement du marché du travail aux cotés de l'inflation dans une même règle serait bien sûr celle de donner des moyens d'intervention directs à la politique monétaire sur la formation de l'équilibre macroéconomique. Politique monétaire et économie réelle seraient alors « réconciliés ».

Les partisans de cette approche considèrent le marché du travail comme l'une des principales sources d'inflation et de formation des anticipations. Cela représenterait donc une avancée économique majeure.

Notre approche consistera d'abord à présenter le fonctionnement du modèle DMP (Diamond, Mortensen et Pissarides) et de ses extensions afin de comprendre l'importance des frictions sur le marché du travail dans la formation de l'équilibre macroéconomique. Dans un second temps, nous préciserons la relation entre dynamique du marché du travail et inflation, enfin, nous nous intéresserons aux résultats obtenus par Ravenna et Walsh (2009) sur la base de leur modèle DSGE augmenté du marché du travail.

Parmi les auteurs ayant travaillé sur ce sujet on peut citer : Blanchard et Galí (2007, 2010) ; Trigari, (2004) ; Moyen et Sahuc (2005) ; Christoffel et Linzert (2010) ; Christoffel et al. (2006) ; Gertler et al. (2008). Tous ces auteurs s'accordent sur un point qui est celui de reconnaître l'importance des frictions et des rigidités salariales comme variables explicatives de la propagation des chocs ainsi que des modes de négociation des salaires.

2.1. Les fondamentaux d'une approche NK -DMP (nouveaux keynésiens - DMP) :

? Des frictions peuvent naître sur le marché du travail, qui engendrent à la fois une augmentation du taux de chômage mais également des emplois vacants. Cela implique

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qu'une simple évaluation du taux de chômage est insuffisante à rendre compte de l'état effectif du marché du travail. Une mesure du ratio postes vacants/chômage identifie l'ampleur de ce phénomène. Ainsi, on peut constater selon l'étude de Walsh (2014) que ce ratio a fortement diminué depuis le début de la crise des subprimes. La forte augmentation du chômage n'a pas donné lieu à une augmentation de postes vacants (faillite, fermetures, délocalisations ...).

? Le taux d'intérêt a un effet direct sur la demande de travail. En effet, sans passer par les canaux usuellement considérés, il existe un canal par lequel une baisse du taux d'intérêt a un effet sur la valeur actualisée des bénéfices attendus par les entreprises pour un certain nombre d'employés. Dans le cas d'une baisse des taux, cette valeur va augmenter et inciter l'entrepreneur à embaucher plus de main d'oeuvre puisque celle-ci est relativement moins couteuse.

? La consommation est une fonction croissante de la baisse des frictions sur le marché du travail : cela est vrai si l'on considère non seulement l'augmentation des revenus distribués aux ménages, mais aussi le fait que les ménages prennent en considération dans leurs décisions l'état de la conjoncture sur le marché du travail et anticipent son évolution. La santé de ce marché (existence de frictions) est alors une variable explicative de la fonction du bien-être social.

? La courbe de Phillips est croissante

? Les prix et les salaires sont considérés comme fixes à court terme (voire à moyen terme) dans ces modèles, ce qui va être la cause de certaines frictions que nous verrons un peu plus bas.

? Les conditions de la négociation salariale jouent un rôle déterminant dans l'équilibre macroéconomique.

2.2. Un modèle d'appariement du marché du travail (DMP) inséré dans un modèle DSGE néo-keynésien (NK - DMP) :

Le modèle de base DMP permet de comprendre l'effet des frictions dit « d'appariement » sur le salaire et le chômage d'équilibre. Ces frictions naissent de l'imperfection informationnelle sur ce marché qui implique que la demande et l'offre de travail sont en partie déconnectées c'est pourquoi la pleine utilisation des capacités productives est rarement assurée. Ces imperfections peuvent avoir différentes origines comme les coûts à la mobilité, l'absence de T.I.C efficace, la congestion entre les acteurs etc. Cela explique la persistance du chômage et d'emplois vacants.

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Une hypothèse importante de ces modèles est qu'il existe des coûts d'appariement autant pour les employeurs que pour les offreurs de telle sorte qu'un arbitrage bénéfices - coût intervient à un moment donné. Il s'agit des coûts d'appariement (ex : entretiens, carburants, communication, formation de rappel etc.)

La résolution du modèle DMP nous donne les salaires et taux de chômage d'équilibre en fonction des conditions spécifiques au marché étudié. La dynamique d'équilibre fait dépendre le nombre de travailleurs de la période 2 à celle de la période 1, ainsi qu'à la destruction d'emplois à la période 1 et des appariements pour la même période. Notons que la valeur de chaque variable dépend des arbitrages coût - profitabilité mentionnés plus haut.

Une des évolutions proposées à ce modèle est celle de Hall (2005) d'y introduire le degré de rigidité des salaires en fonction de la force de négociation des parties au contrat de travail. Une telle proposition sous-entend que, sauf en cas d'indexation des salaires nominaux sur l'inflation, il n'est pas toujours vérifié que les salaires réels restent constants dans le temps. Ce qui remet en cause l'approche conventionnelle retenue pour les modèle DSGE.

2.3. Dynamique du marché du travail et inflation

Mis à part les interprétations traditionnelles de la courbe de Phillips, quelques précisions ont été faites sur la relation entre marché du travail et inflation. En voici quelques-unes.

L'étude de Blanchard et Gali (2007) s'intéresse à l'influence des rigidités des salaires réels sur le niveau d'inflation. Leur principale conclusion est la suivante : la rigidité des salaires réels complique les problèmes d'arbitrage de la banque centrale entre stabilisation de l'inflation et de l'écart de production potentielle. Cela est dû au fait que ces rigidités rendent l'inflation partiellement inerte ce qui a dès lors pour effet d'accentuer les effets inflationnistes et déflationnistes, ou du moins de les ancrer. De telles rigidités peuvent être la conséquence de politique d'indexation des salaires.

Dans la même idée, Ravenna et Walsh (2009) trouvent que la volatilité de l'inflation et de l'output gap sont diminuées lorsque le marché du travail est plus flexible.

Ces derniers arrivent à construire un modèle qui permet de résumer dans une relation entre inflation et écart de chômage (chômage effectif - chômage potentiel) le fonctionnement traditionnel des modèles néo-keynésiens standards avec existence d'un marché du travail caractérisé par des frictions de type DMP.

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2.4. Efficacités des modèles NK-DSGE pour la conduite de la politique monétaire : Résultats des simulations du modèle Ravenna et Walsh (2009)

? La non-prise en compte des frictions sur le marché du travail dans les décisions de politique monétaire (dans les modèles DSGE utilisés) implique des politiques sous-

optimales et des pertes potentielles pouvant être grandes en termes de bien-être social.

? Le marché du travail ne doit pas être administré.

? Les pertes en bien-être social dépendent de l'écart du chômage de telle sorte qu'un marché du travail trop réglementé ou soumis à de nombreuses frictions est un effet négatif sur les ménages.

? La volatilité de la consommation est en partie expliquée par le climat d'incertitude créé par une augmentation de l'écart de chômage.

? La présence de frictions sur le marché du travail rend les agents neutres au genre de politique monétaire, discrétionnaire ou ancrée.

D'autres modèles dans la même lignée sont attribuables entre autres à : Sala, Söderström, et Trigari (2008) ; Blanchard et Galí (2008) et Thomas (2008).

3. L'existence de fortes non-linéarités dans les réactions des agents

Les réactions des agents ne sont en réalité ni homogènes ni linéaires. Les modèles macroéconomiques courants peinent notamment à décrire les non-linéarités qui peuvent subvenir dans des périodes de crise et d'instabilité. Pourtant, en ce qui concerne les comportements de consommation ou d'investissement notamment, il semble évident que ces derniers ne répondent pas, dans la crise que nous traversons, à une logique purement linéaire. Ces non-linéarités comportementales s'appliquent aussi bien, comme nous l'avons vu précédemment, aux banques et aux agents du secteur financier...

C'est alors, qu'un important travail reste à faire pour identifier les déterminants de cette volatilité des agrégats économiques, cela sûrement par l'utilisation de modèles dynamiques et de techniques de simulation. Ces modifications imprévisibles de la structure de décision sont importantes à prendre en compte dans le cadre de la politique monétaire dans la mesure où cela permettra à la politique monétaire d'avoir une meilleure compréhension de la cognition des différents types d'intervenants sur les marchés et ainsi d'optimaliser sa règle de décision. Ainsi, sa prise en charge des crises sera plus efficace mais aussi le retour à la stabilité économique sera plus durable.

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Keynes mentionnait ce qu'il appelle des « instincts animaux » pour invoquer des décisions irrationnelles et déconnectées des réalités économiques prises par les agents dans certaines situations.

La principale explication de ces dérives comportementales est à chercher dans l'impact psychologique de l'incertitude sur les agents (incertitude quant à l'avenir, aux prix futurs des actifs, aux niveaux des salaires, à la reprise économique etc.). Par exemple, les banques centrales ont rendu les conditions d'investissement bien plus profitables à l'heure actuelle qu'avant le déclenchement de la crise. Le résultat attendu conformément aux modèles de base retenus était un retour plus ou moins rapide des activités économiques. Pourtant, il semble que la structure décisionnelle des investisseurs s'est modifiée avec l'incertitude générée par la crise de telle sorte que l'ordre de priorité des variables qu'ils retiennent pour leurs décisions semble avoir changé. La question est alors de savoir dans quelle mesure.

Une autre dimension importante à prendre en compte concerne l'interaction entre les agents économiques. Ces états de doute sont contagieux puisque les agents sont intimement liés entre eux. Dans le cas de la finance par exemple, la cession par un agent de taille importante d'un grand volume d'actifs influence tous les investisseurs qui voient un signal négatif dans cette action, sans pour autant que ces craintes soient justifiées. Mais encore, la chute des cours, qui tombent souvent en dessous de leur valeur fondamentale, approfondit le climat d'incertitude, la recrudescence des problèmes d'asymétrie informationnelle, le blocage des financements et par extension le recul de l'activité réelle sans pour cela, qu'à aucun moment, l'excès de panique n'ait été justifié.

Une chose qui semble peu contestable en ce qui est de l'analyse des comportements des agents financiers, est que l'hypothèse d'efficience des marchés financiers souvent retenue par les modèles DSGE doit être rejetée au profit de tentatives de modélisation des problèmes liés à l'inefficience informationnelle. De très nombreux travaux sont déjà disponibles sur ce sujet en ce qui concerne les marchés mais aussi la structure de décision des banques et des entreprises en fonction des questions d'asymétrie informationnelle. Faut-il encore arriver à en faire un bilan exploitable dans les modèles DSGE.

F.Mishkin précise que puisque le principal objectif final de la politique monétaire est celui de maximiser le bien-être social, elle se doit alors d'évoluer avec la structure des préférences des agents économiques.

Les travaux entre autres de Gertler et Karadi (2009) et Curdia et Woodford (2009) donnent quelques précisions sur ce sujet.

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II. Autres considérations sur la pertinence des fondamentaux de la politique monétaire

1. Discussions autour du ciblage de l'inflation : Quel taux ? Quelle cible ?

1.1. Le ciblage de l'inflation

La récente crise nous a montré que le problème du "zero lower bond", qui, à force de la mise en oeuvre des politique non conventionnelles, pouvait être un problème sérieux en ce sens qu'il implique un fort interventionnisme des banques centrales (voir développement partie 1-II - 4. et Partie 2, I. 3.). Certains économiste se demande s'il ne serait pas plus sage de revoir à la hausse la cible d'inflation afin d'éviter que ce problème ne contraigne la politique monétaire à l'avenir. Ainsi, par exemple, Blanchard, Dell, Ariccia et Mauro (2010) proposent d'augmenter cette cible de 2 à 4 % pour l'Europe.

L'idée derrière cette proposition est qu'en cas de nouvelles instabilités, les anticipations d'inflation ancrées sur un niveau plus élevé, laissent une plus grande marge de manoeuvre aux banques centrales afin de contrer l'endiguement d'une crise potentielle ou d'un choc de demande par exemple, en influençant les taux d'intérêt réels de long terme voire en les rendant négatif en cas de nécessité. Par extension, ces critiques impliquent que la politique monétaire doit être stricte sur une cible d'inflation supérieure très proche des 2% si elle ne change pas cette cible à la hausse. Les discussions entre participants du FOMC semblent aussi tendre vers une révision à la hausse des cibles d'inflation.

Paul Samuelson et Robert Solow proposent même de tolérer le dépassement de cette cible jusqu'au seuil de 5%.

Cependant, différentes critiques peuvent être formulées contre cette proposition :

- Une cible à 4 % pourrait affecter négativement les décisions des ménages et des entreprises. Comme le soutient l'organisation Greenspan, afin de ne pas affecter les comportements fondamentaux des agents, la cible ne doit pas dépasser le niveau des 3 %.

- L'augmentation engendrerait une perte mesurable de la crédibilité et de l'utilité même de la mission des banques centrales dont le comportement serait même assimilable à un comportement discrétionnaire.

- Une cible d'inflation plus haute engage un plus grand risque de réalisation d'une spirale inflationniste.

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- Une telle mesure ne serait bénéfique qu'en cas de crises économiques graves qui sont par expérience très peu fréquentes. Tandis que les coûts d'une telle mesure pourraient se mesurer jour après jour.

1.2. Le ciblage du niveau des prix

De nombreux travaux actuels reviennent sur le choix de la cible d'inflation de la politique monétaire. Ces travaux soulèvent la question de savoir si une cible de niveau des prix ne présenterait pas plus de bénéfices qu'une cible d'inflation en ce sens qu'elle permettrait de mieux ancrer les anticipations d'inflation des agents et aussi éviter les coûts potentiels liés au phénomène de « dérive du niveau des prix » sur une période longe. Notre objectif est de faire un bilan des bénéfices et des désavantages qui pourraient résulter du ciblage du niveau des prix plutôt que de celui de l'inflation. Cela sur la base des récentes études réalisées sur ce sujet.

Qu'est -ce que le ciblage du niveau des prix ?

La banque centrale base sa cible sur la définition d'un sentier de croissance du niveau des prix correspondant à une moyenne corrigé des observations passées. Sa mission sera alors de maintenir le niveau des prix sur cette cible en réagissant de façon ex-post à ses variation sur l'année en faisant modifiant sa cible d'inflation de façon à annuler les effets des écart sur l'année échue.. La grande différence avec le ciblage actuel de l'inflation, c'est que cette dernière adopte une approche prospective. Elle vise à ce que l'inflation moyenne de long terme ne dépasse pas un certain seuil et elle ne réagira pas pour corriger les écarts d'inflation effective d'une année à l'autre.

Avantages du ciblage du niveau des prix

? Une des premières remarques que nous pouvons faire est que la cible du niveau des prix diminue les incertitudes sur les prix futurs et permet donc un meilleur ancrage des anticipations de l'ensemble des agents économiques (syndicats, entreprises, investisseurs). Elle diminue donc les frictions pouvant exister sur le marché du travail et celles liées à la déconnection dans la fixation des prix ex - ante par les entreprises.

? De plus, elle permet d'éviter la perte éventuelle de richesse liée aux fluctuations imprévisibles du niveau d'inflation.

? Aussi, un grand avantage du ciblage du niveau des prix réside dans le fait qu'il sécurise les termes des contrats conclus pour un long terme de telle sorte à ce que les valeurs réelles anticipées du prix du contrat soient toujours égales à leur valeur actuelle. D'autre part, elle permet aux parties d'un contrat d'avoir recours de manière moins fréquente à des produits d'assurance et autres produits financiers de couverture.

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Howitt (2001) affirme d'ailleurs que l'effet des incertitudes entourant les prix est déterminant dans la formation de l'inflation via ce canal des contrats.

? Svensson, Woodford, Gavin et Prescott entre autres soutiennent que ce type de ciblage a pour effet de produire moins de volatilité du PI3 que la cible d'inflation

Inconvénients du ciblage du niveau des prix

I.Fisher en 94 et d'autres études sur le sujet, soulèvent les aspects négatifs que peuvent avoir ce type de ciblage :

? Pourrait produire une volatilité plus grande du PI3 que la cible d'inflation en cas d'occurrence de chocs inattendus sur les prix

? Rendrait l'utilisation des politiques monétaires non conventionnelles inutilisables en cas d'atteinte du « zero lower bond » pendant un choc

? Le fait de maîtriser plus fermement les niveaux des prix pourrait non seulement les déconnecter de leur évolution naturelle avec la dynamique du PIB dans le temps

? Mais aussi, faire perdre au prix leur fonction d'indicateur sur le marché

Il semblerait alors que le ciblage du niveau des prix présente bien des intérêts, cependant un arbitrage doit être fait entre ses bénéfices et ses coûts en comparaison à ceux de la cible d'inflation.

La banque du Canada, dans une publication sur le sujet en Septembre 2009, sur la base de l'analyse de S. Ambler, précise les avantages et les inconvénients du recours au ciblage du niveau des prix dans le tableau qui suit :

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Source : S. Ambler - Banque du Canada

2. Le retour de la théorie discrétionnaire de la politique monétaire

La politique discrétionnaire vise à fixer le taux d'intérêt période après période en fonction de la conjoncture économique. Cela implique que la banque centrale réagit « sur le tas » et librement.

Elle ne s'engage pas à suivre une cible d'inflation quantifiée pour l'avenir. Il n'y a donc pas d'ancrage ou de pilotage des anticipations sous les formes qu'on expérimente depuis la mise en place de la politique monétaire actuelle.

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La politique dite soumise à une règle ou « commitment » est celle de la politique actuelle. Elle est prévisible puisqu'elle fixe le niveau des taux d'intérêt en suivant une règle précise (la règle de Taylor). Elle permet ainsi une grande maîtrise des anticipations d'inflation des agents économiques.

Ce qui a justifié jusqu'alors l'ancrage de la politique monétaire sur une règle ainsi que la grande transparence des orientations stratégiques, c'est le souci du maintien de la crédibilité de la banque centrale. Cette crédibilité est jugée indispensable afin de garder la confiance des agents économiques, de piloter les croyances des agents et donc de garantir la stabilité des prix, et par extension de l'activité économique.

Les deux politiques ont leurs arguments.

Les nouveaux Keynésiens, qui ont toujours prôné l'approche discrétionnaire, profitent de cette période d'instabilité et de l'échec des impulsions de la politique monétaire actuelle, pour réengager le débat sur l'intérêt de chaque approche avec en tête la croyance qu'une politique de type discrétionnaire bien formulée permet d'obtenir de meilleurs résultats en terme de bien-être social sans pour autant perdre en crédibilité. Il est donc intéressant dans le cadre de ce mémoire et au vu du biais d'inefficacité avéré de la politique monétaire en Europe, de nous pencher sur cette approche.

Notons que, sans pour autant s'auto-qualifier de politique discrétionnaire, la Fed et la banque d'Angleterre agissent pourtant en tant que tel lorsqu'elle décide d'intervenir directement dans la politique budgétaire en achetant des bons du trésor ou encore en fixant clairement un conditionnement de leur politique sur des objectifs autres que l'inflation comme celui du niveau du PIB ou celui du de chômage.

Selon l'approche de Clarida, Gali et Gertler (99), qui est partagée par tous les auteurs de ce courant, la principale critique formulée contre la politique discrétionnaire qui est celle de sa crédibilité ne tient pas : Une politique discrétionnaire n'est pas moins crédible qu'une politique engagée si elle est menée selon une marche logique et modérée.

En effet, l'idée étant que les anticipations des agents, au lieu d'être solidement ancrées par la règle, vont s'établir dans la même logique économique que celle de la banque centrale. Donc les agents seront aussi capable d'anticiper assez justement, au regard de la conjoncture économique, les réactions de la banque centrale qui choisi d'adopter une politique discrétionnaire. On parlera de « time consistent equilibrium ».

Pour aller encore plus loin, les travaux récents de l'école des nouveaux Keynésiens permettent dans ce cadre de formuler des modèles de prévision macroéconomique détaillés et certains planchent sur l'élaboration d'une nouvelle règle de politique monétaire qui serait sensible à la conjoncture. Ce courant réaffirme l'importance d'adapter la politique monétaire aux défis économiques. L'idée derrière cette intention sera celle de formuler un « mode d'emploi

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normatif » pour la politique monétaire contenant sûrement des valeurs probables des paramètres du modèle différents en fonction des défis à surmonter.

Y aurait-il des modèles de politiques monétaires de crise et des modèles de politiques monétaires de stabilité par exemple ?

Les travaux doivent encore être approfondis dans ces domaines. Cependant, on peut noter que cette approche n'est pas dénuée de sens au regard à la fois de l'utilisation d'instruments inédits pour contrer la crise récente et la rude bataille que mènent encore les autorités monétaires pour stabiliser les économies à leur niveau potentiel.

Le cadre réglementaire dans lequel la politique discrétionnaire doit évoluer est défini comme suit :

? La politique monétaire ne doit pas chercher à fixer le niveau de l'output au-delà de son niveau potentiel au risque d'engendrer une forte inflation et une perte notable du bien-être social. Cette leçon peut être tirée des erreurs du keynésianisme ancien.

? Lorsque la banque centrale affirme la prédominance de l'objectif d'inflation et bénéficie d'un statut indépendant, le biais inflationniste lié à la politique discrétionnaire diminue.

Aussi, certaines simulations menées par ces trois auteurs ainsi que par des auteurs comme Walsh et Ravenna (2009) entre autres, permettent d'évaluer les bénéfices à tirer de l'adoption d'une politique discrétionnaire en termes de rapport entre bien-être social et la perte sociale.

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CONCLUSION

Tout au long de ce mémoire de recherche, nous sommes revenu sur les principaux concepts clés qui fondent la science économique. Nous avons pu comprendre avec précision comment les équilibres macroéconomiques se formaient, mais aussi, nous avons pu nous rendre compte de la difficulté de modéliser les comportements individuels. Et c'est là tout l'objet de cette science.

Dans le cadre spécifique du sujet que nous présentons ce jour, qui est celui de la capacité de la théorie de politique monétaire à atteindre les objectifs de stabilité économique et financière, nous avons pu rendre compte des principales critiques formulés à l'égard du ciblage stricte de l'inflation, de la construction de la règle de décision retenue, des hypothèses retenu dans les modèles DSGE de base servant à l'analyse économique des banques centrales ou encore de l'efficacité des politiques monétaires non-conventionnelles.

De nombreux éléments de réponse ont été apporté aux principales questions du moment qui sont celle de savoir si :

- Les banques centrales doivent intervenir sur les marchés financiers, i.e. intégrer l'objectif de stabilité financière dans leur mandat, et si oui, de quelle manière

- Les banques centrales doivent intervenir dans les programmes de désendettement des Etats et dans quelle mesure

- La théorie à la base de la politique monétaire actuelle n'est pas incomplète et trop « brute » en soulevant des questions telles que l'existence de non-linéarités et de mauvaises spécifications des modèles DSGE.

Ce qui semble évident, c'est que les discussions se feront de plus en plus nombreuses et engagées dans les années à venir et que les nombreuses ouvertures que permettent les travaux récents ne manqueront pas d'être exploité autant par les économistes - chercheurs que par les banques centrales.

« L'une des conclusions de mon étude de la Grande Dépression est que l'on a tendance à considérer que l'orthodoxie est une stratégie sûre. Mais la stratégie doit dépendre de la situation. En période de crise, l'orthodoxie peut s'avérer être une très mauvaise stratégie »

Ben Bernanke

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