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La gestion de la dette publique dans les états membres de UEMOA et de la CEMAC

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par Aïcha Ndiaye
Université Paris I Panthéon-Sorbonne - Master II recherche droit et gouvernance des systèmes financiers publics 2017
  

Disponible en mode multipage

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MÉMOIRE DE MASTER II DROIT ET GOUVERNANCE

DES SYSTEMES FINANCIERS PUBLICS

La gestion de la dette publique dans les Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C

 
 
 
 

Rédigé par : Sous la direction de :

NDIAYE Aïcha Pr. BOUVIER Michel

Année Académique 2016-2017

Avertissement

La Faculté n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises

dans ce mémoire ; ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

Remerciements :

Je remercie tout d'abord Allah Quim'a donné la force d'effectuer ce travail.

Je souhaite aussi remercier ma famille et particulièrement mes parents. Vous êtes et resterez mes anges gardiens. Sans vous, ma vie n'a aucun sens.

Mes remerciements vont également à l'endroit du Professeur BOUVIER. Malgré son agenda chargé, il n'a pas hésité quand je lui ai demandé de m'encadrer.

Je tiens aussi à remercier Monsieur Samuel GUERINEAU de la FERDI. Il m'a beaucoup aidé dans mes recherches.

Merci à Abdou Malick Ba pour la relecture et la correction de mon mémoire.

Enfin, je remercie tous mes proches et amis qui m'ont toujours soutenu et qui croient en moi.

Sommaire

Introduction : 2

Première Partie : Un double dispositif communautaire de gestion de la dette publique : 20

Chapitre I : la création d'une surveillance multilatérale au sein des deux Unions : 20

Section 1 : L'organisation communautaire de la surveillance multilatérale : 22

Section 2 : La réception des règles de surveillance multilatérale par les Etats : 32

Chapitre II : La définition d'un cadre de référence de la politique d'endettement : 39

Section 1 : L'obligation des Etats de mettre en place une politique d'endettement : 40

Section 2 : La mise en place d'un organe de coordination dans chaque Etat : 46

Deuxième partie : Une évolution lente vers la convergence en matière de gestion de la dette 53

Chapitre I : Une adaptation difficile des Etats aux conditions de bonne gouvernance financière : 54

Section 1 : la transparence, un pilier essentiel de la gestion de la dette des Etats : 55

Section 2 : Les difficultés des Etats à internaliser la nouvelle culture financière : 66

Chapitre II : une gestion de la dette rendue difficile par des facteurs exogènes aux Etats : 72

Section 1 : Une convergence lente en matière de gestion de la dette du fait des carences des instruments communautaires : 73

Section 2 : Des cadres communautaires dépourvus de modèles propres : 80

Conclusion : 86

Principales Abréviations :

BEAC : Banque des Etats de l'Afrique Centrale

CCEG : Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement

CM : Conseil des Ministres

CNDP : Comité National de la Dette Publique

CNPE : Comité National de Politique Economique

CNSM : Comité National de la Surveillance Multilatérale

CEMAC : Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

FERDI : Fondation pour les Etudes et Recherches sur le Développement International

FMI : Fonds Monétaire International

IPSAS : International Public Sector Accounting Standards

LOLF : Loi Organique relative aux Lois de Finances

PCSCS : Pacte de Convergence de Stabilité de Croissance et de Solidarité

PEFA : Dépenses Publiques et Responsabilité Financière

PIB : Produit Intérieur Brut

PPC : Programme Pluriannuel de Convergence

SDMT : Stratégie D'endettement à Moyen Terme

S.M : Surveillance Multilatérale

TOFE : Tableau des Opérations Financières de l'Etat

UEAC : Union Economique de l'Afrique Centrale

UEMOA : Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

Introduction :

L'importance de la construction d'organisations d'intégration n'est plus à démontrer. Plus qu'une utilité, les organisations d'intégration sont devenues une nécessité. En effet, « le développement et le progrès économique, social, scientifique et technique ne sont plus à la portée d'un seul Etat »1(*). Bien au contraire, l'intégration est considérée comme l'ultime solution capable de promouvoir l'émergence des pays en développement. Les organisations d'intégration occupent une place de plus en plus importante en Afrique Subsaharienne francophone. L'instabilité économique mondiale a renforcé la vulnérabilité des petites économies de la région. La solution revient donc à renforcer les liens interafricains et la solidarité afin de mieux faire face aux chocs extérieurs. C'est dans ce cas de figure que sont nées au milieu des années 90, deux grandes organisations d'intégration2(*) à savoir l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (U.E.M.OA.) et la Communauté Economique et Monétaire d'Afrique Centrale (C.E.M.A.C). L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C sont préoccupées par la promotion de la croissance économique. Mais la faiblesse économique des Etats impose que la croissance soit financée sur la base d'emprunts. Ce qui soulève un autre impératif : celui d'assurer une bonne gestion de la dette publique.

L'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (U.E.M.O.A) a été fondée par un traité signé à Dakar (Sénégal) le 10 janvier 1994 par sept Etats que sont le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d'Ivoire, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo. Le 2 mai 1996, la Guinée Bissau devient le huitième Etat membre de l'Union. L'U.E.M.O.A. est le fruit d'expériences d'intégrations régionales qui ont débuté bien avant les indépendances3(*). Elle poursuit et élargit l'intégration entamée par l'Union Monétaire Ouest Africaine (U.M.O.A). Celle-ci a été créée le 02 mai 1962 à Paris par un Traité signé par huit Etats4(*). Toutefois, la crise économique et financière des années 80 a montré les limites d'une intégration cantonnée dans une dimension monétaire (le franc CFA) malgré la stabilité qu'elle avait conférée.

Deux mois après la création de l'U.E.M.O.A, le 16 mars à N'diamena (Tchad), la Communauté Economique et Monétaire des Etats d'Afrique Centrale (C.E.M.A.C) voit le jour. Elle regroupe six Etats à savoir le Cameroun, le Congo, le Gabon, la Guinée Equatoriale, la République de Centrafrique et le Tchad. La C.E.M.A.C a connu un parcours historique moins dynamique que celui de l'U.E.M.O.A. A croire que les Etats de cette dernière sont plus conscients des avantages que procure une intégration. La C.E.M.A.C est l'héritière de l'Union Douanière et Economique de l'Afrique Centrale (U.D.E.A.C) qui a été créée le 08 décembre 1964. Celle-ci, a été, elle-même, précédée par l'Union Douanière Equatoriale (U.D.E) fondée en 19595(*).

Perçues comme des soeurs ou des frères jumeaux6(*), l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont, en effet, beaucoup de points en commun.

Du point de vue de leurs statuts juridiques, l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C constituent, toutes les deux, des organisations d'intégration.7(*) Il s'agit d'un type d'organisation internationale qui regroupe plusieurs Etats et qui visent à terme une harmonisation ou une fusion des législations entres Etas membres. A ce propos, les traités constitutifs des deux unions précisent, dans leurs préambules, qu'il est nécessaire de favoriser le développement harmonieux de leurs Etats membres grâce à l'harmonisation de leurs législations8(*). Elles sont donc dotées d'une personnalité juridique. Et comme leurs noms l'indiquent, elles sont compétentes en matière économique et monétaire. Elles tirent ces compétences d'un transfert de souveraineté de la part des Etats membres. De même, les deux Unions ont la particularité d'avoir été précédées d'une union monétaire. En principe, l'Union monétaire est l'aboutissement de l'union économique. Mais pour les cas de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, c'est le contraire qui s'est produit.

Du point de vue monétaire, les Etats des deux organisations font partie de la zone Franc9(*). Leurs monnaies sont donc attachées à l'euro et bénéficient d'un taux de change fixe.

Sur le plan historique, à quelques exceptions près10(*), les Etats étaient des anciennes colonies françaises. Ils partagent donc la même langue et éprouvent beaucoup d'attachements par rapport aux pratiques françaises.

Sur le plan économique, les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C font partie des pays à faibles revenus. L'économie de la C.E.M.A.C a la particularité de dépendre en grande partie des recettes pétrolières. Elle est donc très vulnérable car les prix du pétrole sont volatiles. D'ailleurs, les Etats connaissent des difficultés du fait de la baisse des prix du pétrole11(*).Les pays de l'U.E.M.O.A concentrent leurs activités économiques dans le secteur primaire, en particulier l'agriculture. Celle-ci est confrontée à des difficultés liées au dérèglement climatique et à la concurrence.

Les économies des Etats ne sont pas diversifiées et sont sensibles aux fluctuations du marché mondial et à la concurrence internationale. Aucun pays de l'U.E.M.O.A ou de la C.E.M.A.C n'est donc en mesure de propulser une croissance économique en se basant uniquement sur ses ressources propres. Cette faiblesse économique les pousse à contracter des dettes.

La dette publique, est un stock issu des emprunts de l'Etat et de ses démembrements auprès d'entités résidentes ou non. A l'époque, l'emprunt servait le plus souvent à financer les guerres.12(*) Mais de nos jours, il est utilisé pour financer en principe des dépenses d'investissement : c'est la règle d'or.

La dette publique est à distinguer du solde budgétaire qui est le résultat de la différence entre les recettes et les dépenses. Lorsque le solde budgétaire est excédentaire, alors il n'est pas besoin d'emprunter vu que les recettes sont supérieures aux dépenses. Mais dans le cas d'un solde déficitaire, l'Etat emprunte pour combler le déficit. Et si l'on additionne les emprunts contractés, on obtient la dette publique. La dette représente l'ensemble des déficits cumulés des années où le budget a été déficitaire.

La gestion de la dette publique dans les Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C répond au souci de maintenir les finances publiques à un rythme soutenable. Cela veut dire que puisque les Etats sont obligés d'emprunter, il faut qu'ils soient toujours en mesure de rembourser la dette en même temps la dette doit servir à accélérer la croissance économique. Et pour cela, les finances publiques doivent être équilibrées, au pire des cas, connaître un déséquilibre raisonnable. De la soutenabilité, dépend la solvabilité c'est-à-dire la capacité à rembourser ses dettes.

L'utilité de la dette publique a fait couler beaucoup d'encre chez les économistes13(*). Mais de nos jours, elle est plus perçue comme une nécessité car le déficit budgétaire est devenu la règle a fortiori dans des pays en voie de développement comme ceux de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C.

La dette peut être intérieure et/ou extérieure. Elle est intérieure lorsque l'Etat emprunte à des agents économiques qui se trouvent sur son territoire. Cette possibilité est assujettie à une forte épargne de la part des ménages. Or, dans les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, plus de de la moitié de la population se trouve en dessous du seuil de la pauvreté14(*). De ce fait, ce sont les bailleurs de fonds internationaux, bilatéraux15(*) et multilatéraux16(*), qui leur octroient des prêts.

Cette dépendance à l'aide extérieure n'est pas récente. Elle date de l'accession à l'indépendance des Etats vers les années 60. A ce moment-là, ils avaient besoin de ressources pour un nouveau départ. Mais la crise financière des années 80 a aggravé les déficits des Etats. Après les programmes d'ajustements structurels qui n'ont pas connu un grand succès, les Etats ont finalement bénéficié d'importantes mesures d'allégement de leurs dettes extérieures, bilatérales comme multilatérales dans le cadre du Club de Paris, de l'Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (I.P.P.T.E) et de l'Initiative d'Allègement de la Dette Multilatérale (I.A.D.M)17(*). Cela leur a permis de recouvrer une soutenabilité de leurs finances publiques.

Les Etats doivent maintenant tout faire pour maintenir cette soutenabilité. Il s'agit d'un défi car ils n'ont pas droit à l'erreur. Il est peu probable qu'un autre projet d'allègement de la dette soit encore mis en oeuvre s'ils n'arrivent pas à bien réguler leurs finances. Le contexte économique mondial actuel n'y est pas favorable.

La dépendance à l'aide extérieure a fait qu'au-delà des intervenants communautaires et étatiques, les bailleurs de fonds sont devenus les troisièmes acteurs de la gestion de la dette publique au sein de la C.E.M.A.C et de l'.U.E.M.O.A. Déjà, la création de ces deux organisations suite à la dévaluation du Franc CFA n'est pas survenue ex-nihilo. Les institutions de Breton Woods et la France ont pressé les Etats à former des organisations d'intégration plus poussées18(*). La gestion de la dette publique a donc été au coeur de la formation de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C. C'est ainsi qu'elles se fixent comme objectif d'assurer « la convergence des performances et des politiques économiques des Etats membres à travers une procédure de surveillance multilatérale » (S.M)19(*). Et suivant les pas de l'U.E.M.O.A, la C.E.M.A.C a adopté les mêmes critères de convergence dans le cadre de la S.M.

Parce qu'elles sont motivées par les mêmes bailleurs de fonds, les deux organisations ont tendance à utiliser les mêmes outils de gestion de l'endettement au sein des Etats membres.

Mais en 2015, l'U.E.M.O.A a révisé son dispositif de S.M et, pour la première fois, la C.E.M.A.C a choisi de prendre un autre chemin. C'est donc l'occasion de revoir le dispositif de S.M qui a été mis en place jusqu'ici. Il ne s'agit pas de dire que la S.M n'a jamais connu de succès. Bien au contraire, elle a permis, tant soit peu, de discipliner les politiques économiques des Etats. Grâce à la S.M des institutions ad-hoc ont été créées aussi bien au sein des Unions qu'aux niveaux nationaux. Des procédures ont été mises en place. Des rapports périodiques sur l'état de la convergence ont été rédigés. Mais après des années d'application, la convergence n'était toujours pas encore atteinte. D'où l'idée de réformer les critères afin de les rendre plus compatibles aux économies des Etats. Les réformes introduites dans les dispositifs de S.M sont un prétexte pour refaire le tour de la question de la gestion de la dette au sein des Etats membres de l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C.

Un deuxième instrument, impulsé par le Fonds Monétaire International, a été également mis en place par l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C. Il n'a pas beaucoup attiré l'attention. Mais il est tout aussi important. Durant nos recherches, le constat qui a été fait c'est qu'il n'existe pratiquement aucun commentaire scientifique sur ce dispositif. Pourtant, c'est un instrument qui responsabilise les Etats. Il les pousse à justifier les raisons de leur endettement qui doivent être des dépenses d'investissements. En plus, il permet de maîtriser les risques relatifs à la contraction des dettes car le dispositif encourage à effectuer des prévisions sur le long terme qui peuvent aller jusqu'à quinze ans. Il conduit à la rédaction de projets élaborés et réfléchis. Ce dispositif, appelé cadre de référence de la politique d'endettement public, ne devrait donc pas être minimisé. Il existe depuis 200720(*) et malgré ses dix années d'ancienneté, il n'a pas fait l'objet de beaucoup de littératures. Il mérite d'être connu.

Le phénomène de la dette publique préoccupe beaucoup les économistes. Il est, en effet, basé sur l'utilisation de formules mathématiques qui, souvent, ne sont pas à la portée d'un grand nombre de lecteurs. Il interpelle aussi les historiens car il est utile de connaître les origines de la dette publique et les mutations qu'elle a subie.

Cependant, la dette publique ne se limite pas à une simple question de formules, de calculs de taux et de chiffres. Si tel était le cas, les traités des deux Unions n'auraient pas prévu une harmonisation des législations budgétaires pour les synchroniser avec la procédure de S.M. Et cela concerne aussi bien les lois de finances que les comptabilités budgétaires21(*).

Dès lors, ne faudrait-il pas partir au-delà des préoccupations purement mathématiques ?

Par ailleurs, dans nombre de travaux, il est reproché aux Etats de ne pas diversifier leurs ressources et de ne pas moderniser le système fiscal. Il est vrai que la mobilisation des recettes pourrait permettre de faire face aux dépenses par des moyens nationaux et donc de ne recourir à l'emprunt qu'à titre exceptionnel. Cependant, la dimension la plus importante qui est négligée est celle de la maîtrise même des dépenses publiques. Il serait vain, en effet, de réussir le pari de la mobilisation des recettes sans maîtriser les dépenses publiques. Si la gestion publique n'est pas rationalisée, toutes les recettes obtenues seront mal utilisées et ne produiront pas l'effet voulu. Beaucoup de lacunes dans l'utilisation des recettes et dans la procédure budgétaire ont été relevées par des études22(*). Ce qui prouve que les Etats doivent faire des efforts allant dans ce sens. Cette exigence ne peut être respectée que lorsque le circuit budgétaire et comptable est clarifié.

Il est clair donc qu'il y a une dimension essentielle qui est plus ou moins banalisée à savoir la transparence dans les finances publiques. Les vertus de la transparence dans un Etat de droit ne sont plus discutées. Elle est même devenue une exigence des citoyens qui se sentent de plus en plus impliqués dans la gestion des deniers publics de leur pays. La transparence permettra à coup sûr d'effectuer une gestion plus optimale de la dette publique car elle va rendre limpides les comptes publics. Il faut reconnaître, en effet, que « les finances publiques africainessouffrent de maladies infantiles »23(*). Ces maladies sont dites infantiles car elles ont atteint les Etats depuis leur accession à l'indépendance. Elles sont aussi « contagieuses » vu qu'elles se sont rapidement propagées sur le continent. Donc, les Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.MA.C n'ont pas été épargnés.

La première maladie est la corruption. La corruption est souvent analysée sous l'angle de la déontologie ou de la répression. Mais si elle est perçue sous l'angle de la gestion, ses conséquences en matière financière seront rapidement remarquées. La corruption est révélatrice d'un dysfonctionnement politique aux conséquences économiques néfastes. Selon le Centre Africain de formation et de recherche administrative pour le développement, 150 milliards d'euros ont été perdus en Afrique en 2011 à cause de la corruption. Et dans le rapport de 2015 de Transparency International sur la corruption dans le monde24(*),les Etats membres de la C.E.M.A.C ont été classés parmi les pays les plus corrompus, et dans une moindre mesure, ceux de l'U.E.M.O.A. La corruption provoque des manques à gagner qui auraient dû servir à des investissements publics. L'Etat perd de l'argent à cause d'une mauvaise gestion et se trouve obligé d'emprunter.

La deuxième maladie, qui comporte même des liens avec la corruption, est le détournement des deniers publics. Il est très présent et il est inutile de le commenter. Les actualités en disent long tous les jours.

Bref, ce qui caractérise les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C est une mauvaise gouvernance des finances publiques. Le circuit budgétaire et comptable n'est pas sécurisé. C'est donc conscient d'une telle préoccupation que le FMI a adopté un « code de bonnes pratiques en matière de transparence des finances publiques » en 200725(*).

Il est normal que les bailleurs de fonds soient préoccupés par la solvabilité des Etats débiteurs. Dès lors, ils font tout pour s'assurer que l'argent prêté est utilisé à des fins utiles. Il est logique que si la dette a servi à des dépenses d'investissement, elle permettra de booster la croissance et facilitera le remboursement. Mais toutes ses obligations qui incombent aux Etats ne seront respectées que si la transparence est garantie aussi bien dans le processus budgétaire que dans la sauvegarde des données comptables.

Dès lors, la première question sur laquelle les Etats doivent se concentrer est celle d'une gestion saine des finances publiques. C'est une saine gestion des finances publiques qui permettra de maîtriser les dépenses publiques. Elle mettra à découvert les dépenses inutiles et injustifiées qui amplifient le déficit budgétaire des Etats et les pousse à emprunter davantage. Il s'agit d'une chaîne de conséquences et, pour nous, tant que le circuit budgétaire et comptable n'est pas fiabilisé, la maîtrise de la dette publique n'en demeurera que plus difficile.

L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont donc repris les bonnes pratiques dégagées par le F.M.I. Elles ont adopté chacune une directive portant code de transparence et de bonne gouvernance des finances publiques26(*). Ensuite, elles ont élaboré des règles budgétaires et comptables compatibles avec les pratiques internationales en matière de gouvernance financière publique. Il s'agit de règles qui introduisent l'exigence de résultats de l'action publique.Nous verrons que cette logique de gestion n'est pas nouvelle chez les Etats. Mais les directives communautaires ont eu la vertu de la systématiser et d'en uniformiser la règlementation au sein de l'ensemble des Etats membres. La gestion efficace et efficiente des deniers publics est un impératif car les ressources financières se font de plus en plus rares.

Cependant, les Etats peinent à internaliser les nouvelles règles de la gestion publique. Les systèmes des Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C tels que conçus ne se prêtent pas à une gestion efficiente des finances publiques. Or une réforme de la gestion publique nécessite une refonte du processus décisionnel. Il ne s'agit pas de déplacer un pion mais de remodeler tout le système administratif et politique. Les rôles et pouvoirs doivent être redistribués entre les différents acteurs. La nouvelle gestion nécessite une refonte systémique de l'appareil étatique. En même temps, cette refonte est problématique. Les Etats sont trop encrés dans un système traditionnel vétuste qui existe, pour la plupart, depuis les indépendances et qui a été rarement révisé. On a l'impression que les Etats appréhendent difficilement les changements qualitatifs. Le redressement devient pénibleaprès un demi-siècle de gestion lacunaire. Et « rien n'est plus difficile que de modifier les habitudes surtout quand elles sont anciennes et mauvaises »27(*). Nous verrons que parce que les Etats peinent à assurer une saine gestion de leurs finances publiques, la gestion de la dette publique reste une préoccupation difficile à résoudre.

En même temps, dans leurs tentatives, les Etats éprouvent de plus en plus des difficultés pour réformer leurs systèmes budgétaires et comptables. En tant que pays sous-développés, le deuxième obstacle qu'ils rencontrent est celui du manque de moyens. Les moyens matériels, humains et financiers n'existent pas en quantité suffisante. Une méthode précise pour internaliser les réformes demeure inconnue des Etats.

Les difficultés dans la gestion de la dette proviennent de différents niveaux. Si ce ne sont pas les Etats, ce sont les organisations communautaires ou encore les bailleurs de fonds internationaux. Les problèmes sont nombreux et variés. Si on se concentre sur les seuls critères de convergence tout en négligeant les bonnes pratiques financières que doivent respecter les Etats, on en restera au statut quo. Le dispositif de S.M sera modifié, les directives financière et comptable revues. Mais le résultat restera mitigé. Les instruments communautaires et nationaux se multiplieront. Et cette inflation compliquera davantage la situation actuelle.

Le volet communautaire constitue le deuxième niveau de difficulté. On ne peut nier la volonté de réformer et d'aller de l'avant au sein de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C. Les dispositifs communautaires s'empilent. Si ce ne sont pas des directives, ce sont des règlements qui sont adoptés en vue d'une meilleure maîtrise des finances publiques. Mais les deux Unions se heurtent à une carence de modèles. L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C n'ont pas de modèles qui leurs sont propres. Un modèle doit non seulement être compatible avec la réalité des Etats mais aussi être le fruit du vécu et des leçons tirées des échecs.

Faute de modèle, c'est le mimétisme qui est mis en avant. S'inspirer de ce qui se passe dans les autres organisations permet d'être en phase avec le mouvement mondial. Mais il n'existe aucun modèle qui peut être importé et appliqué tel quel dans un système donné. Les réalités économiques, politiques et sociales différent d'une sphère à une autre. Et une règlementation qui ne tient pas compte de ces impératifs est vouée à l'inapplicabilité. Donc non seulement les Unions doivent être authentiques en soi mais en plus les dispositifs communautaires doivent être formulés de telle sorte qu'ils puissent supporter les variations nationales de chaque Etat.

Le troisième et dernier niveau de difficulté réside au sein des bailleurs de fonds. A l'échelle communautaire, le constat qui a été fait est une participation forte des bailleurs de fonds dans la construction de deux ensembles sous régionaux. L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C sont poussées, dans leurs décisions, par les bailleurs de fonds. Dès lors, elles sont obligées de se soumettre aux règles universelles de bonne gestion qui, dès fois, ne sont pas compatibles avec les réalités des Etats. A l'échelle nationale, les bailleurs bilatéraux ont tendance à établir des normes de gestion distinctes de celles retenues au niveau communautaire. Et les exigences peuvent même différer d'un bailleur à un autre. Le résultat c'est que les Etats développent autant de techniques de gestion que de bailleurs. Ce qui renforce l'illisibilité budgétaire et sape leur capacité de maîtriser les dépenses auxquelles ils font face.

La gestion de la dette publique devient problématique avec la prise en compte de tous ces paramètres. Les dispositifs de gestion de la dette sont présents mais les écueils sont plus profonds. Le noeud du problème se trouve dans la sécurisation du circuit budgétaire et financier des Etats, dans le réalisme des instruments communautaires et dans une coordination entre les bailleurs de fonds et les destinataires des conditionnalités qui accompagnent les prêts.

Ainsi seront successivement développés le double dispositif communautaire de gestion de l'endettement des Etats (première partie) et les difficultés qui sapent une bonne gestion de la dette publique au sein des Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C (deuxième partie).

Première Partie : Un double dispositif communautaire de gestion de la dette publique :

La gestion de la dette est assurée par des dispositifs communautaires. L'idée est d'harmoniser la réglementation afin de faciliter l'atteinte des objectifs communs. Il est vrai que la gestion de la dette est une préoccupation pour toute organisation internationale à vocation économique et/ou monétaire. Mais elle est plus cruciale pour les pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C car ils sont en voie de développement. Par conséquent, une mauvaise gestion de l'endettement public pourrait constituer une entrave sérieuse à l'émergence des Etats. Deux instruments principaux ont été décelés. Ce sont des dispositifs qui créent des rapports directs entre les Etats et l'organisation communautaire.

La surveillance multilatérale (S.M) constitue le premier instrument qui permet d'apprécier l'endettement d'un Etat et de proposer des mesures correctrices le cas échéant. Elle ne peut donc être contournée. Elle a une vocation générale car elle s'attache à l'ensemble des politiques macroéconomiques. Mais les critères dont elle est chargée d'assurer le respect entretiennent des liens étroits avec la dette des Etats. Ces critères informent à la fois sur le taux du déficit budgétaire et la part de la dette publique dans le PIB des Etats membres.

Le deuxième dispositif, moins connu, est le règlement sur la politique d'endettement public. Il n'aborde que la question relative à la dette publique. Il est très détaillé et pousse les Etats à ne contracter des dettes qu'en cas de nécessité. Comme il a été affirmé tantôt, il n'a pas fait l'objet de beaucoup de réflexions ; d'où l'idée de lui consacrer une partie afin qu'il soit plus connu.

Seront donc successivement développées la surveillance multilatérale (Chapitre I) et la politique d'endettement public (Chapitre II)

Chapitre I : la création d'une surveillance multilatérale au sein des deux Unions :

Aussi bien la C.E.M.A.C que l'U.E.M.O.A ont prévu dans leurs traités constitutifs la mise en place d'une S.M28(*). L'objectif de la S.M ne se limite pas à la gestion de la dette. Elle englobe, dans leur intégralité, les politiques économiques. Le souci est « d'assurer une meilleure discipline budgétaire en appui à la politique monétaire commune, afin de créer les conditions propices à la stabilité des prix et à une croissance forte et durable »29(*). La mise en oeuvre de la S.M passe par la détermination d'une procédure et la définition des critères à respecter pour atteindre la convergence. Le dispositif en vigueur en ce moment au sein de l'U.E.M.O.A est l'Acte Additionnel n°01-2015/CCEG/UEMOA portant nouveau Pacte de Convergence de Stabilité de Coordination et de Solidarité (P.C.S.C.S) adopté en janvier 2015. Le nouveau P.C.S.C.S a apporté des modifications par rapport aux critères de convergence de l'ancien P.C.S.C.S qui datait de 1999. Il fixe l'horizon de convergence au 31 décembre 2019. La procédure de S.M reste toutefois soumise au règlement n°01/99/CM/UEMOA portant définition d'un calendrier opérationnel pour la mise en oeuvre du Pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité entre Etats membres de l'U.E.M.O.A. Les acteurs de la S.M sont désignés par la directive n°01/96/CM-UEMOA du 15 janvier 1996 relative à la mise en oeuvre de la surveillance multilatérale des politiques macro-économiques au sein des États membres de l'U.E.M.O.A.

Concernant la C.E.M.A.C, des réformes ont aussi été entreprises. Aussi bien les critères de convergence que la procédure de S.M ont été revus. C'était la directive n°01/01/UEAC-094-CM-06 qui fixait les critères et indicateurs macro-économiques de la surveillance multilatérale. Mais à partir du 1er janvier 2017, c'est la directive n° 02/16/-UEAC-093-CM-30 qui est appliquée. La procédure de la S.M était, quant à elle, précisée par la directive n°01/00/UEAC-064-CM-04 du 21 juillet 2000
relative à la mise en place de la surveillance multilatérale des politiques macro-économiques au sein des Etats membres de la C.E.M.A.C. A ce niveau aussi, il y a eu une réforme institutionnelle et dorénavant ce sera la directive n° 02/16/-UEAC-093-CM-30 du 03 février 2016 qui sera mise en oeuvre.

L'occasion se présentera dans les développements, d'expliquer pourquoi les deux organisations ont senti le besoin de modifier leur dispositif de S.M.

L'organisation de la S.M sur le plan communautaire a connu de profondes mutations relatives aux critères de convergence (section 1). Dans tous les cas, le rôle des Etats membres reste déterminant car ils appliquent les règles communautaires de S.M (section 2).

Section 1 : L'organisation communautaire de la surveillance multilatérale :

Non seulement des critères et indicateurs ont été dégagés (paragraphe 1) mais, en plus, le contrôle du respect des critères est confié à différents organes communautaires (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : La récente évolution des critères de convergence utilisés au sein des deux Unions :

Les critères étaient quasiment identiques (A) jusqu'en 2015 car l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont successivement adopté des réformes pour mieux tenir compte de leurs spécificités (B).

A- De l'utilisation de critères similaires au sein des deux Organisations:

Après avoir effectué une précision terminologique entre critères et indicateurs (1), nous verrons les critères qui étaient utilisés au sein des deux Unions (2)

1- L'existence d'une différence hiérarchique entre critères et indicateurs en matière de surveillance multilatérale :

Une précision terminologique doit être faite. En effet, il faut distinguer « critères »et « indicateurs ». L'importance de la distinction réside dans les effets produits en cas de non-respect d'un indicateur ou d'un critère.

Pour la C.E.M.A.C, « Les critères sont des variables macro-économiques dont le non-respect peut entrainer l'adoption par le Conseil des Ministres d'une directive à l'encontre de l'Etat membre concerné lui demandant d'élaborer et de mettre en oeuvre un programme d'ajustement approprié »30(*). Par contre, « les indicateurs sont des variables macro-économiques autres que celles retenues pour les critères. Ils sont traités comme des repères indicatifs »31(*). Il ressort de ces deux définitions que les critères et indicateurs ne bénéficient pas du même traitement. La place hiérarchique des critères est plus élevée que celle des indicateurs. La C.E.M.A.C a donc des critères, qui sont au nombre de quatre, et un tableau de bord d'indicateurs.

L'U.E.M.O.A va plus loin car au sein même des critères elle distingue ceux qui sont de premier rang et ceux qui sont de second rang. Les critères de premier rang sont ceux dont le non-respect entraine l'élaboration et la mise en oeuvre d'un programme de mesures rectificatives. Cette définition rejoint celle que la C.E.M.A.C a donnée. Les critères de second rang, quant à eux, ont les mêmes objectifs que les indicateurs de la C.E.M.A.C. Ce sont juste « des repères structurels indicatifs »32(*). Parmi les critères de premier rang, il y en a un dénommé « critère clé » considéré par l'U.E.M.O.A comme un critère essentiel : c'était le solde budgétaire de base rapporté au PIB nominal qui devait être supérieur ou égal à 0. Son non-respect peut déclencher des mécanismes de sanction. Enfin, les indicateurs sont listés d'une manière non limitative par la recommandation n° 02/99/CM/UEMOA relative à la définition des indicateurs de tableau de bord dans le cadre de la mise en oeuvre du pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité entre les Etats membres de l'U.E.M.O.A. Celle-ci a donc des critères de premier de rang parmi lesquels un critère clé, des critères de second rang et un tableau de bord d'indicateurs.

L'attention sera plus portée sur les critères car les indicateurs sont trop nombreux (une vingtaine) pour être détaillés. En plus, ce sont les critères qui lient les Etats contrairement aux indicateurs. D'ailleurs leur évolution a marqué le rythme de la S.M.

2- Des critères anciens à peine respectés :

C'est le Conseil des Ministres de l'U.E.M.O.A qui, chaque année, déterminait les critères de convergence conformément aux exigences du traité constitutif. Et ces critères ne valaient que pour l'année suivant celle pendant laquelle ils ont été fixés. Le 08 Décembre 1999, a été finalement adopté l'Acte Additionnel portant P.C.S.C.S entre les Etats membres de l'U.E.M.O.A33(*).

Pour la C.E.M.A.C, c'est la B.E.A.C qui se chargeait de mettre en oeuvre la S.M. C'est en 2001 que cette mission a été confiée à la Commission. Et la directive n°01/01/UEAC-094-CM-06 du 03 Août 2001 avait fixé les critères et indicateurs macro-économiques de la S.M.

Les critères de la C.E.M.A.C étaient identiques à ceux de premier rang de l'UEMOA. Parmi les quatre critères, trois se rapportaient à la dette :

- Le ratio du solde budgétaire de base rapporté au PIB nominal qui doit être supérieur ou égal à 0

- Le ratio de l'encours de la dette intérieure et extérieure rapporté au PIB nominal qui ne doit pas excéder 70%

-  Les arriérés de paiement :

· Arriérés de paiement intérieurs : nonaccumulation d'arriérés sur la gestion de la période courante ;

· Arriérés de paiement extérieurs : nonaccumulation d'arriérés sur la gestion de la période courante.

Un quatrième critère se rapportant à l'inflation a été posé : le taux d'inflation ne doit pas dépasser 3%.

Rappelons que les critères de la C.E.M.A.C étaient prévus aux articles 2 à 5 de la directive du 03 Août 2001 et ceux de premier rang de l'U.E.M.O.A étaient énumérés à l'article 18 du P.C.S.C.S de 1999.

De multiples critiques ont été formulées vis-à-vis de ces critères34(*).

Pour le solde de base, il a été reproché son mode de calcul. En effet, il est calculé en faisant la différence entre les recettes hors dons et les dépenses totales hors investissements financés par des ressources extérieures. L'effet produit par une telle exigence est l'encouragement à la recherche de ressources extérieures vu qu'elles ne sont pas comptabilisées dans le calcul du solde budgétaire. Il ne prend donc pas en compte les dimensions de l'inflation. En même temps, il n'englobe pas les risques de diminution des ressources nationales des Etats. Enfin, le fait qu'il doive être nul ou positif ne laisse pas de marge de manoeuvre aux Etats d'exercer une politique contra cyclique lorsque la conjoncture l'exige.

Concernant l'endettement, le problème de son respect ne s'est pas réellement posé vu que les Etats ont pu bénéficier des initiatives d'allègement de leurs dettes. Ce qui leur a permis, rappelons-le, de recouvrer la soutenabilité de leurs finances publiques. Mais, il manque un indicateur capable de renseigner sur le rythme de l'endettement.

Quant aux arriérés de paiement, ils sont peu respectés dans la mesure où les Etats, ayant bénéficié d'allègements de leurs dettes, ne se soucient pas trop de leur situation d'endettement. Cette critique concerne surtout les Etats de la C.E.M.A.C. Les dettes sont cumulées d'année en année sans tenir compte des exigences de la convergence. En plus, ce critère n'informe pas sur les conditions financières d'emprunt encore moins sur les affectations qui sont faites de ces emprunts.

Enfin, le fait que l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C utilisent les mêmes indicateurs ne pouvaient être valablement justifiées dans la mesure où les Etats membres des deux unions n'ont pas les mêmes spécificités macroéconomiques. Dès lors, les critères étaient en déphasage avec les réalités étatiques. Ce qui accentue encore plus la difficulté de leur respect et remet en cause leur pertinence. Des critères qui ne prennent pas en compte l'hétérogénéité des situations des Etats sont voués à l'inapplicabilité. Faute de solution, le concept même de « respect du pacte » a été revu. Il a été assoupli et dès lors qu' « une masse critique des Etats membres » (quatre au minimum) 35(*) respectent les critères de premier rang et que la somme de leurs PIB est au moins égale à 65% de celui de l'UEMOA, alors on considère que le pacte a été respecté

De même, depuis que la convergence a été fixée en 2002, l'U.E.M.O.A l'a repoussée en 2005, puis en 2008, enfin en 2013 avant d'adopter finalement un nouveau P.C.S.C.S en 2015.

Pour la C.E.M.A.C l'horizon de convergence qui était fixé à 2004 a été repoussé parce que la Centrafrique, l'unique pays non pétrolifère, n'a pas su respecter les critères relatifs à l'endettement.

Une telle situation ne pouvait perdurer. C'est pourquoi, des réunions et des séances de travaux ont été organisées successivement par l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C. Ce qui a abouti à la révision des critères de S.M.

B- A l'application de nouveaux critères désormais distincts :

A partir de 2015, beaucoup de choses ont changé. L'U.E.M.O.A a révisé son P.C.S.C.S et la C.E.M.A.C a revu son dispositif de S.M. « Préserver le niveau du plafond d'endettement en veillant à la qualité et à la soutenabilité de la dette publique (...)»36(*) a été une préoccupation majeure durant les séances de refonte des critères. Dès lors, avec l'appui d'institutions sur le développement, les deux organisations ont pu réfléchir sur la pertinence des anciens critères de convergence et en adopter de nouveaux. Désormais, les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C ne sont plus soumis aux mêmes critères de convergence. De même, certaines exigences et méthodes de calcul ont changé.

Comparaison des nouveaux critères de surveillance multilatérale de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A

CRITERES

UEMOA

CEMAC

1- Solde budgétaire

Solde budgétaire global/PIB

Supérieur ou égal à -3%

Solde budgétaire de référence/PIB

Supérieur ou égal à -1,5% + épargne de 20% des ressources pétrolières

2- Dette totale/PIB

Dette totale/PIB

Inférieur ou égal à 70 %

Dette totale/PIB

Inférieur ou égal à 70 %

3- Inflation moyenne des prix à la consommation

Inférieur ou égal à 3 %

Inférieur ou égal à 3 %

4- Arriérés intérieurs et extérieurs

SUPPRIME

-non accumulation d'arriérés

Source : Auteur à partir des données de la C.E.M.A.C et de l'.U.E.M.O.A

Trois remarques ressortent de ce tableau :

La première c'est que maintenant c'est le solde budgétaire global qui est utilisé pour l'U.E.M.OA. Il a remplacé le solde budgétaire de base qui présentait des inconvénients. Le solde budgétaire de base est le résultat de la différence entre les recettes totales hors dons extérieurs et la somme des dépenses courantes et des dépenses d'investissement sur des ressources intérieures. Les investissements sur ressources extérieures n'étaient donc pas pris en compte. L'idée était de pousser les Etats à avoir un excédent primaire pouvant leur permettre de prendre en charge les intérêts de la dette sans recourir à un nouvel emprunt. Mais, il a produit un effet revers car comme les investissements sur ressources externes n'étaient pas pris en compte dans le calcul du solde, les Etats y recouraient sans restriction. D'ailleurs, il n'encourageait même pas le développement d'un marché régional. Et puis, mieux vaut que les Etats empruntent pour financer des investissements que des dépenses courantes.

Pour la C.E.M.A.C, c'est le solde de référence qui sera utilisé. Il permet de prévoir une règle d'épargne. En effet, cinq des Etats membres sont producteurs de pétrole. Le pétrole représente 81% des exportations de la région et 54% des recettes budgétaires37(*). Cette forte dépendance expose les Etats à des risques du fait de la volatilité des ressources provenant du pétrole. L'épargne permettra de faire face aux difficultés financières lorsque le prix du pétrole baisse.

La deuxième porte sur le fait que les deux Unions ont revu la norme relative au solde budgétaire. Celui-ci devait être positif ou nul. Mais il se trouve que ce critère était contraignant. Il ne permettait pas aux Etats d'avoir une marge de manoeuvre en matière de politique budgétaire. La C.E.M.A.C fixe maintenant le taux du critère du solde budgétaire à -1,5%. L'objectif est de tenir compte de la situation particulière de la République Centrafricaine. Celle-ci constitue le seul Etat membre qui n'est pas pétrolifère. Donc, on ne peut lui permettre de connaitre des déficits importants. De même, comme les ressources pétrolières sont volatiles, la prudence voudrait qu'une marge moindre de déficit soit accordée aux Etats.

Pour l'U.E.M.O.A, le résultat du solde peut aller jusqu'à -3%. Les Etats sont certes exposés aux chocs extérieurs, mais pas dans les mêmes proportions que ceux de la C.E.M.A.C.

La troisième remarque est relative à l'absence d'arriérés intérieurs et extérieurs. Ce critère a été supprimé par l'U.E.M.O.A. Il est, en effet, largement respecté par les Etats et ne constitue donc pas pour l'U.E.M.O.A un problème ponctuel. Le rythme de l'endettement doit être bridé au risque de se retrouver à la situation d'avant I.P.P.T.E et I.A.D.M. L'attention est peu portée sur ce paramètre car les Etats ne se sentent pas exposés. Dans le rapport sur le dispositif de S.M de la C.E.M.A.C, la FERDI avait proposé de poser une exigence d'apurement les arriérés. Mais visiblement, la proposition n'a pas été retenue.

Le souci de prendre en considération les particularités de la zone a été à la source de ce décalage qu'il y a maintenant entre les critères utilisés au sein des deux unions.

Les critères définis, les organes chargés de la S.M doivent être connus.

Paragraphe 2 : Les organes communautaires chargés de l'exécution de la surveillance multilatérale :

La Commission occupe une place centrale dans le circuit de la S.M (A). Mais, elle est aussi appuyée par d'autres organes communautaires (B).

A- Le rôle prépondérant de la Commission dans la procédure de surveillance multilatérale:

Le rôle de la commission est le même dans l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C. La commission est un organe communautaire d'exécution (1). C'est à elle que revient la mission de faire les rapports sur la surveillance (2).

1- La commission, un organe chargé de la mise en oeuvre des actions communautaires :

Dans toutes les deux organisations, la commission est l'organe exécutif. Elle a des compétences très larges qui ne seront pas exposées dans leur totalité au risque de déborder du cadre du sujet38(*). La commission de l'U.E.M.O.A est composée de huit membres, appelés commissaires, qui sont des ressortissants des Etats membres. Ils sont désignés par la C.C.E.G en raison d'un commissaire par Etat membre et sur la base de critères de compétence et d'intégrité morale39(*). Ils ont un mandat de quatre ans renouvelable. La commission est composée de sept départements en plus de la présidence. Parmi ces départements, il y en a un qui est chargé des questions de finances publiques, de fiscalités intérieures et de la surveillance multilatérale : le département des politiques économiques et de la fiscalité intérieure.

Les commissaires de la C.E.M.A.C sont désignés selon les mêmes règles que ceux de l'U.E.M.O.A. La commission est composée de quatre départements parmi lesquels le département des politiques économique, monétaire et financière. Au sein même de ce département, il y a une direction de la surveillance multilatérale. On y retrouve aussi trois autres directions qui participeront inexorablement à l'exercice de la surveillance multilatérale du fait de leurs missions : les directions des finances publiques, des études économiques et des statistiques.

C'est sur la proposition de la commission, que le Conseil des Ministres se prononce sur les grandes orientations des politiques économiques des Etats. C'est à la commission que les Etats transmettent les données et statistiques nécessaires à l'exercice de la S.M.

Enfin, la commission élabore et rend publics des rapports semestriels d'exécution de la S.M.

Pour la C.E.M.A.C, la commission, bien qu'ayant un rôle prépondérant, travaille au sein de deux collèges. D'ailleurs, elle y assure la présidence. Ce qui montre encore une fois l'importance de la commission.

Le premier collège est la Cellule Communautaire. Elle maintient des rapports directs avec les cellules nationales car elle leur fournit des informations internationales et communautaires. C'est à elle que revient aussi la mission de rédaction des rapports d'exécution de la S.M sur l'état de la convergence. Elle est présidée par le président de la commission de la C.E.M.A.C.

Le deuxième est appelé Collège de surveillance. Il est présidé par la Commission de la C.E.M.A.C elle-même. Il veille au bon fonctionnement de la cellule communautaire et des cellules nationales. Il valide les rapports de la cellule communautaire sur la S.M et les soumet au C.M pour adoption.

Nous verrons que dans l'une et l'autre organisation, la rédaction de rapports sur la S.M est essentielle pour analyser l'état de la convergence.

2- La rédaction de rapports périodiques sur l'état de la convergence :

Chaque semestre, la commission de l'U.E.M.O.A, ou la cellule communautaire de la C.E.M.A.C, rédige un rapport sur la S.M avant d'adopter un rapport définitif à la fin de l'année.

Dans ses rapports, la commission de l'U.E.M.O.A fait état des perspectives économiques dans le monde, évalue la croissance économique de l'U.E.M.O.A et de chaque Etat membre. Elle y fournit également des orientations de politique économique pour l'année à venir.

L'étude de la situation économique de chaque Etat va permettre à la commission d'apprécier la sincérité des données macroéconomiques. Celles-ci vont lui servir de base de calcul du degré de respect des critères de convergence. Les données sont fournies par le Comité National des Politiques Economiques de chaque Etat membre.

C'est ainsi que dans son rapport semestriel publié en juin 2016 sur la situation de 2015, la Commission a remarqué que sur les sept Etats membres, cinq n'ont pas respecté le critère clé (Bénin, Guinée Bissau, Niger, Sénégal et Togo). Cela se comprend du fait que les nouveaux critères connaissent un début d'application et que les Etats vont devoir revoir leurs paramètres budgétaires et économiques pour atteindre le nouvel horizon de convergence fixé au 31 décembre 2019.

La Commission n'a pas hésité à formuler des recommandations. Comme recommandations générales, elle conseille entre autres de maîtriser les dépenses courantes et de renforcer le recouvrement des recettes fiscales. Elle a aussi formulé des recommandations spécifiques comme la diversification de la base productrice de l'économie vu que l'agriculture est menacée par les changements climatiques (Burkina Faso) ; la consolidation de la stabilité sociopolitique et la sécurité (Guinée Bissau et Mali) ; le suivi rigoureux de la gestion de la dette intérieure et extérieure (Niger qui a un déficit de 9%) ; l'amélioration du climat des affaires pour accroître l'attractivité des investissements directs étrangers (Sénégal) ; la poursuite des négociations avec le FMI pour bénéficier davantage de soutiens financiers (Togo)...

Jusqu'à présent la cellule communautaire de la CEMAC diagnostique l'état de la convergence sur la base de l'ancien dispositif de S.M vu que la mise en application du nouveau est prévue pour le 1er janvier 2017. Dans le rapport de la surveillance multilatérale pour 2015, elle a constaté qu'aucun des Etats n'a respecté le critère du solde budgétaire de base sur le PIB qui doit être supérieur ou égal à zéro. Elle a encouragé le respect des objectifs généraux en matière de recouvrement des recettes non pétrolières et d'amélioration du climat des affaires. De même, elle a formulé des recommandations à l'égard de chaque Etat parmi lesquelles : l'orientation de la politique d'endettement vers des conditions plus concessionnelles (Cameroun) ; la poursuite des réformes pour un retour de la paix et de la sécurité (République Centrafricaine) ; l'accélération du processus de diversification des économies (Gabon, Guinée Equatoriale et Tchad).

L'avantage de tels rapports sur la surveillance c'est qu'ils permettent non seulement d'apprécier l'état de la convergence mais aussi le suivi des recommandations formulées par la Commission. Ainsi, à chaque semestre, la commission est en mesure d'apprécier si les recommandations précédentes ont été appliquées ou non. Il ressort donc que la Commission est un organe indispensable dans le suivi de la soutenabilité des finances publiques des Etats.

Il n'en demeure pas moins que d'autres organes interviennent dans le cadre de la surveillance multilatérale.

B - Une multitude d'acteurs intervenant dans la surveillance multilatérale :

Loin de prétendre à l'exhaustivité, seuls seront examinés les organes qui interviennent directement dans le cadre de la S.M. A ce niveau, il y a des différences notables entre l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C.

En premier lieu, il y a la C.C.E.G de l'U.E.M.O.A qui détermine les grandes orientations de politiques économiques. C'est elle qui a adopté le P.C.S.C.S. Celui-ci est en fait un acte additionnel du Traité de l'U.E.M.O.A. Raison pour laquelle il a été adopté par la C.C.E.G.

En second lieu intervient le Conseil des Ministres qui assure la mise en oeuvre des orientations prises par la C.C.E.G de l'U.E.M.O.A. Il a aussi un rôle prépondérant dans la C.E.M.A.C. Tous les travaux qu'effectue la commission ou le collège de surveillance lui sont transmis pour décision. C'est le Conseil qui, par des règlements et directives, met en oeuvre le dispositif de surveillance multilatérale. Il définit les critères et indicateurs ainsi que la procédure de la S.M. Il se prononce sur les grandes orientations des politiques des Etats membres. Il est habilité à adopter toutes règles supplémentaires dans le cadre de la convergence. Un Etat ne peut être exempté du respect des règles de convergence du fait de difficultés économiques et/ou politiques que par l'adoption d'une directive par le Conseil.

La Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest est un organe de la S.M pour l'UEMOA. Selon l'article 10 de la directive 01/96/CM-UEMOA, elle « coordonne avec la commission pour assurer la cohérence de politiques économiques nationales notamment des politiques budgétaires avec la politique monétaire commune. ». Toutes les modifications intervenues dans la dette extérieure et intérieure doivent être communiquées à la banque.

Dans le cadre de la CEMAC, ce ne sont pas des organes en tant que tels qui interviennent mais des représentants d'organismes. En effet, la cellule communautaire est composée de six membres qui sont: le représentant de la BEAC nommé par le gouverneur, le représentant de l'Union Economique de l'Afrique Centrale (UEAC) nommé par le président de la commission, le représentant de la Banque des Etats d'Afrique Centrale nommé par le président de ladite banque, un représentant de la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale (COBAC) nommé par le secrétaire générale de ladite institution, un représentant de la Commission de Surveillance du Marché Financier de l'Afrique Centrale (COSUMAF) et un représentant des Instituts Nationaux de Statistiques du pays qui assure la présidence tournante de l'UEAC. Rappelons-le, la cellule est présidée par le président de la commission.

Le collège de surveillance, quant à lui, réunit la commission qui en assure la présidence, deux représentants de chaque cellule nationale et deux représentants de la cellule communautaire.

La présence de tous ces membres venant de divers organes se justifie par le souci d'assurer la coordination entre les différentes institutions communautaires, de faciliter l'échange d'informations et d'harmoniser l'union monétaire et l'union économique.

Il existe donc tout un réseau qui s'est développé pour mener à bien la surveillance multilatérale. D'ailleurs, des organes extérieurs peuvent même s'y prêter.40(*)

Les Etats membres sont aussi des acteurs incontournables car il leur revient de réceptionner les règles de S.M et d'assurer leur mise en application dans le cadre national.

Section 2 : La réception des règles de surveillance multilatérale par les Etats :

Pour faciliter la mise en oeuvre de la S.M, les Etats membres de l'UEMOA et de la CEMAC doivent établir des programmes pluriannuels de convergence (paragraphe 1) mais aussi instaurer un comité national pour la S.M (paragraphe 2)

Paragraphe 1 : L'établissement de programmes pluriannuels de convergence par les Etats :

Le contenu des programmes est défini par les dispositifs de surveillance multilatérale (A). Ils sont ensuite soumis aux organes communautaires pour évaluation et adoption (B)

A- Un contenu des programmes prédéfinis par les dispositifs communautaires :

Les programmes sont des documents de prévision pour un horizon de trois ou cinq ans. Cependant, ils sont révisés et mis à jour chaque année par les Etats.

Le contenu des programmes pluriannuels de convergence dans le cadre de l'U.E.M.O.A est très riche. Le programme d'un Etat membre doit contenir les réalisations de l'année précédente, les objectifs de l'année en cours, le service de la dette, l'évolution des critères de convergence et principalement celle du critère clé.

Par contre, la C.E.M.A.C ne précise pas dans son dispositif de surveillance multilatérale qu'elle va porter une attention particulière à la gestion de la dette. Cela se comprend aussi dans la mesure où dans le cadre de cette organisation, il n'existe pas une hiérarchie aussi poussée des critères de convergence. Le dispositif précise tout simplement que les Etats doivent informer sur le sentier d'évolution des critères de convergence et des mesures spécifiques prises pour chaque tranche annuelle. Il n'en demeure pas moins que les critères du solde budgétaire et du taux d'endettement sont tout aussi importants pour la CEMAC car, il faut le rappeler, l'objectif des programmes pluriannuels est de permettre de s'assurer qu'un Etat se dote des outils lui permettant d'atteindre la convergence.

Toutefois, comme il a été affirmé tantôt, l'intérêt du critère clé est ressenti quant aux effets de son non-respect. Ainsi, le P.C.S.C.S précise que « l'évaluation des programmes se fait sur la base de l'évolution structurelle du critère clé ». Pour l'U.E.M.O.A, le critère clé est déterminent dans la surveillance multilatérale. Par conséquent, le non-respect du critère clé entraine non seulement le déclenchement de la procédure de rectification mais peut aussi déboucher sur une sanction si la ladite rectification n'a pas été jugée conforme. Mais pour la C.E.M.A.C, il s'agit d'un critère comme les autres. Cela ne veut pas dire qu'il n'existe pas de sanction dans le cadre de la CEMAC. Même si l'ancien dispositif n'avait pas expressément fait allusion à une possibilité de sanctions, celles-ci existaient bel et bien. En effet, la possibilité de sanction a été déjà précisée dans la Convention régissant l'Union Economique de l'Afrique Centrale notamment en son article 6341(*). Dans le nouveau texte de S.M, il est précisé à l'article premier que le non-respect des critères peut déboucher sur la formulation de sanctions par le Conseil des Ministres. Le fait que la possibilité de sanction soit prévue au premier article prouve que, cette fois-ci, la C.E.M.A.C a bien l'intention d'atteindre la convergence.

Les programmes doivent aussi être en cohérence avec les programmes monétaires et d'ajustement structurel. Il est normal que tous ces dispositifs d'ordre financier et économique gardent une logique d'ensemble au risque de dérégler le système. Un Etat doit apprécier ses possibilités d'emprunt en tenant compte des programmes d'ajustement structurel qui visent aussi des objectifs financiers. Mais la C.E.M.A.C rajoute que le respect de la cohérence d'ensemble couvre aussi les lois de finances. Celles-ci doivent y être incluses dans la mesure où c'est à travers elles que les Etats formulent leurs besoins de financement. La loi de finances permet de connaître la différence entre recettes et dépenses et d'en conclure si l'Etat a besoin d'emprunter ou pas.

Enfin, non seulement les programmes pluriannuels doivent avoir un contenu précis permettant d'apprécier le respect de la convergence en plus de cela ils doivent rester en cohérence avec tous les autres dispositifs financiers mis en oeuvre par les Etats.

Une fois élaborés, les programmes sont soumis aux organes communautaires.

B- Des programmes contrôlés par les organes communautaires :

La procédure est la même pour l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C. Deux organes principaux interviennent. L'un s'occupe de l'évaluation du programme et l'autre de l'adoption du programme. Il s'agit respectivement de la Commission et du Conseil des ministres.

Tout d'abord, chaque Etat transmet son programme à la Commission. Cette transmission doit se faire au plus tard le 31 mars de chaque année dans le cadre de la C.E.M.A.C.La Commission évalue les programmes. Elle dispose de trente jours pour rendre un avis sur un programme à compter de sa réception. Ce délai est raccourci de quinze jours pour la procédure de rectification. Chaque programme fait l'objet d'un rapport. Le rapport est communiqué à l'Etat avant la tenue de la session du Conseil.

Ensuite, le rapport est soumis au Conseil des ministres qui l'adopte par voie de décision. Il peut aussi, par voie de décision, décider que le programme soit réaménagé afin d'être en conformité avec les objectifs de la convergence. Et dans ce cas la procédure recommence de la commission au Conseil qui adoptera le programme par voie de décision dans les soixante jours suivant la session au cours de laquelle la décision de rectification a été prise. Mais pour l'UEMOA, si le critère clé n'a pas été jugé conforme après les mesures de rectification, alors la procédure de sanction est déclenchée.

Le programme adopté est notifié au chef d'Etat concerné qui doit le respecter dans sa mise en oeuvre. D'ailleurs, les rapports semestriels de la Commission servent à s'assurer que l'Etat met en oeuvre le programme tel qu'adopté par le Conseil.

Enfin, il peut arriver que des circonstances exceptionnelles se présentent et qu'elles dispensent à l'Etat de se conformer aux objectifs de convergence pour une durée déterminée42(*).

Paragraphe 2 : La création dans chaque Etat d'un organe chargé de la surveillance multilatérale

Il est à noter que cette relation constante entre les institutions communautaires et les Etats est nécessaire pour une mise en oeuvre harmonieuse de la surveillance multilatérale. Preuve pour laquelle, dans chaque Etat il a été institué un organe national pour la surveillance multilatérale.

A- Le statut des organes nationaux :

La dénomination de cet organe diffère de l'U.E.M.O.A à la C.E.M.A.C. Dans la première on parle de comité national de politique économique (CNPE) et dans la seconde de cellule nationale de la surveillance multilatérale (CNSM). Nous verrons que la C.E.M.A.C et l'U.E.M.O.A disposent maintenant de règles très différentes car l'une a procédé à une réforme institutionnelle alors que l'autre a maintenu son système d'antan. La composition (1) ainsi que les missions (2) de ces organes sont définies par les dispositifs de surveillance multilatérale.

1- La composition des organes nationaux chargés de la S.M :

Pour l'U.E.M.O.A, c'est toujours la directive n°01/96-CM du 15 janvier 1996 qui demeure applicable. La directive porte sur la mise en oeuvre de la surveillance multilatérale et énumère les structures communautaires et nationales qui y participent. La composition ainsi que les missions des Comités Nationaux de Politique Economique y sont déterminées. Chaque Comité est composé de dix responsables de services nationaux. L'effectif est plus important que dans le cadre des CNSM. En effet, là où la C.E.M.A.C prévoit que dans chaque cellule nationale, il y aura un représentant de la Direction de la Dette ou de la Caisse Autonome d'Amortissement, par contre, l'U.E.M.O.A exige un représentant de la Direction de la Dette et un représentant de la Caisse Autonome d'Amortissement. Tout peut aussi dépendre de la configuration administrative des Etats qui font la distinction entre ces deux directions. En tout cas, tous les deux membres de ces directions ont un même paramètre de travail à savoir la dette. Par conséquent, l'idée pour la CEMAC d'en faire un choix alternatif est loin d'être impertinente.

Par ailleurs, il doit y avoir dans chaque CNPE un représentant de la direction des douanes. Ce qui n'est pas prévu par la C.E.M.A.C pour les CNSM. Il est vrai que les services douaniers sont capables de renseigner sur l'importance de certaines ressources de l'Etat comme les obligations fiscales dues lors du franchissement de la frontière. Donc la présence d'un représentant des douanes pourrait constituer un avantage non négligeable pour les CNPE.

Le nouveau dispositif de S.M de la C.E.M.A.C a procédé à une réforme institutionnelle des cellules nationales. La composition des cellules a été revue. Si dans l'ancien dispositif les cellules comptaient huit représentants de différentes structures43(*), dans le nouveau dispositif il y a un neuvième membre qui est le représentant résident de la Commission de la C.E.M.A.C. Il s'agit d'une décision non moins importante car les cellules nationales sont les interlocutrices privilégiées de la Commission en matière de S.M. Par conséquent, pour maintenir des rapports réguliers il est préférable qu'il y ait un représentant de la Commission dans les instances des CNSM. La FERDI avait même proposé de joindre aux cellules nationales, un représentant de la Commission Bancaire de l'Afrique Centrale car les questions d'endettement entretiennent des liens étroits avec le système financier. Mais apparemment, cette proposition n'a pas été retenue.

Les organes nationaux ont une composition importante car ils réunissent de hautes autorités qui sont des expertes en matière financière. Ils ont aussi des missions non négligeables.

2- Les missions confiées aux organes nationaux :

L'article 4 de la directive de 1996 précise que les CNPE assistent la Commission de l'U.E.M.O.A dans la mission de S.M. Leurs attributions ont ainsi été énumérées. Elles sont au nombre de trois :

- la gestion d'une base de données statistique :

· collecte et traitement des données nationales ;

· confection d'un tableau de bord macroéconomique et des indicateurs nationaux ;

· examen critique des données (cohérence et pertinence) ;

- la rédaction d'un rapport sur l'évolution de la situation économique de l'Etat auquel il appartient

- le suivi de la politique économique en recensant les décisions récentes et en évaluant leur impact sur le pays.

- La confection d'un rapport de base fondé sur l'évolution des indicateurs macroéconomiques du tableau de bord (article 6)

Ces missions, à l'exception de la dernière, se retrouvaient dans celles des CNSM dans l'ancien dispositif de la C.E.M.A.C. Mais deux différences doivent être soulignées. Premièrement, dans l'ancien dispositif, la C.E.M.A.C n'avait pas procédé comme l'U.E.M.O.A en ressortant une mission de gestion de base de données composée d'une triple dimension. Dans le cadre de la CEMAC, chacune était une mission à part entière distincte de celle de la gestion d'une base de données. Deuxièmement, les missions des CNSM étaient plus nombreuses. Le dispositif de la CEMAC prévoyait aussi la confection du Tableau des Opérations Financières de l'Etat (TOFE), la confection d'un tableau de pilotage des finances publiques et la confection d'un plan de Trésorerie. Les CNSM se retrouvaient donc avec neuf missions44(*).

Mais avec le nouveau dispositif, les missions des cellules nationales ont été réformées.

En effet, au vu d'un rapport de la FERDI les cellules nationales rencontraient d'énormes difficultés pour accomplir leurs missions45(*). Ainsi, avec la réforme institutionnelle, les missions des CNSM ont été non seulement diminuées mais aussi clarifiées. Dans l'ancien dispositif, elles étaient au nombre de neuf et portaient des dénominations générales. Mais dans le nouveau, elles ne sont plus que sept46(*).

Deux anciennes missions ont été conservées. Il s'agit de la gestion d'une base de données statistiques et du suivi de la politique économique.

Quatre missions ont été supprimées avec le nouveau dispositif : les confections du TOFE, d'un tableau des finances publiques, d'un plan de trésorerie et l'examen critique des données.

L'essentiel des rôles alloués aux cellules nationales est axé maintenant sur la surveillance multilatérale. L'expression « en rapport avec la surveillance multilatérale » a été rajoutée à deux anciennes missions : la collecte et le traitement des données et la confection d'un tableau de bord.

Il y a une mission qui a complétement changé de dénomination : le rapport trimestriel sur l'évolution de la situation économique du pays devient le rapport intérimaire de S.M sur l'évolution de la situation économique du pays.

Deux nouvelles missions sont apparues : la rédaction d'un rapport d'exécution de la S.M et la production d'un programme pluriannuel de convergence et le suivi de sa mise en oeuvre.

Le souci de recadrer les interventions des cellules nationales est réel. Il est naturel que comme elles ont été créées en application du dispositif de S.M, leurs missions doivent donc être en conformité avec ce souci de mise en oeuvre de la S.M. Nous verrons donc que les organes nationaux sont incontournables pour la S.M. les CNSM sont davantage responsabilisées par la rédaction d'un nombre important de rapports. Ce qui les place finalement au coeur de la S.M.

Les missions confiées aux organes nationaux n'ont pas été choisies de façon fortuite. Le but est de rendre fructueux l'échange d'informations avec les organes communautaires.

B- Les rapports entre les organes nationaux et ceux communautaires :

Les missions entre les CNSM et les CNPE se sont considérablement distinguées avec la réforme institutionnelle de la C.E.M.A.C. Ces changements vont également se répercuter sur les liens qu'entretiennent les structures nationales avec celles communautaires.

Déjà, les CNPE ont deux interlocuteurs à savoir la BCEAO et la Commission. L'article 5 de la directive de 1996 stipule qu'ils leur transmettent des données statistiques couvrant les domaines des « finances publiques, dette publique, prix et coût, monnaie et crédit, commerce extérieur et balance des paiements, revenus et emplois, comptes nationaux ».

Les CNSM, par contre, n'ont qu'un seul interlocuteur à savoir la Commission de la C.E.M.A.C. les données sus-énumérées étaient aussi celles que les CNSM transmettaient à la commission de la C.E.M.AC. Mais la réforme de 2016 prévoit non seulement de rajouter des données relatives à la situation sociale et au système financier mais aussi envisage ces données comme devant figurer dans les rapports de S.M que doivent élaborer les CNSM. C'est ce qui ressort de l'article 5 de la nouvelle directive. En effet, les missions des CNSM couvrent la rédaction de trois types de rapports relatifs à la S.M qu'elles doivent transmettre à la Commission de la C.E.M.A.C47(*). Et c'est dans tous ces rapports que doivent figurer les données statistiques sus énumérées. Les données ne sont pas livrées en vrac mais doivent faire l'objet d'une analyse et d'un examen critique afin de pouvoir informer sur la situation de la convergence. En plus de cela, le dépôt de chaque rapport est assorti d'une date butoir dans le but de rendre plus effective la S.M. Dans l'ancien dispositif, ces données devaient figurer dans le rapport économique trimestriel. Et on n'exigeait pas aux CNSM une analyse des informations collectées.

La S.M est le processus par excellence de gestion de la dette publique. Elle a un cadre général qui touche l'ensemble des politiques macroéconomiques des Etats. Mais sa finalité est d'assurer la viabilité des finances publiques. D'année en année, elle est perfectionnée pour la rendre plus compatible avec les objectifs communautaires

La C.E.M.A.C affiche une réelle volonté de faire face à l'instabilité budgétaire et économique de ses Etats membres. Il est vrai que c'est un changement de système qui s'impose et que l'U.E.M.O.A aussi devrait aller jusqu'au bout.Néanmoins, les efforts de réforme déjà mis en oeuvre ne peuvent faire l'objet d'un bilan exhaustif pour la bonne et simple raison que les réformes sont trop récentes pour permettre une évaluation de leur pertinence.

Mais la S.M ne suffit pas à elle seule pour assurer une gestion optimale de la dette publique au sein des Etats membres. Comme elle a une vocation générale, un autre dispositif spécial la complète. Il s'agit de la politique d'endettement public prévue depuis 2007 au sein des deux Unions.

Chapitre II : La définition d'un cadre de référence de la politique d'endettement :

La politique d'endettement ne doit pas être confondue avec la S.M bien vrai qu'elle entretient avec celle-ci des rapports étroits. En effet, comme il a été étudié tantôt, la S.M comporte une dimension non négligeable qui est relative à la dette publique. Elle englobe donc les centres d'intérêt de la politique d'endettement qui, comme son nom l'indique, reste cantonné sur la gestion de la dette publique.

En 2007, la C.E.M.A.C et l'U.E.M.O.A ont respectivement adopté le 19 mars48(*) et le 04 juillet49(*), un règlement portant cadre de référence de la politique d'endettement public et de gestion de la dette publique. Les corps des deux textes sont identiques. Cela s'explique par le fait que le Pôle Dette du service des FMI avait initié depuis 2001 des travaux avec l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C. L'objectif était de les aider à se conformer aux directives du 21 mars 2001 adoptées par les Institutions de Breton Woods et qui étaient relatives à la gestion de la dette publique. Ce sont ces travaux, dirigés par le Pôle Dette, qui ont abouti à ces textes identiques.

Par conséquent, le raisonnement au niveau de cette partie sera effectué comme s'il s'agissait d'un unique texte.

Le cadre de gestion de la dette comporte un champ d'application assez large. En effet, le troisième article dudit cadre stipule que celui-ci s'applique « aux emprunts extérieurs et intérieurs contractés directement par l'Etat ; aux emprunts intérieurs et extérieurs contractés par les démembrements de l'Etat ; aux emprunts publics et privés garantis par l'Etat ou ses démembrements ». Donc la dette publique ne concerne pas seulement celle de l'Etat. Mais les emprunts privés non garantis par l'Etat sont naturellement exclus du champ du règlement.

Au vu du cadre de référence, on se rend compte que la politique d'endettement est assurée par deux leviers. Le premier est d'ordre stratégique et renvoie à la mise en place d'une politique d'endettement par chaque Etat. Le second levier est d'ordre organique et requiert donc la création d'une structure dédiée à la gestion de la dette dans chaque Etat membre.

Section 1 : L'obligation des Etats de mettre en place une politique d'endettement :

Aux termes du premier alinéa de l'article 4, chaque Etat doit « (mettre) en place une politique d'endettement fixant les orientations globales en matière d'emprunts publics intérieur et extérieur et de gestion de la dette. » (Paragraphe 1). A côté de cela, un document de stratégie d'endettement sera aussi annexé à la loi de finances (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : la définition d'une politique d'endettement pour un cadre de gestion optimale de la dette :

La politique d'endettement doit englober trois orientations :

- La soutenabilité du niveau et du rythme de croissance de la dette ;

- Le paiement régulier du service de la dette à court, moyen et long terme ;

- La réalisation des objectifs de coût et de risque par l'Etat.

L'intérêt de la politique d'endettement c'est qu'elle doit servir de base à la détermination de la stratégie d'endettement. Chaque année, le document de stratégie d'endettement sera élaboré en tenant compte des objectifs que s'est fixé l'Etat membre.

A- La soutenabilité, un objectif clé d'une politique d'endettement :

La soutenabilité est la situation dans laquelle un Etat est capable d'honorer le service de sa dette sans recourir à des financements extraordinaires. Un endettement permanent peut conduire à des risques économiques surtout durant une période de crise. Il faut donc trouver un moyen de les limiter. C'est d'ailleurs pour minimiser ces risques que le dispositif d'endettement a été mis sur pied. L'objectif est de permettre d'articuler la politique macroéconomique et celle d'endettement public. Mais le souci d'éviter un surendettement ne devrait pas conduire à faire des choix budgétaires qui sont loin d'être optimaux. Laisser primer « un gouvernement par les règles en lieu et place d'un gouvernement par les choix » 50(*) pourrait compromettre l'efficacité dans les orientations budgétaires. C'est ce phénomène qui est en train de se produire dans la mesure où à force d'être assaillis par des règles, les Etats ont tendance à plus s'inquiéter de leur sort devant la commission que de la pertinence de leurs choix. La difficulté réside donc dans l'équilibre qui doit être fait entre l'autonomie des décideurs politiques et le respect des règles communautaires de gestion de la dette. La situation est d'autant plus délicate pour les pays de la Zone Franc car bénéficiant d'un appui financier important de la part des Institutions de Bretons Woods.

La soutenabilité est un enjeu majeur pour des pays qui veulent être attractifs au regard des investissements directs étrangers. Dès lors, des informations crédibles sur la situation financière publique doivent être mises à la disposition du public. La soutenabilité ne va pas seulement dépendre d'une manipulation de chiffres mais aussi d'autres facteurs liés à la situation financière. Il s'agit par exemple de la mobilisation de ressources fiscales et de la rationalisation des dépenses publiques.

Le taux de pression fiscale par rapport au PIB est assez faible dans la zone Franc. Les Etats arrivaient à peine à assurer le taux de 17% exigé par les anciens dispositifs de S.M. En 2011 et en 2012, le taux n'était respecté que par le Sénégal au sein de l'U.E.M.O.A (respectivement 18,9% et 19,2 %). Pour la C.E.M.A.C, il n'y a que le Gabon et Congo qui satisfont à ce critère51(*). Mais Cela n'a pas empêché que ce taux soit revu à la hausse. Il est maintenant de 20%. L'idée est de pousser les Etats à parfaire leurs outils de mobilisation des ressources fiscales. D'ailleurs, dans ses rapports de S.M, la commission ne manque pas de formuler des recommandations allant dans le sens de la modernisation des outils de collecte des recettes fiscales. Il est à noter que la faiblesse des recettes fiscales est due en grande partie à la place prépondérante qu'occupe le secteur informel dans l'économie de ces pays. « Le secteur informel désigne un ensemble de microentreprises non enregistrées au registre du commerce et qui ne font pas non plus de déclarations aux administrations fiscales »52(*). La part du secteur informel dans le PIB des Etats membres de l'U.E.M.O.A varie entre 40 (Sénégal) et 80% (Niger). La non-inscription au fisc est causée plus par l'ignorance des citoyens que par une réelle volonté d'échapper à l'administration fiscale. Au regard du taux d'alphabétisation et de l'inaccessibilité de l'administration dans certaines zones, le respect des règles devient difficile parce que tout simplement les citoyens n'ont pas connaissance de leur existence. Pour la C.E.M.A.C, la faiblesse s'explique aussi par le fait que les recettes pétrolières ne sont pas comptabilisées dans celles fiscales.

Rationaliser les dépenses publiques revient à les axer sur l'essentiel. Pour les pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, les dépenses doivent être plus consacrées à l'investissement qu'au fonctionnement. Il s'agit de pays en développement qui ont besoin de construire un environnement favorable à la croissance économique. Mais dans les faits, les besoins en fonctionnement sont beaucoup plus budgétivores. Et cela concerne surtout les dépenses de personnel. 35 % était le taux moyen des recettes fiscales que les Etats de l'U.E.M.O.A ont consacré aux traitements et salaires en 2011 et en 2012. La fourchette oscille entre 39 et 65% pour les Etats membres de la C.E.M.A.C53(*).

Parce que les ressources nationales sont rares, l'Etat est obligé de recourir à l'emprunt. De ce fait, il est tenu d'évaluer les risques y relatifs sous peine d'aggraver la situation des finances publiques.

B- la prévention des risques, un moyen efficace d'assurer la soutenabilité des finances des Etats :

Les risques relatifs à la contraction de la dette dépendent aussi bien du paiement régulier du service de la dette à court, moyen et long terme que de la réalisation des objectifs de coût et de risque par l'Etat.

Le premier point rejoint le souci de non accumulation des arriérés par les Etats membres de la C.E.M.A.C. En effet, un rythme d'endettement excessif ne permet pas d'assurer à temps le service de la dette. De cette situation peut découler un effet boule de neige et une insolvabilité de l'Etat.

Le second point, quant à lui, concerne surtout une étude de faisabilité. Les objectifs de coût et de risque permettent à l'Etat de savoir s'il est en mesure de rembourser la dette et si les dépenses pour lesquelles il contracte des emprunts sont nécessaires. Cela rejoint les bases de la règle d'or qui voudrait que l'emprunt ne serve qu'à financer les dépenses d'investissement car celles-ci sont appelées à générer des ressources et donc faciliter le remboursement de la dette.

Par ailleurs, un choix de taux d'intérêt faible pourrait permettre d'éviter les risques d'insolvabilité. Les taux d'intérêt fluctuent en fonction du marché financier. Ce qui fait que plus un Etat s'endette, plus il devient vulnérable aux éventuels chocs économiques. Cette situation pousse d'ailleurs la majeure partie des Etats membres de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A à choisir les emprunts à taux fixes.

Toutefois, la limitation des risques liés à l'endettement ne tient pas à la seule gestion de la dette. D'autres leviers doivent être mis en mouvement. Il s'agit d'abord d'une efficacité de la dépense publique qui doit offrir une grande place à l'investissement afin de favoriser la croissance économique. En outre, les ressources doivent être diversifiées et ne pas dépendre uniquement des activités du secteur primaire et de l'emprunt. Les pays de l'U.E.M.O.A, par exemple, sont de grands producteurs agricoles à l'image de la Côte d'Ivoire qui est le premier fournisseur mondial de cacao. Les prix du cacao sont en train de baisser à un rythme effréné du fait d'une surproduction. Une prévision économique rigoureuse aurait peut-être pu permettre de déceler ce phénomène bien avant qu'il se présente. Un principe économique trivial voudrait que le prix d'un produit baisse lorsque l'offre est supérieure à la demande dans le marché. La situation se serait également passée autrement si les agriculteurs avaient été appuyés et initiés aux processus de transformation de leurs productions.

Nous verrons que les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C sont exposés à un nouveau ré endettement car les problèmes sont plus profonds que la seule gestion de la dette, celle-ci n'étant que la partie visible de l'iceberg.

Paragraphe 2 : l'élaboration d'un document annuel de stratégie d'endettement :

Les Etats membres de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A élaborent chaque année un document de stratégie d'endettement public à moyen terme communément appelé Stratégie de gestion de la Dette à Moyen Terme (SDMT). Pour les pays de l'U.E.M.O.A, la SDMT est souvent étalée sur cinq ans alors que pour ceux de la CEMAC c'est sur trois ans.

A- Le contenu du document de stratégie d'endettement :

Le contenu du document de stratégie d'endettement est précisé à l'article 4 du règlement. Ainsi, il doit comporter des informations relatives :

- A la justification de l'emprunt ;

- Aux plafonds d'endettement et de garantie ;

- A la structure du portefeuille des nouveaux emprunts ;

- Aux termes indicatifs des nouveaux emprunts ;

- Le profil de viabilité de la dette pour les quinze années à venir

La justification de l'emprunt dépend des politiques publiques mises en oeuvre. En effet, chaque Etat justifie le besoin de recours à l'emprunt par rapport à son propre contexte. Et le contexte varie dans le temps et dans l'espace. Pour le Mali, le besoin d'emprunt pour l'année 2016 se justifiait par la loi d'orientation et de programmation militaire et par l'Accord signé avec l'Union Nationale des Travailleurs du Mali. Pour le Bénin, le besoin de financement se justifie par le Programme d'Investissements Publics qui vise entre autres à renforcer les infrastructures, à améliorer la productivité du secteur agricole. Quant au Gabon, les priorités dans les investissements sont « le renforcement du réseau routier et des capacité de production d'eau et d'électricité »

Les plafonds d'endettement et de garantie sont fonction d'un cadre de viabilité de la dette. Pour les Institutions de Breton Woods, une dette extérieure est viable lorsqu'elle est inférieure à 150% des exportations des biens et services, à 40% du PIB et à 250% des recettes budgétaires. Donc les Etats vont tenir compte de ces paramètres pour connaître les marges d'endettement qui se présentent à eux. Le Gabon, par exemple, a fixé son plafond d'endettement à 35% du PIB.

Le portefeuille de la dette permet de rendre compte de la part de chaque type de dettes (intérieure et extérieure) dans le montant global de la dette d'un Etat. Il permet aussi de faire une dichotomie en fonction de la variabilité ou non du taux d'intérêt ; de faire une classification en fonction des devises des bailleurs (monnaie locale à savoir le CFA, l'euro, le dollar américain ou encore les autres monnaies étrangères) ; de classifier en fonction des catégories de créancier (dette multilatérale ou bilatérale).

Par ailleurs, des indicateurs de risque comme le taux d'intérêt ou le taux de change sont répertoriés afin d'éviter le surendettement. C'est sur la base de l'étude des risques que la stratégie d'endettement sera déterminée. Dans son document de stratégie d'endettement pour 2016, le Mali préfère « maintenir une politique prudente de mobilisation d'emprunts à taux fixe »54(*). Le Bénin opte pour la même stratégie et précise que le recours aux emprunts à taux variables sera exceptionnel.

Les termes indicatifs des nouveaux emprunts renvoient entre autres à la maturité (date à laquelle les dettes deviennent dues et devront être remboursées) ; au taux d'intérêt (pourcentage calculé et que devra payer chaque année l'Etat au bailleur. On l'appelle aussi service de la dette) ; à la commission d'engagement (rémunération que l'Etat doit au bailleur du fait de son seul engagement tant que le crédit n'est pas encore utilisé. Elle représente un taux du crédit) ; au différé (période au cours de laquelle l'Etat n'a pas à rembourser sa dette. Elle se situe généralement au début du prêt).55(*)

Le profil de viabilité de la dette pour les quinze années à venir responsabilise les Etats. Il permet de prévoir les chocs futurs et de les anticiper. Cette exigence n'est pas respectée par tous les Etats. Certains Etats comme le Bénin respectent cette règle. Par contre, d'autres, comme le Sénégal, rédigent un rapport spécial sur l'analyse de la viabilité de la dette plus connu sous le nom d'AVD. Mais ce rapport n'est pas annexé à la loi de finances comme la SDMT.

B- L'annexion du document à la loi de finances initiale :

Le document de SDMT, rappellent les règlements de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A, est une annexe obligatoire. Elle est partie intégrante de la LFI. Ce qui signifie qu'une fois voté, le document de stratégie s'impose à l'exécutif tel qu'il est approuvé par le Parlement. Cette exigence est prévue à l'article 46 de la directive n° 06/2009/CM/UEMOA portant lois de finances au sein de l'UEMOA. Elle est aussi prévue à l'article 45 de la directive n° 01/11-UEAC-190-CM- 22 relative aux lois de finances.

Il est normal que le document soit annexé à la L.F.I vu qu'il permet de justifier l'emprunt. Or, ce n'est que dans la L.F.I qu'on peut trouver de telles explications. Rappelons, en effet, qu'à la fin de la première partie de la L.F.I, un tableau d'équilibre doit être construit. C'est ce tableau qui informe sur les besoins de financement de chaque Etat. Il ressort la différence entre recettes et dépenses. Et grâce à lui on sait si le solde budgétaire est déficitaire (ce qui traduit un besoin de financement du déficit) ou excédentaire. D'habitude, les Etats ne recourent à l'emprunt que pour faire face au déficit budgétaire.

Il s'y attache aussi le souci d'informer le Parlement. L'exécutif ne peut engager l'Etat sur des obligations qu'ignorent les représentants du peuple. Par conséquent, en les informant, on leur donne l'occasion de savoir ce sur quoi l'Etat pourrait s'engager et dans la limite de ses capacités de remboursement.

Cependant, certains pays ne publient pas le document de stratégie d'endettement. Les lois de finances sont mises en ligne pour en faciliter l'accès aux citoyens. Elles sont même parfois accompagnées d'annexes. Mais l'annexe sur la stratégie d'endettement n'en fait pas partie (Côte d'Ivoire, Sénégal) alors que ce document fait partie intégrante de la loi de finances initiale.

A côté de ces documents élaborés par les Etats, il est exigé d'eux de créer un organe spécial chargé de la gestion de la dette conformément aux directives.

Section 2 : La mise en place d'un organe de coordination dans chaque Etat :

En principe, au sein de chaque Etat membre de la C.E.M.A.C ou de l'U.E.M.O.A, il est créé un organe spécifique chargé de la gestion de la dette telle que déterminée par le règlement. Un délai de douze mois, non respecté, a été imparti pour que les Etats membres se conforment à cette exigence56(*). La dénomination de cet organe peut différer d'un Etat à un autre. Pour la plupart, il est appelé Comité National de la Dette Publique, CNDP en abrégé (Burkina Faso, Cameroun, Côte d'Ivoire, Mali, Sénégal, Togo). Dans d'autres Etats, il porte le nom de Direction Générale de la Dette (Gabon), de Commission Nationale de l'Endettement (Bénin), ou encore de Direction de la Dette Publique (Niger). Il n'empêche que pour les pays où un comité a été créé, l'organisation (paragraphe 1) ainsi que les missions (paragraphe 2) seront étudiées.

Paragraphe 1 : L'organisation des structures de coordination : 

Bien vrai que le règlement n'a pas détaillé la composition des structures de coordination mais le constat a été fait qu'elles sont en général tripartites (A). Toutefois, certains Etats se trouvent dans une situation un peu particulière (B).

A- Une composition tripartite des structures de coordination :

D'une manière générale, le comité est composé de trois organes : un comité de coordination, une commission technique et un secrétariat permanent

Le comité de coordination est l'organe clé. En effet, il regroupe, à lui seul, les exigences du règlement communautaire quant à la composition de la structure de coordination. Celle-ci doit être composée « de représentants des administrations et organismes impliqués dans le processus d'endettement et de gestion de la dette ». Ce qui est le cas pour le comité de coordination. Il est composé d'une dizaine de membres. Il est présidé par le ministre des finances. Il est composé, entre autres, du directeur chargé du budget, du directeur chargé de la prévision et des études économiques, du directeur chargé de la monnaie et du crédit, Le comité de coordination a pour mission, entre autres, « d'adopter la stratégie d'endettement de l'Etat, de coordonner la politique d'endettement publique avec les politiques budgétaire et monétaire,d'émettre un avis motivé sur tout projet d'emprunt intérieur et extérieur et de demande de garantie octroyée par l'Etat ou ses démembrements » 57(*)...

La commission technique se charge de la collecte des données et de leur traitement. Il est le plus souvent composé de spécialistes.

Le secrétariat permanent se charge des dossiers à soumettre au comité de coordination, prépare les rapports du comité de coordination. Il se charge de toutes les tâches administratives. Il est assuré, la plus part du temps, par un organe permanent du ministère des finances. Au Sénégal, par exemple, le secrétariat permanent est confié à la direction de la dette.

Chaque comité national est placé sous la direction du ministère des finances. Il appartient donc au ministre des finances de fixer par arrêté les modalités de fonctionnement et de saisine ainsi que les modalités d'exécution du budget du comité.

Il reste que les organes nationaux éprouvent du mal à exercer leurs missions. Au-delà du manque de ressources financières et humaines, se pose la problématique de la disponibilité des données. Les comités nationaux se trouvent dans une situation très fragile. Mais malgré cela, des missions importantes leur ont été confiées.

B- Une organisation complexe dans certains Etats :

Le Bénin se trouve dans une situation particulière. En effet, la Caisse Autonome d'Amortissement (CAA), créée depuis 1966, s'est vue confier des missions de gestion de la dette. Pour cela, le décret n°2008-241 du 06 Mai 2008 a été pris pour élargir les compétences de la CAA. Celle-ci assure le secrétariat permanent de la Commission Nationale de l'Endettement qui est la structure de coordination créée en vertu de la directive. C'est la CAA qui se charge de la rédaction des rapports sur la stratégie d'endettement et l'exécution de la dette. C'est cette même situation qui prévaut au Cameroun. Pourquoi confier la gestion de la dette à une personne morale autre que l'Etat? La CAA est un établissement public compétent dans la régulation des marchés financiers. Ne faudrait-il pas l'allouer à une structure étatique dépendant du ministère des finances ?En même temps, confier une telle mission à une personne autre que l'Etat pourrait être une garantie de fiabilité dans le contrôle. Mais on pourrait se demander aussi si la CAA pourra à la fois assurer ses missions anciennes et celles qui viennent de lui être confiées par le décret de 2008.

Par ailleurs, le Tchad dispose de deux organes différents dont les missions sont pourtant celles qu'accomplit une structure de coordination telle que prévue par la directive sur l'endettement public. La première, la direction de la dette, est née des cendres de la Caisse d'Amortissement qui a été dissoute en 1993. Elle a pour mission, entre autres, de définir la stratégie d'endettement et de désendettement, de participer aux négociations d'emprunt et d'élaborer les statistiques relatives à la dette publique. La deuxième, la Commission Nationale d'Analyse de la Dette, (CONAD) créée en 2004 est chargée de l'analyse de la viabilité de la dette, du suivi de la mise en oeuvre de la stratégie nationale d'endettement. Son organisation a été revue en 2014 pour se conformer à la directive communautaire. Le secrétariat permanent est assuré par la direction de la dette et les travaux techniques sont confiés à l'Equipe Technique d'Analyse de la Viabilité de la Dette58(*).

Certains pays, en plus d'avoir un CNDP, disposent aussi d'une direction de la dette publique (Sénégal) ou d'une direction de la dette et des dons (Côte d'Ivoire). Est-ce justifié par le fait que l'organe clé du CNDP à savoir le comité de coordination ne se réunit que par intermittence? Déjà, sa composition par de hautes autorités laisse penser que les réunions se feront rares ; d'où l'idée, peut-être, pour certains Etats de confier le Secrétariat permanent à un organe dont les interventions sont constantes à savoir une direction de la dette publique. Cependant, dans une mission précise, plus il y aura d'acteurs moins les responsabilités pourront être fixées. En plus, les conflits de compétence deviennent latents. Et même un conflit de compétence négatif pourrait survenir. Enfin, cette situation n'assure pas la lisibilité de la gestion de la dette pour le citoyen qui voudrait s'enquérir de la situation d'endettement de son pays.

La situation est même plus complexe qu'elle ne leparaît. Et ceci a aussi pour cause les nombreuses exigences posées aux Etats à la fois par l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C mais aussi les bailleurs de fonds comme le FMI. De ce fait, pour satisfaire les uns et les autres, une stratification est effectuée à la manière d'une toile d'araignée. Et tout devient compliqué.

En somme, chaque Etat s'est arrangé pour avoir un organe ad-hoc dont les missions sont concentrées sur la gestion de la dette.

Paragraphe 2 : Des Missions spécialement axées sur la gestion de la dette :

Les CNDP occupent une place importante dans la signature des conventions de prêt (A). En même temps, ils rédigent beaucoup de rapports relatifs à la gestion de la dette (B)

A- Un rôle central dans la contraction des dettes :

L'article 9 du règlement stipule que la « saisine de la structure de coordination pour avis est obligatoire pour tout projet d'emprunt intérieur et extérieur et de demande de garantie publics ».

Les règles de procédure et de saisine des CNDP sont fixées par arrêté du ministre des finances. Avant toute négociation d'une convention de prêt, le CNDP doit être sollicité par le Gouvernement afin qu'il puisse rendre un avis sur ladite convention. Et dans ce cas, le CNDP examine la faisabilité de l'emprunt dans la limite des capacités de remboursement. Il vérifie également si l'emprunt est justifié par un objectif de développement. Un dossier contenant un formulaire rempli par le maître d'ouvrage du projet lui est adressé afin qu'il examine la pertinence du projet. De même, il est mis à sa disposition les informations concernant les futurs bailleurs, les sommes consenties et les conditions générales de remboursement. Après saisine, il dispose d'un certain délai pour se prononcer. Il est de 30 jours au Cameroun59(*).

Il s'agit bien d'un avis obligatoire. Cela veut dire que le Gouvernement est tenu de solliciter le CNDP mais pas de suivre l'avis que celui-ci donnera. Pour octroyer plus de poids au CNDP, l'avis aurait dû être conforme. Mais le plus important c'est que si le Gouvernement ne se conforme pas à l'avis du CNDP, il s'expose à des risques réels. Il s'agit en fait d'une question d'ordre politique d'autant que le CNDP est appelé à rédiger des rapports. Donc le mieux c'est de se conformer aux avis.

L'avis doit être motivé. Il doit tenir compte des impératifs relatifs à l'intérêt de l'emprunt pour l'Etat, à son impact sur la viabilité des finances et à sa compatibilité à la stratégie d'endettement. Par ailleurs, le CNDP doit « veiller au respect de la règlementation en matière de gestion de la dette ». La directive prévoit une intervention de juristes pour assurer le respect des règles de procédure. En effet, l'alinéa 2 de l'article stipule que toute personne ou structure, susceptible d'appuyer le comité de coordination dans ses missions, peut être sollicitée. De même, l'intervention de juristes dans tout le processus d'endettement est exigée par l'article 14.

En outre, il doit assurer la coordination de toutes les administrations dont les missions ont un rapport avec la gestion de la dette. La composition du comité de coordination permet de garantir cette coordination vu que les directeurs des grandes administrations comme la Direction générale de la comptabilité publique et du Trésor, la Direction du Budget, la Direction de la Coopération Economique en sont des membres.

B- La rédaction de documents relatifs à la gestion la dette publique :

Les comités ont pour mission « d'élaborer, de coordonner et de suivre la mise en oeuvre de la politique nationale d'endettement public et de gestion de la dette publique »60(*). Il appartient donc à chaque comité d'élaborer le document sur la SDMT qui sera joint à la loi de finances de l'année. En plus, les comités doivent « veiller à la mise en cohérence desdites politiques avec les objectifs de développement et la capacité financière de l'Etat ». Toutes ces données se retrouvent aussi dans le document de stratégie. En effet, avec l'étude sur les plafonds et garanties, le comité s'assure de la solvabilité de l'Etat pour les années à venir. D'où d'ailleurs l'idée pour beaucoup d'Etats de favoriser les emprunts à taux fixes. De même, les objectifs de développement se traduisent par les justificatifs de l'emprunt qui sont développés dans le document de la SDMT. D'une manière générale, ces justificatifs portent sur des dépenses d'investissement qui visent à créer un environnement plus propice pour le développement

Par ailleurs, une particularité ressort de chaque Etat. En effet, en dehors de la rédaction du document de SDTM, certains Etats confient aux comités la mission de rédiger d'autres rapports. Cela se comprend vu que l'article 6 du règlement exige, pour des raisons de transparence, que chaque Etat publie au moins une fois par an un rapport qui porte notamment sur « les orientations et les objectifs de la politique d'endettement public ; l'encours et la composition de la dette publique notamment sa ventilation par monnaie, par structure d'échéance et structure de taux d'intérêt ; les résultats de la politique d'endettement public, et notamment la viabilité de la dette et l'utilisation des ressources mobilisées. ». La majeure partie des données se trouve dans les documents de SDMT. Mais il y en a d'autres que les comités mettent à la disposition du public à travers d'autres rapports.

Ainsi, la direction générale de la dette du Gabon élabore, pour chaque année écoulée, un rapport sur l'exécution de la dette à moyen et long terme.

La direction de la dette publique et des dons de la Côte d'Ivoire établit, chaque semestre (juin et décembre), un rapport sur le service dû, le servi payé, les arriérés ainsi que l'encours de la dette intérieure et extérieure de l'administration centrale.61(*)

Le CNDP du Sénégal et la CAA du Cameroun rédigent chaque année un rapport sur l'analyse de la viabilité de la dette. Dans ces rapports, le comité apprécie la solvabilité de l'Etat au regard du contexte économique et des politiques mises en oeuvre. Dans son rapport de 2015, le CNDP du Sénégal a conclu que le risque de surendettement est faible. Il était de 55,7% en 2015 c'est-à-dire bien en dessous du taux de l'U.E.M.O.A fixé à 70 %. Pour certains pays, l'analyse de la viabilité de la dette est intégrée dans la SDMT qui est jointe à la loi de finances initiale (Bénin, Gabon).

Sans prétendre à l'exhaustivité, le choix a été fait de se focaliser plus sur les critères que les indicateurs car ils ont connu des modifications importantes. Dans les anciens dispositifs de surveillance multilatérale, l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C utilisaient les mêmes critères de convergence ; critères qui, d'ailleurs, faisaient l'objet de beaucoup de critiques. En 2015, l'U.E.M.O.A. a modifié son instrument de S.M. et la C.E.M.A.C a fait de même. Désormais les deux organisations ont chacune des critères de convergence qui leur sont propres. Il n'empêche que bien vrai qu'on présume que les nouveaux critères sont plus pertinents que les anciens, une appréciation complète ne pourra être effectuée qu'après une mise en oeuvre effective des critères.

La C.E.M.A.C a procédé à des réformes plus profondes notamment en revoyant le cadre institutionnel de la procédure de S.M. Les missions des organes nationaux ont été clarifiées et focalisées sur la seule S.M.

Au plan national, la S.M a conduit à la création de cellules dont la mission est d'entretenir des liens permanents avec la commission. Le but est de favoriser l'échange des données nécessaires à la S.M. En même temps, le problème qui se pose pour ces organes nationaux, c'est le fait qu'ils regroupent des hautes autorités des administrations qui ne participent aux réunions que de façon subsidiaire.

En plus de la surveillance multilatérale, qui a une vocation générale, il existe un autre mécanisme de gestion de la dette publique. Il n'est pas trop connu mais cela n'entame en rien sa pertinence. On a vu, toutes les conséquences qui ont été attachées à l'exigence de la mise en oeuvre d'une politique d'endettement. L'Etat est désormais obligé de définir chaque année une stratégie d'endettement afin d'évaluer les risques. Un comité ad-hoc a été créé au sein de chaque Etat afin de suivre le rythme d'endettement et de veiller sur la viabilité des finances publiques.

Toutefois, le fait que la convergence ne soit pas atteinte jusque-là devrait conduire à des introspections plus profondes.

Deuxième partie : Une évolution lente vers la convergence en matière de gestion de la dette

Depuis 1994 la gestion de la dette est devenue une question majeure pour les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C. De nombreuses directives et règlements ont été adoptés. Ils ont été revus et perfectionnés au fil des ans. S'y sont ajoutées les exigences des Institutions de Breton Woods qui conduisent à la rédaction de SDMT par les Etats.

Et pourtant, le bilan de la gestion de la dette reste mitigé. Jusqu'ici les raisons principales qui poussent aux réformes communautaires tiennent surtout aux critères de dette c'est-à-dire le solde budgétaire, l'encours de la dette et les arriérés de paiement. Si, depuis lors, des modifications sont introduites et qu'il n'y a pas un grand effet du côté des Etats, c'est qu'une introspection suffisante n'a pas été faite. Exiger le respect de taux ou de seuils ne suffit pas à produire les effets voulus. Il existe toute une panoplie de facteurs qui influent peu ou prou sur le degré de respect des critères.

Une analyse profonde doit être faite aussi bien au niveau des Etats que des organisations communautaires elles-mêmes. On se rend compte alors que la gestion de la dette n'est pas uniquement une question d'équation, de chiffres et d'application des règles communautaires. La gestion de la dette nécessite avant tout une bonne gouvernance financière au sein des Etats. Certainement, c'est conscient d'une telle situation que les bailleurs de fonds exigent qu'une bonne gestion des finances publiques soit assurée notamment par la maîtrise des dépenses publiques et l'utilisation efficiente des recettes. Il est vrai, que l'habitude a été prise, dans les analyses, de trop s'attarder sur les questions de mobilisation des ressources au point d'oublier la maîtrise des dépenses. Nous dirons même que la maîtrise des dépenses est le point de départ de toute politique de bonne gouvernance. En effet, si on réussit à diversifier les ressources des Etats sans pour autant rationaliser leur utilisation, elles seront utilisées inutilement. Le déficit réapparaitra, les emprunts s'ensuivront et l'insoutenabilité des finances refera surface. Par conséquent, le plus urgent est d'initier les Etats à la bonne gouvernance. Et cela commence par la transparence du circuit budgétaire et comptable. Les Etats doivent apprendre à respecter les normes des finances publiques. Mais il s'avère que pour diverses raisons, les Etats peinent à intégrer les réformes qu'exige une bonne gouvernance. Il existe donc des problèmes qui sont endogènes aux Etats (chapitre I). En même temps, la gestion de la dette est rendue difficile parce que les normes communautaires en elles-mêmes présentent des faiblesses notoires. A cela, s'ajoute le fait que les exigences des bailleurs de fonds sont souvent hétérogènes et déconnectées des réalités des Etats membres. Il existe donc également des problèmes exogènes aux Etats membres et qui provoquent tous autant de difficultés dans la gestion de la dette (Chapitre II).

Chapitre I :Une adaptation difficile des Etats aux conditions de bonne gouvernance financière :

Dans tous les Etats, il est admis aujourd'hui que la bonne gouvernance est une condition essentielle pour maîtriser la dépense publique. Une mauvaise gestion des dépenses publiques peut conduire à la dérive des finances. C'est conscient d'une telle situation, que l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont entrepris un vaste programme d'harmonisation des législations dans différents domaines relatifs aux finances publiques. Aux termes de l'article 67 du traité de l'UEMOA «L'Union harmonise les législations et les procédures budgétaires, afin d'assurer notamment la synchronisation de ces dernières avec la procédure de surveillance multilatérale de l'Union. Ce faisant, elle assure l'harmonisation des Lois de Finances et des comptabilités publiques, en particulier des comptabilités générales et des plans comptables publics ».62(*) Une importance particulière est octroyée aux dimensions budgétaires et comptables.Les Unions cherchent à fiabiliser les données utilisées pour la surveillance multilatérale. Et dans cette perspective cinq directives ont été adoptées par chacune des organisations. Elles portent sur les lois de finances, la comptabilité publique, le plan comptable de l'Etat, la nomenclature budgétaire et le Tableau des Opérations Financières de l'Etat.63(*)Le souci sous-jacent est de renforcer la transparence au sein des Etats membres. C'est ce qui a d'ailleurs été prévu durant l'adoption d' « un code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques » par chaque organisation64(*).

Rappelons que le processus d'harmonisation des finances publiques a débuté depuis 1997-1998 dans le cadre de l'U.E.M.O.A65(*). Des directives ont été adoptées puis révisées en 2000 au regard du premier code de transparence du FMI qui datait du 26 septembre 1999.

La C.E.M.A.C n'a adopté ses premières directives qu'en 2008 alors qu'en 2007 le FMI avait adopté un nouveau « code de bonnes pratiques en matière de transparence des finances publiques ». Avec l'appui des services du FMI, elle a donc revu les directives et en a adopté de nouvelles pour être en conformité avec le code.

L'U.E.M.O.A, quant à elle, a adopté de nouvelles directives en 2009. Il est vrai que les bailleurs de fonds ont le droit de s'assurer de la bonne utilisation des prêts mis à la disposition des Etats. Et cela ne peut être obtenu qu'avec une transparence qui va de la préparation du budget à son contrôle en passant par son exécution. Les problématiques de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C font l'objet de beaucoup d'études et de rapports. En dépit de tout cela les entraves à une bonne gestion persistent.

Nous verrons donc que la transparence est un pilier essentiel en matière de gestion de la dette (section 1).

Il reste que malgré tous les efforts consentis, les Etats, surtout ceux de la CEMAC, peinent à suivre le rythme de la bonne gouvernance et cela pour diverses raisons (section 2)

Section 1 : la transparence, un pilier essentiel de la gestion de la dette des Etats :

L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont compris qu'il ne faut plus attendre que les finances tendent vers l'insoutenabilité pour intervenir. Il faut saisir le mal par la racine. D'où l'adoption du code de transparence qui est pour certains « le code général des finances publiques et de la comptabilité publique »66(*). Désormais, la transparence est de mise. Elle est définie par la commission de l'U.E.M.O.A comme « l'information claire du public sur la structure et les fonctions des administrations publiques, les visées de la politique des finances publiques, les comptes du secteur public et les projections budgétaires ». La transparence a donc pour objectif de rendre limpide la procédure budgétaire (paragraphe 1) mais aussi à moderniser la comptabilité publique (paragraphe 2) afin de retracer toutes les opérations.

Paragraphe1 : la transparence dans la procédure budgétaire :

Elle a été non seulement affirmée dans le code de transparence mais aussi renforcée par les nouvelles directives portant lois de finances. La transparence dans la procédure budgétaire concerne surtout la mise à disposition de l'information au Parlement (A) et au Public (B).

A- Une revalorisation du Parlement pour un contrôle démocratique des finances:

Déjà, dans un rapport de 2005, certains experts ont estimé que dans le système de l'Afrique subsaharienne d'une manière générale « le Parlement est quasiment exclu du processus budgétaire et financier. Il est (donc) urgent de réintégrer le Parlement en tant qu'acteur à part entière des systèmes financiers publics de l'Afrique subsaharienne, d'autant que partout dans le monde, un consensus se forme pour renforcer le rôle du Parlement, particulièrement en matière budgétaire et financière »67(*).

Le Parlement, en sa qualité de représentant du peuple, devient la première instance qui doit être informée sur tous les engagements de l'Etat et plus généralement l'état des finances publiques. Dans ce sillage, les directives de l'UEMOA et de la CEMAC sur les lois de finances, calquées sur le modèle de la loi n°2001-692 du 1er aout 2001 portant loi organique relative aux lois de finances de la France, ont prévu une multitude dispositifs afin de renforcer le Parlement :

- Une multiplication des documents à fournir au Parlement pour lui permettre de connaître les états financiers :

· Une annexe aux lois de finances doit donner les détails et l'origine des investissements accordés par les bailleurs de fonds ;

· Avant le 1er Aout de chaque année, le gouvernement doit fournir au Parlement le Cadre de Dépenses à Moyen Terme (CDMT)68(*), un rapport sur la situation économique et un rapport sur l'exécution du budget en cours. C'est sur la base de ces documents que le débat d'orientation budgétaire sera organisé. Ils vont permettre au parlement de connaître la position à adopter par rapport à la prochaine loi de finances.

· De nombreux documents doivent aussi être annexés au projet de lois de finances69(*). Il s'agit entre autres du document de SDMT dont l'élaboration a été prévue par la directive de 2009 sur l'endettement.

Le rôle de la représentation nationale est renforcé dans le processus budgétaire même si dans la pratique, la situation est tout autre. Malgré, le fait qu'il soit reconnu au parlement le pouvoir d'amender la loi de finances, la nouvelle nomenclature telle que proposée par les directives de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C ne facilitent pas une telle tâche. En effet, les deux Unions se sont inspirées de la LOLF française mais en ignorent l'esprit. Les directives adoptées ont omis d'intégrer les missions comme unité de vote des lois de finances. Il n'est prévu que l'existence de programmes et d'actions. Ce qui fait que les parlementaires ne pourront reventiler les crédits que dans le cadre d'un même programme. Or, le programme est trop restreint pour permettre un exercice efficace du droit d'amendement.

En outre, par le débat d'orientation budgétaire, le parlement n'aura pas seulement à intervenir à la fin de la procédure budgétaire pour l'adoption de la loi de finances. Il est associé, en principe, au processus budgétaire dès la préparation par le gouvernement. Le débat d'orientation budgétaire doit intervenir chaque année.

Par ailleurs, le vote du projet de loi de règlement est institutionnalisé. Pour l'U.E.M.O.A, il l'était déjà avec les directives révisées en 2000. Il est obligatoire pour chaque année. Et le projet de loi de règlement doit être déposé au parlement et distribué aux représentants du peuple avant le dépôt du projet de loi de finances pour l'exercice à venir. Le but est de permettre aux représentants du peuple de savoir ce qu'il est advenu des autorisations de l'année N-1 et comment envisager celles de l'année N+1. C'est ce qu'on appelle le chaînage vertueux. La loi de règlement doit aussi être accompagnée d'une foule de documents afin de renforcer l'information parlementaire.

Avant les directives, peu d'importance était accordée à la loi de règlement non seulement à cause de son adoption tardive mais aussi parce qu'elle fait état d'un exercice budgétaire déjà achevé et qui ne peut donc être modifié. La pratique de la loi de règlement n'est toujours pas encore encrée dans le système budgétaire et financier des Etats. Au Sénégal, malgré le fait que la première loi de règlement ait été votée depuis 1967, il s'est présenté par la suite une irrégularité dans le processus de vote des lois de règlements à partir de 1976. Des retards de deux ou trois ans étaient notés. La loi de règlement de l'exercice budgétaire de 1998 du Cameroun a été votée en 2000.

La revalorisation du Parlement vise à renforcer le contrôle non juridictionnel. Il présente surtout un caractère politique car pouvant déboucher sur une sanction du Gouvernement par le biais d'une motion de censure.

Cependant, beaucoup notent les incapacités de parlements nationaux d'user de leur pouvoir de contrôle. Cette incapacité est dès fois volontaire vu qu'elle se caractérise par un « désintérêt des députés ». Au Mali, les députés sont occupés à défendre leurs intérêts personnels. En plus, le cumul des fonctions rend la situation plus difficile. Les députés se concentrent beaucoup plus sur les affaires locales que celles nationales.70(*) Quant aux élus camerounais, ils ont tout simplement opté pour la « démission intellectuelle »71(*). Ils n'ont pas l'ensemble des outils techniques leur permettant de faire face aux experts du gouvernement. Donc ce qu'il préfère faire, c'est d'obtempérer. A partir de ce moment, le contrôle parlementaire est vidé de sa substance.

Le public se préoccupe aussi de plus en plus de la gestion des deniers publics. C'est pourquoi, les informations doivent également être mises à sa disposition.

B- La mise à disposition des informations financières au public :

Dans le préambule de son code de transparence, le C.M admet que « les citoyens, à la fois contribuables et usagers des services publics, sont clairement, régulièrement et complètement informés de tout ce qui concerne la gouvernance et la gestion des fonds publics : ils sont mis en droit d'exercer dans le débat public, leur droit de regard sur les finances publiques de toutes les administrations publiques ». Les lois de finances, les annexes ainsi que les autres documents octroyés au Parlement en cours de procédure budgétaire doivent être publiés. Le citoyen a le droit de savoir l'usage qui est fait des deniers publics. Toutefois, cette affirmation n'est que théorique. La publication des données financières est un exercice pénible pour les gouvernements parce qu'elle met à nu les défauts de la gouvernance.

Dans un rapport sur l'application de la transparence au sein de l'UEMOA, le Pôle de Stratégie et de Développement des Finances Publiques du PNUD72(*) remarque que le code de transparence, bien que transposé par les Etats, est différemment appliqué selon les domaines en cause. Certains sont plus sensibles que d'autres et sont donc difficiles à mettre au vu et au su de tout le monde. Les lois de transposition, les règles de marchés publics ainsi que les lois sur les collectivités locales sont entièrement publiées. Par contre, la densité de publication est moindre concernant la publication du calendrier budgétaire, des rapports de la Cour des comptes nationale ou encore des données financières. La transparence est presque inexistante s'agissant des exonérations fiscales, l'association des organismes de société civile à la procédure budgétaire. Le Pôle en a déduit que le Burkina Faso est le pays le plus transparent de l'UEMOA. Il est suivi respectivement par le Sénégal, la Côte d'Ivoire, le Niger, le Mali, le Bénin, le Togo et la Guinée Bissau

Les exemplaires du journal officiel de la Côte d'Ivoire sont disponibles en ligne mais ne sont pas gratuits. La loi de finances du Sénégal pour 2016 contient des annexes sur l'encours de la dette ou encore le service de la dette. Mais le document de SDMT n'y figure pas et pourtant il devrait faire partie intégrante de la loi de finances.73(*) Le même constat est fait pour la Centrafrique Même si l'information est accessible, elle n'est pas intelligible. On ne peut comprendre des chiffres sur l'endettement élaborés dans un tableau sous un format brut. A la complexité naturelle du vocabulaire des finances publiques74(*), s'y ajoutent des tableaux et des chiffres non expliqués.

L'information est disséquée. La plupart du temps, seul le corps de la loi de finances stricto sensu est disponible. Les annexes qui permettent de la comprendre en sont détachées. En plus, les informations fiscales comme les exonérations ne sont pas disponibles. L'administration est réservée concernant ces questions. D'ailleurs, la relation entre administration et administrés n'est pas une relation de collaboration mais plus tôt de conflit et de méfiance.

Tous ces blocages sont dus à de nombreux facteurs intrinsèques à l'organisation même des Etats.

La transparence inclut également une fiabilisation des données financières notamment par la modernisation de la comptabilité.

Paragraphe 2 : la nécessaire sécurisation des données comptables :

La comptabilité permet de faire le lien entre l'autorisation et l'exécution. Grâce à elle, les dépenses et recettes sont retracées d'une manière fiable et les informations du patrimoine de l'Etat sont fidèles à la réalité. Pour ce faire, elle doit être modernisée conformément aux normes internationales (A) et être contrôlée régulièrement (B).

A- La modernisation de la comptabilitépublique conformément aux normes internationales :

La culture africaine est marquée par l'oralité. Elle est présente jusque dans les administrations. Cette situation produit des risques car certaines dépenses ne sont pas retracées. Or toutes les recettes et dépenses de l'Etat doivent pouvoir être répertoriées dans des documents fiables et exhaustifs.

Dans les nouvelles directives sur la comptabilité, il est précisé que les Etatsdoivent désormais disposerd'une comptabilité budgétaire et d'une comptabilité générale. Si la comptabilité budgétaire permet de retracer les recettes et dépenses de l'Etat, la comptabilité générale, elle, renseigne sur le patrimoine de l'Etat en mettant en exergue ses actifs et passifs. La comptabilité budgétaire-ou de caisse-est comme un relevé bancaire. Elle permet de respecter la limite des ressources disponibles : on ne dépense pas plus que le plafond des lois de finances.

Par contre, la comptabilité générale est plus exhaustive. Elleest mue par le souci de transparence et d'efficacité de la dépense publique. Elle s'inspire de la pratique des entreprises privées. La comptabilité générale fiabilise les données financières. Elle permet de rattacher les opérations à l'exercice auxquelles elles se rapportent indépendamment de la date de paiement. On l'appelle aussi comptabilité d'exercice.

Pour les Etats membres de l'U.E.M.O.A, l'existence d'une comptabilité générale était prévue dans la première vague de directives notamment à l'article 3 de la directive n° 05/98/CM/UEMOA portant plan comptable de l'Etat. Et comme les anciennes directives étaient déjà en phase de mise en oeuvre dans les Etats, ceux-ci ont commencé à réformer leurs systèmes comptables afin d'intégrer la comptabilité patrimoniale qui s'inspire du Système Comptable Ouest Africain (SYSCOA). Cependant des difficultés de mise en place de la comptabilité générale étaient déjà notées au Burkina Faso. En effet, il est reproché à la directive d'être détaillée au point qu'elle ne puisse pas accorder une marge de réflexion aux autorités nationales quant à la façon de réformer la compatibilité de l'Etat. C'est dire que la directive a annihilé les initiatives des autorités nationales car les difficultés d'application peuvent interdire toute mise en oeuvre d'une réforme.

Les anciennes directives de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C prévoyaient donc l'existence d'une comptabilité générale, d'une comptabilité budgétaire. Cependant, la référence à des normes internationalement reconnues n'a été précisée qu'avec les nouvelles directives.

Ainsi, aux termes de l'article 3 de la directive n°03/11-UEAC de la CEMAC sur le plan comptable de l'Etat, « la comptabilité générale de l'Etat s'inspire des normes internationales reconnues notamment le système comptable de l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires ou système OHADA en abrégé, les normes comptables internationales applicables pour le secteur public ou IPSAS en abrégé et le manuel de statistiques du Fonds Monétaire International ». Pour l'U.E.M.O.A, « la comptabilité générale s'inspire des normes internationales, notamment du système comptable africain (SYSCOA) »75(*). Ceci résulte du code de bonnes pratiques du FMI qui exige, pour l'intégrité et la fiabilité des données, que les Etats utilisent « des normes comptables généralement reconnues ». Bref, les normes comptables de l'Etat s'inspirent de la pratique des entreprises privées.

Un mouvement international d'intégration de normes privées s'est installé. Il s'agit particulièrement des normes IPSAS inspirées des Normes Internationales d'Information Financière IFRS (International Financial Reporting Standards) mais adaptées aux particularités du secteur public. Ce mouvement a été initié par la Nouvelle Zélande et l'Australie puis s'est répandu dans d'autres pays comme la Grande Bretagne, les Etats-Unis et la France. Rapidement, elles sont devenues pour les bailleurs de fonds une condition de la bonne utilisation des prêts octroyés. Les normes IPSAS ont, en effet, l'avantage de prôner la transparence et la pertinence des comptes publics76(*).

Il reste que la mise en oeuvre des normes IPSAS est très difficile car elle induit un changement profond du système comptable du secteur public. Et « rien n'est plus difficile que de modifier les habitudes surtout quand elles sont anciennes et mauvaises »77(*). Avant les premières directives d'harmonisation, les pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C disposaient de systèmescomptables anciens. En Côte d'Ivoire, jusqu'en 2000, c'est un décret colonial du 30 décembre 1912 qui était appliqué. Au Burkina Faso, le règlement sur la comptabilité publique datait de 1969. Au Cameroun, l'ordonnance de 1962, qui était le corps du système financier du pays, avait été modifié par la loi de finances de 1966-1967 pour y intégrer des règles de comptabilité publique. La première directive de l'U.E.M.O.A sur la comptabilité a été la réplique du règlement général sur la comptabilité publique de la France qui était déjà ancien et qui n'était plus compatible avec la logique de performance.78(*) Et la CEMAC s'inspirant de l'UEMOA, a suivi le mouvement.Les Etats sont donc encrés dans des pratiques comptables qui ne sont plus en phase avec la logique de la gestion axée sur la performance.

Les actuelles directives de l'U.E.M.O.Aet de la C.E.M.A.C sur le plan comptable de l'Etat prévoient une transposition dans les ordres juridiques nationaux. Pour l'U.E.M.O.A, elle devra être faite dans un délai de dix-huit mois c'est-à-dire au plus tard le 31 décembre 2011. L'application doit être faite au plus tard le 1er janvier 2012. Les Etats membres disposent d'un délai supplémentaire qui va jusqu'au 1er janvier 2017 pour l'application intégrale des règles de comptabilité générale. Pour la C.E.M.A.C, le délai de transposition est de deux ans à compter de sa publication qui a eu lieu dans la semaine du 19 décembre 2011. Mais vu l'ampleur des réformes, elle prévoit un délai supplémentaire de deux ans pour les Etats qui souhaiteraient en bénéficier.Elle accorde aussi un délai jusqu'en 2022 pour l'application intégrale de la directive sur la comptabilité publique.

Pour le Togo, le rapport PEFA de juin 2016 constate que c'est en 2008 que les premières directives de 1997-1998 de l'U.E.M.O.A ont commencé à être appliquées79(*). Le Togo a transposé les nouvelles règles de transparence et a réformé le cadre juridique de la comptabilité et de la procédure budgétaire en 2014 et en 201580(*). D'autres textes complémentaires doivent également être adoptés. Même si elles ont été transposées, il est clair que les directives de 2011 connaîtront une application très tardive dans le pays.

En Centrafrique, jusqu'en 2010, il n'existait même pas de comptes administratifs pour retracer les activités des ministères. Le compte administratif du ministère des finances omettait beaucoup de précisions sur les recettes. De plus, il n'y avait que les emprunts qui faisaient l'objet de justifications, les autres dépenses ne nécessitaient pas de pièces justificatives.81(*)

Malgré les évolutions récentes et pertinentes des directives de l'UEMOA et de la CEMAC, il est clair que les Etats auront du mal à s'adapter à ce nouveau contexte. Néanmoins, l'idée qui transparaît dans toutes ces réformes est de rendre limpide les comptes publics notamment par un contrôle plus efficace.

B- Une comptabilité moderne assortie d'un contrôle efficace des comptes publics :

« La comptabilité, les comptes publics, sont la trace de l'usage des deniers publics. Ils en sont la pièce justificative, que les juridictions financières épluchent sans relâche pour apprécier la performance, c'est-à-dire l'efficacité et l'efficience, de la gestion publique »82(*). Le corollaire de la modernisation de la comptabilité est la certification des comptes. La certification des comptes permet à une institution indépendante de l'administration de s'assurer que les comptes publics sont conformes aux normes comptables et sont sincères. L'importance d'une certification dans les pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C est de s'assurer que les crédits ont été utilisés tels qu'ils ont été autorisés par le Parlement. En effet, l'idée de ne plus permettre à la classe politique de maintenir une mauvaise gestion afin de pouvoir utiliser les deniers publics à des fins personnels et en toute impunité a été posée dès 1994 par l'U.E.M.O.A et en 1995 par la C.E.M.A.C. Le contrôle va, donc, au-delà des comptables publics pour certains pays83(*). Une mauvaise gestion grève le budget et pousse à emprunter inutilement. C'est pourquoi certains ordonnateurs peuvent être jugés pour faute de gestion.

Cette tâche de contrôle est généralement confiée à ce qu'on appelle une Institution Supérieure de Contrôle (ISC). Dans la plus part des Etats, elle porte le nom de Cour des Comptes (CDC). L'article 68 du Traité constitutif de l'U.E.M.O.A de 1994 prévoit que, pour garantir la transparence, les comptes publics doivent être contrôlés soit par la Cour des Comptes de l'Union soit par une Cour des Comptes nationale. Le but est « d'assurer la fiabilité des données budgétaires nécessaires à l'organisation de la surveillance multilatérale des politiques budgétaires ».Ce moment a été marqué en Afrique par la transition démocratique et le voeu de rendre la gouvernance publique plus conforme aux exigences internationales.

Les nécessités de la création d'une CDC ont été rappelées par l'article 58 de la directive n°05/97 relative aux lois de finances ; à défaut c'est la CDC de l'Union qui interviendra sur demande des Etats. Mais beaucoupont préféré créé une CDC (ou élargir les compétences de la chambre des comptes de la Cour Suprême) que de recourir à celle de l'Union. Les velléités de souveraineté ont été plus fortes.

Auparavant, beaucoup d'Etats avaient une chambre des comptes au sein de leur cour suprême qui effectuait un contrôle des comptes mais sans rigueur84(*). Ces chambres ne remplissaient pas les conditions d'indépendance prévues par la Déclaration de Lima de 1977.85(*)

Dès 2003, le Sénégal, le Burkina Faso et la Guinée Bissau créent et installent une CDC nationale.Le Mali n'a toujours pas encore une CDC. C'est la section des comptes de la Cour Suprême qui effectue le contrôle de gestion. Le Mali a, depuis les premières directives, rencontré des problèmes institutionnels pour créer une CDC.86(*)Malgré cela, la section est en train d'apurer les comptes de 1960 à 2008 pour les mettre à jour. En même temps, elle apure chaque année les comptes de l'Etat.87(*) Les missions de ces institutions ont été élargies à la certification des comptes. Ainsi, la chambre des comptes de la Côte d'Ivoire, bien que devant être transformée en CDC88(*), effectue, à titre transitoire, la certification des comptes de l'Etat. Depuis 2010, le Niger s'est doté d'une CDC.

La création de CDC est intervenue plus tard au sein des Etats de la C.E.M.A.C à quelques exceptions près89(*). Le traité instituant la C.E.M.A.C n'avait pas prévu la création d'une CDC communautaire. C'est la Cour de justice qui avait en son sein une chambre des comptes et qui se chargeait du contrôle. Néanmoins, le traité de l'UEAC de 1995 avait prévu la création de CDC nationales par les Etats. Ce qui n'a pas produit un grand effet. La première directive de 2008 sur les lois de finances, bien que non appliquée, l'a rappelé. Et l'article 72 de la Directive n°01/11-UEAC-190-CM-22 relative aux lois des Finances est revenu sur la question90(*).

La CDC nationale doit renforcer le contrôle parlementaire. Sa mission d'antan auprès du Parlement se limitait à la rédaction d'une déclaration générale de conformité des comptes et d'un rapport sur l'exécution des lois de finances qui devaient accompagner par le projet de loi de règlement. Avec la dernière génération de directives, elle se voit reconnaître le pouvoir de certifier la régularité, la sincérité et la conformité des états. Elle peut même donner son avis sur la qualité de la gestion des finances publiques.91(*)

La constitution camerounaise de 1996 reconnait à la chambre des comptes de la cour suprême la compétence de contrôler les comptes publics. C'est elle qui joue le rôle de CDC. Un décret, n°2013/16 du 15 mai 2013, a été adopté conformément à la directive de la C.E.M.A.C sur la comptabilité publique. Il élargit les compétences de la chambre des comptes camerounaise à la certification des comptes92(*). La chambre des comptes a donc rendu public son premier rapport de certification en 2014. Il portait sur l'exercice 2013 et ce n'était qu'une première expérimentation. La chambre a déduit que « le compte général de l'Etat de l'exercice 2012, tel que produit, ne se prête pas à la certification ».93(*) Ceci est dû au fait que la comptabilité de l'Etat fonctionne toujours sur la base de la comptabilité de caisse et qu'il existe de nombreux écarts entre recettes et dépenses des caisses d'affectation spéciale qui n'étaient pas justifiées.

Bref, beaucoup de cours et chambres ont commencé à expérimenterla nouvelle mission de certification. Mais l'exercice est rendu difficile du fait que les Etats n'ont pas encore complétement basculé dans le système de comptabilité générale. La mise en oeuvre des réformes est de grande envergure et nécessite donc du temps, des moyens financiers et humains suffisants. Il est clair que les réformes, si elles sont correctement mises en oeuvre, permettront d'assainir les finances publiques et de baisser le niveau d'endettement avec l'élimination des dépenses inutiles. Toutefois, les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C peinent à suivre le rythme de la nouvelle gouvernance financière.

Section 2 :Les difficultés des Etats à internaliser la nouvelle culture financière :

Le principe de supériorité des règles communautaires sur celles des Etats membres a été posé par les traités constitutifs des deux organisations94(*). Il existe donc une réelle volonté d'harmonisation de la législation communautaire au sein des Etats membres. Seulement, la volonté ne suffit pas. Au-delà de la consécration juridique, se posent des problèmes d'ordre pratique qui rendent difficile voire impossible l'application des normes communautaires.

Les règlements et les directives sont les instruments privilégiés de l'harmonisation en zones C.E.M.A.C et U.E.M.O.A. Si les règlements communautaires sont directement applicables sur le territoire des Etats membres, les directives, quant à elles, nécessitent une transposition. Une obligation de résultat pèse sur les Etats et chaque directive est assortie d'une date butoir de transposition95(*). Mais il s'avère que les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C rencontrent des difficultés pour respecter les dispositions communautaires. Même si les difficultés de transposition disparaissent petit à petit. Par contre, la mise en oeuvre des réformes demeure un réel problème. C'est parce que les systèmes des Etats tels que conçus ne prêtent pas à une modernisation de la gestion publique. Ainsi, les facteurs de blocage peuvent être classés en deux : ils sont politico-administratifs (paragraphe 1) et techniques (paragraphe 2)

Paragraphe 1 : Les problèmes d'ordre politico administratif :

Nous verrons successivement les problèmes d'ordre politique (A) et administratif (B)

A- Les blocages produits par la tradition politique des Etats :

Un principe d'autonomie institutionnelle et procédurale est reconnu aux Etats membres quant à la mise en oeuvre des dispositifs communautaires. La seule obligation posée à leur encontre est celle de résultat c'est-à-dire une transposition et une application effective des directives. Les règlements, eux, produisent en principe un effet direct même si dans la pratique la situation est tout autre.

Sur le plan politique, beaucoup d'Etats démontrent un faible intérêt par rapport aux décisions communautaires. Plus les directives sont contraignantes, moins les gouvernants nationaux éprouveront la volonté de les transposer. Le fait qu'ils soient obligés de se référer à des normes qui gouverneront leurs décisions les dissuadent d'effectuer une transposition. Il s'agit en fait d'une velléité de souveraineté. Or, être dans une Union c'est consentir à une limitation de souveraineté pour la poursuite des objectifs communs.

Par ailleurs, la transposition doit être accompagnée d'une obligation de toilettage des textes antérieurs afin d'éviter toute contrariété. Cette exigence est basée sur une obligation d'abrogation et de modification qui pèse sur chaque Etat membre. Cependant, pour certains Etats, comme le Mali, la situation n'est pas aussi simple. En effet, lorsque l'U.E.M.O.A a rappelé, dans son premier code de transparence, l'obligation de la création d'une CDC indépendante pour assurer la transparence dans la gestion des finances, la Commission de l'U.E.M.O.A a saisi la Cour de Justice pour avis sur la demande du ministre des finances du Mali96(*). Celui-ci estime que la création d'une CDC est contraire à la constitution malienne et que le gouvernement rencontre des difficultés à réviser la Constitution. La C.J a répondu en rappelant que « la primauté bénéficie à toutes les normes communautaires, primaires comme dérivées ; immédiatement applicables ou non, et s'exerce à l'encontre de toutes les normes nationales administratives, législatives, juridictionnelles et, même constitutionnelles parce que l'ordre juridique communautaire l'emporte dans son intégralité sur les ordres juridiques nationaux ». Par conséquent, l'Etat du Mali a le devoir de créer une CDC dans les plus brefs délais. Mais jusqu'à présent, il n'existe pas une CDC au Mali. C'est encore la chambre des comptes de la Cour Suprême qui contrôle la gestion de l'Etat.Le contrôle externe est placé sous le prisme du pouvoir exécutif. En Centrafrique, la Cour des Comptes est placée sous l'autorité du ministère de la justice et n'est donc pas indépendante.

Par ailleurs, la structuration politique même des Etats ne se prête pas à une gestion transparente des finances publiques. La tradition d'un exécutif fort qui centralise les pouvoirs est toujours présente.

La prédominance de l'exécutif laisse peu de place au pouvoir législatif. Celui-ci est d'autant plus fragilisé du fait du monocaméralisme. Dans la plus part des Etats, il n'existe qu'une seule chambre à savoir l'Assemblée Nationale97(*). Un parlement bicaméral aurait été plus efficace dans la mesure où il aurait permis les navettes législatives et donc une plus grande attention serait portée à l'action publique. En plus de cela, l'exercice du pouvoir budgétaire par le parlement « est marqué par l'importance prise par le jeu des partis, qui transforme la signification prise par le régime parlementaire et elle se manifeste par le recul des procédures traditionnelles »98(*). La loi de finances une fois au Parlement est adoptée comme lettre à la Poste car le gouvernement dispose d'une majorité qui le soutient. Le parlement est souvent dépourvu de comités techniques capables de l'appuyer dans son contrôle.

Au Burkina Faso, les débats d'orientation budgétaires ne sont toujours pas encore formalisés. Les parlementaires sont obligés de se référer aux rapports de la commission des finances pour comprendre les lois de finances. Et les positions qu'ils adoptent par rapport aux lois de finances leur sont dictées par les groupes parlementaires auxquels ils appartiennent99(*).

En outre, la situation politique instable des pays a renforcé les difficultés de mise en application des dispositifs communautaires. La crise de la Centrafrique a été telle que la CEMAC a été obligée de délocaliser son siège de Bangui. Le Niger et le Mali sont ravagés par des conflits terroristes. Les situations de crise encouragent l'endettement car les dépenses pour y faire face augmentent. En même temps, elles rendent le remboursement difficile car elles bloquent le cycle normal de l'économie et entament la capacité d'un Etat à attirer les investissements directs étrangers.

En somme, le système des finances publiques des Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C est confronté à deux logiques a priori contradictoires : « d'un côté une logique politique ancienne, qui procède de la tradition démocratique et qui privilégie dans l'organisation et le fonctionnement du pouvoir financier la capacité politique, c'est-à-dire celle des élus ; luifait face désormais une logique de gestion, plus récente, qui répond quant à elle à des impératifs économiques et qui privilégie la capacité d'expertise technique des décideurs. Il en résulte un enjeu fondamental qui est de parvenir à concilier ces deux logiques »100(*). Tant que les Etats n'arriveront pas à effectuer un dosage équilibré de ces deux logiques, la gouvernance financière ne sera pas efficiente.

Un autre problème s'ajoute aux difficultés politiques : c'est celui des faiblesses administratives.

B- Une organisation complexe et inefficace des administrations :

L'administration publique est le milieu où sont pensées les réformes. Et avec la nouvelle gestion financière, l'administration publique devient aussi un milieu où les réformes doivent produire des effets.

Les administrations des Etats des deux organisations fonctionnent, pour la plupart, selon le système de carrière. Celui-ci permet un avancement du fonctionnaire du fait de sa seule ancienneté mais non en fonction de ses performances professionnelles. Or la nouvelle gestion publique met l'accent sur la productivité des agents.

Les fonctions publiques sont caractérisées par une faiblesse voire une inexistence de la performance car le travail du personnel n'est pas suffisamment contrôlé. S'y ajoute le fait que les postes occupés sont le fruit d'un favoritisme de la part des dirigeants à l'égard d'une catégorie de personnes ciblées. C'est en fait un « système de clientélisme qui établit un lien entre l'emploi et les relations de toutes sortes : politiques, ethniques, tribales, personnelles, mais qui ne permet pas d'atteindre l'efficacité »101(*). Par conséquent, les réformes administratives, pour être en phase avec la nouvelle gestion publique, sont freinées par l'action des lobbies. Le secteur privé a une faible productivité et n'emploie pas beaucoup de personnes. La fonction publique est donc le cadre professionnel par excellence. De ce fait, les tentatives de réformes sont bloquées. Les partenaires sociaux craignent que les emplois des agents ne soient mis en péril. A chaque fois qu'on parle de réforme de la fonction publique, « on se presse, on s'agite pour étouffer le poussin dans l'oeuf »102(*).

Par ailleurs, le système administratif est complexe. L'exemple a été donné sur les CNDP qui ont été créés, du fait des exigences du FMI, alors qu'il y avait déjà au sein de la plupart des ministères des finances des Etats une direction de la dette.. Certaines structures sont créées sans la suppression d'autres. Et l'intervention de plusieurs administrations dans un domaine ne permet pas de délimiter les compétences encore moins de situer les responsabilités. Ce n'est pas un hasard si le Bénin a jugé nécessaire d'adopter un décret qui délimite les compétences des différentes administrations qui interviennent dans la gestion de la dette.103(*)

Au sein des Etats, la formation, l'information ainsi que la communication doivent être davantage renforcées dans les administrations. Ces trois impératifs pourraient être gérés par l'Observatoire des Fonctions Publiques Africaines (O.F.P.A). Créé en 1991, l'O.F.P.A regroupe vingt-six Etats. Tous les Etats membres de la C.E.M.A.C et de l'U.E.M.O.A font partie de l'O.F.P.A. L'Observatoire a pour mission de collecter et de traiter des informations relatives aux fonctions publiques africaines. A partir de ces données, il décèle les problèmes communs et propose des solutions adéquates. Dans un de ses rapports104(*), l'Observatoire remarque qu'au lieu de pousser à modifier le système de carrière qui existe dans la plupart des fonctions publiques africaines, la mondialisation n'a fait que le renforcer. Les Etats n'ont pas pu suivre les mutations rapides et ont donc conçu le système de carrière comme un refuge face à un monde qui les dépassait.

A cela peuvent s'ajouter des problèmes qui relèvent de la structure administrative des Etats. En effet, certaines réformes, comme celles de la gestion de la dette, qui nécessitent l'intervention de diverses administrations, voient leur réussite dépendre de la coordination entre ces administrations. Or, il est difficile de réunir des autorités autour d'un comité ad-hoc car ils considèrent leur participation à ce comité comme une mission secondaire. En plus de cela, le système administratif est complexe. Certaines structures sont créées sans la suppression d'autres. Et l'intervention de plusieurs administrations dans un domaine ne permet pas de délimiter les compétences encore moins de fixer les responsabilités. Ce n'est pas un hasard si le Bénin a jugé nécessaire d'adopter un décret qui délimite les compétences des différentes administrations en matière de gestion de la dette.105(*)

Un défi plus sérieux encore est celui de trouver une méthode adéquate de mise en oeuvre des réformes.

Paragraphe 2 : Des difficultés techniques liées à l'absence de méthodes:

Les règles de saine gestion des finances publiques sus développées sont méconnues des cultures africaines. C'est ce qui pose des difficultés de mise en oeuvre. La volonté est présente mais la méthode n'est pas au rendez-vous et cela réduit à néant toute tentative de modernisation de la gestion des finances publiques.

La tendance dans les Etats est de mettre en avant les réformes techniques en oubliant les humains. Le potentiel humain doit être enrichi car sans les hommes, les réformes techniques ne pourront pas être appliquées. Lorsque les hommes ne sont pas impliqués dans les réformes, le risque est que tous les nouveaux instruments introduits dans le système budgétaire ne feront que des modifications de surface. Les différents acteurs doivent s'approprier les réformes et comprendre pourquoi il faut changer. Le besoin de changement est souvent l'expression d'une insatisfaction par rapport à une situation actuelle et ils doivent être conscients de cela. Sinon le risque qui se pose est une « accumulation de mesures de réformes envisagées mais dont la mise en place est sans cesse retardée ».106(*)

Un exemple peut être trouvé dans la mise en oeuvre du règlement du C.M de l'U.E.M.O.A sur l'endettement public qui prévoyait la création d'un CNDP dans un délai de douze mois à compter de la signature dudit règlement. Certes, l'article 20 précise que le règlement entre en vigueur dès sa signature c'est-à-dire le 04 juillet 2007, mais l'application effective au niveau national nécessite une intervention étatique ne serait-ce que pour la création d'un CNDP tel qu'exigé par le règlement. Cependant, certains Etats, comme la Côte d'Ivoire, n'ont pas respecté ce délai de douze mois. Le CNDP de la République ivoirienne n'a été mis en place qu'en 2011 par un décret du 30 novembre. Ses membres ont été nommés par un décret du 20 avril 2012. Il n'a tenu sa première session qu'en 2015. Pendant tout ce temps, c'est le comité technique qui se réunissait pour l'élaboration des SDMT ainsi que l'analyse de la viabilité de la dette.

Par ailleurs, on a l'impression que les Etats veulent tout faire aboutir en un laps de temps. Or, des réformes de cette envergure nécessitent une projection dans le temps. Elles impliquent bon nombre d'acteurs et il faudra du temps pour impliquer tous les secteurs concernés. Elles impliquent les fonctionnaires. Et ceux-ci, on l'a vu, ne sont pas toujours d'accord pour que des réformes puissent être mises en oeuvre. Peut-être ne sont-ils pas suffisamment impliqués dans les processus. Elles impliquent aussi les élus locaux et nationaux. Chaque acteur possède une part de responsabilité dans la mise en oeuvre des réformes de bonne gouvernance financière.

Trouver une technique pertinente de mise en oeuvre des réformes est d'autant plus difficile que les Etats manquent d'experts en matière de finances publiques. Les finances publiques en général ne sont enseignées qu'à l'Ecole Nationale d'Administration. En plus, elles séduisent peu d'étudiants dans le milieu universitaire. D'ailleurs, rares sont les universités qui consacrent des formations spécialisées dans ce domaine. Le résultat c'est que ceux qui apprennent la matière à l'étranger y restent : c'est le phénomène de la fuite des cerveaux.

Bref, parce que les règles de nouvelle gestion ne sont pas compatibles avec les pratiques anciennes des Etats, il faut du temps mais surtout une concertation suffisante entre les différents acteurs. La transition entre deux systèmes est toujours difficile et son échec pourrait mener à la déroute.

Il est nécessaire que la gestion efficiente des finances publiques soit accompagnée de solides réformes budgétaires et comptables. Les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C ne peuvent être mis en rade face à ce mouvement international.

Cependant, au vu de tous les développements, il est constaté que les Etats sont confrontés à de nombreux défis. Mais le plus important est non pas de mettre en oeuvre les réformes mais de bien les mettre en oeuvre. Et pour nous, la problématique la plus essentielle est celle de trouver une méthode adéquate qui puisse permettre de concilier logique de gestion et pratique traditionnelle.

Il reste, toutefois, que les problèmes de bonne gestion des finances publiques sont aussi imputables aux organisations communautaires et aux bailleurs de fonds.

Chapitre II : une gestion de la dette rendue difficile par des facteurs exogènes aux Etats :

Pour faire face aux velléités de souveraineté, la règle communautaire doit être forte, persuasive ou dissuasive en fonction des situations. Toutefois, il s'avère que dans le cadre de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, les mesures de gestion de la dette ne sont pas aussi contraignantes. Au lieu de mettre en oeuvre des sanctions pour non-respect, les horizons de convergence ont été repoussés à maintes reprises. Et finalement, le cadre de S.M a été revu. La gestion de la dette dans un cadre communautaire est délicate. Elle exige, en effet, la prise en compte des particularités de chaque Etat avant de dégager des règles générales. Si une règle communautaire fait fi des spécificités nationales, elle sera vouée à l'inapplicabilité. Dans ce cas, ce ne sera pas parce que les Etats n'ont pas voulu l'appliquer, mais tout simplement parce que la règle telle que conçue se placedans une posture d'application difficile. Cette situation est très fréquente dans le cadre de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C qui sont dépourvues de modèles propres. L'absence de modèle encourage le mimétisme. On a l'impression que des études de faisabilité ne sont pas effectuées avant l'édiction de normes communautaires. Tout cela fait perdre à la règle sa raison d'être et donc sa pertinence. Mais la situation n'est pas seulement imputable aux organisations communautaires. Elle trouve aussi sa source dans l'attitude des bailleurs de fonds. L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C subissent des pressions des bailleurs de fonds de leurs Etats. Des règles leur sont imposées pour que les Etats membres puissent bénéficier d'un appui financier.

Nous verrons donc successivement les carences des instruments communautaires en matière de gestion de la dette (section 1) et l'absence de modèles propres à l'UEMOA et à la CEMAC (section 2)

Section 1 : Une convergence lente en matière de gestion de la dette du fait des carences des instruments communautaires :

Pour renforcer le respect des critères de convergence et surtout ceux relatifs à la dette, des sanctions ont été prévues aussi bien par l'U.E.M.O.A que par la C.E.M.A.C. Toutefois, bien qu'existantes, ces sanctions sont pratiquement inappliquées (paragraphe 1). La convergence est rendue également difficile du fait que la S.M ne permet pas aux Etats de faire face aux chocs extérieurs (paragraphe 2)

Paragraphe 1 :La difficile application des sanctions communautaires :

Des sanctions positives et négatives ont été dégagées (A) mais elles demeurent inapplicables (B)

A- L'existence de vagues énoncés de sanctions positives et négatives :

La politique communautaire en matière de gestion de la dette possède un double volet : un volet préventif et un volet correctif. Pour le premier, il a été expliqué à quel point les programmes pluriannuels de convergence sont importants dans le processus de S.M. Dans ses rapports de S.M, la commission surveille chaque Etat afin de s'assurer que le programme pluriannuel de convergence tel qu'adopté par le C.M est exécuté de manière conforme et de détecter, le cas échéant, les anomalies budgétaires. Tout défaut d'application est signalé au C.M. Les anomalies budgétaires tiennent surtout aux violations des critères de solde budgétaire et de l'encours de la dette qui peuvent conduire à des déficits excessifs. Si l'exécution n'est pas jugée conforme, l'Etat bénéficiera alors d'un délai de trente (U.E.M.O.A) ou quarante-cinq jours (C.E.M.A.C) pour élaborer un programme de mesures rectificatives avec l'appui de la Commission. Mais lorsque l'Etat n'a pas pu élaborer les mesures rectificatives ou si celles-ci ont été mal appliquées ou inappliquées, des sanctions doivent normalement être prises à son encontre. Les sanctions ont une forcecroissante et sont prévues par le traité constitutif de l'U.E.M.O.A et le Traité de l'U.E.A.C pour la C.E.M.A.C107(*). Ces sanctions sont :

- La publication par le C.M d'un communiqué éventuellement assorti d'informations supplémentaires sur l'Etat concerné. Avant le prononcé de cette sanction, tous les rapports rédigés par la commission à l'égard dudit Etat ne sont pas publiés. Ce n'est qu'à partir du moment où l'Etat persiste dans la mauvaise gestion budgétaire que sa situation sera rendue publique. L'objectif est de jeter l'opprobre sur l'Etat ;

- Le retrait, annoncé publiquement, des mesures positives dont bénéficiait éventuellement l'Etat membre ;

- La recommandation à la BOAD de revoir sa politique d'interventions en faveur de l'Etat membre concerné ;

- La suspension des concours de l'Union à l'Etat membre concerné

Il s'agit d'une liste non limitative vu que la gamme de sanctions peut être enrichie par un acte additionnel adopté par la CCEG.

Des circonstances exceptionnelles sont toutefois prévues108(*). Il peut arriver que le déficit soit temporaire et qu'il résulte d'une situation indépendante de la volonté de l'Etat. C'est ce qui s'était passé durant la crise des subprime de 2008. Pour ces circonstances, des sanctions ne sont pas appliquées. L'exemption dure en principe six mois.

A côté des sanctions négatives, figurent celles qui sont positives.

Les sanctions positives sont :

- La publication d'un communiqué par la Commission (U.E.M.O.A) ou par le secrétaire exécutif de l'UEAC (C.E.M.A.C) ;

- le soutien de l'Union à la mobilisation des ressources additionnelles nécessaires au financement des mesures rectificatives préconisées.

- Le traité de l'U.E.M.O.A rajoute que l'Etat aura un accès prioritaire aux ressources disponibles de l'Union.

Bref, il s'agit de formulations générales qui n'informent pas sur la manière avec laquelle les appuis financiers vont être accordés aux Etats.C'est d'ailleurs l'une des raisons qui freinent l'application des sanctions.

B- Une application des sanctions freinée par plusieurs facteurs :
 

L'importance des sanctions négatives doit résider dans leur caractère dissuasif même si elles ne sont pas appliquées. Une sanction négative doit être suffisamment sévère pour que les obligations de faire et de ne pas faire puissent être respectées. En même temps, les sanctions positives doivent être incitatives. Mais les sanctions, telles que formulées sont trop vagues.

Le système de sanctionsnégatives est peu efficace car sa mise en oeuvre requiert la quasi-unanimité au sein du C.M. Celui-ci étant une instance politique parce que réunissant les représentants des Etats, un vote à la majorité des 2/3 devient problématique. Par ailleurs, le fait que la commission soit toujours obligée d'attendre l'intervention du C.M pour la mise en application d'une sanction est un réel handicap. Le mieux serait d'initier un processus de déclenchement automatique des sanctions109(*) qui permettrait à la commission d'agir sans ambages.

Le rôle même de la commission pourrait être plus renforcé en lui permettant de déclencher automatiquement la procédure de rectification, de demander à l'Etat les raisons pour lesquelles les critères n'ont pas été respectés, de l'appuyer dans l'élaboration du programme d'ajustement et, enfin, d'appliquer elle-même les sanctions lorsque les mesures contenues dans le programme d'ajustement n'ont pas été respectées. Il s'agit d'une procédure simple qui garantit une communication permanente entre l'Etat concerné et la Commission. En plus, elle permet la célérité dans les prises de décision.

Les sanctions positives, quant à elles, n'incitent pas trop à une bonne gestion car elles sont floues. Il reste que l'U.E.M.O.A promet un accès prioritaire à ses ressources ; ce que ne prévoitpas la C.E.M.A.C. Seulement, l'U.E.M.O.A étant une organisation à structure d'association et fonctionnant donc sur la base de contribution des Etats membres, comment pourrait-elle gratifier les Etats ?

Certains experts ont tenté d'apporter des solutions à ces problématiques. Dans son rapport sur le renforcement de la S.M au sein de la C.E.M.A.C, la FERDI a émis des propositions de réforme. Trois types de sanctions ont été dégagés :

- Les premières sanctions pourraient être des amendes. Toutefois, elles ne seront pas prélevées directement des finances des Etats. Une telle situation pourrait, en effet, accentuer le déficit public. La meilleure solution est de procéder à un prélèvement à la source de leur part de bénéfice que leur verse la BEAC (CEMAC) ou la BCEAO (UEMOA). Dans un premier temps, le montant prélevé va être gelé. Si l'Etat redresse ses finances au bout d'un délai raisonnable alors la somme lui est remboursée. Mais dans le cas contraire, il la perd définitivement. Cependant, ce mécanisme doit être utilisé modérément car il ne faut pas qu'il accentue les difficultés de respect de la convergence. Parallèlement, des fonds peuvent être constitués à partir des amendes prélevées. Ils serviront à apporter un appui financier aux Etats qui produisent des efforts pour atteindre la convergence.

- Un autre mécanisme de sanction pourrait être mis en oeuvre en associant les institutions régionales comme la COBAC. Les banques commerciales fonctionnent sur la base d'un ratio entre fonds propres et actifs risqués. La créance publique est considérée comme un actif risqué lorsque l'Etat n'a pas respecté les critères de convergence. Ce qui pousserait la banque à consolider son fonds propre et à exiger plus de financement de la part de l'Etat.

- La communication est certes un mode de sanction déjà prévu par les organisations, mais son utilisation devrait être revue. La communication, si elle est bien mise en oeuvre, produira d'importants effets notamment au niveau des marchés financiers. Ne pas respecter les critères de convergence est signe de mauvaise gestion. Par conséquent, les créanciers dans les marchés financiers seront plus exigeants envers les Etats concernés. Ceux-ci se verront défavorisés. Mais pour que la communication ait une telle utilité, il faut qu'elle soit « institutionnalisée ». Dans ce cas de figure, la FERDI propose de dédier chaque année un C.M à la surveillance multilatérale, d'encourager la Commission à effectuer des conférences de presse et dénoncer les Etats défaillants, de publier sur le site internet des organisations un tableau de bord sur l'état de la convergence et le degré de respect des critères par chaque Etat.

Un autre aspect, non moins important, est celui du recours juridictionnel qui pourrait pousser les Etats à respecter les critères de convergence. L'article 4 du traité de la CEMAC prévoit qu' «  en cas de violation par un Etat aux obligations qui lui incombent, la cour de justice peut être saisie en vue de prononcer les sanctions dont le régime sera défini par des textes spécifiques. ». Une telle perspective est aussi prévue à l'article 6 du Protocole Additionnel n°1 relatif aux organes de contrôle de l'UEMOA. Il s'agit d'un recours en manquement qui peut être formulé soit par la commission soit par un Etat membre. Cependant, la force exécutoire des décisions des juges communautaires est souvent mise en mal par les Etats. Certes, il est prévu une intervention de la CCEG afin de pousser l'Etat fautif à exécuter la décision de justice. Mais, il peut arriver que ce soit la CCEG elle-même qui va à l'encontre de la position du juge110(*). Ce qui prouve que l'autorité du juge communautaire n'est pas absolue.

Il est clair que les dispositifs communautaires tels que formulés contiennent en eux-mêmes les raisons de leur inapplicabilité. Ceci est d'autant plus vrai qu'il arrive que les critères de S.M bloque la mise en oeuvre de politiques contra cycliques dans les Etats et retardent encore plus la convergence.

Paragraphe 2 : Une convergence ralentie par l'effet pro-cyclique de la surveillance multilatérale :

Certains auteurs estiment que les règles de l'UEMOA et de la CEMAC encouragent la pro cyclicité des politiques budgétaires et donc une mauvaise maîtrise des chocs économiques (A). Mais avec la révision des critères de S.M, il est accordé plus de marge de manoeuvre aux Etats dans leurs politiques budgétaires (B).

A- L'absence de marge de manoeuvre budgétaire dans un contexte pro cyclique :

Une politique budgétaire est dite pro cyclique lorsque, durant une période de haute conjoncture, elle favorise une politique expansionniste (hausse des dépenses et baisse des impôts) et, durant une période de basse conjoncture, provoque une politique restrictive (baisse des dépenses et hausse des impôts). La majeure partie des pays en développement se trouve dans cette situation.

A côté, il existe ce qu'on appelle une politique contra cyclique qui produit des effets inverses. Par exemple, en période de basse conjoncture, la contra cyclicité voudrait que les taux d'imposition soient diminués dans le but de soulager les ménages et de ne pas affecter leur pouvoir d'achat. Les dépenses publiques seront augmentées afin de relancer l'économie privée, de faire face au chômage et à toute autre problématique sociale.

Entre les deux, se trouve la politique acyclique c'est-à-dire que les dépenses restent inchangées en période de récession. Pour certains les politiques budgétaires de la C.E.M.A.C sont acycliques.111(*)

Jusque-là, la convergence n'a pas été atteinte car le critère du solde budgétaire tel que posé ne permettait pas aux Etats membres de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C de faire face aux chocs économiques. En effet, le solde devait toujours être nul ou positif. Ce qui poussait les Etats de la C.E.M.A.C à combler le gap financier par un emprunt et à accentuer ainsi leurs arriérés. C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles le critère de la non-accumulation des arriérés a été revalorisé au sein de la C.E.M.A.C. La diminution des dépenses en période de récession est d'autant plus difficile du fait de l'action des lobbies. Certaines dépenses, étant considérées comme des acquis par les bénéficiaires, deviennent intouchables. Il s'agit pour la plupart des exonérations et des dépenses fiscales.

Le critère du solde budgétaire n'était respecté que pendant les périodes de haute conjoncture et ce n'était pas dû à une politique budgétaire discrétionnaire mais aux stabilisateurs automatiques.

La pro cyclicité est encouragée par la forte instabilité des recettes qui est plus perceptible dans la C.E.M.A.C que dans l'U.E.M.O.A.

Le défi majeur des pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C est d'allier deux objectifs à priori opposés : atteindre une croissance économique en réduisant la pauvreté et assurer une stabilité macroéconomique. La réduction de la pauvreté passe par des projets d'investissement. Or, l'investissement n'est possible que lorsqu'une épargne a été préalablement effectuée. Cependant, il s'est avéré que dans les pays en développement la faiblesse de l'épargne privée est une règle générale. Il incombe donc aux Etats de relever le niveau de l'épargne publique. Cette situation ne peut être obtenue que si la S.M est souple.

Accorder une marge de manoeuvre budgétaire aux pays de la CEMAC et de l'UEMOA, c'est leur permettre de faire face à l'insuffisance des infrastructures nécessaires pour une bonne croissance. La politique budgétaire est le seul instrument qui permet à l'Etat de faire face à certains chocs.Certains auteurs112(*) ont pu constater qu'entre 2000 et 2006, le critère du solde budgétaire n'était pas respecté par les Etats membres de l'UEMOA à l'exception du Bénin (de 2000 à 2002) et du Togo (de 2000 à 2006). Mais, lorsque les soldes budgétaires sont corrigés des appuis financiers provenant de l'IPPTE, ils deviennent tous positifs à quelques exceptions près. Cela signifie que les aides des bailleurs de fonds poussent à dépenser plus. Et sans ces aides, les Etats n'ont pas tendance à effectuer des dépenses en capital. Les Etats sont en fait incapables de s'octroyer eux-mêmes les recettes leur permettant de financer la croissance économique.

Les critères tels qu'ils étaient formulés, enfermaient les Etats dans un carcan institutionnel. Ce qui retardait encore plus la convergence car les Etats ne pouvaient corriger les effets de la basse conjoncture sur les économies nationales.

B- Une probable contra cyclicité avec les nouveaux critères de surveillance multilatérale :

Depuis Keynes (1936), il est admis que la politique budgétaire doit être contra cyclique afin de jouer un rôle stabilisateur sur l'activité économique.

La contra cyclicité ne peut être obtenue que lorsque l'Etat peut moduler librement ses orientations budgétaires en fonction de la conjoncture économique. En effet, la contra cyclicité est différente selon qu'elle résulte d'une politique discrétionnaire du gouvernement ou de l'évolution normale de la conjoncture. Dans la plupart des études menées par des spécialistes, il est avéré que le solde budgétaire des Etats membres de la CEMAC n'est positif que lorsque le marché du pétrole est favorable. Par contre, il devient négatif dès que les prix du pétrole volent en éclats. Ce qui montre que les politiques nationales, si elles existent, ne produisent pas un grand effet sur la situation économique.

Avec la révision des critères de convergence, les Etats de la CEMAC, plus vulnérables aux chocs exogènes, ont prévu une règle d'épargne. Une épargne de 20% sera effectuée sur les ressources pétrolières. Cela permettrait de faire face aux chocs dus à la volatilité des prix du pétrole. Toutefois, il ne s'agit que d'approches théoriques. L'application du nouveau dispositif de S.M est prévue pour 2017. Par conséquent, dresser un bilan devient un exercice prématuré. Tout de même, demeure la question de la Centrafrique qui est l'unique pétrolifère de la CEMAC.

Enfin, les difficultés d'application des règles communautaires relèvent de facteurs endogènes aux Etats mais aussi de facteurs exogènes. Il est clair donc que de réels progrès doivent être effectués dans ce sens au risque d'endurer les mêmes problèmes tenant au respect des critères d'endettement. Il a aussi été remarqué que les deux organisations sont dépourvues de modèles propres.

Section 2 : Des cadres communautaires dépourvus de modèles propres :

Dépourvues de modèles, l'UEMOA et la CEMAC ont tendance à axer leurs interventions sur le mimétisme (paragraphe 1). En même temps, il est légitime que les bailleurs de fonds puissent être en mesure d'exiger une assurance dans la gestion des prêts qu'ils octroient aux Etats. Et dans ce cas de figures, ils prennent des mesures et en exigent l'application (paragraphe 2).

Paragraphe 1 : Des dispositifs communautaires axés sur le mimétisme :

A défaut de modèles authentiques, l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C reproduisent d'une manière mécanique les pratiques extérieures (A). De même, la coordination entre les instances communautaires et les Etats devrait être renforcée (B).

A- La reproduction mécanique de modèles importés :

L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C sont dépourvues d'un modèle propre à chacune.Les organisations portent en elles-mêmes les difficultés d'internalisation de leurs règles par les Etats membres. C'est pourquoi les règles communautaires sont incessamment révisées et cela ne manque pas de se répercuter sur les Etats. Nous avions souligné tantôt l'exemple du Togo qui n'a commencé à appliquer les premières directives budgétaires et comptables de l'UEMOA qu'en 2008. Un an plus tard, l'UEMOA adopte de nouvelles directives qui comportent des changements radicaux (passage de la logique de moyens à la logique de résultats). Le pays sera donc obligé, une fois de plus, de modifier son cadre juridique et institutionnel. Et cela nécessite du temps, des fonds et une formation adéquate. C'est le manque de modèles qui fait que les Unions modifient sans cesse leurs dispositifs. Elles valsent et l'absence d'une stabilité institutionnelle se répercute sur les Etats.

Déjà, dans un article, un auteur113(*) a constaté que les directives peuvent même être en contradiction avec les pratiques des Etats, non pas parce que ceux-ci violent les dispositifs communautaires mais tout simplement du fait que les organisations communautaires ne prennent pas les bonnes décisions de réformes. Il a donné l'exemple de la première directive de l'U.E.M.O.A sur les lois de finances114(*). Celle-ci s'était fortement inspirée de l'ordonnance du 02 janvier 1959 de la France portant loi organique relative aux lois de finances. Avant même la naissance de l'U.E.M.O.A, nombre d'Etats s'étaient inspirés de cette ordonnance. Mais cela pouvait se comprendre parce que les instruments nationaux qui existaient dans les Etats avant l'Union économique étaient très anciens. Les Etats venaient d'accéder à l'indépendance et il leur fallait combler le vide juridique auquel ils faisaient face. Par contre, ce qui ne peut pas être expliqué c'est le fait que l'U.E.M.O.A ait « harmonisé le mimétisme » au sein des Etats membres au moment où en France des études et travaux sont menés pour abroger l'ordonnance et mettre en place un dispositif moderne, plus compatible avec la nouvelle gestion publique. L'U.E.M.O.A a donc introduit la logique de gestion axée sur les moyens alors que depuis les années 90, on est en train de réfléchir sur comment évaluer les résultats de l'action publique.

La directive est devenue doncune contrainte importante pour certains Etats de l'UEMOA qui avaient commencé à expérimenter la gestion axée sur les résultats. Les 26 et 27 septembre 2006 à Ouagadougou, des experts du Burkina Faso, du Bénin et du Mali, avec l'appui de la coopération allemande pour le développement, se sont regroupés dans le cadre d'un atelier sous régional dans le but d'évaluer l'ensemble des contraintes que pouvaient présenter les instruments communautaires.

Quant à la C.E.M.A.C, elle se réfère à l'U.E.M.O.A. C'est pourquoi, les premières directives qu'elle a adoptées en 2008 n'ont pas été viables. Elles ont reproduit les mêmes erreurs. Elles n'ont même pas connu un début d'application. Elles ont donc été rapidement modifiées en 2011.

Si l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.Cs'attachent autant au modèle français c'est parce que « dans la plupart des analyses, la recherche des adaptations et améliorations possibles se trouve sous-tendue (...) par la référence implicite et l'adhésion au modèle français, avec la conviction que les dysfonctionnements constatés dans les pays de la zone trouvent leur cause dans les écarts ou déviations par rapport à ce modèle non pas dans l'inadaptation de ce dernier à la réalité africaine. »115(*)

Il n'est pas prohibé de s'inspirer des pratiques extérieures. Mais un modèle importé ne peut être greffé tel quel dans un système. Il faut qu'il soit remodelé et façonné en fonction des réalités des Etats. Au cas contraire, il est voué à l'inapplicabilité. Ce décalage entre les dispositifs communautaires et les réalités culturelles des Etats encouragent la naissance de pratiques qui dérogent aux règles générales.

B-Une communication insuffisante entre les Unions et les Etats :

L'absence de modèle se trouve aussi dans le fait qu'il n'y a pas de communication suffisante entre les instances communautaires et les Etats censés mettre en oeuvre les réformes.Une communication efficace devrait normalement permettre une application harmonieuse des dispositifs communautaire au niveau des sphères nationales.

Dans un rapport sur les méthodes de calcul du solde budgétaire telles que prévus par les premiers dispositifs de S.M, il a été constaté que les Etats n'appréhendaient pas de la même façon le déficit budgétaire.Pour le Togo, le déficit budgétaire résultait de la différence entre la totalité des recettes publiques et la totalité des dépenses. Pour le Cameroun, le calcul est effectué en faisant la différence entre la totalité des recettes publiques encaissées (y compris les prêts et les dons) et la totalité des dépenses publiques ordonnancées. Il existe autant de formules que d'Etats116(*). La communication n'est pas suffisamment développée dans la mesure où même les nouveaux dispositifs de S.M sont difficilement accessibles.

Peut-être que c'est conscientes des difficultés que peut engendrer le manque de communication que les deux Unions adoptent maintenant des guides didactiques. Chaque guide se rapporte à une directive et l'explique article après article afin que l'interprétation soit uniforme dans tous les Etats.

Par ailleurs, l'idée a été émise de créer un Observatoire des finances publiques africaines117(*). Le but serait de lui permettre de dénoncer les mauvaises gestions. Partant de là, l'Observatoire pourrait répertorier et catégoriser les comportements des gouvernements face à la gestion financière. Une telle perspective permettrait à l'U.E.M.O.A et à la C.E.M.A.C de comprendre les attitudes des Etats et de prendre des décisions allant dans le sens d'un redressement efficace. Et même sans cela, les informations recueillies par l'Observatoire pourraient faciliter les études d'impact qui sont des préalables nécessaires pour toute prise de décision. La communication entre les Etats et les organes communautaires n'en serait que plus fluide.

Enfin, la norme communautaire doit être modulable et adaptable à la réalité de chaque Etat.

Si les deux organisations n'ont pas de modèles qui leur sont propres c'est aussi parce que les bailleurs de fonds ne leur en donnent pas l'occasion.

Paragraphe 2 : Une place importante occupée par les bailleurs de fonds au sein des deux Unions :

Le processus d'intégration des deux Unions a toujours été encouragé de l'extérieur (A). En plus, les conditionnalités sont adoptées sans une véritable prise en compte des réalités des Etats (B).

A- Un processus d'intégration encouragé de l'extérieur :

Le fait que l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C n'aient pas de modèles qui leur sont propres ne leur est pas imputable à elles seules. On a vu que mis à part les Etats membres, le long processus d'intégration de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C a toujours fait participer d'autres acteurs. Ces acteurs ne sont pas signataires des conventions d'intégration mais exercent des influences certaines sur les décisions prises. Il s'agit, en premier lieu, de la France qui, depuis les indépendances, accompagnent les Etats dont la plupart sont des anciennes colonies. S'y ajoute le fait que le Franc CFA arriméà l'Euro.

En second lieu, il y a les institutions de Breton Woods qui occupent une place de plus en plus importante depuis la grande crise des années 80.

Enfin, l'Union Européenne est un grand bailleur fonds à travers la coopération avec les Etats ACP (Afrique-Caraïbe-Pacifique).

Des coïncidences ont été remarquées entre la construction européenne et celle des deux Unions. Le traité de Maastricht de 1992 prévoit le respect de critères de convergence pour la préparation de l'Union monétaire. Les Etats devaient se soumettre aux critères à partir du 1er janvier 1994. Le même mois, l'Union Monétaire Ouest Africaine est complétée d'une union économique. Quelques temps après, la C.E.M.A.C est créée. Celle-ci n'a pas hésité à reconnaître dans son préambule que les Etats doivent se conformer à « la nouvelle dynamique en cours dans la zone Franc, au demeurant nécessaire au regard des mutations et du recentrage des stratégies de coopération et de développement observés en Afrique et sur d'autres continents dont l'Europe. ».

On reprochait aussi à l'U.E.M.O.A. de s'être inspirée des critères de convergence définis dans le traité d'Amsterdam de 1997 qui a mis sur pied un Pacte de Stabilité et de Croissance. En 1999, l'U.E.M.O.A se dote d'un P.C.S.C.S en reprenant notamment ceux relatifs au déficit public. Le traité de Maastricht prévoit, en effet, un déficit public de 3 % du PIB et un encours d'endettement qui ne doit pas dépasser 60% du PIB et pour l'U.E.M.O.A c'était un solde budgétaire positif ou nul et un endettement qui devait être inférieur à 70% du PIB. LA C.E.M.A.C, comme toujours, a suivi les pas de l'U.E.M.O.A. La ressemblance est plus frappante maintenant avec le nouveau P.C.S.C.S vu que les Etats de l'U.E.M.O.A peuvent avoir un déficit de 3% comme ceux de l'Union Européenne.

Dès lors, l'intégration semble plus être un phénomène voulu plutôt que subi. Les deux unions sont influencées par les incessantes interventions des bailleurs de fonds

Il est légitime que les bailleurs de fonds se soucient de l'efficacité des aides octroyées. Elle est d'ailleurs devenue une conditionnalité pour l'octroi d'aide. Mais les conditionnalités sont souvent adoptées en marge des réalités des Etats.

B-Des « conditionnalités » adoptées en marge des réalités des Etats :

Les bailleurs de fonds ont raison de vouloir s'assurer que les fonds octroyés sont utilisés d'une manière efficace. C'est pourquoi les aides sont allouées moyennant le respect de conditions de bonne gouvernance.

Les nouvelles normes comptables appelées IPSAS sont élaborées par le Conseil International des Normes Comptables du secteur public (IPSASB). Le conseil a pour objectif d'élaborer des normes comptables qui auront vocation à s'appliquer à l'ensemble des secteurs publics du monde. Les réformes de comptabilité qu'ont introduites l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C ont été développées par ce conseil. Il est composé de dix-huit membres et seize conseillers techniques. Il n'y a aucun membre ou conseiller qui vient d'un Etat des deux Unions. Les seuls Etats africains représentés sont l'Afrique du Sud et le Nigéria. Dans ces conditions, l'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C peineront à intégrer les règles de bonne gestion au sein des Etats parce qu'elles en ignorent les mécanismes. Et même sans cela, il aurait été pertinent qu'il y ait au moins un représentant capable de faire comprendre toutes les difficultés auxquelles les Etats font face.

Par ailleurs, du fait que les Etats peinent à intégrer les règles communautaires de bonne gestion, certains bailleurs de fond préfèrent déroger au système et mettre en place des procédures dérogatoires. Cela provoque l'émergence de pratiques périphériques parallèlement à la règlementation en vigueur. Beaucoup de cas ont été relevés118(*). Au Cameroun et en Côte d'Ivoire, il existe des procédures différentes en fonction des bailleurs de fonds. Et « tant que les bailleurs de fonds établiront des conventions dérogeant expressément aux règles du droit budgétaire et de la comptabilité publique, il sera difficile de contraindre les pays concernés à utiliser le circuit orthodoxe des finances publiques. »119(*)

Conclusion :

Les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C sont obligés de s'endetter ne serait-ce que pour investir. La croissance économique dépend du développement social, infrastructurel... Et il s'avère que dans ces pays l'initiative privée n'est pas aussi importante. Il appartient donc aux Etats de prendre en charge les initiatives de croissance économique. En même temps, leurs missions de relance de l'économie ne devraient pas mettre en péril l'état de leurs finances. Les Etats se trouvent donc entre le marteau et l'enclume.

Par ailleurs, du fait que les recettes nationales n'existent pas en quantité suffisante, ils sont obligés d'emprunter sur le marché international. Cette situation comporte des risques certains. La crise des dettes publiques des années 80 est encore un vif souvenir.

Par conséquent, pour sécuriser leurs démarches, les Etats se sont réunis pour former des Unions, instaurer une surveillance multilatérale afin de pouvoir veiller sur la bonne tenue de leurs finances publiques. Des règles de convergence ont été posées depuis 1994 mais jusqu'à présent la convergence n'a pas été atteinte.

Les règles de S.M étaient-elles pertinentes ? Elles ont été critiquées moult fois du fait de leur manque de réalisme. Elles ont été jugées incompatibles avec les réalités des Etats. L'U.E.M.O.A et la C.E.M.A.C, qui se basaient sur les mêmes critères de convergence, ont donc décidé de les revoir. Chacune a désormais des règles propres présumées plus adéquates avec les particularités des Etats. Mais les réformes sont très récentes. Leur pertinence ne pourra être appréciée qu'après une mise en oeuvre effective.

Pour renforcer la sécurité dans le processus d'endettement, un dispositif, qui impose aux Etats de mettre en place une politique d'endettement public, a été adopté. Il a conduit à la création d'organes ad-hoc mais aussi à une clarification de la procédure d'endettement dans chaque Etat.

Le changement ne devrait, toutefois, pas se limiter à des dispositifs spécifiques. La maîtrise des dépenses publiques est un impératif pour les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C. Et cela ne peut être effectué qu'à la condition de respecter le circuit orthodoxe des procédures budgétaire et comptable. Dans ce sillage, les deux Unions ont adopté des directives y relatives. Le but est de s'assurer de la saine gestion des finances publiques. Désormais, les Etats sont tenus de se fixer des objectifs, de rendre limpide la procédure budgétaire et de fiabiliser leurs comptabilités afin que toutes les données financières puissent être enregistrées.

En vérité ces nouvelles règles de gestion résultent des exigences des bailleurs de fonds. Les bailleurs de fonds se soucient de la soutenabilité des finances des Etats débiteurs. Il y va de leur intérêt. Ils posent donc des conditionnalités pour pouvoir bénéficier des prêts qu'ils octroient. Ils exigent une transparence dans la gestion des deniers publics. Par l'introduction de la gestion axée sur les résultats, les Etats seront obligés de justifier l'utilisation qui a été faite des fonds prêtés.

Cependant, les règles de nouvelle gouvernance financière sont insérées difficilement dans la gestion interne des Etats. Les problèmes sont divers et se présentent à plusieurs niveaux. Si ce ne sont pas des blocages politiques, ce sont des mouvements conservateurs au sein de l'administration qui constituent des freins à la mise en oeuvre de la nouvelle gestion publique. Une difficulté plus sérieuse est celle de la mise en oeuvre des réformes par des méthodes appropriées.

D'autres difficultés, qui proviennent des Unions, ont aussi été décelées. Les dispositifs communautaires présentent le défaut d'être peu contraignants. Leur pertinence est discutable car ils sont pris en marge des réalités des Etats. Leurs formulations les rendent inapplicables et donc la convergence n'en est que plus ralentie.

Les derniers acteurs, les bailleurs de fonds, peuvent aussi constituer une entrave à la convergence. La volonté de moderniser les Etats débiteurs est indéniable. Mais les conditionnalités qui accompagnent les prêts ne sont pas toujours à la portée des Etats pour la bonne et simple raison qu'elles méconnaissent les cultures des Etats destinataires.

Grosso modo, une symbiose entre les actions des différents acteurs est un impératif. La concertation doit être renforcée. Une gestion réussie de la dette publique profitera aux Etats, aux Unions et aux bailleurs de fonds.

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Traité révisé de la Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale du 25 juin 2008

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www.finances.gouv.td

www.afdb.org

www.cemac.int

http://www.dgtcfm.cm

www.dette.ga

www.finances.gouv.ci

www.dpee.sn

Table des matières

Sommaire 5

Principales Abréviations : 8

Introduction : 10

Première Partie : Un double dispositif communautaire de gestion de la dette publique : 20

Chapitre I : la création d'une surveillance multilatérale au sein des deux Unions : 20

Section 1 : L'organisation communautaire de la surveillance multilatérale : 22

Paragraphe 1 : La récente évolution des critères de convergence utilisés au sein des deux Unions : 22

A- De l'utilisation de critères similaires au sein des deux Organisations: 22

1- L'existence d'une différence hiérarchique entre critères et indicateurs en matière de surveillance multilatérale : 22

2- Des critères anciens à peine respectés : 23

B- A l'application de nouveaux critères désormais distincts : 25

Paragraphe 2 : Les organes communautaires chargés de l'exécution de la surveillance multilatérale : 27

A- Le rôle prépondérant de la Commission dans la procédure de surveillance multilatérale: 28

1- La commission, un organe chargé de la mise en oeuvre des actions communautaires : 28

2- La rédaction de rapports périodiques sur l'état de la convergence : 29

B - Une multitude d'acteurs intervenant dans la surveillance multilatérale : 30

Section 2 : La réception des règles de surveillance multilatérale par les Etats : 32

Paragraphe 1 : L'établissement de programmes pluriannuels de convergence par les Etats : 32

A- Un contenu des programmes prédéfinis par les dispositifs communautaires : 32

B- Des programmes contrôlés par les organes communautaires : 34

Paragraphe 2 : La création dans chaque Etat d'un organe chargé de la surveillance multilatérale 35

A- Le statut des organes nationaux : 35

1- La composition des organes nationaux chargés de la S.M : 35

2- Les missions confiées aux organes nationaux : 36

B- Les rapports entre les organes nationaux et ceux communautaires : 38

Chapitre II : La définition d'un cadre de référence de la politique d'endettement : 39

Section 1 : L'obligation des Etats de mettre en place une politique d'endettement : 40

Paragraphe 1 : la définition d'une politique d'endettement pour un cadre de gestion optimale de la dette : 40

A- La soutenabilité, un objectif clé d'une politique d'endettement : 41

B- la prévention des risques, un moyen efficace d'assurer la soutenabilité des finances des Etats : 43

Paragraphe 2 : l'élaboration d'un document annuel de stratégie d'endettement : 44

A- Le contenu du document de stratégie d'endettement : 44

B- L'annexion du document à la loi de finances initiale : 45

Section 2 : La mise en place d'un organe de coordination dans chaque Etat : 46

Paragraphe 1 : L'organisation des structures de coordination : 47

A- Une composition tripartite des structures de coordination : 47

B- Une organisation complexe dans certains Etats : 48

Paragraphe 2 : Des Missions spécialement axées sur la gestion de la dette : 49

A- Un rôle central dans la contraction des dettes : 49

B- La rédaction de documents relatifs à la gestion la dette publique : 50

Deuxième partie : Une évolution lente vers la convergence en matière de gestion de la dette 53

Chapitre I : Une adaptation difficile des Etats aux conditions de bonne gouvernance financière : 54

Section 1 : la transparence, un pilier essentiel de la gestion de la dette des Etats : 55

Paragraphe 1 : la transparence dans la procédure budgétaire : 56

A- Une revalorisation du Parlement pour un contrôle démocratique des finances: 56

B- La mise à disposition des informations financières au public : 58

Paragraphe 2 : la nécessaire sécurisation des données comptables : 60

A- La modernisation de la comptabilité publique conformément aux normes internationales : 60

B- Une comptabilité moderne assortie d'un contrôle efficace des comptes publics : 63

Section 2 : Les difficultés des Etats à internaliser la nouvelle culture financière : 66

Paragraphe 1 : Les problèmes d'ordre politico administratif : 66

A- Les blocages produits par la tradition politique des Etats : 66

B- Une organisation complexe et inefficace des administrations : 69

Paragraphe 2 : Des difficultés techniques liées à l'absence de méthodes: 71

Chapitre II : une gestion de la dette rendue difficile par des facteurs exogènes aux Etats : 72

Section 1 : Une convergence lente en matière de gestion de la dette du fait des carences des instruments communautaires : 73

Paragraphe 1 : La difficile application des sanctions communautaires : 73

A- L'existence de vagues énoncés de sanctions positives et négatives : 73

B- Une application des sanctions freinée par plusieurs facteurs : 75

Paragraphe 2 : Une convergence ralentie par l'effet pro-cyclique de la surveillance multilatérale : 77

A- L'absence de marge de manoeuvre budgétaire dans un contexte pro cyclique : 77

B- Une probable contra cyclicité avec les nouveaux critères de surveillance multilatérale : 79

Section 2 : Des cadres communautaires dépourvus de modèles propres : 80

Paragraphe 1 : Des dispositifs communautaires axés sur le mimétisme : 80

A- La reproduction mécanique de modèles importés : 80

B-Une communication insuffisante entre les Unions et les Etats : 82

Paragraphe 2 : Une place importante occupée par les bailleurs de fonds au sein des deux Unions : 83

A- Un processus d'intégration encouragé de l'extérieur : 83

B-Des « conditionnalités » adoptées en marge des réalités des Etats : 84

Conclusion : 86

Bibliographie : 88

Table des matières 96

* 1GUEYE Thiamba, « L'incidence de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africaine sur les finances publiques de ses Etats membres », Panthéon-Assas, Avril 2011, p.14

* 2 Elles regroupent 14 des 23 pays d'Afrique subsaharienne francophone ; Elles représentent à elles seules plus de la moitié de la superficie de la zone.

* 3Il y a eu, en effet, des expériences d'intégration douanière et économique avant la création de l'U.E.M.O.A. Le 09 juin 1959, une première convention créant l'Union Douanière de l'Afrique Occidentale est signée. Elle deviendra, en 1966, l'Union Douanière des Etats d'Afrique de l'Ouest (U.D.E.A.O). Le terme « Etats » était devenu déterminant à ce moment-là pour marquer l'accession à la souveraineté. Dans le désir de renforcer l'intégration, le 17 avril 1973 la Communauté Economique de l'Afrique de l'Ouest est fondée grâce à un traité signé à Abidjan par six Etats. La CEAO sera dissoute au moment de la création de l'UEMOA. Il existe également une autre organisation appelée Communauté Economique des Etats de l'Afrique Occidentale qui a été fondée le 28 mai 1975 à Lagos

* 4Il s'agissait du Dahomey (actuel Bénin), du Mali, du Sénégal, de la Haute-Volta (actuel Burkina Faso), de la Côte d'Ivoire, du Niger, de la Mauritanie et du Togo. La Mauritanie a quitté l'Union en 1973 et a créé sa propre monnaie. Le Mali avait fait pareil mais a ensuite réintégré l'Union.

* 5 En Juin 1959 est signée la convention portant création de l'UDE par quatre Etats membres. En 1961, le Cameroun rejoint l'organisation. Le 8 mars 1964 à Brazzaville est signé l'accord portant création de l'UDEAC. Et la Guinée Equatoriale adhère à l'UDEAC en 1983.

* 6 Ce sont des termes journalistiques que les médias utilisent lorsqu'ils comparent ces deux organisations.

* 7 Les organisations d'intégration sont généralement distinguées des organisations de coopération. Celles-ci poursuivent des intérêts communs aux Etats membres mais chaque Etat conserve sa liberté d'action et de décision

* 8 2ème alinéa du préambule du traité de la C.E.M.A.C ; 4ème alinéa du préambule du traité de L'U.E.M.O.A

* 9 La zone Franc regroupe, en plus des Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, les îles Comores et la France.

* 10 La Guinée Equatoriale était une colonie espagnole et la Guinée Bissau était une colonie portugaise. Elles sont donc lusophones. Le Cameroun et le Togo étaient des colonies allemandes avant de devenir des protectorats français.

* 11Tous les pays de la C.E.M.A.C, excepté la Centrafrique, sont pétrolifères. Les ressources pétrolières représentent plus de 50% des recettes budgétaires des Etats. Et selon le rapport du FMI de 2016, les recettes d'exportations pétrolières ont baissé de 32% par rapport à 2015

* 12 Dès le XVIème siècle, des cités italiennes comme Florence inventent la dette publique pour financer les incessantes guerres. En France, à partir de 1522, le Roi François Ier reproduit cette technique.

* 13On peut citer par exemple John Maynard Keynes qui, après la crise de 1929, plaidait en faveur d'un endettement de l'Etat pour relancer l'économie nationale. En 1974, l'économiste Barro s'est opposé à sa thèse. Celui-ci a estimé que les agents économiques sont capables d'anticiper les effets d'une augmentation des dépenses publiques par l'endettement de l'Etat. Dès lors, lorsque l'Etat envisagera d'augmenter les impôts pour rembourser les dettes, les agents économiques auront déjà épargné leur argent et l'Etat sera donc faussé dans ses prévisions.

* 14 Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest, « Rapport sur la situation de la pauvreté dans les pays de l'U.E.M.O.A », 2012, pp.3

* 15Un bailleur de fonds bilatéral est généralement une personne morale à savoir l'Etat qui prête à un autre Etat. Il existe beaucoup de bailleurs de fonds bilatéraux. Ce sont la plus part du temps les Etats du Nord. on peut citer entre autres la France, l'Allemagne, le Canada, le Japon...

* 16 Les bailleurs de fonds multilatéraux sont des organisations internationales qui regroupent plusieurs Etats et qui fonctionnent sur la base d'un capital financé par ces Etats par le biais de quotes-parts. Les principaux bailleurs de fonds multilatéraux sont la Banque Africaine de Développement (BAD) et les institutions de Breton Woods à savoir le FMI et la Banque Mondiale. La BAD a été créée le 04 Août 1963. Elle regroupe 80 Etats membres dont 54 sont africains. Au départ, elle n'était réservée que pour les Etats africains. Mais elle a dû accepter l'adhésion de pays occidentaux car elle était en manque de ressources.Au sein de la Banque Mondiale, il y a une structure appelée Association Internationale de Développement ou IDA. En 2016, l'Association a consacré 50% de ses ressources à 39 pays africains dont ceux l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C (sauf Cameroun et Gabon). Ces informations sont disponibles sur http://ida.banquemondiale.org/ . Enfin, l'Union Européenne est liée aux pays africains en général par l'Accord de l'Afrique-Caraïbe-Pacifique.

* 17 L'IPPTE a été lancée en 1996 par le FMI et la Banque Mondiale. Pour être admissibles, les pays devaient s'engager à lutter contre la pauvreté. Les pays parvenus au bout du processus de l'IPPTE pouvaient aussi bénéficier de l'IADM. Les dettes des Etats ont été diminuées à hauteur de 90%. Parmi les Etats de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C, le Tchad est le dernier à y avoir bénéficié. Initiée en 2005, l'IADM est une continuité de l'IPPTE. Les pays qui ont atteint le point d'achèvement dans le cadre de l'IPPTE, ont bénéficié d'une annulation intégrale de leurs dettes au titre de l'IADM. En septembre 2012, tous les pays de l'U.E.M.O.A et de la C.E.M.A.C ont pu en bénéficier sauf le Tchad qui était admissible. Ces deux initiatives ont permis d'alléger les dettes multilatérales des Etats. Pour les dettes bilatérales, il y a eu principalement le Club de Paris. Composé de 21 Etats membres créanciers, le Club a participé à l'IPPTE. En 2015, il a accordé au Tchad l'annulation totale de ses dettes dans le cadre de l'IPPTE.

* 18 Les Etats membres de la C.E.M.A.C se regroupent rapidement à N'diamena le 16 mars et un texte fondateur composé de sept articles est rédigé. Ceci témoigne de l'empressement durant la création de C.E.M.A.C

* 19 Article 4 du traité révisé de l'U.E.M.O.A

* 20Règlement n°12/07-UEAC-186-CM-15 du 19 mars 2007 portant cadre de référence de la politique d'endettement public et de gestion de la dette publique dans les Etats membres de la C.E.M.A.C ;Règlement n°09/2007/CM/UEMOA du 04 juillet 2007 portant cadre de référence de la politique d'endettement public et de gestion de la dette publique dans les Etats membres de l'U.E.M.O.A

* 21Article 67 du traité de l'U.E.M.O.A ; Article 56 du traité de l'U.E.A.C

* 22Direction Générale de la Coopération Internationale et du développement, « La gestion de la dépense publique dans les pays de l'Afrique francophone subsaharienne », 2004, Etude dirigée par BOUVIER Michel

* 23 DIARRA Eloi, « Pour une Observatoire des Finances Publiques Africaines (OFIPAF) », in Afrilex, juin 2012, p.2

* 24 Le rapport est disponible en ligne sur http://news.abamako.com/documents/docs/Classement-pays-2015.pdf

* 25Il a été précédé d'un autre code adopté en 2003. Le code de 2007 a été adopté pour être en phase avec la nouvelle gestion publique c'est-à-dire la gestion axée sur les résultats. Le code est disponible en ligne : https://www.imf.org/external/np/fad/trans/fre/codef.pdf

* 26Directive n° 01/2009/CM/UEMOA du 27 mars 2009 portant code de transparence et de bonne gouvernance dans la gestion des finances publiques pour l'U.E.M.O.A; directive n°06/11-UEAC-190-CM-22 portant code de transparence et de bonne gouvernance de la gestion des finances publiques pour la C.E.M.A.C

* 27 LAMBERT Alain, « Quel bilan 10 ans après », in RFFP n°136, p.20

* 28 Articles 52 à 63 du traité de l'U.E.A.C et articles 63 à 75 du Traité de l'UEMOA

* 29ACTE ADDITIONNEL N° 04/99portant pacte de convergence, de stabilité, de croissance et de solidarité entre les États membres de l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)

* 30 Article 1er de la directive n°01/01/UEAC-094-CM-06

* 31 Article 6 de la directive n°01/01/UEAC/094-CM-06

* 32 Article 1er de l'ancien P.C.S.C.S

* 33 Acte additionnel  N° 04/99 portant Pacte de Convergence, de Stabilité, de Croissance et de Solidarité entre les États membres de l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (PCSCS).

* 34Samuel GUERINEAU, Sylviane Guillaumont JEANNENEY et Florian LEON, Viabilité budgétaire et renforcement du dispositif de surveillance multilatérale au sein de la CEMAC, FERDI, 15 Juillet 2015, p.8 et s.

* 35 C'est  le règlement N°10/2007/CM/UEMOA qui a déterminé ce qu'il faut entendre par « masse critique ».

* 36 18ème session ordinaire de la CCEG, « Déclaration de la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement », Cotonou, 19 Janvier 2015

* 37 Rapport du Fonds Monétaire International (FMI), « Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale », juillet 2015, p.10

* 38 Cf. articles 26 et suivants du Traité de l'UEMOA et articles 25 et suivants du Traité de la CEMAC

* 39 Article 27 du Traité révisé de l'UEMOA

* 40Sur la base de l'article 8 de ses statuts, le FMI « peut demander aux États membres de lui communiquer des renseignements qu'il juge nécessaires à la conduite de ses opérations ». Ces renseignements peuvent être les importations et exportations, la balance internationale des paiements, le revenu national. Ces renseignements servent, précise le statut, « faciliter la réalisation d'étude destinées à aider les États membres à élaborer des politiques de nature à promouvoir la réalisation des buts du Fonds ». Et comme tous les Etats de l'UEMOA et de la CEMAC sont membres du FMI, ces dispositions s'appliquent à eux. En plus de publier chaque année un rapport sur les politiques communes de l'UEMOA et de la CEMAC, le FMI effectue aussi des études sur la situation de chaque Etat. La Banque de France élabore, chaque année, un rapport sur la zone Franc. Elle ne manque pas de souligner la situation de la surveillance multilatérale.

* 41 Deux types de sanction ont été dégagées : la publication par le C.M d'un communiqué éventuellement assorti d'informations sur la situation de l'Etat membre concerné et/ou le retrait annoncé publiquement du soutien dont bénéficiait l'Etat membre concerné. D'autres sanctions peuvent aussi être prises par le C.M.

* 42 Article 60 de la convention sur l'UEAC

* 43 Article 5 de la directive n° 01/00-UEAC

* 44 Article 3 de la directive 01/00-UEAC

* 45 Rapport FERDI, « Viabilité budgétaire et renforcement du dispositif de surveillance multilatérale au sein de la CEMAC », 15 juillet 2015, p.12 et s. la FERDI a jugé que les moyens humains et financiers des CNSM sont insuffisants. D'une manière générale les cellules sont composées de hauts fonctionnaires nationaux qui ont de nombreuses tâches et qui ne participent donc aux travaux des cellules que d'une façon subsidiaire. Les missions des cellules sont donc reléguées au second plan faute de temps. Quant aux finances, les cellules ne bénéficient pas d'assez de fonds. Leurs budgets leur sont octroyés par les Etats et ils sont toujours fluctuants. Ce qui ne leur permet pas d'avoir des marges de manoeuvre financière dans le but d'encourager leurs membres par la distribution de perdiems, de gratifications par exemple. Les moyens financiers facilitent la mobilisation des membres. De même, la mission de confection des programmes pluriannuels de convergence ne leur a pas été transmise ou bien l'a été dans certains Etats mais pour un laps de temps. Il est donc nécessaire de clarifier les missions des cellules.En plus, Elles ont du mal à se procurer les données nécessaires auprès des autres services. Il s'agit d'un problème réel de coordination avec les autres directions des Etats. Ce qui rend difficiles la collecte et l'analyse des données

* 46 Article 3 de la directive n°01/16-UEAC-093-CM-30

* 47 Article 4 : le rapport intérimaire de S.M sur l'évolution de la situation économique du pays doit être déposé avant la fin du mois de septembre, le rapport d'exécution de la S.M sur l'évolution de la situation économique du pays transmis avant la fin du mois de juin de l'année en cours et le PTC transmis au plus tard le 31 mars.

* 48 Règlement n°12/07-UEAC-185-CM-15 portant cadre de référence de la politique d'endettement public et de la gestion de la dette publique dans les Etats membres de la CEMAC

* 49 Règlement n°09/2007/CM/UEMOA portant cadre de référence de la politique d'endettement public et de la gestion de la dette publique dans les Etats membres de l'UEMOA.

* 50 TAILLEFAIT Antony, « Les automatismes budgétaires à l'épreuve du politique : à propos des dettes publiques », in RFFP, n°133, p.134

* 51 GEOURJON Anne-Marie et alii, Intégration régionale pour le développement en zone Franc, Economica, 2013, p.117

* 52 DUFRENOT Gilles et alii, Politique budgétaire et dette dans les pays de l'UEMOA, Economica, 2007, p.21

* 53 Intégration régionale pour le développement en zone Franc, ibid.

* 54 Mali, Annexe 12 de la LFI pour 2016, « stratégie d'endettement public pour l'année 2016 », p.12

* 55 Définitions trouvées sur lesechos.fr

* 56 La Côte d'Ivoire a créé son CNDP en 2011 par le décret n°2011-424 du 30 novembre ;

* 57 Sénégal, article 4 de l'arrêté ministériel n° 5889 en date du 3 juillet 2008 portant création, attribution et organisation du Comité national de la Dette publique.

* 58Tchad, « Rapport annuel de gestion de la dette publique du Tchad », exercice 2015, p.3-4

* 59 Cameroun, arrêté N°00000224/MINFI/du 07 avril 2014 fixant les modalités de saisine et la procédure devant le Comité National de la Dette Publique

* 60Sénégal, Article 2 de l'arrêté ministériel n°5889 du 3 juillet 2008 portant création, attribution et organisation du comité national de la dette publique

* 61 Direction de la Dette Publique et des Dons, rapport sur la dette publique au 31 décembre 2016, 09 février 2017

* 62A l'article 93 du Traité de l'UEAC, il est prévu cette même harmonisation avec des termes différents

* 63 Pour l'UEMOA, les directives adoptées en juin 2009 sont :

- La directive n° 06/2009-CM/UEMOA portant lois de finances au sein de l'UEMOA

- La directive n°07/2009-CM/UEMOA portant règlement général sur la comptabilité publique au sein de l'UEMOA

- La directive n°08/2009-CM/UEMOA portant nomenclature budgétaire de l'Etat au sein de l'UEMOA

- La directive n°09/2009-CM/UEMOA portant plan comptable de l'Etat

- La directive n°10/2009-CM/UEMAO portant tableau des opérations financières de l'Etat au sein de l'UEMOA

Pour la CEMAC, les directives adoptées sont :

- La directive n°01/11-UEAC-190-CM-22 relative aux lois de finances dans les pays membres de la CEMAC

- La directive n° 02/11-UEAC-190-CM-22 portant règlement général sur la comptabilité publique

- La directive n°03/11-UEAC-190-CM-22 portant nomenclature budgétaire de l'Etat

- La directive n°04/11-UEAC-190-CM-22 relative aux opérations financières de l'Etat

- La directive n°05/11- UEAC-190-CM-22 relative au Plan comptable de l'Etat en zone CEMAC

* 64 La directive n°06/11-UEAC-190-CM-22 pour la CEMAC et la directive n° 01/2009/CM/UEMOA du 27 mars 2009 pour l'UEMOA

* 65 Cinq directives portant sur les cinq domaines des finances publiques ci-énumérés ont été adoptées par l'UEMOA en 1997 et en 1998. Mais du fait qu'elles ont été rédigées dans la précipitation, elles ont dû être révisées en 1999. En plus de ces directives, l'UEMOA avait aussi adopté un code de la transparence le 30 juin 2000 pour être en phase avec les normes de bonne conduite dégagées par le FMI.

* 66 YONABA Salif, « La difficile intégration des règles budgétaires et comptables des Etats membres de l'UEMOA », in RFFPn°79, septembre 2002 p.225

* 67« La gestion de la dépense publique dans les pays de l'Afrique francophone subsaharienne », op.cit., p.37

* 68 Le CDMT n'est pas un instrument nouveau. Il a été initié au sein des Etats par le FMI et la Banque Mondiale depuis la fin des années 90. Il permettait alors de contourner les rigidités du principe d'annualité car les directives n'avaient pas encore prévu une gestion axée sur les résultats. Les CDMT doivent être en phase avec les Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté telles qu'élaborées par les institutions de Breton Woods. Ils sont aussi des conditions pour bénéficier de l'aide financière. Les CDMT concernent surtout les dépenses publiques. Ils permettent à un Etat de se fixer des objectifs de politiques publiques et d'en évaluer les résultats après exécution. Ils s'inscrivent dans un cadre pluriannuel et nécessitent une grande technicité pour la prévision et l'évaluation des politiques publiques. Ce qui n'est pas toujours évident.

* 69 L'Article 45 de la directive n°01/11 de la CEMAC qui fait état de 15 annexes et article de la directive de l'UEMOA

* 70 TOURE Chekna, « Le système de contrôle des finances publiques au Mali », in Afrilex, n°4 p.164

* 71 BATOUM-BA-NGOUE Samuel Théophile « Démocratisation et processus budgétaire dans les Etats de l'Union Economique et Monétaire d'Afrique Centrale : exemple du Cameroun » in Afrilex n°4, p. 20

* 72 Pôle de développement et finances publiques, « Application du code de transparence en zone UEMOA. Bilan fin 2016 », disponible sur http://le-pole.org/images/note%20transparence%20vf.pdf

* 73 La loi de finances est disponible en ligne sur http://www.finances.gouv.sn/images/yootheme/demo/Projet_de_Loi_de_finances_2016.pdf

* 74 C'est l'exemple du mot « crédit » qui signifie dans le langage ordinaire un prêt ou une avance mais en finances publiques, il renvoie à une autorisation de dépenser. Etant, étant un carrefour de disciplines, les finances publiques empruntent des notions appartenant à divers domaines comme l'économie, la sociologie, l'histoire, le droit fiscal et même la santé.

* 75 Article 3 de la directive n°09/2009/CM/UEMOA portant plan comptable de l'Etat au sein de l'UEMOA

* 76 Pour plus d'informations sur les normes IPSAS et leur intégration dans le secteur public cf. ROBERT Jean François des et COLIBERT Jacques, Les normes IPSAS et le secteur public », Ed. Dunod, Paris, 2008, 282 pages

* 77 LAMBERT Alain, « Quel bilan 10 ans après », in RFFP n°136, p.20

* 78 Il s'agit de la directive n°06/97/CM/UEMOA du 16 décembre 1997 qui s'est fortement inspirée du décret français du 29 Décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique

* 79PEFA, « Evaluation du système de gestion des finances publiques selon l'approche PEFA 2016, République togolaise », juin 2016 P.1

* 80 Loi n°2014-009 du 11 juin 2014 portant code de transparence dans la gestion des finances publiques ; et en 2015 les cinq directives ont été transposées.

* 81 Commission Européenne et Banque Africaine de Développement, « République centrafricaine, évaluation de la gestion des finances publiques selon la méthodologie PEFA », juillet 2010, p.14

* 82MIGAUD Didier, Allocution d'ouverture du colloque sur la comptabilité générale de l'Etat 10 ans après, in RFFP n°136, novembre 2016, p.10

* 83 Pour MEDE Nicaise, il s'agit d'une particularité des juridictions financières. L'unicité de juridiction est de mise et les juges financiers contrôlent les comptes des comptables publics mais aussi jugent les ordonnateurs pour faute de gestion. Cf. MEDE Nicaise, « L'UEMOA et le développement des cours des comptes en Afrique de l'Ouest », in RFFP n°90, mai 2005, p.267

* 84Le premier contrôle des comptes n'est intervenu au Bénin qu'en 1994 et il portait sur l'exercice de l'année 1991.

* 85 Edictée parl'Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle des finances publiques (INTOSAI), la déclaration de Lima édicte des lignes directrices concernant l'indépendance des ISC, leurs rapports avec le Parlement et le Gouvernement, leurs pouvoirs et méthodes de contrôle. L'intégralité des lignes directrices de la déclaration est disponible sur http://www.issai.org/fr/site-issai/issai-framework/

* 86Cf Chapitre 2 section 2 paragraphe 2

* 87 Cellule d'Appui à la Réforme des Finances Publiques, « République du Mali, cadre de mesure de la gestion de la performance des finances publiques », octobre 2016, p.11

* 88 La transformation de la chambre des comptes de la cour suprême en CDC est prévue par la loi organique n°2015-494 du 07 juillet 2015

* 89 Le Gabon fait partie des rares pays de la CEMAC qui ont eu très tôt une CDC. Dès 1994, La Cour Suprême est scindée en trois juridictions indépendantes : la Cour de Cassation, le Conseil d'Etat et la Cour des Comptes. C'est la loi organique no 11/94 du 17 septembre 1994 qui fixe l'organisation, la composition, les compétences, le fonctionnement et les règles de procédures de la Cour des Comptes

* 90 L'article 72 stipule que « le contrôle juridictionnel des opérations budgétaires et comptables des administrations publiques est assuré par une Cour des Comptes qui doit être créée dans chaque Etat Membre. Cette Cour des Comptes est une juridiction, et ses membres ont le statut de magistrat. Elle est indépendante par rapport au gouvernement et au Parlement et autonome par rapport à toute autre juridiction. Elle décide seule de la publication de ses avis, décisions et rapports. Elle est l'Institution Supérieure de Contrôle de chaque Etat ».

* 91Guide didactique de la directive n°02/11 -UEAC-190-CM-22 relative au règlement général de la comptabilité publique. Le guide en a conclu que la CDC « tient une fonction de conseiller du pouvoir législatif en matière financière ». p.113-114

* 92 L'alinéa 3 de l'article 125 dispose que « a juridiction des comptes certifie que les états financiers sont réguliers, sincères et donnent une image fidèle de la situation financière de l'Etat. ». Et l'article 126 dispose que « Le Compte Général de l'Etat est produit par le Ministre chargé des finances au juge des comptes, à l'appui du projet de loi de règlement qui lui est communiqué annuellement. Au vu du projet de loi de règlement et des comptes administratifs des ordonnateurs principaux, le juge des comptes donne son avis et un rapport de certification sur le Compte Général de l'Etat. L'avis et le rapport sont transmis au Parlement »

* 93 Chambre des comptes de la Cour Suprême du Cameroun, « Rapport annuel 2013 », 10 décembre 2014, p.189

* 94 Article 6 du traité de l'UEMOA qui stipule que «  Les actes arrêtés par les organes de l'Union pour la réalisation des objectifs du présent Traité et conformément aux règles et procédures instituées par celui-ci, sont appliqués dans chaque Etat membre nonobstant toute législation nationale contraire, antérieure ou postérieure ». C'est la même formule qu'on retrouve à l'article 44 du traité de la CEMAC. 

* 95 Article 41 du traité révisé de la CEMAC et article 43 du traité révisé de l'UEMOA

* 96 C.J UEMOA n° 001/2003 du 18 mars 2003, demande d'avis de la commission de l'UEMOA relative à la création d'une cour des comptes au Mali

* 97 C'est l'exemple du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, du Mali, de la Centrafrique, du Togo, du Tchad...

* 98 DIALLO Ibrahima, « Pour une appréciation concrète des pouvoirs du Parlement sénégalais en matière budgétaire », in Afrilex, juin 2012, p.26

* 99 DA Dakor, « La recherche de la transparence budgétaire dans les réformes en finances publiques au Burkina Faso », in Afrilex, juin 2012 p.12

* 100 « La gestion de la dépense publique dans les pays de l'Afrique francophone », op.cit., p.33

* 101 NZOUANKEU Jacques Mariel, « L'impact des stratégies et réformes des procédures budgétaires sur la performance des fonctions publiques dans l'espace francophone africain, in RFFP n°98, juin 2007 p.105

* 102 GOUNOU Zimé Kora, « Les conditions du pilotage des réformes du contrôle des finances publiques au Bénin », in RFFP n°37, février 2017, p.265

* 103Il s'agit du décret n°2008-721 du 22 décembre 2008 portant délimitation des compétences en matière de gestion de la dette

* 104 O.F.P.A, «Tendances Majeures de l'Evolution Récente des Fonctions Publiques Africaines et Perspectives de leurs Réformes », 2000 

* 105 Il s'agit du décret n°2008-721 du 22 décembre 2008 portant délimitation des compétences en matière de gestion de la dette.

* 106 BOUVIER Michel, « La conduite de la réforme budgétaire dans les pays en développement : réflexions méthodologiques », in Réformes des finances publiques : la conduite du changement, Paris, L.G.D.J, 2007, p.130

* 107 Article 74 du Traité révisé de l'UEMOA et article 63 du traité de l'UEAC

* 108 Les circonstances exceptionnelles sont définies par le règlement communautaire n°11/99//CM/UEMOA du 21 décembre 1999 comme un choc économique qui se traduit par une diminution du PIB réel de 3 points en dessous de la moyenne des 3 dernières années ou un choc extérieur se traduisant par une diminution des recettes budgétaires de 10% par rapport à la moyenne des 3 dernières années. Cette même définition a été retenue à l'article 58 de la convention de l'UEAC.

* 109 Il s'agit d'une proposition formulée par la FERDI dans son rapport de 2015 sur le dispositif de surveillance multilatéral de la C.E.M.A.C

* 110DIOP El Hadj Oumar, « L'ordre juridique interne des organisations d'intégration africaine », janvier 2017, p.34 disponible sur http://afrilex.u-bordeaux4.fr/l-ordre-juridique-interne-des.html

* 111BIKAI J. Landry, « Règles de surveillance multilatérale et pro cyclicité de la politique budgétaire dans la zone CEMAC », juin 2015, p.1-26, disponible sur https://www.beac.int/download/BEAC_Working_Paper_07_15.pdf

* 112DUFRENOT Gilles et alii., op.cit., p.69

* 113 DA Dakor, op.cit., p.8

* 114Directive 05/97/CM-UEMOA du 16 décembre 1997 relative aux lois de finances

* 115 « La gestion de la dépense publique dans les pays de l'Afrique subsaharienne », op.cit., p.202

* 116 Ibid., p.85

* 117 DIARRA Eloi, op.cit.

* 118 Ibid., p.

* 119 Ibid., p46






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